Sommaire
Présidence de M. Alain Richard
Secrétaires :
Mme Jacqueline Eustache-Brinio, M. Loïc Hervé.
2. Mises au point au sujet de votes
3. Loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023. – Suite de la discussion d’un projet de loi
Demande de réserve de l’amendement n° 2057 rectifié bis après l’article 13. – Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales ; M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion. – La réserve est ordonnée.
M. René-Paul Savary, rapporteur de la commission des affaires sociales pour la branche vieillesse
M. René-Paul Savary, rapporteur
Amendement n° 2017 de Mme Hélène Conway-Mouret. – Rejet par scrutin public n° 236.
Amendement n° 2392 rectifié ter de M. Patrice Joly. – Rejet.
Amendement n° 3161 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet par scrutin public n° 237.
Amendement n° 3186 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet par scrutin public n° 238.
M. René-Paul Savary, rapporteur
Motion d’ordre et demande de priorité
Demande de priorité de l’amendement n° 2127 rectifié de la commission. – Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales ; M. Olivier Dussopt, ministre. – La priorité est ordonnée.
Demande d’examen séparé de l’amendement n° 2127 rectifié. – Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales ; Mme Laurence Rossignol ; Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales ; M. Patrick Kanner. – La priorité est ordonnée.
Motion d’ordre et demande de priorité (suite)
Suspension et reprise de la séance
Amendement n° 2127 rectifié de la commission
Sous-amendement n° 4876 de M. Hervé Gillé.
Sous-amendement n° 4879 de Mme Sabine Van Heghe
Sous-amendement n° 4880 de M. Bernard Jomier
Sous-amendement n° 4881 de Mme Nicole Bonnefoy
Sous-amendement n° 4883 rectifié de M. Jérôme Durain
Sous-amendement n° 4885 de M. Olivier Jacquin. – Non soutenu.
Sous-amendement n° 4887 de M. Rémi Féraud. – Non soutenu.
Sous-amendement n° 4890 de M. Joël Bigot
Sous-amendement n° 4891 de Mme Catherine Conconne. – Non soutenu.
Sous-amendement n° 4892 de M. Éric Kerrouche
Sous-amendement n° 4893 de Mme Annie Le Houerou
Sous-amendement n° 4896 de M. Jean-Luc Fichet
Sous-amendement n° 4898 de Mme Émilienne Poumirol. – Non soutenu.
Sous-amendement n° 4900 de Mme Florence Blatrix Contat
Sous-amendement n° 4903 de M. Patrick Kanner. – Non soutenu.
Sous-amendement n° 4907 de M. Victorin Lurel. – Non soutenu.
Sous-amendement n° 4909 de M. Jean-Claude Tissot
Sous-amendement n° 4911 de Mme Marie-Pierre Monier
Sous-amendement n° 4913 de M. Mickaël Vallet
Sous-amendement n° 4914 de Mme Monique Lubin. – Non soutenu.
Sous-amendement n° 4915 de Mme Michelle Meunier
Sous-amendement n° 4918 de M. Sebastien Pla
Sous-amendement n° 4920 de M. Rémi Cardon
Sous-amendement n° 4922 de M. Yan Chantrel
Sous-amendement n° 4926 de M. Thierry Cozic. – Non soutenu.
Sous-amendement n° 4928 de M. Claude Raynal
Sous-amendement n° 4943 de M. Jean-Yves Leconte. – Non soutenu.
Sous-amendement n° 4944 de Mme Angèle Préville. – Non soutenu.
Sous-amendement n° 4946 de M. Jean-Marc Todeschini
Sous-amendement n° 4980 de Mme Corinne Féret
Sous-amendement n° 4983 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Non soutenu.
Sous-amendement n° 5384 de Mme Raymonde Poncet Monge
Sous-amendement n° 5385 de Mme Mélanie Vogel
Sous-amendement n° 5386 de M. Guillaume Gontard
Sous-amendement n° 5387 de M. Thomas Dossus
Sous-amendement n° 5388 de M. Jacques Fernique
Sous-amendement n° 5389 de M. Daniel Salmon
Sous-amendement n° 5390 de M. Daniel Breuiller
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE Mme Pascale Gruny
4. Mises au point au sujet de votes
5. Loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023. – Suite de la discussion d’un projet de loi
Amendement n° 2127 rectifié de la commission et sous-amendements (suite)
Amendement n° 2127 rectifié de la commission et sous-amendements identiques (suite)
Amendement n° 2127 rectifié de la commission et sous-amendements (suite). – Rejet des sous-amendements ; adoption, par scrutin public n° 238, rendant sans objet les sous-amendements ainsi que les amendements nos 4329 rectifié de Mme Éliane Assassi et 2863 rectifié de Mme Monique Lubin.
Amendement n° 2860 rectifié bis de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 4332 rectifié de Mme Éliane Assassi. – Rejet.
Amendement n° 3450 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.
Amendement n° 417 rectifié de M. Guy Benarroche. – Rejet.
Amendement n° 2861 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 4581 de M. Jacques Fernique. – Rejet.
Amendement n° 2126 de la commission. – Adoption.
PRÉSIDENCE DE Mme Laurence Rossignol
Amendement n° 1938 rectifié bis de M. Philippe Mouiller. – Adoption.
Amendement n° 4334 rectifié de Mme Éliane Assassi. – Rejet.
Amendement n° 3688 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.
Amendement n° 2635 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 208 rectifié bis de Mme Laurence Muller-Bronn. – Retrait.
Amendement n° 4336 rectifié de Mme Éliane Assassi. – Rejet.
Amendement n° 4651 du Gouvernement. – Adoption.
Amendement n° 2128 de la commission. – Rectification.
Amendement n° 2128 rectifié de la commission. – Adoption.
Amendement n° 3580 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Devenu sans objet.
Amendement n° 2129 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 4341 rectifié bis de Mme Éliane Assassi. – Devenu sans objet.
Amendement n° 2130 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 3099 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet par scrutin public n° 239.
Demande de clôture par M. Bruno Retailleau sur les explications de vote sur l’amendement n° 4334 rectifié. – Adoption.
Amendement n° 4337 rectifié de Mme Éliane Assassi. – Rejet par scrutin public n° 241.
Amendement n° 3569 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.
Amendement n° 3568 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.
Amendement n° 3573 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.
Amendement n° 3575 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet par scrutin public n° 243.
Amendement n° 2864 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet par scrutin public n° 244.
Amendement n° 3584 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet par scrutin public n° 245.
Amendement n° 3579 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.
Amendement n° 3587 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.
Amendement n° 3591 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet par scrutin public n° 246.
Amendement n° 2131 de la commission. – Adoption.
PRÉSIDENCE DE M. Vincent Delahaye
Adoption, par scrutin public n° 247, de l’article modifié.
Suspension et reprise de la séance
6. Mise au point au sujet d’un vote
7. Communication relative à une commission mixte paritaire
8. Loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 – Suite de la discussion d’un projet de loi
Amendement n° 2390 de M. Guy Benarroche. – Rejet.
Amendement n° 424 de M. Guy Benarroche. – Rejet.
Demande de renvoi en commission de l’article 9
Motion n° 5392 de Mme Émilienne Poumirol. – Rejet.
Motion d’ordre et demande de priorité
Demande de réserve de l’amendement n° 2132 de la commission. – Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales ; M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion. – La priorité est ordonnée.
Demande d’examen séparé de l’amendement n° 2127 rectifié. – Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales ; Mme Laurence Rossignol ; Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales ; M. Patrick Kanner. – Adoption.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie
Suspension et reprise de la séance
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales
Amendement n° 2132 de la commission (priorité)
Suspension et reprise de la séance
Opposition à l’examen de sous-amendements :
M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales
Amendement n° 2132 de la commission (priorité) (suite)
Amendement n° 2132 de la commission (priorité) (suite). – Adoption par scrutin public n° 248.
Renvoi de la suite de la discussion.
compte rendu intégral
Présidence de M. Alain Richard
vice-président
Secrétaires :
Mme Jacqueline Eustache-Brinio,
M. Loïc Hervé.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Mises au point au sujet de votes
M. le président. La parole est à M. Henri Cabanel.
M. Henri Cabanel. Lors du scrutin public n° 233 portant sur l’article 7 du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023, Nathalie Delattre souhaitait s’abstenir.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Mme Nathalie Goulet. Lors du scrutin public n° 233 portant sur l’article 7 du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023, je souhaitais voter contre, alors que j’ai été considérée comme votant pour. C’est d’autant plus cohérent que j’ai voté les amendements de suppression du même article. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe CRCE. – M. Vincent Éblé applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Christine Bonfanti-Dossat.
Mme Christine Bonfanti-Dossat. Lors du scrutin public n° 233 portant sur l’article 7 du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023, je souhaitais m’abstenir.
M. le président. Acte est donné de ces mises au point, mes chers collègues. Elles seront publiées au Journal officiel et figureront dans l’analyse politique du scrutin concerné.
3
Loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023
Suite de la discussion d’un projet de loi
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023, dont le Sénat est saisi en application de l’article 47-1, alinéa 2, de la Constitution (projet n° 368, rapport n° 375, avis n° 373).
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus, au sein de la deuxième partie, à l’examen de l’amendement n° 2057 rectifié bis portant article additionnel après l’article 7.
DEUXIÈME PARTIE (suite)
DISPOSITIONS RELATIVES AUX DÉPENSES DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L’EXERCICE 2023
TITRE Ier (suite)
RECULER L’ÂGE DE DÉPART EN TENANT COMPTE DES SITUATIONS D’USURE PROFESSIONNELLE
Demande de réserve
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, je salue l’ensemble de mes collègues, car nous allons de nouveau partager une journée animée. (Sourires.)
La commission des affaires sociales a pris connaissance, à la levée de la séance hier soir, du dépôt de sous-amendements émanant du groupe CRCE à l’amendement n° 2057 rectifié bis, dont Bruno Retailleau est le premier signataire. Ce n’est que plus tard dans la nuit que j’ai pu prendre connaissance de ces deux cent trente-six sous-amendements supplémentaires, s’ajoutant aux nombreux autres sous-amendements déjà déposés sur ce même amendement. Leur nombre supposerait que nous consacrions une large partie de la matinée à ce débat important.
Néanmoins, comme l’a indiqué à plusieurs reprises le rapporteur René-Paul Savary au cours de nos débats, la commission souhaite parvenir rapidement à l’examen des articles 8 et 9. C’est pourquoi, en application de l’article 44, alinéa 6, du règlement du Sénat, je demande la réserve de l’examen de l’amendement n° 2057 rectifié bis après l’article 13. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. Je suis donc saisi d’une demande de la commission tendant à réserver l’examen de l’amendement n° 2057 rectifié bis après l’article 13.
Selon l’article 44, alinéa 6, du règlement, la réserve est de droit, lorsque celle-ci est demandée par la commission saisie au fond, sauf opposition du Gouvernement.
Quel est l’avis du Gouvernement sur cette demande de réserve ?
M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion. Monsieur le président, comme je l’ai systématiquement indiqué depuis le début de vos travaux et de nos débats, le Gouvernement ne s’oppose jamais à la commission pour ce qui relève des questions de recevabilité, d’irrecevabilité ou d’organisation des débats.
Par conséquent, l’avis du Gouvernement est évidemment favorable.
M. le président. La réserve est ordonnée.
Par conséquent, nous reprenons la discussion à l’amendement n° 608 rectifié bis. (Protestations sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
Mes chers collègues, l’ordre des débats incombe à la présidence, quel que soit celui qui l’exerce. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Rappels au règlement
M. Patrick Kanner. Monsieur le président, mon rappel au règlement se fonde sur l’article 44 bis du règlement ayant trait au droit d’amendement des parlementaires.
Cette demande de réserve intervient alors que nous nous préparions naturellement tous à batailler contre l’amendement n° 2057 rectifié bis, amendement tellement important que nous aurions souhaité l’examiner plus tôt dans le débat parlementaire, notamment dans la partie recettes.
Et voilà que, par surprise – je ne dirais pas par déloyauté, ce serait trop fort –, alors que M. Retailleau s’est lancé hier dans une très longue diatribe en s’adressant à nous par ces mots « Vous, les obstructeurs » (Oui ! sur les travées du groupe Les Républicains.), vous recourez à des arguties pour ne pas débattre ce matin.
Je le répète, nous étions prêts à ferrailler, monsieur le président du groupe Les Républicains. Pourtant, aujourd’hui, vous décalez votre intervention. Cela est extrêmement déloyal et préjudiciable au bon déroulement de nos travaux. La sincérité de nos débats est toujours très importante, y compris au regard d’éventuels recours devant le Conseil constitutionnel.
Nous sommes prêts et je vous rassure : même après l’article 13, nous ferraillerons contre cet amendement, totalement inique et injuste, notamment pour les travailleurs des entreprises, dont les régimes de retraite sont appelés à être supprimés. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à M. Bruno Retailleau, pour un rappel au règlement.
M. Bruno Retailleau. Mon rappel au règlement est fondé sur le même article de notre règlement.
Nous allons bien évidemment discuter de l’amendement que j’ai déposé.
Mes chers collègues, je tiens à votre connaissance qu’hier la permanence du président Larcher a été privée d’électricité. Ceux qui ont fait cela ont également coupé l’électricité d’une clinique.
M. Jean-Marc Todeschini. C’est de notre faute ?
Mme Cathy Apourceau-Poly. Cela n’a pas de rapport !
M. Bruno Retailleau. Au moment où je vous parle, d’autres sénateurs ont vu l’électricité coupée à leur domicile ou dans leur entreprise. (Exclamations sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. Patrick Kanner. Quel rapport ?
M. Bruno Retailleau. Je n’accuse personne ! Mes chers collègues, écoutez-moi bien !
M. le président. Mes chers collègues, gardez votre calme !
M. Bruno Retailleau. J’attends de la gauche qu’elle dénonce aussi, unanimement – unanimement ! –, ces agissements ! (M. Thomas Dossus s’exclame.)
Ce sont des violences qui sont faites à des élus de la République et qui s’apparentent à une forme d’appropriation partisane et personnelle des moyens de production d’énergie, qui appartiennent au peuple français et non pas à telle ou telle corporation. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC, ainsi qu’au banc des commissions. – M. Martin Lévrier applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour un rappel au règlement.
Mme Céline Brulin. Mon rappel au règlement se fonde sur le même article de notre règlement.
Je souhaite interroger nos collègues du groupe Les Républicains. Mes chers collègues, avez-vous la réforme et votre soutien au Gouvernement honteux ? Vous avez multiplié les procédures pour que l’article 7 soit voté en pleine nuit. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) Deux nuits ont finalement été nécessaires pour parvenir à son adoption.
Mme Dominique Estrosi Sassone. Nous avons des séances de nuit et pas seulement des séances de jour !
Mme Céline Brulin. Aujourd’hui, vous voulez retarder l’examen d’un amendement suscitant beaucoup de colère dans notre pays et ce que vous venez d’évoquer, monsieur Retailleau, en constitue précisément un témoignage. (M. Vincent Segouin s’exclame.) Vous voulez l’examiner loin des regards de nos concitoyens, qui sont les premiers concernés.
M. Vincent Segouin. Vous ne voulez pas bosser !
Mme Céline Brulin. Cet amendement, comme les sous-amendements que nous avons déposés, doit être discuté en plein jour.
Voyez-vous, il ne s’agit pas d’obstruction ou de sous-amendements que vous considérez inutiles ; il est au contraire question d’étudier précisément, métier par métier,…
M. Alain Joyandet. C’est de la simulation !
Mme Céline Brulin. … les conséquences concrètes qu’entraînera votre amendement sur des travailleurs dont les conditions de travail sont extrêmement difficiles.
Monsieur le président, une suspension de séance me semble nécessaire afin que chaque groupe puisse réorganiser son travail en tenant compte de la réserve qui vient d’être ordonnée.
En outre, le report de l’examen de l’amendement doit permettre à la commission des affaires sociales d’examiner de manière approfondie les sous-amendements afférents, ce qui n’a pour l’instant pas été le cas…
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Mensonge !
Mme Céline Brulin. … de ceux qui ont été déposés par les groupes de gauche ces dernières heures. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE et SER.)
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour un rappel au règlement.
M. Guillaume Gontard. Ce rappel au règlement se fonde sur l’article 36, alinéa 8, de notre règlement.
Tout d’abord, le rappel au règlement de Bruno Retailleau était totalement hors sujet au regard de ce dont nous sommes en train de discuter.
J’en viens à l’amendement n° 2057 rectifié bis. Hier soir, nous avons prématurément levé la séance, alors que nous aurions pu poursuivre nos travaux, parce que M. Retailleau était déjà parti. Nous avons cru comprendre que la séance avait été levée afin que l’amendement de M. Retailleau puisse être examiné ce matin.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Exactement !
M. Guillaume Gontard. Pourtant, ce matin, l’examen de cet amendement est repoussé.
De quoi avez-vous peur ? Pourquoi cette désertion ?
Parlons-en ! C’est un sujet important, nous sommes d’accord. Rétablissez l’ordre d’examen du texte pour que nous puissions discuter du fond de cet amendement.
Depuis le début, vous refusez le débat et vous refusez de discuter. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) Vous nous avez corsetés ! Vous nous avez enfermés dans un débat à sens unique et vous continuez !
Faites preuve d’un peu de courage et rétablissez l’ordre d’examen du texte pour que nous puissions débattre tranquillement de cet amendement. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. René-Paul Savary, rapporteur de la commission des affaires sociales pour la branche vieillesse. Ce débat sur la réforme des retraites mérite que nous soyons attentifs, sans être provocateurs les uns envers les autres (Protestations sur des travées du groupe SER.)
Mes chers collègues, vous avez sacrifié à votre volonté de faire de l’obstruction – disons-le –,…
M. Jean-Marc Todeschini. N’importe quoi !
M. René-Paul Savary, rapporteur. … la présentation d’amendements dont la qualité n’était pas à la hauteur de nos débats, me semble-t-il, et, surtout, dont l’objet ne correspondait pas à vos interventions.
Vous avez souhaité, depuis des heures et des heures, manifester votre hostilité à cette réforme, nous l’avons bien compris. Pendant ce temps, nous n’avons pas entamé le débat de fond…
M. Thomas Dossus. Il faut être deux pour cela !
M. René-Paul Savary, rapporteur. … et, maintenant, vous nous reprochez le retard pris.
Réfléchissez bien ! Il vous appartient de ne pas déposer de sous-amendements à des amendements que nous proposons, qui retarderont encore le débat.
M. Vincent Éblé. Vous avez supprimé nos amendements, il faut bien les défendre !
M. René-Paul Savary, rapporteur. Mes chers collègues, je vous invite donc à être attentifs à cette configuration. Il reste des sujets importants à aborder, qui méritent encore des heures de débat et sur lesquels nous souhaitons vivement engager la discussion.
M. le président. Nous reprenons la discussion…
Mme Laurence Rossignol. Je demande la parole pour un rappel au règlement, monsieur le président !
M. le président. Un représentant de chaque groupe a déjà pris la parole pour un rappel au règlement. (Exclamations sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. Jean-Marc Todeschini. Le rappel au règlement est de droit !
M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour un rappel au règlement.
Mme Laurence Rossignol. Monsieur le président, avec tout le respect que je dois à votre présidence et tout en reconnaissant bien volontiers que c’est vous qui présidez et personne d’autre, je rappelle que l’alinéa 3 de l’article 36 du règlement précise que « la parole est accordée sur-le-champ à tout sénateur qui la demande pour un rappel au règlement. Toutefois, l’auteur doit simplement faire référence à une disposition précise du règlement ».
Par conséquent, monsieur le président, je vous invite à appliquer cette disposition du règlement et à donner la parole à ceux qui la demandent pour des rappels au règlement.
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour un rappel au règlement.
M. Bernard Jomier. Ce rappel au règlement se fonde sur l’article 33 de notre règlement, ayant trait aux comportements au sein de l’hémicycle.
Bruno Retailleau a rapporté des faits extérieurs à notre hémicycle en s’adressant manifestement directement au président du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain Patrick Kanner.
Nous bataillons fermement contre cette réforme. Nous utilisons les outils que le règlement nous accorde, à nous l’opposition,…
M. Patrick Kanner. Comme vous, mes chers collègues de droite !
M. Bernard Jomier. … mais nous ne sommes en aucune manière responsables des faits, tout à fait regrettables et parfois délictueux, que M. Retailleau a rapportés. (Marques de satisfaction sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Vincent Segouin. Vous les condamnez, alors ?
M. Bernard Jomier. Il serait bon que ces attaques personnelles, proscrites par l’article 33 de notre règlement, ne se produisent pas dans cet hémicycle.
Vous défendez une réforme, nous l’avons compris. Vous l’avez conçue, puis vous l’avez confiée au Gouvernement : en cela, il s’agit en quelque sorte d’une gestation pour autrui (Exclamations amusées et applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.), en l’occurrence le Gouvernement, dont, nous en convenons, l’accouchement est un peu difficile !
Retrouvons notre calme ! Cessons ces attaques et appliquons les articles du règlement ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour un rappel au règlement.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Monsieur le président, ce rappel au règlement se fonde sur l’article 44 bis de notre règlement.
Céline Brulin vient de solliciter une suspension de séance. Il semblerait normal de nous l’accorder. En effet, l’amendement de M. Retailleau devait être présenté hier soir, cela n’a pas été le cas. Il devait l’être ce matin, ce n’est toujours pas le cas. Maintenant, M. Retailleau nous propose de discuter de cet amendement, ce soir, en catimini. Ce n’est pas possible !
Nous vous le disons : depuis le début, nous ne faisons pas d’obstruction ! (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) Nous refusons pied à pied la réforme des retraites ! C’est vous, l’obstruction – l’obstruction au peuple, l’obstruction aux gens qui défilent dans la rue et qui combattent votre réforme !
M. Max Brisson. Plus c’est gros, plus ça passe !
Mme Cathy Apourceau-Poly. C’est la raison pour laquelle vous nous avez fait voter l’article 7, cette nuit, en catimini (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.),…
M. Max Brisson. Balivernes !
Mme Cathy Apourceau-Poly. … parce que vous avez honte de ce que vous êtes en train de faire !
Nos précédents amendements n’ont pas été examinés par la commission des affaires sociales. C’était un simulacre de démocratie !
Nous demandons que M. Retailleau présente son amendement ce matin, comme cela était prévu, et que la commission des affaires sociales se réunisse afin d’examiner nos sous-amendements.
M. le président. La parole est à M. Martin Lévrier, pour un rappel au règlement.
M. Martin Lévrier. Ce rappel au règlement se fonde sur le même article de notre règlement.
J’entends la demande de suspension de séance pour quelques minutes relayée par Cathy Apourceau-Poly, afin que son groupe puisse réorganiser son travail. J’eusse aimé que les groupes situés à la gauche de cet hémicycle, en déposant autant de sous-amendements en catimini cette nuit (M. Jean-Marc Todeschini s’exclame.), aient eu la même préoccupation à l’égard du travail des autres groupes parlementaires qui les découvrent ce matin.
L’hypocrisie a été levée hier lors de la conférence des présidents, puisque l’obstruction y a été clairement annoncée.
Mme Cathy Apourceau-Poly. C’est vous, l’obstruction !
M. Martin Lévrier. Vous devez maintenant l’assumer, ce qui sera bien plus simple (Exclamations sur les travées du groupe CRCE.) et nous évitera de perdre un temps fou.
Je maintiens qu’il faut poursuivre nos travaux.
Il est étonnant que vous parliez de travail en catimini, lorsque nous siégeons la nuit, alors que cela fait partie de notre mission et que c’est notre rôle. Il n’existe aucune différence entre un vote de nuit et un vote de jour. Sinon, demandez que les séances soient levées à dix-huit heures, comme tous ceux qui ne veulent pas travailler la nuit ! (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP, UC et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. René-Paul Savary, rapporteur. La commission est disponible jour et nuit.
Néanmoins, madame Apourceau-Poly, une différence existe entre prendre du temps et se précipiter.
Vous proposez d’examiner l’amendement de Bruno Retailleau ce soir, mais, dans la mesure où il a été convenu de l’examiner après l’article 13, cela voudrait dire que nous ayons eu le temps de débattre de l’ensemble des articles d’ici-là.
Ce ne sera pas du tout le cas, sauf à ce que vous vouliez bâcler la discussion. Entre bâcler le débat et l’empêcher, il existe certainement une marge de manœuvre qui permettrait d’aborder le fond des sujets.
J’appelle votre attention sur ce point. Vous avez la volonté de vous opposer – d’accord ! –, mais, pour ceux qui ont la volonté de débattre, permettez que le Parlement puisse jouer son rôle – les Français l’attendent. (Exclamations sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST.)
M. Jean-François Husson. Il a raison !
M. René-Paul Savary, rapporteur. Par conséquent, révisez vos arguments d’opposition, afin, au moins, qu’ils tiennent. Ils ne tiennent pas ! Soyez attentifs à cela !
Nous n’avons jamais eu l’habitude de travailler de cette façon. Le respect a toujours prévalu dans le débat de confrontation qui est nécessaire au Parlement, convenez-en.
Ressaisissez-vous et faites en sorte que nous puissions enfin débattre ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC. – Exclamations sur les travées du groupe CRCE.)
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour un rappel au règlement. Sans doute celui-ci nous éclairera-t-il sur son interprétation de notre règlement.
Mme Raymonde Poncet Monge. Monsieur le président, c’est tout à fait l’objet de mon intervention ! (Ah ! sur des travées du groupe Les Républicains.)
Bien que je sois sénatrice depuis peu, les rappels au règlement de MM. Retailleau et Lévrier me semblent véritablement sans objet. En l’occurrence, c’est plutôt moi qui demande à être éclairée !
Je comprends que M. Retailleau ait besoin, dès le matin, à dix heures et demie, de sa dose d’idéologie. Certains prennent de la vitamine C ; lui a besoin de s’injecter des doses d’idéologie très tôt le matin pour avoir de la force ! Très bien ! (Vives exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Max Brisson. Ce sont des insultes !
Mme Raymonde Poncet Monge. En quoi les coupures d’électricité ont-elles leur place dans un rappel au règlement ? Vous nous l’expliquerez !
Arrêtez de dire que nous ne voulons pas en venir au débat de fond ! (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.) Le débat de fond, c’était hier ! C’était celui qui portait sur l’article 7 et que vous avez restreint !
M. Max Brisson. N’importe quoi !
Mme Raymonde Poncet Monge. Si je suis le maillot jaune, vous n’étiez, quant à vous, pas dans le peloton ! (Rires et applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
Oui, nous voulions avoir ce débat de fond. Les syndicats le voulaient. Sur cinq jours de débat, ils souhaitaient que nous consacrions au moins deux jours à l’article 7.
M. Max Brisson. C’est un aveu !
Mme Raymonde Poncet Monge. Cependant, cela ne vous intéressait pas ! Ce sont les autres articles qui vous intéressent afin de montrer que quelques mesures d’accompagnement sont prévues.
Mon rappel au règlement ne vaut pas moins que celui de M. Retailleau ! (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
Après l’article 7 (suite)
M. le président. L’amendement n° 608 rectifié bis, présenté par Mme Conconne, M. Lurel, Mmes Jasmin, Lubin et G. Jourda et M. Durain, est ainsi libellé :
Après l’article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de trois mois faisant suite à la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport relatif aux conséquences de l’accélération de l’allongement de la durée de cotisation à 172 trimestres pour les assurés nés avant le 1er janvier 1973 dans les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution. Ce rapport mettra en évidence les conséquences de ce nouveau calendrier sur l’âge effectif de départ en retraite et sur le niveau des pensions.
La parole est à M. Jérôme Durain.
M. Jérôme Durain. Le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale portant réforme du système de retraite ne contient à ce stade aucune mesure spécifique concernant ladite outre-mer.
Pourtant, sa situation est très différente de celle de l’Hexagone, en raison de l’arrivée tardive de la sécurité sociale dans ces territoires et de la persistance, liée à leur histoire, d’une part importante de travail informel ou de défauts de déclaration.
Les carrières hachées sont, de ce fait, surreprésentées dans les outre-mer et très difficiles à reconstituer, faute d’archives complètes. Il en ressort un niveau de pension de base sensiblement plus faible que dans l’Hexagone et un nombre très important de retraités pauvres, voire très pauvres.
Les données issues de la collection Points de repère de la sécurité sociale nous fournissent, à ce titre, des chiffres éclairants : l’âge moyen de départ à la retraite en Martinique est de 65,03 ans contre 62,9 ans à l’échelle nationale, en raison d’un nombre de trimestres validés plus difficile à atteindre pour les Martiniquais.
Cela est confirmé par une étude menée par la sécurité sociale sur la génération née entre 1961 et 1964 : 6,5 % des assurés de cette génération sont partis à la retraite à l’échelle nationale, contre moins de 1 % en Martinique ; un peu plus de 6 % des assurés de cette génération sont concernés par des « trous » de carrière en France, contre 20 % en Martinique ; les validités incomplètes sont largement supérieures en Martinique.
Concernant les départs anticipés, là aussi, des différences notables existent : en 2020, ils concernaient 2 % des assurés en Martinique, 1 % en Guadeloupe, 3 % en Guyane et à La Réunion, contre 20 % à l’échelle nationale.
L’accélération du passage à 43 annuités de cotisation renforcera la difficulté pour les habitants de ladite outre-mer nés dans les années 1960 à atteindre le nombre de trimestres requis pour bénéficier d’une pension complète et, en conséquence, les contraindra à travailler jusqu’à 67 ans, l’âge du taux plein.
L’article 40 de la Constitution ne nous permet pas de sortir les collectivités d’outre-mer de l’application de ce nouveau calendrier. À défaut, cet amendement vise à demander un rapport au Gouvernement sur les conséquences de l’accélération de l’allongement de la durée de cotisation dans les outre-mer.
M. le président. Le sous-amendement n° 4941, présenté par M. Kanner, Mme Féret, MM. Fichet et Jomier et Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, est ainsi libellé :
Sous-amendement à l’amendement n° 608
Alinéa 3
Remplacer le mot :
« trois »
Par :
« douze »
La parole est à M. Patrick Kanner.
M. Patrick Kanner. L’examen de ce sous-amendement m’offre l’occasion d’une mise en point.
Mes chers collègues, vous utilisez les articles 38, 42, alinéa 10, et 42, alinéa 16, de notre règlement, les amendements prioritaires, les reports d’examen d’amendements de M. Retailleau à une date hypothétique. À ce jeu-là, nous aurions pu être aussi productifs. (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Alain Joyandet. C’est vous qui nous obligez !
M. Patrick Kanner. Voilà ce qu’est une véritable obstruction !
Néanmoins, parce que nous ne sommes pas dans une logique d’obstruction, je retire ce sous-amendement, ainsi que les sous-amendements suivants.
M. le président. Les sous-amendements nos 4941, 4940, 4939, 4938, 4937, 4936, 4935, 4934 et 4933 sont retirés.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 608 rectifié bis ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Vous le savez, mes chers collègues, la commission a pour habitude de refuser les demandes de rapport.
Vous êtes nombreux dans cet hémicycle à travailler sur le statut des sapeurs-pompiers et à être très attentifs à trouver les moyens d’accompagner leur engagement. Les éléments figurant dans votre amendement seront discutés par ailleurs au sein d’autres commissions.
La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme Laurence Rossignol. Nous parlons des outre-mer !
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Nous n’avions pas le même amendement sous les yeux. Vous voyez, nous non plus, nous n’avons pas toujours les mêmes éléments…
M. Patrick Kanner. Il faut suspendre alors !
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Néanmoins, monsieur Kanner, en réalité, les masques sont tombés : vous faites de l’obstruction !
M. Jean-Marc Todeschini. Vous dites n’importe quoi !
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Cette demande de rapport et ces sous-amendements relèvent de l’obstruction.
M. Patrick Kanner. Vous ne connaissez pas vos dossiers !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Cet amendement est important, puisqu’il a pour objet la question de nos collègues ultramarins. Les populations de leurs départements présentent, comme l’exposé des motifs l’indique, des caractéristiques de carrière et d’état de santé bien différentes, ainsi que des indicateurs d’espérance de vie en bonne santé, également très différents, qui ne leur sont pas favorables.
Cette question n’est pas traitée ni même prise en compte dans ce projet de loi. Cela a été souligné avec vigueur par Victorin Lurel précédemment.
Cette demande de rapport portant sur les conséquences de l’application des dispositions prévues par ce texte dans ces départements nous paraît essentielle. Il s’agit d’un message que nous devons adresser à nos compatriotes ultramarins : nous sommes en train de débattre d’un projet de loi qui, une fois de plus, portera atteinte à l’égalité sociale entre les résidents des départements d’outre-mer et ceux de métropole.
C’est la raison pour laquelle nous estimons que cette demande de rapport est particulièrement justifiée, en dépit de la position du Sénat que nous connaissons bien sur ce sujet.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 608 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements et de douze sous-amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les deux premiers amendements sont identiques.
L’amendement n° 223 est présenté par M. Chantrel.
L’amendement n° 4677 rectifié est présenté par Mmes M. Vogel et Poncet Monge, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi, Salmon et Leconte.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans l’année suivant la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l’application de l’article 7 de la présente loi. Ce rapport analyse notamment les conséquences du relèvement de l’âge de la retraite à soixante-quatre ans pour les assurés établis hors de France ainsi que leur conjoint qui attestent d’une interruption d’activité professionnelle.
La parole est à M. Yan Chantrel, pour présenter l’amendement n° 223.
M. Yan Chantrel. Je souhaite, au travers de cet amendement, parler des autres grands oubliés de la réforme que sont les Français établis hors de France – ils sont un certain nombre –, dont j’ai l’honneur d’être l’un des représentants dans cet hémicycle. À l’instar d’autres salariés, ils ont des carrières hachées, puisqu’ils travaillent souvent dans un pays, puis dans un autre.
Monsieur le ministre, vous êtes intervenu sur ce sujet au tout début de la discussion de ce texte et j’aimerais bien que vous avanciez sur certains problèmes spécifiques que rencontrent nos compatriotes établis hors de France, afin qu’ils soient résolus.
