IV. FINANCES DE LA BANQUE (ARTICLES 16 À  20)

Selon les statuts, la Banque dispose de pouvoirs généraux, notamment pour lever des fonds ; pour acquérir, vendre ou garantir des titres ; pour placer ou mettre en dépôt des fonds non nécessaires à ses opérations. Elle peut également établir des filiales ou accepter des fonds spéciaux qui correspondent à son objet et relèvent de ses fonctions. Elle doit adopter des règles spécifiques pour la mise en place, la gestion et l'utilisation de chaque fonds spécial.

Le Conseil des gouverneurs définit au moins une fois par an la part des revenus à affecter aux différents emplois, ainsi que la part à répartir entre les membres le cas échéant.

Les membres de la Banque ne peuvent imposer aucune restriction portant sur les monnaies. C'est à la Banque qu'il appartient d'évaluer une monnaie par rapport à une autre ou de décider si une monnaie est convertible.

S'agissant des opérations ordinaires, la Banque décide également du traitement des cas d'arriérés ou de défaillance pour honorer les engagements pris à son encontre. Les statuts prévoient que la Banque doit constituer des provisions pour couvrir les pertes éventuelles ainsi que les règles d'imputation des pertes.

V. GOUVERNANCE (ARTICLES 21 À  31)

L'accord rappelle que la Banque et son personnel ne doivent pas s'ingérer dans les affaires politiques d'un des membres de la Banque et qu'ils ne doivent pas se laisser influencer par les membres de la Banque. Seules des considérations économiques doivent présider aux décisions.

1. Le conseil des gouverneurs

Investi de tous les pouvoirs, le Conseil des gouverneurs peut les déléguer en tout ou partie au Conseil d'administration, à l'exception des plus importants qui sont relatifs à l'admission ou la suspension de nouveaux membres, à l'augmentation ou à la réduction du capital, aux recours contre les interprétations ou applications du présent accord par le Conseil d'administration, à l'élection des administrateurs de la Banque et du Président, à l'approbation du bilan général et du compte profits et pertes de la Banque, à la détermination du montant des réserves, à la modification des statuts, à la décision de mettre fin aux opérations de la Banque et à la répartition des actifs ainsi qu'à l'exercice des autres pouvoirs expressément conférés au Conseil des gouverneurs.

Chaque membre de la Banque désigne un gouverneur et un gouverneur suppléant qu'il peut révoquer à tout moment. Les gouverneurs, titulaires et suppléants, ne sont pas rétribués.

Lors de chacune de ses réunions annuelles, le Conseil des gouverneurs élit l'un de ses gouverneurs comme président pour l'année.

L'accord précise également quelques règles de procédure. En dehors de l'Assemblée annuelle, le Conseil des gouverneurs peut également se réunir de sa propre initiative ou sur convocation du Conseil d'administration à la demande de 5 membres de la Banque.

Le quorum est fixé à la majorité des gouverneurs représentant au moins 2/3 du total des voix des membres.

Des règles de procédure établies par le Conseil des gouverneurs permettent au Conseil d'administration de recueillir le vote des gouverneurs sans convocation en assemblée et d'organiser des réunions électroniques du Conseil des gouverneurs.

2. Le Conseil d'administration

Le Conseil d'administration est responsable de la direction des affaires générales de la Banque et exerce tous les pouvoirs délégués par le Conseil des gouverneurs, notamment ceux relatifs à la préparation des travaux du Conseil des gouverneurs, à la définition des politiques de la Banque et des principales politiques opérationnelles et financières à l'adoption de décisions en matière de prêts, garanties, prises de participation et assistance technique. Il supervise également la gestion et le fonctionnement de la Banque, approuve la stratégie, le plan annuel et le budget de la Banque et soumet les comptes annuels audités au Conseil des gouverneurs. Conformément à la demande des pays non régionaux et notamment de la France, la Banque établit un mécanisme de surveillance de la gestion et du fonctionnement de la Banque conforme au principe de transparence.

Il est composé de douze membres élus pour un mandat de deux ans renouvelables, non cumulables avec celui de gouverneur. Neuf d'entre eux sont élus par les gouverneurs qui représentent les membres régionaux et les trois autres sont élus par les gouverneurs qui représentent les membres non régionaux. Choisis parmi les ressortissants des pays membres ayant une expertise en matière économique et financière, ils ne sont pas rémunérés, pour favoriser une structure légère et peu coûteuse.

S'agissant de la répartition des trois « chaises » non régionales , les pays non régionaux sont convenus de la formule suivante, les pays de la zone euro ayant manifesté leur volonté de former une circonscription unique au sein du Conseil d'administration :

chaise « Zone euro »

chaise « Europe élargie »

chaise « Emergents non-asiatiques »

Allemagne

France

Italie

Espagne

Pays-Bas

Autriche

Finlande

Portugal

Luxembourg

Malte

Royaume-Uni

Pologne

Suisse

Suède

Norvège

Danemark

Islande

Brésil

Égypte

Afrique du Sud

Comme l'a souligné le Directeur général du Trésor lors de son audition 10 ( * ) devant la commission, l'institution d'une « chaise » unique pour la zone euro constitue en soi une grande innovation . La France la partagera avec plusieurs autres pays européens selon l'accord de rotation obtenu en décembre 2015, puis entériné par les ministres des finances concernés, lors d'une réunion de l'Eurogroupe. Cet accord, qui porte sur douze ans, prévoit que tous les pays de la circonscription peuvent, théoriquement, accéder aux différents postes de représentation et que le temps de présence des différents pays est approximativement proportionnel à leurs poids respectifs en termes de droits de vote au sein de la circonscription. La rotation des pays est en principe annuelle, mais l'Allemagne, la France et l'Italie peuvent, compte tenu de leur importance, bénéficier d'un mandat plus long. La France détiendra ainsi le poste d'administrateur titulaire trois années sur douze (soit 25 % du temps alors que ses droits de vote pour la chaise « Zone euro » s'élèvent à 21,4 %) ainsi que l'un des deux postes d'administrateurs suppléants pendant cinq ans.

