III. DES MOYENS FINANCIERS RENFORCÉS POUR LA POLITIQUE D'AIDE AU LOGEMENT
A. LES SPÉCIFICITÉS DU LOGEMENT OUTRE-MER ET LES RÉPONSES DES POUVOIRS PUBLICS
Comme votre rapporteur pour avis l'avait rappelé
l'an
dernier, la politique du logement s'inscrit dans un contexte de contraintes
spécifiques où dominent :
- des besoins très importants liés au nécessaire
rattrapage des retards actuels et à une croissance démographique
très forte (1,6 % par an), quatre fois supérieure en moyenne
à celle de la métropole ;
- un revenu moyen peu élevé reflétant une forte
proportion de bas salaires et un taux de chômage important de 30 %
en moyenne ;
- des disponibilités foncières limitées liées
à l'environnement naturel (risques, configuration des terrains...) et au
sous-équipement des villes et des quartiers ;
- des collectivités locales aux situations financières
difficiles ;
- un parc de logements insalubres ou sous-équipés qui, bien
qu'en diminution, reste très important.
ÉLÉMENTS STATISTIQUES D'APPRÉCIATION DE LA SITUATION DU LOGEMENT DANS LES DOM ET À MAYOTTE
|
Guadeloupe |
Martinique |
Guyane |
Réunion |
Mayotte |
Total |
Population 1999 |
421 632 |
381 467 |
157 274 |
705 072 |
131 320 |
1 796 765 |
Croissance 99/90 |
8,95% |
6,09% |
37,24% |
18,18% |
38,82% |
15,74% |
Nombre de résidences principales (99) |
144 818 |
130 844 |
46 173 |
215 044 |
28 388 |
565 267 |
Nombre de Rmistes(4) |
29 146 |
28 977 |
9 273 |
63 667 |
(2) |
131 063 |
Logements insalubres (1) |
14 000 |
9 000 |
10 000 |
21 000 |
(3)15 000 |
69 000 |
Besoin logements neufs sociaux/an |
3 000 |
2 930 |
1 800 |
5 000 |
1 800 |
14 530 |
(1)
estimations réalisées par les DDE en 1998 pour la Martinique, la
Guyane et Mayotte, en 2000 par la DDE de Guadeloupe et 2000 par l'agence de
l'urbanisme de la Réunion.
(2) pas de RMI à Mayotte
(3) la quasi totalité du parc traditionnel peut être
considérée comme insalubre, soit environ 15.000 logements.
(4) nombre de foyers en juin 2000
Source
: Secrétariat d'Etat à l'outre-mer
Pour répondre à l'ampleur et à la diversité
des besoins, l'Etat privilégie les aides à la pierre
regroupées au sein de la ligne budgétaire unique (LBU). Celle-ci,
totalement fongible et autorisant des adaptations locales, finance outre la
construction neuve de logements sociaux, l'amélioration
réhabilitation, l'accession à la propriété et
depuis le 1
er
janvier 1998, la résorption de
l'habitat insalubre.
Par ailleurs, le maintien en 2001, du taux réduit de TVA -2,1 % au
lieu de 9,5 %- pour les opérations de logements locatifs sociaux et
très sociaux correspond à une aide fiscale directe,
estimée à 22,9 millions d'euros (150 millions de
francs) par an.
A compter du 1
er
juillet 2001, et en application de la loi
d'orientation pour l'outre-mer, la réforme tendant à
l'unification des barèmes de l'allocation logement dans le secteur
locatif est achevée.
Commencée en 1999, elle avait pour objectif la suppression progressive
des quatre barèmes retenus pour le calcul des loyers-plafonds et
définis en fonction de la date de construction du logement.
Outre les inégalités en découlant, l'existence de ces
quatre barèmes freinaient la réhabilitation des logements sociaux
les plus anciens : le barème retenu pour le loyer-plafond de ces
logements ne permettait pas de prendre en compte les augmentations
consécutives à la réhabilitation, sauf à imposer un
taux d'effort trop important aux locataires.
La réforme aboutit donc à l'application d'un seul
barème, celui correspondant à la période de construction
la plus récente et qui est le plus favorable
. Le coût de cette
unification est estimé à 12,5 millions d'euros
(82 millions de francs), dont 3,35 millions d'euros (22 millions
de francs) en coût budgétaire. De plus, ce nouveau barème a
fait l'objet d'une revalorisation au 1
er
juillet 2001
identique à celle opérée en métropole.
