Rapport n° 579 (2015-2016) de M. Jean-Pierre RAFFARIN , fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, déposé le 4 mai 2016
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INTRODUCTION
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PREMIÈRE PARTIE : LES ENJEUX DE LA
CRÉATION DE LA BANQUE ASIATIQUE D'INVESTISSEMENT DANS LES
INFRASTRUCTURES
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SECONDE PARTIE : DES STATUTS DE LA BANQUE
ASIATIQUE D'INVESTISSEMENT DANS LES INFRASTRUCTURES QUI GARANTISSENT LE RESPECT
DES PRINCIPES SOCIAUX ET ENVIRONNEMENTAUX
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I. L'OBJET PRINCIPAL DE LA BANQUE : LE
DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE DURABLE (ARTICLES 1 À
3)
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II. LE CAPITAL DE LA BANQUE
(ARTICLES 4 À 8)
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III. UNE EXIGENCE DE CONFORMITÉ AUX
MEILLEURES PRATIQUES INTERNATIONALES (ARTICLES 9 À 15)
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IV. FINANCES DE LA BANQUE
(ARTICLES 16 À 20)
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V. GOUVERNANCE (ARTICLES 21 À
31)
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VI. DES DISPOSITIONS GÉNÉRALES QUI
OUVRENT LA VOIE À LA COOPÉRATION (ARTICLES 32 À
36)
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VII. RETRAIT ET SUSPENSION DES MEMBRES
(ARTICLES 37 À 39)
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VIII. SUSPENSION ET CESSATION DES OPÉRATIONS
DE BANQUE (ARTICLES 40 À 43)
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IX. STATUT, IMMUNITÉS, PRIVILÈGES ET
EXONÉRATIONS ACCORDÉS À LA BANQUE SUR LE TERRITOIRE DE SES
MEMBRES (ARTICLES 44 À 52)
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X. AMENDEMENT, INTERPRÉTATION, ARBITRAGE
(ARTICLES 53 À 56)
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XI. DISPOSITIONS FINALES
(ARTICLES 57 À 60)
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I. L'OBJET PRINCIPAL DE LA BANQUE : LE
DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE DURABLE (ARTICLES 1 À
3)
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CONCLUSION
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EXAMEN EN COMMISSION
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LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES
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ANNEXE 1 - COMPTE RENDU DE L'AUDITION DE
M. BRUNO BÉZARD, DIRECTEUR GÉNÉRAL DU TRÉSOR,
LE 6 AVRIL 2016
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ANNEXE 2 - RÉGIONS
GÉOGRAPHIQUES CLASSÉES COMME ASIE ET OCÉANIE PAR LES
NATIONS UNIES
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ANNEXE 3 - BANQUE ASIATIQUE D'INVESTISSEMENT
DANS LES INFRASTRUCTURES - PARTS DE CAPITAL ET DROITS DE VOTE
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ANNEXE 4 - ETAT DES SIGNATURES ET DES
RATIFICATIONS
N° 579
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2015-2016
Enregistré à la Présidence du Sénat le 4 mai 2016 |
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE , autorisant la ratification de l'accord portant création de la Banque asiatique d' investissement dans les infrastructures ,
Par M. Jean-Pierre RAFFARIN,
Sénateur
(1) Cette commission est composée de : M. Jean-Pierre Raffarin , président ; MM. Christian Cambon, Daniel Reiner, Jacques Gautier, Mmes Nathalie Goulet, Josette Durrieu, Michelle Demessine, MM. Xavier Pintat, Gilbert Roger, Robert Hue, Mme Leila Aïchi , vice-présidents ; M. André Trillard, Mmes Hélène Conway-Mouret, Joëlle Garriaud-Maylam, MM. Joël Guerriau, Alain Néri , secrétaires ; MM. Michel Billout, Jean-Marie Bockel, Michel Boutant, Jean-Pierre Cantegrit, Bernard Cazeau, Pierre Charon, Robert del Picchia, Jean-Paul Emorine, Philippe Esnol, Hubert Falco, Bernard Fournier, Jean-Paul Fournier, Jacques Gillot, Mme Éliane Giraud, MM. Gaëtan Gorce, Alain Gournac, Mme Sylvie Goy-Chavent, MM. Jean-Pierre Grand, Jean-Noël Guérini, Claude Haut, Mme Gisèle Jourda, M. Alain Joyandet, Mme Christiane Kammermann, M. Antoine Karam, Mme Bariza Khiari, MM. Robert Laufoaulu, Jacques Legendre, Jeanny Lorgeoux, Claude Malhuret, Jean-Pierre Masseret, Rachel Mazuir, Christian Namy, Claude Nougein, Philippe Paul, Mme Marie-Françoise Perol-Dumont, MM. Cédric Perrin, Yves Pozzo di Borgo, Henri de Raincourt, Alex Türk, Raymond Vall, Bernard Vera . |
Voir le(s) numéro(s) :
Assemblée nationale ( 14 ème législ.) : |
3218 , 3486 et T.A. 703 |
|
Sénat : |
483 et 580 (2015-2016) |
INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
Le Sénat est saisi du projet de loi n° 483 (2015-2016) autorisant la ratification de l'accord portant création de la Banque asiatique d'investissement dans les infrastructures (Asian Infrastructure Investment Bank , AIIB ) .
Évoquée pour la première fois en octobre 2013 par le Président chinois Xi Jinping, la création de cette banque multilatérale visant à répondre à un besoin de financement de long terme des infrastructures en Asie, s'est concrétisée très rapidement, puisque l'AIIB est opérationnelle depuis janvier 2016.
Ce succès de la diplomatie chinoise traduit à la fois la volonté de la Chine de peser davantage dans le domaine du financement multilatéral, faute d'avoir obtenu une représentation à la hauteur de son poids économique dans les institutions financières internationales existantes, ainsi que celle de poursuivre son développement économique par la conquête de nouveaux marchés commerciaux, dont l'accès serait facilité par de nouvelles infrastructures permettant de « connecter » non seulement les marchés asiatiques entre eux, mais aussi l'Asie, l'Europe et l'Afrique, conformément à la stratégie de la « nouvelle route de la soie .
Les statuts de l'AIIB ont fait l'objet d'un processus de négociations entre les membres fondateurs potentiels. La France et ses partenaires européens, qui se sont entendus pour présenter une position unifiée sur ce sujet, ont ainsi pu obtenir des mesures de sauvegarde environnementale et sociale, ainsi que de transparence des marchés publics. Ces statuts sont largement inspirés de ceux de la Banque mondiale et de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement, dont la France est membre.
Estimant satisfaisantes les garanties apportées sur le cadre social et environnemental de l'AIIB qui se présente d'ailleurs, selon les mots de son président Jin Liqun comme une structure « légère, propre et verte » (« lean, clean and green »), la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a adopté ce projet de loi qui contribuera au développement économique de l'Asie, dont les besoins en infrastructures restent immenses, dont la commission souhaite qu'il puisse se faire avec la participation des entreprises françaises qui possèdent des atouts importants dans ce domaine.
PREMIÈRE PARTIE : LES ENJEUX DE LA CRÉATION DE LA BANQUE ASIATIQUE D'INVESTISSEMENT DANS LES INFRASTRUCTURES
I. UN SUCCÈS DE LA DIPLOMATIE ÉCONOMIQUE CHINOISE
1. Le ralliement de 57 « membres fondateurs potentiels » dont la majorité des pays du continent asiatique
La création de la Banque asiatique d'investissement dans les infrastructures ou AIIB résulte d'une initiative chinoise. Elle a été évoquée, pour la première fois, en octobre 2013, par le Président chinois Xi Jinping lors du Forum de coopération économique Asie-Pacifique (APEC) à Bali, en Indonésie.
En octobre 2014, la Chine a signé avec les pays asiatiques intéressés un protocole d'entente reconnaissant l'importance des infrastructures dans le développement de l'Asie et le besoin d'un financement additionnel important à long terme pour financer les infrastructures de la région. Parmi ces pays asiatiques, on comptait, outre la Chine, l'Inde, le Kazakhstan, le Pakistan et les pays membres de l'Association des Nations d'Asie du Sud-Est (ASEAN) : Brunei, la Malaisie, les Philippines, la Thaïlande, Singapour l'Indonésie, cette dernière rejoignant l'initiative quelques mois plus tard.
La Chine a ensuite lancé un appel à candidatures pour rejoindre le groupe des membres fondateurs potentiels, dont l'échéance était fixée au 31 mars 2015, le statut de « membre fondateur potentiel » donnant la possibilité d'avoir une place à la table des négociations pendant l'élaboration des statuts et des premières politiques de la Banque.
Les grands pays occidentaux ont tous été sollicités par les autorités chinoises pour rejoindre le projet de création de l'AIIB. Parmi ceux-ci, les États-Unis, le Japon et le Canada, notamment, ont refusé de devenir membres fondateurs de l'AIIB (voir infra ), mais si les premières réactions ont été relativement réservées, elles ont finalement cédé la place à une attitude plus constructive de dialogue avec les autorités chinoises et les équipes chargées de la mise en place de la Banque.
En mars 2015, le Royaume-Uni, le Luxembourg et la Suisse ont été les premiers pays non-régionaux à annoncer leur intention de devenir « membre fondateur potentiel » de l'AIIB, bientôt suivis par la France, l'Allemagne et l'Italie qui ont également exprimé, ensemble, leur souhait d'en faire partie. À leur suite, un grand nombre de pays européens se sont également déclarés comme l'Autriche, l'Espagne, la Finlande, les Pays-Bas, la Pologne, le Portugal. Au total, dix-sept pays européens 1 ( * ) , dont quatorze membres de l'Union européenne sont devenus membres fondateurs potentiels. La Belgique, l'Irlande et Chypre feraient par ailleurs partie des pays souhaitant adhérer à l'AIIB quand de nouvelles adhésions seront possibles, peut-être au second semestre 2016, mais cela reste à confirmer.
L'Australie et la Corée du Sud ont également rejoint le groupe des pays régionaux quelques jours après l'annonce conjointe de la France, l'Allemagne et l'Italie. La Nouvelle-Zélande avait obtenu le statut de membre fondateur potentiel dès janvier 2015. Enfin, les trois BRICS qui n'avaient jusque-là pas souhaité s'associer à l'initiative - le Brésil, la Russie et l'Afrique du Sud - ont finalement déclaré leur intérêt quelques jours avant la date butoir et font également partie des membres fondateurs.
Par ailleurs, environ 35 pays auraient signalé leur intérêt à rejoindre les 57 membres fondateurs potentiels de l'AIIB quand cela sera possible, selon des modalités qui restent à définir. Parmi eux, le Canada qui n'avait pas souhaité faire partie des membres fondateur potentiels, envisage désormais sérieusement de devenir membre de l'AIIB lorsque cela sera de nouveau possible.
Le 25 décembre 2015, les conditions définies pour l'entrée en vigueur de l'accord portant création de l'AIIB ont été réunies. Au 1 er janvier 2016, les 57 membres fondateurs potentiels de l'AIIB avaient signé l'accord portant création de la Banque. À la date du 17 mars 2016, 32 d'entre eux avaient déposé leurs instruments de ratification (voir annexe).
2. La recherche d'une influence accrue de la Chine dans le domaine du financement multilatéral
Depuis plusieurs années, la Chine cherche à renforcer son influence dans les institutions financières internationales existantes, d'autant qu'elle n'est plus toujours éligible, du fait de l'augmentation de son niveau de revenu, à la totalité des financements octroyées par celles-ci. Comme d'autres pays émergents, elle s'y estime sous-représentée compte tenu de son poids dans l'économie mondiale. Elle occupe ainsi une part relativement réduite dans la Banque asiatique de développement (BAsD) (voir infra ) qui prévoit certes d'engager environ 4 milliards de dollars de financements en Chine au titre de sa stratégie pays 2015-2017, mais via le capital ordinaire de la banque, la Chine n'étant plus éligible aux financements du Fonds asiatique de développement (FAsD), partie concessionnelle des financements de la BAsD.
