N° 144

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2024-2025

Enregistré à la Présidence du Sénat le 21 novembre 2024

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances, considéré comme rejeté par l'Assemblée nationale, pour 2025,

Par M. Jean-François HUSSON,

Rapporteur général,

Sénateur

TOME III

LES MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

(seconde partie de la loi de finances)

ANNEXE N° 11a

ÉCOLOGIE, DÉVELOPPEMENT ET MOBILITÉ DURABLES

(Programmes 113 « Paysages, eau et biodiversité », 181 « Prévention des risques »,
174 « Énergie, climat et après-mines », 345 « Service public de l'énergie »,
217 « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durables »,
380 « Fonds d'accélération de la transition écologique dans les territoires »
et 235 « Sûreté nucléaire et radioprotection »)

COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE : FINANCEMENT DES AIDES
AUX COLLECTIVITÉS POUR L'ÉLECTRIFICATION RURALE

Rapporteur spécial : Mme Christine LAVARDE

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Bruno Belin, Christian Bilhac, Jean-Baptiste Blanc, Michel Canévet, Emmanuel Capus, Thierry Cozic, Bernard Delcros, Thomas Dossus, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Stéphane Sautarel, Pascal Savoldelli, vice-présidents ; Mmes Marie-Carole Ciuntu, Frédérique Espagnac, MM. Marc Laménie, Hervé Maurey, secrétaires ; MM. Pierre Barros, Arnaud Bazin, Grégory Blanc, Mmes Florence Blatrix Contat, Isabelle Briquet, MM. Vincent Capo-Canellas, Raphaël Daubet, Vincent Delahaye, Vincent Éblé, Rémi Féraud, Stéphane Fouassin, Mme Nathalie Goulet, MM. Jean-Raymond Hugonet, Éric Jeansannetas, Christian Klinger, Mme Christine Lavarde, MM. Antoine Lefèvre, Dominique de Legge, Victorin Lurel, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Jean-Baptiste Olivier, Olivier Paccaud, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Georges Patient, Jean-François Rapin, Mme Ghislaine Senée, MM. Laurent Somon, Christopher Szczurek, Mme Sylvie Vermeillet, M. Jean-Pierre Vogel.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (17ème législ.) : 324, 459, 462, 468, 471, 472, 486, 524, 527, 540 et T.A. 8

Sénat : 143 et 144 à 150 (2024-2025)

L'ESSENTIEL

I. LA MISSION ÉCOLOGIE PARTICIPE AU PROGRAMME D'ÉCONOMIE DU GOUVERNEMENT

A. UNE DIMINUTION GÉNÉRALE DES CRÉDITS DE LA MISSION

Dans le champ des programmes étudiés dans le cadre du présent rapport, indiqués dans le graphique suivant, les crédits diminuent en autorisations d'engagement (AE) pour atteindre 16,1 milliards d'euros (- 14,7 %), et en crédits de paiement pour arriver à 15,2 milliards (- 6,7 %). Cette baisse s'explique par une mesure de périmètre, le transfert de MaPrimeRénov' sur la mission « Cohésion des territoires » (2 milliards d'euros), ainsi que par des mesures d'économies décidées par le Gouvernement.

Évolution des crédits entre la LFI 2024 et le PLF 2025

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat

Le Gouvernement a par ailleurs déposé un amendement de crédits sur la mission « Écologie » à l'Assemblée nationale, qui ne sera pas examiné en raison du rejet de la première partie, mais qui permet de clarifier ses intentions. Il prévoit de diminuer de 4,9 % les CP de la mission, notamment sur le fonds vert (- 216 millions d'euros), ainsi que sur la politique de l'énergie. Sur le périmètre retraité des effets conjoncturels (programme 345 et transfert de MaPrimeRénov'), les AE diminuent de 24,5 % et les CP de 14,6 % par rapport à la LFI pour 2024.

La maquette de la mission est marquée par la création d'un nouveau programme 235 « Sûreté nucléaire et radioprotection » destiné à porter les crédits de l'Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR), nouvelle autorité administrative indépendante (AAI) qui sera mise en place au 1er janvier 2025, à la suite de la fusion de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN).

B. LES OPÉRATEURS DE LA MISSION DOIVENT DAVANTAGE PARTICIPER À L'EFFORT DE RÉDUCTION DE L'EMPLOI PUBLIC

En 2025, le plafond d'emplois de la mission s'élèverait à 37 041 ETPT, contre 35 460 ETPT en LFI pour 2024. Si on retranche l'effet de la création de l'ASNR, c'est-à-dire si on ne considère que les effectifs portés par le programme 217, la hausse est beaucoup moins marquée : le plafond d'emplois demandé en 2025 est de 35 014 ETPT, contre 34 990 ETPT en 2024. Surtout, la diminution des effectifs totaux de la mission depuis plusieurs année tranche avec l'augmentation enregistrée dans le champ des opérateurs rattachés aux programmes étudiés par le rapporteur spécial.

Comparaison de l'évolution du nombre d'ETPT sous plafond
de l'ensemble des emplois du ministère et celui des opérateurs
du ministère de la transition écologique (hors météorologie et transports)

(en ETPT)

Note : les emplois de l'ASN (jusqu'en 2024) et de l'ARSN (PLF 2025) sont retranchés pour éviter l'effet de périmètre consécutif au transfert de l'ensemble du personnel de l'IRSN de la mission « Recherche et enseignement supérieur » à la mission « Écologie ».

Source : commission des finances du Sénat

Cette progression des emplois des opérateurs n'est pas une bonne nouvelle. La forte dégradation des finances publiques impose de prendre des mesures fortes pour réduire les dépenses dont l'efficacité ne serait pas avérée. Jusqu'à présent, les mesures d'économies ont surtout porté sur l'administration centrale et déconcentrée, mais en parallèle, les opérateurs ont augmenté leurs dépenses, sans qu'elles fassent l'objet d'un suivi aussi étroit.

En particulier, certaines des dépenses de l'Office français de la biodiversité (OFB) soulèvent des interrogations. Les atlas de la biodiversité communale (ABC) correspondent à un dispositif déjà pris en charge par le fonds vert, et l'ajout d'un supplément de subvention à l'OFB ne semble pas nécessaire. En outre, les dépenses de communication de l'OFB, d'un montant de 7 millions d'euros en exécution pour l'année 2023, paraissent également trop élevées au regard des besoins de l'opérateur. Enfin, près de 7 % des dépenses de l'Office, hors frais de personnel, sont consacrées à la mission « Formation et mobilisation des citoyens et des parties prenantes » : le rapporteur spécial n'a pas réussi à identifier les actions réalisées au regard de ces 45 millions d'euros de dépenses.

S'agissant de l'Agence de transition écologique (Ademe), il apparaît que l'augmentation de sa subvention ainsi que du nombre de ses ETPT correspond en grande partie à des missions du plan de relance qui devaient à l'origine être temporaires, mais qui ont finalement été pérennisées. Or, l'Inspection générale des finances (IGF), dans une revue de dépenses d'avril 2023 consacrée aux aides à la transition écologique, souligne que les trois-quarts des dispositifs d'aide de l'Ademe n'ont pas fait l'objet d'évaluations. D'une manière plus générale, il convient également de se demander si certaines missions de l'ADEME ne pourraient pas être réalisées par les directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL).

Pour toutes ces raisons, le rapporteur spécial présentera deux amendements tendant à diminuer les crédits de l'OFB et de l'Ademe. Si l'on souhaite freiner durablement la progression des dépenses publiques, il est en effet indispensable de reconsidérer les missions des opérateurs, ainsi que leur articulation avec les services de l'administration centrale et déconcentrée.

II. UNE RÉDUCTION DE MOITIÉ DES CRÉDITS DE LA STRATÉGIE NATIONALE BIODIVERSITÉ

Le programme 113 « Paysages, eau et biodiversité » connaît une baisse significative de ses crédits dans le PLF pour 2025. Les AE passent de 578 millions à 441,3 millions d'euros, soit une diminution de 23,7 %. Les crédits de paiement (CP) baissent également, de 512 millions d'euros à 445,6 millions d'euros (- 13 %).

150 millions d'euros ont été inscrits pour la Stratégie nationale biodiversité (SNB) 2030 en loi de finances initiale pour 2023 et 264 millions d'euros en 2024. En revanche, les crédits de la SNB ont été réduits de moitié en 2025, pour atteindre 139,6 millions d'euros.

La protection de la biodiversité n'est pas un objectif secondaire par rapport à l'adaptation au changement climatique. Il sera donc impératif de définir une nouvelle trajectoire de la Stratégie nationale biodiversité, qui priorise les actions les plus efficaces en matière de préservation de la biodiversité et qui tienne compte de la contrainte budgétaire actuelle.

S'agissant de la politique de l'eau, l'année 2025 sera la première année de mise en oeuvre du 12ème programme d'intervention des agences de l'eau. S'il était prévu que ce programme bénéficie d'un surplus de financement de 25 % par an par rapport au 11ème programme, la mise en oeuvre complète de la réforme a été décalée d'un an : le plafond des agences de l'eau (aussi appelé « plafond mordant ») devait être relevé de 175 millions d'euros en 2025, mais cette augmentation ne sera finalement effective qu'en 2026. Le rehaussement du plafond a été reporté à l'année suivante, en raison notamment de l'opposition des représentants des agriculteurs à une hausse de la redevance pour pollution diffuse.

Trajectoire du plafond des Agences de l'eau entre 2023 et 2026

(en millions d'euros)

Source : commission des finances

III. REPENSER LA POLITIQUE DE PRÉVENTION DES RISQUES

Le fonds pour la prévention des risques naturels majeurs « FPRNM », mieux connu sous le nom de « fonds Barnier », est la principale politique de prévention des risques de l'État. Il était à l'origine financé par un prélèvement sur la garantie « CatNat » des contrats des assurances, mais depuis 2021, il est intégré au budget de l'État. Le prélèvement sur les assurés n'a toutefois pas disparu, et le « contrat implicite » de la budgétisation était que la différence entre le produit de cette taxe et le montant du fonds Barnier demeure raisonnable.

Or, on constate aujourd'hui un écart massif entre les financements du fonds Barnier et le prélèvement sur les contrats d'assurance : en 2023, le produit de cette taxe a atteint 273 millions d'euros, tandis que le fonds Barnier s'élevait à 205 millions d'euros. Ce décalage va s'amplifier : le relèvement du taux de la surprime de 12 % à 20 % prévu au 1er janvier 2025 conduira à une hausse du rendement du prélèvement sur la garantie CatNat, qui devrait atteindre 450 millions d'euros l'année prochaine.

Comparaison entre le produit du prélèvement sur la garantie « CatNat »
et les sommes allouées au fonds Barnier entre 2015 et 2025

(en millions d'euros)

Source : commission des finances

Une telle situation n'est pas acceptable. Le prélèvement sur les contrats d'assurance ne dépend pas du revenu des assurés, et il est assis sur la « surprime CatNat », qui a vocation à financer le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles (régime CatNat). Le consentement à cet impôt repose ainsi sur l'idée que les sommes collectées servent à financer la prévention des risques.

Les enjeux de prévention des risques dépassent par ailleurs le champ actuel du fonds Barnier. Le retrait-gonflement des argiles (RGA) et le recul du trait de côte ne sont en effet pas pris en charge par le fonds, bien qu'ils présentent des enjeux financiers considérables. Or, des mesures de prévention existent, et elles peuvent réduire considérablement la pression sur le régime d'indemnisation CatNat. Le rapporteur présente donc un amendement de crédits visant à augmenter les crédits de la politique de prévention des risques naturels de l'État sur le programme 181 de 220 millions d'euros à 450 millions d'euros, en les prélevant sur l'action relative à l'adaptation au changement climatique du fonds vert. Des crédits seront fléchés vers le fonds Barnier pour l'amener à 300 millions d'euros, tandis que les sommes restantes serviront à financer d'autres actions de prévention (50 millions d'euros sur l'action 10 pour subventionner des travaux dans des communes non dotées d'un plan de prévention des risques naturels majeurs ; 100 millions d'euros pour une nouvelle action de prévention du RGA).

D'autres mesures de la politique de prévention des risques sont en revanche plus discutables. 6 millions d'euros sont consacrés sur le programme 181 à la subvention des associations pour leur participation aux filières « REP » (responsabilité élargie du protecteur). Or, ces filières font l'objet de nombreuses critiques, en raison de leurs problèmes de gouvernance et de leur faible efficacité, et il est impératif de mettre en place les réformes nécessaires avant de poursuivre leur soutien. Le rapporteur spécial propose donc un amendement de suppression de cette ligne budgétaire.

IV. LE « FONDS VERT » : HISTOIRE D'UNE DISPARITION PROGRAMMÉE

Le programme 380 « Fonds d'accélération de la transition écologique dans les territoires », dit le « fonds vert », est doté de 1 milliard d'euros en AE et de 1,143 milliard d'euros en CP, ce qui représente une baisse de 60 % en AE et une hausse de 1,7 % en CP par rapport à l'année précédente. L'amendement du Gouvernement déposé à l'Assemblée nationale prévoit toutefois de retrancher 216 millions d'euros en CP au programme, soit 20 % de ses crédits.

Le décret d'annulation de février 2024 avait déjà coupé 500 millions d'euros en AE et plus d'un tiers (38,2 %) des CP du fonds vert, sachant que les deux tiers des crédits restants ont été mis en réserve. Il n'est pas surprenant dans ces conditions que le projet de loi de finances de fin de gestion pour 2024 annule en plus 400 millions d'euros en AE et 65 millions d'euros en CP sur le programme.

Exécution des crédits du fonds vert en 2024

(en millions d'euros)

Source : commission des finances

Ces variations extrêmes sont particulièrement dommageables pour la conduite des politiques de transition écologique par les collectivités territoriales. Ce sont des investissements qui s'inscrivent dans le temps long, et qui nécessitent donc de la prévisibilité. La situation actuelle des finances publiques nécessite de réaliser des économies, et il n'est pas question de remettre en cause cette exigence, mais la progression du fonds vert aurait dû être davantage lissée les années précédentes, afin d'éviter le mouvement de « Stop and Go » auquel nous faisons face aujourd'hui.

Une question s'impose : quel est l'avenir du fonds vert ?

Une question s'impose alors : quel est l'avenir du fonds vert ? D'après les informations obtenues par le rapporteur spécial, des réflexions sont en cours pour fusionner le fonds vert avec la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL) et la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR). Il serait alors rattaché à la mission « Relations avec les collectivités territoriales », et les collectivités pourraient s'adresser à un guichet unique pour bénéficier de l'une de ces aides.

Le rapporteur spécial avait proposé la création d'un « fonds territorial climat », qui a été adopté de manière transpartisane par le Sénat en séance public lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2024, le Gouvernement s'était engagé à le mettre en oeuvre. Dans le cadre de la fusion du fonds vert avec la DSIL et la DETR, la mise en oeuvre du fonds territorial climat pourrait être facilitée. Le rapporteur spécial sera vigilant sur ce point.

V. LES COMPENSATIONS DE L'ÉTAT AUX PRODUCTEURS D'ÉLECTRICITÉ RENOUVELABLE RETROUVENT LEUR NIVEAU D'AVANT CRISE

A. EN 2025, LE COÛT POUR L'ÉTAT DES CHARGES DE SERVICE PUBLIC DE L'ÉNERGIE (CSPE) DEVRAIT REPRÉSENTER 6,7 MILLIARDS D'EUROS

D'après une délibération de la Commission de régulation de l'énergie (CRE) en juillet 2024, le montant global des compensations de CSPE au titre de l'exercice 2025 représenterait 9,5 milliards d'euros, soit un retour à un niveau comparable aux années d'avant crise. Un effet de périmètre conduit à profondément affecter le montant de crédits inscrits sur le programme 345 « Service public de l'énergie ». En effet, l'article 7 du présent PLF prévoit de réformer le mode de financement du soutien aux zones non interconnectées (ZNI) pour en faire un dispositif de nature fiscale entrainant par voie de conséquence une diminution de 3 milliards d'euros des crédits inscrits. Dans ces conditions, le PLF prévoit 6,7 milliards d'euros de crédits sur le programme. À travers une série de mesures d'optimisation des compensations de charges de service public de l'énergie, le Gouvernement a par ailleurs annoncé vouloir réduire par amendement ce montant de 214 millions d'euros.

Durant la période de crise des prix de l'énergie, c'est-à-dire principalement au cours des années 2022 et 2023, le fonctionnement habituel des compensations de CSPE a été profondément bouleversé. En effet, en raison de l'augmentation très sensible et inédite des prix de l'électricité sur les marchés de gros, les mécanismes de soutien à la production d'électricité au moyen d'énergies renouvelables (EnR) sont devenus en pratique des dispositifs de prélèvement automatique de revenus exceptionnels qui auraient pu être perçus par les producteurs du fait de cette hausse des prix historique.

Évolution des charges de service public de l'énergie relatives
au soutien à la production électrique d'origine renouvelable en métropole
entre 2020 et 2025

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les délibérations de la CRE

À ce titre, à la fin de l'année 2022, au regard des prévisions d'évolution des prix de l'électricité sur les marchés de gros, la CRE estimait que l'État pourrait percevoir 30 milliards d'euros de recettes exceptionnelles prélevées sur les producteurs d'électricité renouvelable. Finalement, la baisse des prix de marchés beaucoup plus rapide qu'anticipé aura limité ces recettes exceptionnelles à 5,9 milliards d'euros (respectivement 1,9 et 4,0 milliards d'euros au titre des années 2022 et 2023). En 2024, les compensations pour charges de service public relatives à la production d'électricité renouvelable en métropole représenteront à nouveau un coût pour l'État, qui pourraient atteindre 2,5 milliards d'euros. En 2025, les évaluations de la CRE font état d'une prévision de 4,3 milliards d'euros de dépenses dont 2,9 milliards d'euros, soit les deux-tiers, pour la seule filière photovoltaïque.

Alors que la mise en oeuvre du nouveau mécanisme de soutien à la production d'hydrogène décarboné a pris énormément de retard, les crédits prévus à ce titre en 2025 sont manifestement beaucoup trop élevés et ne pourront être exécutés. Aussi, le rapporteur propose-t-il par amendement d'annuler les 25 millions d'euros de CP et 425 millions d'euros d'AE prévus dans le PLF en faveur de ce dispositif. Par ce même amendement, elle propose de réallouer 10 millions d'euros de CP et 300 millions d'euros d'AE au fonds chaleur (voir infra) ainsi que d'affecter 100 millions d'AE à une action 15 « Prévention du risque de retrait-gonflement des argiles » du programme 181 « Prévention des risques ».

B. EN 2025, LA « QUEUE DECOMÈTE » DES MESURES PRISES POUR AMORTIR LES CONSÉQUENCES DE LA CRISE DES PRIX DE L'ÉNERGIE

Les mesures de soutien exceptionnel aux consommateurs d'électricité et de gaz visant à atténuer les effets de la crise des prix auront pesé à hauteur de 50 milliards d'euros sur les finances publiques dont 20 milliards d'euros pour le volet fiscal du bouclier tarifaire sur les prix de l'électricité1(*) et 30 milliards d'euros pour les dépenses budgétaires ayant résulté des autres dispositifs.

Coût pour les finances publiques des mesures de soutien
aux consommateurs finals d'électricité et de gaz mises en oeuvre
dans le cadre de la crise des prix de l'énergie

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les réponses au questionnaire budgétaire

L'année 2025 doit marquer la fin des dernières mesures de soutien. En effet, la baisse sensible des prix observée sur les marchés de l'énergie ne justifie plus le maintien de ces dispositifs coûteux. Alors que la fiscalité de l'électricité allait mécaniquement remonter à son niveau d'avant crise, l'article 7 du présent PLF donne cependant la possibilité à l'exécutif de l'augmenter potentiellement à un niveau nettement plus élevé en 2025. La commission des finances du Sénat est opposée à cette augmentation estimée à 3,4 milliards d'euros, de la charge fiscale supportée par l'ensemble des consommateurs d'électricité. En dépit de la fin de l'ensemble des dispositifs de soutien, 337 millions d'euros de crédits résiduels sont encore prévus pour des régularisations et le financement ex post du second semestre 2024 des boucliers tarifaires relatifs aux logements collectifs.

VI. LE PROGRAMME 174 FAIT L'OBJET DE COUPES BUDGÉTAIRES

En 2025, une évolution de périmètre substantielle affecte le programme 174 « Énergie, climat et après-mines » : le transfert du dispositif MaPrimRénov' vers le programme 135 « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat » de la mission « Cohésion des territoires ».

Les crédits proposés en 2025 sur le programme s'élèvent à 2,4 milliards d'euros en AE et 2,1 milliards d'euros en CP, soit, à périmètre constant, des diminutions respectives de 38,5 % et 26,4 %. Comme précisé infra, ces réductions s'expliquent principalement par la baisse des crédits relatifs aux dispositifs d'aides à l'acquisition de véhicules propres ainsi que par le recul des dépenses prévisionnelles liées au chèque énergie résultant de la réforme de son mode d'attribution. Elles ont aussi pour origine la non reconduction de l'aide ciblée portant sur la consommation de carburants des actifs ayant besoin de leur véhicule pour se rendre sur leur lieu de travail.

A. LA RÉFORME INÉVITABLE DES MODALITÉS D'ATTRIBUTION DU CHÈQUE ÉNERGIE VA ENTRAÎNER UNE DIMINUTION DU NOMBRE DE SES BÉNÉFICIAIRES

Comme l'avait souligné le rapporteur dans son rapport relatif à l'examen du projet de loi de finances pour 2024, la suppression de la taxe d'habitation (TH) sur les résidences principales imposait de revoir les modalités d'attribution du chèque énergie qui reposaient sur une base de données qui était tenue par la direction générale des finances publiques (DGFiP) dans le cadre de l'établissement de cette imposition. Faute d'avoir été anticipée, cette situation a grandement perturbé la campagne 2024 du chèque énergie. Face à l'impossibilité d'actualiser la liste des bénéficiaires selon les modalités qui étaient appliquées jusqu'en 2023, le Gouvernement de l'époque avait décidé de reconduire à l'identique la liste des ménages qui étaient éligibles au titre de la campagne de l'année précédente, privant ainsi environ un million de ménages du bénéfice de la mesure. Face au tollé engendré par cette mesure, l'exécutif a dû faire machine arrière et concevoir en catastrophe une plateforme électronique permettant aux ménages éligibles de se manifester.

Pour tenir compte des conséquences induites par la suppression de la TH sur les résidences principales, l'article 60 du présent PLF prévoit une révision des modalités d'attribution du chèque énergie. Les critères d'éligibilité au dispositif seraient désormais appréciés à la maille du foyer fiscal à partir des données issues des déclarations d'impôt sur le revenu. Cependant, pour éviter que deux chèques soient envoyés pour les ménages qui vivent ensemble mais déclarent leurs revenus séparément, il est nécessaire de croiser ces données avec l'information relative à l'occupation d'un logement, elle-même appréciée à partir du numéro de point de livraison du compteur d'électricité qui serait transmis à l'Agence de services et de paiements (ASP) par les fournisseurs d'électricité. Du fait de cette révision, l'attribution et l'envoi du chèque énergie ne sera plus systématiquement automatique. Certains bénéficiaires devront effectuer la démarche volontaire de se manifester, sur une plateforme électronique ou par courrier, pour réclamer leur droit. De ce fait, en raison du phénomène inévitable de « non recours », certains foyers éligibles ne recevront pas de chèque et ne pourront pas bénéficier du dispositif.

Pour 2025, seuls 615 millions d'euros de CP sont prévus au titre du chèque énergie, soit une baisse de 180 millions d'euros. En revanche, les AE restent stables à 900 millions d'euros. Cela signifie que l'administration considère que tous les nouveaux bénéficiaires finiront par solliciter leur chèque. Cette hypothèse n'est pas réaliste. Il n'est cependant pas possible de diminuer l'enveloppe des AE au stade du PLF sans remettre indirectement en cause le montant du chèque énergie.

B. 1,2 MILLIARD D'EUROS D'ÉCONOMIES ESCOMPTÉES SUR LES DISPOSITIFS D'AIDES À L'ACQUISITION DE VÉHICULES PROPRES

Les crédits proposés en 2025 par le PLF initial pour financer les aides à l'acquisition de véhicules propres ont été réduits à 970 millions d'euros, soit une baisse de 530 millions d'euros par rapport aux crédits prévisionnels prévus en LFI pour 2024 (1 500 millions d'euros), une diminution en réalité plus forte en raison de la surconsommation des crédits en 2024. Du fait du succès inespéré du leasing social et du dynamisme du bonus, les crédits exécutés en 2024 pourraient atteindre 1 846 millions d'euros. En partant de cette base de référence, la baisse des crédits proposés pour 2025 atteindrait 876 millions d'euros (- 47 %). En outre, le Gouvernement a annoncé vouloir réduire ces crédits de 300 millions d'euros supplémentaires. Cette diminution de crédits pourra être compensée par la mobilisation du dispositif des certificats d'économies d'énergie (CEE), sur le modèle des appels à projets visant à soutenir l'acquisition de véhicules lourds électriques qui étaient financés jusqu'en 2023 par des crédits budgétaires du programme 174. La pérennité de la prime à la conversion apparaît par ailleurs incertaine.

Aussi, au total, la réduction du montant de crédits prévus en 2025 au titre des aides à l'acquisition de véhicules propres par rapport aux dépenses exécutées en 2024 représenterait 1 176 millions d'euros (- 64 %).

Évolution des crédits (CP) consacrés aux aides à l'acquisition
de véhicules propres

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires et les réponses au questionnaire du rapporteur

En 2024, année de son lancement, le dispositif de leasing social a rencontré un succès inespéré, bien au-delà des anticipations les plus optimistes. 50 000 commandes ont afflué dès les premiers jours de janvier et le dispositif a dû être aussitôt suspendu pour éviter un emballement insoutenable pour les finances publiques. Le coût pour l'État de chaque dossier représente 13 000 euros, soit, pour 2024, un montant total de 650 millions d'euros. Compte-tenu de la baisse des crédits prévue en 2025, le coût unitaire pour l'État de chaque commande devra nécessairement être fortement réduit et le dispositif davantage ciblé.

C. UN FONDS CHALEUR MANIFESTEMENT SOUS-DOTÉ

Le présent PLF prévoit de réduire de 820 à 540 millions d'euros les crédits du fonds chaleur, géré par l'Ademe. Cette diminution de crédits conduirait à une « année blanche », au sens où 2025 serait entièrement consacré au financement de projets déjà engagés, et qu'il serait impossible d'accepter de nouveaux projets. Le rapporteur propose ainsi un amendement prévoyant de prélever 10 millions d'euros de crédits de paiement (CP) et 300 millions d'euros d'autorisations d'engagement (AE) sur l'action 18 « Soutien hydrogène » du programme 345 pour les affecter au fonds chaleur.

VII. LEVER LES OBSTACLES À LA FUSION DE L'ASN ET DE L'IRSN

La fusion de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) a été annoncée le 8 février 2023, et elle a été consacrée par la loi n° 2024-450 du 21 mai 2024 relative à l'organisation de la gouvernance de sûreté nucléaire et de la radioprotection. La loi prévoit ainsi la création d'une nouvelle autorité administrative indépendante (AAI), l'Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR) au 1er janvier 2025, dont les crédits sont portés par un nouveau programme 235 « sûreté nucléaire et radioprotection »2(*) créé sur la mission.

Le programme 235 est doté pour 2025 de 360,5 millions d'euros en AE et de 365,2 millions d'euros en CP, et il a été construit à partir des budgets de l'ASN et de l'IRSN, en y incluant des mesures nouvelles visant à absorber les coûts conjoncturels de la mise en oeuvre de la réforme, ainsi qu'à renforcer les moyens de l'ASNR dans un contexte de relance du nucléaire et d'adaptation au changement climatique.

La date d'entrée en vigueur de la fusion entre l'ASN et l'IRSN fait l'objet de débats. Le directeur de l'IRSN en particulier, entendu en audition par le rapporteur spécial, a souligné que le processus de fusion était particulièrement complexe. L'une des difficultés est que l'ASN est un établissement public administratif (EPA), tandis que l'IRSN est un établissement public industriel et commercial (EPIC), ce qui signifie que les agents de l'ASN relèvent du droit public, tandis que ceux de l'Institut ont un statut de droit privé. Le logiciel de pilotage des dépenses de l'État, Chorus, n'est notamment pas adapté pour prendre en charge des agents de droit privé.

Comparaison entre les financements publics de l'ASN et à l'IRSN en 2024
et les crédits ouverts en 2025 pour l'ASNR

(en millions d'euros)

Source : commission des finances

Cependant, repousser la date de fusion de l'IRSN et de l'ASN n'est pas une option viable. Le processus est déjà largement engagé, et revenir sur la date choisie signifierait devoir refaire l'ensemble de la maquette budgétaire de la nouvelle autorité. En outre, le maintien des deux entités pendant plusieurs mois pourrait entraîner des surcoûts.

Il convient en revanche de s'assurer que l'ASNR dispose de l'ensemble des moyens nécessaires pour l'accomplissement de ses missions. Or, les informations transmises au rapporteur spécial indique qu'il manque 19,4 millions d'euros pour que le budget de la nouvelle autorité puisse être bouclé. Il est possible cependant que ce manque soit comblé dans le cas où l'ASNR ne serait pas entièrement assujettie à la TVA, et un rescrit fiscal à ce sujet est attendu pour fin novembre.

Réunie le 19 novembre 2024, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission des finances a décidé de proposer au Sénat l'adoption des crédits de la mission tels que modifiés par cinq amendements de crédits. Elle a proposé d'adopter l'article 60 tel que modifié par un amendement. Elle a proposé d'adopter, sans modification, les crédits du compte d'affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale (FACÉ) ».

Réunie à nouveau le jeudi 21 novembre 2024, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a confirmé définitivement ses votes émis sur toutes les missions, tous les budgets annexes, tous les comptes spéciaux et les articles rattachés aux missions, ainsi que les amendements qu'elle a adoptés, à l'exception des votes émis pour les missions « Culture », « Direction de l'action du Gouvernement », « Enseignement scolaire », « Médias, livre et industries culturelles », « Audiovisuel public », « Recherche et enseignement supérieur », ainsi que des comptes spéciaux qui s'y rattachent.

Au 10 octobre 2024, date limite, en application de l'article 49 de la loi organique relative aux lois de finances, pour le retour des réponses du Gouvernement aux questionnaires budgétaires concernant le présent projet de loi de finances, 30 % des réponses portant sur la mission Écologie, développement et mobilités durables.

PREMIÈRE PARTIE
ANALYSE GÉNÉRALE DE LA MISSION

I. DANS UN CONTEXTE BUDGÉTAIRE CONTRAINT, LES CRÉDITS DE LA MISSION CONNAISSENT UNE DIMINUTION

A. LES CRÉDITS OUVERTS DANS LE PROJET DE LOI DE FINANCES INITIALE DIMINUENT EN RAISON À LA FOIS DE TRANSFERTS ET DE MESURES D'ÉCONOMIE

Le présent rapport porte sur les programmes de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » hors dépenses relatives aux transports, à l'information géographique et à la météorologie3(*), soit 76,1 % des CP de la mission en 2024. Ce périmètre recoupe :

le programme 217 « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durables », programme support de la mission, qui assure le fonctionnement général des services et porte la masse salariale du ministère de la transition écologique et depuis 2018, du ministère de la cohésion des territoires ainsi que du secrétariat d'État chargé de la mer ;

le programme 113 « Paysages, eau et biodiversité », qui soutient les actions destinées à mettre en oeuvre la politique de l'eau et à préserver la biodiversité ;

le programme 380 « Fonds d'accélération de la transition écologique dans les territoires », créé par la loi de finances pour 2023, qui vise à financer des politiques en lien avec la transition écologique dans les collectivités territoriales ;

le programme 181 « Prévention des risques », qui regroupe les crédits employés dans la lutte contre les risques naturels, technologiques et hydrauliques, ainsi que les moyens alloués à l'ADEME, au renforcement de la sûreté nucléaire et, depuis la loi de finances pour 2021, au Fonds de prévention des risques naturels majeurs (fonds « Barnier ») ;

le programme 174 « Énergie, climat et après-mines », qui rassemble les ressources consacrées au pilotage de la politique énergétique, à la gestion économique et sociale de l'après-mines, à la lutte contre le changement climatique et la pollution de l'air, à l'accompagnement de la transition énergétique (chèque énergie, prime de rénovation énergétique, aides à l'acquisition de véhicules propres) ;

le programme 345 « Service public de l'énergie », qui regroupe les charges de service public de l'énergie, auparavant inscrites sur le CAS « Transition énergétique » ;

le programme 235 « Sûreté nucléaire et radioprotection », créé par le présent projet de loi de finances4(*), qui porte les dépenses de l'Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR).

Enfin, le champ de l'analyse porte également sur le compte d'affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale (FACE) ».

Le projet de loi de finances pour 2025 propose, pour les programmes de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » examinés par le rapporteur spécial, 16,1 milliards d'euros en AE et 15,2 milliards d'euros en CP, ce qui représente une diminution des AE de 14,9 % et des CP de 6,7 % par rapport à l'année dernière.

Toutefois, ces chiffres sont partiellement biaisés par une mesure de périmètre - le transfert de MaPrimeRénov' à la mission « Cohésion des territoires » -, ainsi que par une forte augmentation des crédits du programme 345 « Service public de l'énergie », passant de 5,5 à 7,3 milliards d'euros en AE et de 4,9 à 6,7 milliards d'euros en CP, qui traduit le double effet de la réforme de l'accise sur l'électricité et de l'extinction des boucliers tarifaires sur le gaz et l'électricité.

Lorsque l'on retranche ces deux facteurs, les financements des autres programmes de la mission Écologie (hors transport) connaissent une baisse un peu plus marquée : les AE diminuent de 20,4 % pour atteindre 8,8 milliards d'euros, et les CP diminuent en parallèle de 9 % pour atteindre 8,5 milliards d'euros.

Évolution des crédits de la mission
« Écologie, mobilité et développement durables »

(en millions d'euros)

Programmes

LFI 2024

PLF pour 2025

Évolution PLF 2025/ LFI 2024

AE

CP

AE

CP

AE

CP

113 - Paysages, eau et biodiversité

578

441,3

512

445,6

- 23,7 %

- 13,0 %

174 - Énergie, climat et après-mines

5 817,2

5 435,2

2 393,4

2 108,0

- 58,9 %

- 61,2 %

181 - Prévention des risques

1 357,0

1 358,6

1 311,7

1 308,7

- 3,7 %

- 3,3 %

217 - Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durables

3 103,5

3 095,6

3 226,4

3 215,3

+ 4,0 %

+ 3,9 %

345 - Service public de l'énergie

5 539,0

4 884,0

7 331,0

6 663,5

+ 32,4 %

+ 36,4 %

380 - Fonds d'accélération de la transition écologique dans les territoires

2 499

1 124

1 000

1 142,9

- 60 %

+ 1,7 %

235 - Sûreté nucléaire et radioprotection

-

-

360,5

365,2

-

-

Total

18 894

16 339

16 135

15 249

- 14,6 %

- 6,7 %

Total hors 345 et MaPrimeRénov'

11 058

9 430

8 804

8 586

- 20,4 %

- 9,0 %

Source : commission des finances

Évolution des crédits entre la LFI 2024 et le PLF 2025
(avec et sans le programme 345 « Service public de l'énergie » et MaPrimeRénov')

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances d'après les réponses du ministère de la transition écologique au questionnaire du rapporteur spécial

Dans le détail, l'évolution des autres programmes est la suivante :

le programme 174, « Énergie, climat et après-mines », voit ses AE et ses CP fortement diminuer, de respectivement 58,9 % et 61,2 %. Cette baisse résulte toutefois au premier chef d'une mesure de périmètre, le transfert de l'ensemble des financements de MaPrimeRénov' (2 milliards d'euros de crédits ouverts en 2024) à la mission « Cohésion des territoires ». Elle résulte également d'une baisse de 500 millions d'euros de l'aide à l'acquisition de véhicules électriques ;

le programme 380, « fonds d'accélération pour la transition écologique dans les territoire », voit ses AE fortement diminuer, passant de 2,5 milliards à d'euros à 1 milliard d'euros (- 60 %). Ses CP semblent augmenter en revanche, passant de 1,12 milliards d'euros en LFI 2024 à 1,14 milliard d'euros dans le présent projet de loi de finances (+ 1,7 %). Cependant, ce chiffre ne prend pas en compte les annulations de crédits décidées sur le programme en février 2024, ni la réduction des crédits prévue par le Gouvernement pour 2025, qui seront détaillées infra ;

les crédits du programme 113, « Paysages, eau et biodiversité », connaissent une baisse significative : ils passent de 512 millions d'euros à 445,6 millions d'euros, soit une diminution de 13 %. Cette réduction s'explique surtout par une contraction des financements de la Stratégie nationale biodiversité (SNB) ;

les crédits du programme 181, « Prévention des risques », diminuent faiblement - de 3,9 % - pour atteindre 1,3 milliard d'euros ;

le programme 217, « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durables », connaît une augmentation de 119,7 millions d'euros en AE et en CP, qui découle en partie des mesures de revalorisation salariale.

B. LES MOUVEMENTS DE CRÉDITS ENVISAGÉS PAR LE GOUVERNEMENT

Le Gouvernement a déposé à l'Assemblée nationale un amendement prévoyant des mouvements sur tous les programmes de la mission Écologie, à l'exception du programme 113 « Paysages, eau et biodiversité ».

Le rejet de la première partie du projet de loi de finances le mardi 12 novembre a pour conséquence que cet amendement ne sera pas examiné en séance public par l'Assemblée nationale. Le rapporteur spécial souhaite néanmoins présenter les évolutions de crédits prévues, afin d'avoir une vision consolidée de la maquette budgétaire de la mission telle qu'elle résulte des derniers arbitrages interministériels.

Les mouvements les plus significatifs portent sur le programme 174 « Energie, climat et après-mines », qui perdrait 12,5 % de ses AE et 14,2 % de ses CP. L'ensemble des annulations de crédit porterait sur le soutien à l'acquisition de véhicules électriques. Le Gouvernement précise dans l'objet de l'amendement que ce montant serait complété par des aides au titre des certificats d'économie d'énergie.