Je pense notamment aux conventions de sécurité sociale qui sont signées avec d’autres pays. La France est en effet l’un des rares pays à ne pas reconnaître les polypensionnés, puisqu’elle signe des conventions bilatérales. Le salarié qui aura changé plusieurs fois de pays devra, au moment de la retraite, choisir une seule de ces conventions. Ainsi, s’il a travaillé dix ans dans un pays et dix ans dans un autre, l’État l’oblige à renoncer à ses droits dans l’un des deux pays où il a travaillé. Imaginez le montant de sa pension de retraite le moment venu…
La prise en compte des vingt-cinq meilleures années pose un autre problème, puisqu’elle entraîne une décote automatique de la retraite de nos compatriotes établis hors de France. En effet, par définition, ceux-ci font leurs vingt-cinq années dans d’autres pays que la France.
Monsieur le ministre, je souhaite obtenir des précisions, de façon à régler ce problème. Cette demande de rapport vise à dresser un état des lieux des conséquences d’une telle réforme sur la retraite de nos compatriotes établis hors de France.
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour présenter l’amendement n° 4677 rectifié.
M. Guillaume Gontard. L’amendement de Mélanie Vogel tend à demander au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport, afin que puissent être examinées les conséquences économiques et sociales du relèvement de l’âge légal de départ à la retraite à 64 ans pour les Français établis hors de France.
Cela a été rappelé, les carrières professionnelles de nos compatriotes établis à l’étranger sont souvent morcelées. Le relèvement de l’âge de départ expose donc les Français de l’étranger à des conséquences particulières. Le rapport aurait pour objet de les identifier, afin d’en éliminer les effets néfastes.
Nombre de Français établis à l’étranger connaissent une carrière morcelée, mais également des interruptions dans leur activité professionnelle, afin de pouvoir suivre leur conjoint dans un autre pays. Dans certains cas, cette interruption peut être due au seul fait que les démarches administratives nécessaires à l’exercice de ladite activité professionnelle prennent du temps, comme cela peut être le cas avec la reconnaissance des diplômes. Ils sont ainsi confrontés à des difficultés d’embauche dans le pays de résidence.
Le rapport demandé au Gouvernement vise donc à porter une attention particulière sur les conséquences du relèvement de l’âge de départ à la retraite pour ces personnes.
M. le président. Le sous-amendement n° 5215, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Antiste, Mme Artigalas, MM. Assouline et J. Bigot, Mmes Blatrix Contat et Bonnefoy, MM. Bouad et Bourgi, Mme Briquet, M. Cardon, Mmes Carlotti et Conway-Mouret, MM. Cozic, Devinaz, Durain et Éblé, Mme Espagnac, M. Féraud, Mme M. Filleul, M. Gillé, Mme Harribey, MM. Houllegatte, Jacquin, Jeansannetas et P. Joly, Mme G. Jourda, M. Kerrouche, Mme de La Gontrie, MM. Lozach, Lurel, Magner, Marie, Mérillou et Michau, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme Préville, MM. Raynal et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Roger, Stanzione, Sueur, Temal, Tissot, Todeschini, M. Vallet et Vallini, Mme Van Heghe et M. Vaugrenard, est ainsi libellé :
À l’amendement 4677
Les mots « hors de France » sont remplacés par les mots : « au Vietnam »
La parole est à M. Yan Chantrel.
M. Yan Chantrel. Je réponds à M. Retailleau sur son reproche d’obstruction, si je puis dire. (Murmures sur des travées du groupe Les Républicains.)
Monsieur le sénateur, c’est vous qui avez fait de l’obstruction ce matin, avec votre manœuvre visant à repousser le débat ! Cela montre que vous ne voulez pas débattre ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Dominique Estrosi Sassone. Bien sûr…
M. Martin Lévrier. Mais non, on reporte !
M. Yan Chantrel. Vous avez souvent fait des comparaisons internationales, soulignant que, dans tel pays, l’âge de départ était fixé à 65 ans ou à 67 ans.
En fait, vous ne connaissez pas vraiment le sujet, alors que, nous, nous le connaissons ! La plupart de nos compatriotes vivant dans ces pays, nous sommes en mesure de vous rapporter leurs témoignages sur les conséquences de telles réformes dans ces pays.
D’ailleurs, vous ne prenez pas tous les pays en exemple, notamment ceux où la retraite est à 60 ans, comme c’est le cas dans la province du Québec, où j’ai vécu – même s’il faut reconnaître que le système est différent. Il faut donc examiner le sujet dans sa globalité.
Il se trouve que les pays où l’on part plus tard à la retraite sont justement ceux qui ont pratiquement les taux de pauvreté les plus importants ! Avoir des personnes âgées pauvres, est-ce bien cela que vous voulez vendre à notre société ? Pour notre part, ce n’est pas ce que nous souhaitons défendre ! Voilà l’intérêt d’avoir du recul sur la situation, comme nous l’avons.
Nous ne faisons pas d’obstruction ! L’obstruction vient de l’autre côté de l’hémicycle.
Mme Chantal Deseyne. Non, non, non !
M. Yan Chantrel. Nous avons déposé un ensemble de sous-amendements pour que nos compatriotes établis hors de France puissent également apparaître dans ce débat – c’est important. Pour autant, je les retire.
M. le président. Les sous-amendements nos 5215, 5216, 5217, 5218, 5219, 5220, 5221, 5222, 5223, 5224, 5225 et 5226 sont retirés.
L’amendement n° 2017, présenté par Mme Conway-Mouret, est ainsi libellé :
Après l’article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai d’un an suivant la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l’application de l’article 7 de la présente loi. Ce rapport analyse les conséquences du relèvement de l’âge de la retraite à soixante-quatre ans pour les assurés établis hors de France, ainsi que leur conjoint, qui attestent d’une interruption d’activité professionnelle.
La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret.
Mme Hélène Conway-Mouret. Monsieur le ministre, la réforme que vous proposez aura des effets négatifs sur la vie de 68 millions de Français, mais également sur celle de 3 millions d’entre eux, qui ont choisi de vivre à l’étranger et que, comme l’a rappelé Yan Chantrel, vous avez oubliés dans ce texte.
Les Français l’ont bien compris, notamment les femmes, qui représentent la moitié de la population. En manifestant massivement, ils vous font savoir qu’ils n’en veulent pas. D’ailleurs, des manifestations ont également eu lieu à l’étranger, notamment à Berlin et à Madrid.
Vous vous entêtez, alors que l’examen du texte a mis en lumière les grands oubliés de votre réforme, notamment ceux qui ont des carrières hachées.
C’est malheureusement le cas de tous nos compatriotes qui font le choix de la mobilité et qui vivent à l’étranger pendant une période plus ou moins longue. Certains ont travaillé en France et dans plusieurs autres pays. Selon l’Observatoire de l’expatriation Banque Transatlantique, 39 % des séjours à l’étranger sont motivés par une raison professionnelle et pas moins de 25 % par une raison sentimentale.
Nombre de femmes – elles sont majoritaires, même si le nombre d’hommes est croissant – renoncent à exercer une activité professionnelle, afin de suivre leur conjoint en poste à l’étranger, mettant ainsi parfois fin à une carrière prometteuse. Il ne leur est en effet pas toujours facile de trouver du travail pendant l’expatriation ou à leur retour en France.
Ainsi, la grande majorité de ceux qui sont souvent nos meilleurs ambassadeurs à l’étranger sont directement concernés par votre réforme.
C’est pourquoi nous demandons au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport visant à examiner les conséquences économiques et sociales du relèvement de l’âge de départ à la retraite à 64 ans pour les Français établis hors de France.
M. René-Paul Savary, rapporteur. Mes chers collègues, il est important de s’intéresser aux assurés établis hors de France ainsi qu’à leurs conjoints, afin de voir comment sont prises en compte les interruptions professionnelles.
Se pose également le problème des femmes françaises qui, après avoir suivi leur conjoint, ont accouché dans un pays étranger, mais dont les trimestres de majoration ne sont pas pris en compte à leur retour ou dont la carrière est interrompue. Ce sujet est intéressant, mais il a déjà été largement étudié, notamment par le Conseil d’orientation des retraites (COR).
Monsieur Chantrel, vous qui semblez tout savoir, alors que les autres ne savent rien,… (Protestations sur des travées des groupes SER et CRCE. – M. Yan Chantrel proteste.)
Mme Cathy Apourceau-Poly. Oh, ça va !
M. René-Paul Savary, rapporteur. C’est ce que vous nous avez dit !
… nous pourrons discuter en aparté…
M. Jean-Marc Todeschini. C’est en public qu’il faut le faire !
M. René-Paul Savary, rapporteur. … des différences entre les régimes suisse et ouzbek. Ce sera très constructif pour la suite de nos débats.
La commission émet un avis défavorable sur ces amendements. M. le ministre pourrait nous donner des précisions sur cet important sujet.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, vous le savez, en général, le Gouvernement s’oppose aux demandes de rapport, même si des exceptions peuvent advenir, considérant que les compétences du Parlement en matière d’évaluation des politiques publiques et de contrôle de l’action du Gouvernement – missions d’information, commissions d’enquête… – permettent de produire et de remettre des rapports sur nombre de sujets, à un rythme et avec une objectivité plus importants que lorsqu’ils sont confiés au Gouvernement, sous l’autorité des ministres qui dirigent les différents services.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur ces amendements.
Cela étant, j’ai eu l’occasion de répondre, voilà quelques jours, à une question de Mme Joëlle Garriaud-Maylam et de M. Christophe-André Frassa relative aux Français de l’étranger : un rapport ne suffirait pas à régler les difficultés rencontrées par nos ressortissants à l’étranger. Il y a des difficultés conventionnelles : chaque situation renvoie à la nécessité d’une convention ou d’un accord fiscal et social, parfois les deux, avec les pays concernés, aussi bien en matière de transfert de droits que de versement de pensions et de leur fiscalisation ou non. M. Frassa a d’ailleurs, comme vous, monsieur Chantrel, pointé la difficulté liée au choix du pays et à l’impossibilité de faire valoir ces droits dans des pays différents.
Au tout début de ces débats, je me suis engagé à ce qu’un groupe de travail transpartisan composé des parlementaires représentant les Français établis hors de France s’attelle à ces sujets. J’ai précisé que ce sera dans le même temps un travail de fourmi et de titan. En effet, il faudra, en premier lieu, examiner la situation de chaque pays et faire en sorte d’avancer dans une relation bilatérale qui nécessite un accord partagé sur chacun des sujets, en second lieu, élaborer des projets ou propositions de loi permettant les ratifications des conventions qui devront être adoptés.
Nous sommes au début d’un long processus, sur lequel je réitère mon engagement.
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.
M. Guillaume Gontard. Nous le voyons, et les explications de M. le ministre en attestent, c’est un sujet important. Aussi, on pourrait faire une exception pour cette demande de rapport.
Environ 2,5 millions de Français vivent à l’étranger. Pour autant, il n’y a pas un mot sur leur situation dans la réforme des retraites du Gouvernement. C’est évidemment un oubli de taille, car ils sont trop souvent pénalisés par les dispositions existantes. Bien plus, ils subiraient de plein fouet les conséquences de certaines mesures prévues par ce projet de loi.
Les Français de l’étranger ont souvent des carrières morcelées, notamment parce qu’ils ont tendance à changer de poste plus fréquemment. Les cas de personnes ayant travaillé dans plusieurs pays ne sont pas rares.
De tels parcours professionnels sont de plus en plus fréquents. D’un côté, de plus en plus de Français partent travailler à l’étranger, de l’autre côté, les entreprises ont de moins en moins recours au détachement, mais font signer davantage de contrats de travail locaux.
Monsieur le ministre, vous proposez de créer un groupe de travail, nous veillerons à ce qu’il soit créé. Pour autant, l’ensemble des arguments avancés montrent qu’il est nécessaire d’inscrire dans le texte une demande de rapport visant à nous éclairer sur une telle situation.
M. le président. La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret, pour explication de vote.
Mme Hélène Conway-Mouret. Monsieur le ministre, j’entends votre argument et, je le sais, les demandes de rapport ne sont pas populaires et sont généralement rejetées.
D’abord, demander un rapport permet de fixer un calendrier pour sa remise. Au passage, si un groupe de travail est créé et si les parlementaires sont conviés à le rejoindre, nous répondrons présent.
Ensuite, un rapport permettrait d’avancer sur ce sujet. Je ne pense pas qu’il faille revoir l’ensemble des conventions fiscales, même si cela peut, bien sûr, être étudié.
Enfin, un rapport permettrait de rassembler tous les argumentaires et, surtout, d’avancer selon un calendrier donné.
Comme vous l’avez souligné, monsieur le ministre, il s’agit d’un travail de fourmi qui durerait des années. Cela veut dire que nous ne connaîtrons pas assez rapidement les effets de la réforme sur les Français vivant à l’étranger ou ceux qui s’appliqueraient plus particulièrement à ceux qui veulent partir à l’étranger et qui ont besoin d’être complètement informés de ce qui les attend quand ils rentreront en France.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Je soutiens très fermement cette demande de rapport, d’autant plus que j’ai posé au gouvernement du précédent mandat une question écrite relative à la question des retraites de nos compatriotes établis à l’étranger, pour laquelle je n’ai pas eu de réponse. Ma question étant devenue obsolète, je l’ai reposée !
Ainsi, si cette demande de rapport était acceptée, je retirerais ma question écrite, ce qui permettrait au Gouvernement d’améliorer les statistiques de son taux de réponse aux questions écrites des parlementaires. (Sourires sur des travées du groupe GEST.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.
M. Jean-Yves Leconte. Les questions qui se posent concernent tous ceux qui font une partie de leur carrière à l’international et pas seulement les Français établis hors de France. Elles portent sur les décotes auxquelles ils ne pourront pas prétendre, parce qu’ils auront fait des années à l’étranger, sur le calcul de leurs années en France, puisque, si la moitié de leur carrière est faite à l’étranger, les vingt-cinq meilleures années seront toutes leurs années de carrière.
Je pense tout particulièrement aux fonctionnaires détachés qui travaillent notamment dans nos écoles françaises à l’étranger en recrutement local.
Je pense aussi à toutes les personnes qui travaillent en recrutement local dans nos services diplomatiques et consulaires et qui n’ont parfois pas accès à la retraite française.
Monsieur le ministre, sur tous ces sujets, les dispositions pourraient être législatives, mais elles sont d’abord réglementaires. Elles relèvent également de la manière dont on interprète l’application des conventions fiscales.
Ainsi, un rapport qui donne la position du Gouvernement a tout son intérêt. Il convient donc de voter ces amendements.
Les sujets qui nous tiennent à cœur, en particulier l’absence de décote et la possibilité de cotiser pour la retraite française si l’on travaille pour les services français à l’étranger en recrutement local, méritent bien que, tous ensemble, nous discutions très rapidement au sein d’un groupe de travail, afin de faire évoluer la réglementation.
Imposer une condition d’âge à 64 ans pour liquider ses droits à la retraite à un certain nombre de Français qui vivent dans des pays où la retraite est à 60 ans pose une difficulté et il se peut que, pendant quelques années, un certain nombre d’entre eux aient besoin d’aller au consulat demander les allocations de solidarité aux personnes âgées !
M. le président. La parole est à M. Yan Chantrel, pour explication de vote.
M. Yan Chantrel. Monsieur le ministre, nous avons bien pris note de votre engagement et de la création de ce groupe transpartisan, auquel, évidemment, nous participerons, afin d’améliorer la situation de nos compatriotes établis hors de France et d’avancer sur certains sujets.
Monsieur le rapporteur, je me dois de vous répondre. Vous dites que je sais tout, mais je suis tout de même l’un des représentants de nos compatriotes établis hors de France ! Au travers de vos propos, vous les insultez !
Mme Cathy Apourceau-Poly. Exactement !
M. Yan Chantrel. Je ne vous donne pas de leçons sur la situation dans la Marne.
Je vous demanderai donc un peu de respect, à l’instar de celui dont nous faisons montre ! Nous pouvons débattre assez durement sur le fond – c’est tout à l’honneur de notre hémicycle –, mais nous devons nous montrer un minimum de respect et avoir la décence de ne pas nous livrer à ce genre d’attaques.
Vous passez beaucoup de temps à dire que vous voulez avoir un débat de fond. Appliquez ce principe à vous-même,…
M. René-Paul Savary, rapporteur. Vous avez raison… Et à vous aussi ! (Sourires.)
M. Yan Chantrel. … intervenez sur le fond – c’est toujours très intéressant – et continuons à débattre sereinement et à étudier tous les amendements que nous avons déposés. (Applaudissements sur des travées du groupe SER.)
Mme Cathy Apourceau-Poly. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Mélanie Vogel, pour explication de vote.
Mme Mélanie Vogel. Les Français établis hors de France ont souvent accompli une partie de leur carrière en France, une autre à l’étranger, parfois dans différents pays ; certains reviennent de nouveau en France, d’autres non. Ils sont un peu dans la même situation que les femmes qui, en France, ont eu des carrières hachées, sauf que, dans de nombreux cas, ils n’ont même pas eu de carrières hachées !
Simplement, le calcul de leur salaire annuel moyen et la manière dont leurs droits à la retraite sont liquidés sont discriminatoires, puisque les années à l’étranger ne sont pas prises en compte.
Ces Français, qui ont étudié ou travaillé ailleurs, qui participent à la richesse du monde et de nos sociétés et qui apportent tellement aux pays étrangers, mais aussi à la France, se retrouvent pénalisés, parce que leur carrière ne s’est pas déroulée uniquement en France.
Aussi, nous vous demandons un rapport visant à étudier les effets de cette réforme, qui, de la même manière qu’elle touchera l’ensemble des Français ayant des carrières hachées, concernera particulièrement les Français de l’étranger. Ceux-ci connaissent en effet des situations très variables, les conventions étant établies avec certains pays, mais pas avec d’autres. Bref, il y a autant de situations que de Français.
Néanmoins, nous avons besoin de connaître de manière objective les conséquences de la réforme sur leurs droits. Voilà pourquoi nous vous demandons un tel rapport. Près de 3 millions de personnes vivent à l’étranger : ce n’est pas grand-chose de demander d’étudier l’effet de cette réforme sur leur vie et sur leurs droits.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 223 et 4677 rectifié.
J’ai été saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l’une, du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain et, l’autre, du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 235 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 343 |
Pour l’adoption | 93 |
Contre | 250 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix l’amendement n° 2017.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 236 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 343 |
Pour l’adoption | 93 |
Contre | 250 |
Le Sénat n’a pas adopté.
L’amendement n° 2392 rectifié ter, présenté par MM. P. Joly, Redon-Sarrazy, Stanzione, Magner, Gillé, Michau et Durain, Mme M. Filleul, M. M. Vallet, Mmes Blatrix Contat et Conway-Mouret, M. Pla, Mmes Conconne, Poumirol et G. Jourda, MM. Temal et Leconte, Mmes Jasmin et Le Houerou, M. Chantrel, Mme Monier, MM. Tissot, Devinaz et Jacquin et Mme Préville, est ainsi libellé :
Après l’article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai d’un an suivant la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet un rapport sur l’application de l’article 7 de cette loi. Ce rapport analyse les conséquences du relèvement de l’âge de la retraite à soixante-quatre pour les retraités qui vivent dans les territoires ruraux par rapport aux retraités qui vivent dans les zones urbaines et l’impact économique et financier qu’il peut avoir.
La parole est à M. Patrice Joly.
M. Patrice Joly. Mes chers collègues, comme moi, vous savez que l’évolution démographique de la France va dans le sens d’un accroissement continu de la part des personnes âgées dans les prochaines années.
Ce vieillissement est hétérogène dans le territoire national. On constate que les parts de la population âgée sont plus importantes dans les zones rurales que dans les zones urbaines. Les écarts sont très sensibles. Par exemple, en Île-de-France, la part des personnes de plus de 60 ans s’élève à 15,5 % ; à l’inverse, dans le Limousin, cette part est de 30 % et dépasse les 30 % dans la Creuse.
Ainsi, outre les écarts entre les régions, les retraités semblent, en proportion, plus nombreux dans les territoires ruraux.
Cet amendement vise donc à demander au Gouvernement de remettre un rapport au Parlement dont l’objet serait d’examiner les conséquences économiques et sociales du relèvement de l’âge de départ à la retraite à 64 ans pour les Français vivant dans les zones rurales au regard de ceux qui vivent dans les zones urbaines.
L’enjeu est de comprendre les spécificités du vieillissement en milieu rural et leurs principes organisateurs.
Ce rapport serait essentiel pour appréhender l’aménagement du territoire, le développement des services médico-sociaux en direction des populations âgées, l’accompagnement social des parcours de vie dans la vieillesse.
Il assurerait également le développement d’une action publique adéquate et pertinente. En effet, les territoires ruraux ne sont pas tous également préparés au vieillissement, voire à la gérontocroissance, qui les concerne. Les politiques publiques locales proposent différentes solutions qu’il convient d’examiner et de scruter pour les adapter.
Le sens de cet amendement est d’examiner les conséquences particulières de l’article 7 sur les territoires ruraux, de la même manière que nous avons évoqué, à l’occasion d’autres débats, les conséquences liées aux catégories d’emploi dans les territoires ruraux par rapport aux territoires urbains.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement dont l’objet est une demande de rapport.
Ces sujets ont déjà été étudiés dans nombre d’articles de presse et par les organismes qui s’intéressent aux sujets liés à la retraite.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 2392 rectifié ter.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 3161, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon, est ainsi libellé :
Après l’article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement présente au Parlement un rapport à propos de l’impact de la présente loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 sur les retraites des travailleurs et travailleuses immigrés compte tenu de leurs parcours de carrières spécifiques.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. J’anticipe vos reproches, selon lesquels il aurait fallu déposer cet amendement sur le projet de loi Immigration et non sur ce texte.
Plusieurs études ont pour point commun de montrer l’insuffisance de l’étude d’impact de cette réforme des retraites. Je rappelle qu’elle n’a pas été faite par le Conseil d’État. Aussi, tous ces amendements tendent à demander des rapports sur des points particuliers de l’impact de ce projet de loi – leur lien direct avec l’article est aussi simple que cela.
Selon une étude de l’Insee, les immigrés représentent moins de 10 % de la population française, mais 20 % des personnes pauvres. Je vous rappelle qu’à 62 ans, 25 % des personnes les plus pauvres, et non pas tous les pauvres, sont déjà décédées.
Parmi ces dernières, les personnes immigrées sont surreprésentées. Une partie d’entre elles ont des carrières hachées – en ce sens, cela rejoint la discussion précédente –, en raison des discriminations à l’embauche – être immigré est l’un des facteurs de discrimination les plus forts. Elles sont souvent au chômage – 8,5 % en moyenne, contre 4,7 % pour les personnes non-immigrées – et elles entrent souvent tardivement sur le marché du travail français.
De plus, il manque souvent dans leur relevé de carrière de nombreuses années, car elles n’ont pas été déclarées par leurs employeurs. Les personnes immigrées payent de façon massive le prix fort de pratiques illégales d’employeurs exploiteurs peu scrupuleux. Ainsi, en raison de carrières à faibles salaires et incomplètes, nombre de travailleurs immigrés vivent grâce à l’allocation de solidarité aux personnes âgées (Aspa), si elles y ont droit.
Les travailleurs étrangers sont surreprésentés dans les secteurs et les métiers d’ouvriers et d’employés, qui paieront le prix le plus fort de cette réforme – j’en ai parlé hier. Ils pâtiront aussi, et proportionnellement plus, du recul de l’âge de la retraite.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. On aurait pu, bien sûr, demander mille rapports, qui sur telle catégorie, qui sur tel statut, qui sur telle conséquence de cette réforme des retraites.
En réalité, il existe déjà une étude d’impact, que vous avez certainement lue, ma chère collègue, puisque je sais avec quelle attention vous cherchez à repérer tous les points qui font débat.
Beaucoup d’éléments ont été fournis par la Caisse nationale d’assurance vieillesse (Cnav) et par les services des ministères. Ils nous ont permis de bien nous informer.
Je ne dis pas que des catégories de personnes ne sont pas dans des situations difficiles. C’est justement pour les défendre contre de dures réalités que nous nous sommes engagés.
Demander des rapports est en fait en contradiction avec votre souhait d’avoir des réponses à vos questions écrites. On ne peut pas demander aux services du ministère de rédiger rapport sur rapport et de faire réponse sur réponse à des questions écrites. Il faut être raisonnable en tout.
Si nous voulons retrouver la sérénité des débats, il nous faut savoir raison garder dans nos demandes.
M. Laurent Lafon. Très bien !
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 3161.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 237 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 343 |
Pour l’adoption | 93 |
Contre | 250 |
Le Sénat n’a pas adopté.
L’amendement n° 3186, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon, est ainsi libellé :
Après l’article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport évaluant les conséquences d’un report de l’âge légal de la retraite à 64 ans et de l’accélération de l’augmentation de la durée de cotisation à 43 annuités sur l’augmentation des dépenses de santé publique.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Selon une analyse du Centre d’étude de l’emploi et du travail (CEET), la réforme de 2010 a sensiblement augmenté le nombre d’arrêts maladie de longue durée chez les seniors, pour un surcoût estimé à 68 millions d’euros. Sont en cause la vulnérabilité, qui augmente avec l’âge, ainsi que la moindre résistance de ces populations à l’intensité du travail comme aux accidents professionnels.
Un nouveau report de l’âge de départ se traduira par des surcoûts pour l’assurance maladie et pour la branche accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP), qui ne sont pas évalués dans les tableaux d’équilibre.
Par ailleurs, de nombreuses études concluent à un effet négatif de l’allongement de la vie active sur la santé, que celle-ci soit objectivement décrite ou autoévaluée. L’augmentation de la prévalence des taux de dépression et des troubles mentaux par le travail n’est pas un phénomène anodin : il serait à l’origine de 20 % des arrêts de travail, un chiffre en constante augmentation depuis 2016.
Vous ne prenez donc pas suffisamment en compte les impacts de cette réforme sur le système de santé, en raison de l’augmentation des arrêts maladie, des effets postérieurs à la période de travail de la prolongation de l’exposition aux agents chimiques et des répercussions du report de l’âge de départ sur la santé perçue. Rappelons en outre que cette situation est aggravée par les inégalités de santé.
J’ai évoqué « deux ans ferme » : à l’âge dont il est question, c’est bien ainsi qu’il faut qualifier les conséquences qu’emportera cette réforme sur la santé !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Madame Poncet Monge, vous avez raison : l’assurance maladie, la branche vieillesse et la branche autonomie sont liées, elles constituent d’ailleurs la sécurité sociale.
C’est pourquoi je n’ai pas été choquée que cette réforme ait pour véhicule législatif un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale.
M. Jean-Marc Todeschini. Nous, si !
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Vous demandez un nouveau rapport. Encore une fois, nous avons chaque année l’occasion d’examiner précisément les relations entre les différentes branches ; nous le ferons encore lors de l’examen du prochain budget de la sécurité sociale.
Plus l’on vieillit, plus l’on rencontre des difficultés, chacun peut s’en rendre compte. Pour autant, doit-on évoquer cette question maintenant, alors que beaucoup de sujets importants restent en attente, comme les bornes d’âge ou la pénibilité, laquelle n’est d’ailleurs pas sans lien avec votre préoccupation ? J’ai le sentiment que vous essayez de gagner du temps et c’est très pénible.
La commission émet un avis défavorable sur cet amendement
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Madame la rapporteure générale, il ne me semble pas déceler en matière de questions écrites la même inflation que celle que nous subissons sur les prix. Je suis sénatrice depuis 2020 et j’ai posé quinze questions écrites : huit d’entre elles ont obtenu une réponse, j’attends les réponses aux questions restantes.
Je suis favorable à une certaine sobriété en la matière. (Sourires.)
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. J’évoquais les questions écrites en général !
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 3186.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 8
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Au second alinéa de l’article L. 161-18, les mots : « l’avant-dernier alinéa de l’article L. 732-23 » sont remplacés par les mots : « l’article L. 732-18-4 » ;
2° Au premier alinéa de l’article L. 161-21-1, le taux : « 80 % » est remplacé par le taux : « 50 % » ;
3° À la fin de la première phrase du premier alinéa et au dernier alinéa de l’article L. 341-15, au premier alinéa et à la première phrase du second alinéa de l’article L. 341-17 ainsi qu’à la première phrase du premier alinéa et à la fin du second alinéa de l’article L. 351-7-1 A, les mots : « au premier alinéa de l’article L. 351-1 » sont remplacés par les mots : « à l’article L. 351-1-5 » ;
4° L’article L. 341-16 est ainsi modifié :
a) Au deuxième alinéa, les mots : « au premier alinéa de l’article L. 351-1 » sont remplacés par les mots : « à l’article L. 351-1-5 » ;
b) Au troisième alinéa, après la référence : « L. 351-1 », sont insérés les mots : «, à l’exclusion de son premier alinéa, » ;
5° Au début de la section 1 du chapitre Ier du titre V du livre III, il est ajouté un article L. 351-1-1 A ainsi rédigé :
« Art. L. 351-1-1 A. – La condition d’âge prévue au premier alinéa de l’article L. 351-1 est abaissée d’au moins deux ans, dans des conditions fixées par décret, pour les assurés mentionnés à l’article L. 161-22-1-5 et pour les assurés bénéficiaires d’un départ en retraite au titre des articles L. 351-1-1, L. 351-1-3, L. 351-1-4 et L. 351-1-5. Cette condition d’âge est abaissée d’une durée ne pouvant excéder deux ans pour les assurés mentionnés à l’article L. 351-6-1. »
6° L’article L. 351-1-1 est ainsi modifié :
a) À la première phrase, les mots : « un âge » sont remplacés par les mots : « un des trois âges » ;
b) La seconde phrase est ainsi modifiée :
– après le mot : « cotisations », sont insérés les mots : « à la charge de l’assuré » ;
– sont ajoutés les mots : « , ainsi que les périodes validées en application des articles L. 381-1 et L. 381-2 » ;
7° Au premier alinéa de l’article L. 351-1-3, les mots : « tout ou partie de » sont supprimés ;
8° La section 1 du chapitre Ier du titre V du livre III est complétée par un article L. 351-1-5 ainsi rédigé :
« Art. L. 351-1-5. – La condition d’âge prévue au premier alinéa de l’article L. 351-1 est abaissée, dans des conditions fixées par décret, pour les assurés reconnus inaptes au travail dans les conditions prévues à l’article L. 351-7 et pour ceux justifiant d’une incapacité permanente au moins égale à un taux fixé par décret. » ;
9° L’article L. 351-8 est ainsi modifié :
a) Le 1° ter est abrogé ;
b) À la fin du 2°, les mots : « dans les conditions prévues à l’article L. 351-7 » sont remplacés par les mots : « et les assurés justifiant d’une incapacité permanente au moins égale à un taux fixé par décret admis à demander la liquidation de leur pension de retraite dans les conditions prévues à l’article L. 351-1-5 » ;
10° Au troisième alinéa de l’article L. 382-24, les mots : « du premier alinéa de l’article L. 351-1 » sont remplacés par les mots : « de l’article L. 351-1-5 » ;
11° L’article L. 643-3 est ainsi modifié :
a) Après le I, il est inséré un II ainsi rédigé :
« II. – La condition d’âge prévue au premier alinéa du I est abaissée d’au moins deux ans, dans des conditions fixées par décret, pour les assurés bénéficiaires d’un départ en retraite au titre des III à V. » ;
b) Le II devient un III et la première phrase est ainsi modifiée :
– les mots : « un âge » sont remplacés par les mots : « un des trois âges » ;
– sont ajoutés les mots : « ou des organismes débiteurs des prestations familiales pour les périodes validées en application des articles L. 381-1 et L. 381-2 » ;
c) Le III devient un IV et, au premier alinéa, les mots : « tout ou partie de » sont supprimés ;
d) Il est ajouté un V ainsi rédigé :
« V. – La condition d’âge prévue au premier alinéa du I du présent article est abaissée, dans des conditions fixées par décret, pour les assurés relevant des 2° et 3° de l’article L. 643-4 » ;
12° Au premier alinéa du 2° de l’article L. 643-4, les mots : « premier alinéa du I » sont remplacés par la référence : « V » ;
13° L’article L. 653-2 est ainsi modifié :
a) Après le I, il est inséré un II ainsi rédigé :
« II. – La condition d’âge prévue au premier alinéa du I est abaissée d’au moins deux ans, dans des conditions fixées par décret, pour les assurés bénéficiaires d’un départ en retraite au titre des III à V. » ;
b) Le II devient un III et la première phrase est ainsi modifiée :
– les mots : « un âge » sont remplacés par les mots : « un des trois âges » ;
– sont ajoutés les mots : « ou des organismes débiteurs des prestations familiales pour les périodes validées en application des articles L. 381-1 et L. 381-2 » ;
c) Le III devient un IV et, au premier alinéa, les mots : « tout ou partie de » sont supprimés ;
d) Il est ajouté un V ainsi rédigé :
« V. – La condition d’âge prévue au premier alinéa du I du présent article est abaissée, dans des conditions fixées par décret, pour les assurés relevant des 2° et 3° de l’article L. 653-4. » ;
14° Au premier alinéa du 2° de l’article L. 653-4, les mots : « premier alinéa » sont remplacés par la référence : « V » ;
15° Après les mots : « l’âge », la fin du dixième alinéa de l’article L. 821-1 est ainsi rédigée : « prévu à l’article L. 351-1-5. »
II. – Le code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° Au troisième alinéa de l’article L. 117-3, la référence : « L. 161-17-2 » est remplacée par la référence : « L. 351-1-5 » ;
2° Au deuxième alinéa du I de l’article L. 262-10, les mots : « au premier alinéa de l’article L. 351-1 » sont remplacés par les mots : « à l’article L. 351-1-5 ».
III. – Le code des pensions civiles et militaires de retraite est ainsi modifié :
1° Le 5° du I de l’article L. 24 est ainsi modifié :
a) Les mots : « , par rapport à un âge de référence de soixante ans » sont remplacés par les mots : « d’au moins deux ans, par rapport à l’âge mentionné à l’article L. 161-17-2 du code de la sécurité sociale » ;
b) Les mots : « tout ou partie de » sont supprimés ;
2° L’article L. 25 bis est ainsi modifié :
a) La première phrase est ainsi modifiée :
– après le mot : « abaissé », sont insérés les mots : « d’au moins deux ans » ;
– les mots : « un âge » sont remplacés par les mots : « un des trois âges » ;
b) La seconde phrase est ainsi modifiée :
– après le mot : « maternité », sont insérés les mots : « , des périodes validées en application des articles L. 381-1 et L. 381-2 du code de la sécurité sociale » ;
– sont ajoutés les mots : « à la charge de l’assuré ».
