B. QUI SE DÉVELOPPE DANS UNE APPROCHE EUROPÉENNE
1. La définition d'une approche globale
D'inspiration française, cette proposition d'un traitement plus global de la question des migrations a été reprise au niveau européen sous la forme de « l'approche globale sur la question des migrations », adoptée en décembre 2005 par le Conseil européen.
Elle vise une « approche équilibrée, globale et cohérente, comprenant des politiques destinées à lutter contre l'immigration illégale et permettant, en coopération avec les pays tiers, de tirer parti des avantages de l'immigration légale », qui définisse une action cohérente en matière de migrations au travers de différents domaines d'action : relations extérieures, développement, emploi, justice, liberté et sécurité.
Une première conférence ministérielle euro-africaine sur la migration et le développement s'est tenue en juillet 2006 à Rabat. Elle a abouti à la définition d'un partenariat assorti d'un plan d'action.
Le développement solidaire fait désormais partie intégrante de la politique migratoire de l'Union européenne. Il est un des axes de l'approche globale avec la gestion des migrations légales et la lutte contre les migrations illégales.
Une réflexion sur le concept de migration circulaire a fait l'objet d'une communication de la Commission européenne en juillet 2007. L'accent est mis sur la recherche de formules nouvelles de nature à faciliter des mouvements légaux de personnes.
Dans le cadre de la Présidence française de l'Union européenne, un pacte européen sur l'immigration et l'asile a été adopté par le Conseil européen les 15 et 16 octobre 2008.
Ce pacte comprend cinq engagements fondamentaux parmi lesquels celui de créer un partenariat global avec les pays d'origine et de transit favorisant les synergies entre les migrations et le développement. Le Conseil européen convient notamment : - de conclure au niveau communautaire ou à titre bilatéral, des accords avec les pays d'origine et de transit, comportant des dispositions relatives au développement des pays d'origine et de transit à côté de possibilités de migration légale et de mesures pour lutter contre l'immigration irrégulière. Les Etats membres sont invités à s'informer mutuellement et à se concerter sur les objectifs et les limites de ces accords bilatéraux ; - d'examiner comment les politiques migratoires et de développement peuvent profiter aux régions d'origine de l'immigration en cohérence avec les autres aspects de la politique du développement ; - d'identifier des projets de développement solidaire ; - de promouvoir des actions de co-développement qui permettent aux migrants de participer au développement de leurs pays ; - d'adopter des instruments financiers spécifiques pour favoriser des transferts au meilleur coût de l'épargne des migrants ; - d'accélérer le déploiement de Plateformes de coopération et les Partenariats pour la mobilité (la France est partie prenante dans les partenariats qui se nouent avec le Cap Vert, la Moldavie et la Géorgie) ; - d'intervenir pour insuffler de la cohérence entre ces actions territoriales et la politique de voisinage qui elle-même doit s'articuler au sud avec le processus de Barcelone. |
La proposition française de faire des accords de gestion concertée des flux migratoires et de développement solidaire un instrument de la politique migratoire européenne a été retenue.
Sous Présidence française, la 2ème conférence ministérielle euro-africaine Migration et Développement s'est réunie à Paris, le 25 novembre 2008 , avec la participation de 32 États d'Afrique de l'ouest.
Après une phase de dialogue et de réflexion, l'Union européenne s'est engagée dans une phase plus opérationnelle sur la question des migrations.
2. Les instruments
La mise en oeuvre de la politique européenne liant la migration et le développement prend la forme de programmes territoriaux et de programmes thématiques.
Les instruments comprennent :
- des Partenariats pour la mobilité gérés avec les États membres,
- des Plates-formes gérées avec les États membres,
- la politique de voisinage gérée par la Commission « Migration » comprend dans chaque projet régional un projet-pilote de Centre d'information et de gestion des migrations, financé à hauteur de 10 millions d'euros sur 3 ans sur le 9 e FED.
3. Les financements
Pour faire face à l'urgence de la situation, les crédits du mécanisme de réaction rapide ont été utilisés en 2007 au Sénégal pour le renforcement des capacités de gestion de la migration et de lutte contre la migration irrégulière au Sénégal, pour la formation des personnels, l'assistance directe aux migrants de retour ou aux candidats potentiels à la migration, une campagne de sensibilisation contre la migration irrégulière, ainsi que la lutte contre le trafic de migrants.
Depuis, différents instruments financiers ont été identifiés ou spécifiquement développés pour le financement d'actions en relation avec les migrations et le développement.
Des financements de l'Union européenne, consacrés au développement solidaire, existent, d'une part, sous la rubrique « Liberté, sécurité et justice » et, d'autre part, sous la rubrique « Actions extérieures » du budget européen.
Les financements sous la rubrique « Liberté, sécurité et justice » sont regroupés dans le programme cadre « solidarité et gestion des flux migratoires ».