Le programme 345 perdrait également 216 millions d'euros (- 2,9 % de ses AE et - 3,2 % de ses CP), au travers de mesures de maîtrise et de modération des hausses de dépenses de soutien à la production d'énergies renouvelables.

Enfin, le programme 380 « Fonds d'accélération de la transition écologique dans les territoires » verrait ses AE inchangés, mais connaîtrait une baisse de 216 millions d'euros de ses CP, au motif de la diminution des engagements en 2024, qui découle elle-même des annulations de crédits décidées en février dernier.

Les autres mouvements de crédits sont liés pour l'essentiel aux mesures transversales prises en matière de masse salariale (indemnités journalières, ajout de deux jours de carence pour les agents publics...). Ce sont au total 5 % des CP de la mission - sur le champ des programmes examinés par le rapporteur spécial - qui seraient supprimés.

Le Gouvernement a également annoncé un abondement de 80 millions d'euros sur le programme 181, pour amener le fonds Barnier à un montant de 300 millions d'euros. Cette mesure n'a cependant pas fait l'objet d'un amendement déposé à l'Assemblée nationale.

Conséquences de l'amendement du Gouvernement déposé
à l'Assemblée nationale sur les crédits de la mission
« Écologie, mobilité et développement durables »

(en millions d'euros)

Programmes

PLF 2025

PLF pour 2025 avec l'amendement du Gouvernement

Évolution

AE

CP

AE

CP

AE

CP

113 - Paysages, eau et biodiversité

512

445,6

512,0

445,6

-

-

174 - Énergie, climat et après-mines

2 393,4

2 108,0

2 093,4

1 808

- 12,5 %

- 14,2 %

181 - Prévention des risques

1 311,7

1 308,7

1 310,3

1 307,3

- 0,1 %

- 0,1 %

217 - Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durables

3 226,4

3 215,3

3 203,7

3 207,6

- 0,7 %

- 0,2 %

345 - Service public de l'énergie

7 331,0

6 663,5

7 117

6 449,5

- 2,9 %

- 3,2 %

380 - Fonds d'accélération de la transition écologique dans les territoires

1 000

1 142,9

1 000

926,9

-

- 18,9 %

235 - Sûreté nucléaire et radioprotection

3 60,5

365,2

357,8

362,5

- 0,7 %

- 0,7 %

Total

16 135

15 249

15 466,2

14 504,7

- 4,1 %

- 4,9 %

Source : commission des finances

Conséquences de l'amendement du Gouvernement déposé
à l'Assemblée nationale sur les crédits (CP) de la mission
« Écologie, mobilité et développement durables »

(en millions d'euros)

Source : commission des finances

Sur le périmètre retraité des effets conjoncturels (P345 et transfert de MaPrimeRénov'), les AE diminuent de 24,5 % et les CP de 14,6 % par rapport à la LFI 2024. Comme mentionné supra, en tenant compte des annulations de crédits en cours de gestion sur le budget 2024, la baisse entre les deux exercices est moins importante. Ces quelques chiffres soulignent la forte contribution des crédits de la mission Ecologie à la diminution du déficit public.

II. LES EFFECTIFS ET LE PATRIMOINE IMMOBILIER DU MINISTÈRE

A. LES OPÉRATEURS DE LA MISSION DOIVENT DAVANTAGE PARTICIPER À L'EFFORT DE RÉDUCTION DE L'EMPLOI PUBLIC

1. Un schéma d'emploi nul sur le programme 217 en 2025

Les dépenses « support » du ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires (MTECT), du ministère de la transition énergétique et du secrétariat d'État chargé de la mer sont retracées dans le programme 217 « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durables » de la présente mission.

Les effectifs de ces trois ministères sont portés en quasi-totalité sur le programme 217 « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie et de la mobilité durables », à l'exception des effectifs de la future Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR), portés par le programme 235 « Sûreté nucléaire et radioprotection ».

Évolution du nombre d'ETPT sous plafond des MTE5(*)/MCTRCT6(*)
et ministère de la mer

(en ETPT)

Source : commission des finances du Sénat

En 2025, le plafond d'emploi de la mission s'élèverait à 37 041 ETPT, contre 35 460 ETPT en LFI pour 2024. Cette progression très forte des ETPT, qui revient à un niveau proche de 2020 et qui tranche avec l'évolution du plafond d'emploi de la mission sur les dix dernières années, s'explique pour l'essentiel par le transfert des emplois de l'IRSN de la mission « Recherche et enseignement supérieur » dans le contexte de la création de l'ASNR.

Si on retranche l'effet de la création de l'ASNR, c'est-à-dire si on ne considère que les effectifs portés par le programme 217, la hausse est beaucoup moins marquée : le plafond d'emplois demandé en 2025 est de 35 014 ETPT, contre 34 990 ETPT en 2024. Cette progression de 24 ETPT est expliquée par les facteurs suivants :

- l'effet en année pleine du schéma d'emplois mis en oeuvre en 2024 (+ 310,82 ETPT) ;

- l'effet en année courante du schéma d'emplois pour 2025 (- 244,34 ETPT) ;

- la prise en compte différée des conséquences sur le personnel du ministère de la transition écologique des conséquences de la loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale (+ 150 ETPT) ;

- le solde des transferts (- 193,27 ETPT).

Pour 2025, le total des transferts sortants est de 201,27 ETPT :

- 103,4 ETPT sont transférés vers le programme 156 « Gestion fiscale et financière de l'État et du secteur public local » de la mission « Gestion des finances publiques », au titre du déploiement des centres de gestion financière (CGF) ;

- 77,87 ETPT sont également transférés vers le programme 156, au titre cette fois de la finalisation du transfert de la liquidation des taxes d'aménagement à la Direction générale des finances publiques ;

- 8 ETPT sont transférés vers le programme 212 « Soutien de la politique de la défense » de la mission « Défense », pour le financement de postes vacants d'ouvriers mis à disposition dans le cadre de la mise en place du service infrastructure de la Défense ;

- 4 ETPT sont transférés au Secrétariat général de la planification écologique (programme 219 « Coordination du travail du gouvernemental » de la mission « Direction de l'action du Gouvernement ») ;

Le total des transferts entrants est quant à lui de 8 ETPT, et ils concernent des ETPT en provenance du ministère de l'Intérieur, du ministère des armées et du budget annexe « contrôle et exploitation aériens », ce qui permet bien d'arriver à un solde de transferts de - 193,27 ETPT.

Évolution du plafond d'emploi du programme 217
entre la LFI 2024 et le PLF pour 2024

(en ETPT)

Note : ce graphique ne portant que sur le programme 217, il n'inclut pas les ETPT de l'ASRN.

Source : commission des finances

Le schéma d'emploi du programme 217 en année pleine est nul en 2025, alors qu'il est positif en 2024 (+ 166 ETPT) et en 2023 (+ 57 ETPT).

Solde du schéma d'emplois du programme 217

(en ETPT)

 

2021

2022

2023

2024

2025

Cat. A

- 32

- 6

+ 248

+ 347

0

Cat. B

- 414

- 124

+ 18

- 69

0

Cat. C

- 299

- 184

- 209

- 112

0

Total

- 745

- 314

+ 57

+ 166

0

Note : les chiffres pour 2024 et 2025 sont prévisionnels.

Source : commission des finances, d'après les réponses au questionnaire du rapporteur spécial

2. Une augmentation des emplois des opérateurs de la mission, en contradiction avec la nécessité de réduire les dépenses publiques

Les opérateurs de la mission continuent de voir leurs effectifs augmenter. Le plafond d'emploi des opérateurs de la mission (hors transports) demandé pour 2024 s'élève à 7 353 ETPT contre 7 310 ETPT en 2025. Cette évolution est principalement portée par l'ADEME, qui gagne 35 ETPT entre 2024 et 2025. Les effectifs de cet opérateur ont augmenté de 26,7 % en cinq ans.

Cette progression des emplois des opérateurs n'est pas une bonne nouvelle. La forte dégradation des finances publiques impose de prendre des mesures fortes pour réduire les dépenses dont l'efficacité ne seraient pas avérées. Jusqu'à présent, les mesures d'économies ont surtout porté sur l'administration centrale et déconcentrée, mais en parallèle, les opérateurs ont augmenté leurs dépenses, sans qu'elles ne fassent l'objet d'un suivi aussi étroit.

Si l'on souhaite freiner durablement la progression des dépenses publiques, il est indispensable de reconsidérer les missions et les actions des opérateurs, ainsi que leur articulation avec les services de l'administration centrale et déconcentrée. Le rapporteur déposera ainsi plusieurs amendements afin de rationaliser les dépenses de certains des opérateurs de la mission.

Plafond des ETPT des opérateurs de la mission
Écologie, développement et mobilités durables (hors transports)

 

LFI 2019

LFI 2020

LFI 2021

LFI 2022

LFI 2023

LFI 2024

PLF 2025

Programme 113

5 180

5 145

5 086

5 131

5 216

5 375

5 381

Agences de l'eau

1 576

1 536

1 497

1 497

1 497

1 563

1 560

OFB (ex AFB + ONCFS)

1 443

2 659

2 638

2 643

2 727

2 775

2 775

1 216

CERL

140

140

140

140

140

170

179

Parcs nationaux

797

802

803

843

843

858

858

EPMP

8

8

8

8

9

9

9

Programme 174

455

438

424

398

399

381

378

ANGDM

137

131

125

122

118

116

113

ANDRA

302

291

283

260

265

265

265

Programme 181

1 389

1 356

1 352

1 361

1 453

1 554

1 594

INERIS

511

498

485

485

487

489

494

ADEME

878

858

867

876

966

1 065

1 100

Total

7 024

6 939

6 862

6 890

7 068

7 310

7 353

Source : commission des finances

Concernant les autorités administratives indépendantes rattachées à la mission, leurs ETPT restent stables, à l'exception bien entendu de l'Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection, qui est dotée de 2027 ETPT pour sa création. Les modalités de calcul de ce plafond d'emploi en comparaison de celui de l'ASN et de l'IRSN (mission « Recherche et enseignement supérieur ») seront détaillées infra.

Plafond des ETPT des autorités administratives indépendantes rattachées
à la mission Écologie, développement et mobilités durables (hors transports)

 

LFI 2019

LFI 2020

LFI 2021

LFI 2022

LFI 2023

PLF 2024

LFI 2025

Total programme 217

175

176

175

175

177

182

182

Commission nationale du débat public

10

10

9

9

11

11

11

Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires

12

12

11

11

11

11

11

Commission de régulation de l'énergie

153

154

155

155

155

160

160

Autorité de sûreté nucléaire (programme 181)

432

440

444

445

457

470

-

Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (programme 235)

-

-

-

-

-

-

2 027

Total

607

616

619

620

634

652

2 209

Source : commission des finances

B. HORS DÉPENSES DE PERSONNEL, LES CRÉDITS DU PROGRAMME SUPPORT CONNAISSENT UNE AUGMENTATION EN AUTORISATIONS D'ENGAGEMENT POUR FINANCER LE CRÉDIT-BAIL IMMOBILIER DE LA TOUR SÉQUOIA

Hors titre 2, le programme 217 assure le financement des activités de « soutien » (systèmes d'information, fonctions juridiques et d'expertise, moyens de fonctionnement, actions à l'international, formation, action sociale, prévention des risques professionnels) nécessaires à la mise en oeuvre des politiques portées par la mission.

Le programme 217 hors titre 2 est doté 286,7 millions d'euros en CP et de 275,6 millions d'euros en CP, ce qui représente une augmentation de respectivement 14,2 millions et 22,1 millions d'euros. Si les crédits continuent de progresser, la dynamique est moins forte qu'entre 2023 et 2024 (+ 52,2 millions d'euros en AE et + 27,3 millions d'euros en CP).

La sous-action 3, portant les dépenses d'immobilier de l'administration centrale, de l'Inspection générale de l'environnement et du développement durable (CGEDD) au sein du MTE, du MCTRCT et du ministère de la mer, voit ses AE augmenter de 19,6 millions d'euros entre 2024 et 2025, après une progression importante de 40,5 millions d'euros entre 2023 et 2024. Ces hausses successives s'expliquent essentiellement par le lancement des travaux de réfection de la tour Séquoia. Pour mémoire, la tour Séquoia est un gratte-ciel situé dans le quartier de La Défense, occupé par une partie du personnel du ministère de la Transition écologique depuis 2024.

Initialement, une rénovation complète de la façade était envisagée, pour un coût estimé à 90 millions d'euros. Cependant, en raison de la structure du bâtiment, l'administration a estimé les gains d'énergie à 1 % ou 2 %, ce qui n'était pas suffisant pour justifier une telle dépense. Le ministère de la transition écologique a donc retenu l'option d'une réfection moins ambitieuse, d'un coût d'environ 50 millions d'euros, ayant vocation à renforcer la sécurité du bâtiment.

Plus généralement, la question de l'avenir de la tour Séquoia se pose. L'État n'est pas propriétaire aujourd'hui de la tour, mais est en régime de crédit-bail, et il aura l'option de devenir propriétaire en 2032. La vente du gratte-ciel à ce moment pourrait néanmoins ne pas être avantageuse, dans la mesure où l'immobilier est peu dynamique à la Défense, et où le coût des travaux depuis 2014 aura été important. Une possibilité serait de densifier la Grande Arche, pour libérer ainsi plus d'une dizaine d'étages. Le bâtiment pourrait alors accueillir d'autres administrations.

En tout état de cause, le choix de la tour Séquoia pour héberger le personnel du ministère ne semble pas avoir été un pari gagnant financièrement pour l'État.

DEUXIÈME PARTIE
LE FINANCEMENT DES POLITIQUES ENVIRONNEMENTALES

I. LA POLITIQUE DE L'EAU ET DE LA BIODIVERSITÉ : LES CRÉDITS CONSACRÉS À LA BIODIVERSITÉ SONT EN DIMINUTION

A. UNE RÉDUCTION DE MOITIÉ DES FINANCEMENTS DE LA STRATÉGIE NATIONALE BIODIVERSITÉ

Le programme 113 « Paysages, eau et biodiversité » met en oeuvre :

- la politique de l'eau, qui prend appui sur les dispositifs de la directive cadre eau (DCE) du 23 octobre 2000 et fixe des objectifs de protection et de restauration de la qualité de l'eau et des milieux aquatiques ;

- la politique relative au littoral et au milieu marin, principalement par la mise en oeuvre de la directive-cadre « Stratégie pour le milieu marin » (DCSMM) du 17 juin 2008 qui vise à réaliser ou maintenir un bon état écologique des eaux marines ;

- la politique relative à la biodiversité, qui vise à une meilleure connaissance de la biodiversité, la protection des espèces animales, la protection des espaces naturels, via les aires protégées (parcs nationaux, parcs naturels régionaux, réserves naturelles nationales, régionales, Natura 2000), la trame verte et bleue, etc.

Le programme connaît une baisse significative de ses crédits dans le PLF pour 2025. Les AE passent de 578 millions à 441,3 millions d'euros en AE, soit une diminution de 23,7 %. Les crédits de paiement (CP) baissent également, de 512 millions d'euros à 445,6 millions d'euros (- 13 %).

Cette réduction des crédits s'explique principalement par la diminution des montants alloués à l'action 07 « Gestion des milieux et biodiversité », qui voit ses crédits en CP diminuer de 14,7 %. L'action comprend néanmoins toujours 94,4 % des crédits du programme.

Évolution des crédits du programme 113 entre 2024 et 2025

(en millions d'euros)

Programme 113 - Paysages, eau et biodiversité

LFI 2024

PLF pour 2025

Évolution PLF 2024/ LFI 2025

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Action 01 - Sites, paysages, publicité

10,1

11

9,3

12,2

+ 8,7 %

+ 31,1 %

Action 02 - Innovation, territorialisation et contentieux

9,6

11,9

9,6

12,8

+ 23,8 %

+ 33,3 %

Action 07 - Gestion des milieux et biodiversité

558,2

418,4

493

420,6

- 25,1 %

- 14,7 %

Total

578

441,3

512

445,6

- 23,7 %

- 13,0 %

Source : réponse de la DGALN au questionnaire du rapporteur spécial

Cette baisse des crédits résulte d'une diminution des financements de la Stratégie nationale biodiversité (SNB), qui avait été intégrée dans le programme 113 l'année précédente. La SNB a vocation à permettre d'atteindre les objectifs du cadre mondial de la biodiversité de Kunming-Montréal adopté le 19 décembre 2022, et dont la mise en oeuvre est prévue au niveau européen par le règlement « Restauration de la nature » voté en juillet dernier.

Le rapport « financement de la stratégie nationale pour la biodiversité (SNB) pour 2030 », de l'inspection générale des finances (IGF) et de l'inspection générale de l'environnement et du développement durable (IGEDD) de novembre 2022, prévoyait un besoin de financement net provenant de l'État de 372,4 millions d'euros en 2025, et progressant jusqu'à atteindre 465,1 millions d'euros en 2027.

Besoins de financements nets à couvrir de la stratégie nationale biodiversité

(en millions d'euros)

 

2023

2024

2025

2026

2027

Besoins bruts

618,7

729,8

817,4

868,5

890,1

Financements prévus ou annoncés

330

330

330

330

330

Financement des agences de l'eau

115

115

115

115

95

Besoins nets à couvrir

173,7

284,8

372,4

423,5

465,1

Source : commission des finances, d'après le rapport « financement de la stratégie nationale pour la biodiversité (SNB) pour 2030 », de l'Inspection générale des finances et l'Inspection générale de l'environnement et du développement durable, novembre 2022

La trajectoire définie par les inspections générales a été initialement prise pour référence par le Gouvernement pour le financement de la SNB. Ainsi, 150 millions d'euros ont été inscrits en loi de finances initiale pour 2023, et 264 millions d'euros en 2024. En revanche, les crédits de la SNB ont été réduits de moitié en 2025, pour atteindre 139,6 millions d'euros, répartis de la manière suivante :

- 71,2 millions d'euros pour l'administration centrale et déconcentrée ;

- 10 millions d'euros pour l'Office français de la biodiversité, intégrés à sa subvention pour charge de service public ;

- 54,8 millions d'euros consacrés au financement de projets territoriaux.

La protection de la biodiversité n'est pas un objectif secondaire par rapport à l'adaptation au changement climatique. Il sera donc impératif de définir une nouvelle trajectoire de la Stratégie nationale biodiversité, qui priorise les actions les plus efficaces en matière de préservation de la biodiversité, et qui tienne compte de la contrainte budgétaire actuelle.

Hors SNB 2030, on compte deux mesures de nature « tendancielle » : premièrement, 15 millions d'euros sont consacrés au plan triennal de réduction des dégâts de gibier aux cultures. Le plan a été annoncé en 2021, pour un montant pluriannuel de 60 millions d'euros, et 2025 constitue sa dernière année de mise en oeuvre.

Enfin, le plan d'accompagnement des cirques bénéficie de 8 millions d'euros en 2025, comme en 2024. Le plan est prévu pour s'achever en 2026. Cette mesure a vocation à mettre en oeuvre une disposition de la loi n° 2021-1539 du 30 novembre 2021 visant à lutter contre la maltraitance animale prévoyant que la détention d'animaux sauvages dans des établissements itinérants afin de les présenter au public soit interdite à partir du 1er décembre 2028. Le programme 113 prévoit ainsi une aide à la fixation des cirques ainsi que le financement du placement d'animaux en refuge.

B. LES OPÉRATEURS DE L'EAU ET DE LA BIODIVERSITÉ

1. La progression des financements des agences de l'eau dans le cadre du 12ème programme d'intervention est en suspens en 2025

Les six agences de l'eau sont des établissements publics de l'État à caractère administratif. Elles mettent en oeuvre, à l'échelle des grands bassins hydrographiques, des politiques nationales qui s'inscrivent notamment dans un objectif d'atteinte du bon état des eaux.

La loi de finances pour 2020 a transféré aux agences de l'eau le recouvrement des redevances cynégétiques, jusqu'alors perçues auprès des titulaires du permis de chasser par l'Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS). Il s'agissait de diversifier les redevances des agences de l'eau et d'élargir ces ressources à des contributions dans le champ des atteintes à la biodiversité, dans la perspective de conforter le rôle des agences comme opérateurs principaux du financement des politiques de l'eau et de la biodiversité. La loi de finances pour 2021 a ensuite intégré dans le plafond de redevances affectées aux agences de l'eau la part de redevances pour pollutions diffuses reversée à l'OFB. Le plafond de redevances affectées - dit « plafond mordant » - a ainsi atteint 2,197 milliards d'euros.

Montant pluriannuel des dépenses du 11programme d'intervention
des agences de l'eau

(en millions d'euros)

Domaine 0 : Dépenses propres des agences de l'eau

1 086

Domaine 1 : Actions de connaissance, de planification et de gouvernance

966

Domaine 2 : Mesures générales de gestion de l'eau

4 265

Domaine 3 : Mesures générales de gestion de l'eau et de la biodiversité

5 364

Primes versées pour la réalisation d'actions ou de travaux d'intérêts communs au bassin ou au groupement de bassins7(*)

914

Total

12 595

Source : réponses au questionnaire du rapporteur spécial

Le 11e programme pluriannuel d'intervention des agences de l'eau 2019-2024, adopté à l'automne 2018, a fait l'objet d'une révision de ses dépenses par un arrêté du 24 juin 2022. Le plafond pluriannuel des autorisations d'engagement des agences de l'eau sur les cinq ans est désormais fixé à 12,595 milliards d'euros, hors contributions aux autres opérateurs de l'eau et de la biodiversité, et hors plan de relance.

L'année 2025 sera ainsi la première année de mise en oeuvre du 12ème programme d'intervention des agences de l'eau. Il était prévu que ce programme bénéficie de 475 millions d'euros supplémentaires par an par rapport au 11ème, ce qui représente un surplus de financement de 25 %. Toutefois, la mise en oeuvre de la réforme n'est pas encore complète.

Le plafond de recettes des agences de l'eau a été relevé de 150 millions d'euros en 2024, et elles ont également bénéficié de la suppression de la prime de performance épuratoire, pour un montant également de 150 millions d'euros. La réforme des redevances de l'eau, prévue à l'article 101 de la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024, prévoit en effet le remplacement de la redevance pour la modernisation des réseaux de collecte par deux redevances incitatives, la redevance pour la performance des réseaux d'eau potable et la redevance pour la performance en matière d'assainissement.

Il est prévu que les 175 millions d'euros restants soient apportés par un relèvement du plafond à compter de 2026. Le nouveau relèvement du plafond devait initialement être mis en place pour 2025, mais il a été décalé à l'année suivante, en raison notamment de l'opposition des représentants des agriculteurs à une hausse de la redevance pour pollution diffuse.

Trajectoire du plafond mordant entre 2023 et 2026

(en millions d'euros)

Source : commission des finances

2. Les moyens de l'Office français de la biodiversité peuvent être rationalisés
a) Une hausse de 15 millions de la subvention à l'Office français de la biodiversité

L'année 2024 a constitué la cinquième année d'existence de l'Office français de la biodiversité (OFB), qui fusionne l'Agence française de la biodiversité (AFB) et l'Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS). Les missions confiées au nouvel établissement ont pour objectif général la surveillance, la préservation, la gestion et la restauration de la biodiversité terrestre, aquatique et marine, ainsi que la gestion équilibrée et durable de l'eau.

En 2024, l'établissement prévoit un financement global de 625,2 millions d'euros, réparti comme illustré dans le graphique ci-dessous. En 2023, le financement global s'élevait à 580,7 millions d'euros.

Recettes de l'OFB en 2024

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat

Les contributions des agences de l'eau restent le principal moyen de financement de l'OFB (397,8 millions d'euros), ces contributions intégrant la somme des anciennes contributions à l'AFB et à l'ONCFS, augmentées de 14,9 millions d'euros par rapport à l'année précédente.

La subvention pour charges de service public de l'OFB sera quant à elle de 117,7 millions d'euros en 2025, en hausse de 15 millions d'euros par rapport à l'année précédente, du fait de la reconduction des 10 millions alloués en gestion 2024 pour le financement des actions relatives à la SNB, de 4,9 millions d'euros de compensation par l'État du surcoût de la protection complémentaire pour les agents de l'OFB et des parcs nationaux, et enfin de la hausse des cotisations au CAS pensions.

Évolution de la subvention du programme 113 à l'OFB depuis sa création

(en millions d'euros)

 

2020

2021

2022

2023

2024

2025

Évolution 2024/2025

AE

41,4

51,2

53,2

78,8

102,7

117,7

+ 14,6 %

CP

41,5

51,3

53,2

79,0

102,7

117,7

+ 14,6 %

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

On peut également relever que l'OFB bénéficiera de ressources d'un montant de 6 millions d'euros au titre du « Loto de la biodiversité ». Ce jeu de grattage a été rendu possible par l'article 115 de la loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023, qui prévoit l'affectation à l'office du montant du prélèvement issu du produit brut de ce jeu.

La création de ce dispositif laisse pour le moins circonspect. La mise en oeuvre d'un « loto » pour financer une politique aussi importante que la biodiversité donne l'impression, même si les montants sont faibles, que l'État se défausse de ses politiques publiques. De plus, les jeux de hasard et d'argent posent de véritables problèmes d'addiction, et associer la protection de la biodiversité, qui est une cause populaire chez les jeunes, à un tel jeu n'est pas responsable. Le rapporteur général et le rapporteur spécial avaient tous deux déposé un amendement de suppression de la mesure, adopté par le Sénat.

b) Des économies peuvent être réalisées sur certains postes de dépense de l'OFB

Le budget initial de l'OFB pour 2023, rectifié en cours d'année, comprend un total de dépenses de 580,1 millions d'euros en crédits de paiement, dont 50,8 % de dépenses d'intervention.

Répartition des dépenses de l'OFB de 2021 à 2024

 

Exécution en 2021 (CP)

Exécution en 2022 (CP)

Exécution en 2023
(CP)

Exécution en 2024 (CP)

Budget rectificatif n° 1

Millions d'euros

%

Millions d'euros

%

Millions d'euros

%

Millions d'euros

%

Appui à la mise en oeuvre des politiques de l'eau et de la biodiversité

165,6

36,0 %

186,6

37,9 %

181

35,4 %

192,8

30,4 %

Gestion des espaces naturels et des espèces

12,4

2,7 %

27,7

5,6 %

25,2

5 %

39,9

6,3 %

Police de l'environnement et police sanitaire

4,4

1,0 %

88,3

17,9 %

89,4

17,5 %

3,4

0,5 %

Formation et mobilisation des citoyens et des parties prenantes

13,8

3,0 %

30,7

6,2 %

32,9

6,4 %

43,6

6,87 %

Connaissance et expertise

37,1

8,1 %

79,6

16,2 %

93

18,2 %

51,4

8,1 %

Personnel, soutien et management

226,7

49,3 %

79,8

16,2 %

89,3

17,4 %

302,7

47,7 %

Total

460

100,0 %

492,7

100,0 %

510,8

100,0 %

634,06

100,0 %

Source : commission des finances, d'après les réponses au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial

S'agissant des moyens humains, l'opérateur connaît une augmentation de son plafond d'emploi de 48 ETPT pour atteindre 2 775 ETPT en 2024. En 2025, il est prévu que le schéma d'emplois de l'OFB soit nul.

Emplois sous plafond de l'OFB

(en ETPT)

 

LFI 2020

LFI 2021

LFI 2022

LFI 2023

LFI 2024

PLF 2025

Emplois sous plafond

2 659

2 638

2 643

2 727

2 775

2 775

Source : commission des finances

Certaines des dépenses de l'OFB soulèvent des interrogations. Ainsi en est-il des atlas de la biodiversité communale (ABC) qui constituent un dispositif déjà pris en charge par le fonds vert. Dès lors, l'ajout d'un supplément de subvention à l'OFB ne semble pas nécessaire.

Pour mémoire, les atlas de la biodiversité communale désignent un programme d'inventaire des milieux et des espèces présentes sur les territoires, qui doit servir d'outil d'information et d'aide à la décision pour les collectivités. Les ABC passent par la production de cartographie d'enjeux de biodiversité, ainsi que par la production de publications relatives à leur mise en oeuvre.

Il ne s'agit pas de supprimer cette politique, qui présente un intérêt pour les communes, mais de rationaliser son fonctionnement, en évitant la multiplication des bureaux d'études et en priorisant les mesures qui ont un effet réel sur la protection de la biodiversité.

Près de 7 % des dépenses de l'Office, hors frais de personnel, sont consacrées à la mission « Formation et mobilisation des citoyens et des parties prenantes ». Le rapporteur spécial n'a pas réussi à identifier les actions réalisées au regard des plus de 45 millions d'euros de dépenses.

En outre, les dépenses de communication de l'OFB, d'un montant de 7 millions d'euros en exécution pour l'année 2023, paraissent également trop élevées au regard des besoins de l'opérateur. En cette période de contrainte budgétaire, il est impératif de réaliser des économies sur les dépenses dont l'importance est secondaire.

Au regard de tous ces éléments, le rapporteur spécial présentera un amendement visant à réduire le montant de la subvention du programme 113 à l'Office français de la biodiversité.

II. REPENSER LA POLITIQUE DE PRÉVENTION DES RISQUES

Évolution des crédits du programme 181 « Prévention des risques »
entre 2024 et 2025

(en millions d'euros)

Programme 181 - Prévention des risques

LFI 2024

PLF pour 2025

Évolution PLF 2025/ LFI 2024

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Action 01 - Prévention des risques technologiques et des pollutions

70,5

72,5

65,3

67,3

- 7,2 %

- 7,4 %

Action 10 - Prévention des risques naturels et hydrauliques

37,8

37,8

37,8

37,8

-

-

Action 11 - Gestion de l'après-mine et travaux de mise en sécurité, indemnisations et expropriations sur les sites

42,1

42,1

42,9

42,9

+ 2,0 %

+ 2,0 %

Action 12 - Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME)

879

879

908

908

+ 3,3 %

+ 3,3 %

Action 13 - Institut national de l'environnement industriel et des risques (INERIS)

32,1

32,6

32,1

32,6

+ 1,6 %

+ 1,6 %

Action 14 - Fonds de prévention des risques naturels majeurs

225

220

225

220

-

-

Total

1 357,0

1 358,6

1 311,7

1 308,7

- 3,7 %

- 3,3 %

Source : réponse au questionnaire du rapporteur spécial

A. LE MONTANT DU FONDS « BARNIER » DOIT ÊTRE MIS EN COHÉRENCE AVEC LES PRÉLÈVEMENTS SUR LES CONTRATS D'ASSURANCE

Dans le PLF pour 2025, les crédits de l'action 14, « fonds pour la prévention des risques naturels majeurs » sont de 225 millions d'euros en AE et de 220 millions d'euros en CP, ce qui est identique aux crédits ouverts dans la LFI pour 20248(*).

Le fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM), communément appelé le « fonds Barnier », est prévu par l'article L. 561-3 du code de l'environnement, et il permet de financer l'acquisition de biens à l'amiable ou par expropriation lorsque les biens en question sont exposés à un risque des mesures de réduction de la vulnérabilité aux risques naturels.

Les interventions du fonds « Barnier »

Le fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM) permet différents types d'interventions.

Les mesures d'acquisition de biens d'habitation ou de petites entreprises, à l'amiable ou par expropriation, permettent des délocalisations des populations gravement menacées ou dont le bien a été sinistré, sans prise en compte du risque dans le montant de l'acquisition.

Les mesures de réduction de la vulnérabilité face aux risques peuvent bénéficier à des collectivités locales en particulier pour leurs études, travaux et équipements sur les territoires dotés de plans de prévention des risques naturels (PPRN). Cette mesure est la plus utilisée du FPRNM et représente plus de 50 % du montant des délégations effectuées ces dernières années. Elle permet notamment le financement des programmes d'action de prévention des inondations (PAPI), des opérations contractualisées dans le cadre des contrats de plan État-région (CPER) et d'une partie du plan séisme Antilles (PSA).

Le FPRNM vient également en soutien, sous conditions, à des mesures de réduction de la vulnérabilité du bâti pour les particuliers (habitations) et les petites entreprises.

Les mesures au bénéfice de l'État concernent les études et travaux de mise en conformité des digues domaniales de protection contre les crues et les submersions marines et les dépenses liées à l'élaboration des PPRN, à l'information préventive et la mise en oeuvre de la directive inondation. In fine, l'acquisition de ces connaissances est indispensable en termes de prévention et partagée avec l'ensemble des parties prenantes.

Un taux maximal de subvention ou d'indemnité est fixé pour la plupart des mesures. Certaines mesures sont plafonnées dans leur montant global et dans la durée.

Source : réponse au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial

Répartition de l'intervention9(*) du FPRNM par type de risque de 2019 à 2023

(en millions d'euros)

 

2019

2020

2021

2022

2023

Mouvement de terrain

23,2

23,2

42,6

12,7

13,8

Inondation

115,5

199,0

221,3

124,8

114,4

Submersion marine

14,5

7,3

25,8

25,6

20,7

Incendie de forêt

0,34

0,5

0,4

1,8

3,7

Avalanche

0,4

0,6

0,5

0,8

1,7

Cavité souterraine

5,0

3,7

4,9

7,2

4,8

Séisme

40,0

24,2

33,4

39,2

19

Volcanisme

-

-

-

0,5

1,0

Autres dont multirisques

3,5

5,8

9,9

16,2

13,8

TOTAL

202,5

264,3

338,7

229,9

225,6

Source : réponse au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial

La loi de finances pour 2021 a intégré le budget du Fonds de prévention des risques naturels majeurs au programme 181 « Prévention des risques ». Jusqu'à cette intégration, le FPRNM était financé par un prélèvement obligatoire de 12 % sur le montant payé par les assurés au titre de la garantie contre les catastrophes naturelles représentant elle-même une « surprime » de 12 % ou 6 % sur la prime technique d'assurance selon qu'il s'agit d'un contrat habitation ou automobile.

Cela ne signifie pas que ce prélèvement ait disparu : une nouvelle taxe a été créée à l'article 235 ter ZE du code général des impôts, qui reprend l'assiette et le taux exacts du prélèvement sur la surprime CatNat, mais qui est désormais entièrement affectée au budget général de l'État. Par conséquent, les montants attribués au fonds Barnier sont décorrélés du taux de la surprime.

Le régime d'indemnisation des catastrophe naturelles et la surprime CatNat

Lorsque l'état de catastrophe naturelle a été déclaré par arrêté, les assureurs sont tenus d'assurer les victimes, au titre de la « garantie CatNat » obligatoire dans tout contrat garantissant les dommages aux biens, et en particulier dans l'assurance multirisque habitation (MRH). La reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle doit être demandée par la commune, dans un délai de 24 mois après l'événement.

Dans le même temps, les assurances peuvent souscrire à une offre de réassurance de la Caisse centrale de réassurance (CCR), qui est une société anonyme intégralement détenue par l'État, qui bénéficie d'une garantie illimitée de sa part. Ces deux versants, une couverture obligatoire par les assureurs privés et une possibilité de réassurance garantie par l'État, constitue le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles, dit « régime CatNat ».

Le régime CatNat n'a vocation qu'à couvrir des risques naturels « inassurables » par le seul secteur privé. Il intègre notamment les inondations, les séismes, les cyclones (outre-mer) ainsi que le risque retrait gonflement des argiles (RGA). En revanche, il n'inclut pas les risques incendies, tempêtes, grêle et neige, car ils sont déjà couverts par des contrats d'assurance ordinaires. Les catastrophes naturelles relevant du régime sont listées par une circulaire du 29 avril 2024 (IOME2322937C).

L'article L. 125-2 du code des assurances prévoit que le régime CatNat est financé par une cotisation additionnelle assise sur la prime des contrats d'assurance, appelée « surprime CatNat ». Le taux de cette prime est fixé par arrêté, et il est codifié à l'article A 125-2 du code des assurances.

Dans le droit en vigueur, le taux de surprime est de 12 % pour les contrats multirisques habitation (MRH), et de 6 % pour les contrats d'assurance automobile.

Un arrêté du 22 décembre 2023 prévoit qu'à partir du 1er janvier 2025, il sera appliqué un relèvement du taux à 20 % pour les contrats MRH et à 9 % pour les contrats automobiles.

Source : commission des finances

La budgétisation du fonds Barnier devait permettre au Parlement de se prononcer sur les dépenses du fonds, de simplifier sa gestion et de donner une plus grande visibilité et stabilité sur ses financements. La commission des finances du Sénat avait, pour toutes ces raisons, soutenu la budgétisation10(*). En revanche, la réforme ne devait pas se traduire par une diminution des financements consacrés à la prévention des risques par rapport aux prélèvements sur les contrats d'assurance. D'ailleurs, au moment de la budgétisation, les sommes allouées au fonds Barnier ont été relevées de 137 millions d'euros à 205 millions d'euros, les rapprochant de ce qui était effectivement prélevé sur les contrats d'assurance en 2021.

Or, on constate aujourd'hui un décalage massif entre les financements du fonds Barnier et le prélèvement sur les contrats d'assurance : en 2023, le produit de cette taxe a atteint 273 millions d'euros, tandis que le fonds Barnier s'élevait à 205 millions d'euros.

Ce décalage va s'amplifier. Le relèvement du taux de la « surprime CatNat » de 12 % à 20 % prévu au 1er janvier 2025 conduira à une hausse du rendement du prélèvement sur la garantie CatNat des contrats d'assurance, qui devrait atteindre 450 millions d'euros l'année prochaine, alors que le montant du fonds Barnier n'est que de 220 millions d'euros.

Une telle situation n'est pas acceptable. Le prélèvement prévu à l'article 235 ter ZE du code général des impôts ne dépend pas du revenu des assurés, et il est assis sur la « surprime CatNat », qui a vocation à financer le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles (régime CatNat).

Le consentement à cet impôt repose ainsi sur l'idée que les sommes collectées viennent financer la prévention des risques. D'ailleurs, avant le projet de loi de finances pour 2025, de nombreux acteurs du monde de l'assurance pensaient que le relèvement du taux de la surprime se traduirait par une augmentation à hauteur équivalente des subventions au fonds Barnier. Son absence dans le présent projet de loi de finances a logiquement mené à une forte protestation de la part des assureurs.