Entre l'inauguration de la banque en janvier 2016 et la première assemblée annuelle en juin 2016, le poste d'administrateur titulaire est occupé par l'Allemagne, tandis que les deux postes de suppléants le sont respectivement par les Pays-Bas et l'Autriche, tous ces pays ayant ratifié l'accord. Le deuxième poste de suppléant était destiné à la France et devrait lui revenir dès qu'elle aura ratifiée.

L'annexe B fixe les dispositions relatives à l'élection des administrateurs.

Chaque administrateur nomme un administrateur suppléant pour agir en son absence, voire deux s'il a reçu un nombre très important de voix.

Selon les règles de procédure, le Conseil d'administration se réunit périodiquement, mais il peut aussi être convoqué par le Conseil des gouverneurs à la demande de trois administrateurs.

Le Conseil d'administration fonctionne en principe de « façon non résidente », ce qui dispense les pays membres d'y affecter des représentants permanents. La convocation de ceux-ci pour les seules réunions réduit notablement les frais de fonctionnement de la Banque. Le suivi de l'AIIB par l'administration française sera effectué, comme c'est le cas pour les autres banques multilatérales existantes, par le bureau compétent de la Direction générale du Trésor avec l'appui de notre ambassade à Pékin.

Le quorum est identique à celui du Conseil des gouverneurs.

En l'absence d'administrateur de sa nationalité présent au Conseil d'administration, un pays membre peut y envoyer un représentant sans droit de vote, si l'ordre du jour appelle une question qui le concerne particulièrement.

Des règles de procédure établies par le Conseil d'administration permettent d'organiser des réunions électroniques ou de voter sur une question sans réunion.

3. Les règles de vote

L'accord présente les modalités de calcul des droits de vote de chaque membre lors des réunions du Conseil des gouverneurs et du Conseil d'administration. Chaque membre fondateur se voit attribuer, outre les voix dont il dispose en qualité de membre, 600 voix de membre fondateur.

Les différentes règles de majorité permettant au Conseil des gouverneurs de statuer sont précisées : majorité des suffrages exprimés, majorité qualifiée avec un vote affirmatif de deux tiers du nombre total des gouverneurs représentant au moins les trois quarts du total des voix des membres, majorité spéciale avec un vote affirmatif de la majorité du nombre total des gouverneurs représentant au moins la majorité du total des voix des membres.

Une fois que tous les pays auront ratifié, la Chine 11 ( * ) disposera de 300 834 voix sur un total de 1 154 223, ce qui représente 26,06 % des droits de vote. La France, quant à elle, disposera, de 36 786 voix, soit 3 ,19 %.

Pour les décisions les plus importantes, qui doivent être adoptées à des majorités qualifiées, par le Conseil des Gouverneurs ou le Conseil d'administration, représentant au moins les trois quarts des voix des membres , la Chine et les pays non régionaux, qui détiennent respectivement 26,06 % et 26,7 % des droits de vote, bénéficient d'un droit de véto. C'est le cas notamment des décisions relatives à la définition des politiques de la Banque ou aux opérations de la Banque. En revanche, si de nouveaux pays sont autorisés à adhérer à l'AIIB, la Chine perdra ce droit de véto.

4. Le Président de la Banque, le ou les vice-présidents et les personnels de la Banque

Le Président est élu, à une majorité qualifiée, par le Conseil des gouverneurs qui peut aussi le suspendre ou le démettre de ses fonctions. Choisi parmi les ressortissants des pays membres de la région, son mandat de 5 ans n'est renouvelable qu'une fois, comme l'avaient exigé les pays non-régionaux. Sauf en cas de partage égal des voix, il ne prend pas part au vote. Représentant légal de la Banque, il conduit, sous la direction du Conseil d'administration, les affaires courantes de la Banque. Il est l'autorité hiérarchique des personnels qu'il recrute « sur la base géographique la plus large possible tout en gardant à l'esprit la nécessité primordiale de garantir les normes les plus exigeantes d'efficacité et de compétence technique ».

En janvier 2016, le Conseil des gouverneurs a élu le Chinois Jin Liqun à la présidence de la Banque .

Sur sa recommandation, le Conseil d'administration nomme un ou plusieurs vice-présidents « sur la base d'un processus ouvert, transparent et fondé sur le mérite » comme l'ont souhaité et obtenu les pays non-régionaux, dont la France.

Dans l'exercice de leurs fonctions, le président et ses personnels ont un devoir de loyauté exclusif envers la Banque.


* 10 Audition en réunion plénière de la commission, le mercredi 6 avril 2016 (voir compte-rendu en annexe).

* 11 Voir en annexe les parts de capital et les droits de vote des membres régionaux et non régionaux de l'AIIB.

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