En 2013, la Chine, qui est actionnaire de la Banque interaméricaine de développement (BID), a choisi d'exercer son influence par la mise en place d'un fonds fiduciaire, auquel elle a prévu d'affecter jusqu'à 2 milliards de dollars, afin de cofinancer des projets avec la BID : 25 % des fonds seront destinés à des prêts souverains et 75 % à des prêts non souverains, avec des ressources disponibles respectivement jusqu'en 2016 et 2019. En 2009, au moment de son entrée au capital de la BID, la Chine avait déjà abondé deux fonds fiduciaires, auxquels elle avait consenti un apport total de 75 millions de dollars à chaque fois.
C'est dans le contexte d'un blocage, par le Congrès américain, de la réforme du Fonds monétaire internationale (FMI) de 2010 portant sur les droits de vote et l'augmentation des contributions des États membres, que la Chine a lancé en 2013 la création de l'AIIB. Toutefois, il faut noter qu'en 2015, les États-Unis ont fini par ratifier la réforme du FMI, qui a placé la Chine au troisième rang des investisseurs du fonds et permis l'entrée du renminbi (RMB) dans le panier des droits de tirage spéciaux (DST).
Force est de constater que l'AIIB est la première banque multilatérale qui n'a pas les États-Unis et le Japon comme partenaires. En effet, ces deux pays jouent un rôle majeur dans la Banque asiatique de développement (BAsD) dont ils sont les deux plus gros détenteurs du capital - fin 2014, ils en détenaient respectivement 15,6 % et 15,7 % tandis que la Chine disposait de 6,5 %. Ils n'ont d'ailleurs pas souhaité y accorder une augmentation de capital sélective visant à modifier la répartition du capital au bénéfice de la Chine. En outre, la présidence de la Banque est traditionnellement confiée à un Japonais, le Japon étant son plus gros contributeur.
Une inflexion de la position américaine a cependant été constatée à l'automne 2015, lors de la visite du Président chinois Xi Jinping aux États-Unis. À cette occasion, la Maison blanche a en effet souligné qu'elle accueillait « favorablement la contribution croissante de la Chine au financement du développement et des infrastructures en Asie et au-delà ».
En revanche, le Japon n'envisage pas de revoir sa position pour l'instant. Reconnaissant que la création de l'AIIB répondait à un besoin réel de financement des infrastructures en Asie, le Japon a annoncé, en mai 2015, son propre plan d'investissement, doté de 110 milliards de dollars sur cinq ans dédiés aux infrastructures « de qualité ». Ce plan devrait reposer sur quatre piliers : une mobilisation accrue des instruments de l'aide publique au développement japonais (prêts, dons, assistance technique), un soutien plus important à la Banque asiatique de développement, un appui sur certains instruments de la JBIC ( Japan Bank for International Cooperation ) et le partage de connaissances.
Par ailleurs, en 2014, la Chine a établi un fonds fiduciaire à la Banque africaine de développement (BAfD), doté de 2 milliards de dollars. Ce fonds, l'Africa Growing Together Fund (AGTF), vise à réaliser des cofinancements dans le secteur des infrastructures.
En juin 2015, la Chine a également adhéré au Centre de développement de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) dont l'objectif est d'aider les décideurs à concevoir des solutions politiques pour stimuler la croissance et améliorer les conditions de vie dans tous les pays et surtout dans les pays en développement.
Enfin, le 14 décembre 2015, la Chine est devenue membre de la dernière grande banque régionale de développement dont elle n'était pas membre, la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD) avec l'intention de développer des partenariats, en particulier avec l'AIIB, pour cofinancer des projets d'infrastructure en lien avec l'initiative chinoise de la « Nouvelle route de la soie » (voir infra). Si elle ne détient qu'une part très faible du capital de la BERD (0,1 %) - ce qui lui donne peu de poids dans la prise de décision, comparativement aux membres du G7 et aux membres de l'Union européenne qui détiennent respectivement 56 % et 60 % des droits de vote -, elle pourrait toutefois, comme précédemment, envisager de créer un fonds bilatéral de cofinancement : un premier signe en est une contribution chinoise de 250 millions d'euros sous forme de prise de participation au nouveau fonds de co-investissement, l' Equity Participation Fund , créé par la Banque le 25 novembre 2015.
II. UNE RÉPONSE COMPLÉMENTAIRE AU SYSTÈME FINANCIER MULTILATÉRAL ?
1. Une réponse à un besoin avéré de financement des infrastructures en Asie
Compte tenu de l'insuffisance des infrastructures dans la région, la création de l'AIIB se justifie pleinement. En 2010, la Banque asiatique de développement estimait le besoin d'investissement à 8 000 milliards de dollars entre 2010 et 2020. Les financements des banques multilatérales existantes- 30 milliards de dollars de prêts par an pour la Banque mondiale et 12 milliards pour la Banque asiatique de développement 2 ( * ) - ne permettent pas de satisfaire les besoins et les marchés financiers régionaux ne sont pas suffisamment développés. L'AIIB devrait ainsi contribuer à orienter l'épargne dormante de pays développés ou à revenus intermédiaires vers les pays de la région qui en ont le plus besoin .
•
L'Asie du Sud-Est
enregistre
un retard important s'agissant de la quantité et de la qualité
des infrastructures par rapport aux autres régions du monde, si l'on
excepte Singapour et la Malaisie qui se classent respectivement au
2
ème
et 24
ème
rang
3
(
*
)
selon le classement
Global
Competitiveness Index
(GCI) 2015-2016, au chapitre des infrastructures,
leurs ports et leurs aéroports comptant parmi les premiers mondiaux. En
revanche, la Thaïlande, l'Indonésie, le Vietnam et les Philippines
ont des infrastructures globalement sous-dimensionnées ou
nécessitant des améliorations, ces pays se situant entre la
44
ème
et la 90
ème
place du classement GCI,
tandis que les pays les moins avancés de la région, la Birmanie,
le Cambodge et le Laos, ont besoin de développer leurs infrastructures
de base. Au total, les besoins en infrastructures, qui se font
particulièrement sentir dans les secteurs de l'énergie et des
transports, sont estimés, par notre service économique qui couvre
la région,
entre 100 et 200 milliards de dollars par an
pour les prochaines décennies
. L'Indonésie, les
Philippines, la Thaïlande, la Malaisie et le Vietnam devraient constituer
les marchés porteurs. Les besoins en financement des pays de l'ASEAN
sont importants, d'autant que certains d'entre eux, comme le Vietnam, le
Cambodge et le Laos rencontrent des difficultés budgétaires et
que l'aide publique au développement (APD) dédiée aux
infrastructures - apportée principalement par le Japon et dans une
moindre mesure par les banques multilatérales de développement -
contribue pour à peine 10 % aux financements actuels des
infrastructures.
•
Les pays d'Asie du Sud
,
enregistrent, dans l'ensemble, un retard significatif s'agissant de la
quantité et de la qualité de leurs infrastructures de transport,
ce qui constitue un frein majeur à leur croissance. Confrontés,
à des degrés divers, à des contraintes de financement, ils
ne reçoivent pas de financements multilatéraux à la
hauteur de leurs besoins : taux de décaissement en général
très bas comme au Bangladesh ; problème de la
«
single borrower limit
» de la Banque mondiale,
déjà très exposée en Inde ; concentration des
prêts dans des secteurs autres que le transport comme au Pakistan. Les
financements bilatéraux, quant à eux, constituent un apport
non-négligeable, en particulier pour des pays comme le Sri Lanka, le
Bangladesh et le Pakistan, qui se sont nettement ouverts aux financements
chinois ces dernières années, en particulier dans les domaines
portuaire et routier. En Inde, ce sont les financements japonais qui
prédominent.
• Les besoins en financement
des
pays de l'Asie centrale et du Caucase
sont importants pour le développement des infrastructures, dont le
sous-dimensionnement ou l'état médiocre sont le résultat
d'un sous-investissement depuis la chute de l'URSS, voire depuis le
début des années 1980, ce qui constitue une entrave au
développement de ces pays. L'état général des
infrastructures apparaît particulièrement insatisfaisant en Asie
centrale, sauf en Azerbaïdjan, où une politique plus active
d'investissement dans les infrastructures ferroviaires et routières
semble avoir été menée.
Même si les principales institutions financières internationales sont déjà très actives, il existe des besoins supplémentaires de financements, ainsi que des besoins spécifiques qui ne sont pas couverts et dans lesquels la BAII pourrait s'engager. Ainsi, en Ouzbékistan, la Banque asiatique de développement ne finance pas les infrastructures de dimension régionale ou locale mais se concentre sur le financement des infrastructures transnationales qui participent au désenclavement et à une meilleure intégration de la région. En outre, le contexte macroéconomique dégradé dans la région, lié principalement à la chute des revenus en hydrocarbures et à l'impact de la dévaluation du rouble sur les monnaies locales, accroît les besoins de financement extérieur - le Kazakhstan a ainsi fait appel à l'aide budgétaire de la Banque asiatique de développement - mais conduit aussi au rééchelonnement de certains des plus grands projets d'infrastructures comme le métro de Bakou en Azerbaïdjan, en vue de limiter l'endettement.
Selon la Direction générale du Trésor 4 ( * ) , quelques projets auraient déjà été soumis par le Bangladesh, l'Inde et la Géorgie notamment. L'AIIB a également envoyé une mission au Tadjikistan pour identifier des projets avec le gouvernement et explorer des pistes de collaboration avec la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD).
De plus, la création de l'AIIB participe à l'intégration progressive des marchés asiatiques, au nom de la « connectivité » au sein du continent asiatique, mais également entre l'Asie, l'Europe et l'Afrique. En septembre 2013, concomitamment au lancement du projet de l'AIIB, le Président Xi Jinping avait aussi dévoilé sa stratégie de la « nouvelle route de la soie » dite aussi « one belt, one road » qui regroupe une route terrestre devant relier la Chine à l'Europe par l'intermédiaire de l'Asie centrale et occidentale et une route maritime venant renforcer les connections de la Chine avec les pays d'Asie du Sud, l'Afrique et l'Europe. Cette initiative a notamment vocation à permettre à la Chine de conquérir de nouveaux marchés commerciaux en en facilitant l'accès par la construction d'infrastructures telles que des routes, des ports et des aéroports. Dans un contexte de ralentissement de la croissance de l'économie chinoise et de diminution de la demande externe. Un fonds d'investissement, doté de 40 milliards de dollars est dédié au projet de la nouvelle route de la soie.
Même s'il n'existe pas de lien formel entre ces deux initiatives - une institution multilatérale de financement et une vision stratégique de politique étrangère de la Chine - leurs périmètres d'intervention se recouvrent largement, en termes géographiques (ASEAN, Asie centrale, Asie du Sud) mais aussi sectoriels puisque la priorité est donnée aux infrastructures de transport. Répondant par écrit aux questions de votre rapporteur, la Direction générale du Trésor 5 ( * ) a indiqué que plusieurs projets pourraient vraisemblablement bénéficier du soutien des deux initiatives, d'autant que la Chine, premier actionnaire de l'AIIB, devrait certainement encourager ce rapprochement. À cet égard, les autorités chinoises ont d'ores et déjà clairement indiqué qu'elles chercheraient à mobiliser l'AIIB comme instrument financier en faveur de la nouvelle route de la soie.
2. Concurrence ou complémentarité avec les autres bailleurs de fonds internationaux ?
L'AIIB n'a pas vocation à concurrencer ou à se substituer aux actions du Fonds monétaire international (FMI), de la Banque mondiale (BM) ou de la Banque asiatique de développement (BAsD). Elle se positionne plutôt comme complémentaire aux autres institutions financières internationales, conformément à ce qu'affirment ses statuts. Des cofinancements avec les banques multilatérales existantes sont prévus parmi les toutes premières opérations de la Banque et le Président de l'AIIB récemment nommé, Jin Liqun, a rencontré les Présidents de la BM et de la BAsD et identifié un certain nombre de projets concrets qui pourront faire l'objet de cofinancements.
