Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Loïc Hervé, rapporteur. Si cet amendement était adopté, le juge pourrait prévoir, à titre de peine complémentaire, non seulement le blocage du ou des comptes qui ont permis la commission de l’infraction, mais aussi celui des autres comptes de la personne condamnée.
Cette piste a été explorée par le Gouvernement et par votre serviteur, mais elle semble contraire à la Constitution. Il ne me paraît pas judicieux de prendre ce risque. Au demeurant, il est plausible que les infractions donnant lieu au prononcé de cette peine complémentaire soient commises en utilisant plusieurs comptes et plusieurs plateformes.
La nouvelle rédaction adoptée par la commission spéciale garantit que le juge puisse prononcer le blocage de tous les comptes d’accès concernés. Cette rédaction intermédiaire permet de répondre en partie à votre argumentaire, mon cher collègue.
L’avis de la commission spéciale est donc défavorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° 68 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme le président. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 133, présenté par M. L. Hervé, au nom de la commission spéciale, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 5, seconde phrase
Remplacer le mot :
précités
par les mots :
faisant l’objet d’une suspension
II. – Alinéa 6
Remplacer les mots :
visés par la peine complémentaire
par les mots :
faisant l’objet d’une suspension
III. – Alinéa 21
Remplacer le mot :
accéder
par les mots :
utiliser un compte d’accès
IV. – Alinéa 24
Remplacer les mots :
accéder à certains services désignés par la juridiction
par les mots :
utiliser un compte d’accès à certains services en ligne désignés par la juridiction de condamnation ou par le juge d’application des peines
V. – Alinéas 25 et 26
Rédiger ainsi ces alinéas :
II. – Après le 19° de l’article 41-2 du code de procédure pénale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° Ne pas utiliser, pour une durée qui ne saurait excéder six mois, un compte d’accès à un ou des services de plateforme en ligne définis au 4° du I de l’article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance en l’économie numérique, services de réseaux sociaux en ligne et services de plateformes de partage de vidéo au sens du règlement 2022/1925 du Parlement européen et du Conseil du 14 septembre 2022 relatif aux marchés contestables et équitables dans le secteur numérique et modifiant les directives (UE) 2019/1937 et (UE) 2020/1828. »
La parole est à M. le rapporteur.
Mme le président. L’amendement n° 116, présenté par MM. Haye, Patriat, Iacovelli, Bargeton et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 21
Remplacer les mots :
lorsque l’infraction a été commise en recourant à un service en ligne, y compris si celui-ci n’a pas été le moyen unique ou principal de cette commission
par les mots :
pour les délits prévus au II de l’article 131-35-1 du présent code
II. – Alinéa 24
Remplacer les mots :
Lorsque l’infraction a été commise en recourant à un service en ligne, y compris si celui-ci n’a pas été le moyen unique ou principal de cette commission
par les mots :
Pour les délits prévus au II de l’article 131-35-1 du présent code
III. – Alinéa 26
Compléter cet alinéa par les mots :
. Les dispositions du présent alinéa s’appliquent pour les délits prévus au II de l’article 131-35-1 du code pénal
La parole est à M. Ludovic Haye.
M. Ludovic Haye. Cet amendement vise à calquer la liste des délits pouvant déclencher ces nouveaux dispositifs de bannissement numérique sur celle des délits pouvant déclencher la peine complémentaire prévue à l’article 131-35-1 du code pénal.
Au sein de la commission spéciale, nous avons proposé de nouvelles modalités d’application du bannissement numérique. Or les peines limitatives de la liberté d’expression rendent nécessaires des garanties fortes en termes de proportionnalité, de champ d’application et de durée.
Cet amendement vise à apporter ces garanties.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Loïc Hervé, rapporteur. Vous proposez, mon cher collègue, de limiter l’application du bannissement, en tant que modalité d’exécution des peines, aux délits visés par ledit bannissement prononcé en tant que peine complémentaire. Or c’est tout l’inverse de ce que la commission spéciale a voulu faire !
