M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. On aurait pu croire que, sur un amendement rédactionnel, il n’y aurait pas de divergences entre le rapporteur général et le Gouvernement, mais nous considérons que l’adoption de cet amendement empêcherait d’atteindre le but recherché à l’article 3, à savoir la possibilité d’un dégrèvement des prélèvements sociaux.
En conséquence, l’avis du Gouvernement est défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l’article 3 octies, modifié.
(L’article 3 octies est adopté.)
Article 3 nonies (nouveau)
Le I de l’article 199 septies du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, le mot : « enfant » est remplacé par le mot : « personne » ;
2° Au 1°, les mots : « , s’ils sont âgés de moins de dix-huit ans, » sont supprimés.
M. le président. L’amendement n° I-162, présenté par M. Husson, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Le premier alinéa du I de l’article 199 septies du code général des impôts est complété par les mots : « et par personne réputée à charge en application de l’article 196 A bis ».
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement a pour objet de préciser un certain nombre d’éléments sur le sujet des rentes de survie. Il s’agit de procéder à un toilettage du dispositif de l’article 199 septies du code général des impôts, en précisant que la majoration de 300 euros est calculée non plus par enfant, mais par personne à charge vivant sous le toit du contribuable, ce qui couvre plus largement les situations que l’on peut rencontrer aujourd’hui.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Il est regrettable que le premier point de l’amendement du rapporteur général restreigne le dispositif qui a été ouvert dans le cadre du débat à l’Assemblée nationale ; l’aménagement des critères a conduit à augmenter le nombre de bénéficiaires de la rente de survie.
Par ailleurs, le second volet de cet amendement « de précision » est déjà satisfait par la rédaction du texte.
Pour ces deux raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L’amendement n° I-321 rectifié bis est présenté par Mmes Guidez, Vermeillet et Sollogoub, M. Henno, Mme Gatel, MM. Duffourg et Longeot, Mme Gosselin, M. Grand, Mmes Perrot et Jacquemet, MM. Bonneau, J.M. Arnaud, Canévet, Kern et Vanlerenberghe, Mme de La Provôté, M. Menonville, Mme Morin-Desailly, MM. Wattebled et Fargeot, Mme Malet, MM. Bleunven et Gremillet et Mme Saint-Pé.
L’amendement n° I-1183 rectifié est présenté par Mme Lermytte.
L’amendement n° I-1734 rectifié est présenté par Mme Pantel, MM. Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, M. Daubet, Mme N. Delattre, M. Fialaire, Mme Girardin et MM. Gold, Grosvalet, Guérini, Guiol, Masset et Roux.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 3 nonies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article 199 quindecies du code général des impôts est ainsi modifié :
1° À la première phrase, les mots : « d’une réduction d’impôt égale » sont remplacés par les mots : « d’un crédit d’impôt égal » ;
2° À la seconde phrase, les mots : « à la réduction » sont remplacés par les mots : « au crédit ».
II. – Le I ne s’applique qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.
III. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Michel Canévet, pour présenter l’amendement n° I-321 rectifié bis.
M. Michel Canévet. Cet amendement important, porté par notre collègue Jocelyne Guidez, est lui aussi un amendement de justice fiscale.
Nous savons tous que le secteur de l’hébergement des personnes âgées souffre aujourd’hui de problèmes financiers extrêmement importants. En même temps, nous sommes attachés, dans notre pays, à ce que puisse s’exercer le libre choix pour les personnes âgées de rester à domicile ou d’aller en institution. C’est important.
Aujourd’hui, les personnes âgées qui décident de rester à domicile bénéficient d’un crédit d’impôt, dans la limite de 10 000 euros, quand celles qui décident d’aller en institution ne bénéficient que d’une réduction d’impôt, toujours plafonnée à 10 000 euros.
Cette situation nous paraît particulièrement injuste. Il n’y a pas de raison que les dispositifs diffèrent en fonction du choix qu’opèrent les familles et, surtout, les personnes ! Il n’y a pas de raison, en particulier, que les personnes aux ressources faibles, voire inexistantes, qui n’ont pas la chance de payer de l’impôt, soient exclues d’aides et de soutiens du fait de leur choix de se rendre en institution.
À cet égard, notre amendement est une mesure de justice fiscale : nous proposons que les personnes accueillies en institution bénéficient d’un crédit d’impôt, à l’instar de celles qui souhaitent rester à la maison.
M. le président. L’amendement n° I-1183 rectifié n’est pas soutenu.
La parole est à M. Christian Bilhac, pour présenter l’amendement n° I-1734 rectifié.
