M. Olivier Dussopt, ministre. Ce projet de loi faite suite à quatre mois de concertation. Il a donné lieu à plus de 175 heures de débat à l’Assemblée nationale et au Sénat et votre assemblée, le Sénat, l’a voté à deux reprises : une première fois en première lecture, après l’examen de chacun des articles,…
M. Fabien Gay. Par un vote bloqué !
M. Olivier Dussopt, ministre. … une seconde fois, après que la commission mixte paritaire a abouti à une conclusion partagée. C’est la démonstration que le processus est allé au bout.
Si l’Assemblée nationale n’a pu voter en première lecture, c’est uniquement en raison de l’obstruction systématique et organisée des groupes de gauche (Exclamations sur les mêmes travées. – Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.), qui l’a privée de sa capacité à délibérer.
Ce projet de loi est nécessaire, madame la sénatrice.
M. Fabien Gay. Pour rassurer les marchés financiers !
M. Olivier Dussopt, ministre. Il est nécessaire pour faire face aux déficits structurels et pour améliorer le système de retraite. Sa mise en œuvre à la fin de l’année, lorsque le Conseil constitutionnel se sera prononcé, permettra de revaloriser les petites pensions, de mieux prendre en compte la pénibilité, mais aussi de mieux accompagner celles et ceux qui ont commencé à travailler tôt.
Madame la sénatrice, vous avez à deux reprises parlé de responsabilité. Être responsable, c’est faire cette réforme…
M. Pierre Laurent. Contre les salariés !
M. Olivier Dussopt, ministre. … et prendre la décision de la mener à son terme pour sauver notre système de retraite et faire en sorte que les générations qui viennent puissent accéder à un système qui les protège et qui protégera les plus fragiles.
M. Jean-Marc Todeschini. Arrêtez vos mensonges !
M. Olivier Dussopt, ministre. Être responsable, madame la sénatrice, c’est saluer la mobilisation sociale, lorsqu’elle est organisée et qu’elle se passe bien. En revanche, lorsqu’il y a des violences, il faut les condamner.
M. Fabien Gay. Entendez la colère sociale !
M. Olivier Dussopt, ministre. Quand on condamne les violences, madame la sénatrice, on soutient les forces de police placées sous l’autorité du ministre de l’intérieur.
Je profite de votre question pour saluer l’ensemble des forces de police et de gendarmerie, qui, par leur travail, par leur intervention, garantissent la sécurité et le maintien de l’ordre. C’est aussi l’expression de la démocratie et de la liberté. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Exclamations sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST.)
rapport du groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (ii)
M. le président. La parole est à M. Julien Bargeton, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. Julien Bargeton. Ma question s’adresse à Mme la ministre de la transition énergétique.
« Une exploitation et un surdéveloppement vampiriques, une exploitation non durable des ressources en eau, la pollution et le réchauffement climatique incontrôlé sont en train d’épuiser, goutte après goutte, cette source de vie pour l’humanité. » Ainsi s’exprime António Guterres dans l’avant-propos d’un rapport publié avant l’ouverture de la session inédite de l’ONU consacrée à l’eau, qui débute aujourd’hui.
Les inondations au Pakistan en 2022 nous ont montré les conséquences du réchauffement de notre planète sur le cycle de l’eau : 33 millions de personnes concernées, 1 700 morts, 1,8 million d’hectares de terres agricoles dévastées.
Le sixième rapport de synthèse du Giec (groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) montre que ces épisodes seront de plus en plus intenses et de plus en plus récurrents sous nos latitudes.
Dans notre pays, l’hiver historiquement sec que nous venons de traverser nous montre qu’il est plus que jamais nécessaire de préserver cette ressource. C’est l’un des enjeux principaux de notre siècle.
Ces impératifs nous pressent donc de modifier notre rapport à l’eau, nos modes de gestion afin d’en assurer la qualité, la quantité et le caractère renouvelable. Cette incertitude implique également de replacer l’eau au cœur de tous nos débats sur les changements climatiques.
