M. le président. La parole est à Mme Amel Gacquerre, auteure de la question n° 844, adressée à M. le ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion.
Mme Amel Gacquerre. C’est aujourd’hui acté : l’expérimentation « territoires zéro chômeur de longue durée » se poursuivra – presque – normalement en 2024.
Il s’agit d’une nouvelle rassurante après quelques annonces déstabilisantes pour ce dispositif qui a fait ses preuves.
Aujourd’hui, 58 territoires sont habilités et enregistrent des résultats probants, des personnes éloignées de l’emploi qui sont au chômage en moyenne depuis cinq ans étant embauchées en contrat à durée indéterminée dans des entreprises de l’économie sociale et solidaire. À ce jour, plus de 60 entreprises y emploient près de 2 200 personnes.
Créé en 2016, ce dispositif bénéficiait d’un réel soutien de l’État.
Or un premier coup a été asséné à cette expérimentation avec la réduction de la participation de l’État au financement de l’emploi des salariés embauchés, qui est passée le 1er octobre 2023 de 102 % à 95 % du Smic brut.
A été parallèlement annoncé en conseil des ministres, le 27 septembre 2023, un financement de l’État de 69 millions d’euros, montant insuffisant inscrit dans le projet de loi de finances pour 2024. Une telle dotation aurait eu pour conséquences l’arrêt net des embauches au sein des 58 territoires habilités et la remise en question de l’entrée de nouveaux territoires dans le dispositif.
Je salue le recul du Gouvernement, qui s’est engagé sur des crédits de 80 millions d’euros en faveur du dispositif – il est à souligner néanmoins que les acteurs du champ de l’insertion estimaient le besoin à 89 millions d’euros.
Compte tenu de l’enjeu en matière d’accès à l’emploi des publics les plus fragiles, sachant par ailleurs que l’évaluation du dispositif est prévue en 2026 et qu’il est donc nécessaire de permettre à cette expérimentation de se développer dans de bonnes conditions, j’ai deux questions à poser à Mme la ministre.
Premièrement, pouvez-vous vous engager dès maintenant à rouvrir la discussion courant 2024 si le budget prévu de 80 millions d’euros s’avère insuffisant ? Cette question se pose d’autant plus que de nouveaux territoires entreront dans le dispositif.
Deuxièmement, l’évaluation du dispositif en 2026 vise à décider de sa pérennisation. Pouvez-vous, jusqu’à cette échéance, garantir une visibilité aux territoires habilités via un engagement pérenne et stable de l’État ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Fadila Khattabi, ministre déléguée auprès de la ministre des solidarités et des familles, chargée des personnes handicapées. Madame la sénatrice Gacquerre, vous interrogez le Gouvernement sur le soutien à l’expérimentation « territoires zéro chômeur de longue durée » ; ce soutien est constant et les moyens que nous y consacrons sont encore renforcés en 2024.
Le Gouvernement a soutenu en 2020 la prolongation de cette expérimentation pour une durée de cinq ans - à l’époque, j’avais moi-même voté en faveur de cette mesure en tant que députée - afin d’habiliter 50 nouveaux territoires en plus des 10 territoires historiques. Ajoutons au tableau les 11 millions d’euros de crédits supplémentaires, enveloppe allouée après de nombreux échanges, actés lors de l’examen du PLF à l’Assemblée nationale.
Résultat : le budget de cette expérimentation est en nette augmentation en 2024. L’État lui consacrera près de 80 millions d’euros, soit une augmentation de plus de 35 millions d’euros, la plus forte hausse dans le budget du ministère du travail.
Ce montant semble suffisant pour assurer une montée en charge de l’expérimentation à la fois ambitieuse et cohérente avec le nombre d’habilitations envisagées en 2024. Il n’y a pas de diminution du soutien financier de l’État ni aucun recul en la matière : je tiens à vous rassurer, madame la sénatrice.
Par ailleurs, 2 nouveaux territoires ont été habilités par arrêté, ce qui porte le total à 60 territoires. L’objectif est d’atteindre les 85 territoires habilités d’ici à la fin de l’expérimentation.
