Mme Raymonde Poncet Monge. Il fallait bien, à un moment donné, qu’on parle des finances publiques !
Comme je l’ai dit au sujet de l’Agirc-Arrco, leur situation est consolidée, notamment vis-à-vis de l’Europe. Le fait que vous passiez les réserves d’une caisse à une autre ne change rien du point de vue des exigences européennes ; ce n’est qu’un jeu de bonneteau.
Quant à l’excédent, il ne provient pas seulement, monsieur le ministre, de votre politique de l’emploi – dont il y aurait beaucoup à dire, d’ailleurs. Il résulte aussi des différentes réformes de l’assurance chômage, c’est-à-dire qu’il a été permis en restreignant les droits des travailleurs à percevoir une indemnisation et en réduisant le montant de celle-ci.
En effet, vous dégagez des excédents en réduisant les droits et vous dites ensuite aux chômeurs qu’ils doivent participer à la politique de l’emploi ! C’est tout de même légèrement pervers…
S’agissant de la politique de l’emploi, j’aimerais bien que l’Unédic ait un droit de regard sur elle, comme elle le demande, d’ailleurs. Au départ, c’était l’État qui payait à travers Pôle emploi - demain France Travail - ; puis, la part prise en charge par l’Unédic n’a cessé de croître, à 10 %, 11 %, puis 12 %. S’il faut comprendre que l’Unédic devra payer 100 % de la politique étatique de l’emploi, dites-le clairement, monsieur le ministre.
Dans ce cas, il faudra que l’organisme puisse exercer un droit de regard. Par exemple, l’Unédic s’intéresse à la qualité de l’emploi en distinguant notamment les contrats à durée déterminée et les emplois durables. Ses représentants ne seront peut-être pas d’accord avec vos mesures qui ont pour effet de fragiliser le dispositif « territoires zéro chômeur de longue durée ». Si l’Unédic paie, il lui revient aussi de décider en partie de la qualité de la politique de l’emploi qui doit être mise en œuvre. Or vous en décidez de façon unilatérale.
Mme la présidente. La parole est à Mme Audrey Linkenheld, pour explication de vote.
Mme Audrey Linkenheld. Dans le droit fil de ce qu’ont dit mes collègues, notamment Alexandre Ouizille, je veux indiquer que notre propos ne porte pas sur la politique de l’emploi ou la politique économique ; il est de rappeler ce qu’est le rôle de l’Unédic. En réalité, celui-ci n’est pas de contribuer à la politique de l’emploi ou à la politique économique du Gouvernement (M. le ministre le conteste.), quand bien même les équations que vous avez présentées auraient du sens, philosophiquement. L’Unédic est un organisme qui est soumis à des statuts et dont la mission et le rôle lui ont été assignés par les textes sur lesquels les partenaires sociaux se sont accordés.
Je me permets d’ailleurs de les citer : « Les missions de l’Unédic sont de conseiller les partenaires sociaux, de sécuriser les règles d’assurance chômage, de sécuriser le financement des allocations versées aux demandeurs d’emploi […]. L’Unédic a aussi une mission pédagogique pour rendre accessibles les règles aux demandeurs d’emploi. »
Par conséquent, l’Unédic n’a pas pour rôle de réduire la dette de l’État ni d’apporter les recettes complémentaires dont celui-ci a besoin parce que, à un moment donné, le Gouvernement a fait le choix, dans le cadre de sa politique de l’emploi ou de sa politique des retraites, de dépenser de l’argent en faveur des travailleurs, des chômeurs ou de retraités.
C’est la raison pour laquelle nous avons déposé cet amendement de suppression. Plus largement, cela justifie aussi que nous nous opposons aux ponctions qui sont opérées sur d’autres structures gérées par les partenaires sociaux, par exemple lorsque le Gouvernement prévoit qu’Action Logement financera la politique du logement.
Monsieur le ministre, nous ne sommes pas forcément en désaccord avec les grands équilibres que vous défendez ; nous rappelons simplement que ce que prévoit l’alinéa 19 n’entre pas dans le rôle de l’Unédic.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. En ce qui me concerne, je ne vois pas ce qui empêche les partenaires sociaux d’utiliser une partie de leurs excédents pour participer à la création d’emplois ou au développement de l’apprentissage. Le nombre des contrats en apprentissage a doublé grâce à un important soutien financier de l’État et c’est un grand succès.