B. LE RENFORCEMENT DES MOYENS BUDGÉTAIRES CONSACRÉS AU LOGEMENT EN 2002
1. Les crédits consacrés au logement social
EVOLUTION DU MONTANT DES CRÉDITS CONSACRÉS AU LOGEMENT SOCIAL DEPUIS 1997 (AUTORISATIONS DE PROGRAMME)
millions d'euros (millions de francs)
|
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
2001 (1) |
2002 (1) |
L.B.U.Budgétaire |
151,03
|
143,82
|
149,53
|
147,77
|
180,46
|
255,51
|
Créance
|
94,89
|
88,54
|
94,85
|
100,38
|
81,40
|
3,11
|
R.H.I.(2) budgétaire |
7,79
|
14,64
|
14,64
|
14,64
|
19,82
|
27,44
|
SPIOM (3) |
0,84
|
0,78
|
0,47
|
0,71
|
0,95
|
1,52
|
50 pas géométriques (4) |
|
|
|
4,57
|
4,57
|
4,57
|
Baisse T.V.A. |
22,87
|
22,87
|
22,87
|
22,87
|
22,87
|
22,87
|
A.N.A.H |
2,06
|
2,80
|
3,11
|
2,97
|
4,11
|
4,53
|
TOTAL |
279,48
|
273,45
|
285,47
|
293,91
|
314,18
|
319,54
|
(1)Prévisions
(2) Budgétaire (65-01 art.20) résorption de l'habitat insalubre
(3) 65-01 art.10
(4) 65-01 art.30
Source
: Secrétariat d'Etat à l'outre-mer
Pour 2002, les crédits affectés à l'aide au logement
inscrits au chapitre 65-01 s'élèvent à
287,52 millions d'euros (1.886 millions de francs) en autorisations
de programme, en hausse de 39,7 % et les crédits de paiement
à 161,039 millions d'euros (1.056,35 millions de francs), soit
une augmentation de 11,2 %.
Cette forte progression permet, comme l'an dernier, de compenser
intégralement la suppression de la créance de proratisation, dont
une partie venait abonder la LBU.
Cette suppression, prévue sur trois ans, résulte de la mesure,
inscrite dans la loi d'orientation pour l'outre-mer, portant alignement du
niveau du RMI servi outre-mer sur celui versé en métropole.
Ainsi, en 2001, la part logement de la créance de proratisation
s'établissait à 75,76 millions d'euros (496,95 millions
de francs) et la hausse des autorisations de programme en 2002 est de
81,87 millions d'euros (536 millions de francs). La compensation
n'est pas totale, s'agissant des crédits de paiement puisque ceux-ci
n'augmentent que de 16,21 millions d'euros (106,34 millions de
francs).
Mais comme l'an dernier, on peut considérer que l'importance des
crédits reportés -35,22 millions d'euros en 2000 et
57,95 millions d'euros (380,13 millions de francs) en 2001- justifie le
choix de ne pas effectuer la compensation intégrale de la suppression de
la créance de proratisation s'agissant des crédits de paiement.
Le programme physique pour 2002 a pour objectif le financement de
10.700 logements neufs, l'amélioration de 6.000 logements
locatifs sociaux et l'augmentation des opérations de résorption
de l'habitat insalubre, qui devraient bénéficier à
2.400 familles.
2. La mise en oeuvre progressive du règlement de la zone des cinquante pas géométriques
Les problèmes posés par l'occupation
illégale de la zone des cinquante pas géométriques
concernent essentiellement les deux départements de la Guadeloupe et de
la Martinique, justifiant l'adoption de la loi n° 96-1241 du
30 décembre 1996 relative à l'aménagement, la
protection et la mise en valeur de la zone dite des cinquante pas
géométriques dans les départements d'outre-mer.
Celle-ci instaure dans chacun des trois départements de la Guadeloupe,
de la Martinique et de la Guyane une juridiction appelée
« commission départementale de vérification des
titres » chargée d'apprécier la validité des
titres de propriété sur des terrains de la zone des cinquante pas
géométriques.
Sous peine de forclusion, ces titres devaient être remis à la
commission départementale précitée avant le
13 janvier 2001.
