ARTICLE 70 - Modernisation du dispositif de lutte contre la sous-capitalisation prévu à l'article 212 du code général des impôts
Commentaire : le présent article a pour objet de moderniser le dispositif de lutte contre la sous-capitalisation, qui a fait l'objet en décembre 2003 d'une remise en cause jurisprudentielle sur les fondements du droit communautaire et du droit conventionnel, et propose en particulier une nouvelle rédaction de l'article 212 du code général des impôts.
I. LE DROIT EXISTANT
A. LE DISPOSITIF ACTUEL DE LIMITATION DE LA SOUS-CAPITALISATION
1. Les vertus et le potentiel d'abus du financement par emprunt
Aux termes du I de l'article 209 du code général des impôts, les bénéfices taxables en France sont ceux « réalisés dans des entreprises exploitées en France », cette notion ayant été précisée par la jurisprudence du Conseil d'Etat, ainsi que « ceux dont l'imposition est attribuée à la France par une convention internationale relative aux doubles impositions », le critère retenu dans le modèle de convention de l'Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) étant l'établissement stable.
Parmi les charges qui, en vertu du 1 de l'article 39 du code général des impôts, sont susceptibles d'être déduites du résultat des entreprises imposables à l'impôt sur le revenu ou à l'impôt sur les sociétés (IS), figurent les intérêts d'emprunts se rapportant à d'autres personnes que l'exploitant lui-même, et sous réserve que le capital ait été entièrement libéré, ainsi que le prévoit le 3° du 1 de l'article 39 du code général des impôts.
Une société étant susceptible de se financer par l'émission de titres de capital et par endettement, qui sont les deux grandes composantes du passif, la tentation existe donc de sous-capitaliser une société en maximisant le montant des intérêts déductibles pour minorer le résultat imposable , en particulier dans les groupes internationaux, où l'endettement entre sociétés peut contribuer à un transfert de bénéfices de celles sous-capitalisées vers la
société mère ou les sociétés établies dans les pays à fiscalité plus faible. La fixation du niveau de taux d'intérêt répond dès lors à une logique analogue à celle des prix de transfert, et la sous-capitalisation se révèle d'autant plus intéressante si le régime fiscal des intérêts est plus avantageux que celui des dividendes , ce qui est le cas en France et dans la plupart des pays de l'OCDE. Cette méthode permet également d'acquérir une société en finançant cet achat sur les bénéfices futurs de la société acquise.
Le choix du financement ne dépend donc plus des seules considérations économiques, mais également de l'environnement fiscal dans un contexte de concurrence croissante entre Etats. Il est dès lors apparu nécessaire, en France comme chez la majorité de ses partenaires (cf. tableau infra ), de mettre en place des dispositifs de prévention et de sanction de la sous-capitalisation à des fins d'optimisation fiscale , en limitant la déductibilité des intérêts.
2. Les limitations apportées à la déductibilité des intérêts
Le dispositif français de lutte contre la sous-capitalisation repose sur la combinaison des articles 39, 57 et 212 du code général des impôts , qui prévoient une limitation du taux et du montant des intérêts et sommes mis à la disposition des associés, des exceptions et des conditions afférentes au régime des sociétés mères et filiales, et une base d'imposition par analogie avec les prix de transfert.
a) La limitation du taux prévue par le 3° du 1 de l'article 39
Aux termes du 3° du 1 de l'article 39, les intérêts servis aux associés à raison des sommes qu'ils laissent ou mettent à la disposition de la société, en sus de leur part du capital, quelle que soit la forme de la société, sont déductibles dans la limite de ceux calculés à un taux égal à la moyenne annuelle des taux effectifs moyens pratiqués par les établissements de crédit pour des prêts à taux variable aux entreprises, d'une durée initiale supérieure à deux ans . Ce taux est publié tous les trimestres par l'administration fiscale.
Cette limite de taux n'était jusqu'en 2003 pas applicable aux opérations réalisées dans le cadre d'une centralisation de la trésorerie d'un groupe internationalisé (présent dans au moins trois Etats), sous certaines conditions. Par une décision du 11 décembre 2002, la Commission européenne a toutefois considéré que cette dérogation constituait une aide d'Etat prohibée , source de distorsion de concurrence et susceptible de favoriser certaines entreprises. Ce régime de faveur a donc été supprimé par une instruction fiscale du 28 février 2003 .
b) La limitation du montant prévue par l'article 212
L'article 212 du code général des impôts, introduit par l'article 22 de la loi de finances rectificative pour 1990 n° 90-1169 du 29 décembre 1990, prévoit une limitation cumulative, pour les sociétés soumises à l'IS, du montant des intérêts afférents aux sommes que les associés laissent ou mettent à la disposition de la société. Il dispose ainsi que la déduction de ces intérêts n'est admise que si ces sommes n'excèdent pas, pour l'ensemble des associés ou actionnaires, une fois et demie le montant du capital social . Les associés ou actionnaires concernés sont ceux possédant, en droit ou en fait, la direction de l'entreprise ou détenant plus de 50 % des droits financiers ou des droits de vote attachés aux titres émis par la société.
Il est toutefois prévu deux exceptions à ce régime :
- les intérêts bénéficiant des dispositions du I de l'article 125 C du code général des impôts, c'est-à-dire afférents aux sommes prêtées par les associés, inscrites sur un compte, bloquées et destinées à être incorporées au capital de la société emprunteuse ;
- les intérêts afférents aux avances consenties par une société ou à une autre société lorsque la première possède, au regard de la seconde, la qualité de société mère, selon le régime des sociétés mères et filiales prévu par l'article 145 du code général des impôts. Cette exclusion fut au centre de la récente remise en cause jurisprudentielle (cf. infra ), compte tenu de son caractère discriminatoire à l'encontre des filiales dont la société mère est établie hors de France.
En dépit de sa vocation dissuasive et de lutte contre l'optimisation fiscale dans un contexte de concurrence propice à l'expatriation des bases taxables, l'article 212 s'est vu contester dans ses fondements juridiques (cf. infra ) tout en n'empêchant pas les détournements , dans la mesure où la limitation de la déductibilité ne s'applique en pratique qu'aux avances consenties par les associés personnes physiques ou des sociétés mères étrangères, et n'inclut pas celles versées par d'autres sociétés du groupe. De 2000 à 2003, le nombre de redressements annuels effectués s'est établi en moyenne à 111, pour un montant moyen de 17,1 millions d'euros.
c) Le fondement juridique du redressement fiscal prévu par l'article 57
L'article 57 du code général des impôts fournit un fondement juridique pour le redressement d'entreprises qui ont transféré des bénéfices hors de France, ces derniers étant susceptibles d'être réintégrés dans le résultat imposable.
Il concerne avant tout la pratique fréquente des prix de transfert , qui sont ceux relatifs aux échanges internationaux de biens, services ou actifs incorporels entre entreprises dépendantes (cette condition n'étant pas requise en cas de transfert auprès d'entreprises situées dans un Etat ou territoire dont le régime fiscal est privilégié) ou appartenant à un même groupe, mais est également susceptible de s'appliquer à la sous-capitalisation , puisqu'il vise les transferts directs ou indirects de bénéfices, « soit par voie de majoration ou de diminution des prix d'achat ou de vente, soit par tout autre moyen ».
Les dispositions de cet article entendent donc prévenir la facturation à une filiale française de prix de transfert anormalement élevés ou le versement d'intérêts d'un taux et d'un montant excédant ceux qui auraient été pratiqués dans des conditions normales de concurrence en cas de financement externe et indépendant.
