M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jérôme Durain, rapporteur. Malgré leur pertinence, les réflexions et propositions de Guy Benarroche viennent se fracasser contre la jurisprudence constante de la commission au sujet des demandes de rapport.

Pour autant, ce sujet est central. C’est en réalité le problème des têtes de réseau. En effet, comme la commission d’enquête l’a utilement démontré, la criminalité organisée, ce sont quelques criminels du haut du spectre qui déploient des moyens de corruption, pratiquent la violence, la menace, et utilisent l’appât du gain pour influencer des publics fragiles. Finalement, ils attirent dans leurs filets toute une population qui ne demande qu’à rester dans le droit chemin.

Avec les mesures que nous avons adoptées et que nous allons encore adopter, nous apporterons des solutions en allant chercher le haut du spectre et en évitant à beaucoup de nos jeunes concitoyens de tomber dans le piège du narcotrafic.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérald Darmanin, garde des sceaux. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote.

M. Guy Benarroche. Je remercie M. le rapporteur pour sa réponse.

Nous avions pointé dès le départ de nos discussions les manques de cette proposition de loi. L’absence de volet social n’est pas le seul, mais il est important. Je ne vois pas de mesures en ce sens dans ce texte. Ce n’était sans doute pas l’objet envisagé par ses auteurs, mais si aucune politique publique n’est menée en matière de prévention, d’information et d’accompagnement des victimes du narcotrafic, cela revient à n’avancer que sur une jambe.

Nous demandons un rapport, parce que nous ne pouvons pas demander grand-chose de plus dans le périmètre de cette proposition de loi. Il arrive parfois que des demandes de rapport soient votées par cette assemblée…

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 88.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. le vice-président de la commission.

M. Christophe-André Frassa, vice-président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et dadministration générale. Monsieur le président, je demande une courte suspension de séance pour que la commission puisse se réunir.

M. le président. Je vous accorde une suspension de séance de dix minutes.

Par ailleurs, je vous propose, mes chers collègues, de prolonger nos travaux au-delà de vingt heures sans les interrompre pour le dîner. Comme il nous reste vingt-trois amendements à examiner sur ces deux textes, nous pourrions terminer ce soir la discussion des articles, à vingt et une heures au plus tard.

Y a-t-il des oppositions ?…

Il en est ainsi décidé.

Nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures vingt-cinq, est reprise à dix-neuf heures cinquante-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

Après l’article 23
Dossier législatif : proposition de loi visant à sortir la France du piège du narcotrafic
Après l’article 24

Article 24

I. – (Supprimé)

II (nouveau). – Après le titre II du livre II du code de la sécurité intérieure, il est inséré un titre II bis ainsi rédigé :

« TITRE II BIS

« LUTTE CONTRE LES TROUBLES GÉNÉRÉS PAR LE TRAFIC DE STUPÉFIANTS

« Art. L. 22-11-1. – Afin de faire cesser les troubles à l’ordre public résultant de l’occupation liée à des activités de trafics de stupéfiants, en réunion et de manière récurrente, d’une portion de la voie publique, d’un équipement collectif ou des parties communes d’un immeuble à usage d’habitation, le représentant de l’État dans le département et, à Paris, le préfet de police peut prononcer une interdiction de paraître dans les lieux concernés à l’encontre de toute personne à l’égard de laquelle il existe des raisons sérieuses de penser qu’elle participe à cette occupation ou à ces activités.

« L’interdiction, qui ne peut être prononcée que pour une durée maximale d’un mois, tient compte de la vie familiale et professionnelle de la personne concernée. En particulier, le périmètre géographique de la mesure ne peut comprendre son domicile principal.

« Art. L. 22-11-2. – Le non-respect d’un arrêté pris sur le fondement de l’article L. 22-11-1 du présent code est puni d’une peine de deux mois d’emprisonnement et 3 750 euros d’amende ».

III (nouveau). – Le chapitre Ier du titre Ier de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 est ainsi modifié :

1° À la première phrase du g de de l’article 4, après le mot : « voisinage », sont insérés les mots : « ou aux abords du logement » ;

2° Après le b de l’article 7, il est inséré un b bis ainsi rédigé :

« b bis) De s’abstenir de tout comportement ou de toute activité, qui, aux abords du logement, aurait pour effet de porter atteinte aux droits et libertés des autres occupants de l’immeuble et des immeubles environnants, à la jouissance paisible de leur logement et de son environnement, ou aux intérêts du bailleur ; ».

