2. Pour un bon usage de la déconcentration
Le
mouvement de déconcentration a été initié au sein
du ministère de la culture dans les années 1980, lorsque la
croissance de ses moyens l'a amené à s'adapter à une
dimension qu'il n'avait pas jusque là, et s'est traduite par un
accroissement du rôle des directions régionales des affaires
culturelles qui constituent, avec les services départementaux des
archives et du patrimoine, les échelons déconcentrés du
ministère.
Parallèlement à cette évolution propre au ministère
de la culture, la déconcentration est devenue un principe fondamental de
l'organisation administrative de l'Etat. Conçue par la loi
n° 92-125 du 6 février 1992 relative à
l'administration territoriale de la République comme le corollaire
nécessaire de la décentralisation, elle a redonné vie
à l'adage selon lequel " on peut gouverner de loin, mais on
n'administre bien que de près ".
Plus qu'à tout autre domaine d'intervention de l'Etat, ce principe
administratif a vocation à s'appliquer à l'action conduite par le
ministère de la culture dont le rôle en matière de soutien
à la création et de diffusion culturelle se traduit de plus en
plus par un partenariat avec les collectivités locales et un dialogue
direct avec les artistes. Par ailleurs, il apparaît comme un moyen
privilégié de développer l'offre culturelle dans les
régions.
Le décret n° 97-1200 du 19 décembre 1997 a
précisé les conditions d'application de la règle
générale posée par le décret n°97-34 du
15 janvier 1997 selon laquelle les décisions individuelles entrant
dans le champ de compétences de l'Etat, à l'exception de celles
concernant les agents publics, sont prises par le préfet. Il s'est
traduit en 1998 par un accroissement du montant des crédits
déconcentrés, évolution qui devrait arriver à son
terme en 1999.
Si l'on tient compte des seuls crédits déconcentrables
2(
*
)
, les crédits
déconcentrés représentaient, en 1998, 81 % des
dotations du ministère contre 28 % en 1990.
Comme nous l'avons souligné plus haut, la déconcentration
entraîne en premier lieu un accroissement de la charge de travail des
directions régionales des affaires culturelles. Nous ne reviendrons pas
ici sur les inconvénients qui risquent de résulter d'une
insuffisance de leurs moyens.
Au-delà de ces difficultés liées à la gestion de la
politique culturelle, la déconcentration aura pour conséquence de
modifier les relations entre l'administration et les professionnels de la
culture
. Dans cette perspective, des inquiétudes se sont
manifestées face aux risques d'une politique culturelle, à
géométrie variable : l'administration centrale
dépourvue de moyens de contrôle ne serait plus capable de
coordonner la politique culturelle qui serait réduite à
l'addition de 23 politiques régionales. En ce domaine, votre rapporteur
considère que les outils statistiques et informatiques ne pourront se
substituer à la volonté politique.
Dans le souci de parer à ces critiques, la ministre a souhaité
relancer la politique contractuelle en la dotant d'un cadre
général précisant les droits et les obligations
respectives de l'Etat et des structures culturelles. Ce cadre
général est défini par
la charte du service public,
qui entrera en vigueur le 1er janvier 1999. Ce document qui avait vocation
à l'origine à s'appliquer au seul secteur du spectacle vivant
devrait concerner l'ensemble des domaines d'intervention du ministère, y
compris les musées. Destinée à clarifier les conditions de
l'intervention de l'Etat, elle fixe les principes généraux
définissant les responsabilités des équipes et des
structures subventionnées, les principales règles relatives
à la direction et à la gestion des établissements assurant
des missions de service public ainsi que les règles et les obligations
qui s'imposent à l'Etat.
Cette relance de la contractualisation correspond à une
nécessité. En effet, les structures culturelles doivent
évoluer dans le sens d'une responsabilisation accrue de façon
à mieux satisfaire les attentes du public et à mieux remplir leur
mission de service public. Cette dernière doit être fondée
sur la définition de priorités précises et la mise en
place d'instruments de contrôle et d'évaluation.
Cette exigence concerne non seulement les interventions
déconcentrées de l'Etat auxquelles devraient s'appliquer en
premier lieu la charte de service public, mais également les grandes
institutions culturelles situées à Paris,
qu'il s'agisse de
la Bibliothèque nationale de France ou du Grand Louvre. Ces
établissements doivent, en effet, participer activement à la
diffusion culturelle, notamment en prenant en compte, plus largement qu'elles
ne le font aujourd'hui, le rôle de têtes de réseau qui leur
incombe à l'égard des institutions situées en province.
Votre rapporteur souhaite que la contractualisation puisse constituer un moyen
d'évoluer en ce domaine.
Si votre rapporteur approuve les finalités de cette charte comme les
principes qu'elle réaffirme (répartition équilibrée
de l'offre culturelle, liberté des créateurs,
démocratisation de l'accès à la culture), il souligne que,
sous bien des aspects, ses dispositions demeurent très
générales et leurs conditions de mise en oeuvre très
floues, laissant à l'administration et à ses partenaires une
large marge d'appréciation. La valeur de ce document dépendra
donc des suites qu'entendra lui donner le ministère dans ses relations
avec les structures subventionnées.