IV. – Le livre VII du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° Au début de la section 3 du chapitre II du titre III, il est ajouté un article L. 732-17-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 732-17-1. – La condition d’âge prévue à l’article L. 732-18 est abaissée d’au moins deux ans, dans des conditions fixées par décret, pour les assurés mentionnés à l’article L. 732-29 et pour les assurés bénéficiaires d’un départ en retraite au titre des articles L. 732-18-1, L. 732-18-2, L. 732-18-3 et L. 732-18-4. » ;
2° L’article L. 732-18-1 est ainsi modifié :
a) À la première phrase, les mots : « un âge » sont remplacés par les mots : « un des trois âges » ;
b) La dernière phrase est ainsi modifiée :
– après le mot : « cotisations », sont insérés les mots : « à la charge de l’assuré » ;
– sont ajoutés les mots : « , ainsi que les périodes validées en application des articles L. 381-1 et L. 381-2 du même code » ;
3° Au premier alinéa de l’article L. 732-18-2, les mots : « tout ou partie de » sont supprimés ;
4° Après l’article L. 732-18-3, il est inséré un article L. 732-18-4 ainsi rédigé :
« Art. L. 732-18-4. – La condition d’âge prévue à l’article L. 732-18 est abaissée, dans des conditions fixées par décret, pour les assurés reconnus inaptes au travail dans les conditions prévues à l’article L. 351-7 du code de la sécurité sociale et pour ceux justifiant d’une incapacité permanente au moins égale à un taux fixé par décret. » ;
5° L’article L. 732-23 est ainsi rédigé :
« Art. L. 732-23. – Les anciens prisonniers de guerre bénéficient d’une pension à un âge variant suivant la durée de captivité, dans des conditions fixées par décret.
« Les anciens prisonniers de guerre évadés de guerre, au-delà d’un certain temps de captivité, et les anciens prisonniers rapatriés pour maladie peuvent choisir le régime le plus favorable.
« Toute partie de mois n’est pas prise en considération.
« Les trois premiers alinéas s’appliquent à tous les anciens combattants pour leur durée de service actif passé sous les drapeaux. » ;
6° À la fin de la seconde phrase des articles L. 732-25 et L. 781-33, les mots : « de l’article L. 732-23 » sont remplacés par les mots : « des articles L. 732-18-2 et L. 732-18-4 du présent code, ni aux assurés mentionnés aux 3°, 4° bis et 5° de l’article L. 351-8 du code de la sécurité sociale, dans des conditions fixées par décret » ;
7° À la première phrase du I et à la fin du II de l’article L. 732-30, la référence : « L. 732-18 » est remplacée par la référence : « L. 732-18-4 ».
V. – Le 3° de l’article L. 5421-4 du code du travail est ainsi modifié :
1° La référence : «, L. 351-1-4 » est remplacée par les mots : « à L. 351-1-5 » ;
2° La référence : « L. 723-10-1 » est remplacée par la référence : « L. 653-2 » ;
3° La référence : « L. 732-18-3 » est remplacée par la référence : « L. 732-18-4 ».
VI. – 1. Le III est applicable aux fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales ainsi qu’aux ouvriers régis par le régime des pensions des ouvriers des établissements industriels de l’État, dans des conditions déterminées, en tant que de besoin, par décret en Conseil d’État.
2. Le présent article entre en vigueur pour les pensions prenant effet à compter du 1er septembre 2023.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, sur l’article.
Mme Raymonde Poncet Monge. Je rappelle que la pénibilité, avec mobilisation du compte professionnel de la prévention (C2P), est la cause de l’essentiel des départs anticipés. Ceux-ci sont possibles dans le cadre d’une carrière longue, mais ils sont si peu nombreux pour ce motif que le Gouvernement a dû créer les carrières « super-longues ».
Il convient, en ouverture de cette discussion, de souligner que ces départs anticipés interviennent deux ans avant l’âge légal ; avec la réforme précédente, l’âge légal est passé à 62 ans, celui du départ anticipé à 60 ans. Cela nous paraissait normal, certains syndicats y voyaient même une contrepartie.
Dans le texte dont nous discutons, l’âge légal passe à 64 ans, celui du départ anticipé est par conséquent fixé à 62 ans, un âge qui nous semblait impossible lors de la réforme précédente.
S’agissant des personnes en situation de handicap, la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) indique que cette réforme n’est pas à la hauteur des enjeux et va renforcer leur précarisation. Certes, vous n’avez pas modifié l’âge de départ pour ce qui les concerne, mais la CNSA regrette que vous ne l’ayez pas réduit.
Il lui paraît en effet contestable de présenter comme des progrès la préservation du statu quo ou de faibles avancées. Il en va ainsi du maintien de l’âge de la retraite anticipée à 62 ans pour inaptitude ou à 55 ans pour handicap : singulièrement, vous vous félicitez d’un « progrès » dès lors que vous n’aggravez pas la situation actuelle. La CNSA déplore donc que vous ne soyez pas au rendez-vous.
Selon le Collectif Handicaps, le report de l’âge légal à 64 ans pénalisera les personnes en situation de handicap qui, elles, ne peuvent pas bénéficier des dispositifs dérogatoires à 55 ans, mais qui rencontrent toutefois de grandes difficultés pour rester dans l’emploi.
M. le président. Il faut conclure, ma chère collègue !
Mme Raymonde Poncet Monge. Celles-ci passent en moyenne huit ans et demi sans emploi ni retraite avant 50 ans.
M. le président. La parole est à Mme Esther Benbassa, sur l’article.
Mme Esther Benbassa. Vous nous présentez cette réforme comme un projet porteur de justice sociale et de progrès. Nous ne sommes pas dupes de votre hypocrisie : vous faites passer pour une avancée sociale le simple maintien de la retraite anticipée à 55 ans pour les personnes en situation de handicap, et nous devrions nous en satisfaire.
Ces personnes connaissent des difficultés durant leur scolarité, puis dans le monde du travail, en raison de leurs limitations et l’environnement urbain est inadapté à leur mode de vie. On ne peut donc que déplorer, une fois de plus, que le Gouvernement ne les intègre pas davantage dans sa politique de réformes sociales.
Pourtant, 19 % des Français en situation de handicap se trouvent sous le seuil de pauvreté, contre 13 % de la population générale. D’après un rapport de l’inspection générale des affaires sociales (Igas) en date du 16 décembre 2022, les retraités déclarés inaptes vivent en moyenne quatre à six ans de moins que les autres.
Pour résumer, les personnes en situation de handicap trouvent difficilement du travail, sont plus précaires que le reste de la population, qui les exclut, vivent moins longtemps et dans de moins bonnes conditions. Quoi qu’il arrive, les travailleurs handicapés sont perdants et vous échouez à leur garantir une vie et une retraite dignes.
Votre texte révèle, sur ce sujet en particulier, un manque d’ambition criant, qui ne tranche pas avec l’ensemble de votre politique. La solidarité, l’inclusion et l’intégration sont des mots slogans que vous ne comptez jamais mettre en pratique.
M. le président. La parole est à M. Alain Joyandet, sur l’article.
M. Alain Joyandet. L’article 8 est très important pour le groupe Les Républicains : nous entendons nous en saisir pour inscrire dans le texte une avancée substantielle pour les femmes, notamment pour les mères de famille. (Murmures sur les travées du groupe SER.)
Monsieur le ministre, les quelque vingt sénateurs qui ont signé mon amendement sur la question des 43 annuités ont besoin d’explications précises. Certains d’entre nous ne comprennent rien aux carrières longues.
M. Alain Joyandet. Nous avons déposé un amendement pour simplifier les choses. Nous avons voté l’âge légal de départ à la retraite à 64 ans ; reste donc la question des 43 annuités. Nous demandons que ce chiffre soit défini comme la durée maximale de cotisation : qui a cotisé 43 ans peut partir à la retraite.
Si nous votons une telle évolution, combien de personnes en plus seront concernées par rapport au texte initial, et pour quel montant ? Nous sommes responsables : pour amender le texte, il nous faut connaître le coût des mesures que nous votons. En l’espèce, des chiffres circulent en tous sens, de la part de la commission comme du Gouvernement, mais nous ne disposons toujours pas de cette information.
Enfin, je tiens à dire à nos collègues de gauche que nous avons retiré cet amendement, parce que nous ne souhaitions pas prendre le risque de les voir déposer cinq cents sous-amendements au dernier moment. (Exclamations sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
Mme Sophie Primas. Vous nous bâillonnez !
Mme Cathy Apourceau-Poly. Arrêtez cela, enfin !
M. Alain Joyandet. Eh oui ! Vous êtes en train de faire obstacle à un débat démocratique sur un sujet qui nous intéresse tous. Vous nous empêchez d’amender le texte !
M. Éric Kerrouche. N’importe quoi !
M. Alain Joyandet. Vous vous livrez à un exercice de simulation, tel un avant-centre, durant un match de football, qui se couche dans les dix-huit mètres pour obtenir un penalty.
Monsieur Kanner, vous vous êtes occupé de sport au Gouvernement, cette image devrait vous parler : cela s’appelle de la simulation ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi qu’au banc des commissions.) Si l’arbitre ne s’en aperçoit pas, il siffle un penalty. En revanche, s’il s’en aperçoit, il donne un avertissement.
M. le président. Votre temps de parole est épuisé, mon cher collègue.
M. Alain Joyandet. Je souhaite que nos concitoyens ouvrent les yeux : je ne peux pas amender le texte en raison de votre obstruction. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Philippe Mouiller. Dès que nous parlons, on nous inflige un rappel au règlement !
M. Patrick Kanner. On me souffle qu’il n’y a pas penalty lorsque l’on est hors-jeu. C’est une belle expression ! (Sourires sur les travées du groupe SER.)
Mes chers collègues, continuons à travailler avec un peu de sang-froid. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Sophie Primas. C’est cela !
M. Philippe Pemezec. Cinéma !
M. Patrick Kanner. Je vous le dis très tranquillement : vous ne pouvez pas reprocher à votre opposition de faire simplement son travail d’opposition. (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.)
MM. Max Brisson et Philippe Pemezec. Obstruction !
M. Patrick Kanner. Étant majoritaires, vous disposez d’outils du règlement,…
Mme Sophie Primas. Et vous, vous n’en disposez pas ?
M. Patrick Kanner. … dont l’application a été décidée hier en conférence des présidents, à l’instar des alinéas 10 et 16 de l’article 42. Ceux-ci s’ajoutent à l’article 38, que vous utilisez déjà sporadiquement. De plus, vous déplacez des amendements, comme ce fut le cas avec celui de M. Retailleau.
Nous pourrions vous imposer à chaque fois un rappel au règlement pour vous enjoindre de respecter votre opposition, comme nous vous respectons, afin que nous gagnions du temps pour le débat. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST. – Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme Michelle Meunier, sur l’article.
Mme Michelle Meunier. Monsieur le ministre, mes chers collègues, nous vous le disons depuis presque une semaine maintenant : cette réforme est financière et le report de l’âge légal de départ emporte des conséquences sociales graves.
Mme Dominique Estrosi Sassone. Il a été voté.
Mme Michelle Meunier. Les rustines que vous nous proposez à l’article 8 sont des leurres qui ne tromperont pas les millions de Français mobilisés contre ce texte, non plus que leurs représentants.
Je souhaite relayer ici les vives inquiétudes du secteur du handicap. Alors que cet article prétend atténuer les injustices, il risque au contraire d’aggraver les inégalités d’accès au départ anticipé pour les personnes en situation de handicap ou d’incapacité.
Les travailleurs les plus vulnérables sont pénalisés : titulaires d’une pension d’invalidité, personnes inaptes au travail, bénéficiaires de l’allocation aux adultes handicapés (AAH), travailleurs handicapés, travailleurs en incapacité permanente à la suite d’un accident de travail ou d’une maladie professionnelle, mais aussi fonctionnaires handicapés.
Vous prétendez assouplir pour eux les conditions d’accès à la retraite anticipée en abaissant le taux d’incapacité nécessaire à 50 % et en remplaçant la condition de trimestres validés par celle de trimestres cotisés.
La durée de cotisation reste toutefois trop longue pour les personnes aux carrières hachées et à la fatigabilité élevée ; la substitution des trimestres validés par les trimestres cotisés aura pour effet de compliquer l’accès au dispositif. Nous regrettons ici que la majorité sénatoriale ait déclaré irrecevables de nombreux amendements visant à corriger le tir en la matière.
M. le président. Il faut conclure !
Mme Michelle Meunier. La fixation de l’âge de départ anticipé aggravera donc la situation. (Applaudissements sur des travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, sur l’article.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Après l’épisode antidémocratique que nous venons tous de traverser, nous nous plongeons dans l’examen de l’article 8. Le débat interne aux Républicains au sujet de l’adaptation des règles de départ anticipé pour les carrières longues conduira-t-il les droites à accepter une discussion plus large avec nous ?
Présenté comme la caution sociale de cette réforme, cet article prolonge un statu quo injuste pour les bénéficiaires du dispositif carrières longues. Vos diversions ne trompent personne : à terme, vous décalez d’un an l’âge de départ à la retraite pour ceux qui ont commencé à travailler à 18 ans.
Après avoir mené la guerre aux régimes pionniers, vous vous apprêtez à maintenir les seuls régimes spéciaux injustes : en imposant une durée de cotisation majorée d’un an, à 44 annuités, vous réservez un traitement spécial à ceux qui ont commencé à 14 ans, 16 ans et 18 ans.
Levons le doute : ce que vous présentez comme des droits nouveaux constituent en réalité de grands reculs sociaux.
De plus, ces mesures concernent très peu de personnes. Si, en 2004, 126 000 personnes partaient à la retraite avant 60 ans après une carrière longue, ce dispositif ne comptait plus que 238 bénéficiaires en 2021. Votre réforme n’y changera rien.
Vous ne reconduisez ces mesures que parce que celles-ci s’inscrivent dans une dynamique d’extinction du dispositif carrières longues. Selon une projection de la Cnav, le nombre de bénéficiaires d’une retraite anticipée pour ce motif sera divisé par deux dans vingt ans, en particulier en raison des carrières hachées des femmes et des jeunes.
La droite sénatoriale aura-t-elle le courage de protéger les carrières longues en supprimant les mesures d’âge pour les travailleurs ayant commencé à cotiser avant 21 ans ?
M. le président. La parole est à M. Michel Canévet, sur l’article.
M. Michel Canévet. Le groupe Union Centriste est satisfait que l’on puisse enfin aborder la cessation progressive ou anticipée de l’activité, l’usure professionnelle ou encore l’ensemble des mécanismes de solidarité, qui sont autant de sujets essentiels. Mes chers collègues, nous avons failli ne pas y parvenir,…
M. Thomas Dossus. Non !
M. Michel Canévet. … alors même qu’il s’agit des questions qui font véritablement débat dans ce texte.
Cette succession d’amendements issus du même groupe et ayant le même objet, à savoir la suppression de l’article, n’a aucun sens. Elle nous prive de notre capacité de débattre des vrais sujets de préoccupation de l’ensemble des Français.
Le temps passé à présenter de manière redondante ces amendements identiques sera autant de temps en moins pour que nous, membres du groupe Union Centriste, puissions exprimer notre vision de la société et des retraites. Nous subissons cela depuis le début de cette discussion.
Nous espérons donc que les oppositions se rendent compte que nous devons débattre du fond, plutôt que de nous en remettre à des artifices de procédure qui empêchent la discussion. Que nos collègues se ressaisissent et que nous nous exprimions enfin ! (Applaudissements sur les travées des groupes UC, RDPI et Les Républicains.)
Rappels au règlement
M. Claude Raynal. Ce rappel au règlement se fonde sur l’article 33 du règlement, à la suite de la prise de parole de M. Joyandet, qui nous mettait en cause. Si vous me permettez, j’y inclurai une réponse à M. Canévet.
M. Michel Canévet. Je vous en prie.
M. Claude Raynal. Monsieur Joyandet, si vous avez été contraint de retirer votre amendement, cela n’a rien à voir avec nous, c’est parce qu’il y a eu – je le dis sans ambages – un accord entre la majorité sénatoriale et le Gouvernement.
M. Roger Karoutchi. Cela ne vous regarde pas et ce n’est pas le sujet !
M. Claude Raynal. Selon ses termes, certains amendements sont acceptés préalablement, d’autres ne le sont pas. Le vôtre ne l’a pas été par vos amis, mon cher collègue.
Mme Sophie Primas. Ce n’est pas vrai !
M. Claude Raynal. Je vous prie de ne pas nous en faire porter la responsabilité ! (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Ensuite, comme M. Canévet après vous, vous avancez que nous entrons dans une séquence de présentation de je ne sais combien d’amendements identiques de suppression. Permettez-moi de vous rappeler les termes de l’article 40 de la Constitution. La différence entre vous et nous, c’est que vous avez négocié avec le Gouvernement – à juste titre, je ne le conteste pas.
Mme Sophie Primas. Vous pouvez aussi le faire.
M. Claude Raynal. Résultat : tout ce que vous devez faire passer est couvert par l’intention du Gouvernement, ce qui vous autorise à défendre des amendements qui, à défaut, seraient déclarés irrecevables au titre de l’article 40. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Michel Canévet. Qui donc manie l’article 40, monsieur Raynal ?
M. Claude Raynal. Comme nous n’avons pas cette possibilité, nous sommes contraints d’en passer par des amendements de suppression. Monsieur Canévet, vous connaissez cela par cœur, mais vous jouez un jeu dangereux. (Protestations sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)
M. Martin Lévrier. Oh !
M. Max Brisson. C’est l’hôpital qui se moque de la majorité !
M. Claude Raynal. Eh oui ! Monsieur Canévet, votre volonté d’avoir recours une nouvelle fois à l’article 38 est une fumisterie : nous sommes obligés d’en passer par ces amendements afin de pouvoir avancer nos propres propositions. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. Roger Karoutchi. Pas cinquante fois le même amendement, tout de même !
M. le président. La parole est à M. Alain Joyandet, pour un rappel au règlement.
M. Alain Joyandet. Je me réfère au même article du règlement que notre collègue, qui m’a mis en cause.
Monsieur Raynal, ce que vous dites est faux. J’ai retiré cet amendement à la lumière de l’expérience d’hier soir. Vous avez en effet déposé cinq cents sous-amendements sur l’amendement de notre collègue centriste, qui a donc été contraint de le retirer.
Nous n’avons aucun problème à débattre du fond de cet amendement sur les 43 ans et j’aurais été satisfait que nous en discutions ensemble. J’attends d’ailleurs des réponses très précises de M. le ministre à ce sujet.
M. Vincent Éblé. Vous êtes d’accord pour en parler à condition que nous n’exprimions pas de divergence !
M. Alain Joyandet. J’ai voté les 64 ans ; à mon sens, les 43 ans de cotisation en sont la compensation. Les réponses précises du ministre conditionneront à ce titre mon vote final sur l’ensemble du texte. C’est dire si cette question est importante.
Mon cher collègue, les jeux que vous imaginez n’ont pas de réalité. Vous traversez un moment compliqué et vous commencez à retirer vos sous-amendements, parce qu’il est de plus en plus difficile de justifier votre stratégie.
Vous espérez que nos concitoyens ne comprennent pas ce qui se passe.
M. Éric Kerrouche. Ils ont très bien compris !
M. Alain Joyandet. Vous les prenez pour des zozos (Exclamations sur les travées du groupe SER.) en essayant de leur faire croire que c’est nous qui faisons de l’obstruction,…
M. Éric Kerrouche. En effet, c’est vous qui faites de l’obstruction !
M. Max Brisson. Gardez vos nerfs !
M. Alain Joyandet. … mais ils commencent à s’en rendre compte. Cela devient insupportable et c’est pour cela que vous retirez vos sous-amendements.
Ne prenez pas les Français pour des zozos ! Respectez la grande institution qu’est le Sénat.
J’ai été élu benjamin de cette maison en 1995,… (Exclamations ironiques sur les travées des groupes SER et CRCE.)
M. Vincent Éblé. Il est donc temps d’arrêter !
M. Alain Joyandet. … et je n’ai jamais vu une opposition se comporter comme cela. C’est détestable ! (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – Protestations sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST.)
M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour un rappel au règlement.
Mme Céline Brulin. Mon rappel au règlement se fonde sur le même article.
Je tiens à féliciter notre collègue pour cette illustration parfaite de ce qu’est une carrière longue, notamment sur ces travées ! (Rires et applaudissements sur les travées des groupes CRCE et SER.) Il faut bien mettre un peu d’humour dans nos débats…
Je vous rassure, mes chers collègues, nous voterons chaque amélioration du texte, quelle que soit la travée d’où elle provient. Si d’aventure nous devions sous-amender des amendements, cela ne serait que pour parfaire encore les améliorations que vous proposeriez, ainsi que vous aurez l’occasion de le constater au cours de l’examen de cet article.
Le problème est bien le suivant : le retrait de cet amendement est le fruit d’un accord avec le Gouvernement…
M. Alain Joyandet. Pas du tout !
M. Michel Canévet. Arrêtez !
Mme Céline Brulin. … parce que celui-ci préfère négocier avec une poignée de membres des Républicains plutôt qu’avec une intersyndicale unie et solide.
Mme Sophie Primas. Une poignée ? Quel mépris !
Mme Céline Brulin. Vous ne ferez croire le contraire à personne ou alors annoncez à tout le monde que vous renoncez à améliorer la situation des Français au motif que vous ne pourriez pas le faire ici !
Plus d’une cinquantaine de membres de la droite et du centre ont refusé hier de voter l’article 7 ; ils étaient encore trois de plus dans ce cas ce matin. Je veux féliciter ces collègues (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST.) qui ont pris cette position malgré les nombreuses pressions dont ils ont sans doute fait l’objet. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Martin Lévrier. Ils n’ont pas besoin de vous !
Mme Sophie Primas. C’est terriblement méprisant.
M. Roger Karoutchi. Qu’est-ce que c’est que ça ?
M. Max Brisson. C’est honteux !
M. Philippe Mouiller. Ce n’est pas un rappel au règlement !
M. Michel Canévet. Arrêtez !
M. le président. Ma chère collègue, restez-en au règlement.
Mme Céline Brulin. Les fissures et les lézardes commencent à apparaître, elles vont s’amplifier ! (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST. – Protestations sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
Article 8 (suite)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. René-Paul Savary, rapporteur. Revenons au fond du problème pour apporter un peu de sérénité.
Je tiens à vous présenter la philosophie de la commission des affaires sociales s’agissant des dispositifs contenus dans ce texte.
Vous l’avez constaté à l’article 2, quand nous avons entendu davantage prendre en compte l’employabilité des seniors dans le texte initial : cette réforme s’appliquant à tout le monde, nous avons fait des propositions pour les seniors au chômage comme pour ceux qui étaient en emploi. Il s’agissait pour nous de répartir l’effort collectif sur le plus grand nombre de personnes possible, non pour pénaliser quiconque, mais pour éviter de concentrer les efforts sur certains profils.
En matière de pénibilité, vous remarquerez à l’article 9 que nous avons diversifié les dispositions : il nous fallait, selon les âges de départ anticipé, tenir compte de la pénibilité ou des risques, pour ceux qui y sont exposés, de l’inaptitude – un facteur indépendant du monde du travail – ou de l’invalidité.
Dès lors, il nous appartient de prendre des dispositions pour les retraites anticipées. Pour autant, cela signifie que nous accordons aux personnes concernées une retraite plus longue que celle des autres, alors que la durée moyenne de retraite est un peu supérieure à vingt ans, en rapport avec l’usure au travail.
Notre objectif a donc toujours été de prêter attention au fait que cette retraite plus longue devait correspondre à l’espérance de vie plus courte des personnes concernées.
À ce titre, le dispositif doit être non pas le plus juste – nous n’y parviendrons pas –, mais le moins injuste possible.
Pour ce qui concerne les mères de famille, nous appliquons la même stratégie : alors que nous demandons à tout le monde de travailler plus, il nous faut prendre en considération leurs difficultés pour parvenir à améliorer leurs pensions. C’est pourquoi nous avons privilégié un dispositif de surcote plutôt qu’un âge d’ouverture avancée des droits.
La logique adoptée par la commission vise ainsi à s’appliquer au plus grand nombre de personnes possible.
Il en va de même s’agissant des régimes spéciaux : notre objectif est que ceux qui souffrent d’une usure professionnelle et d’une espérance de vie plus courte, qu’ils relèvent ou non d’un régime spécial, bénéficient d’une retraite plus longue. Il s’agit donc pour nous avant tout de prendre en compte la pénibilité plutôt que les raisons historiques de telle ou telle situation.
C’est cela, un raisonnement du XXe siècle, par opposition à celui qui vient directement du XIXe siècle, quand on accordait une retraite anticipée comme un droit social, en compensation d’un salaire moindre. Nous ne réfléchissons plus ainsi et les Français doivent être convaincus que les différents dispositifs de cette réforme sont aussi peu inégalitaires que possible.
Il me semble important de rappeler tout cela au moment où nous abordons l’examen de l’article 8. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Olivier Dussopt, ministre. Je souhaite tout d’abord corriger certains propos.
Madame Poncet Monge, vous avez indiqué que l’invalidité et l’incapacité de travail étaient les premières causes de départ anticipé. Ce n’est pas exact.
Chaque année, sur les 42 % d’assurés qui prennent leur retraite avant l’âge légal « général », 22 % partent au titre d’un départ anticipé pour carrière longue et seulement 15 %, soit environ 100 000 personnes par an, le font pour des raisons liées à un état d’incapacité ou d’invalidité.
Nous aborderons ce sujet – le rapporteur l’a indiqué – dans le cadre de l’examen de l’article 9, car, comme j’ai eu l’occasion de le dire au début de nos travaux en séance publique ainsi qu’en commission, je ne me satisfais pas, ni humainement ni intellectuellement, qu’un assuré sur sept, peu ou prou, parte de manière anticipée pour des problèmes de santé.
L’enjeu est d’avancer en matière de prévention de la pénibilité. Il est en effet bien plus pertinent et satisfaisant de permettre, par la prévention, à un maximum d’assurés d’aller jusqu’à l’âge légal – quoi que l’on pense de cet âge – plutôt que de compenser des difficultés de santé par un départ anticipé de deux ans.
Je préfère que les assurés partent au bon âge et en bonne santé plutôt que de manière anticipée et en mauvaise santé. C’est tout l’enjeu de la prévention.
Vous avez indiqué, madame la sénatrice, que la portée de ce dispositif avait vocation à se restreindre. Si nous ne faisons rien et que nous nous en tenons au dispositif « carrières longues » – j’y reviendrai pour répondre à M. Joyandet –, celui-ci concernera en effet de moins en moins d’assurés. La raison en est simple : l’âge moyen d’entrée dans la vie active tendant à augmenter, le nombre de personnes ayant cotisé des trimestres suffisamment tôt pour bénéficier d’un dispositif « carrières longues » a mécaniquement vocation à baisser.
Le dispositif que nous vous proposerons d’adopter, qui prévoit une nouvelle borne d’âge, permet de contrecarrer une telle trajectoire.
La seconde inexactitude que je souhaite corriger porte sur la prise en compte du handicap, évoquée par Mmes Benbassa et Meunier.
Il n’y a pas de dégradation de la borne d’âge de départ anticipé des travailleurs handicapés, puisque nous maintenons purement et simplement celle-ci à 55 ans.
Vous avez par ailleurs indiqué, madame Meunier, que les critères de départ anticipé pourraient être plus restrictifs. Or c’est précisément l’inverse qui est prévu.
Actuellement, un assuré né en 1972 qui souhaite partir à 55 ans doit remplir une double condition : avoir cotisé 118 trimestres et en avoir validé 20 de plus, soit 138.
Alors que ces deux conditions sont aujourd’hui cumulatives, nous faisons de la durée de cotisation de 118 trimestres une condition exclusive de départ anticipé. Par conséquent, des assurés ayant cotisé 118 trimestres n’auront plus à se soucier de ces 20 trimestres supplémentaires, et le départ anticipé des travailleurs en situation de handicap s’en trouvera facilité.
Nous simplifions également – sans préjudice de ce que j’ai indiqué concernant la prévention – la procédure de départ anticipé pour incapacité, puisque le départ des travailleurs dont le taux d’incapacité est supérieur à 20 % sera automatique, alors qu’il est aujourd’hui conditionné à un avis médical. Nous considérons en effet que, dès lors qu’un avis médical a conduit à fixer le taux d’incapacité à plus de 20 %, un avis médical supplémentaire n’est pas nécessaire.
J’en viens à deux autres points – pardonnez-moi d’être un peu long, monsieur le président, mais cela me permettra d’aller plus vite lorsque nous aborderons les très nombreux amendements et sous-amendements déposés à cet article.
Le sénateur Joyandet m’a interpellé au sujet du dispositif « carrières longues », qui intéresse nombre de parlementaires, députés et sénateurs.
Le dispositif actuel, qui a été créé en 2003, autorise des assurés à partir de manière anticipée dès lors qu’ils remplissent trois conditions cumulatives et impératives.
La première condition est d’avoir cotisé pendant 5 trimestres avant la borne d’âge telle qu’elle est définie par la loi.
Les salariés qui ont cotisé 5 trimestres avant 16 ans – en réalité, en fonction de leur date de naissance, certains ne doivent avoir cotisé que 4 trimestres, mais, dans la suite de mon propos, je dirai 5 pour simplifier – peuvent prendre leur retraite de manière anticipée à partir de 58 ans.
Ceux qui ont cotisé 5 trimestres avant 20 ans peuvent bénéficier d’un départ anticipé de deux ans par rapport à l’âge légal, soit 60 ans aujourd’hui et 62 ans demain.
La deuxième condition est d’avoir atteint l’âge d’ouverture des droits spécifiques fixé en relation avec chacune des bornes d’âge.
La troisième condition est d’avoir cotisé le nombre de trimestres requis, et pas seulement de les avoir validés.
En l’état actuel du droit, la durée de cotisation des personnes ayant commencé à travailler avant 16 ans est égale à celle qui est exigée de tous les assurés plus 8 trimestres, soit 2 ans. Elle est donc de 44 ans à l’heure actuelle ; elle passerait à 45 ans avec la réforme, mais nous allons modifier cette mesure et la réduire.
Celles et ceux qui ont commencé à travailler avant 20 ans doivent avoir cotisé 5 trimestres avant 20 ans, ils doivent avoir atteint l’âge de 60 ans et avoir cotisé pendant 42 années complètes. Après la réforme, ils devront avoir 62 ans et avoir cotisé pendant 43 années.
Le nombre d’années cotisées est bien souvent cause de déception pour les assurés. Prenons le cas d’un travailleur qui fait valoir son droit à un départ anticipé, parce qu’il a atteint 60 ans et cotisé 5 trimestres avant 20 ans : il doit démontrer qu’il a cotisé 168 trimestres. Toutefois, s’il a fait son service militaire, les 4 trimestres qui sont validés à ce titre ne sont pas cotisés ; par conséquent, ils ne comptent pas. Il en va de même pour une femme ayant commencé à travailler avant 20 ans qui, une fois devenue mère, prend, comme c’est son droit, un congé parental : durant celui-ci, les trimestres continuent d’être validés, mais ils ne sont pas cotisés. Nous changerons également cela.
En l’état actuel du droit, pour ceux qui ont commencé à travailler avant 20 ans, le dispositif de départ anticipé – je reviendrai sur ce que nous proposons de changer, ainsi que sur les coûts, comme cela m’a été demandé –, s’il se traduit par une bonification théorique de 2 ans, ne permet de bénéficier que d’une bonification effective de 9 mois au regard des trois conditions cumulatives que j’ai citées.
Ce dispositif est donc bien souvent une machine à déception – j’en viens à votre question dans un instant, monsieur Joyandet, mais ces éléments relatifs à la construction du dispositif participent de la réponse que je vais vous donner concernant les coûts.
Par ce projet de loi, nous proposons d’apporter deux modifications à ce dispositif.
La première est la création d’une nouvelle borne d’âge à 18 ans, qui permettra à ceux qui ont cotisé 5 trimestres avant 18 ans de bénéficier d’un départ anticipé, non pas de 2 ans, mais de 4 ans.
La seconde est la création, que le Gouvernement a proposée à l’Assemblée nationale, mais qu’il soutiendra par voie d’amendement dans cet hémicycle, d’une autre borne d’âge, qui permettra à ceux qui ont cotisé 5 trimestres avant 21 ans de bénéficier d’une bonification de 1 an.
Il me paraît en effet – mais nous en débattrons – que l’on peut considérer qu’une personne qui a cotisé 5 trimestres avant 21 ans a commencé à travailler tôt.
Monsieur Joyandet, vous m’avez posé des questions relatives au coût des dispositions que vous proposiez d’introduire par l’amendement que vous avez été amené à retirer pour les raisons que vous avez évoquées.
Comme je l’ai indiqué à l’Assemblée nationale, la suppression de la troisième condition de départ anticipé, soit le fait d’avoir cotisé 43 années complètes, étant entendu que les deux premières conditions cumulatives – l’atteinte de l’âge spécifique d’ouverture des droits et les 5 trimestres cotisés avant la borne d’âge – seraient maintenues, coûterait entre 300 et 350 millions d’euros.
Par ailleurs, l’ouverture des droits à la retraite anticipée à tout assuré ayant travaillé ne serait-ce qu’un jour avant ses 21 ans et qui satisferait à la seule condition d’avoir cotisé pendant 43 années coûterait entre 7 et 10 milliards d’euros. Vous conviendrez que c’est inabordable.
S’il s’agit enfin de garantir à tout assuré qui a commencé à travailler avant 21 ans et qui remplit la condition relative au nombre de trimestres cotisés avant une borne d’âge définie, et ce, indépendamment de tout âge spécifique d’ouverture des droits, le coût serait de l’ordre de 1,7 milliard d’euros.
