M. Bernard Buis. Il s’agit ici de respecter une sorte de parallélisme des formes, en facilitant la transformation des logements en bureaux. Cela peut paraître paradoxal au vu de l’objet de ce texte, mais c’est parfois un besoin, certaines communes rurales manquant de bureaux.
M. le président. L’amendement n° 23, présenté par M. Buis, est ainsi libellé :
Après l’article 6
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le premier alinéa du I de l’article 9 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Un copropriétaire peut modifier la destination de ses parties privatives à usage d’habitation en bureau ou en commerce. Par dérogation au premier alinéa du présent I, lorsque cette modification contrevient à la destination de l’immeuble, elle est soumise à l’approbation de l’assemblée générale statuant à la majorité prévue à l’article 24. »
La parole est à M. Bernard Buis.
M. Bernard Buis. Il s’agit d’un amendement de repli par rapport au précédent.
Cependant, ces deux amendements en discussion commune ne visent pas vraiment la même cible que le reste de la proposition de loi… Aussi, je les retire, monsieur le président.
M. le président. Les amendements nos 22 et 23 sont retirés.
L’amendement n° 21, présenté par M. Buis, est ainsi libellé :
Après l’article 6
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le premier alinéa du I de l’article 9 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Un copropriétaire peut modifier la destination de ses parties privatives à usage d’habitation en bureau ou local professionnel. Par dérogation au premier alinéa du présent I, lorsque cette modification contrevient à la destination de l’immeuble, elle est soumise à l’approbation de l’assemblée générale statuant à la majorité prévue à l’article 24.
« À peine de nullité de l’approbation de l’assemblée générale, le bénéfice de cette dérogation est conditionné à l’occupation des bureaux ou des locaux professionnels ainsi créés pour une durée d’au moins trois ans à compter de la livraison des travaux permettant le changement de destination des locaux concernés. »
La parole est à M. Bernard Buis.
M. Bernard Buis. Je le retire également, pour les mêmes raisons, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 21 est retiré.
Article 7
(Non modifié)
La loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 précitée est ainsi modifiée :
1° Le II de l’article 24 est complété par un l ainsi rédigé :
« l) La modification de la répartition des charges mentionnées au premier alinéa de l’article 10 rendue nécessaire par un changement de la destination d’une ou de plusieurs parties privatives dans les cas prévus au deuxième alinéa du I de l’article 9. » ;
2° Le e de l’article 25 est complété par les mots : « , à l’exception du changement de la destination d’une ou de plusieurs parties privatives mentionné au l du II de l’article 24 » – (Adopté.)
6
Mise au point au sujet de votes
M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Brault.
M. Jean-Luc Brault. Monsieur le président, lors des scrutins nos 195 et 196, les membres du groupe Les Indépendants ont été considérés comme ayant voté pour, alors qu’ils souhaitaient voter contre.
M. le président. Acte est donné de cette mise au point, mon cher collègue.
Elle figurera dans l’analyse politique des scrutins concernés.
7
Transformation des bureaux en logements
Suite de la discussion en procédure accélérée et adoption d’une proposition de loi dans le texte de la commission modifié
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi visant à faciliter la transformation des bureaux en logements.
Nous en avons terminé avec l’examen des articles.
Vote sur l’ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à M. Christian Redon-Sarrazy, pour explication de vote.
M. Christian Redon-Sarrazy. Comme nous l’avons indiqué lors de la discussion générale hier soir, nous allons voter pour cette proposition de loi, mais nous le ferons avec le sentiment que nous ne sommes pas à la hauteur des réponses que le sujet du logement mérite.
Certes, vous avez rappelé, monsieur le ministre, les mesures prises depuis 2017 en ce domaine. Mais que pèsent-elles face à la chute des mises en chantier et aux saignées subies par le logement social ? Vous affirmez être mobilisé pour le logement social, mais, en même temps, vous nous avez demandé de rejeter un amendement qui ne visait qu’à rappeler ce qui figure déjà dans la loi, à savoir les fameux 30 %, ce qui aurait pu contribuer à améliorer la situation dans les communes carencées.
Le texte que nous allons voter ouvre bien quelques perspectives, mais, nous le savons, elles seront insuffisantes. Au demeurant, nous demandons à voir si elles se concrétiseront.