L’évaluation du dispositif est en cours, vous le savez. Le comité scientifique constitué début juin a démarré ses travaux. Attendons son rapport définitif, qui nous éclairera sur l’utilité du dispositif « territoires zéro chômeur de longue durée » et sur la durabilité de son modèle économique.
subventions allouées au centre régional jeunesse et sports de petit-couronne
M. le président. La parole est à M. Didier Marie, auteur de la question n° 951, adressée à Mme la ministre des sports et des jeux Olympiques et Paralympiques.
M. Didier Marie. Le centre régional jeunesse et sports (CRJS) de Petit-Couronne, dans le département de la Seine-Maritime, fait face à une diminution de 28 000 euros des subventions annuelles qui lui sont accordées par la délégation régionale académique à la jeunesse, à l’engagement et aux sports (Drajes) pour l’année 2023 et ses responsables craignent la suppression totale desdites subventions pour l’année 2024.
Le centre régional jeunesse et sports de Petit-Couronne est une structure majeure dans le domaine du sport sur le territoire de la métropole de Rouen, puisqu’il accueille 150 sportifs chaque année dans sept disciplines olympiques.
Il est par ailleurs pleinement engagé dans la dynamique des jeux Olympiques de Paris 2024 : il a été sélectionné en tant que centre de préparation aux jeux Olympiques et Paralympiques de Paris dans sept disciplines sportives différentes : athlétisme olympique et paralympique, badminton olympique, basketball, basketball fauteuil, judo olympique, tennis de table olympique.
Il est en outre, depuis plusieurs années, terre d’accueil de la solidarité olympique et permet à des sportifs venus du monde entier de s’entraîner en vue de la préparation des jeux Olympiques.
Toutefois, madame la ministre, malgré la qualité du centre, consacrée par le label Grand Insep de l’Institut national du sport, de l’expertise et de la performance et le passage de grands champions tel que Teddy Riner, l’avenir de cette structure semble de plus en plus flou pour les dix-neuf personnes qui y travaillent.
L’Agence nationale du sport a annoncé une diminution, voire une suppression, des subventions allouées au CRJS de Petit-Couronne ; la concrétisation de cette annonce aura pour conséquence la dégradation des services du centre et la perte de son attractivité, ce qui affectera les fédérations sportives du département.
Ces décisions vont à rebours de la volonté affichée par le Gouvernement de faire du sport la grande cause nationale de 2024, année des jeux Olympiques en France. La mobilisation en faveur d’une telle cause devrait au contraire nous encourager à soutenir partout le sport pour toutes et pour tous.
Dans ce contexte, madame la ministre, pouvez-vous me rassurer, et rassurer les sportifs professionnels et amateurs qui fréquentent le CRJS de Petit-Couronne, quant au maintien pour l’année 2024 d’un niveau de subvention qui soit à la hauteur des besoins de la structure ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Fadila Khattabi, ministre déléguée auprès de la ministre des solidarités et des familles, chargée des personnes handicapées. Monsieur le sénateur Marie, malgré la restructuration du centre de ressources, d’expertise et de performance sportives (Creps) d’Houlgate, en 2008, l’État a poursuivi son soutien au développement de la haute performance en Normandie, via notamment la mise à disposition de cadres d’État - trois postes de direction sur les sites de Petit-Couronne, Le Havre et Caen - et une subvention annuelle moyenne de 70 000 euros.
La nouvelle organisation territoriale de l’État, qui s’est traduite en 2020 par la création des Drajes et par un transfert des missions, a conduit à engager en 2022 la procédure d’installation en Normandie d’une mission régionale de la performance hébergée par le groupement d’intérêt public (GIP) Centre sportif de Normandie.
Afin d’asseoir sa montée en compétences, le ministère chargé des sports a financé trois postes : un poste de responsable régional de la haute performance et deux postes de conseiller haut niveau et haute performance, pour un montant total de 230 000 euros.
L’Agence nationale du sport octroie par ailleurs une subvention de 14 000 euros pour compléter le financement du poste de responsable régional de la haute performance. Elle participera également au financement des actions et des projets territoriaux de la maison régionale de la performance à destination des sportifs de haut niveau et de l’écosystème territorial : 150 000 euros, ce n’est pas rien.
