M. le président. Je mets aux voix l’article 2.
(L’article 2 est adopté.)
Chapitre II
Mise en place d’une stratégie nationale pour la pédopsychiatrie
(Division nouvelle)
Article 3
I. – Une stratégie nationale pour la pédopsychiatrie est élaborée dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, puis révisée au moins tous les cinq ans, sous la responsabilité du ministère de la santé.
II. – Elle a comme objectif que tout enfant ou adolescent bénéficie, dans les meilleurs délais, des moyens lui permettant de retrouver un état de bien-être psychique contribuant à l’épanouissement de son développement, et des soins en santé mentale nécessaires. Elle inclut également un volet relatif à la formation de l’ensemble des professionnels de santé à la prise en charge des problématiques de santé mentale des enfants et adolescents et un volet relatif à la revalorisation des conditions d’exercice de la pédopsychiatrie.
III. – Elle se décline en un réseau territorial de structures pédopsychiatriques dans le cadre du projet territorial de santé mentale mentionné à l’article L. 3221-2 du code de la santé publique de manière à garantir à chaque enfant ou adolescent en souffrance psychique d’être soigné au sein de son lieu de vie ou de son lieu de soins.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Muller-Bronn, sur l’article.
Mme Laurence Muller-Bronn. L’article 3 est consacré au développement des moyens nécessaires à la prise en charge des mineurs en pédopsychiatrie, secteur aujourd’hui menacé par une pénurie majeure, comme l’indique la Cour des comptes dans son rapport de mai 2023.
Les chiffres sont alarmants : 1,5 million d’enfants et d’adolescents souffrent d’un trouble psychique, dont 600 000 à 800 000 de troubles plus sévères, selon le rapport.
Très récemment, la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) a révélé dans une étude que les troubles psychiques des mineurs, particulièrement des jeunes filles, atteignent des niveaux sans commune mesure avec ceux que l’on peut observer dans la population générale adulte.
En psychiatrie, les taux d’hospitalisation pour gestes suicidaires ou auto-infligés chez les filles âgées de 10 à 19 ans a doublé une première fois entre 2012 et 2020, puis une seconde fois entre 2020 et 2022.
La Drees précise que cette envolée des hospitalisations chez les jeunes femmes ne peut être constatée ni chez les garçons ou les jeunes hommes ni chez les adultes de plus de 30 ans. Ce sujet dépasse donc largement le questionnement de genre.
Enfin, la santé mentale des mineurs doit aussi nous inquiéter en raison de la surconsommation de médicaments psychotropes chez les enfants. Les chiffres pour l’année 2021 ont explosé, la consommation d’hypnotiques ayant augmenté de 224 % !
Ces chiffres figurent dans un rapport publié par le Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge en mars 2023. Le Haut Conseil y révèle que le nombre de délivrances de psychotropes chez les 0-19 ans s’est chiffré en millions en 2021. Il précise par ailleurs que toutes ces prescriptions ont été données hors autorisation de mise sur le marché et qu’elles transgressent les recommandations des agences de santé et les consensus scientifiques.
Cette médicalisation à outrance ne peut pas résoudre les troubles psychiques complexes, nous le savons. Avant d’ajouter encore des traitements chimiques incertains, le recours à la parole et à la psychothérapie devrait rester la priorité.
Enfin, au moment où l’on nous parle d’empathie, sachez que les victimes trans d’Androcur portent plainte contre l’État. Produit par le laboratoire Bayer, commercialisé depuis 1980, ce médicament a été prescrit massivement à des femmes contre l’endométriose et l’acné ou encore comme moyen de contraception, et il est donné en hormonothérapie aux personnes transgenres pour ses propriétés anti-androgéniques.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 13 rectifié est présenté par Mme Guillotin, MM. Grosvalet, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, M. Daubet, Mme N. Delattre, M. Fialaire, Mme Girardin, MM. Gold et Guiol, Mme Jouve, MM. Laouedj et Masset, Mme Pantel et M. Roux.
L’amendement n° 16 est présenté par Mmes Rossignol et Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Poumirol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Philippe Grosvalet, pour présenter l’amendement n° 13 rectifié.
M. Philippe Grosvalet. Je commencerai par faire un petit rappel historique : le mercredi 10 février 2010, un décret paraissait au Journal officiel de la République française. Pour la première fois dans le monde, un pays, la France, excluait le transsexualisme de la liste des maladies mentales. Il était signé de Mme Roselyne Bachelot-Narquin, alors ministre de la santé, qui avait d’ailleurs promis cette exclusion quelques mois auparavant.