Le tableau comparatif ci-après présente les principaux régimes de lutte contre la sous-capitalisation en vigueur dans les pays de l'OCDE.
Principaux dispositifs de lutte contre la sous-capitalisation |
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Pays |
Référence légale |
Personnes concernées |
Notion d'emprunt concernée |
Notion de capitaux propres |
Ratio dette / capitaux propre |
Conséquence fiscale |
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ALLEMAGNE |
Article 8a du KStG. Nouvelle version entrée en vigueur le 1 er janvier 2004 |
1) Tout actionnaire (même imposable en Allemagne) qui détient (in)directement plus de 25 % des actions de la société dès que la rémunération globale des prêts appréciée au niveau de la société emprunteuse est supérieure à 250.000 euros ; 2) Toute personne liée à cet actionnaire ; 3) Tout tiers qui peut « avoir recours » à cet actionnaire ou à la personne liée. |
Tout type d'emprunt porteur d'intérêts, à l'exclusion des dettes commerciales à court terme |
Capital souscrit + réserves incorporées au capital +/- réserves +/- report à nouveau +/- 50 % de « Sonderposten mit Rücklaganteil » |
1,5 pour 1 Ratio se calculant à partir du montant des prêts accordés par les associés divisé par leur part dans les capitaux propres. A noter que le régime s'applique sans considération de ratio si la rémunération n'est pas calculée en pourcentage du prêt. |
Requalification des intérêts excédentaires en dividendes. Taxation au barème de l'IR sur la base de 50 % des revenus. |
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CANADA |
Non précisé |
- Non-résidents détenant au moins 25 % des droits de vote ou du capital ; - non-résidents ou société d'investissement détenue par des non-résidents liée à un actionnaire spécifié ou ne traitant pas en régime de pleine concurrence avec lui. |
La composante « dette » est la dette moyenne pour un exercice fiscal et est égale à la moyenne de montants mensuels, chacun représentant le montant le plus élevé atteint par l'encours de la dette à des non-résidents spécifiés à un moment quelconque du mois. |
La composante « capital » est constituée des bénéfices réinvestis mesurés en début d'année et du montant moyen du capital libéré et du surplus d'apport attribué aux non-résidents spécifiés, et est égale à la moyenne des montants calculés au début de chaque mois au cours de l'année d'imposition. |
2 pour 1 |
Déduction rejetée |
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ESPAGNE |
Article 20 LIS. Modifié par la loi de finances pour 2004. |
Toute société non résidente de l'UE. (sauf si elle réside dans un territoire de l'Union européenne qualifié réglementairement de paradis fiscal) |
Moyenne annuelle du montant total des emprunts. Tout type d'emprunt, en ce compris les instruments financiers hybrides. |
Capital + bénéfices distribués +/- résultat de l'exercice |
3 pour 1 |
Requalification des intérêts en dividendes. |
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Pays |
Référence légale |
Personnes concernées |
Notion d'emprunt concernée |
Notion de capitaux propres |
Ratio dette / capitaux propre |
Conséquence fiscale |
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ETATS-UNIS En italique : projet du 25/07/03 |
Section 163 (j) de l'IRC « earning striping rules » |
Société apparentée non imposable aux Etats-Unis Société non apparentée lorsqu'il existe une garantie apportée par une société étrangère apparentée à la société débitrice américaine établie dans le même Etat que le créancier. |
Tout type d'emprunt |
1,5 pour 1 Suppression de toute référence à un ratio d'endettement Les intérêts doivent également, pour être considérés comme « exagérés », être supérieurs à la moitié du revenu de la société américaine. Volume global d'intérêts déductible ramené de 50 % à 25 % du résultat fiscal de l'entreprise américaine. |
Les intérêts dont la déduction est refusée sont reportables en avant sans limite de temps. Report limité à 10 ans pour les intérêts exclus en application de la nouvelle législation (les autres seraient définitivement perdus). |
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FRANCE |
Article 212 du code général des impôts |
Associés ou actionnaires qui dirigent la société en fait ou en droit ou qui détiennent plus de 50 % des droits patrimoniaux ou de vote rattachés aux titres émis par la société |
Tout type d'avance, à l'exception de celles accordées par une société ayant la qualité de société mère au sens de l'article 145 du CGI |
Capital actions d'une filiale française appartenant à une société mère résidente ou non résidente, à l'exclusion des réserves taxées. |
1,5 pour 1 |
Requalification des intérêts excédentaires en dividendes (sans possibilité de crédit d'impôt) |
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ITALIE |
Entrée en vigueur à compter du 1 er janvier 2004 d'une nouvelle disposition |
Non précisé |
Pays |
Référence légale |
Personnes concernées |
Notion d'emprunt concernée |
Notion de capitaux propres |
Ratio dette / capitaux propre |
Conséquence fiscale |
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PAYS-BAS |
Nouvel art. 10-d de la loi relative à l'impôt sur les sociétés, adoptée le 18 décembre 2003 |
Tout associé, quelque soit son lieu d'établissement, détenant 30 % des droits financiers ou 30 % des droits de vote |
3 pour 1, avec réfaction de 500.000 euros endettement « anormal » = emprunts - (3 x capitaux propres) - 500 000 euros |
Non déductibilité d'une partie des intérêts égale au montant le plus bas entre : - intérêts versés x (endettement anormal/endettement total) - intérêts versés à des entités liés - intérêts intra-groupe reçus |
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ROYAUME-UNI Projet devant entré en vigueur le 1 er avril 2004 |
ICTA 88 / S 209 |
Jusqu'à maintenant : Les mesures anti-sous-capitalisation ne s'appliquent que si l'une des parties de la transaction en cause se situe hors du Royaume-Uni. Projet : - abrogation de la législation spécifique en matière de sous-capitalisation ; - adaptation des règles en matière de prix de transfert, pour qu'elles s'appliquent aux cas de sous-capitalisation ; - application des règles régissant les prix de transfert à toutes les sociétés apparentées, même celles domiciliées au Royaume-Uni. |
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SUISSE |
Articles 65 et 75 de la loi fédérale sur l'impôt fédéral direct. |
Les sociétés dans lesquelles les capitaux étrangers dépassent le pourcentage autorisé des fonds empruntés. |
Il est convenu qu'une société peut emprunter des fonds étrangers de son propre chef à concurrence d'un certain pourcentage de la valeur de ses actifs estimés en fin d'année. Ce pourcentage dépend du type d'actif concerné. |
Les intérêts sont ajoutés aux bénéfices et imposés. |
B. LA REMISE EN CAUSE OPÉRÉE PAR LA JURISPRUDENCE
1. Le caractère discriminatoire sur le fondement du droit communautaire et du droit conventionnel
Ainsi qu'il a été indiqué supra , le b du 1° de l'article 212 prévoit que le dispositif ne s'applique pas aux intérêts versés, dans le cadre du régime des sociétés mères prévu par l'article 145 du code général des impôts, par la fille à la société mère. Mais compte tenu des conditions d'application de ce régime relatives à l'imposition des sociétés, les intérêts versés par une filiale française à sa mère ne sont en pratique déductibles sans limitation que dans la mesure où cette dernière est française . Cette limitation de l'exonération du dispositif de lutte sous-capitalisation aux seules sociétés mères et filiales françaises ressort d'ailleurs des travaux parlementaires relatifs à l'extension de l'application de l'article 212 à tous les associés majoritaires, prévue par la loi de finances pour 1991 n° 90-1169 du 29 décembre 1990.
