II. LE PROFIL MIGRATOIRE DES DIFFÉRENTS PAYS
L'examen de l'évolution des statistiques disponibles sur les migrations entre les pays signataires des accords et la France fait apparaître, en dépit des spécificités énoncées ci-après, quelques constantes pour les visas de long séjour:
- une part prépondérante et croissante des regroupements familiaux ;
- une tendance à la baisse des visas pour études ;
- le caractère extrêmement marginal de la migration professionnelle.
Sénégal |
Bénin |
Congo |
Tunisie |
||||||
2004 |
2008 |
2004 |
2008 |
2004 |
2008 |
2004 |
2008 |
||
Visas de long séjour |
2 627 |
3 401 |
578 |
460 |
677 |
641 |
6 354 |
12 544 |
|
regroupement familial |
452 |
1 508 |
55 |
173 |
nc |
262 |
2 504 |
4 602 |
|
conjoints de français (depuis 2007) |
898 |
99 |
38 |
3 015 |
|||||
études |
2 043 |
1 704 |
457 |
223 |
427 |
273 |
2 667 |
3 312 |
|
motifs professionnels |
45 |
81 |
10 |
11 |
4 |
7 |
1 056 |
1 413 |
Les indicateurs disponibles sur l'immigration clandestine constatée montrent qu'en dépit d'une situation économique bien plus favorable, la Tunisie exerce une pression migratoire bien supérieure aux pays d'Afrique sub-saharienne, ce qui atteste de la complexité de la relation entre migration et développement :
En 2007 |
Sénégal |
Bénin |
Congo |
Tunisie |
||||
Refus d'admission |
399 |
55 |
366 |
265 |
||||
Zones d'attente |
319 |
45 |
299 |
153 |
||||
prononcées |
exécutées |
prononcées |
exécutées |
prononcées |
exécutées |
prononcées |
exécutées |
|
OQTF 1 ( * ) |
767 |
21 |
142 |
6 |
1 076 |
11 |
1 528 |
63 |
APRF |
749 |
182 |
72 |
18 |
326 |
25 |
3 005 |
769 |
ITF |
56 |
25 |
9 |
9 |
34 |
8 |
289 |
100 |
AEX |
2 |
4 |
0 |
0 |
3 |
0 |
10 |
10 |
1. Le Sénégal
Le Sénégal a des frontières communes avec cinq pays (Gambie, Guinée Bissau, Guinée Conakry, Mali et Mauritanie), dans un espace de libre-circulation au sein de la communauté économique des États d'Afrique de l'Ouest.
Pays source d'émigration, notamment depuis les régions de Dakar, de Djourbel, de Kaolack, Tambacounda, Ziguinchor et Saint-Louis, le Sénégal est également un pays de transit pour les ressortissants du Cap-Vert, de la Guinée Bissau, de Guinée Conakry, du Mali, de la Mauritanie, du Bénin, de la Côte d'Ivoire, du Liberia et du Togo.
Sur une population totale de 11,9 millions d'habitants, en croissance de 2,4 % par an, un peu plus de deux millions de Sénégalais vivent à l'étranger.
Le Sénégal est traditionnellement un pays de forte émigration vers la France.
La communauté sénégalaise en France compte 52 473 personnes en 2007, dont les 3/5 es ont un titre de séjour d'une durée de validité supérieure à un an.
En croissance régulière (+ 14% entre 2002 et 2007), elle se place au 9 e rang des communautés étrangères en France après l'Algérie, le Maroc, le Portugal, la Turquie, la Tunisie, l'Italie, l'Espagne et la Chine. Elle occupe le premier rang des communautés d'Afrique subsaharienne.
Le flux annuel d'immigrants se stabilise autour de 4 000 en 2006 et 2007, plaçant le Sénégal au 8 e rang des pays en flux d'émigration vers la France après l'Algérie, le Maroc, la Chine, la Tunisie, la Turquie, les Etats-Unis et le Cameroun.
Ce flux annuel est majoritairement une immigration familiale (2 054 premiers titres délivrés en 2007) et comporte un nombre important d'étudiants et de stagiaires (1 552 en 2007). La France est le premier pays d'accueil des étudiants sénégalais à l'étranger (9 200 en 2006). En revanche, l'immigration professionnelle reste infime.
