M. Frédéric Buval. Par cet amendement, nous proposons de créer un fonds de compensation au profit de la continuité territoriale, dont le principe a été acté par le protocole d’objectifs et de moyens de lutte contre la vie chère signé le 16 octobre entre l’État, la CTM, les élus locaux, les distributeurs présents sur l’île, les grossistes, les représentants des structures socioprofessionnelles, le Grand Port maritime et le principal transporteur de Martinique.
Ce fonds doit permettre de compenser les frais d’approche, sur une liste de produits de première nécessité, en concertation avec l’ensemble des acteurs intégrés dans la chaîne logistique et d’approvisionnement des biens de consommation.
Cela assurera la baisse effective du prix de plus de 6 000 produits alimentaires et non alimentaires, à compter du 1er janvier 2025.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Demande de retrait.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Frédéric Buval. Je le retire, monsieur le président !
M. le président. L’amendement n° I-1428 rectifié est retiré.
Article 11
I. – Il est institué au titre des deux exercices consécutifs clos à compter du 31 décembre 2024 une contribution exceptionnelle sur les bénéfices des grandes entreprises.
II. – Sont redevables de la contribution exceptionnelle les redevables de l’impôt sur les sociétés prévu à l’article 205 du code général des impôts qui réalisent un chiffre d’affaires supérieur ou égal à 1 milliard d’euros.
Le chiffre d’affaires mentionné au premier alinéa du présent II s’entend du chiffre d’affaires réalisé en France par le redevable au cours de l’exercice ou de la période d’imposition ramené, le cas échéant, à douze mois et, pour la société mère d’un groupe mentionné à l’article 223 A ou à l’article 223 A bis du code général des impôts, de la somme des chiffres d’affaires de chacune des sociétés membres de ce groupe.
Pour les redevables qui sont placés sous le régime prévu à l’article 223 A ou à l’article 223 A bis du code général des impôts, la contribution exceptionnelle est due par la société mère.
III. – L’assiette de la contribution exceptionnelle est égale à l’impôt sur les sociétés calculé sur l’ensemble des résultats imposables aux taux prévus à l’article 219 du code général des impôts, déterminé avant imputation des réductions et crédits d’impôt et des créances fiscales de toute nature.
Pour les redevables placés sous le régime prévu à l’article 223 A ou à l’article 223 A bis du code général des impôts, la contribution exceptionnelle est assise sur l’impôt sur les sociétés afférent au résultat d’ensemble et à la plus-value nette d’ensemble du groupe définis aux articles 223 B, 223 B bis et 223 D du même code, déterminé avant imputation des réductions et crédits d’impôt et des créances fiscales de toute nature.
IV. – A. – Pour les redevables dont le chiffre d’affaires est supérieur ou égal à 1 milliard d’euros et inférieur à 3 milliards d’euros, le taux de la contribution exceptionnelle est fixé à 20,6 % pour le premier exercice clos à compter du 31 décembre 2024 et à 10,3 % pour le second exercice clos à compter de cette même date.
Pour les redevables dont le chiffre d’affaires est supérieur ou égal à 1 milliard d’euros et inférieur à 1,1 milliard d’euros, les taux mentionnés au premier alinéa du présent A sont multipliés par le rapport entre, au numérateur, la différence entre le chiffre d’affaires du redevable et 1 milliard d’euros et, au dénominateur, 100 millions d’euros. Ces taux sont exprimés avec deux décimales après la virgule. Le deuxième chiffre après la virgule est augmenté d’une unité si le chiffre suivant est supérieur ou égal à 5.
B. – Pour les redevables dont le chiffre d’affaires est supérieur ou égal à 3 milliards d’euros, le taux de la contribution exceptionnelle est fixé à 41,2 % pour le premier exercice clos à compter du 31 décembre 2024 et à 20,6 % pour le second exercice clos à compter de cette même date.
Pour les redevables dont le chiffre d’affaires est supérieur ou égal à 3 milliards d’euros et inférieur à 3,1 milliards d’euros, les taux applicables (T) sont déterminés à partir de leur chiffre d’affaires exprimé en milliards d’euros (CA) et des taux mentionnés au premier alinéa du A du présent IV (T1) et au premier alinéa du présent B (T2), au moyen de la formule suivante :
T = T1 + (T2 – T1) x (CA – 3 milliards d’euros) / 100 millions d’euros.