Quatorze ans plus tard, nous examinons ensemble, mes chers collègues, cet article 3, qui prévoit la mise en place d’une stratégie nationale pour la pédopsychiatrie dans une proposition de loi sur les personnes en questionnement de genre.
Si important soit-il, comme le montre le fort engagement de notre groupe en sa faveur, le sujet de la pédopsychiatrie n’a absolument rien à faire dans un texte sur les mineurs en questionnement de genre.
Depuis 2010, de l’eau a coulé sous les ponts, mais certains d’entre vous restent visiblement irrigués par les mêmes idées rétrogrades, à rebours des aspirations à la tolérance et du nouveau rapport à l’identité et au genre qui émerge aujourd’hui dans notre société.
C’est au nom de cette évolution que je vous invite, mes chers collègues, à voter pour cet amendement, qui vise à supprimer l’article 3.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour présenter l’amendement n° 16.
Mme Laurence Rossignol. On se demande vraiment ce que cet article fait dans ce texte !
Bien sûr, tout le monde est favorable à une stratégie nationale pour la pédopsychiatrie. D’ailleurs, le Gouvernement a tenu, la semaine dernière, des Assises de la pédiatrie et de la santé de l’enfant, où M. Valletoux était d’ailleurs, je crois, le seul ministre présent. La stratégie pour la pédiatrie et la santé de l’enfant qui y a été présentée comporte un axe sur la santé mentale des enfants et des adolescents qui pourrait valoir stratégie en matière de pédopsychiatrie.
Ce que nous attendons du Gouvernement, c’est que les préconisations qui ont été faites à cette occasion soient suivies d’effets et soient mises en œuvre ! L’enjeu, aujourd’hui, est bien celui-là. Il n’est pas que le Sénat vote le principe d’une stratégie pour la pédopsychiatrie.
Pourquoi, d’ailleurs, lier celle-ci à la question des transitions des mineurs ? Pourquoi pas plutôt à celle des troubles alimentaires ou encore à celle des automutilations ? De fait, il y a mille et une raisons de définir une telle stratégie.
Nous n’avons pas trop compris ce choix. S’agit-il de montrer que le Sénat se préoccupe des enfants et des adolescents et de leur santé mentale plus largement que de la simple question des transitions ?
M. Bruno Retailleau. Oui !
Mme Laurence Rossignol. S’agit-il de montrer que la question des transitions de genre relève de la psychiatrie ? Ce n’est pas clair.
Afin d’éviter tous les malentendus – il est souhaitable qu’ils soient les moins nombreux possible –, il serait bien que cet amendement soit adopté.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Pour éviter tout malentendu, madame Rossignol, je réaffirme ici que nous considérons depuis longtemps que la transition de genre n’est pas une maladie psychiatrique.
Je répète aussi à M. Grosvalet que nous ne sommes pas rétrogrades sur le sujet, bien au contraire.
Cependant, si le questionnement de genre n’est pas une maladie psychiatrique, il entraîne une souffrance importante, qui nécessite des soins et un suivi par un psychologue ou un pédopsychiatre. C’est le sens de l’article 3 de la proposition de loi.
Je souhaite rappeler quelques chiffres, que certains de mes collègues ont déjà évoqués. Selon l’étude nationale sur le bien-être des enfants (Enabee) publiée par Santé publique France l’année dernière, 13 % des enfants scolarisés en élémentaire présentaient un trouble probable de santé mentale.
Le résultat d’une enquête publiée par la Drees ce mois-ci montre que le taux d’hospitalisation pour des gestes auto-infligés, qui intègrent notamment les tentatives de suicide, des filles âgées de 10 à 19 ans a doublé entre 2012 et 2020, puis de nouveau entre 2020 et 2022.
Enfin, selon le Conseil national de l’ordre des médecins, que nous avons auditionné, le nombre de professionnels spécialisés en psychiatrie des enfants et des adolescents a baissé de 34 % entre 2010 et 2022.
Ces chiffres sont évidemment éloquents.
La commission a donc souscrit à l’objectif de faire de la pédopsychiatrie une priorité de santé publique et de permettre à tout enfant de bénéficier d’un accès aux soins psychiatriques.