IV (nouveau). – Le chapitre II du titre IV du livre IV du code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :

1° À l’article L. 442-4-1, les mots : « de l’obligation prévue au troisième alinéa (b) » sont remplacés par les mots : « des obligations prévues aux b et b bis » ;

2° Après l’article L. 442-4-2, il est inséré un article L. 442-4-3 ainsi rédigé :

« Art. L. 442-4-3. – Lorsqu’il constate que les agissements ou les activités de l’occupant habituel d’un logement troublent l’ordre public de manière grave ou répétée, et que ces agissements ou ces activités méconnaissent les obligations définies aux b et b bis de l’article 7 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986, le préfet peut enjoindre au bailleur de mettre en œuvre la procédure définie aux articles L. 442-4-1 et L. 442-4-2 du présent code. L’injonction mentionne les éléments de fait qui justifient la mise en œuvre de la procédure susmentionnée.

« Le bailleur fait connaître au représentant de l’État la suite qu’il entend réserver à l’injonction dans un délai de quinze jours. En cas de refus du bailleur, d’absence de réponse dans un délai qui ne peut être inférieur à quinze jours ou lorsque, ayant accepté le principe de l’expulsion, le bailleur n’a pas saisi le juge à l’expiration d’un délai d’un mois à compter de sa réponse, le représentant de l’État peut se substituer à lui et saisir le juge dans les conditions mentionnées au même article L. 442-4-2. »

M. le président. L’amendement n° 130, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Guy Benarroche.

M. Guy Benarroche. Nous demandons la suppression de l’article 24 que j’appellerai, pour ma part, l’article « Bruno Retailleau ». Je l’ai déjà dit à plusieurs reprises, cet article pose un vrai problème à notre groupe, et ce pour plusieurs raisons.

D’abord, c’est le seul article de cette proposition de loi qui soit totalement étranger aux travaux de notre commission d’enquête transpartisane. Je récuse donc le qualificatif « transpartisan » pour cet article, puisqu’aucun membre de la commission d’enquête n’a jamais émis une telle préconisation.

Sachant que des pans entiers de recommandations, comme l’aspect prévention, le volet social, le traitement des familles des victimes, n’ont pas été intégrés dans le texte, ou n’ont pu l’être du fait de l’article 40, nous ne pouvons qu’être surpris par cette mesure administrative « de ne pas paraître ». C’est à la fois inefficace et inopérant, car impossible à mettre en place : cela revient donc à affaiblir l’autorité, dont beaucoup se réclament pourtant ici.

Pour les personnes que nous visons, ne pas paraître dans un lieu n’est pas un problème dès lors qu’elles peuvent communiquer très facilement grâce à leurs téléphones mobiles et imposer une forme de présence grâce à l’image. Bref, nous obtiendrons plutôt l’effet inverse de celui que nous recherchons.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jérôme Durain, rapporteur. Cet article 24 est important. Notre collègue Guy Benarroche précise qu’il n’est pas issu des travaux de la commission d’enquête. C’est vrai, mon cher collègue, mais je vous rappelle que la proposition de loi n’a pas été cosignée par l’ensemble des membres de cette commission. Seuls Étienne Blanc et moi-même l’avons déposée.

Nous sommes dans un travail itératif, progressif. La commission d’enquête a fait une série de recommandations, que nous avons complétées d’un travail autour de la proposition de loi avec des auditions complémentaires, puis d’un travail avec le Gouvernement, puisqu’il s’agit d’un domaine où l’initiative parlementaire vient rencontrer le cœur des pouvoirs régaliens de l’État.

Je disais hier que j’avais la chance d’être invité partout dans le pays pour parler de ce sujet, comme Étienne Blanc, parce que beaucoup de maires sont très inquiets de ce qui se passe sur leur territoire. Et je suis surpris de voir que cette mesure est souvent plébiscitée par des élus, quelle que soit leur opinion politique. Leur argument est assez simple : peut-on accepter collectivement que 2 % ou 3 % des habitants d’un quartier terrorisent les autres ?

Le législateur, quant à lui, doit se poser la question suivante : la mesure est-elle nécessaire et proportionnée pour permettre de « désenkyster » un certain nombre de territoires de la République en les libérant des trafics qui s’y déroulent ?

