Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Corinne Imbert, rapporteure. Si nous proposons d’encadrer la mesure et de la réserver aux primo-prescriptions par le médecin spécialiste, c’est pour ne pas accroître la charge administrative des médecins généralistes.

On peut imaginer que les primo-prescriptions, notamment des médicaments à fort enjeu financier, sont réalisées par des médecins spécialistes. Les généralistes, eux, s’occupent du renouvellement des traitements. Ne leur demandons pas à eux aussi de cocher les cases du formulaire, aussi simple et facile soit-il à remplir !

L’accord préalable de l’assurance maladie fait déjà attendre le patient ; les ordonnances permettent un contrôle a posteriori des prescriptions. Cette mesure peut être utile, mais elle doit être simple.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Aurélien Rousseau, ministre. Je comprends qu’il faille faire simple. Le téléservice proposé pourrait d’ailleurs être simple.

La mesure proposée par M. Iacovelli vise les 15 % à 20 % de médicaments qui sont prescrits en dehors de leur indication thérapeutique. Le problème relève beaucoup des médecins généralistes : je pense par exemple à la prescription d’antidiabétiques utilisés comme coupe-faim. (Mme Émilienne Poumirol en convient.)

Il s’agit, par ce dispositif très rapide, de responsabiliser un peu plus les médecins. Les volumes concernés ne sont pas « epsilonesques ». Je comprends les arguments avancés, mais la mesure proposée ne semble pas déraisonnable eu égard à l’intérêt qu’elle revêt en termes de maîtrise de la dépense, de pertinence des soins et de santé publique.

Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 1374.

(Le sous-amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 1159, modifié.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 33.

Article additionnel après l'article 33 - Amendement n° 1159
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024
Article 34 bis (nouveau)

Article 34

L’article L. 162-1-7 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° La deuxième phrase du I est ainsi modifiée :

a) Les mots : « pour les actes innovants » sont supprimés ;

b) Sont ajoutés les mots : « , dans la limite de dix-huit mois » ;

2° À la fin de la dernière phrase du premier alinéa du II et à la seconde phrase du second alinéa du III, les mots : « , renouvelable une fois pour les évaluations complexes » sont supprimés ;

3° Le second alinéa du II est remplacé par quatre alinéas ainsi rédigés :

« Peuvent proposer à la Haute Autorité de santé de s’autosaisir de l’évaluation du service attendu ou du service rendu d’un acte ou d’une prestation, selon des modalités définies par voie réglementaire :

« 1° Les conseils nationaux professionnels mentionnés à l’article L. 4021-3 du code de la santé publique ;

« 2° Les associations d’usagers agréées au titre de l’article L. 1114-1 du même code ;

« 3° L’exploitant, au sens du I de l’article L. 165-1-1-1 du présent code, d’un produit de santé mentionné aux articles L. 5211-1 ou L. 5221-1 du code de la santé publique, lorsque ce produit est, d’une part, porteur de l’action thérapeutique ou diagnostique de l’acte à évaluer et, d’autre part, à usage collectif. »

Mme la présidente. L’amendement n° 294, présenté par Mme Imbert, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Corinne Imbert, rapporteure. Par cet amendement, nous proposons de maintenir le renouvellement possible de la prise en charge provisoire des actes professionnels pour une période de trois ans.

Les actes innovants peuvent faire l’objet d’une inscription provisoire à la nomenclature pour une période initiale de trois ans, qui laisse le temps de recueillir les données nécessaires à une prise en charge pérenne.

L’article 34 a ouvert cette inscription sur la liste provisoire à tous les actes, y compris à ceux qui sont moins innovants. Il supprimait aussi initialement le renouvellement possible du délai de trois ans, l’adoption d’un amendement ayant finalement permis un renouvellement de dix-huit mois.

Après avoir interrogé la Haute Autorité de santé, il apparaît que ce nouveau délai de dix-huit mois reste insuffisant dans certaines situations. Confirmer ou non la prise en charge pérenne des actes suppose parfois de recueillir de nouvelles données en vie réelle sur cinq ans.

Cet amendement vise ainsi à maintenir le droit existant.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Aurélien Rousseau, ministre. Madame la rapporteure, vous reprenez l’argument de la Haute Autorité de santé sur ce délai. Je le comprends, mais sous l’égide de la rapporteure générale à l’Assemblée nationale, ce délai avait été fixé, par un jugement de Salomon, à dix-huit mois, ce qui nous semble équilibré. Il s’agit d’exercer une pression sur la HAS et d’éviter un allongement des dispositifs provisoires.

J’émets donc un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 294.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 295, présenté par Mme Imbert, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Supprimer les mots :

à la fin de la dernière phrase du premier alinéa du II et

La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Corinne Imbert, rapporteure. Cet amendement tend à conserver le délai supplémentaire dont dispose la Haute Autorité de santé pour rendre son avis sur l’inscription d’un acte aux nomenclatures, lorsque l’évaluation présente une complexité particulière.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Aurélien Rousseau, ministre. Il ne sera donc pas dit que la HAS n’est pas une autorité indépendante (Sourires.).