L’éligibilité élargie aux bâtiments qui ne sont pas uniquement au départ des habitations est à saluer, mais, nous l’avons rappelé, il faudra davantage que des mesures d’accompagnement, en particulier pour les collectivités qui auront la maîtrise d’ouvrage de ces chantiers.
En ce qui concerne l’ingénierie, nous espérons, comme nous l’avons voté, que l’ANCT sera à leur côté, mais vous connaissez comme nous la situation budgétaire de nos collectivités en 2024 et ce qu’elles entrevoient pour 2025.
Quoi que l’on puisse dire, les aménagements attendus ou nécessaires pour des logements ne sont pas tout à fait les mêmes que ceux qui sont exigés pour des bureaux ou des locaux commerciaux. Réseaux, transports, écoles, petite enfance, services : dans bien des cas, il y aura de nombreux besoins nouveaux. Et ce n’est pas la taxe d’habitation, supprimée par votre majorité, qui viendra couvrir ces besoins, non plus que la taxe d’aménagement, puisque vous venez de confirmer son exonération partielle, alors que ses recettes auraient été les bienvenues pour les départements.
Nous poursuivrons au mois de juin prochain nos travaux sur le logement avec l’examen du projet de loi relatif au développement de l’offre de logements abordables. Sachez d’ores et déjà que nous resterons vigilants et fidèles à nos engagements.
M. le président. La parole est à Mme Antoinette Guhl, pour explication de vote.
Mme Antoinette Guhl. Le groupe écologiste votera ce texte, même si nous considérons qu’il est insuffisant. Vous l’avez compris, nous voulions subordonner l’autorisation de transformation des bureaux à la réalisation d’une partie de logements sociaux, ou en tout cas à l’accueil de publics prioritaires. Tel ne sera pas le cas.
Ce texte ne répond pas non plus, comme je l’ai souligné à plusieurs reprises, aux besoins du monde étudiant.
Pour ces raisons, nous sommes effectivement déçus du résultat, même si nous considérons que cette faculté de transformation de bureaux en logements est positive, en particulier bien sûr pour les grandes villes, qui pourront utilement recourir à ce dispositif. Nous allons dans la bonne direction, mais à petits pas.
M. le président. La parole est à Mme Sophie Primas, pour explication de vote.
Mme Sophie Primas. Pour le groupe Les Républicains, il n’y a pas d’hésitation : nous allons évidemment voter cette proposition de loi. Tout ce qui va dans le sens de la relance du logement est bon à prendre en ce moment.
Monsieur le ministre, nous vous donnons rendez-vous pour les prochaines étapes.
Je veux saluer le travail des deux rapporteurs et les remercier de leur investissement, et cela dans des délais très courts. Je ne parlerai ni de puzzle ni de marguerite (Sourires.), monsieur le ministre, mais, j’y insiste, nous avons besoin de travailler avec vous sur une vision plus globale pour le logement. Il faut notamment nous pencher sur les entrées de ville, sur ce que vous appelez « la France moche ». Je pense qu’il y a là un potentiel au moins équivalent à celui de la transformation des bureaux. C’est pour nous un enjeu prioritaire.
Nous voterons donc cette proposition de loi des deux mains.
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente de la commission des affaires économiques. Après avoir voté hier soir, tard, la proposition de loi sur la régulation des meublés de tourisme, nous nous apprêtons à voter cette proposition de loi sur la transformation des bureaux en logements. Mais les bureaux ne sont pas les seuls concernés ; à cet égard, je salue l’initiative prise par Mme la rapporteure pour élargir le champ d’application de cette proposition de loi aux bâtiments d’enseignement, aux garages et aux hôtels, car c’était absolument nécessaire.
Ce texte permettra la création de quelques dizaines de milliers de logements. On peut s’interroger sur les délais, dans la mesure où ces transformations seront relativement longues, même si des amendements adoptés sur l’initiative de Mme la rapporteure ont pour objet d’accélérer les procédures, tout en faisant en sorte que les maires ne soient pas dépossédés de leurs prérogatives. Nous avons été extrêmement vigilants sur ce dernier point.