Comme vous pouvez le constater, monsieur le sénateur, ces montants élevés contreviennent à l’objectif d’équilibre du système que nous pouvons partager.
Je terminerai par quelques mots sur les carrières longues et sur l’amendement n° 2127 rectifié de M. Savary.
En ce qui concerne les carrières longues, vous avez suggéré, monsieur le sénateur Alain Joyandet, que les 43 années de cotisation constituent un plafond au-delà duquel aucun assuré ne serait obligé de continuer à travailler.
Je ne peux que m’opposer à une telle proposition, qui contrevient aux principes mêmes qui fondent notre système de retraite depuis sa création et en vertu desquels les deux conditions cumulatives pour prendre sa retraite sont l’atteinte de l’âge légal d’ouverture des droits – dont je répète, comme je l’ai indiqué lors de l’examen de l’article 7, qu’il constitue une protection contre les machines à décote que sont les systèmes fondés uniquement sur la durée de cotisation – et la durée de cotisation.
Or, dans le système tel qu’il est conçu, la durée de cotisation est considérée, non pas comme un plafond, mais comme un plancher.
M. Bruno Retailleau. Et pour les apprentis ?
M. Olivier Dussopt, ministre. Je citerai deux exemples pour illustrer ce point.
Chaque année, sur les 800 000 assurés qui partent à la retraite, 180 000 ont cotisé plus de trimestres que nécessaire. C’est notamment le cas des enseignants du primaire, que nous avons évoqué à l’occasion de l’adoption d’un certain nombre d’amendements à l’article 7 visant à remédier à cette situation.
Je souligne également les progrès qui ont été réalisés depuis une vingtaine d’années. Avant 2003 et la création du dispositif « carrières longues », l’âge de départ était fixé à 60 ans et la durée de cotisation requise était de 37,5 ans.
Un assuré qui commençait sa carrière à 22,5 ans parce qu’il avait fait des études supérieures jusqu’à la licence ou la maîtrise travaillait 37,5 ans et prenait sa retraite à taux plein à 60 ans, alors que son camarade de classe élémentaire qui commençait à travailler à 15 ans dans une usine ne pouvait prendre sa retraite à taux plein qu’au même âge, soit après 45 années de travail. Il pouvait donc y avoir un écart de 8 ans entre deux assurés – et parfois plus pour ceux qui commençaient à travailler très tôt.
Grâce au dispositif « carrières longues », cet écart s’est progressivement réduit, si bien qu’aujourd’hui, en tenant compte de la durée plancher de cotisation requise et des âges d’ouverture des droits, les écarts ne sont plus que de un à deux ans. Les dispositions que nous vous proposons, notamment pour les assurés entrés dans la vie active avant 18 ans ou avant 21 ans, permettront de réduire encore cet écart à un an, voire moins en fonction de la date de naissance et du moment auquel l’assuré a commencé à travailler.
Vous avez indiqué, madame Apourceau-Poly, qu’en fonction de l’âge auquel ils sont entrés dans la vie active certains assurés pourraient être amenés à travailler 43 à 44 ans.
La réalité est plus complexe. Ce que vous dites n’est exact que pour les assurés qui commencent à travailler le jour de leur anniversaire. Un assuré qui a commencé à travailler à 16 ans et 3 mois ou à 16,5 ans devra travailler, non pas 44 ans, mais 43 ans et 9 mois ou 43,5 ans.
Il est donc impossible de fixer un plafond. On ne peut pas construire une société dans laquelle on garantirait à tous les individus qu’ils ne travailleront pas un jour de plus que les autres. Ce n’est pas ainsi que fonctionne notre système de protection sociale.
J’en viens enfin à l’amendement du rapporteur de la commission des affaires sociales. J’ai eu l’occasion d’indiquer que je discernais, dans le dispositif proposé, une initiative de Bruno Retailleau. (Murmures sur les travées du groupe CRCE. – M. Jean-Marc Todeschini s’exclame.)
Par cet amendement, qui me paraît aller dans le bon sens, nous abordons la question des mères et, plus largement, celle des droits familiaux.
Dans un contexte d’augmentation de l’âge d’ouverture des droits, augmentation qui n’est pas due à cette réforme, mais qui est le fruit d’un mouvement beaucoup plus long, les trimestres acquis au titre de la maternité ou de l’éducation des enfants sont moins utiles.
Nous sommes dans une société où le taux d’emploi des femmes progresse, ce qui est une très bonne nouvelle. À leur création dans les années 1960 et 1970, les droits familiaux, en particulier les trimestres de maternité, ont été conçus pour compenser les trimestres pendant lesquels les femmes ne pouvaient pas cotiser – le congé maternité n’était pas assez long pour être converti en trimestre cotisé et, souvent, les femmes interrompaient leur activité.
Depuis lors, le plus souvent, et bien que des difficultés demeurent, les jeunes mères peuvent valider le trimestre correspondant à leur congé maternité et reprendre leur activité en validant le trimestre en cours. Alors qu’ils étaient pensés comme des trimestres de compensation, les trimestres liés à la maternité deviennent des trimestres de majoration. Nous n’entendons nullement remettre en cause ce droit.
Pour autant, pour une mère dont la carrière est complète ou quasiment complète à un an près et qui arrive à l’âge d’ouverture des droits en ayant travaillé 42 ans, ces trimestres sont, sinon perdus, en tout cas moins utiles.
De fait, les situations varient beaucoup. Ces trimestres de majoration, qui sont très utiles pour les femmes qui ont des carrières hachées – on sait qu’elles y sont plus exposées que les hommes –, auxquelles ils permettent d’atteindre sans décote les 42 ou 43 années de cotisation requises, sont moins utiles pour d’autres femmes.
Le dispositif proposé par l’amendement n° 2127 rectifié a le mérite de conserver le bénéfice de ces trimestres dans toutes les situations : d’une part, il maintient les majorations de durée d’affiliation pour les femmes – ou plutôt pour les parents, puisque les trimestres d’éducation peuvent être répartis au sein du couple – pour les carrières incomplètes, afin d’éviter ou de limiter la décote, d’autre part, il permet à celles – ou ceux, mais majoritairement celles – qui à 63 ans, soit un an avant l’âge d’ouverture des droits, ont atteint la durée d’affiliation requise, de bénéficier d’une compensation par un mécanisme de surcote.
Une telle majoration de la pension paraît d’autant plus juste que la maternité, même lorsqu’elle n’est pas inconciliable avec leur carrière professionnelle puisqu’elle ne conduit pas les femmes à l’interrompre, constitue un frein à la promotion.
Pour le dire autrement, si la conciliation entre maternité et carrière professionnelle est plus facile, en tout cas moins difficile aujourd’hui, puisqu’elle est, sinon un empêchement de travailler, du moins un frein à la promotion, majorer la pension est peut-être la plus juste des compensations à apporter au moment de la retraite.
M. Bruno Retailleau. C’est vrai aussi de l’adoption !
M. Olivier Dussopt, ministre. Tout à fait, il s’agit, non pas seulement de maternité ou de paternité, mais bien de parentalité.
Telles sont les raisons pour lesquelles le Gouvernement émettra un avis favorable sur l’amendement n° 2127 rectifié.
Motion d’ordre et demande de priorité
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, en application de l’article 46 bis, alinéa 2, du règlement, la commission propose au Sénat de disjoindre l’amendement n° 2127 rectifié, présenté par les rapporteurs, de la discussion commune.
Par ailleurs, en application de l’article 44, alinéa 6, du règlement, la commission demande la priorité d’examen et de vote sur cet amendement.
M. le président. Je suis saisi par la commission d’une demande d’examen séparé de l’amendement n° 2127 rectifié, ainsi que d’une demande de priorité, afin que cet amendement soit examiné et mis aux voix avant l’ensemble des amendements en discussion commune.
Je rappelle que, aux termes de l’article 44, alinéa 6, de notre règlement, lorsqu’elle est demandée par la commission saisie au fond, la priorité est de droit, sauf opposition du Gouvernement.
Quel est l’avis du Gouvernement sur cette demande de priorité ?
M. Olivier Dussopt, ministre. Sur cette demande de priorité, le Gouvernement s’en remet à la commission.
M. Patrick Kanner. Ce n’est pas de l’obstruction, ça ?
Mme Patricia Schillinger. C’est de la simplification !
M. le président. Je vais consulter le Sénat sur la demande d’examen séparé de l’amendement n° 2127 rectifié.
Y a-t-il des observations ?…
La parole est à Mme Laurence Rossignol.
Mme Laurence Rossignol. Bien que nous soyons très souples, ces changements incessants dans l’ordre d’examen des amendements nous demandent de nous adapter.
Je me permets donc de vous interroger, mes chers collègues : sur cet amendement important, sur lequel on peut raisonnablement considérer qu’il y a à dire, prévoyez-vous de demander dans la foulée l’application de l’article 38 de notre règlement ou nous laisserez-vous le temps du débat ?
M. Bruno Retailleau. Cela dépend…
Mme Sophie Primas. Il faut que ce soit raisonnable !
Mme Laurence Rossignol. Ceux qui me connaissent et qui savent les thématiques auxquelles je suis particulièrement attachée comprendront que ma question est sincère.
M. Roger Karoutchi. Retirez donc vos amendements !
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires sociales.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Pardonnez-moi l’expression, ma chère collègue, mais il ne faut pas nous prendre pour des lapins de six semaines ! (Rires sur les travées du groupe Les Républicains. – Exclamations sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
Si vous poussez des cris d’orfraie, c’est parce que l’adoption de l’amendement n° 2127 rectifié aurait pour conséquence de rendre sans objet les amendements de suppression.
Vous avez déposé trois cents sous-amendements, si bien que nous débattrons du seul amendement n° 2127 rectifié jusqu’à cette nuit.
M. Lucien Stanzione. Nous sommes là pour ça ! (Non ! sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Je répète : trois cents sous-amendements !
M. Jean-Marc Todeschini. Et une commission qui ne les examine pas !
Mme Laurence Rossignol. Ce n’était pas ma question !
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Ce n’est pas votre question, mais c’est ma réponse, ma chère collègue. (Sourires.)
Dans ces conditions, vous ne pouvez pas dire que l’on vous prive de débat sur l’amendement de René-Paul Savary visant à instaurer une surcote pour les femmes. Il ne faut pas exagérer. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner.
M. Patrick Kanner. La décision prise par la présidente de la commission des affaires sociales modifie considérablement l’ordonnancement de nos travaux. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mes chers collègues, ne nous reprochez pas de vouloir nous exprimer au moment où vous tentez de nous en empêcher !
Dans ces conditions, monsieur le président, je sollicite une suspension de séance de dix minutes afin que nous puissions nous réorganiser. (Non ! sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires sociales.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Au risque de me répéter, vous avez déposé trois cents sous-amendements, mes chers collègues. Vous aurez donc tout le temps de vous exprimer et vous n’avez nullement besoin d’une suspension de séance pour vous adapter à cet état de fait.
M. Jean-Marc Todeschini. Nous sommes là pour travailler.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. À titre personnel, je n’y suis pas favorable, mais la décision ne m’appartient pas.
Rappel au règlement
M. Guillaume Gontard. Mon rappel au règlement se fonde sur l’article 44 bis de notre règlement.
Je souhaite remettre les choses à l’endroit. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.) Les sujets que nous allons aborder en examinant l’article 8, tout comme ceux que nous avons abordés avec l’article 7, sont particulièrement importants.
On nous accuse de faire de l’obstruction. (Marques d’ironie sur les travées du groupe Les Républicains.) Voilà le petit jeu auquel vous vous adonnez depuis un moment, mes chers collègues.
Mme Sophie Primas. Vous avez déposé cent cinquante amendements identiques !
M. Guillaume Gontard. Nous avons déposé environ trois mille six cents amendements sur ce texte, vous, un peu plus de mille. Où est l’obstruction ? Nous n’avons fait que notre travail de parlementaires.
Sur un sujet aussi important que celui dont nous allons débattre, je ne suis pas choqué que trois cents sous-amendements aient été déposés. (Mme Cathy Apourceau-Poly acquiesce.) Je suis même étonné que chaque sénatrice ou sénateur n’ait pas déposé son propre amendement, portant ce nombre à trois cent quarante-huit.
Nous représentons en effet nos territoires. (M. Roger Karoutchi s’exclame.)
M. Max Brisson. Et nous, nous ne représentons rien ?
M. Guillaume Gontard. Dans nos territoires justement, nous entendons beaucoup parler de ces dispositions qui ont des effets sur la vie de nos concitoyens, à commencer par l’article 7, qui recule l’âge légal de départ à la retraite de 62 à 64 ans. Non seulement je souhaite m’exprimer, mais on me demande de le faire !
Tel est du reste le rôle du Parlement et c’est cette réalité que vous niez dangereusement. En contraignant nos débats, vous niez la démocratie ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Sophie Primas et M. Max Brisson. C’est vous !
M. Guillaume Gontard. N’inversez pas les choses, mes chers collègues. Lorsque vous recourez aux articles 38 ou 42 de notre règlement ou lorsque vous déposez un amendement tendant à réécrire un article tout en le reprenant, nous n’avons d’autre possibilité de nous exprimer qu’en déposant des sous-amendements.
Nous avons eu des débats intéressants et sereins jusqu’à l’article 7. (Marques d’ironie sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Max Brisson. Balivernes !
M. Guillaume Gontard. Pourquoi ne souhaitez-vous pas poursuivre dans cette voie ?
Nous sommes parvenus à l’article 8, soit la moitié du texte. Il nous reste donc encore du temps. Débattons de l’ensemble des amendements ! (Applaudissements sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE.)
Motion d’ordre et demande de priorité (suite)
M. le président. Sur la demande d’examen séparé de l’amendement n° 2127 rectifié, la parole à Mme Michelle Gréaume.
M. Max Brisson. D’autres la retardent !
Mme Michelle Gréaume. … au motif que nous ferions de l’obstruction sur ce projet de réforme. Je souhaite vous répondre qu’en dépit de sa taille modeste le groupe communiste travaille dur et en toute sérénité.
Nous avons déposé de nombreux amendements, mais ce serait une erreur de croire que c’est pour faire de l’obstruction.
Mme Dominique Estrosi Sassone. Pas du tout !
M. Max Brisson. Si, c’est ce que vous faites !
Mme Michelle Gréaume. Nous avons déjà prouvé notre efficacité. Je vous rappelle, par exemple, que la commission d’enquête sur l’influence croissante des cabinets de conseil privés sur les politiques publiques, dont les conclusions sont connues et reconnues, a été constituée sur notre initiative.
M. Yves Bouloux. Quel est le rapport ?
Mme Michelle Gréaume. Permettez-nous de donner nos points de vue sur les effets collatéraux que cette réforme emportera. Nous nous battons contre ce que nous trouvons injuste, car c’est pour cela que nous sommes élus. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST.)
M. le président. La parole est à M. Éric Kerrouche.
M. Éric Kerrouche. Mes chers collègues, nous sommes frontalement, structurellement, en opposition sur ce texte. Il y a une division forte entre la droite et la majorité gouvernementale, qui n’appartiennent plus maintenant qu’à un même groupe (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Laurent Lafon proteste également.), et les travées de la gauche.
Je m’étonne toutefois que vous vous étonniez, mes chers collègues.
Vous recourez à l’ensemble des procédures de parlementarisme rationalisé pour réduire notre temps de parole,…
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Manifestement, cela ne marche pas !
M. Éric Kerrouche. … et vous vous étonnez que nous réagissions par tous les moyens disponibles.
Nous mettrons en œuvre tous les moyens dont nous disposons,…
M. Max Brisson. Et vice versa !
M. Éric Kerrouche. … pour répondre à la brutalité que vous avez choisi d’employer.
Mme Sophie Primas. Vous vous discréditez aux yeux des Français !
M. Éric Kerrouche. Hier, Hervé Marseille a dit que les mouches avaient changé d’âne. Je rappellerai pour ma part cette citation latine : Asinum asinus fricat – l’âne fréquente l’âne. À médiocrité, médiocrité et demie ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
Mme Sophie Primas. C’est méprisant !
M. le président. Je consulte le Sénat sur la demande d’examen séparé de l’amendement n° 2127 rectifié. (Il est procédé à une épreuve à main levée.)
Il en est ainsi décidé.
La demande priorité de la commission ayant été acceptée par le Gouvernement, elle est de droit.
La priorité est donc ordonnée.
Mes chers collègues, afin de vous permettre de revoir l’ordre de vos interventions, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures vingt-cinq, est reprise à douze heures trente.)
M. le président. La séance est reprise.
Mes chers collègues, l’examen séparé de l’amendement n° 2127 rectifié qui vient d’être adopté entraîne la présentation et la mise en discussion de cet amendement et de l’ensemble des sous-amendements qui s’y rattachent. En cas d’adoption de cet amendement, tous les amendements de suppression deviendraient sans objet.
En revanche, l’intégralité des amendements subsistants, ainsi que leurs sous-amendements, seront examinés.
Mme Laurence Rossignol. Monsieur le président, ma question est naïve et sincère : qu’entendez-vous par « l’intégralité des amendements subsistants » ? Combien d’amendements resteront en discussion ?
M. le président. Il s’agit des amendements figurant dans le dérouleur, à l’exception des amendements nos 4329 rectifié et 2863 rectifié, qui deviendraient également sans objet.
Rappels au règlement
Mme Raymonde Poncet Monge. Mon rappel au règlement pourrait se fonder sur tellement d’articles, notamment la disposition relative à la sincérité des débats…
Monsieur le président, je vous ai demandé la parole avant la suspension de séance. Je vous rappelle que, conformément à l’article 36, alinéa 3, du règlement, « la parole est accordée sur-le-champ à tout sénateur qui la demande pour un rappel au règlement ». Vous avez suspendu la séance, alors que vous aviez très bien vu que je demandais la parole, et cela depuis un moment, pour un rappel au règlement.
M. le président. Il fallait voter sur la demande d’examen séparé. Vous avez maintenant la parole, ma chère collègue.
Mme Raymonde Poncet Monge. On ne suspend pas la séance quand un sénateur veut faire un rappel au règlement, on lui donne la parole « sur-le-champ », ainsi que c’est prévu ! (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) Arrêtez !
Mme Sophie Primas. C’est le président qui préside !
Mme Raymonde Poncet Monge. Vous avez les moyens de nous faire taire.
M. Max Brisson. Ne nous montrez pas du doigt !
Mme Raymonde Poncet Monge. Vous voulez nous faire taire sur tous les autres articles (Protestations sur les mêmes travées.), parce que vous ne voulez pas que nous parlions sur les mesures sociales.
En revanche, nous n’avons pas eu les moyens de vous faire parler sur l’article 7.
Monsieur le président, quand le ministre a parlé pendant dix-sept minutes et que le rapporteur a parlé pendant plusieurs minutes, vous privez tous les élus de la gauche, notamment les écologistes, de la possibilité de répondre, et ce au titre de l’article 38 du règlement. Pendant vingt minutes, on entend mensonges et approximations et, ensuite, nous ne pouvons plus parler : article 38 !
Arrêtez donc de nous faire taire sur les mesures sociales ! Les mesures sociales, ce n’est pas vous. (Applaudissements sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE. – Vives protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. Pour la clarté de la discussion, je rappelle que l’article 38 n’a pas été appliqué sur cet article pour le moment.
La parole est à M. Fabien Gay, pour un rappel au règlement.
M. Fabien Gay. Sur l’organisation de nos débats, je vous remercie, monsieur le président, d’avoir précisé les conséquences qu’aura le vote de l’examen séparé de l’amendement du rapporteur sur la demande de la droite sénatoriale. Il faut expliquer clairement ce qui se passera, à savoir que près d’une soixantaine d’amendements de suppression deviendront sans objet.
Nous voulons nous exprimer sur l’article 8, mais, dans la mesure où nous sommes contraints par l’article 42, alinéa 10, du règlement, qui prévoit une seule prise de parole par groupe, tout le monde ne pourra pas le faire. Telle sera la conséquence de ce vote.
Nous nous apprêtons donc à examiner l’amendement de M. Savary, ainsi que les sous-amendements rattachés. S’il est adopté, les amendements de suppression de l’article ne seront pas examinés. Or il faut tout de même que nous ayons le débat et que chacun puisse s’exprimer.
Mme Sophie Primas. Soyez raisonnables !
M. Fabien Gay. Vous venez de dire que l’article 38 pourrait s’appliquer. Si cela doit réellement être le cas, il faut nous le dire.
Voulez-vous jusqu’au bout restreindre le débat sur l’article 8 ? Pour notre part, nous ne le souhaitons pas : nous voulons pouvoir avoir le débat au moins sur le seul amendement qui restera en discussion.
M. le président. Chacun a entendu que, pour l’instant, personne n’a demandé l’application de l’article 38.
Mme Cathy Apourceau-Poly. C’est la même chose : on n’est pas des lapins de six semaines !
M. le président. La parole est à M. Roger Karoutchi pour un rappel au règlement.
M. Roger Karoutchi. Lors de la réforme de notre règlement en 2015, l’article 38 comme l’article 42 ont bien évidemment été soumis au Conseil constitutionnel qui les a validés.
M. Bruno Retailleau. Exactement.
M. Roger Karoutchi. Vous vous en souvenez, monsieur le président. Ils ont ensuite été soumis aux présidents de groupe de notre assemblée qui les ont validés, puis soumis au vote du Sénat qui, à l’unanimité, les a validés.
Par conséquent, remettre aujourd’hui en cause les articles du règlement intérieur est absurde : ils ont été adoptés à l’unanimité de notre assemblée. (Protestations sur des travées des groupes GEST et SER.) C’est la vie, que cela vous plaise ou non, mes chers collègues.
À M. Kanner, Mme Rossignol ou M. Fabien Gay qui disent que c’est insupportable, je rappelle que, dans le cadre de la révision constitutionnelle de 2008 sur la modernisation des institutions, j’ai tout fait pour que les groupes minoritaires et les groupes d’opposition aient plus de droits, parce que je suis un parlementariste convaincu.
Pour autant, monsieur Kanner, vous voudrez bien admettre que, quand des centaines de sous-amendements et cinquante ou soixante amendements de suppression d’un article sont déposés, nous ne sommes pas dans la logique d’un débat parlementaire normale – et vous le savez.
Par conséquent, si l’on veut avoir un débat normal jusqu’à dimanche prochain, il faut que la gauche manifeste clairement qu’elle souhaite débattre, quand bien même un certain nombre d’amendements ne peuvent plus être examinés en application de tel ou tel article du règlement, car il restera toujours des amendements sur lesquels chacun pourra s’exprimer librement. Un vrai débat peut donc avoir lieu.
Encore faut-il que nos collègues de la gauche décident d’arrêter de défendre des centaines de sous-amendements et de ne pas présenter cinquante ou soixante amendements de suppression et choisissent d’aller au fond du débat. Si tel est le cas, allons-y tous ensemble ! Sinon, cela voudra dire que, en réalité, on ne souhaite pas le débat. (Applaudissements prolongés sur les travées des groupes Les Républicains, UC, RDPI et INDEP, ainsi que sur des travées du groupe RDSE.)
M. le président. Pour être tout à fait précis, en réponse à la question de M. Gay, trente et un sous-amendements seront mis en discussion à la suite de la présentation de l’amendement n° 2127 rectifié et il restera ensuite cinquante-quatre autres amendements sur l’article 8.
Il me semble donc que le parcours législatif qui s’annonce est assez complet.
M. le président. L’amendement n° 2127 rectifié, présenté par M. Savary et Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 14
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
…° Après l’article L. 351-1-2 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 351-1-2-… ainsi rédigé :
« Art. L. 351-1-2-…. - Pour les assurés qui bénéficient d’au moins un trimestre de majoration de durée d’assurance au titre des articles L. 351-4, L. 351-4-1 ou L. 351-5, la durée d’assurance ayant donné lieu à cotisations à la charge de l’assuré accomplie l’année précédant l’âge mentionné à l’article L. 161-17-2 lorsque celui-ci est égal ou supérieur à soixante-trois ans et au-delà de la limite mentionnée au deuxième alinéa de l’article L. 351-1 ouvre droit à une majoration de pension dans les mêmes conditions que celles prévues au premier alinéa de l’article L. 351-1-2.
« Un décret en Conseil d’État détermine les conditions dans lesquelles le présent article s’applique aux assurés affiliés à plusieurs régimes légaux ou rendus légalement obligatoires d’assurance vieillesse, de façon à permettre la prise en compte, pour le bénéfice de la majoration de pension mentionnée au premier alinéa, des trimestres de majoration de durée d’assurance ou de bonification accordés à l’assuré au même titre que ceux mentionnés au même alinéa par les autres régimes. » ;
II. – Après l’alinéa 22
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
…) Le I est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Pour les assurés qui bénéficient d’au moins un trimestre de majoration de durée d’assurance au titre des articles L. 351-4, L. 351-4-1 ou L. 351-5, la durée d’assurance ayant donné lieu à cotisations à la charge de l’assuré accomplie l’année précédant l’âge mentionné à l’article L. 161-17-2 lorsque celui-ci est égal ou supérieur à soixante-trois ans et au-delà de la limite mentionnée au deuxième alinéa de l’article L. 351-1 ouvre droit à une majoration de pension dans les mêmes conditions que celles prévues à la première phrase du quatrième alinéa du présent article.
« Un décret en Conseil d’État détermine les conditions dans lesquelles le présent article s’applique aux assurés affiliés à plusieurs régimes légaux ou rendus légalement obligatoires d’assurance vieillesse, de façon à permettre la prise en compte, pour le bénéfice de la majoration de pension mentionnée au cinquième alinéa, des trimestres de majoration de durée d’assurance ou de bonification accordés à l’assuré au même titre que ceux mentionnés au même alinéa par les autres régimes. » ;
III. – Après l’alinéa 32
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
…) Le I est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Pour les assurés qui bénéficient d’au moins un trimestre de majoration de durée d’assurance au titre des articles L. 351-4, L. 351-4-1 ou L. 351-5, la durée d’assurance ayant donné lieu à cotisations à la charge de l’assuré accomplie l’année précédant l’âge mentionné à l’article L. 161-17-2 lorsque celui-ci est égal ou supérieur à soixante-trois ans et au-delà de la limite mentionnée au deuxième alinéa de l’article L. 351-1 ouvre droit à une majoration de pension dans les mêmes conditions que celles prévues à la première phrase du quatrième alinéa du présent article.
« Un décret en Conseil d’État détermine les conditions dans lesquelles le présent article s’applique aux assurés affiliés à plusieurs régimes légaux ou rendus légalement obligatoires d’assurance vieillesse, de façon à permettre la prise en compte, pour le bénéfice de la majoration de pension mentionnée au cinquième alinéa, des trimestres de majoration de durée d’assurance ou de bonification accordés à l’assuré au même titre que ceux mentionnés au même alinéa par les autres régimes. » ;
IV. – Après l’alinéa 46
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…° L’article L. 14 est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« IV. - Pour les assurés qui bénéficient d’au moins un trimestre de majoration de durée d’assurance ou de bonification au titre des b et b bis de l’article L. 12 ou des articles L. 12 bis ou L. 12 ter, la durée d’assurance ayant donné lieu à cotisations à la charge de l’assuré accomplie l’année précédant l’âge mentionné à l’article L. 161-17-2 du code de la sécurité sociale lorsque celui-ci est égal ou supérieur à soixante-trois ans et au-delà de la limite mentionnée au premier alinéa du I de l’article L. 13 du présent code ouvre droit à une majoration de pension dans les mêmes conditions que celles prévues
« Un décret en Conseil d’État détermine les conditions dans lesquelles le présent article s’applique aux assurés affiliés à plusieurs régimes légaux ou rendus légalement obligatoires d’assurance vieillesse, de façon à permettre la prise en compte, pour le bénéfice de la majoration de pension mentionnée au premier alinéa du présent IV, des trimestres de majoration de durée d’assurance ou de bonification accordés à l’assuré au même titre que ceux mentionnés au même alinéa par les autres régimes. » ;
V. – Après l’alinéa 73
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
…° Après l’article L. 732-25-1, il est inséré un article L. 732-25-1-… ainsi rédigé :
« Art. L. 732-25-1-…. - Pour les assurés qui bénéficient d’au moins un trimestre de majoration de durée d’assurance au titre du premier alinéa de l’article L. 732-38, la durée d’assurance ayant donné lieu à cotisations à la charge de l’assuré accomplie l’année précédant l’âge mentionné à l’article L. 161-17-2 du code de la sécurité sociale lorsque celui-ci est égal ou supérieur à soixante-trois ans et au-delà de la durée minimale mentionnée à l’article L. 732-25 du présent code ouvre droit à une majoration de pension dans les mêmes conditions que celles prévues au premier alinéa de l’article L. 732-25-1.
« Un décret en Conseil d’État détermine les conditions dans lesquelles le présent article s’applique aux assurés affiliés à plusieurs régimes légaux ou rendus légalement obligatoires d’assurance vieillesse, de façon à permettre la prise en compte, pour le bénéfice de la majoration de pension mentionnée au premier alinéa du présent article, des trimestres de majoration de durée d’assurance ou de bonification accordés à l’assuré au même titre que ceux mentionnés au même alinéa par les autres régimes. » ;
La parole est à M. le rapporteur.
M. René-Paul Savary, rapporteur. Voilà un amendement particulièrement important, puisqu’il porte sur un sujet auquel nous sommes attachés, celui de la carrière des mères de famille, dont nous voulons faire en sorte que les particularités soient reconnues.
Avant de présenter l’amendement, je voudrais remercier Bruno Retailleau. (Exclamations ironiques sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE.)
M. Fabien Gay. Ah oui ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Cela fait un certain nombre d’années qu’il se montre très sensible aux problèmes que rencontrent les mères de famille, à leurs carrières hachées et aux difficultés que l’on peut rencontrer quand on élève ses enfants et que l’on continue à travailler. Il m’a confié une mission de réflexion sur ce sujet dont nous avons largement débattu à la commission des affaires sociales et qui est tout à fait essentiel. C’est là un marqueur fort de notre attachement à prendre en compte la situation des mères de famille.
Dans la proposition que je vais vous faire, mes chers collègues, nous avons toujours veillé à conserver certains principes sur lesquels je m’attarderai quelques instants.
Tout d’abord, nous constatons tous que les pensions de retraite des mères de famille sont moins élevées que celles des hommes, compte tenu des difficultés de carrière qu’elles peuvent rencontrer.
Ensuite, dans le dispositif actuel, la majoration est différenciée pour la maternité, l’éducation des enfants ou l’adoption, et elle peut varier : quand on est fonctionnaire on n’a pas forcément le même nombre de trimestres – quatre trimestres de majoration avant 2004 et deux trimestres après 2004. Nous comptions donc prendre en compte cette différence.
Pour ce qui est de la durée, la même logique s’applique. Prévoir un âge anticipé de départ à la retraite – nous avons travaillé sur toutes les solutions possibles – revient à accorder une durée de retraite plus longue. Or l’argument selon la durée de la retraite devrait être plus longue pour les femmes que pour les hommes ne vaut pas, parce qu’il n’y a pas de différence en matière d’espérance de vie – c’est la même. En conséquence, ce type de dispositif relèverait d’un droit qui, au regard de la législation européenne, serait considéré comme discriminant pour les hommes par rapport aux femmes. C’est pourquoi nous ne l’avons pas retenu.
Tels sont les principes qui nous ont animés et conduits à faire cette proposition d’une surcote anticipée.
Là aussi, nous allons à l’encontre des dispositifs du système de retraite actuel, puisque la surcote ne peut intervenir que quand la durée de cotisation est dite à taux complet – 172 trimestres à l’avenir –, que l’âge légal de départ à la retraite est atteint et que l’assuré travaille au-delà de cet âge légal avant de liquider sa retraite.
C’est la raison pour laquelle nous proposons un dispositif inédit de surcote avant l’âge légal.
À partir du moment où l’on a un trimestre de majoration au moins dans le calcul de sa pension, une fois pris en compte les 172 trimestres requis, indépendamment du fait que cette majoration de trimestres soit liée à la maternité ou à l’éducation et dès lors que l’on a atteint le taux plein à 63 ans – je vous dirai pourquoi nous avons retenu cet âge, alors que la loi prévoit qu’il faudra travailler jusqu’à 64 ans –, il nous paraît tout à fait légitime d’introduire une disposition particulière, à savoir une meilleure pension pour prendre en compte cet effort supplémentaire. Je précise que cette réforme vise les mères de famille, mais peut également concerner des hommes, puisque la répartition des majorations au titre de l’éducation et possible.
Par rapport à une mesure portant sur l’âge anticipé, cette disposition présente un autre avantage, celui de réduire les différences de niveau de pension entre les hommes et les femmes. Sur toutes les travées, j’entends que cette réduction doit être au cœur de notre réflexion et qu’il faut faire en sorte de la mettre en œuvre. Les différences se réduiront naturellement, au fil du temps, compte tenu du fait que les femmes sont de plus en plus diplômées et qu’elles ont des carrières relativement similaires à celles des hommes. Par conséquent, progressivement, le montant des pensions tendra vers une plus grande égalité.
M. le président. Veuillez conclure, monsieur le rapporteur.
M. René-Paul Savary, rapporteur. Un seul trimestre de majoration suffit, quel que soit le nombre d’enfants, que l’on travaille dans la fonction publique ou dans le secteur privé.
Enfin, nous avons limité le dispositif à quatre trimestres, soit 5 % de surcote, faute de quoi l’on tomberait dans un dispositif particulièrement onéreux ; or nous savons que cette réforme a avant tout pour objectif de combler les déficits et non de les creuser.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous vous proposons cet amendement, sur lequel nous pourrons, me semble-t-il, nous mettre d’accord. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. Mes chers collègues, je vous propose de suspendre la séance après la présentation des sous-amendements déposés sur l’amendement n° 2127 rectifié.
Je suis saisi de trente-huit sous-amendements.
Les trente et un premiers sont identiques.
Le sous-amendement n° 4876 est présenté par M. Gillé.
Le sous-amendement n° 4879 est présenté par Mme Van Heghe.
Le sous-amendement n° 4880 est présenté par M. Jomier.
Le sous-amendement n° 4881 est présenté par Mme Bonnefoy.
Le sous-amendement n° 4883 rectifié est présenté par M. Durain.