Au total, ce sont donc près de 400 000 euros qui sont garantis annuellement au bénéfice du sport de haut niveau en Normandie.
L’Agence nationale du sport propose enfin un accompagnement des structures du territoire, notamment sur le volet des équipements ou sur celui de l’emploi. À cela s’ajoutent les moyens déjà alloués aux fédérations sportives au titre des programmes d’accession au sport de haut niveau via les projets sportifs fédéraux, soit plus de 700 000 euros versés au territoire normand en 2022.
Comme vous pouvez le constater, monsieur le sénateur, l’État est pleinement mobilisé sur le sujet.
situation de la maternité de guingamp
M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, auteure de la question n° 963, adressée à M. le ministre de la santé et de la prévention.
Mme Annie Le Houerou. Ma question concerne la situation préoccupante de la maternité de Guingamp, confrontée à une menace persistante de fermeture qui nuit à son attractivité. Ce sont 500 naissances annuelles qui sont ainsi fragilisées.
Depuis le mois d’avril 2023 et jusqu’au mois d’avril 2024, les accouchements sont suspendus.
Malgré les engagements du Président de la République et des ministres successifs en faveur du maintien à Guingamp d’un centre hospitalier de plein exercice, aucune perspective concrète n’est envisagée. Sans projet, il ne sera pas possible de rester attractif ; or la population, soutenue par les élus, n’accepte pas cette dégradation de l’offre de soins.
Cette suspension est une violence de plus faite aux femmes et aux enfants, créant un sentiment d’abandon au sein de la population la plus vulnérable de Bretagne et aggravant le renoncement aux soins, phénomène unanimement constaté.
Depuis la suspension de l’activité de la maternité, plusieurs femmes ont accouché en route. À la mi-novembre, faute de pouvoir rallier à temps la maternité référente, Nathalie, d’Yvias, a accouché d’une petite Margot entre une pizzeria et un garage.
Alors que la prise en charge des femmes se détériore, que la perspective d’accoucher est une angoisse pour ces femmes que j’ai rencontrées - elles refusent d’aller attendre l’arrivée de bébé à l’hôtel -, les discussions avec l’agence régionale de santé tournent au dialogue de sourds.
Elles sont sur le point de rompre ; il est donc urgent de trouver une issue à cette impasse en instaurant un dialogue entre les représentants locaux, les autorités sanitaires, les professionnels de santé, les élus et les représentants des usagers et en travaillant ensemble à une solution viable.
Dans ce contexte, madame la ministre, je souhaite savoir ce qu’envisage de faire le Gouvernement pour lever l’incertitude persistante autour du maintien de la maternité de Guingamp.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Fadila Khattabi, ministre déléguée auprès de la ministre des solidarités et des familles, chargée des personnes handicapées. Madame la sénatrice Le Houerou, la situation de la maternité de Guingamp est bien connue du ministère de la santé et de la prévention, qui, en lien avec les professionnels, les élus du territoire et l’agence régionale de santé, en assure le suivi régulier.
En effet, les accouchements ont été suspendus dans cette maternité à compter du 26 avril 2023, du fait de risques liés à un manque de professionnels de santé - car qui dit « risques » dit « danger pour la mère ».
Oui, certaines maternités font face, comme le reste du système de santé, à des tensions qui touchent notamment aux ressources humaines. Sont concernées plusieurs professions indispensables au fonctionnement d’une maternité : gynécologues, obstétriciens, anesthésistes-réanimateurs, sages-femmes. Ces tensions sont pour partie liées aux problèmes d’attractivité qui affectent ces professions et à la charge que représente la permanence des soins.
L’engagement du Gouvernement en la matière est constant et nous continuons d’apporter des réponses adaptées. Garantir partout sur le territoire la santé maternelle, néonatale et infantile est une des priorités du ministère de la santé et de la prévention, dont l’action consiste toujours, dans ce domaine, à trouver un équilibre entre proximité et sécurité.