À mon avis, il est tout à fait possible que les partenaires sociaux participent à la politique de l’emploi aux côtés de France compétences et de France Travail, s’ils le souhaitent, ainsi que le Gouvernement.
Il n’y aurait rien là de contre-nature dans la mesure où les partenaires sociaux s’intéressent aussi à l’emploi et à la formation.
Certes, l’Unédic a une dette importante, 60 milliards d’euros, de sorte qu’il faut que les excédents servent d’abord à réduire son montant. Mais pourquoi ne pas en utiliser une partie pour soutenir la politique de l’emploi si les partenaires sociaux sont d’accord ?
Rien de cela ne me choque. Je m’abstiendrai sur ces amendements.
Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Lubin, pour explication de vote.
Mme Monique Lubin. Monsieur le ministre, vous avez fait le parallèle avec ce que nous vous avons opposé précédemment au sujet de l’Agirc-Arrco, ce qui me donne l’occasion de répéter nos arguments. En réalité, là encore, vous faites les poches des salariés (M. le ministre délégué le nie.), car ce sont tout de même leurs cotisations que vous proposez de ponctionner.
De plus, chacun sait que la vie économique connaît des fluctuations, des hauts et des bas. Je préférerais donc que l’on garde les fonds de l’Unédic pour venir en aide aux demandeurs d’emploi, d’autant que les chiffres du chômage commencent à remonter – et je ne le souhaite pas, bien évidemment.
En outre, la réforme des retraites risque d’aggraver la situation des chômeurs de longue durée. Cela est quasi certain parce que le problème de l’emploi des seniors n’est toujours pas réglé. Même si l’on en parle, personne ne trouve les mesures adéquates.
Par conséquent, certains risquent de se retrouver au chômage sur une durée longue. Je préférerais que l’on travaille à garantir l’avenir de ces personnes et que l’on revienne sur les mesures de restriction d’indemnisation qui ont été prises pour les chômeurs de plus de 55 ans. Le besoin est réel. Je gage que nous en reparlerons dans quelques mois…
Mme la présidente. La parole est à Mme Michelle Gréaume, pour explication de vote.
Mme Michelle Gréaume. J’entends bien ce que vous nous dites, monsieur le ministre : il faut financer la politique du plein emploi que le Gouvernement veut mettre en place. Toutefois, je tiens à rappeler que, le 29 septembre dernier, les syndicats et le patronat se sont associés dans une déclaration commune contre cette ponction sur l’Unédic.
Ma collègue a eu tout à fait raison de rappeler que le rôle de l’Unédic n’est pas celui que vous voulez lui donner. Il faut écouter les salariés qui s’expriment dans la rue. Ils ont cotisé, ils continuent de cotiser et, bien sûr, leur but n’est pas de finir au chômage, mais de travailler et de construire leur avenir. Toutefois, ils ne sont pas à l’abri d’un accident de la vie et ils peuvent se retrouver au chômage. Or la réforme du chômage leur est tombée dessus, puis la réforme des retraites. À force de tacler les salariés, la situation risque de se tendre dans notre pays.
Je vous le dis sincèrement, monsieur le ministre : l’Unédic n’est pas faite pour ce que vous voudriez en faire, mais pour répondre aux accidents de la vie.
De plus, ce que vous proposez risque d’avoir pour conséquence la hausse du nombre d’arrêts maladie. Après les économies que vous ferez grâce à l’Unédic, viendra une autre réforme de l’assurance chômage et, à force de faire des réformes, le nombre d’arrêts maladie augmentera. Vous commencez par proposer cette ponction, laquelle sera suivie, à n’en pas douter, d’autres mesures.
Mme la présidente. La parole est à M. Alexandre Ouizille, pour explication de vote.
M. Alexandre Ouizille. Monsieur le ministre, vous nous disiez qu’il fallait que nous ayons le souci de l’État et de sa santé financière. Certes, mais commencez par vous ! Depuis le début de l’examen de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, vous semblez organiser les difficultés de l’État.