Le sous-amendement n° 4885 est présenté par M. Jacquin.
Le sous-amendement n° 4887 est présenté par M. Féraud.
Le sous-amendement n° 4890 est présenté par M. J. Bigot.
Le sous-amendement n° 4891 est présenté par Mme Conconne.
Le sous-amendement n° 4892 est présenté par M. Kerrouche.
Le sous-amendement n° 4893 est présenté par Mme Le Houerou.
Le sous-amendement n° 4896 est présenté par M. Fichet.
Le sous-amendement n° 4898 est présenté par Mme Poumirol.
Le sous-amendement n° 4900 est présenté par Mme Blatrix Contat.
Le sous-amendement n° 4903 est présenté par M. Kanner.
Le sous-amendement n° 4907 est présenté par M. Lurel.
Le sous-amendement n° 4909 est présenté par M. Tissot.
Le sous-amendement n° 4911 est présenté par Mme Monier.
Le sous-amendement n° 4913 est présenté par M. M. Vallet.
Le sous-amendement n° 4914 est présenté par Mme Lubin.
Le sous-amendement n° 4915 est présenté par Mme Meunier.
Le sous-amendement n° 4918 est présenté par M. Pla.
Le sous-amendement n° 4920 est présenté par M. Cardon.
Le sous-amendement n° 4922 est présenté par M. Chantrel.
Le sous-amendement n° 4926 est présenté par M. Cozic.
Le sous-amendement n° 4928 est présenté par M. Raynal.
Le sous-amendement n° 4943 est présenté par M. Leconte.
Le sous-amendement n° 4944 est présenté par Mme Préville.
Le sous-amendement n° 4946 est présenté par M. Todeschini.
Le sous-amendement n° 4980 est présenté par Mme Féret.
Le sous-amendement n° 4983 est présenté par Mme Poncet Monge, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon et Mme M. Vogel.
Ces trente et un sous-amendements sont ainsi libellés :
Amendement n° 2127
1° Alinéa 4
Compléter cet alinéa par les mots :
ou à un départ à la retraite abaissé d’autant de trimestres que celui ou ceux accordés automatiquement sans que cet âge de départ ne puisse être inférieur à soixante-deux ans, selon des modalités fixées par décret
2° Alinéas 9, 14, 19 et 25
Après les mots :
majoration de pension
insérer les mots :
ou à un départ à la retraite abaissé d’autant de trimestres que celui ou ceux accordés automatiquement sans que cet âge de départ ne puisse être inférieur à soixante-deux ans
La parole est à M. Hervé Gillé, pour présenter le sous-amendement n° 4876.
M. Hervé Gillé. Monsieur le rapporteur, je vous ai écouté avec beaucoup d’attention et, malgré tous vos efforts, vous ne parviendrez jamais à gommer le fait que toutes les analyses convergent pour démontrer que les femmes subiront davantage que les hommes les effets négatifs de ce projet de loi.
Dans le cas qui nous occupe, vous essayez de nous faire valoir une surcote qui permettrait d’améliorer le niveau de retraite des femmes qui ont eu des enfants, alors que celle-ci ne s’appliquera qu’après 64 ans.
Ainsi, le dispositif actuel qui permet aux femmes qui ont des enfants d’avoir des trimestres majorés et de partir dans des conditions correctes à 62 ans est rayé de la carte. Il n’est plus possible.
Vous essayez d’imaginer, au travers de cette surcote, une forme de plus-value qui permettrait en quelque sorte d’effacer le fait que les femmes qui ont des enfants et qui ont des trimestres de bonification peuvent partir dans des conditions correctes à 62 ans, que ce soit à taux plein ou non, si c’est leur choix. La question du choix est d’ailleurs bien le fond du sujet.
En outre, monsieur le rapporteur, après tout, on pourrait imaginer que certaines femmes puissent partir à 62 ans tout en bénéficiant d’une surcote. C’est précisément ce que nous nous apprêtons à défendre. Et cela aura pour conséquence que, du point de vue financier, le système pourrait s’équilibrer.
Par conséquent, ce sous-amendement vise à faire en sorte que les femmes puissent continuer à partir à 62 ans en bénéficiant de leurs trimestres de majoration. C’est ce que vous essayez de gommer aujourd’hui, en empêchant les femmes de pouvoir en profiter.
M. le président. La parole est à Mme Sabine Van Heghe, pour présenter le sous-amendement n° 4879.
Mme Sabine Van Heghe. Tout au long de ces débats, quand vous ne les avez pas bridés brutalement – nous comprenons que vous soyez gênés par nos propositions –, nous avons dénoncé cette réforme injuste, inutile et inefficace.
Décaler de deux ans l’âge légal de départ à la retraite touchera encore plus violemment et injustement les personnes qui sont déjà fragilisées par des difficultés ou par des spécificités personnelles et professionnelles – en particulier les femmes.
Vouloir les faire travailler plus longtemps relève d’un mépris avéré envers les plus fragiles de nos concitoyens et d’une casse de notre modèle social, que nous ne pourrons jamais cautionner. Les petites touches en trompe-l’œil que vous voudriez faire passer pour des avancées ne pourront jamais occulter la brutalité de votre réforme.
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour présenter l’amendement n° 4880.
M. Bernard Jomier. Je souhaite dire quelques mots sur l’article 8, sur lequel nous n’avons pas pu intervenir (Marques d’impatience sur les travées du groupe Les Républicains.) – oui, monsieur Karoutchi, vous nous avez privés de la possibilité de nous exprimer –, avant d’entrer dans le débat sur la situation des mères de famille, dont il est question avec cet amendement et à laquelle Bruno Retailleau est particulièrement attentif.
En effet, l’article 8 porte aussi sur d’autres questions. Il est en quelque sorte une tentative d’atténuation des effets de l’article 7, qui posent particulièrement problème et que les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain n’ont pas voté.
Nous aurons l’occasion d’en reparler, en déclinant l’argument sur plusieurs thématiques : l’article 8, comme d’ailleurs l’article 9, vise le cas d’un certain nombre de personnes qui, vous le savez bien, se trouvent actuellement dans un cycle de prise en charge maladie du fait de la difficulté qu’elles ont à exercer leur emploi en fin de carrière et de la faiblesse des dispositifs d’adaptation et de compensation.
Si vous interrogez les soignants et les médecins, ils vous diront tous la multiplicité de ces situations, que l’on retrouve d’ailleurs dans les chiffres des budgets de l’assurance maladie et de l’assurance retraite : ils vous raconteront le cas de ces personnes de 57 ou 58 ans qu’ils doivent mettre de façon répétée en arrêt maladie de courte durée en essayant de tenir jusqu’à l’arrêt de longue maladie qui est réglementairement borné à deux ans, pour essayer de faire le chaînage entre la longue maladie et la retraite sans passer par la case de l’invalidité, qui entraîne une baisse trop importante des revenus.
Cette question est fondamentale, parce que la situation sera aggravée par l’article 7. Nous entrons donc dans la discussion de l’atténuation des dispositifs que celui-ci prévoit. Vous choisissez de commencer le débat en évoquant d’emblée la situation des mères de famille, volet qui n’est pas particulièrement lié à la maladie. Certes. Reste que le débat se déroule dans un certain désordre, ce que je regrette.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bonnefoy, pour présenter le sous-amendement n° 4881.
Mme Nicole Bonnefoy. Ce sous-amendement vise à donner le choix aux mères qui auraient atteint le nombre de trimestres avant 64 ans, grâce aux trimestres de majoration de durée au titre de la maternité, de choisir entre le bénéfice d’une surcote de 1,25 % par trimestre supplémentaire jusqu’à 64 ans et la possibilité de prétendre à un départ à la retraite anticipée, sans que cet âge de départ puisse être inférieur à 62 ans.
Son adoption apporterait une plus-value réelle aux mères de famille et rétablirait un peu d’humanité en leur permettant de partir à la retraite avant le nouvel âge légal.
M. le président. La parole est à M. Jérôme Durain, pour présenter le sous-amendement n° 4883 rectifié.
M. Jérôme Durain. La surcote ne suffira pas.
Les mesures qui ont été proposées ne sont pas cosmétiques, mais elles sont bien insuffisantes pour compenser la brutalité de ces deux années de travail supplémentaires pour les femmes qui ont eu des carrières difficiles.
Ce sous-amendement vise à ce que ces femmes qui bénéficient de majorations leur permettant l’obtention du taux plein puissent partir plus tôt à la retraite.
M. le président. Les sous-amendements nos 4885 et 4887 ne sont pas soutenus.
La parole est à M. Joël Bigot, pour présenter le sous-amendement n° 4890.
M. Joël Bigot. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Le sous-amendement n° 4891 n’est pas soutenu.
La parole est à M. Éric Kerrouche, pour présenter le sous-amendement n° 4892.
M. Éric Kerrouche. Je mesure l’effort qui est fait par M. le rapporteur, mais nous sommes structurellement opposés à la nature même de cette réforme.
Nous sommes là dans la politique du « moins pire ». Celle-ci ne peut pas nous convenir, parce qu’elle ne remet pas en cause la brutalité du décalage de l’âge de départ à la retraite.
Mes chers collègues, je ne sais pas si vous vous rendez compte de l’effet de votre vote d’hier soir et, plus fondamentalement, de la graine de désespoir qui a été semée dans une grande partie de la population, en particulier chez ceux qui seront les premiers concernés par cette réforme.
L’intervention du ministre et celle de Stanislas Guerini hier montrent bien que l’on est dans une logique technique de déréalisation complète des situations, alors que, pour les gens, il n’y a pas d’aspect technique : seule compte l’expérience sensible de ce qu’ils devront vivre au quotidien. Aucune explication technique – quand bien même vous les donneriez toutes – ne pourra effacer la seule réalité dont les gens comprennent très bien les conséquences, à savoir le recul de l’âge de la retraite, et ce quelle que soit leur situation et même si l’amendement de M. Savary vise à essayer de tempérer cette mesure.
On parle des gens en général, on est en train de les essentialiser, sans jamais tenir compte des cas individuels. C’est là un problème fondamental.
Quand on évoque ces cas individuels, cela dérange nos collègues de la droite, parce qu’ils se rendent bien compte que, derrière ce qu’ils proposent, il y a des gens et ils prennent conscience de la brutalité que l’on exerce à leur endroit. On n’effacera pas cette brutalité avec un amendement, quand bien même il serait dans la politique du « moins pire ».
M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour présenter le sous-amendement n° 4893.
Mme Annie Le Houerou. Il s’agit de donner aux mères qui bénéficient de la durée d’assurance requise pour l’obtention du taux plein grâce à leurs trimestres de majoration de durée d’assurance au titre de la maternité, mais qui ne peuvent pas partir à la retraite faute d’avoir atteint l’âge légal, le choix de pouvoir partir à la retraite plus tôt.
C’est tout de même un comble ! Le Gouvernement nous a présenté des mesures de bonifications pour enfants, qui ne sont pas opérantes du fait de la nécessité pour les mères de travailler deux ans de plus.
Ce point a probablement fait l’objet de négociations avec les élus du groupe Les Républicains, dans l’espoir de les convaincre de voter le report d’âge à 64 ans.
Chers collègues de la droite, les dispositions de l’article 8 sont si injustes et semblaient si inacceptables à la majorité d’entre vous que vous avez négocié avec le Gouvernement quelques mesures d’atténuation de la réforme. En même temps, vous semez la confusion et vous rendez les choses encore plus compliquées pour celui qui essaie d’évaluer sa situation particulière.
C’est un aveu de culpabilité de votre part : coupables d’ajouter deux ans de travail supplémentaires pour tous, vous tentez maintenant d’atténuer les effets de votre vote pour rattraper l’injustice du recul de l’âge à 64 ans. (Applaudissements sur des travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Fichet, pour présenter le sous-amendement n° 4896.
M. Jean-Luc Fichet. Il est défendu, monsieur le président !
M. le président. Le sous-amendement n° 4898 n’est pas défendu.
La parole est à Mme Florence Blatrix Contat, pour présenter le sous-amendement n° 4900.
Mme Florence Blatrix Contat. Celles qui pouvaient partir à la retraite à 62 ans à taux plein ne le pourront plus avec cette réforme : c’est un recul supplémentaire pour les femmes.
Tout au long de ces débats, nous avons démontré que toutes les réformes des retraites avaient pénalisé les femmes. C’est le cas cette fois encore : l’allongement de la durée de travail sera pour elles de neuf mois, alors qu’il est de cinq mois pour les hommes ; qui plus est, 60 % des économies permises par cette réforme se feront sur le dos des femmes.
La parité n’est pas partout. Il n’y a qu’à voir : nous sommes à peine un peu plus de 30 % de femmes dans cet hémicycle.
Certes, intuitivement, l’amendement n° 2127 rectifié peut paraître séduisant, puisqu’il vise à permettre d’avoir une très légère surcote de 5 %. Pourtant, c’est bien peu quand on sait que leurs pensions sont très largement inférieures à celles des hommes.
Le recul de l’âge de la retraite à 64 ans défavorisera les 120 000 mères qui, aujourd’hui, pourraient partir à la retraite. Du fait de leur maternité et des carrières hachées, les femmes ont des retraites beaucoup plus faibles que celle des hommes, de sorte que, 5 % de surcote, cela ne suffira pas.
Ce qu’il faut, c’est davantage une politique en faveur de l’égalité entre les femmes et les hommes, en particulier en matière de salaires, car les femmes gagnent en moyenne 23 % de moins que leurs collègues masculins.
L’amendement de la commission n’est donc qu’un pis-aller : les femmes ne pourront plus partir à la retraite dès 62 ans, ce qui serait une véritable régression pour elles. (Mme Sophie Primas s’exclame.)
M. le président. Les sous-amendements nos 4903 et 4907 ne sont pas soutenus.
La parole est à M. Jean-Claude Tissot, pour présenter le sous-amendement n° 4909.
M. Jean-Claude Tissot. Ce sous-amendement a pour objet d’apporter de la cohérence à l’amendement de la commission, qui tend à accorder, un an avant l’âge légal de départ à la retraite, une surcote de 1,25 % par trimestre supplémentaire aux assurés ayant atteint la durée d’assurance requise au titre de la maternité, de l’adoption ou de l’éducation d’enfants, dans le secteur privé comme dans la fonction publique.
Selon les rapporteurs, cet amendement vise à « témoigner aux mères de famille la reconnaissance que leur porte la Nation ».
Comme l’ont déjà déploré plusieurs de mes collègues, cette conception purement nataliste des femmes et de leur rôle dans notre société est partiellement étonnante, voire inquiétante. (Mme Sophie Primas s’exclame.)
Cela étant, cet amendement nous prouve qu’il est malgré tout possible de faire adopter des dispositifs de majoration des pensions dans le cadre d’un texte, dont le Gouvernement, qui prétend agir à l’euro près, justifie l’existence par la recherche d’un prétendu nécessaire équilibre.
Mes chers collègues, nous pourrions profiter de ce débat pour étendre les droits à surcote à tous ceux auxquels la Nation doit une certaine reconnaissance.
Je pense notamment aux soignants, qui ont été en première ligne pour lutter contre les vagues épidémiques successives de la covid-19 et de la grippe saisonnière et qui continuent de faire admirablement face malgré des moyens humains et matériels particulièrement limités.
Je pense à l’ensemble des professionnels des métiers du secours et de l’aide à la personne, qui assistent nos concitoyens au quotidien.
Je pense aussi à l’ensemble des responsables associatifs, qui font vivre notre société et participent à l’animation de nos communes pour le plus grand bien de tous.
Je pense enfin aux élus locaux – certains sont d’ailleurs présents dans nos tribunes –, particulièrement ceux des communes rurales, qui doivent consacrer leur temps libre à assumer de très nombreuses responsabilités – et j’en oublie certainement.
Mes chers collègues, comme vous le constatez, la Nation pourrait être reconnaissante à de très nombreux citoyens ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, pour présenter le sous-amendement n° 4911.
Mme Marie-Pierre Monier. Rassurez-vous, monsieur le rapporteur, je ne vous interrogerai pas sur ce qui motive le dépôt de cet amendement.
Nous proposons, pour notre part, de donner aux mères qui bénéficient de la durée d’assurance requise pour l’obtention d’une retraite à taux plein grâce à leurs trimestres de majoration de durée d’assurance au titre de la maternité et qui ne peuvent pas partir à la retraite, faute d’avoir atteint l’âge légal, le choix de partir plus tôt.
Rappelons qu’en l’état ce projet de réforme des retraites annihile le bénéfice que les mères de famille tirent de leurs trimestres de majoration. Ces dernières seront en effet obligées de travailler jusqu’à 64 ans et ne pourront plus bénéficier de la surcote à laquelle elles avaient droit jusqu’à présent, lorsqu’elles décidaient de rester en activité après 62 ans, après avoir validé le nombre nécessaire de trimestres pour partir à la retraite, grâce à la combinaison des trimestres de cotisation acquis par le travail et validés via la maternité.
L’amendement de la commission, lui, ne résoudra pas davantage les inégalités entre les femmes et les hommes en termes de retraite. Comme l’a dit Florence Blatrix Contat, il s’agit d’un véritable pis-aller.
Mme Sophie Primas. Pas plus que ce que vous aviez proposé !
Mme Marie-Pierre Monier. Pour l’ensemble des femmes, les inégalités s’accroîtront quoi qu’il arrive avec ce projet de loi.
M. le président. La parole est à M. Mickaël Vallet, pour présenter le sous-amendement n° 4913.
M. Mickaël Vallet. Il est défendu !
M. le président. Le sous-amendement n° 4914 n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Michelle Meunier, pour présenter le sous-amendement n° 4915.
Mme Michelle Meunier. Cette fameuse surcote améliorera-t-elle la situation des femmes ? Un peu, monsieur le rapporteur – personne ne dira le contraire. Pour autant, mettra-t-elle un terme à la situation actuelle, à savoir que 40 % des femmes partent à la retraite au terme d’une carrière incomplète, sans bénéficier d’une retraite à taux plein ? Non ! Votre mesure ne règle pas ce problème-là.
Cette fameuse surcote diminuera-t-elle la proportion de femmes qui doivent attendre l’annulation automatique de la décote à 60 ans ? Non ! Pourtant, 20 % des femmes sont dans ce cas.
Cette surcote compensera-t-elle financièrement les pensions calculées sur la base des vingt-cinq meilleures années, qui représentent en moyenne entre 17 % et 20 % de moins que celles des hommes ? Compensera-t-elle également ce que produisent les inégalités cumulées durant les carrières ? Non, bien sûr que non.
Cette surcote compensera-t-elle le fait qu’une mère de famille de trois enfants perçoit une pension moindre que celle d’un père de famille de trois enfants ? Vos 5 % n’y suffiront pas, monsieur le rapporteur !
Dernière question, cette surcote permettra-t-elle aux femmes ayant tous les trimestres nécessaires de solder leur retraite à 62 ans ? Non ! C’est pourquoi je propose, avec ce sous-amendement, que les femmes puissent le faire après avoir validé 172 trimestres de cotisation.
M. le président. La parole est à M. Sebastien Pla, pour présenter le sous-amendement n° 4918.
M. Sebastien Pla. Monsieur le rapporteur, votre vision du travail des femmes est partielle. Attaquez-vous d’abord à la question de l’égalité salariale avant de vous attaquer à celle des retraites.
Plus généralement, pour les femmes comme pour tous les autres travailleurs, vous ne proposez qu’une seule recette miracle pour équilibrer le système : travailler plus longtemps.
Les mesures que vous prévoyez à l’article 8, comme le dispositif de surcote, c’est en quelque sorte l’arbre qui cache la forêt des différents articles que vous venez de faire voter au Sénat et de l’injustice de votre réforme, laquelle pénalisera toujours davantage les femmes.
Mes chers collègues, j’étais dans la rue hier et avant-hier. Croyez-moi, les manifestants que j’ai rencontrés, qu’ils soient de droite ou de gauche d’ailleurs – ce n’est pas la question –, ne veulent pas de cette réforme. Ils ne comprennent pas l’obstination de la majorité sénatoriale à soutenir le report global de l’âge légal de départ à la retraite. Ils ressentent votre entêtement à ne pas les entendre comme une véritable injustice et une marque de mépris.
Je vous propose, monsieur le ministre, de sortir de votre ministère et d’aller à la rencontre des vraies gens. Lors de vos déplacements ministériels, je vous invite aussi à demander aux préfets de ne pas choisir les personnes qui vous reçoivent.
Monsieur le ministre, vous nous rabâchez à longueur de journée que notre pays doit s’aligner sur ses voisins européens. Si, en 1936, le Front populaire s’était inspiré des autres pays européens, il n’aurait jamais accordé les congés payés ni la semaine de 40 heures !
Quand il s’agit de s’inspirer des autres pour dégrader les acquis sociaux si chèrement acquis, vous êtes les champions ! En revanche, quand il s’agit de s’en inspirer pour faire contribuer les multinationales qui réalisent des superprofits indécents et le capital, vous refusez ! La France serait-elle devenue plus libérale que les pays anglo-saxons ?
Enfin, si votre volonté réelle est de réduire les déficits publics, commencez par chercher les recettes là où elles se trouvent. Renoncez au recul de l’âge légal de départ à la retraite, rétablissez l’ISF (impôt de solidarité sur la fortune), réduisez les niches fiscales et ayez le courage de vous attaquer sérieusement à la fraude fiscale plutôt qu’au statut des travailleuses et des travailleurs ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE. – M. Daniel Salmon applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Rémi Cardon, pour présenter le sous-amendement n° 4920.
M. Rémi Cardon. Au lendemain du 8 mars, Journée internationale des droits des femmes, où nous nous sommes vu imposer l’article 7, qui pénalisera plus particulièrement celles-ci, je rappelle qu’aujourd’hui l’âge moyen de départ à la retraite des femmes est de 63,2 ans, contre 62 ans pour les hommes.
Il faut également avoir en tête que 60 % des efforts demandés dans le cadre de la réforme reposeront sur les femmes. En effet, sur les 17 milliards d’euros d’économies que vous allez faire sur le dos des Français, monsieur le ministre, mes chers collègues de droite, 11 milliards d’euros seront à la charge des femmes.
Aussi ce sous-amendement est-il destiné à vous rattraper, mes chers collègues, puisqu’il vise à donner la possibilité aux mères de famille, qui bénéficient de trimestres de majoration de durée d’assurance au titre de la maternité et qui bénéficient par ailleurs de la durée d’assurance requise pour l’obtention d’une retraite à taux plein, de partir à la retraite avant d’atteindre l’âge légal.
Nous vous proposons d’atténuer la dureté des dispositions de l’article 7 et, ainsi, de vous rattraper.
M. le président. La parole est à M. Yan Chantrel, pour présenter le sous-amendement n° 4922.
M. Yan Chantrel. Votre manière de fonctionner depuis le début de l’examen de ce texte est intéressante.
Une fois de plus, vous présentez un amendement qui vise à nous faire croire que vous défendez une mesure favorable à nos concitoyens – cette fois-ci, une disposition en faveur des femmes. Reste que le socle de la réforme que vous avez votée, c’est-à-dire le report de l’âge légal de départ à la retraite à 64 ans – vous pourrez nous dire tout ce que vous voulez –, repose sur une injustice et appauvrit les femmes !
En fait, cet amendement ne changera absolument rien, monsieur le rapporteur. Cette surcote est un nouveau cache-sexe et ne répond pas à un objectif de justice sociale qui devrait pourtant présider à cette réforme.
Je vous rappelle que l’écart de pension entre les hommes et les femmes reste substantiel : à la fin de l’année 2020, les femmes touchaient en moyenne une pension inférieure de 40 % à celle des hommes – cet écart reste de 28 %, même si l’on tient compte de la réversion.
Si le salaire moyen des femmes était égal à celui des hommes, les cotisations dont elles s’acquitteraient rapporteraient 5,5 milliards d’euros supplémentaires à la sécurité sociale.
Contrairement à ce que l’on entend parfois, en moyenne, les femmes ne partent pas plus tôt que les hommes à la retraite ; au contraire, elles partent légèrement plus tard. C’est le cas, non seulement en moyenne, mais aussi à chaque âge jusqu’à 67 ans, âge auquel la proportion de femmes retraitées est inférieure à celle des hommes retraités.
Dans certains pays, les femmes partent plus tôt que les hommes à la retraite. C’est le cas en Autriche, où l’âge légal de départ est fixé à 60 ans pour les femmes. Comme vous appréciez les exemples hors de France, je vous en cite un. (Sourires.) La France n’est donc pas le pays le plus généreux en termes d’âge effectif de départ à la retraite, surtout pas à l’égard des femmes.
Comme, en règle générale, vous aimez les témoignages, je vais vous livrer celui de Laure, enseignante, qui vous renverra à la violence de cette réforme vis-à-vis des femmes : « Je crois que tout le monde a bien compris que tout le monde était perdant, mais que les femmes étaient davantage perdantes encore que les hommes.
Mme Michelle Meunier. Oui !
M. Yan Chantrel. « En tant que femme divorcée, ma retraite, ce ne sera pas le pied total. C’est une vraie précarité ! En plus, j’ai fait des études. Résultat, il y a peu de chances que j’arrive à m’arrêter dès 64 ans. »
Voilà le résultat de votre réforme et de l’article 7 que vous avez voté hier ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE.)
M. le président. Le sous-amendement n° 4926 n’est pas soutenu.
La parole est à M. Claude Raynal, pour présenter le sous-amendement n° 4928.
M. Claude Raynal. Monsieur le président, j’associe Thierry Cozic à la présentation de ce sous-amendement.
L’article 8 prévoit une partie des mesures d’accompagnement que vous avez généreusement mises en avant pour contrebalancer les effets négatifs des mesures d’âge prévues à l’article 4.
En réalité, monsieur le ministre – mais vous le savez bien –, les âges de départ anticipé à la retraite étant calculés en fonction de l’âge légal, le fait de reculer celui-ci à 64 ans les décale mécaniquement de deux ans.
Nous discutons donc des effets de bord parmi les plus injustes de la réforme. C’est particulièrement le cas pour les travailleurs ayant eu une carrière longue, dispositif qui est accessible, je le rappelle, en contrepartie d’un nombre donné de trimestres acquis, dont cinq trimestres cotisés avant la fin des vingt ans.
Comme l’indique le dossier de presse que vous nous avez transmis, il faudra dans ce cas atteindre l’âge de 62 ans pour pouvoir partir avec une retraite à taux plein, contre 60 ans aujourd’hui.
Pis, pour bénéficier du dispositif de carrière longue, il faudra avoir cotisé, pour partir à 60 ans, la durée d’assurance requise majorée d’une année, soit 44 ans. Cette disposition n’est ni plus ni moins qu’une double peine : non seulement ceux qui ont commencé très tôt ont souvent des métiers pénibles, mais ils devront travailler une année de plus que les autres pour partir avec une retraite à taux plein !
Il suffit de comparer le coût des mesures d’accompagnement prévues à cet article au regard des économies attendues du fait des mesures d’âge pour en comprendre l’insuffisance : le maintien de l’âge légal de départ à la retraite à 62 ans pour invalidité ou inaptitude coûterait 3,1 milliards d’euros par an, quand les mesures concernant les carrières longues coûteraient 0,6 milliard d’euros par an.
De manière générale, le compte n’y est pas. Il vous faut évidemment revoir votre copie !
M. le président. Les sous-amendements nos 4943 et 4944 ne sont pas soutenus.
La parole est à M. Jean-Marc Todeschini, pour présenter le sous-amendement n° 4946.
M. Jean-Marc Todeschini. Vous l’avez compris, si je défends ce sous-amendement identique, c’est que le dépôt d’amendements ou de sous-amendements identiques nous permet de nous exprimer, car, ici, c’est pire qu’à l’Assemblée nationale où le Gouvernement a pourtant la possibilité de recourir à l’article 49.3 de la Constitution.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Tout à fait !
M. Jean-Marc Todeschini. La majorité sénatoriale utilise tous les artifices à sa disposition et, en plus, elle nous accuse de faire traîner les débats ! On veut nous museler, nous empêcher de parler.
Assumez donc le vote intervenu cette nuit ! Un 8 mars, vous avez décidé, monsieur le ministre, mes chers collègues de la droite sénatoriale, rejointe par la droite élyséenne, de pénaliser les plus pauvres, c’est-à-dire principalement des femmes. Vous avez en quelque sorte créé un impôt sur leur vie.
Mme Sophie Primas. Arrêtez !
M. Jean-Marc Todeschini. Comme vous ne l’assumez pas, vous préférez accuser ceux qui, d’après vous, veulent détourner le débat.
C’est pourtant clair : nous sommes opposés à ce report de l’âge légal de départ à la retraite. Nous n’avons donc aucune honte à dire que, oui, nous voulons nous exprimer et exposer les raisons de notre choix.
Le Gouvernement nous a d’abord fait miroiter une pension minimum à 1 200 euros. Finalement, après que certains, notamment le député Guedj, ont demandé des précisions, on a vu à combien de personnes cette mesure s’adresserait réellement : on est passé de plusieurs dizaines de milliers de bénéficiaires à quelques milliers. On a donc fait croire à beaucoup de femmes, elles qui sont le plus pénalisées par leur carrière, qu’elles toucheraient 1 200 euros.
Le Gouvernement a ensuite cherché à faire illusion, avec le mirage de l’index seniors. Il a créé un thermomètre qui ne sert à rien ou, plutôt, qui ne servira qu’à dresser un constat. Ce n’est pas cet index qui améliorera la vie des gens.
M. le ministre nous a reproché cette nuit de ne pas être dans le réel, alors que, lui, il le serait. Je pense l’inverse.
Ainsi, le Président de la République n’aurait perçu aucune colère la semaine dernière. Pourtant, cette colère existe, même si elle est sourde. Méfiez-vous, parce qu’un jour elle pourrait s’exprimer dans les urnes ! Et si elle n’éclate pas aujourd’hui, c’est parce qu’elle s’affirme de manière étouffée – et vous savez très bien à quoi je fais référence en disant cela.
Bref, vous n’avez pas voulu de nos propositions. De notre côté, nous ne voulons pas de votre modèle social ni du système que vous mettez en place pour appauvrir les retraités. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret, pour présenter le sous-amendement n° 4980.
Mme Corinne Féret. Beaucoup d’arguments ont déjà été avancés par mes collègues.
Pour ma part, je dirais très précisément ce que nous proposons avec ce sous-amendement, car son dispositif est très clair. Ce n’est en rien de l’obstruction,…
Mme Corinne Féret. … comme vous ne cessez de le répéter.
« À l’alinéa 4, après les mots “L. 351-1-2”, ajouter les mots “ou à un départ à la retraite abaissé d’autant de trimestres que celui ou ceux accordés automatiquement sans que cet âge de départ ne puisse être inférieur à 62 ans, selon des modalités fixées par décret”.
« À l’alinéa 9, après les mots “majoration de pension”, ajouter les mots“ ou à un départ à la retraite abaissé d’autant de trimestres que celui ou ceux accordés automatiquement sans que cet âge de départ ne puisse être inférieur à 62 ans”.
« À l’alinéa 14, après les mots : “majoration de pension”, ajouter les mots “ou à un départ à la retraite abaissé d’autant de trimestres que celui ou ceux accordés automatiquement sans que cet âge de départ ne puisse être inférieur à 62 ans”.
« À l’alinéa 19, après les mots “majoration de pension”, ajouter les mots “ou à un départ à la retraite abaissé d’autant de trimestres que celui ou ceux accordés automatiquement sans que cet âge de départ ne puisse être inférieur à 62 ans”.
« À l’alinéa 25, après les mots “majoration de pension”, ajouter les mots “ou à un départ à la retraite abaissé d’autant de trimestres que celui ou ceux accordés automatiquement sans que cet âge de départ ne puisse être inférieur à 62 ans”. »
Si vous avez écouté attentivement ce que je viens de lire, vous devez avoir compris que nous voulons accorder la possibilité aux mères de famille qui bénéficient de la durée d’assurance requise pour l’obtention d’une retraite à taux plein, grâce à leurs trimestres de majoration de durée d’assurance au titre de la maternité, mais qui ne peuvent pas partir à la retraite, faute d’avoir atteint l’âge légal, de le faire plus tôt.
Voilà ce que nous proposons par ces sous-amendements qui, selon vos accusations, s’apparentent à de l’obstruction, alors qu’ils visent à introduire des mesures d’amélioration et, ce faisant, remettent en cause l’amendement de la commission.
M. le président. Madame Poncet Monge, si vous présentez le sous-amendement n° 4983, qui a été signé par l’ensemble des membres du groupe GEST, vos collègues perdront le droit de défendre leur propre sous-amendement.
Mme Raymonde Poncet Monge. Je le retire, monsieur le président !
M. le président. L’amendement n° 4983 est retiré.
Les sept sous-amendements suivants sont identiques.
Le sous-amendement n° 5384 est présenté par Mme Raymonde Poncet Monge.
Le sous-amendement n° 5385 est présenté par Mme Mélanie Vogel.
Le sous-amendement n° 5386 est présenté par M. Guillaume Gontard.
Le sous-amendement n° 5387 est présenté par M. Thomas Dossus.
Le sous-amendement n° 5388 est présenté par M. Jacques Fernique.
Le sous-amendement n° 5389 est présenté par M. Daniel Salmon.
Le sous-amendement n° 5390 est présenté par M. Daniel Breuiller.
Ces sept sous-amendements sont ainsi libellés :
Amendement n° 2127
1° Alinéa 4
Compléter cet alinéa par les mots :
ou à un départ à la retraite abaissé d’autant de trimestres que celui ou ceux accordés automatiquement sans que cet âge de départ ne puisse être inférieur à soixante-deux ans, selon des modalités fixées par décret
2° Alinéas 9, 14, 19 et 25
Après les mots :
majoration de pension
insérer les mots :
ou à un départ à la retraite abaissé d’autant de trimestres que celui ou ceux accordés automatiquement sans que cet âge de départ ne puisse être inférieur à soixante-deux ans
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter le sous-amendement n° 5384.
Mme Raymonde Poncet Monge. Partons de la situation actuelle.