Comparaison entre le produit du prélèvement sur la garantie « CatNat »
et les sommes allouées au fonds Barnier entre 2015 et 2025

(en millions d'euros)

Note : l'allocation de 220 millions d'euros au fonds Barnier pour 2025 est présentée comme un rebasage, et non comme un abondement exceptionnel comme en 2024. Les chiffres du prélèvement sur la garantie « CatNat » en 2024 et 2025 sont prévisionnels.

Source : commission des finances

Le rapporteur spécial avait déjà alerté sur cette situation dans son rapport sur le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles, adopté par la commission des finances le 15 mai dernier : « Il serait incompréhensible pour l'ensemble des acteurs de l'assurance et de la prévention des risques que le relèvement du taux de la surprime ne se traduise pas par un rehaussement parallèle des financements du fonds Barnier, ou du moins, des dépenses destinées à la prévention des risques. »11(*)

Le rapporteur spécial ne défend pas le retour à un compte d'affectation spécial, qui empêcherait le Parlement de se prononcer sur les montants alloués au fonds Barnier. En revanche, il soutient absolument une mise en cohérence des fonds publics fléchés vers la prévention des risques avec le prélèvement sur les contrats d'assurance. Il formulait ainsi la recommandation suivante : « inscrire chaque année sur le programme 181 un montant de financement du fonds Barnier cohérent avec les sommes collectées au titre de l'article 235 ter ZE du code général des impôts. Retracer le montant de cette taxe dans le projet annuel de performance de la mission « Écologie, mobilité et développement durable », et justifier le financement de la politique de prévention des risques au regard de ce montant. »12(*)

Cette recommandation n'a pas été suivie. Le rendement de l'impôt prévu à l'article 235 ter ZE du code général des impôts n'apparaît d'ailleurs pas non plus dans les Voies et Moyens annexés au projet de loi de finances, ce qui est incompréhensible sachant qu'il rapporte aujourd'hui plus de 250 millions d'euros, et que dès l'année prochaine son produit sera de près d'un demi-milliard d'euros.

Après le dépôt du projet de loi de finances initiale, le Gouvernement a annoncé son intention de finalement rehausser le financement du fonds Barnier à 300 millions d'euros lors des épisodes d'inondations qu'ont connu les départements de l'Ardèche, de la Loire et du Var. Ce relèvement du montant est nécessaire, mais il convient d'aller encore plus loin : les 450 millions d'euros récoltés sur les contrats d'assurance doivent être affectés à la prévention des risques. Le rapporteur spécial souligne à nouveau que l'amendement de crédit déposé à l'Assemblée nationale ne prévoit pas cet abondement supplémentaire.

Les enjeux de prévention des risques dépassent par ailleurs le champ des mesures aujourd'hui prises en charge par le fonds Barnier. Le retrait-gonflement des argiles (RGA) et le recul du trait de côte ne sont en effet pas pris en charge par le fonds, bien qu'ils présentent des enjeux financiers considérables.

À l'avenir, le poids du RGA au sein du régime d'indemnisation des catastrophes naturelles devrait augmenter fortement, avec une volatilité qui pourrait être considérable selon les scénarios de hausse de température. Les indemnités versées au titre de la sécheresse devraient avoisiner 43 milliards d'euros entre 2020 et 2050, contre 13,8 milliards d'euros au cours des trente dernières années. Environ 50 % des maisons individuelles en France sont situées dans une zone d'exposition à ce risque.

Or, des mesures de prévention pour le RGA existent, et elles peuvent aider à réduire considérablement la pression sur le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles. Le rapporteur spécial en avait présenté certaines, avec leurs avantages et leurs inconvénients, dans le rapport qu'il a consacré au risque RGA, et dont les conclusions ont été adoptées par la commission des finances le 15 février 2023.

Mesures « horizontales » et « verticales »
de prévention du retrait-gonflement des argiles

Les mesures verticales désignent les opérations qui agissent directement sur la structure du bâtiment. Elles peuvent par exemple consister en une rigidification de la structure par l'injection de résine, ou en l'installation de micropieux au niveau des fondations. Ces mesures ont une efficacité prouvée, et elles sont également utilisées pour redresser des bâtiments fragilisés par le RGA.

Les mesures horizontales répondent à une logique différente : elles consistent à agir sur l'environnement du bâtiment, afin de limiter en amont du sinistre la variation de la teneur en eau du sol. Elles peuvent notamment désigner des techniques d'imperméabilisation de la surface du sol aux abords direct de la surface du bâti, afin de limiter l'évaporation sur la surface. D'autres solutions consistent à agir sur la végétation, avec par exemple l'installation d'écrans anti-racinaires.

Les mesures qui portent sur l'environnement du bâti présentent un coût moyen de 10 000 euros, qui nettement moins élevé que celui des mesures curatives (plusieurs dizaines de milliers d'euros). Ces techniques sont toutefois expérimentales à l'heure actuelle, et par conséquent, elles ne sont aussi reconnues par les compagnies que le sont les mesures dites « verticales ».

L'« initiative sécheresse », lancée le 12 septembre 2023 par Frances assureurs, la CCR, et la Mission risques naturels (MRN) a vocation à définir une démarche de prévention pérenne pour les maisons existantes exposées et non sinistrées.

Source : rapport d'information n° 354 (2022-2023) du 15 février 2023 de Mme Christine Lavarde fait au nom de la commission des finances sur le financement du risque de retrait gonflement des argiles et de ses conséquences sur le bâti

Le recul du trait de côte présente des enjeux financiers moins importants, mais néanmoins significatifs. Le rapport de la mission de l'IGEDD et de l'Inspection générale de l'administration (IGA) de novembre 2023 relatif au financement des conséquences du recul du trait de côte considère ainsi que plusieurs milliers de logements sont menacés à l'horizon 2050 : « Le nombre de locaux menacés est d'environ 8 200 pour les logements et activités. Le nombre de logements est d'environ 5 200, pour une valeur totale estimée à 1,1 milliard d'euros. Le nombre de locaux d'activité (hors équipements publics) est d'environ 1 400 ; dominés à près de 60 % par les commerces, hôtels et locaux de camping. La valeur des bureaux et des commerces est estimée à 120 millions. S'y ajoutent environ 100 locaux d'équipements publics ».

Des mesures de prévention existent là aussi, mais le recul du trait de côte est aujourd'hui un angle mort de la politique de prévention des risques. Des mesures sont prévues dans le fonds vert, mais elles concernent des montants très faibles (6 dossiers ont été acceptés en 2024 au 31 août, pour un montant de 2,2 millions d'euros).

Le rapporteur spécial soutenait, dans son contrôle sur le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles13(*) l'intégration du RGA et du recul du trait de côte dans le champ du fonds Barnier, dans une logique d'efficacité économique : les coûts actuels de prévention seront des gains futurs dans l'indemnisation des sinistres. Toutefois, il apparaît que l'intégration de ces deux risques dans le fonds Barnier pourrait à l'heure actuelle poser des difficultés techniques.

Il n'en reste pas moins possible de les financer dans un premier temps par des mécanismes ad hoc, qui ne relèveraient pas du fonds Barnier stricto sensu, mais qui répondraient à la même logique, et qui constitueraient une forme « halo » du fonds Barnier.

À cet égard, le projet annuel de performances de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » mentionne de manière curieuse l'existence de deux nouvelles actions 15 et 16 dans le programme 181, qui ne se trouvent nulle part dans la maquette : « Le financement de la prévention des risques naturels et hydrauliques sur l'action 10 du programme 181 est complété par les crédits du fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM) portés par l'action 14 ainsi que par les crédits mobilisés en 2025 pour engager un plan national inondation et des actions pour mieux répondre aux conséquences croissantes du phénomène de retrait gonflement des argiles via les deux nouvelles actions 15 et 16 du programme, créées à cet effet. » Ces actions, initialement prévues dans la maquette, semblent avoir été contre-arbitrées.

Ces évolutions sont pourtant indispensables. Le rapporteur présentera un amendement de crédits visant à augmenter les crédits de la politique de prévention des risques naturels de l'État sur le programme 181 de 220 millions d'euros à 450 millions d'euros. Une partie sera fléchée sur le fonds Barnier (action 14), de sorte à ce que son enveloppe atteigne 300 millions d'euros, tandis que les 150 millions d'euros restants serviront à financer des actions de prévention qui ne sont pas prises en charge aujourd'hui par le fonds Barnier (50 millions d'euros sur l'action 10 qui permet de subventionner des travaux dans des communes non dotées d'un plan de prévention des risques naturels majeurs ; 100 millions pour une nouvelle action de prévention du RGA).

B. RISQUES NATURELS ET TECHNOLOGIQUES : DES MOYENS BUDGÉTAIRES STABILISÉS, CERTAINS DISPOSITIFS PEUVENT ÊTRE REVUS

1. Une stabilité des crédits alloués à la prévention des risques technologiques

Pour 2025, l'action 01 « Prévention des risques technologiques et des pollutions » voit ses crédits diminuer de 7,4 % par rapport à l'année précédente. Cette baisse s'explique par l'ajout de 10 millions d'euros à l'Assemblée nationale lors des débats du PLF pour 2024 afin de mettre en place des mesures visant à réduire les risques liés aux substances per- ou polyfluoroalkyles (PFAS). Sur cette somme 5 millions d'euros ont été pérennisés.

Plus généralement, la finalité de cette action consiste à assurer la prévention des risques technologiques et des pollutions, à maîtriser les effets des processus industriels, des produits et des déchets sur l'environnement et la santé, et à mettre en oeuvre la feuille de route « économie circulaire ».

Cette politique de prévention s'opère par le biais des plans de prévention des risques technologiques (PPRT). Créés par la loi n° 2003-699 du 30 juillet 2003 relative à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages, à la suite de la catastrophe AZF, ils prévoient des mesures visant à réduire les risques associés à la présence de sites industriels à hauts risques (classés Seveso seuil haut) pour les riverains.

Ces plans permettent d'agir sur l'urbanisation autour des installations présentant les plus grands risques (installations Seveso seuil haut) et de corriger des situations d'exposition au risque des populations, au besoin, par des mesures foncières d'expropriation ou de délaissement ou par des travaux sur les biens d'habitation. Des mesures supplémentaires de réduction du risque à la source sur les sites industriels, allant au-delà des exigences réglementaires, peuvent également être prescrites lorsque leur mise en oeuvre est moins coûteuse que les mesures foncières qu'elles permettent d'éviter.

Enfin, des mesures alternatives aux mesures foncières peuvent être prescrites par arrêté préfectoral après l'approbation du PPRT. Ces mesures concernent uniquement les biens autres que les logements, dès lors qu'elles apportent une amélioration substantielle de la protection des populations et que leur coût est inférieur aux mesures foncières qu'elles permettent d'éviter. Ces mesures peuvent notamment porter sur les activités économiques.

Au 1er août 2024, pour la première fois les 387 PPRT prescrits ont été approuvés. Le dernier PPRT l'a été au second semestre de l'année 2023. Ainsi, vingt-trois ans après la catastrophe de l'usine AZF, l'élaboration de ces plans est achevée. Désormais, l'enjeu est celui de leur mise en oeuvre effective.

Bilan des PPRT

Un bilan de l'avancement de la mise en oeuvre des 387 PPRT approuvés entre 2007 et 2023 peut être effectué :

- sur les 99 logements et 78 activités faisant l'objet d'une expropriation (pour un montant de financement de l'État estimé à 132 millions d'euros), 82 logements (83 %) et 39 activités (50 %) ont été expropriés. 151 logements (soit 56 % des 269 concernés) et 64 activités (soit 35 % des 181 activités) ont été délaissés ;

- 8 mesures alternatives ont été prescrites et 4 sont à l'étude, pour un montant de financement de l'État estimé à ce stade à 6,2 millions d'euros ;

- 24 mesures supplémentaires ont été réalisées ou sont à l'étude, pour un montant de financement de l'État estimé à 138 millions d'euros ;

- 188 PPRT prescrivent des travaux de protection face aux risques technologiques à près de 15 610 logements. Au 1er août 2024, environ 7 204 logements (46 %) ont fait l'objet d'un diagnostic de travaux ; les travaux ont été réalisés pour 4 713 d'entre eux (30 % des logements soumis à travaux, représentant 64,5 % des logements diagnostiqués).

Source : réponse au questionnaire du rapporteur spécial

Ainsi, entre 2009 et 2023, 273 millions d'euros d'AE ont été engagés par l'État et 180 millions d'euros de CP ont été consommés pour la mise en oeuvre des mesures prescrites par les PPRT (mesures foncières, supplémentaires et alternatives) et l'accompagnement des riverains dans la réalisation de travaux sur l'habitat de protection face aux risques technologiques.

2. La prévention des risques naturels et hydrauliques : la mise en oeuvre des plans de prévention des risques naturels se poursuit

Les AE et les CP inscrits pour 2025 sur l'action 10 « Prévention des risques naturels et hydrauliques », à savoir 37,5 millions d'euros, sont stables depuis 2023.

La prévention des risques naturels et hydrauliques, visant à assurer la protection des personnes et des biens face aux catastrophes naturelles telles les inondations, les mouvements de terrains, les séismes, ou les submersions marines, est mise en oeuvre par les plans de prévention des risques naturels (PPRN), les programmes d'actions de prévention contre les inondations (PAPI), outils de contractualisation entre l'État et les collectivités permettant de promouvoir une gestion des risques d'inondation, ou encore le plan séisme Antilles. Cette politique de prévention revêt un caractère crucial dans un contexte de dérèglement climatique.

Le PPRN, annexé au plan local d'urbanisme ou à la carte communale, a pour objet de maîtriser l'urbanisation dans les zones à risques et de réduire la vulnérabilité des populations et des biens, à travers des mesures d'interdiction ou d'adaptation des constructions nouvelles ou existantes. Il peut concerner un aléa particulier, comme par exemple, le risque inondation, ou plusieurs selon les caractéristiques du territoire.

Concrètement, un plan de prévention des risques délimite les zones concernées par le risque sur le territoire, sur la base d'un aléa de référence, par exemple pour les crues des rivières, la crue centennale, ou si elle est plus élevée, la plus haute crue connue, et définit une réglementation pour chaque zone.

L'objectif visé lors de la mise en place des PPRN conduisait à ce que 12 500 communes soient couvertes par un PPRN approuvé, couvrant les territoires à forts enjeux. Cet objectif a été dépassé depuis 202214(*). À la date du 31 août 2024, 12 556 communes sont couvertes par un PPRN opposable, et 1 906 communes relèvent d'un PPRN prescrit15(*).

Évolution du nombre de communes couvertes
par un PPRN ou assimilés jusqu'au 3 juin 2024

Source : réponses au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial

D'après les informations communiquées au rapporteur spécial, 67 % des communes couvertes par un PPRN approuvé le sont pour l'aléa inondation et 13 % pour l'aléa retrait-gonflement des argiles.

L'amendement du rapporteur spécial décrit supra permettra d'augmenter les moyens alloués à la prévention des risques naturels, tant pour les particuliers que pour les collectivités. L'évolution du coût de la sinistralité à l'horizon 205016(*) nécessite d'accentuer la politique de prévention, même dans un contexte budgétaire contraint.

3. Certains dispositifs présentent un intérêt limité dans la politique de prévention des risques et peuvent être supprimés

Le programme 181 finance également des politiques dont l'intérêt apparaît plus limité. Ainsi, 6 millions d'euros sont consacrés à la subvention des associations dans le domaine de la santé, de l'environnement et de l'économie circulaire. Certaines des associations financées sont « Women in Europe for a Common Future », « France Nature Environnement », « Humanité et biodiversité ». Ces structures bénéficient d'autres financements.

En outre, l'une des justifications du financement de ces associations est de permettre leur participation aux instances de dialogue mises en place dans le cadre des filières « REP » (responsabilité élargie du protecteur). Or, les filières REP font l'objet de nombreuses critiques, en raison de leur gouvernance et de leur faible efficacité17(*). Un rapport de l'Inspection générale des finances (IGF), de l'inspection générale de l'environnement et du développement durable (IGEDD) et du Conseil général de l'économie (CGE) paru en juin 2024 souligne ainsi que « le pilotage des filières REP par les pouvoirs publics présente des défaillances qui ne peuvent être rectifiées à cadre institutionnel constant »18(*).

Avant d'investir davantage d'argent public dans des mesures de soutien à ce dispositif, il est impératif de mettre en place les réformes nécessaires. Le rapporteur spécial propose donc un amendement de suppression de cette ligne budgétaire.

C. LES DÉPENSES DE L'ADEME PEUVENT ÊTRE RATIONALISÉES

1. Une subvention et un plafond d'emploi en hausse, à rebours des exigences de rationalisation des dépenses publiques

La loi de finances initiale pour 2018 a opéré une rebudgétisation totale du financement de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME), qui prend également le nom d'« Agence de la transition écologique ». L'Agence était auparavant financée par l'attribution du produit de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP), emportant la création d'une nouvelle action (action 12 « ADEME ») sur le programme 181.

L'ADEME mène des politiques de natures diverses. Elle poursuit notamment des actions dans la mise en oeuvre des objectifs nationaux en matière de chaleur renouvelable, d'économie circulaire, de mobilité durable, d'amélioration de la qualité de l'air, de la résorption des décharges littorales et de la reconversion des friches polluées, d'accompagnement des entreprises et des territoires, et enfin d'adaptation au changement climatique.

Une subvention de 908 millions en AE et en CP est inscrite sur l'action 12 pour l'année 2025, soit une augmentation de 29 millions d'euros (+ 3,3 %) par rapport à la dotation retenue en 2024.

L'action de l'ADEME est toutefois déterminée par son budget d'intervention propre (« budget incitatif »), qui est fixé par son Conseil d'administration. Les sources de financement du budget incitatif vont au-delà de la SCP, pour inclure les fonds propres de l'agence.

Le montant du budget notifié à l'ADEME s'élève à 900 millions d'euros en autorisations d'engagement, soit une baisse de 35 % par rapport à 2024 (1,4 milliard d'euros). Il est inférieur à celui de la SCP car celle-ci aura notamment vocation à réaliser les paiements programmés en 2025 sur ses engagements passés, sur son fonctionnement et sur les premiers paiements liés aux engagements 2025. Les économies sur le budget incitatif porteront principalement sur le fonds chaleur (voir infra).

Il n'en reste pas moins que la subvention pour charges de service public de l'ADEME a fortement progressé sur les dernières années, passant de 551,6 millions d'euros à 909 millions d'euros, ce qui représente une progression de 65,5 %.

Une partie de la hausse très importante enregistrée entre 2023 et 2024 devait permettre de compenser la fin des financements issus du plan de relance19(*). Toutefois, les financements « relance » étaient censés être temporaires, mais, comme de nombreuses autres mesures, ils se poursuivent au-delà de l'échéance initiale du plan.

Le plafond d'emploi de l'ADEME augmente de 35 ETPT entre la LFI pour 2024 et le PLF pour 2025, passant de 1 065 ETPT à 1 100 ETPT, sachant que deux emplois ont été octroyés au cours de l'exercice 202420(*).

Évolution de la subvention à l'ADEME entre 2020 et 2025

Source : commission des finances

Cette progression du plafond d'emploi de l'ADEME fait suite à plusieurs augmentations successives sur les dernières années, si bien que depuis 2020 l'Agence a gagné 242 ETPT, soit une augmentation de 28 % de ses effectifs. Les évolutions les plus notables sont les suivantes :

- en 2022, 65 ETPT ont été octroyés en cours d'année afin de mettre en oeuvre les mesures du plan France Relance ;

- en 2023, le plafond d'emploi a été rehaussé de 90 ETPT pour inclure les 65 ETPT susmentionnés, et 25 ETPT supplémentaires ont été accordés pour pérenniser certains des moyens humains en intérim en 2022 traitant de France 2030 et d'autres activités techniques, comme celles consacrées par exemple à la supervision des filières REP ;

- en 2024, le plafond d'emploi a été rehaussé de 99 ETPT pour gérer l'extension du fonds chaleur21(*), certaines mesures du fonds vert, les dispositifs France 2030, et un renforcement des missions de l'ADEME dans certains domaines, comme la mise en place du bonus-malus par modèle de véhicule ;

- en 2025, le plafond d'emploi a été rehaussé de 35 ETPT pour couvrir des postes actuellement pourvus par des intérimaires sur des dispositifs pérennisés.

L'ADEME et le plan « France 2030 »

L'ADEME a été désignée par l'État comme opérateur de France 2030, et elle est dotée à ce titre d'un budget d'environ 9 milliards d'euros pour une durée de cinq ans. L'objectif est que l'ADEME bénéficie d'un champ d'action large sur l'ensemble de la chaine de la transition écologique, du soutien aux innovations de rupture jusqu'à la massification et l'industrialisation de solutions disposant d'une maturité suffisante.

Dans ce cadre, trois appels à projets notamment sont déjà ouverts et opérés par l'ADEME :

- le « développement de briques technologiques et démonstrateurs pour les systèmes énergétiques », qui a pour objectif de promouvoir le développement de technologie et d'actions de démonstration de grande ampleur dans les domaines du photovoltaïque, de l'éolien flottant et des réseaux énergétiques ;

- le « développement de briques technologiques par des PME pour les systèmes énergétique », qui vise à soutenir les PME dans un objectif de structuration des filières de production des énergies renouvelables ;

- l'« aide à l'investissement de l'offre industrielle des énergies renouvelables », qui vise à développer les capacités industrielles dans les énergies renouvelables en accompagnant l'industrialisation de la production et l'assemblage des composants.

Source : commission des finances

Comme la progression de la subvention pour charges de service public, il apparaît qu'un certain nombre de ces ETPT correspondent à des missions qui devaient à l'origine être temporaires, mais qui ont finalement été pérennisés.

Or, l'Inspection générale des finances (IGF), dans une revue de dépenses d'avril 2023 consacrées aux aides à la transition écologique, relève que les trois-quarts des dispositifs d'aide de l'Ademe n'ont pas fait l'objet d'évaluations : « L'évaluation des dispositifs d'aide à la transition écologique et énergétique apparaît, en l'état, lacunaire. L'Ademe, pour sa part, dispose de quatre principaux indicateurs de suivi et d'impact. Sur les 114 dispositifs identifiés par la mission, 28 soit environ un quart ont fait l'objet d'évaluations, dont 17 en MWh d'énergie renouvelable produits, 19 en termes de tonnes de CO2 évitées, 1 selon le nombre de points de collecte soutenus et 10 en fonction du tonnage de matière recyclée. »22(*)

L'IGF précise ensuite qu'un grand nombre de dispositifs sont en réalité d'une ampleur limitée, et l'Inspection conclut que « le risque de redondance avec des dispositifs existants ne peut être exclu »1. Cette conclusion peut être étendue au-delà de la question des aides à la transition écologique.

Il ne s'agit pas en effet de remettre en cause le rôle de l'ADEME dans la distribution des aides à la transition écologique, dans la mesure où l'Agence dispose d'un rôle d'expertise reconnu, mais d'alerter plus généralement sur le risque que pose la multiplication des études et dispositifs expérimentaux. L'ADEME développe par exemple un outil de visualisation cartographique des risques, qui apparaît faire doublon avec des outils de l'État comme Géorisques.

D'autres programmes, tels que le fonds chaleur, ont une utilité avérée, mais il convient d'essayer de le gérer avec moins d'ETPT. À ce titre, l'ADEME conduit actuellement une évaluation externe du Fonds chaleur, portant en particulier sur l'efficacité et l'efficience du dispositif, et l'Agence précise qu'il « sera tenu compte de cette évaluation dans les réflexions sur les évolutions des modalités de gestion du fonds chaleur. »23(*)

Il convient également de se demander si certaines missions de l'ADEME ne pourraient pas être effectuées par les directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL). C'est le cas notamment du programme « démarches territoriales énergie / climat » qui consiste dans un accompagnement des collectivités dans leurs démarches territoriales par des programmes d'études, d'animation ou de communication.

Enfin, un certain nombre de publications et études de l'Ademe relatives à l'économie circulaire pourraient être directement financées par les filières REP.

Pour toutes ces raisons, le rapporteur présentera un amendement réduisant de 20 millions d'euros la subvention pour charge de service public de l'ADEME. Cet amendement ne vise pas à remettre en cause l'existence de l'Agence, mais constitue une incitation au recentrage de ses missions et à la rationalisation de ses dépenses de fonctionnement.

2. Les crédits du fonds chaleur diminuent fortement

Grâce au fonds « chaleur », l'ADEME soutient le développement des investissements de production et des réseaux de distribution de chaleur renouvelable, pour les besoins de l'habitat collectif, du tertiaire, de l'industrie et de l'agriculture.

Ce fonds finance deux types de projets : les installations de petite et moyenne taille, en complément d'autres aides (contrat de projets État-région par exemple) ; les installations biomasses de grande taille dans le secteur agricole et tertiaire, dans le cadre d'appels à projets nationaux annuels « Biomasse Chaleur Industrie Agriculture Tertiaire » (BIACT).

Les soutiens apportés par le fonds visent à atteindre les objectifs fixés tant par la loi que par la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) d'avril 2020 :

- la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte prévoit que 38 % de la consommation finale de chaleur devra être d'origine renouvelable en 2030 et entend multiplier par cinq la quantité de chaleur renouvelable et de récupération livrée par les réseaux de chaleur ;

- la PPE confirme cet engagement, avec un objectif d'augmentation de la consommation de chaleur renouvelable de 25 % en 2023 et de hausse de 40 % à 60 % en 2028 par rapport à 2016.

Entre 2009 et 2023, 4,28 milliards d'euros ont été engagés pour soutenir près de 8 500 opérations d'investissement. Il est estimé qu'ils ont généré un montant d'investissement de 14 milliards d'euros et une production de 45,4 TWh/an.

En mars 2022, dans le cadre du plan de résilience pour faire face aux conséquences de la crise en Ukraine, le fonds a été abondé de 152 millions d'euros supplémentaires pour atteindre 522 millions d'euros, et en 2023, un montant presque identique a été retenu. En 2024, le fonds chaleur a vu une nouvelle fois ses financements fortement augmenter : il gagne 300 millions d'euros, pour atteindre 820 millions d'euros.

Évolution des montants engagés par le fonds « chaleur » de l'ADEME

(en millions d'euros)

Fonds « chaleur »

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

168

263

249

231

206

165

216

213

197

259

2019

2020

2021

2022

2023

2024

2025

295

350

350

522

520

820

500

Note : les chiffres jusqu'en 2022 correspondent à l'exécution constatée du fonds chaleur, tandis que les chiffres pour 2023 et 2024 sont des prévisions.

Source : réponses au questionnaire budgétaire

Il était initialement prévu que le fonds chaleur connaisse une forte augmentation de ses crédits dans les années à venir. Dans la dernière trajectoire présentée par la direction générale de l'énergie et du climat dans le cadre de la programmation pluriannuelle de l'énergie, le fonds chaleur est censé atteindre 1,2 milliard d'euros en 2025, puis augmenter de 200 millions d'euros par an, jusqu'en 2029 où il progressera de 300 millions d'euros.

Trajectoire pluriannuelle prévisionnelle du fonds chaleur en 2024

(en millions d'euros)

2025

2026

2027

2028

2029

2030

1 200

1 400

1 600

1 800

2 000

2 300

Source : commission des finances

Pour 2025 toutefois, il est prévu que le fonds chaleur retombe à 500 millions d'euros. D'après les représentants de l'ADEME auditionnés par le rapporteur spécial, cette diminution de crédits conduirait à une « année blanche » du fonds chaleur, au sens où 2025 serait entièrement consacré au financement de projets déjà engagés, et qu'il serait impossible d'accepter de nouveaux projets. Ils estiment ainsi qu' « une réduction de 35 % du fonds chaleur (qui serait ramené à environ 500 millions d'euros) pourrait conduire à l'impossibilité de financer de nouveaux projets instruits et soutenus (l'enveloppe étant saturée par les 330 millions d'euros de projets reportés de 2024 à 2025 et les 170 millions d'euros de contrats pluriannuels déjà signés). »24(*)

Le fonds chaleur est un outil indispensable pour atteindre les objectifs fixés en termes de transition énergétique. Il convient de rester vigilant à ce que les baisses de crédits n'obèrent pas de manière trop importante ses capacités d'actions. C'est pourquoi le rapporteur spécial dépose un amendement de crédits visant à augmenter de 10 millions d'euros les CP pour 2025 et de 300 millions d'euros les AE. L'ADEME et le ministère ont indiqué que les règles de répartition des aides allaient être revues de manière à pouvoir continuer à soutenir le maximum de projets dans un contexte budgétaire contraint.

3. Les conséquences des économies sur le Fonds « économie circulaire » ne sont pas encore connues

Le Fonds « économie circulaire » vise à accompagner la politique des pouvoirs publics et à contribuer à l'atteinte des objectifs fixés par la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire, en réduisant significativement la part des déchets enfouis, en développant la réincorporation des matières recyclées, le recyclage, et en accompagnant la mise en oeuvre par les collectivités d'une tarification incitative. Il vise également à développer la méthanisation, ainsi que le soutien aux projets basés sur l'économie circulaire.

En 2023 et en 2024, 300 millions d'euros ont été consacrés au fonds « économie circulaire »25(*). Cette somme était en augmentation de 133 millions d'euros par rapport aux financements du fonds en 2022 par le budget incitatif de l'ADEME, mais elle venait surtout compenser la fin du plan de relance.

Il n'est pas encore déterminé dans quelle mesure les économies décidées pour 2025 sur le budget incitatif de l'ADEME auront des conséquences sur le montant du fonds économie circulaire.

Financements du fonds économie circulaire

(en millions d'euros)

 

2019

2020

2021

2022

2023

2024

Fonds Économie circulaire

164,0

164,0

163,0

167,0

300

300

Plan de relance, volet économie circulaire

-

16,0

221,8

274

1,0

-

Total

164,0

180,0

384,8

431

301,0

300

Source : commission des finances

4. Un encadrement plus fort des « filière REP » est souhaitable

Ce fonds ne doit pas être confondu avec le bonus réparation, prévu par la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire (AGEC). Le financement de ce dernier repose entièrement sur les contributions versées par les producteurs aux éco-organismes agréés par l'État, tels qu'Ecosystem ou Refashion, en accord avec le principe de responsabilité élargie du producteur (REP).

De la multiplicité des financements de l'économie circulaire nait une certaine illisibilité pour le citoyen. Par ailleurs, la décentralisation de cette politique par l'intermédiaire des éco-organismes peut nuire au déploiement des politiques publiques. Ainsi le ministère de la Transition écologique a prononcé vendredi 17 novembre 2023 une astreinte financière à l'encontre de l'éco-organisme Alcome, qui avait refusé de se conformer à la mise en demeure émise en juin 2023 par la direction générale de la prévention des risques de produire les éléments permettant de soutenir financièrement les collectivités territoriales.

Du fait d'un manque de ressources humaines, les contrôles de l'État sur les éco-organismes gestionnaires de REP sont peu nombreux. Pour autant, ces structures reçoivent des sommes significatives acquittées de manière obligatoire par les consommateurs. À titre d'exemple, ecosystem a perçu 263,3 millions d'euros nets d'éco-participation en 2023 et employait 169 collaborateurs. Malgré ces moyens financiers et humains importants, le rapporteur spécial a eu des retours selon lesquels l'éco-organisme ne répond pas aux consommateurs ni par voie électronique ni par voie postale.

III. LE PROGRAMME 380 : LE FONDS VERT, HISTOIRE D'UNE DISPARITION PROGRAMMÉE

A. LE FONDS VERT VOIT SES AUTORISATIONS D'ENGAGEMENT ÊTRE RÉDUITES DE PLUS DE MOITIÉ

1. Le fonds vert sera fusionné avec la DSIL et la DETR

Le programme 380 « Fonds d'accélération de la transition écologique dans les territoires » est un programme de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » depuis la loi de finances initiale pour 2023. La création du programme, mieux connu comme le « Fonds vert », a été annoncée le 27 août 2022, et il a été placé sous la responsabilité de la direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature.

Le programme a pour objectif de financer les projets des collectivités territoriales en lien avec la transition écologique, et il est composé des trois actions suivantes.

L'action 01 « Performance environnementale » a vocation à financer la rénovation des bâtiments publics des collectivités territoriales, le soutien au tri à la source et à la valorisation des déchets, et la rénovation des parcs de luminaires d'éclairage publique.

L'action 02 « Adaptation des territoires au changement climatique » vise surtout à financer des politiques de prévention des risques. Elle comprend la lutte contre l'érosion côtière, la prévention des incendies, le renforcement de la protection contre les vents cycloniques, la prévention des inondations et l'appui aux collectivités de montagne soumises à des risques émergents (crues, avalanches, chutes de blocs). Elle doit également financer des politiques de renaturation des villes.

Enfin, l'action 03 « Amélioration du cadre de vie » comprend des politiques de natures diverses. Elle doit permettre l'accompagnement du déploiement de zones à faibles émissions mobilité, de prendre des mesures de reconquête des friches, de favoriser la restructuration des locaux d'activité, et encourager le développer de l'industrie sur les territoires.

Pour 2025, le fonds vert est doté de 1 milliard d'euros en AE et de 1,143 milliard d'euros en CP, ce qui représente une baisse de 60 % en AE et une hausse de 1,7 % en CP.

Évolution des crédits du programme 380 entre 2024 et 2025

(en millions d'euros)

Programme 380 - Fonds d'accélération de la transition écologique dans les territoires

LFI 2024

LFI 2024 après annulations

PLF pour 2025

Évolution PLF 2025/ LFI 2024

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Action 01 - Performance environnementale

1 209

488,5

972,3

355

500

569,3

- 58,6 %

+ 16,5 %

Action 02 - Adaptation des territoires au changement climatique

425

199

492,7

111,1

200

230,5

- 52,9 %

+ 15,8 %

Action 03 - Amélioration du cadre de vie

865

436,4

534

228

300

343,1

- 65,3 %

- 21,8 %

Total

2 499

1 124

1 999

694

1 000

1 142,9

- 60 %

+ 1,7 %

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

L'effondrement des autorisations d'engagement du programme est l'illustration des fragilités structurelles du fonds vert, que le rapporteur spécial a régulièrement dénoncées. Le fonds vert était initialement présenté comme « à la main des collectivités territoriales », mais il est en réalité devenu une variable d'ajustement des politiques environnementales de l'État.

Le décret d'annulation de février 2024 avait déjà coupé 500 millions d'euros en AE et plus d'un tiers (38,2 %) des CP du fonds vert, sachant que les deux tiers des crédits restants ont été mis en réserve. Il n'est pas étonnant dans ces conditions que le projet de loi de finances de fin de gestion pour 2024 annule 400 millions d'euros en AE et 65 millions d'euros en CP sur le programme.

L'attribution de 1,143 milliard d'euros en CP pour 2025, soit un montant supérieur à celui inscrit dans la loi de finances initiale pour 2024, pourrait donner l'illusion d'une « stabilisation » du fonds vert. En réalité, ces crédits viennent principalement financer des projets qui ont déjà été engagés les années précédentes.

En outre, un amendement que le Gouvernement a déposé à l'Assemblée nationale prévoit une diminution de 216 millions d'euros des CP du fonds vert pour 202526(*), pour atteindre un montant de 926,9 millions d'euros. Au regard des autorisations d'engagement consommés les années précédentes (917,5 millions d'euros pour 2024 au 1er août, et 2 milliards d'euros en 2023), il est vraisemblable que le fonds vert ne puisse pratiquement plus prendre aucun nouveau projet en 2025. Ces variations extrêmes sont particulièrement dommageables pour la conduite des politiques de transition écologique par les collectivités territoriales. Ce sont des investissements qui supposent de se placer dans le temps long, et qui nécessitent donc de la prévisibilité. En effet, avant même de formuler leurs demandes, les collectivités territoriales doivent identifier leurs besoins et élaborer les dossiers.

La situation actuelle des finances publiques nécessite de réaliser des économies, et il n'est pas question de remettre en cause cette exigence, mais la progression du fonds vert aurait dû être davantage lissée les années précédentes, afin d'éviter le mouvement de « Stop and Go » auquel nous faisons face aujourd'hui.

Une question s'impose alors : quel est l'avenir du fonds vert ? D'après les informations obtenues par le rapporteur spécial, des réflexions sont en cours pour fusionner le fonds vert avec la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL) et la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR). Il serait donc désormais rattaché à la mission « Relations avec les collectivités territoriales », et les collectivités pourraient s'adresser à un guichet unique pour bénéficier de l'une de ces aides.

Dans la pratique, il arrive déjà que des dossiers déposés au titre du fonds vert soient basculés sur la DSIL et la DETR, et l'inverse a également été constaté. Il y a bien entendu des erreurs d'aiguillages, mais ces transferts sont également motivés par la disponibilité ou non des crédits sur les différentes enveloppes.

La fusion du fonds vert avec la DSIL et la DETR aura le mérite de simplifier la procédure de demande pour les collectivités territoriales. En effet, à l'heure actuelle, les collectivités territoriales doivent déposer trois fois le même dossier pour obtenir des subventions pour des projets similaires. L'administration confirmait ainsi l'année dernière que : « Le retour d'expérience réalisé à l'automne avec des porteurs de projets et des services instructeurs a permis d'identifier la simplification du processus d'instruction comme une attente majeure de la part des acteurs concernés par le fonds vert. »

Cette évolution interroge toutefois sur la nature du fonds vert. Lors de sa mise en place, il était présenté comme une nouvelle voie de financement des investissements de transition écologique des collectivités territoriales, plus favorable et plus souple que les dotations existantes. Il s'est en réalité avéré n'être qu'une enveloppe de plus gérée par les services préfectoraux, dont les moyens ne sont pas déterminés par les besoins des collectivités territoriales, mais par les priorités politiques de l'État central.

Certaines mesures ont d'ailleurs été ajoutées au fonds vert - comme le financement des « territoires d'industrie » - alors qu'elles n'ont qu'un rapport indirect avec la transition écologique.

D'autres mesures, comme l'adaptation au changement climatique, auraient pu être intégrées au programme 181 « prévention des risques », dans la mesure où elles s'intègrent à des politiques existantes. Par exemple, 72 % des dossiers acceptées en matière de prévention des inondations concernent le renforcement des aides apportées par les PAPI. La politique de valorisation des déchets est également en ligne droite des politiques déjà menées par l'ADEME dans le cadre du fonds « Économie circulaire ».

