M. le président. La parole est à Mme Silvana Silvani, pour présenter l’amendement n° 939.
Mme Silvana Silvani. Là encore, il s’agit de refuser l’assujettissement à la CSG-CRDS des rémunérations des apprentis, dont je rappelle qu’elles varient entre 694 euros et 1 389 euros.
Nous n’entendons ni commenter, ni critiquer, ni remettre en cause l’apprentissage dans son ensemble ; notre débat ne porte que sur la rémunération des apprentis. Rappelons qu’il s’agit plutôt de jeunes qui démarrent dans la vie active, dont le statut est plutôt précaire et dont les rémunérations comptent parmi les plus faibles.
Il a été question tout à l’heure d’équité vis-à-vis des stagiaires, mais, si l’on voulait vraiment l’équité, on alignerait plutôt le statut de ces derniers sur celui des apprentis, puisque leur situation en matière d’indemnité est similaire. Je parle non pas des salariés en formation continue, qui n’entrent pas dans ce champ, mais bien des jeunes en insertion professionnelle, stagiaires comme apprentis.
Le leitmotiv est que tout le monde doit contribuer, mais on devrait peut-être poser quelques lignes rouges. En particulier, affecter de la sorte un public jeune, en voie de qualification et d’insertion, me paraît envoyer un message négatif pour nos perspectives d’avenir.
C’est pour ces raisons que nous demandons nous aussi la suppression des alinéas 1 à 5 de l’article 7.
M. le président. La parole est à M. Michel Masset, pour présenter l’amendement n° 1159 rectifié.
M. Michel Masset. Cet amendement, dans la même veine que les précédents, vise à préserver la rémunération de nos apprentis en supprimant cette mesure qui, selon les organisations consultées, entraînerait une baisse de 150 euros à 180 euros de leur rémunération chaque mois.
Mme Frédérique Puissat. Mais non !
M. Michel Masset. On vient ici frapper au portefeuille des jeunes engagés dans une démarche de formation et d’insertion. C’est une mesure que je ne peux comprendre au regard du volontarisme des jeunes et des besoins en main-d’œuvre de nos artisans.
C’est la raison pour laquelle je demande le retrait de cette mesure foncièrement injuste pour nos jeunes.
M. le président. La parole est à M. Xavier Iacovelli, pour présenter l’amendement n° 1227 rectifié.
M. Xavier Iacovelli. En cohérence avec nos amendements de suppression de l’article 7, nous ne pensons pas qu’il convienne de revenir sur une politique qui a fonctionné et eu des résultats positifs. On est en effet passé de 350 000 contrats d’apprentissage en 2017 à plus d’un million à la fin de 2023.
Certes, cette politique comprenait aussi des mesures d’aide aux entreprises, dont nous débattrons lors de l’examen du projet de loi de finances, mais l’exonération des apprentis de la CSG-CRDS a aussi joué un rôle. Les y assujettir, comme il est proposé dans les alinéas 1 à 5 de cet article, ferait peser une charge supplémentaire sur leur pouvoir d’achat. C’est aussi pour éviter de les pénaliser ainsi que nous demandons leur suppression.
Pour une fois que l’on a une politique qui fonctionne bien, pourquoi la remettre en cause ? Pour ma part, sur la question de l’apprentissage, je propose le statu quo.
M. le président. L’amendement n° 376, présenté par MM. Szczurek, Hochart et Durox, est ainsi libellé :
I – Alinéa 4
Après le mot :
travail
insérer les mots :
, des entreprises qui emploient plus de quarante-neuf salariés
II. – Alinéa 5
Remplacer le mot :
abrogé
par les mots :
complété par les mots : « des entreprises qui emploient moins de cinquante salariés ».
La parole est à M. Christopher Szczurek.
M. Christopher Szczurek. Dans l’objectif de relancer les filières de l’apprentissage, mais également, reconnaissons-le, de camoufler quelque peu le chômage de masse, le Gouvernement a largement subventionné l’apprentissage. La loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel a suscité une augmentation certaine du nombre d’apprentis, dans l’objectif affiché d’atteindre un million de contrats d’apprentissage en 2027. Malgré nos réserves, nous saluons les effets de cette politique.
