II. PRÉSENTATION DES QUATRE PROGRAMMES
A. PROGRAMME 105 « ACTION DE LA FRANCE EN EUROPE ET DANS LE MONDE »
1. Principaux chiffres
Le programme « Action de la France en Europe et dans le monde » regroupe 1 801,4 millions d'euros d'AE et 1 814,4 millions d'euros de CP , soit 61,2 % de l'ensemble des crédits de paiement de la mission. A périmètre constant, les crédits du programme augmentent de 3,2 % en AE et de 5,8 % en CP par rapport à 2010 .
Ce programme rassemble 8 325 ETPT , ces effectifs servant dans les directions et services suivants :
- état-major du ministère ;
- inspection générale, conseil des affaires étrangères, conseillers diplomatiques du Gouvernement, direction de la prospective, centre de crise ;
- direction générale des affaires politiques et de sécurité ;
- direction de l'Union européenne ;
- direction des affaires juridiques ;
- direction de la coopération de sécurité et de défense ;
- direction générale de l'administration et de la modernisation ;
- directions dont l'action « soutient et prolonge l'action diplomatique » (protocole, archives, etc.) ;
- experts nationaux détachés servant dans les institutions de l'Union européenne (UE) et diplomates d'échange, placés auprès des ministres des affaires étrangères d'autres pays de l'UE ;
- personnels du programme exerçant dans les ambassades bilatérales et les représentations permanentes ;
- personnels servant au support d'autres programmes du MAEE (voire d'autres ministères) lorsque les nécessités locales du service l'exigent.
Ce programme est scindé en six actions (numérotées de 1 à 7, l'action n° 3 ayant été supprimée), dont les crédits se répartissent de la façon suivante :
Répartition par action des crédits demandés pour 2011
Intitulé de l'action |
Autorisations d'engagement (en euros) |
Crédits de paiement
|
En % des CP du programme |
Coordination de l'action diplomatique |
81 932 327 |
81 932 328 |
4,5 % |
Action européenne |
45 484 403 |
49 634 403 |
2,7 % |
Contributions internationales |
842 544 160 |
842 544 160 |
46,4 % |
Coopération de sécurité et de défense |
97 555 617 |
97 555 617 |
5,4 % |
Soutien |
235 073 296 |
244 488 243 |
13,5 % |
Réseau diplomatique |
498 825 230 |
498 265 365 |
27,5 % |
Source : projet de loi de finances pour 2011, annexe « Action extérieure de l'Etat »
2. Justification des crédits
a) Les dépenses de personnel
Le montant demandé pour ces dépenses, qui correspondent à la rémunération des emplois décrits précédemment, s'élève à 548 millions d'euros , soit 30,4 % des crédits du programme.
Cette charge est portée par l'ensemble des actions, à l'exception de l'action n° 4 « Contributions internationales ». La part de l'action n° 7 « Réseau diplomatique » est prépondérante : 322,4 millions d'euros, soit 58,8 % de l'ensemble.
b) Les dépenses de fonctionnement
Les dépenses de fonctionnement représentent 325,2 millions d'AE et 329 millions d'euros de CP pour 2011, soit 18,1 % des crédits du programme .
Ces dépenses sont essentiellement portées par les actions n° 6 « Soutien », n° 7 « Réseau diplomatique » et, dans une moindre mesure, n° 1 « Coordination de l'action diplomatique ».