Le caractère discriminatoire résultant de la combinaison des articles 145 et 212 du code général des impôts a dès lors été contesté sur les fondements des conventions bilatérales conclues par la France avec des Etats étrangers et du droit communautaire , plus particulièrement de l'article 43 du traité du 25 mars 1957 instituant la Communauté européenne (ci-après « Traité CE »), relatif au principe de liberté d'établissement. Le Conseil d'Etat a ainsi rendu deux importants arrêts « SARL Coréal Gestion » et « Andritz » le 30 décembre 2003 , qui tendent à souligner ce caractère discriminatoire et à restreindre l'applicabilité du dispositif français de lutte contre la sous-capitalisation. Par ces deux décisions, le Conseil d'Etat a en effet refusé à l'administration fiscale française le droit d'appliquer, respectivement, à la filiale d'une société allemande et à celle d'une société autrichienne, les règles prévues pour lutter contre la sous-capitalisation.
Cette remise en cause de la compatibilité de l'article 212 avec le droit communautaire et conventionnel peut être rapprochée de celle de l'arrêt « Schneider Electric » du 28 juin 2002, relatif au dispositif de lutte contre la fraude et l'évasion fiscales de l'article 209 B du code général des impôts . Ce régime a ainsi été réformé par l'article 104 de la loi de finances pour 2005 n° 2004-1484 du 30 décembre 2004.
2. Une appréciation plus stricte du principe de liberté d'établissement par la jurisprudence communautaire
De nombreux Etats membres de l'Union européenne ont mis en oeuvre des régimes fiscaux dérogatoires. Ces régimes doivent néanmoins être appréciés au regard des articles 2 et 5 du Traité CE, et surtout des principes fondamentaux du droit communautaire que constituent la liberté d'établissement des ressortissants d'un Etat membre au sein de l'Union européenne, et la liberté de circulation des capitaux (prévue par les articles 56 à 60 du traité).
Au cours de la période récente, la Cour de justice des communautés européennes (CJCE) a été amenée à plusieurs reprises à préciser son interprétation de la portée de ces principes, en particulier au regard de dispositions fiscales spécifiques prises par les Etats membres. Cette interprétation se révèle extensive, et conduit à considérer comme une restriction à la liberté d'établissement l'application par un Etat membre d'un traitement fiscal inégal aux sociétés filiales constituées sur son territoire et placées dans une situation objectivement comparable, selon que la société mère s'y trouve ou non elle-même établie . Les motifs tirés de la perte de recettes ou de l'évasion fiscales ne sont que rarement retenus. En outre, la CJCE fait prévaloir le droit communautaire sur les conventions signées par les Etats membres.
La CJCE a ainsi jugé, dans son arrêt « Denkavit International BV » du 17 octobre 1996, que les dispositifs anti-abus participant de la lutte contre l'évasion et la fraude fiscales devaient être proportionnés avec les objectifs poursuivis, et que l'autorité nationale devait en particulier vérifier l'existence d'indices de fraude ou d'évasion. L'arrêt « Imperial Chemical Industries » du 16 juillet 1998 implique également qu'un tel dispositif ait pour objet spécifique de sanctionner les montages artificiels destinés à contourner la loi fiscale. Parallèlement, l'arrêt « Centros » du 9 mars 1999 a conclu que, sauf à établir au cas par cas l'existence d'un abus, une société peut être créée dans un Etat membre dans le seul but d'y bénéficier d'une législation plus avantageuse , et ce, même si la société en cause exerce l'essentiel, voire l'ensemble, de ses activités dans un autre Etat membre.
Dans son arrêt « Lasteyrie du Saillant », rendu le 11 mars 2004, la CJCE a jugé que l'article 167 bis du code général des impôts, relatif à l'imposition des plus-values latentes (« exit tax ») d'une personne physique en cas de transfert du domicile du contribuable hors de France, entravait l'exercice de la liberté d'établissement et constituait une disproportion au regard de l'objectif allégué de lutte contre l'évasion fiscale .
S'agissant de discriminations fondées sur le pays de résidence d'une société mère, l'arrêt « Metallgesellschaft & Hoechst » du 8 mars 2001 a condamné le Royaume-Uni, au motif que sa législation réservait aux seules sociétés dont la société mère est installée au Royaume-Uni la faculté de lui verser des dividendes sans être assujetties au paiement anticipé de l'IS.
Enfin et surtout, par un arrêt « Lankhorst-Hohorst Gmbh » du 12 décembre 2002, la CJCE a déclaré le dispositif « anti sous-capitalisation » allemand incompatible avec l'article 43 du Traité CE , du fait du traitement fiscal différent (imposition au taux de 30 % en tant que dividendes occultes, ou déductibilité en tant que charges) des intérêts versés par une filiale résidente, selon que la société mère était ou non résidente.
Ainsi, bien que la CJCE ne se soit pas explicitement prononcée sur la compatibilité de l'article 212 au regard du droit communautaire, sa jurisprudence sur des dispositifs poursuivant des objectifs analogues a pu mettre en exergue la portée discriminatoire et éventuellement disproportionnée de ce dispositif, susceptible de conforter son incompatibilité.
3. L'arrêt « SARL Coréal Gestion » relatif au droit communautaire
Par cet arrêt rendu le 30 décembre 2003, le Conseil d'Etat a jugé, de façon peu surprenante et en rejetant les deux arguments présentés par l'administration, que les dispositions de l'article 212 du code général des impôts étaient incompatibles avec le principe de liberté d'établissement posé par l'article 43 du Traité CE, dans la mesure où il restreignait la déductibilité des intérêts versés (en rémunération d'avances) par une société française à sa société mère allemande . Il en résultait un traitement moins favorable que celui appliqué aux filiales de sociétés mères françaises, non justifié par une différence objective de situation.
4. L'arrêt « Andritz » relatif aux conventions fiscales bilatérales
Plus délicate était la question de la portée des clauses de non-discrimination, s'agissant de sociétés mères établies dans des Etats tiers liés à la France par des conventions fiscales comportant une telle clause n'ayant pas expressément maintenu l'application de l'article 212 . Dans son arrêt « Andritz », également rendu le 30 décembre 2003, le Conseil d'Etat a néanmoins considéré que la clause de non-discrimination de la convention franco-autrichienne du 8 octobre 1959 , figurant à l'article 26-3 de cette convention et rédigée conformément à l'article 24-5 du modèle de convention de l'OCDE, s'opposait à l'application de l'article 212 du code général des impôts, la filiale française d'une société mère autrichienne devant être considérée comme de même nature que la filiale française d'une société mère française. Pour aboutir à cette conclusion, le Conseil d'Etat a procédé à une comparaison hypothétique des situations, en recherchant si, même en l'absence d'un établissement stable, la société mère autrichienne aurait été passible de l'IS si elle avait été française et avait exercé son activité en France.
La portée de cette décision dépasse le simple cadre de la convention fiscale franco-autrichienne et pourrait être étendue à toutes les conventions fiscales reprenant les stipulations de l'article 24-5 de la convention modèle de l'OCDE, et ne comprenant pas une stipulation expresse de compatibilité de l'article 212. De même, l'arrêt aboutit à considérer qu'en l'absence de stipulations contraires, les clauses de non-discrimination n'ont pas un caractère subsidiaire par rapport aux autres dispositions d'une convention fiscale. Compte tenu de la priorité accordée aux dispositions du Traité CE sur celles d'une convention fiscale bilatérale qui leur seraient contraires, il en résulte que pour être applicable, un dispositif anti-abus doit être expressément prévu par les conventions et ne pas entraver le droit communautaire . Cette solution avait, du reste, été privilégiée dans l'arrêt « Schneider Electric » du 28 juin 2002, précité.