M. Christian Bilhac. Il est défendu.
Je veux simplement signaler à M. le rapporteur et à M. le ministre qu’ils ne seront pas toujours aussi jeunes ! Eux aussi seront vieux un jour…
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Je vous ai entendu, mon cher collègue Canévet, mais la réduction d’impôt permet d’aider près de 420 000 ménages, pour un coût de plus de 250 millions d’euros.
Si j’ai bien compris, l’adoption de l’amendement que vous proposez aurait pour effet de supprimer le ciblage du dispositif sur les foyers les plus modestes. Puisque 45 % seulement des foyers sont actuellement soumis à l’impôt sur le revenu, la transformation du dispositif de réduction d’impôt en crédit d’impôt entraînerait une augmentation considérable du coût, qui n’est pas évaluée à ce stade, mais qui pèserait fortement sur nos finances publiques.
Certains des amendements que nous avons adoptés tout à l’heure conduiront peut-être à des économies. Cependant, j’attire l’attention de tous sur la portée très importante du dispositif proposé, raison pour laquelle je sollicite le retrait de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Nous avons devant nous une problématique à traiter – celle du grand âge –, pour laquelle, d’ailleurs, la Première ministre a annoncé une loi de programmation. Nous devons réfléchir au modèle de financement de la dépendance et de l’autonomie.
M. le rapporteur général évoquait le coût de ces amendements, sans pouvoir précisément le chiffrer. Je peux vous dire qu’il est compris entre 650 et 800 millions d’euros. La disposition est donc extrêmement coûteuse.
Je renvoie par ailleurs aux travaux de la députée Christine Pires Beaune sur le sujet, travaux ayant abouti à un plan d’urgence en direction des Ehpad.
Quoi qu’il en soit, il nous faut reposer le cadre général du financement de l’autonomie, de la dépendance et du grand âge.
Je demande le retrait des amendements ; à défaut, l’avis sera défavorable.
M. le président. Je mets aux voix les amendements nos I-321 rectifié bis et I-1734 rectifié.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, adopte les amendements.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 3 nonies.
Je suis saisi de trois amendements identiques.
L’amendement n° I-910 rectifié est présenté par MM. Bocquet et Savoldelli, Mmes Apourceau-Poly, Brulin, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.
L’amendement n° I-2060 rectifié bis est présenté par M. Féraud, Mme Canalès, MM. Temal, Lurel, Cozic, Kanner et Raynal, Mmes Blatrix Contat et Briquet, M. Éblé, Mme Espagnac, M. Jeansannetas, Mmes Artigalas, Bonnefoy et Brossel, MM. Cardon, Chaillou et Chantrel, Mmes Conconne et Daniel, MM. Fichet et Gillé, Mme Harribey, MM. Jacquin et P. Joly, Mme G. Jourda, M. Kerrouche, Mme Linkenheld, M. Lozach, Mme Lubin, MM. Marie, Mérillou et Michau, Mme Monier, M. Montaugé, Mme Narassiguin, MM. Ouizille, Pla et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Roiron, Ros, Stanzione, Tissot, M. Vallet, M. Weber, Ziane, Fagnen et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° I-2232 rectifié bis est présenté par Mme Aeschlimann et MM. Panunzi et Piednoir.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 3 nonies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article 199 quindecies du code général des impôts est ainsi modifié :
1° La première phrase est complétée par les mots : « jusqu’au 31 décembre 2023 » ;
2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Au titre des dépenses supportées du 1er janvier 2024 au 31 décembre 2025, les contribuables bénéficient d’un crédit d’impôt égal à 25 % de celles-ci. Le montant annuel des dépenses ouvrant droit au crédit d’impôt ne peut pas excéder 10 000 € par personne hébergée. »
II. – Le I n’est applicable qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.
III. – La perte de recettes pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Éric Bocquet, pour présenter l’amendement n° I-910 rectifié.
M. Éric Bocquet. En 2019, environ 730 000 personnes résidaient en Ehpad. En moyenne, le coût d’une chambre individuelle s’élève à 2 000 euros par mois.
Selon le récent rapport de notre collègue députée Christine Pires Beaune, intitulé Garantir la prise en charge des personnes âgées en établissement, encadrer leur reste à charge, parmi les résidents en Ehpad, les personnes âgées les plus pauvres, notamment les plus fragiles et les plus isolées, sont très nombreuses. Ainsi, seulement 24 % des personnes peuvent couvrir les frais de séjour via leurs revenus courants – moins d’un quart. Cela signifie que, sans épargne, sans solidarité familiale, trois personnes sur quatre ne peuvent pas payer une chambre en Ehpad.