Pour ce qui est de Guingamp, la suspension des accouchements, initialement prévue pour durer deux mois, a été en effet reconduite plusieurs fois. Pourquoi ? Pour des raisons de sécurité. Malgré l’engagement de l’ARS, qui est pleinement mobilisée et fait tout pour aider la maternité à retrouver les équipes professionnelles nécessaires à son fonctionnement, les difficultés persistent, je le reconnais.
Je sais que le cabinet du ministre, Aurélien Rousseau, a organisé pas plus tard qu’hier, madame la sénatrice, un temps d’échange auquel vous et de nombreux autres élus avez participé, toujours dans l’optique de trouver des solutions adaptées.
Mme Annie Le Houerou. C’est faux !
Mme Fadila Khattabi, ministre déléguée. C’est bien sûr dans cette voie qu’il faut poursuivre pour se redonner des perspectives partagées. (Mme Annie Le Houerou hoche la tête en signe de dénégation.)
Vous me répondez « non », madame la sénatrice ; voici en tout cas les échos et les informations que j’ai eus : une réunion s’est tenue hier sur ce sujet.
M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour la réplique.
Mme Annie Le Houerou. Si une réunion s’est tenue, elle s’est tenue sans les élus et sans les représentants des professionnels de santé et des usagers.
Il y a bel et bien un problème d’attractivité !
Nous demandons un engagement clair sur la reconstruction - promise - d’un hôpital de plein exercice.
Nous demandons un projet médico-soignant qui réponde aux besoins de santé du territoire.
Nous demandons une bonification des rémunérations des soignants, car nous sommes en déficit.
Des solutions existent : des postes d’internes doivent être ouverts aux futurs médecins, fussent-ils étudiants à l’étranger, afin qu’ils soient affectés en France dans les établissements en tension, comme à Guingamp, pour y soutenir les médecins seniors et maîtres de stage. Des médecins français étudiant à l’étranger demandent à faire leur internat ici : des solutions existent donc, j’y insiste !
Mme Annie Le Houerou. Une autre piste pourrait consister à former une équipe d’accompagnement des femmes, de la conception jusqu’aux premiers mois de l’enfant, en lien avec les sages-femmes libérales.
M. le président. Il faut conclure.
Mme Annie Le Houerou. Une demande s’exprime en faveur de l’organisation d’une table ronde impliquant l’ensemble des parties prenantes ; je m’en fais ici le relais.
M. le président. Nous en avons terminé avec les réponses à des questions orales.
Mes chers collègues, l’ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures trente, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Mathieu Darnaud.)
PRÉSIDENCE DE M. Mathieu Darnaud
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
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Loi de finances pour 2024
Rejet en nouvelle lecture d’un projet de loi
M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion en nouvelle lecture du projet de loi de finances pour 2024, considéré comme adopté en nouvelle lecture par l’Assemblée nationale en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution (projet n° 219, rapport n° 220).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre délégué.
M. Thomas Cazenave, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de loi de finances pour 2024 que nous examinons aujourd’hui en nouvelle lecture s’inscrit dans la droite ligne des objectifs que nous avons fixés dans la loi de programmation des finances publiques pour 2023 à 2027.
Nous sommes sur une ligne de crête. (Mme Christine Lavarde s’en amuse.) Nous devons continuer de financer les nécessaires investissements dans la transition écologique, nous devons poursuivre notre politique de l’offre favorable à l’emploi et à la croissance, nous devons continuer d’investir dans les services publics prioritaires que sont l’éducation, la justice et l’armée.
Nous devons atteindre ces objectifs sans dégrader notre trajectoire, en maîtrisant nos finances publiques et en poursuivant une politique de justice fiscale et de lutte contre la fraude.
En première lecture, ici, au Sénat, ces grandes orientations ont été confortées. En effet, malgré des points de désaccord sur lesquels j’aurai l’occasion de revenir, vous avez voté pour un budget qui confirme le chemin que nous souhaitons emprunter.
Sur la maîtrise de la dépense publique, d’abord, la trajectoire que nous nous sommes fixée établit un déficit public à 4,4 % pour 2024. C’est une nouvelle étape importante qui doit nous permettre de repasser sous la barre des 3 % de déficit en 2027. Nous avons ici un point d’accord : la maîtrise des finances publiques est une priorité.
