M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° II-780, présenté par MM. Fernique, Dantec, Benarroche, G. Blanc, Dossus et Gontard, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mme Ollivier, M. Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
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+ |
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Infrastructures et services de transports |
108 000 000 |
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108 000 000 |
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Affaires maritimes, pêche et aquaculture |
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Paysages, eau et biodiversité |
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Expertise, information géographique et météorologie |
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Prévention des risques dont titre 2 |
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Énergie, climat et après-mines |
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Service public de l’énergie |
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Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables dont titre 2 |
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108 000 000 |
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108 000 000 |
Fonds d’accélération de la transition écologique dans les territoires |
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TOTAL |
108 000 000 |
108 000 000 |
108 000 000 |
108 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Jacques Fernique.
M. Jacques Fernique. Les AOM ont déjà engagé le verdissement de leurs flottes, en acquérant des autobus électriques ou roulant à l’hydrogène.
Cette transition énergétique coûte très cher aux collectivités. En effet, les bus à zéro émission sont bien plus coûteux à l’achat que les bus roulant au diesel ou au gaz. Sur les 15 670 bus en circulation sur le territoire national, 96 % ne sont ni électriques ni à l’hydrogène. Si l’on devait les remplacer, le surcoût serait de 4,7 milliards d’euros.
Les collectivités sont dans l’obligation d’investir pour verdir leurs flottes. La Commission européenne vient par exemple de publier une proposition de règlement afin que tous les nouveaux autobus urbains vendus dans l’Union européenne soient à zéro émission dès 2030. Cela reviendrait à obliger les collectivités à acquérir uniquement des bus électriques ou à l’hydrogène à très court terme.
Or, contrairement à ce qui se fait chez nos voisins, il n’existe plus aucun dispositif de soutien de la part de l’État. Le bonus écologique pour l’acquisition d’un bus électrique a pris fin en décembre 2022. Le volet de financement des zones à faibles émissions (ZFE) du fonds vert, lancé au début de 2023, restreint le champ d’une éventuelle aide au verdissement des flottes de bus. Enfin, le dernier appel à projets de l’Ademe pour l’aide à l’acquisition de véhicules lourds électriques, lancé en avril dernier, exclut totalement les autobus.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie-Claire Carrère-Gée, rapporteure spéciale. La commission demande le retrait de cet amendement, pour les mêmes raisons que celles qui ont été évoquées précédemment. Les mesures déjà votées par le Sénat devraient rapporter 750 millions d’euros aux AOM.
M. le président. L’amendement n° II-693 rectifié, présenté par M. Gillé, au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
- |
+ |
- |
Infrastructures et services de transports |
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Affaires maritimes, pêche et aquaculture |
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Paysages, eau et biodiversité |
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Expertise, information géographique et météorologie |
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Prévention des risques dont titre 2 |
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Énergie, climat et après-mines |
40 000 000 |
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40 000 000 |
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Service public de l’énergie |
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40 000 000 |
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40 000 000 |
Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables dont titre 2 |
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Fonds d’accélération de la transition écologique dans les territoires |
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TOTAL |
40 000 000 |
40 000 000 |
40 000 000 |
40 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Hervé Gillé, rapporteur pour avis de la commission de l’aménagement du territoire. Cet amendement adopté par la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable vise à consolider l’appel à projets de l’Ademe pour 2024 concernant l’acquisition de véhicules propres.
L’objet de cet amendement est donc le fléchage de cet appel à projets, et non le financement des AOM : l’angle est différent.
Pour faciliter l’investissement dans les véhicules électriques, nous demandons une enveloppe de 40 millions destinée à l’achat d’autobus électriques, qui, vous le savez, n’ont pas bénéficié de cet appel à projets en 2023 malgré leurs coûts particulièrement élevés.
Madame la rapporteure, vous mentionnez le financement des AOM, mais l’objet de cet amendement est d’abonder un appel à projets : ce n’est pas la même chose. Je le rappelle, cet amendement est unanimement soutenu par la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable.