Le raisonnement est le même que précédemment : même si le maintien du délai est plus confortable pour la HAS, il l’est moins pour l’accès aux autorisations définitives.

J’émets donc un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 295.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 34, modifié.

(Larticle 34 est adopté.)

Article 34
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Après l’article 34 bis

Article 34 bis (nouveau)

L’avant-dernier alinéa du C du V de l’article L. 162-16-6 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :

« Les prescripteurs recueillent les données de suivi des patients traités, selon des modalités définies par décret. Ces données sont transmises, dans des conditions assurant le respect du secret médical, au Comité économique des produits de santé ainsi qu’à l’entreprise titulaire des droits d’exploitation, à l’entreprise assurant l’importation parallèle ou à l’entreprise assurant la distribution parallèle du médicament. L’entreprise titulaire des droits d’exploitation, l’entreprise assurant l’importation parallèle ou l’entreprise assurant la distribution parallèle du médicament participe en tout ou partie au financement du recueil des données. »

Mme la présidente. L’amendement n° 1178, présenté par Mme Poumirol, M. Jomier, Mme Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Lubin et Rossignol, MM. Redon-Sarrazy, Kerrouche, Chantrel et Lurel, Mme Bélim, MM. Jacquin, Ziane, Ouizille et Michau, Mmes Bonnefoy et Harribey, MM. Temal et Durain, Mme G. Jourda, MM. Féraud et Cardon, Mme Blatrix Contat, MM. Cozic, P. Joly et Stanzione, Mmes Conway-Mouret et Monier, MM. Chaillou, Tissot et Marie, Mme Artigalas, MM. Mérillou, Gillé et Montaugé, Mme Linkenheld et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 2, dernière phrase

Remplacer les mots :

en tout ou partie

par le mot :

intégralement

La parole est à Mme Émilienne Poumirol.

Mme Émilienne Poumirol. Cet amendement a pour objet de préciser que, dans le cadre de l’évaluation des traitements innovants, la prise en charge financière du recueil des données revient intégralement à l’entreprise titulaire des droits d’exploitation, à l’entreprise assurant l’importation parallèle ou à l’entreprise assurant la distribution parallèle du médicament.

Nous sommes favorables à la simplification de la collecte des données et à la réduction de la charge de saisie des données par les établissements de santé grâce à la standardisation des outils de recueil. Il nous apparaît toutefois important que le recueil des données d’efficacité visant à évaluer la performance des nouveaux médicaments reste assuré par les industriels.

Les établissements de santé ne disposent pas des moyens suffisants pour assurer cette tâche supplémentaire. La réduction persistante des moyens qui leur sont accordés nécessite d’indiquer clairement que ce recueil ne leur incombera pas financièrement.

L’Institut national du cancer (INCa) demande également de veiller à ce que ces sommes, versées au budget général de l’hôpital, soient bien affectées par la direction de l’hôpital à la recherche et à l’évaluation des données, ainsi qu’au financement de postes de chercheurs plutôt que de cliniciens.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Corinne Imbert, rapporteure. Avis défavorable.

L’article 34 bis permet l’utilisation de bases publiques contenant des données utiles afin de vérifier l’efficacité en vie réelle de médicaments de thérapie innovante. Une telle évolution me semble souhaitable. La participation des entreprises au financement du recueil des données peut demeurer partielle.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Aurélien Rousseau, ministre. Premièrement, nous n’allons pas faire peser la même charge sur tous les établissements de santé, puisque l’AP-HP assurera gratuitement l’accès à la base de données et la maintenance du dispositif.

Deuxièmement, si l’on insérait dans l’article l’adverbe « intégralement », ces données ne seraient plus publiques, puisque les entreprises les financeraient entièrement. Nous considérons qu’il faut maintenir le leadership public en matière de recueil des données. Si les entreprises finançaient exclusivement le dispositif, elles auraient davantage de prise sur ces données.

Je préfère le dispositif prévu dans l’article, à savoir une banque collective de données publiques, un rôle spécifique accordé à l’AP-HP et un financement partiel possible par l’industrie.

Mme la présidente. Madame Poumirol, l’amendement n° 1178 est-il maintenu ?

Mme Émilienne Poumirol. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 1178 est retiré.

Je mets aux voix l’article 34 bis.

(Larticle 34 bis est adopté.)

Article 34 bis (nouveau)
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Article additionnel après l'article 34 bis - Amendements n° 133 rectifié quater et n° 406 rectifié ter (début)

Après l’article 34 bis

Après l’article 34 bis
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Article additionnel après l'article 34 bis - Amendements n° 133 rectifié quater et n° 406 rectifié ter (interruption de la discussion)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 133 rectifié quater est présenté par MM. Milon, Burgoa, J.B. Blanc et Khalifé, Mmes Demas et Petrus et M. Sol.

