CHAPITRE II -
LA POLITIQUE DE PROTECTION DES CONSOMMATEURS
I. LA POLITIQUE DE SOUTIEN AU MOUVEMENT CONSUMÉRISTE
A. LES ASSOCIATIONS AGRÉÉES DE CONSOMMATEURS : DES RELAIS INDISPENSABLES DE LA POLITIQUE DE PROTECTION DES CONSOMMATEURS
1. Un mouvement associatif dynamique
Les
associations de consommateurs constituent des relais indispensables de la
politique de protection des consommateurs. Par leurs actions de formation, de
conseil et d'information, elles sont des partenaires privilégiés
des pouvoirs publics.
Parmi elles, les associations agréées au sens des
articles L.421-1 et suivants du code de la consommation
1(
*
)
jouent un rôle essentiel. Leur
agrément leur permet en effet :
- d'intervenir devant les juridictions civiles pour soutenir la demande en
réparation d'un consommateur lésé ;
- de se porter partie civile, s'il y a atteinte à
l'intérêt collectif des consommateurs ;
- de représenter plusieurs plaignants devant les tribunaux, dans le
cas d'un préjudice causé par un même professionnel ;
- de demander au juge civil la suppression des clauses abusives dans les
contrats qui sont proposés aux consommateurs ;
- de demander au tribunal civil ou pénal de faire cesser des
agissements illicites ou de supprimer des clauses illicites dans un contrat ou
dans une catégorie de contrats.
On recense au niveau national 19 associations de consommateurs
agréées.
LES ASSOCIATIONS AGRÉÉES DE CONSOMMATEURS
ADEIC-FEN |
Association d'éducation et d'information du consommateur de l'Education nationale |
AFOC |
Association FO Consommateur |
ALLDC |
Association Léo Lagrange pour la Défense des Consommateurs |
ASSCO-CFDT |
Association Etudes et consommation CFDT |
CGL |
Confédération générale du logement |
CNAFAL |
Conseil national des associations familiales catholiques |
CNAPES |
Comité national des associations populaires familiales syndicales |
CNL |
Confédération nationale du logement |
CSCV |
Confédération syndicale du cadre de vie |
CSF |
Confédération syndicale des familles |
FF |
Familles de France |
FR |
Familles rurales |
FNAUT |
Fédération nationale des usagers des transports |
INDECOSA - CGT |
Association pour l'information et la
défense des
consommateurs
|
ORGECO |
Organisation générale des consommateurs |
UFC - QUE CHOISIR |
Union fédérale des consommateurs - Que choisir ? |
UFCS |
Union féminine civique et sociale |
UNAF |
Union nationale des associations familiales |
Ces
associations assurent deux catégories de missions :
- l'aide aux consommateurs par des actions d'information et de soutien
dans le règlement des litiges ;
- la représentation des consommateurs auprès des pouvoirs
publics ou des professionnels.
La concertation entre les pouvoirs publics et les associations de consommateurs
est, en particulier, institutionnalisée au sein du Conseil national de
la consommation (CNC).
Les associations agréées participent également à de
multiples instances nationales telles que la Commission de la
sécurité des consommateurs (CSC), la Commission des clauses
abusives, le Conseil national du crédit. Elles sont
représentées à la Commission nationale d'équipement
commercial, au Comité national de l'euro et dans de nombreuses autres
instances.
Au niveau local, les associations agréées sont
représentées dans une vingtaine d'instances
départementales telles que les Commissions de surendettement, les
Commissions départementales d'équipement commercial (CDEC), les
Commissions de conciliation des loyers, etc.
Ainsi associées aux politiques mises en oeuvre par les pouvoirs
publics, aussi bien en matière de sécurité domestique que
de lutte contre le surendettement ou de certification des produits industriels
et des services, ces associations ont une charge de travail considérable
et un rôle social important qui justifient le soutien des pouvoirs
publics
.
Elles souhaiteraient d'ailleurs que ce rôle soit reconnu par un
" statut d'élu social qui leur permettrait d'exercer ces
différentes représentations dans de meilleures
conditions.