Néanmoins, l’État supporte 58 % des dépenses d’apprentissage. Cette charge a été évaluée à près de 11 milliards d’euros par la Cour des comptes, dans un rapport du mois de juillet 2023.
Dans un contexte de dégradation importante de nos comptes publics, fruit de la politique inefficace menée depuis sept ans, le Gouvernement souhaite diminuer les aides à l’apprentissage. Nous convenons qu’il faut recentrer ce dispositif, auquel sont également éligibles actuellement les étudiants en grandes écoles ou en études longues, ce qui n’est plus concevable.
Toutefois, il convient de préserver ce dispositif pour les TPE-PME. L’apprentissage y est essentiel, particulièrement dans l’artisanat ou le secteur du bâtiment.
Cet amendement vise donc à exclure de la réforme des exonérations et abattements prévue à cet article les entreprises de moins de 50 salariés.
M. le président. L’amendement n° 440 rectifié bis, présenté par Mme Paoli-Gagin, M. Chasseing, Mme Lermytte, MM. Brault et Chevalier, Mme L. Darcos, MM. Grand, Laménie, A. Marc, Rochette, Verzelen, Wattebled et Lemoyne, Mme Sollogoub, M. Omar Oili, Mme Billon, M. Masset, Mme Perrot, M. Haye et Mme Nadille, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 4
Compléter cet alinéa par les mots :
dans les microentreprises et les petites et moyennes entreprises, telles que définies par l’article 51 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à Mme Marie-Claude Lermytte.
Mme Marie-Claude Lermytte. Il s’agit d’un amendement de ma collègue Vanina Paoli-Gagin.
La montée en puissance de l’apprentissage est une réussite collective incontestable. Grâce aux mécanismes d’incitation mis en place par la puissance publique, les entreprises se sont emparées du dispositif, auquel les jeunes ont porté un très vif intérêt. C’est particulièrement le cas pour les TPE et les PME, qui ont ainsi trouvé un moyen efficace de recruter et de former des jeunes.
Dans une logique de rationalisation des dépenses publiques, le Gouvernement a fait le choix de restreindre les mécanismes de soutien à l’apprentissage, notamment en assujettissant les rémunérations des apprentis à la CSG-CRDS. La hausse du coût du travail des apprentis pourra potentiellement être absorbée par les grandes entreprises, mais elle risque de se révéler beaucoup plus dommageable pour les TPE et les PME, ainsi que de conduire mécaniquement à une baisse de rémunération pour les titulaires de contrats d’apprentissage.
Cet amendement vise donc à exclure les TPE et PME de cette mesure d’économie.
Selon l’inspection générale des finances, une réduction générale des exonérations permettrait de générer une recette de 278 millions d’euros. En maintenant les exonérations pour les entreprises de moins de 250 salariés, comme nous le proposons via cet amendement, on réduirait de 210 millions d’euros l’impact de la mesure, ce qui permettrait donc une économie de 68 millions d’euros sans compromettre ni l’emploi ni la formation des jeunes.
M. le président. L’amendement n° 573 rectifié, présenté par Mmes Le Houerou et Poumirol, MM. Montaugé et Uzenat, Mme Bélim, MM. Pla et Ros, Mmes Lubin, Conway-Mouret, Brossel, S. Robert et Bonnefoy et MM. Redon-Sarrazy, Fagnen, Cozic, Michau, Ziane et Bourgi, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par les mots :
pour les entreprises de plus de 250 salariés
La parole est à Mme Annie Le Houerou.
Mme Annie Le Houerou. Je ne reviens pas sur l’importance des apprentis pour les artisans et les TPE, ainsi que pour la transmission des savoir-faire. Nous proposons de concilier limitation des exonérations et soutien aux apprentis, en n’assujettissant à la CSG-CRDS que les apprentis engagés par des entreprises de plus de 250 salariés.
M. le président. L’amendement n° 439 rectifié bis, présenté par Mme Paoli-Gagin, M. Chasseing, Mme Lermytte, MM. Brault et Chevalier, Mme L. Darcos, MM. Grand, Laménie, A. Marc, Rochette, Verzelen, Wattebled et Lemoyne, Mme Sollogoub, M. Omar Oili, Mme Billon, M. Masset, Mme Perrot, M. Haye et Mme Nadille, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 5
Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :
2° Le a du 1° du III est ainsi rédigé :
« 1° a) Les rémunérations des apprentis mentionnées à l’article L. 6221-1 du code du travail, dans les microentreprises et les petites et moyennes entreprises, telles que définies par l’article 51 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie ; »
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à Mme Laure Darcos.