D'ailleurs, même si l'AIIB opérera dans des zones géographiques et des secteurs dans lesquels la Banque mondiale (BM) et la Banque asiatique de développement (BAsD) sont déjà présentes, la « rivalité » entre ces institutions pour les projets sur le terrain n'est cependant pas avérée. En premier lieu, les besoins de financement dans le secteur des infrastructures en Asie sont tels que tout nouveau bailleur est par principe le bienvenu sur ce marché, en second lieu, les premiers échanges entre l'AIIB et ses consoeurs semblent positifs et s'orienter vers une démarche de partenariats et de cofinancements, dont l'AIIB aura besoin, de son côté, pour prendre pied sur le marché.
En outre, les membres non-régionaux de l'AIIB, mais aussi certains membres régionaux comme l'Australie et la Nouvelle-Zélande, ont beaucoup insisté, pendant les négociations, sur l'importance de ne pas dupliquer les instruments existants et de rechercher des partenariats avec les institutions de développement existantes. La France, avec ses partenaires européens, a notamment obtenu que les standards définis par l'AIIB en matière de normes environnementales et sociales et d'appels d'offres permettent de faciliter les cofinancements et qu'il soit clairement inscrit dans les statuts de l'AIIB qu'elle se positionne comme une institution complémentaire, et non concurrente, par rapport aux banques existantes.
III. UNE PLACE DE LA FRANCE RÉSOLUMENT ANCRÉE DANS L'APPARTENANCE À LA ZONE EURO
Le 17 mars 2015, la France, accompagnée de l'Allemagne et de l'Italie, s'est jointe au groupe des membres fondateurs potentiels, juste avant la date de clôture de l'appel à candidature fixée au 31 mars 2015. Le Directeur général du Trésor, entendu 6 ( * ) par votre commission, a indiqué que ces trois pays y avaient adhéré simultanément en présentant un acte unique. Cette démarche commune sans précédent, a-t-il souligné, avait pour objet de manifester la forte cohésion et solidarité de la zone euro. Ce faisant, la France a considéré que la Banque a un rôle à jouer pour répondre à l'important besoin de financement des infrastructures en Asie et qu'une participation dès sa création, permettrait de s'assurer du respect des meilleurs pratiques en termes de gouvernance, de marchés publics ainsi que de la sauvegarde des normes environnementales et sociales.
Dans le cadre d'une coordination satisfaisante, avec notamment l'Allemagne, l'Italie, le Royaume-Uni, les Pays-Bas et la Suisse, en vue de défendre les priorités des pays non-régionaux européens, la France a participé au processus de négociation à partir de la quatrième réunion, les 27 et 28 avril 2015, à Pékin. Les trois réunions précédentes avaient permis d'adopter les grandes règles de gouvernance ainsi que le principe d'une collaboration étroite entre la Banque mondiale et la Banque asiatique de développement. Au cours de la réunion de finalisation des statuts qui s'est tenue en mai 2015 à Singapour, la France et ses partenaires européens ont abordé les politiques environnementales et sociales ainsi que les règles de passation des marchés. Les pays non-régionaux ont obtenu satisfaction sur les points qu'ils jugeaient indispensables (voir infra ).
Cette coordination s'est prolongée par la demande des pays de la zone euro de former une circonscription unique au sein du Conseil d'administration, dès août 2015, et l'obtention d'une chaise « Zone euro » occupée, à tour de rôle, par les pays concernés, pour une durée calculée en fonction de leurs poids respectifs en termes de droits de vote au sein de la circonscription (voir infra ).
Pour la France, le canal multilatéral présente un certain nombre d'avantages comparatifs en permettant de mobiliser une multiplicité d'acteurs et d'expertises autour d'enjeux importants, parallèlement aux capacités d'interventions bilatérales. L'AIIB interviendra principalement, au moins dans les premières années, en Asie du Sud, Asie centrale et Asie du Sud-Est, régions du monde dans laquelle l'AFD est aussi active. En revanche, à ce stade, elle s'est engagée à ne pas intervenir en Chine où l'AFD est aussi présente. Selon la Direction générale du Trésor 7 ( * ) , l'AIIB est perçue par l'AFD comme un partenaire potentiel de cofinancement dans cette zone où les projets sont de taille très importante et les cofinancements entre bailleurs bilatéraux et entre bailleurs multilatéraux et bilatéraux sont chose courante. Des contacts à haut niveau ont déjà eu lieu entre les deux institutions : le président de l'AIIB, Jin Liqun, a rencontré la directrice générale de l'AFD, Anne Paugam, lors de son déplacement à Paris fin 2015 et plusieurs pistes de collaboration ont été évoquées. La coopération sera bénéfique tant pour le rayonnement de la France, par les canaux bilatéral et multilatéral, que pour les pays bénéficiaires qui verront ainsi complétée la palette de financements mis à leur disposition.
SECONDE PARTIE : DES STATUTS DE LA BANQUE ASIATIQUE D'INVESTISSEMENT DANS LES INFRASTRUCTURES QUI GARANTISSENT LE RESPECT DES PRINCIPES SOCIAUX ET ENVIRONNEMENTAUX
Les statuts de l'AIIB sont très proches de ceux de la Banque mondiale et de ceux de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement.
Les statuts comportent 60 articles et 2 annexes. L'annexe A liste les souscriptions initiales au capital social autorisé pour les pays pouvant devenir membres en distinguant entre les membres régionaux et les membres non régionaux, tandis que l'annexe B précise les modalités d'élection des administrateurs.
I. L'OBJET PRINCIPAL DE LA BANQUE : LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE DURABLE (ARTICLES 1 À 3)
La Banque a pour objet de favoriser le développement économique durable, de créer de la richesse et d'améliorer la connectivité des infrastructures en Asie en investissant dans les infrastructures et dans d'autres secteurs productifs, ainsi que de promouvoir la coopération régionale pour traiter les enjeux de développement en collaboration avec d'autres institutions multilatérales et bilatérales de développement.
Ce concept de soutenabilité a été ajouté au mandat de la Banque à la demande des pays non-régionaux et notamment de la France.
Les financements de la Banque sont accordés aux pays de la région et pourraient l'être également à des pays situés hors de la région pour autant que cela profiterait au développement de la région . Les termes « Asie » et « région » englobent les régions géographiques classées comme Asie et Océanie par les Nations unies (voir annexe).
La Banque promeut l'investissement de capitaux publics et privés, utilise ses ressources et encourage les investissements privés pour le développement des infrastructures et d'autres secteurs productifs. Elle peut éventuellement suppléer l'investissement privé lorsque celui-ci n'est pas disponible à des conditions raisonnables.
Il est en outre prévu que peuvent acquérir la qualité de membre de la Banque, les membres de la Banque internationale pour la reconstruction et le développement ou de la Banque asiatique de développement. Une distinction est opérée entre membres régionaux, membres non régionaux et membres fondateurs. Après l'échéance fixée pour rejoindre la Banque, une procédure spécifique est mise en place, permettant de devenir membre par un vote à la majorité spéciale du Conseil des gouverneurs.
II. LE CAPITAL DE LA BANQUE (ARTICLES 4 À 8)
Le capital social initial autorisé de l'AIIB s'élève à 100 milliards de dollars américains , divisé en un million de parts d'une valeur nominale de 100 000 dollars.
Une augmentation du capital peut être décidée par le Conseil des gouverneurs à une majorité qualifiée et en tout état de cause, le capital social de la banque est révisé au moins tous les cinq ans par le Conseil des gouverneurs. Chaque membre dispose alors « d'une possibilité raisonnable de souscrire ».
La valeur nominale des parts libérées est de 20 milliards de dollars et celle des parts sujettes à appel de 80 milliards de dollars. Les parts de capital initialement souscrites par les membres sont émises au pair. Chaque membre souscrit à des parts du capital de la Banque dans un rapport de 2 parts libérées pour 8 parts sujettes à appel.
Le pourcentage de capital détenu par les membres régionaux doit être au moins de 75 % du capital total souscrit. Le nombre initial de parts à souscrire est fixé par le Conseil des gouverneurs. Celui-ci peut toutefois, à la demande d'un membre, augmenter la souscription de ce membre à la condition que le pourcentage de capital détenu par les membres régionaux ne devienne pas inférieur à 75 % du capital total souscrit, sauf décision contraire du Conseil des gouverneurs statuant à une majorité qualifiée. De manière satisfaisante, les pays non-régionaux ont obtenu ainsi la possibilité d'élargir la part des non-régionaux dans le capital de la Banque dans la perspective d'accueillir de nouveaux membres importants, notamment les États-Unis.
En acceptant de faire entrer les pays non régionaux dans le capital, la part détenue par la Chine 8 ( * ) dans celui-ci, qui devait être de 50 %, est passée à 30,34 %.
En matière d'allocation du capital, les membres non-régionaux se sont accordés pour se répartir leurs droits selon la même formule que celle utilisée par les membres régionaux, soit 60 % de PIB à prix courants et 40 % de PIB en parité de pouvoir d'achat sur la base des chiffres du FMI de 2013 (voir en annexe les parts de capital et les droits de vote des membres régionaux et non régionaux de l'AIIB).
Le versement du montant initialement souscrit s'opère en dollars, en cinq tranches (20 %). La première est versée dans un délai de trente jours suivant l'entrée en vigueur de l'accord ou, au plus tard, à la date du dépôt de l'instrument de ratification selon la date la plus tardive, les tranches suivantes le sont ensuite chaque année après la date retenue. Les pays considérés comme moins avancés bénéficient d'un dispositif particulier pour le versement de leur souscription.
La part de la France représente 3,37 % du capital , soit une contribution de 3 375,6 millions de dollars au capital initial, ce qui la classe septième actionnaire de l'AIIB et deuxième actionnaire non-régional après l'Allemagne mais devant le Brésil et le Royaume-Uni. Les parts appelées, dont le montant s'élève à 675,12 millions de dollars, devront être versées sur cinq ans. Si la France ratifie l'accord en 2016 comme prévu, elle devra verser deux tranches (2 x 20%) la première année, soit environ 270 millions de dollars, puis trois tranches de 135 millions de dollars respectivement en 2017, 2018 et 2019.
Tous les droits liés aux parts, y compris les droits de vote, sont suspendus tant que les sommes exigibles n'ont pas été versées.
Ces parts de capital ne peuvent être données en nantissement, ni grevées de charges. Les membres de la Banque sont responsables, au titre des parts, dans la limite de la partie non versée du prix d'émission. En revanche, ils ne peuvent être tenus pour responsables des obligations contractées par la Banque.
L'accord définit, en outre, les fonds ordinaires comme comprenant le capital social autorisé, les fonds obtenus en vertu des pouvoirs généraux de la Banque, les fonds ou revenus perçus par la Banque hors les ressources des fonds spéciaux visés à l'article 17 (voir infra ).
III. UNE EXIGENCE DE CONFORMITÉ AUX MEILLEURES PRATIQUES INTERNATIONALES (ARTICLES 9 À 15)
Les ressources de la Banque sont exclusivement employées pour la poursuite de son objet.
Les opérations financières de la Banque se divisent en opérations ordinaires financées par ses ressources ordinaires et en opérations spéciales financées par des fonds spéciaux qui doivent apparaître, de manière séparée, sur les états financiers. Les ressources ordinaires et les ressources des fonds spéciaux sont à tous moments et à tous égards détenues, utilisées, engagées, investies ou aliénées de manière totalement distincte. Les dépenses qui relèvent directement des opérations ordinaires ne peuvent être imputées que sur les ressources ordinaires de la Banque.
L'accord fixe le montant total de l'encours des opérations financières de la Banque qui ne peut être modifié que par une décision du Conseil des gouverneurs, sans toutefois pouvoir dépasser 250 % du capital souscrit net d'obligations de la Banque, de ses réserves, des bénéfices non distribués qui font partie des ressources ordinaires.
Les bénéficiaires des financements accordés par la Banque sont ses membres, leurs agences, administrations et subdivisions politiques ou les entités ou entreprises actives sur leur territoire, ainsi que les organismes ou entités internationaux intéressés par le développement économique de la région.
L'AIIB a recours principalement à trois instruments financiers : les prêts souverains et non souverains, les prises de participation minoritaires et les garanties. Dans certaines circonstances particulières, la Banque peut prêter assistance à un autre bénéficiaire avec l'accord du Conseil des gouverneurs statuant à une majorité qualifiée.