Toujours selon le même rapport, dans le modèle actuel, « les plus modestes ne sont pas aidés à la hauteur de leurs besoins et sont même moins aidés que les plus aisés », du fait de la réduction d’impôt dont ces derniers peuvent bénéficier. Nous partageons ce constat et proposons, par conséquent, de transformer la réduction d’impôt sur les dépenses d’hébergement des personnes dépendantes en un crédit d’impôt ouvert à toutes et à tous.
L’adoption de notre amendement permettrait de soutenir, non pas seulement les 418 000 ménages bénéficiant actuellement d’une réduction d’impôt pour un montant total de 255 millions d’euros, mais l’ensemble des personnes, y compris celles qui ne sont pas imposables, grâce à une aide financière indispensable compte tenu du coût des structures d’accueil.
M. le président. La parole est à M. Rémi Féraud, pour présenter l’amendement n° I-2060 rectifié bis.
M. Rémi Féraud. Le présent amendement est d’autant plus important qu’il a déjà été adopté par la commission des finances de l’Assemblée nationale, avec un large consensus politique. Le sujet doit être remis sur la table aujourd’hui et j’espère que nous voterons cette disposition, qui présente d’ailleurs de grandes similarités avec les amendements que nous venons tout juste d’adopter.
Il y a tout de même un souci lié à la capacité à payer les frais d’Ehpad des familles les plus modestes – les trois quarts des familles –, qui ne bénéficient pas de la réduction d’impôt actuelle. S’y ajoute une difficulté liée à l’inflation et à la hausse des coûts.
Il y a par ailleurs un problème de financement des Ehpad, qui diffère quelque peu, je le reconnais, de celui que nous traitons.
Il y a aussi une question d’inégalité, comme le soulignait Éric Bocquet. Que l’on ait des mécanismes de réduction d’impôt à valeur incitative, certes – on n’arrête d’ailleurs pas d’en mettre en place sur des produits d’épargne. Mais, là, nous parlons d’un dispositif de solidarité, non d’un mécanisme incitatif. Cette solidarité ne peut pas s’exercer sur le seul quart des personnes les plus aisées, en ignorant les trois quarts restants, qui sont les plus modestes, et ce même si cela coûte cher.
Enfin, il y a un problème démocratique. Le Gouvernement, lui-même, a confié l’an dernier une mission à Christine Pires Beaune et ces amendements sont le fruit du rapport qui en a découlé.
Je sais qu’une loi sur le grand âge est prévue pour bientôt – son examen est tout le temps reporté –, mais nous, nous proposons un dispositif pour les années 2024 et 2025, qui permet d’attendre l’élaboration d’un autre mode de financement.
Je sais aussi que cela coûte cher… Mais, enfin, on a refusé d’augmenter la contribution des plus hauts revenus et voté déjà plusieurs niches fiscales supplémentaires ! Il faut aussi prendre des mesures qui coûtent cher en faveur des plus modestes, notamment pour la prise en charge des personnes âgées dépendantes en Ehpad.
Cette disposition a été votée à l’Assemblée nationale, en commission des finances : je pense que nous devons la voter au Sénat et que le Gouvernement doit en tenir compte.
M. le président. L’amendement n° I-2232 rectifié bis n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. La commission demande le retrait de ces amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, pour explication de vote.
M. Patrick Kanner. Rappelons tout de même, mes chers collègues, comment les choses se sont passées à l’Assemblée nationale… La commission des finances a donné un avis favorable sur cette mesure. Il est donc fort probable que, si l’amendement avait été examiné dans l’hémicycle, il aurait été adopté. Cet examen n’a pas été rendu possible parce que, monsieur le ministre, le Gouvernement a dégainé l’article 49.3 très tôt dans la discussion.
Nous souhaitons donc rétablir une proposition parlementaire qui aurait manifestement fait l’objet d’un accord à l’Assemblée nationale, toutes tendances confondues. Cela mérite d’être pris en considération.
Par conséquent, non seulement les présents amendements sont justes sur le fond, car ils permettent une meilleure prise en charge des personnes âgées en Ehpad, mais ils le sont également sur la forme, sur un plan politique. Ils rendent effectivement possible une expression du Parlement, ici, au Sénat, alors que vous avez bâillonné l’Assemblée nationale.