C’est un sujet qui est effectivement lourd. Je me suis moi-même posé la question. Les préconisations de la commission d’enquête et ce type de mesures me semblent d’ailleurs converger. En outre, la majorité des membres de la commission des lois ont exprimé le souhait d’apporter une réponse très concrète à ce problème, notamment au travers de cette expulsion locative et de cette interdiction de paraître. Je suis donc défavorable à la suppression de l’article.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bruno Retailleau, ministre dÉtat. Le Gouvernement est évidemment défavorable à la suppression de cet article !

De quoi parle-t-on ? De trafiquants qui pourrissent la vie d’un quartier ! Faut-il les laisser sur place continuer à gâcher la vie de ses habitants, qui, eux, aspirent à vivre en toute tranquillité ? L’expulsion vise à empêcher les trafiquants de paraître autour de leur point de deal. C’est d’une telle évidence que je ne comprends même pas qu’on puisse être opposé à cet article !

Alors que les trafiquants pourrissent la vie de la barre d’immeuble où ils habitent – il s’agit souvent d’un logement social –, on ne pourrait pas les expulser ?

Chaque fois que je me suis rendu sur le terrain, à Rennes et ailleurs, et que j’y ai rencontré des habitants, ils m’ont dit : « Écoutez, trouvez-nous des logements, sortez-nous d’ici ou alors sortez-les. » Vous connaissez très bien la situation, monsieur Benarroche.

Telle est la réalité très concrète à laquelle nous voulons nous confronter, en mettant en œuvre deux mesures. Nous proposons tout d’abord d’interdire à des trafiquants de paraître, après qu’ils ont été reconnus coupables et condamnés. Ce n’est pas la police qui décrétera leur expulsion. Nous proposons ensuite de pouvoir les expulser de leur logement social.

M. le président. La parole est à Mme Audrey Linkenheld, pour explication de vote.

Mme Audrey Linkenheld. Je souhaite nuancer à la fois les propos de ceux qui veulent la suppression de cet article et les arguments qui viennent d’être développés par ceux qui le défendent.

L’article 24 prévoit, d’une part, l’interdiction de paraître des trafiquants, condamnés ou présumés, pendant un mois. On peut parfaitement comprendre les raisons pour lesquelles on souhaite qu’une telle interdiction puisse être prononcée. J’attire toutefois l’attention de l’ensemble du Sénat sur le fait que si nous votons cette disposition, alors il faut que nous soyons certains d’être capables de la faire respecter.

Prononcer une interdiction de paraître pendant un mois qui ne sera ensuite jamais respectée dans les faits, c’est prendre le risque d’accroître le sentiment que peuvent ressentir un certain nombre d’habitants dans nos quartiers quant à l’impunité de ces individus.

Comme nous le disons depuis le début de l’examen de cette proposition de loi, les mesures qu’elle prévoit resteront vaines sans moyens supplémentaires pour la police, pour la gendarmerie, pour la justice.

L’article 24 prévoit, d’autre part, la possibilité d’expulser de leur logement, non pas, si j’ai bien lu le texte, des trafiquants condamnés, mais des trafiquants suspectés.

Il est déjà possible d’expulser de son logement social quelqu’un qui a été condamné pour trafic de stupéfiants en lien avec l’usage, paisible ou non, de son logement. Les textes le prévoient déjà. Je pense d’ailleurs que le ministre Darmanin pourrait témoigner qu’un certain nombre d’expulsions ont déjà eu lieu chez les bailleurs sociaux pour ces raisons.

Nous ne sommes pas en train de prévoir la possibilité d’expulser,…

M. le président. Veuillez conclure.

Mme Audrey Linkenheld. … nous sommes en train de la faire évoluer. Il faut être très clair sur cette question.

M. le président. Merci de respecter votre temps de parole !

Mme Audrey Linkenheld. S’il n’y avait pas eu toutes ces suspensions de séance !

M. le président. Ce n’est pas de mon fait.

La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote.

M. Guy Benarroche. Je partage tout à fait ce qui a été dit, et je le répète : le dispositif est totalement inopérant. Il est impossible d’appliquer une interdiction de paraître, nous en avons de nombreux exemples.