Ma collègue Lubin a raison de dire que vous faites les poches des salariés. En réalité, vous avez tronqué le budget de l’État du produit d’un certain nombre d’impôts qui étaient à votre main : après avoir réduit la fiscalité des entreprises, ainsi que celle des ménages les plus aisés avec la suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune, vous venez nous dire qu’il faut bien vous rattraper quelque part, en faisant les poches de l’Unédic ou bien celles des uns et des autres.
Or ces organismes sont endettés, comme l’ont rappelé mes collègues, et dans la mesure où l’on peut être sûr qu’une crise « majuscule » interviendra dans les trois, quatre, cinq ou six prochaines années, ils auront à financer des dépenses d’assurance chômage, de sorte qu’ils seront de nouveau en difficulté.
Parce que vous refusez d’organiser un financement correct de l’État et de la sécurité sociale, vous essayez de trouver des solutions à la petite semaine, si bien que le problème ne manquera pas de ressurgir.
Par conséquent, nous vous encourageons à traiter les choses de manière structurelle plutôt que d’aller chercher dans les poches des uns et des autres pour trouver des solutions dont l’efficacité ne durera qu’un instant.
Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.
M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales. Depuis plusieurs minutes, nous débattons des relations entre les collectivités territoriales, les partenaires sociaux, l’Unédic et l’État, ce dernier manifestant sa volonté soit de mal compenser les départements, soit de prélever dans les recettes et les excédents des structures.
Comme nous l’avons indiqué lors de la discussion générale, la situation financière de la sécurité sociale est extrêmement tendue et compliquée, et la trajectoire que vous proposez, monsieur le ministre, amplifie encore ces difficultés.
Depuis le début de l’examen du texte, nous ne vous avons entendu proposer que très peu de mesures d’économie ou de réforme. En revanche, nous avons entendu que vous vouliez prélever de l’argent chez ceux qui ont certes bénéficié des réformes nationales, mais qui se sont également montrés de bons gestionnaires.
Quant aux départements, leur situation relève d’un pacte de confiance avec l’État. Or ils sont mal compensés – leurs représentants l’ont dit. L’État prend des décisions en matière de politique sociale, les départements paient et ne sont pas compensés à juste hauteur.
Certes, nous pouvons comprendre qu’il y a là une vraie difficulté pour l’État. Toutefois, l’essentiel de notre démarche vise à ce que celui-ci prenne ses responsabilités en matière de réformes.
Par exemple, dans quelques semaines, nous devrons examiner la proposition de loi portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir en France. Le volet financier qui accompagnera ce texte ne manque pas de nous inquiéter, car le Gouvernement reporte en permanence les dépenses sur les départements. Le sujet est important.
Par conséquent, il me semble que les réponses que vous avez données à mes collègues restent insuffisantes et que vous devriez aussi nous faire des propositions qui témoignent de la capacité de l’État à faire lui-même des économies de gestion. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
En miroir de cette intervention, il faudra nous montrer respectueux envers les finances de l’État, lors de l’examen des amendements portant articles additionnels après l’article 10, qui prévoient d’introduire des demandes d’exonération pour diverses catégories socioprofessionnelles dans divers domaines d’activité. En effet, d’un côté nous demandons une meilleure gestion de l’État ; de l’autre, prenons garde qu’il se retrouve en difficulté.
Gardons en tête que nous devrons faire preuve de responsabilité et ayons un discours cohérent : demandons à l’État de mieux faire, mais, en même temps, soyons sérieux dans les décisions que nous prendrons. (M. le ministre délégué approuve.)
Mme Michelle Gréaume. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Le président de la commission des affaires sociales nous enjoint – à tout le moins nous y encourage - de faire des réformes pour faire des économies.
Mme Cathy Apourceau-Poly. La réduction Fillon !
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. J’en citerai deux. Nous avons conduit une réforme de l’assurance chômage dont chacun peut désormais mesurer les bénéfices par les excédents qu’elle permet de dégager. Cette réforme générant plusieurs milliards d’euros d’économies, il est normal qu’une partie de ces excédents contribuent au redressement des finances publiques – ayons le courage de le dire ! Et c’est aussi le cas de la réforme des retraites. (Mme Émilienne Poumirol s’exclame.)