Nous réaliserons cet objectif, car nous ferons des économies. Les dépenses de l’État baisseront en 2024 : 14 milliards d’euros seront économisés grâce à la sortie des dispositifs de crise.
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Ce ne sont pas des économies, c’est de l’affichage !
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Par ailleurs, 350 millions d’euros seront économisés sur la politique de l’emploi grâce à la réduction du chômage et 500 millions d’euros en améliorant l’efficience de la politique de formation professionnelle et de l’apprentissage.
Ces économies sont ciblées. Nous ne souhaitons pas faire de grands coups de rabot dans la dépense publique,…
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Allez !…
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. … qui auraient un effet contre-productif sur la croissance, l’emploi et qui pourrait finalement amoindrir nos recettes.
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Baratin !
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Ce sera pour l’an prochain !
M. Claude Raynal, président de la commission des finances. Hélas !
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. C’est notre ligne directrice depuis 2017. Cette politique fonctionne et nous permet d’atteindre les résultats économiques que nous avons aujourd’hui. Nous ne changerons pas de cap, car il produit des résultats. La réforme reste et restera le moteur de notre politique de maîtrise des finances publiques.
Nous nous sommes également accordés sur le financement de la transition écologique. Dans ce projet de loi de finances, 10 milliards d’euros supplémentaires seront consacrés à la rénovation des logements et des bâtiments publics, à l’énergie décarbonée, au verdissement du parc automobile.
Vous avez également soutenu le principe des budgets verts pour les collectivités territoriales et les opérateurs, et inscrit la possibilité de calculer la part de dette dédiée à l’investissement dans la transition écologique. Je suis convaincu que nous ne parviendrons à respecter notre trajectoire en matière de réduction des émissions que si nous nous dotons de boussoles communes. Il s’agit d’une avancée majeure.
Vous avez été favorables à des choix politiques ambitieux pour accompagner la transition écologique : la sortie progressive du gazole non routier (GNR), la taxe sur les gestionnaires d’infrastructures de transport les plus polluantes, le malus sur les véhicules polluants, l’accompagnement du nouveau modèle agricole.
En ce qui concerne la poursuite de notre politique de l’offre, vous avez aussi souhaité garder nos grandes orientations en faveur de l’emploi, de la production et de la croissance. En 2024, nous poursuivrons donc la suppression progressive de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE). Nous créerons aussi un nouveau crédit d’impôt en faveur de l’industrie verte.
Nous nous sommes également retrouvés sur le soutien dans nos services publics : l’augmentation du budget de l’éducation nationale, pour le porter à un niveau historique ; l’augmentation du budget de nos armées pour qu’elles puissent faire face aux défis stratégiques que nous connaissons ; l’augmentation du budget de la justice pour renforcer l’accès au droit et augmenter le nombre de places en prison.
Vous avez aussi souhaité valider les grandes orientations de justice fiscale comme le « pilier II », qui permettra une imposition minimale des sociétés à 15 % dès le 1er janvier 2024.
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Et la Fifa, c’est de la justice fiscale ? Allô ?
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Cette mesure, prise à l’échelle de l’OCDE, représente une avancée majeure dans la lutte contre le dumping fiscal.
La France a été leader dans cette initiative. Nous pouvons collectivement nous réjouir de cette mesure.
Vous avez aussi voté l’indexation du barème de l’impôt sur le revenu sur l’inflation, qui est une mesure forte de soutien au pouvoir d’achat des ménages. Cette mesure représente un manque à gagner de 6 milliards d’euros pour l’État et bénéficiera directement à 18 millions de foyers dans notre pays.
La justice fiscale passe également par la lutte contre la fraude.
Mme Nathalie Goulet. Très bien !
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. C’est un enjeu de cohésion sociale. Sur le sujet, vous avez adopté les très nombreuses mesures présentes dans ce texte visant à lutter contre toutes les fraudes.
Par le renforcement des moyens d’abord : ce sont 250 agents supplémentaires qui seront dédiés à la lutte contre la fraude à la direction générale des finances publiques (DGFiP). Nous renforçons aussi les techniques d’enquête sur internet avec, notamment, la permission d’accéder aux contenus publics et d’enquêter sous pseudonyme. Nous renforçons la lutte contre les nouveaux types de fraudes en ligne.