Si nous adoptions votre amendement, on ne pourrait jamais bannir une personne qui a commis un crime, car la liste à laquelle vous faites référence ne comporte que des délits. En d’autres termes, et pour illustrer mon propos, si un prédateur sexuel ayant recruté ses victimes sur internet était placé en liberté conditionnelle, on ne pourrait, à la fin de sa peine, lui interdire d’aller sur certains réseaux sociaux.
Là encore, il convient de mener une réflexion pour trouver le bon équilibre. Je pourrais accepter votre amendement si vous proposiez que le bannissement soit encouru seulement pour certains crimes et délits bien identifiés. Mais votre rédaction est beaucoup trop restrictive, et elle aurait pour conséquence de priver cette nouvelle arme de sa portée. Vous manquez ainsi l’occasion de mieux protéger les victimes et la société.
Nous avons prévu à cet égard, je vous le rappelle, que le juge ne puisse prononcer le bannissement que si l’auteur est condamné pour une infraction commise en ligne. Ce garde-fou d’importance me semble pleinement garantir la conformité à la Constitution du texte adopté par la commission.
Je sollicite donc le retrait de cet amendement, lequel deviendrait d’ailleurs sans objet si l’amendement n° 133 que je viens de présenter était adopté.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué. Je souhaite, tout d’abord, saluer le travail du rapporteur Loïc Hervé, qui, partant de cet article 5 créant une peine complémentaire de bannissement pour les personnes reconnues coupables de certains délits, a prévu que ledit bannissement puisse être prononcé dans le cadre du sursis probatoire, de la composition pénale ou comme peine alternative à une peine d’emprisonnement. Ce triple dispositif vient s’ajouter au dispositif initial, et c’est une bonne chose.
Le Gouvernement considère cependant que, pour garantir la sécurité juridique du dispositif, il faut l’entourer de toutes les précautions ayant prévalu lors de la rédaction de l’article 5. Il convient ainsi d’apporter des précisions portant sur la durée du bannissement et sur les délits ou crimes pouvant faire l’objet du bannissement prononcé en tant que tel ou en tant que peine complémentaire.
C’est la raison pour laquelle j’émets un avis favorable sur l’amendement n° 133 qu’a présenté M. le rapporteur et qui vise à apporter des précisions à cet égard.
En ce qui concerne l’amendement n° 116, l’avis est également favorable, même s’il est probable que cette disposition devienne sans objet, dans la mesure où il tend à circonscrire la liste des délits pour lesquels le juge a la faculté de prononcer une peine de bannissement dans les trois cas ouverts par le rapporteur – composition pénale, sursis probatoire et peine alternative.
Mme le président. En conséquence, l’amendement n° 116 n’a plus d’objet.
L’amendement n° 117 rectifié, présenté par MM. Haye, Patriat, Iacovelli, Bargeton et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 9
Supprimer la référence :
222-33-1-1,
II. – Alinéa 11
Rédiger ainsi cet alinéa :
« 3° Les délits prévus aux articles 226-1 à 226-2-1, 226-4-1, 226-8 et 226-8-1 ;
III. – Alinéa 15
Remplacer la référence :
431-6
par les mots :
et au deuxième alinéa de l’article 431-6
La parole est à M. Ludovic Haye.
M. Ludovic Haye. Cet amendement vise à modifier la liste des délits, en retenant ceux qui sont punis de deux ans de prison minimum et de 30 000 euros d’amende – à l’exception des délits de presse –, qui constituent des abus de liberté d’expression et qui sont en lien direct avec l’utilisation des réseaux sociaux. Je rejoins ici les propos de Patrick Chaize.
La commission spéciale a élargi la liste de délits pouvant faire l’objet de la peine complémentaire prévue à l’article 5 du présent projet de loi. Il s’agit, au travers de cet amendement, d’affirmer le respect du principe de proportionnalité des peines.