Oui, nous continuons de mener des réformes structurelles, mais allons jusqu’au bout du raisonnement ! Il n’est pas anormal que les économies résultant de ces réformes qui ont été assumées courageusement, notamment par mon collègue Olivier Dussopt (Vives exclamations sur les travées du groupe SER.), puissent contribuer au redressement des finances publiques.
Laissez-moi conclure mon propos !
Le président de la commission des affaires sociales a raison d’appeler les uns et les autres à la responsabilité avant l’examen des prochains amendements, qui visent, de fait, à dégrader la situation de nos finances publiques.
Je viens de vous donner deux exemples de réformes que nous avons conduites. Il n’y a rien d’anormal à ce que nous en tirions les bénéfices pour le redressement des finances publiques.
Je déplore en effet que ce sujet-là ne soit pas davantage au cœur de nos débats, puisque je dois chaque fois expliquer pourquoi nous souhaitons que ces réformes, qui génèrent des économies, puissent contribuer au redressement des finances publiques. On ne peut pas accepter un déficit public à 5 % du PIB. Sa réduction doit être la conséquence directe des réformes engagées par notre majorité. (Mmes Émilienne Poumirol et Michelle Gréaume protestent.)
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 230, 839 rectifié et 1214 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. L’amendement n° 906, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Brulin, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Alinéa 20
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Céline Brulin.
Mme Céline Brulin. Dans la lignée des amendements que mes collègues ont précédemment défendus, celui-ci vise à supprimer l’alinéa 20 de l’article 10. En effet, nous refusons que s’opèrent des prélèvements sur l’Unédic.
Monsieur le ministre, vous nous dites que nous pensons aux collectivités territoriales, aux partenaires sociaux ou aux différentes caisses, mais pas à l’État !
Prenons donc rendez-vous pour l’examen du projet de loi de finances. Le groupe communiste présentera de nombreux amendements visant à dégager de nouvelles recettes pour les finances de l’État. Nous espérons que vous serez à nos côtés pour les soutenir.
M. Laurent Burgoa. On les connaît vos recettes !
Mme Céline Brulin. D’ailleurs, dans le cadre de l’examen de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, nous débattons beaucoup de la manière de réduire les dépenses, mais bien plus rarement de celle par laquelle nous pourrions améliorer les recettes.
À ce propos, je vous remercie, monsieur le président de la commission, d’avoir fait ce rappel à l’ordre sur les mesures d’exonération dont nous débattrons lors de l’examen des amendements portant articles additionnels après l’article 10. En effet, les exonérations deviennent une plaie pour le financement de la protection sociale.
Monsieur le ministre, il faudrait éviter les provocations. Dire que la réforme des retraites, notamment les mesures sur l’Unédic, générera des économies, cela reste à prouver. Les spécialistes sont nombreux à expliquer que le coût social de cette réforme risque d’être considérable.
Enfin, vous vous faites le grand défenseur du paritarisme, mais les récentes – et douloureuses - négociations sur l’Unédic ont été pilotées par une lettre de cadrage extrêmement stricte, qui s’apparente à du verrouillage. Parlons-en donc ! Et je ne reviens pas sur la contribution de l’Unédic à France Travail, qui ne cesse de croître.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. En réalité, ma chère collègue, vous auriez dû supprimer l’alinéa 19 et non pas l’alinéa 20, qui ne fait que renvoyer à un décret. Malgré tout l’intérêt de votre diatribe, l’avis de la commission est défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Avis défavorable pour les raisons que j’ai développées précédemment.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 10, modifié.
(L’article 10 est adopté.)
Après l’article 10
Mme la présidente. L’amendement n° 1206 rectifié, présenté par M. Chantrel, Mme Conway-Mouret, M. Jomier, Mme Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Lubin, Poumirol et Rossignol, MM. Redon-Sarrazy, Kerrouche et Lurel, Mme Bélim, MM. Jacquin, Ziane, Ouizille et Michau, Mmes Bonnefoy et Harribey, MM. Temal et Durain, Mme G. Jourda, MM. Féraud et Cardon, Mme Blatrix Contat, MM. Cozic, P. Joly et Stanzione, Mme Monier, MM. Chaillou, Tissot et Marie, Mme Artigalas, MM. Mérillou, Gillé et Montaugé, Mme Linkenheld et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le 3° bis de l’article L. 131-8 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Au a, le taux : « 6,67 % » est remplacé par le taux : « 6,66 % » ;
2° Il est ajouté un d ainsi rédigé :
« d) À la Caisse des Français de l’étranger, mentionnée à l’article L. 766-4-1, pour la contribution mentionnée à l’article L. 136-1, pour la part correspondant à un taux de 0,01 % ; ».
