ANNEXE I : LISTE DES PERSONNALITÉS AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR POUR AVIS
Mardi 29 septembre 2009
Entretien avec M. Jérôme Clément , Président d'ARTE France
Mardi 27 octobre 2009
Entretien avec M. Alain de Pouzilhac , Président directeur général de la holding « Audiovisuel Extérieur de la France » et Mme Christine Ockrent , Directrice générale déléguée de la société holding « Audiovisuel Extérieur de la France »
Mercredi 28 octobre 2009
Visite des locaux de TV5 Monde et entretien avec Mme Marie-Christine Saragosse , Directrice générale de TV5 Monde
Entretien avec M. Jean-Christophe Fleury, sous-directeur de l'audiovisuel extérieur au ministère des Affaires et européennes
Jeudi 29 octobre 2009
Entretien avec Mme Elisa Drago , Mme Maria Afonso et M. Daniel Desequelle , représentants de l'intersyndicale de RFI
Mercredi 4 novembre 2009
Audition de Mme Laurence Franceschini, Directrice du développement des médias (DDM), Service du Premier ministre
ANNEXE II : COMPTE-RENDU DE L'AUDITION DE MME LAURENCE FRANCESCHINI, DIRECTRICE DU DÉVELOPPEMENT DES MEDIAS
La commission a procédé, lors de sa réunion du mercredi 4 novembre, à l'audition de Mme Laurence Franceschini, directrice du développement des médias, sur les crédits du programme « Action audiovisuelle extérieure » de la mission « Médias » dans le cadre du projet de loi de finances pour 2010.
M. Josselin de Rohan, président, a indiqué que la commission suivait avec un intérêt particulier la réforme de l'audiovisuel extérieur. Il a rappelé qu'elle s'était saisie pour avis du projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision, et que, sur proposition de son rapporteur pour avis, M. Joseph Kergueris, elle avait proposé plusieurs amendements sur les aspects relatifs à l'audiovisuel extérieur, qui ont été adoptés par le Sénat et repris dans la loi. Il a souhaité obtenir un éclairage sur la mise en oeuvre de la réforme de l'audiovisuel extérieur et des précisions au sujet des priorités du futur contrat d'objectifs et de moyens entre l'Etat et la société holding en charge de l'audiovisuel extérieur de la France, qui devrait être transmis à la commission.
Il a également souhaité connaître les moyens consacrés à l'audiovisuel extérieur dans le projet de loi de finances pour 2010 et les synergies et les mutualisations entre les différents opérateurs, c'est-à-dire TV5 Monde, France 24 et Radio France Internationale (RFI), face aux nouveaux enjeux, comme le basculement de l'analogique au numérique et le développement des nouvelles technologies, comme la télévision sur Internet ou sur téléphone mobile.
Enfin, il s'est interrogé sur la situation des différentes sociétés et notamment sur les conséquences de la grève au sein de RFI sur l'équilibre budgétaire de la radio.
Mme Laurence Franceschini, directrice du développement des médias au ministère de la culture et de la communication, a rappelé que la réforme de l'audiovisuel extérieur, lancée à l'été 2007 par le Président de la République, partait du constat selon lequel la diversité des opérateurs, avec d'abord Radio France Internationale, puis TV5 Monde et enfin France 24, ainsi que la faiblesse du pilotage stratégique de l'Etat, ajoutée à la multiplicité des tutelles et des sources de financement, nourrissaient depuis plusieurs années, et à juste titre, les critiques sur le manque de cohérence de la politique audiovisuelle extérieure de la France. Cette réforme avait donc pour objectifs d'améliorer la cohérence de la politique audiovisuelle extérieure, la lisibilité de ses orientations stratégiques et l'efficacité de chacun de ses opérateurs.
Cette réforme s'est traduite par la création, en avril 2008, de la société holding « audiovisuel extérieur de la France », dont le capital est entièrement détenu par l'Etat et qui a vocation à regrouper l'ensemble des participations publiques dans les différentes sociétés de l'audiovisuel extérieur, c'est-à-dire RFI, TV5 Monde et France 24, de manière à renforcer les synergies et les mutualisations entre ces sociétés.
La société « audiovisuel extérieur de la France » est devenue, avec la loi du 5 mars 2009 relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision, une société nationale de programme, dont la mission est de contribuer à la diffusion et à la promotion de la langue française, des cultures française et francophone, ainsi qu'au rayonnement et à la présence de la France dans le monde, notamment par la programmation et la diffusion d'émissions de télévision et de radio ou de services en ligne relatifs à l'actualité française, francophone, européenne et internationale.