M. Rachid Temal. Elle est horrible !
Mme Raymonde Poncet Monge. Environ 120 000 femmes partent chaque année à la retraite à l’âge de 62 ans très exactement. Cela concerne environ 35 % de l’ensemble des femmes. Celles-ci remplissent les deux conditions requises. Une grande partie d’entre elles – pas toutes – acquièrent des trimestres supplémentaires grâce à leurs enfants.
Vous en conviendrez, personne ne les a obligées à partir à la retraite. Elles auraient pu travailler deux ans de plus et profiter d’une surcote de 10 % de leur pension.
L’article 7, sur lequel vous avez très peu parlé hier, leur imposera désormais de travailler jusqu’à 64 ans, tout en leur faisant perdre cette majoration de 10 %. En d’autres termes, on leur supprime non seulement la possibilité de partir à 62 ans, mais aussi la surcote.
Monsieur le rapporteur, avec votre amendement, vous leur en rendez la moitié : 5 %. Merci !
Qu’elles n’aient pas voulu la surcote de 10 % signifie qu’elles préfèrent partir à la retraite à 62 ans. Les écologistes préfèrent d’ailleurs aussi que leur arbitrage se fasse en faveur du temps libre plutôt qu’en faveur de deux ans de travail supplémentaires.
Avec cette réforme, vous visez deux objectifs : faire payer le programme de stabilité aux travailleurs et faire travailler plus – j’y insiste. Or 120 000 femmes vous disent chaque année qu’elles ne le souhaitent pas – et nous sommes très satisfaits de ce choix.
M. le président. La parole est à Mme Mélanie Vogel, pour présenter l’amendement n° 5385.
Mme Mélanie Vogel. L’amendement de la commission a pour objet de faire perdre aux femmes et, plus largement, aux personnes qui ont fait le choix d’avoir des enfants un peu moins que ce qui est prévu par le texte.
Je rappelle que, selon les règles actuelles, hors réforme, les femmes qui obtiennent aujourd’hui une retraite à taux plein à 62 ans, du fait de la majoration de leurs trimestres, peuvent partir dès 62 ans, tout comme celles qui n’ont pas eu d’enfant.
Ce sous-amendement a pour objet de leur laisser ce choix. À l’inverse, l’amendement de la commission n’est en rien un progrès, car la surcote qu’il tend à prévoir serait plus faible qu’elle ne l’est aujourd’hui. Cette mesure ne constitue au mieux qu’un moindre recul.
J’ajoute que 60 % des efforts demandés par cette réforme sont demandés aux femmes, alors qu’elles touchent des pensions dont le montant est 40 % inférieur à celui des hommes en moyenne, qu’elles aient ou non des enfants.
Nous avons pourtant fait un certain nombre de propositions en faveur des femmes. Parlons d’égalité salariale : si, en France, à travail égal, les femmes et les hommes avaient un salaire égal, il y aurait 5,5 milliards d’euros en plus dans les caisses de la sécurité sociale ! C’est la moitié du déficit que vous voulez combler… Vous refusez de l’instituer !
Vous avez également refusé de mettre en œuvre un congé paternité obligatoire, alors qu’il s’agit de l’un des facteurs clés de la discrimination entre les femmes et les hommes au travail.
Les femmes, qu’elles soient mères ou non, participent à la vie de la société, maintiennent le pays debout, mais reçoivent beaucoup moins.
Nous ne sommes pas là pour produire les actifs qui paieront vos retraites ! Que nous fassions le choix d’avoir des enfants ou le choix inverse, nous avons les mêmes droits : le même droit au respect de la dignité et le même droit de partir à la retraite à 62 ans ! (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour présenter le sous-amendement n° 5386.
M. Guillaume Gontard. Nous défendons aujourd’hui un dispositif d’atténuation de la mesure de report de l’âge légal de départ à la retraite à 64 ans, conséquence de votre vote d’hier soir, mes chers collègues.
Permettez-moi de rappeler quelques chiffres : une femme sur cinq est contrainte de travailler jusqu’à 67 ans pour bénéficier d’une retraite à taux plein, contre seulement un homme sur dix.
Les femmes touchent des pensions moins élevées que les hommes. Le montant de leurs pensions de droit direct est ainsi inférieur de 40 % à celui qui est versé aux hommes. Même en prenant en considération les pensions de réversion, les femmes perçoivent une pension inférieure de 28 % à celle des hommes. Par ailleurs, 37 % des femmes retraitées touchent moins de 1 000 euros brut, contre 15 % des hommes seulement.
La durée moyenne de travail supplémentaire demandée aux femmes en vertu de la réforme est de sept mois, contre cinq mois seulement pour les hommes. Les femmes nées en 1980 seront – relativement aux hommes – les plus pénalisées par la réforme. Elles devront travailler huit mois de plus, contre seulement quatre mois de plus pour les hommes.
Vous le voyez, le report de l’âge légal de départ à la retraite accentuera la décote, en accroissant le nombre de trimestres d’assurance manquants, alors qu’en moyenne les femmes partent déjà un an plus tard que les hommes pour éviter cette minoration de leur pension.
Pour certaines femmes, le report de l’âge d’ouverture des droits diminuera l’intérêt d’avoir acquis des trimestres supplémentaires au titre de la maternité, car il efface le bénéfice de ce dispositif.
Pour terminer, il est inconcevable qu’en matière de retraite vous ne défendiez les droits que des seules mères de famille. Les droits des femmes doivent être protégés, qu’elles aient ou non des enfants. N’excluons personne, ce à quoi mènerait l’adoption de l’amendement de la commission.
M. le président. La parole est à M. Thomas Dossus, pour présenter le sous-amendement n° 5387.
M. Thomas Dossus. En raison de l’application de l’article 42 du règlement du Sénat, je n’ai pas pu m’exprimer sur l’article 8. Je suis donc très heureux de prendre la parole : il aurait été dommage que je ne puisse pas évoquer la partie « sucrée » de cette réforme, qui ressemble d’ailleurs davantage à un édulcorant – on est plus proche de l’aspartame que du sucre… (Sourires sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE.)
En cet instant, nous ne faisons que discuter de la meilleure manière d’atténuer la brutalité de la réforme et de ses effets. C’est notre souhait.
Il est utile de rappeler que le report de deux ans de l’âge légal de départ à la retraite est brutal et injuste, et encore plus pour les femmes. Cette mesure est d’ailleurs tellement brutale et injuste que la droite sénatoriale cherche à la tempérer… Enfin, comme viennent de le dire mes collègues, cela ne concerne pour toutes les femmes, mais seulement les mères de famille…
Je note au passage que, même si c’est peut-être parce que l’heure de la suspension approche, les travées de droite sont de plus en plus clairsemées quand il s’agit de défendre les mesures de la majorité.
Après mes collègues, j’insiste sur le fait qu’il serait vraiment regrettable d’adopter l’amendement de la commission, qui tend à exclure certaines femmes. Même dans sa volonté d’atténuer la réforme, la droite continue en effet de nous imposer sa vision conservatrice du droit. (Mme Sophie Primas proteste.)
Mes chers collègues, vous pouvez tenter d’adoucir cette réforme, mais vous ne ferez pas oublier que, pendant deux jours, ici, nous avons mis sur la table toutes les pistes qui auraient permis d’éviter le recul de l’âge légal de départ à la retraite. Nous avons proposé d’autres sources de financement, que vous avez toutes balayées en bloc.
Aujourd’hui, votre obstination bloque le pays. Retirez votre réforme, écoutez les hommes et, surtout, les femmes de ce pays !
M. le président. La parole est à M. Jacques Fernique, pour présenter le sous-amendement n° 5388.
M. Jacques Fernique. Ce sous-amendement vise à donner la possibilité aux femmes, qui bénéficient de la durée d’assurance requise pour obtenir une retraite à taux plein grâce à leurs trimestres de majoration de durée d’assurance au titre de la maternité, mais qui ne peuvent pas partir à la retraite, faute d’avoir atteint l’âge légal, de le faire plus tôt. (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées du groupe CRCE.)
M. le président. La parole est à M. Daniel Salmon, pour présenter le sous-amendement n° 5389.
M. Daniel Salmon. Je tiens à saluer le bel effort du rapporteur : on vous coupe une jambe, mais on vous offre une prothèse ! (Rires et Applaudissements sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE.) Tel est l’esprit de cet amendement, de cet article et de ce projet de loi d’une manière générale.
Pour vous, tout passe par l’argent ! Votre surcote sert à monnayer le décalage de deux ans de l’âge légal de départ à la retraite. Monsieur le rapporteur, tout ne s’achète pas : les jours, les mois, les années de retraite répondent à une attente, celle de disposer d’un temps libéré des contraintes du travail. Cela n’a pas de valeur pécuniaire.
Bien entendu, le niveau des pensions est important. Chaque euro compte pour les petits budgets. Le montant des retraites ne fait que refléter les inégalités de revenus perçus pendant la vie active.
Vous faites payer aux retraités modestes votre choix d’une société inégalitaire, celle des rentiers, celle du capital qui rapporte bien davantage que le travail.
Ce sous-amendement tend à offrir aux femmes une possibilité que vous leur refusez.
M. le président. La parole est à M. Daniel Breuiller, pour présenter le sous-amendement n° 5390.
M. Daniel Breuiller. Au fond, voilà une réforme thatchérienne (Mme Sophie Primas s’exclame.), qui aggrave les conditions de vie de nos concitoyens et pénalise en priorité les femmes.
Voter une telle disposition de nuit, dans notre hémicycle, méritait d’être dénoncé. Le faire un 8 mars est évidemment encore plus grave.
Je remercie les rapporteurs de tenter d’atténuer cette mesure d’une grande violence. Mon collègue Thomas Dossus a parlé d’aspartame. Moi, je pense plutôt au Doliprane que l’on devra administrer à tous ceux qui auront mal à la tête demain.
La question que je souhaite aborder est celle de la liberté de choix.
Voilà un ou deux jours – je ne sais plus exactement, probablement parce que nous avons basculé dans une autre dimension, très éloignée des conditions habituelles des travaux en séance publique –, six de nos collègues centristes déposaient un amendement de suppression de l’article 7 au nom de la liberté, plus précisément de la liberté de choix.
Nous devons a minima, alors que vous venez de durcir les critères de cette réforme et de rendre obligatoire la poursuite du travail jusqu’à 64 ans, laisser le choix aux femmes de décider du moment où elles prendront leur retraite, de bénéficier ou non de la surcote – au moins pour moitié –, auxquelles elles ont d’ailleurs droit dans le régime actuel.
Il ne nous revient pas, mes chers collègues, de les contraindre, parce que cela nous semble la meilleure chose pour elles, à travailler plus tard et à bénéficier d’une majoration.
Vous êtes nombreux, sur les travées de droite, à revendiquer la liberté. Eh bien, laissez cette liberté aux femmes : elles n’ont pas besoin que nous leur imposions cet allongement de la durée du travail ! (Applaudissements sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE.)
Mme Cathy Apourceau-Poly. Exactement !
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à treize heures trente, est reprise à quinze heures, sous la présidence de Mme Pascale Gruny.)
PRÉSIDENCE DE Mme Pascale Gruny
vice-président
Mme le président. La séance est reprise.
4
Mises au point au sujet de votes
Mme le président. La parole est à Mme Colette Mélot.
Mme Colette Mélot. Lors du scrutin public n° 233 sur l’article 7 du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023, les sénateurs Daniel Chasseing, Jean-Pierre Decool et Dany Wattebled souhaitaient s’abstenir.
Mme le président. La parole est à M. Olivier Rietmann.
M. Olivier Rietmann. Lors du scrutin public n° 233 sur l’article 7 du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023, ma collègue Sylviane Noël souhaitait voter contre et mon collègue Didier Mandelli souhaitait s’abstenir.
Mme le président. Acte est donné de ces mises au point. Elles seront publiées au Journal officiel et figureront dans l’analyse politique du scrutin concerné.
5
Loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023
Suite de la discussion d’un projet de loi
Mme le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus, au sein de l’article 8, à la présentation de l’avis de la commission sur les sous-amendements à l’amendement n° 2127 rectifié.
Article 8 (suite)
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur de la commission des affaires sociales pour l’assurance vieillesse. L’amendement n° 2127 rectifié est particulièrement important, puisqu’il vise à prendre en compte les mères de famille.
Après l’intervention de M. le ministre ce matin et la présentation que j’en ai moi-même fait, qui mettait l’accent sur les principes qui ont animé la commission des affaires sociales pour prendre en compte de la façon la plus précise possible les difficultés rencontrées par les mères de famille ayant une carrière hachée, je rappellerai quelques éléments.
Il suffit d’une majoration de trimestres liée soit à l’éducation des enfants, soit à la maternité : la mesure touche donc les mères, quel que soit le nombre d’enfants, mais également les pères de famille puisqu’existe la redistribution des trimestres de majoration. Nous avons préféré une telle mesure au départ anticipé avant l’âge d’ouverture des droits, ainsi que vous le proposez au travers des sous-amendements, mes chers collègues. En effet, votre proposition induirait, comme je l’ai souligné tout à l’heure, une différence de traitement liée au genre des personnes, ce qui irait à l’encontre du droit européen. Par ailleurs, le coût du dispositif ne serait pas tout à fait le même.
Mme Poncet Monge l’a rappelé, une surcote de 5 % équivaut à une année de retraite, puisque la surcote est une disposition actuarielle : une durée moyenne de retraite à 100 % étant de 20 ans, un complément de 5 % correspond à une année de départ anticipé. Sauf que les 5 % sont viagers et répartis sur 20 ans – ce qui est déjà significatif –, alors qu’en cas de départ anticipé le coût est immédiat pour le système de retraite.
Certains disent que cette mesure est insuffisante : c’est exact. Ils proposent d’élargir par voie d’amendement le dispositif jusqu’à 62 ans. Je dis : non ! À 62 ans, dans le régime actuel, il n’y a pas de surcote : pour bénéficier de la surcote, il faut non seulement avoir atteint le taux plein, mais également aller au-delà de l’âge légal ; il faut donc avoir au moins atteint 62 ans et un trimestre, ce qui correspond à 1,25 % de surcote tout au long de la carrière. Nous avons contingenté la mesure à quatre trimestres de façon que le coût soit raisonnable.
Monsieur le ministre, si vous souhaitez que l’on aille un peu plus loin que le droit actuel afin de gagner encore trois trimestres, ne vous gênez pas pour donner un avis favorable. (M. le ministre sourit.) Je préférerais en effet – mais c’est un avis strictement personnel –…
M. Gérard Longuet. C’est le nôtre aussi !
M. René-Paul Savary, rapporteur. … dépasser le droit actuel, en consentant un effort pour les mères de famille plutôt qu’en votant des mesures d’âge qui ratent leur cible, nous aurons l’occasion d’en discuter ultérieurement. Pour cela, il me faut votre autorisation !
En tout état de cause, même si elle n’est pas suffisante, la mesure présentée par la commission touchera 30 % des femmes qui liquident leur retraite sur une génération, soit 130 000 personnes : c’est un chiffre qui me paraît significatif. C’est donc un dispositif qui mérite toute votre attention.
Mes chers collègues, compte tenu des explications que je vous ai données, qui, je l’espère, sont les plus claires possible, je vous invite à voter l’amendement n° 2127 rectifié, à l’exclusion de toute autre mesure, car c’est lui qui répond le mieux aux préoccupations des mères de famille. Par ailleurs, il contribuera – on peut être répétitif parfois à bon escient – à diminuer l’écart des pensions entre les hommes et les femmes.
La commission émet donc un avis défavorable sur l’ensemble des sous-amendements.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion. Je me suis déjà exprimé longuement à la fin de la discussion générale sur l’article.
Le Gouvernement soutient l’amendement adopté par la commission des affaires sociales, qui présente le double mérite de permettre, d’une part, le maintien d’un avantage de temps sous forme d’une majoration de la durée d’affiliation au régime pour les femmes et, plus largement, pour les assurés bénéficiant de trimestres dits familiaux, qui n’ont pas une carrière complète au moment de l’âge d’ouverture des droits, d’autre part, une surcote pour celles qui, au contraire, ont atteint la durée d’affiliation requise à 63 ans, alors qu’il restera quatre trimestres à travailler.
Le Gouvernement émet donc un avis favorable sur l’amendement n° 2127 rectifié. En revanche, il émet un avis défavorable sur l’ensemble des sous-amendements, pour les mêmes raisons que celles qui ont été évoquées par M. le rapporteur, y compris les questions d’équilibre budgétaire.
J’ouvre une parenthèse pour préciser qu’un certain nombre d’interventions ont souligné la difficulté qui subsiste quant à la différence de niveau de pension entre les hommes et les femmes. C’est évidemment à la fois un constat et un regret qui sont partagés, mais le fondement de la solution pour que les pensions des hommes et des femmes soient identiques tient non pas au système de retraite, mais bien à l’égalité professionnelle et à la résorption des inégalités tout au long de la vie. C’est un sacré chantier, si vous me permettez une expression aussi familière, qui dépasse très largement le cadre de ce projet de loi.
Mme le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.
Mme Laurence Rossignol. L’amendement n° 2127 rectifié est l’ambulance qui suit l’offensive terrestre contre la retraite à 62 ans. Bien entendu, comme on est respectueux des conventions, on ne va pas tirer sur l’ambulance. Voilà pourquoi je voterai cet amendement.
Pour autant, je formulerai quelques remarques.
Ma première remarque concerne les sous-amendements. Monsieur le rapporteur, on pourrait à la fois voter des majorations de durée d’assurance et une augmentation de la surcote : les deux ne sont pas contradictoires. Quand l’écart de rémunération entre les femmes et les hommes s’élève à 35 %, pourquoi ne pas prévoir d’augmenter spécifiquement les pensions des femmes ?
Ma deuxième remarque concerne la nature des écarts de pensions entre les hommes et les femmes. Ces écarts s’expliquent par deux facteurs : les carrières trouées et la faiblesse des rémunérations des femmes pendant toute leur durée d’activité, qui altère aussi le montant de leur pension.
De ce point de vue, cet amendement, dont l’objet concerne spécifiquement les mères de famille, fait l’impasse sur les inégalités salariales. Malheureusement, il n’y a pas que les mères de famille qui souffrent de rémunérations insuffisantes et inégalitaires : les femmes qui n’ont pas d’enfant sont dans la même situation. L’écart résiduel de rémunération entre les femmes et les hommes est de 9 %, indépendamment des carrières, à poste égal, à travail égal et à diplôme égal.
En excluant toutes les femmes qui ne sont pas mères de famille, le dispositif prévu ne répond pas à l’écart de rémunération spécifique entre les femmes et les hommes, qui affecte également la carrière des femmes qui ne sont pas mères de famille.
M. René-Paul Savary, rapporteur. C’est vrai, mais on ne peut pas répondre à tous les problèmes.
Mme Laurence Rossignol. Enfin, si cette mesure est utile, je doute de sa portée nataliste : à 28 ou à 30 ans, les jeunes femmes qui veulent mettre un bébé en route ne pensent pas à la surcote. Ce qu’elles veulent savoir, c’est si elles pourront travailler, élever leur enfant, avoir un logement, une place en crèche et si leur carrière souffrira de cette maternité ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST.)
Mme le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. J’ai eu au moins à deux reprises l’occasion de m’exprimer sur cet amendement et sur la logique politique qui le sous-tend, quand j’ai présenté pour mon groupe la motion référendaire et encore hier.
En fait, ce qui n’est pas juste – nous l’avons souligné de nombreuses fois –, c’est le fait de reporter l’âge de départ à la retraite à 64 ans. Cela pénalise plus particulièrement les femmes : toutes les femmes, qu’elles soient mères de famille ou non.
Nous nous sommes exprimés sur les carrières hachées et les inégalités salariales, mais, qu’il s’agisse aussi bien du Gouvernement que de la commission, vous n’avez pas voulu nous entendre.
Nous avons déposé un sous-amendement global visant à réécrire cet amendement : il a été rejeté. Vous ne réglez donc en rien la problématique des femmes qui ont des carrières hachées et de petits salaires, et qui seront les grandes perdantes de cette réforme. Je l’ai dit encore hier, lors de la séance de questions d’actualité au Gouvernement, même si le ministre essaye de nous démontrer le contraire.
Comme nos collègues du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, dans la mesure où il constitue un petit « plus », un petit « mieux » pour quelques femmes, nous voterons cet amendement. Pour autant, cette mesure est totalement insuffisante et ne répond pas à la demande des femmes.
La proposition des communistes pour régler cette question est la suivante : le montant du congé parental d’éducation doit être équivalent à 100 % du salaire, ce qui éviterait la question de la surcote. Ne répondez pas que vous manquez d’argent pour financer cette mesure : nous avons plein de solutions, mais vous les refusez !
En attendant que vous mûrissiez votre réflexion, nous voterons en faveur de ce très petit pas, car il faut bien commencer par quelque chose…
Mme le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. M. le ministre a raison : la neutralisation des trimestres enfants n’est pas uniquement due à l’allongement d’âge, elle est aussi due au fait que les femmes travaillent plus – c’est l’effet générationnel, l’effet de noria. Toutefois, il n’a raison qu’aux deux tiers, car un tiers des trimestres a été effacé par la réforme de 2010, et ce sera plus important encore avec la réforme actuelle.
Nous vous l’avons rappelé, 120 000 femmes par génération font aujourd’hui le choix de partir à 62 ans. Elles remplissent donc les deux conditions mentionnées et elles partent à taux plein. Les trimestres enfants vont tous devenir des trimestres travaillés.
Monsieur le rapporteur, la surcote est bien une neutralité actuarielle, mais l’esprit de la surcote est le volontariat. Jusqu’à présent, ces femmes qui, à 62 ans, travaillaient encore deux ans bénéficiaient de 10 % : c’était neutre sur leur patrimoine retraite, les deux ans qu’elles n’avaient pas, elles les gagnaient par la surcote. Aujourd’hui, vous ne leur en donnez plus que la moitié. Ce faisant, vous faites baisser le patrimoine retraite de ces 120 000 femmes, qui utilisaient majoritairement leurs trimestres enfants.
Nous vous l’avons dit, les mesures d’âge sont anti-redistributives, elles accroissent les inégalités. Pour autant, vous les préférez, car vous voulez que l’on produise plus et, surtout, que le pacte de stabilité soit respecté à court terme. Vous l’avez souligné, monsieur le rapporteur, les effets de ces deux mesures ne sont pas les mêmes à court terme ; c’est pour cela que vous privilégiez la surcote.
Quoi qu’il en soit, comme mes collègues, je voterai cet amendement, qui est l’une des mesures d’atténuation de la brutalité de la réforme.
Mme le président. La parole est à Mme Viviane Artigalas, pour explication de vote.
Mme Viviane Artigalas. Cet amendement est une petite mesure de compensation qui a été négociée, mais il n’annulera pas la brutalité de ce projet de loi.
Avec cet article 8, vous avez au moins le mérite de la cohérence dans la casse de notre système de solidarité. Vous voulez faire travailler deux ans de plus nos concitoyens, quelles que soient leurs difficultés et la durée de leur carrière. D’autres mesures de compensation seront peut-être votées, mais vouloir faire travailler deux ans de plus des personnes déclarées inaptes au travail, les bénéficiaires de l’allocation aux adultes handicapés (AAH), de l’allocation de cessation anticipée d’activité, les travailleurs ayant une carrière longue, les travailleurs handicapés, les travailleurs ayant une incapacité permanente à la suite d’un accident de travail ou d’une maladie professionnelle, les fonctionnaires handicapés, c’est-à-dire les plus fragiles et les plus précaires, c’est vraiment une logique de brutalité !
Bien évidemment, les femmes seront les grandes perdantes de cette réforme. Je le répète, ce n’est pas cette petite mesure proposée par la commission qui améliorera leur retraite. Quoi qu’il en soit, nous la voterons malgré tout, car mieux vaut tenir que courir. (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme le président. La parole est à M. Olivier Henno, pour explication de vote.
M. Olivier Henno. Nous voterons cet amendement pour des questions d’équilibre, de justice et de valeur.
Mme Françoise Gatel. Très bien !
M. Olivier Henno. Il faut plus de justice vis-à-vis des femmes. Il existe un écart de rémunération entre les femmes et les hommes : 10 % à fonction égale ou à diplôme égal. C’est insupportable, mais on ne peut pas non plus tout attendre de cette réforme du système de retraite.
On peut se soucier de cette injustice à l’occasion d’une réforme du système de retraite – pourquoi pas ? –, mais on ne s’en est toujours pas souciés autant, je pense notamment à la réforme Touraine, sans ouvrir de nouveau la polémique.
Nous aurions voulu aller plus loin, mais nous voterons cet amendement au bénéfice duquel nous avons retiré les amendements que nous avions déposés, notre principal souhait étant d’aller au bout de cette discussion.
Par ailleurs, j’ai entendu les propos de Mme Vogel. Je ne suis pas souvent d’accord avec elle, mais je reconnais que son argumentation est construite. Néanmoins, dans le cadre d’un système de retraite par répartition, il est tout à fait indispensable, voire légitime, de s’occuper de démographie et de la dimension nataliste : elle est intrinsèque au système.
Enfin, dernier mot, pour nous, la famille, contrairement à ce que j’ai entendu dire tout à l’heure, n’est ni une idéologie ni une doctrine : c’est une valeur, mes chers collègues !
Être mère ou père de famille, ce n’est pas un gros mot, c’est une valeur essentielle et la cellule de base de la société. Comme le disait Victor Hugo, la famille, c’est la plus solide des forteresses ! (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains. – Mmes Véronique Guillotin et Colette Mélot applaudissent également. – Mme Laurence Cohen s’exclame.)
Mme le président. La parole est à M. Henri Cabanel, pour explication de vote.
M. Henri Cabanel. Le RDSE est un groupe où chacun est libre de son vote, mais, pour une fois, nous allons tous voter cet amendement afin de rendre justice aux femmes qui ont une carrière hachée.
Néanmoins, nous éprouvons une certaine frustration par rapport à la manière dont se déroulent nos discussions. Nous aurions préféré un véritable débat. Tel n’est malheureusement pas le cas.
Certains reprochent à la majorité sénatoriale d’avoir utilisé des procédures d’ordre réglementaire pour museler les temps de parole des uns et des autres. Je rappelle que celles-ci n’ont été déclenchées qu’à partir de l’article 7. Depuis le début, la gauche cherche à ralentir le débat. C’est bien la première fois depuis que je siège au Sénat que je vois des amendements identiques signés individuellement par les membres d’un même groupe et défendus un par un, pour gagner du temps ! (Mme Monique Lubin s’exclame.)
L’ADN du RDSE, c’est le débat. Notre volonté est d’aller jusqu’au bout de l’examen de ce texte. Que chacun se prononce clairement sur ses objectifs, car il est de notre responsabilité d’éclairer les Français. L’image que nous donnons aujourd’hui n’est pas bonne. (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE, UC et Les Républicains. – Mme Colette Mélot applaudit également.)
Mme le président. La parole est à M. Yan Chantrel, pour explication de vote.
M. Yan Chantrel. Je parlerai plus globalement de l’article 8, car vous nous en avez privés au tout début, avec vos artifices et votre volonté de nous bâillonner et de brider nos prises de parole.
Mme le président. Monsieur Chantrel, votre propos doit porter sur l’amendement et les sous-amendements.
M. Jérôme Durain. On attaque le contenu de l’intervention !
M. Yan Chantrel. Rassurez-vous, madame la présidente, c’est en lien.
On ne dirait pas que c’est la présidence qui parle, c’est plutôt la présidence de la droite… (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Vincent Éblé. Est-ce la présidence de séance ou la police de la pensée ?
Mme le président. Monsieur Chantrel, je ne peux pas vous laisser dire cela : ici, je suis la présidente de séance de tout l’hémicycle ! (Mêmes mouvements sur les mêmes travées.)
Mme Sophie Primas. Excusez-vous !
M. Yan Chantrel. Mes chers collègues, votre intimidation ne marchera pas ! (Exclamations sur les mêmes travées.)
M. Olivier Paccaud. C’est indigne d’un parlementaire !
M. Yan Chantrel. Vous essayez de nous bâillonner depuis hier, mais vous ne priverez pas les Français du débat.
Malgré vos coups de force, nous continuerons de les défendre, ne vous en déplaise : c’est la démocratie, il faut l’accepter !
Mme Laure Darcos. Changez de chambre !
M. Max Brisson. Provocation !
M. Yan Chantrel. Je vais devoir demander une suspension de séance si ça continue…
Mme le président. Je ne l’accorderai pas.
M. Yan Chantrel. Ce qu’il faut retenir du recul de l’âge de départ à la retraite à 64 ans, c’est qu’il touche les plus fragiles, notamment ceux dont parle l’amendement de M. Savary, et, au premier chef, celles et ceux qui bénéficient d’une retraite anticipée et qui sont les victimes de votre réforme : les titulaires d’une pension d’invalidité, les travailleurs déclarés inaptes au travail, les allocataires de l’AAH et de l’allocation de cessation anticipée d’activité, les travailleurs ayant eu une carrière longue, les travailleurs handicapés, les travailleurs qui ont une incapacité permanente à la suite d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle, les fonctionnaires handicapés… (Exclamations et marques d’impatience sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
Rappels au règlement
M. Roger Karoutchi. J’ai dit ce matin que j’espérais un débat serein… Je vous remercie de m’avoir entendu.
Je me permets de faire savoir à M. Chantrel et à l’ensemble de nos collègues que, si le climat reste le même, il faudra appliquer la totalité du règlement.
Je pense notamment à l’article 95, qui prévoit très clairement que toute provocation et toute atteinte à la présidence de séance entraîne la censure avec exclusion temporaire du Palais du Sénat. (Très bien ! et applaudissements nourris sur les travées des groupes Les Républicains, UC, RDPI et INDEP.)
Mme le président. La parole est à M. Jérôme Durain, pour un rappel au règlement.
M. Jérôme Durain. La majorité semble avoir la faculté de savoir ce que contiennent nos amendements avant même d’en avoir pris connaissance. Ainsi, hier, la présidente de la commission des affaires sociales a déclaré irrecevables nos sous-amendements sans même les avoir lus. Aujourd’hui, madame la présidente, vous avez la faculté de savoir ce que notre collègue Chantrel allait dire avant même qu’il ne s’exprime. Il avait à peine commencé son propos en dénonçant la volonté de nous bâillonner : il en a le droit !
Mme Dominique Estrosi Sassone et M. Bruno Retailleau. Il n’a pas dit cela !
Mme le président. Poursuivez, monsieur Durain, mais je vous invite à consulter le compte rendu de débat.
M. Jérôme Durain. Nous regarderons la vidéo ensemble.
La suite de l’intervention de M. Chantrel a montré que son propos portait bien sur le fond du texte. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) On n’est pas obligés d’en arriver aux extrémités que nous promet M. Karoutchi.
Je sais que, politiquement, cela devient compliqué pour vous. On mesure bien, à l’aune des rectifications de vote, que vos positions s’effritent. Quand on lit la presse locale, on comprend aussi votre embarras : tout cela n’est pas très populaire.
Mme Françoise Gatel. Non !
M. Jérôme Durain. Laissez-nous travailler. (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.) Vous connaissez notre attachement à cette assemblée, à l’ordre qui y règne, à la qualité des débats que nous produisons ensemble. Si vous contribuez au calme, vous pourrez compter sur nous. (Mêmes mouvements.)
Mme le président. Voyons d’où viennent les provocations… Personnellement, en tant que présidente de séance, je n’ai pas apprécié.
Mes chers collègues, je souhaite sincèrement que nos débats conservent la sérénité qui fait la marque de fabrique de notre assemblée et qui contribue à la bonne image de nos travaux.
Je n’hésiterai pas, afin de maintenir la sérénité de nos débats, à faire usage des prérogatives que le règlement confère à la présidence de séance.
Ce rappel ayant été fait, nous reprenons le cours normal de la discussion.
Article 8 (suite)
Mme le président. La parole est à M. Bernard Fialaire, pour explication de vote.
M. Bernard Fialaire. Je voterai l’amendement du rapporteur, mais pas parce que j’ai l’article 7 honteux ou pour me racheter d’une mauvaise action que j’aurais commise !
Mme Françoise Gatel. Très bien !
M. Bernard Fialaire. Au contraire, je le voterai parce qu’il existe une cohérence à demander certains efforts et à corriger, par ailleurs, certaines inégalités.
Je ne suis pas économiste – je n’écoute d’ailleurs pas les économistes, car je m’en méfie.
M. Vincent Éblé. Vous devriez.
M. Bernard Fialaire. Je me base sur ce que me disent les personnes que je rencontre. Elles travaillent aussi dur que celles que rencontre la gauche, mais elles ont aussi un peu de bon sens.
Quand l’espérance de vie augmente de dix ans en quarante ans,…
M. Rachid Temal. Sept ans !
M. Bernard Fialaire. … quand il y a davantage de départs à la retraite que de gens qui entrent sur le marché du travail, quand la démographie baisse, nul besoin d’avoir fait Polytechnique pour comprendre que le système n’est pas équilibré et qu’il faut faire collectivement un effort supplémentaire.
M. Éric Kerrouche. C’est incroyable !
M. Bernard Fialaire. Les gens qui travaillent dur, qui se lèvent tôt le matin, sont disposés à y consentir, quoi que l’on en dise ! Ils l’ont d’ailleurs déjà accepté, par exemple, lorsqu’on leur a demandé de travailler un jour de plus en faveur des personnes âgées et de la dépendance. C’est aussi l’honneur de nos concitoyens, c’est la marque de la solidarité nationale !
Quand on veut une retraite par répartition, malgré les difficultés et la dureté du travail, on doit pouvoir faire cet effort supplémentaire pour équilibrer le régime et éviter à nos enfants de payer à la fois nos retraites et les dettes que nous leur laisserons ! (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE, RDPI, UC et Les Républicains.)
Rappel au règlement
Mme Raymonde Poncet Monge. On a reproché à M. Chantrel de ne pas s’exprimer sur l’amendement et de tenir des propos hors sujet.
Pourtant, celui qui est intervenu avant lui a fait exactement la même chose. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) Il a dit que le débat n’était pas intéressant, que nous utilisions des procédés dilatoires, que nous meublions, etc. Dans les deux minutes qui lui étaient imparties, il n’a pas du tout parlé de l’amendement : il a pris la parole pour nous tacler, alors que nous venions de présenter des arguments sérieux sur la surcote, le patrimoine retraite, le rendement à court terme ou à long terme pour défendre telle solution plutôt que telle autre.
