IV. LES ÉNERGIES RENOUVELABLES
Les pouvoirs publics favorisent le développement de technologies moins polluantes notamment grâce à la fixation des conditions d'achat du courant qu'elles produisent.
A. LES TECHNOLOGIES D'ACTUALITÉ
Depuis
le vote de la loi de finances pour 2001, deux technologies connaissent un
développement prometteur : l'énergie éolienne et la
pile à combustible.
L'énergie éolienne
Si les pouvoirs publics ont mis en oeuvre un système de rachat de
l'électricité fournie par le vent favorable à cette
filière, force est de constater que l'installation des
générateurs d'électricité ne s'effectue pas sans
heurts, qu'il s'agisse de la Bretagne où la multiplication des
implantations d'éoliennes suscite des polémiques, ou de
l'éventuelle création d'une batterie de rotors sur le cap corse,
où des manifestations locales hostiles à cette énergie
« propre » semble se faire de plus en plus jour
14(
*
)
.
Aussi votre Commission des Affaires économiques souhaiterait-elle
connaître les mesures que le Gouvernement entend prendre pour favoriser
le développement de cette filière tout en respectant les
aspirations des habitants des zones où ces engins sont
installés.
La pile à combustible
La pile à combustible permet, quant à elle, de fournir de
l'électricité et de la chaleur en ne rejetant que de la vapeur
d'eau.
Elle est susceptible d'être utilisée d'une part dans
l'automobile
où elle permet d'obtenir un excellent rendement
énergétique du moteur (au moins le double des véhicules
à essence). Les véhicules fonctionnant grâce à cette
pile sont encore au stade expérimental (des recherches sont notamment
menées pour le programme européen Hydro-Gen qui regroupe PSA,
Renault, le CEA, De Nora, Solvay et l'Air Liquide), mais, selon les
informations communiquées à votre rapporteur pour avis, des
progrès importants restent à réaliser pour diminuer la
taille des composants et pour limiter les coûts de fabrication, si bien
que, selon les experts, la commercialisation des premiers véhicules de
série ne devrait pas intervenir avant une dizaine d'année.
Elle est aussi utilisable sur des postes fixes, dans le
bâtiment
ou
l'industrie
, où la question de l'encombrement du
matériel est moins cruciale. Des fabricants nord américains ont
déjà vendu plusieurs centaines d'installations dans le monde,
mais leur coût unitaire (0,6 million d'euros) demeure un frein
à leur diffusion.
Le marché mondial de la pile à combustible est estimé
à 120 milliards d'euros dont 46 pour l'automobile, 43 pour
l'électronique portable et 30 milliards pour les bâtiments
industriels et individuels.
Votre Commission des Affaires économiques partage les
préoccupations des membres de l'Office parlementaire d'évaluation
des choix scientifiques et technologiques qui, dans un récent rapport
considéraient comme nécessaire de «
combler de toute
urgence le retard pris par nos équipes scientifiques et nos industriels
sur les Etats-Unis, le Canada et le Japon
»
15(
*
)
.
B. LES CONDITIONS DE RACHAT DE L'ÉNERGIE PRODUITE PAR LES ENR
Il
existe, en France, une
obligation d'achat de l'électricité
produite par les filières fonctionnant grâce à des
énergies renouvelables ou à la cogénération
.
Elle permet de soutenir l'activité d'unités de production qui ne
seraient pas rentables tout au long de l'année, mais sont cependant
susceptibles d'apporter une contribution positive à l'allègement
de la facture énergétique française. Un décret du
6 décembre 2000 a fixé à 12 MW le seuil de
l'obligation d'achat.
La CRE a émis, conformément à la loi, deux avis portant
respectivement sur les arrêtés fixant les conditions de rachat de
l'électricité produite par :
- les éoliennes, les centrales hydrauliques et les usines
d'incinération d'ordures ménagères (le
5 juin 2001) ;
- les installations de cogénération
d'électricité et de chaleur valorisée
(12 juillet 2001).
La CRE rappelle qu'en vertu du décret du
6 décembre 2000 précité, le tarif d'achat est la
somme des
coûts évités
de long terme et d'une
rémunération supplémentaire correspondant à la
contribution à «
l'indépendance et la
sécurité d'approvisionnement, la qualité de l'air et la
lutte contre l'effet de serre, la gestion optimale et le développement
des ressources nationales, la maîtrise des choix technologiques d'avenir,
et l'utilisation rationnelle de l'énergie
».