Mme le président. Le sous-amendement n° 143, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Amendement 117, alinéas 4 à 11
Remplacer ces alinéas par dix-sept alinéas ainsi rédigés :
II. – Alinéa 10
Remplacer les mots :
, 225-6 et 225-10
par les mots :
et 225-6
III. – Alinéa 11
Rédiger ainsi cet alinéa :
« 3° Le délit prévu à l’article 226-2-1 ;
IV. – Alinéa 13
Supprimer la référence :
, 226-10
V. – Alinéa 15
Rédiger ainsi cet alinéa :
« 7° Les délits prévus aux articles 211-2, 223-13, 223-14, 227-18, 227-18-1, 227-21, 412-8 et au deuxième alinéa de l’article 431-6 ;
VI. – Alinéa 17
Supprimer la référence :
431-1,
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué. Ce sous-amendement vise, comme l’amendement n° 117 rectifié que vient de présenter M. Haye, à préciser la liste des délits en retenant ceux qui, punis de sanctions lourdes, constituent des abus de liberté d’expression et sont en lien direct avec l’utilisation des réseaux sociaux.
Il me semble important de circonscrire le champ des délits pour lesquels le juge a la faculté de prononcer, notamment, la peine de bannissement, afin de garantir la sécurité du dispositif.
Je suis donc favorable à l’amendement n° 117 rectifié, sous réserve de l’adoption de ce sous-amendement.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Loïc Hervé, rapporteur. En ce qui concerne l’amendement n° 117 rectifié du groupe RDPI, que nous avons examiné ce matin, la commission spéciale s’était déclarée prête à émettre un avis favorable sous réserve de plusieurs rectifications, lesquelles ont été apportées.
Or le Gouvernement revient sur ces rectifications au travers de son sous-amendement n° 143.
Pour ma part, je demeure favorable à cet amendement approuvé par la commission spéciale, laquelle a suivi sa position constante depuis le début de nos travaux sur ce texte, mais j’émets un avis tout à fait défavorable sur le sous-amendement du Gouvernement.
Mme le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 143.
(Le sous-amendement n’est pas adopté.)
Mme le président. L’amendement n° 118, présenté par MM. Haye, Patriat, Iacovelli, Bargeton et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :
Alinéa 21
Remplacer les mots :
trois ans
par les mots :
six mois
La parole est à M. Ludovic Haye.
M. Ludovic Haye. Cet amendement vise à calquer la durée du nouveau dispositif de bannissement numérique dans le cadre d’une peine susceptible d’être prononcée à la place de l’emprisonnement – ou en même temps –, au titre de l’article 131-6 du code pénal, sur celle de la peine complémentaire prévue à l’article 131-35-1 du même code, soit six mois.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Loïc Hervé, rapporteur. Je ne crois pas qu’il y ait un risque constitutionnel à prévoir une durée de trois ans pour le bannissement comme alternative à l’emprisonnement. Pour mémoire, cette durée est un maximum, de même importance que la durée maximale prévue dans le même cadre pour une interdiction de paraître.
Pour autant, en opportunité, je comprends l’argument des auteurs de l’amendement, et il me semble non pas nécessaire, mais raisonnable de limiter cette durée à six mois : pour se réinsérer, un condamné a besoin de mener une vie relativement normale, et nous entraverions cet objectif en prévoyant une durée de bannissement trop longue. Je trouve toutefois que la durée de six mois est un peu courte.
C’est pourquoi, avec courage (Sourires.), je m’en remets à la sagesse de notre assemblée.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué. Il est toujours intéressant de comparer les différentes libertés, en l’occurrence la liberté d’expression et celle de paraître.
Il faut tout de même se souvenir que le juge constitutionnel considère généralement la valeur de la liberté d’expression comme plus élevée que celle de la liberté de mouvement et de circulation ou de la liberté de paraître.
Je propose donc de suivre la position de M. Haye, en fixant à six mois la durée de la peine de bannissement. Une fois le dispositif éprouvé, il sera toujours temps de le faire évoluer, si nécessaire.