Nous n’avons même pas les moyens de supprimer définitivement les points de deal. Chacun sait ici que lorsqu’un point de deal est démantelé dans la cité, il est recréé le lendemain. Et on va demander à la police de se rendre dans ces mêmes endroits, non plus pour démanteler des points de deal – ils seront toujours là –, mais pour constater que des gens y paraissent alors que cela leur est interdit ? On ne pourra jamais appliquer cette mesure, jamais ! Elle sera donc contre-productive.

Par ailleurs, ce sont non pas les gens condamnés qui seront expulsés de leur logement, mais ceux qui sont susceptibles de troubler l’ordre public. Encore faut-il que ces personnes soient les signataires du bail ; or c’est plus souvent leur père ou leur mère.

Expulser un locataire, qui est un trafiquant ou que l’on suspecte de se livrer à du trafic, un jeune de 24 ou 25 ans, qui a une famille, deux gosses, c’est s’en prendre au bas du spectre. Il sera remplacé dès le lendemain par quelqu’un d’autre. Le problème sera le même, comme pour les points de deal.

En outre, la personne expulsée va se retrouver sans logement, à la rue, avec un ou deux gosses peut-être, dans une situation encore plus précaire. Est-ce la solution pour régler le problème du haut du spectre et du narcotrafic ?

Qu’est-ce que cet article vient faire dans ce texte ? Est-ce autre chose que de l’affichage ? La commission l’a dit, les opérations « places nettes XXL » ne marchent pas. Malgré cela, on prévoit deux mesures qui ont encore moins de chances de fonctionner ! Et on veut nous faire croire qu’elles vont permettre de lutter contre le narcotrafic et le haut du spectre. Or il s’agit juste de mesures qui ne sont pas autre chose que de l’esbroufe et de la communication.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jérôme Durain, rapporteur. En réponse à Audrey Linkenheld, je précise qu’on ne crée pas un nouveau motif d’expulsion. Il existe d’ores et déjà bien des cas permettant d’expulser quelqu’un de son logement.

Par ailleurs, je ne souscris à cette mesure que parce que l’on s’intéresse à des individus qui font partie d’organisations criminelles et dans le périmètre du texte. Nous ne jetons pas un filet à maille étroite destiné à attraper n’importe quel gamin ayant fait une bêtise. Nous visons, je le répète, des criminels qui font partie d’organisations criminelles et qui nuisent à l’équilibre des quartiers. (M. Guy Benarroche sexclame.) Il faut rappeler le contexte dans lequel s’inscrit cet article.

Pour ces raisons, nous soutenons cet article.

M. le président. La parole est à M. le ministre d’État.

M. Bruno Retailleau, ministre dÉtat. Je redis, pour ce qui concerne l’expulsion du logement, qu’il s’agit de substituer le préfet au bailleur social, ce dernier pouvant encourir des menaces. C’est l’État qui reprend la main lorsqu’il s’agit de prendre ce type de décision.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 130.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 29 n’est pas soutenu.

L’amendement n° 82 rectifié, présenté par Mme Eustache-Brinio, MM. Bazin et de Legge, Mme Belrhiti, MM. Perrin, Rietmann, Khalifé, Frassa, Karoutchi, Bouchet, Panunzi et J.P. Vogel, Mme V. Boyer, M. Cambon, Mmes Dumont et Di Folco, M. Chaize, Mme Borchio Fontimp, MM. P. Vidal et Sol, Mmes Micouleau et Dumas, MM. Naturel et Reynaud, Mmes Demas, Aeschlimann, Estrosi Sassone et Malet, MM. Daubresse, Brisson et Piednoir, Mme Drexler, M. C. Vial, Mme Garnier, M. Reichardt, Mmes Bellurot et Gruny, MM. Bruyen et Rapin, Mme Josende, M. Sido, Mme Imbert, MM. Michallet, Genet, Cadec et Allizard, Mme Pluchet et M. Meignen, est ainsi libellé :

Alinéa 7

Remplacer le chiffre :

deux

par le chiffre :

six

La parole est à Mme Jacqueline Eustache-Brinio.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio. Cet amendement vise à modifier la durée de la peine d’emprisonnement encourue en cas de délit de non-respect de l’arrêté préfectoral d’interdiction de paraître prévu par le premier alinéa de l’article 22-11-2 du code de la sécurité intérieure créé par l’article 24 de la proposition de loi.