À mon tour, je remercie Mme la rapporteure de la commission des affaires économiques du travail qu’elle a réalisé avec les équipes du Sénat, en complémentarité et en lien très étroit avec le rapporteur de la commission des finances, Stéphane Sautarel, qui a lui aussi apporté sa contribution et sa touche personnelle.
En effet, comme hier, nous avons eu besoin d’aborder des questions de fiscalité. Même si ce n’est pas habituel en dehors des textes budgétaires, c’était nécessaire, car, nous le savons, la fiscalité risquait de freiner ces opérations de transformation de bureaux en logements. Aussi, je remercie Stéphane Sautarel d’avoir travaillé sur une fiscalité plus incitative, afin de mieux prendre en compte l’équilibre financier de ces opérations, qui sont encore assez onéreuses, afin d’arriver à un prix de vente compris entre 5 000 et 6 000 euros du mètre carré.
Comme l’a rappelé Sophie Primas, nous nous retrouverons dans quelques semaines, monsieur le ministre, pour débattre non pas d’une grande loi sur le logement, mais d’une loi sur le logement abordable.
Soyez assuré que le Sénat, en particulier sa commission des affaires économiques, par l’intermédiaire des deux rapporteurs qu’elle a désignés, Sophie Primas et Amel Gacquerre, prendra toute sa part pour enrichir le texte initial ; nous serons en mesure d’apporter davantage de réponses aux attentes qui sont exprimées par nos concitoyens en matière de logement abordable, mais également de logement tout court. En effet, je le rappelle, nous avons besoin non seulement d’un choc de l’offre, mais également d’une relance de la demande.
En tout cas, monsieur le ministre, nous serons au rendez-vous !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?…
Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l’ensemble de la proposition de loi, dont la commission a ainsi rédigé l’intitulé : proposition de loi visant à faciliter la transformation des bâtiments de destination autre qu’habitation en habitations.
(La proposition de loi est adoptée.) – (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé du logement. Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie de ce vote large sur ce bel outil, qui va permettre d’accélérer la conversion de bâtiments en logements.
Je veux surtout saluer le travail des rapporteurs, qui ont véritablement enrichi le texte : d’une part, en élargissant le dispositif à d’autres bâtiments que les bureaux, ce qui va nous permettre de disposer d’encore plus de bâtiments et de surfaces déjà artificialisées pour créer des logements, tout en respectant nos objectifs de sobriété foncière ; d’autre part, en faisant preuve de modération sur la question fiscale. Vous avez ainsi été sensibles aux enjeux économiques pour les promoteurs qui s’engagent dans des opérations de transformation de bureaux en logements.
Je me réjouis de tous les apports du Sénat et je ne doute pas que nous réussirons à convoquer rapidement une commission mixte paritaire sur ce texte.
J’ai par ailleurs la certitude que le même esprit de coconstruction prévaudra lors de l’examen, dans quelques semaines, du projet de loi sur le développement de l’offre de logements abordables.
En tout cas, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie encore de ce vote. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)
M. le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-huit heures dix, est reprise à dix-huit heures quinze.)
M. le président. La séance est reprise.
8
Accord avec l’Allemagne sur l’apprentissage transfrontalier
Adoption en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République fédérale d’Allemagne relatif à l’apprentissage transfrontalier (projet n° 426, texte de la commission n° 600, rapport n° 599).
La procédure accélérée a été engagée sur ce texte.
Discussion générale
M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères, chargé de l’Europe. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, je me réjouis d’être aujourd’hui devant vous pour présenter le projet de loi autorisant l’approbation de l’accord relatif à l’apprentissage transfrontalier, signé le 21 juillet 2023 en Alsace, à Lauterbourg, par les ministres française et allemande des affaires étrangères.
La coopération transfrontalière nous est, à toutes et tous ici, particulièrement chère. Nombreux sont nos concitoyens à vivre à proximité d’une frontière, voire à travailler de l’autre côté de celle-ci. Ils éprouvent au quotidien tant les avantages que les complexités administratives induites par cette proximité.
Notre rôle est de continuer à faire de la frontière franco-allemande un espace dynamique d’échanges mutuels, qui soit non pas un obstacle, mais toujours une passerelle entre nos deux pays.