Le Gouvernement a annoncé dévoiler prochainement cinquante mesures relatives à la gestion de l’eau. Dans le cadre de cette journée de l’ONU consacrée à l’eau, madame la ministre, pouvez-vous nous en dire davantage sur le contenu de ces propositions visant à renforcer et à améliorer la gestion de l’eau dans notre pays afin d’en assurer la qualité et la quantité pour nos concitoyens ? (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées du groupe INDEP.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de la transition énergétique.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre de la transition énergétique. Monsieur le sénateur Bargeton, je vous prie tout d’abord d’excuser l’absence de mon collègue Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, qui, comme vous le savez, est fortement investi sur ce sujet et qui rencontrera dans les prochains jours António Guterres pour fixer un agenda sur l’eau qui soit particulièrement ambitieux, à l’échelle tant internationale que nationale.
Vous avez raison de mentionner également le rapport du Giec, qui confirme l’extrême urgence d’agir pour atteindre les objectifs de l’accord de Paris en matière climatique. Pour notre part, nous sommes passés à l’action, comme nous y invite ce rapport, sous l’égide du Président de la République et de la Première ministre. Je rappelle ainsi que le premier quinquennat du Président de la République a permis de doubler le rythme de baisse de nos émissions de gaz à effet de serre. Nous continuerons d’agir.
Je ne reviens pas sur le vote très large sur ces travées de la loi relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables et, en première lecture, du projet de loi Nucléaire, qui sont autant d’éléments nous permettant d’agir pour notre planète et de lutter contre le réchauffement climatique.
La ressource en eau est un enjeu majeur en France. Nous devons collectivement, État comme collectivités locales, mieux anticiper la diminution de la ressource en eau, mieux préparer les sécheresses à venir. C’est tout l’objet du plan Eau que la Première ministre et Christophe Béchu présenteront très prochainement, qui est une brique importante de l’ensemble de la planification écologique voulue par le Président de la République.
Nous devons engager une réelle transition sur trois axes : la sobriété de nos usages – elle fera écho à la sobriété énergétique –, la garantie de l’accès à une eau potable de qualité et la restauration du grand cycle de l’eau.
Ce travail s’inscrit dans la continuité des Assises de l’eau et du Varenne agricole de l’eau et de l’adaptation au changement climatique. Il s’agit de concilier, à l’échelle des territoires, une moindre disponibilité de la ressource et des besoins accrus.
Les Français attendent de nous que nous agissions et, je peux vous le dire, le Gouvernement sera au rendez-vous ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
déclarations du président de la république
M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Laurence Rossignol. Ma question s’adresse à Mme la Première ministre.
Que nous a dit le Président de la République tout à l’heure ?
M. David Assouline. Rien !
Mme Laurence Rossignol. D’abord, il nous a dit que la majorité du pays, celle qui s’oppose à sa réforme, serait dans le déni de la réalité et dans l’ignorance – et que lui seul nous conduirait vers la lumière. C’est une insulte à l’intelligence des Français.
Il nous a dit que les manifestants seraient noyautés par des factieux. Il est allé jusqu’à les comparer aux suprémacistes de Brasilia ou du Capitole. C’est encore une insulte.
Il nous a dit que les syndicats auraient refusé de négocier. C’est un mensonge, a déjà répondu Laurent Berger.
Il nous a dit que nous n’aurions fait comme contre-proposition que l’augmentation des déficits, alors qu’aucun de nos amendements n’a été retenu ni examiné, pas même ceux qui portaient sur l’augmentation des cotisations patronales. Encore un mensonge, donc. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
Il nous a dit que les entreprises ne finançaient pas les retraites. Alors là… La seule explication possible est que, trahi par son inconscient, le Président de la République fait part de son rêve ! Mais c’est aussi un mensonge. (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
Il nous a dit que les Français ne voudraient plus travailler et qu’il remettrait les bénéficiaires du RSA au travail. C’est une insulte.