Elle a adopté et précisé l’organisation de la stratégie nationale prévue par le texte, en y ajoutant un volet relatif à la formation des professionnels de santé et un autre relatif à l’amélioration des conditions d’exercice de la pédopsychiatrie.
Je dois dire ici, monsieur le ministre, qu’il sera peut-être utile, dans le cadre de la politique conventionnelle, d’étudier la manière dont l’acte de pédopsychiatrie pourrait être mieux payé que l’acte de psychiatrie tout court.
Les pédopsychiatres nous disent tous la même chose : une consultation de psychiatrie dure entre vingt minutes et une demi-heure, quand une consultation de pédopsychiatrie dure au minimum deux heures. Or elles sont payées de la même façon ! Il est donc nécessaire de revoir les conditions d’exercice de la pédopsychiatrie pour inciter les jeunes à aller vers cette spécialité. (M. le ministre délégué marque son approbation.)
La mise en place de la stratégie s’inscrit dans la continuité des conclusions du rapport de la commission des affaires sociales sur la santé mentale publié en décembre 2021 – j’étais à l’époque président de la commission et Philippe Mouiller faisait partie des défenseurs de cette demande sur la pédopsychiatrie –, ainsi que de la proposition de résolution présentée par notre collègue Nathalie Delattre et récemment adoptée à l’unanimité par notre assemblée.
Elle rejoint également l’un des objectifs que vous avez vous-même annoncés, monsieur le ministre, lors des assises de la pédiatrie : améliorer la réponse en pédopsychiatrie sur l’ensemble du territoire.
La commission est donc défavorable à ces amendements de suppression.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Frédéric Valletoux, ministre délégué. Je serai cohérent avec la position qui est la mienne depuis le début sur l’ensemble de ce texte.
Comme je l’ai indiqué en introduction de nos débats, l’annonce d’une stratégie nationale pour la pédopsychiatrie n’a rien à faire dans cette proposition loi.
Cela dit, je souscris aux propos que vient de tenir M. le rapporteur sur la mobilisation commune de tous ici. Les nombreuses questions qui m’ont été posées sur le sujet lors de ma dernière audition par la commission des affaires sociales montrent bien la préoccupation du Sénat sur le besoin de réveiller le secteur de la santé mentale, notamment pour accompagner les plus jeunes.
Croyez bien que le Gouvernement s’y attelle ! Je remercie M. le rapporteur de l’avoir souligné.
Pour ce faire, nous nous inspirons évidemment des réflexions et de la mobilisation qui sont les vôtres depuis déjà longtemps, mesdames, messieurs les sénateurs.
Toutefois, il ne me semble pas approprié d’apporter une réponse à ce problème par un article dans cette proposition de loi.
J’émets donc un avis favorable sur les amendements de suppression de cet article.
M. le président. La parole est à M. Bruno Retailleau, pour explication de vote.
M. Bruno Retailleau. Je veux simplement répondre à l’interrogation de Laurence Rossignol.
Si cet article sur la mise en place d’une stratégie nationale pour la pédopsychiatrie figure dans le texte, ce n’est pas parce que nous voulons établir un lien entre celle-ci et le sujet abordé aux articles 1er et 2. (Protestations sur les travées des groupes SER et CRCE-K.) C’est d’ailleurs la raison pour laquelle la commission a bien séparé les choses en créant des chapitres distincts. Nous avons simplement voulu profiter d’un vecteur, car les vecteurs sont rares !
Mes chers collègues, monsieur le ministre, certaines ou certains d’entre vous consultent peut-être de temps en temps un médecin scolaire. Que fait un médecin scolaire lorsqu’il a face à lui une famille avec des enfants, des adolescents, qui se scarifient, qui s’automutilent, qui menacent de se suicider ? Il essaie désespérément d’obtenir un rendez-vous avec un pédopsychiatre. Dans le meilleur des cas, on lui propose un rendez-vous trois à six mois plus tard… Concrètement, voilà ce qui se passe, monsieur le ministre.
Nous ne voulions pas laisser passer une occasion de dire ce que nous avons à dire, de répéter ce que la commission a conclu il y a plusieurs années déjà. (Mme Mélanie Vogel s’exclame.) Le sujet est trop important pour que nous ne le mettions pas sur la table ! (Protestations sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE-K.)