La peine de bannissement qui figurait dans le projet de loi initial était déjà un dispositif tout neuf. Les trois dispositifs que la commission spéciale y a introduits à juste titre, sur l’initiative de M. le rapporteur, sont également nouveaux.
Si nous voulons nous assurer que le juge constitutionnel les valide, il convient de prendre les précautions d’usage, quitte à ce que les paramètres – durée, liste des délits concernés, etc. – soient revus, une fois établi le respect de la proportionnalité de ces peines.
L’avis du Gouvernement sur cet amendement est donc tout à fait favorable.
Mme le président. Je mets aux voix l’article 5, modifié.
(L’article 5 est adopté.)
Après l’article 5
Mme le président. L’amendement n° 106, présenté par MM. Dossus, Benarroche, Breuiller, Dantec, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :
Après l’article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le I de l’article 222-33-1-1 du code pénal est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« 9° Lorsqu’il a été commis par l’utilisation d’un service de communication au public en ligne ou par le biais d’un support numérique ou électronique, que ce soit par la diffusion de contenus accessibles au public ou par l’envoi de messages émis par la voie de communications électroniques. »
II. – L’article 60-1-2 du code de procédure pénale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« …° La procédure porte sur l’infraction mentionnée au 9° de l’article 222-33-1-1 du code pénal. »
La parole est à M. Thomas Dossus.
M. Thomas Dossus. Cet amendement vise à créer une amende forfaitaire pour les outrages sexistes commis en ligne.
D’après un rapport de 2021 de l’inspection générale de la police nationale (IGPN), récemment rendu public, 2 350 faits d’outrage sexiste ont été recensés par le ministère de l’intérieur entre août 2018 et décembre 2020, mais seulement 15 % des auteurs ont été identifiés et très peu de sanctions ont été prononcées.
Comme il est indiqué dans le rapport, l’outrage sexiste est une infraction difficile à constater dans l’espace public, car il est rarement commis en présence de policiers.
À la suite de la loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur (Lopmi), l’outrage sexiste et sexuel est devenu un délit le 1er avril 2023. L’amende qui y est associée est passée de 1 500 euros à 3 750 euros. Malheureusement pour les victimes, la répression plus sévère de cet outrage risque de ne pas suffire, le manque de preuves les empêchant souvent d’obtenir réparation.
Or, si de tels actes commis dans la rue ou dans les transports sont difficiles à caractériser, ils sont beaucoup plus faciles à prouver lorsqu’ils sont commis en ligne – messages privés, posts publics sur les réseaux sociaux. Les outrages sexistes et sexuels en ligne laissent des traces !
C’est la raison pour laquelle nous proposons de créer une amende forfaitaire spécifiquement dédiée aux outrages sexistes et sexuels commis en ligne. Cette amende, particulièrement dissuasive, permettrait de lutter plus efficacement contre ces injures, qui n’ont leur place ni dans la rue ni sur internet.
Je précise que cet amendement a été rédigé en concertation avec l’association StopFisha.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Loïc Hervé, rapporteur. Cet amendement tend à intégrer au délit d’outrage sexiste ou sexuel les infractions commises en ligne. Il a pour objet de garantir une répression rapide des comportements dégradants, hostiles ou discriminatoires qui se produisent en ligne, en les soumettant à une amende forfaitaire délictuelle.
Je partage l’avis des auteurs de l’amendement sur ce sujet. J’ai d’ailleurs moi-même déposé un amendement dont les dispositions procèdent du même état d’esprit.
Cependant, la solution proposée ne peut pas être acceptée en l’état, car elle pose deux difficultés juridiques.
Premièrement, elle s’insère dans un dispositif qui touche la vie réelle : elle vise les comportements, alors qu’il faudrait cibler la diffusion de contenus.
Deuxièmement, notre code de procédure pénale ne permet pas de procéder à une réquisition pour identifier l’auteur d’une infraction commise en ligne si celle-ci n’est pas punie d’au moins un an d’emprisonnement.