Ce programme-cadre regroupe les quatre fonds suivants :
- le Fonds européen pour les frontières extérieures est doté de 1,82 milliard d'euros sur la période 2007-2013. Il doit permettre d'améliorer l'efficacité des contrôles aux frontières, de garantir une application des règles communautaires plus harmonisée et d'améliorer la délivrance des visas. Les actions financées sont variées : infrastructures, équipements, programmes d'échanges, formations et études ;
- le Fonds européen pour les réfugiés est doté de 628 millions d'euros sur la période 2007-2013. Il a pour objectif de soutenir les efforts des Etats membres pour accueillir les demandeurs d'asile et les réfugiés ;
- le Fonds européen pour l'intégration des ressortissants des pays tiers est doté de 825 millions d'euros pour la période 2007-2013. Il a pour objectif de favoriser l'intégration des ressortissants des pays tiers, notamment sur le marché du travail ;
- le Fonds européen pour le retour est doté de 676 millions d'euros. Il a pour objet d'aider les Etats membres à financer aussi bien des actions pour les retours forcés ou volontaires de personnes en situation régulière ou irrégulière, ainsi qu'à des déboutés du droit d'asile. Les aides concernent autant les aspects logistiques (transport, hébergement) que les mesures d'accompagnement avant le départ et/ou à l'arrivée.
Les financements sous la rubrique « Actions extérieures » dans le domaine des migrations sont répartis entre plusieurs instruments de l'action extérieure de l'Union européenne.
Créé depuis le 1 er janvier 2007, l'instrument de voisinage et de partenariat représente, sur la période budgétaire 2007-2013, un montant de 11,18 milliards d'euros, avec un minimum de 95 % alloués aux programmes nationaux et multinationaux et jusqu'à 5 % alloués à des programmes de coopération transfrontière. Cet instrument se fixe notamment pour objectif de financer des projets assurant la protection des travailleurs migrants, une gestion frontalière efficace et sûre, un soutien aux réformes et au renforcement des capacités dans des domaines tels que la justice et les affaires intérieures, y compris l'asile, la migration et la réadmission, les actions destinées à combattre et à prévenir la traite des êtres humains.
En application d'une règle de 3 % souhaitée par le Conseil, les ressources de l'instrument destinées aux actions consacrées aux migrations devraient représenter un total de 335 millions d'euros sur la période 2007-2013.
L'instrument de coopération au développement est destiné à financer des actions géographiques et des actions thématiques, dans le cadre d'une enveloppe globale de 16,897 milliards d'euros pour la période 2007-2013.
Les actions géographiques sont le soutien à la coopération et aux réformes dans le domaine de la sécurité et la justice, ainsi que de la lutte contre le trafic des êtres humains et le soutien à la coopération et aux réformes dans le domaine des migrations et de l'asile en aidant à la mise en oeuvre de politiques orientées vers le développement.
La règle des 3 % pour le financement d'actions consacrées aux migrations porterait le montant à environ 500 millions d'euros sur la période 2007-2013.
Les actions thématiques couvrent l'ensemble des pays avec lesquels l'Union européenne entretient des relations.
Le « programme d'assistance financière et technique aux pays tiers dans les secteurs de l'immigration et de l'asile » ( Aeneas) prend en considération toutes les dimensions du phénomène migratoire (migration et développement, migration légale, immigration clandestine et traite des êtres humains, droits des migrants, asile et protection internationale) avec les objectifs suivants :
- stimuler les liens entre la migration et le développement ;
- encourager une gestion efficace de la migration des travailleurs ;
- lutter contre l'immigration clandestine et faciliter la réadmission des immigrés clandestins ;
- protéger les migrants contre l'exploitation et l'exclusion et soutenir la lutte contre la traite des êtres humains ;
- promouvoir l'asile et la protection internationale.
Le budget de 384 millions d'euros pour 2007-2013 fait l'objet d'une programmation pluriannuelle par la Commission sur laquelle reposent les appels à propositions. Le financement communautaire des projets compris entre 500 000 et 2 millions d'euros ne dépasse pas 80 % du montant total.
Des enveloppes financières sont fixées par "route migratoire":
Route migratoire |
Dotation 2007+2008 (en millions d'euros) |
Flux migratoires du sud |
27 |
Flux migratoires de l'est |
21 |
Moyen-Orient et pays du Golfe |
1,955 |
Asie |
6 |
Amérique latine et Caraïbes |
6 |
En marge de l'appel à proposition, des projets ciblés peuvent être retenus par la Commission . Il s'agit d'initiatives négociées directement avec la Commission. Il en est ainsi de :
- un projet « Migration et développement » géré par un consortium dont le chef de file est le Programme des Nations unies pour le développement qui associe l'Organisation internationale pour les migrations, l'Organisation internationale du travail, le Fonds des Nations unies pour la population et le Haut commissariat des Nations unies pour les réfugiés, est financé par le programme thématique à hauteur de 15 millions d'euros pour trois années.
- la Banque européenne d'investissement et la Banque européenne pour la reconstruction et le développement offriront également un instrument financier qui n'est pas encore accessible (la Commission souhaiterait investir 700 millions d'euros pour la période 2007-2013).
L'Union européenne offre donc une vaste palette d'instruments financiers liés à l'articulation entre migrations et développement. La Commission et les États membres devront veiller à la cohérence de ces différents instruments, dotés de montants significatifs et gérés par des directions générales différentes.