Mme Laure Darcos. Défendu.
M. le président. L’amendement n° 280 rectifié bis, présenté par Mme Billon, M. Pillefer, Mmes Antoine, Gacquerre, Morin-Desailly, Patru, Perrot, O. Richard et Sollogoub et MM. Bleunven, Cadic, Cambier, Canévet, Capo-Canellas, Courtial, S. Demilly, Lafon, Levi, Longeot et Haye, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Rédiger ainsi cet alinéa :
2° Le a du 1° du III est complété par les mots : « lorsqu’ils effectuent leur apprentissage dans un métier de l’une des familles professionnelles et une zone géographique caractérisées par des difficultés de recrutement dont la liste est déterminée par décret. »
La parole est à Mme Annick Billon.
Mme Annick Billon. Sans préjuger de l’avis que Mme la rapporteure générale donnera sur tous ces amendements, nous proposons par celui-ci, à défaut de supprimer l’assujettissement des apprentis à la CSG-CRDS, d’en exclure au moins les métiers en tension.
On sait que la France fait face à de fortes pénuries de salariés dans divers secteurs. Ainsi, dans le bâtiment, la restauration, ou encore les soins aux personnes, le manque de personnel qualifié freine la croissance et l’efficacité des services.
Certains pays européens ont pris des mesures similaires, qui ont amélioré leur compétitivité économique et industrielle. C’est pourquoi, si l’amendement que j’ai présenté au début de cette discussion commune devait ne pas être voté, l’adoption de celui-ci offrirait une voie médiane, à savoir une exclusion des métiers en tension du champ d’application de ces mesures.
M. le président. Le sous-amendement n° 565, présenté par M. Pillefer, est ainsi libellé :
Amendement n° 280, alinéa 3
Compléter cet alinéa par la phrase :
Cette liste comprend notamment les métiers du soin et de l’aide à domicile.
La parole est à M. Bernard Pillefer.
M. Bernard Pillefer. Ce sous-amendement vise à compléter l’amendement que vient de présenter Annick Billon.
Les secteurs les plus touchés par les difficultés de recrutement sont le bâtiment et les travaux publics, la restauration et les soins à la personne. Une stratégie de soutien aux apprentis dans ces professions souvent perçues comme exigeantes est indispensable pour réduire ce décalage entre l’offre et la demande. Selon une étude, 42 % des jeunes hésitent à s’orienter vers ces secteurs en raison des conditions de travail difficiles.
En Allemagne, les politiques fiscales favorisant le recours aux apprentis dans les secteurs industriels ont permis de réduire de 25 % le déficit de main-d’œuvre qualifiée entre 2010 et 2020.
Aussi, par ce sous-amendement, j’entends rappeler l’importance d’inscrire le secteur du soin et de l’aide à domicile dans la liste des métiers en tension visée dans la disposition proposée par Mme Billon. D’après le ministère de la santé et de l’accès aux soins, environ 50 000 postes d’aide-soignant et d’aide à domicile sont vacants en 2024. Ces besoins devraient continuer d’augmenter, puisque le nombre de personnes âgées devrait être de 20 millions en 2030, contre 13,5 millions aujourd’hui. En outre, le secteur de la santé en milieu rural fait face à une désertification critique, avec un manque de 15 000 professionnels de santé en 2023.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je précise que ces amendements et ce sous-amendement n’ont pas tous le même périmètre et ne sont pas tous rédigés de la même façon.
Tout d’abord, les amendements identiques nos 198, 215 rectifié bis, 248 rectifié sexies, 278 rectifié bis, 415 rectifié bis, 664, 939, 1159 rectifié et 1227 rectifié visent à maintenir l’exonération intégrale de CSG-CRDS dont bénéficient les apprentis. Une telle mesure conduirait à maintenir une iniquité vis-à-vis d’autres publics similaires.