Les taux déterminés par application de la formule prévue au troisième alinéa du présent B sont exprimés avec deux décimales après la virgule. Le deuxième chiffre après la virgule est augmenté d’une unité si le chiffre suivant est supérieur ou égal à 5.
V. – Les réductions et crédits d’impôt et les créances fiscales de toute nature ne sont pas imputables sur la contribution exceptionnelle.
VI. – La contribution exceptionnelle n’est pas admise dans les charges déductibles pour la détermination du résultat imposable.
VII. – La contribution exceptionnelle est établie, contrôlée et recouvrée comme l’impôt sur les sociétés et sous les mêmes garanties et sanctions. Les réclamations sont présentées, instruites et jugées selon les règles applicables à ce même impôt.
VIII. – La contribution exceptionnelle est payée spontanément au comptable public compétent au plus tard à la date prévue au 2 de l’article 1668 du code général des impôts pour le versement du solde de liquidation de l’impôt sur les sociétés.
IX. – Après le 2° de l’article 7 de l’ordonnance n° 2013-837 du 19 septembre 2013 relative à l’adaptation du code des douanes, du code général des impôts, du livre des procédures fiscales et d’autres dispositions législatives fiscales et douanières applicables à Mayotte, il est inséré un 2° bis ainsi rédigé :
« 2° bis La contribution exceptionnelle sur les bénéfices des grandes entreprises prévue à l’article 11 de la loi n° 2024-XXX du [date] de finances pour 2025 ; ».
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Briquet, sur l’article.
Mme Isabelle Briquet. L’article 11 prévoit d’instaurer une taxe sur les profits des entreprises dont le chiffre d’affaires dépasse 1 milliard d’euros.
Depuis 2017, l’exécutif a vidé les caisses de l’État en multipliant les avantages fiscaux en faveur des grandes entreprises. Or, aujourd’hui, il semble enfin prêt à reconnaître la nécessité de les faire contribuer davantage.
Toutefois, cette mesure présente une limite majeure : elle ne s’applique que pendant deux ans, alors que les efforts demandés aux Français sont durables.
Cette temporalité risque d’avoir un effet pervers : certaines entreprises pourraient choisir de reporter des opérations ou de limiter artificiellement leurs profits sur la période concernée, afin d’échapper à la taxe.
En conséquence, les recettes attendues pourraient s’avérer inférieures à cette prévision de 8 milliards d’euros. Je vous demande, monsieur le ministre, de vous assurer, au moins, que ces sommes entrent effectivement dans les caisses de l’État.
Pour autant, il me semble nécessaire de réfléchir à pérenniser cette taxe sur les grandes entreprises, afin d’en faire un véritable instrument de justice fiscale et budgétaire.
M. le président. La parole est à M. Thierry Cozic, sur l’article.
M. Thierry Cozic. Monsieur le ministre, à la lumière du présent article, l’adage « mieux vaut tard que jamais » prend tout son sens.
En vous décidant enfin à instaurer une taxe sur les profits des entreprises dont le chiffre d’affaires dépasse 1 milliard d’euros, vous exécutez un très léger pas de côté par rapport à votre sponsoring fiscal des grandes entreprises de ce pays, lesquelles semblent plutôt bien se porter : elles ont redistribué 150 milliards d’euros de dividendes l’an passé, un record.
Il faut noter que cet article ressemble fortement, au moins dans l’idée, à la taxation des superprofits défendue par notre groupe depuis la crise sanitaire. Même si cette mesure arrive bien tard, pour une question d’assiette, relevons que, pour une fois, la victoire idéologique n’est pas du côté du Rassemblement national. Il y a de quoi la savourer, monsieur le ministre.
M. Laurent Saint-Martin, ministre. Oh ! Tout cela ne vous empêche pas de voter avec lui pour revenir sur la réforme des retraites !
M. Thierry Cozic. Une fois n’est pas coutume, vous partez dans la bonne direction. Malheureusement, vous vous arrêtez au milieu du gué. En effet, cette surtaxe, bien que bienvenue, pourrait s’avérer une fausse bonne idée, car elle souffre d’un défaut majeur : elle est temporaire.