Toute personne qui s’écarte du sujet de l’amendement doit être également sanctionnée, madame la présidente !
Article 8 (suite)
Mme le président. La parole est à Mme Monique Lubin, pour explication de vote.
Mme Monique Lubin. J’avoue que je suis très circonspecte sur l’amendement de M. le rapporteur.
Évidemment, par rapport à ce que le Gouvernement nous propose, les 5 % de surcote représentent un mieux, une atténuation des effets négatifs du projet de loi. Reste que c’est toujours moins que ce que les femmes ont aujourd’hui !
Mme Monique Lubin. Actuellement, une femme qui arrive à l’âge légal de la retraite, c’est-à-dire à 62 ans, avec tous ses trimestres, aura 10 % de surcote si elle décide de travailler jusqu’à 64 ans.
Mme Raymonde Poncet Monge. Exact !
Mme Monique Lubin. Certes, le dispositif de M. Savary est meilleur que celui du Gouvernement, mais il apporte bien moins aux femmes que celui qui prévaut aujourd’hui.
Mme Raymonde Poncet Monge. Et en plus elles n’ont pas le choix !
Mme Monique Lubin. J’allais le dire, ma chère collègue ! (Sourires sur les travées des groupes SER et GEST.)
On va les obliger à aller jusqu’à 64 ans, même si elles ont la totalité de leurs trimestres à 62 ans, et on leur donne gentiment 5 %, alors qu’elles peuvent aujourd’hui obtenir 10 % dans les mêmes conditions, mais sur la base du volontariat.
Monsieur le rapporteur, je sais que vous êtes sincère, mais votre proposition ne me plaît pas. Beaucoup de mes collègues, y compris dans les rangs de la gauche, la trouvent plutôt pas mal…
Mme Laurence Cohen. Elle est moins pire !
Mme Monique Lubin. À titre personnel, cet amendement ne me dérange pas en ce qu’il a été élaboré avec sérieux, mais je ne le partage pas.
Mme le président. La parole est à Mme Mélanie Vogel, pour explication de vote.
Mme Mélanie Vogel. Oui, il importe de dire que l’amendement sur lequel nous sommes amenés à voter aura pour effet de faire perdre des droits aux femmes qui ont des enfants, même si c’est un peu moins que ce qu’a prévu le Gouvernement.
Aujourd’hui, les femmes qui atteignent le taux plein à 62 ans avec leurs trimestres de majoration peuvent choisir de s’arrêter ou de continuer à travailler jusqu’à 64 ans. Dans ce dernier cas, elles bénéficient d’une surcote de 10 %.
Ce qui nous est proposé ici n’est en aucun cas un progrès par rapport à l’existant. C’est un moindre recul pour les seules personnes qui ont fait le choix d’avoir des enfants.
Cet amendement, s’il est voté, n’aura aucun effet sur les inégalités structurelles entre les femmes et les hommes dans la société, que nous avons proposé à de nombreuses reprises de corriger par des mesures que vous avez systématiquement refusées.
Je finirai en disant que, pour moi, la famille, ce n’est pas une valeur. C’est une institution (Mme Martine Filleul applaudit. – M. Olivier Paccaud s’exclame.),…
Ce n’est pas un gros mot ! Je ne sais pas pourquoi le mot institution vous pose problème.
… et, comme toutes les institutions, elle est une construction sociale, et, comme toute construction sociale, elle a vocation à évoluer.
M. Olivier Paccaud. Il faut la protéger !
Mme Mélanie Vogel. Nous avons le projet de faire évoluer la famille pour qu’elle soit moins centrée sur l’idée qu’elle est une affaire de femmes, que les femmes sont là pour faire des enfants et pour s’en occuper. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
Mme le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Avant d’expliquer mon vote, je tiens à dire que nos débats, même s’ils sont tendus, ne sont pas inutiles. J’en veux pour preuve que, depuis le vote sur le report de l’âge de départ à la retraite à 64 ans, une petite dizaine de nos collègues ont modifié leur vote pour le transformer en vote contre ou en abstention. Cela montre que les arguments et les explications finissent pas influer sur nos positions respectives.
Monsieur Fialaire, ce qui compte, c’est non pas l’espérance de vie, mais l’espérance de vie en bonne santé. Celle-ci stagne (M. Jean-Marie Vanlerenberghe fait un geste de dénégation.) et l’on ne sait pas ce qu’elle sera à l’avenir. Bien plus, l’espérance de vie globale régressera probablement dans les années à venir, comme aux États-Unis. En tout cas, il y a un doute sérieux sur l’espérance de vie en bonne santé, même si je conçois que cette définition soit assez complexe.
Toujours est-il que, si l’on se réfère à cet indicateur, il n’y a pas vraiment d’arguments pour reporter l’âge légal de départ à la retraite.
J’en viens à l’amendement de M. le rapporteur. Malgré les conditions dans lesquelles il a été présenté, après des manœuvres, certes réglementaires, pour nous amener à l’examiner en priorité, je me trouve face au dilemme du verre à moitié vide ou à moitié plein. En d’autres termes, faut-il accepter de voter l’atténuation, au demeurant partielle, d’un cadre général très négatif ?
Notre groupe y réfléchit et il est divisé sur cette question. Nous ne sommes pas arrivés en séance en nous étant mis d’accord avec le Gouvernement sur une position de principe sur tout. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) Je ne dis pas que c’est le cas de tout le monde. Pour preuve, je l’ai dit, des votes changent depuis hier soir. Je reconnais les possibilités d’évolution de chacun.
Aussi, les votes du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain seront peut-être divers. Pour ma part, je suis plutôt enclin à accepter la proposition du rapporteur, avec toutes les réserves que je viens d’exprimer.
Mme le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.
M. Gérard Longuet. Le groupe Les Républicains soutient avec conviction l’amendement n° 2127 rectifié. En effet, il a l’immense mérite d’ouvrir enfin le débat sur une réalité française : le régime par répartition ne peut durer que si nous avons un équilibre des naissances au regard de la durée de la vie à la retraite.
Vous évoquez avec nostalgie le Conseil national de la Résistance (CNR), qui, au printemps 1944, avant même que la France ne soit libérée, a posé les bases d’une politique sociale, notamment avec ce régime de retraite par répartition. Malgré les circonstances tragiques, notre pays avait à l’époque une natalité de 21 ‰, contre 11 ‰ aujourd’hui, c’est-à-dire à peu près moitié moins. Cette décrue a été particulièrement forte au début du XXIe siècle, puisque nous étions encore à 14 ‰ en 2000. Cela pose une véritable interrogation.
Comme rapporteur spécial du budget de l’éducation nationale, je puis vous rappeler qu’il y avait 820 000 naissances en France en 2012, voilà dix ans, contre 720 000 en 2022, soit 100 000 en moins. Parallèlement, la vie s’allonge et le nombre de retraités ne peut qu’augmenter, ce dont il faut se réjouir.
Votre amendement, monsieur le rapporteur, rappelle cette évidence. Évacue-t-il pour autant la totalité du problème ? La réponse est non, mais, si nous ne mettons pas le pied dans la porte à cet instant, nous aurons manqué un rendez-vous.
Mme le président. Il faut conclure, mon cher collègue !
M. Gérard Longuet. Madame la présidente, je vous sais très attentive aux délais, mais je veux simplement ajouter que, pour nous, la famille est une valeur (Exclamations sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE.), qui repose sur le respect de la parole donnée à son conjoint lorsque l’on décide de faire un enfant,…
Mme le président. Votre temps de parole est écoulé !
M. Gérard Longuet. … et de la parole donnée à ses enfants lorsqu’ils viennent au monde. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme le président. La parole est à M. Daniel Breuiller, pour explication de vote.
M. Daniel Breuiller. Pour ma part, je voterai cet amendement du rapporteur, mais, je le dis très honnêtement, je le voterai par défaut.
Par défaut, parce que l’addition de l’article 7, qui porte à 64 ans l’âge de départ à la retraite, et de l’amendement Savary à cet article 8, qui crée une surcote de 5 %, entraîne un recul global par rapport à la situation actuelle, certes, un recul plus limité que celui qu’a entraîné le simple vote de l’article 7, mais un recul tout de même. Même avec l’amendement Savary, nous aurons in fine une aggravation du sort des travailleurs.
Par ailleurs, j’ai entendu hier une proposition de certains membres du groupe UC visant à ne pas imposer la mesure d’âge. De la même façon, la surcote devrait rester un choix personnel.
Mes chers collègues de la droite et du centre, vous qui êtes très souvent les apôtres de la liberté, pourquoi ne laissez-vous pas aux gens le choix de la liberté ? Certains peuvent être cassés par le travail et n’aspirent qu’à prendre leur retraite, même avec une décote. C’est déjà possible aujourd’hui, donc gardons cette option. Ne retardons pas la possibilité pour chacune, en l’occurrence, de prendre sa retraite au moment où elle le décide.
Enfin, je tiens à dire que je ne comprends pas que nous ayons aujourd’hui ce débat, pourtant important et intéressant, pour savoir si la famille et le travail sont ou non des valeurs ; un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale, avec ses délais contraints, ne s’y prête pas. J’aimerais que nous prenions le temps d’en parler dans un autre cadre. La famille a beaucoup changé et il y a beaucoup de familles très différentes. Je ne vois pas en quoi ce serait une valeur. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme le président. La parole est à Mme Michelle Meunier, pour explication de vote.
Mme Michelle Meunier. Nous assistons là à un beau moment de débat parlementaire.
J’ai déjà eu l’occasion de le dire, cet amendement ne règle pas le problème des inégalités entre les femmes et les hommes : inégalités de salaires et de pensions, accès aux métiers encore trop réservés à des femmes dans le médico-social, le soin, les services à la personne, etc.
Cet amendement ne règle que la question des femmes qui ont trois enfants,…
M. René-Paul Savary, rapporteur. Les mères de famille !
Mme Michelle Meunier. … et qui pourront bénéficier d’une surcote.
J’ai pensé au départ que la situation serait un peu meilleure que celle que prévoit le texte, mais, en vous entendant, mes chers collègues de la majorité sénatoriale, je ne sais pas s’il faut voter cet amendement. En tout cas, le doute s’est installé en moi et in fine je pense que je m’abstiendrai.
M. Olivier Rietmann. Quel courage !
Mme le président. La parole est à M. Philippe Mouiller, pour explication de vote.
M. Philippe Mouiller. Je formulerai trois remarques.
Tout d’abord, je soutiens l’amendement de notre rapporteur et je le remercie d’avoir trouvé cette plus-value, qui permettra de mettre en avant la natalité et la place des femmes dans notre société. Nous nous mobilisons collectivement pour travailler plus longtemps afin d’assurer l’équilibre de nos retraites, mais il est important d’envoyer des signaux aux femmes.
Ensuite, nous avons beaucoup entendu dans le débat des questionnements sur l’égalité entre les femmes et les hommes en matière de rémunération et d’emploi. Je le reconnais, c’est un sujet important, dont le Sénat doit s’emparer, mais ce n’est pas du tout l’objet du texte.
M. Éric Kerrouche. C’est la conséquence !
M. Philippe Mouiller. Aujourd’hui, nous devons nous concentrer sur un autre enjeu, à savoir l’équilibre de notre système de retraite.
Enfin, concernant les personnes handicapées, j’ai entendu beaucoup d’interventions anticipant pour ces derniers une situation beaucoup plus difficile. Certes, ils sont dans l’effort collectif, mais, si vous prenez le temps de lire l’ensemble du texte, vous verrez qu’en réalité rien ne va concrètement changer pour eux. L’âge de 55 ans restera un âge barrière pour pouvoir partir à la retraite de manière anticipée. Le Gouvernement simplifie les procédures, ce qui améliorera leur condition. Je tenais à le préciser, parce que j’ai entendu beaucoup d’inexactitudes à ce sujet.
Pour conclure, j’ai un service à vous demander, mes chers collègues de l’opposition sénatoriale : si vous vous souciez tant de l’enjeu du médico-social, demandez à ceux qui sont en train de couper l’électricité dans les établissements médico-sociaux d’arrêter ces manœuvres. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Annick Jacquemet et M. Jean-Marie Vanlerenberghe applaudissent également.)
Mme le président. La parole est à M. Bruno Retailleau, pour explication de vote.
M. Bruno Retailleau. Nous sommes à un moment intéressant du débat.
Je remercie M. le rapporteur d’avoir déposé cet amendement. Ce sujet était pour nous une ligne rouge dans nos discussions avec le Gouvernement.
M. Pierre Laurent. C’est plutôt la ligne Maginot !
M. Bruno Retailleau. Ce point du débat est intéressant pour deux raisons.
D’abord, nous assistons à un rare moment de quasi-convergence entre nous. Il faut le souligner.
Ensuite, d’un point de vue plus politique, étant à l’origine de cet amendement, j’ai été accusé de vouloir absolument une politique nataliste – abomination des abominations pour une partie de cet hémicycle… Cependant, je constate qu’une grande partie de la gauche est restée fidèle à l’héritage du Front populaire, qui a inventé l’allocation familiale universelle, enrichie ensuite par le CNR et le gaullisme. Tous ont fondé le socle d’une politique familiale nataliste, soit dit pour ceux qui aiment l’Histoire.
Pour autant, une petite partie de la gauche, peu représentée dans notre hémicycle, considère que la famille n’est pas une valeur. Pour ses représentants, il faut déconstruire tout cet environnement en tournant le dos à ces cadres collectifs, à notre destin commun, au profit d’une émancipation individuelle radicale.
J’y insiste, je suis heureux qu’il y ait au Sénat cette gauche sociale,…
M. Jean-Michel Houllegatte. Il n’y a pas de droite sociale ?
M. Bruno Retailleau. … qui subsiste. Je suis d’autant mieux placé pour le dire qu’il m’est arrivé de regretter des dérives idéologiques dans ma propre famille politique à ce sujet.
C’est un élément fondamental, car la démographie est l’impensé de la réforme du Gouvernement. Un régime par répartition est un régime de transition démographique et intergénérationnel.
Les femmes sont déjà les grandes perdantes,… (Ah ! sur les travées du groupe SER.)
Mme Laurence Rossignol. Oui !
M. Bruno Retailleau. … et les mères de famille encore plus, puisque l’on écrase les trimestres de majoration avec les deux années de recul.
Mme le président. Il faut conclure, mon cher collègue.
M. Bruno Retailleau. On ne peut pas penser l’avenir de notre régime sans une politique familiale vraiment vigoureuse et volontaire. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et des travées du groupe UC.)
Mme le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Sueur. Je remercie M. Retailleau de sa contribution à l’histoire du Front populaire… (Rires sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
Cependant, cette contribution est quelque peu orientée. Il est tout à fait contraire à la réalité de considérer que les ministres, femmes et hommes, qui ont participé au gouvernement du Front populaire auraient été contre une politique de la famille. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Max Brisson. Il a dit le contraire !
M. Jean-Pierre Sueur. Au contraire, ils ont fait beaucoup à cet égard.
M. Max Brisson. Vous êtes d’accord !
M. Bruno Retailleau. Le décret-loi de 1938 !
M. Max Brisson. C’était Daladier !
M. Jean-Pierre Sueur. Nous nous inscrivons dans le droit fil de cette politique du Front populaire et nous ne pouvons accepter vos insinuations sur nos prétendues contradictions avec ce moment de notre histoire politique. C’est une imposture que nous ne pouvons accepter ! (Mme Émilienne Poumirol applaudit. – Nouvelles exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme le président. La parole est à M. Pierre Laurent, pour explication de vote.
M. Pierre Laurent. C’est ce que vient de dire Bruno Retailleau qui m’incite à prendre la parole. Il faut être d’accord sur le sens de ce que nous nous apprêtons à voter.
Vous parlez de ligne rouge, mon cher collègue. Pour ce qui est de la réforme des retraites, c’est plutôt la ligne Maginot !
M. Jean-François Husson. Vous l’avez déjà dit !
M. Pierre Laurent. Avec les 64 ans, la régression sociale va être massive pour tout le monde, et pas seulement pour les mères de famille.
Ne parlez pas de ligne rouge qui empêcherait cette régression. Nous ne sommes pas dans la conquête sociale. Puisque vous avez fait référence au Front populaire, qui a été une période de grandes conquêtes sociales, je dirai que nous en sommes loin. Nous sommes en train d’essayer de limiter un tout petit peu les dégâts que provoquera la réforme que vous voulez absolument voter.
Par ailleurs, le plus grave coup qui ait été porté à la politique familiale française date du jour où il a été décidé que les entreprises seraient totalement dégagées du financement des allocations familiales. Votre famille politique a, ce jour-là, pris le parti de fiscaliser entièrement la politique familiale. Et comme vous n’avez de cesse d’appeler à la baisse des dépenses publiques, c’est vous qui tarissez les possibilités d’être ambitieux en la matière. Vous êtes les premiers à faire pression sur le niveau des dépenses publiques et des dépenses sociales.
M. Bruno Retailleau. C’est la solidarité envers les générations futures !
M. Pierre Laurent. Ne nous donnez pas de leçons ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE, ainsi que sur des travées du groupe SER.)
Mme le président. La parole est à M. Éric Kerrouche, pour explication de vote.
M. Éric Kerrouche. Je ne suis pas étonné que notre collègue Bruno Retailleau ne veuille pas franchir la ligne rouge. Je n’en ai jamais douté.
Sur le fond, on peut dire qu’avec cet amendement, s’il est voté, les choses seront « moins pires ». Cependant, l’égalité entre les femmes et les hommes est un principe fondamental de notre droit, y compris au moment de la retraite. Or l’on constate un écart de 28 % sur les droits à la retraite entre les hommes et les femmes. Quand on prend en compte uniquement les droits directs, sans les droits dérivés, cet écart monte à 41 %. Il y a là une vraie difficulté.
Je reviens à ce prétendu bon sens, que vous avez invoqué tout à l’heure, monsieur Fialaire. Selon vous, comme nous vivons plus longtemps, il n’y a pas besoin de sortir de Polytechnique pour comprendre qu’il faut travailler plus. Rien n’est moins faux !
Encore une fois, je vous le répète, vous raisonnez sur des moyennes, ce qui n’a pas de sens en statistiques. La moyenne est une valeur générale. Ce qui compte, c’est l’écart à la moyenne, qui est complètement différent en fonction du sexe, de la catégorie sociale et du revenu. Faire comme si la moyenne concernait tout le monde est une erreur : certains seront directement touchés.
Vouloir faire croire, comme le Gouvernement, que cette réforme serait une réforme de bon sens est justement un non-sens statistique, une erreur politique et une erreur sociale. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST. – M. Bernard Fialaire exprime son désaccord d’un signe de tête.)
Mme le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.
Mme Laurence Rossignol. Monsieur Retailleau, sachez que je suis disponible pour un débat sur les questions démographiques, sur la natalité et sur les politiques familiales. Un tel débat doit passer d’abord par une analyse sérieuse de ce qui, aujourd’hui, nous a amenés au chiffre, que vous avez donné, d’un peu plus de 700 000 naissances par an.
M. Gérard Longuet. C’est moi qui l’ai donné !
Mme Laurence Rossignol. Peu importe !
À mon sens, la principale cause des hésitations des jeunes couples à mettre des enfants au monde réside d’abord dans la persistance des inégalités entre les femmes et les hommes. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Bruno Retailleau. Pas seulement !
Mme Laurence Rossignol. Laissez-moi finir !
Quand vous demandez à une jeune femme diplômée quelle carrière elle veut faire, elle répond que celle-ci doit être compatible avec sa vie familiale. Les garçons de la même promotion ne répondront pas cela. Conclusion, les jeunes gens se projettent sur leur avenir en fonction des charges de famille. Et, pour les jeunes femmes, le premier enfant ne peut arriver que quand tout est sécurisé : carrière, logement, couple. Là est le vrai sujet !
Par ailleurs, on peut comprendre que de jeunes gens entre 25 et 35 ans s’interrogent pour savoir à quoi ressemblera le monde dans lequel vivront leurs enfants. Aussi, la meilleure politique familiale serait de rassurer les jeunes sur notre engagement à prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir à leurs enfants de l’eau, de l’air et un climat viable… (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) Bien sûr que si ! L’éco-anxiété est une donnée majeure, comme l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.
Je ne demande qu’à faire un grand débat sur ces sujets. C’est quand vous voulez ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
Mme le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-François Husson. La voix de la sagesse ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. René-Paul Savary, rapporteur. Si nous voulons donner envie aux jeunes, il faut aussi que notre discours soit moins misérabiliste ou apocalyptique quand on évoque le travail. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
J’apporterai quelques précisions. Ce débat est intéressant, mais j’ai entendu quelques approximations. Je vais essayer d’être le plus synthétique possible.
Oui, des majorations de trimestres sont perdues, disons plutôt effacées. Elles n’entrent pas en compte, que ce soit pour la durée ou pour le montant de la pension. Actuellement, nous sommes à 20 % de majorations perdues. Après l’allongement de l’âge, nous serons à 30 %. Cependant, si nous sommes à 20 %, c’est en raison du début d’application de la loi Touraine. Des majorations sont perdues en l’absence des 43 annuités ou à cause du décalage de l’âge. Cette réforme a donc un effet amplificateur, ce qui ne nous a pas échappé. C’est la raison pour laquelle nous sommes convenus de conserver une majoration qui nous a semblé importante, une majoration bénéficiant majoritairement aux femmes.
Choix ou pas choix ? Vous dites qu’il n’y a plus de choix du fait du décalage de l’âge, mais il n’y a pas plus de choix avec l’allongement de la durée de cotisation. En effet, si vous avez l’âge et pas la durée, vous n’avez pas de taux plein, et vice versa. Les deux facteurs jouent. C’est la subtilité du dispositif qui le rend si complexe. J’avoue que j’ai mis longtemps à le comprendre.
Aujourd’hui, une femme de 62 ans qui part avec un trimestre supplémentaire d’activité bénéficie de la surcote, sauf que, pour avoir ses 43 annuités à 62 ans, il faut qu’elle ait commencé à travailler à 19 ans.
Mme Raymonde Poncet Monge. Non ! Et les trimestres ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Toutes les femmes ne sont donc pas concernées.
J’ai entendu que, sans la surcote, elles auraient des pensions moins importantes. Non, puisqu’elles vont travailler. C’est tout l’intérêt de l’effet « bornes » que de forcer à travailler plus longtemps. (Exclamations sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.) C’est la philosophie même de la réforme. Les femmes dont nous parlons n’auront pas la surcote, mais, comme elles travailleront plus longtemps, leur rémunération sera plus importante durant ces années actives. Ainsi, une fonctionnaire, dont la pension est calculée sur les six derniers mois, aura une meilleure retraite, puisque son indice en fin de carrière sera plus important. Elle rattrapera éventuellement la surcote.
J’estime que cette surcote de 5 % est tout à fait significative. Dites-le autour de vous si vous votez cet amendement : c’est la preuve que vous aurez essayé d’améliorer les pensions. Même si cette initiative vient de la droite, ne vous gênez pas pour le dire, mes chers collègues de l’opposition. (Sourires.)
Par ailleurs, vous avez largement souligné, à juste titre, que le système actuel était inégalitaire pour les mères de famille à plusieurs égards. Il y a en effet des différences de traitement pour l’usure professionnelle, l’incapacité permanente, etc.
Avec cette réforme, nous essayons de faire en sorte qu’il soit le moins inégalitaire possible. C’est pourquoi je vous invite à suivre ce qui sera proposé dans l’amendement de M. Retailleau sur les régimes spéciaux. Il est parti du même raisonnement : il faut trouver une durée de retraite qui tienne compte de l’usure professionnelle et que tout le monde soit logé à la même enseigne.
C’est pourquoi on peut imaginer, sans animosité, arriver à cette égalité dans des délais un peu plus contraints que ce que propose le Gouvernement.
Telles sont les réflexions qui ont animé la commission.
Merci de soutenir cet amendement, qui est décisif, et merci à Bruno Retailleau de l’avoir proposé. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme le président. La parole est à M. Claude Raynal, pour explication de vote.
M. Claude Raynal. Je serai bref. Il arrive que notre rapporteur fasse une envolée sur le thème : « Si vous votez notre amendement, n’oubliez pas de rappeler que c’est nous qui l’avons proposé ! »
M. Alain Chatillon. Il n’a pas dit ça !
M. Claude Raynal. C’est exactement ce qu’il vient de dire !
Se pose simplement un petit problème : la moindre des petites améliorations ne peut venir que de vous, puisque vous avez passé un accord préalable avec le Gouvernement qui vous autorise à déposer tel ou tel amendement !
Si le Gouvernement avait refusé que vous déposiez cet amendement, celui-ci tombait sous le coup de l’article 40 de la Constitution, et il n’y aurait pas eu d’« amélioration »… Mais nous ne le dirons pas ! (Applaudissements sur des travées du groupe SER.)
Mme le président. Je mets aux voix les sous-amendements identiques nos 4876 à 5390.
(Les sous-amendements ne sont pas adoptés.)
Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° 2127 rectifié.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Je rappelle que l’avis du Gouvernement est favorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
Mme le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 238 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 280 |
Pour l’adoption | 280 |
Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
En conséquence, les amendements identiques de suppression de l’article, ainsi que les amendements nos 4329 rectifié et 2863 rectifié, n’ont plus d’objet.
Je suis saisie de onze amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 2860 rectifié bis, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéas 4 à 9
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Monique Lubin.
Mme Monique Lubin. Cet amendement vise à supprimer le décalage à 62 ans de l’âge de départ anticipé à la retraite pour les titulaires d’une pension d’invalidité, les travailleurs déclarés inaptes au travail et les allocataires de l’AAH.
Nous pourrions saisir l’occasion qui nous est offerte avec l’examen de ce projet de loi pour corriger ce qui nous semble être une injustice. Tout comme celui soulevé par M. le rapporteur au travers de l’amendement dont nous venons de discuter, ce sujet intéressant mérite débat.
Mme le président. L’amendement n° 4332 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli, est ainsi libellé :
Alinéas 8 et 9
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Pierre Laurent.
M. Pierre Laurent. Cet amendement vise à supprimer la limitation à deux ans maximum du départ anticipé pour pénibilité.
Nous ne sommes évidemment pas opposés à un départ anticipé pour motif de pénibilité, mais il nous semble que cette disposition accompagne le recul de l’âge légal à 64 ans. En limitant à deux ans maximum la possibilité de ce départ, elle vise en réalité à le retarder de deux ans ; nous y sommes opposés.
Mme le président. L’amendement n° 3450, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon, est ainsi libellé :
I – Alinéa 9
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Art. L. 351-1-1 A. – L’âge mentionné à l’article L. 351-1 est abaissé d’au moins deux ans, dans des conditions fixées par décret, pour les assurés mentionnés à l’article L. 161-22-1-5 et pour les assurés bénéficiaires d’un départ en retraite au titre des articles L. 351-1-1, L. 351-1-3, L. 351-1-4 et L. 351-1-5. Cette condition d’âge est abaissée d’une durée pouvant aller jusqu’à neuf ans pour les assurés mentionnés à l’article L. 351-1-3 et d’une durée ne pouvant excéder deux ans pour les assurés mentionnés à l’article L. 351-6-1.
II – Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
…. – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
…. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Un rapport de l’Igas (inspection générale des affaires sociales) et de l’IGF (inspection générale des finances) de 2016 soulignait les spécificités des besoins des travailleurs handicapés, en faisant état d’une fatigabilité accrue, d’un absentéisme plus fréquent et de besoins d’accompagnement supplémentaires, notamment en vue de la retraite.
Le rapport pointait également une prévalence importante des maladies professionnelles chez les travailleurs handicapés, entraînant une hausse des cotisations AT-MP (accidents du travail-maladies professionnelles) et des charges d’assurance prévoyance.
Par ailleurs, un précédent rapport Igas-IGF, publié en 2013, indiquait que l’avancée en âge des personnes handicapées se traduisait plus souvent par la survenue de nouvelles déficiences liées à l’âge – la surprévalence – et entraînait de nouveaux handicaps comme la surdité, la cécité, la réduction de la mobilité, la dépression, ainsi que par un possible accroissement des déficiences antérieures.
Pour ces différentes raisons, la réforme doit s’adapter aux besoins particuliers des travailleurs handicapés.
Or, si la réforme maintient l’âge de départ à la retraite à 55 ans, tous les travailleurs en situation de handicap ne peuvent pas bénéficier de ce départ anticipé. Le dispositif prévu se traduira donc pour eux par une aggravation de leur situation.
Nous vous proposons de garantir aux travailleurs en situation de handicap la possibilité d’un départ anticipé ou progressif à partir de 55 ans, dans des conditions beaucoup plus larges, et de l’inscrire dans la loi. C’est notre rôle !
Présenter, comme vous le faites, des mesures de statu quo ou de faibles avancées comme de véritables progrès sociaux est une hypocrisie, alors que l’économie générale ou, plutôt, la tendance de fond du texte conduit à une aggravation de la situation des personnes invalides dont l’âge de départ à la retraite n’a pas été modifié.
Mme le président. L’amendement n° 417 rectifié, présenté par M. Benarroche, Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Salmon, est ainsi libellé :
Alinéa 9, première phrase
1° Remplacer les mots :
d’au moins
par les mots :
d’une durée de
2° Supprimer les mots :
, dans des conditions fixées par décret,
La parole est à M. Jacques Fernique.
M. Jacques Fernique. La chambre haute a souvent alerté sur les dérives de ce gouvernement quant à son rapport au corps législatif : procédure accélérée devenue la norme, non-ratification des ordonnances, renvoi constant aux décrets. Sous couvert d’efficacité, toutes ces décisions éloignent la représentation nationale de dispositions importantes en soustrayant celles-ci à la discussion parlementaire.
Nous l’avons vu lors de la construction de ce texte sur l’avenir des retraites, le Gouvernement ne s’était guère donné la peine d’écouter les syndicats, les partis politiques ou même le Conseil d’État, nous empêchant en particulier d’entendre ce dernier en maintenant secrète la note qui aurait pu et dû éclairer nos échanges.
Cet article 8 est représentatif du bricolage pratiqué par le Gouvernement : des annonces de progrès social, mais sans réelles mesures pour rendre celui-ci effectif.
Notre amendement vise donc à concrétiser les annonces non faites par le Gouvernement.
Le présent article prévoit plus particulièrement que l’invalidité ou l’inaptitude ouvre droit à un départ anticipé à un âge fixé par décret. En plus du bénéfice d’une retraite à taux plein, il est ainsi prévu que cet âge soit maintenu à 62 ans par décret.
Notre groupe ne souhaite pas laisser de place à de tels renvois au décret. Les discussions de ces derniers jours ont montré combien l’absence de décret pouvait impacter le calcul des retraites, celles des enseignants par exemple. Il nous paraît donc nécessaire de fixer dès maintenant l’âge de départ anticipé, de manière aussi précise que dans l’article 7 du projet de loi.
Mme le président. L’amendement n° 2861 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 9, première phrase
Supprimer les mots :
, dans des conditions fixées par décret,
La parole est à Mme Monique Lubin.
Mme Monique Lubin. Cet amendement vise à garantir que l’âge de départ anticipé à la retraite pour les allocataires de l’allocation de cessation anticipée d’activité, les travailleurs ayant eu une carrière longue, les travailleurs handicapés, les travailleurs qui ont une incapacité permanente à la suite d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle, sera toujours de 62 ans, et que cette disposition ne soit pas prise par décret, comme cela est proposé.
Mme le président. L’amendement n° 4581, présenté par M. Fernique, Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon, est ainsi libellé :
Alinéa 9, première phrase
Après le mot :
décret
insérer les mots :
, à la suite des négociations avec les organisations syndicales et patronales représentatives au niveau national et interprofessionnel
La parole est à M. Jacques Fernique.
M. Jacques Fernique. Alors que le Gouvernement limite fortement le débat parlementaire, et réduit à peu de chose la concertation avec les organisations syndicales, cet amendement a pour objet de faire des négociations avec les partenaires sociaux – organisations syndicales et patronales représentatives –, aux niveaux national et interprofessionnel, un point de passage obligé, préalable au décret.
Mme le président. L’amendement n° 2126, présenté par M. Savary et Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 9, première phrase
Supprimer la référence :
, L. 351-1-4
La parole est à M. le rapporteur.
Mme le président. Les trois amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 2846 rectifié est présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 3374 est présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon.
L’amendement n° 4333 rectifié est présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli.
Ces amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 9, seconde phrase
Supprimer cette phrase.
La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour présenter l’amendement n° 2846 rectifié.
Mme Émilienne Poumirol. Cet amendement vise à ne pas décaler de deux ans l’âge de départ à la retraite pour les salariés qui sont affectés par des risques professionnels, une situation dont on sait qu’elle est particulièrement pénible.
(Mme Laurence Rossignol remplace Mme Pascale Gruny au fauteuil de la présidence.)
PRÉSIDENCE DE Mme Laurence Rossignol
vice-présidente
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 3374.
Mme Raymonde Poncet Monge. L’article précise que les départs anticipés au titre du C2P ne peuvent intervenir plus de deux ans avant l’âge de droit commun, soit 62 ans dans le futur système, contre 60 ans aujourd’hui.
Cet amendement vise à maintenir la possibilité d’un départ anticipé à 60 ans pour les salariés affectés par des risques professionnels.
Ces dispositions de l’article 8 surviennent alors que le travail s’intensifie depuis trente ans, je ne reviendrai pas sur les chiffres de la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares).
Selon les chercheurs Thomas Barnay et Éric Defebvre, la période de la retraite a, de façon générale, des effets bénéfiques pour la santé et le bien-être, particulièrement pour les catégories populaires, qui sont largement exposées à l’accroissement de la pénibilité au travail.
Selon eux, le rôle protecteur de la retraite est très important pour les personnes dont le travail a été éprouvant. Pour celles qui ont été confrontées à des contraintes physiques, la retraite améliore principalement la santé générale ; pour autant, elle ne répare pas toujours les corps. Pour les personnes ayant subi des contraintes psychosociales, la retraite entraîne une diminution sensible de l’anxiété et de la dépression.