2. Un financement public qui se stabilise
Les
subventions de l'Etat aux associations de consommateurs inscrites dans le
projet de loi de finances pour 1999 s'élèvent à
50 millions de francs contre 40 millions de francs en loi de finances
initiale pour 1998.
Cette augmentation fait suite à une longue période de
réduction des aides aux organisations consuméristes, comme
l'illustre le graphique suivant :
Votre rapporteur pour avis émet le souhait que les crédits
affectés à ces subventions ne fassent pas l'objet cette
année, comme les années antérieures, de mesures de
régulation budgétaire
.
Ces mesures de régulation, qui frappent le budget des associations sans
qu'elles puissent s'y préparer ont, en effet, ces dernières
années largement contribué à l'effondrement des
crédits de subvention aux associations de consommateurs.
Dans ce secteur, comme dans d'autres, les associations, avec peu de moyens,
prolongent et démultiplient l'action de l'Etat. C'est pourquoi, il est
de mauvaise politique de rechercher dans ces subventions une source
d'économie budgétaire. Compte tenu des montants en jeu, leur
contribution à la réduction des déficits publics ne peut
être que réduite. En revanche, la suppression de quelques dizaines
de milliers de francs de subvention interrompt des actions que seules ces
associations assurent.
C'est en particulier le cas des permanences au sein des centres techniques
régionaux de la consommation (CTRC). Ces permanences permettent d'aider
les particuliers à résoudre leurs problèmes de
consommation. Assurées par des bénévoles, elles sont
indemnisées 5 à 20 francs de l'heure.
Pour limiter l'ampleur des mesures de régulation, il faut que les
associations fassent mieux valoir l'utilité de leurs actions. Le montant
de leurs subventions dépend, en effet, de la façon dont elles
réussiront à asseoir leur crédibilité, moins aux
yeux du secrétariat d'Etat à la consommation -qui leur est
acquis- qu'à celui du ministère de l'économie et des
finances. Dans cette perspective, on peut se demander si elles ne gagneraient
pas à engager une réflexion sur les critères d'attribution
des subventions qui leurs sont allouées.
Votre rapporteur pour avis souligne également les difficultés
qu'entraînent les retards dans les versements des subventions aux
associations. Depuis plusieurs années, l'administration verse un premier
acompte de 40% des subventions en février, pour ne verser le reste qu'au
mois de novembre ou décembre. Ces pratiques conduisent à faire
vivre les associations la quasi totalité de l'année avec 40 % de
leur subvention sans, de plus, avoir jamais la certitude de pouvoir toucher le
reste. Pour certaines d'entre elles, c'est leur équilibre même qui
est compromis par cette pratique.
3. La répartition des subventions
Les subventions accordées aux différentes associations se répartissent de la façon suivante :
|
1991 |
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
ADEIC-FEN
|
909.370
|
500.652
|
374.013
|
331.700
|
300.029
|
256.608
|
315.090
|
338.705
|
Ces
subventions sont réparties en fonction des critères
suivants :
- implantation locale et activité des associations dans les
départements. Cette présence sur le terrain est
déterminante dans le calcul des dotations de fonctionnement des
organisations nationales, puisque 80 % des crédits aux organismes
nationaux sont répartis en proportion des actions subventionnées
localement ;
- participation aux travaux du conseil national de la consommation ;
- publication de revues ;
- participation aux travaux de normalisation et de certification.
L'augmentation des crédits affectés aux associations de
consommateurs pour 1999 devrait permettre de réduire les
inégalités entre les associations, mais aussi d'encourager les
associations les plus dynamiques.
Votre rapporteur pour avis souligne qu'elle pourrait également
être l'occasion de valoriser les associations qui effectuent des efforts
de coordination avec les autres associations. Il importe, en effet, compte tenu
du nombre des associations de consommateurs, de développer les actions
communes et la pratique du mandatement dans les différentes commissions
où les associations de consommateurs sont
représentées
.
B. L'INSTITUT NATIONAL DE LA CONSOMMATION : UN ETABLISSEMENT À LA CROISÉE DES CHEMINS
Créé par la loi de finances pour 1966, l'Institut
national de la consommation (INC) a été conçu par le
législateur pour être un organisme pluridisciplinaire de services
aux consommateurs et à leurs organisations.