Tout en observant que la plupart de ces contributions ne peuvent pas
être établies de façon rationnelle et objective ,
la CRE souligne le risque d'un trop grand écart entre les tarifs
d'achat et le coût réel de chaque filière
. Elle
constate que «
si ces prix sont inférieurs aux coûts,
la filière ne se développera pas ; si ceux-ci sont
supérieurs, elle risque de se développer au-delà des
objectifs poursuivis, générant pour certains producteurs des
rentes anormalement élevées et un coût important pour la
collectivité. Ce coût se manifestera par l'augmentation des prix,
supportée par l'ensemble des consommateurs français et
pénalisera la compétitivité de
l'économie
»
16(
*
)
.
C'est pourquoi la commission estime qu'il serait préférable de
recourir soit à des
appels d'offres
, que prévoit la loi de
février 2000, soit à des mécanismes de
«
certificats verts
» qui permettent de soutenir
l'essor de filières qui ne sont pas économiquement
compétitives en fournissant la preuve qu'un producteur a injecté
dans le réseau de l'électricité qui provient
d'énergies renouvelables et en permettant l'achat de cette
électricité à un prix plus avantageux que le tarif annuel
(cf. l'encadré ci-dessous). Selon la CRE, ce système permettrait
de mieux maîtriser les volumes réalisés et de soutenir les
filières concernées au moindre coût pour la
collectivité.
Votre Commission des Affaires économiques souhaiterait savoir si le
Gouvernement envisage de recourir au système des appels d'offres ou des
« certificats verts » que recommande la CRE
.
Les marchés des certificats verts
Les
marchés de certificats verts sont de nouveaux mécanismes
permettant le soutien des filières d'énergies renouvelables qui
ne sont pas économiquement compétitives avec les filières
classiques.
Un certificat vert est la preuve attestant que l'électricité qui
a été injectée sur le réseau par un producteur est
bien d'origine renouvelable. Ce certificat prend la forme d'un document (papier
ou électronique) contenant des informations sur la nature et le contexte
de la production concernée. Il est émis sous le contrôle
d'une autorité compétente.
Du point de vue commercial, un producteur d'électricité
renouvelable vend séparément son électricité sur le
marché de l'électricité (au prix du marché, donc
généralement sans en retirer une rémunération
suffisante de ses investissements). Il peut ensuite vendre les certificats
verts correspondants sur un marché de certificats distinct et
spécifique.
La demande sur un tel marché peut reposer sur le volontariat des
consommateurs ou sur des dispositifs réglementaires ou fiscaux.
Ainsi, aux Pays-Bas, la demande d'électricité verte (et donc des
certificats associés) est très forte car son prix pour certains
consommateurs est inférieur à celui de
l'électricité d'origine fossile, du fait d'une taxe pesant sur
cette dernière.
Au Danemark, le système des certificats verts qui doit entrer
progressivement en vigueur à partir de 2003 pour remplacer le
mécanisme d'obligation d'achat aujourd'hui en vigueur,
prévoit :
- une obligation portant sur les consommateurs de justifier d'un certain
pourcentage C de leur consommation d'origine renouvelable ;
- une pénalité P en cas de non respect de cet objectif.
Un tel dispositif crée une demande de certificats pour une
quantité égale au pourcentage C de la consommation
intérieure totale sous réserve que leur prix soit
inférieur à P.
Source
: CRE
La CRE a émis un avis défavorable au projet
d'arrêté fixant les conditions d'achat de
l'électricité produite par des installations de
cogénération et de chaleur valorisée
,
considérant que le «
niveau du tarif proposé et ses
modalités techniques sont exagérément favorables aux
producteurs et entraînent une augmentation inutilement
élevée du prix de l'électricité pour les
consommateurs en France
».
La commission a fondé son avis sur le fait que :
- le niveau du tarif proposé est bien supérieur à la
somme des coûts et des externalités évités d'une
centrale à cycle combiné au gaz ;
- le tarif proposé est, par ailleurs, très supérieur
aux coûts et externalités évités d'une production
issue d'une centrale nucléaire, avec en plus dans ce cas un bilan
environnemental dégradé en termes de lutte contre l'effet de
serre et de pollution de l'air ;
- il est possible de conclure que le tarif proposé permet,
conformément à l'objectif poursuivi, de rémunérer
largement la plupart des projets de cogénération ;
- certaines modalités techniques du tarif proposé sont
très favorables aux producteurs et inutilement coûteuses pour la
collectivité.
La Commission des Affaires économiques s'interroge, quant à
elle, sur les surcoûts susceptibles de résulter, pour les
consommateurs, des tarifs choisis et souhaiterait connaître les
réponses que le Gouvernement peut apporter aux observations de la
CRE.