Mme Silvana Silvani. Ce n’est pas du tout le sujet !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 13 rectifié et 16.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 6 rectifié bis, présenté par Mme Devésa, M. Mizzon, Mme Guidez et MM. Canévet et Ravier, est ainsi libellé :
Alinéa 2, première phrase
Rédiger ainsi cette phrase :
Elle a comme objectif de garantir à tout enfant ou adolescent l’accès aux soins nécessaires à la bonne prise en charge de sa santé mentale.
La parole est à Mme Brigitte Devésa.
Mme Brigitte Devésa. Il s’agit d’un amendement de simplification.
Selon Santé publique France, la santé mentale comprend trois composantes : la santé mentale positive, la détresse psychologique réactionnelle et les troubles psychiatriques de durée variable.
La rédaction proposée de la première phrase de l’alinéa 2, en visant la bonne prise en charge de la santé mentale, simplifie le droit proposé, tout en satisfaisant l’objectif du texte.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.
Mme Laurence Rossignol. Je n’interviendrai pas sur le fond.
La liste pour le moins surprenante des cosignataires de cet amendement, à savoir quatre sénateurs du groupe Union Centriste et le sénateur du groupe Reconquête, me paraît être un événement suffisamment important dans cet hémicycle pour être souligné.
Il me paraît justifié que l’on interpelle l’ensemble des sénateurs du groupe Union Centriste pour leur demander si cet amendement les engage tous, comment ils vivent son existence et quel est l’avenir de leur groupe. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST. – Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. L’amendement n° 7 rectifié bis, présenté par Mme Devésa, M. Mizzon, Mme Guidez et MM. Canévet et Ravier, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Supprimer les mots
de manière à garantir à chaque enfant ou adolescent en souffrance psychique d’être soigné au sein de son lieu de vie ou de son lieu de soins
La parole est à Mme Brigitte Devésa.
Mme Brigitte Devésa. Il s’agit d’un amendement de simplification rédactionnelle.
Par définition, un réseau territorial permettra à chaque mineur d’accéder à l’accompagnement nécessaire à proximité immédiate de son lieu de vie.
Par ailleurs, en supprimant la référence au « lieu de vie » ou au « lieu de soins », le législateur ouvre d’autres possibilités, qui pourraient, dans certains cas, être plus opportunes pour les jeunes.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Je comprends, madame Devésa, l’objectif de simplification visé par les auteurs de l’amendement en supprimant la mention explicite de l’objectif de soins pédopsychiatriques de proximité.
Toutefois, j’estime nécessaire de préciser que le réseau de structures territoriales doit, dans sa mise en œuvre, permettre à chacun de recevoir des soins au sein de son lieu de vie.
Cela n’empêche évidemment pas une prise en charge dans d’autres structures plus éloignées, par la suite, si la situation le nécessite.
La commission sollicite donc le retrait de l’amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
Mme Brigitte Devésa. Je retire l’amendement, monsieur le président !
M. le président. L’amendement n° 7 rectifié bis est retiré.
Je mets aux voix l’article 3, modifié.
(L’article 3 est adopté.)
Chapitre III
Dispositions finales
(Division nouvelle)
Article 4 (nouveau)
La présente loi fait l’objet d’un nouvel examen par le Parlement dans un délai maximal de cinq ans à compter de sa promulgation – (Adopté.)
Vote sur l’ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à M. Ian Brossat, pour explication de vote.
M. Ian Brossat. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, en écoutant nos débats, je repensais à un échange sur le pacte civil de solidarité (Pacs) entre Christine Boutin et Muguette Jacquaint, qui était à l’époque députée de la Seine-Saint-Denis. Alors que Christine Boutin s’étendait longuement sur les souffrances, disait-elle, des personnes homosexuelles, Muguette Jacquaint lui répondit en substance : « C’est à cause de vous qu’elles souffrent. »
Au fond, ce texte, je le pense profondément, ne réglera rien. Au contraire, il aggravera les difficultés et les fragilités des personnes trans mineures. C’est donc un mauvais texte, raison pour laquelle notre groupe votera contre.
J’ajouterai que, malgré tout, je suis optimiste sur l’évolution des choses. Il y a trente ou quarante ans, il y avait des oppositions à la dépénalisation de l’homosexualité. Pourtant, cela s’est fait ! Il y a eu des oppositions à la dépsychiatrisation de l’homosexualité, et cela s’est fait ! Il y a eu des oppositions violentes et agressives au Pacs, et cela s’est fait ! Il y a eu des oppositions au mariage pour tous, et cela s’est fait.
