2. Le débat sur l'avenir de l'agence
Un débat est récemment apparu sur la pertinence de conserver l'agence 44 ( * ) . S'il est évidemment tentant de la supprimer pour renouer avec une présentation orthodoxe du budget, votre rapporteur pour avis considère que sa disparition entraînerait vraisemblablement plus de maux qu'elle n'en résoudrait.
Tout d'abord, votre rapporteur pour avis considère qu'il faut éviter d'accroître l'instabilité législative dans notre pays . L'agence n'a pas démérité depuis sa création en 2003, elle bénéficie d'une visibilité croissante et l'histoire mouvementée des ancêtres de l'agence depuis 1945 montre les hésitations perpétuelles des différents Gouvernements pour trouver un mode de financement adéquat pour les projets d'infrastructures de transport.
En outre, il souligne que la question de sa suppression ne se pose que parce que l'on a exagérément retardé la recherche de sources de financement pérennes pour remplacer le produit de cession des sociétés concessionnaires. Il est évident que le recours à des subventions budgétaires est une solution de second rang, d'autant plus que ces dotations dépasseront les 2,5 milliards d'euros pour les trois années à venir compte tenu des retards à prévoir dans la mise en place de la taxe poids lourds. Or, la philosophie présidant la création de l'AFITF était justement d'éviter de trouver chaque année des ressources pour l'agence.
Par surcroît, l'acceptabilité de la taxe poids lourds auprès des professionnels du secteur repose en grande partie sur l'affectation d'une grande partie de son produit à l'AFITF 45 ( * ) .
Par ailleurs, il convient de sanctuariser des crédits qui engagent la France sur le long, voire le très long terme 46 ( * ) . Le retour à un financement uniquement à partir du budget général ou au travers d'un compte d'affectation spécial ferait perdre le caractère protecteur accordé aux crédits gérés par l'agence. Supprimer l'AFITF, c'est risquer de renouer avec les pratiques ministérielles du passé : retards de paiement et réduction de crédits.
Enfin, dans un contexte économique marqué par une grave crise financière qui impactera négativement l'économie réelle, l'Etat doit plus que jamais continuer sa politique de grands travaux . Nul ne conteste en effet la corrélation qui existe entre le niveau d'un pays en infrastructures de transport et la croissance de son Produit Intérieur Brut 47 ( * ) . Le développement économique de la France se décide dès maintenant, en refusant de céder à la facilité de ponctionner les ressources de l'AFITF, et en maintenant fermement le cap de l'investissement.
En définitive, votre rapporteur pour avis considère que l'AFITF est aujourd'hui à la croisée des chemins et que ses missions doivent évoluer pour être à la hauteur des enjeux du Grenelle de l'environnement . C'est pourquoi il sera attentif à la réflexion du Gouvernement sur son avenir et qui devra naturellement être menée à son terme avant que le Parlement ne soit invité à se prononcer sur le schéma national des infrastructures de transport courant 2009, véritable feuille de route pour l'agence.
* 44 La commission des finances du Sénat a en effet voté un amendement d'appel tendant à supprimer l'urgence. Cette interrogation intervient alors que les députés ont consacré son existence lors de l'examen du projet de loi de mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement: l'agence pourrait à terme gérer un fonds de capitalisation regroupant des actifs et des participations de l'Etat (article 9), elle percevra une partie de l'éco-redevance (article 10) et elle mettra en oeuvre le schéma national des infrastructures de transport (article 15).
* 45 La partie de la taxe générée sur les routes.
* 46 La sanctuarisation des crédits de l'AFITF est nécessaire compte tenu de la quasi impossibilité de diviser un projet d'infrastructures de transport en sous-projets et des promesses de cofinancement de projets faites à certains de nos partenaires européens.
* 47 Cf. rapport du Conseil d'analyse économique, de MM. Michel Didier et Rémy Prud'homme, « Infrastructures de transport, mobilité et croissance », décembre 2007.