II. L'HISTORIQUE DE LA NÉGOCIATION

La France et l'Éthiopie n'étaient jusqu'à aujourd'hui pas liées par une convention fiscale en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu .

Malgré la modestie actuelle des échanges entre les deux pays, la perspective de leur développement depuis la fin de la guerre avec l'Erythrée ont conduit notre pays à solliciter l'ouverture de négociations.

C'est dans ce cadre que la France a adressé en décembre 2004 un projet de convention aux autorités fiscale éthiopiennes qui ont répondu favorablement à l'organisation d'un premier tour de négociation à Addis Abeba en juin 2005.

La très grande qualité technique des négociateurs éthiopiens ainsi qu'un fort appui de l'ambassade ont permis de finaliser un accord technique dès ce premier tour de négociation et aboutir à son paraphe le 17 juin 2005. Le texte qui résulte de ces travaux reflète un bon compromis pour les deux États. Seule la définition du territoire de l'Éthiopie, donnée à l'article 3 du projet, n'a pu être finalisée et demeure soumise à de nouvelles discussions entre les ministères des affaires étrangères des deux États.

Le projet de convention fiscale franco-éthiopienne en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu a été signé à Paris le 15 juin 2006.

III. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Ce projet est conforme dans ses grandes lignes au modèle de convention de l'OCDE , sous réserve des aménagements liés aux spécificités de la législation des deux États et des adaptations habituellement retenues dans les conventions conclues par la France, notamment avec les pays en voie de développement. L'Éthiopie ne disposant pas d'impôt sur la fortune, la convention ne vise que les impôts sur le revenu.

L'accent peut toutefois être mis sur les dispositions suivantes .

En ce qui concerne la notion d' établissement stable , l'article 5 reprend une définition conforme au modèle de l'OCDE. Toutefois, s'agissant des chantiers de construction ou de montage, la France a concédé à la partie éthiopienne que la durée nécessaire à la constitution d'un établissement stable soit limitée à 6 mois ce qui correspond au régime concédé par la France en la matière avec un certain nombre d'états similaires (Botswana, Gabon, Ghana, Namibie et Zimbabwe) et au modèle de convention de l'ONU.

Par ailleurs une entreprise d'assurance (exception faite des activités de réassurance) est réputée avoir un tel établissement dans l'autre État si elle y assure des risques ou si elle y collecte des primes par le truchement d'un agent dépendant.

Ces deux concessions faites à la partie éthiopienne en référence au modèle de convention de l'ONU ont trouvé leur contrepartie dans l'abandon par l'Éthiopie de sa demande relative à l'insertion du principe dit « de la force attractive de l'établissement stable », également tiré du modèle de l'ONU, qui permet d'imposer dans un État des bénéfices attribuables au siège d'une entreprise de l'autre État pour autant qu'il existe sur son territoire un établissement stable de cette entreprise.

En ce qui concerne les dividendes , ceux-ci peuvent être imposés par l'État de la source à un taux n'excédant pas 10 % de leur montant brut dans tous les cas, y compris dans le cadre mère-fille. Cette concession de la France s'intègre dans un compromis global concernant les revenus « passifs » (dividendes, intérêts et redevances).

S'agissant des intérêts et des redevances , imposables dans les deux états, l'Éthiopie a, en effet, accepté de réduire de moitié le taux d'imposition à la source qui résulte de son droit interne en le limitant à 5 % pour les intérêts et à 7,5 % s'agissant des redevances.

La définition du terme « redevances » inclut toutefois, conformément aux principes de l'ONU, les paiements relatifs à l'usage ou au droit d'usage d'un équipement industriel, commercial ou scientifique.

Par ailleurs, la France s'est réservé la possibilité, dans le cadre d'une clause de la Nation la plus favorisée, de bénéficier ultérieurement de manière automatique du régime fiscal plus favorable (taux de retenue à la source inférieur ou exonération) que l'Éthiopie pourrait consentir à nos partenaires membres de l'OCDE dans le cadre de ses négociations futures en matière d'intérêts, de dividendes et de redevances. Ce point est particulièrement important s'agissant des dividendes compte tenu du fait que le développement à venir de l'Éthiopie s'accompagnera à moyen terme d'un allégement de l'imposition à la source des flux financiers intra-groupes.

Le régime fiscal applicable aux professions libérales est conforme au modèle de l'ONU. Les revenus de source éthiopienne perçus par des résidents de France et tirés de l'exercice de professions libérales ou d'autres activités de caractère indépendant ne pourront être imposés dans l'État de la source que s'ils sont imputables à une installation fixe d'affaires ou si le séjour sur le territoire de l'autre État est supérieur à 183 jours.

Cet avantage concédé par la France à l'Éthiopie trouve sa contrepartie d'une part dans la définition du terme « redevances » qui ne vise pas les prestations de services et, d'autre part, dans l'abandon de la demande éthiopienne relative à l'insertion d'un article relatif aux rémunérations pour services techniques qui lui aurait permis d'imposer plus largement à la source les rémunérations des ingénieurs et consultants Français.

Les rémunérations publiques sont généralement imposables par l'État qui les verse. Toutefois, afin d'éviter une distorsion dans le traitement fiscal de certaines catégories d'agents publics français en poste en Éthiopie (coopérants), l'application des exonérations fiscales dans l'État de l'exercice des activités en cause, prévues par les accords culturels et de coopération conclu entre les deux États en 1966, a été confirmée.

Les pensions privées de source française versées à des expatriés français en Éthiopie en application de la législation sur la sécurité sociale sont exclusivement imposables en France, ce qui répond aux voeux des représentants des Français de l'Etranger établis en Afrique.

L'article relatif à l'imposition des autres revenus réserve le droit exclusif d'imposer, conformément aux principes de l'ONU, à l'État de la source.

L'Éthiopie a demandé un crédit d'impôt fictif en cas d'exonération de l'impôt sur les sociétés éthiopien d'un établissement français en Éthiopie. Dès lors que la France exempte ce type de revenus en vertu du droit interne (hors régimes du bénéfice mondial et du bénéfice consolidé), une telle demande a pu être acceptée. Il a été précisé que cette acceptation ne pourrait avoir d'incidence sensible qu'en cas de changement de territorialité de l'impôt sur les sociétés français. Il a également été indiqué expressément que ce mécanisme de crédit d'impôt fictif ne pourrait en aucun cas concerner les revenus passifs en provenance d'Éthiopie.

Enfin, à l'initiative française, le projet de convention introduit plusieurs clauses anti-abus.

En premier lieu, la France sauvegarde son droit d'appliquer l'article 209 B du code général des impôts.

Pour les revenus « passifs » (intérêts, dividendes, redevances) l'application de la convention est conditionnée au fait que le résident de l'autre État en est bien le bénéficiaire effectif et que la participation ou la créance génératrice des revenus, en ce qui concerne les dividendes et les intérêts ou le bien générateur des redevances, n'est pas destiné ou affecté de manière à tirer indûment profit des avantages de la convention. En outre, s'agissant des intérêts, une condition supplémentaire d'imposition effective de leur bénéficiaire est exigée par le texte.

Les autres dispositions du projet de convention fiscale sont conformes aux standards et n'appellent pas, de la part de votre rapporteur, d'observations particulières .

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