M. le président. La parole est à M. Arnaud Bazin, pour explication de vote.
M. Arnaud Bazin. La solidarité à l’égard des personnes âgées admises en Ehpad et ayant de faibles ressources est assurée par le département, à travers l’aide sociale. Celui-ci peut d’ailleurs procéder à une récupération sur la succession ou capter jusqu’à 90 % des ressources de la personne.
La solidarité nationale s’exprime donc simplement par cette voie-là, au lieu de s’exprimer à travers un crédit d’impôt ou Dieu sait quoi, et toutes les ressources de la personne seront ultérieurement captées.
Par conséquent, je ne comprends pas bien le mécanisme de ces amendements et, surtout, je m’interroge sur le fait que l’on puisse affirmer que ces personnes ne bénéficient pas de la solidarité nationale : sans la garantie de l’aide sociale, elles ne pourraient même pas être admises en établissement !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-910 rectifié et I-2060 rectifié bis.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° I-326 rectifié bis, présenté par Mme Muller-Bronn, M. Bacci, Mme Bellurot, MM. Bouchet et Reichardt, Mmes Drexler et Dumas, MM. Houpert, Cadec et Klinger, Mme Pluchet et MM. Sido et Panunzi, est ainsi libellé :
Après l’article 3 nonies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – À la seconde phrase de l’article 199 quindecies du code général des impôts, le montant : « 10 000 € » est remplacé par le montant : « 13 000 € ».
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Bruno Sido.
M. Bruno Sido. L’amendement est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-326 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 3 decies (nouveau)
Au premier alinéa du 1 de l’article 199 unvicies du code général des impôts, l’année : « 2023 » est remplacée par l’année : « 2026 ».
M. le président. La parole est à M. Emmanuel Capus, sur l’article.
M. Emmanuel Capus. Je prends la parole à la place de Laure Darcos, qui ne peut pas être présente à cette séance.
L’article 3 decies vise à proroger jusqu’au 31 décembre 2026 la réduction d’impôt dont bénéficient les contribuables souscrivant au capital des sociétés pour le financement de l’industrie cinématographique et audiovisuelle, les Sofica.
L’amendement de la commission des finances tend à supprimer le taux dérogatoire de 48 % pour ne conserver que le taux intermédiaire de 36 %. Il vise également à abaisser le montant du plafond de la réduction de 18 000 euros à 15 000 euros.
Laure Darcos et moi-même souhaitons vous alerter, mes chers collègues, sur les conséquences de cette initiative.
Pour rappel, les Sofica sont concurrencées par d’autres instruments financiers plus liquides, moins risqués, plus rentables. Le succès actuel du dispositif est donc extrêmement dépendant des caractéristiques de l’avantage fiscal défini par le législateur.
Entre 2012 et 2016, le taux de la réduction d’impôt historiquement fixé à 48 % a été plafonné à 36 %. En cinq ans, à l’époque, la création cinématographique et audiovisuelle a perdu 10 millions d’euros.
Le rétablissement du taux de 48 % à partir de 2017 a permis de renouer avec des collectes importantes et de renforcer les obligations pesant sur les Sofica. Celles-ci ont été incitées à diversifier davantage leurs investissements.
Avec la dégradation des conditions de l’avantage fiscal accordé aux Sofica, nous risquons de fragiliser un dispositif évalué très favorablement par l’inspection générale des finances et par la Cour des comptes, et, avec lui, l’ambition culturelle qu’il fondait.
J’ajoute que le dispositif des Sofica a un coût relativement modéré pour les finances publiques, de l’ordre de 35 millions d’euros.
C’est la raison pour laquelle je vous appelle, mes chers collègues, à maintenir la réduction d’impôt à son taux actuel. Elle est essentielle à l’économie du cinéma et de l’audiovisuel français.
M. le président. L’amendement n° I-163, présenté par M. Husson, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
L’article 199 unvicies du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa du 1, l’année : « 2023 » est remplacée par l’année : « 2026 » ;
2° Au 2, le montant : « 18 000 € » est remplacé par le montant : « 15 000 € » ;
3° Les alinéas 6 à 9 sont supprimés.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Je souhaite tout d’abord répondre à votre intervention, monsieur Capus, en soulignant que, si le coût de ce crédit d’impôt est modeste pour les finances publiques, son intérêt l’est tout autant pour les Sofica. Vous pourrez leur faire part de cette observation, tirée des propos que vous-même avez tenus.