Mme Marie-Claire Carrère-Gée, rapporteure spéciale. Je ne donnais pas l’avis sur votre amendement !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial. La commission demande le retrait de l’amendement n° II-693 rectifié, en raison des mesures prises en faveur des AOM lors de l’examen de la première partie de ce budget, que nous avons déjà rappelées.
Toutefois, cher collègue, vous posez une question assez juste : le bleu budgétaire de cette mission, comme ceux de nombreuses autres, ne comporte pas toutes les données. Nous ne savons pas combien d’aides ont été distribuées pour 2024 dans le cadre de cet appel à projets porté par l’Ademe sur les « écosystèmes de véhicules lourds électriques ». Les années précédentes, autour de 60 millions d’euros étaient distribués.
Je le demande au Gouvernement – je ne sais pas quel ministre me répondra : combien sera mis sur la table dans le cadre de cet appel à projets cette année ?
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Clément Beaune, ministre délégué. Le Gouvernement remercie les auteurs de ces amendements de leur soutien à ces appels à projets. De mémoire, la première génération de cet appel, qui recouvrait un domaine assez large, incluant les cars, les bus et les poids lourds électriques, était dotée de 55 milliards d’euros. Il nous a d’ailleurs été reproché de distribuer une enveloppe trop modeste sur un objet trop large, et de trop disperser les aides.
Roland Lescure, Agnès Pannier-Runacher et moi-même avons lancé un deuxième appel à projets doté de 60 millions d’euros, qui est en cours et rencontre un réel succès. Il est en effet plus ciblé.
Madame la rapporteure, au sein du programme 174 « Énergie, climat et après-mines », piloté par la ministre de la transition énergétique, le montant sera plus élevé…
Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial. Mais de combien sera-t-il ?
M. Clément Beaune, ministre délégué. Nous sommes encore en train de discuter de la répartition des crédits. Vous le savez, cela fonctionne ainsi sur le programme 174.
Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial. Oui, nous le savons !
M. Clément Beaune, ministre délégué. Il y a différents usages, et le montant dépend des paramètres que nous déterminerons pour les dispositifs inclus, comme le bonus écologique, le leasing social, la prime à la conversion, etc.
J’en conviens, le moment est tardif, mais il y a encore un certain nombre d’arbitrages d’ordre réglementaires à prendre. Agnès Pannier-Runacher, Roland Lescure et moi-même vous préciserons avant la fin de l’année le montant retenu pour chacun des dispositifs.
Je le dis dès maintenant : non seulement il faudra prolonger cet appel à projets, comme nous nous y sommes engagés, mais il faudra aussi lui allouer un montant plus important. C’est aussi à cette condition que se fera l’électrification des flottes des collectivités et des professionnels du transport routier. Le montant alloué dans le cadre de ces appels à projets sera augmenté l’année prochaine.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur ces deux amendements.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Hervé Gillé, rapporteur pour avis de la commission de l’aménagement du territoire. Ma clé de lecture est différente : en quelque sorte, le ministre conforte notre position.
J’invite l’ensemble de mes collègues à adopter cet amendement, qui enverrait un signal très clair, notamment en faveur de l’acquisition des bus électriques. Le sujet a été clairement défini dans ce cadre-là. Il est important de soutenir les collectivités.
M. le président. La parole est à M. Yannick Jadot, pour explication de vote.
M. Yannick Jadot. Monsieur le ministre, vous êtes en train de négocier la proposition de règlement européen sur les normes d’émissions de CO2 des poids lourds et des bus. Dans ses termes actuels, à partir de 2030, si les collectivités n’ont pas développé des infrastructures de production de biométhane ou de biogaz, elles devront acheter des bus électriques. Il est important, dès maintenant, d’envoyer un signal budgétaire.
De même que M. Gillé, il me semble que, à partir du moment où nous sommes tous convaincus de l’importance de ces appels à projets, et puisque le Gouvernement prend l’engagement d’augmenter le montant qui leur est alloué, nous pouvons adopter cet amendement.
Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial. Mais cela n’a pas de sens !
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur spécial.
Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial. Nous discutons du montant d’une enveloppe budgétaire sur laquelle nous ne disposons d’aucune visibilité, dans laquelle sont à la fois mélangés les crédits du bonus écologique, ceux de la prime à la conversion et ceux des appels à projets.
L’amendement de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable vise à allouer 40 millions d’euros supplémentaires à cette enveloppe. Le ministre a annoncé que les sommes versées lors de cet appel à projets seraient supérieures à celles de l’année dernière, où 56 millions d’euros avaient été distribués. Mme la ministre, à ses côtés, dit : « Peut-être… »
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Ça flotte !
Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial. Mes chers collègues, j’ai peur que vous n’adoptiez une proposition moins-disante.
Comme la répartition de cette enveloppe n’est pas précisée, ces crédits ne sont pas réellement déplacés. Il n’y a qu’une masse d’argent, allouée à la transition du parc de véhicules, mais nous ignorons quels leviers seront ou non actionnés…
J’aurai l’occasion d’y revenir lors de notre débat : durant l’examen de la loi de finances de fin de gestion, lorsqu’il s’est aperçu que des crédits manquaient pour mener à bien un certain nombre de politiques, le Gouvernement est venu abonder les lignes de crédit concernées. Pour cette raison, les crédits ouverts en 2024 pour la prime à la conversion et le bonus écologique sont inférieurs aux sommes exécutées en 2023.
Je ne sais pas si adopter cet amendement aurait beaucoup de sens. Le message a été entendu, me semble-t-il. Comme vous, mes chers collègues, j’aimerais pouvoir travailler sur des documents qui nous permettent de savoir comment la politique publique de transition du parc est décidée pour les véhicules de particuliers, les véhicules de transport en commun ou les véhicules professionnels.
Nous ne disposons pas de cette information. Nous apprenons des choses au cours de la séance publique…
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Comme toujours, au dernier moment !
Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial. … ce qui prouve au moins que notre travail est utile. Mais au regard des propos du ministre, je ne sais pas si l’adoption de cet amendement aurait beaucoup de sens.
M. le président. Monsieur Fernique, l’amendement n° II-780 est-il maintenu ?
M. Jacques Fernique. Non, je le retire au profit de celui de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, monsieur le président.
M. Clément Beaune, ministre délégué. La question est celle de la répartition de l’enveloppe, puisqu’il n’y a pas d’argent magique…
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Cela dépend !
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. C’est votre président lui-même qui le dit !
M. Clément Beaune, ministre délégué. Nous ne sommes plus tout à fait à l’ère du « quoi qu’il en coûte », encore moins dans celle de l’argent magique, qui n’existe pas, par définition. La question est donc celle de la répartition ou de la réattribution des crédits.
Monsieur le sénateur Gillé, je vois aussi dans votre proposition d’attribuer davantage d’argent à ces appels à projets un appel à amplifier ces derniers. Tant mieux, nous le ferons.
Mais pour attribuer de l’argent au programme 174, ce dont Mme Pannier-Runacher et moi-même serions en première intention ravis, il faut bien le prendre ailleurs, en l’occurrence sur le programme 217 « Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables ». Vous prenez donc cet argent au détriment des effectifs de nos ministères, dont nous avons prévu l’augmentation au profit de la transition écologique. Cela serait légèrement incohérent…
Au sein du programme 174, des moyens importants seront dégagés pour continuer et amplifier ces appels à projets. Nous pouvons discuter du caractère tardif de la précision de la répartition de ces fonds, mais cette répartition se fera.
Comme vous le savez, madame la rapporteure spéciale, cette enveloppe contient un certain nombre de dispositifs dont le montant des dépenses est assez incertain en exécution, notamment le bonus écologique. Cela relève un peu de la nature de ce programme réunissant des dispositifs assez différents, qu’Agnès Pannier-Runacher pilote.