Par ailleurs, la constitution du groupe, qui nécessitait des réorganisations capitalistiques complexes, est désormais achevée. La holding détient aujourd'hui 100 % du capital de RFI et de France 24, ainsi que 49 % de celui de TV5 Monde.
TV5 Monde occupe une place à part dans ce nouvel ensemble, puisqu'elle est un partenaire et non une filiale de la holding, ce qui a permis d'apaiser les craintes des partenaires francophones de cette chaîne.
Mme Laurence Franceschini a ensuite présenté la situation de chacun des opérateurs.
La réforme de Radio France Internationale, attendue depuis une dizaine d'année, s'est traduite par un plan global de modernisation, accompagné d'un plan de sauvegarde de l'emploi, qui prévoit 206 suppressions de postes et 34 créations, avec des mesures d'accompagnement comme des reclassements, des départs volontaires, des mises à la retraite ou des licenciements, et qui est à l'origine d'un conflit social qui dure depuis le mois de mai 2009.
A la suite de la décision de la Cour d'appel de Paris du 28 septembre 2009 et de la modification en conséquence par la direction de RFI du plan de sauvegarde de l'emploi, le comité d'entreprise a pu remettre son avis sur ce plan, qui s'est donc ouvert le 28 octobre. A la date de l'audition, 202 demandes d'information avaient été relevées par la direction dont 108 salariés dès le premier jour, ce qui permet d'espérer voir les départs contraints limités.
La stratégie des dirigeants du groupe s'agissant de RFI repose sur l'idée de relancer cette radio, qui reste une belle et grande maison avec des personnalités d'exception, à la conquête de nouveaux bassins d'audience tout en confortant ses positions en Afrique.
Cette stratégie vise donc d'abord à redéfinir les priorités géographiques en réorganisant les rédactions en langues étrangères, afin d'en supprimer certaines, comme celles en allemand, en polonais, en serbo-croate, en albanais, en turc et en laotien, tout en encourageant les programmes dans d'autres langues, comme l'anglais, l'espagnol, le portugais-brésilien, l'haoussa et le swahili s'agissant de la radio, ou le mandarin, le russe, le vietnamien et le persan en ce qui concerne les programmes sur Internet.
L'objectif est non seulement de consolider les positions de RFI en Afrique francophone, mais aussi de développer son audience en Afrique lusophone et anglophone.
Cette stratégie s'accompagne de l'idée de mieux prendre en compte la dimension économique et de renforcer la place de la musique.
Elle vise ensuite à développer RFI sur Internet.
Enfin, elle a pour objectif de redresser la situation financière de la station et d'améliorer sa gestion, ce qui implique de redéfinir les métiers des salariés, dans le cadre d'un dialogue social rénové et dans un climat de confiance avec la direction, ce que devrait favoriser le déblocage du plan social.
A cet égard, l'idée d'un déménagement de RFI, qui occupe actuellement des locaux au sein de Radio France, pour se rapprocher géographiquement de France 24, serait de nature à favoriser ces évolutions.
Concernant TV5 Monde, la conférence de Vancouver de novembre 2008 a adopté le plan stratégique pour la période 2009-2011.
Ce plan stratégique repose sur l'idée de faire de TV5 Monde un « média global » présent sur tous les supports, et notamment l'Internet, ce qui suppose un développement important du sous-titrage, tout en préservant les valeurs et la spécificité de cette chaîne généraliste francophone.
Enfin, s'agissant de France 24, la première priorité est l'extension progressive à 24 h/24 h de programmation en arabe, en s'appuyant sur les synergies entre France 24 et la radio Monte Carlo Doualiya, filiale de RFI.
Mme Laurence Franceschini a détaillé les crédits consacrés à l'audiovisuel extérieur dans le cadre du projet de loi de finances pour 2010, qui relèvent pour partie du programme « Action audiovisuelle extérieure » de la mission « Médias » et pour une autre partie des crédits de redevance du programme « Contribution au financement de l'action audiovisuelle extérieure » de la mission « Avances à l'audiovisuel public ».
Pour 2010, la dotation globale allouée à la société « Audiovisuel extérieur de la France » s'établit à 312,6 millions d'euros, ce qui représente une augmentation de 16,7 millions d'euros par rapport au montant voté en loi de finances initiale pour 2009, soit une hausse de + 5,6 %.
Si cette augmentation est inférieure de 2,9 millions d'euros aux demandes de la société holding, elle n'en traduit pas moins un réel effort financier de la part de l'Etat.
La réforme de l'audiovisuel extérieur trouve sa traduction dans les modalités de financement des sociétés de l'audiovisuel extérieur.