J’entends bien qu’il ne convient pas de comparer apprentis et salariés. Pour autant, tous sont dans les mêmes entreprises et comparent donc leur rémunération. Ainsi, certains cotisent et d’autres non. Pour quelle raison ? Qu’est-ce qui justifie cette différence ? Le fait d’avoir le statut d’apprenti ? Je ne crois pas que ce soit une bonne raison.
Je rappelle également que le dispositif de l’article 7 ne concerne que la part des rémunérations excédant très précisément 883 euros par mois. Au-delà de cette somme, le taux de CSG applicable sera de 9,2 %, ce qui correspond à environ 9 euros pour un salaire de 1 000 euros. Cela n’a rien d’excessif. Précisons en outre que c’est l’apprenti qui assumera ce coût, et non l’entrepreneur : en commençant ainsi à cotiser, il commencera à acquérir la notion de participation aux droits à la sécurité sociale, donc à la solidarité nationale, dont il bénéficie.
Sur ces amendements identiques, la commission émet donc un avis défavorable.
Il en est de même pour les autres amendements en discussion commune.
Les auteurs des amendements nos 376, 440 rectifié bis, 573 rectifié et 439 rectifié bis souhaitent exclure de l’assujettissement à la CSG-CRDS les apprentis qui travaillent dans les TPE-PME. Je partage vos propos sur l’apprentissage, mes chers collègues, et je conviens de la nécessité de soutenir ces entreprises, premiers employeurs dans nos territoires, qui contribuent à leur vitalité et, aujourd’hui plus que jamais, à la formation des jeunes. Toutefois, l’exonération de CSG-CRDS ne semble pas le moyen le plus adéquat d’y parvenir.
En effet, je le répète, cette exonération concerne l’apprenti et non l’employeur. Comment justifier qu’au sein d’une même classe de CFA deux apprentis ayant la même activité dans deux entreprises différentes ne se voient pas prélever la même part de CSG sur leur rémunération ? Là encore, ce serait une injustice que personne ne comprendrait. On peut aussi imaginer qu’au sein d’une même famille un enfant paierait des cotisations sociales et l’autre non. On voit bien que ce serait créer des injustices.
L’amendement n° 280 rectifié bis et le sous-amendement n° 565 visent à exclure d’assujettissement à la CSG-CRDS les apprentis travaillant dans un secteur en tension. Je comprends l’intention des auteurs et nous devons en effet aider certains des secteurs qui ont été mentionnés. Toutefois, nous savons que les choses évoluent très vite dans notre monde économique.
De nombreux secteurs sont en tension et ont du mal à recruter – Jean-Luc Brault a ainsi fait remarquer qu’il fallait faire venir des soudeurs qualifiés d’autres pays européens. Oui, cela existe, et dans de plus en plus de secteurs d’activité ! Peut-être devrions-nous postuler que le problème se pose dans tous les secteurs.
Toutefois, pour la même raison que précédemment, il semble difficile d’accepter une telle inégalité de traitement entre apprentis.
Je tiens maintenant à réagir à certains propos qui ont été tenus.
Pensez-vous vraiment qu’un jeune renoncera à prendre la voie de l’apprentissage parce qu’il devra payer 9 euros de cotisations ? Cela me semble moins déterminant que l’aide au poste ; nous aurons ce débat lors de l’examen du projet de finances.
De grâce, faisons preuve de solidarité pour décider des postes budgétaires où nous pouvons réaliser des économies ! Si nous ne le faisons pas là, nous ne le ferons nulle part – dans ce cas, autant arrêter tout de suite la discussion…
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Je tenterai de répondre aux différents arguments qui ont été avancés.
Madame Poncet Monge, si, comme vous l’avez indiqué, 10 % des apprentis s’inscrivent à France Travail, cela veut dire que les 90 % restants sont parvenus à s’insérer dans le marché de l’emploi, soit en poursuivant leur formation, soit en étant embauchés ! (Mme Raymonde Poncet Monge proteste.)
M. Olivier Rietmann. Eh oui !
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Il s’agit d’un succès, et même d’une révolution culturelle : l’apprentissage est désormais considéré par notre jeunesse comme la voie royale vers l’emploi.
M. André Reichardt. Bien sûr !
Mme Silvana Silvani. Ce n’est pas vrai…
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. … mais il convient de saluer la révolution culturelle de l’apprentissage dans notre pays, quel que soit le niveau de qualification.