Dès lors, on peut raisonnablement s’attendre à ce que les entreprises concernées, qui disposent de services comptables très compétents du fait de leur volume d’affaires, mettent en œuvre toutes les astuces possibles pour la contourner en décalant dans le temps leurs bénéfices dans l’attente de l’exercice 2026, pour lequel cette surtaxe ne sera plus due.
Ainsi, le rendement de cette taxe, attendu à 8 milliards d’euros puis à 4 milliards d’euros, pourrait être amoindri par un rendement décevant sur l’impôt sur les sociétés (IS), au détriment des finances publiques.
Monsieur le ministre, nous avons tous ici en tête la contribution sur la rente inframarginale de la production d’électricité (Crime) instaurée par le PLF pour 2024, qui devait rapporter initialement 13 milliards d’euros, mais qui n’a finalement donné que 330 millions d’euros.
Sur cet article, notre vigilance sera élevée, et nous serons force de proposition, afin de nous garder du fiasco de l’an passé, et surtout d’éviter que vous ne laissiez des trous dans la raquette par lesquels les grands groupes pourraient s’engouffrer et faire fondre le rendement de cette taxe comme neige au soleil.
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, sur l’article.
M. Marc Laménie. Cet article 11 est sensible, comme l’ont rappelé les orateurs précédents ; il instaure une contribution exceptionnelle temporaire sur les bénéfices des grandes entreprises.
L’impôt sur les sociétés fait partie des impôts principaux, que nous examinons avec les recettes dans cette première partie, c’est-à-dire la TVA, l’impôt sur le revenu, la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE), puis les autres recettes fiscales nettes.
L’impôt sur les sociétés est un prélèvement obligatoire qui affiche un rendement annuel estimé à hauteur de 56,2 milliards d’euros pour 2025.
Cette contribution exceptionnelle avait été mise en œuvre dans les années 1970, notamment en 1974 à la suite du premier choc pétrolier de 1973, et à plusieurs reprises, jusqu’en 2017, où elle avait généré un surcroît de recettes de 5 milliards d’euros.
Au titre des années 2024 et 2025, elle s’appliquerait aux redevables de l’impôt sur les sociétés dont le chiffre d’affaires dépasse 1 milliard d’euros, leur nombre étant estimé à 450. Elle rapporterait 8 milliards d’euros en 2025 et 4 milliards d’euros en 2026.
Certes, cette mesure participe au redressement des finances publiques, mais il faut émettre un bémol, car les entreprises, même les grandes, se heurtent à un problème de compétitivité.
De nombreux secteurs d’activité souffrent et sont en difficulté. Il s’agit aussi d’emploi : de grands groupes ferment des sites, malheureusement. Même si un dispositif anti-évitement est prévu, il convient de rester prudent.
Notre groupe se ralliera à la position de la commission des finances, mais en veillant à soutenir réellement le monde économique.
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, sur l’article.
M. Pascal Savoldelli. Vous proposez une surtaxe temporaire à l’impôt sur les bénéfices pour, si je ne me trompe pas, 450 entreprises. Vous en escomptez un rendement de 8 milliards d’euros en 2025, mais que nos concitoyens le sachent : ce rendement sera divisé par deux en 2026.
Or l’année dernière, en 2023, les bénéfices des seules entreprises du CAC 40 se sont élevés à 149 milliards d’euros, en hausse de 9 milliards d’euros par rapport au record de 2022. Vous avez bien entendu : une hausse de plus de 9 milliards d’euros porte les bénéfices à 149 milliards d’euros, mais on nous propose une taxe avec un rendement escompté de 8 milliards d’euros, qui passera à 4 milliards d’euros en 2026.
Vous me le confirmerez tout à l’heure, monsieur le ministre, mais j’ai vérifié : en vérité, vous allez récupérer l’excédent sur seulement quarante entreprises. En effet, en 2025 comme en 2026, les taux d’imposition sur les sociétés resteront inférieurs à ce qu’ils étaient durant le premier quinquennat d’Emmanuel Macron, sauf – écoutez-moi bien ! – pour les entreprises qui réalisent un chiffre d’affaires de plus de 3 milliards d’euros.
Cette mesure exceptionnelle ne ramène même pas le taux au niveau normal, celui qui précédait sa diminution non financée. Votre ambition est tout simplement fantomatique ! En gros, ceux qui profitent du travail des autres vont contribuer de façon exceptionnelle et temporaire, mais à un niveau moins élevé qu’avant la crise sanitaire.