Or l’outrage sexiste et sexuel n’est pas sanctionné par une peine de prison. En pratique, les policiers et gendarmes ne pourront identifier l’auteur de l’outrage avec certitude et ne pourront a fortiori lui infliger une amende.
Pour ces raisons, je sollicite le retrait de cet amendement ; à défaut, j’y serais défavorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. L’amendement n° 134, présenté par M. L. Hervé, au nom de la commission spéciale, est ainsi libellé :
Après l’article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après la section 4 du chapitre II du titre II du live II du code pénal, est insérée une section 4 … ainsi rédigée :
« Section 4 …
« De l’outrage en ligne
« Art. 222-33-1-2. – I. – Est puni de 3 750 euros d’amende et d’un an d’emprisonnement le fait, hors les cas prévus aux articles 222-17 à 222-18-1, 222-33-1 et 222-33-2 à 222-33-2-3 du code pénal et aux troisième et quatrième alinéas de l’article 33 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, de diffuser en ligne tout contenu qui soit porte atteinte à la dignité d’une personne ou présente à son égard un caractère injurieux, dégradant ou humiliant, soit crée à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante.
« Est considéré comme diffusé en ligne au sens du présent article, tout contenu transmis au moyen d’un service de plateforme en ligne définis au 4° du I de l’article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance en l’économie numérique, d’un service de réseaux sociaux en ligne ou d’un service de plateformes de partage de vidéo au sens du règlement 2022/1925 du Parlement européen et du Conseil du 14 septembre 2022 relatif aux marchés contestables et équitables dans le secteur numérique et modifiant les directives (UE) 2019/1937 et (UE) 2020/1828.
« Les personnes reconnues coupables du délit prévu au présent article encourent également les peines complémentaires suivantes :
« 1° La peine de stage prévue aux 1° , 4° , 5° ou 7° de l’article 131-5-1 du présent code ;
« 2° L’interdiction d’utiliser un compte d’accès à un service en ligne prévue au 12° bis de l’article 131-6 ; cette interdiction est prononcée pour une durée de six mois au plus.
« II. – Pour le délit prévu au I du présent article, l’action publique peut être éteinte, dans les conditions prévues aux articles 495-17 à 495-25 du code de procédure pénale, par le versement d’une amende forfaitaire d’un montant de 300 euros. Le montant de l’amende forfaitaire minorée est de 250 euros et le montant de l’amende forfaitaire majorée est de 600 euros.
« Art. 222-33-1-3. – I. – L’infraction définie à l’article 222-33-1-2 est punie de 7 500 euros d’amende et d’un an d’emprisonnement lorsqu’elle est commise :
« 1° Par une personne qui abuse de l’autorité que lui confèrent ses fonctions ;
« 2° Sur un mineur ;
« 3° Sur une personne dont la particulière vulnérabilité due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse est apparente ou connue de son auteur ;
« 4° Sur une personne dont la particulière vulnérabilité ou dépendance résultant de la précarité de sa situation économique ou sociale est apparente ou connue de son auteur ;
« 5° Par plusieurs personnes agissant en qualité d’auteur ou de complice ;
« 6° En raison de l’orientation sexuelle ou de l’identité de genre, vraie ou supposée, de la victime ;
« 7° Par une personne qui commet la même infraction en étant en état de récidive dans les conditions prévues au second alinéa de l’article 132-11.
« II. – Pour le délit prévu au I du présent article, y compris en cas de récidive, l’action publique peut être éteinte, dans les conditions prévues aux articles 495-17 à 495-25 du code de procédure pénale, par le versement d’une amende forfaitaire d’un montant de 600 euros. Le montant de l’amende forfaitaire minorée est de 500 euros et le montant de l’amende forfaitaire majorée est de 1 200 euros. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Loïc Hervé, rapporteur. Les auditions conduites par le rapporteur et la commission spéciale ont mis au jour les difficultés posées, en matière de harcèlement en ligne, par la réponse pénale classique.