Elles comportent en particulier :
- pour le réseau diplomatique , des dépenses de fonctionnement (et d'investissement) d'un montant de 79 millions d'euros , en baisse de 5 % par rapport à l'année précédente, à périmètre constant. Plus précisément, selon les informations transmises par le ministère, deux postes de dépense sont en hausse , à savoir le gardiennage (+ 7,6 %), du fait du renforcement des dispositifs de sécurité, ainsi que l'entretien et la maintenance (+ 1,2 %), en raison de la vétusté d'une partie non négligeable du parc immobilier. En revanche, l'ensemble des autres postes se voit appliquer des baisses, par exemple les frais de représentation (- 12,3 %), les consommables informatiques (- 10,45 %) ou encore les voyages et missions statutaires (- 2,7 %) ;
- pour l'action « Soutien », un total de 46,8 millions d'euros en CP pour les dépenses d'immobilier pour les sites français du MAEE (dont 24 millions d'euros de loyers budgétaires), 28,9 millions d'euros pour les dépenses de sécurité (en France et à l'étranger), 11,6 millions d'euros de CP pour les dépenses de fonctionnement courant et 6,3 millions d'euros de CP pour la valise diplomatique. De plus, une ligne de 25,5 millions d'euros d'AE et de 29,5 millions d'euros de CP est prévue pour l' informatique ;
- pour l'action « Coordination de l'action diplomatique », 7 millions de CP sont demandés pour les conférences internationales et les voyages officiels . Ce montant s'affiche en baisse de 56 % par rapport à 2010, à la fois parce qu'il n'y aura pas de sommet France-Afrique en 2011 et que les frais liés à l'organisation des sommets du G 8 et du G 20, présidés par la France, figurent au sein d'un programme spécifique.
c) Les dépenses d'investissement
Les dépenses d'investissement s'élèvent à 13,2 millions d'euros en AE et à 18,3 millions d'euros en CP, soit à peine 1 % des CP du programme. Elles apparaissent, une nouvelle fois, en recul.
Cependant, il convient de noter, à cet égard, que les dépenses d'investissements immobiliers (entretien lourd), en France et à l'étranger, sont désormais financées par les produits de cessions immobilières alimentant le compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'Etat ». Pour les immeubles situés en France, le « taux de retour » au MAEE sur les produits de cessions est de 65 %, ce qui correspond au taux de « droit commun ». En revanche, ce taux est, à titre dérogatoire, de 100 % pour les produits de cessions des immeubles domaniaux situés à l'étranger.
La politique de cessions immobilières du MAEE Depuis le 1 er janvier 2010, le MAEE ne peut plus compter que sur ses produits de cession pour financer sa programmation immobilière, aucun crédit n'étant alloué sur le budget général (programme 105). Parallèlement aux cessions classiques d'immeubles ou de logements devenus inutiles, le ministère a dû s'interroger sur la nécessité de conserver dans notre parc des biens emblématiques mais témoins d'une autre époque. Dans ce contexte, il donc envisagé de céder quelques bâtiments de grande valeur, à forte dimension patrimoniale : - la résidence de l'ambassadeur à Buenos Aires estimée à 8 millions d'euros ; - la villa de fonctions du consul général à Sydney (3,7 millions d'euros) ; - le consulat général à Anvers, hôtel particulier, estimé à près de 3 millions d'euros ; - la villa de fonction du consul général à Hong Kong, estimée à plus de 40 millions d'euros ; - le logement de fonctions du n° 2 à Madrid, dite Villa andalouse (14,5 millions d'euros) ; - l'immeuble des services culturels à New York estimé à 23 millions d'euros ; - la villa de fonction du consul général à San Francisco, estimée à près de 8 millions d'euros ; - le Palais Lenzi à Florence, siège de l'Institut (12 millions d'euros) ; - l'Hospice Wallon à Amsterdam (consulat général, logement du consul général, SCAC et Institut), estimé à 4 millions d'euros ; - le site de Sathorn à Bangkok ; - l'immeuble de la chancellerie diplomatique à Londres, en vue de procéder à un regroupement des services. La programmation immobilière 2010-2012, validée par les plus hautes autorités du MAEE et par la Commission interministérielle chargée d'émettre un avis sur les opérations immobilières de l'Etat à l'étranger (CIM), prévoit un montant de produits de cession de l'ordre de 390 millions d'euros. Les opérations immobilières prévues ne pourront être lancées qu'au fur et à mesure de l'encaissement des produits. Source : MAEE |
Les crédits restants, essentiellement portés par l'action n° 6 « Soutien », correspondent notamment à des investissements sur différents projets visant à renforcer la sécurité informatique du MAEE .
d) Les dépenses d'intervention
Les dépenses d'intervention représentent 915 millions d'euros d'AE et 919,1 millions d'euros de CP, soit 50,7 % de l'ensemble des CP du programme .
Très majoritairement portés par l'action n° 4 « Contributions internationales » et, dans une moindre mesure, par l'action n° 2 « Action européenne » 3 ( * ) , ces crédits correspondent, pour l'essentiel, au financement des quotes-parts de la France dans les organisations internationales auxquelles elle participe.