Les statuts fixent les principes régissant les opérations. Dès le début de leur négociation, les pays non régionaux, dont la France, ont veillé à ce que les politiques de la Banque reposent sur les grands principes auxquels ils sont attachés, en vue de garantir que celles-ci soient proches de celles des autres banques multilatérales de développement.
À cet égard, le rapport explicatif, qui accompagne les statuts, prévoit que ces politiques se fonderaient « sur les meilleures pratiques internationales » et « incluraient, entre autres, des cadres environnementaux et sociaux, la divulgation de l'information, la passation de marchés et la soutenabilité de la dette ». Ces grands principes figurent à l'article 13 qui met en exergue les principes d'une saine gestion bancaire. La Banque doit ainsi s'assurer que « chacune de ses opérations est conforme à ses politiques opérationnelle et financière, notamment et de manière non limitative en matière d'incidences environnementales et sociales ». S'agissant des règles de passation des marchés, les statuts prévoient que « la Banque n'impose aucune restriction à l'acquisition de biens et de services au regard de la provenance ».
Pendant la négociation, la France a encore rappelé le caractère essentiel, pour elle, des sauvegardes environnementales et sociales ainsi que des règles de passation des marchés. Dans ce contexte, le secrétariat intérimaire chargé de la création de l'AIIB a soumis à l'assemblée des négociateurs en chef, afin de compléter les statuts, un projet de « cadre environnemental et social » et un « cadre en matière de passation de marchés » sur lesquels des discussions ont pu s'engager dès le mois de mai 2015. La Direction Générale du Trésor, le ministère des affaires étrangères et du développement international et l'Agence française de développement ont joint leur expertise pour examiner ces deux documents.
Le cadre de passation de marchés a rapidement été considéré comme satisfaisant. En revanche, le cadre social et environnemental, document particulièrement sensible, a requis une attention plus grande . La France, en coordination avec les autres pays européens, a formulé un certain nombre de commentaires et de propositions, visant notamment à garantir que l'AIIB pourrait facilement réaliser des opérations en cofinancement et à défendre une meilleure prise en compte de plusieurs aspects importants comme les droits du travail. À la demande de la France notamment, ce document a fait l'objet d'une consultation publique, ouverte à tous, au cours de l'été 2015. La Banque a ensuite présenté une version révisée de ce « cadre », soumis à la relecture des négociateurs en chef, avec l'assurance qu'il ne serait pas présenté pour adoption au conseil d'administration tant qu'il ne ferait pas consensus parmi tous les membres fondateurs potentiels. Après quelques échanges supplémentaires - pendant lesquels la France a notamment demandé que la prise en compte l'Accord de Paris sur le climat - le document a été considéré comme satisfaisant par l'ensemble des parties.
Ces deux documents-cadres 9 ( * ) ont été formellement adoptés, début 2016, par le conseil d'administration qui peut les réviser. Ils devront tous deux être complétés par des procédures de mise en oeuvre.
Les statuts indiquent que les modalités et les conditions de financement doivent être définies en tenant compte de la nécessité de protéger la situation financière de la Banque et ses revenus. Le montant d'une prise de participation de la Banque dans une entreprise est ainsi plafonné. Les financements peuvent être accordés dans la monnaie du pays concerné.
Par ailleurs, la Banque peut fournir différentes sortes d'assistance technique. Les frais d'assistance non remboursables sont imputés sur les recettes de la Banque.
IV. FINANCES DE LA BANQUE (ARTICLES 16 À 20)
Selon les statuts, la Banque dispose de pouvoirs généraux, notamment pour lever des fonds ; pour acquérir, vendre ou garantir des titres ; pour placer ou mettre en dépôt des fonds non nécessaires à ses opérations. Elle peut également établir des filiales ou accepter des fonds spéciaux qui correspondent à son objet et relèvent de ses fonctions. Elle doit adopter des règles spécifiques pour la mise en place, la gestion et l'utilisation de chaque fonds spécial.
Le Conseil des gouverneurs définit au moins une fois par an la part des revenus à affecter aux différents emplois, ainsi que la part à répartir entre les membres le cas échéant.
Les membres de la Banque ne peuvent imposer aucune restriction portant sur les monnaies. C'est à la Banque qu'il appartient d'évaluer une monnaie par rapport à une autre ou de décider si une monnaie est convertible.
S'agissant des opérations ordinaires, la Banque décide également du traitement des cas d'arriérés ou de défaillance pour honorer les engagements pris à son encontre. Les statuts prévoient que la Banque doit constituer des provisions pour couvrir les pertes éventuelles ainsi que les règles d'imputation des pertes.
V. GOUVERNANCE (ARTICLES 21 À 31)
L'accord rappelle que la Banque et son personnel ne doivent pas s'ingérer dans les affaires politiques d'un des membres de la Banque et qu'ils ne doivent pas se laisser influencer par les membres de la Banque. Seules des considérations économiques doivent présider aux décisions.
1. Le conseil des gouverneurs
Investi de tous les pouvoirs, le Conseil des gouverneurs peut les déléguer en tout ou partie au Conseil d'administration, à l'exception des plus importants qui sont relatifs à l'admission ou la suspension de nouveaux membres, à l'augmentation ou à la réduction du capital, aux recours contre les interprétations ou applications du présent accord par le Conseil d'administration, à l'élection des administrateurs de la Banque et du Président, à l'approbation du bilan général et du compte profits et pertes de la Banque, à la détermination du montant des réserves, à la modification des statuts, à la décision de mettre fin aux opérations de la Banque et à la répartition des actifs ainsi qu'à l'exercice des autres pouvoirs expressément conférés au Conseil des gouverneurs.
Chaque membre de la Banque désigne un gouverneur et un gouverneur suppléant qu'il peut révoquer à tout moment. Les gouverneurs, titulaires et suppléants, ne sont pas rétribués.
Lors de chacune de ses réunions annuelles, le Conseil des gouverneurs élit l'un de ses gouverneurs comme président pour l'année.
L'accord précise également quelques règles de procédure. En dehors de l'Assemblée annuelle, le Conseil des gouverneurs peut également se réunir de sa propre initiative ou sur convocation du Conseil d'administration à la demande de 5 membres de la Banque.
Le quorum est fixé à la majorité des gouverneurs représentant au moins 2/3 du total des voix des membres.
Des règles de procédure établies par le Conseil des gouverneurs permettent au Conseil d'administration de recueillir le vote des gouverneurs sans convocation en assemblée et d'organiser des réunions électroniques du Conseil des gouverneurs.
2. Le Conseil d'administration
Le Conseil d'administration est responsable de la direction des affaires générales de la Banque et exerce tous les pouvoirs délégués par le Conseil des gouverneurs, notamment ceux relatifs à la préparation des travaux du Conseil des gouverneurs, à la définition des politiques de la Banque et des principales politiques opérationnelles et financières à l'adoption de décisions en matière de prêts, garanties, prises de participation et assistance technique. Il supervise également la gestion et le fonctionnement de la Banque, approuve la stratégie, le plan annuel et le budget de la Banque et soumet les comptes annuels audités au Conseil des gouverneurs. Conformément à la demande des pays non régionaux et notamment de la France, la Banque établit un mécanisme de surveillance de la gestion et du fonctionnement de la Banque conforme au principe de transparence.
Il est composé de douze membres élus pour un mandat de deux ans renouvelables, non cumulables avec celui de gouverneur. Neuf d'entre eux sont élus par les gouverneurs qui représentent les membres régionaux et les trois autres sont élus par les gouverneurs qui représentent les membres non régionaux. Choisis parmi les ressortissants des pays membres ayant une expertise en matière économique et financière, ils ne sont pas rémunérés, pour favoriser une structure légère et peu coûteuse.
S'agissant de la répartition des trois « chaises » non régionales , les pays non régionaux sont convenus de la formule suivante, les pays de la zone euro ayant manifesté leur volonté de former une circonscription unique au sein du Conseil d'administration :
chaise « Zone euro » |
chaise « Europe élargie » |
chaise « Emergents non-asiatiques » |
Allemagne France Italie Espagne Pays-Bas Autriche Finlande Portugal Luxembourg Malte |
Royaume-Uni Pologne Suisse Suède Norvège Danemark Islande |
Brésil Égypte Afrique du Sud |
Comme l'a souligné le Directeur général du Trésor lors de son audition 10 ( * ) devant la commission, l'institution d'une « chaise » unique pour la zone euro constitue en soi une grande innovation . La France la partagera avec plusieurs autres pays européens selon l'accord de rotation obtenu en décembre 2015, puis entériné par les ministres des finances concernés, lors d'une réunion de l'Eurogroupe. Cet accord, qui porte sur douze ans, prévoit que tous les pays de la circonscription peuvent, théoriquement, accéder aux différents postes de représentation et que le temps de présence des différents pays est approximativement proportionnel à leurs poids respectifs en termes de droits de vote au sein de la circonscription. La rotation des pays est en principe annuelle, mais l'Allemagne, la France et l'Italie peuvent, compte tenu de leur importance, bénéficier d'un mandat plus long. La France détiendra ainsi le poste d'administrateur titulaire trois années sur douze (soit 25 % du temps alors que ses droits de vote pour la chaise « Zone euro » s'élèvent à 21,4 %) ainsi que l'un des deux postes d'administrateurs suppléants pendant cinq ans.
Entre l'inauguration de la banque en janvier 2016 et la première assemblée annuelle en juin 2016, le poste d'administrateur titulaire est occupé par l'Allemagne, tandis que les deux postes de suppléants le sont respectivement par les Pays-Bas et l'Autriche, tous ces pays ayant ratifié l'accord. Le deuxième poste de suppléant était destiné à la France et devrait lui revenir dès qu'elle aura ratifiée.
L'annexe B fixe les dispositions relatives à l'élection des administrateurs.
Chaque administrateur nomme un administrateur suppléant pour agir en son absence, voire deux s'il a reçu un nombre très important de voix.
Selon les règles de procédure, le Conseil d'administration se réunit périodiquement, mais il peut aussi être convoqué par le Conseil des gouverneurs à la demande de trois administrateurs.
Le Conseil d'administration fonctionne en principe de « façon non résidente », ce qui dispense les pays membres d'y affecter des représentants permanents. La convocation de ceux-ci pour les seules réunions réduit notablement les frais de fonctionnement de la Banque. Le suivi de l'AIIB par l'administration française sera effectué, comme c'est le cas pour les autres banques multilatérales existantes, par le bureau compétent de la Direction générale du Trésor avec l'appui de notre ambassade à Pékin.
Le quorum est identique à celui du Conseil des gouverneurs.
En l'absence d'administrateur de sa nationalité présent au Conseil d'administration, un pays membre peut y envoyer un représentant sans droit de vote, si l'ordre du jour appelle une question qui le concerne particulièrement.
Des règles de procédure établies par le Conseil d'administration permettent d'organiser des réunions électroniques ou de voter sur une question sans réunion.
3. Les règles de vote
L'accord présente les modalités de calcul des droits de vote de chaque membre lors des réunions du Conseil des gouverneurs et du Conseil d'administration. Chaque membre fondateur se voit attribuer, outre les voix dont il dispose en qualité de membre, 600 voix de membre fondateur.
Les différentes règles de majorité permettant au Conseil des gouverneurs de statuer sont précisées : majorité des suffrages exprimés, majorité qualifiée avec un vote affirmatif de deux tiers du nombre total des gouverneurs représentant au moins les trois quarts du total des voix des membres, majorité spéciale avec un vote affirmatif de la majorité du nombre total des gouverneurs représentant au moins la majorité du total des voix des membres.
Une fois que tous les pays auront ratifié, la Chine 11 ( * ) disposera de 300 834 voix sur un total de 1 154 223, ce qui représente 26,06 % des droits de vote. La France, quant à elle, disposera, de 36 786 voix, soit 3 ,19 %.
Pour les décisions les plus importantes, qui doivent être adoptées à des majorités qualifiées, par le Conseil des Gouverneurs ou le Conseil d'administration, représentant au moins les trois quarts des voix des membres , la Chine et les pays non régionaux, qui détiennent respectivement 26,06 % et 26,7 % des droits de vote, bénéficient d'un droit de véto. C'est le cas notamment des décisions relatives à la définition des politiques de la Banque ou aux opérations de la Banque. En revanche, si de nouveaux pays sont autorisés à adhérer à l'AIIB, la Chine perdra ce droit de véto.