Cette diversité des politiques financées - qui met à mal le principe de spécialité budgétaire - est un héritage du plan de relance, dont la majorité des mesures du fonds vert sont issues.

Recoupement des politiques menées au sein
du programme 380 et du programme 362 (Plan de relance)

Programme 380

Programme 362

Rénovation thermique des bâtiments publics

Sous-action consacrée à la rénovation des bâtiments publics des collectivités au sein de l'action 01 « Rénovation énergétique »

Reconquête des friches

« fonds friche » dans la sous-action « Densification et renouvellement urbain » au sein de l'action 02

Appui à la Stratégie nationale biodiversité 2030

Politiques en faveur de la biodiversité dans la sous-action « Biodiversité, prévention des risques et résilience » au sein de l'action 02

Restructuration des locaux d'activité

Fonds de restructuration des locaux d'activité au sein de l'action 02

Recul du trait de côte et renforcement de la protection des bâtiments des collectivités d'outre-mer contre les vents cycloniques

Lutte contre l'érosion du littoral, gestion du trait de côte, et renforcement des bâtiments publics au risque cyclonique au sein de l'action 02

Soutien au tri à la source et valorisation des biodéchets

Sous-action consacrée au développement du tri et à la valorisation des déchets au sein de l'action 04

Source : commission des finances, d'après les réponses au questionnaire du rapporteur spécial

L'absence de chiffrage des mesures du fonds vert pour 2025

Tout comme les années précédentes, la répartition prévisionnelle des crédits entre les différentes mesures du Fonds vert n'est pas détaillée dans les documents budgétaires. La justification donnée est à nouveau que le fonds vert est censé s'adapter aux besoins des territoires, et que préciser la répartition des financements aurait pour conséquence de limiter le choix des collectivités territoriales dans les politiques menées.

Cet argument n'est pas recevable, car il s'agit d'une simple mesure de bonne gestion budgétaire, et d'un préalable indispensable pour que le Parlement puisse se prononcer en toute connaissance de cause sur les crédits du programme 380. Le fonds vert peut bien entendu connaître des évolutions importantes lors de l'exécution, mais cela n'est pas un obstacle à la réalisation de prévisions indicatives.

La lisibilité budgétaire ne doit pas être négligée. Elle est indispensable pour que les parlementaires puissent évaluer la destination et la progression des crédits chaque année lors de l'examen du projet de loi de finances.

Source : commission des finances

En tout état de cause, il importe de faire enfin confiance aux collectivités territoriales dans la détermination de leurs investissements en matière de transition écologique.

Pour cette raison, le rapporteur spécial avait proposé la création d'un « fonds territorial climat », qui a été adopté de manière transpartisane par le Sénat en séance public lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2024. Le Gouvernement s'était ensuite engagé à le mettre en oeuvre, et une circulaire du 28 décembre a prévu qu'une part du fonds vert serait déployée en cours d'année pour accompagner la mise en oeuvre des « plan climat-énergie territoriaux » (PCAET).

Le fonds territorial climat avait en effet vocation à attribuer 200 millions d'euros du fonds vert directement aux intercommunalités ayant adopté un PCAET à raison de 4 euros par habitant27(*).

Cette ressource, dans la mesure où elle était connue d'avance, aurait été d'une plus grande efficacité que des crédits accordés via des appels à manifestation d'intérêt dans le cadre du fonds vert. La planification impose d'avoir en effet une vision de long terme sur le niveau des ressources disponibles, ce qui est impossible lorsque l'avenir des projets dépend d'une instruction menée par les services préfectoraux.

Interrogée sur le devenir du fonds territorial climat, l'administration a répondu que « les annulations puis les gels budgétaires n'ont pas permis de créer une part dédiée au sein du fonds vert mais l'identification des projets PCAET parmi les projets du fonds vert permet de souligner que les projets PCAET sont nombreux à solliciter et à bénéficier du fonds vert : 756 projets ont déjà reçu l'engagement d'un financement de l'État en 2024. » Ces projets, cependant, ont été financés par la procédure classique du fonds vert, alors que tout l'intérêt du fonds territorial était précisément que les crédits soient affectés directement aux intercommunalités.

Dans le cadre de la fusion du fonds vert avec la DSIL et la DETR, la mise en oeuvre du fonds territorial climat pourrait être facilitée. Le rapporteur spécial sera vigilant sur ce point.

2. Les collectivités territoriales doivent être davantage accompagnées dans l'ingénierie des dossiers

Charles Guené et Claude Raynal, dans leur rapport d'information sur les dotations d'investissement aux collectivités territoriales du 20 juillet 2022, pouvaient écrire qu'« il ressort des déplacements des rapporteurs spéciaux une insuffisante prise en compte des besoins des collectivités en termes d'ingénierie notamment préalablement au dépôt de leurs projets »28(*). Un constat similaire peut être dressé pour le programme 380.

Plusieurs mesures sont concernées par cette difficulté. D'après les auditions menées par le rapporteur spécial, les dossiers pour le fonds friche ne sont souvent pas d'une qualité suffisante pour engager les financements. Contrairement au plan de relance, la politique de rénovation énergétique des bâtiments publics requiert désormais une étude préalable des économies d'énergie prévues. Si cette étude permet de mieux évaluer l'efficacité de cette politique, elle crée des besoins en ingénierie supplémentaires pour les collectivités territoriales. Dans les réponses au questionnaire budgétaire, l'administration reconnaît d'ailleurs cette difficulté : « Au-delà des aspects financiers, les collectivités souhaitant réaliser des investissements de rénovation énergétique de leur parc peuvent se heurter à des difficultés d'accès à l'ingénierie, surtout les plus petites qui n'ont pas de compétences en interne. »

Le risque est que les élus et les préfets privilégient les mesures les moins exigeantes au niveau des études préalables, au détriment des politiques plus structurantes. Ce n'est pas le cas de la politique de rénovation énergétique des bâtiments, qui concentre une part importante des dossiers, compte tenu des besoins très forts des collectivités en la matière. En revanche, la politique de soutien au tri à la source et à la valorisation des biodéchets, de recyclage foncier et de restructuration des locaux d'activité pâtissent de cette complexité. Des projets plus légers sur le plan technique, comme la rénovation de l'éclairage public, bénéficiaient du report des dossiers.

Il faut néanmoins reconnaître que le fonds vert comprend des mesures d'aide à l'ingénierie. Des prestations d'ingénierie peuvent être financées par le fonds, et des partenariats avec la Banque des territoires sont possibles. L'administration indique également que la montée en puissance du programme « Action des collectivités territoriales pour l'efficacité énergétique » (ACTEE) devrait permettre de résoudre une partie des difficultés concernant les études thermiques préalables pour la rénovation des bâtiments publics.

Toutefois, d'une manière générale, les difficultés d'ingénierie des petites collectivités territoriales auraient davantage dû être anticipées. C'est une problématique qui est en effet est connue depuis longtemps, à travers les retours d'expérience des dotations d'investissement, comme le montre le rapport précité.

B. LES MESURES DU FONDS VERT RÉPONDENT À UN BESOIN DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

1. Une sous-consommation qui découle des mesures d'annulation de crédits

Les chiffres des dépôts de dossiers montrent que les mesures du fonds répondent, en général, ç véritable demande par les collectivités territoriales. Cependant, certaines enveloppes ont financé un nombre extrêmement restreint de mesures, si bien qu'il peut y avoir dans certains cas une impression de saupoudrage.

Le tableau suivant présente les chiffres de l'exécution du fonds vert.

L'exécution du fonds vert à la date du 31 août 2024

Démarche

Nombre de dossiers déposés

Nombre de dossiers acceptés

 

Somme des dépenses des projets déposés

(en millions d'euros)

Somme de l'aide demandées au fonds vert des projets déposés

(en millions d'euros)

Somme des montants de subvention attribués des projets acceptés

(en millions d'euros)

Somme des dépenses des projets acceptés

(en millions d'euros)

Rénovation énergétique des bâtiments publics locaux

4 567

1 977

4 439,6

1 418,7

472,0

1 791,1

Soutien au tri à la source et à la valorisation des biodéchets

250

42

330,2

143,4

40,5

22,8

Rénovation des parcs de luminaires d'éclairage public

1 997

816

694,9

209,9

44,8

268,7

Prévention des inondations

347

141

277,7

73,8

16,7

46,4

Appui aux collectivités de montagne soumises à des risques émergents

89

39

41,4

26,7

3,8

6,8

Renforcement de la protection des bâtiments contre les vents cycloniques

32

21

128,5

14,0

4,2

49,3

Prévention des risques d'incendies de forêt et de végétation

626

362

80,8

42,0

13,0

29,5

Accompagnement pour l'adaptation des territoires littoraux au recul du trait de côte

28

6

10,3

7,0

1,5

2,2

Renaturation des villes et des villages

1 822

453

2 259,6

499,0

72,7

430,5

Appui à l'ingénierie

650

240

94,9

52,0

11,6

20,0

Accompagnement du déploiement des ZFE

224

63

463,3

170,0

33,2

122,7

Recyclage foncier

1 260

178

9 236,2

1 158,5

152,3

999,9

Développement du covoiturage

282

151

48,1

22,5

9,9

20,4

Mobilités durables en zone rurale

196

54

76,2

26,9

4,9

9,3

Territoires d'industries en transition écologique

241

4

1 127,6

247,0

15,7

29,5

Source : réponses au questionnaire du rapporteur spécial

Au niveau global, l'ensemble des AE - après l'annulation de 400 millions d'euros prévue par le PLFG - devraient être consommées d'ici la fin de l'année. Concernant les CP, l'administration estime qu'ils devraient connaître une sous-consommation d'au moins 27 millions d'euros, soit 4 % des crédits disponibles. Pour cette raison, elle a formulé la demande que le programme 380 puisse figurer dans la liste des programmes pouvant bénéficier d'une majoration des plafonds de reports des crédits de paiement.

Cette sous-consommation des crédits, à laquelle s'ajoute l'annulation de 65 millions de CP par le PLFG, découle de la décision de mettre en réserve les deux tiers des crédits restants du fonds vert après les annulations de crédits décidées en février 2024.

La répartition du taux de consommation des AE en 2024 entre les régions est relativement proche d'une région à l'autre, se situant aux alentours de 100 %. Le taux de consommation le plus faible concerne la Corse, avec 94 % des crédits notifiés qui ont été engagés29(*).

La consommation en CP est plus faible en revanche. Le projet de loi de finances de fin de gestion a ainsi annulé 50 millions d'euros de crédits de paiement, en raison de décaissements constatés inférieurs aux prévisions.

Selon les régions, les données sont contrastées en ce qui concerne la consommation des CP. Hors outre-mer, le taux d'exécution des CP délégués aux régions est en moyenne de 60 %, avec certaines régions se situant en dessous de 40 %. Trois régions et département d'Outre-mer ont une consommation atteignant ou dépassant les prévisions : la Martinique (101,4 %), la Réunion (96,9 %), la Guadeloupe (159,7 %). En France métropolitaine, seul la Bourgogne-Franche-Comté présente des chiffres d'exécution comparables (109,9 %).

2. Le fonds friches

Le programme 380 reprend le fonds friches, qui relevait de l'action 02 « Biodiversité et lutte contre l'artificialisation » du programme 362. Le Président de la République avait annoncé la pérennisation du fonds le 7 septembre 2021.

Le fonds friches a vocation à financer des opérations de recyclage de friches ou de fonciers déjà artificialisés. Le recyclage des friches engendre en effet des surcoûts par rapport aux constructions sur terrain non bâti, notamment en raison des travaux de restructuration lourde et de dépollution nécessaires. Le fonds friches doit permettre de construire de nouveaux logements et locaux d'activité, sans faire progresser l'artificialisation nette. Le Cerema estime ainsi que les friches représentent un stock de 150 000 hectares, dont 41 500 hectares en zone tendue.

Sont considérées comme des friches les terrains nus, déjà artificialisés, et qui ont perdu leur usage ou leur affectation, ainsi que les îlots d'habitat, d'activité ou mixte, bâti et caractérisé par une importante vacance.

Pour éviter les effets d'aubaine, le fonds friches s'adresse aux projets d'aménagements de friches dont les bilans économiques restent déficitaires après prise en compte de toutes les autres subventions publiques, et malgré la recherche de l'optimisation de tous les autres leviers d'équilibre. En outre, il concerne des projets suffisamment matures pour entrer en phase opérationnelle dans les deux ans à venir.

Ce fonds avait été initialement doté de 300 millions d'euros en AE dans la mission « Plan de relance » de la loi de finances initiale pour 2021. Dans le budget pour 2022, le fonds friches a été reconduit avec 350 millions d'euros supplémentaires, et il a bénéficié d'une rallonge de 100 millions d'euros au début de l'année 2022.

Au total, 750 millions d'euros ont été engagés dans le cadre du plan de relance, qui ont vocation à financer 1 382 projets lauréats. Ces sommes doivent permettre de recycler 3 375 hectares de friches pour la fin de l'année 2024.

Le fonds vert a mis en commun le fonds « ADEME » et les fonds régionaux. La procédure d'octroi des subventions a également évolué. Le dépôt des dossiers est ouvert à tous les moments de l'année, et le traitement des dossiers fait désormais « au fil de l'eau », et non plus sur des périodes d'appel à projets. Le fonds vert a également inclus la renaturation totale ou partielle d'une friche, dans la liste des opérations pouvant faire l'objet d'un accompagnement financier, dans les mêmes conditions que les opérations de recyclage foncier.

Au 31 juillet 2024, dans le cadre du fonds vert, on compte 156 projets lauréats en 2024 pour plus de 1 250 candidatures déposées pour cette mesure. Le bilan pour cette année est le suivant :

- une préservation de surface de 300 hectares ;

- la construction de 3 000 logements nouveaux, dont 1 700 logements sociaux, à partir des opérations de recyclage fonciers ;

- la transformation de friches en espace naturel, agricole et forestier, d'environ 5000 000 m².

3. La rénovation énergétique des bâtiments des collectivités territoriales

La rénovation énergétique des bâtiments des collectivités territoriales est de loin de la mesure du fonds vert qui a fait l'objet du plus de dossiers déposés et des financements, au niveau global, les plus élevés.

Au 31 août 2024, on compte 1 977 dossiers acceptés pour un total de 4 567 dossiers déposés. 472 millions d'euros de subvention ont été accordés pour une demande de 1,42 milliard d'euros, ce qui représente un taux de satisfaction de 33 %, qui est légèrement meilleur que celui de l'année dernière (27 %).

Un tiers environ des dossiers visent à rénover des bâtiments scolaires. Viennent ensuite les bureaux et les logements qui représentent chacun environ un sixième des dossiers. Les trois-quarts des projets incluent l'isolation des murs, planchers ou toiture, et plus de 6 projets sur 10 incluent un changement de chauffage.

4. La politique d'adaptation au changement climatique

La politique de prévention des risques menée dans le cadre du fonds vert est constituée d'un ensemble de mesures destinées à l'adaptation des territoires au changement climatique. Il inclut la prévention des inondations, des feux de forêt, des risques naturels en montagne, des risques spécifiques aux outre-mer (dont le risque cyclonique) ainsi que la lutte contre le recul du trait de côte.

Concernant la prévention des inondations, 72 % des projets acceptés en 2023 portent sur le renforcement des plans d'action de prévention des inondations (PAPI). Les 28 % restant portent sur l'appui financier aux collectivités gestionnaires de digues, dans le cadre de la compétence GEMAPI.

La moitié de ces dossiers concernent plus spécifiquement le soutien aux dépenses du système d'endiguement (surveillance et entretien courant) et à la création de zones d'expansion de crues susceptibles de réduire la pression sur les ouvrages hydrauliques concernés.

S'agissant de la prévention des risques d'incendie de forêt, les financements les plus demandés portent sur la protection et la défense des zones déjà urbanisées contre les incendies (37 % en 2023) l'aménagement de la forêt aux abords des zones urbanisées (32 %), la détection précoce des départs de feux et la surveillance (15 %) et enfin le développement de la connaissance et de la culture du risque (11 %).

TROISIÈME PARTIE
SERVICE PUBLIC DE L'ÉNERGIE
ET TRANSITION ÉNERGÉTIQUE 

I. LES COMPENSATIONS DE L'ÉTAT AUX PRODUCTEURS D'ÉLECTRICITÉ RENOUVELABLE RETROUVENT DES NIVEAUX COMPARABLES À LA SITUATION D'AVANT CRISE

A. LES RECETTES EXCEPTIONNELLES QUE L'ÉTAT A RÉELLEMENT PERÇUES DES PRODUCTEURS PENDANT LA CRISE SE SONT RÉVÉLÉES NETTEMENT MOINS ÉLEVÉES QUE LES ANTICIPATIONS INITIALES

1. En 2022 et 2023, des recettes exceptionnelles de 5,9 milliards d'euros, inférieures de 24 milliards d'euros aux estimations qui avaient été réalisées à la fin de l'année 2022

Les charges de service public de l'énergie correspondent en théorie aux dépenses de l'État qui compensent les obligations de service public assignées aux entreprises du secteur de l'électricité et du gaz par le code de l'énergie. La Commission de régulation de l'énergie (CRE) est chargée d'évaluer chaque année le montant des charges de service public de l'énergie (CSPE)30(*). À travers cette mission, en pratique, elle détermine la grande majorité des crédits du programme 345 « Service public de l'énergie ».

Durant la période de crise des prix de l'énergie, c'est-à-dire principalement au cours des années 2022 et 2023, le fonctionnement habituel des compensations de CSPE a été profondément bouleversé. En effet, en raison de l'augmentation très sensible et inédite des prix de l'électricité sur les marchés de gros, les mécanismes de soutien à la production d'électricité au moyen d'énergies renouvelables (EnR) sont devenus en pratique des dispositifs de prélèvement automatique de revenus exceptionnels qui auraient pu être perçus par les producteurs du fait de cette hausse des prix historique. Aussi, pour la première fois depuis la création du mécanisme des compensations de CSPE, les sommes habituellement versées par l'État aux producteurs se sont transformées en recettes publiques prélevées sur les rémunérations exceptionnelles perçus par ces mêmes producteurs au titre de la vente de leurs volumes d'électricité sur les marchés.

La délibération de « réévaluation » des CSPE pour 2023 publiée au début du mois de novembre 2022 par la CRE31(*) anticipait un phénomène d'une ampleur considérable puisque s'agissant des dispositifs de soutien à la production d'électricité renouvelable en métropole et au titre des années 2022 et 2023, le régulateur anticipait la perception de recettes nettes par l'État à hauteur de 30 milliards d'euros (11 milliards pour 2022 et 19 milliards pour 2023).

Toutefois, le reflux beaucoup plus rapide qu'anticipé des prix de l'électricité au cours de l'année 2023, confirmée en 2024, a conduit à réviser à la baisse de manière très significative ces recettes exceptionnelles. En définitive, les recettes exceptionnelles perçues par l'État au titre de ces dispositifs auront été de 1,9 milliard d'euros en 2022 et de 4 milliards d'euros en 2023, soit au total environ 24 milliards d'euros de moins que les estimations qui avaient été réalisées à la fin de l'année 2022.

Évolutions successives des évaluations des recettes exceptionnelles attendues
au titre des dispositifs de soutien à la production d'électricité renouvelable
en métropole au titre des années 2022 et 2023 (novembre 2022 - juillet 2024)

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les délibérations successives de la CRE

2. En 2024, les dispositifs de soutien à la production d'électricité d'origine renouvelable sont redevenus coûteux pour l'État

En 2024, d'après la délibération de la CRE du 11 juillet dernier, les compensations de CSPE relatives aux dispositifs de soutien à la production d'électricité renouvelable en métropole repasseront dans leur globalité en « territoire positif » pour un montant prévisionnel de 2 525 millions d'euros. Parmi les types de technologies de production, seule la filière des éoliennes terrestres continuerait d'afficher des charges négatives et donc des recettes pour l'État à hauteur de 251 millions d'euros.

Évaluation par la CRE des compensations de charges de service public
de l'énergie résultant des dispositifs de soutien à la production d'électricité
renouvelable en métropole au titre de l'année 2024

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après la délibération n° 2024-139 de la CRE du 11 juillet 2024 relative à l'évaluation des charges de service public de l'énergie pour 2025 et à la réévaluation des charges de service public de l'énergie pour 2024

Au total, toutes charges de service public de l'énergie confondues, les compensations que l'État devrait verser au titre de l'année 2024 devraient, selon les dernières estimations de la CRE, s'établir à 7 milliards d'euros.

Évaluation par la CRE des compensations de charges de service public
de l'énergie au titre de l'année 2024

(en millions d'euros)

ZNI : zones non interconnectées.

Source : commission des finances du Sénat, d'après la délibération n° 2024-139 de la CRE du 11 juillet 2024 relative à l'évaluation des charges de service public de l'énergie pour 2025 et à la réévaluation des charges de service public de l'énergie pour 2024

B. EN 2025, LES COMPENSATIONS VERSÉES PAR L'ÉTAT RETROUVENT DES NIVEAUX COMPARABLES À LA SITUATION QUI PRÉVALAIT AVANT LA CRISE DES PRIX DE L'ÉNERGIE

D'après la délibération de la CRE en juillet 2024 précitée, le montant global des CSPE au titre de l'exercice 2025 représenterait 9,5 milliards d'euros, soit à un retour à un niveau comparable aux années d'avant crise. Le détail de la ventilation de ce montant par catégories de charges est présenté dans le graphique ci-après.

Il est à noter que les charges prévisionnelles réelles à compenser en 2025 par l'État devraient être diminuées de 600 millions d'euros du fait de l'affectation au budget de l'État du complément de prix Arenh qui était auparavant reversé aux fournisseurs. Cette évolution a été prévue par une disposition de l'article 225 de la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024. Aussi, la CRE estimait-elle en juillet dernier les compensations prévisionnelles que l'État devra verser en 2025 à 8,9 milliards d'euros.

Évaluation des CSPE au titre de l'année 2025

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après la délibération n° 2024-139 de la CRE du 11 juillet 2024 relative à l'évaluation des charges de service public de l'énergie pour 2025 et à la réévaluation des charges de service public de l'énergie pour 2024

Le périmètre du programme 345 avait été bouleversé en 2023 par la création de la nouvelle action 17 « Mesures exceptionnelles de protection des consommateurs » destinée à porter les crédits nécessaires pour compenser les charges de service public de l'énergie (CSPE) assumées par les fournisseurs au titre des mesures dites de « bouclier tarifaire » et autres « amortisseurs ».

Une nouvelle révision de périmètre prévue par le présent projet de loi de finances (PLF) doit profondément affecter le volume de crédits inscrits sur le programme 345. Il s'agit de la réforme du dispositif de financement du système de péréquation des tarifs de l'électricité en faveur des zones non interconnectées (ZNI). L'article 7 du présent PLF prévoit en effet que les charges de service public de l'énergie résultant de ce soutien ne soient plus compensées au moyen de crédits budgétaires de l'action 11 « Soutien dans les zones non interconnectées au réseau métropolitain » du programme 345 comme c'était le cas jusqu'en 2024 mais par l'affectation aux opérateurs qui assument ces charges d'une fraction prélevée sur le produit des accises appliquées aux combustibles de chauffage. Seuls les territoires de Saint-Martin et Saint-Barthélemy ne sont pas concernés par cette réforme, ce qui explique que 70 millions d'euros de crédits résiduels soient prévus sur l'action 11 du programme 345 pour l'exercice 2025.

Les charges correspondantes étant évaluées par la CRE à 3 milliards d'euros pour 2025, ce phénomène explique la majeure partie de l'écart constaté entre le montant des compensations prévisionnelles au titre de l'année 2025 par le régulateur et le montant total des crédits inscrits sur le programme 345 pour ce même exercice : 6,7 milliards d'euros. Révélateur de la situation de sortie de crise des prix de l'énergie et de retour à une situation plus habituelle, ce montant est quasiment identique à celui qui avait été constaté au titre de l'exercice 2020 moyennant le retraitement des charges relevant du soutien aux ZNI.

Comparaison des CSPE constatées au titre de l'année 2020
avec les crédits inscrits sur le programme 345 en 2025

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat

Crédits du programme 345 « Service public de l'énergie »
en 2023, en 2024 et en 2025 (CP)

(en millions d'euros)

 


2023
(exécution)

2024
(CRE juillet 2024)

2025
(PLF)

Variation 2024-2025

09- Soutien aux énergies renouvelables électriques en métropole continentale

1 375,9

2 524,6

4 235,6

+ 67,8 %

10- Soutien à l'injection de biométhane

44,2

1 061,8

1 181,5

+ 11,3 %

11- Solidarité avec les zones non interconnectées au réseau métropolitain

3 166,1

2 425,8

70,0

- 97,1 %

12- Soutien à la cogénération au gaz naturel et autres moyens thermiques

214,1

299,7

588,1

+ 96,2 %

13- Soutien aux effacements de consommation

63,0

198,7

187,0

- 5,9 %

14- Dispositions sociales pour les consommateurs en situation de précarité énergétique

51,0

41,4

39,8

- 3,9 %

15- Frais divers

87,7

94,5

-

- 100 %

17-Mesures exceptionnelles de protection des consommateurs

15 169,1

356,4

336,6

- 5,6 %

18-Soutien hydrogène

0,0

0,0

25,0

+ 100 %

Total programme

20 170,2

7 002,9

6 663,5

- 4,8 %

Source : documents budgétaires et délibérations de la CRE

Il est à noter qu'un montant nul est indiqué à l'action 15 « Frais divers » dans le projet annuel de performances 2025 du programme 345. Cette situation résulte de l'affectation à l'État du complément de prix Arenh (voir supra), prévue par la LFI pour 2024 et estimée à 556 millions d'euros. Cette recette, correspondant à une compensation négative de CSPE doit être imputée sur cette action 15 qui ainsi, en pratique, présente un solde prévisionnel négatif de 538 millions d'euros au titre de l'année 2025. Elle sera in fine déduite des compensations de charges dues à la société Électricité de France (EDF).

Comme l'illustre le graphique ci-dessous, 43 % des 6,7 milliards d'euros de compensations prévisionnelles dues par l'État au titre de l'année 2025, soit 2,9 milliards d'euros, seraient versés à la seule filière photovoltaïque.

Répartition des compensations pour charges de service public à verser par l'État
en 2025 d'après la délibération de la CRE du 11 juillet dernier

(en millions d'euros et en pourcentages)

Source : commission des finances du Sénat, d'après la délibération n° 2024-139 du 11 juillet 2024 de la CRE relative à l'évaluation des charges de service public de l'énergie pour 2025 et à la réévaluation des charges de service public de l'énergie pour 2024

Dans le cadre de son plan de 5 milliards d'euros d'économies complémentaires sur les dépenses de l'État, le Gouvernement a annoncé vouloir réduire de 214 millions d'euros les crédits prévus sur le programme 345 en 2025 dans le PLF déposé (cf. supra description de l'amendement déposé par le Gouvernement à l'Assemblée nationale).

La DGEC a signalé au rapporteur que ces économies pourraient résulter de la mise en oeuvre d'une série de mesures visant notamment à davantage encadrer les rémunérations versées aux centrales renouvelables pour les inciter à réduire leur production dans les périodes de prix de marchés négatifs. Deux articles additionnels rattachés à la mission Écologie ont été transmis par le Gouvernement pour permettre la mise en oeuvre de ces dispositifs.

Ces économies passent aussi par l'annulation de 25 millions d'euros de crédits de paiement prévus au titre du soutien à la production d'hydrogène décarboné et qui ne pourront être exécutés en 2025 compte-tenu du retard pris dans la mise en oeuvre par l'Ademe de ce nouveau dispositif (voir infra).

Enfin, pour atteindre cette cible de 214 millions d'euros, la DGEC devra également vraisemblablement revoir ses ambitions à la baisse s'agissant des volumes de gaz vert soutenus dans le cadre des appels d'offres destinés à promouvoir l'injection de biométhane.

1. Corrélativement au retour à la normale des prix de l'électricité sur les marchés, les mécanismes de soutien à la production d'énergies renouvelables électriques représentent à nouveau des charges pour le budget de l'État

Les dépenses de soutien aux énergies renouvelables (EnR) électriques continentales portées par l'action 09 « Soutien aux énergies renouvelables électriques en métropole continentale » du programme 345 consistent à compenser les fournisseurs d'électricité des surcoûts engendrés par les contrats d'obligation d'achat et de complément de rémunération qu'ils sont tenus de conclure avec les producteurs d'énergies renouvelables.

Les dispositifs de soutien public à la production d'EnR ont vocation à donner de la visibilité aux producteurs afin d'assurer la rentabilité de leurs projets et de déclencher la décision d'investir. En période « normale », comme cela avait été systématiquement vérifié avant la crise inédite des prix de l'énergie, les revenus garantis par les contrats d'obligation d'achat ou de complément de rémunération sont inférieurs aux prix de marché et les compensations supportées par l'État au titre des charges de service public de l'énergie pour soutenir la production d'EnR en métropole se traduisent par des dépenses publiques versées aux producteurs pour des montants qui, avant la crise, évoluaient chaque année entre 5 et 6 milliards d'euros.

Toutefois, pendant la période de crise de l'énergie, les prix de l'électricité sur les marchés de gros se sont maintenus à des niveaux supérieurs aux rémunérations garanties par les dispositifs de soutien public, si bien que celles-ci se sont transformées en rémunérations plafonnées qui, pour les installations concernées par ces mécanismes, se sont traduit par un prélèvement mécanique des revenus excédentaires qui auraient été perçus par les producteurs du fait de la flambée des prix de l'électricité.

Comme souligné supra, d'après la délibération de la CRE de juillet 2024, les recettes exceptionnelles ainsi perçues par l'État en 2023 au titre des dispositifs de soutien à la production d'énergie renouvelable électrique se sont finalement établies à 4 milliards d'euros. En 2022, ces recettes avaient représenté 1,9 milliard d'euros. Le cumul des recettes exceptionnelles perçues par l'État au titre de ces deux années atypiques a ainsi atteint 5,9 milliards d'euros, soit un montant infiniment moins élevé que ce qui avait pu être envisagé à l'automne 2022, au moment du pic de la crise des prix de l'énergie.

En 2024, alors que la CRE anticipait encore en juillet 2023 des charges de service public négative à hauteur de 2,7 milliards d'euros, ces dernières vont finalement à nouveau représenter un coût pour l'État, évalué par le régulateur32(*) à 2,5 milliards d'euros.

Évolution des charges de service public de l'énergie relatives au soutien
à la production d'énergies renouvelables en métropole (action 09)
entre 2020 et 2025

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les délibérations de la CRE

En 2025, toujours d'après les dernières évaluations de la CRE, les compensations de l'État au titre des charges de service public relatives au soutien des énergies renouvelables électriques devraient poursuivre leur « retour à la normale », à l'instar de l'évolution des prix de l'électricité sur les marchés de gros auxquels elles sont directement corrélées. Le régulateur les a ainsi évaluées à 4,3 milliards d'euros. En 2025, contrairement à la situation observée en 2024, toutes les filières, y compris l'éolien terrestre, représenteraient de nouveau des coûts budgétaires nets pour l'État.

2. Le soutien à l'injection de biométhane : une charge de 1,2 milliard d'euros multipliée par 20 en 7 ans pour tenir les objectifs ambitieux de la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE)

En matière de gaz naturel, le biométhane constitue la principale source d'énergie renouvelable, raison pour laquelle l'État soutient financièrement son injection dans les réseaux de transport et de distribution de gaz naturel33(*).

Évolution du coût budgétaire des soutiens à l'injection du biométhane
(2018-2025)

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les délibérations de la CRE

En 2025, le coût pour l'État des dispositifs de soutien à l'injection de biométhane pourrait atteindre 1,2 milliard d'euros, soit une augmentation de 120 millions d'euros en un an et une multiplication par 20 depuis 2018. D'après la DGEC, cette augmentation extrêmement significative s'expliquerait principalement par le développement de la filière et l'augmentation des volumes de gaz vert soutenus : « en 2018, 73 unités de méthanisation injectaient du biométhane dans les réseaux de gaz naturel, pour une capacité raccordée de 1,5 TWh par an. Au 30 septembre 2024, 710 installations de production de biométhane sont raccordées aux réseaux de transport et de distribution, pour une capacité cumulée de 13 TWh par an. De fait, la forte augmentation des charges de service public versées pour le soutien à l'injection de biométhane s'explique principalement par le développement de la filière »34(*).

La DGEC souligne par ailleurs que ce développement de la filière résulte des objectifs ambitieux fixés par la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) : 6 TWh de biométhane injecté en 2023, et entre 14 et 22 TWh en 2028. Le projet de nouvelle PPE prévoit une ambition de développement bien plus forte encore avec un objectif de 44 TWh de biométhane injecté à l'horizon 2030.

Déjà entre 2018 et 2020, les crédits consacrés au soutien public à cette filière avaient fortement augmenté, faisant craindre un emballement comparable à la situation observée à la fin de la première décennie des années 2000 concernant les contrats d'obligation d'achat d'électricité d'origine photovoltaïque. Dès 2018, la CRE avait alerté l'État sur les niveaux excessifs de rentabilité de la filière mais ce n'est qu'à la fin de l'année 2020 que celui-ci est intervenu. L'arrêté du 23 novembre 2020 avait ainsi révisé le dispositif de soutien au biométhane afin de tenir compte de la maturité atteinte par la filière et de l'évolution des coûts de production. Ce décret réduit le tarif d'achat, prévoit sa dégressivité trimestrielle et renforce les conditions d'accès aux contrats. Ces évolutions doivent limiter la rémunération moyenne des capitaux investis à environ 7 %.

Pour tenir compte de l'inflation des coûts de construction pour les nouvelles installations, le tarif d'achat de biométhane a été revalorisé par un nouvel arrêté tarifaire du 10 juin 2023. D'après la DGEC, ce nouvel arrêté « s'est avéré nécessaire pour relancer la filière et ne pas compromettre l'atteinte des objectifs de la PPE ».

Néanmoins, compte-tenu des délais nécessaires au développement des projets, la DGEC observe que les conditions fixées par ce nouvel arrêté tarifaire ne peuvent pas être à l'origine de l'augmentation très significative du coût du soutien constaté depuis 2023 : « en raison du délai entre la date de signature d'un contrat et la mise en service de l'installation, l'évolution à la hausse des charges pour le soutien à l'injection du biométhane ne peut s'expliquer par la publication de l'arrêté du 10 juin 2023. En outre, le coefficient réduisant le tarif dans le cas où la capacité contractualisée excède la trajectoire de la PPE est un garde-fou qui garantit l'absence d'une croissance incontrôlée des sommes versées aux producteurs de biométhane ».

3. En 2025, le financement de la péréquation tarifaire en faveur des consommateurs des zones non interconnectées (ZNI) serait assuré par l'affectation d'une fraction de l'accise sur les énergies

Les coûts de production d'électricité en Corse ainsi que dans les départements, régions et territoires d'outre-mer sont sensiblement supérieurs à ceux de la métropole continentale. Aussi, au nom de la solidarité nationale, les consommateurs de ces zones non interconnectées (ZNI) bénéficient d'une péréquation tarifaire : les surcoûts des opérateurs historiques des ZNI font l'objet d'une compensation par l'État.

Jusqu'à aujourd'hui, la compensation des charges de service public résultant de cette péréquation tarifaire35(*) était financée au moyen de crédits budgétaires retracés par l'action 11 « Soutien dans les zones non interconnectées au réseau métropolitain » du programme 345.

L'article 7 du présent projet de loi de finances prévoit de réformer le circuit de financement de la compensation de ces charges à compter de 2025. Plutôt que par des crédits budgétaires, cette compensation serait assurée par l'affectation d'une fraction des accises appliquées aux combustibles de chauffage. D'un dispositif basé sur des dépenses budgétaires, le circuit de cette compensation serait ainsi reconfiguré en un mécanisme de nature fiscale. Pour le budget de l'État, une dépense serait ainsi convertie en une moindre recette.

Évolution du coût du soutien aux ZNI (2017-2025)

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les délibérations de la CRE

En 2025, le montant prévisionnel des compensations des charges liées à cette péréquation tarifaire, devrait dépasser les 3 milliards d'euros, soit une augmentation de près de 600 millions d'euros (+ 19 %) en un an.

D'après la CRE, l'augmentation substantielle du coût prévisionnel du soutien aux ZNI en 2025 est principalement liée à deux phénomènes :

- d'une part, à hauteur de 320 millions d'euros la baisse attendue des TRVe qui mécaniquement conduit à réduire les recettes tarifaires perçues par les opérateurs et donc à accroître leurs charges à compenser ;

- d'autre part, pour 212 millions d'euros, la hausse des coûts du projet de renouvellement et de renforcement de l'interconnexion SACOI (pour Sardaigne-Corse-Italie) qui relie la Corse à l'Italie et à la Sardaigne.

Le projet de renforcement de l'interconnexion SACOI

Les opérations de renouvellement et d'augmentation de la puissance de l'interconnexion dite SACOI (pour Sardaigne-Corse-Italie), l'une des deux interconnexions électriques de la Corse36(*) correspondent à un projet développé par l'entreprise EDF en partenariat avec le gestionnaire de réseau de transport d'électricité italien TERNA. La programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) de Corse prévoit par ailleurs cette opération afin de porter la capacité de la liaison SACOI à 100 mégawatt (MW).

Ce projet, qui passe notamment par le renouvellement de la station de conversion de Lucciana, est important s'agissant de la sécurité d'approvisionnement électrique de la Corse. Il a d'ailleurs été qualifié de projet d'intérêt commun au sens du règlement européen n° 347/2013 du 17 avril 2013 concernant des orientations pour les infrastructures énergétiques transeuropéennes.

Source : commission des finances du Sénat

La réforme du financement des dispositifs de soutien aux ZNI s'applique à tous les territoires concernés à l'exception de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy pour lesquels ces dispositifs continueront d'être financés par des crédits inscrits à l'action 11 du programme 345. C'est pour cette raison que le projet annuel de performances du programme 345 pour 2025 prévoit 70 millions d'euros sur l'action 11 répartis entre :

- 45 millions d'euros pour Saint-Martin ;

- et 25 millions d'euros pour Saint-Barthélemy.