À la crise démocratique qu’il a approfondie, à la crise politique qu’il a ouverte, il a répondu par la perspective de nouveaux débauchages, sans doute parmi les députés qui n’ont pas voté la motion de censure. C’est une indécence.
Il nous a dit vouloir taxer les entreprises qui rachètent leurs actions, sauver l’éducation, la santé et l’industrie, sans jamais préciser ni où, ni quand, ni comment.
Mais il n’a pas manqué de nous dire que la réforme des retraites serait appliquée sans délai.
Madame la Première ministre, de matinale en journal de 20 heures, ou de 13 heures, vous-même, le Président de la République et vos ministres ne faites qu’asséner les mêmes arguments d’autorité. La seule autocritique que vous nous concédez est celle d’une défaillance pédagogique.
Vous voulez apaiser le pays ? Je le crois sincèrement. Mais il n’y a qu’une solution : rendez aux Français les deux ans de vie que vous leur volez ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST. – Exclamations sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement.
M. Olivier Véran, ministre délégué auprès de la Première ministre, chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement. Votre question, madame la ministre Laurence Rossignol…
Mme Laurence Rossignol. Je ne suis plus ministre !
M. Olivier Véran, ministre délégué. Je vous appelle « madame la ministre » parce que, en 2014, vous étiez ministre déléguée auprès de Marisol Touraine. (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes RDPI, INDEP, UC et Les Républicains.)
J’ai été député socialiste…
M. Jérôme Durain. Certains n’ont pas trahi !
M. Olivier Véran, ministre délégué. … et vous et moi, nous avons eu le courage de soutenir en 2014 une réforme des retraites portée par le Gouvernement auquel vous apparteniez, qui a, pardonnez du peu, allongé la durée de cotisation pour tous les Français qui travaillent. Vous l’avez fait dans un souci de justice, avec pour objectif d’équilibrer un système de retraite qui, dans la durée, aurait été déficitaire.
M. Patrick Kanner. Et les carrières longues ?
M. Olivier Véran, ministre délégué. Permettez-moi aussi de vous rappeler, madame la sénatrice, qu’à l’époque, lorsque vous faisiez partie du Gouvernement, un texte important, courageux et nécessaire pour l’économie de notre pays, a été adopté en ayant recours à l’article 49.3. Pour autant, vous n’avez pas alors démissionné du Gouvernement, pas plus que je n’ai quitté le groupe socialiste. (Exclamations sur les travées du groupe SER.) Vous avez sans doute la mémoire sélective, moi pas !
En écoutant votre question, j’ai l’impression que vous avez l’oreille sélective, madame la sénatrice, moi pas. Je dirais même l’oreille déformante, car jamais le Président de la République n’a comparé les manifestants à des factieux. (Protestations sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
Au contraire, il a clairement fait la distinction entre les manifestations démocratiques, dont il a salué l’organisation et la sécurisation par les organisations syndicales, et les groupes violents, qui viennent de l’ultragauche et cherchent à saccager nos villes. (Exclamations sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
Surtout, madame la sénatrice, nous venons du même bord.
M. Hussein Bourgi. Mais elle n’a pas trahi !
M. Olivier Véran, ministre délégué. Quand nous disons que nous allons augmenter les petits salaires, qui sont inférieurs du SMIC, vous devriez dire oui ! Quand nous disons que nous allons améliorer les fins de carrière pour les salariés, vous devriez dire oui ! Quand nous disons que nous allons lever une contribution exceptionnelle sur les grands groupes qui rachètent des actions, vous devriez dire oui !
M. le président. Il faut conclure !
M. Olivier Véran, ministre délégué. Et, quand nous proposons de mettre en formation les bénéficiaires du RSA qui sont loin de l’emploi, ou même de les employer, vous devriez applaudir avec nous, madame la sénatrice. C’est cela, avoir de la mémoire, du courage et de la conviction dans la continuité ! (Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées du groupe RDPI et sur des travées du groupe UC. – Protestations sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
affichage environnemental des produits agricoles
M. le président. La parole est à Mme Guylène Pantel, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
Mme Guylène Pantel. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire.