Nous renforçons aussi les sanctions contre les fraudeurs avec une sanction administrative balai pour la fraude aux aides publiques et une nouvelle sanction d’indignité fiscale.
Ces grandes orientations ont donc fait l’objet d’accords avec vous, mais vous avez aussi fait de très nombreuses propositions, que nous avons débattues longuement.
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Oui, mais pour quel résultat ?
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Le président de la commission des finances, le rapporteur général, les 49 rapporteurs spéciaux, les 76 rapporteurs pour avis et plus globalement l’ensemble des sénateurs ont proposé, en première lecture, 3 760 amendements que nous avons examinés pendant 150 heures de débats. Vous avez adopté au total 663 amendements.
Mme Frédérique Puissat. Pour rien !
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Ces amendements traduisent parfois des désaccords entre le Sénat et le Gouvernement. Ils traduisent aussi une volonté que le Sénat a eue d’enrichir le texte proposé par le Gouvernement.
Contrairement à ce que j’ai pu entendre, nous avons écouté et retenu les amendements qui représentaient des points d’accord importants. (Vives protestations sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Thomas Dossus s’en amuse.)
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Que dalle ! Halte à la provocation !
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Le texte qui vous est soumis aujourd’hui est riche des débats qui ont eu lieu au Sénat.
Le Sénat a validé les grandes orientations du texte sur le financement de la transition écologique, la poursuite de la politique de l’offre, l’investissement dans les services publics prioritaires comme l’éducation nationale. Le Sénat a adopté 663 amendements. Le texte voté par le 49.3 en reprend plus de 120.
M. Loïc Hervé. Ce n’est pas beaucoup !
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. C’est un record historique !
Nous avons retenu des amendements transpartisans défendus par la plupart des groupes, comme le prolongement de la garantie sur l’évolution de la dotation particulière relative aux conditions d’exercice des mandats locaux (DPEL) des communes nouvelles, mesure que je sais très chère à Françoise Gatel, ou le gel de la trajectoire de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) en outre-mer en 2024.
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. C’est pour qui, tout ça ?
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Je citerai également parmi les amendements transpartisans l’augmentation de l’objectif d’incorporation d’énergies renouvelables dans les gazoles pour le calcul de la taxe incitative relative à l’utilisation d’énergie renouvelable dans les transports (Tiruert).
Nous avons également retenu des amendements de la majorité sénatoriale et du rapporteur général, comme le principe d’une taxe sur les plateformes de streaming,…
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. On en reparlera !
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Vous appelez ça du dialogue ?
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Je pense aussi à l’aménagement des conditions d’éligibilité des fonds de capital investissement au dispositif d’apport-cession, dispositif défendu par Christine Lavarde, ou à l’aide aux départements du Nord et du Pas-de-Calais,
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Non, vous ne l’avez pas maintenu dans le texte !
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Nous avons aussi retenu des amendements du groupe Socialiste, Écologiste et Républicains, comme l’ajustement soutenu par Thierry Cozic des règles de la taxe sur les surfaces commerciales (Tascom) en cas de fusion d’établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) ou la suppression du critère de potentiel financier dans le DPEL pour le soutien aux élus locaux, mesure défendue notamment par Éric Kerrouche.
Du groupe Union Centriste, nous avons retenu le dégrèvement en faveur des logements ayant fait l’objet de travaux de réhabilitation « seconde vie », la mise en place d’un fonds de compensation perte de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB), défendue par le sénateur Bonneau, la bonification de 20 % de la fraction péréquation de la dotation de solidarité rurale (DSR) des communes classées France Ruralités Revitalisation (FRR) du sénateur Delcros.
Pour le groupe RDPI, nous avons retenu l’exonération des aides versées aux entreprises touchées par la crise de l’eau à Mayotte, et le soutien au Département de Mayotte et au syndicat de gestion de l’eau, défendus par le sénateur Soilihi.
Pour le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, nous avons retenu la suppression de la redevance d’eau dans le calcul du coefficient d’intégration fiscale des communautés de communes, proposition défendue par la présidente Cukierman.