Monsieur le sénateur Jadot, vous évoquiez les échéances européennes, que vous connaissez bien du fait de vos fonctions précédentes. Je le redis : nous devons accélérer la transformation des flottes vers l’électrique. Mais, comme nous en avons déjà discuté, nous assumons que la France propose une flexibilité par rapport à l’échéance de 2030.
Pourquoi ? Parce que beaucoup de collectivités, parfois dirigées par les écologistes, se sont engagées dans des achats de flottes par tranche. Leur annoncer maintenant qu’elles devront arrêter net leurs achats de flottes en 2030 reviendrait à provoquer une coupure qui risquerait de freiner le développement de solutions intermédiaires, hybrides ou gaz, en direction de la transition écologique.
Décaler cette échéance ou la maintenir avec des dérogations reviendrait finalement à donner un peu de flexibilité aux collectivités déjà engagées dans la transition écologique, et non à favoriser celles qui ont toujours de vieux bus diesel, si je puis m’exprimer ainsi.
En effet, pour accélérer cette échéance en pratique, il faut développer les accompagnements lors des appels à projets. Je le redis, monsieur le sénateur, nous le ferons.
M. le président. L’amendement n° II-697, présenté par M. Gillé, au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
- |
+ |
- |
Infrastructures et services de transports |
5 000 000 |
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5 000 000 |
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Affaires maritimes, pêche et aquaculture |
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Paysages, eau et biodiversité |
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|
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|
Expertise, information géographique et météorologie |
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|
Prévention des risques dont titre 2 |
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Énergie, climat et après-mines |
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Service public de l’énergie |
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Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables dont titre 2 |
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5 000 000 |
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5 000 000 |
Fonds d’accélération de la transition écologique dans les territoires |
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TOTAL |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Hervé Gillé, rapporteur pour avis de la commission de l’aménagement du territoire. Cet amendement de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable a pour objet une disposition de la loi d’orientation des mobilités, qui avait rendu obligatoire l’élaboration par les régions, à l’échelle des bassins de mobilité, d’un contrat opérationnel de mobilité pour définir les modalités de l’action commune des AOM. Quatre ans plus tard, on ne peut que constater que cette mesure peine à être mise en œuvre.
Or l’augmentation de la part modale des transports collectifs, pourtant indispensable à la décarbonation du secteur, repose en grande partie sur la bonne articulation entre les différentes parties prenantes des politiques locales de mobilité. Cela suppose notamment de favoriser l’interopérabilité des différents modes et réseaux de transport, d’un point de vue technique et tarifaire.
Dans ce contexte, l’amélioration de la coordination des acteurs et de l’articulation des différents schémas locaux de planification des mobilités existants – je ne les cite pas tous – est nécessaire et même indispensable pour mettre en œuvre nos politiques.
Dans cette perspective, cet amendement tend à apporter un soutien financier aux collectivités territoriales, notamment au moyen de la réalisation d’études de mobilité ou d’expérimentations, ainsi que par l’intermédiaire d’outils d’ingénierie territoriale et d’instances de concertation, au service de la définition d’objectifs partagés en matière de mobilité.
Nous proposons donc d’abonder de 5 millions d’euros supplémentaires l’action n° 47 « Fonctions support » du programme 203 « Infrastructures et services de transport ».
C’est vraiment d’une importance primordiale : il n’y a pas d’intermodalité sans vision complémentaire des schémas de mobilité à tous les niveaux, entre l’agglomération, la métropole, le département et la région, pour accompagner l’ensemble des projets. Or, à l’heure actuelle, ces démarches ne sont pas suffisamment puissantes et claires en la matière.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie-Claire Carrère-Gée, rapporteure spéciale. La commission des finances partage entièrement le diagnostic : se coordonner avec ses voisins relève du travail des AOM, autrement la notion de « réseau » perdrait de son sens.
En revanche, je ne suis pas sûre que, si les AOM ne se coordonnent qu’insuffisamment ou avec du retard, c’est parce qu’il leur manque 5 millions d’euros. Cela relève d’une obligation légale, et même sans loi elles devraient y penser toutes seules…
Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis de la commission serait défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Clément Beaune, ministre délégué. Le Gouvernement partage également ce diagnostic.