En effet, la peine d’emprisonnement de deux mois est insuffisante pour permettre au procureur de la République de traduire un contrevenant à une interdiction administrative de paraître en comparution immédiate devant le tribunal en cas de flagrant délit.

C’est pourquoi le présent amendement tend à porter de deux à six mois la peine d’emprisonnement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Cet amendement paraît parfaitement compatible avec le dispositif qui est mis en œuvre, qu’il améliore même. La commission y est donc favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bruno Retailleau, ministre dÉtat. Le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement, bien sûr. Six mois, c’est le quantum de peine qui permettra la comparution immédiate en cas de flagrance.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 82 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 108 rectifié, présenté par M. Bacchi, Mme Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Alinéa 15

Après la deuxième occurrence du mot :

activités

insérer les mots :

, en lien avec des activités de trafics de stupéfiants,

La parole est à M. Jérémy Bacchi.

M. Jérémy Bacchi. Cet amendement vise à préciser les dispositions de la nouvelle rédaction de l’article 24 relatives au logement.

L’article 24 permet à un bailleur de résilier le bail d’un locataire si ses activités troublent l’ordre public de manière grave ou répétée. Au regard de l’objet de la présente proposition de loi, et par souci de protection des locataires des HLM, il nous paraît indispensable de proportionner cette mesure.

Ainsi, il est primordial qu’il soit explicitement précisé que les activités troublant l’ordre public de manière grave et répétée et qui justifient la résiliation du bail doivent être en lien avec des activités de trafic de stupéfiants. Ainsi, ce nouvel article ne pourrait pas être utilisé à d’autres fins.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jérôme Durain, rapporteur. Cet amendement conforte la réponse que j’ai faite précédemment. Le groupe communiste propose de limiter le dispositif d’injonction au bailleur aux cas où le trouble à l’ordre public est réellement en lien avec un trafic de stupéfiants. Cela me semble de bon aloi s’agissant d’un dispositif aussi innovant.

L’objectif est bien de gérer localement les nuisances que subissent les habitants en raison de la présence de points de deal. Graver cette précision dans le marbre de la loi me paraît donc tout à fait utile.

La commission émet un avis favorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bruno Retailleau, ministre dÉtat. Le Gouvernement s’en remettra à la sagesse du Sénat.

Depuis le début, nous disons que nous envisageons un périmètre plus large que le seul trafic de stupéfiants. Nous voulons frapper la criminalité organisée. J’aurais donc préféré que cet amendement vise à étendre ce périmètre et qu’il tienne compte de la logique qui préside depuis le début à l’examen de ce texte.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 108 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 24, modifié.

(Larticle 24 est adopté.)

Article 24
Dossier législatif : proposition de loi visant à sortir la France du piège du narcotrafic
Article 16 (précédemment réservé)

Après l’article 24

M. le président. L’amendement n° 152 rectifié quinquies, présenté par Mmes Josende, Aeschlimann et Belrhiti, MM. Naturel, Frassa, Bouchet, Genet, Panunzi et Allizard, Mme Schalck, MM. Meignen, C. Vial et Belin, Mme Borchio Fontimp, MM. Brisson et Bruyen, Mmes M. Mercier et P. Martin, M. J.B. Blanc et Mme Canayer, est ainsi libellé :

Après l’article 24

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement s’engage à délivrer un rapport sur la gestion du parc locatif public par le bailleur social qui doit faire face à des troubles de jouissance portant une atteinte à l’ordre public.

La parole est à Mme Lauriane Josende.

Mme Lauriane Josende. Le présent amendement, je le sais, est incompatible avec la jurisprudence du Sénat. Je le soutiendrai néanmoins et je vous demanderai de le voter.

Le parc locatif public est devenu une cible privilégiée pour les narcotrafiquants. En effet, les habitations à loyer modéré peuvent servir de lieu de fabrication, de stockage et de vente de stupéfiants. L’illustration en a été faite dans ce débat.

Bien qu’il existe des dispositifs légaux permettant aux bailleurs sociaux de lutter contre les effets de la délinquance dans les HLM, ils sont inopérants puisque les bailleurs font désormais l’objet de menaces et d’agressions.