Madame Billon, je ne compare évidemment pas les apprentis avec les salariés et les stagiaires. Je compare en revanche les niveaux de rémunération. Dans une même entreprise, à rémunération égale, il peut exister une distorsion entre des travailleurs qui sont exonérés et d’autres non, notamment entre un apprenti et son tuteur. Nous devons nous interroger sur ce décalage.
Nous devons d’autant plus le faire, monsieur Iacovelli, que seules les rémunérations excédant 50 % du Smic seront assujetties. Cela signifie que les apprentis de moins de 21 ans, y compris ceux qui ont déjà obtenu leur baccalauréat, ne seront pas affectés par cette mesure s’ils perçoivent de faibles rémunérations.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Exactement !
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Il importe de préciser que nous ne proposons pas de mettre fin à cette exonération pour l’ensemble des apprentis.
Madame Lubin, vous avez eu raison de rappeler que j’ai d’abord été mal à l’aise avec cette mesure. Je l’ai d’ailleurs reconnu devant l’Assemblée nationale comme devant le Sénat. Toutefois, des dispositions prises pour traiter le flux entrant, c’est-à-dire les futurs apprentis, ont largement répondu à mes réserves. Dorénavant, une personne qui est actuellement en apprentissage ne verra pas sa rémunération baisser. Il s’agit d’une manière de traiter la question de l’équité de la mesure.
Je termine en revenant sur les métiers en tension. Je suis sensible à l’argument de la rapporteure générale selon lequel deux jeunes d’un même CFA percevant la même rémunération pourraient être traités différemment, l’un étant exonéré de cotisations sociales et l’autre non.
En France, de manière générale et sans nous limiter à la seule question de l’apprentissage, nous devons mieux flécher les financements publics de la formation professionnelle vers les besoins en main-d’œuvre des entreprises. Pour mieux traiter les métiers en tension et les besoins des entreprises, il convient de travailler avec les branches sur une différenciation en matière de coûts contrats. Ainsi, les formations seront moins chères. Par ailleurs, nous souhaitons mieux informer les jeunes et leur famille en amont sur le taux d’insertion professionnelle et les rémunérations attendues pour chaque type de formation.
Nous soutiendrons plus finement les métiers en tension en adoptant ces deux mesures qu’au travers des exonérations de cotisations des apprentis.
M. le président. La parole est à Mme Christine Bonfanti-Dossat, pour explication de vote.
Mme Christine Bonfanti-Dossat. Madame le rapporteur général, monsieur le président de la commission des affaires sociales, vous nous mettez face à un dilemme pour le moins insoluble. Lorsqu’il a défendu l’amendement n° 1159 rectifié, Michel Masset a évoqué une baisse de rémunération de 150 euros. Ce sont des montants similaires – entre 100 euros et 150 euros – qui m’ont été fournis dans ma permanence. De votre côté, vous évoquez la somme de 9 euros. Dans ces conditions, il est difficile de prendre parti.
Néanmoins, comme précédemment, je me prononcerai en faveur de la suppression de l’article 7.
M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales. Je vous confirme le montant de 9 euros !
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Nous devons en deux minutes nous prononcer sur des amendements très divers, qui auraient mérité d’être examinés séparément pour plus d’équité. (Exclamations sur les travées des groupes Les Républicains et UC.) Leurs objets sont tout de même très différents !
Madame la ministre, soit je me suis mal exprimée, soit vous mélangez deux choses : j’ai indiqué que 8 % des inscrits à France Travail étaient d’anciens apprentis, et non pas que 8 % des anciens apprentis étaient inscrits à France Travail. J’espère que vous mesurez la nuance.
J’admire l’intérêt que porte cette assemblée au pouvoir d’achat des salariés. J’espère, mes chers collègues, que vous ferez preuve du même intérêt lorsque nous examinerons d’autres amendements.
Je le redis, la sécurité sociale a pour objet non pas d’améliorer le pouvoir d’achat des salariés, mais de soigner et d’offrir une retraite et des conditions de travail dignes. Voilà son objectif ! Cela n’a rien à voir avec le fait d’accorder des exonérations de cotisations sociales à de pauvres employeurs qui ne sauraient garantir autrement le pouvoir d’achat de leurs salariés…
Les écologistes prônent une restauration du consentement à la cotisation. Selon moi, la cotisation est un droit socialisé. Il convient de consentir à l’impôt et aux cotisations sociales, lorsqu’ils sont bien utilisés, pour défendre les prestations de la sécurité sociale.