L'INC est, en effet, à la fois un centre d'essais comparatifs, un centre
d'information et de documentation et un organisme d'études et de
formation.
Bien que l'INC ne soit plus l'unique référence des consommateurs,
il dispose d'un capital de notoriété important avec son magasine
"
60 millions de consommateurs
" et demeure le seul
centre d'essais et de documentation à la disposition des associations de
défense des consommateurs.
1. Une réforme attendue de l'Institut national de la consommation
Comme
votre commission l'a souligné depuis plusieurs années, l'INC
traverse une crise financière grave et plus encore une crise
d'adaptation de ses missions à un environnement qui, depuis sa
création, a considérablement évolué.
Cette situation, qui perdure depuis 1994, date de l'adoption par le Conseil
d'administration d'un premier plan de redressement, n'a pas, cette année
encore, reçu de solution
.
Un groupe de travail, présidé par M. Robert Rochefort, directeur
du CREDOC, a toutefois été mis en place en 1998 pour faire des
propositions de réforme de l'INC au Gouvernement. Il a remis, le
17 juin dernier, ses conclusions au Secrétaire d'Etat aux petites
et moyennes entreprises, au commerce et à l'artisanat.
Selon ce rapport, l'INC est décrit comme un établissement en
perte de repères, fragilisé par une situation financière
précaire et dont les missions doivent être clarifiées.
Pour sortir de cette situation, le groupe de travail propose en premier lieu de
redéfinir les missions et les structures de l'INC.
Dans cette perspective, il est suggéré de distinguer nettement
dans les structures et la comptabilité de l'organisme ce qui est du
ressort de l'activité éditoriale à caractère
commercial, de ce qui a trait à l'aide permanente accordée au
réseau des organisations de consommateurs et au pôle de
réalisation d'essais comparatifs.
Tirant les conséquences d'une situation dans laquelle l'activité
éditoriale est déficitaire et insuffisamment
professionnalisée, le rapport préconise une filialisation de
l'activité commerciale.
Il est, en second lieu, proposé de contractualiser les relations de
l'INC avec l'Etat et avec les mouvements de défense des consommateurs.
Se fondant sur l'expérience des contrats de plan des entreprises
publiques, le rapport estime qu'un contrat d'objectifs pluriannuel serait de
nature à " clarifier " les relations entre l'INC et la
tutelle. Il propose également que le contrat qui lierait l'INC et les
associations de consommateurs définisse les services que celui-ci peut
leur apporter.
Votre rapporteur pour avis invite le Secrétariat d'Etat à
étudier au plus vite ces propositions.
Il importe que l'INC soit de nouveau en mesure de remplir son rôle de
soutien et d'information aux consommateurs et à leurs associations.
Parce qu'organisme public indépendant des pouvoirs économiques et
politiques, l'INC peut jouer un rôle important de diffusion de
l'information relative à la consommation, notamment auprès des
publics défavorisés.
Il convient donc de mettre en oeuvre au plus tôt des solutions qui
permettent à l'INC de sortir d'une crise qui dure déjà
depuis trop longtemps.
2. Un budget qui se maintient
En 1997,
l'INC a dégagé un résultat comptable positif de
2,1 millions de francs sur un budget de 51,5 millions de francs. Ce
résultat marque un retour à l'équilibre financier
après plusieurs années de déficit.
Au cours des années 1993 à 1995, l'INC avait, en effet, connu une
crise financière sévère qui s'était traduite par un
déficit cumulé de près de 54 millions de francs.
Ces difficultés étaient liées pour l'essentiel à la
chute des ventes en kiosque de la revue (-58 % entre 1988 et 1995 et
-42,5 % entre 1993 et 1994), ainsi qu'à la baisse des abonnements.
Dans le même temps, le montant de la subvention de l'Etat avait connu une
évolution en accordéon avec une tendance marquée à
la baisse.