Je suis donc convaincu que le jour viendra où les personnes trans seront traitées avec une égale dignité. Ce texte n’y contribue pas, mais ce temps viendra, et je souhaite qu’il vienne vite. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE-K, SER et GEST, ainsi que sur des travées du groupe RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme Silvana Silvani, pour explication de vote.
Mme Silvana Silvani. Pour ma part, je reviendrai sur les doutes qui ont été exprimés précédemment par certaines personnes, ce qui est tout à leur honneur.
Oui, il existe des doutes sur ce sujet. On a utilisé et manipulé des données scientifiques qui ne sont pas stabilisées – nous l’avons bien vu. Nous sommes capables, les uns et les autres, d’avancer avec la même certitude des arguments et leur contraire.
On nous dit que l’article 3 de ce texte n’a rien à voir avec les articles 1er et 2, qu’il serait un peu indépendant. Soit !
Enfin, l’article 4 prévoit qu’il faudra très probablement revenir sur la présente proposition de loi, les connaissances sur ces sujets étant susceptibles d’évoluer.
Ce texte est donc un peu brouillon.
Vous disiez, monsieur Retailleau, que vous au moins aviez eu le courage d’ouvrir le débat. Soit. Mais ouvrir le débat, ce n’est pas voter une proposition de loi ! C’est très bien de commencer à cerner le sujet ; pour autant, nous ne sommes manifestement pas prêts à prendre une décision sur cette question. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K.)
Nous maintenons, bien évidemment, notre opposition à ce texte.
M. le président. La parole à M. Rémi Féraud, pour explication de vote.
M. Rémi Féraud. À l’issue de ce débat, les positions sont plus claires… Deux types d’arguments, qui ne sont pas compatibles, ont été invoqués en défense de cette proposition de loi.
J’ai ainsi entendu dire, d’un côté, qu’il n’y avait pas de certitude en la matière ; or, en pareil cas, on ne se précipite pas pour légiférer en vue d’interdire des actes ! Il a également été dit, de l’autre côté, qu’il y avait des doutes : il faudrait donc, dans ce cas également, laisser du temps au temps… En réalité, il ne s’agit pas de véritables arguments.
Cette proposition de loi traduit une vision extrêmement idéologique, fondée sur beaucoup d’ignorance, de préjugés et, malheureusement, d’intolérance. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.) Les arguments sont les mêmes que ceux qui avaient été invoqués contre le pacte civil de solidarité et, il y a onze ans, contre le mariage pour tous ! Il s’agit ici d’interdire et de rejeter ce que l’on ne comprend pas, ce que l’on n’accepte pas.
Mais on n’interdira pas les personnes trans, les mineurs trans ! (Mêmes mouvements.)
Mme Jacqueline Eustache-Brinio. Ce n’est pas le sujet !
M. Rémi Féraud. Avec ce texte, on leur rendra seulement la vie plus difficile, ce qui est irresponsable. Interdire ce qui existe est absolument illusoire !
Disons-le clairement, le problème, c’est non pas l’accompagnement des mineurs trans, mais la transphobie ! (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Je ne veux pas dire par là qu’il y aurait un camp du bien et un camp du mal ; je suis, en général, assez modéré. Pour autant, cette proposition de loi contribuera non pas à protéger les mineurs, non pas à garantir le principe de précaution, comme cela a été dit, mais à alimenter une transphobie, qui est déjà extrêmement forte dans notre société.
Je ne retiendrai qu’un point positif du débat sur cette proposition de loi, dont je déplorerai, comme – je pense – toute la gauche, l’adoption : la position du Gouvernement, que je salue, et qui, après un moment de flottement, a été très claire. J’espère que son refus de laisser ce texte prospérer sera durable. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.)
M. le président. La parole est à Mme Mathilde Ollivier, pour explication de vote.
Mme Mathilde Ollivier. Mme Devésa nous a dit que les jeunes trans devaient attendre…
Attendre, alors que le taux de passage à l’acte chez ces jeunes est de 30 % à 50 % ? Attendre, alors que les bloqueurs de puberté permettent une diminution de 40 % du risque de dépression et de tentative de suicide chez les jeunes ?