Entre 2004 et 2008, la demande globale de visas a fortement diminué et le nombre total de visas délivrés est passé, sur la même période de 24 622 à 21 641 (30 novembre 2008), le taux de refus est resté stable autour de 20%.
Le nombre de visas de court séjour délivrés (78 % du total des visas délivrés sur les 11 premiers mois de l'année 2008) est passé de 17 287 en 2004 à 15 671 au 30 novembre 2008, soit une baisse de 9,25%.
Le nombre de visas de long séjour délivrés a augmenté, passant de 2 627 en 2004 à 3 401 au 30 novembre 2008, mais cette augmentation reflète l'évolution de la réglementation française qui, par la loi du 24 juillet 2006 relative à l'immigration et à l'intégration, soumet depuis 2007 les conjoints de Français à visas de long séjour.
2. Le Bénin
Sur une population de 9 millions d'habitants, plus de 500 000 béninois vivent à l'étranger, soit environ 6 % de la population.
Le Bénin n'est pas un pays source d'émigration mais plutôt un pays de transit pour les Nigérians et les Congolais.
Pour sa part, le Bénin accueille environ 175 000 migrants, principalement originaires du Nigéria, du Togo, du Niger, de la Côte d'Ivoire et du Ghana. Forte de 4 000 personnes, la communauté française est la première des communautés occidentales au Bénin.
La France est la première destination en Europe pour les Béninois candidats à l'émigration, devant l'Allemagne et l'Italie, mais se place après les pays voisins du Bénin : le Nigéria, le Togo, la Côte d'Ivoire, et le Burkina Faso.
La communauté béninoise résidant en France en 2007 s'élevait à 7 458 ressortissants, le nombre de premiers titres délivrés étant de 795 en 2007, ce qui situe le Bénin au 43 e rang des pays d'origine des flux migratoires à destination de la France.
Le flux annuel de migrants béninois connaît une baisse annuelle régulière depuis 2002 (1 262 premiers titres délivrés en 2002).
8 800 demandes de visas ont été reçues en 2007, dont 1 860 sur des passeports diplomatiques ou de service. Le taux de refus s'établit à 17 %.
L'immigration familiale a récemment connu une augmentation importante, alors que l'immigration professionnelle reste, quant à elle, très modeste et a connu une baisse régulière depuis 2002.
Les statistiques des mesures d'éloignement prononcées en 2007 font apparaître des chiffres relativement limités par rapport au Sénégal.
Le taux d'exécution des mesures d'éloignement prononcées (en excluant les réadmissions et les retours volontaires) est de 14,8% (19,7% réadmissions et retours volontaires inclus). Ces résultats sont très nettement inférieurs au taux d'exécution des mesures d'éloignement toutes nationalités confondues : 23 %.
3. Le Congo
La République du Congo ne représentait pas traditionnellement un pays de très forte pression migratoire vers la France, même si d'après les chiffres fournis à votre rapporteur, les statistiques de l'immigration clandestine, rapportées à la population du pays, sont proches de celles du Sénégal.
La population du Congo comprend 3,8 millions d'habitants, avec un taux de croissance démographique de 2,7 % par an.
En 2007, la République du Congo occupait le 21 e rang des pays d'origine des migrants en France. La communauté congolaise résidant en France a néanmoins augmenté sensiblement depuis 2003, passant de 23 357 à 26 631 personnes, soit une hausse de 14% en 5 ans.
L'immigration congolaise reste une immigration familiale. Cette catégorie de migrants représente 79,6% du total des premiers titres délivrés (1405 titres sur 2526) en 2007. Ainsi, pour les titres délivrés dans le cadre des « familles de français », le Congo arrive au 14 e rang toutes nationalités confondues pour cette catégorie de migrants en France. Il convient de relever l'extrême faiblesse du flux d'immigrés pour motifs professionnels qui ne représente que 1,7 % de l'ensemble (43 titres délivrés en 2007).
Les autres migrants congolais sont des étudiants, 16 % du flux annuel 2007 (342 titres délivrés), des étrangers malades et des demandeurs d'asile. Il convient de noter une baisse sensible du taux de délivrance de titres pour la catégorie "réfugiés, apatrides, demandeurs d'asile" depuis 2005, qui représentait 18 % du nombre de titres délivrés.