Nous essayons, au maximum, d’utiliser les éléments à notre disposition et les travaux conduits au Sénat. Vous ne pouvez pas méconnaître le rapport d’information élaboré par notre collègue Roger Karoutchi dans le courant de cette année, au nom de la commission des finances. Il avançait un certain nombre de conclusions, que nous avons tous appréciées et approuvées. Il s’agit ici de mettre en œuvre une partie de ses recommandations.
Je rappelle à l’assemblée que les éléments chiffrés qui ont été rappelés témoignent d’un dispositif déjà fortement dérogatoire. L’idée n’est pas de créer des difficultés supplémentaires : comme cela a été dit précédemment, on ouvre parfois de nouveaux dispositifs et, dans d’autres cas, on en replace sur des trajectoires plus raisonnables. C’est le cas avec ce dispositif, qui serait d’ailleurs ramené à la situation d’avant la crise.
Je pense avoir, avec cette réponse, défendu l’amendement n° I-163 et je vois, par le sourire de notre collègue Emmanuel Capus, qu’il va finir par l’adopter. (Sourires.)
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. J’estime qu’il faut donner de la prévisibilité et de la stabilité aux acteurs, c’est pourquoi je rejoins l’argument du sénateur Emmanuel Capus.
M. Emmanuel Capus. Excellent !
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Nous donnons de la visibilité aux acteurs sur les trois prochaines années. C’est ce qu’ils nous demandent et le soutien au secteur mérite d’être prolongé. L’avis est donc défavorable sur l’amendement n° I-163.
M. le président. La parole est à Mme Sylvie Robert, pour explication de vote.
Mme Sylvie Robert. Même si, en effet, la mesure est tirée d’un rapport que nous connaissons, je suis assez surprise de voir le rapporteur général modifier ainsi un dispositif ayant fait ses preuves et montré combien il était utile pour le financement du cinéma.
Bien sûr, il faut de la visibilité. Mais, comme le soulignait M. le ministre, la stabilité est aussi extrêmement importante, au regard des enjeux nationaux et internationaux.
Nous devons garder à l’esprit le point fondamental évoqué par notre collègue Emmanuel Capus : lorsque le taux de l’avantage fiscal a été plafonné à 36 %, voilà quelques années, ce coup de rabot a immédiatement entraîné une sous-collecte de 10 millions d’euros, avec de fortes conséquences en termes d’investissement – plutôt de sous-investissement – dans la création cinématographique et audiovisuelle.
Par ailleurs, les Sofica représentent en moyenne 6 % à 7 % du budget d’un film, ce qui n’est pas rien pour la création cinématographique.
Je ne comprends pas bien que l’on fragilise ainsi le financement public de notre cinéma, au regard de ce que l’on attend de celui-ci, c’est-à-dire son rayonnement international, et du caractère fondamental de ces investissements en matière de création artistique. Cette préconisation de notre collègue Roger Karoutchi n’est franchement pas une bonne idée !
M. le président. La parole est à M. Éric Bocquet, pour explication de vote.
M. Éric Bocquet. J’interviens dans le même esprit que ma collègue Sylvie Robert à l’instant.
L’exception culturelle justifie l’exception de financement des arts et de la culture ! Par conséquent, il s’agit davantage d’interroger l’efficience des Sofica que de persister, de manière un peu dogmatique, dans une logique de baisse du financement public du cinéma, au motif, selon notre collègue Roger Karoutchi, que celui-ci serait un « art gâté ».
L’efficacité de la mesure fiscale liée aux Sofica est avérée. Selon le Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC), les 12 Sofica agréées en 2022 ont levé une enveloppe globale de 72,8 millions d’euros, qui sera investie dans le cinéma et l’audiovisuel en 2023. C’est un montant de collecte encore jamais atteint, en augmentation de 2 millions d’euros par rapport à 2021.
De plus, les Sofica agréées en 2022 ont consacré en moyenne 72 % de leurs investissements sous forme de contrats d’association vers des films aux devis inférieurs à 8 millions d’euros.
Enfin, rappelons que les Sofica ont récemment investi dans de nombreux longs métrages sélectionnés dans les très grands festivals internationaux.
M. le président. La parole est à M. Stéphane Sautarel, pour explication de vote.
M. Stéphane Sautarel. Je souhaite pour ma part soutenir cet amendement du rapporteur général, qui, en effet, s’inspire d’un rapport d’information de notre collègue Roger Karoutchi. S’il faut donner de la prévisibilité, monsieur le ministre, c’est peut-être en dessinant une trajectoire claire pour cette dépense fiscale, dont la collecte est certes évaluée comme bonne, mais dont les résultats en termes de rayonnement de notre cinéma soulèvent davantage d’interrogations.