De façon tout aussi importante, le Conseil d'Etat a jugé que les articles 9-1 et 11-6 de la convention modèle de l'OCDE comme l'article 57 du code général des impôts, précité, n'ont pas pour objet de juger de la normalité du recours à un prêt, mais invitent uniquement à s'assurer de la normalité du taux d'intérêt pratiqué . Ce jugement tend à limiter singulièrement les facultés d'appréciation en opportunité de l'administration fiscale sur les modalités de financement d'une entreprise, ainsi que la portée de l'article 57 dont la formulation est très générale. Le montant du prêt accordé et le caractère éventuellement disproportionné de l'endettement de la filiale ne peuvent, dès lors, être contestés par l'administration fiscale sur le fondement de cet article.
C. LES PRÉCISIONS APPORTÉES PAR L'ADMINISTRATION FISCALE ET LA NÉCESSITÉ D'INTRODUIRE UNE RÉFORME
1. Les précisions apportées dans l'instruction fiscale du 12 janvier 2005
Par une instruction publiée le 12 janvier 2005 dans le Bulletin officiel des impôts , l'administration fiscale a entendu se rallier aux arrêts rendus par le Conseil d'Etat , en précisant les hypothèses dans lesquelles les dispositions des articles 57et 212 du code général des impôts conservaient leur valeur pour assurer la défense des affaires contentieuses.
Le champ d'application du dispositif a ainsi été précisé. Aux termes de l'instruction, les dispositions de l'article 212 peuvent seulement s'appliquer à l'égard des filiales françaises dont la société mère est établie dans un Etat non membre de l'Union européenne :
- lorsque cet Etat n'est pas lié à la France par une convention fiscale ;
- lorsque la convention ne contient pas la clause de non-discrimination ;
- lorsque la clause de non-discrimination de la convention ne fait pas obstacle à la mise en oeuvre des dispositifs nationaux de lutte contre la sous-capitalisation ;
- ou lorsque la France s'est réservée expressément le droit d'appliquer les dispositions de l'article 212 dans la convention conclue avec cet Etat.
L'instruction comportait également la liste des conventions dans le cadre desquelles l'application du dispositif demeurait possible, et qui concernait 59 Etats et territoires .
De même, les conditions de mise en oeuvre de l'article 57 ont été explicitées . L'administration fiscale a estimé que la nouvelle jurisprudence, s'agissant des situations de sous-capitalisation de filiales de sociétés étrangères, avait seulement pour effet de priver l'administration de pouvoir contester les choix de financement opérés par deux entreprises qui, même si elles appartiennent à un même groupe, sont juridiquement distinctes. A cet égard, quand bien même l'endettement de la filiale pourrait apparaître disproportionné au regard de ses facultés de remboursement, les dispositions de l'article 57 du code général des impôts ne permettent de s'opposer qu'à la seule anormalité des modalités du prêt, soit essentiellement le taux servi.
L'administration fiscale a également considéré que la question de la répartition de l'endettement, et donc de la charge de paiement des intérêts, entre le siège et l'établissement stable d'une seule et même entreprise n'était en revanche pas abordée par les deux arrêts du Conseil d'Etat. Les services de contrôle restaient dès lors en droit d'analyser la capitalisation des succursales françaises de banques étrangères, et éventuellement de dénoncer son caractère insuffisant . L'administration a rappelé que la répartition des charges financières entre l'établissement français et le siège étranger devait demeurer conforme au principe de territorialité, tel que posé par l'article 209-I du code général des impôts et par l'article 7 du modèle de convention fiscale de l'OCDE. Il en résultait, ce qui constituait une précision importante, que les avances consenties par une banque étrangère à son établissement français ne pouvaient être génératrices d'intérêts lorsqu'elles couvraient la dotation en capital d'une entreprise indépendante .
2. L'actualisation du dispositif demeure nécessaire
Malgré les précisions apportées dans l'instruction du 12 janvier 2005, la nouvelle jurisprudence tend à restreindre fortement l'applicabilité des articles 57 et 212 du code général des impôts , sans que l'administration puisse agir, dans la plupart des cas, sur le fondement de l'abus de droit , qui suppose que les opérations visées n'aient pas de substance économique (ce qui n'est généralement pas le cas du financement par endettement), ou de l'acte anormal de gestion , le recours à l'emprunt n'étant pas contraire à l'intérêt social.
La lutte contre la sous-capitalisation à des fins d'optimisation fiscale n'a pas pour autant perdu sa légitimité, de telle sorte qu'une réforme du dispositif s'imposait.
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ
Le présent article propose une nouvelle rédaction pour l'article 212 du code général des impôts ( I ) et complète ou modifie les article 112 ( II ), 209 ( III ), 223 B ( IV ), 223 I ( V ) et 223 S ( VI ) du même code, afin de mettre en place un nouveau régime de lutte contre la sous-capitalisation complet, juridiquement compatible avec le droit conventionnel et communautaire, plus opérationnel, à la fois élargi dans son périmètre et dont l'applicabilité est recentrée sur l'optimisation fiscale abusive, selon les principaux axes suivants :
- l'élargissement du périmètre des sociétés créancières par la prise en compte des entreprises liées à la société emprunteuse ;
- une nouvelle définition de la limite du taux d'intérêt, plus conforme à la réalité économique, et trois nouvelles limitations cumulatives du montant des intérêts déductibles , afin de mieux caractériser les situations de sous-capitalisation manifeste ;
- l'introduction d'un mécanisme de report sur les exercices ultérieurs de la fraction des intérêts non déductibles , qui deviennent des intérêts différés ;
- des assouplissements par des exclusions expresses reposant sur la nature des sociétés concernées ou des opérations réalisées, et par un nouveau régime de preuve contraire sur l'endettement global du groupe ;
- un régime spécifique aux groupes fiscalement intégrés , dérogeant à certaines règles du nouveau dispositif afin de préserver la logique de groupe par la prise en compte des intérêts non déductibles dans le résultat d'ensemble de la société mère.
Le VII du présent article prévoit également que soient précisées par décret les obligations déclaratives et modalités d'application des dispositions des I et III, et le VIII prévoit que le nouveau régime est applicable aux exercices ouverts à compter du 1 er janvier 2007 , ce qui laissera aux entreprises et aux groupes le temps nécessaire à l'adaptation ou à la modification de leur structure financière, et en particulier à la recapitalisation de certaines filiales potentiellement concernées par le nouveau dispositif.
A. LA LIMITATION DU TAUX ET L'ÉLARGISSEMENT DU PÉRIMÈTRE DES INTÉRÊTS VERSÉS
1. La prise en compte des entreprises liées à la société emprunteuse
Le texte proposé par le I du présent article pour le I de l'article 212 du code général des impôts tend à prendre en compte tous les emprunts obtenus auprès d'entreprises avec lesquelles la société emprunteuse est liée, et non plus auprès des seuls associés . Il dispose ainsi que les intérêts déductibles dans une certaine limite de taux (cf. infra ) sont ceux « afférents aux sommes laissées ou mises à disposition d'une entreprise par une entreprise liée directement ou indirectement au sens du 12 de l'article 39 (du code général des impôts) ».