4. Le Président de la Banque, le ou les vice-présidents et les personnels de la Banque
Le Président est élu, à une majorité qualifiée, par le Conseil des gouverneurs qui peut aussi le suspendre ou le démettre de ses fonctions. Choisi parmi les ressortissants des pays membres de la région, son mandat de 5 ans n'est renouvelable qu'une fois, comme l'avaient exigé les pays non-régionaux. Sauf en cas de partage égal des voix, il ne prend pas part au vote. Représentant légal de la Banque, il conduit, sous la direction du Conseil d'administration, les affaires courantes de la Banque. Il est l'autorité hiérarchique des personnels qu'il recrute « sur la base géographique la plus large possible tout en gardant à l'esprit la nécessité primordiale de garantir les normes les plus exigeantes d'efficacité et de compétence technique ».
En janvier 2016, le Conseil des gouverneurs a élu le Chinois Jin Liqun à la présidence de la Banque .
Sur sa recommandation, le Conseil d'administration nomme un ou plusieurs vice-présidents « sur la base d'un processus ouvert, transparent et fondé sur le mérite » comme l'ont souhaité et obtenu les pays non-régionaux, dont la France.
Dans l'exercice de leurs fonctions, le président et ses personnels ont un devoir de loyauté exclusif envers la Banque.
VI. DES DISPOSITIONS GÉNÉRALES QUI OUVRENT LA VOIE À LA COOPÉRATION (ARTICLES 32 À 36)
Le siège de la Banque est établi à Pékin, mais la Banque est autorisée à établir des agences et des bureaux en d'autres lieux.
Chaque membre désigne les points de contact nationaux ainsi que ses dépositaires pour conserver des avoirs et des actifs de la Banque.
La langue de travail est l'anglais. Les membres fournissent à la Banque les informations qui facilitent son travail et la Banque transmet à ses membres des rapports sur sa situation financière à différentes échéances. Pour satisfaire le principe de transparence défendu notamment par la France, une politique de divulgation d'informations est mise en place pour assurer la transparence des opérations.
L'accord ouvre la possibilité pour la Banque de coopérer avec d'autres institutions financières internationales et d'autres organisations internationales concernées par le développement économique de la région .
VII. RETRAIT ET SUSPENSION DES MEMBRES (ARTICLES 37 À 39)
Tout membre peut se retirer de la Banque en respectant un préavis d'au moins 6 mois, mais reste responsable des engagements contractés envers la Banque jusqu'à la date de réception du préavis.
En cas de manquement à ses obligations, un membre peut être suspendu par le Conseil des gouverneurs et cesse automatiquement d'être membre un an après la date de suspension.
L'accord prévoit les règles d'apurement des comptes d'un pays qui cesse d'être membre, ainsi que les modalités de rachat, par la Banque, des parts de ce pays.
VIII. SUSPENSION ET CESSATION DES OPÉRATIONS DE BANQUE (ARTICLES 40 À 43)
L'accord autorise la suspension temporaire des opérations de banque par le Conseil d'administration en cas d'urgence, en attendant que le Conseil des gouverneurs décide des suites à prendre.
Il donne également à la Banque la possibilité de mettre fin immédiatement aux activités de la Banque par un vote qualifié du Conseil des gouverneurs. Dans ce cas, la responsabilité de tous les membres au regard des souscriptions non appelées au capital social est maintenue jusqu'à la liquidation de toutes les créances, selon l'ordre de priorité fixé entre les créanciers. Une fois tous les engagements envers les créanciers honorés, le Conseil des gouverneurs peut décider, à la majorité qualifiée, de distribuer les actifs entre les membres, selon des modalités précisées dans l'accord.
IX. STATUT, IMMUNITÉS, PRIVILÈGES ET EXONÉRATIONS ACCORDÉS À LA BANQUE SUR LE TERRITOIRE DE SES MEMBRES (ARTICLES 44 À 52)
La Banque est dotée de la pleine personnalité morale et a la capacité juridique notamment de conclure des contrats, d'acquérir et d'aliéner des biens immobiliers et mobiliers ainsi que d'ester et de se défendre en justice.
L'accord pose le principe de l'immunité de juridiction de la Banque qu'il assortit d'exceptions. Il renvoie aux procédures spéciales de la Banque pour le règlement des litiges entre la Banque et ses membres.
Sont également mentionnés les principes de l'immunité d'exécution des biens et des actifs de la Banque, de l'inviolabilité des archives, du traitement privilégié des communications entre chaque membre et la Banque et entre les membres, de l'exemption des actifs de la Banque de toute restriction empêchant la poursuite de l'objet et l'exercice des fonctions bancaires de manière efficace, ainsi que de l'exonération fiscale et douanière de la Banque, de ses avoirs, biens et revenus.
Les personnels de la Banque bénéficient également d'immunités et de privilèges en matière de procédure judiciaire, de déplacement ainsi que de règles relatives aux étrangers et aux changes. En outre, aucun impôt n'est prélevé sur les salaires et émoluments.
L'accord autorise la Banque à renoncer à ses privilèges, immunités et exonérations.
X. AMENDEMENT, INTERPRÉTATION, ARBITRAGE (ARTICLES 53 À 56)
L'accord prévoit que seule une majorité qualifiée du Conseil des gouverneurs peut amender le présent accord. L'unanimité est toutefois requise pour modifier le droit de se retirer de la Banque, les limites à la responsabilité des membres au titre des parts ainsi que les droits relatifs au rachat du capital social.
Les questions d'interprétation du présent accord relèvent de la compétence du Conseil d'administration. Une fois la décision rendue, la question peut être renvoyée devant le Conseil des gouverneurs qui statue en dernier ressort.
L'accord établit les conditions d'arbitrage entre la Banque et un ancien membre et entre la Banque et un membre après l'adoption d'une décision visant à mettre fin aux opérations de la Banque. Il précise également la composition du tribunal d'arbitrage et la procédure suivie.
Les statuts posent en outre le principe de l'accord tacite d'un membre dont l'accord préalable à l'action de la Banque est requis, sauf objection dans un délai raisonnable.
XI. DISPOSITIONS FINALES (ARTICLES 57 À 60)
Les dispositions finales fixent les règles de signature du présent accord et établissent la Chine comme son dépositaire. Les textes anglais, chinois et français de l'accord font également foi.
L'accord est soumis à la ratification, à l'acceptation ou à l'approbation des signataires. Les modalités de dépôt des instruments sont détaillées. La date du dépôt des instruments est celle retenue pour avoir la qualité de membre de la Banque.
L'entrée en vigueur de l'accord portant création de l'AIIB est subordonnée à sa ratification par au moins 10 pays représentant au moins 50% des droits de vote. Ces conditions ont été réunies le 25 décembre 2015.
Les statuts retiennent le principe d'une réunion inaugurale dès l'entrée en vigueur de l'accord.
La cérémonie d'ouverture et les premières réunions du Conseil des gouverneurs et du Conseil d'administration de l'AIIB ont ainsi eu lieu du samedi 16 janvier au lundi 18 janvier 2016, à Pékin. Le Conseil des gouverneurs a adopté un certain nombre de documents indispensables au lancement des opérations de la Banque et porté à la Présidence de la Banque le Chinois Jin Liqun, qui servait de « Président-désigné » depuis le 1 er septembre 2015.
Le 5 février 2016, l'AIIB a annoncé la nomination de cinq vice-présidents :
- Sir Danny Alexander, britannique, au poste de secrétaire général,
- M. Kyttack Hong, coréen, au poste de directeur de la gestion des risques,
- M. D.J. Pandian, indien, au poste de directeur des investissements,
- M. Joachim von Amsberg, allemand, au poste de directeur de la stratégie,
- et M. Luky Eko Wuryanto, indonésien, au poste de directeur administratif.
CONCLUSION
Après un examen attentif des stipulations de cet accord, la commission recommande l'adoption de ce projet de loi qui contribuera au développement économique et à l'intégration de la région asiatique, et ce d'autant plus que l'AIIB, tout en fonctionnant avec des coûts optimisés, appliquera des normes sociales et environnementales ainsi que des règles de passation des marchés conformes aux bonnes pratiques des autres banques multilatérales de développement, ce qui facilitera les partenariats, notamment les cofinancements, avec celles-ci.
En outre, il est absolument nécessaire que la France ratifie rapidement cet accord, afin d'être en mesure, une fois la loi promulguée, les formalités de dépôt des instruments de ratification et le versement de sa contribution réalisés, de prendre la place qui lui revient dans la gouvernance de la Banque, notamment lors de l'Assemblée annuelle12 ( * ) de l'AIIB, prévue fin juin 2016 . Jusqu'à présent, faute d'avoir ratifié, la France n'a été invitée qu'en tant qu'observateur, aux réunions du Conseil des gouverneurs et du Conseil d'administration de l'AIIB qui se sont tenus en janvier dernier. Elle n'a donc eu ni droit de parole, ni droit de vote, pendant ces réunions.
La commission a adopté le présent projet de loi lors de sa réunion du 4 mai 2016.
EXAMEN EN COMMISSION
Réunie le 4 mai 2016, sous la présidence de M. Christian Cambon, vice-président, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a procédé à l'examen du rapport de M. Jean-Pierre Raffarin sur le projet de loi n° 483 (2015-2016) autorisant la ratification de l'accord portant création de la Banque asiatique d'investissement dans les infrastructures (Asian Infrastructure Investment Bank, AIIB) .
Après l'exposé du rapporteur, un débat s'est engagé.
M. Christian Cambon, président. - On observe, dans cette partie du monde, une certaine prévention à l'encontre de la Chine. On a vu aussi la manière dont ce pays s'y est pris à Madagascar. La Chine a-t-elle réussi à modifier son image ?
M. Robert del Picchia. - Vos remarques sur le multilatéralisme de la Chine sont justes. On voit que la Chine est soucieuse de soigner son image en se montrant généreuse vis-à-vis de ses partenaires. En revanche, si cette initiative est complémentaire du système monétaire international actuel, ne risque-t-elle pas à terme d'entrer en concurrence avec lui ? Par ailleurs, en quelle monnaie les prêts pourront-ils être libellés ? On se souvient que l'initiative de l'OPEP pour remplacer le dollar par le DTS avait fait long feu. Enfin, où la Grande-Bretagne se situe-t-elle dans cette initiative ?
Mme Nathalie Goulet. - La France a intérêt à ratifier cet accord. Il est intéressant qu'on trouve comme signataires Israël, l'Arabie Saoudite mais aussi l'Iran. Que va-t-il se passer si les sanctions perdurent à l'encontre de ce dernier pays malgré l'accord récemment signé ? Si un des membres fondateur figure dans la liste des paradis fiscaux ? Enfin, de quelle manière cette nouvelle banque coordonnera-t-elle son action avec celle la Banque islamique de développement ou encore de l'Agence française de développement (AFD) ?
M. Joël Guerriau. - La route de la soie rappelle Marco Polo, sauf que dans le cas de l'espèce c'est la Chine qui s'ouvre le monde et non l'inverse ! Que pourra faire la France en pesant 3 % du capital ? Quel était le risque de ne pas adhérer ? Quelle est la position des banques françaises et de l'AFD ? La chaise unique de la zone euro sera une parmi combien de chaises ?
Mme Marie-Françoise Perol-Dumont. - La création de cette banque est à l'évidence un succès diplomatique pour la Chine mais nous ne pouvions pas être absents de ce tour de table. Les votes seront proportionnels aux PIB des pays membres. Ceci n'est-il pas facteur d'instabilité si d'autres pays adhèrent ? Quelle sera alors notre place dans le dispositif ? La part de nos entreprises ne risque-t-elle pas d'être très fluctuante ?
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. - On voit que la monnaie chinoise est de plus en plus utilisée en Afrique. Quelle est la position du Japon, des Etats-Unis et des autres pays sur cette évolution ? Comment l'activité de cette nouvelle banque va-t-elle s'articuler avec celle de la Banque asiatique de développement ?