Cette ambition est tout d’abord la marque d’une relation bilatérale forte, celle que nous entretenons avec l’Allemagne et que mettra encore à l’honneur la visite d’État du Président de la République outre-Rhin à la fin de cette semaine. Elle est ensuite la preuve d’une Europe au service de ses habitants, qui continue, près de vingt ans après la création de l’espace Schengen, à faciliter la mobilité des Européens. Elle est, enfin, le signe tangible que l’engagement du Parlement en faveur de nos territoires portera ses fruits.
Tout d’abord, cette ambition est la marque d’une relation bilatérale forte : en concluant le traité d’Aix-la-Chapelle, en 2019, nous avons acté la volonté d’avancer conjointement avec l’Allemagne face aux défis qui sont les nôtres, sur le continent et dans le monde.
Dans ce traité, nous avions affirmé notre souhait de soutenir la formation et l’enseignement professionnels. Nous avions également instauré, pour endosser des missions de cette nature, le Comité de coopération transfrontalière, le CCT. En réunissant l’ensemble des acteurs du transfrontalier en une même organisation, ce comité a relayé remarquablement le souhait des acteurs, notamment locaux, de conclure cet accord sur l’apprentissage.
Ensuite, cette ambition est la preuve d’une Europe au service de ses habitants : dans son discours de la Sorbonne du 25 avril dernier, le Président de la République a appelé de ses vœux la mise en œuvre d’un Erasmus de l’apprentissage et de la formation professionnelle.
Au moins 15 % des apprentis doivent, d’ici à 2030, bénéficier d’une mobilité européenne. L’accord qui vous est soumis aujourd’hui, mesdames, messieurs les sénateurs, s’inscrit pleinement dans cet objectif. Je vous demande donc, au nom du Gouvernement, de l’approuver pour envoyer un message clair : c’est dans l’Europe que notre jeunesse se renforce et se perfectionne. C’est l’un des jalons qui nous permettra de construire la souveraineté pour l’avenir de notre Europe.
Enfin, cette ambition est le signe d’un engagement du Parlement en faveur de nos territoires : le Sénat a eu l’occasion de se prononcer pour la loi relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et la simplification, voilà deux ans, dite loi 3DS. C’est précisément cette loi qui a prévu qu’une convention internationale puisse préciser les modalités de mise en œuvre de l’apprentissage transfrontalier, afin de donner les moyens aux collectivités, notamment aux régions, de poursuivre et développer les dispositifs d’apprentissage transfrontalier.
Avec ce nouvel accord, nous permettrons aux apprentis issus de l’ensemble du territoire métropolitain de réaliser une partie de leur formation, pratique ou théorique, dans l’un des trois Länder frontaliers, à savoir le Bade-Wurtemberg, la Rhénanie-Palatinat ou la Sarre. Il en ira de même, réciproquement, pour les apprentis issus de ces Länder. Toutes les certifications qui sont éligibles à l’apprentissage en France le seront également à l’apprentissage transfrontalier ; tous les diplômes professionnels allemands pouvant être obtenus par apprentissage seront concernés.
Mesdames, messieurs les sénateurs, cet accord est une démonstration de l’Europe en action. Il montre que les engagements pris au plus haut niveau de l’État peuvent se traduire par des actions concrètes, qui touchent directement la vie des citoyens. En approuvant ce projet de loi, vous ne soutenez pas seulement un accord bilatéral ; vous affirmez votre confiance dans une Europe qui éduque, qui intègre et qui construit l’avenir de sa jeunesse.
Mesdames, messieurs les sénateurs, nous pouvons nous féliciter d’être parvenus à signer l’accord de Lauterbourg, qui répond à un besoin sincère exprimé par les acteurs locaux de part et d’autre de la frontière. Alors que l’Allemagne s’apprête également à le ratifier, je vous invite à le soutenir et, ainsi, à ajouter une pierre supplémentaire au bel édifice qu’est l’amitié franco-allemande. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées du groupe UC. – Mme Elsa Schalck applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Akli Mellouli, rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui le projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République fédérale d’Allemagne relatif à l’apprentissage transfrontalier.
Cet accord est le premier à s’inscrire dans le cadre légal posé par la loi 3DS, qui a introduit de nouvelles dispositions dans le code du travail relatives au développement de l’apprentissage transfrontalier.