Le caractère de somme laissée ou mise à disposition de la société emprunteuse est conforme à la rédaction actuelle du premier alinéa de l'article 212. En revanche, la prise en compte des sociétés créancières liées à l'emprunteuse élargit sensiblement le périmètre du dispositif, en particulier aux emprunts contractés auprès de filiales du même groupe. Ce lien de dépendance s'apprécie en droit comme en fait et, aux termes du 12 de l'article 39 précité, est réputé exister entre deux entreprises :
« a. lorsque l'une détient directement ou par personne interposée la majorité du capital social de l'autre ou y exerce en fait le pouvoir de décision ;
« b. lorsqu'elles sont placées l'une et l'autre, dans les conditions définies au a, sous le contrôle d'une même tierce entreprise ».
Le lien de dépendance s'apprécie donc en droit par la détention directe ou indirecte de la majorité du capital social, et en fait par des relations contractuelles, un rapport de domination ou le contrôle d'une société tierce, notion qui peut s'entendre au sens de l'article L. 233-3 du code de commerce.
2. La limitation alternative du taux d'intérêt versé
Le texte proposé par le I du présent article pour le I de l'article 212 du code général des impôts prévoit que les intérêts versés par la société emprunteuse sont déductibles selon le plus élevé des deux plafonds suivants :
- soit, comme dans le droit actuel , dans la limite des intérêts calculés d'après le taux prévu au premier alinéa du 3° du I de l'article 39 du code général des impôts, c'est-à-dire le taux égal à la moyenne annuelle des taux effectifs moyens pratiqués par les établissements de crédit pour des prêts à taux variable aux entreprises, d'une durée initiale supérieure à deux ans ;
- ou, s'ils sont supérieurs (ce qui fait du premier taux un taux « plancher »), « d'après le taux que cette entreprise emprunteuse aurait pu obtenir d'établissements ou d'organismes financiers indépendants dans des conditions analogues ». Cette formulation, reposant sur une logique comparative, fait référence au principe de pleine concurrence prévu dans les travaux de l'OCDE pour la détermination des prix de transfert. Il s'agit donc de permettre aux entreprises de se prévaloir de conditions d'emprunt comparables à celles du marché , ces dernières étant appréciées selon des critères d'indépendance des établissements pourvoyeurs de crédit et d'analogie des conditions d'octroi.
Dans la pratique, les entreprises auront sans doute plus fréquemment recours au taux prévu par le premier alinéa du 3° du I de l'article 39, qui est publié par l'administration et évite de devoir justifier le caractère concurrentiel et indépendant du second taux. Comme dans la pratique actuelle, les intérêts non admis en déduction au-delà du plafond choisi sont fiscalement « perdus » , dans la mesure où, contrairement à la limitation afférente au montant présentée infra , il n'est pas prévu de report des intérêts excédentaires sur les exercices suivants.
B. DES MODALITÉS D'APPLICATION CIBLÉES SUR LES SITUATIONS DE SOUS-CAPITALISATION ABUSIVE
Outre la limitation afférente aux intérêts, le nouveau dispositif reprendrait l'architecture actuelle en introduisant une limitation du montant des intérêts, mais selon des modalités sensiblement différentes et plus précises, afin de cibler le dispositif sur les situations de sous-capitalisation réellement abusives et sources de moins-value fiscale, sans pour autant pénaliser le financement par emprunt. Un mécanisme de report de la fraction d'intérêts non déductibles est également prévu.
1. Les trois conditions constitutives d'une sous-capitalisation manifeste
a) Un plancher de non déductibilité et trois plafonds cumulatifs de déductibilité
Le texte proposé par le I du présent article pour le 1 du II de l'article 212 du code général des impôts introduit de nouvelles conditions relatives à la limitation du montant des intérêts déductibles, selon trois modalités (complétées par un montant plancher) précisées infra . Le premier alinéa du 1 du II de l'article 212 dispose que cette limite doit être appréciée simultanément à celle du taux , dont les conditions sont prévues par le I du même article (cf. supra ), donc en procédant à l'agrégation des intérêts servis à toutes les entreprises liées. Le caractère non déductible de la fraction des intérêts excédant la plus élevée de ces trois limites est quant à lui prévu par le cinquième alinéa, et l'appréciation des limites comme de la fraction non déductible se fait par exercice .
Il est donc prévu que lorsque le montant des intérêts servis à l'ensemble des entreprises liées directement ou indirectement à la société emprunteuse et déductibles selon les modalités afférentes au taux excède simultanément, au titre d'un même exercice, ces trois limites, la fraction des intérêts excédant la plus élevée de ces limites n'est pas déductible au titre du même exercice, dès lors qu'elle est supérieure à 150.000 euros , montant considéré comme peu significatif et donc non constitutif d'une sous-capitalisation abusive. Le caractère cumulatif des trois limites relatives au montant implique que le fait de respecter au moins l'une d'entre elles permet d'assurer la déductibilité des intérêts.
Le texte proposé pour les a, b et c du II de l'article 212 précise les trois limites cumulatives, qui ont respectivement trait à l'endettement global de la société emprunteuse, à la couverture des intérêts versés par le résultat corrigé de divers éléments, et aux intérêts reçus de sociétés liées .
b) Le ratio d'endettement
La limite relative au ratio d'endettement, prévue par le a, traduit un principe analogue à celui du droit actuel et est en vigueur dans plusieurs Etats européens. Cette limite est calculée en multipliant le montant globalisé des intérêts servis par le rapport existant entre une fois et demie le montant des capitaux propres (soit le même ratio que dans le droit actuel) et le montant moyen des sommes laissées ou mises à disposition par l'ensemble des entreprises liées au cours de l'exercice. Ce montant moyen doit être entendu comme un prorata journalier ou mensuel sur l'exercice considéré, compte tenu de la variation du montant des avances versées en cours d'exercice.
Si la pondération (150 %) est la même que dans le dispositif actuel et correspond à celle pratiquée dans d'autres Etats (en Allemagne et aux Etats-Unis en particulier), il est en revanche fait référence aux capitaux propres, notion plus financière que juridique, et non plus au capital social, ce qui correspond à un périmètre plus large et permet donc de rehausser le plafond d'endettement, à plus forte raison lorsque la société est en croissance et a une certaine ancienneté. Cette approche est plus conforme à la pratique de l'analyse financière , qui tend à évaluer le ratio d'endettement d'une société en rapportant ses dettes aux fonds propres et quasi fonds propres.
Le texte proposé pour le a du 1 du II de l'article 212 offre également à l'entreprise la faculté de choisir, pour la détermination du montant des capitaux propres, entre celui existant à la clôture ou à l'ouverture de l'exercice . Ce facteur de souplesse intègre le fait que les résultats peuvent être bénéficiaires ou déficitaires. Ainsi lorsque l'exercice se révèle déficitaire et que la société a contracté un emprunt en début d'exercice, la possibilité de retenir le montant des capitaux propres inscrits en début d'exercice permet de les majorer (puisqu'ils n'ont pas encore été diminués des pertes à venir de l'exercice), et donc de diminuer le ratio d'endettement.