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Yan Chantrel.
M. Yan Chantrel. À travers cet amendement, je veux revenir sur un sujet que nous avons déjà abordé au cours du débat, à savoir le besoin de financement de la Caisse des Français de l’étranger.
En effet, la CFE est chargée, en partie, d’une mission de service public. Or elle est financée uniquement par ses adhérents puisqu’aucune taxe ne lui est affectée et qu’elle ne bénéficie d’aucun soutien de l’État, hormis pour la catégorie aidée, à hauteur de 380 000 euros.
Elle garantit pourtant une couverture essentielle à nos compatriotes et assure une action de service public puisque la plupart de ceux qui y sont affiliés ne sont pas pris en charge par les assurances privées. C’est le cas, notamment, des personnes âgées ou de celles qui souffrent d’une affection de longue durée. D’où l’importance de pouvoir financer la caisse à hauteur du service public qu’elle fournit.
Cet amendement vise donc à affecter à la CFE une part de la CSG-CRDS, qui est également payée par nos compatriotes établis hors de France. Ainsi pourra s’exercer une pleine solidarité.
Monsieur le ministre, contrairement à ce que vous avez dit précédemment, le déficit de la caisse est structurel et s’il continue de se creuser durant les deux ou trois prochaines années, la CFE risque d’aller vers une quasi-faillite.
Il est essentiel que le Gouvernement prenne sa part de responsabilité en finançant à sa juste mesure la Caisse des Français de l’étranger, soit 25 millions d’euros selon les évaluations qui ont été faites.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Nous avons déjà évoqué le financement de Caisse des Français de l’étranger lorsque nous avons examiné l’amendement de Mme Vogel, dont l’objet était de prélever 0,1 point de la CSG attribuée à la Cades. Vous proposez dans votre amendement de prélever le Fonds de solidarité vieillesse (FSV). L’avis est défavorable, comme précédemment.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. En effet, nous avons déjà évoqué ce sujet et, pour les mêmes raisons que celles qui ont été données par la rapporteure générale, je ne suis pas favorable à ce que l’on détourne une partie d’une recette pour alimenter la CFE.
Je reste néanmoins ouvert à l’idée de faire le bilan de la réforme de 2018, qu’Anne Genetet avait défendue à l’Assemblée nationale, afin que nous puissions examiner ensemble les aménagements éventuels à apporter à ce dispositif.
Avis défavorable.
Mme la présidente. La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret, pour explication de vote.
Mme Hélène Conway-Mouret. Comme vient de le rappeler notre collègue Yan Chantrel, la Caisse des Français de l’étranger assure avant tout une mission de service public. Sa situation a été améliorée grâce au vote, voilà quelques années, d’une loi dont le Sénat avait pris l’initiative, mais elle souffre désormais d’un manque de soutien financier, alors qu’elle en a bien besoin.
En effet, pour accomplir sa mission sociale, la CFE ne peut compter que sur les recettes provenant des contrats d’adhésion, contrairement aux caisses primaires d’assurance maladie, qui bénéficient, quant à elles, de recettes complémentaires issues du produit de la CSG-CRDS ou des taxes affectées.
Par cet amendement, nous proposons d’allouer à la Caisse des Français de l’étranger une partie du produit de la fraction de CSG sur les revenus du patrimoine et sur les revenus de placements affecté au Fonds de solidarité vieillesse. Cela permettrait de renforcer notre modèle d’assurance santé à l’étranger et, in fine, de mieux répondre aux besoins de nos compatriotes.
C’est la raison pour laquelle je vous invite à voter cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Yan Chantrel, pour explication de vote.
M. Yan Chantrel. Monsieur le ministre, j’ai entendu votre réponse et je m’en félicite. Si vous pouviez mettre en place un groupe de travail spécifique et transpartisan sur le sujet, l’initiative serait en effet bienvenue.