Cependant, les moyens sont disponibles au sein de nos programmes, en particulier dans le cadre du fonds vert, qui permet le financement au cas par cas de l’ingénierie et de l’accompagnement. Je ne pense pas qu’il soit nécessaire de créer une nouvelle ligne budgétaire au sein de nos programmes actuels, car les moyens financiers et les outils existent déjà à l’aide du fonds vert.
Je propose que l’on s’en tienne à cet équilibre. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Hervé Gillé, rapporteur pour avis de la commission de l’aménagement du territoire. Monsieur le ministre, nous ne savions pas si le fonds vert serait ou non reconduit. Aujourd’hui, vous nous indiquez qu’il sera maintenu. Mais les conditions de sa mise en œuvre au niveau des départements sont assez différentes, et ces fonds sont peut-être insuffisamment fléchés.
Les préfets reprennent parfois la main à l’aide de comités de mobilités, parce qu’ils sentent bien la nécessité d’articuler les différentes démarches à tous les échelons.
Cet amendement a comme objectif de donner une impulsion, afin, pourquoi pas, de permettre des cofinancements complémentaires du fonds vert. Nous le maintenons.
M. le président. L’amendement n° II-26 rectifié, présenté par Mme Lavarde, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Aide ciblée sur les factures d’électricité des ménages
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
En euros) |
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Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
- |
+ |
- |
Infrastructures et services de transports |
|
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|
|
Affaires maritimes, pêche et aquaculture |
|
|
|
|
Paysages, eau et biodiversité |
|
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Expertise, information géographique et météorologie |
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|
|
Prévention des risques dont titre 2 |
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Énergie, climat et après-mines |
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500 000 000 |
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500 000 000 |
Service public de l’énergie |
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500 000 000 |
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500 000 000 |
Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables dont titre 2 |
|
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Fonds d’accélération de la transition écologique dans les territoires |
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900 000 000 |
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520 000 000 |
Aide ciblée sur les factures d’électricité des ménages |
1 900 000 000 |
|
1 520 000 000 |
|
TOTAL |
1 900 000 000 |
1 900 000 000 |
1 520 000 000 |
1 520 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme le rapporteur spécial.
Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial. Avec cet amendement, nous changeons totalement de sujet : nous quittons le domaine des transports pour aborder les dispositifs de soutien des consommateurs face à la hausse des prix de l’énergie.
Le PLF tel qu’il a été déposé par le Gouvernement ne comportait pas de mesure spécifique prévoyant une aide ciblée pour faire face à l’augmentation des prix de l’électricité. Lors de sa révision des tarifs au mois de février dernier, la Commission de régulation de l’énergie (CRE) a conservé inchangée l’accise sur l’électricité, fixée au niveau minimum prévu par l’Union européenne, entre 0,5 et 1 euro par mégawattheure.
Sur l’initiative de notre rapporteur général, la commission des finances puis le Sénat ont voté une remontée de cette accise à son niveau d’avant crise pour les particuliers, dans un souci de bonne gestion des finances publiques.
Il ne vous aura pas échappé que la consommation d’électricité est différente selon les revenus. Un niveau d’accise équivalent pour tout le monde fait peser un effort supplémentaire sur le premier décile, les membres du dernier décile ont une consommation d’électricité supérieure de 60 % à celle des plus modestes.
C’est la raison pour laquelle le Sénat a choisi de suivre le rapporteur général, en remontant l’accise sur l’électricité à 32 euros par mégawattheure dans la première partie du budget qu’il a adoptée.
En séance publique, le Gouvernement avait déposé un amendement tendant à une solution intermédiaire. En lisant l’objet de cet amendement entre les lignes et en le comparant avec les propos tenus au banc par le ministre, on comprend qu’alors que, selon les premières projections de la CRE, les tarifs réglementés de vente de l’électricité hors taxe augmenteraient de 2 % au mois de février prochain, le Gouvernement souhaiterait une augmentation de 10 % de ces tarifs toutes taxes comprises.
