CONCLUSION

Loin d'être anecdotique, le renforcement de la protection d'espèces menacées comme les albatros et les pétrels est le signe que la diversité biologique constitue un objectif international. Il faut noter qu'en l'occurrence, quelques mesures peu coûteuses et de bon sens aboutissent à un résultat notable, comme en témoigne le retour de ces oiseaux dans des aires de nidification qu'ils avaient désertées.

Par ailleurs, les pays possesseurs de flottes de navires palangriers ont également un fort intérêt économique à ce que cette forme de pêche épargne le plus possible d'oiseaux de mer qui en sont les victimes involontaires.

La France, dont les armateurs agissent dans la zone économique des TAAF respectent déjà ces mesures protectrices, a tout à gagner à se joindre rapidement aux six Etats qui ont déjà ratifié cet accord, et qui ont permis son entrée en vigueur le 1 er février 2004.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission a procédé à l'examen du présent rapport lors de sa réunion du 5 mai 2004.

A l'issue de l'exposé du rapporteur, M. Guy Penne a souligné l'importance que revêtait, tant pour l'image de la France que pour la protection des espèces menacées, la ratification de cet accord.

La commission a alors adopté le projet de loi.

PROJET DE LOI

(Texte proposé par le gouvernement)

Article unique 2 ( * )

Est autorisée l'approbation de l'accord sur la conservation des albatros et des pétrels (ensemble deux annexes), signé à Canberra, le 19 juin 2001, et dont le texte est annexé à la présente loi.

ANNEXE I -
ÉTUDE D'IMPACT3 ( * )

I - État du droit et situation de fait existant et leurs insuffisances :

A - État du droit international

En vertu de la convention des Nations Unies sur le droit de la mer de 1982 et de la convention sur la diversité biologique de 1992, les États ont l'obligation de protéger le milieu marin et de préserver la diversité biologique, en appliquant, si nécessaire, l'approche de précaution prévue par le principe 15 de la Déclaration de Rio de Janeiro sur l'environnement et le développement.

A la cinquième réunion des Parties à la convention de Bonn de 1979 sur la protection des espèces migratrices appartenant à la faune sauvage, qui s'est déroulée en avril 1997, il a été décidé d'intégrer toutes les espèces d'albatros de l'hémisphère sud, dans les annexes I ou II de la convention. Lors de la réunion suivante en novembre 1999 ce sont deux espèces de pétrels, particulièrement menacées par les captures accidentelles lors des activités de pêche dans l'océan Antarctique, qui ont été inscrites à l'annexe II de la Convention. Par ailleurs, cette même réunion a lancé la négociation d'un accord sur la conservation des albatros de l'hémisphère sud, dont le champ a été élargi aux pétrels et dont la couverture géographique n'est plus limitée à l'hémisphère sud.

Cet accord constitue une étape supplémentaire pour protéger les oiseaux marins des dangers que comporte la pêche à la palangre. Selon les experts, ce type de pêche tuerait, au niveau mondial, plus de 300000 oiseaux marins, dont 100000 albatros, par an.

Jusqu'alors, le problème avait été traité par la Commission pour la conservation de la flore et de la faune marines de l'Antarctique (CCAMLR), qui s'était attaquée au problème de la mortalité d'animaux marins liée directement ou indirectement à la pêche et avait pris deux mesures essentielles: l'une (mesure 25-03, en 1999) porte sur la réduction de la mortalité accidentelle des oiseaux et des mammifères marins au cours des opérations de pêche au chalut dans la zone Antarctique; l'autre (mesure 25-02, en 2002) concerne la réduction de la mortalité accidentelle d'oiseaux de mer au cours de la pêche à la palangre, expérimentale ou non. Par ailleurs, la CCAMLR a exigé que l'usage des courroies d'emballage en plastique soit progressivement supprimé sur les navires de pêche et que soit tenu un registre des engins de pêche perdus.

Pour sa part, l'Organisation des Nations Unies pour l'Agriculture et l'Alimentation (OAA) s'était elle aussi penchée sur la question, et avait élaboré, en 1999, un plan d'action international visant à réduire les captures accidentelles d'oiseaux de mer par les palangriers. Mais il s'agissait d'un plan n'ayant aucun caractère juridiquement contraignant.

Par rapport à la réglementation internationale centrée sur les pêches, l'accord sur la conservation des albatros et des pétrels, qui a été conclu en application de la convention sur la protection des espèces migratrices appartenant à la faune sauvage, organise, de manière globale, la protection de ces deux catégories d'oiseaux, à l'intérieur de leur aire dite de" répartition", à la fois en imposant à chaque Partie un "plan d'action" à large spectre et en appelant toutes les Parties à une véritable coopération.