D’ailleurs, je tiens à vous signaler que l’ensemble des sénateurs des Français établis hors de France, ainsi que quelques députés des Français de l’étranger, ont saisi le président du Sénat, la présidente de l’Assemblée nationale et le Gouvernement pour organiser des assises de la protection sociale concernant nos compatriotes établis hors de France. Vous pourriez profiter de ces assises pour lancer un débat plus large sur la protection sociale des Français de l’étranger.
Mme la présidente. La parole est à M. Christophe-André Frassa, pour explication de vote.
M. Christophe-André Frassa. Je remercie Mme Conway-Mouret d’avoir rappelé la loi sur la réforme de la CFE, que nous avons adoptée et dont j’étais à l’origine.
M. André Reichardt. Charité bien ordonnée… (Sourires.)
M. Christophe-André Frassa. Il est vrai que la caisse souffre aujourd’hui d’un problème, récent celui-ci. Je ne pense pas que la solution soit de détourner une partie de la CSG.
Toutefois, monsieur le ministre, j’attire votre attention sur la mission de service public qu’assure la CFE, comme viennent de le rappeler mes collègues. En effet, on a obligé la Caisse des Français de l’étranger à prendre en charge ce que l’on désigne comme la « troisième catégorie aidée ». Or l’État ne remplit pas sa mission, car les budgets alloués à cette troisième catégorie aidée, dans le cadre de l’aide sociale, ne sont jamais au rendez-vous.
La Caisse des Français de l’étranger a besoin du concours de l’État pour remplir sa mission sur la troisième catégorie aidée, c’est-à-dire pour couvrir socialement nos compatriotes les plus démunis. C’est là que l’effort doit porter.
Mme la présidente. L’amendement n° 799 rectifié bis, présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, MM. Parigi et Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° L’article L. 135-3 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les recettes du Fonds de solidarité vieillesse sont par ailleurs constituées d’une fraction du produit de la contribution sociale mentionnée au I de l’article L. 136-7-1 à concurrence d’un montant correspondant à l’application d’un taux de 3 % à l’assiette de cette contribution. » ;
2° Au 3° du I de l’article L. 136-8, le taux : « 6,2 % » est remplacé par le taux : « 9,2 % ».
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Entre 2014 et 2019, les investissements publicitaires des opérateurs de jeux en ligne et de paris sportifs ont augmenté de 25 %. Ce secteur fait l’objet de campagnes publicitaires intenses, voire agressives, qui incitent fortement à des pratiques de jeu excessives.
Dans une analyse comparée des opérateurs, publiée en juillet 2020, l’Autorité nationale des jeux (ANJ) a ainsi remarqué « un ciblage renforcé des jeunes avec des stratégies de marketing digital sur les réseaux sociaux Snapchat et TikTok ».
Selon cette analyse, trois parieurs en ligne sur quatre ont moins de 34 ans et ce public est particulièrement vulnérable à des phénomènes d’addiction.
À cet égard, les chiffres de Santé publique France sont éloquents. Selon cet organisme, « les paris sportifs représentent le risque le plus important au plan individuel : la part des joueurs à risque modéré est trois fois plus importante que pour les jeux de loterie et la part de joueurs excessifs six fois plus élevée ».
Or cette addiction peut avoir des impacts sociaux graves, car elle touche majoritairement une population déjà précaire.
Dans une étude de 2019, l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT) relève que « les pratiques [de jeu] à risques modérés ou excessifs se rencontrent chez des hommes plus jeunes, issus de milieux sociaux modestes, ayant un niveau d’éducation et des revenus inférieurs à ceux des autres joueurs ».
La régulation des jeux et des paris sportifs en ligne semble donc un impératif. Aujourd’hui, 40 % du chiffre d’affaires des opérateurs de jeux d’argent provient de personnes ayant une pratique excessive.
En conséquence, cet amendement vise à réguler ces plateformes tout en fournissant des pistes de financement pour la sécurité sociale, en augmentant le taux de CSG sur les paris sportifs, les recettes supplémentaires ainsi perçues étant consacrées à la prise en charge du grand âge, via le FSV.