Nous prônons, quant à nous, un retour à un taux pérenne de 33,3 % de l’imposition sur les bénéfices. C’est pourquoi nous avons décidé de ne déposer aucun amendement sur cet article, qui est notoirement insuffisant.
Pour autant, nous allons défendre des amendements visant à ajouter des articles additionnels après l’article 11, sur les superprofits, sur les superdividendes, sur l’impôt sur les sociétés et sur les Gafam – Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft.
M. le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures six, est reprise à douze heures sept.)
Mme Florence Blatrix Contat. Le fait que le Gouvernement se décide enfin à faire contribuer les grandes entreprises est bienvenu, n’ayons pas peur des mots.
Toutefois, je souhaite vous faire part de deux réserves.
Premièrement, il aura fallu attendre que le pays soit au bord du gouffre budgétaire, avec un déficit de 6,1 % du PIB, pour que vous preniez conscience qu’il fallait agir. Vous avez diminué le taux de l’impôt sur les sociétés de 33,33 % à 25 % et vous avez refusé, ces dernières années, toutes nos propositions à ce sujet ; vous avez creusé la dette par des cadeaux pour ces entreprises, sans aucune contrepartie financière. Aujourd’hui, vous admettez qu’il faut faire marche arrière, mais ce n’est que temporaire.
Deuxièmement, vous vous trompez, selon moi, sur les résultats de votre politique de l’offre et vous n’en tirez donc pas les bons enseignements. Cette politique, nous dites-vous, a créé deux millions d’emplois ; certes, mais de telles créations d’emplois se sont aussi produites chez beaucoup de nos voisins européens, en grande partie grâce à la politique de taux faibles et de quantitative easing de la Banque centrale européenne (BCE). Elles sont donc en grande partie liées aux taux d’intérêt.
Vous nous avez indiqué que la France était un pays attractif en termes d’investissements, c’est vrai en matière de projets, mais en termes de créations d’emplois, si l’on se rapporte à la taille du pays, nous ne sommes que huitièmes. Enfin, notre commerce extérieur est toujours extrêmement dégradé.
Votre politique de l’offre a donc échoué. Vous faites un premier pas, mais il faut, selon moi, aller plus loin pour trouver de nouvelles ressources et taxer les entreprises, sans grever leur compétitivité. Mes collègues vous ont déjà donné des pistes en ce sens.
M. le président. La parole est à M. Grégory Blanc, sur l’article.
M. Grégory Blanc. Mettre davantage à contribution les entreprises qui bénéficient de l’infrastructure et de la puissance de l’État après les chocs que nous avons connus avec le covid-19 et l’inflation, et davantage les grandes que les entreprises de taille intermédiaire, moyennes ou plus petites, tout cela paraît tout à fait légitime. Je voudrais toutefois avancer quelques remarques.
D’abord, sur la forme : avec la rédaction de cet article, on aboutit à pénaliser le made in France et à encourager les délocalisations ou le dépaysement d’un certain nombre de productions. Il faut donc que nous sécurisions cet aspect.
Ensuite, sur le fond, les taux lissés d’impôt sur les sociétés proposés ici sont de 30 % pour les entreprises qui réalisent entre 1 milliard et 3 milliards d’euros de chiffre d’affaires et de 35 % pour celles qui réalisent plus de 3 milliards d’euros de chiffre d’affaires.
Certains soutiennent que c’est excessif, mais en étudiant le mouvement à l’œuvre dans un certain nombre de pays dans le monde, et notamment dans les pays occidentaux qui sont contraints de rembourser les dettes contractées, on constate une augmentation de la fiscalité.
Aux États-Unis, entre le taux fédéral et les taux locaux dans un certain nombre d’États, il n’est pas rare que le taux d’impôt sur les sociétés dépasse 30 % ; en Allemagne, il atteint 30 % si l’on prend en compte taux fédéral et taux locaux ; il en va de même au Japon.
C’est dire que la surtaxe, qui aboutit à mettre en place un taux de 30 % pour les entreprises qui réalisent en France un chiffre d’affaires entre 1 milliard d’euros et 3 milliards d’euros, n’est pas un outil susceptible de pénaliser nos entreprises à l’international.