Sécheresse hivernale historique, inflation, difficultés de transmission des exploitations, élevages pastoraux en péril, prédation : la vulnérabilité du monde agricole est perceptible dans les discussions à bâtons rompus que nous avons avec les professionnels du secteur. Les réponses apportées par les autorités sont parfois insatisfaisantes et suscitent l’agacement, l’anxiété ou la résignation.
À cela s’ajoute l’équation complexe sur les contours du futur dispositif d’affichage environnemental sur les produits alimentaires, prévu dans la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire et remodelé dans la loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.
Ce projet d’envergure fait l’objet d’un travail de concertation piloté par l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe) et le ministère de la transition écologique, qui ont collecté des contributions jusqu’au 10 mars dernier, notamment sur les modalités d’affichage.
L’analyse du cycle de vie est la méthode d’évaluation privilégiée pour classer les produits ou les services, en fonction des émissions de gaz à effet de serre, des atteintes à la biodiversité et de la consommation d’eau et d’autres ressources naturelles que leur production a entraîné. En découle l’attribution d’une note, qui sera affichée sur les produits ou services, en rayonnage ou sur internet.
Bien que ce dispositif réponde à une aspiration légitime des consommateurs, bon nombre de producteurs craignent qu’il ne soit inadapté à des produits locaux et artisanaux, à l’instar de ce qui avait été observé avec le Nutri-score.
La demande des exploitants agricoles est simple : ne créez pas de nouvelles sources de découragement !
Monsieur le ministre, pouvez-vous nous assurer que le nouvel outil d’affichage environnemental ne posera pas pour les produits du terroir les mêmes difficultés que le Nutri-score ? (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Madame la sénatrice Pantel, je vous prie tout d’abord d’excuser l’absence des ministres Christophe Béchu et Bérangère Couillard, qui assistent aujourd’hui à la conférence des Nations unies sur l’eau à New York.
La transition écologique, comme vous le savez, est au cœur de l’action gouvernementale et la planification écologique est une priorité de notre Première ministre.
L’information du consommateur sur les caractéristiques environnementales des produits est fondamentale pour faire évoluer nos modes de consommation. Nous voulons et nous devons permettre aux consommateurs de devenir des « consom’acteurs ».
C’est pourquoi la loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets a prévu la mise en place d’un affichage environnemental sur les produits.
Cet affichage intégrera des données sur l’impact sur l’environnement de la fabrication et du transport des produits. Il prendra en compte les ressources extraites, la consommation d’eau, les émissions de gaz à effet de serre ou encore les effets sur la biodiversité.
Vous questionnez la méthode. Plusieurs expérimentations ont été conduites en 2021 sur les produits alimentaires et en 2022 sur le textile.
Ma collègue Bérangère Couillard a réuni dès le mois d’octobre 2022 les associations de consommateurs, les ONG et les porteurs de ces expérimentations pour recueillir leurs attentes et leurs idées, afin de construire ensemble cet affichage environnemental.
Priorité a été donnée aux produits alimentaires et aux textiles. L’objectif est, pour ces deux secteurs, qu’un affichage environnemental puisse être déployé dès le début de l’année 2024 par les entreprises volontaires, avant de devenir obligatoire, comme le prévoit la loi.
En ce qui concerne le secteur alimentaire, pas de découragement, pas de défaillance ! Ma collègue Bérangère Couillard réunira les parties prenantes le 27 mars prochain pour lancer une véritable concertation sur la première version du projet de méthode de calcul de l’affichage environnemental des produits alimentaires.
zéro artificialisation nette
M. le président. La parole est à M. Jean-Baptiste Blanc, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)
M. Jean-Baptiste Blanc. Ma question s’adresse à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
Le Sénat s’est livré, depuis près d’un an, à un patient et minutieux travail d’écoute et d’expertise du « zéro artificialisation nette » (ZAN), cet édifice aux nombreux vices cachés. Au terme d’une maturation collective et transpartisane, la commission spéciale, présidée par Valérie Létard, a fait adopter la semaine dernière, à une large majorité, une proposition de loi d’initiative sénatoriale qui consolide les fondations et conforte l’ouvrage, pour que celui-ci puisse traverser le temps.