En effet, le cyberharcèlement ne fait pas l’objet d’une définition autonome dans le code pénal. Il se trouve couvert par les infractions existantes de harcèlement, qu’il s’agisse de harcèlement simple, de harcèlement scolaire ou de harcèlement de la part du conjoint.
Or il s’agit de faits graves et passibles de peines lourdes, qui supposent, légitimement, la tenue d’un procès et, en amont de celui-ci, la conduite d’une enquête, parfois longue, pour garantir le respect des droits de toutes les parties – notamment le principe du contradictoire. La sanction pénale intervient ainsi plusieurs mois, voire plusieurs années, après la commission des faits.
Face à ce constat, le présent amendement vise à créer un délit d’outrage en ligne, inspiré de l’outrage sexiste et sexuel et pouvant faire l’objet d’une sanction immédiate par le biais d’une amende forfaitaire délictuelle, outil qui a fait la preuve de son efficacité pour certains délits. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle, sur l’initiative du Gouvernement, nous l’avons largement étendu dans le cadre de la Lopmi, dont j’étais l’un des deux rapporteurs.
Cette nouvelle infraction serait caractérisée de la façon suivante.
Elle porterait sur la diffusion, par le biais d’une plateforme en ligne – au sens du règlement européen sur les services numériques –, de contenus de toute nature portant atteinte à la dignité d’une personne ou présentant à son égard un caractère injurieux, dégradant ou humiliant, ou créant à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante.
En revanche, l’infraction ne serait pas constituée si les faits sont de nature à tomber dans le champ des délits existants de harcèlement, de menace ou d’injure publique aggravée, plus lourdement réprimés, ou dans celui de l’outrage sexiste ou sexuel.
Elle serait de nature délictuelle, sa répression étant alourdie dès lors qu’elle s’est accompagnée d’une circonstance aggravante.
Elle serait passible, sous sa forme simple, d’une amende de 3 750 euros et d’un d’emprisonnement ou du paiement d’une amende forfaitaire délictuelle (AFD) de 300 euros, et, sous sa forme aggravée, d’une amende de 7 500 euros ou du paiement d’une AFD de 600 euros.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué. Monsieur le rapporteur, vous avez fait allusion à la Lopmi.
Dans sa décision du 19 janvier 2023 relative à cette loi, le Conseil constitutionnel a estimé que la procédure de l’amende forfaitaire n’était possible qu’à la condition de porter sur des délits punis d’une peine d’emprisonnement qui ne peut être supérieure à trois ans et dont les éléments constitutifs peuvent être aisément constatés, et de ne mettre en œuvre que des peines d’amende de faible montant.
Or les infractions dont il s’agit nécessitent des enquêtes parfois approfondies pour identifier les auteurs, ce qui n’est à première vue pas tout à fait compatible avec l’AFD.
Par ailleurs, la nature des contenus illicites en ligne doit souvent faire l’objet d’une appréciation juridique et les zones grises sont importantes – je laisse de côté les contenus les plus univoques, qui font l’objet des mesures dont nous avons discuté il y a quelques heures. C’est peu compatible avec le caractère automatique de l’amende forfaitaire.
Compte tenu de ces réserves, je demande le retrait de cet amendement.
Mme le président. La parole est à M. Thomas Dossus, pour explication de vote.
M. Thomas Dossus. Le délit que vous souhaitez créer, monsieur le rapporteur, s’inspire du délit d’outrage sexiste et sexuel.
Or vous mentionnez explicitement dans l’objet de l’amendement que l’infraction donnant lieu à ce délit ne sera pas constituée si les faits sont de nature à tomber dans le champ des délits existants, comme le harcèlement ou l’outrage sexiste et sexuel. J’ai du mal à comprendre ce dispositif…
Mme le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Loïc Hervé, rapporteur. Mon cher collègue, en matière d’infraction pénale, en l’espèce constitutive d’un délit, les faits sont rattachés à une infraction ou à une autre. L’amende forfaitaire est exclusive d’un autre dispositif.