C. EN 2025, LA « QUEUE DE COMÊTE » DES MESURES EXCEPTIONNELLES PRISES POUR AMORTIR LES CONSÉQUENCES DE LA CRISE DES PRIX DE L'ÉNERGIE

1. Les mesures de soutien exceptionnel aux consommateurs visant à atténuer les effets de la crise des prix auront pesé à hauteur de 50 milliards d'euros sur les finances publiques

Pour amortir les effets de la crise des prix de l'énergie sur les factures des consommateurs de gaz et d'électricité, différentes mesures de soutien ont été mises en oeuvre par l'État depuis la fin de l'année 2021. Les pertes de recettes subies par les fournisseurs en raison de ces mesures ont fait l'objet de compensations au titre du mécanisme des charges de service public de l'énergie (CSPE) financées par des crédits inscrits à l'action 17 « Mesures exceptionnelles de protection des consommateurs » du programme 345.

Les tarifs réglementés de vente de gaz (TRVg) ont d'abord été gelés par voie règlementaire en octobre 2021 jusqu'à la fin de l'année 2022. Au premier semestre 2023, ce bouclier tarifaire sur les prix du gaz s'est traduit par une limitation de la hausse des TRVg à 15 %. Au 30 juin 2023, le Gouvernement a décidé de mettre un terme à ce dispositif en raison de la baisse des prix. D'après la délibération de la CRE du 11 juillet 2024 précitée, le coût total de ce « bouclier tarifaire individuel » sur les prix du gaz s'est élevé au total à 4,8 milliards d'euros.

En parallèle de ce bouclier tarifaire « individuel », un dispositif destiné aux ménages vivant dans des logements chauffés collectivement au gaz a été instauré par voie règlementaire à compter du mois d'avril 2022 puis prorogé à plusieurs reprises jusqu'à la fin de l'année 2024. Son coût global est estimé à 1,9 milliard d'euros.

En 2022 puis en 2023, un dispositif dit de « bouclier tarifaire » sur les prix de l'électricité a également été instauré pour limiter les effets de la hausse des prix de marché sur les factures des petits consommateurs éligibles aux tarifs réglementés de vente d'électricité (TRVe). Ce dispositif a permis de contenir les hausses moyennes des factures d'électricité des consommateurs éligibles aux TRVe à 4 % en 2022 puis, en 2023, à 15 % en février auxquels se sont ajoutés 10 % supplémentaires au mois d'août. Le coût pour les finances publiques de ce dispositif entre 2022 et 2023 s'est établi à 20 milliards d'euros.

Au coût de ce « bouclier tarifaire » sur les prix de l'électricité peut être ajouté celui qui résulte de la minoration des tarifs de l'accise sur l'électricité (l'ancienne taxe intérieure sur la consommation finale d'électricité ou « TICFE ») à leur niveau minimum autorisé par le droit de l'Union européenne. Cette minoration a été mise en oeuvre en 2022 puis en 2023 avant d'être atténuée en 202438(*) pour une baisse de recettes publiques cumulée estimée à 20 milliards d'euros. En outre, en 2022, le bouclier tarifaire sur les prix de l'électricité a également été financé, à hauteur d'environ 8 milliards d'euros, par le relèvement de 20 TWh du volume d'accès régulé à l'électricité nucléaire historique (Arenh). Une charge qui a reposé entièrement sur l'entreprise Électricité de France (EDF) dont l'actionnariat est devenu 100 % public en juillet 2023.

Comme pour le gaz mais avec retard, un dispositif spécifique appliqué ex post aux consommations électriques dans l'habitat collectif a été mis en oeuvre à compter de la fin de l'année 202239(*) et jusqu'à la fin de l'année 2024. Le coût de ce dispositif est évalué à 0,9 milliard d'euros.

Enfin, en 2023 et en 2024, des mécanismes dits « d'amortisseurs » ont été créés pour soutenir les entités non éligibles au « bouclier tarifaire » sur les prix de l'électricité. Au mécanisme de droit commun s'est ajouté au début de l'année 2023 un dispositif renforcé qualifié de « sur-amortisseur » ciblé sur les très petites entreprises (TPE) non éligibles aux TRVe. Les compensations versées par l'État aux fournisseurs au titre de ces mécanismes d'amortisseurs sont estimées à 2,3 milliards d'euros.

Coût pour les finances publiques des mesures de soutien
aux consommateurs finals d'électricité et de gaz mises en oeuvre
dans le cadre de la crise des prix de l'énergie

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les réponses au questionnaire budgétaire

Au total, les mesures exceptionnelles de soutien aux consommateurs de gaz et d'électricité auront pesé à hauteur de 50 milliards d'euros sur les finances publiques dont 20 milliards d'euros pour le volet fiscal du bouclier tarifaire sur les prix de l'électricité40(*) et 30 milliards d'euros pour les dépenses budgétaires ayant résulté des autres dispositifs.

2. En 2025, des dépenses résiduelles estimées à 337 millions d'euros

L'année 2025 doit être celle de la sortie complète des mesures de soutien exceptionnelles liées à la crise des prix de l'énergie. En effet, la baisse sensible des prix observée sur les marchés de l'énergie ne justifie plus le maintien de ces dispositifs coûteux. Alors que la fiscalité de l'électricité allait mécaniquement remonter à son niveau d'avant crise, ce qui apparaît justifié au regard du croisement entre la sortie de la crise de l'énergie et l'entrée dans une crise budgétaire non moins préoccupante, l'article 7 du présent PLF donne même la possibilité à l'exécutif de l'augmenter significativement en 2025. Une perspective à laquelle la commission des finances du Sénat est opposée.

En dépit de la fin de l'ensemble des dispositifs de soutien, 337 millions d'euros sont néanmoins inscrits sur le projet annuel de performance 2025 à l'action 17 « Mesures exceptionnelles de protection des consommateurs ». Ces dépenses résiduelles correspondent :

- d'une part, pour 285 millions d'euros41(*), aux coûts différés des boucliers tarifaires collectifs correspondant au second semestre 2024 ;

- d'autre part, pour 52 millions d'euros, à des reliquats relatifs aux compensations des boucliers tarifaires individuels (gaz et électricité) évalués par la CRE dans sa délibération du 11 juillet dernier précitée.


* 38 Les tarifs normaux d'accise sur l'électricité avaient alors été relevés par voie réglementaire à 21 euros par MWh pour les particuliers et 20,50 euros par MWh pour les entreprises.

* 39 Avec un effet rétroactif sur le deuxième semestre de l'année 2022.

* 40 La minoration des tarifs d'accise sur l'électricité.

* 41 180 millions d'euros pour l'électricité et 105 millions d'euros pour le gaz.

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