Exemple d'application Une société dispose de capitaux propres d'un montant de 200 en fin d'exercice. Au cours de l'exercice, trois sociétés liées lui ont laissé ou mise à disposition des avances qui ont connu des variations mensuelles, et dont le montant pour l'exercice est respectivement de 1.000, 1.800 et 2.000. La société leur a versé un montant global d'intérêts de 20. La limite d'intérêt afférente au ratio d'endettement est calculée de la façon suivante : - montant moyen mensuel des avances : (1.000 + 1.800 + 2.000) / 12 = 400 ; - pondération des capitaux propres : 200 x 1,5 = 300 ; - rapport entre le montant moyen des avances et les capitaux propres pondérés : 300 / 400 = 75 % ; - la limite d'intérêts de la société potentiellement déductibles est alors de 20 x 75 %, soit 15. |
c) La couverture des intérêts par le résultat
Le texte proposé pour le b du 1 du II de l'article 212 prévoit une limite consistant en la c ouverture du montant des intérêts servis par une quotité du résultat courant avant impôt (RCAI) , auquel sont réintégrés certains éléments . Le montant des intérêts doit ainsi être inférieur au quart du RCAI, préalablement majoré desdits intérêts, et le cas échéant des amortissements pris en compte pour la détermination de ce résultat et de la quote-part de loyers de crédit bail pour la détermination du prix de cession du bien à l'issue du contrat.
Ces deux derniers éléments, qui constituent un aménagement favorable, ont pour objet d'extraire du champ du dispositif les entreprises dédiées au financement à long terme d'équipements lourds , quasi exclusivement par emprunt, mais aussi, dans la grande majorité des cas (compte tenu de la prise en compte des amortissements), l'acquisition d'immeubles donnés en location.
d) Les intérêts reçus des sociétés liées
La dernière limite prévue par le texte proposé pour le c du 1 du II de l'article 212 consiste à ce que le montant des intérêts versés par l'entreprise excède celui des intérêts servis à cette dernière par les sociétés qui lui sont liées, directement ou indirectement. Cette disposition a pour objet de limiter les effets du dispositif pour les sociétés intermédiaires , qui empruntent pour prêter les mêmes sommes à d'autres sociétés du groupe, et dont le montant des intérêts est généralement supérieur à celui déterminé par les deux premières limites.
2. La possibilité de reporter la fraction des intérêts non déductibles
Le texte proposé par le I du présent article pour le dernier alinéa du 1 du II de l'article 212 du code général des impôts prévoit un mécanisme de report sur les exercices ultérieurs, sous certaines conditions, de la fraction des intérêts non déductibles « immédiatement » , c'est-à-dire de la fraction du montant des intérêts supérieure à la plus élevée des trois limites précédentes, dès lors qu'elle est supérieure à 150.000 euros. Ce mécanisme de report est favorable aux entreprises ; il s'inspire du système américain et n'est pas prévu par la plupart des Etats européens.
Aux termes de la première phrase de cet alinéa, la fraction d'intérêts non déductibles peut être déduite au titre de l'exercice suivant (exercice n + 1) « à concurrence de la différence calculée au titre de cet exercice entre la limite mentionnée au b et le montant des intérêts admis en déduction en vertu du I » . La société doit donc préalablement déterminer le montant des intérêts déductibles afférents aux emprunts de l'exercice n + 1 et les déduire du montant correspondant à la limite de couverture des intérêts à hauteur de 25 % du résultat courant avant impôts corrigé (cf. supra ), le solde constituant le plafond des intérêts différés qui sera déductible du résultat imposable de cet exercice.
Ce calcul implique donc que la déductibilité d'intérêts non déduits durant l'exercice n, est soumise à la double condition que la société ne se trouve plus en situation de sous-capitalisation avérée et ne dépasse pas la limite de couverture des intérêts, indépendamment de son endettement global. Dès lors, la déductibilité des intérêts non déduits au cours de l'exercice n sera d'autant plus réduite que le montant des intérêts déductibles de l'exercice n + 1 sera élevé.
Le dispositif proposé tend ainsi à ne pas encourager les situations de sous-capitalisation chronique et durable, et incite au contraire les sociétés à se recapitaliser pour mieux profiter du report de déductibilité.
La seconde phrase du même alinéa prévoit, en outre, la possibilité de rendre déductible au titre des exercices postérieurs à l'exercice n + 1, dans les mêmes conditions, le solde des intérêts non imputés à la clôture de cet exercice. Une décote de 5 % est néanmoins appliquée sur le montant des intérêts à la clôture de chaque exercice . Cette disposition constitue également un facteur d'incitation à une recapitalisation rapide.
Compte tenu de cette possibilité de report, le III du présent article prévoit, par coordination , le transfert des intérêts différés dans les opérations de restructuration. Ce transfert se base sur le mécanisme prévu, dans le cadre d'opérations de restructuration, par l'article 209 du code général des impôts s'agissant des déficits antérieurs non encore déduits et subis par la société « apporteuse ».
Ainsi le III du présent article modifie l'article 209 du code général des impôts, en complétant la référence aux déficits antérieurs par celle aux intérêts différés en application du 1 du II de l'article 212 du code général des impôts.
3. Les situations spécifiques justifiant une dérogation au dispositif
a) Une meilleure compatibilité avec le droit communautaire et conventionnel
Le nouveau dispositif se veut d'application universelle. Il prend en compte l'ensemble des sociétés liées à la société débitrice et ne fait donc plus référence au régime des sociétés mères , qui fut au centre des récents contentieux auxquels le Conseil d'Etat a apporté une solution défavorable à l'administration (cf. supra sur la récente remise en cause par la jurisprudence). Cette universalité conforte la compatibilité du nouveau dispositif avec le principe de libre établissement prévu par l'article 43 du Traité CE. Il pourra donc, le cas échéant, s'appliquer aux filiales financées par une société mère établie dans un autre Etat membre de l'Union européenne ou dans un Etat avec lequel la France a conclu une convention fiscale.
En outre, le II du présent article tend à compléter l'article 112 du code général des impôts, qui prévoit la liste des revenus qui ne sont pas considérés comme distribués. Il est ainsi inséré un 8° à cet article, afin que soit considérée comme revenus non distribués la fraction d'intérêts non déductibles déterminée par application du 1 du II de l'article 212 du même code et reportable sur l'exercice suivant ou sur les exercices ultérieurs, moyennant une décote (cf. supra ). Cette disposition a pour objet de ne pas appliquer de retenue à la source aux distributions transfrontalières , compte tenu en particulier de la décote de 5 %.
b) Les exceptions du fait de l'activité exercée ou de l'opération en cause
Un certain nombre d'exclusions sont toutefois expressément prévues par le texte proposé par le I du présent article pour le 2 du II de l'article 212 du code général des impôts, lorsque le montant des intérêts n'est pas significatif (cf. supra sur le plancher de 150.000 euros), que l'entreprise est impliquée dans certaines activités ou opérations, ou qu'elle apporte la preuve du ratio d'endettement supérieur de son groupe (III de l'article 212).
Les premier à troisième alinéas du 2 du II de l'article 212 prévoient ainsi que les dispositions du 1 du II du même article, afférentes aux limitations du montant des intérêts déductibles, ne s'appliquent pas aux intérêts dus à raison des sommes ayant servi à financer deux types d'opérations :
- les « opérations de financement réalisées dans le cadre d'une convention de gestion centralisée de la trésorerie d'un groupe par l'entreprise chargée de cette gestion centralisée ». Sont donc exclues les filiales faisant office de centrales de trésorerie, que le présent article définit juridiquement, dont l'activité consiste à centraliser les excédents de trésorerie du groupe et à redistribuer ou négocier les emprunts intra-groupes, en vue d'optimiser la gestion financière de la structure. Ces filiales, qui peuvent être la holding du groupe ou une société financière dédiées à ce type de gestion, ne sont en effet pas réellement bénéficiaires des avances qu'elles reçoivent et sont par nature soumise à un endettement élevé ;
- « l'acquisition de biens donnés en location dans les conditions prévues aux 1 et 2 de l'article L. 313-7 du code monétaire et financier », c'est-à-dire dans le cadre d'une opération de crédit-bail .