Il faut le répéter : face aux mauvais procès qui sont faits à notre texte, le Sénat n’a pas bouleversé l’architecture du ZAN. Les cibles et les trajectoires sont intactes. Des ajustements, de la souplesse et des outils nouveaux étaient nécessaires pour répondre aux inquiétudes, voire à la colère, de certains élus locaux. Nous les avons écoutés et pris au sérieux.
Longtemps muet sur le sujet, le Gouvernement dit aujourd’hui être prêt à adapter la loi. Il a longtemps sous-estimé, et sous-estime encore, le potentiel hautement inflammable du ZAN. Son approche comptable et recentralisatrice et l’absence d’accompagnement des collectivités face à ces nouvelles obligations inquiètent les élus de tous les départements et, ici, sur toutes les travées.
Nos auditions nous ont convaincus qu’il était impératif d’apporter des réponses législatives à des questions aussi variées que celles qui portent sur le calendrier, les grands projets, la prise en compte des efforts passés, la garantie rurale, les communes littorales, les bâtiments agricoles… Il fallait éteindre l’incendie.
Le texte que nous avons rédigé et adopté à une large majorité est aujourd’hui prêt à être examiné par l’Assemblée nationale.
Ma question est simple : le Gouvernement tiendra-t-il sa promesse de poursuivre la discussion sur la base du texte adopté par le Sénat ? Quand cette proposition de loi sera-t-elle inscrite à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale ? (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Monsieur le sénateur Blanc – monsieur le rapporteur –, laissez-moi vous dire quelques mots avant de vous dire oui… (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.)
Chaque année, en moyenne, 20 000 hectares d’espaces naturels, agricoles et forestiers sont consommés en France. Les conséquences de ce phénomène sont écologiques, mais aussi socio-économiques, comme la diminution du potentiel de production agricole.
La France s’est fixé pour objectifs d’atteindre à horizon de 2050 le zéro artificialisation nette et une réduction de moitié de la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers avant 2030.
En novembre dernier, lors de son discours de clôture du Congrès des maires de France, Mme la Première ministre a rappelé que le Gouvernement était prêt à un certain nombre d’évolutions,…
M. Philippe Bas. Prouvez-le !
Mme Dominique Faure, ministre déléguée. … comme la prise en compte des grands projets d’envergure nationale et la garantie rurale, à laquelle nous sommes tous attachés.
Les propositions du Gouvernement ont été défendues par Christophe Béchu lors de l’examen de la proposition de loi sénatoriale sur le ZAN la semaine dernière. Vous le savez, monsieur le rapporteur, elles n’ont pas été retenues par le Sénat, qui a préféré ce que nous pensons être une trajectoire moins économe en termes d’artificialisation.
Le Gouvernement considère aujourd’hui que le texte du Sénat ne permet pas de respecter la trajectoire ambitieuse de réduction de l’artificialisation que nous portons. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.) Cette trajectoire est fixée dans la loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.
Cependant, monsieur le sénateur, cette proposition de loi a encore vocation à évoluer dans le cadre de la navette parlementaire. L’objectif est de parvenir à un compromis acceptable pour l’ensemble des acteurs – députés, sénateurs, associations d’élus locaux ou associations de défense de l’environnement – sur ce sujet, qui est aussi important pour les Français que pour les élus locaux. Le Gouvernement est très désireux de trouver un compromis acceptable pour tous. Nous le trouverons ensemble, monsieur le sénateur. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Baptiste Blanc, pour la réplique.
