III. LA POLITIQUE CULTURELLE DYNAMIQUE DANS UN CONTEXTE DE CULTURE SOUS EMBARGO
A. LE SCANDALE D'UNE CULTURE SOUS EMBARGO
M. Human
Abdul-khalid Abdul Ghafour, ministre irakien de la culture et de l'information
a dénoncé à maintes reprises ce qu'il appelle une
« culture sous embargo » lors des conférences des
ministres de la culture organisées par l'UNESCO .
Sans reprendre les données comparatives chiffrées que produit le
gouvernement irakien, il est évident que les effets de la guerre du
golfe ont été particulièrement destructeurs en
matière de culture et d'éducation. Avant 1990 l'Irak était
un pays dont l'ensemble du monde saluait les performances en matière
d'éducation, de lutte contre l'analphabétisme et l'illettrisme.
Cette action avait du reste été récompensée, en
1985, par le prix de l'Unesco contre l'illettrisme. L'enseignement
supérieur avait été considérablement
développé et de nouvelles générations de
diplômés mettaient leur compétence au service de leur pays.
La presse, l'édition se développaient également. Une vie
culturelle importante fleurissait dans un pays à l'histoire plusieurs
fois millénaire.
Votre groupe d'amitié ne peut que condamner une politique qui aboutit
de facto à un embargo culturel que rien ne justifie juridiquement.
A cet égard l'épisode récent de la menace de destruction
de livres irakiens temporairement importés en France à l'occasion
des journées du livre irakien organisées les 12 et 13 octobre
2001 à Paris par l'Académie diplomatique, est
particulièrement révélateur d'une application rigide des
résolutions de l'ONU.
Cette menace de détruire un millier de livres venait après le
blocage par les autorités douanières françaises des livres
destinés au Salon du livre euro-arabe organisé par l'Institut du
monde arabe en juin 2001. Des difficultés de même type
interviennent chaque année par exemple pour la Foire de Paris.
Il convient de rappeler que les résolutions de l'ONU, les dispositions
européennes et en conséquences la législation
douanière française, interdisent l'importation de biens irakiens,
hors pétrole et produits pétroliers. La vente ou même le
don de tout autre bien étant prohibé strictement. En
l'espèce, un conflit avec le transitaire et le fait que les
autorités irakiennes ne souhaitaient pas prendre en charge
financièrement le rapatriement de ces livres, risquaient de conduire
à leur mise au pilon.
Outre le symbole particulièrement fort que constitue la destruction de
livres il est difficile d'expliquer que la France a pu organiser librement un
salon du livre français à Bagdad en décembre 2000, et
instituer un ostracisme vis-à-vis de la culture irakienne.
Heureusement, les autorités françaises ont trouvé une
solution permettant la tenue de ces journées à Paris. Il est
toutefois révélateur que l'on doive arriver à une
situation de crise dont les conséquences sur l'image de notre pays et
sur les efforts que déploie notre coopération sont
évidemment négatives.
Afin que des situations de même type ne se reproduisent pas il semble
à votre groupe d'amitié qu'une interprétation souple des
résolutions devrait être adoptée en matière
culturelle.
Nous avons déjà accepté l'importation temporaire de biens
culturels mais aussi commerciaux. S'agissant des biens culturels il serait
nécessaire de permettre la diffusion des ouvrages d'auteurs irakiens en
France. Les ouvrages importés pourraient, s'ils demeuraient sur le
territoire français être considérés comme un don.
Outre cette mesure d'assouplissement, qui nous paraît parfaitement
respecter l'esprit de la résolution 661, votre groupe d'amitié
souhaite vivement que la France oeuvre pour que les domaines culturel,
artistique, universitaire, éducatif ou pédagogique, ne soient pas
inclus dans le régime des sanctions. Votre groupe rappelle
néanmoins avec vigueur qu'il ne s'agit que d'une mesure partielle avant
une levée totale de l'embargo.