4. Les charges relatives à la cogénération déclinent à la suite de la mise en extinction progressive des mécanismes de soutien

La cogénération correspond à la production combinée de chaleur et d'électricité par des installations fonctionnant au gaz naturel37(*). Pour la soutenir, l'État obligeait EDF et les entreprises locales de distribution d'électricité (ELD) à conclure des contrats d'obligation d'achat ou de complément de rémunération avec les installations de cogénération à haute performance énergétique de moins de 12 MW. En contrepartie, il compense aux distributeurs d'électricité l'intégralité des surcoûts générés par ces mécanismes de soutien.

Conformément à la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE), le dispositif de soutien à la cogénération a été abrogé à compter du 23 février 2021 en application d'un décret du 21 août 2020. Depuis cette date, les installations de cogénération à partir de gaz naturel ne sont plus éligibles à un soutien et aucune nouvelle demande de contrat ne peut donc être acceptée. Dans la mesure où les producteurs disposent d'un délai de deux ans pour mettre en service leur installation, depuis le début de l'année 2023 plus aucune nouvelle centrale ne sera soutenue. Les contrats en cours ne sont pas impactés par cette abrogation.

En 2025, les charges relatives au soutien à la cogénération pourraient s'élever à 554 millions d'euros, soit 254 millions d'euros de plus qu'en 2024 mais un montant inférieur de 115 millions d'euros au niveau constaté en 2021 (669 millions d'euros), avant le déclenchement de la crise des prix de l'énergie.

5. Compte-tenu du retard de la mise en oeuvre du dispositif de soutien à la production d'hydrogène décarboné, aucun crédit de paiement ne lui sera consacré en 2025

En 2024, pour la première fois, l'action 18 « Soutien hydrogène », créée en 2023, avait été dotée d'une enveloppe de crédits de 680 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 25 millions d'euros en crédits de paiement (CP).

Ces montants devaient permettre la mise en oeuvre d'un dispositif de soutien à la production d'hydrogène décarboné par lequel la puissance publique compense au producteur, sur une période de 10 à 15 ans, la charge liée à la différence de coût de production entre de l'hydrogène décarboné et de l'hydrogène produit à partir de combustibles fossiles.

L'objectif poursuivi est celui d'un déploiement à horizon 2029 d'une production d'hydrogène décarboné soutenue pour une puissance de 1 GW d'électrolyse. Il est prévu que la montée en puissance du dispositif se réalise en trois étapes. Un premier objectif de 150MW en 2024, une deuxième phase de 250MW en 2025 puis 600MW dès 2026 avant de parvenir à l'objectif d'1 GW en 2029.

Alors que le lancement de premiers appels d'offres était à l'origine prévu dès 2023, ce dispositif, piloté par l'Ademe, a pris du retard. Les premiers appels d'offre ne se seront pas lancés avant 2025. Si ce nouveau calendrier est tenu, de premiers crédits d'engagements pourraient être consommés l'année prochaine mais aucune dépense effective ne sera versée.

En réponse au questionnaire du rapporteur, la DGEC a confirmé qu'aucun crédit du programme 345 ne serait consommé en 2024 au titre du soutien à la filière hydrogène. Dans ces conditions, alors que 200 millions d'euros d'autorisations d'engagement avaient déjà été annulées dans le cadre du décret n° 2024-124 du 21 février 2024 portant annulation de crédits, le projet de loi de finances de fin de gestion pour 2024 prévoit l'annulation de 470,4 millions d'euros d'autorisations d'engagement supplémentaires sur le programme 345 au titre de ce dispositif.

Le projet annuel de performances 2025 du programme 345 prévoyait de réinscrire 692,5 millions d'euros d'autorisations d'engagement et 25 millions d'euros de crédits de paiement au titre du soutien à la production d'hydrogène. Cependant, comme indiqué supra, le Gouvernement prévoit, dans le cadre de son plan d'économies complémentaires de 5 milliards d'euros, de réduire les crédits du programme 345 à hauteur de 214 millions d'euros ce qui inclut notamment les 25 millions d'euros de crédits de paiement qui avaient été inscrits à l'action 18 dans le projet annuel de performances 2025 du programme 345. Ce montant semble encore très ambitieux au rapporteur spécial, qui relève que mi-novembre l'appel d'offres n'a pas été lancé et que lors de son audition l'Ademe a indiqué qu'il faudrait a minima un an entre la date de publication de l'appel d'offres et les premiers engagements. Par voie d'amendement, le rapporteur propose de sincériser l'action 18 et éviter ainsi une nouvelle annulation importante d'AE en fin de gestion. Par ce même amendement, elle propose une réallocation partielle de ces crédits à hauteur de 10 millions de CP et 300 millions d'euros d'AE sur le fonds chaleur.

C. EN 2025, LA « QUEUE DE COMÊTE » DES MESURES EXCEPTIONNELLES PRISES POUR AMORTIR LES CONSÉQUENCES DE LA CRISE DES PRIX DE L'ÉNERGIE

1. Les mesures de soutien exceptionnel aux consommateurs visant à atténuer les effets de la crise des prix auront pesé à hauteur de 50 milliards d'euros sur les finances publiques

Pour amortir les effets de la crise des prix de l'énergie sur les factures des consommateurs de gaz et d'électricité, différentes mesures de soutien ont été mises en oeuvre par l'État depuis la fin de l'année 2021. Les pertes de recettes subies par les fournisseurs en raison de ces mesures ont fait l'objet de compensations au titre du mécanisme des charges de service public de l'énergie (CSPE) financées par des crédits inscrits à l'action 17 « Mesures exceptionnelles de protection des consommateurs » du programme 345.

Les tarifs réglementés de vente de gaz (TRVg) ont d'abord été gelés par voie règlementaire en octobre 2021 jusqu'à la fin de l'année 2022. Au premier semestre 2023, ce bouclier tarifaire sur les prix du gaz s'est traduit par une limitation de la hausse des TRVg à 15 %. Au 30 juin 2023, le Gouvernement a décidé de mettre un terme à ce dispositif en raison de la baisse des prix. D'après la délibération de la CRE du 11 juillet 2024 précitée, le coût total de ce « bouclier tarifaire individuel » sur les prix du gaz s'est élevé au total à 4,8 milliards d'euros.

En parallèle de ce bouclier tarifaire « individuel », un dispositif destiné aux ménages vivant dans des logements chauffés collectivement au gaz a été instauré par voie règlementaire à compter du mois d'avril 2022 puis prorogé à plusieurs reprises jusqu'à la fin de l'année 2024. Son coût global est estimé à 1,9 milliard d'euros.

En 2022 puis en 2023, un dispositif dit de « bouclier tarifaire » sur les prix de l'électricité a également été instauré pour limiter les effets de la hausse des prix de marché sur les factures des petits consommateurs éligibles aux tarifs réglementés de vente d'électricité (TRVe). Ce dispositif a permis de contenir les hausses moyennes des factures d'électricité des consommateurs éligibles aux TRVe à 4 % en 2022 puis, en 2023, à 15 % en février auxquels se sont ajoutés 10 % supplémentaires au mois d'août. Le coût pour les finances publiques de ce dispositif entre 2022 et 2023 s'est établi à 20 milliards d'euros.

Au coût de ce « bouclier tarifaire » sur les prix de l'électricité peut être ajouté celui qui résulte de la minoration des tarifs de l'accise sur l'électricité (l'ancienne taxe intérieure sur la consommation finale d'électricité ou « TICFE ») à leur niveau minimum autorisé par le droit de l'Union européenne. Cette minoration a été mise en oeuvre en 2022 puis en 2023 avant d'être atténuée en 202438(*) pour une baisse de recettes publiques cumulée estimée à 20 milliards d'euros. En outre, en 2022, le bouclier tarifaire sur les prix de l'électricité a également été financé, à hauteur d'environ 8 milliards d'euros, par le relèvement de 20 TWh du volume d'accès régulé à l'électricité nucléaire historique (Arenh). Une charge qui a reposé entièrement sur l'entreprise Électricité de France (EDF) dont l'actionnariat est devenu 100 % public en juillet 2023.

Comme pour le gaz mais avec retard, un dispositif spécifique appliqué ex post aux consommations électriques dans l'habitat collectif a été mis en oeuvre à compter de la fin de l'année 202239(*) et jusqu'à la fin de l'année 2024. Le coût de ce dispositif est évalué à 0,9 milliard d'euros.

Enfin, en 2023 et en 2024, des mécanismes dits « d'amortisseurs » ont été créés pour soutenir les entités non éligibles au « bouclier tarifaire » sur les prix de l'électricité. Au mécanisme de droit commun s'est ajouté au début de l'année 2023 un dispositif renforcé qualifié de « sur-amortisseur » ciblé sur les très petites entreprises (TPE) non éligibles aux TRVe. Les compensations versées par l'État aux fournisseurs au titre de ces mécanismes d'amortisseurs sont estimées à 2,3 milliards d'euros.

Coût pour les finances publiques des mesures de soutien
aux consommateurs finals d'électricité et de gaz mises en oeuvre
dans le cadre de la crise des prix de l'énergie

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les réponses au questionnaire budgétaire

Au total, les mesures exceptionnelles de soutien aux consommateurs de gaz et d'électricité auront pesé à hauteur de 50 milliards d'euros sur les finances publiques dont 20 milliards d'euros pour le volet fiscal du bouclier tarifaire sur les prix de l'électricité40(*) et 30 milliards d'euros pour les dépenses budgétaires ayant résulté des autres dispositifs.

2. En 2025, des dépenses résiduelles estimées à 337 millions d'euros

L'année 2025 doit être celle de la sortie complète des mesures de soutien exceptionnelles liées à la crise des prix de l'énergie. En effet, la baisse sensible des prix observée sur les marchés de l'énergie ne justifie plus le maintien de ces dispositifs coûteux. Alors que la fiscalité de l'électricité allait mécaniquement remonter à son niveau d'avant crise, ce qui apparaît justifié au regard du croisement entre la sortie de la crise de l'énergie et l'entrée dans une crise budgétaire non moins préoccupante, l'article 7 du présent PLF donne même la possibilité à l'exécutif de l'augmenter significativement en 2025. Une perspective à laquelle la commission des finances du Sénat est opposée.

En dépit de la fin de l'ensemble des dispositifs de soutien, 337 millions d'euros sont néanmoins inscrits sur le projet annuel de performance 2025 à l'action 17 « Mesures exceptionnelles de protection des consommateurs ». Ces dépenses résiduelles correspondent :

- d'une part, pour 285 millions d'euros41(*), aux coûts différés des boucliers tarifaires collectifs correspondant au second semestre 2024 ;

- d'autre part, pour 52 millions d'euros, à des reliquats relatifs aux compensations des boucliers tarifaires individuels (gaz et électricité) évalués par la CRE dans sa délibération du 11 juillet dernier précitée.

II. PROGRAMME 174 « ÉNERGIE, CLIMAT ET APRÈS-MINES » : DES CRÉDITS AFFECTÉS PAR LES CONTRAINTES BUDGÉTAIRES

Le coeur du programme 174 « Énergie, climat et après-mines » est constitué d'aides versées aux ménages pour alléger leurs charges de consommation énergétique (le chèque énergie) et pour soutenir la conversion écologique du parc de véhicules (les aides à l'acquisition de véhicules propres).

D'autres dépenses portées par ce programme concernent notamment :

- l'accompagnement de l'après-mines, centré sur la gestion des garanties sociales et la reconversion économique des bassins miniers ;

- les activités permettant la promotion de la lutte contre l'effet de serre et le changement climatique ainsi que l'amélioration de la qualité de l'air.

En 2025, une évolution de périmètre très substantielle42(*) affecte le programme. Il s'agit du transfert des crédits relatifs au dispositif « MaPrim'Renov » vers le programme 135 « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat »43(*) rattaché à la mission « Cohésion des territoires ».

Par ailleurs, les crédits proposés en 2025 sur le programme 174 « Énergie, climat et après-mines » s'élèvent à 2,4 milliards d'euros en AE et 2,1 milliards d'euros en CP, soit, à périmètre constant, des diminutions respectives de 38,5 % et 26,4 %.

Cette baisse significative des crédits inscrits sur le programme 174 a trois principales origines :

- une diminution de 530 millions d'euros des crédits devant financer les aides à l'acquisition de véhicules propres ;

- une baisse de 180 millions d'euros des crédits de paiement dévolus au chèque énergie en lien avec la réforme de ce dispositif ;

- la non reconduction de l'aide ciblée portant sur la consommation de carburants des actifs ayant besoin de leur véhicule pour se rendre sur leur lieu de travail44(*).

Crédits prévus au titre du programme 174 « Énergie, climat et après-mines »
en 2025 (CP)

(en millions d'euros)

 

2023

(Exécution)

2024

(LFI)

2025

(PLF)

Variation

2024-2025

01- Politique de l'énergie

130,7

182,7

181,2

- 0,8 %

02- Accompagnement transition énergétique45(*)

1 313,0

1 391,0

615,0

- 55,8 %

03- Aides à l'acquisition de véhicules propres

1 697,6

1 501,0

970,5

- 35,3 %

04- Gestion économique et sociale de l'après-mines

267,5

270,2

256,7

- 5,0 %

05- Lutte contre le changement climatique et pour la qualité de l'air

53,5

63,7

78,5

+ 23,2 %

06- Soutien

20,6

1,4

6,2

+ 342,9 %

Total programme

3 482,8

2 863,2

2 108,0

- 26,4 %

Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires

Il est à noter que l'augmentation des crédits prévus au titre de l'action 06 « Soutien » s'explique par l'imputation sur cette action des coûts de la campagne de communication « Sobriété énergétique » qui étaient auparavant financés par redéploiement de crédits.

Enfin, dans le cadre de sa volonté de réaliser 5 milliards d'euros d'économies de dépenses supplémentaires par rapport à sa copie initiale, le Gouvernement a par ailleurs annoncé vouloir réduire de 300 millions d'euros supplémentaires les crédits alloués aux dispositifs d'aide à l'acquisition de véhicules propres. Une partie de ces aides pourrait désormais être financée via le mécanisme des certificats d'économies d'énergie (CEE).

A. UNE RÉFORME INCONTOURNABLE DES MODALITÉS D'ATTRIBUTION DU CHÈQUE ÉNERGIE QUI VA CEPENDANT EN RÉDUIRE LE NOMBRE DE BÉNÉFICIAIRES

1. En 2024, les conditions d'attribution du chèque énergie ont été très profondément perturbées par la fin de la taxe d'habitation sur les résidences principales

Le chèque énergie est un titre spécial de paiement conçu pour aider les ménages les plus modestes à payer leurs factures d'énergie46(*). Il permet aux ménages bénéficiaires de régler leur facture d'énergie, quel que soit leur moyen de chauffage. L'aide moyenne est d'environ 150 euros, avec un montant par chèque qui varie entre 48 et 277 euros. Ce montant était jusqu'à aujourd'hui calculé en fonction du revenu fiscal de référence et de la situation familiale du bénéficiaire (évaluée en fonction du nombre d'unités de consommation47(*)). Le dispositif concerne les ménages qui se situent en-dessous du deuxième décile de revenus, soit 20 % des ménages français

Jusqu'en 2023, le critère de la composition familiale du ménage était apprécié à partir de la base de données afférente à la taxe d'habitation (« base TH ») tenue et mise à jour par la direction générale des finances publiques (DGFiP).

Barème du chèque énergie 2024

 

RFR/UC<5 700€

5 700€<RFR/UC<6 800€

6 800€<RFR/UC<7 850€

7 850€<RFR/UC<11 000€

1 UC

194 €

146 €

98 €

48 €

1 <UC<2

240 €

176 €

113 €

63 €

2 UC ou + 

277 €

202 €

126 €

76 €

Source : réponses de la DGEC au questionnaire budgétaire

La distribution par montants du nombre de chèques émis au titre de la compagne 2024 est présentée dans le graphique ci-après.

Distribution par montants des chèques énergie émis au titre de la campagne 2024

(en nombre de chèques)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses de la DGEC au questionnaire budgétaire

Au titre de la campagne 2024, environ 5,5 millions de ménages doivent bénéficier du dispositif de chèque énergie. Depuis 2022, le nombre de ménages bénéficiaires s'est ainsi érodé d'environ 300 000.

Compte tenu de la suppression de la taxe d'habitation sur les résidences principales au 1er janvier 2023, la liste des bénéficiaires du chèque énergie pour 2024 n'a pas pu être établie selon les critères habituels. Aussi, le Gouvernement de l'époque avait-il décidé de reconduire à l'identique la liste des bénéficiaires du chèque énergie au titre de l'année 2023. Cette situation a engendré de nombreuses réclamations et la dénonciation de situations d'injustices dans la mesure où certains ménages qui n'étaient pas éligibles en 2023 auraient dû avoir droit au bénéfice du chèque énergie en 2024 en raison de l'évolution de leur situation entre 2021 et 2022.

Aussi, en complément, un guichet de demande a-t-il été mis en place afin de permettre aux ménages qui sont éligibles au chèque énergie au titre de leur situation en 2022 (revenus et composition du ménage), mais ne l'étaient pas au titre de leur situation en 2021 ou dont la situation a changé depuis 2021, de réclamer l'attribution du chèque énergie auquel ils ont droit. Cette situation concerne par exemple les jeunes primo-déclarants qui entrent dans la vie active, les ménages qui ont connu une baisse de revenus entre 2021 et 2022 ou les ménages qui ont connu une naissance en 2022. Ouvert le 4 juillet dernier, ce guichet doit rester accessible jusqu'au 31 décembre 2024.

D'après les éléments figurant dans le projet annuel de performances du programme 174, un million de ménages pourraient être concernés par ce système déclaratif. Le taux de recours de ce chèque énergie « quérable » est estimé à seulement 40 % par l'administration. Il pourrait ainsi représenter 60 millions d'euros48(*).

Dans ces conditions, à date, le montant des chèques émis pour la campagne 2024 s'élève à 821 millions d'euros contre 834 millions d'euros en 2023 et 863 millions d'euros en 202249(*), soit une érosion d'environ 5 % en deux ans.

2. Rendue indispensable, la réforme du mode d'attribution du chèque énergie va se traduire en pratique par une baisse du nombre des ménages qui en seront effectivement bénéficiaires

Pour tenir compte des conséquences induites par la suppression de la taxe d'habitation sur les résidences principales, l'article 60 du présent PLF (dont le commentaire figure infra) prévoit une révision des critères du chèque énergie ainsi que de ses modalités d'attribution. Si les modalités techniques de leur prise en compte et de leur collecte par l'administration seront amenées à évoluer, de manière générale, les conditions pour apprécier l'éligibilité et le montant du chèque énergie doivent cependant rester les mêmes, à savoir les revenus d'un ménage et sa composition.

En raison de la suppression de la taxe d'habitation sur les résidences principales, il n'est plus possible d'apprécier le critère de la composition du ménage à partir de la base de données afférente à la taxe d'habitation (« base TH ») qui était tenue et mise à jour par la DGFiP. Le critère de la composition familiale serait ainsi désormais apprécié au travers de la composition du foyer fiscal elle-même prise en compte dans le revenu fiscal de référence des avis d'impôt sur le revenu. L'unité de référence ne serait ainsi plus le ménage et sa composition qui pouvaient être identifiés au moyen de la « base TH » mais le foyer fiscal au sens de l'impôt sur le revenu.

En outre, pour éviter que deux chèques soient envoyés pour les ménages qui vivent ensemble mais déclarent leurs revenus séparément, il est nécessaire de croiser les données correspondant au foyer fiscal extraites des déclarations d'impôt sur le revenu avec l'information relative à l'occupation d'un logement. Cette dernière information serait appréciée à partir du numéro de point de livraison du compteur d'électricité.

Aussi, désormais, l'attribution du chèque énergie reposerait-elle sur les paramètres fiscaux du ménage, c'est-à-dire sur la notion de foyer fiscal, et sur le croisement entre le numéro de compteur et le numéro fiscal du titulaire du contrat de fourniture d'électricité. Ce croisement doit assurer qu'un seul chèque soit envoyé par logement.

Cette révision se traduira malheureusement par une baisse de l'efficacité du dispositif liée à la fin de l'automatisation universelle de son attribution. En effet, le dispositif deviendra partiellement « quérable », c'est-à-dire qu'une partie des foyers éligibles devront faire la démarche de se manifester pour réclamer leur droit. L'expérience de 2024 le démontre, sur cette part « quérable », il est à craindre un phénomène de non recours particulièrement important.

Aussi, contrairement à la situation qui prévalait jusqu'en 2023 du fait de l'automatisation universelle des envois de chèque, certains foyers éligibles ne bénéficieront-ils pas du dispositif. Le nombre de ménages effectivement bénéficiaires du chèque énergie va ainsi sans aucun doute diminuer.

S'il confirme ce phénomène, le projet annuel de performances pour 2025 du programme 174 témoigne cependant d'un certain optimisme, probablement excessif, en indiquant que la réforme du chèque énergie « pourrait conduire à une réduction transitoire du nombre des bénéficiaires la première année de mise en oeuvre ».

Pour l'année 2025, seuls 615 millions d'euros de crédits de paiement sont inscrits sur le programme 174 au titre du chèque énergie, soit une baisse de 180 millions d'euros par rapport aux montants prévus en 2024. En revanche, les autorisations d'engagement prévues pour cette même année 2025 au titre du dispositif restent stables à 900 millions d'euros. Cela signifie que l'administration considère que l'ensemble des nouveaux bénéficiaires non connus de l'ASP se manifesteront et que la réforme ne se traduirait que par un retard dans l'attribution des chèques considérés et dans leur utilisation qui interviendrait pour une part plus importante en année N + 1, c'est-à-dire en 2026 s'agissant de la campagne 2025. Cette hypothèse apparaît cependant irréaliste. Il ne fait pas de doute que la quérabilité partielle du dispositif engendrera une part de non recours et que certains foyers éligibles ne réclameront pas leur chèque.

En outre, le rapporteur observe qu'aujourd'hui, compte-tenu du calibrage du critère de revenus, certains ménages qui se situent sous le seuil de pauvreté (60 % du revenu médian) ne sont pas éligibles au chèque énergie. Dans le futur, elle estime qu'il serait juste de paramétrer le dispositif de façon à s'assurer que tous les ménages situés sous le seuil de pauvreté bénéficient effectivement de ce dispositif de soutien. Toutefois, par esprit de responsabilité et compte-tenu de l'impératif de redresser à court terme l'état préoccupant de nos finances publiques, le rapporteur convient que cette évolution nécessaire ne pourra pas être mise en oeuvre dès 2025.

3. Des frais de gestion de 35 millions d'euros qui interpellent

Le rapporteur ne cache pas son étonnement quant à l'ampleur des frais de gestion du dispositif de chèque énergie. En 2025, ces frais sont évalués à 35 millions d'euros, soit plus de 4 % du coût total. Dans le cadre de la mise en oeuvre de la réforme du mode d'attribution du chèque énergie50(*), ces frais devraient augmenter de 4 millions d'euros (+ 13 %) par rapport à 2024. Aussi, depuis la généralisation du dispositif, ces frais auront été presque multipliés par deux.

Si la hausse très importante de ces frais constatée en 2022 et 2023 s'explique par les nombreux chèques exceptionnels qui ont été mis en place pour accompagner les consommateurs dans le cadre de la crise des prix de l'énergie, il semble qu'une sorte « d'effet cliquet » se soit produit dans la mesure où les coûts n'ont pas retrouvé en 2024 leur niveau antérieur à la crise.

Évolution des frais de gestion constatés (2019-2023) et prévisionnels (2024 et 2025)
du dispositif de chèque énergie

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les projets et rapports annuels de performance de la mission « Écologie, développement et mobilité durables »

La DGEC a souligné au rapporteur que l'ampleur de ces frais de gestion est principalement liée à l'assistance téléphonique auprès des usagers, à l'impression et à l'envoi de 5,5 millions de chèques sur du papier sécurisé onéreux ou encore aux dépenses relatives aux systèmes informatiques permettant de gérer les interfaces entre l'Agence de services et de paiement (ASP) et les fournisseurs d'énergie, en particulier entre le moment où les chèques ont été utilisés par leurs bénéficiaires et où l'ASP verse la compensation financière correspondante au fournisseur.

Avec notamment la création d'une plateforme de demande électronique, les besoins liés au nouveau système d'attribution doivent se traduire par une augmentation supplémentaire de ces frais que le rapporteur espère non pérenne. Elle suivra avec attention les évolutions de ces dépenses au cours des années à venir.

B. 1,2 MILLIARD D'EUROS D'ÉCONOMIES ATTENDUES SUR LES DISPOSITIFS D'AIDES À L'ACQUISITION DE VÉHICULES PROPRES

1. En 2025, par rapport aux dépenses exécutées en 2024, la baisse des crédits affectés aux aides à l'acquisition de véhicules propres pourrait s'élever à 1,2 milliard d'euros

Les crédits relatifs aux aides « historiques » à l'achat ou à la location de véhicules neufs émettant peu de CO2 (« bonus ») ainsi qu'au retrait de véhicules qui émettent beaucoup de CO2 (prime à la conversion)51(*) sont suivis à l'action 03 « Aides à l'acquisition de véhicules propres ». À ces aides historiques s'est ajouté depuis 2024 le dispositif dit de leasing social qui aura coûté, dès sa première année et en dépit d'un nombre de bénéficiaires limité, 650 millions d'euros (voir infra).

Les crédits proposés en 2025 pour financer les aides à l'acquisition de véhicules propres ont été réduits à 970 millions d'euros, soit une baisse de 530 millions d'euros par rapport aux crédits prévisionnels prévus en LFI pour 2024 (1 500 millions d'euros). Cette baisse sera même en réalité plus accentuée du fait de la surconsommation des crédits relatifs aux aides à l'acquisition de véhicules propres. En effet, en raison du succès inespéré du leasing social et du dynamisme supérieur aux anticipations du bonus, les crédits consommés en 2024 au titre de l'action 03 du programme 174 pourraient, selon les prévisions les plus récentes, atteindre 1 846 millions d'euros, soit 346 millions d'euros de plus que les crédits adoptés en LFI pour 2024. En partant de cette base de référence, la diminution des crédits proposés par le PLF pour 2025 atteindrait 876 millions d'euros, soit une baisse de 47 %.

En outre, dans le cadre de son plan d'économies complémentaires de 5 milliards d'euros, le Gouvernement a annoncé vouloir réduire de 300 millions d'euros supplémentaires les crédits inscrits en 2025 au titre de l'action 03. Cette diminution de crédits pourra être compensée par l'utilisation d'un nouveau levier de financement pour les aides à l'acquisition de véhicules propres : les certificats d'économies d'énergie (CEE).

Au total, la réduction du montant de crédits prévus en 2025 au titre des aides à l'acquisition de véhicules propres par rapport aux dépenses exécutées en 2024 s'élèverait ainsi à 1 176 millions d'euros, soit une baisse de 64 %.

Évolution des crédits (CP) consacrés aux aides
à l'acquisition de véhicules propres

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires et les réponses au questionnaire du rapporteur

2. Des dispositifs de soutien « historiques » qui vont devoir être rendus moins attractifs pour réduire les dépenses publiques qu'ils génèrent

D'après les informations fournies au rapporteur par la direction générale de l'énergie et du climat (DGEC), en juillet 2024, la part des voitures neuves qui remplissent les critères d'attribution du bonus s'établissait à 9,3 % tandis qu'au cours des sept premiers mois de l'année, 896 millions d'euros ont été versés pour 192 000 bonus52(*). En 2023, 331 000 bonus avaient été versés53(*) (soit une hausse de 1,5 % en un an) pour un total de 1,4 milliard d'euros, en hausse de 26 % par rapport à 2022.

Au cours des sept premiers mois de l'année 2024, 40 000 primes à la conversion ont été distribuées pour 141 millions d'euros. En 2023, 76 000 primes avaient été attribuées (un chiffre en baisse de 17,4 % par rapport à 2022) pour un montant de 250 millions d'euros.

Nombre de bonus et de primes à la conversion distribués (2018-2023)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire budgétaire

Pour que ces dispositifs d'aides ne génèrent pas en 2025 des coûts supérieurs aux crédits prévus en loi de finances initiale, et ce même si le levier des CEE est mobilisé pour les financer, ils devront nécessairement être significativement révisés et rendus moins attractifs. Alors que l'option de la suppression du dispositif de prime à la conversion est souvent évoquée, des hypothèses de ciblage et de baisse du montant du bonus seront vraisemblablement également nécessaires.

Toujours d'après les éléments transmis par la DGEC, au cours des sept premiers mois de l'année 2024, 178 900 voitures électriques neuves ont été immatriculées en France, contre 157 400 sur la même période en 2023. Leur part de marché a ainsi progressé de 1,7 point pour atteindre 16,9 %.

Part de marché des véhicules électriques54(*) (2011-2024)

Source : direction générale de l'énergie et du climat (DGEC)

Sur cette même période, la part de marché des véhicules hybrides rechargeables a quant à elle décrue de 1 point à 7,8 % pour 82 700 véhicules vendus.

Part de marché des véhicules hybrides rechargeables55(*) (2011-2024)

Source : direction générale de l'énergie et du climat (DGEC)

Jusqu'en 2023, alors que les trois quarts des voitures électriques vendues en France étaient importés et que la même part de la valeur ajoutée totale des batteries était produite par l'industrie chinoise, en pratique, les aides à l'acquisition de véhicules propres financées par les contribuables français revenaient à subventionner l'industrie automobile chinoise et à mettre en danger notre souveraineté. C'est cet état de fait inacceptable que le rapporteur spécial avait dénoncé à l`occasion de l'examen du PLF pour 2023. Elle avait invité le Gouvernement de l'époque à concevoir un dispositif, sur le modèle notamment des mesures mises en place par les États-Unis à l'été 2022, permettant de prendre en compte l'empreinte carbone des véhicules sur l'ensemble de leur cycle de vie et non les seules émissions générées lors de leur usage. Cette méthode, plus respectueuse des enjeux climatiques devait également permettre de privilégier les véhicules produits en France et en Europe, du fait d'un mix énergétique moins carboné qu'en Chine.

Il aura fallu plusieurs mois pour que le gouvernement de l'époque finisse par reconnaître l'urgence du problème et par se ranger aux arguments et aux solutions préconisées par le rapporteur spécial. Par un décret56(*) et un arrêté57(*) du 19 septembre 2023, il avait ainsi mis en place un dispositif permettant de conditionner l'éligibilité au bonus à l'obtention d'un score environnemental calculé, en plus des émissions à l'usage, au regard de l'empreinte écologique de chacune des étapes qui précèdent la mise en circulation du véhicule. Ce score prend donc notamment en compte les matériaux utilisés pour la production (acier, métaux ferreux, aluminium, etc.), la consommation énergétique lors de l'assemblage, l'empreinte écologique des batteries ou encore le transport des véhicules jusqu'à leur lieu de commercialisation. Pour être éligible, un véhicule doit obtenir un score minimum de 60 sur 80. L'application de cette nouvelle méthodologie a été étendue à la détermination de l'éligibilité des véhicules à la prime à la conversion ainsi qu'au nouveau dispositif de leasing social (voir infra).

Désormais, seules les versions de voitures particulières neuves électriques qui figurent sur la liste publiée par l'arrêté interministériel du 14 décembre 2023 modifié, mise à jour tous les mois par de nouveaux arrêtés58(*), traduisant leur atteinte du score environnemental minimal suite à l'instruction de leur dossier par l'Ademe, peuvent bénéficier des aides financées par les contribuables français. Aujourd'hui, la liste comporte un peu plus de 600 modèles de véhicules.

Cette réforme a eu pour effet de sensiblement réduire la part des véhicules neufs éligibles au bonus. Cette part est ainsi passée de 20,1 % en décembre 2023 à 9,5 % en août 2024. Le premier bilan du dispositif est positif. L'administration comme les acteurs du secteur s'accordent à reconnaître son efficacité. D'après le secrétariat général à la planification écologique (SGPE), cette réforme aurait ainsi permis d'accroître la part de marché des véhicules fabriqués en Europe et de réduire celle des véhicules importés d'Asie dans les immatriculations de voitures particulières neuves en France. Ainsi d'après les informations transmises par la DGEC au rapporteur, du fait de cette réforme, « la part de marché des véhicules électriques assemblés en Asie a diminué de 45,0 % en décembre 2023 à 24,8 % en juin 2024, tandis que celle des véhicules assemblés en Europe a augmenté de 45,0 % en décembre 2023 à 53,8 % en juin 2024 ».

Le rapporteur se félicite des bons résultats de cette réforme qu'elle avait appelée de ses voeux un an avant qu'elle ne soit effectivement mise en oeuvre.

3. Le leasing social : un succès inespéré pour un coût considérable

Mis en place au 1er janvier 2024, le dispositif de leasing social permet à ses bénéficiaires d'accéder à des offres de location59(*) de véhicules électriques extrêmement attractives pour des loyers mensuels situés entre 40 euros et 150 euros, soit pour certains véhicules, des montants très nettement inférieurs à l'objectif de 100 euros par mois qui avait été envisagé à l'origine. En 2025, il a concerné les ménages appartenant aux cinq premiers déciles de revenus dépendant de leurs véhicules personnels pour leur activité professionnelle.

Le dispositif de leasing social a rencontré un succès absolument inespéré, allant très au-delà de toutes les anticipations de l'administration comme des constructeurs. Alors que le dispositif avait été lancé sans limite de temps ni de commandes et que les estimations les plus optimistes tablaient sur 10 000 à 20 000 véhicules commandés sur l'année, pas moins de 50 000 demandes ont affluées dès les premiers jours de janvier. En conséquence, le dispositif a dû être suspendu en catastrophe dès février 2024 pour éviter que son coût atteigne des niveaux trop insoutenables pour le budget de l'État.

Le coût pour l'État de chaque dossier représente en effet 13 000 euros, soit, pour 2025, un montant total de 650 millions d'euros.

Compte-tenu de la baisse des crédits prévues au titre des aides à l'acquisition de véhicules propres en 2025, il ne fait aucun doute que le coût associé au dispositif de leasing social devra être réduit en restreignant de manière sensible le montant du soutien apporté par l'État à chaque dossier et en ciblant davantage les bénéficiaires. Une aide limitée à 6 000 ou 7 000 euros par véhicules aurait par exemple vraisemblablement pu permettre d'atteindre l'objectif d'un loyer de 100 euros pour les véhicules d'entrée de gamme.

III. LA CRÉATION D'UN NOUVEAU PROGRAMME PORTANT LES MISSIONS DE LA NOUVELLE AUTORITÉ DE SÛRETÉ ET DE RADIOPROTECTION

A. UN BUDGET CONSTRUIT À PARTIR DE CEUX DE L'ASN ET DE L'IRSN

La fusion de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) a été annoncée le 8 février 2023, et elle a été consacrée par la loi n° 2024-450 du 21 mai 2024 relative à l'organisation de la gouvernance sûreté et de la radioprotection. La loi prévoit ainsi la création d'une nouvelle autorité administrative indépendante (AAI), l'Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR) au 1er janvier 2025.

L'autorité de sûreté nucléaire et
l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire

Autorité de sûreté nucléaire

L'autorité de sûreté nucléaire (ASN) est une autorité administrative indépendante, financé à titre principal par le programme 181 « Prévention des risques », qui assure le contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection. Jusqu'au projet de loi de finances pour 2025, l'action 9 « Contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection » du programme 181 portait les effectifs et les crédits de personnel de l'ASN ainsi que les dépenses de fonctionnement, d'investissement et d'intervention engagées au titre de la réalisation des cinq missions fondamentales de l'ASN : la réglementation, la délivrance des décisions individuelles, le contrôle, l'information du public et l'assistance au Gouvernement en cas de situation d'urgence.

Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire

L'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) est un établissement public à caractère industriel et commercial, rattaché à la mission « Recherche et enseignement supérieur » avant le PLF pour 2025, qui exerce une mission de service publique d'expertise relative à la sûreté nucléaire et à la protection des personnes et de l'environnement contre les rayonnements ionisants. Elle joue également un rôle dans la protection des installations et des transports contre les actes de malveillance.

La loi n°2024-450 du 21 mai 2024 relative à l'organisation de la gouvernance de la sûreté nucléaire et de la radioprotection prévoit une fusion de l'IRSN avec l'ASN pour créer l'autorité de radioprotection et de sûreté nucléaire (ASNR) au 1er janvier 2025.

Source : commission des finances

Les missions de l'ASNR seront les suivantes :

- le contrôle de la sûreté nucléaire, de la radioprotection et des activités nucléaires comportant un risque d'exposition des personnes aux rayonnements ionisants ;

- une mission générale d'expertise, de recherche et de formation dans les domaines du nucléaire et de la radioprotection ;

- participer à l'information du public, et contribuer aux travaux et à l'information du Parlement.

Le programme 235 est doté pour 2025 de 360,5 millions d'euros en AE et de 365,2 millions d'euros en CP, et il est découpé en deux actions, « Personnels oeuvrant pour la politique en matière de sûreté nucléaire et radioprotection (action 01) et « sûreté nucléaire et radioprotection » (action 02).

Crédits du programme 235 entre en 2025

(en millions d'euros)

Programme 235 - Sûreté nucléaire et radioprotection

PLF pour 2025

AE

CP

Action 01 - Personnels oeuvrant pour la politique en matière de sûreté nucléaire et radioprotection

226,5

226,5

Action 02 - Sûreté nucléaire et radioprotection

134,0

138,7

Total

360,5

365,2

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

Le budget de la nouvelle autorité a été déterminé à partir de celui de l'ASN et de l'ASNR.

La loi de finances initiale pour 2024 a ouvert 75,2 millions d'euros de CP pour l'ASN. D'autres charges relatives au fonctionnement de l'ASN sont intégrées dans les programmes supports des ministères économiques et financiers (programme 218), du ministère de la transition écologique (programme 217), et du secrétariat général du Gouvernement (programme 354).

La subvention pour charges de service public (SCSP) de l'IRSN pour 2024, imputée sur le programme 190 de la mission « Recherche et enseignement supérieur », est de 182,6 millions d'euros. L'Institut bénéficie également d'une taxe affectée, la contribution de sûreté nucléaire et de radioprotection (CSRN), assise sur les installations nucléaires de base et plafonnée à 61,1 millions d'euros60(*).

La disparition de l'IRSN en tant qu'entité propre pose d'ailleurs la question de l'avenir de cette contribution. L'article 5 du présent projet de loi de finances proposer ainsi de fusionner la CSRN avec la taxe sur les installations de base, et il a été décidé de ne pas affecter cette nouvelle imposition à l'ASNR.