M. Jean-Baptiste Blanc. Je ne peux vous laisser dire que nous sortons de la trajectoire, madame la ministre. Nous sommes dans la trajectoire. (Mme Valérie Létard acquiesce.) Je vois d’ailleurs que Mme Létard approuve ce que je dis.
Nous pensons que seuls les élus locaux pourront porter la transition écologique ; il faut leur en donner le temps, les moyens et l’ingénierie nécessaires. Sur un sujet aussi inflammable, écoutez le Sénat ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC, ainsi que sur des travées du groupe RDSE.)
suites données au projet de loi relatif à l’immigration
M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Jean-Yves Leconte. Ma question s’adresse au ministre de l’intérieur et des outre-mer.
La France est dans la rue pour manifester son désaccord profond avec le passage en force d’une réforme des retraites qu’elle rejette en bloc. Cette réforme n’est pas soutenable d’un point de vue humain et social, et son poids repose exclusivement sur les efforts des travailleuses et travailleurs.
C’est dans ce contexte très tendu qu’était prévu l’examen au Sénat du projet de loi pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration, à compter de mardi prochain.
Alors que les étrangers voient leurs droits particulièrement dégradés en France, qu’ils sont soumis à des conditions de plus en plus exigeantes et à des procédures toujours plus complexes, qui les maintiennent dans des situations de précarité et d’insécurité juridique et administrative inacceptables, une réforme de ces droits mérite d’être abordée avec sérénité et sérieux.
C’est pourquoi, au vu du contexte actuel, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain a demandé que ce projet de loi soit retiré de l’ordre du jour de notre assemblée.
Monsieur le ministre, pouvez-vous nous préciser les propos du Président de la République, qui semble annoncer une série de textes découpant votre projet de loi à la manière d’un puzzle ?
Quoi qu’il arrive, le Gouvernement peut et doit prendre rapidement les mesures qui s’imposent en matière de régularisation des travailleurs étrangers. Il n’est pas besoin d’une loi pour réviser au plus vite la liste des métiers en tension, dans le cadre d’une concertation avec les partenaires sociaux, ou pour donner des instructions aux préfets en faveur de l’admission au séjour des étrangers qui contribuent chaque jour à l’effort national – et cotisent pour nos retraites.
Dans l’attente de mesures législatives permettant de sécuriser durablement leur séjour et leur emploi, il convient de ne pas maintenir ceux-ci dans une situation inadmissible de précarité et d’agir rapidement avec les outils existants. Monsieur le ministre, qu’attend donc le Gouvernement pour agir face à ces urgences ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
M. Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur et des outre-mer. Monsieur le sénateur Leconte, vous avez bien entendu le Président de la République et je vous remercie de vous faire ici l’écho de ses propositions.
M. le président du Sénat s’est exprimé sur ce point lors de sa rencontre avec le Président de la République, je crois, et j’ai moi-même échangé avec François-Noël Buffet, président de votre commission des lois.
Nous entendons votre demande. C’est pourquoi la Première ministre va dans un moment, avec le ministre délégué chargé des relations avec le Parlement, le ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion et moi-même, proposer au Parlement une méthode de travail afin que soient adoptées les mesures législatives nécessaires pour améliorer l’intégration des étrangers, mais également pour lutter contre l’immigration irrégulière.
Je pense à la lutte contre les passeurs, à l’intégration par la langue, par le travail, ou à l’expulsion des délinquants étrangers, que nous devons pouvoir faire plus facilement. Je pense aussi aux moyens que nous devons donner à notre justice et à nos préfectures. Ces sujets législatifs, il est nécessaire que nous les abordions.
Mais une nouvelle méthode de travail est souhaitée par le Président de la République et les chambres parlementaires, sur le projet de loi sur l’immigration, mais aussi sur tous les autres textes. Je laisse le soin à la Première ministre de l’évoquer ultérieurement avec les présidents des deux chambres. J’espère avoir répondu à votre interrogation. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)