Le quatrième alinéa du 2 du II de l'article 212 prévoit la même exclusion pour les intérêts dus par les établissements de crédit mentionnés à l'article L. 511-9 du code monétaire et financier.
Le cinquième et dernier alinéa du 2 du II tire les conséquences de ces dérogations en précisant que les intérêts et sommes dus par ces entreprises ou établissements pour les opérations précitées ne sont pas prises en compte pour le calcul de la fraction non déductible et pour la détermination des trois limites précédemment décrites, relatives à l'endettement global, au résultat courant avant impôt majoré et au montant des intérêts versés par des entreprises liées.
Enfin le texte proposé par le dernier alinéa du I du présent article pour le IV de l'article 212 du code général des impôts prévoit, comme dans le droit actuel (2° de l'article 212), une disposition spécifique pour les sociétés coopératives régies par la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération. La condition afférente à la libération intégrale du capital , prévue par le 3° du 1 de l'article 39 du code général des impôts, est ainsi exclue pour la détermination de la déductibilité des intérêts.
C. LES LIMITATIONS EN CAS DE PREUVE CONTRAIRE APPORTÉE PAR L'ENTREPRISE
1. La prise en compte de l'endettement global
Le texte proposé par le I du présent article pour le III de l'article 212 du code général des impôts prévoit que le dispositif relatif à la non-déductibilité des intérêts par application de la limite afférente à leur montant ne s'applique pas lorsque l'entreprise apporte la preuve que le ratio d'endettement de son groupe est supérieur ou égal à son propre ratio d'endettement au titre de l'exercice de prise en compte de la situation éventuelle de sous-capitalisation. Il s'agit donc d'une clause de « sauvegarde » avantageuse dans la mesure où les limites quantitatives a priori objectives et non contestables posées par le I de l'article 212 ne sont pas irréfragables, la charge de la preuve reposant sur l'entreprise.
L'objet de cette preuve est de montrer que la situation de sous-capitalisation n'est pas artificielle , par la prise en compte de l'endettement global du groupe, donc également à l'égard des tiers. La présence d'un endettement supérieur au niveau du groupe permet en effet d'illustrer l'absence de marges de manoeuvre de capitalisation intra-groupe de la société , et que l'endettement intra-groupe de la société, bien que potentiellement caractéristique d'une sous-capitalisation, constitue une alternative à l'endettement déjà élevé du groupe.
Cette disposition est complétée par deux importantes précisions sur les notions de groupe et de ratio d'endettement , respectivement prévues par les deuxième et troisième alinéas du III de l'article 212.
2. La notion de groupe
Aux termes du texte proposé pour le deuxième alinéa du III de l'article 212, le groupe s'entend, pour l'application du dispositif de lutte contre la sous-capitalisation, de « l'ensemble des entreprises françaises ou étrangères placées sous le contrôle d'une même personne morale ». La notion même de contrôle est également précisée : sont ainsi considérées comme placées sous le contrôle d'une société ou personne morale « les entreprises dans lesquelles la société ou personne morale détient, directement ou indirectement, la majorité des droits de vote ou y exerce directement ou par personnes interposées le pouvoir de décision ». Le texte dispose en outre que les droits de vote détenus indirectement par la société ou personne morale sont calculés en additionnant les pourcentages de droits de vote détenus par chaque entreprise du groupe, afin de prendre en compte les situations de contrôle exercé par une ou plusieurs filiales intermédiaires.
Cette définition du contrôle est donc directement inspirée de celle de l'article L. 233-3 du code de commerce, précité. Votre rapporteur général estime néanmoins que cette dernière est plus complète que celle proposée par le présent article , et que notre droit ne gagne pas à ce que se multiplient les définitions du contrôle ou des liens de dépendance entre entreprises, en particulier si l'on considère que le 12 de l'article 39 du code général des impôts prévoit déjà une définition des entreprises liées, reprise par le texte proposé pour le a du 1 du II de l'article 212 (cf. supra ). Il vous propose donc un amendement tendant à substituer à cette nouvelle définition une référence à l'article L. 233-3 du code de commerce.
3. Les définitions du ratio d'endettement
Le troisième alinéa du III de l'article 212 prévoit deux définitions du ratio d'endettement, selon l'entité concernée :
- le ratio d'endettement de l'entreprise concernée par la sous-capitalisation correspond logiquement au rapport existant entre le montant total des dettes et le montant des capitaux propres ;
- le ratio d'endettement du groupe , plus spécifique, tend quant à lui à neutraliser les opérations intra-groupes et la double comptabilisation des titres des entreprises du groupe. Il est donc déterminé en rapportant le montant global des dettes, exclusion faite de celles intra-groupes, aux capitaux propres, lesquels sont « minorés du coût d'acquisition des titres des entreprises contrôlées et retraités des opérations réciproques réalisées entre les entreprises appartenant au groupe, figurant au bilan du dernier exercice clos de l'ensemble des entreprises appartenant au groupe ». Ce dernier exercice sera celui du bilan consolidé si le groupe est placé sous le régime de l'intégration fiscale.
D. UNE PRÉVALENCE DE LA LOGIQUE DE GROUPE QUI NE COMPROMET PAS L'EFFICACITÉ DU DISPOSITIF
1. Le transfert à la société mère de la fraction d'intérêts non déductibles de la société intégrée
Le IV du présent article propose que la part des intérêts non déductibles des entreprises appartenant à un groupe de sociétés relevant du régime de l'intégration fiscale défini par les articles 223 A à 223 U du code général des impôts, soit transférée à la société tête de groupe . Il complète ainsi l'article 223 B du code général des impôts par six alinéas.
Les articles 223 A et suivants du code général des impôts, introduits par la loi de finances pour 1988, définissent le régime d'intégration fiscale. Ce régime permet à la société tête de groupe d'être la seule redevable de l'IS dû par les sociétés du groupe dont elle possède au moins 95 % du capital . Les déficits et bénéfices des sociétés intégrées sont compensés dans le résultat imposable de la société intégrante, mais les déficits subis par une société au titre d'exercices antérieurs à son entrée dans le groupe ne peuvent s'imputer que sur ses propres bénéfices.
Le deuxième alinéa du IV du présent article pose le principe selon lequel la société intégrée ne peut imputer sur ses résultats ultérieurs les intérêts non admis en déduction au titre de l'exercice. Ces intérêts sont en effet transférés à la société tête de groupe , dans les conditions prévues aux cinq alinéas suivants du IV du présent article. Ce mécanisme est conforme à la logique de l'intégration fiscale mais déroge au dernier alinéa du 1 du I de l'article 212 du code général des impôts (dans la rédaction proposée par le I du présent article), qui prévoit, ainsi qu'il a été précisé supra , un mécanisme de report sur les exercices ultérieurs des intérêts que la société n'a pu déduire immédiatement.
2. La déductibilité des intérêts du résultat d'ensemble du groupe
Les troisième à sixième alinéas du texte proposé par le IV du présent article pour l'article 223 B du code général des impôts expliquent dans quelle proportion les intérêts non admis en déduction du résultat des sociétés intégrées peuvent être transférés à la société tête de groupe et être déduits du résultat d'ensemble au titre de l'exercice.
Le principe est le suivant : la société tête de groupe pourra procéder à la déduction des intérêts versés à des sociétés liées n'appartenant pas au groupe fiscal dans la limite d'un ratio de couverture d'intérêts calculé au niveau du groupe. Le groupe est donc appréhendé comme une entité unique.