Alors que, avant la réforme, les crédits étaient attribués individuellement à chacune des trois entités, désormais les financements font l'objet d'une enveloppe globale confiée à la société holding, à charge pour elle de la répartir entre les différentes sociétés qui lui sont rattachées.
En effet, l'Etat conserve un droit de regard sur la stratégie de l'audiovisuel extérieur, mais ne gère plus au quotidien les différentes sociétés.
En ce qui concerne TV5 Monde, le conseil d'administration du 21 octobre 2009 a fixé à 72,4 millions d'euros la dotation pour 2010, ce qui représente un montant inférieur à la demande de la société mais une progression de 1,8 million d'euros par rapport à 2009, soit + 2,5 %.
Concernant le futur contrat d'objectifs et de moyens (COM) entre l'Etat et la société « audiovisuel extérieur de la France », Mme Laurence Franceschini a indiqué que sa rédaction était quasiment achevée et qu'il serait transmis prochainement aux assemblées.
Elle a imputé le retard de son élaboration à des discussions concernant l'avenir de la radio Monte Carlo Doualiya.
Le projet de COM se fonde sur les orientations stratégiques suivantes :
- concernant France 24 : une couverture mondiale dès 2010 et une diffusion en arabe 24h/24h ;
- s'agissant de RFI : le développement de nouvelles langues et une diffusion dans les vingt plus grandes agglomérations françaises ;
- concernant TV5 Monde : la poursuite du plan stratégique.
S'agissant du pilotage de l'audiovisuel extérieur, Mme Laurence Franceschini a rappelé que la direction du développement des médias avait un rôle de premier plan dans l'exercice de la tutelle de l'Etat sur la société « audiovisuel extérieur de la France », mais qu'elle se faisait en concertation étroite avec les autres ministères, notamment la direction du budget, l'agence des participations de l'Etat, ainsi que le ministère des affaires étrangères et européennes qui joue un rôle important dans ce domaine.
Enfin, concernant les mutualisations entre les différentes sociétés, Mme Laurence Franceschini a indiqué que, contrairement à une crainte qui avait été exprimée lors de la création de la holding, qui tenait au risque d'une concurrence entre les différents opérateurs face aux distributeurs, la distribution des programmes faisait l'objet des plus fortes synergies.
D'autres mutualisations sont en cours, notamment en matière de gestion ou de recherche et développement.
M. Joseph Kergueris, rapporteur pour avis, s'est interrogé au sujet de l'évolution exacte de la subvention versée à la holding en 2010 et sur le point de savoir s'il ne serait pas préférable d'afficher clairement la répartition par la holding des subventions entre les différentes sociétés afin de ne pas alimenter les soupçons de favoritisme à l'égard de telle ou telle entité.
Il s'est également déclaré inquiet des conséquences de la crise sociale au sein de RFI sur l'équilibre financier de la radio et donc sur les financements dont dispose la société en charge de l'audiovisuel extérieur de la France. Il s'est demandé si l'Etat et la direction du développement des médias en particulier ne devraient pas s'impliquer davantage afin de trouver une issue à ce conflit et d'aboutir à une amélioration du climat social.
Enfin, il a fait part de ses inquiétudes au sujet des protocoles portant sur les aspects culturels annexés aux accords commerciaux négociés actuellement par la Commission européenne avec des pays tiers au regard du respect de la diversité culturelle et de la production et de la circulation d'oeuvres audiovisuelles européennes.
