II. UN AVENANT, QUE LE PROJET DE LOI PROPOSE DE RATIFIER, QUI VIENT ASSOUPLIR LA FACULTÉ POUR LES TRANSFRONTALIERS DE TÉLÉTRAVAILLER TOUT EN ENGENDRANT UNE PERTE FISCALE POUR L'ÉTAT FRANÇAIS

A. L'AVENANT DU 7 NOVEMBRE 2022 ALLONGE LA DURÉE DU FORFAIT DE TÉLÉTRAVAIL ET ÉTEND SON APPLICATION À CERTAINS CONTRIBUABLES PERCEVANT DES RÉMUNÉRATIONS PUBLIQUES

1. La négociation d'un nouvel avenant a été motivée par l'expérience de la crise sanitaire

Anticipant la sortie des mesures d'urgence sanitaire et la fin de la mesure de tolérance fiscale sur le télétravail au 30 juin 2022, les autorités françaises et luxembourgeoises, représentées par le secrétaire d'État chargé des affaires européennes Clément Beaune et la ministre luxembourgeoise à la Grande Région Corinne Cahen, se sont accordées lors de la 6e commission intergouvernementale franco-luxembourgeoise pour le renforcement de la coopération transfrontalière, réunie à Esch-Belval le 19 octobre 2021, sur un relèvement du forfait de télétravail de 29 à 34 jours.

Cet accord politique s'est traduit par la négociation et la signature le 7 novembre 2022 d'un avenant à la convention fiscale du 20 mars 2018.

2. Un forfait de télétravail plus conséquent, dans le cadre duquel continue de s'appliquer le principe d'imposition dans l'État d'exercice de l'activité

L'article 1er de l'avenant augmente la durée du forfait de télétravail de 29 à 34 jours. Désormais, le seuil de 34 jours conditionne le régime d'imposition des contribuables en télétravail. En-deçà des 34 jours, le contribuable est réputé exercer son activité dans l'État de son employeur et continue d'être imposé dans l'État d'exercice de l'activité. Au-delà des 34 jours de télétravail, le principe d'imposition dans l'État de résidence s'applique dès le premier jour de télétravail.

Il importe de rappeler que le seuil de 34 jours ne constitue pas un encadrement du télétravail. Il s'agit d'une mesure exclusivement fiscale. Les contribuables sont libres de télétravailler plus de 34 jours par an. La convention détermine en revanche quel État est en mesure de les imposer sur les revenus perçus au titre de ce télétravail.

Cette disposition constitue cependant un frein administratif pour les entreprises qui sont, de facto, réticentes à autoriser leurs employés à dépasser ce seuil. Excéder le forfait revient, en effet, à multiplier les obligations de déclarations pour l'employeur. Le partage d'imposition qui découle du dépassement du seuil de 34 jours entraîne un double prélèvement à la source assis sur deux assiettes distinctes, l'un pour l'impôt dû au Luxembourg et l'autre pour l'impôt dû en France.

S'agissant du choix du nombre de 34 jours, cette demande du Luxembourg s'inscrit en cohérence avec la politique conventionnelle du Grand-Duché. Ce dernier a récemment renégocié les conventions bilatérales avec la Belgique et l'Allemagne pour élever le seuil de télétravail en-deçà duquel continue à s'appliquer le principe d'imposition dans l'État d'exercice de l'activité à 34 jours. Cette renégociation d'ensemble permet de placer les travailleurs transfrontaliers sur un pied d'égalité, quel que soit leur pays d'origine.

3. L'extension du bénéfice de ce forfait aux contribuables percevant des rémunérations publiques

L'article 2 de l'avenant vise à étendre le bénéfice du forfait de télétravail aux contribuables visés au b du 1 de l'article 18.

Pour mémoire, l'article 18 de la convention stipule un principe général d'imposition dans l'État de source des rémunérations de source publique. Par exception, le b du paragraphe 1 de ce même article prévoit une imposition dans l'autre État, sous réserve :

- d'une part, que les services rémunérés soient exercés dans cet État ;

- d'autre part, que le bénéficiaire de ces rémunérations soit un résident de cet État et en possède la nationalité sans posséder en même temps la nationalité du premier État.

L'article 2 de l'avenant doit permettre aux contribuables résidents d'un État contractant et qui rendent des services dans un autre État pour lesquels ils perçoivent des rémunérations publiques, de bénéficier des stipulations relatives au télétravail.

En l'état actuel de la convention, un transfrontalier français qui travaille pour une personne publique luxembourgeoise au Luxembourg relève du a du paragraphe 1 de l'article 18. Il est donc soumis à un principe d'imposition dans l'État de source de ces revenus.

En revanche, ce même transfrontalier, lorsqu'il télétravaille en France pour le compte d'une personne publique luxembourgeoise, bascule dans le champ du b du paragraphe 1 de l'article 18. Tout en percevant des rémunérations de source publique luxembourgeoise, il exerce ses services en France, État dont il est résident et détient la nationalité. Dans cette hypothèse, il est soumis à un principe d'imposition dans l'État d'exercice de l'activité.

L'application de ces stipulations créait actuellement une différence de traitement entre les transfrontaliers selon que leur employeur soit public ou privé.

Pour remédier à cette difficulté, l'article 2 de l'avenant prévoit qu'un résident d'un État contractant qui rend des services à l'autre État contractant et qui, au cours d'une période imposable, rend ces services à l'autre État dans le premier État ou dans un État tiers durant une période d'au maximum 34 jours, est considéré comme rendant effectivement ses services dans l'autre État durant toute la période imposable.

Cette clause a été intégrée dans l'avenant à la demande du Luxembourg afin d'aligner le régime des personnes employées dans le secteur public sur le régime des personnes employées dans le secteur privé. Le secteur public luxembourgeois est également largement dépendant de la main-d'oeuvre frontalière.

4. Une clause de revoyure et la possibilité pour les deux parties de conclure un nouvel avenant

L'article 3 de l'avenant prévoit de compléter le paragraphe 3 du protocole annexé à la convention par une clause de revoyure. Cette clause stipule que les États parties se rencontreront avant le 31 décembre 2024 pour déterminer les conditions qui s'appliqueront aux résidents concernés par l'avenant à compter du 1er janvier 2025. Elle prévoit l'éventualité de la conclusion d'un nouvel avenant.

En complément de cette nouvelle clause, l'article 4 de l'avenant précise que l'avenant demeurera en vigueur jusqu'à la fin de l'année suivant celle de son entrée en vigueur, soit en 2025. L'absence de conclusion d'un nouvel avenant entrainera sa reconduction.

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