Les dotations apparaissent, une nouvelle fois, en nette progression par rapport à 2010 (+ 14,1 % sur la seule action n° 4). En effet, après le « rebasage » des opérations de maintien de la paix (OMP) ces dernières années, qui a mis fin à leur sous-budgétisation chronique, c'est la révision du taux de change budgétaire qui est le principal facteur d'évolution cette année. Ainsi, par rapport au dollar américain, l'euro est évalué à 1,35 dollar (au lieu de 1,56 dollar de 2008 à 2010).
3. Objectifs et indicateurs
Les objectifs et indicateurs du programme n'ont été que relativement peu modifiés dans le cadre du projet de loi de finances pour 2011.
Dans le détail, l'indicateur 2.1.1 « Taux des coopérants placés auprès des élites militaires étrangères » a été modifié pour désormais s'intituler « Taux des hauts responsables étrangers en activité, formés par la France » (sous l'égide de la direction de la coopération de sécurité et de défense - DCSD). Selon le MAEE, la modification de cet indicateur vise à mieux refléter le retour sur investissement des formations financées par la DCSD.
Et, s'agissant de l'indicateur 4.1 « Taux de dématérialisation des procédures », la plus grande partie des procédures étant désormais dématérialisée, il ne tient donc plus compte que des procédures pour lesquelles une marge de progression significative existe encore. Cela concerne ainsi les demandes d'actes d'état civil, dont la dématérialisation est estimée à 73 % en 2010, et les procédures d'inscription des étudiants étrangers dans une université française (83 %). Cet indicateur pourrait être appelé à disparaître une fois l'ensemble des objectifs atteints.
4. Les principales observations de votre rapporteur spécial
a) Un effort de rigueur qui se poursuit au-delà de l'augmentation apparente des crédits
Comme l'année dernière, un premier regard sur l'évolution des crédits demandés pour le programme 105 entre 2009 et 2010 pourrait faire croire à un certain confort budgétaire. En effet, les crédits affichent une assez nette augmentation , de 3,2 % en AE et de 5,8 % en CP à périmètre constant .
Cependant, l'analyse montre que ces majorations visent à financer des contraintes dont le MAEE ne saurait s'exonérer , en tout premier lieu les contributions internationales, en progression de plus de 105 millions d'euros (actions 2 et 4).
Les autres postes apparaissent globalement en recul de 0,8 % . Il convient de citer à cet égard :
- la diminution très sensible des crédits de l'action n° 1 « Coordination de l'action diplomatique » (- 30,9 % en AE et - 27,7 % en CP). Comme indiqué précédemment, cette contraction est particulièrement prononcée sur la sous-action protocole (- 52,6 % en CP), du fait de la création du programme 332, mais elle concerne aussi des lignes telles que le centre de crise (- 4,4 % en CP) ou la communication (-12,1 % en CP) ;
- l'action 6 « Soutien », en repli de 20,6 % en AE (les CP ne baissant « que » de 2,5 %). Hormis les dépenses de sécurité (+ 7,1 %), sanctuarisées afin de faire face aux menaces croissantes auxquelles sont exposés nos postes, l'ensemble des lignes diminuent nettement ;
- enfin, comme indiqué précédemment, les crédits de l'action n° 7 « Réseau diplomatique » reculent de 3 %.
En somme, derrière les apparences d'une forte augmentation de crédits, les marges de manoeuvre réelles du ministère sur le programme 105 tendent à régresser .
b) Une estimation enfin réaliste des contributions aux organisations internationales
Votre rapporteur spécial ne peut que se féliciter du calibrage des contributions françaises aux organisations internationales (et aux OMP) , ayant souligné à de nombreuses reprises que la sincérité budgétaire doit être spécialement de mise pour ces crédits 4 ( * ) . Cette démarche, initiée depuis deux ans, aboutit dans le présent projet de budget à un chiffrage dont le réalisme est renforcé par le taux de change retenu (pour rappel, 1,35 dollar pour un euro, soit une hypothèse légèrement moins favorable que le cours euro-dollar au moment de la rédaction du présent rapport).