En réponse, Mme Laurence Franceschini a apporté les précisions suivantes :
- les protocoles sur la coopération culturelle annexés aux accords commerciaux négociés actuellement par la Commission européenne avec les pays tiers font l'objet d'une attention particulière du gouvernement français. Certains de ces protocoles ne soulèvent pas de difficultés particulières, à l'image de celui conclu avec les pays de la Caraïbe, mais d'autres, comme celui négocié avec la Corée du Sud, ont posé de sérieuses difficultés concernant leur impact sur les oeuvres audiovisuelles, comme l'a fait observer très justement le centre national du cinéma ; ces difficultés ont incité la France à présenter au niveau européen une stratégie relative aux oeuvres audiovisuelles, élaborée par le ministère des affaires étrangères et européennes, afin que les institutions européennes s'en inspirent dans les négociations commerciales avec les pays tiers ; plus largement, ces accords posent la question de la mise en oeuvre de la convention de l'Unesco sur la diversité culturelle, qui ne visait pas uniquement à proclamer le principe de la diversité culturelle mais à mieux prendre en compte la spécificité des industries culturelles, qui justifie l'existence de mécanismes de soutiens et des dérogations aux règles du marché ; compte tenu du rôle majeur de la France dans l'adoption de la Convention de l'Unesco sur la diversité culturelle, notre pays pourrait jouer un rôle moteur au sein de l'Union européenne dans ce domaine ; la direction du développement des médias participe d'ailleurs actuellement à l'élaboration d'un Livre vert de la Commission européenne portant sur les industries culturelles ;
- le ministère de la culture et de la communication a organisé plusieurs réunions entre la direction et les représentants des personnels de RFI sans aboutir à de réelles avancées ; les nombreux retards dans la mise en oeuvre du plan social de RFI ont inévitablement des conséquences sur son équilibre financier et il faut souhaiter une solution rapide à ce conflit ;
- la dotation de 295,9 millions d'euros versée à la société « audiovisuel extérieure de la France » prévue par la loi de finances initiale pour 2009 a été abondée de 4 millions d'euros supplémentaires en gestion, ce qui a porté la dotation totale à 299,9 millions d'euros ; la dotation pour 2010 serait donc en augmentation de 12,7 millions d'euros, soit une hausse substantielle de 4,1 %, mais qui reste inférieure de 2,9 millions d'euros aux demandes de la holding ; en réalité, ce sont surtout les niveaux des dotations prévisionnelles pour 2012 et 2013 qui font actuellement l'objet de divergences entre l'Etat et les dirigeants de la holding.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga s'est déclarée préoccupée par l'ampleur de la crise sociale au sein de RFI et par l'absence de véritable dialogue de la part de la direction. Elle s'est demandé si, face à une situation de conflit social persistant au sein d'une entreprise publique, l'Etat ne devrait pas prendre ses responsabilités, en désignant un médiateur pour sortir de cette impasse.
Par ailleurs, elle s'est inquiétée du risque de concurrence provenant de l'arrivée de France 24 sur des canaux de diffusion où figure actuellement TV5 Monde, du fait de la tentation des distributeurs de profiter de l'arrivée d'un nouvel opérateur pour faire jouer la concurrence et faire monter les prix.
Elle a estimé que TV5 Monde, en tant que chaîne généraliste et francophone, présentait une importance particulière qui justifiait sa présence sur la télévision numérique terrestre, afin d'être accessible à l'ensemble des foyers français.
Elle a enfin insisté sur la nécessité de respecter le plan d'orientation stratégique de TV5 Monde dans la répartition des dotations entre les différentes sociétés par la holding, notamment vis-à-vis des autres partenaires francophones.
M. Josselin de Rohan, président, a indiqué qu'il ne voyait pas de concurrence entre France 24 et TV5 Monde, mais plutôt une réelle complémentarité. Par ailleurs, il a salué la qualité des journaux télévisés de France 24.
M. Jacques Gautier a également rendu hommage à la qualité des journalistes de France 24, en regrettant l'absence de cette chaîne dans un pays comme l'Afghanistan.
M. Joseph Kergueris, rapporteur pour avis, a cité le cas des hôtels qui confient la gestion des canaux de télévisions disponibles dans les chambres d'hôtel à des sous-traitants, qui ont tendance à faire monter les enchères entre les différentes chaînes pour que celles-ci soient diffusées.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga a souligné que France 24, chaîne d'information, et TV5 Monde, chaîne généraliste et francophone mondiale, ne visaient pas les mêmes publics, la première étant surtout appréciée par les hommes d'affaires français effectuant des déplacements à l'étranger, alors que la seconde était davantage regardée par les ressortissants étrangers ou les Français établis dans ces pays.
En réponse, Mme Laurence Franceschini a apporté les précisions suivantes :
- la désignation d'un médiateur risquerait de retarder la sortie de la situation actuelle de RFI et ne parait donc pas pouvoir être retenue ;
- avec une hausse de 2,5 % de sa dotation, la subvention versée à TV5 Monde est en augmentation pour 2010, elle correspond aux engagements pris par la France vis-à-vis de ses partenaires francophones et elle donnera les moyens à la chaîne de mettre en oeuvre les priorités de son plan stratégique ;
- l'éventuelle diffusion de TV5 Monde sur la télévision numérique terrestre, même si elle devrait se traduire par un accompagnement budgétaire, dépend avant tout d'une décision politique. Il faut cependant relever que, d'ores et déjà, TV5 Monde est disponible sur le câble et le satellite et donc accessible à une grande partie des foyers français. Par ailleurs, cela soulève la question de la visibilité des programmes canadien, belge ou suisse auprès des téléspectateurs français. Enfin et surtout, cela modifierait la vocation même de la chaîne, qui n'est pas de produire elle-même des programmes mais d'assurer la retransmission de programmes français, qui ont par définition déjà été diffusés par les chaînes nationales présentes sur la TNT.