Pour cela, il devait nécessairement jouer sur la fiscalité. L’amendement du Gouvernement visait ainsi à lui laisser la possibilité de définir par arrêté l’accise sur l’électricité, de sorte que les tarifs toutes taxes comprises du mois de février soient supérieurs de 10 % à ceux du mois d’août dernier, toutes taxes comprises également.
Cette solution nous paraît là encore insatisfaisante, car elle apporte un soutien indifférencié aux consommateurs, qui bénéficie plutôt au dernier décile des revenus qu’au premier.
Le Sénat a donc suivi le rapporteur général en remontant l’accise sur l’électricité, mais il convient également d’apporter un soutien aux ménages les plus fragiles. C’est l’objectif de cet amendement, qui vise à établir un chèque énergie complémentaire pour les deux premiers déciles, et un chèque énergie exceptionnel entre le troisième et le sixième décile.
Ces deux dispositifs permettent de garantir, pour l’ensemble de ces personnes, une hausse des tarifs de l’électricité inférieure à 10 %, conformément aux souhaits du Gouvernement. Cette hausse sera même largement inférieure à 10 % en dessous des deux premiers déciles, où l’aide apportée par le chèque énergie sera supérieure à la remontée totale de l’accise sur l’électricité à 32 euros par mégawattheure.
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. C’est vraiment de la dentelle !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre de la transition énergétique. Cet amendement doit être compris en rapport avec l’augmentation de la taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité (TICFE) adoptée par le Sénat.
Je comprends votre logique, car la prémisse de votre raisonnement est la même pour la sortie progressive du bouclier énergétique souhaitée par le Gouvernement : puisque nous commençons à sortir de la crise, nous pouvons commencer à relever la TICFE.
Là où je ne vous rejoins pas, c’est que l’augmentation des tarifs sous-jacente à l’augmentation de la TICFE que vous souhaitez est supérieure à 15 %. (Mme le rapporteur spécial acquiesce.) Cette hausse s’ajouterait aux augmentations successives du tarif réglementé gelé dans le cadre du bouclier énergétique, de 10 % puis de 15 %.
Nous estimons que cette augmentation est trop importante. C’est le premier point.
Le deuxième point, c’est que, alors que l’augmentation de la TICFE a vocation à être durable, en tout cas telle qu’elle est formulée, vous proposez un chèque qui ne constitue qu’une réaction dans l’immédiat. Ce faisant, vous ne répondez pas à la question posée, qui est celle de l’équilibre général du système.
Je vous rejoins autour de l’idée que le chèque énergie est un système intéressant, car il présente un taux de non-recours parmi les plus faibles de tous nos dispositifs sociaux, et qu’il est automatiquement fléché sur l’énergie. Je vous rappelle cependant que ce chèque énergie concerne non pas uniquement l’électricité, mais également d’autres énergies. Quoi qu’il en soit, une augmentation uniquement fondée sur les tarifs de l’électricité peut donc être discutée.
Par ailleurs, la logique qui consiste à augmenter une taxe à long terme tout en apportant une mesure ponctuelle ne nous semble pas équilibrée.
En effet, l’approche du Gouvernement est de conforter le chèque énergie, qui permet de protéger les plus vulnérables, situés en dessous du deuxième décile de revenus. La TICFE a vocation par ailleurs à remonter progressivement.
Je m’inscris en faux sur deux points de vos propos, madame la rapporteure spéciale : le Gouvernement a certes indiqué que le bouclier énergétique avait pour objectif que les tarifs n’augmentent pas au-delà de 10 %, mais les arbitrages ne sont pas encore finalisés. Deuxièmement, la CRE n’a pas encore défini le tarif réglementé de vente. Vous indiquez que le tarif non gelé de l’électricité augmentera de 2 % en février 2024, mais en réalité nous n’en savons rien…