M. le président. La parole est à Mme Silvana Silvani, pour explication de vote.
Mme Silvana Silvani. Il est vrai que ces amendements en discussion commune ont des objets très divers ; on ne sait plus où donner de la tête…
Je ne voudrais pas que la question de la rémunération des apprentis et de l’assujettissement aux cotisations sociales soit noyée dans le débat sur l’apprentissage. Ce n’est pas l’objet de mon amendement.
S’il est en effet question de 9 euros – je n’ai pas fait le calcul –, ne portons pas de jugements hâtifs : si elle peut paraître dérisoire depuis cet hémicycle, cette somme peut se révéler importante pour certains.
Par ailleurs, je rappelle que les apprentis ne sont pas encore des salariés.
Mme Anne-Sophie Romagny. Les stagiaires non plus !
Mme Silvana Silvani. Bien sûr, ils travaillent et ils apprennent en faisant. Pour autant, ils n’ont pas encore le statut de salarié. À mon sens – au risque d’effectuer une comparaison hasardeuse –, les assujettir aux cotisations sociales reviendrait par exemple à assujettir les étudiants boursiers.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Madame la ministre, ce à quoi nous assistons en ce moment même dans l’hémicycle prouve bien la nécessité d’organiser un grand débat sur l’apprentissage. Comme l’a parfaitement dit Anne-Sophie Romagny, ce débat ne saurait avoir lieu durant l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale ou celui du projet de loi de finances.
Je parle sous le contrôle de Jean-Marie Vanlerenberghe, il me semble que c’est en 2018 que nous avons pour la dernière fois examiné une loi sur l’apprentissage. Il est largement temps d’organiser un grand débat sur ce sujet dans cet hémicycle. J’aimerais, madame la ministre, que vous vous y engagiez.
En attendant, adoptons cet article et poursuivons la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale. (Marques d’approbation sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)
M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Annick Billon, pour explication de vote.
Mme Annick Billon. Je remercie Nathalie Goulet de ses propos. Si nous défendons tous l’apprentissage, certains dispositifs actuels mériteraient en effet un grand débat. Je pense notamment à la certification Qualiopi et aux dispositifs d’enseignement à distance, qui consomment beaucoup d’argent public.
Madame la rapporteure générale, monsieur le président de la commission des affaires sociales, nous avons déposé des amendements très différents les uns des autres. La question que nous devons nous poser est celle des répercussions de ces mesures d’assujettissement.
Nous avons consacré énormément de temps et d’énergie à donner de l’attrait à la filière de l’apprentissage. Aujourd’hui, nous prenons des décisions qui pourraient mettre un coup d’arrêt à une telle attractivité.
Je maintiens l’amendement n° 278 rectifié bis. Je regrette toutefois que nous soyons contraints de débattre en nous fondant sur des estimations qui sont contestées par le président de la commission.
L’apprentissage se porte bien et nous devons le préserver. Pour cela, chère collègue Nathalie Goulet, je dis oui à un grand débat !
M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Fichet, pour explication de vote.
M. Jean-Luc Fichet. Permettez-moi de nous ramener à la réalité : nous parlons d’assujettir des personnes en apprentissage qui gagneront 800 euros par mois ! (Mme la ministre et Mme la rapporteure générale de la commission des affaires sociales contestent.) Vous prétextez une prétendue équité entre un stagiaire et un apprenti, qui pourraient être rivaux et ne pas comprendre la différence de traitement dont ils font l’objet.
Je rappelle que de grands groupes réalisent des superprofits en France (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.) et supportent une imposition cinquante fois moindre que les TPE et les PME qui embauchent des apprentis. Il serait juste de mettre fin à ce débat pour savoir si nous allons diminuer de 100 euros ou de 9 euros, selon les hypothèses, les rémunérations de jeunes qui démarrent dans la vie professionnelle, qui nous occupe depuis plus d’une heure !
Soyons sérieux ! Nous pourrions trouver de l’argent facilement à condition de lever le barrage à une imposition des grands profits. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe SER.)