M. Yves Pozzo di Borgo. - Ne s'agit-il pas d'une sorte d'application par les Chinois de la doctrine Monroe à l'Asie ? Je poserais également une question en tant que président du groupe d'amitié France-Asie centrale. Dans les pays de la route de la soie, nous sommes à présent dans un « deuxième cercle économique ». Ainsi, au Turkménistan et au Kazakhstan, les entreprises françaises étaient présentes, mais cette présence recule. Est-ce que nos entreprises pourront bénéficier de la pénétration de l'AIIB dans cette zone ?
M. André Trillard . - A côté de ce beau projet, il y a la banque des BRICS dont la gouvernance est également chinoise ! Par ailleurs, l'Afrique peut devenir la chasse gardée de la Chine ! Je pense notamment à la construction de ports dans plusieurs pays, et aux visées chinoises sur le port de Lomé, en particulier. Par ailleurs, n'oublions pas que certains produits restent interdits à l'importation en Chine, la pénétration de nos entreprises n'étant autorisée que dans les cas où la Chine le veut bien. Il faut certes adhérer à l'AIIB mais sur une base d'ouverture plus réciproque.
M. Claude Malhuret. - Le 18 décembre 2015, les occidentaux ont fait une concession importante à la Chine en permettant que le renminbi soit inclus dans le panier des cinq monnaies composant les DTS, alors même que la monnaie chinoise ne remplissait pas les critères nécessaires, étant étroitement contrôlé par le Gouvernement chinois. Il y a là une rupture d'égalité. Est-il dès lors prudent de s'engager dans ce nouveau projet sans exiger que la monnaie chinoise rejoigne le droit commun ?
M. Jean-Paul Emorine. - Un commentaire : lorsqu'on voit l'influence chinoise dans cette zone, en particulier à Singapour et en Malaisie, la démarche de la Chine apparaît naturelle. Il est préférable pour nous d'y participer. Par ailleurs, nous avons fait, Richard Yung et moi, un rapport sur l'union des marchés de capitaux. Aux Etats-Unis, 70 % des investissements sont financés par les marchés de capitaux. En Europe, le président Juncker aimerait que l'on passe de 30 à 50 %. Il faut donc relativiser ! Enfin, les Chinois recherchent assidûment des terres agricoles en raison de leurs énormes besoins dans ce domaine.
M. Jeanny Lorgeoux. - On ne pourra pas empêcher la montée de l'« Empire chinois ». Il vaut mieux accompagner le mouvement que s'y opposer. En ce qui concerne l'Afrique subsaharienne, l'AFD ne peut pas financer à elle seule toutes les infrastructures. Or les Africains ayant commencé à remettre en cause la qualité des infrastructures construites par les Chinois, la Chine aimerait une « triangulation » avec la France pour pénétrer plus durablement le marché africain en améliorant la qualité de ses investissements. Du point de vue des entreprises françaises, il s'agit d'utiliser au mieux ce nouveau levier !
Mme Hélène Conway-Mouret. - Quelle est la réaction de Moscou à la création de cette banque ?
M. Jean-Pierre Raffarin, rapporteur . - Finalement, la question de fond que vous posez revient à se demander s'il faut avoir peur de la Chine. En premier lieu, cela ne sert à rien d'avoir peur en politique étrangère et en second lieu, cela dépend de la vision que l'on a du monde. En France, la vision de la politique étrangère est celle d'un monde multipolaire. L'émergence de la Chine contribue à un nouvel équilibre du monde et c'est aussi le moyen de ne pas avoir pour seul interlocuteur les États-Unis. La paix, qui est notre objectif final, ne doit pas être imposée au reste du monde par une seule grande puissance, mais doit être le résultat d'un équilibre entre les pays. Le fond de l'affaire, c'est que la pensée chinoise n'est pas une pensée de l'affrontement. Songer qu'au XVe siècle l'amiral Zheng He arrive en Afrique avec une véritable armada mais qu'il ne lui vient pas à l'idée de coloniser les territoires qu'il visite. On n'a pas affaire à un peuple qui pratique l'affrontement, même si cela ne veut pas dire qu'il ne défend pas ses intérêts. L'élément important, c'est « le potentiel de situation », comme cela a très bien été montré par François Julien notamment, la création d'un rapport de forces tel que les adversaires n'ont pas intérêt à vous attaquer. Ainsi pour les Chinois, le général le plus brillant n'est pas celui qui gagne la guerre mais celui qui se met en situation de ne pas avoir à la livrer.
La Chine construit l'AIIB et obtient l'entrée du renminbi (RMB) dans le panier des droits de tirage spéciaux (DTS), c'est à dire qu'elle construit son « potentiel de situation », sans agressivité, en associant les autres pays. Naturellement, il y a derrière tout cela une volonté de puissance marquée par une ambition d'abord asiatique. La Chine veut être « le leader » de cette région en vue d'être une puissance mondiale majeure. La recherche de l'équilibre « à la française » ne peut s'exprimer que par la voie multilatérale. Que des outils multilatéraux se créent, c'est la moins mauvaise des solutions, car ils permettent d'associer le plus de partenaires possibles. Le fait que la Chine investisse dans l'ONU, comme le dit Robert del Picchia, me paraît positif car on reste dans un cadre multilatéral. Je serais davantage inquiet si elle s'investissait à l'extérieur de l'ONU ! Le Président Cambon parlait de l'expérience de Madagascar et cela rejoint ce que disait Jeanny Lorgeoux sur l'Afrique. Les Chinois veulent corriger les difficultés connues en Afrique et ils souhaitent travailler avec la France en Afrique pour y construire une stratégie de long terme. Les Chinois ont une volonté de long terme et la France leur semble être un bon allié pour cela.
Pour répondre à Robert del Picchia, il y a douze sièges au Conseil d'administration dont trois hors région Asie. Il y a ainsi une chaise « zone euro », une chaise « Europe élargie » avec notamment le Royaume-Uni et une chaise « Emergents non asiatiques » avec le Brésil, l'Egypte et l'Afrique du Sud. C'est vrai qu'il y a des concurrences, comme le disait aussi Joëlle Garriaud-Maylam. Le Japon d'ailleurs a lancé son propre plan d'investissements de 110 milliards de dollars sur cinq ans et la Banque asiatique d'investissement a également fait son plan d'investissements en Asie. Cependant il y aura aussi des partenariats et des cofinancements comme l'accord le prévoit.
Pour répondre à Joël Guerriau, si nous sommes d'accord pour que la Chine soit un partenaire mondial dans un monde multipolaire, alors on n'a pas intérêt à dire « non » en permanence mais plutôt à aider la Chine à accéder à cette position. Le Royaume-Uni a été plus rapide que nous, mais je considère qu'il valait mieux répondre avec l'Allemagne et l'Italie que tout seul, même un peu plus tardivement. Le risque est d'apparaître comme velléitaire et comme manquant de confiance dans un monde multipolaire. Quand je vois que les Etats-Unis exigent des visas pour les Français qui ont fait un passage préalable en Iran alors qu'ils décident d'ouvrir l'Iran, je m'interroge sur l'intérêt qu'une seule grande puissance fixe des règles. S'agissant des droits de vote, il n'y a pas de risque de déséquilibre s'il y a de nouveaux entrants au capital. Il n'y a pas non plus de monnaies choisies mais on reste dans une logique d'internationalisation du RMB. Les propos des campagnes présidentielles américaines sont souvent en contradiction avec l'attitude des Etats-Unis par la suite. Ainsi, lors de son premier déplacement en Chine, en qualité de secrétaire d'Etat, Mme Clinton n'avait pas dit un mot de la question des droits de l'Homme. On voit bien qu'il y a une attitude destinée au public américain et une autre, celle de deux grandes puissances qui traitent entre elles.
Pour répondre à Yves Pozzo di Borgo, s'agissant des grandes entreprises françaises, elles travaillent assez bien en Chine et je ne suis pas très inquiet. Pour les PME, c'est différent, car il faut qu'elles y aient de bons partenaires. Les grands groupes trouveront des partenariats mais il faut construire des partenariats pour les PME car sinon, comment peuvent-elles profiter des opportunités ? Notre système d'export est fragilisé par le fait que les grands groupes ne portent pas les PME comme c'est le cas en Allemagne. Safran emmène des PME en Chine mais il y a assez peu de groupes français qui le font. Jean-Paul Emorine a tout à fait raison sur l'achat de terres par les Chinois. Vous avez été plusieurs à parler du triangle France-Chine-Afrique, je vous annonce qu'il y aura un grand forum sur ce sujet à Dakar fin 2016 en présence des premiers ministres français et chinois, des autorités sénégalaises et celles d'autres pays d'Afrique. S'agissant de la Russie, les relations entre la Chine et la Russie se sont améliorées. La Chine a toujours choisi la stabilité en matière de politique étrangère. Pour elle, un bon régime est un régime stable. Les Chinois ne se positionnent pas comme « les gendarmes du monde ». Ils considèrent que pour développer leur pays, ils ont besoin que le reste du monde soit stable.
Pour conclure, il se passe quelque chose de très intéressant aujourd'hui. Un nouveau monde se dessine avec de nouvelles puissances. La Chine y sera un facteur d'équilibre avec les Etats-Unis. Tout notre intérêt est de construire du « multilatéral » pour éviter d'être exclu.
Mme Hélène Conway-Mouret. - En fait ma question portait sur l'attitude des pays qui sont dans la zone d'influence russe. N'auraient-ils pas intérêt à se tourner vers la Chine et quelle serait alors l'attitude de la Russie ?
M. Jean-Pierre Raffarin, rapporteur. - La Russie ne peut pas être contre les investissements chinois dans ces pays, compte tenu de sa situation économique. Il n'y aura donc pas d'hostilité. La Russie et la Chine ont fait beaucoup de progrès pour se comprendre. Nous travaillons beaucoup pour cela.
Suivant l'avis du rapporteur, la commission adopte le rapport ainsi que le projet de loi précité, à l'unanimité. Il sera examiné par le Sénat en séance publique le 12 mai 2016, selon la procédure normale.
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES
Mercredi 6 avril 2016, réunion de la commission
M. Bruno Bézard, directeur général du Trésor.
ANNEXE 1 - COMPTE RENDU DE L'AUDITION DE M. BRUNO BÉZARD, DIRECTEUR GÉNÉRAL DU TRÉSOR, LE 6 AVRIL 2016
M. Jean-Pierre Raffarin . - Monsieur le Directeur général, merci d'être venu nous parler ce matin de la Banque asiatique d'investissement dans les infrastructures (BAII) ou Asian Infrastructure Investment Bank (AIIB ). Le concept, mis en avant par les autorités chinoises, de « route de la soie », s'accompagne de la volonté de créer les outils financiers pour mener à bien des grands projets effectivement nécessaires. On mesure bien l'ambition de la Chine en Asie et sur un axe Asie-Europe qui peut même passer par l'Afrique. La France va contribuer au capital de la nouvelle banque à hauteur de 3,4%. Une telle création est sans précédent depuis des décennies. Faut-il y voir une stratégie en direction de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international (FMI) ? Tous les pays n'y participent pas ; je pense en particulier aux États-Unis...Quelles ont été les conditions de la participation de la France ? Y voyez-vous une évolution du rôle de la Chine dans l'économie mondiale ?
M. Bruno Bézard , directeur général du Trésor . - C'est un point d'inflexion majeur et historique pour la communauté internationale. Le sujet n'est pas seulement financier mais aussi politique. C'est une page d'histoire qui s'écrit avec cette montée de la Chine dans le système financier international. Certes, cette banque est née en Chine ; elle est profondément chinoise, son siège est à Pékin et son président est chinois. Elle a d'abord rassemblé 20 pays asiatiques, auxquels se sont joints ensuite des pays « non-régionaux », dont la France et tous ses grands partenaires européens. L'idée est de soutenir le développement de l'Asie par la création des infrastructures dont manque effectivement ce continent. La Chine, rappelons-le, a fondé son développement sur les infrastructures : « si tu veux t'enrichir, construis d'abord des routes » disait Deng Xiaoping. Ce choix politique est au coeur de la culture chinoise contemporaine. Bien sûr, il ne faut pas faire preuve de naïveté : il n'est pas question que d'économie. Ce projet s'inscrit dans la volonté de la Chine de s'insérer davantage dans la communauté internationale, d'améliorer la« connectivité » en Asie et de mieux relier la Chine au reste du monde. C'est la fameuse « route de la soie ».