Je partage, pour terminer, l’argument avancé par mes collègues : il convient de s’assurer que les 8 milliards d’euros prévus seront bien au rendez-vous. En tenant compte des techniques de dépaysement des chiffres et des procédures engagées, sans doute, par un certain nombre de directeurs administratifs et financiers (DAF) dans de très grandes entreprises, nous risquons de devoir nous contenter de rendements plus faibles, sans doute entre 5,5 milliards d’euros et 7 milliards d’euros.
M. le président. La parole est à M. Michel Canévet, sur l’article.
M. Michel Canévet. Inutile de vous dire que le groupe Union Centriste ne partage pas, pour l’essentiel, la teneur des discours que l’on vient d’entendre.
Notre vision est totalement différente : nous avons soutenu, depuis 2017, la baisse de l’impôt sur les sociétés, parce que nous considérons que nos entreprises doivent être compétitives dans une économie de plus en plus internationalisée et que leur imposer des charges supérieures à celles de leurs concurrents ne fait que les handicaper. Au contraire, il convient de leur permettre de se développer.
Le chemin pour parvenir au standard international de 25 % a été long et difficile. Or ce qu’attendent aujourd’hui la plupart des entrepreneurs, ceux qui investissent, c’est de la stabilité fiscale. Il est donc impératif d’éviter de continuellement faire évoluer la fiscalité.
Nous éprouvons quelques craintes à l’égard des conséquences de cette augmentation de l’impôt sur les sociétés. Elle est qualifiée de « contribution exceptionnelle », mais je rappelle simplement qu’en 2011 a été instituée une contribution exceptionnelle sur les hauts revenus – nous en avons parlé lors de l’examen de l’article 3. Mes chers collègues, cette contribution exceptionnelle est toujours en vigueur !
Soyez donc attentifs au fait que nous envoyons un message négatif aux entrepreneurs en instituant une contribution exceptionnelle, un type de mesure qui, en France, a tendance à perdurer.
Le groupe Union Centriste considère qu’il faut trouver d’autres sources de financement et il formulera des propositions dans le cadre de l’examen de cet article 11.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Laurent Saint-Martin, ministre. Permettez-moi de répondre brièvement à cette petite discussion générale sur l’article 11. Pourquoi émettrons-nous des avis défavorables, tant sur la pérennisation que sur les modifications des taux ?
Tout d’abord, nous considérons cet article comme un mal nécessaire. Je rejoins les propos de M. Canévet : si nous augmentons les impôts sur les entreprises, même temporairement, ce n’est pas par conviction politique, mais pour répondre à la nécessité du moment.
Après des années durant lesquelles nous avons su protéger notre tissu économique et industriel, sans doute plus que tout autre pays, avec un coût croissant pour les finances publiques, cela n’a échappé à personne, nous estimons que toutes les parties prenantes doivent participer au redressement des comptes publics. Une contribution exceptionnelle et ciblée sur les grandes entreprises profitables nous semble donc justifiée.
Profitables, car il s’agit d’un prélèvement à l’intérieur même de l’impôt sur les sociétés, c’est ainsi que cet outil prend tout son sens. Sans impôt sur les sociétés, point de contribution au titre de cet article 11.
Ce dispositif ne concerne donc que les très grandes entreprises, réalisant un chiffre d’affaires supérieur à 1 milliard d’euros et dégageant des bénéfices, précisément parce que ces entreprises ont été davantage protégées. Cette contribution est donc une forme de contrepartie à la protection dont elles ont bénéficié.
Il s’agit d’une surtaxe à l’impôt sur les sociétés, et non d’une hausse de son taux. La différence est de taille : le message envoyé, tant aux entreprises françaises qu’aux investisseurs étrangers en termes d’attractivité de notre pays, n’est absolument pas le même entre, d’une part, une modification structurelle et pérenne du taux de l’impôt sur les sociétés – lequel est passé de 33 % à 25 % en sept ans – et, d’autre part, un prélèvement exceptionnel s’inscrivant à l’intérieur de cet impôt.
Vous connaissez d’ailleurs ce mécanisme, qui a notamment été utilisé en loi de finances rectificative pour 2017, lorsqu’il a fallu compenser à hauteur de 10 milliards d’euros l’invalidation par l’Europe de la taxe sur les dividendes. Nous savons donc actionner ce levier rapidement et efficacement.