J’avais initialement déposé un amendement visant à permettre aux bailleurs sociaux de résilier de plein droit un bail après la condamnation définitive du locataire pour une infraction assimilée à un trouble de la jouissance, trouble que la jurisprudence consacre, portant atteinte à l’ordre public et ayant été commise postérieurement à la conclusion du contrat de bail.

Après échange avec le ministère, je vous présente aujourd’hui un nouvel amendement, qui vise à prévoir la remise par le Gouvernement au Parlement d’un rapport sur la situation du parc locatif public face à la dérive du narcotrafic. Il devra porter un regard juste et critique sur la situation des HLM et ouvrir de véritables pistes de réflexion pour endiguer un phénomène majeur.

Mes chers collègues, en votant cet amendement, vous offrirez aux bailleurs sociaux et aux élus locaux de nos territoires un début de réponse salutaire. Ces dérives inacceptables ne peuvent demeurer longtemps sans réponse.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jérôme Durain, rapporteur. Notre collègue Josende a anticipé l’avis de la commission. Le rapport qu’elle propose n’est pas inintéressant évidemment, mais la jurisprudence du Sénat est constante sur les demandes de rapport. Désolé, mais c’est non ! Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bruno Retailleau, ministre dÉtat. Favorable ! (Exclamations amusées.)

Cet avis est l’exception qui confirme la règle. Nous considérons que les bailleurs sociaux et le parc social locatif font face à de tels problèmes que cela mérite une réflexion et un rapport, qui nous permettra ensuite de prendre des décisions. (Exclamations ironiques sur les travées des groupes SER et GEST.)

M. le président. La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote.

M. Guy Benarroche. Je ne vais pas m’opposer à la demande de rapport !

On prévoit un rapport sur les parcs de logements sociaux face à la dérive du narcotrafic, mais on ne fait pas le lien entre cette dérive et la précarité des gens qui y habitent, l’absence de services publics dans ces quartiers, l’impossibilité pour les associations qui accompagnent les familles de les aider à se désenclaver pour fuir le narcotrafic. On n’en parle pas ! On dit juste qu’il ne faut pas loger des gens qui font du trafic parce que cela trouble la vie de tous les autres.

Or ce que demandent les familles de victimes, ce n’est pas que l’on expulse des gens – elles savent très bien qu’ils seront remplacés par d’autres petites mains du narcotrafic – ; ce qu’elles veulent, c’est que des mesures d’accompagnement, des mesures administratives, scolaires, sociales soient prises afin de pouvoir mettre fin à l’emprise du narcotrafic.

Ce n’est absolument pas ce que vous nous proposez. Le dispositif envisagé, je le répète encore une fois, je suis désolé, sera totalement inopérant. Au contraire, il renforcera le sentiment d’immunité, dont nous avons parlé lorsque nous avons évoqué les brouilleurs, de gens qui continuent à organiser des trafics et à commettre des « narchomicides » à partir d’un certain nombre de lieux. Dans la mesure où ces gens continueront de paraître, où ils auront toujours des relais dans les cités, parce qu’on n’aura pas résolu tous les problèmes en amont, leur sentiment d’impunité n’en sera que plus fort.

Nous allons à l’encontre des conclusions de la commission d’enquête. C’est d’ailleurs le seul élément qui pourrait conduire le groupe écologiste à ne pas voter ce texte.

Je ne vois pas comment on pourra annoncer ce dispositif à tous les acteurs marseillais, en particulier aux acteurs sociaux. C’est impossible. C’est un déni de réalité !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 152 rectifié quinquies, modifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 180, présenté par M. Montaugé, Mmes Narassiguin, de La Gontrie et Linkenheld, M. Bourgi, Mme Harribey, MM. Roiron, Chaillou et Kerrouche, Mmes Conconne et Carlotti, M. Kanner, Mme Monier, MM. Ros et M. Weber, Mme S. Robert, M. Mérillou, Mme Daniel et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 24

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport analysant les dynamiques structurelles, d’ordre social, économique et territorial, contribuant à la progression des trafics de stupéfiants en zone rurale. Ce rapport examine notamment l’impact du taux d’activité des populations résidant dans ces territoires et les déséquilibres en matière d’accès à l’emploi ou aux services publics. Il propose également des mesures concrètes et coordonnées visant à renforcer la lutte contre ces trafics par la mobilisation de dispositifs de prévention et de réinsertion socioprofessionnelle.

La parole est à Mme Audrey Linkenheld.