La France a été l'un des premiers pays occidentaux à soutenir cette initiative de la Chine. Le 17 mars 2015, je suis allé à Pékin annoncer l'adhésion commune de la France, de l'Italie et de l'Allemagne, l'idée étant de manifester une forte cohésion et solidarité de la zone euro. Cette démarche commune est sans précédent.
Nous aurions certes pu avoir une réaction différente à cette initiative, en craignant une potentielle entreprise de « domination » de la Chine, en estimant que l'AIIB (sigle en anglais) concurrencerait la Banque asiatique de développement (BAD) ou encore qu'elle déstabiliserait les institutions de Bretton Woods . On a d'ailleurs pu entendre ce genre d'objections parmi les pays invités. Toutefois, les grands pays occidentaux ont, pour une grande part, adhéré, car ils ont compris que cette participation était dans leur intérêt. C'est pourquoi nous avons eu un niveau d'exigence très élevé : transparence des procédures et des règles de passation des marchés, transparence des recrutements, attention extrême aux questions environnementales, à la protection des travailleurs et de leurs droits sociaux. Nous avons véritablement bataillé au cours de longues séances de négociation pour obtenir des engagements juridiques satisfaisants. Le président de l'AIIB, Jin Liqun, a bien compris ces exigences et les a reformulées en trois mots : « lean, clean and green ». Par ailleurs, le fait qu'il y ait dans cette institution une« chaise » unique pour la zone euro constitue en soi une grande innovation, avec une représentation tournante au sein du conseil d'administration. Contrairement à la Banque mondiale et au FMI, l'AIIB n'a d'ailleurs pas de conseil d'administration résident à Pékin, ce qui est moins coûteux. L'AIIB aura donc un conseil d'administration non-résident, comme par exemple la banque européenne d'investissement (BEI), ses membres étant convoqués pour chaque réunion.
Pour la Chine, la création de cette banque constitue un message fort envoyé à la communauté internationale. Au-delà de l'instrument financier au service des infrastructures en Asie, il s'agit également d'un signal politique envoyé par la Chine. La France a toujours considéré que les pays émergents devaient avoir une place plus grande au sein de la communauté financière internationale. Le Congrès américain a retardé la réforme du FMI, en refusant de l'approuver pendant plusieurs années. Ironie de l'histoire, c'est, depuis peu, chose faite. Certains voient cette création comme une remise en cause des institutions de Bretton Woods , ce qui me semble excessif. C'est une banque multilatérale de développement de plus, avec une forte tonalité chinoise. Cette création s'inscrit aussi dans un mouvement que nous appelons de nos voeux : une plus grande intégration de la Chine dans la communauté internationale, alors qu'elle a jusqu'ici été un peu un« franc-tireur », ce qui nous gêne parfois, comme en Afrique, où elle prête dans des conditions parfois opaques à des pays dont nous avons dû annuler les dettes. Nous souhaitons que la Chine respecte davantage certaines disciplines internationales comme de ne pas ré-endetter certains pays surendettés. Pour citer trois exemples où nous avons soutenu la Chine dans sa volonté de s'intégrer davantage : la Chine vient d'adhérer à la Banque européenne de reconstruction et de développement (BERD) ; le renminbi a intégré le panier des DTS (droits de tirage spéciaux), ce qui signifie notamment que les émissions obligataires en DTS auront une composante renminbi ; nous saluons enfin la participation régulière de la Chine, comme d'ailleurs du Brésil, de l'Afrique du Sud et de la Corée du Sud, en tant que membres ad hoc aux réunions du Club de Paris, instance que je préside et dans laquelle les créanciers échangent des informations sur la dette des pays surendettés et négocient des traitements de dette. Ces pays émergents sont devenus, aujourd'hui, des bailleurs incontournables, par le biais tant de prêts bilatéraux que d'achats d'obligations. Nous estimons qu'il est dans l'intérêt de tous que ces grands pays émergents rejoignent progressivement le Club de Paris et respectent ses grands principes d'action, afin de renforcer leur inclusion dans le système multilatéral et d'améliorer la représentativité et l'efficacité du Club.
Pour toutes ces raisons, nous pensons que cette création de l'AIIB, doit être encouragée dès lors que sont respectés des critères sociaux, environnementaux et de gouvernance, et que la France doit y jouer son rôle, dans un cadre européen.
M. Christian Cambon . - J'entends ce plaidoyer vibrant en faveur de l'AIIB, mais je voudrais vous entendre sur la position de trois acteurs qui ne sont pas sans influence dans la zone, à savoir les États-Unis, le Canada et le Japon. Les États-Unis semblent assez hostiles et ont vivement critiqué le Royaume-Uni lorsqu'il a choisi de devenir membre de l'AIIB. Pour manifester leur mauvaise humeur, ils ont lancé le partenariat transpacifique, en octobre 2015, en vue de faciliter les échanges commerciaux de part et d'autre du Pacifique. C'est un traité de libre-échange qui va supprimer quelques 18 000 droits de douane. Comment expliquez-vous l'attitude des États-Unis qui sont favorables au libre-échange et qui devraient donc être intéressés par le développement des infrastructures ? Comment comprenez-vous leur hostilité ainsi que celle du Japon et du Canada ? Comment va se passer la cohabitation dans la région ?
Mme Marie-Françoise Perol-Dumont . - La création de l'AIIB est un signal fort de la volonté de la Chine de jouer un rôle plus important dans la communauté financière internationale et dans l'ordre international global. Il ne s'agit donc pas seulement pour la Chine d'optimiser ses excédents d'épargne. Les pratiques de la Chine comme prêteur sont différentes de celles des banques multilatérales existantes, dont on critique parfois la lourdeur. Cette lourdeur s'explique par l'évaluation de la viabilité financière, mais surtout par des études d'impact environnemental et social des projets. Nous pensons tous au petit opuscule de Guillaume Poitrinal qui compare les temps de réalisation des projets français et chinois. Les procédures chinoises sont certes plus rapides, plus simples, semblent donc plus efficientes, mais au prix de certaines dérives. Pensez-vous que ce serait important que l'AIIB puisse avoir des coopérations avec la Banque asiatique de développement et la Banque mondiale, sachant que certains analystes disent que la puissance de feu de l'AIIB sera à terme plus importante que celle de ces deux banques ? Cela pourrait peut-être servir de garde-fou.
M. Jacques Gautier . - Ma question ne concerne pas la thématique du jour. L'année 2015 est une grande année pour les exportations d'armement qui se chiffrent à 16 milliards d'euros. C'est un grand succès pour l'équipe France, ce qui comprend aussi l'accompagnement de la Coface. Il existe un litige entre DCNS et la Coface sur le dossier de la résiliation de la vente des navires BPC à la Russie et de leur revente ultérieure à l'Égypte. La discussion porte sur les dépenses de construction - de l'ordre de 60 millions d'euros -, le contrat avec la CNIM qui a été traité directement avec la Coface sans DCNS, et les frais supplémentaires pour lesquels la Coface ne valide que deux tiers des sommes présentées par DCNS. Le sénateur Daniel Reiner et moi-même, suivons ce dossier au titre du programme 146. Les industriels viennent vers nous et sans vouloir nous immiscer entre eux et le Trésor, nous voulons tirer la sonnette d'alarme et savoir quel est votre point de vue sur la question. Il nous semble en effet qu'il faut parvenir à une solution satisfaisante pour tous.
M. Jean-Pierre Raffarin . - Une question centrale dans notre commission, même si elle est collatérale au sujet de l'audition de ce matin.
M. Bernard Cazeau . - Nous nous réjouissons de voir que les pays de la zone euro se retrouvent, pour une fois, sur un projet important comme celui de l'AIIB. Que peut-on attendre de la participation des pays de la zone euro en général et de la France en particulier dans l'AIIB ?
M. Jeanny Lorgeoux . - S'agissant de l'institution d'une« chaise unique de la zone euro », est-ce l'expression d'une volonté chinoise d'avoir un interlocuteur unique ou celle d'une« européanité » en marche ?
M. Robert del Picchia. - Qui est à l'initiative de la participation de la France dans l'AIIB ? Quid de l'Agence française de développement (AFD) ? Ces deux institutions seront-elles concurrentes ou complémentaires ? Le Droit de tirage spécial (DTS) va-t-il désormais être utilisé par certains organismes comme instrument de facturation, comme ce fut le cas de l'OPEP un bref moment ? Enfin, peut-on imaginer que la Chine souhaite aller au-delà de la création d'un contrepoids aux institutions de Bretton Woods en créant également, par exemple, un organisme parallèle au programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) ?
M. Jean-Pierre Raffarin . - Merci de nous dire un mot sur l'évolution de l'AFD.
M. Jean-Paul Emorine . - L'AIIB va représenter des investissements très importants et l'on peut se réjouir que les pays de l'Union européenne y participent. Avec mon collègue le sénateur Richard Yung, nous avons beaucoup travaillé sur l'union des marchés de capitaux que le Président Juncker voudrait développer. Ces marchés de capitaux représentent 70 % des montants financiers aux États-Unis et 30 % dans l'Union européenne. Comment l'union des marchés de capitaux va-t-elle pouvoir s'intégrer dans ce nouvel espace asiatique ?