BUDGET DE l'INC DEPUIS 10 ANS
|
88 |
89 |
90 |
91 |
92 |
93 |
94 |
95 |
96 |
97 |
98 |
Recettes propres |
85,1 |
79,4 |
91,8 |
120,2 |
139,7 |
112,7 |
72,6 |
52,7 |
57,6 |
51,5 |
54,8 |
dont : |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Mensuel kiosque |
17,5 |
17,3 |
18,0 |
25,1 |
41,7 |
34,0 |
20,1 |
13,4 |
13,9 |
11,6 |
15,3 |
Hors série kiosque |
23,5 |
17,8 |
18,1 |
27,1 |
23,1 |
20,8 |
9,1 |
5,2 |
5,9 |
5,8 |
5,4 |
Numéro pratique kiosque |
21,3 |
19,0 |
24,2 |
31,1 |
37,8 |
25,3 |
15,9 |
9,1 |
11,3 |
8,5 |
7 |
Abonnements |
16,8 |
19,1 |
23,7 |
28,3 |
26,5 |
27,9 |
22,0 |
21,0 |
22,9 |
22,3 |
23,7 |
Produits financiers |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
1,3 |
2,9 |
2,5 |
1,7 |
1,9 |
0,8 |
0,5 |
0,4 |
Subvention d'État |
37,0 |
36,0 |
45,2 |
47,8 |
47,2 |
37,0 |
33,5 |
43,5 |
28,5 |
29,0 |
25 |
Total produits |
128,8 |
117,4 |
139,2 |
170,6 |
190,7 |
154,5 |
110,6 |
103,4 |
93,9 |
85,6 |
82 |
Charges de personnel |
25,1 |
24,1 |
25,7 |
33,3 |
34,2 |
38,5 |
39,9 |
33,9 |
26,7 |
25,9 |
25,8 |
Amortissements |
0,2 |
1,0 |
1,1 |
1,1 |
0,9 |
1,4 |
2,4 |
2,3 |
1,7 |
0,7 |
0,6 |
Autres charges |
105,8 |
93,4 |
103,2 |
120,4 |
144,0 |
133,4 |
95,9 |
74,7 |
64,9 |
56,9 |
55,6 |
Total charges |
131,1 |
118,5 |
130,0 |
154,8 |
179,1 |
173,3 |
138,2 |
110,9 |
93,3 |
83,5 |
82 |
Résultat |
-2,3 |
-1,1 |
9,2 |
15,8 |
11,6 |
-18,8 |
-27,6 |
-7,5 |
0,6 |
2,1 |
0,0 |
La
baisse de près de 30 % de la subvention de l'Etat en 1993 et en
1994, intervenant en même temps que la baisse des ressources propres de
l'Institut, n'avait fait qu'amplifier la crise financière.
Le retour à l'équilibre, en 1996 et 1997, a été
obtenu par une réduction sévère des dépenses et par
la mise en oeuvre d'un plan social, en 1995, qui a réduit les effectifs
de 120 à 80.
Ce retour à l'équilibre est cependant précaire.
L'épuisement des réserves de l'établissement ne laisse
aucune marge de sécurité en cas de fluctuation à la baisse
des ventes du mensuel. Cette situation impose à l'établissement
une politique d'investissement minimal qui l'a conduit à restreindre le
nombre de ses essais comparatifs. Or ces essais constituent une des raisons
d'être de l'établissement et un des éléments
essentiels de la compétitivité de ses publications face à
la concurrence des autres revues de consommateurs.
Pour 1999, le montant de la subvention de fonctionnement de l'INC inscrite
dans le projet de loi de finances s'élève à
25 millions de francs, comme en 1998
.
On peut se demander si ce montant est suffisant pour relancer les
activités de l'INC. La Cour des comptes soulignait déjà en
1995 que "
si les pouvoirs publics considèrent que le rôle
et la mission de l'INC constituent un enjeu dans une politique de la
consommation dont l'Etat ne saurait se désintéresser, il
conviendrait de lui accorder des moyens financiers suffisants pour assurer son
développement en fonction des missions qui lui sont assignées. Si
tel n'est pas le cas , la subvention a vocation à
disparaître".
La même question se pose aujourd'hui. Il
conviendra, une fois les missions et les structures de l'INC redéfinies,
d'y répondre.