L’amendement n° 406 rectifié ter est présenté par Mmes Lassarade et Berthet, MM. Anglars, Panunzi et Cadec, Mme Dumont, MM. Brisson et Bouchet, Mme M. Mercier, MM. Houpert, Bruyen et Allizard, Mmes Micouleau et Gosselin, M. Lefèvre, Mme Aeschlimann, MM. Saury et Mandelli, Mmes Belrhiti et Bonfanti-Dossat et MM. Gremillet, Sido et Rapin.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 34 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le premier alinéa du I de l’article L. 162-16-4 du code de la sécurité sociale est complété par les mots : « et des investissements réalisés sur le territoire national par l’entreprise exploitant le médicament, l’entreprise assurant l’importation parallèle du médicament ou l’entreprise assurant la distribution parallèle du médicament, y compris sous forme de partenariats avec des organismes de recherche ».

La parole est à M. Alain Milon, pour présenter l’amendement n° 133 rectifié quater.

M. Alain Milon. En juillet 2021, le Gouvernement présentait le plan Innovation Santé 2030, qui avait pour but de remettre la France sur le devant de la scène mondiale en matière d’innovation en santé et de permettre à l’ensemble des patients français de bénéficier des derniers traitements.

Dans cette compétition mondiale, la France a donc fait le choix de soutenir l’innovation afin de rester une terre d’accueil des révolutions médicales de demain. Plusieurs mécanismes ont été pour cela mis en place, ou doivent encore l’être, afin de faciliter l’accès des patients aux traitements innovants.

Pour autant, pour concevoir ces traitements nouveaux, l’écosystème de recherche et de développement a encore besoin d’un réel accompagnement pour que les ambitions affichées puissent pleinement se concrétiser.

Dans la loi de financement de la sécurité sociale 2022, le législateur avait introduit un mécanisme de protection du marché français contre les pénuries de médicaments en imposant une prise en compte de l’implantation des lieux de production des médicaments dans le calcul de leur prix. Or la souveraineté se joue également dans notre capacité à innover, à inventer les médicaments de demain, et non uniquement à produire ceux d’aujourd’hui.

Sur ce même modèle, afin de favoriser les investissements sur le territoire national dans la recherche médicale, nous proposons de prendre en compte ces derniers dans le calcul du prix des médicaments qu’ils permettent in fine de développer.

L’adoption de cet amendement n’entraînerait par ailleurs pas de charge nouvelle pour les finances sociales. Le dispositif permet d’adapter les critères de constitution des prix, afin d’en valoriser certains aspects au détriment d’autres.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Do Aeschlimann, pour présenter l’amendement n° 406 rectifié ter.

Mme Marie-Do Aeschlimann. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Corinne Imbert, rapporteure. Avis défavorable.

Les critères de constitution des prix, aujourd’hui fixés par le code de la santé publique, comprennent effectivement l’amélioration du service médical rendu, mais également, selon une disposition de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2022 que nous avions soutenue ensemble, mon cher collègue, la sécurité d’approvisionnement du marché français que garantit l’implantation des sites de production en France ou en Union européenne.

Ainsi, le prix du médicament tient déjà compte des investissements productifs réalisés par les entreprises en France pour ces mêmes médicaments.

L’amendement vise à prendre en compte les investissements de tous types réalisés par les entreprises en France, y compris en matière de recherche. S’il était adopté, cela reviendrait à tenir compte pour la fixation du prix de critères indépendants du médicament lui-même, de sa sécurité d’approvisionnement et de son apport thérapeutique.

Cela ne nous semble pas souhaitable, car cela pourrait entraîner une hausse importante du coût des médicaments. En outre, les investissements réalisés ne garantissent pas une amélioration du service médical rendu.

La commission demande donc le retrait de ces amendements ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Aurélien Rousseau, ministre. Je partage en tout point les propos de la rapporteure. Je crains que ce dispositif n’introduise un biais.

Il serait bien difficile de distinguer ce qui, dans la recherche et le développement, a fini par permettre la mise au point de tel ou tel médicament. Nous serions alors totalement entre les mains de l’industriel.

D’autres leviers, dont certains seront contestés sur une partie de vos travées, existent pour inciter les industriels à investir en France. L’évaluation du service médical rendu doit demeurer au cœur du calcul du prix du médicament. Il convient de ne pas trop diluer les critères pris en compte.

L’avis est donc défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 133 rectifié quater et 406 rectifié ter.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, nous avons examiné 239 amendements au cours de la journée ; il en reste 225 à étudier sur ce projet de loi de financement de la sécurité sociale.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Article additionnel après l'article 34 bis - Amendements n° 133 rectifié quater et n° 406 rectifié ter (début)
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Discussion générale

8

Ordre du jour

Mme la présidente. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, vendredi 17 novembre 2023 :

À neuf heures trente, le soir et la nuit :

Suite du projet de loi, considéré comme adopté par l’Assemblée nationale en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution, de financement de la sécurité sociale pour 2024 (texte n° 77, 2023-2024).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée le vendredi 17 novembre 2023, à zéro heure trente.)

Pour le Directeur des comptes rendus du Sénat,

le Chef de publication

FRANÇOIS WICKER