Pourquoi tenons-nous à ce que cette contribution conserve un caractère temporaire ? Pour continuer à préserver l’attractivité de notre politique de l’offre et offrir de la visibilité sur la politique fiscale du pays, en cantonnant cette mesure dans le temps.
C’est la raison pour laquelle elle est assise sur les exercices 2024 et 2025, pour des versements en 2025 et 2026, avec des taux différenciés selon l’année et le chiffre d’affaires des entreprises, une première fourchette étant prévue pour les chiffres d’affaires compris entre 1 milliard et 3 milliards d’euros, une seconde pour ceux qui excèdent 3 milliards d’euros.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous considérons que cet article est cohérent en l’état et compris par les entreprises, dont je salue d’ailleurs les représentants qui, dans un véritable esprit de responsabilité, ont eux-mêmes proposé des contributions de la part des grandes compagnies bénéficiaires.
Nous serons donc défavorables à tout amendement tendant à modifier les taux, l’assiette ou le calendrier de cette mesure.
M. le président. Je suis saisi de neuf amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° I-504 rectifié, présenté par M. Lurel, Mmes Bélim, G. Jourda et Daniel, MM. M. Weber et Féraud et Mmes Blatrix Contat et Monier, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 1
Supprimer le mot :
deux
II. – Alinéa 7
Après le taux :
20,6 %
supprimer la fin de cet alinéa.
III. – Alinéa 9
Après le taux :
41,2 %
supprimer la fin de cet alinéa.
La parole est à M. Victorin Lurel.
M. Victorin Lurel. Nous avons deux visions politiques et idéologiques très différentes. Monsieur le ministre, vous indiquez que vous n’avez pas fait ce choix par conviction ou par idéologie, mais poussé par la nécessité du moment.
La situation étant exceptionnelle, on aurait pu exiger un effort exceptionnel de tous. Puisque la mesure est temporaire, le seuil de chiffre d’affaires aurait pu être fixé à 750 000 euros, par exemple, et nous aurions pu demander davantage ; alors, il m’aurait été plus facile de comprendre le caractère temporaire de cette proposition.
Nous distinguons trois blocs dans cet hémicycle : ceux qui veulent baisser les impôts au nom de la compétitivité et de l’attractivité du territoire ; ceux qui veulent pérenniser cette mesure ; et le Gouvernement, qui veut maintenir cette disposition en l’état pendant deux ans.
Notre collègue Grégory Blanc a brillamment démontré que, même avec une surtaxe, le taux ne dépasse pas 30 %, un niveau pratiqué dans d’autres pays. Ce n’est donc pas cela qui dégradera la compétitivité-prix de la France.
Nous demandons, pour notre part, de pérenniser ce dispositif, car ce n’est pas les stigmatiser que de rappeler que, depuis de longues années, ces entreprises ont engrangé des bénéfices considérables, procèdent à des rachats d’actions qui ne seront taxés qu’à leur valeur nominale lors de l’émission, distribuent des stock-options, ce qui constitue un enrichissement pratiquement sans cause pour leurs hauts cadres.
Nous demandons donc la pérennisation de cette mesure.
M. le président. L’amendement n° I-126 rectifié bis, présenté par M. Canévet, Mme Vermeillet, M. Delahaye, Mme N. Goulet, M. Henno, Mme Perrot, M. Cigolotti, Mmes Billon, O. Richard et Sollogoub, MM. J.M. Arnaud, Vanlerenberghe, Fargeot, P. Martin, Levi, Longeot, Bleunven et Marseille et Mme Jacquemet, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 1
Remplacer les mots :
des deux exercices consécutifs
par les mots :
de l’exercice consécutif
II. – Alinéa 7
1° Remplacer le taux :
20,6 %
par le taux :
10 %
2° Remplacer les mots :
le premier
par le mot :
l’
3° Supprimer les mots :
et à 10,3 % pour le second exercice clos à compter de cette même date
III. – Alinéa 9
1° Remplacer le taux :
41,2 %
par le taux :
20 %
2° Remplacer les mots :
le premier
par le mot :
l’
3° Supprimer les mots :
et à 20,6 % pour le second exercice clos à compter de cette même date
III. – Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – À l’article 278 du code général des impôts, le taux : « 20 % » est remplacé par le taux : « 21 % ».
IV. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Michel Canévet.