Plus précisément, les quatrième et cinquième alinéas du IV du présent article précisent le calcul de la proportion d'intérêts non admis en déduction dans les résultats des sociétés intégrées et imputable sur le résultat d'ensemble, afin de neutraliser l'effet des versements d'intérêts et de dividendes intra-groupes . Ce calcul correspond à :
- la somme des intérêts versés à des sociétés liées mais non intégrées au groupe fiscal. Cette somme est majorée des intérêts différés antérieurs à l'intégration et imputés au titre de l'exercice, afin d'éviter une double utilisation de la limite afférente au ratio de couverture par le quart du résultat courant avant impôt majoré ;
- moins la somme représentant la limite de couverture d'intérêts agrégée égale à 25 % de l'ensemble des résultats courants avant impôt de chaque société. Ce montant est, d'une part, minoré des dividendes perçus d'une autre société du groupe, et d'autre part, majoré des intérêts d'emprunt en cause, des amortissements inclus dans les résultats et de la quote-part de loyers crédit-bail prise en compte pour la détermination du prix de cession du bien à l'issue du contrat.
L'excédent résultant de cette opération est, aux termes de l'avant dernier alinéa du IV du présent article, déduit du résultat d'ensemble de la société mère, sous la réserve, toutefois, que la somme déduite ne puisse être supérieure à la somme des intérêts des sociétés du groupe non déductibles immédiatement du résultat d'ensemble.
3. Des conditions de report semblables au régime de droit commun
Le texte proposé par le dernier alinéa du IV du présent article prévoit un mécanisme de report sur les exercices ultérieurs de la fraction des intérêts non déductibles immédiatement du résultat d'ensemble.
Les modalités du report s'apparentent à celle prévues par le régime de droit commun du sixième alinéa du 1 du I de l'article 212 du code général des impôts dans la rédaction proposée par le I du présent article (cf. supra).
Aux termes du dernier alinéa du IV du présent article, la fraction d'intérêts non déductibles immédiatement peut être déduite au titre de l'exercice suivant (exercice n + 1) ou au titre des exercices postérieurs « à concurrence de la différence, calculée pour chacun des exercices de déduction, entre la limite prévue au 2° [cinquième alinéa du IV du présent article] et la somme des intérêts mentionnée au 1° [quatrième alinéa du IV ] majorée des intérêts déduits immédiatement en application du seizième alinéa ». Le montant des intérêts différés est donc déductible à hauteur du quart du résultat courant avant impôt corrigé, après déduction des intérêts versés à des sociétés liées et des intérêts différés antérieurs, déduits au titre de l'exercice.
Lorsque le report s'effectue sur des exercices postérieurs à l'année n + 1, une décote de 5 % est appliquée sur le montant des intérêts à la clôture de chaque exercice , comme dans le régime de droit commun.
4. Le retour au régime de droit commun en cas d'extinction du groupe et d'absorption ou de scission de la société mère
L'application du régime de droit commun se fait dans deux hypothèses : d'une part, lors de la fin du groupe ( VI du présent article), d'autre part lors de l'absorption ou de la scission de la société mère ( V du présent article).
Le VI du présent article complète l'article 223 S du code général des impôts qui traite de la fin du régime d'intégration fiscale. Il précise ainsi que « l es intérêts qui n'ont pu être admis en déduction du résultat d'ensemble en application des treizième à dix-septième alinéas de l'article 223 B, et qui sont encore reportables à l'expiration de la période d'application du régime défini à l'article 223 A, sont imputables par la société qui était redevable des impôts mentionnés à l'article 223 A dus par le groupe, sur ses résultats » selon les modalités de droit commun prévues au sixième alinéa du 1 du II de l'article 212. Dans cette hypothèse, la société redevable des impôts est la société qui était la société tête de groupe.
D'autre part, le C du V du présent article modifie le 6° de l'article 223 I du code général des impôts relatif à l'absorption de la société mère ou de la scission de celle-ci. Il précise que « les déficits et les intérêts transférés sont imputables sur les bénéfices ultérieurs [de la société bénéficiaire de l'apport] dans les conditions prévues respectivement au troisième alinéa du I de l'article 209 et au sixième alinéa du 1 du II de l'article 212 ».
Le principe du transfert des intérêts différés , non encore déduits par la société absorbée ou scindée, à la ou les sociétés bénéficiaires des apports est posé par les A et B du V du présent article, qui insère la référence aux intérêts différés au sein de l'article 223 I. Il s'appuie sur le mécanisme prévu, respectivement par les articles 223 A et 223 B du code général des impôts, pour le transfert des déficits dans le cadre de ces opérations d'absorption ou de scission.
III. LES MODIFICATIONS ADOPTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
Sur proposition de notre collègue député Gilles Carrez, rapporteur général du budget, et avec l'avis favorable du gouvernement, l'Assemblée nationale a adopté, avec l'avis favorable du gouvernement, cinq amendements rédactionnels ou de précision au texte proposé par le I du présent article pour le premier alinéa du 1 du II, le dernier alinéa du III et le IV de l'article 212 du code général des impôts, au A du III et au cinquième alinéa du IV du présent article.
M. Gilles Carrez a également retiré, après avoir obtenu des précisions du gouvernement, un amendement tendant à admettre la déductibilité sans limitation des intérêts versés au titre des prêts consentis par des établissements de crédit à des sociétés liées, sous réserve que les conditions de ces prêts soient identiques à celles pratiquées avec les clients extérieurs au groupe .
M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire, s'est déclaré favorable à cette disposition et a pris l'engagement qu'elle soit apportée par voie de doctrine administrative , comme c'est aujourd'hui le cas. Votre rapporteur général veillera à ce que cet engagement soit effectivement respecté.
IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES
Votre rapporteur général est favorable aux dispositions du présent article, qui contribuent à établir un régime de lutte contre la sous-capitalisation plus efficace car mieux adapté aux contraintes et choix économiques des entreprises. Ce régime met également fin aux discriminations antérieures qui avaient été contestées par le Conseil d'Etat, et se révèle plus favorable aux entreprises et d'une application plus souple que le dispositif actuel si l'on prend en considération :
- le caractère cumulatif des trois limites afférentes au montant des intérêts et constitutives d'une situation de sous-capitalisation, joint à celle afférente au montant de la fraction non déductible, qui est celle excédant la plus élevée des ces trois limites ;
- le principe du report de la fraction des intérêts non déductibles sur les exercices ultérieurs ;
- les exclusions au profit des montants peu significatifs, des établissements de crédit, du crédit-bail et des conventions de gestion centralisée d'un groupe ;
- et la « clause de sauvegarde » prévue par le régime de preuve contraire sur la situation réelle de l'endettement du groupe.
Le présent article tend, en outre, à privilégier opportunément la logique de groupe intégré sur celle de l'individualisation des situations de sous-capitalisation. Le présent texte représente en fait un pas important vers l'émergence d'un véritable droit des groupes, que votre rapporteur général appelle de ses voeux depuis 1996.
Toutefois, ainsi qu'il l'a relevé plus haut, la définition spécifique de la notion de contrôle prévue par le I du présent article pour le III de l'article 212 du code général des impôts, en ce qu'elle s'inspire de celle prévue par l'article L. 233-3 du code de commerce, pourrait utilement être remplacée par cette dernière, qui se révèle plus précise et permet d'éviter la surabondance de définitions distinctes selon les codes. Un amendement vous est donc proposé en ce sens.
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.