B. LA BAISSE DE LA SUBVENTION SUSCITE UNE REDÉFINITION DES PRIORITÉS D'ACTION DE L'INSTITUT
1. Un plan d'économies à court et moyen termes
À court terme, l'Institut français prévoit la mise en oeuvre de plusieurs mesures d'économies visant à absorber cette baisse.
· En ce qui concerne tout d'abord ses dépenses de fonctionnement, d'importantes économies résultent de son déménagement en 2024 dans de nouveaux locaux au loyer moins élevé (pour une économie d'environ 9 millions d'euros sur la durée du bail de neuf ans). Elles seront complétées en 2025 par un effort supplémentaire sur les frais de fonctionnement, notamment par une internalisation de certaines tâches relatives à la communication institutionnelle, et une baisse des frais de mission.
Au-delà des seuls aspects financiers, une réflexion est par ailleurs en cours sur une éventuelle évolution du statut juridique de l'Institut français, qui pourrait bénéficier d'un régime de recrutement mieux adapté à ses missions sous le statut d'établissement public administratif (EPA).
· Dans le but d'éviter de répartir la baisse de crédits par saupoudrage, l'Institut procède par ailleurs à une revue stratégique générale de ses programmes et activités, indispensable dans la mesure où la baisse de la SCSP représente 20 % des dépenses non contraintes de l'Institut. Ce réexamen a permis d'arbitrer une préservation globale de l'accompagnement du réseau, c'est-à-dire des moyens alloués à la formation, aux projets et à la modernisation des postes. Feront en revanche l'objet d'une réduction de leur financement :
- le soutien au cinéma avec, à compter de 2025, une suppression de la contribution de l'Institut à l'aide aux cinémas du monde, qui ne met pas le dispositif en péril ;
- la politique en faveur des résidences et des mobilités, notamment le programme de mobilité internationale de recherche artistique (MIRA) ;
- l'accompagnement à la structuration des secteurs culturels dans les pays du Sud, le programme d'appui aux opérateurs culturels en Afrique (AOCA) étant réduit de moitié ;
- dans une moindre mesure, le budget des partenariats européens, et notamment le fonds culturel franco-allemand ;
- enfin, les conventions passées avec les collectivités locales, qui seront désormais recentrées sur les partenariats les plus dynamiques.
Lors de son audition par le rapporteur, la présidente de l'Institut français a insisté sur son souhait de rendre les actions conduites par l'établissement, et surtout leurs effets positifs pour le positionnement de la France à l'étranger, plus visibles par les citoyens français. Cette démarche passera en 2025 par la poursuite du travail lancé par le pôle d'évaluation d'impact de l'Institut ainsi que par le développement des partenariats avec les collectivités territoriales.
Le rapporteur relève que certains projets conduits en partie dans les territoires ont été très visibles au cours des dernières années, à l'image de l'exposition Salammbô : le partenariat conclu entre la réunion des musées métropolitains Rouen Normandie, le Mucem de Marseille et le musée national du Bardo, avec le soutien de l'Institut français de Tunisie, a permis de la rendre successivement visible à Rouen, à Marseille et enfin à Tunis depuis septembre 2024.
2. Un cadre contractuel renouvelé
Les priorités stratégiques de l'Institut français à moyen terme sont déterminées dans le cadre d'un contrat d'objectifs et de performance (COP), dont la nouvelle mouture recueillera l'avis du Sénat dans les prochaines semaines, avant une adoption par le conseil d'administration de l'établissement prévue pour le début d'année 2025 au plus tard.
Les priorités d'action fixées par ce document pour les trois prochaines années correspondent à celles de l'action culturelle extérieure de la France. Il s'agit de l'animation du réseau culturel français à l'étranger, du développement des industries culturelles et créatives (ICC) françaises à l'international et de la structuration de ces mêmes industries dans les pays du Sud, ainsi que du soutien à la création artistique dans sa dimension internationale.
Trois zones géographiques sont par ailleurs considérées comme prioritaires : l'Afrique, dans le cadre de l'agenda transformationnel ; l'Europe, au sens de la communauté politique européenne, avec l'objectif de favoriser le dialogue entre les jeunesses et les sociétés civiles et de renforcer le sentiment européen ; l'Indopacifique, en particulier dans le domaine des ICC. Ces priorités géographiques sont d'ores et déjà observées par l'Institut, dont les crédits d'intervention bénéficient principalement à ces trois zones.
Annoncé par le Président de la République en août 2017, le rapprochement entre la Fondation des Alliances françaises (FAF) et l'Institut français (IF) se poursuit par ailleurs dans son volet de mutualisation des ressources, dans le cadre de la convention tripartite renouvelée en juillet 2023 entre le MEAE, la FAF et l'IF. Le soutien à l'enseignement du français en tant que langue étrangère (FLE), la diffusion culturelle, la professionnalisation des agents des AF et la mise en oeuvre de la démarche qualité sont désormais confiés à l'IF. Le MEAE insiste sur la complémentarité territoriale des deux réseaux, le plus souvent implantés dans des villes et territoires distincts, les Alliances pouvant par ailleurs constituer le relais de l'action culturelle et linguistique des postes dans les pays sans Institut (comme c'est le cas en Australie, au Venezuela, en Thaïlande ou aux Philippines).
Le soutien de l'Institut français aux différentes formes d'expression artistique
Les industries culturelles et créatives (ICC), fortement génératrices de revenus, sont désormais bien identifiées dans les différents projets mis en oeuvre par l'Institut. Pour mémoire, le réseau a amorcé en 2019 un virage stratégique visant à élargir son champ d'action à l'accompagnement des filières économiques de la culture et au soutien de l'entrepreneuriat culturel. Cette évolution correspond aux priorités du ministère, qui affirme le soutien aux ICC, « secteur clé de l'économie française et recouvrant une dimension politique majeure en tant qu'instrument de diffusion de la création et de la culture française », comme un « objectif essentiel de notre diplomatie d'influence ».
En ce qui concerne les arts visuels, qui bénéficient d'un effet de mode très important et d'un fort soutien de la part des acteurs privés de la culture, la présidente de l'Institut souligne la nécessité de définir l'action de l'établissement en complément du soutien apporté par la sphère privée.
Selon la présidente de l'Institut, les difficultés rencontrées par le spectacle vivant pourraient être partiellement surmontées par le renforcement de sa diffusion internationale. Si les productions du secteur sont souvent coûteuses et peu amorties du fait d'une durée de vie réduite, ainsi que l'avait souligné la Cour des comptes en 2022, elles constituent cependant un marqueur fort et très demandé à l'étranger de la culture française. Leur financement pourrait ainsi être facilité si leur présentation à l'étranger, qui permet de prolonger leur durée d'amortissement, était mieux prise en compte au stade de la création.