La première raison est que l'ASNR ne dispose pas de la personnalité morale, et la loi organique relative aux lois de finances du 1er août 2001 réserve la possibilité de percevoir une taxe affectée aux entités bénéficiant de la personnalité morale. En tout état de cause, il n'aurait en effet pas été « sain » de financer le régulateur du nucléaire par une taxe assise sur les activités de l'industrie nucléaire. Le risque aurait été qu'une telle affectation alimente les critiques relatives à l'indépendance de l'ASNR. Le financement de l'IRSN par la CSRN a ainsi été entièrement remplacé par des crédits budgétaires.

Structuration du financement de l'ASN et de l'IRSN en 2024

Source : commission des finances

Au total, les crédits ouverts en 2024 pour l'ASN et l'IRSN - en incluant la CSRN - sont d'environ 325 millions d'euros. Il faut néanmoins préciser que toutes les activités de l'IRSN ne sont pas transférées à l'ASNR : les activités de la direction de l'expertise nucléaire de défense sont transférées au ministère des Armées et des Anciens combattants, et une partie des activités de dosimétrie est confiée au Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (mission « Recherche et enseignement supérieur »).

Après retraitement des périmètres, l'ASN et l'IRSN bénéficient ainsi de 303,4 millions d'euros en 2024, soit 61,8 millions d'euros de moins que ce qui est inscrit pour l'ASNR sur le programme 235.

Ce décalage s'explique de plusieurs manières :

- il y a tout d'abord des coûts relatifs à la revalorisation de certaines catégories de personnels. La loi n° 2024-450 du 21 mai 2024 relative à l'organisation de la gouvernance de la sûreté nucléaire et de la radioprotection prévoit 15 millions d'euros de revalorisation salariale pour les salariés de l'IRSN et 2,2 millions d'euros pour ceux de l'ASN ;

- 2,5 millions d'euros de compensation au titre de la « marge dosimétrie » et de l'écart entre la rebudgétisation de la CRSN à son plafond et son rendement en 2024 ;

- 42,1 millions d'euros de mesures nouvelles, qui ont en partie vocation à supporter les surcoûts liés au processus de fusion. D'après l'administration, « ces moyens ont vocation à permettre à l'ASNR de supporter les coûts conjoncturels liés à la mise en oeuvre de la réforme et de se renforcer sur les enjeux de poursuite d'exploitation du parc nucléaire existant, d'adaptation au changement climatique ainsi que sur les enjeux d'innovation dans les réacteurs nucléaires innovants (SMR - small modular reactors). »

Les principaux investissements en 2025 concerneront, tout d'abord, l'adaptation du centre technique de crise à la nouvelle organisation issue de la fusion. La fusion présente en effet un avantage certain en matière de réactivité lors des situations de crise, mais elle suppose une refonte importante des systèmes existants61(*).

En matière de recherche, les investissements porteront sur le développement d'une installation permettant l'étude des phénomènes physiques mis en oeuvre dans certains systèmes passifs, dont l'utilisation est envisagée dans les petits réacteurs modulaires (SMR), le maintien en condition opérationnelle des plateformes dédiées à l'incendie et aux systèmes de confinement et enfin sur des plateaux techniques dédiés à la recherche en radioprotection.

Une partie de ces mesures nouvelles auront également vocation à compenser la sous-budgétisation de l'IRSN en 2024. En effet, la dotation budgétaire de l'IRSN avait été volontairement sous-calculée de 20,1 millions d'euros sur l'année 2024, afin de consommer les réserves de l'établissement en fin d'année. La trésorerie résiduelle est prévue pour rejoindre le budget général de l'État.

Plus généralement, une augmentation des moyens relatifs à la régulation et à l'expertise du nucléaire était attendue dans le contexte d'une relance du secteur. À cet égard, la dégradation du budget de l'IRSN était une source de préoccupation importante, relevée par la Cour des comptes en 2021 ainsi que par Jean-François Rapin, dans le rapport de contrôle qu'il a consacré à l'Institut62(*). Sans la fusion, il était prévu que le solde du fonds de roulement de l'IRSN atteigne -5,6 millions d'euros en 2025.

Il est possible que la rationalisation des activités puisse permettre des économies dans les prochaines années, mais celles-ci ne sont pas garanties, sachant que la fusion n'a pas été effectuée pour des raisons budgétaires63(*).

Comparaison entre les financements publics de l'ASN et à l'IRSN
en 2024 et les crédits ouverts en 2025 pour l'ASNR

Source : commission des finances

S'agissant des emplois, 2027 ETPT sont demandés pour l'ASNR en 2025. Là aussi, ce plafond d'emploi a été déterminé à partir de l'ASN et de l'IRSN.

En effet, le plafond d'emploi de l'ASN en 2024 est de 470 ETPT, tandis que celui de l'IRSN est de 1654 ETPT. À la somme des deux, il faut d'abord retrancher les transferts vers la direction de l'expertise nucléaire de défense (- 131 ETPT), le commissariat de l'énergie atomique (- 38 ETPT) et le service du contrôle budgétaire et comptable ministériel du ministère de l'écologie (- 1 ETPT). On doit également compter l'effet des schémas d'emplois 2024 et 2025 (+ 9 ETPT) et l'inclusion des doctorants dans le plafond d'emplois (63 ETPT)64(*).

Détermination du plafond d'emploi de l'ASNR

(en ETPT)

Note : DEND : direction de l'expertise nucléaire de défense ; CEA : Commissariat de l'énergie atomique ; CBCBM : contrôle budgétaire et comptable ministériel.

Source : commission des finances

B. LEVER LES OBSTACLES À LA FUSION DE L'IRSN ET DE L'ASN

La date de fusion entre l'ASN et l'IRSN, prévue pour le 1er janvier 2025, fait l'objet de débats. Le directeur de l'IRSN en particulier, entendu en audition par le rapporteur spécial, a souligné que le processus de fusion était particulièrement complexe, et les délais pour la réaliser extrêmement courts.

L'une des difficultés est que l'ASN est un établissement public d'administration (EPA), tandis que l'IRSN est un établissement public industriel et commercial (EPIC), ce qui signifie que les agents de l'ASN relèvent du droit public, tandis que ceux de l'Institut ont un statut de droit privé.

Or, le logiciel de pilotage des dépenses de l'Etat, Chorus, n'est pas adapté pour prendre en charge des agents de droit privé. D'après l'IRSN, « Outre la gestion du personnel et des accords négociés, la gestion de la paie des salariés sous contrat de droit privé (provenant de l'IRSN), le traitement de la TVA incompatibles avec les fonctionnalités actuelles de Chorus, l'intégralité des processus de dépenses et ressources est concerné. »65(*)

L'IRSN signale plus généralement des retards dans la publication des décrets d'application de la loi de fusion, qui pourraient poser des difficultés techniques. À la date du 31 octobre 2024, aucun des décrets prévus, sauf celui relatif à la représentation du personnel, n'a été adressé au Conseil d'Etat. L'IRSN alerte en particulier sur la nécessité que soit pris le plus rapidement possible le décret relatif au transfert des biens, droits et obligations (décret « BDO »).

L'application de la loi n°2024-450 du 21 mai 2024 relative à l'organisation
de la gouvernance de la sûreté nucléaire et de la radioprotection

Certaines dispositions dites « autoportantes » ont vocation à s'appliquer au 1er janvier 2025 sans requérir de décrets d'applications :

- la substitution de l'ASNR à l'ASN et l'IRSN ;

- les attributions générales de l'ASNR, notamment en matière de régulation et de recherche.

D'autres dispositions de la loi renvoient explicitement à des décrets d'application. Ils doivent déterminer les modalités :

- du transfert des biens, droits et obligations de l'IRSN à l'État et au CEA ;

- de l'exercice par l'ASNR des missions pouvant donner lieu à des rémunérations pour services rendus ;

- du transfert des personnels des activités concernant la dosimétrie et la DEND de l'IRSN au CEA et au ministère des armées ;

- des modalités d'application des dispositions transitoires relatives notamment à la représentation du personnel de l'ASNR.

Enfin, certaines dispositions de la loi ne renvoient pas explicitement à des décrets ultérieurs, mais leur application effective nécessite néanmoins l'adoption de textes règlementaires complémentaires, à l'instar de celles relatives à la valorisation des résultats des programmes de recherche.

Source : commission des finances, d'après les réponses de l'IRSN au questionnaire du rapporteur spécial

Ces difficultés sont réelles, mais repousser la date de fusion de l'IRSN et de l'ASN n'est pas une option viable. Le processus est déjà largement engagé, et revenir sur la date choisie signifierait devoir refaire l'ensemble de la maquette budgétaire de la nouvelle autorité. En outre, le maintien des deux entités pendant plusieurs mois pourrait entraîner des surcoûts.

Par ailleurs, ce n'est pas la première fois qu'un EPIC est fusionné avec un EPA. L'Agence de services et de paiement (ASP) a ainsi été créée en 2009 sous la forme d'établissement public à caractère administratif par la réunion du Centre national pour l'aménagement des structures des exploitations agricoles (CNASEA), qui était un EPA, et de l'Agence unique de paiement (AUP), qui était un EPIC. À l'inverse, l'IRSN elle-même est née de la fusion entre un EPA (l'Office de protection contre les rayonnements ionisants) et un EPIC (l'Institut de protection et de sûreté nucléaire). Les difficultés techniques relatives à une telle fusion ne sont donc ni insurmontables ni inédits.

Il convient en revanche de s'assurer que l'ASNR dispose de l'ensemble des moyens nécessaires pour l'accomplissement de ses missions. La nouvelle autorité est mise en place dans un contexte de relance de l'industrie du nucléaire, qui doit permettre à la France de garantir sa souveraineté énergétique sur le long terme. Il est donc essentiel que l'autorité régulatrice puisse, dès la première année de sa création, accompagner les nouveaux projets.

Or, les représentants de l'ASN ont souligné devant le rapporteur qu'il manquait 19,4 millions d'euros dans le budget de la nouvelle autorité pour qu'elle puisse accomplir l'ensemble de ces missions, et ce chiffre a également été confirmé par la direction générale de la prévention des risques.

Toutefois, le montant mentionné ci-dessus repose sur l'hypothèse d'un assujettissement total de l'ASNR à la TVA - c'est-à-dire que l'ASNR, comme l'ASN, ne se verrait pas déduire la TVA de ses acquisitions, et ne collecterait pas la TVA. Cette hypothèse n'est pas confirmée à ce stade. Il est donc possible que l'ASNR bénéficie du régime plus favorable de TVA de l'IRSN, ce qui apporterait environ 20 millions d'euros de recettes à l'AAI, et permettrait de combler les 19,4 millions d'euros manquants.

Un rescrit sur cette question a donc été demandé à l'administration fiscale, et celui-ci devrait être transmis fin novembre selon les dernières informations du rapporteur spécial. Selon les conclusions de ce rescrit, il sera alors nécessaire ou non de modifier le budget de l'ASNR.

Enfin, la construction budgétaire des crédits de titre 2 a été bâtie sur l'hypothèse d'une exonération totale de l'ASNR de la taxe sur les salaires payée par l'IRSN (2,7 millions d'euros). Or, les travaux réalisés dans le cadre de la demande d'un rescrit fiscal à la DGFiP laissent entendre que cette exonération ne pourrait être que partielle. La réponse sera apportée par le rescrit fiscal, qui est attendu début décembre 2024.

IV. LE COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE « FINANCEMENT DES AIDES AUX COLLECTIVITÉS POUR L'ÉLECTRIFICATION RURALE (FACÉ) »

A. LE COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE FACÉ PERMET LE FINANCEMENT « PÉRÉQUÉ » D'AIDES À L'ÉLECTRIFICATION RURALE

Le compte d'affectation spéciale (CAS) « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale » (FACÉ) retrace les aides versées aux autorités organisatrices de la distribution d'électricité - AODÉ (communes, établissements publics de coopération intercommunale, syndicats d'électrification) pour le financement des travaux d'électrification en zone rurale dont elles assurent la maîtrise d'ouvrage66(*).

Le CAS FACÉ permet de verser des aides aux AODÉ afin de financer :

- des travaux d'électrification rurale67(*) ;

- des opérations de maîtrise de la demande d'électricité ;

- des opérations de production d'électricité par des énergies renouvelables68(*) ;

- des installations de production de proximité dans les zones non interconnectées (ZNI)69(*).

Ces aides sont réparties par département sous forme de dotations affectées à l'électrification rurale, selon des critères précisés par voie d'arrêté, par le ministre chargé de l'énergie et après avis du conseil du FACÉ. Cette répartition se fonde sur les évaluations des besoins en travaux d'électrification rurale par département réalisées tous les deux ans. Une fois les dotations réparties par département, elles sont versées aux AODÉ sur la base des projets de travaux présentés.

Le regroupement des AODÉ, et donc de la maîtrise d'ouvrage, au niveau départemental, a été encouragé par le législateur70(*). Les modalités de versement des aides du FACÉ incluent depuis 2013 un dispositif financier d'incitation au regroupement à l'échelle départementale71(*).

Le financement du CAS FACÉ repose aujourd'hui sur des contributions dues par les gestionnaires de réseaux de distribution72(*) et assises sur le nombre de kilowattheures (kWh) distribués à partir des ouvrages exploités en basse tension l'année précédant celle du versement de la contribution.

D'après la direction de la législation fiscale (DLF), la contribution qui sert à financer le CAS Facé présente une grande fragilité juridique au regard du droit de l'Union européenne et un risque de contentieux élevé pour un enjeu financier qui pourrait dépasser le milliard d'euros.

Cette contribution est en effet assise sur des quantités d'électricité et entre ainsi dans le champ du cadre européen harmonisé de taxation de l'énergie. Or, le droit de l'Union européenne n'admet l'institution de taxes indirectes supplémentaires sur les produits soumis à accise que pour des « fins spécifiques ». À ce titre, la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) a explicitement jugé, dans le contentieux sur l'ex-contribution au service public de l'électricité (CSPE), que « les finalités de cohésion territoriale et sociale poursuivies (...), à savoir la mise en oeuvre d'une péréquation tarifaire géographique, [sont des] finalités normalement financées par le budget de l'État, qui ne permettent pas de considérer que la taxe [en cause] poursuivait une finalité spécifique »73(*).

Au surplus, le cadre européen harmonisé ne permet pas de procéder à des modulations infranationales du tarif de l'accise sur l'électricité. Ce principe a été rappelé dans un arrêt de la CJUE en date du 30 mai 2024 (C743/22), dans lequel la Cour précise que : « la directive s'oppose à une législation nationale qui autorise des régions ou des communautés autonomes à fixer des taux d'accise différents pour un même produit et une même utilisation en fonction du territoire où le produit est consommé ». Or en l'espèce, l'article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales prévoit une différenciation du taux de la contribution qui alimente le CAS Facé en fonction de la taille des communes.

Aussi, afin de sécuriser le mode de financement des aides à l'électrification rurale, l'article 7 du présent projet de loi de finances prévoit-il de substituer à la contribution existante l'affectation d'une fraction de l'accise sur l'électricité pour un montant de recettes identique.

B. LE TOTAL DES CRÉDITS DU CAS FACÉ AINSI QUE LEUR DÉCOMPOSITION ENTRE SES DEUX PROGRAMMES RESTENT INCHANGÉS

Depuis 2018 le montant de crédits ouverts en loi de finances sur le CAS est stable à 360 millions d'euros.

Les crédits du CAS par programme en 2025

(en milliers d'euros)

Programme

Exécution 2023

LFI 2024

PLF 2025

793 « Électrification rurale »

AE

334,0

357,0

357,0

CP

362,3

357,0

357,0

794 « Opérations de maîtrise de la demande d'électricité, de production d'électricité par les énergies renouvelables ou de production de proximité dans les zones non interconnectées, déclarations d'utilité publique et intempéries »

AE

6,9

3,0

3,0

CP

5,0

3,0

3,0

Total

AE

340,9

360,0

360,0

CP

367,2

360,0

360,0

Source : projets et rapports annuels de performances du CAS-FACÉ

Le CAS FACÉ se compose de deux programmes, qui se décomposent en actions correspondant aux différents types de travaux financés :

- 99 % des crédits du compte d'affectation figurent au programme 793 « Électrification rurale », doté de 357 millions d'euros en 2025, un montant strictement identique à celui inscrit en 2024.

Les crédits de ce programme servent à financer des aides destinées aux réseaux électriques74(*). La moitié des crédits du programme (187 millions d'euros75(*)) sont dévolus au renforcement des réseaux et un quart (90 millions d'euros) à leur sécurisation76(*) ;

- le programme 794 « Opérations de maîtrise de la demande d'électricité, de production d'électricité par des énergies renouvelables ou de production de proximité dans les ZNI, déclarations d'utilité publique et intempéries », bénéficie, comme en 2024, de 3 millions d'euros en 2025.

Le programme 794 est consacré aux aides à la production d'électricité à partir de sources renouvelables dans les sites isolés, à la production à partir d'installations de proximité dans les zones non interconnectées ainsi qu'aux opérations de maîtrise de la demande en énergie.

EXAMEN DE L'ARTICLE RATTACHÉ

ARTICLE 60

Réforme du chèque énergie

Le présent article prévoit de réviser les critères et les modalités d'attribution du chèque énergie. Cette révision est nécessitée par la suppression de la taxe d'habitation sur les résidences principales qui est intervenue au 1er janvier 2023. Le critère de composition du foyer était en effet apprécié à partir de données déclaratives collectées par la direction générale des finances publiques (DGFiP) pour établir et recouvrer la taxe d'habitation.

L'article propose également que le ministre en charge des affaires sociales ne soit plus signataire de l'arrêté qui détermine les caractéristiques du dispositif de chèque énergie. Or, en pratique le chèque énergie n'est attribué que sur des critères sociaux de revenus et de composition familiale et il présente toutes les caractéristiques d'une aide sociale. Contrairement à sa vocation originelle, son attribution n'a pas de lien direct avec le phénomène de précarité énergétique, sauf de manière incidente si l'on considère qu'il existe une corrélation entre la précarité sociale et la précarité énergétique. Certes il ne peut être utilisé que pour payer des factures d'énergie mais ça n'en fait pas pour autant un véritable dispositif de politique énergétique.

Aussi, parce que ce chèque reste avant toute chose un soutien à caractère social, le rapporteur propose-t-elle par un amendement que le ministre en charge des affaires sociales soit toujours le signataire de l'arrêté qui détermine les caractéristiques du dispositif de chèque énergie.

Le rapporteur spécial propose d'adopter cet article ainsi modifié.

I. LE DROIT EXISTANT : LES CRITÈRES ET LES MODALITÉS D'ATTRIBUTION DU CHÈQUE ÉNERGIE ÉTAIENT DÉPENDANTS DES DÉCLARATIONS COLLECTÉES PAR L'ADMINISTRATION POUR ÉTABLIR ET RECOUVRER LA TAXE D'HABITATION

1. Le chèque énergie et ses modalités de gestion jusqu'à la suppression de la taxe d'habitation

Le chèque énergie est un titre spécial de paiement conçu pour aider les ménages les plus modestes à payer leurs factures d'énergie77(*). Il permet aux ménages bénéficiaires de régler leur facture d'énergie, quel que soit leur moyen de chauffage. Les dispositions législatives du chèque énergie sont prévues aux articles L. 124-1 à L. 124-5 du code de l'énergie. Le fonctionnement de cette aide est par ailleurs précisé par les dispositions réglementaires figurant aux articles R. 124-1 à R. 124-16 du même code.

L'éligibilité d'un ménage au dispositif et le montant du chèque versé sont fonction du croisement de deux critères que sont, d'une part le revenu fiscal de référence du ménage et, d'autre part la situation familiale de celui-ci évaluée en fonction du nombre d'unités de consommation (UC). Plus précisément, ces deux critères sont appréciés dans les conditions suivantes :

- le revenu fiscal de référence (RFR) pris en compte pour une campagne de distribution donnée est celui de l'année N - 2 établi à partir des déclarations d'impôt sur le revenu effectuées en année N - 178(*) ;

- la composition du ménage exprimée en unité de consommation (UC) au sens de la taxe d'habitation au 1er janvier N - 1.

À titre d'exemple, s'agissant de la campagne 2023, l'éligibilité au chèque énergie a été appréciée en fonction des revenus du ménage perçus en 2021 et de sa composition familiale au sens de la taxe d'habitation au 1er janvier 2022.

Pour l'appréciation de l'éligibilité au chèque énergie et pour calculer le montant de l'aide, le critère de la composition du ménage est défini de la façon suivante : la première personne du ménage compte pour 1 UC, la deuxième pour 0,5 UC, et les suivantes pour 0,3 UC79(*).

Jusqu'en 2023, le critère de la composition du ménage était apprécié à partir de la base de données afférente à la taxe d'habitation (« base TH ») tenue et mise à jour par la direction générale des finances publiques (DGFiP). Cette base permettait de reconstituer les ménages par logement, indépendamment du regroupement ou non des membres au regard de l'impôt sur le revenu.

Le dispositif concerne les ménages qui se situent en-dessous du deuxième décile de revenus, soit 20 % des ménages français, c'est-à-dire environ 5,6 millions au total. L'aide moyenne est d'environ 150 euros et varie de 48 à 277 euros.

Barème actuel du chèque énergie

(en euros)

 

RFR/UC<5 700€

5 700€<RFR/UC<6 800€

6 800€<RFR/UC<7 850€

7 850€<RFR/UC<11 000€

1 UC

194 €

146 €

98 €

48 €

1 <UC<2

240 €

176 €

113 €

63 €

2 UC ou + 

277 €

202 €

126 €

76 €

Source : DGEC

En 2021 puis en 2024, la possibilité d'utiliser de manière effective le chèque énergie a été élargie à de nouveaux publics qui n'ont pas de liens directs avec des fournisseurs d'énergie dans la mesure où leurs dépenses d'énergie sont comprises dans leurs charges locatives ou bien celles qu'ils acquittent au titre de leur hébergement.

Ainsi, depuis 2021, la loi d'accélération et de simplification de l'action publique dite « ASAP »80(*) et son décret d'application du 30 décembre 202081(*) permettent à l'ensemble des bénéficiaires du chèque énergie résidant en Établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD), en Établissement d'hébergement pour personnes âgées (EHPA), en résidences autonomie ou en établissements ou en unités de soins de longue durée (USLD), d'utiliser leur chèque énergie, y compris si l'établissement dans lequel ils résident n'est pas conventionné à l'aide personnalisée au logement (APL). Auparavant, parmi ces établissements, seuls ceux qui étaient des logements foyers conventionnés à l'APL pouvaient accepter les chèques énergie de leurs résidents.

Par ailleurs, afin de faciliter l'usage du chèque énergie et d'améliorer son taux d'usage, l'article 231 de la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024 a introduit la possibilité d'utiliser le chèque énergie pour le paiement des charges locatives dans les logements locatifs sociaux, compte tenu du caractère d'intérêt général de ces logements. Depuis le 1er janvier 2024, il est donc possible d'utiliser le chèque énergie pour le paiement des charges locatives incluant des charges d'énergie dans les logements locatifs sociaux82(*).

Enfin, le neuvième alinéa de l'article L. 124-1 du code de l'énergie prévoit une aide spécifique équivalente au chèque énergie pour les occupants de résidence sociales. Cette aide de 192 euros par logement est réclamée au titre de ses résidents par le gestionnaire de la résidence via une attestation. Elle est ensuite répercutée sur les redevances des résidents après déduction par le gestionnaire de ses frais de gestion qui ne peuvent dépasser 5 % de l'aide, soit 9,60 euros.

2. Les modalités d'attribution du chèque énergie ne sont plus applicables depuis la suppression de la taxe d'habitation

Depuis la campagne 2024, du fait de la suppression de la taxe d'habitation sur les résidences principales au 1er janvier 2023, il n'est plus matériellement possible d'établir la liste des bénéficiaires du chèque énergie selon les modalités et les critères qui prévalaient jusqu'ici.

Pour la campagne 2024, le Gouvernement de l'époque avait décidé dans un premier temps que les bénéficiaires du chèque énergie seraient les mêmes que ceux de la campagne 2023. Aussi, dans ces conditions, 5,5 millions de ménages ont reçu leur chèque énergie de manière automatique au mois d'avril 2024.

Cette situation était insatisfaisante à double titre. D'une part, elle a maintenu l'éligibilité au chèque énergie de ménages qui ne répondaient plus aux critères utilisés jusqu'en 2023. Un million de ménages auraient été concernés pour un coût d'environ 100 millions d'euros pour les finances publiques. D'autre part, elle privait de l'attribution du chèque énergie certains foyers qui au contraire auraient dû pouvoir bénéficier de cette aide au regard de l'appréciation de ces mêmes critères. Cette situation concerne notamment les jeunes primo-déclarants qui entrent dans la vie active, les ménages qui ont connu une baisse de revenus entre 2021 et 2022 ou les ménages qui ont connu une naissance en 2022.

En février 2024, des associations de consommateurs83(*) ainsi que la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR) ont alerté les pouvoirs publics quant aux conséquences du modèle dégradé d'attribution du chèque énergie initialement retenu par le Gouvernement de l'époque. Elles ont mis en évidence le fait qu'environ un million de ménages pourraient se retrouver privés de cette aide quand bien même ils auraient dû pouvoir en bénéficier. Face à la polémique, le Gouvernement de l'époque a été contraint d'ajuster le dispositif qu'il avait envisagé à l'origine et, pour régler la question de ces bénéficiaires privés de leur droit légitime, l'administration a mis en place en juillet 2024 un guichet permettant à ces ménages de se faire connaître et de réclamer l'attribution de leur chèque énergie84(*). Ce guichet doit rester ouvert jusqu'au 31 décembre 2024.

D'après les éléments figurant dans le projet annuel de performances du programme 174 « Énergie, climat et après-mines », un million de ménages pourraient être concernés par ce système déclaratif. Le taux de recours de ce chèque énergie « quérable » est estimé à seulement 40 % par l'administration. Ce chèque pourrait ainsi représenter un coût de 60 millions d'euros85(*).

Dans ces conditions, à date, le montant des chèques émis pour la campagne 2024 s'élève à 821 millions d'euros contre 834 millions d'euros en 2023 et 863 millions d'euros en 202286(*), soit une érosion d'environ 5 % en deux ans.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : RÉVISER LES CRITÈRES ET LES MODALITÉS D'ATTRIBUTION DU CHÈQUE ÉNERGIE POUR TENIR COMPTE DE LA SUPPRESSION DE LA TAXE D'HABITATION SUR LES RÉSIDENCES PRINCIPALES

1. La révision de l'appréciation des critères du chèque énergie pour tirer les conséquences de la fin de la taxe d'habitation sur les résidences principales

Pour tenir compte des conséquences induites par la suppression de la taxe d'habitation sur les résidences principales, le présent article prévoit une révision des critères du chèque énergie ainsi que de ses modalités d'attribution aux bénéficiaires. Si les modalités techniques de leur prise en compte et de leur collecte par l'administration seront amenées à évoluer, de manière générale, les conditions pour apprécier l'éligibilité et le montant du chèque énergie doivent cependant rester les mêmes, à savoir les revenus d'un ménage et sa composition.

En raison de la suppression de la taxe d'habitation sur les résidences principales, il n'est plus possible d'apprécier le critère de la composition du ménage à partir de la base de données afférente à la taxe d'habitation (« base TH ») qui était tenue et mise à jour par la DGFiP (voir supra). Le critère de la composition familiale serait ainsi désormais apprécié au travers de la composition du foyer fiscal elle-même prise en compte dans le revenu fiscal de référence des avis d'impôt sur le revenu. L'unité de référence ne serait ainsi plus le ménage et sa composition qui pouvaient être identifiés au moyen de la « base TH » mais le foyer fiscal au sens de l'impôt sur le revenu.

En outre, pour éviter que deux chèques soient envoyés pour les ménages qui vivent ensemble mais déclarent leurs revenus séparément, il est nécessaire de croiser les données correspondant au foyer fiscal extraites des déclarations d'impôt sur le revenu avec l'information relative à l'occupation d'un logement. Cette dernière information serait appréciée à partir du numéro de point de livraison du compteur d'électricité. L'évaluation préalable de l'article souligne à cet égard « qu'un logement ne disposant que d'un point de livraison, ces modalités visent à garantir qu'un seul chèque soit émis par logement ».

Aussi, désormais, l'attribution du chèque énergie reposerait-elle sur les paramètres fiscaux du ménage, c'est-à-dire sur la notion de foyer fiscal, et sur le croisement entre le numéro de compteur et le numéro fiscal du titulaire du contrat de fourniture d'électricité. Ce croisement doit assurer qu'un seul chèque soit envoyé par logement.

Afin de mettre en oeuvre ces modifications d'appréciation des critères du chèque énergie, le I du présent article prévoit de modifier l'article L. 124-1 du code de l'énergie.

Le  de ce I procède ainsi à la modification de la définition du chèque énergie qui figure au premier alinéa de l'article en précisant qu'il permet « aux foyers dont le revenu fiscal de référence est, compte tenu de la composition du foyer fiscal du titulaire du contrat de fourniture d'électricité du logement, inférieur à un plafond ». Cette nouvelle définition substitue la notion de foyer fiscal à celle de ménage et précise que le chèque énergie est attribué au titulaire du contrat de fourniture d'électricité.

Sur ce dernier point, et pour éviter l'envoi de chèques indus, le  du même I ajoute un alinéa à l'article L. 124-1 pour apporter la précision suivante : « un seul chèque est attribué par logement, au titre du seul logement principal ».

Dans la même logique et avec les mêmes intentions, que la modification de la définition du chèque énergie au premier alinéa de l'article L. 124-1, le 1° du III du présent article modifie la rédaction du premier alinéa de l'article L. 124-2 du même code pour indiquer que le montant du chèque est fonction « des revenus et du nombre de personnes composant le foyer fiscal du titulaire du contrat de fourniture d'électricité ».

Afin que les résidents des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes, qui ne disposent pas de numéro de compteur électrique, ne se trouvent pas privées du bénéfice du chèque énergie, le 5° du I du présent article les inclut dans le dispositif d'aide spécifique prévu aujourd'hui pour les résidences sociales de type « logement-foyer » (voir supra).

Enfin, le 2° du III du présent article prévoit de rationaliser la liste des ministres signataires de l'arrêté prévu au dernier alinéa de l'article L. 124-2 qui détermine les caractéristiques du dispositif de chèque énergie. Il est prévu de limiter les signataires au ministre en charge de l'énergie et à celui en charge du budget tandis qu'aujourd'hui l'arrêté doit être signé par les ministres chargés de l'énergie, des affaires sociales et de l'économie.

2. En conséquence, les modalités pratiques d'identification des foyers éligibles et d'attribution des chèques énergies à leurs bénéficiaires par l'Agence de service et de paiement (ASP) seraient modifiées et précisées par les dispositions d'un nouvel article L. 124-1-1 du code de l'énergie

Pour tenir compte des nouvelles modalités d'appréciation des critères du chèque énergie, le présent article prévoit aussi de modifier les modalités techniques selon lesquelles les foyers éligibles seront identifiés et la liste des bénéficiaires établie chaque année par l'Agence de service et de paiement (ASP).

Le dispositif proposé prévoit ainsi que l'ASP, à partir de l'ensemble des foyers qui ont été éligibles au dispositif au moins une année au cours des trois campagnes antérieures, dresse chaque année la liste des bénéficiaires du chèque énergie. Pour dresser cette liste, elle devra vérifier l'éligibilité de tous les foyers qui ont été bénéficiaires au cours des trois années précédentes à partir des données fiscales qui lui auront été transmises par la DGFiP et des informations relatives aux numéros de points de livraison des compteurs électriques livrés par les fournisseurs et les gestionnaires de réseaux de distribution.

Après le croisement de ces informations, l'ASP sera ainsi en mesure d'envoyer de façon automatique les chèques énergie aux bénéficiaires qu'elle connaît déjà dans la mesure où ils ont déjà été éligibles au cours des trois années précédentes.

En revanche, elle ne pourra pas automatiser l'envoi de chèques aux nouveaux bénéficiaires qui ne figurent pas dans ses bases87(*). Aussi, dans ce nouveau système, à l'instar du guichet qui a été mis en oeuvre en 2024, ces nouveaux bénéficiaires devront-ils se manifester sur une plateforme en ligne ou par courrier afin de réclamer leur chèque. Selon les mêmes modalités que les foyers qui figuraient déjà dans ses bases, l'ASP appréciera l'éligibilité effective de ces nouveaux bénéficiaires potentiels au regard des données qui lui auront été transmises par l'administration fiscale, les fournisseurs et les gestionnaires de réseaux de distribution.

Les nouvelles modalités pratiques d'identification des bénéficiaires et d'attribution des chèques énergie par l'ASP seraient ainsi prévues dans un nouvel article L. 124-1-1 du code de l'énergie dont la création est proposée au II du présent article (voir infra).

Le 3° du I du présent article modifie ainsi l'article L. 124-1 du même code pour préciser que l'ASP « émet le chèque énergie et l'attribue à ses bénéficiaires dont la liste est établie selon les modalités définies à l'article L. 124-1-1 ».

Le  du même I supprime quant à lui le huitième alinéa du même article L. 124-1. Celui-ci prévoyait la transmission par l'administration à l'ASP du fichier des ménages éligibles au chèque énergie qui était établi à partir de l'ancienne « base TH » de la DGFiP.

Le II du présent article prévoit donc la création du nouvel article L. 124-1-1 qui définit les nouvelles conditions, décrites supra, dans lesquelles l'ASP établirait chaque année la liste des bénéficiaires.

Le I de ce nouvel article disposerait ainsi que « chaque année, l'ASP établit un projet de liste des bénéficiaires du chèque énergie à partir de la liste des bénéficiaires des trois années précédentes et des demandes enregistrées sur une plateforme mise à disposition par l'ASP ou par courrier ». Il ajouterait que l'ASP « vérifie l'éligibilité au chèque énergie de chaque personne figurant sur ce projet de liste, au moyen des données relatives aux revenus et à la composition du foyer fiscal, que l'administration fiscale lui communique à sa demande, et des données relatives au point de livraison permettant d'identifier le logement principal du foyer fiscal, qui lui sont communiquées, à sa demande, par les fournisseurs d'électricité et les gestionnaires de réseaux ». Ces différents croisements de fichiers nécessitent des développements informatiques conséquents qui induisent une forte hausse des coûts de gestion du chèque énergie qui, pour l'année 2025, vont atteindre 35 millions d'euros. (cf. analyse des crédits du programme 174).

Le II de ce même article préciserait que « l'ASP assure le traitement des données et préserve la confidentialité des informations qui lui sont transmises ».

Enfin, le III de l'article prévoirait que les modalités d'application de ses dispositions seraient définies par un décret en Conseil d'État, pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL).

III. LA POSITION DU RAPPORTEUR SPÉCIAL : UNE RÉFORME INÉVITABLE QUI VA CEPENDANT SE TRADUIRE, AU MOINS À COURT TERME, PAR UNE BAISSE DU NOMBRE DE BÉNÉFICIAIRES

Comme elle l'avait déjà souligné à l'automne 2023 lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2024, le rapporteur observe que les modalités d'identification des bénéficiaires du chèque énergie et d'attribution de cette aide telles qu'elles avaient cours jusqu'en 2023 ne peuvent matériellement plus être mises en oeuvre. Leur révision est ainsi inévitable.

Elle note que cette révision se traduira malheureusement par une baisse de l'efficacité du dispositif liée à la fin de l'automatisation universelle de son attribution. Cette baisse de l'efficacité du dispositif résulte du fait qu'il deviendra partiellement « quérable », c'est-à-dire qu'une partie des foyers éligibles devront faire la démarche de se manifester pour réclamer leur droit. L'expérience de 2024 le démontre, sur cette part « quérable », il est à craindre un phénomène de non recours particulièrement important.

Aussi, contrairement à la situation qui prévalait jusqu'en 2023 du fait de l'automatisation universelle des envois de chèque, certains foyers éligibles ne bénéficieront-ils pas du dispositif. Le nombre de ménages effectivement bénéficiaires du chèque énergie va ainsi sans aucun doute diminuer.

S'il confirme ce phénomène, le projet annuel de performances 2025 du programme 174 témoigne cependant d'un certain optimisme, probablement excessif, en indiquant que la réforme du chèque énergie « pourrait conduire à une réduction transitoire du nombre des bénéficiaires la première année de mise en oeuvre ».

Pour l'année 2025, seuls 615 millions d'euros de crédits de paiement sont inscrits sur le programme 174 au titre du chèque énergie, soit une baisse de 180 millions d'euros par rapport aux montants prévus en 2024. En revanche, les autorisations d'engagement prévues pour cette même année 2025 au titre du dispositif restent stables à 900 millions d'euros. Cela signifie que l'administration considère que l'ensemble des nouveaux bénéficiaires non connus de l'ASP se manifesteront et que la réforme ne se traduirait que par un retard dans l'attribution des chèques considérés et dans leur utilisation qui interviendrait pour une part plus importante en année N + 1, c'est-à-dire en 2026 s'agissant de la campagne 2025. Cette hypothèse apparaît cependant manifestement irréaliste. Il ne fait en réalité pas de doute que la quérabilité partielle du dispositif engendrera une part de non recours et que certains foyers éligibles ne réclameront pas leur chèque. Aussi, par son amendement le rapporteur propose-t-elle de réduire les crédits relatifs aux engagements prévus au titre du chèque énergie en 2025, comme présenté supra dans les développements du rapport relatifs à l'analyse des crédits du programme 174.

Cette conséquence est tout à fait regrettable mais, compte-tenu des données actuellement disponibles, elle semble malheureusement inévitable au moins à court terme. En effet, dans les conditions actuelles, le maintien d'une automatisation complète de la détermination de la liste des foyers éligibles et de l'envoi des chèques supposerait de ne se fonder que sur la base des seules déclarations d'impôt sur le revenu. Cependant, comme précisé supra, ce modèle conduirait à attribuer deux chèques pour les personnes d'un même foyer, vivant dans le même logement, mais qui déclarent leurs revenus séparément. D'après l'évaluation préalable, une telle hypothèse se traduirait par « un doublement du coût du dispositif et à l'attribution d'environ 3 millions de chèques indus ». Cette perspective n'est évidemment pas envisageable.