Vous nous parlez de l’intérêt de l’enfant. Là encore, les scientifiques sont unanimes : l’impossibilité pour les mineurs d’accéder à ces soins risque de porter gravement atteinte à leur santé.
Vous nous avez dit, monsieur Retailleau, que ce texte n’était pas dogmatique. J’ose espérer qu’outre votre propre rapport, lequel est biaisé, vous avez lu celui de la Défenseure des droits, dont sont issus les chiffres que j’ai cités !
Ce soir, je me désole des dérives réactionnaires de la droite républicaine et d’une partie de l’Union Centriste,…
M. Stéphane Ravier. Et voilà les insultes !
Mme Mathilde Ollivier. … qui cosignent des amendements et tiennent des conciliabules avec l’extrême droite de cet hémicycle, qu’ils applaudissent. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Joshua Hochart, pour explication de vote.
M. Joshua Hochart. Comme vous pouvez vous en douter, nous voterons cette proposition de loi.
Les personnes transsexuelles ou souffrant de dysphorie de genre doivent être écoutées, entendues, soutenues moralement et aimées. Mais le sujet aujourd’hui n’est pas réellement celui-là.
Tout d’abord, nous soutenons ce texte parce qu’il va dans le même sens que celui que portent notre collègue Joëlle Mélin et le groupe Rassemblement national de l’Assemblée nationale. (Vives exclamations sur les travées des groupes RDPI et SER.)
M. Xavier Iacovelli. Eh oui !
M. Hussein Bourgi. Nous y voilà !
M. Joshua Hochart. Ensuite, sur le fond, il nous faut évidemment préciser qu’une transition définitive et irréversible est le choix d’une vie. Beaucoup d’enfants et d’adolescents peuvent traverser des phases de doute et d’incertitude et penser, parfois à tort, que la transition est la clé.
Il convient de ne pas omettre les pesanteurs politiques et idéologiques qui orientent quelquefois les choix, même au sein du cercle familial. Il faut mettre en place un accompagnement et un soutien psychologique et social qui permettront au jeune, lorsqu’il atteindra la majorité, de faire un choix de manière libre et éclairée, un choix libéré de toutes contraintes.
J’entends, à gauche de cet hémicycle, mes collègues s’insurger contre cette proposition de loi, arguant qu’elle représenterait une réelle menace pour les personnes trans et, plus largement, pour les personnes homosexuelles. Ils se cachent volontairement les yeux, en oubliant que la véritable menace pour les personnes trans et homosexuelles dans ce pays, c’est l’immigration massive et la montée de l’islam radical. (Protestations sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.) Oui, je sais, mes chers collègues, que vous souffrez en m’écoutant parler ! L’islam radical fait bien peu de cas de la liberté de conscience, de la liberté sexuelle et de la liberté tout court ! (Mêmes mouvements.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Do Aeschlimann, pour explication de vote.
Mme Marie-Do Aeschlimann. Mes chers collègues, nous devrions nous réjouir d’avoir eu ce débat sur ce sujet grave et important. Je tiens, au nom du groupe Les Républicains, à remercier notre collègue Jacqueline Eustache-Brinio d’avoir réalisé ce travail de recherche et de documentation pour étayer une position qui est équilibrée, et d’avoir réussi, avec le concours de notre rapporteur Alain Milon, à faire progresser cette proposition de loi pour lui donner une dimension et un sens qui permettent d’affirmer deux points.
Tout d’abord, et cela a été rappelé à plusieurs reprises par les orateurs, ce texte ne constitue en aucun cas une prise de position contre les personnes transgenres, ou celles dont les orientations, notamment sexuelles, sont différentes. Nous respectons profondément toutes celles et tous ceux dont les vues, les habitudes et les orientations sont différentes !
La finalité de ce texte est bien de protéger les enfants. Il s’agit d’éviter que des mineurs ne prennent des décisions irréversibles en recourant aux bloqueurs de puberté et à la chirurgie de réassignation sexuelle, ce qui pourrait les empêcher de changer d’avis lorsqu’ils auront atteint l’âge de la majorité.
Il est vrai que ces sujets sont compliqués et graves. Mais pour notre part, nous avons pris nos responsabilités. Je pense que nous nous rendrons compte, plus tard, qu’il fallait discuter de ce texte pour poser les problèmes tranquillement, calmement et avec responsabilité. Le groupe Les Républicains votera ce texte avec sérieux et détermination ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)