A cette date, le secrétariat de la commission de la Guadeloupe avait
reçu 618 demandes de vérification de titres et celui de la
Martinique 461 demandes, tandis qu'en Guyane 4 demandes ont
été déposées.
En Martinique, 272 décisions ont déjà
été prises par la commission, concernant 230 validations de
titres (avec 8 appels de la décision intervenue, dont 7 de la part du
préfet) et 42 refus de validation de titres (avec 2 appels).
Par ailleurs, la loi du 30 décembre 1996 a prévu la
possibilité de cessions à titre onéreux de terrains
situés dans les espaces urbains ou les secteurs occupés par une
urbanisation diffuse de la zone des cinquante pas géométriques
aux Antilles au profit :
- de personnes qui ont édifié ou fait édifier, avant
le 1er janvier 1995, des constructions affectées à l'exploitation
d'établissements à usage professionnel (article L 89-4 du code du
domaine de l'Etat) ;
- de personnes qui ont édifié ou fait édifier, avant
le 1er janvier 1995, des constructions à usage d'habitation qu'elles
occupent à titre principal ou qu'elles donnent à bail en vue
d'une occupation principale (article L. 89-5 du code du domaine de
l'Etat).
Le décret n° 2000-345 du 18 avril 2000 relatif aux modalités
de ces cessions fixe notamment les modalités des cessions
accordées à titre gratuit aux communes et aux organismes ayant
pour objet social la réalisation d'opérations d'habitat social.
Selon les préfectures et les directions des services fiscaux de
Guadeloupe et de Martinique, le nombre des occupations illégales serait
de l'ordre de 9.000 à 10.000 pour les deux départements
antillais.
De plus, l'article 3 de la loi du 30 décembre 1996 a
prévu l'octroi d'une aide exceptionnelle de l'Etat au profit de
personnes à revenus modestes qui souhaiteraient acquérir le
terrain qu'elles occupent à titre d'habitation principale. Le dispositif
législatif relatif à l'octroi de cette aide a fait l'objet de
l'article 79 de la loi de finances pour 2000.
On estime à environ 7.500 le nombre des parcelles susceptibles
d'être cédées au titre de l'article L. 89-5 avec
le bénéfice de l'aide exceptionnelle de l'Etat. Le projet de loi
de finances pour 2002 prévoit d'allouer au titre de cette aide
exceptionnelle : 4,573 millions d'euros (29,997 millions de
francs) en AP et 1,524 million d'euros (9,997 millions de francs) en
CP, à répartir entre les deux départements antillais.
Enfin, le décret n° 98-1081 du 30 novembre 1998 a
fixé les règles relatives au fonctionnement des agences pour la
mise en valeur des espaces urbains de la zone dite des cinquante pas
géométriques. Les présidents des conseils d'administration
de chacune de ces deux agences ont été nommés par
décrets du 4 mai 2000 et les directeurs par décrets du
16 février 2001.
Chaque agence sera consultée sur toute demande de cession de terrains
qui sera présentée au préfet du département
concerné en application de la loi du 30 décembre 1996.
Les cessions de terrains seront faites par le préfet du
département concerné et devront tenir compte des zones à
risques affectant notamment le littoral des départements antillais.
Le fonctionnement de chacune des agences est assuré par le produit de la
taxe spéciale d'équipement prévue en leur faveur, par le
produit des cessions minoré du montant de l'aide exceptionnelle de
l'Etat, et par les redevances d'occupation temporaire du domaine maritime
concernant les terrains de la zone des cinquante pas géométriques
situés en zone urbaine ou en secteurs occupés par une
urbanisation diffuse.
Le produit de cette taxe au titre de 2001 sera de
0,594 millions d'euros en Guadeloupe et de 0,533 millions d'euros en
Martinique, le plafond de cette taxe ayant été fixé par le
Parlement à 1,524 million d'euros (9,997 millions de
francs).
Les agences sont en cours d'installation à Basse-Terre (Guadeloupe) et
Fort-de-France (Martinique) et la délimitation de leur zone
d'intervention est achevée en Martinique.
Dans ce département, l'agence a déjà commencé des
études pré-opérationnelles et des travaux de
relevés topographiques dans 8 secteurs situés sur 5 des
27 communes de la Martinique concernées par la zone des cinquante
pas géométriques.