Que cet accord ait été conclu avec l’Allemagne n’est pas dû au hasard : la politique de coopération entre la France et ce pays est l’une des plus abouties au sein de l’Union européenne. Elle s’est construite progressivement, du traité de l’Élysée de 1963 au traité d’Aix-la-Chapelle de janvier 2019.
La région Grand Est a mis en place un dispositif d’apprentissage transfrontalier avec certains territoires frontaliers allemands dès 2010. Tout d’abord mis en œuvre sur la base d’une expérimentation, le dispositif a été formalisé par deux accords-cadres : l’accord-cadre relatif à l’apprentissage transfrontalier dans le Rhin supérieur du 12 septembre 2013, puis celui pour la coopération transfrontalière en formation professionnelle et continue Sarre-Lorraine du 20 juin 2014.
Cependant, la loi du 5 septembre 2018 sur la réforme de la formation professionnelle a retiré aux régions françaises la compétence d’organisation et de financement principal des formations par apprentissage à compter du 1er janvier 2020. Les accords-cadres ont donc pris fin, même si une solution transitoire a été trouvée pour ne pas rompre cette expérience, qui a bénéficié à près de 500 jeunes, essentiellement français.
Les élus locaux se sont mobilisés pour qu’une solution pérenne soit trouvée et pour que les apprentissages transfrontaliers puissent continuer à se développer.
Le Comité franco-allemand de coopération transfrontalière, institué par le traité d’Aix-la-Chapelle de 2019, a relayé dans un avis du 31 mai 2021 cette volonté politique des deux bords du Rhin.
C’est par le vecteur de la loi 3DS que de nouvelles dispositions relatives au développement de l’apprentissage transfrontalier ont été introduites dans le code du travail.
Il faut saluer le rôle de Mme Brigitte Klinkert, ministre déléguée chargée de l’insertion lors de l’examen du projet de loi et ancienne présidente du conseil départemental du Haut-Rhin, et celui de M. Sylvain Waserman, député. Tous deux sont à l’origine de l’introduction de ces dispositions dans cette loi, qui prévoit la conclusion d’une convention entre la France et le pays frontalier dans lequel est réalisée la partie pratique ou la partie théorique de la formation par apprentissage.
Tel est l’objet du présent accord, qui s’inspire largement des précédents accords-cadres de 2013 et 2014, lesquels donnaient satisfaction aux deux parties.
Les principales différences concernent l’aire géographique, puisque, dorénavant, en application du principe d’égalité, tout le territoire métropolitain est concerné par le dispositif. En revanche, côté allemand, seuls les Länder frontaliers – Bade-Wurtemberg, Rhénanie-Palatinat et Sarre –, sont concernés, même si une clause d’extension à d’autres Länder est prévue.
Le financement sera assuré conformément aux dispositions en vigueur dans chaque pays.
L’accord ne prévoit pas de mécanisme de compensation, car il ne modifie pas les équilibres relatifs au financement de l’apprentissage, notamment en raison des volumes estimés. Toutefois, trois ans après l’entrée en vigueur de l’accord, une nouvelle négociation des règles de financement pourra être engagée.
En France, c’est l’opérateur de compétences des entreprises de proximité, Opco EP, désigné pour gérer l’ensemble des contrats d’apprentissage transfrontalier, qui sera l’organisme de financement. Un comité de suivi associant les représentants des Länder concernés et les organismes régionaux et consultatifs se réunira annuellement et pourra émettre de propositions d’amélioration, si nécessaire.
Globalement, le présent accord est plus favorable à l’apprentissage transfrontalier. Plusieurs facteurs devraient conduire à un nombre de bénéficiaires plus élevé que par le passé.
Tout d’abord, il sécurise juridiquement le dispositif. Ensuite, la réforme de 2018 a permis la progression du nombre d’apprentis et a porté l’âge d’entrée limite à 29 ans révolus. Enfin, la loi 3DS a étendu à toute la métropole le champ d’application de l’apprentissage transfrontalier avec les localités allemandes concernées.