B - Gestion du problème dans les Terres Australes et Antarctiques Françaises (TAAF)

La pêche à la palangre de la légine conduisant à la capture accidentelle d'un nombre important de pétrels et d'albatros, l'administration des TAAF avait imposé aux pêcheurs français, diverses mesures :

- Présence d'un contrôleur des pêches sur chaque bateau, en vue de constater les infractions et d'évaluer l'importance de la mortalité;

- Limitation de la période et des horaires de pêche;

- Utilisation de techniques d'effarouchement (notamment des banderoles);

- Interdiction des rejets d'usine, qui attirent les oiseaux.

Pour la campagne 2002-2003, des mesures supplémentaires sont appliquées. Elles sont axées sur la prévention et la répression des activités de pêche illicites, qui sont responsables de la majorité des captures accidentelles.

Outre cet ensemble d'actions afférentes à la pêche, des campagnes d'éradication des rats et des lapins, qui sont deux espèces nuisibles pour les pétrels, ont été conduites avec succès.

II - Bénéfices escomptés en matière :

* d'emploi

En France, la pêche de la légine à la palangre, qui est pratiquée dans les eaux de Crozet et de Kerguelen gérées par l'administration des Terres Australes et Antarctiques Françaises (TAAF), est responsable de captures accidentelles d'albatros et de pétrels, en nombre important.

Afin de concilier l'activité de pêche, qui est essentielle pour l'économie et l'emploi des TAAF, avec la nécessité de protéger les albatros et les pétrels menacés par le recours à la technique de la palangre, l'administration des TAAF a pris diverses mesures, telles que: l'obligation, pour les palangriers, d'embarquer un contrôleur des pêches, agent du territoire assermenté et affecté à la détection d'éventuelles infractions et la réglementation des conditions d'utilisation des palangres, inspirée des recommandations de la convention sur les ressources marines de l'Antarctique.

L'harmonisation au niveau international de ce type de contraintes permettra aux opérateurs maritimes français de ne pas subir la concurrence d'États pratiquant le « moins disant écologique » et de défendre ainsi l'emploi.

* d'intérêt général :

Si l'Union européenne a, depuis plus de vingt ans, mis en place une politique harmonisée de protection des oiseaux, celle-ci ne peut atteindre sa pleine efficacité que complétée par des accords internationaux permettant de traiter d'espèces dans le périmètre géographique correspondant aux réalités biologiques.

Dans une perspective de conservation d'espèces pélagiques, l'accord a pour principal intérêt d'organiser une coopération internationale, seule capable de garantir l'efficacité des diverses mesures à mettre en oeuvre :

- L'élaboration et l'harmonisation des stratégies de conservation ;

- La réintroduction, le renforcement et la restauration de populations dans leur aire de répartition naturelle ;

- La lutte contre les espèces envahissantes ;

- La protection des sites de reproduction, par l'élaboration et la mise en oeuvre de plans de gestion pour les sites protégés, en tenant compte de l'importance internationale de ces sites ;

- L'élaboration de plans de gestion pour les secteurs d'alimentation et de migration en hiver ;

- La réduction, voire l'élimination des captures accidentelles ;

- La recherche scientifique et la surveillance (développement de nouvelles techniques) ;

- L'éducation et la sensibilisation du public.

* d'incidences financières :

L'article 7 de l'accord ne fixant pas de barème pour la répartition des dépenses obligatoires (celui-ci devant être revu à chaque adhésion), l'accord aura une incidence financière limitée, mais dont l'ampleur ne peut être précisément chiffrée dès maintenant.

* de complexité de l'ordonnancement juridique :

L'approbation de l'accord n'entraînera pas de modification de l'ordonnancement juridique existant, sachant qu'au cours de ces dernières années la France a pris une série de mesures législatives et réglementaires satisfaisant déjà aux objectifs de l'accord. Il s'agit de:

- L'article L.411 du Code de l'Environnement, qui prohibe la destruction, l'altération ou la dégradation des milieux particuliers des espèces ;

- L'arrêté du 14 août 1998, pris en application de l'article L. 411-1 et 2 du Code de l'Environnement, qui interdit, pour toutes les espèces d'albatros et de pétrels présents dans les TAAF, leur destruction, capture, naturalisation, transport et commerce; des dérogations à ces interdictions sont prévues à des fins scientifiques et dans des conditions définies par l'arrêté du 22 décembre 1999; elles sont délivrées par l'administrateur supérieur des TAAF ;

- L'article L. 411-3 de ce même code, qui interdit l'introduction volontaire ou involontaire, dans le milieu naturel, de tous spécimens d'espèces non indigènes par rapport au territoire d'introduction ;

- L'arrêté du 12 octobre 2001, qui a interdit l'introduction de toutes espèces animales ou végétales dans les TAAF.

* 2 Voir le texte annexé au document Sénat n° 45 (2003-2004)

* 3 Texte transmis par le Gouvernement pour l'information des parlementaires.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page