M. Jean-Pierre Raffarin - Monsieur le directeur général, à vous la parole pour répondre à ces questions.
M. Bruno Bézard - Pour répondre au sénateur Cambon, les États-Unis, le Japon et le Canada ont été réticents à la création de l'AIIB, mais pour des raisons différentes. Les États-Unis, pour une question de politique intérieure, le Congrès versus l'administration, dont je ne suis pas certain qu'elle soit fondamentalement hostile à ce projet. Cela traduit une peur de la Chine, mais aussi le sentiment de la remise en cause d'un système international perçu comme dominé, jusqu'à présent, par les États-Unis. Pour le Japon, la raison est totalement différente. Le Japon domine la Banque asiatique de développement, qui, elle, y a vu, initialement, une concurrente. J'ai reçu son Président, avec qui nous avons discuté des enjeux de l'apparition de ce nouvel acteur. Vous connaissez l'extrême sensibilité des relations entre la Chine et le Japon. Je pense toutefois que ces pays finiront par rejoindre l'AIIB. Il y a des signes. Ainsi, lors de la visite du Président Xi Jinping à Washington, à l'automne dernier, il y a eu une déclaration conjointe disant que la contribution de la Chine au financement du développement des infrastructures en Asie était la bienvenue. Sur la question du partenariat transpacifique, je ne suis pas certain que la création de l'AIIB ait été le facteur déclenchant, même si cela a pu être une incitation à avancer. On ne peut nier qu'il y a des jeux de pouvoirs géopolitiques dans cette région du monde. Pour répondre à Mme Perol-Dumont, je suis d'accord avec vous sur le fait que les « lourdeurs » de la Banque mondiale sont aussi des gages de sécurité et de respect des procédures. Nous avons beaucoup insisté sur la nécessité pour la nouvelle banque de respecter les procédures d'appel d'offres, la transparence des candidatures et de mener des études d'impact - la France a été un des pays les plus exigeants, avec ses partenaires européens, s'agissant des études d'impact -. J'ai aussi beaucoup apprécié le livre de Guillaume Poitrinal. En Chine, le prix à payer pour la rapidité, c'est parfois l'absence de contrepouvoir, d'études d'impact et les petits arrangements. On ne peut pas associer le nom de la France à cette banque si elle n'est pas« propre ». Les lourdeurs sont donc parfois justifiées. En revanche, on n'est pas obligé de faire des conseils d'administration résidents surabondants qui coûtent cher. Sur l'opportunité d'une coopération entre l'AIIB et la Banque mondiale et ses « petites soeurs » régionales, il faut aller dans ce sens et cela commence. La Banque asiatique de développement a compris qu'il fallait composer. Il y aura clairement des accords de coopération entre l'AIIB et les institutions financières internationales existantes. Pour répondre à M. Lorgeoux, la Chine n'a rien demandé à la zone euro, même si elle a toujours soutenu la zone euro et l'euro, notamment pour une raison d'équilibre avec les États-Unis. La Chine aurait pu le suggérer mais ce n'est pas le cas. L'idée est venue de quelques Trésors des pays de l'Union européenne qui ont évoqué l'idée entre eux avant d'en parler aux autorités politiques. Pour répondre à la question« que peut-on attendre ? », nous pouvons attendre plusieurs choses. Il y aura bien sûr des retombées économiques, si nos entreprises savent être présentes, notamment dans les secteurs de l'assainissement de l'eau, des villes propres et pour certains projets d'infrastructures. Il sera sans doute difficile de se positionner sur des travaux publics au Laos ou en Birmanie par exemple, en raison d'une forte concurrence. D'une façon générale, les retombées économiques ne seront pas automatiques car il existe une forte concurrence. Toutefois, il n'y a pas que des retombées économiques. Le fait d'être « en accompagnement » critique et vigilant de la Chine, dans son développement international, dans cette partie du monde, où nous avons aussi une partie de notre histoire, est très positif. Je pense au Laos, au Cambodge et au Viêt Nam. Si la France pouvait être en « accompagnement » de certains projets de l'AIIB dans cette partie du monde, ce serait un merveilleux symbole. Ces pays ne souhaitent pas être seuls face à la Chine et sont désireux d'avoir un partenaire dont ils connaissent la culture, à côté du partenaire chinois. Je suis très favorable à des partenariats entre l'AFD et l'AIIB, mais il faudra se battre car la concurrence sera rude. Vous me demandez qui a pris la décision ? Je répondrai que c'est le Gouvernement qui a décidé, mais je rends un hommage particulier à Laurent Fabius qui a eu une vision politique forte sur ce sujet. En ce qui concerne les DTS, je crois qu'ils vont se développer, mais encore une fois vous ne les aurez pas demain dans votre porte-monnaie. J'ai oublié de vous dire que la Chine préside le G20 et que c'est historique. Nous avons mis en place une collaboration technique très forte avec la Chine pour l'aider dans sa présidence. Vendredi dernier, s'est tenue à Bercy une réunion de 35 ministres des finances et gouverneurs de banque centrale pour discuter de l'architecture financière internationale. Ce séminaire était présidé par la France - Michel Sapin et le gouverneur de la Banque de France - ainsi que par le gouverneur de la Banque centrale chinoise. De nombreux ministres des finances étaient présents, notamment ceux de l'Allemagne, du Royaume-Uni, de l'Italie, de l'Espagne, de pays d'Afrique et de pays émergents, ainsi que des économistes pour discuter de l'évolution du système monétaire international. La place du DTS est un sujet à traiter et la Chine insiste - le renminbi vient d'être intégré au panier de devises qui sert de base à son calcul - pour que le DTS ait une place plus importante.
Concernant l'impact de la non-livraison du BPC, nous sommes en discussion avec les industriels. J'ai reçu le président de DCNS il y a quelques semaines. Il y a un équilibre à trouver, l'Etat doit être vigilant dans l'analyse quantitative précise des fonds qui doivent être remboursés aux industriels. Il y a une expertise du sinistre en cours et des échanges entre DCNS et la Coface. Nous avons fait une avance sur indemnités, très importante pour la trésorerie de DCNS.
Concernant l'AFD, le président de la République a pris des décisions et fait des annonces pour donner plus de moyens à l'AFD, pour qu'elle fasse plus de prêts et de dons, notamment en faveur du climat. Pour cela, il faut que l'AFD voie son haut de bilan renforcé. L'Etat fera son devoir d'actionnaire. L'AFD, qui est un établissement public et a vocation à le rester, verra son bilan renforcé grâce à l'action financière de l'Etat. Parallèlement, le Président de la République a annoncé l'établissement de relations entre l'AFD et la CDC. Des conventions seront mises en place. L'AFD doit être plus proche des territoires, ce qui est précisément une caractéristique de la CDC. L'AFD, qui a un réseau international, et la CDC, doivent pouvoir se compléter. Nous pensons qu'il y a beaucoup de synergies possibles entre les deux établissements publics et nous sommes en train de travailler à les mettre sur le papier. La CDC n'aura pas à apporter des financements, de sorte que les craintes qu'elle avait exprimées à cet égard sont désormais sans fondement. La crainte qu'avait la CDC d'une « contagion des bilans » est également dissipée.
M. Jean-Pierre Raffarin . - L'Etat renforcera donc le haut de bilan de l'AFD ?
M. Bruno Bézard . - Oui, nous avons travaillé comme l'aurait fait un groupe privé à l'égard d'une filiale à laquelle il tient beaucoup, mais dont le bilan, pour des raisons historiques et techniques, est insuffisant pour porter prudentiellement le financement de nouveaux prêts. Nous avons travaillé pour trouver une solution qui permette à l'Etat de faire son devoir d'actionnaire en renforçant le haut de bilan.
Concernant l'union des marchés de capitaux, c'est un projet auquel la France est très attachée. Mais nous voulons une composante concrète. Il s'agit de développer le financement désintermédié des entreprises, qui ont un problème d'accès aux financements bancaires. Il s'agit également de développer une nouvelle titrisation, qui, loin des dérives que nous avons connues, soit de qualité et de sécurité ; dans ces conditions, elle peut être très utile pour alléger le bilan des banques. Il est également nécessaire de défragmenter les marchés européens et de la zone euro qui sont encore très fragmentés. Enfin dans le contexte d'un possible Brexit, je souhaite rappeler que nous sommes attachés à ce qu'il y ait une égalité de concurrence entre les places financières européennes : si, en cas de Brexit, la place financière de Londres veut continuer à fournir des services en toute liberté dans l'ensemble du marché intérieur, il faut que ce soit selon les mêmes règles du jeu.
M. Yves Pozzo di Borgo . - Un classement est sorti récemment qui indique que la place financière de Londres est devenue la première place au monde. La place de Paris est classée 37 ème . Cela m'a surpris, sachant que la finance est, après le tourisme, le deuxième poste économique de la ville de Paris.
M. Bruno Bézard . - Mon expérience m'a appris à me méfier des classements. La presse a par exemple annoncé que la France avait reculé d'un certain nombre de places dans l'accueil des investissements internationaux, et on s'est aperçu que c'était une erreur. Pour autant, nous travaillons bien sûr pour renforcer la place financière de Paris, en particulier dans le cadre du comité 2020. Il faut connaître les domaines dans lesquels nous sommes forts et les développer en priorité. Nous tentons aussi de construire des réponses aux hypothèses de Brexit. Pour faire le lien avec le reste de la séance, j'ajouterai qu'il faut faire de Paris une place importante pour le renminbi. Il y a là-dessus une compétition avec Londres.
ANNEXE 2 - RÉGIONS GÉOGRAPHIQUES CLASSÉES COMME ASIE ET OCÉANIE PAR LES NATIONS UNIES
ASIE |
Asie centrale |
Kazakhstan |
Kirghizistan |
Ouzbékistan |
Tadjikistan |
Turkménistan |
Asie orientale |
Chine |
Chine, région administrative spéciale de Hong Kong |
Chine, région administrative spéciale de Macao |
Japon |
Mongolie |
République de Corée |
République populaire démocratique de Corée |
Asie méridionale |
Afghanistan |
Bangladesh |
Bhoutan |
Inde |
Iran (République islamique d') |
Maldives |
Népal |
Pakistan |
Sri Lanka |
Asie du Sud-Est |
Brunéi Darussalam |
Cambodge |
Indonésie |
Malaisie |
Myanmar |
Philippines |
République démocratique populaire lao |
Singapour |
Thaïlande |
Timor-Leste |
Viet Nam |
Asie occidentale |
Arabie saoudite |
Arménie |
Azerbaïdjan |
Bahreïn |
Chypre |
Émirats arabes unis |
État de Palestine |
Géorgie |
Iraq |
Israël |
Jordanie |
Koweït |
Liban |
Oman |
Qatar |
République arabe syrienne |
Turquie |
Yémen |
OCÉANIE |
Australie et Nouvelle-Zélande |
Australie |
Îles Norfolk |
Nouvelle-Zélande |
Mélanésie |
Fidji |
Îles Salomon |
Nouvelle-Calédonie |
Papouasie-Nouvelle-Guinée |
Vanuatu |
Micronésie |
Guam |
Îles Mariannes septentrionales |
Îles Marshall |
Kiribati |
Micronésie (États fédérés de) |
Nauru |
Palaos |
Polynésie |
Îles Cook |
Îles Wallis-et-Futuna |
Nioué |
Pitcairn |
Polynésie française |
Samoa |
Samoa américaines |
Tokelau |
Tonga |
Tuvalu |
Source : site de l'Organisation des Nations unies
ANNEXE 3 - BANQUE ASIATIQUE D'INVESTISSEMENT DANS LES INFRASTRUCTURES - PARTS DE CAPITAL ET DROITS DE VOTE
ANNEXE 4 - ETAT DES SIGNATURES ET DES RATIFICATIONS
Au 1 er janvier 2016, les 57 membres fondateurs potentiels de la Banque asiatique d'investissement dans les infrastructures avaient signé l'accord portant création de la Banque :
Régionaux
Arabie Saoudite Australie Azerbaïdjan Bangladesh Birmanie Brunei Cambodge Chine Corée du Sud Emirats Arabes Unis Géorgie Inde Indonésie |
Iran Israël Jordanie Kazakhstan Koweït Kirghizistan Laos Malaisie Maldives Mongolie Népal Nouvelle-Zélande |
Oman Ouzbékistan Pakistan Philippines Qatar Russie Singapour Sri Lanka Tadjikistan Thaïlande Turquie Vietnam |
Non-régionaux
Afrique du Sud Allemagne Autriche Brésil Danemark Egypte Espagne |
Finlande France Italie Islande Luxembourg Malte Norvège |
Pays-Bas Pologne Portugal Royaume-Uni Suède Suisse |
Au 17 mars 2016, 32 pays signataires de l'accord avaient déposé leurs instruments de ratification :
Membres régionaux |
Membres non-régionaux |
|
Australie |
Koweït |
Afrique du Sud |
Birmanie |
Maldives |
Allemagne |
Brunei Darussalam |
Mongolie |
Autriche |
Chine |
Népal |
Danemark |
Corée du Sud |
Nouvelle-Zélande |
Finlande |
Emirats Arabes Unis |
Pakistan |
Luxembourg |
Géorgie |
Philippines |
Malte |
Inde |
Russie |
Norvège |
Indonésie |
Singapour |
Pays-Bas |
Israël |
Tadjikistan |
Royaume-Uni |
Jordanie |
Turquie |
Source : Ministère des affaires étrangères et du développement international.
* 1 Ces 17 membres fondateurs européens sont l'Allemagne, l'Autriche, le Danemark, l'Espagne, la Finlande, la France, l'Italie, l'Islande, le Luxembourg, Malte, la Norvège, les Pays-Bas, la Pologne, le Portugal, le Royaume-Uni, la Suède et la Suisse.
* 2 Cité in La Banque asiatique d'investissement dans les infrastructures , Emile-Robert Perrin, 21/11/2015
* 3 Classement qui prend en compte 140 pays.
* 4 Source : réponses au questionnaire écrit de la commission.
* 5 Source : réponses au questionnaire écrit de la commission.
* 6 Audition en réunion plénière de la commission, le mercredi 6 avril 2016 (voir compte-rendu en annexe).
* 7 Source : réponses au questionnaire écrit de la commission.
* 8 Voir également en annexe les parts de capital et les droits de vote des membres régionaux et non régionaux de l'AIIB.
* 9 Environmental and social Framework AIIB http://www.aiib.org/uploadfile/2016/0226/20160226043633542.pdf
Procurement Policy AIIB
http://euweb.aiib.org/html/aboutus/Operational_Policies/Procurement/?show=3
* 10 Audition en réunion plénière de la commission, le mercredi 6 avril 2016 (voir compte-rendu en annexe).
* 11 Voir en annexe les parts de capital et les droits de vote des membres régionaux et non régionaux de l'AIIB.
* 12 Le ministre des Finances et des Comptes publics pourrait y participer.