Ainsi, le montant des crédits demandés à ce titre devrait permettre à la France, sauf aléas, de faire face aux appels de fonds correspondants .
Votre rapporteur spécial considère que le budget des organisations internationales et des OMP doit être tenu, tout comme les budgets nationaux. Pour autant, ses travaux lui ont clairement montré que la France ne décide pas seule en la matière, non plus qu'en matière de fixation des quotes-parts des membres des organisations.
Si notre pays doit donc poursuivre et amplifier son action de maîtrise de cette ligne budgétaire, il ne saurait évidemment pas se soustraire à son obligation de financer en temps et en heure ses contributions, d'autant que sa position privilégiée dans de nombreuses organisations (à commencer par le Conseil de sécurité de l'ONU) constitue un indéniable facteur de puissance et d'influence.
c) La difficile redéfinition des missions des postes de présence diplomatique
Comme cela a été rappelé supra , une mesure particulièrement emblématique de la RGPP a consisté à transformer une trentaine d'ambassades bilatérales en « postes de présence diplomatique ».
De fait, selon les informations transmises à votre rapporteur spécial, les réductions d'emplois prévues se sont concrétisées , ce qui a abouti à ramener l'effectif moyen des postes entre 11 et 12 ETPT.
En revanche, la redéfinition des missions de ces postes ne paraît pas avoir été achevée. Il s'agit pourtant du corollaire logique des diminutions d'effectifs et ce point avait bien été mis en exergue par la RGPP.
Le débat budgétaire devra permettre d'examiner les intentions du Gouvernement en la matière. Pour sa part, votre rapporteur spécial n'imagine pas que la réforme consiste à faire les mêmes missions moins bien qu'auparavant avec « les moyens du bord » . Afin d'être véritablement jugée, l'expérience des postes de présence diplomatique devrait être menée à son terme, c'est-à-dire en redéfinissant réellement les missions de la trentaine de postes concernés.
d) Le projet de création d'une foncière des immeubles publics à l'étranger paraît toujours en panne
Enfin, votre rapporteur spécial constate que le décret portant création d'une agence de gestion des immeubles de l'Etat à l'étranger demeure en attente alors que cette « foncière » est annoncée depuis plus de deux ans.
Selon les informations fournies par le MAEE, une expérimentation dans un nombre limité de pays (de l'ordre de cinq) est envisagée. Une telle démarche est probablement nécessaire afin de démontrer la pertinence d'un tel outil, dans des contextes, notamment juridiques, très différents selon les pays.
D'une manière ou d'une autre, il est néanmoins nécessaire que ce dossier avance, la gestion du parc immobilier national à l'étranger apparaissant perfectible.
Synthèse des principales observations de votre
rapporteur spécial
|
- Les crédits demandés pour le programme 105 apparaissent en assez nette augmentation, de 3,2 % en AE et de 5,8 % en CP à périmètre constant . Cependant, cette hausse vise à financer des contraintes dont le MAEE ne saurait s'exonérer , en particulier les participations de la France au budget des organisations internationales et des opérations de maintien de la paix (+ 105 millions d'euros en 2011). |
- L'évolution des crédits demandés au titre de ces organisations et opérations participe d' une démarche saine de « vérité budgétaire » . Initié depuis deux ans, l'effort est sérieusement amplifié dans le présent projet de budget, avec un taux de change euro-dollar réaliste. Sur cette base, le montant des crédits devrait permettre à la France, sauf aléas, de faire face aux appels de fonds correspondants. |
- La diminution des effectifs de la trentaine de postes de présence diplomatique n'étant pas une fin en soi, les missions de ces postes gagneraient à être redéfinies , conformément aux décisions du conseil de modernisation des politiques publiques (CMPP). |
- Le projet de création d'une agence de gestion des immeubles de l'Etat à l'étranger doit aboutir rapidement de sorte qu'une expérimentation dans un nombre limité de pays puisse être conduite dans les meilleurs délais. |
* 3 Cette action regroupe les contributions à des organisations internationales à vocation européenne, en premier lieu le Conseil de l'Europe (35 millions d'euros) et l'Union de l'Europe occidentale (3,3 millions d'euros).
* 4 Voir par exemple le rapport d'information Sénat n° 24 (2007-2008).