Selon un rapport de l’inspection générale des affaires sociales (Igas), près de 300 contrats d’apprentissage transfrontalier pourraient, à terme, être conclus chaque année sur les deux rives du Rhin. Et si cet accord est le premier dans ce domaine, d’autres devraient suivre, en particulier avec la Belgique, le Luxembourg, la Suisse ou encore l’Italie.
Lors de la présentation de mon rapport en commission, la semaine dernière, certains de mes collègues élus de territoires transfrontaliers se sont exprimés sur l’utilité de développer de telles coopérations pour le bien de notre jeunesse et de leur employabilité.
Le Sénat de la République française est la première chambre saisie de cet accord. L’Assemblée nationale et le Bundestag devraient se prononcer avant l’automne prochain. Le dispositif entrera donc rapidement en vigueur. Il est conclu pour une période de trois ans, renouvelable par tacite reconduction pour trois ans supplémentaires.
La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées préconise l’approbation de cet accord, dont l’objet est de donner une base juridique légale à l’apprentissage transfrontalier franco-allemand. Celui-ci a déjà fait ses preuves et il s’en trouvera conforté.
De plus, cet accord répond aux enjeux de la formation professionnelle, ainsi que de l’insertion des jeunes, et participe à la construction de l’espace européen de l’éducation. Je vous invite donc à voter ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – Mme Laure Darcos applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin.
Mme Vanina Paoli-Gagin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la France et l’Allemagne sont unies par une histoire riche et complexe. Aujourd’hui, nos deux pays partagent une relation d’amitié privilégiée, qui s’incarne au quotidien dans les territoires transfrontaliers.
La proximité géographique invite à la coopération. Les partenariats noués au fil du temps, dans les domaines économique, culturel ou encore social, renforcent aussi, jour après jour, les liens qui nous unissent.
Les zones de frontière sont des espaces très spécifiques où se mêlent les cultures et les approches de pays différents. Ce sont des territoires d’échanges très riches de biens, de services et de main-d’œuvre. Cela pose évidemment des questions d’ordre juridique et administratif : c’est le défi de l’harmonisation des réglementations. Nous devons y apporter des réponses concrètes pour fluidifier et faciliter ces coopérations.
Nous examinons à ce titre le projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République fédérale d’Allemagne relatif à l’apprentissage transfrontalier.
L’apprentissage est un formidable outil de formation pour favoriser l’employabilité des jeunes. L’immersion leur permet d’intégrer les savoirs, mais aussi les savoir-être et les savoir-faire qui sont nécessaires à l’épanouissement en milieu professionnel. C’est un moyen de faciliter l’insertion dans le marché de l’emploi de nos apprentis franco-allemands, qui bénéficient ainsi d’une première expérience de travail très riche.
En encourageant le développement des apprentissages entre nos deux pays, nous soutenons une passerelle supplémentaire vers la mobilité internationale au cours du parcours étudiant.
Le cadre juridique de cette coopération permettra aux Français et aux Allemands vivant de part et d’autre de la frontière de continuer à bâtir des relations durables. Je pense notamment aux établissements de formation, ainsi qu’aux entreprises, allemandes ou françaises, qui innovent ensemble, dégagent de la valeur ajoutée et créent des emplois ; elles sont les instruments de notre souveraineté industrielle européenne.
En facilitant l’apprentissage transfrontalier, toutes les parties prenantes sont dans une perspective « gagnant-gagnant ». La conclusion de cet accord, cela a été rappelé, s’inscrit au cœur des objectifs de la politique européenne en matière de formation. Nous pouvons nous féliciter de le soutenir, tant il représente une étape attendue par nos deux pays, tout particulièrement par notre jeunesse.
Mes chers collègues, vous l’aurez compris, les membres du groupe Les Indépendants – République et Territoires voteront en faveur de ce texte, tout en saluant le travail de son rapporteur.
Les relations transfrontalières contribuent à l’édification d’un modèle de partenariat fructueux, mais elles participent aussi de la puissance de notre espace économique européen. Elles accroissent aussi le sentiment d’appartenance à une communauté européenne unie, un sentiment particulièrement important dans le contexte actuel.
Nous espérons que cet accord aidera à renforcer, dans les années à venir, nos liens d’amitié avec l’Allemagne, si nécessaires dans le contexte géopolitique que nous connaissons. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE, ainsi qu’au banc des commissions.)