La DGEC s'est engagée auprès du rapporteur à tout mettre en oeuvre afin qu'un minimum de foyers éligibles ne reçoivent pas leur chèque de manière automatisée. Afin de diminuer le plus possible le taux de non recours qui sera immanquablement élevé pour la partie quérable du nouveau dispositif d'attribution, il est indispensable en effet de réduire autant que possible la part des bénéficiaires qui devront effectuer eux même la démarche de vérifier leur éligibilité et de réclamer leur chèque. Le cas échéant, des mesures de communications ciblées pourrait être envisagées pour les publics les plus susceptibles d'être concernés.

Comme indiqué supra, le présent article propose que le ministre en charge des affaires sociales ne soit plus signataire de l'arrêté prévu au dernier alinéa de l'article L. 124-2 du code de l'énergie qui détermine les caractéristiques du dispositif de chèque énergie. Or, en pratique le chèque énergie, qui n'est attribué que sur des critères sociaux relatifs aux revenus et à la composition familiale des ménages, présente toutes les caractéristiques d'une aide purement sociale. En effet, contrairement à sa vocation originelle, son attribution n'a pas de lien direct avec le phénomène de précarité énergétique, sauf, de manière incidente, si l'on considère qu'il existe une corrélation entre la précarité sociale et la précarité énergétique. Certes il ne peut être utilisé que pour payer des factures d'énergie mais ça n'en fait pas pour autant un véritable dispositif de politique énergétique.

Aussi, parce-que ce chèque reste avant toute chose un soutien à caractère social, le rapporteur propose-t-elle par un amendement que le ministre en charge des affaires sociales soit toujours le signataire de l'arrêté qui détermine les caractéristiques du dispositif de chèque énergie.

Proposition du rapporteur spécial : le rapporteur spécial propose d'adopter cet article ainsi modifié.

EXAMEN PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

En première lecture, l'Assemblée nationale n'ayant pas adopté la première partie du projet de loi, celui-ci est considéré comme rejeté en application du troisième alinéa de l'article 119 du Règlement de l'Assemblée nationale.

En conséquence, sont considérés comme rejetés les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » (et article 60) et donc des programmes 113 « Paysages, eau et biodiversité », 181 « Prévention des risques », 174 « Énergie, climat et après-mines », 345 « Service public de l'énergie », 217 « Conduite et pilotage des politique de l'écologie, du développement et de la mobilité durables », 380 « Fonds d'accélération de la transition écologique dans les territoires » et 235 « Sûreté nucléaire et radioprotection » et le compte d'affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale (FACÉ) ».

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mardi 19 novembre 2024, sous la présidence de M. Stéphane Sautarel, vice-président, la commission des finances a procédé à l'examen du rapport de Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial, sur les programmes « Paysages, eau et biodiversité », « Prévention des risques », « Énergie, climat et après-mines », « Service public de l'énergie », « Conduite et pilotage des politique de l'écologie, du développement et de la mobilité durables », « Fonds d'accélération de la transition écologique dans les territoires » et « Sûreté nucléaire et radioprotection » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » (et article 60) et le compte d'affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale (FACÉ) ».

M. Stéphane Sautarel, président. - Nous examinons cet après-midi le rapport spécial de notre collègue Christine Lavarde sur les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».

Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » sur les programmes « Paysages, eau et biodiversité », « Prévention des risques », « Énergie, climat et après-mines », « Service public de l'énergie », « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durables », « Fonds d'accélération de la transition écologique dans les territoires » et « Sûreté nucléaire et radioprotection » et du compte d'affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale ». - Les crédits proposés dans le projet de loi de finances pour les programmes de la mission « Écologie, développement et mobilités durables », hors dépenses relatives aux transports, à l'information géographique et à la météorologie, sont en baisse par rapport à 2024.

À périmètre constant, en tenant compte du transfert des crédits de MaPrimeRénov' à la mission « Cohésion de territoires » et de l'augmentation substantielle des crédits du programme 345 « Service public de l'énergie », liée à la réforme des accises sur l'énergie et au reflux des prix de marché, les autorisations d'engagement (AE) diminuent de 20,4 % et les crédits de paiement (CP) de 9 %.

Un amendement du Gouvernement déposé à l'Assemblée nationale prévoyait d'amplifier encore cette baisse, à 24,5 % pour les autorisations d'engagement et 14,6 % pour les crédits de paiement. Toutefois, à la suite du rejet de la première partie du projet de loi de finances (PLF), cet amendement n'a pas été examiné en séance publique par les députés.

La mission « Écologie, développement et mobilités durables » contribue donc déjà largement à l'effort de réduction du déficit pour 2025, mais il est sans doute possible de faire encore un peu mieux.

Si le solde du schéma d'emploi de la mission est nul pour 2025, alors qu'il était légèrement positif en 2023 et 2024, les effectifs de certains opérateurs continuent d'augmenter. L'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) gagne ainsi 35 équivalents temps plein travaillés (ETPT), soit une croissance de ses effectifs de presque 27 % en cinq ans.

Les crédits du programme 113, qui met en oeuvre la politique de l'eau, ainsi que les politiques relatives au littoral, au milieu marin et à la biodiversité, diminuent de 24 % en AE et de 13 % en CP. Cette réduction concerne principalement l'action n° 07 « Gestion des milieux et biodiversité », qui regroupe néanmoins toujours près de 95 % des crédits du programme.

C'est principalement le financement de la Stratégie nationale biodiversité qui en pâtit. À l'avenir, il conviendrait de redéfinir la trajectoire financière de cette politique pour l'adapter aux contraintes budgétaires, en identifiant les actions les plus urgentes et les plus efficaces à mener.

S'agissant de la politique de l'eau, l'année 2025 sera la première année d'application du douzième programme d'intervention des agences de l'eau, mais, là encore, on constate dès la première année une mise en oeuvre partielle de la réforme, sans redéfinition de la trajectoire financière.

La subvention pour charges de service public de l'Office français de la biodiversité (OFB) augmente, pour sa part, de 15 millions d'euros dans le PLF 2025. Je reviendrai ultérieurement sur ce cas particulier.

En ce qui concerne la politique de prévention des risques, portée par le programme 181, notre principal problème reste le fonds Barnier, l'abondement de 70 millions d'euros promis par le Premier ministre ne figurant pas dans l'amendement de crédits du Gouvernement. Par ailleurs, le rendement de l'impôt prévu à l'article 235 ter ZE du code général des impôts n'apparaît pas dans les Voies et Moyens annexés au projet de loi de finances, ce qui est incompréhensible alors qu'il doit rapporter environ 450 millions d'euros en 2025, contre 300 millions d'euros en 2024.

Nous proposerons donc un amendement visant à porter à 450 millions d'euros les crédits alloués à la politique de prévention des risques naturels de l'État. Il s'agira bien entendu de rehausser l'enveloppe du fonds Barnier (action n° 14), mais aussi d'abonder l'action n° 10, qui permet de subventionner des travaux dans des communes dépourvues de plan de prévention des risques naturels (PPRN), mais qui peuvent être atteintes, par ruissellement ou en cascade, en cas d'événement climatique extrême.

Nous demandons également la création d'une action nouvelle spécifiquement consacrée à la prévention du retrait-gonflement des argiles (RGA), un risque qui n'est pas pris en charge par le fonds Barnier. Cette idée, esquissée par les rédacteurs du projet annuel de performances du programme 181, n'avait finalement pas été retenue. Nous voulons donc aider l'administration à concrétiser ses projets !

En ce qui concerne les risques industriels, nous nous félicitons que les 387 plans de prévention des risques technologiques (PPRT) soient enfin achevés. Il aura fallu attendre vingt-trois ans après le drame d'AZF... L'enjeu réside désormais dans leur mise en oeuvre effective. Entre 2009 et 2023, 273 millions d'euros ont été engagés et 180 millions d'euros ont été versés pour soutenir cette politique de prévention.

Le Fonds d'accélération de la transition écologique dans les territoires, ou fonds vert, qui nous avait été vendu à grand renfort de communication il y a deux ans, est à l'abandon. Pour 2025, les AE baissent de 60 %, quand les CP augmentent légèrement, de 1,7 %. Ces crédits, que le Gouvernement prévoit par ailleurs de réduire de 216 millions d'euros par voie d'amendement, seront juste suffisants pour payer les dépenses engagées en 2023 et 2024. La capacité à financer de nouveaux projets avec le fonds vert est nulle.

D'après nos informations, des réflexions sont en cours pour fusionner le fonds vert avec la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL) et la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR). Les collectivités éligibles pourraient ainsi s'adresser à un guichet unique pour bénéficier de l'une de ces aides. En pratique, l'étanchéité entre les enveloppes des différents fonds n'a jamais été totale, comme l'a montré mon rapport de l'an dernier.

Le fonds vert devait être plus facile d'accès, entièrement déconcentré, adapté à la réalité des territoires... Trois ans après sa création, il n'a pas tenu sa promesse, sans compter que la diversité des politiques qu'il finance met à mal le principe de spécialité budgétaire.

Je reviens à la proposition de créer un fonds territorial climat, adoptée à l'unanimité du Sénat l'an dernier, et finalement intégrée dans la loi de finances de 2024. On nous dit aujourd'hui que les gels budgétaires n'ont pas permis de le mettre en oeuvre, alors que c'est clairement le retard dans la planification écologique qui n'a pas permis de passer à l'action. Nous voulions de la simplification ; la logique de guichet s'est encore imposée.

Les crédits consacrés aux politiques de soutien aux consommateurs diminuent assez sensiblement, avec une baisse de 38,5 % des AE et de 26 % des CP. Cette évolution s'explique par la diminution de 530 millions d'euros des aides à l'acquisition de véhicules propres, la minoration de 180 millions d'euros des crédits alloués au chèque énergie ainsi que la non-reconduction de l'aide au carburant pour les actifs.

L'article 60 du PLF pour 2025, rattaché à la mission « Écologie, développement et mobilité durables », prévoit une refonte du dispositif du chèque énergie pour tenir compte de la suppression de la taxe d'habitation. Bien qu'inévitable, cette révision se traduira certainement par un phénomène de non-recours assez important, l'attribution du chèque cessant d'être entièrement automatisée. Il ne serait donc pas surprenant de constater des annulations assez importantes de crédits en fin de gestion pour ce dispositif d'aide, dont les frais de gestion - 35 millions d'euros pour 2025 - nous alertent également. Après les surcoûts liés aux chèques exceptionnels et au développement du nouveau système d'attribution, espérons que ces frais pourront être contenus à l'avenir.

Le succès de la politique d'aide à l'achat de véhicules propres a dépassé toutes les attentes, notamment grâce au mécanisme de leasing social ouvert par la loi de finances initiale (LFI) pour 2024. Dès janvier, plus de 50 000 dossiers avaient été déposés, alors que le Gouvernement en attendait entre 10 000 et 20 000 pour l'ensemble de l'année. En conséquence, selon les dernières prévisions, les crédits consommés en 2024 pourraient atteindre 1 846 millions d'euros, soit 346 millions d'euros de plus que les crédits adoptés en LFI pour 2024. Pour 2025, ces crédits s'établiraient à 670 millions seulement, en baisse de 64 %.

La refonte des soutiens publics à la mobilité durable devrait se traduire par la suppression de la prime à la conversion et l'utilisation des certificats d'économies d'énergie (C2E) pour financer le leasing. Le programme 174 ne comprendrait donc plus que les crédits du « bonus écologique », ce dispositif faisant lui-même l'objet d'une diminution de l'aide accordée par véhicule.

Le soutien au consommateur est aussi passé, pendant la crise des prix de l'énergie, par le programme 345 « Service public de l'énergie ». De 2021 à 2024, cette politique de soutien a coûté au total 50 milliards d'euros, dont 20 milliards d'euros pour le volet fiscal du bouclier tarifaire sur les prix de l'électricité et 30 milliards d'euros pour les dépenses budgétaires résultant des autres dispositifs.

En 2024, avec des prix de marché encore assez élevés, le soutien aux énergies renouvelables n'a pas été trop coûteux, l'éolien terrestre ayant même contribué positivement, en rapportant 250 millions d'euros à l'État. L'année 2025 marquera le retour à un rythme plus classique : la Commission de régulation de l'énergie (CRE) a estimé en juillet dernier que les charges de soutien aux énergies renouvelables s'élèveraient à 4,3 milliards d'euros l'an prochain.

La filière biométhane, qui se développe très rapidement, représentera un coût budgétaire de 1,2 milliard d'euros, vingt fois plus qu'en 2018. En revanche, la filière de l'hydrogène ne décolle pas. Aucun des crédits inscrits en LFI de 2024 n'a été consommé. Je propose donc de supprimer les crédits prévus dans le PLF pour 2025 : l'appel d'offres n'a toujours pas été lancé, et il faut compter environ un an entre sa publication et le décaissement des premières autorisations d'engagement.

Le programme 345 portait aussi les crédits de la péréquation tarifaire dans les zones non interconnectées, évalués à 3 millions d'euros pour 2025. Ces derniers seront désormais financés par une fraction du produit des accises sur l'énergie, à l'exception des 70 millions d'euros concernant Saint-Martin et Saint-Barthélemy.

Déduction faite des dépenses de péréquation, en se limitant au périmètre des énergies renouvelables, les charges de soutien au service public de l'énergie s'élèvent donc à 6,7 milliards d'euros pour 2025, un montant quasiment identique à celui qui avait été constaté en 2020. La filière photovoltaïque représente à elle seule 43 % de ce montant.

Le Gouvernement prévoit de réduire de 214 millions d'euros les fonds du programme 345, en annulant les crédits destinés à soutenir la production d'hydrogène décarboné, mais aussi en incitant les producteurs d'énergies renouvelables à réduire leur production en période de prix de marché négatifs. Ces mesures feront l'objet de deux articles additionnels rattachés à la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».

En matière d'énergie, je ne peux pas ne pas évoquer le nucléaire, et la modification de périmètre liée à la création du programme 235. On y regroupe l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN), dont les crédits entraient déjà dans la mission, et l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), dont les crédits figuraient dans la mission « Recherche et enseignement supérieur ».

Cette opération est l'exemple même d'une fusion qui commence par coûter : les crédits de la nouvelle entité - l'Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR) - sont supérieurs de près de 62 millions d'euros à 2024, du fait d'une revalorisation du personnel et d'un certain nombre d'opérations à financer, notamment en matière de systèmes d'information. Il faudra donc veiller à l'évolution de ces crédits, et ce d'autant qu'il manque déjà plus de 19,4 millions d'euros à la nouvelle structure, alors même qu'elle n'est pas encore créée, pour accomplir ses missions. La question pourrait être résolue grâce à des rescrits fiscaux, mais nous en attendons encore la publication.

Par ailleurs, vous avez sans doute tous été mobilisés autour de la diminution conséquente des crédits du fonds Chaleur. L'efficacité de ces crédits ne faisant pas de doute - ils ont un rôle important dans le déclenchement des programmes d'investissement des collectivités territoriales -, je porterai un amendement pour abonder les CP à hauteur de 10 millions d'euros et les AE à hauteur de 300 millions d'euros. Conjuguées à une réorganisation des critères d'attribution, ces évolutions permettront de financer plus de projets.

J'en viens au compte d'affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale », le CAS Facé. Je suis certaine que, sur ce sujet aussi, vous avez été sollicités... Je vous invite à la prudence. Deux décisions de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) viennent fragiliser le mode de financement actuel du CAS Facé : qu'un contentieux éclate, et le système s'écroule ! En revanche, il n'y a rien à craindre du changement de règles de financement. Au lieu de passer par les distributeurs, nous passons par une affectation budgétaire, mais à la même hauteur que précédemment et toujours avec le même différentiel d'une vingtaine de millions d'euros entre les recettes affectées et les crédits ouverts, afin d'apurer la dette. Autrement dit, nous ne faisons que lever le risque juridique sur le financement du CAS dans la durée.

Enfin, le Gouvernement supprime à la hache des crédits d'intervention : c'est le plus facile à faire ! Si nous voulons respecter nos objectifs écologiques sans créer une trop forte dette écologique, il va falloir s'attaquer à la rationalisation du fonctionnement du ministère et de ses opérateurs.

À ce titre, je présente plusieurs amendements ayant valeur de signaux. Je propose notamment la suppression de subventions pour 6 millions d'euros dans la gestion des filières à responsabilité élargie du producteur (REP). Je propose également, alors que les emplois de l'Ademe ont augmenté de 25 % du fait des crédits de relance confiés à l'agence - ces crédits ayant forcément vocation à s'éteindre assez rapidement -, de ne pas accepter un nouvel accroissement d'effectifs et de diminuer les crédits de la structure. J'attire l'attention sur le fait que l'Ademe et les éco-organismes réalisent des publications très similaires et que, ces derniers échappant à tout contrôle budgétaire du Parlement, malgré l'importance des montants qu'ils gèrent, je ne peux intervenir que sur l'Ademe. Je propose enfin de réduire les crédits de l'OFB et de ralentir le rythme de déploiement des Atlas de la biodiversité communale.

M. Pascal Martin, rapporteur pour avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable sur la mission « Écologie, développement et mobilité durables ». - Le nouveau programme 235 répond au besoin d'avoir une lisibilité parfaite sur la création, effective au 1er janvier prochain, de l'ASNR, autorité administrative indépendante (AAI) issue de la fusion de l'IRSN et de l'ASN.

Effectivement, on imagine qu'une fusion, à court ou moyen terme, est source d'économies. Je rappelle néanmoins que la relance de la filière nucléaire supposera des charges croissantes pour ce futur organisme dans les prochaines années. Je citerai notamment le réexamen de sûreté des centrales de 900 et 1 300 mégawatts, la création d'une piscine pour Orano, l'étude de douze projets de petits réacteurs modulaires (SMR), la poursuite du projet Cigéo et le démarrage des travaux de construction du premier des nouveaux réacteurs pressurisés européens (EPR2). Cette charge croissante est incontestable et s'imposera à l'ASNR.

Or, cela a été rappelé, il manquerait aujourd'hui 19,4 millions d'euros pour assurer des dépenses qui, en très grande majorité, sont incompressibles et obligatoires. Je ne voudrais pas que l'objectif premier de la réforme, qu'une majorité de sénateurs a votée, soit de rationaliser les moyens dédiés à la sûreté nucléaire et que les activités de recherche aient à pâtir des réductions de crédits. Nous attendons effectivement des réponses pour des rescrits fiscaux à hauteur de 20 millions d'euros ; s'ils étaient octroyés, le problème serait résolu.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable sur la mission « Écologie, développement et mobilité durables ». - Je concentrerai mon intervention sur les crédits du fonds Chaleur. Le déclenchement de la guerre en Ukraine a engendré une dynamique de la chaleur décarbonée et le fonds Chaleur a augmenté en conséquence. En dépit de cette hausse, le portefeuille de projets pouvant être financés reste très important. Voir ce fonds diminuer de 820 millions d'euros à 500 millions d'euros est donc une mauvaise nouvelle, d'autant qu'avec les futures élections municipales en 2026, l'année 2025 aurait été une année importante pour mener à bien de tels projets au sein des collectivités. J'attends donc les propositions de Mme le rapporteur spécial. Si nous pouvons trouver des améliorations dans le cadre des discussions parlementaires, ce serait une bonne chose.

M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques sur la mission « Écologie, développement et mobilité durables ». - La commission des affaires économiques n'examinera mon rapport pour avis que la semaine prochaine. Mais je tiens à vous remercier de votre invitation à partager ma réflexion avec vous.

Sur le fonds Chaleur, je pense que nous parviendrons, ensemble, à trouver des solutions pour conforter le soutien apporté à ces solutions vertueuses de décarbonation.

Le CAS Facé est un autre sujet très sensible, et j'ai apprécié les remarques de Mme le rapporteur spécial à ce propos. Nous allons faire en sorte, là aussi, de trouver une voie pour ne pas déclencher des contentieux européens inutiles.

En matière de revitalisation des territoires, je rappelle que des engagements avaient été pris pour accompagner les territoires concernés par les fermetures de centrales à charbon. Ce serait important d'y veiller dans le cadre du budget pour 2025...

Le nombre de bénéficiaires du chèque énergie est en très forte diminution. C'est dû, notamment, à la suppression de la taxe d'habitation, qui ne permet plus de croiser certaines informations pour identifier de potentiels bénéficiaires. Je proposerai une solution sur ce sujet.

Je terminerai mon propos en évoquant les taxes. Sur l'électricité, je partage la proposition de revenir au niveau d'avant la crise et, sur le gaz, je suivrai aussi la proposition de Mme le rapporteur spécial. Certes, cela peut concerner des familles aux revenus plutôt faibles, mais le décalage positif est tel pour le gaz que l'évolution est pertinente.

M. Thomas Dossus. - Merci à Mme le rapporteur spécial de sa présentation précise dans un temps limité. Elle parlait d'envoyer des signaux... Je pense qu'ils sont clairs ! Il ne faut pas être trop éco-anxieux quand on regarde l'enchaînement des événements climatiques récents et le budget que l'on met en face pour l'atténuer. C'est clairement un sabotage budgétaire !

En plus de l'abandon du fonds vert, un véritable dénigrement des actions portées par les collectivités territoriales a eu lieu dans la presse. Pourquoi saborder, d'abord, le fonds vert avant de songer à le mutualiser avec la DSIL et la DETR ? Je déplore également l'abandon du fonds territorial climat, pour lequel nous nous étions beaucoup battus.

De nouveau, c'est un budget de capitulation face à ceux qui ont, tout à la fois, les moyens de contribuer et l'empreinte écologique la plus forte. Aucune des pistes de financement d'une politique écologique envisagées par le rapport Pisani-Ferry n'est à l'ordre du jour. Pis, les moyens sont en recul. Tout ce que nous économisons aujourd'hui, nous le paierons bien plus cher dans l'avenir. J'exprime donc, à titre général, un net regret.

M. Vincent Delahaye. - Je partage le point de vue de Mme le rapporteur spécial sur la limitation de la possibilité donnée au Gouvernement d'augmenter l'accise sur l'électricité. On veut encourager l'électricité, décarboner notre consommation d'énergie et réindustrialiser ; dans un tel contexte, une augmentation trop forte du prix de l'électricité ne serait pas un bon signal.

Au sein du groupe d'études Énergie, présidé par Daniel Gremillet, nous avons récemment auditionné le président directeur général d'EDF, qui s'interrogeait sur la nécessité de continuer à soutenir avec des prix garantis la filière photovoltaïque. Quel est l'avis de Mme le rapporteur spécial sur le sujet ? Ne pourrait-on pas honorer les contrats existants et en rester là ?

M. Marc Laménie. - Merci, madame le rapporteur spécial, pour la présentation du premier rapport sur la mission « Écologie, développement et mobilité durables » qui, cela a été souligné, présente des masses financières importantes. Les opérateurs semblent très nombreux. À combien sont-ils estimés, pour quels ETP ?

Mme Florence Blatrix Contat. - À mon tour, je remercie Mme le rapporteur spécial pour son rapport très étayé. Plus d'un an après la présentation de la planification écologique par le Président de la République, nous en sommes au renoncement... Certes, nous saluons le fait qu'on limite la baisse du fonds Chaleur, mais le sacrifice du fonds vert - il est supprimé deux ans après sa mise en place - prive les collectivités territoriales de visibilité. Autre sacrifiée : la stratégie nationale pour la biodiversité, alors même qu'elle est essentielle.

Je partage les regrets exprimés sur la trop faible utilisation du chèque énergie. Nous attendons les propositions. Il a été question du coût de ce chèque énergie : s'agit-il de coûts sur une seule année ou de coûts récurrents ?

Sur les dispositifs d'aide à l'acquisition des véhicules propres, l'impact carbone des véhicules a-t-il été pris dans son ensemble ? Autrement dit, quid des véhicules propres venant de l'autre bout du monde ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Ce rapport me paraît exhaustif, synthétique et précis sur un pan assez large de la mission. On peut regretter les montants de crédits dont nous disposons. Mais nous avons aussi pu constater un certain manque de cohérence dans la gestion du fonds vert avec, notamment, des actions émargeant à différents programmes.

En outre, on a assez souvent entendu dans l'hémicycle que les règles en matière de dotations variaient d'un département à l'autre, alors même que ces dotations reposent sur les mêmes textes juridiques. Cela justifie-t-il une réduction des moyens ? Oui, mais pas exclusivement. Cela impose-t-il de faire converger ces crédits vers des objectifs de verdissement des investissements portés par la puissance publique ? Oui, certainement, d'ailleurs, avec une meilleure coordination et en recherchant la simplification. C'est en tout cas une préoccupation réelle.

En ce qui concerne la prévention des risques, les rapports commis par le Sénat au fil du temps doivent conduire à trouver une réponse. Le Gouvernement doit entendre ce que nous proposerons pour enclencher un effort supplémentaire. Il y a une vingtaine d'années, Nîmes a connu de fortes inondations, et la ville a su mettre en place des dispositifs dont elle recueille aujourd'hui les fruits.

Entre Christine Lavarde et les rapporteurs pour avis, j'ai noté une convergence de vues, et nous tenterons de rester ambitieux, même si les crédits affichés sont en baisse. Il faut simplifier les dispositifs inutilement coûteux et privilégier les bons investissements, qui répondent davantage aux préoccupations environnementales des Français.

- Présidence de M. Claude Raynal, président -

Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial. - En ce qui concerne le soutien à la filière photovoltaïque, les mesures liées aux tarifs étant d'ordre réglementaire, il sera possible d'en prendre dès le début de l'année 2025. Des travaux actuellement menés par la direction générale de l'énergie et du climat (DGEC) vont dans ce sens. Pour autant, ces décisions n'auront aucun impact sur le budget 2025, puisque l'attribution d'un tarif dépend de la date de demande complète de raccordement. Ainsi, les charges de service public diminueront dans le futur. Je rappelle que les dépenses du programme 345 sont liées à des activités des années antérieures. Il faudra notamment aligner tous les tarifs sur ceux qui sont les plus bas.

Monsieur Laménie, vous trouverez le détail des effectifs des opérateurs dans le « jaune budgétaire ». Cette politique publique a une spécificité : un certain nombre d'établissements et d'organismes font cohabiter des agents de l'État et des agents de collectivités locales.

En ce qui concerne l'attribution du chèque énergie et son coût de fonctionnement, l'étiage s'élève à 20 millions d'euros, en raison notamment du coût de l'impression sur des titres sécurisés. Nous faisons face à un ressaut d'environ 15 millions d'euros, qui devrait diminuer les prochaines années, quand les développements informatiques auront été menés à leur terme. Par ailleurs, nous avons considéré toutes les mesures qui pourraient permettre une concomitance entre la déclaration d'éligibilité et la récupération de l'information du point de livraison : c'est strictement impossible d'y parvenir. Nous avons interrogé les services fiscaux et des problèmes techniques se posent.

Enfin, j'ai consacré un long développement à l'impact carbone des véhicules électriques dans mon rapport. Il y a deux ans, j'avais prôné une réorientation des aides dédiées au soutien de la mobilité durable. Je n'avais pas été entendue en 2022, mais avais fini par l'être en 2023. Fin 2023, l'écoscore a été mis en place et, aujourd'hui, les véhicules éligibles à un bonus doivent obtenir la note de 60 sur 100. Ainsi, les caractéristiques globales des véhicules sont bien prises en compte. Je ne m'interdis pas de déposer des amendements complémentaires pour parfaire le dispositif.

M. Hervé Maurey, rapporteur spécial de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » sur les programmes « Infrastructures et services de transports » et « Affaires maritimes, pêche et aquaculture ». - L'essentiel des investissements de l'État dans les infrastructures de transport passe par l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afit France). La loi du 24 décembre 2019 d'orientation des mobilités (LOM) avait prévu la trajectoire de dépenses de l'Agence jusqu'à 2023. En l'absence de nouvelle loi de programmation, il n'existe plus de trajectoire pluriannuelle d'investissement pour ces infrastructures.

Afin de contribuer à l'effort nécessaire de redressement de nos finances publiques, d'importantes économies vont être réalisées, et ce dès 2024, puisque le projet de loi de finances de fin de gestion (PLFG) prévoit de réduire de 393 millions d'euros les moyens affectés en 2024 à l'Afit France. L'effet de cette baisse sur le budget de l'Agence est en partie atténué par le versement de 188 millions d'euros par les sociétés d'autoroutes, que ces dernières refusaient de régler depuis 2021 ; j'y reviendrai.

En 2025, l'effort d'économies sera nettement plus important puisque le PLF prévoit déjà de réduire de 750 millions d'euros les moyens de l'Afit France par rapport aux montants alloués en LFI de 2024. Par ailleurs, le Gouvernement souhaite accentuer cet effort en baissant encore ces moyens de 60 millions d'euros. Il faut rappeler que les ressources financières de l'Agence avaient nettement augmenté en 2024. Ainsi, en 2025, les investissements de l'État dans les infrastructures de transport retrouveraient globalement leur niveau de 2023, soit environ 3,7 milliards d'euros.

Ce budget a été calibré pour permettre d'honorer les restes à payer pour 2025, liés aux programmes déjà engagés pour lesquels des appels de fonds étaient prévus l'an prochain. Les projets qui n'étaient pas engagés avant 2025 ne pourront pas être financés. Cette situation se traduira notamment par un décalage dans le temps de la réalisation d'opérations prévues dans les volets « transport » des contrats de plan État-régions (CPER), alors que les avenants correspondants viennent tout juste d'être signés. Ce ralentissement de la mise en oeuvre des CPER sera vraisemblablement amplifié par la situation financière des collectivités, notamment par celle des régions, qui seront sûrement appelées à revoir leur participation à la baisse.

Les sociétés d'autoroutes, en conflit avec l'État au sujet de l'indexation de la taxe d'aménagement du territoire (TAT), retenaient en otage l'Afit France depuis trois ans, en refusant de payer une contribution annuelle de 60 millions d'euros. Après avoir été déboutées en première instance, ces sociétés ont dû verser à l'Agence les sommes qu'elles lui devaient pour 2021, 2022 et 2023, soit 188 millions d'euros. Toutefois, elles ont fait appel de la décision et ont de nouveau refusé de payer l'échéance pour 2024. Le sujet est donc encore loin d'être clos.

Concernant les crédits prévus pour le programme 203, une logique globale de reconduction des crédits de 2024 a prévalu, selon un principe de continuité des services publics, qui s'appliquera avec difficulté puisque l'inflation n'a pas été prise en compte.

Nous constatons une exception notable à ce principe : les investissements d'entretien et de régénération dans les infrastructures déjà existantes. Compte tenu de l'état de dégradation inquiétant de ces réseaux, qu'ils soient ferroviaires, routiers ou fluviaux, ces investissements ont été sanctuarisés et vont progresser en 2025 à un rythme supérieur à l'inflation, ce qui représente plutôt une bonne nouvelle. En effet, les crédits actuels ne permettent même pas d'enrayer la tendance à la dégradation. Les crédits alloués à l'entretien des ponts routiers, insuffisants en 2024, devraient augmenter en 2025.

M. Jean-Baptiste Olivier, rapporteur spécial de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » sur les programmes « Infrastructures et services de transports » et « Affaires maritimes, pêche et aquaculture ». - Concernant le domaine ferroviaire, deux évolutions me semblent notables. D'abord, le PLF prévoit l'ouverture de 797 millions d'euros de crédits pour financer un contrat de location de matériel roulant, qui doit permettre de renouveler les rames de trains de nuit. Ensuite, les soutiens consacrés au fret ferroviaire et plus particulièrement à l'aide à l'activité de wagon isolé augmenteront de 30 millions d'euros.

Le rapport d'information sur la SNCF et le système ferroviaire de MM. Hervé Maurey et Stéphane Sautarel, déposé en mars 2022, a été précurseur pour identifier et évaluer le manque d'investissement dans la régénération et la modernisation du réseau ferroviaire. Depuis, leurs constats et recommandations ont été repris par un rapport du Conseil d'orientation des infrastructures (COI), puis par la Première ministre un an plus tard. L'État a pris l'engagement de revaloriser progressivement les investissements de régénération et de modernisation du réseau. À l'horizon 2027, cette revalorisation doit atteindre 1,5 milliard d'euros : 1 milliard d'euros en régénération et 500 millions d'euros en modernisation.

À la demande de l'État, la SNCF s'est engagée à financer intégralement cette montée en puissance des investissements dans le réseau jusqu'en 2027. Cette modalité de financement présente l'avantage, particulièrement dans les conditions actuelles, de ne pas peser sur les finances publiques. Cependant, elle n'est pas viable sur le long terme et un nouvel équilibre devra être trouvé, pour plusieurs raisons.

Premièrement, pérenniser cette modalité de financement conduirait à accroître dans des proportions déraisonnables le lien de dépendance financière entre l'opérateur de transport historique qu'est SNCF Voyageurs et le gestionnaire d'infrastructures, SNCF Réseau, dans un univers qui devient concurrentiel.

Deuxièmement, SNCF Voyageurs financerait un réseau utilisé aussi par ses concurrents, qui ne seraient pas astreints à pareille obligation.

Surtout, en pesant sur les résultats de SNCF Voyageurs, ce mode de financement pourrait à terme contraindre les capacités d'investissement de la filiale et avoir un effet inflationniste sur le prix des billets, nuisant ainsi à sa compétitivité face à la concurrence.

En fin d'année dernière, la Société du Grand Paris a été rebaptisée Société des grands projets (SGP), et ce changement de nom n'est pas anodin. Il accompagne une transformation plus profonde des missions de cet établissement, qui va désormais pouvoir accompagner les collectivités sur l'ensemble du territoire, dans la conception, la maîtrise d'ouvrage et le financement des projets de services express régionaux métropolitains (Serm). La Société a déjà signé cinq conventions de financement à ce titre.

Par ailleurs, Voies navigables de France (VNF) a actualisé son contrat de performance à la fin de l'année dernière. Sa trajectoire pluriannuelle d'investissement a été revalorisée afin d'accélérer la régénération et la modernisation du réseau fluvial existant, qui a souffert pendant des décennies d'un sous-investissement chronique. Contrairement à ce qui avait été prévu, le Gouvernement vient de décider de diminuer les effectifs de VNF de 37 ETP sur 4 028, ce qui représente une baisse d'1 %.

Concernant cet opérateur, deux problématiques méritent notre attention et des évolutions seront sans doute nécessaires dans les années à venir. Il faudra réfléchir aux règles relatives à la redevance hydraulique, principale ressource propre de l'établissement, et aux modalités de financement de nouvelles demandes adressées à VNF en matière de prévention des inondations. En effet, les missions de l'opérateur dépassent aujourd'hui ses missions traditionnelles de transport.

J'en viens aux crédits du programme 205 « Affaires maritimes, pêche et aquaculture », qui baisseront sensiblement en 2025, pour plusieurs raisons. D'abord, des dispositifs de soutien aux entreprises de transport maritime sont supprimés, notamment au travers d'un ciblage des exonérations de charges sur le transport de passagers. Ensuite, il faut noter la disparition du fonds d'intervention maritime, qui participait à financer des projets portés par les collectivités locales. Enfin, la subvention annuelle à la Société nationale de sauvetage en mer (SNSM) baisse de 2,6 millions d'euros.

Ces mesures d'économies s'expliquent toutes par la situation désastreuse de nos finances publiques. Leurs effets devront néanmoins être surveillés dans la durée, notamment en ce qui concerne la compétitivité du pavillon maritime français, qui a été soutenue par les dispositifs d'exonération de charges patronales ces dix dernières années.

En baisse relative, les crédits des programmes 203 et 205 sont très largement préservés et permettent d'assurer l'entretien indispensable de nos infrastructures de transport. Nous proposons donc de les adopter.

M. Vincent Capo-Canellas, rapporteur spécial de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » sur le programme « Expertise, information géographique et météorologie » et sur le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ». - Le programme 159 regroupe les subventions pour charges de service public (SCSP) du Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema), de l'Institut national de l'information géographique et forestière (IGN) et de Météo-France.

Des épisodes récents et malheureusement de plus en plus récurrents nous montrent à quel point nous avons besoin que Météo-France soit au rendez-vous. Je vois donc d'un bon oeil la stabilisation de ses moyens financiers et de ses effectifs en 2025. Je vous rappelle que, pendant dix ans et jusqu'en 2023, l'établissement avait subi une cure d'amaigrissement significative et qu'il ne fallait pas aller plus loin.

Je voudrais insister sur l'IGN, qui se retrouve dans une situation d'impasse budgétaire. L'année dernière déjà, l'établissement ne pouvait pas faire adopter son budget et, à mon initiative notamment, la loi de finances de fin de gestion (LFG) avait permis d'attribuer une majoration de 4 millions d'euros de sa subvention. L'analyse partagée alors par l'établissement et ses tutelles faisait état d'une difficulté passagère liée à des financements promis par certains ministères, qui n'avaient pas été honorés dans les délais anticipés. L'IGN réalise en effet des prestations pour d'autres ministères au titre de grands programmes.

Cependant, il apparaît cette année que les difficultés financières de l'établissement sont plus graves et structurelles. Un rapport de l'inspection générale de l'environnement et du développement durable (Igedd) réalisé l'été dernier a démontré un déficit structurel de 15 millions d'euros par an des missions de base de l'établissement, qui ont vocation à être couvertes par la SCSP. L'augmentation des coûts de production de ces missions et la mise à disposition gratuite des données publiques de l'IGN ont creusé ce déficit dans des proportions aujourd'hui insoutenables.

Ces dernières années, cette problématique était masquée par les avances reçues par l'établissement dans le cadre de sa participation aux grands projets financés en dehors de sa SCSP.

Dans les conditions actuelles, l'IGN aurait du mal à faire adopter par son conseil d'administration un budget pour 2025, l'impasse étant clairement indiquée. D'après les analyses de ses services financiers, l'Institut pourrait ne plus être en mesure d'assurer la paye de ses agents à partir du mois d'octobre 2025. L'inquiétude est grande et je poursuivrai mes investigations avec le Gouvernement pour tenter de trouver une solution.

En 2025, un effort substantiel a également été demandé au Cerema, de l'ordre de 10 millions d'euros si l'on tient compte de la baisse prévue de sa subvention et de la hausse des charges résultant d'obligations décidées par l'État.

