III. LES VIOLENCES SEXUELLES ET SEXISTES DANS LE CINÉMA

La question des violences sexuelles et sexistes (VSS) dans le cinéma et l'audiovisuel occupe l'espace médiatique suite aux affaires judiciaires du producteur Harvey Weinstein, initiées en octobre 2017 par une série d'articles du New York Times.

Rapidement, des révélations sur une ambiance de travail toxique et des rapports trop souvent ambigus sur les plateaux de tournage ont été apportées, singulièrement par les femmes victimes, qui ont su trouver le courage de s'exprimer, parfois au péril de leur carrière.

A. LA CRISE FRAPPE LA FRANCE

En France, l'actrice Judith Godrèche a porté avec force ce combat, avec un dépôt de plainte en février 2024 contre les réalisateurs Benoît Jacquot et Jacques Doillon6(*). Ses interventions ont été à l'origine d'une prise de conscience pour de très nombreuses victimes, qui ont pu enfin s'exprimer et dénoncer une réalité parfois sordide.

De manière générale, il appartient au monde du cinéma et plus largement de l'image de se livrer à un examen de conscience approfondi sur des pratiques qui ont perduré à travers les âges, à tel point qu'elles ont pu littéralement « faire partie du décor », les spécificités de la création cinématographique servant alors d'alibi commode à des comportements délictueux.

Malgré les avancées sociétales majeures de ces dernières années qui vont toutes dans le sens d'une prise en compte de la parole des victimes et d'un traitement respectueux des acteurs, le cinéma s'est peut-être senti immunisé, et se trouve aujourd'hui confronté à une crise majeure qui rebondit médiatiquement chaque année.

B. DES INITIATIVES POUR ENTENDRE, PROTÉGER ET PRÉVENIR

La commission s'est saisie de cette problématique, qui met en jeu la crédibilité et l'image de l'ensemble de la filière.

D'une part, dans le cadre de l'examen en séance publique de sa proposition de loi visant à conforter la filière cinématographique en France7(*), le Sénat a adopté le 14 février 2024 à l'initiative de Monique de Marco et de plusieurs de ses collègues un amendement à l'article 6 qui prive les producteurs des aides du CNC lorsque des faits de VSS ont été constatés sur les lieux de tournage et que les obligations de prévention n'ont pas été remplies.

À ce jour cependant, ce texte pourtant très attendu par la profession, n'a pas encore été inscrit à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale.

D'autre part, la commission et la Délégation aux droits des femmes ont organisé une grande table ronde le 4 juin 20248(*) consacrée aux VSS dans le cinéma.

Cette matinée a donné l'occasion d'entendre toute l'industrie cinématographique, des acteurs, avec Anna Mouglalis, aux producteurs en passant par les responsables de casting, mais également le collectif 50/50, très actif dans la dénonciation des VSS.

La commission d'enquête de l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale avait initié une commission d'enquête sur les VSS, qui avait entamé ses travaux le 14 mai 2024 et mené neuf auditions avant que la dissolution n'y mette un terme le 9 juin.

Elle a cependant été reconstituée par la nouvelle législature et a désigné son Bureau le 22 octobre. La nouvelle commission d'enquête a repris le champ très large de la précédente, puisqu'elle a souhaité étendre son contrôle aux secteurs du spectacle vivant, de la mode et de la publicité en plus du cinéma et de l'audiovisuel.

Le rapporteur pour avis suivra bien entendu avec une grande attention les travaux et les conclusions de cette instance.


* 6 Judith Godrèche a été auditionnée par la Délégation aux droits des femmes du Sénat le 29 février 2024 : https://videos.senat.fr/video.4408472_65de6dfe60fe6.droits-des-femmes--audition-de-judith-godreche

* 7 Cette proposition de loi est la traduction législative du rapport précité « Le cinéma contre-attaque », réalisé par Jérémy Bacchi, Sonia de La Provôté et Céline Boulay-Espéronnier.

* 8 https://www.senat.fr/compte-rendu-commissions/20240603/cult.html#toc2

Partager cette page