Ces cinq dernières années, le nombre total de visas demandés a enregistré une baisse de 8,3%. Parallèlement, le nombre total de visas délivrés est en très légère augmentation passant de 8 776 en 2004 à 8 973 au 30 novembre 2008, le taux de refus ayant chuté de plus de 13 % en cinq ans et se situant maintenant autour de 20%.
Le nombre de visas de court séjour délivrés qui représente 62,73 % des visas délivrés au 30 novembre 2008 a progressé sensiblement de 10 % sur cinq ans.
4. La Tunisie
La Tunisie présente le profil migratoire spécifique des États du Maghreb, très fortement tourné vers l'Europe avec laquelle ils forment un espace de forte circulation.
Avec une population de 10,2 millions d'habitants, dont le taux d'accroissement est de 1,15 % par an, la Tunisie est le premier pays du sud de la Méditerranée à être entré, le 1 er janvier 2008, dans une zone de libre-échange avec l'Union européenne et accumule de bonnes performances dans les palmarès internationaux (26 e rang mondial pour l'innovation, 30 e pour l'enseignement supérieur et la formation). L'attractivité de l'économie tunisienne s'est confirmée et son taux de croissance devrait être de 6,1 % pour 2008. Cependant, le chômage (14,2 %) reste un problème et touche surtout des diplômés de l'enseignement supérieur.
La communauté tunisienne à l'étranger est estimée à 930 000 personnes, soit 10 % de la population du pays. 83 % des Tunisiens de l'étranger sont établis en Europe, 58 % sont établis en France.
Les transferts de cette communauté expatriée représentent environ un milliard d'euros par an, soit environ 5 % du PIB du pays.
En dépit d'une situation économique plutôt favorable, la Tunisie reste un pays de départ en raison du manque de perspectives et de l'accroissement du chômage des jeunes. Selon certaines estimations, 41 % des jeunes Tunisiens verraient leur avenir dans l'émigration.
Cette immigration prend également la forme de l'immigration illégale dont le premier pays destinataire est l'Italie.
La Tunisie est également un pays de transit pour les migrants africains du sud du Sahara. La Tunisie a signé une série d'accords bilatéraux, avec le Sénégal, le Mali..., prévoyant la suppression des visas de court séjour, ce qui peut faciliter le transit par son territoire des candidats au départ.
En France, avec une communauté s'élevant à 172 555 personnes en 2007, la Tunisie se situe au 5 e rang des pays d'origine de migrants résidant en France.
Le flux annuel (premiers titres délivrés) en 2007, était de 9 814 personnes (4ème rang). On constate une augmentation du nombre de ressortissants tunisiens d'environ 5% entre 2002 et 2007 (de 164 657 à 172 555 personnes).
L'immigration familiale était et reste la première cause d'immigration avec plus de 2/3 de l'ensemble des flux d'entrées (6 436 personnes sur un total de 10 187 en 2002 et 6 764 personnes sur un total de 9 814 en 2007), ce qui la place au 3 e rang.
On constate également un maintien depuis 2002 de la forte proportion d'étudiants et stagiaires qui constituent la deuxième cause d'immigration avec 25 % de l'ensemble des flux d'entrées (2 220 titres en 2007 contre 2 332 en 2002), ce qui la place au 4 e rang.
En revanche, elle n'occupe que la 15 e place en matière d'immigration pour motifs professionnels avec un flux d'entrées de 324 personnes en 2007 et la 45 e pour la catégorie des réfugiés, apatrides et demandeurs d'asile.
Enfin, le nombre de ressortissants tunisiens inscrits au titre d'étrangers malades a diminué depuis 2002 en passant de 145 à 68.
Les flux de demandes de visas sont très importants.
Le nombre de visas de court séjour délivrés entre 2004 et 2007 est passé de 64 238 à 62 389 avec une légère augmentation du nombre de visas de circulation.
Depuis 2004, on peut constater une baisse du nombre des étudiants et des scolaires, une stabilité des professionnels et une augmentation du nombre de visas délivrés pour raison familiale. Pour cette dernière catégorie, qui comprend les bénéficiaires du regroupement familial et de la carte « vie privée et familiale », l'augmentation est surtout due à la demande de cartes de séjour « vie privée et familiale » depuis 2007.
* 1 Obligation de quitter le territoire français, arrêté préfectoral de reconduite à la frontière, interdiction du territoire français, arrêté d'expulsion.