Je voudrais rappeler que le Cerema a réalisé ces dernières années ce que l'État n'a jamais fait : une réforme structurelle de ses missions. Après avoir passé en revue toutes les tâches qu'il réalisait, il a abandonné toutes celles pour lesquelles d'autres acteurs, privés ou publics, pouvaient tout aussi bien intervenir. Le Centre a ainsi réduit de 25 % ses effectifs et ses dépenses, dans un effort considérable de bonne gestion. Il est paradoxal de demander les efforts les plus conséquents aux meilleurs élèves. De plus, les crédits de personnel du ministère de l'administration centrale progressent de près de 4 %, prenant en compte les mesures nationales qui conduiront à majorer les charges, dont celles du Cerema. L'administration bénéficie donc d'une augmentation de 4 %, qu'elle refuse à l'établissement public placé sous sa tutelle. Entre un État qui ne se réforme pas et un opérateur dont il pourrait s'inspirer, ce deux poids deux mesures semble particulièrement critiquable.

J'en viens au budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » (Bacea), dont les recettes dépendent du trafic. Si ce dernier a retrouvé ses niveaux d'avant la crise du covid, cette évolution doit être nuancée tant les difficultés se font sentir sur les vols intérieurs. En effet, le trafic intérieur ne représente que 74 % de son niveau d'avant la crise et se trouve sur une trajectoire déclinante.

Cette situation ne manquera pas d'être aggravée par le projet du Gouvernement d'augmenter de 1 milliard d'euros la fiscalité sur le transport aérien. Tel qu'il a été annoncé, le projet se traduirait par des plans sociaux pour les compagnies aériennes et réduirait la connectivité des territoires en métropole et en outre-mer. Pour atténuer ces effets récessifs, il m'apparaît nécessaire, a minima, de réduire la hausse prévue pour les vols intérieurs et à destination des territoires ultra-marins.

De plus, le projet annoncé signerait l'arrêt de mort en France de l'aviation à la demande, dite « aviation d'affaires », entraînant d'importantes destructions d'emplois. En effet, cette augmentation de la taxe reviendrait à doubler les tarifs, ce qu'aucun marché ne peut supporter.

Le transport aérien sera aussi confronté en 2025 à une hausse sensible des redevances aériennes, qui vont notamment inclure les coûts du dernier protocole social de la direction générale de l'aviation civile (DGAC), que je vous ai présenté en octobre dernier dans le cadre d'une mission de contrôle. Ces redevances visent aussi à rattraper les conséquences de la crise sanitaire et devraient atteindre le niveau exceptionnellement élevé de 2,1 milliards d'euros en 2025.

Les charges de personnel du Bacea seront fortement affectées par les mesures catégorielles comprises dans le nouveau protocole social. Ce protocole m'était apparu comme la moins mauvaise des solutions à court terme, afin de poursuivre les réformes amorcées récemment par la direction des services de la navigation aérienne (DSNA). Son coût sera cependant très élevé : 100 millions d'euros par an d'ici à 2027.

Une des mesures prévues dans le protocole ne figure pas dans le PLF, pour ne pas l'alourdir. Cette mesure n'ayant pas été examinée à l'Assemblée en première partie, il reviendra sans doute à un sénateur de proposer qu'on s'y attarde. Il s'agit de la création d'un corps unique de contrôleurs aériens, qui constitue une mesure centrale du dialogue social. Cette perspective nécessite la mise en oeuvre d'un plan de requalification des techniciens supérieurs des études et de l'exploitation de l'aviation civile (TSEEAC) dans le corps des ingénieurs du contrôle de la navigation aérienne (ICNA). Il a été convenu de cette mesure avec l'ensemble des syndicats et il ne faut pas manquer à la parole donnée. L'attractivité de ce plan de requalification nécessite de prendre une mesure législative ; j'y reviendrai.

Depuis 2024, la trajectoire pluriannuelle des investissements du Bacea a été réévaluée à la hausse. De grands programmes de mise à niveau informatique et numérique continuent de se déployer. Dans le même temps, je l'avais souligné devant la commission, l'ensemble des infrastructures de base ont une dette technique, ce qui nécessite de fournir un effort d'investissement pour éviter l'obsolescence et la dégradation, ce qui explique l'augmentation des dépenses d'investissement observée en 2025.

Enfin, après avoir culminé à 2,7 milliards d'euros en 2022, la dette du Bacea a amorcé un repli en 2023. Elle pourrait passer sous la barre des 2 milliards d'euros l'année prochaine et la DGAC a pour objectif qu'elle soit inférieure à 1,5 milliard d'euros à l'horizon 2027. Avant la crise du covid et l'effondrement du trafic, cette dette représentait moins de 700 millions d'euros. La volonté de la faire baisser est à saluer.

Je souhaite que la commission propose au Sénat d'adopter les crédits du budget annexe et de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ». Cependant, j'ai quelques regrets, dont l'accumulation de taxes sur le secteur aérien et la situation de l'IGN.

M. Philippe Tabarot, rapporteur pour avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable sur les crédits relatifs aux transports ferroviaires, fluviaux et maritimes. - La responsabilité face au contexte a guidé mes travaux préparatoires et je n'ai pas déposé d'amendements visant à créer de nouvelles dépenses ou des baisses de fiscalité, contrairement aux années précédentes. Je n'ai donc pas proposé de moyens supplémentaires pour la modernisation pourtant indispensable du réseau ferroviaire et pour l'Autorité de régulation des transports (ART), notre gendarme du rail et des autoroutes dont les missions se sont considérablement développées. Je n'ai pas non plus proposé de suramortissement fiscal pour l'acquisition d'équipement ferroviaire et de matériel roulant peu polluant, alors que la décarbonation est essentielle, ni de baisse de la TVA dans les transports du quotidien, qui viendrait pourtant donner une bouffée d'oxygène aux autorités organisatrices de la mobilité (AOM).

En revanche, il me semble nécessaire de flécher davantage certaines recettes fiscales vers le secteur des transports, qui reçoit trop peu de financements alors que sa charge fiscale s'alourdit sans cesse. La distorsion est peu compréhensible. À cet égard, la diminution de l'affectation de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) à l'Afit France d'un peu plus de 700 millions d'euros paraît trop brutale, et je souhaiterais revenir au moins en partie sur cette mesure.

Le dispositif envisagé par le Gouvernement sur la taxe de solidarité sur les billets d'avion (TSBA) est perfectible et deux orientations semblent possibles. D'une part, nous pourrions transformer cette augmentation pérenne en mesure exceptionnelle. D'autre part, si la mesure devait rester pérenne, une partie des bénéfices pourrait profiter au secteur des transports, notamment à l'Afit France et, pour le secteur aérien, à un crédit d'impôt sur les carburants d'aviation durable.

Il me paraît également pertinent de pérenniser la possibilité pour les employeurs de prendre en charge 75 % des abonnements de transport de leurs salariés au lieu de 50 %.

Enfin, le Gouvernement a déclaré être ouvert à ce que nous portions une augmentation raisonnable du versement mobilité (VM) à deux conditions : financer une augmentation de l'offre par le biais des Serm et assurer une concertation avec les employeurs. J'envisage donc de proposer une augmentation du taux de plafond du VM pour les intercommunalités ayant obtenu la labélisation d'un Serm et de créer une part de VM régionale, ce qui faciliterait le financement des investissements dans le transport ferroviaire.

En dépit de ces propositions, 2025 sera une année blanche pour le réseau ferroviaire. La conférence nationale sur le financement des mobilités et la conférence sur le financement des Serm, qui auront lieu en début d'année, nous permettront, je l'espère, de trouver d'autres sources de financement pour lutter contre le vieillissement de nos infrastructures. Je pense notamment aux recettes du marché carbone et aux concessions autoroutières quand les contrats arriveront à leur terme.

M. Olivier Jacquin, rapporteur pour avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable sur les crédits relatifs aux transports routiers. - Je me focaliserai sur deux sujets qui me tiennent à coeur : l'avenir du financement des infrastructures de transport et les mobilités en zones peu denses.

Je ne reviendrai pas sur les propos de Philippe Tabarot relatifs à l'idée d'attribuer une part de VM aux régions, avec lesquels je suis en accord. Mes propositions sont modérées du point de vue des dépenses.

D'abord, en matière d'infrastructures de transport, ce PLF marque une rupture. Les recettes de l'Afit France, qui commençait enfin à entrevoir une dynamique positive grâce à l'instauration de la nouvelle taxe sur l'exploitation des infrastructures de transport de longue distance, diminueront de 900 millions d'euros en 2025. À cette situation s'ajoute l'incertitude structurelle pesant sur le financement de l'Agence, qui n'a toujours pas été levée.

Dans ce contexte, les dépenses de l'Afit France seront revues à la baisse. Bien que la ventilation précise de cet affaissement de moyens ne soit pas encore connue, nous savons déjà que le plan Vélo et marche 2023-2027 fera partie des sacrifiés puisqu'aucune AE nouvelle ne sera ouverte. En parallèle, s'il est légitime que les collectivités participent à l'effort collectif de redressement des finances publiques, nous craignons que la route ne soit la variable d'ajustement budgétaire au niveau local. Pourtant, les besoins se chiffrent en milliards d'euros, ne serait-ce que pour assurer l'entretien du réseau routier, dont l'état sera encore aggravé par les effets du changement climatique. Il est impératif que la conférence nationale sur le financement des mobilités permette une remise à plat du modèle de financement des transports et l'identification de nouvelles recettes pérennes. À ce titre, le moment est venu d'envisager la généralisation de la possibilité pour les régions de mettre en place une écocontribution sur le transport de marchandises, comme l'a fait la région Grand Est.

J'en viens aux mobilités en zones peu denses. Le droit actuel conditionne la possibilité de lever le VM à l'organisation de services réguliers de transport public de personnes, ce qui empêche en pratique les petites AOM d'en bénéficier. Afin d'aller au bout de l'ambition portée par la LOM de mettre fin aux zones blanches de la mobilité, je proposerai d'assouplir ces conditions pour permettre aux AOM de lever le VM afin d'organiser un panel de services plus large, intégrant les mobilités partagées, souvent plus pertinentes que les transports collectifs dans les espaces peu denses.

Je souhaiterais aussi avancer sur la question des AOM, qui ne disposent pas des bases fiscales suffisantes pour lever le VM. Le Sénat avait été précurseur, lors de l'examen de la LOM, en proposant d'instaurer une dotation spécifique pour ces collectivités. Malheureusement, cette piste n'avait pas survécu à la navette parlementaire. Je souhaite que cette question figure parmi nos priorités lors de la future conférence nationale sur le financement des mobilités.

Enfin, l'ART a besoin d'un petit soutien en 2025. En effet, elle est pourvue de nouvelles missions et doit travailler sur la question de la fin des contrats de concessions autoroutières. Ce régulateur important doit retrouver une recette stable.

M. Jean-Raymond Hugonet. - La taxation aveugle dont va souffrir le transport aérien équivaut à « se mettre une balle dans le pied » même si l'on comprend qu'il y a derrière une volonté de rendement et sans doute des intentions politiques. La trajectoire vertueuse de l'avion du futur a-t-elle été prise en compte avant de prendre cette décision ? Peut-elle encore permettre au transport aérien de voir se dessiner une perspective plus positive que celle qui semble émerger à l'issue de ce budget ?

M. Marc Laménie. - En ce qui concerne le volet ferroviaire, j'ai en mémoire le rapport d'information important qu'avaient remis Stéphane Sautarel et Hervé Maurey ; qu'en est-il de leurs recommandations, notamment en matière de régénération du réseau ? Comment envisagez-vous le devenir de l'Afit France et de ses moyens d'intervention ? Enfin, quelle est votre position sur le devenir du fret ferroviaire ?

M. Pascal Savoldelli. - L'IGN est maintenant une société commerciale. En dix ans, sa SCSP a baissé de 10 %. Son modèle économique ne cesse de changer. L'an dernier, le rapporteur spécial avait déposé un amendement visant à augmenter les crédits de 4 millions d'euros et j'en avais déposé un prévoyant une hausse de 6 millions d'euros. Proposerez-vous cette année un abondement conséquent pour l'IGN, dont les missions sont de plus en plus complexes et importantes, au regard des guerres probables et du changement climatique ?

M. Arnaud Bazin. - J'aurai une demande de précision pour Vincent Capo-Canellas sur les conséquences de la taxe sur l'aviation civile, en mettant de côté l'aviation à la demande. Quel sera son impact différentiel sur la compagnie nationale par rapport aux autres compagnies opérant sur notre territoire ?

Mme Florence Blatrix Contat. - Je déplore la baisse des moyens de l'Afit France et ses conséquences sur nos infrastructures ferroviaires. La décarbonation de la mobilité routière ne pourra pas se faire sans renforcer la mobilité ferroviaire et les mobilités douces. Vous avez évoqué les conséquences de cette baisse sur les CPER et de probables décalages dans le temps de leur réalisation. Pouvez-vous nous donner des précisions sur cette temporalité et sur les projets qui pourraient être abandonnés ?

En ce qui concerne le développement des Serm, vous avez évoqué des conventions de financement signées pour cinq projets ; quels sont-ils ? À quelle échéance pourraient-il aboutir ? Avec quels financements ?

M. Stéphane Sautarel. - S'agissant de la taxe sur l'aviation, une mesure spéciale est-elle prévue pour les lignes d'aménagement du territoire (LAT) ?

La question d'un rapprochement entre le Cerema et l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) a-t-elle été évoquée lors des auditions que vous avez menées ? Quelle sera l'incidence de la baisse des moyens de l'Afit France sur les CPER ? Je me réjouis des moyens alloués aux trains d'équilibre du territoire (TET). Enfin, quel regard portez-vous sur les Serm et la transformation de la SGP pour répondre à ces enjeux ?

M. Hervé Maurey, rapporteur spécial. - Je commencerai par répondre à certains propos des rapporteurs pour avis. Je trouve sage de ne pas proposer de dépenses nouvelles même si, dans certains cas, notamment pour l'ART, ce serait utile.

En ce qui concerne l'idée d'affecter des ressources supplémentaires aux infrastructures, j'y suis favorable. Je suis en accord aussi avec ce qu'a dit M. Jacquin sur les VM, notamment pour les territoires ruraux.

J'en viens aux autoroutes. Dans le rapport que j'ai présenté récemment, j'ai émis l'idée qu'à terme, une partie des recettes liées aux péages soit affectée à l'ensemble des mobilités, notamment à la régénération des infrastructures, en particulier ferroviaires. Sans cela, nous serons confrontés à un phénomène d'aggravation et le président de l'ART n'a pas hésité, lors de son audition, à employer le mot « paupérisation », qui est celui qui convient.

Monsieur Laménie, pour l'évolution des investissements dans les infrastructures, nous avions évoqué le chiffre de 1,5 milliard d'euros par an dans notre rapport. Cependant, rien de concret ne se produit si ce n'est que, chaque année, on prélève davantage sur les résultats de SNCF Voyageurs pour financer SNCF Réseau, ce qui n'est ni sain ni satisfaisant.

Pour le fret ferroviaire, à la suite d'une demande des instances européennes, nous avons récemment procédé à une opération de dissociation entre l'opérateur ferroviaire Hexafret, qui a dû renoncer à 30 % de son activité, et Technis, chargé de la maintenance des locomotives. C'est à ce prix que nous avons pu éviter d'avoir à rembourser des sommes colossales.

M. Jean-Baptiste Olivier, rapporteur spécial. - Selon notre analyse, la baisse des investissements aura des conséquences sur les CPER. Cependant, cela ne signifie pas que les contrats soient remis en question et il s'agit bien de maintenir les engagements de l'État. Je ne suis pas en mesure de dire quel sera le décalage dans la mise en oeuvre.

Pour les Serm, cinq projets sont en cours, trois dans le Grand Est, deux dans les Hauts-de-France. La carte figurera dans notre rapport.

M. Philippe Tabarot, rapporteur pour avis. - Effectivement, cinq conventions de financement ont été signées. J'ajouterai que vingt-quatre projets ont été labellisés.

M. Vincent Capo-Canellas, rapporteur spécial. - L'IGN est bien un établissement public, qui perçoit une SCSP. L'année dernière, nous avions trouvé une solution, fruit d'un arbitrage et d'une négociation difficiles. Nous avions trouvé le vecteur de la LFG. Les 4 millions d'euros que nous avions ajoutés sont rebasés dans le PLF pour 2025. J'avais commencé les négociations en demandant 8 millions. Il y a un sujet de fond : l'IGN travaille sur les données géographiques et la donnée constitue aujourd'hui un élément central, auquel il faut consacrer des moyens. J'avais remis un rapport il y a deux ans environ, en prédisant qu'il y aurait un jour un trou d'air parce que l'IGN était financé par les grands programmes et que les ministères impliqués finiraient par rencontrer des difficultés financières. À l'époque, mon analyse semblait bizarre, mais, aujourd'hui, l'Institut est en apnée et il lui manque 15 millions d'euros tous les ans. Je n'ai pas encore la solution, mais nous pourrons la trouver ensemble.

Une note circule sur le possible regroupement du Cerema, de l'ANCT et de l'Ademe, qui ne serait pas dépourvu de sens. Il faut étudier ce qu'on peut y gagner en efficacité, notamment pour les collectivités et la transition écologique, et quels seront les effets budgétaires.

Concernant la taxation du secteur aérien, il n'y a pas eu d'étude d'impact et cette mesure nous parvient par voie d'amendement. Il faudrait faire un état des lieux exhaustif des taxes du transport aérien. Le budget de la DGAC s'élève à 2,7 milliards d'euros, qui sont prélevés sur le secteur, par le biais de taxes, de redevances, de certifications et de services fournis. Il s'agit d'ajouter 1 milliard d'euros à la TSBA, qui s'élevait déjà à 340 millions. Quelles seront les conséquences ? Air France a chiffré entre 250 et 300 millions d'euros l'impact supplémentaire de cette taxe. La première version de la taxe était très importante pour les longs courriers et les classes avant, ce qui agressait le modèle économique de la compagnie nationale et sa capacité à générer du profit. Le Gouvernement en a pris conscience et a modéré son envie. Cependant, en ce qui concerne les courts et moyens courriers, la taxation pourrait passer de 2,63 à 9,50 euros. Or pour les compagnies présentes en France métropolitaine et dans les outre-mer, la sensibilité au prix est très importante. Selon tous les modèles que j'ai pu consulter, il y aura des plans sociaux, des fermetures de lignes et de bases. De nombreuses compagnies sont en train de chiffrer les licenciements. Au-delà du débat de fond sur la pertinence de la taxation, l'impact pose problème. Il y aura moins de dessertes dans les territoires, notamment dans les outre-mer. Il faut trouver des solutions pour modérer les effets sociaux et économiques d'une telle augmentation.

La question de l'avion du futur et de la décarbonation aurait dû être prise en compte. Nous allons affaiblir les capacités contributives des compagnies, qui vont devoir décaler le renouvellement de leurs flottes.

Les LAT seront dénoncées par les exploitants. Nous en avons déjà perdu deux ou trois l'an dernier, parce que nous ne savions pas les faire tourner financièrement. Aujourd'hui, des patrons de compagnie exploitant des LAT subventionnées disent qu'elles vont perdre plus de 1 million d'euros. Il faut trouver le bon équilibre pour éviter la casse sociale et territoriale.

Enfin, monsieur Tabarot, il serait logique que cette taxe aide à la décarbonation du secteur aérien. Cependant, nous n'en sommes pas là ; il nous faut d'abord vérifier que nous n'allons pas détruire la base taxable.

Article 42

Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial. - L'amendement II-22 (FINC.1) prévoit d'abonder les crédits du fonds Chaleur en réduisant ceux qui ne sont pas dépensés dans le cadre du soutien à l'hydrogène décarbonée.

L'amendement II-22 (FINC.1) est adopté.

Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial. - L'amendement II-23 (FINC.2) vise à réduire de 20 millions d'euros les crédits versés à l'Ademe, afin notamment de l'inciter à réduire ses frais de fonctionnement et de communication.

L'amendement II-23 (FINC.2) est adopté.

Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial. - L'amendement II-24 (FINC.3) prévoit de diminuer la subvention attribuée à l'OFB.

L'amendement II-24 (FINC.3) est adopté.

Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial. - L'amendement II-25 (FINC.4) prévoit de réduire les subventions versées à des associations qui interviennent dans la gestion des filières à responsabilité élargie du producteur.

L'amendement II-25 (FINC.4) est adopté.

Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial. - L'amendement II-26 (FINC.5) contribue à la mise en place de la politique de prévention des risques que nous appelons de nos voeux, avec notamment un abondement du fonds Barnier, un renforcement de l'action sur les risques hydrauliques et la création d'une action sur le retrait-gonflement des argiles.

L'amendement II-26 (FINC.5) est adopté.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », sous réserve de l'adoption de ses amendements.

EXAMEN DE L'ARTICLE RATTACHÉ

Article 60

Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial. - L'amendement II-27 (FINC.6) concerne les modalités d'attribution du chèque énergie. Il prévoit de ne pas retirer de la liste des signataires le ministre chargé des affaires sociales. Dans mon esprit, le chèque énergie correspond aussi à un dispositif social. Il ne s'agit pas d'un soutien à l'énergie, mais aux consommateurs.

L'amendement II-27 (FINC.6) est adopté.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter l'article 60, sous réserve de l'adoption de son amendement.

M. Vincent Capo-Canellas, rapporteur spécial. - J'émets un avis favorable à l'adoption des crédits du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ».

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, les crédits du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ».

Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial. - J'émets un avis favorable à l'adoption des crédits du compte d'affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale ». Si vous pouviez, chacun dans vos groupes respectifs, convaincre vos collègues que le plus grand risque serait de supprimer les quatre alinéas de l'article 7, tout le monde y gagnerait.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, les crédits du compte d'affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale ».

*

* *

Réunie à nouveau le jeudi 21 novembre 2024, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a confirmé définitivement ses votes émis sur toutes les missions, tous les budgets annexes, tous les comptes spéciaux et les articles rattachés aux missions, ainsi que les amendements qu'elle a adoptés, à l'exception des votes émis pour les missions « Culture », « Direction de l'action du Gouvernement », « Enseignement scolaire », « Médias, livre et industries culturelles », « Audiovisuel public », « Recherche et enseignement supérieur », ainsi que des comptes spéciaux qui s'y rattachent.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Monsieur le Sénateur, Patrick CHAIZE, vice-président de la Fédération en charge des relations avec le Sénat

Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires

- Mme Caroline TRANCHANT, adjointe au directeur des ressources humaines ;

- M. Vincent MOREAU, directeur des affaires financières.

Direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature (DGALN)

- M. Philippe MAZENC, directeur général de l'aménagement, du logement et de la nature ;

- Mme Marie-Laure METAYER, adjointe à la directrice de l'eau et de la biodiversité ;

- Mme Sylvie ESCANDE-VILBOIS, responsable de la mission performance ;

- Mme Julie PERCELAY, adjointe à la sous-directrice de l'animation territoriale et appui politiques de préservation des écosystèmes ;

- Mme Fanny CUSIN-MASSET, adjointe au sous-directeur de la coordination, appui, stratégie et pilotage des politiques de protection et restauration des écosystèmes ;

- M. Samir BASRAOUI, de la mission performance pour le P380.

Direction générale de la prévention des risques (DGPR)

- Mme Régine ENGSTRÖM, directrice adjointe.

Direction générale de l'énergie et du climat (DGEC)

- Mme Sophie MOURLON, directrice générale.

Plateforme automobile (PFA)

- M. Nicolas LE BIGOT, directeur des affaires environnementales, techniques et réglementaires.

Commission de régulation de l'énergie (CRE)

- Mme Emmanuelle WARGON, présidente.

Agence de la transition écologique (Ademe)

- M. David MARCHAL, directeur de l'expertise et des programmes.

Francegaz

- M. Frédéric MARTIN, président ;

- M. Max-Erwann GASTINEAU, directeur des affaires publiques et territoires.

Électricité de France (EDF)

- M. Bertrand LETHIEC, directeur des affaires publiques ;

- M. Jérémy GALLET, chargé de mission à la direction des affaires publiques.

Office français de la biodiversité (OFB)

- M. Olivier THIBAULT, directeur général.

Autorité de sûreté nucléaire

- M. Olivier GUPTA, directeur général ;

- M. Bernard DOROSZCZUK, président.

LA LOI EN CONSTRUCTION

Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :

Https://www.senat.fr/dossier-legislatif/pjlf2025.html


* 1 C'est-à-dire la minoration du tarif d'accise sur l'électricité.

* 2 Le numéro du programme « 235 » a été choisi en référence à l'isotope fissile uranium 235, qui est utilisé comme combustible primaire dans la plupart des réacteurs nucléaires.

* 3 Soit les programmes 203 « Infrastructures et services de transports », 205 « Sécurité et affaires maritimes, pêche et aquaculture » et 159 « Expertise, géographie et météorologie ».

* 4 Le numéro du programme « 235 » a été choisi en référence à l'isotope fissile uranium 235, qui est utilisé comme combustible primaire dans la plupart des réacteurs nucléaires.

* 5 Ministère de la transition écologique.

* 6 Ministère de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales.

* 7 Article L. 213-9-2 du code de l'environnement. Ces actions ou travaux d'intérêts communs doivent contribuer à la gestion équilibrée et durable de la ressource en eau, des milieux aquatiques, du milieu marin et de la biodiversité.

* 8 20 millions d'euros en AE et en CP avaient été ajoutés au cours de la navette parlementaire.

* 9 Les montants correspondent aux délégations des crédits extra-budgétaires du FPRNM.

* 10 Rapport général fait au nom de la commission des finances du Sénat, Rapporteur général M. Jean-François Husson, Tome II fascicule 1, pages 584-598.

* 11 Rapport d'information n° 603 (2023-2024) du 15 mai 2024 de Mme Christine Lavarde fait au nom de la commission des finances sur le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles.

* 12 Rapport d'information n° 603 (2023-2024) du 15 mai 2024 de Mme Christine Lavarde fait au nom de la commission des finances sur le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles.

* 13 Rapport d'information n° 603 (2023-2024) du 15 mai 2024 de Mme Christine Lavarde fait au nom de la commission des finances sur le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles.

* 14 À la fin août 2022, 15 077 communes étaient couvertes par un PPRN opposable, et 2 173 communes relevaient d'un PPRN prescrit.

* 15 La diminution du nombre de communes sur le territoire desquelles un PPRN est prescrit depuis le milieu des années 2000 résulte de l'approbation d'un nombre croissant de PPRN.

* 16 Rapport d'information n° 603 (2023-2024) du 15 mai 2024 de Mme Christine Lavarde fait au nom de la commission des finances sur le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles.

* 17 Cette problématique est identifiée depuis longtemps. Voir par exemple « Les dysfonctionnements de « la responsabilité élargie du producteur » et des éco-organismes », Jean-Baptiste Bahers, revue Mouvement n° 86.

* 18 « Performance et gouvernance des filières à responsabilité élargie du producteur », IGF, IGEDD, CGE, juin 2024

* 19 En 2023, l'agence perçoit avait perçu 175 millions d'euros en CP par des crédits issus du plan de relance, sur le programme 362 « Écologie ». Le fonds de décarbonation de l'industrie est en tête des financements, avec 110 millions d'euros en CP, suivi par les mesures en faveur de la mobilité, pour un montant de 64,2 millions d'euros en CP.

* 20 Ces deux ETPT ont vocation à participer au développement d'éco-scores sur des équipements utilisés pour la transition écologique.

* 21 Lors des auditions du PLF pour 2024, les représentants de l'ADEME ont indiqué au rapporteur spécial qu'ils estiment que chaque tranche de 10 millions d'euros supplémentaires pour le fonds chaleur nécessite un ETPT de plus pour l'absorber.

* 22 Inspection générale des finances, « Revue des aides à la transition écologique », avril 2023.

* 23 Réponses au questionnaire du rapporteur spécial.

* 24 Réponses de l'ADEME au questionnaire du rapporteur spécial.

* 25 Dont un million d'euro provenant de manière résiduelle du plan de relance.

* 26 Les AE demeureraient inchangées.

* 27 Le dispositif devait être applicable à la métropole de Lyon, et le périmètre de la métropole du Grand Paris, les fonds étaient prévus pour être versés aux établissements publics territoriaux.

* 28 Rapport d'information n° 806 (2021-2022) fait au nom de la commission des finances du Sénat sur les dotations d'investissement aux collectivités territoriales, Charles Guené et Claude Raynal, 22 juillet 2022, page 28.

* 29 Exception faite des Terres australes antarctiques Françaises, qui ont consommés 73,3 % des autorisations d'engagement notifiées.

* 30 En vertu des dispositions de l'article L. 121-9 du code de l'énergie.

* 31 Délibération n° 2022-272 de la Commission de régulation de l'énergie du 3 novembre 2022 relative à la réévaluation des charges de service public de l'énergie pour 2023.

* 32 Dans sa dernière délibération de juillet 2024.

* 33 Dans cette perspective, l'article L. 446-2 du code de l'énergie prévoit que les fournisseurs de gaz naturel sont tenus de conclure des contrats d'achat de biométhane produit par les installations éligibles à l'obligation d'achat. L'application de ces contrats génère un surcoût, qui correspond à la différence entre le prix d'acquisition du biométhane et le prix moyen constaté sur le marché de gros du gaz naturel ainsi qu'aux coûts de gestion du dispositif. C'est ce surcoût, évalué tous les ans par la Commission de régulation de l'énergie (CRE), que l'État prend à sa charge.

* 34 Réponses de la DGEC au questionnaire du rapporteur.

* 35 Évaluées chaque année par la CRE dans les mêmes conditions que les autres charges de service public de l'énergie faisant l'objet de compensations.

* 36 La seconde étant l'interconnexion dite SARCO (pour Sardaigne-Corse).

* 37 Ce processus permet d'atteindre des rendements énergétiques globaux supérieurs à ceux obtenus via la production séparée de chaleur (chaudières) et d'électricité (centrales électriques) et de générer ainsi des économies d'énergie primaire. La chaleur produite est généralement utilisée par injection dans un réseau de chaleur ou pour un processus industriel.

* 38 Les tarifs normaux d'accise sur l'électricité avaient alors été relevés par voie réglementaire à 21 euros par MWh pour les particuliers et 20,50 euros par MWh pour les entreprises.

* 39 Avec un effet rétroactif sur le deuxième semestre de l'année 2022.

* 40 La minoration des tarifs d'accise sur l'électricité.

* 41 180 millions d'euros pour l'électricité et 105 millions d'euros pour le gaz.

* 42 1 milliard d'euros d'AE et 1,4 milliard d'euros de CP en 2025.

* 43 Géré par la Direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature.

* 44 435 millions d'euros de crédits avaient été ouverts au titre de ce dispositif dans le cadre de la LFI pour 2024.

* 45 À périmètre constant, c'est-à-dire en retraitant les crédits alloués au dispositif MaPrimeRenov en LFI pour 2024.

* 46 Il a été instauré par l'article 201 de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte pour remplacer les tarifs sociaux de l'énergie. Après une phase d'expérimentation il a été généralisé en 2018.

* 47 La première personne du ménage compte pour 1 UC, la deuxième pour 0,5 UC et les suivantes pour 0,3UC.

* 48 42 millions d'euros pourraient être dépensés en 2024 et 18 millions d'euros en 2025 selon une hypothèse d'utilisation de 70 % de ces chèques dès 2024.

* 49 Hors chèques énergie exceptionnels.

* 50 Notamment en lien avec la création de la nouvelle plateforme électronique permettant aux bénéficiaires potentiels de se faire connaître.

* 51 C'est le Fonds d'aide à l'acquisition de véhicules propres, dont la gestion est assurée par l'Agence de services et de paiement, qui est chargé du suivi des dossiers des demandes d'aides et qui assure leur versement.

* 52 Dont 131 000 bonus attribués à des voitures particulières.

* 53 Dont 298 000 bonus attribués à des voitures particulières.

* 54 Dans les ventes annuelles de véhicules neufs.

* 55 Dans les ventes annuelles de véhicules neufs.

* 56 Décret n° 2023-886 du 19 septembre 2023 relatif au conditionnement de l'éligibilité au bonus écologique pour les voitures particulières neuves électriques à l'atteinte d'un score environnemental minimal.

* 57 Arrêté du 19 septembre 2023 relatif à la méthodologie de calcul du score environnemental et à la valeur de score minimale à atteindre pour l'éligibilité au bonus écologique pour les voitures particulières neuves électriques.

* 58 La dernière liste a été complétée par l'arrêté du 7 octobre 2024 modifiant l'arrêté du 14 décembre 2023 fixant la liste des versions de voitures particulières électriques ayant atteint le score environnemental minimal conditionnant l'éligibilité à certaines aides à l'achat ou à la location de véhicules peu polluants.

* 59 Pour une durée minimum de 3 ans.

* 60 Le programme 212, « soutien de la politique de défense » porte également une subvention à l'IRSN d'un montant de 4,4 millions d'euros pour 2024.

* 61 Le Gouvernement a avancé cet argument lors de son audition publique à l'OPECST, le 16 février 2023 : « le dispositif actuel de gestion de crise souffre actuellement de la dualité du système de sûreté nucléaire français, qui conduit à avoir, pour les autorités publiques, deux entités comme interlocutrices sur le même sujet, et disposant chacune d'une cellule de crise ».

* 62 Cour des comptes, « L'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN », 26 octobre 2021. La Cour des comptes pouvait ainsi écrire : « Si l'Institut a équilibré son budget au cours de la période contrôlée du fait de l'absence de dotations aux amortissements, il enregistre des déficits comptables récurrents, ce qui signifie que l'Institut ne constitue ou ne reconstitue pas les réserves financières nécessaires au renouvellement de ses matériels, aménagements et plateformes techniques. »

* 63 Jean-François Rapin, rapport d'information fait au nom de la commission des finances, « Relance du nucléaire : adapter les moyens de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) », 24 mai 2023 : « Les acteurs entendus par le rapporteur spécial sont tous allés dans le sens de l'absence de gains d'efficience attendus de la fusion. La direction du budget a mis en avant ses « espoirs tout à fait mesurés sur des pistes de rationalisation » émergeant de la nouvelle organisation. »

* 64 Les doctorants sont comptés hors plafond dans un EPIC, mais ils sont comptés dans le plafond dans un EPA.

* 65 Réponses de l'IRSN au questionnaire du rapporteur.

* 66 La création du CAS par l'article 7 de la loi n° 2011-1978 de finances rectificative pour 2011 du 28 décembre 2011 a conduit à budgétiser des aides auparavant directement prises en charge par le Fonds d'amortissement des charges d'électrification géré par Électricité de France (EDF), qui avait été mis en place dès 1936 par l'article 108 de la loi de finances du 31 décembre 1936, confirmé par l'article 38 de la loi du 8 avril 1946 sur la nationalisation de l'électricité et du gaz. Elle a nécessité la reprise par les services de l'État de la gestion de ces aides avec la création d'une mission chargée du financement de l'électrification rurale, placée sous l'autorité du directeur général de l'énergie et du climat.

* 67 C'est à dire des travaux de premier établissement, d'extension, de renforcement et de perfectionnement des ouvrages de distribution.

* 68 Si ces opérations permettent d'éviter des extensions ou des renforcements de réseaux.

* 69 Lorsque ces opérations permettent d'éviter des extensions ou des renforcements de réseaux.

* 70 La loi n° 2006-1537 du 7 décembre 2006 relative au secteur de l'énergie prévoit que le préfet engage une procédure de création d'un syndicat de communes ou d'un syndicat mixte à l'échelle environnementale lorsque la maîtrise d'ouvrage n'est exercée ni par le département, ni par un groupement couvrant le territoire départemental, ni par un groupement de collectivités territoriales dont la population est au moins égale à un million d'habitants.

* 71 Article 16 de l'arrêté du 27 mars 2013 pris en application du décret n° 2013-46 du 14 janvier 2013 relatif aux aides pour l'électrification rurale. Ces minorations ne peuvent représenter plus de 25 % des droits à subvention des AODE concernées.

* 72 C'est à dire principalement Enedis (ex ERDF) et les autres entreprises locales de distribution (ELD).

* 73 25 juillet 2018, affaire C-103/17, Messer c/ France, point 43.

* 74 Pour améliorer la qualité de l'électricité distribuée, la sécurisation des réseaux face aux intempéries, ainsi que leur extension et leur enfouissement.

* 75 En hausse de 6 millions d'euros par rapport à 2024.

* 76 Le montant consacré à la sécurisation des réseaux baisse de 5 millions d'euros en 2025 en raison de la résorption progressive du stock de réseaux à fils nus.

* 77 Il a été instauré par l'article 201 de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte pour remplacer les tarifs sociaux de l'énergie. Après une phase d'expérimentation il a été généralisé en 2018.

* 78 Les usagers pouvant modifier leur déclaration de revenus après la clôture de la période déclarative (printemps N - 1) jusqu'au mois de décembre N - 1, le temps de traitement des données par l'administration fiscale ne permet de disposer des revenus définitifs N - 2 qu'en mars de l'année N.

* 79 Ces valeurs étant réduites de moitié pour les enfants mineurs en résidence alternée au domicile de chacun des parents.

* 80 Loi n° 2020-1525 du 7 décembre 2020 d'accélération et de simplification de l'action publique.

* 81 Décret n° 2020-1763 du 30 décembre 2020 modifiant les modalités de mise en oeuvre du chèque énergie.

* 82 Décret n° 2024-411 du 4 mai 2024 relatif au chèque énergie émis au titre de l'année 2024 et modifiant les modalités de la mise en oeuvre du chèque énergie.

* 83 La CLCV, l'Afoc, Familles rurales, le Cnafal, l'UFC et l'Unaf.

* 84 Les modalités spécifiques d'attribution du chèque énergie pour la campagne 2024 ont été prévues par le décret n° 2024-411 du 4 mai 2024 relatif au chèque énergie émis au titre de l'année 2024 et modifiant les modalités de la mise en oeuvre du chèque énergie.

* 85 42 millions d'euros pourraient être dépensés en 2024 et 18 millions d'euros en 2025 selon une hypothèse d'utilisation de 70 % de ces chèques dès 2024.

* 86 Hors chèques énergie exceptionnels.

* 87 C'est-à-dire des foyers qui n'étaient pas éligibles au dispositif au cours des trois années antérieures.

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