Pour la population masculine la plus exposée à des contraintes physiques, ces chercheurs observent que la retraite permet une diminution des maladies chroniques de 13 %, une baisse de l’anxiété et de la dépression de 8 %, et – c’est important pour l’espérance de vie sans incapacité – une baisse de 16 % de la limitation d’activité. Le meilleur remède à la pénibilité est donc bien la retraite.
N’acceptez pas cette usure des corps des travailleurs de notre pays, monsieur le ministre ! Les manifestants vous l’ont rappelé : ils ne veulent plus perdre leur vie à la gagner.
Mme la présidente. La parole est à Mme Michelle Gréaume, pour présenter l’amendement n° 4333 rectifié.
Mme Michelle Gréaume. Cet amendement vise à ne pas décaler de deux ans l’âge de départ anticipé pour les salariés affectés par des risques professionnels.
Mme la présidente. L’amendement n° 1938 rectifié bis, présenté par M. Mouiller, Mme L. Darcos, MM. Favreau, Sol et Pointereau, Mme Thomas, M. Karoutchi, Mmes Micouleau et Canayer, M. Cuypers, Mme Boulay-Espéronnier, MM. de Legge, Perrin et Rietmann, Mme Dumont, MM. Bonne, Bouloux, Belin et Chaize, Mme M. Mercier, MM. Sido, Burgoa, Frassa et Bascher, Mme Chauvin, MM. Meignen et Bouchet, Mme Demas, M. Cambon, Mmes Gruny et Bourrat, M. Savin, Mme Imbert, M. Genet, Mmes Petrus, Richer et Joseph, M. Piednoir, Mme Schalck, M. D. Laurent, Mmes Berthet, Bonfanti-Dossat et Jacques, MM. Brisson, Tabarot et Gremillet et Mmes Lopez et Borchio Fontimp, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 9, seconde phrase
Après le mot :
durée
insérer les mots :
pouvant aller jusqu’à neuf ans pour les assurés mentionnés à l’article L. 351-1-3 et d’une durée
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
…. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Philippe Mouiller.
M. Philippe Mouiller. Nous avons regardé de très près la situation des travailleurs handicapés. Aujourd’hui, un certain nombre de mesures existent pour leur permettre de partir à la retraite de façon anticipée, à l’âge de 55 ans – je ne reviendrai pas sur les questions des risques professionnels et de la fatigabilité de ces travailleurs.
Cette possibilité de départ à 55 ans relève actuellement du décret. Le présent amendement vise donc à inscrire dans le dur de la loi cette véritable avancée.
Je tiens également à souligner la volonté de simplification du Gouvernement pour la prise en compte de cette période.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. La commission a toujours regardé le principe du départ anticipé à la retraite comme la possibilité d’accorder une durée de retraite plus longue, au travers de la prise en compte de plusieurs facteurs – usure, invalidité, maladie. Dans ces cas, il est en effet tout à fait légitime que la société consacre un effort supplémentaire, notamment financier, aux personnes qui ont eu un parcours compliqué. C’est la raison pour laquelle ont été prévues des dérogations à l’âge de départ à la retraite, fixé par le présent texte à 64 ans. Mais cela fait beaucoup de mesures d’âge…
L’âge de départ à la retraite pour les personnes en situation de handicap est de 55 ans. Outre l’exposition aux risques professionnels, un nouveau critère est prévu : l’ensemble des trimestres cotisés – ou réputés tels –, critère différent de celui des trimestres validés. Il s’agit d’un dispositif d’ouverture, et l’on peut comprendre que des amendements visent à inscrire l’âge de 55 ans dans la loi, moyennant le respect de critères.
Le C2P, avec un nombre de points convertibles en trimestres, permet de faire bénéficier d’un départ à la retraite anticipé de deux ans.
Trop de personnes choisissant ce dispositif plutôt que d’autres dispositifs, nous avons pensé qu’il était préférable, plutôt que de fixer leur âge de départ à la retraite à 60 ans – soit deux ans de moins que l’âge légal actuel –, de favoriser le temps partiel rémunéré, en déplafonnant les points et en les réservant à la fin de carrière. Cette solution de transition et progressive, qui peut toujours être débattue, nous paraît judicieuse.
Pour les salariés en situation d’invalidité ou d’inaptitude, pour des raisons médicales mais non professionnelles, le Gouvernement propose un départ anticipé par rapport à l’âge de 64 ans. Cela signifie que l’on conserve le droit en vigueur, soit un âge de départ à la retraite à 62 ans.
J’en viens à un point de divergence que nous avons avec le Gouvernement.
Pour les personnes justifiant d’un taux d’incapacité permanente au moins égal à 20 %, ou entre 10 % et 20 % lorsqu’ils ont été exposés à certains risques professionnels durant dix-sept années, nous sommes opposés à la mesure prévue par le Gouvernement tendant à reporter l’âge de départ de 60 ans à 62 ans. Nous souhaitons que l’âge de départ à la retraite anticipée pour invalidité demeure fixé à 60 ans.
Nous examinerons ultérieurement la question des bornes d’âge – au nombre de trois ou quatre – pour les carrières longues.
Nous souhaitons faire en sorte que les bornes d’âge pour les fonctionnaires de catégories sédentaires et actives soient équivalentes, d’un métier à l’autre ou d’un statut à l’autre. La borne d’âge passe donc à 59 ans pour les catégories actives et à 54 ans pour les catégories super-actives.
Le raisonnement que nous avons suivi ayant toujours été le même, j’émets un avis défavorable sur les amendements qui vont à l’encontre des propositions faites par la commission des affaires sociales, à l’exception de l’amendement n° 1938 rectifié bis présenté par M. Philippe Mouiller. Pour ce qui concerne le départ à la retraite anticipé à partir de 55 ans pour les travailleurs handicapés, nous retiendrons ce dernier amendement plutôt que l’amendement n° 3450 présenté par Mme Poncet Monge – pour autant, l’esprit est le même.
S’agissant de l’amendement n° 417 proposé par M. Benarroche, je pense qu’il y a une erreur d’appréciation : je ne peux pas croire que son auteur ait véritablement cette intention…
L’avis est donc défavorable sur ces amendements faisant l’objet d’une discussion commune, sauf sur les amendements nos 2126 et 1938 rectifié bis.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre. Tout d’abord, sur le fond, M. le rapporteur a donné l’essentiel des arguments, que le Gouvernement partage.
Je précise que, sur l’amendement n° 2126 de la commission, j’émets un avis de sagesse.
Je demande le retrait de tous les amendements faisant l’objet d’une discussion commune ; à défaut, l’avis sera défavorable. En effet, comme l’a dit M. le rapporteur, la plupart de ces amendements sont satisfaits, dans la mesure où ils visent des situations qui n’évoluent pas avec le texte que nous présentons.
Je n’ai qu’une différence d’appréciation avec M. le rapporteur : il concerne l’amendement n° 1938 rectifié bis présenté par Philippe Mouiller. Nous partageons l’idée selon laquelle l’âge de départ des personnes en situation de handicap doit demeurer fixé à 55 ans.
L’article L. 351-1-3 du code de la sécurité sociale, mentionné dans cet amendement, dispose que cet âge de départ anticipé, soit 55 ans, est fixé par décret. Le Gouvernement n’envisage absolument pas de modifier ce décret.
Nous craignons que la rédaction proposée dans cet amendement – « pouvant aller jusqu’à neuf ans pour les assurés mentionnées à l’article L. 351-1-3 » – empêche d’aller plus loin par décret. En l’état de la rédaction du décret, et du fait de la possibilité de la modifier ultérieurement, nous considérons que l’amendement est satisfait. C’est pourquoi j’émets une demande de retrait plutôt qu’un avis favorable.
Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Lubin, pour explication de vote.
Mme Monique Lubin. J’entends bien que le Gouvernement a fait un effort, dans la mesure où il ne change pas l’âge de départ à la retraite de certaines catégories, comme les personnes handicapées ou en situation d’invalidité. Or je pense que ces personnes sont en situation d’inégalité et qu’elles devraient toutes pouvoir partir à 60 ans. Nous aurions dû, les uns et les autres, veiller à ce que cette disposition soit prévue.
L’examen de ce projet de loi devrait nous donner l’occasion de rectifier cette inégalité. Certes, j’imagine qu’une telle mesure a un coût. Je ne suis pas spécialiste de ce dossier, mais, que ces personnes relèvent de l’AAH, ou qu’elles soient en situation d’invalidité ou d’incapacité, la réalité c’est qu’en fin de carrière elles ne peuvent plus travailler. Pourquoi ne pas fixer l’âge de départ à 60 ans pour toutes les personnes relevant de ces catégories ? Ce serait une véritable mesure de justice.
M. Rachid Temal. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Breuiller, pour explication de vote.
M. Daniel Breuiller. Ma première remarque porte sur l’amendement n° 1938 rectifié bis de M. Mouiller. J’ai compris, pour ma part, qu’il visait à ne pas passer par le décret justement pour préserver l’âge de départ à la retraite à 55 ans. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle je le voterai.
Seconde remarque, le rapporteur a dit qu’il y avait beaucoup de bornes d’âge. Je suis d’accord avec lui : moi aussi, je souhaite m’opposer aux mesures de « Borne », à commencer par ce projet de loi. (Sourires.)
Mme la présidente. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.
M. Fabien Gay. Dans la droite ligne de l’intervention de ma collègue Monique Lubin, je considère que, entre 55 ans et 60 ans, que l’on soit en situation d’invalidité, d’incapacité ou de handicap, on ne retrouve pas de travail.
Quoi qu’il arrive, on ne repart pas au travail lorsque l’on a contracté une maladie professionnelle ou eu un accident de la vie. Même dans la start-up nation, où l’on peut se recycler à l’infini, on n’y arrive pas !
Outre la question de l’égalité qu’il faut considérer, nous avons un choix de société à faire : soit nous continuons à insécuriser ces personnes en les laissant dans une très grande précarité, avec une allocation ou le RSA jusqu’à l’âge de 64 ans, voire plus, s’ils n’ont pas eu une carrière complète ; soit nous disons que, à un moment donné, cela suffit et qu’il faut fixer une limite d’âge, en les laissant partir à la retraite à 60 ans. C’est selon nous le bon moment.
Quoi qu’il en soit, il y aura un sas de précarité. Tant qu’à prendre une mesure qui pèsera sur les comptes sociaux, autant sécuriser l’âge de départ à la retraite de ces personnes !
On peut certes débattre pour savoir s’il faut viser l’incapacité, le vieillissement, le handicap, et à quelle hauteur… Mais nous devrions au minimum, lors de l’examen de cet article relatif à la pénibilité, nous mettre d’accord sur ce point.
Je ne comprends pas pourquoi ni M. le rapporteur ni M. le ministre ne font un geste en ce sens !
M. Pascal Savoldelli. Très bien !
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 2860 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 2846 rectifié, 3374 et 4333 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Je suis saisie de dix-neuf amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 4334 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli, est ainsi libellé :
Alinéas 11, 26, 36, 53 et 61
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Le Gouvernement présente la création du dispositif dit « carrières très longues » et le statu quo relatif au dispositif « carrières longues » existant comme des mesures de justice sociale.
Or le dispositif « carrières longues » ne sera pas renforcé. En réalité, l’âge de départ pour les bénéficiaires de ce dernier, qui ont commencé à travailler à 18 ans ou 19 ans, sera allongé de deux ans, soit un départ à 62 ans en 2030. Quant à ceux qui ont commencé à travailler avant 18 ans, ils pourront toujours partir à 60 ans, mais ils connaîtront un durcissement de leur situation puisqu’ils devront s’acquitter de la durée de cotisation majorée d’un an.
En fait, c’est un véritable coup de communication ! Le Gouvernement maintient à 58 ans l’âge de départ pour celles et ceux ayant commencé à travailler avant 16 ans, soit moins de 1 % des générations qui sont touchées par la réforme.
En effet, pour la génération née 1973, le dispositif de carrières « super-longues » ne concerne pas plus de 300 personnes par an environ. L’âge moyen d’accès à un premier emploi stable est passé de 20 ans, en 1975, à 27 ans aujourd’hui.
Notre amendement vise à supprimer les trois bornes d’âge de départ anticipé pour les carrières longues et très longues.
Mme la présidente. L’amendement n° 3688, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 11
Rédiger ainsi cet alinéa :
a) À la première phrase, les mots « au moins égale à une limite définie par décret » sont remplacés par les mots « égale à celle prévue au deuxième alinéa de l’article L. 351-1 » ;
II. - Alinéa 36
Rédiger ainsi cet alinéa :
- les mots : « au moins égale à une limite définie par décret » sont remplacés par les mots « égale à celle prévue au deuxième alinéa de l’article L. 351-1 »
III. - Alinéas 51 à 53
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
a) À la première phrase, les mots « au moins égale à une limite définie par le même décret » sont remplacés par les mots « égale à celle prévue au deuxième alinéa de l’article L. 351-1 du même code »
IV. - Alinéa 61
Rédiger ainsi cet alinéa :
a) À la première phrase, les mots « au moins égale à un seuil défini par décret » sont remplacés par les mots « égale à celle prévue au deuxième alinéa de l’article L. 351-1 du code de la sécurité social » ;
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Le projet de loi renvoie à un décret la définition des départs anticipés pour carrière longue et les conditions de durée requises.
La seule référence au dispositif envisagé réside dans le remplacement des termes : « les assurés qui ont commencé leur activité avant un âge » par : « les assurés qui ont commencé leur activité avant un des trois âges », sous-entendu 16 ans, 18 ans et 20 ans.
Cette modification n’apporte rien à l’état du droit puisque, avec la rédaction actuelle, il existe déjà quatre âges : 16 ans, 17 ans, 18 ans et 20 ans. Pis, la modification envisagée vient figer les possibilités du pouvoir réglementaire en matière d’âge, alors qu’il s’agit au contraire d’un paramètre sur lequel il faut trouver le plus de souplesse possible, au profit ici de la durée d’assurance requise.
Actuellement, le décret prévoit que les assurés ayant commencé à travailler avant 20 ans doivent justifier d’une durée de cotisation équivalente à celle requise pour le taux plein. Les assurés ayant commencé à travailler avant 16 ans doivent justifier de cette durée, mais majorée de huit trimestres.
Le Gouvernement, dans son dossier de presse, prévoit d’abaisser cette condition à quatre trimestres pour les assurés ayant commencé à travailler avant 16 ans, de majorer cette durée de quatre trimestres pour ceux ayant commencé avant 18 ans et ne prévoit pas de la majorer, comme c’est le cas aujourd’hui, pour les assurés ayant commencé avant 20 ans. Le dispositif est très compliqué… (Sourires sur des travées des groupes Les Républicains et UC.)
Par conséquent, nous vous proposons de modifier les dispositions envisagées, et de supprimer à chaque fois la référence aux trois âges – la simple évocation du dispositif suffit à en montrer la complexité… – pour les remplacer par une disposition claire précisant que la durée de cotisation requise pour l’anticipation au titre de la carrière longue est égale à la durée d’assurance requise pour le taux plein. C’est bien plus simple, vous en conviendrez !
Mme la présidente. L’amendement n° 2635 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 11
Rédiger ainsi cet alinéa :
a) À la première phrase, les mots : « au moins égale à une limite définie par décret » sont remplacés par les mots : « égale à celle prévue au deuxième alinéa du même article L. 351-1 » ;
II. - Alinéa 36
Rédiger ainsi cet alinéa :
- les mots : « au moins égale à une limite définie par le même décret » sont remplacés par les mots : « égale à celle prévue au deuxième alinéa de l’article L. 351-1 » ;
III. - Alinéa 53
Rédiger ainsi cet alinéa :
- les mots : « au moins égale à une limite définie par le même décret » sont remplacés par les mots : « égale à celle prévue au deuxième alinéa de l’article L. 351-1 » ;
IV. - Alinéa 61
Rédiger ainsi cet alinéa :
a) À la première phrase, les mots : « au moins égale à un seuil défini par décret » sont remplacés par les mots : « égale à celle prévue au deuxième alinéa de l’article L. 351-1 » ;
La parole est à Mme Monique Lubin.
Mme Monique Lubin. Je ne vais pas lire l’objet de mon amendement, qui est exactement le même que celui de ma collègue Raymonde Poncet Monge. Je poserai plutôt les termes du problème.
Le projet de loi prévoit des durées différentes en matière de carrières longues. Il existera un dispositif pour ceux qui auront commencé à travailler avant 16 ans. Certes, c’est une mesure positive, même s’il existait déjà un certain nombre de mesures, mais cela ne concernera au final que très peu de personnes. Ce dispositif aura toutefois le mérite d’exister.
Aujourd’hui, ceux qui ont cotisé cinq trimestres avant 20 ans et qui ont le nombre de trimestres nécessaire à l’âge requis peuvent prétendre au dispositif « carrières longues » dès 60 ans. Ceux-là, qui constituent déjà et qui constitueront encore plus dans les dix années qui viennent le gros de la cohorte des carrières longues, vont devoir continuer à travailler jusqu’à 62 ans.
Nous avons eu ce débat précédemment, 62 ans, c’est certes mieux que 64 ans, mais c’est pire que 60 ans, n’est-ce pas ? Pour la plupart, on l’a dit, ce sont des personnes qui travaillent donc depuis longtemps et que l’on retrouve dans tous les métiers dont nous n’arrêtons pas de parler.
Je vous invite, mes chers collègues, à réfléchir : pour un certain nombre de ces personnes, deux ans de plus lorsque la loi sera pleinement entrée en vigueur, ou quelques mois dès maintenant, ce n’est pas rien ! Voilà ce que nous préconisons : 43 ans de cotisation et on s’en va !
Mme la présidente. Les trois amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 45 rectifié est présenté par MM. Cabanel, Artano et Bilhac, Mme M. Carrère, M. Corbisez, Mme N. Delattre, MM. Fialaire, Gold et Guérini, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux.
L’amendement n° 1918 est présenté par MM. Iacovelli, Lévrier, Hassani, Patriat, Bargeton et Buis, Mme Cazebonne, MM. Dagbert et Dennemont, Mme Duranton, M. Gattolin, Mme Havet, MM. Haye, Kulimoetoke, Lemoyne, Marchand, Mohamed Soilihi et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud, Richard et Rohfritsch, Mme Schillinger, M. Théophile et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
L’amendement n° 3407 est présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon.
Ces amendements sont ainsi libellés :
Alinéas 11, 26, 36, 53 et 61
Remplacer les mots :
un des trois âges
par les mots :
un des quatre âges, dont le plus élevé ne peut excéder vingt et un ans
La parole est à M. Henri Cabanel, pour présenter l’amendement n° 45 rectifié.
M. Henri Cabanel. Le dispositif de retraite anticipée pour carrière longue a été mis en place en 2003 dans un esprit de justice sociale pour accompagner les réformes d’allongement de la durée d’assurance requise. Les assurés qui ont commencé à travailler particulièrement tôt et qui remplissent certaines conditions de durée d’assurance peuvent ainsi bénéficier d’un départ en retraite anticipé pour carrière longue.
Afin d’amortir l’impact du relèvement de l’âge légal sur les assurés qui ont travaillé le plus tôt, l’article 8 modifie les conditions applicables aux carrières longues. L’âge de départ à la retraite pour longue carrière serait ainsi anticipé selon trois bornes d’âge.
Cet amendement prévoit de créer une quatrième borne d’âge de début d’activité permettant un départ anticipé pour les assurés ayant travaillé avant 21 ans. Cette nouvelle borne d’âge permettra aux assurés ayant réuni quatre ou cinq trimestres avant 21 ans et justifiant de leur durée d’assurance requise cotisée de partir à l’âge de 63 ans. Les âges de début d’activité et l’âge de départ possible sont définis par décret.
Un décret précisera par ailleurs que, pour l’ensemble des niveaux du dispositif des carrières longues, la condition de durée cotisée sera fixée conformément à la durée d’assurance requise pour le droit commun. Il indiquera qu’un assuré pourra partir à la retraite à taux plein s’il a cotisé au moins cette durée, dès lors qu’il aura atteint l’âge anticipé de départ au titre des carrières longues.
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Buis, pour présenter l’amendement n° 1918.
M. Bernard Buis. Cet amendement de mon collègue Xavier Iacovelli et de notre groupe est identique à celui qu’a excellemment présenté notre collègue Cabanel. Je n’en dirai donc pas plus !
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 3407.
Mme Raymonde Poncet Monge. Mon amendement est identique aux deux précédents, mais je tiens à souligner que, comme c’est souvent le cas, les sénateurs du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires souhaitent atténuer la brutalité de la réforme voulue par le Gouvernement.
L’article 8 précise que l’âge de départ à la retraite pour carrière longue peut être anticipé selon trois bornes d’âge qui sont définies par décret. L’accès au dispositif est conditionné à un début d’activité avant 16 ans, 18 ans ou 20 ans.
Nous avons proposé d’autres formulations pour cet article. Si elles n’étaient pas retenues, le présent amendement a pour objet, au vu malheureusement de la complexité du dispositif, de créer une possibilité de départ anticipé pour les assurés ayant travaillé avant 21 ans, et donc une quatrième borne d’âge de début d’activité, conformément aux annonces de la Première ministre du 5 février 2023.
Pour faire suite à cet engagement, un décret précisera également que, pour l’ensemble des niveaux du dispositif des carrières longues – et c’est le point important –, la condition de durée cotisée sera fixée conformément à la durée d’assurance requise pour le droit commun.
Aujourd’hui, quoi qu’on en pense, il s’agit de 43 annuités au terme de l’accélération du calendrier de la réforme Touraine. Dès lors qu’il atteint l’âge anticipé de départ au titre des carrières longues, l’assuré devra pouvoir partir à la retraite à taux plein s’il a cotisé au moins cette durée requise.
Mme la présidente. L’amendement n° 208 rectifié bis, présenté par Mme Muller-Bronn, M. J.B. Blanc, Mme Belrhiti, MM. Rojouan, Rapin, Mandelli, Pellevat, Panunzi et Frassa, Mme Thomas, M. Charon, Mme Bonfanti-Dossat et M. Gremillet, est ainsi libellé :
Alinéas 11, 26, 36, 53
Compléter ces alinéas par les mots :
et après la seconde occurrence du mot : « décret » sont insérés les mots : « qui ne peut être supérieure à la durée d’assurance mentionnée au deuxième alinéa de l’article L. 351-1 du code de la sécurité sociale »
La parole est à M. Didier Mandelli.
M. Didier Mandelli. Défendu.
Mme la présidente. L’amendement n° 4336 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli, est ainsi libellé :
I. – Alinéas 14, 27, 37 et 55
Supprimer ces alinéas.
II. – Alinéas 28 et 38
Supprimer les mots :
et, au premier alinéa, les mots : « tout ou partie de » sont supprimés
La parole est à M. Pascal Savoldelli.
M. Pascal Savoldelli. Aujourd’hui, pour accéder à la retraite anticipée pour handicap à 55 ans, il faut remplir deux conditions cumulatives : valider une certaine durée d’assurance – trimestres cotisés et trimestres assimilés – et un certain nombre de trimestres cotisés. La réforme prévoit de ne plus retenir que la condition de durée cotisée.
Cette évolution conduit certes à réduire la durée totale d’assurance pour bénéficier du dispositif, mais, à nos yeux, elle ne règle en rien la problématique à laquelle sont confrontées les personnes concernées. La durée de cotisation reste beaucoup trop longue. Pis, cela risque de rendre encore plus compliqué l’accès au dispositif, car les trimestres assimilés mais non cotisés, notamment au titre du chômage, d’un arrêt de maladie, d’un stage, ne sont plus pris en compte.
D’ailleurs, ce retour en arrière contredit totalement l’article qui prévoit de mieux prendre en compte les périodes de stage de formation professionnelle.
On peut être favorable à la réduction de la durée d’assurance totale exigée, mais il est inacceptable de supprimer la prise en compte des trimestres validés. Il faut donc maintenir cette possibilité de prendre en compte les trimestres validés assimilés et élargir les périodes reconnues comme telles, qu’elles soient des périodes de chômage, d’arrêt maladie, d’accident du travail, de stage de formation professionnelle, d’apprentissage, de service civique, etc.
Il faut également réduire la durée exigée de cotisation en situation de handicap d’au moins vingt trimestres, car une personne en situation de handicap ayant passé plus de cinq années au chômage ou en maladie ne pourra pas prétendre à une retraite anticipée en remplissant les autres conditions.
Cet amendement n’est pas seulement issu de notre groupe : le Collectif Handicaps, qui rassemble au plan national 52 organisations, nous a demandé d’évoquer cette problématique dans le débat. Il faudrait faire bénéficier du dispositif les personnes dont le handicap survient à compter de 40 ans et qui ont un taux d’incapacité supérieur à 50 %.
Mme la présidente. L’amendement n° 4651, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 14
Compléter cet alinéa par les mots :
et les périodes pendant lesquelles les fonctionnaires, magistrats et militaires vérifiaient les conditions d’affiliation à l’assurance vieillesse du régime général mentionnées à ces articles mais étaient affiliés à un régime spécial
II. – Alinéa 27
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Ce décret prévoit également les conditions dans lesquelles sont réputées avoir donné lieu à versement de cotisations par l’assuré les périodes pendant les lesquelles les fonctionnaires, magistrats et militaires vérifiaient les conditions d’affiliation à l’assurance vieillesse du régime général mentionnées aux articles L. 381-1 et L. 381-2 du code précité mais étaient affiliés à un régime spécial.
III. – Alinéa 37
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Ce décret prévoit également les conditions dans lesquelles sont réputées avoir donné lieu à versement de cotisations par l’assuré les périodes pendant les lesquelles les fonctionnaires, magistrats et militaires vérifiaient les conditions d’affiliation obligatoire à l’assurance vieillesse du régime général mentionnées aux articles L. 381-1 et L. 381-2 du code précité mais étaient affiliés à un régime spécial.
IV. – Alinéa 55
Compléter cet alinéa par les mots :
et des périodes pendant lesquelles les fonctionnaires, magistrats et militaires vérifiaient les conditions d’affiliation à l’assurance vieillesse du régime général mentionnées à ces articles mais étaient affiliés à un régime spécial
V. – Alinéa 64
Compléter cet alinéa par les mots :
et les périodes pendant lesquelles les fonctionnaires, magistrats et militaires vérifiaient les conditions d’affiliation à l’assurance vieillesse du régime général mentionnées à ces articles mais étaient affiliés à un régime spécial
La parole est à M. le ministre.
M. Olivier Dussopt, ministre. L’article 8 prévoit la prise en compte des trimestres acquis au titre de l’assurance vieillesse des parents au foyer (AVPF) et de l’assurance vieillesse des aidants (AVA) pour calculer le bénéfice de la retraite anticipée pour carrière longue par dérogation au principe selon lequel seuls les trimestres cotisés par l’assuré sont pris en compte.
Dans la rédaction retenue à l’Assemblée nationale, les seuls trimestres pris en compte sont ceux au cours desquels les intéressés ont été affiliés au régime général. Or les périodes au cours desquelles l’assuré était aidant ou parent au foyer peuvent être comptabilisées au titre de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) ou au titre du code des pensions civiles et militaires de retraite (CPCMR).
Nous proposons d’élargir aux autres régimes la prise en compte des trimestres d’assurance vieillesse des parents au foyer et d’assurance vieillesse des aidants pour la prise en compte des trimestres dans le calcul de l’éligibilité au départ anticipé pour carrière longue.
Mme la présidente. L’amendement n° 2128, présenté par M. Savary et Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
I. – Alinéas 25 à 27
Rédiger ainsi ces alinéas :
b) Le II est ainsi modifié :
- à la première phrase, les mots : « un âge » sont remplacés par les mots : « un des trois âges » ;
- la seconde phrase est complétée par les mots : « , ainsi que les périodes validées en application des articles L. 381-1 et L. 381-2 » ;
II. – Alinéas 35 à 37
Rédiger ainsi ces alinéas :
b) Le II est ainsi modifié :
- à la première phrase, les mots : « un âge » sont remplacés par les mots : « un des trois âges » ;
- la seconde phrase est complété par les mots : « , ainsi que les périodes validées en application des articles L. 381-1 et L. 381-2 » ;
La parole est à M. le rapporteur.
M. René-Paul Savary, rapporteur. Cet amendement vise à corriger une erreur rédactionnelle.
Mme la présidente. L’amendement n° 3580, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon, est ainsi libellé :
Alinéa 36
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Telle que la prévoit le Gouvernement, la détermination de trois âges, de surcroît par décret, pour permettre un départ anticipé à la retraite entraîne de fait de grandes injustices pour les carrières longues.
Nous en avons parlé, certaines carrières « super-longues » comptent 44 annuités, d’autres 43. Le Gouvernement, qui se targuait de bien prendre en compte la pénibilité et d’offrir aux personnes qui ont commencé à travailler tôt des voies de sortie anticipée, n’a pas présenté de système suffisamment juste et cohérent.
Vous l’écriviez vous-même dans un rapport sur les objectifs de la réforme. Un assuré ayant validé cinq trimestres avant la fin de ses 16 ans pourra liquider sa pension plus tôt qu’aujourd’hui. Un assuré ayant validé cinq trimestres avant la fin de ses 18 ans sera, à terme, conduit à liquider sa pension un an plus tard qu’en l’absence de réforme. Soit un report – c’est de cela que vous vous félicitez – nettement inférieur à la hausse de deux ans de l’âge d’ouverture des droits. Un an de plus seulement pour les personnes qui travaillent depuis leurs 18 ans : quelle chance, quel progrès, quel geste social important et exceptionnel…
Autre geste exceptionnel : permettre la validation de quatre à cinq trimestres avant 16 ans. Mais, selon la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees), seuls 0,4 % des cotisants de la génération née en 1962 valident un premier trimestre avant l’âge de 16 ans. Ce taux sera de 0,1 %, soit quatre fois moins, pour les générations suivantes. L’âge de la première validation de trimestres se situe autour de 21 ans pour la génération 1962 et autour de 22 ans pour la génération 1978. Pour la vaste majorité des futurs retraités, votre mesure ne servira guère ; en revanche, ils vont subir – c’est sûr – la brutalité de l’entièreté de cette réforme, c’est-à-dire deux ans de plus. Voilà la réalité !
Mme la présidente. L’amendement n° 2129, présenté par M. Savary et Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 55
1° Remplacer le mot :
maternité
par le mot :
temporaire
2° Remplacer les mots :
, des périodes validées
par le mot :
et
La parole est à Mme la rapporteure générale.
Mme la présidente. L’amendement n° 4341 rectifié bis, présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli, est ainsi libellé :
Alinéa 61
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Défendu.
Mme la présidente. L’amendement n° 2130, présenté par M. Savary et Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 61
Compléter cet alinéa par les mots :
et le mot : « déterminées » est remplacé par le mot : « déterminés » ;
La parole est à Mme la rapporteure générale.
Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 3103 rectifié est présenté par MM. Cabanel, Artano et Bilhac, Mme M. Carrère, M. Corbisez, Mme N. Delattre, MM. Fialaire, Gold et Guérini, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux.
L’amendement n° 3726 rectifié bis est présenté par MM. Chasseing, Guerriau et Decool, Mme Mélot, MM. Lagourgue, Grand, Wattebled, Menonville, Verzelen, A. Marc, Capus, Malhuret et Médevielle, Mme Paoli-Gagin, M. Calvet, Mmes Dindar et Dumont et MM. Laménie et Chatillon.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. – Après l’alinéa 11
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…) Après la deuxième occurrence du mot : « décret », sont insérés les mots : « qui ne peut être supérieure à la durée d’assurance mentionnée au deuxième alinéa de l’article L. 351-1 du code de la sécurité sociale » ;
II. – Après les alinéas 27 et 37
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…) À la première phrase du même II, après la seconde occurrence du mot : « décret », sont insérés les mots : « qui ne peut être supérieure à la durée d’assurance mentionnée au deuxième alinéa de l’article L. 351-1 du code de la sécurité sociale » ;
III. – Après l’alinéa 48
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…) Après la seconde occurrence du mot : « décret », sont insérés les mots : « qui ne peut être supérieure à la durée d’assurance mentionnée au deuxième alinéa de l’article L. 351-1 du code de la sécurité sociale » ;
IV. – Après l’alinéa 53
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
- après la seconde occurrence du mot : « décret », sont insérés les mots : « qui ne peut être supérieure à la durée d’assurance mentionnée au deuxième alinéa de l’article L. 351-1 du code de la sécurité sociale » ;
La parole est à M. Henri Cabanel, pour présenter l’amendement n° 3103 rectifié.
M. Henri Cabanel. Cet amendement précise les conditions de départ pour les carrières longues. Ainsi, un assuré qui remplit les conditions de début d’activité et qui atteint l’âge du départ anticipé auquel il a droit pourra bénéficier d’une retraite à taux plein si sa durée de cotisation effective atteint la durée d’assurance requise pour le droit commun.
Mme la présidente. La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin, pour présenter l’amendement n° 3726 rectifié bis.
Mme Vanina Paoli-Gagin. Défendu.
Mme la présidente. L’amendement n° 3099 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, M. Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 11
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…) Après la seconde occurrence du mot : « décret », sont insérés les mots : « qui ne peut être supérieure à la durée d’assurance mentionnée au deuxième alinéa de l’article L. 351-1 du code de la sécurité sociale » ;
II. – Après les alinéas 27 et 37
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« …) À la première phrase du même II, après la deuxième occurrence du mot : « décret », sont insérés les mots : « qui ne peut être supérieure à la durée d’assurance mentionnée au deuxième alinéa de l’article L. 351-1 du code de la sécurité sociale ».
III. – Après l’alinéa 53
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
- après la seconde occurrence du mot : « décret », sont insérés les mots : « qui ne peut être supérieure à la durée d’assurance mentionnée au deuxième alinéa de l’article L. 351-1 du code de la sécurité sociale » ;
IV. – Après l’alinéa 61
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…) À la même première phrase, après la seconde occurrence du mot : « décret », sont insérés les mots : « qui ne peut être supérieure à la durée d’assurance mentionnée au deuxième alinéa de l’article L. 351-1 du code de la sécurité sociale ».
La parole est à Mme Monique Lubin.
Mme Monique Lubin. Nous sommes conscients que la mesure que nous proposons pourra avoir des conséquences importantes d’un point de vue budgétaire, mais il faut prendre en compte les personnes qui auront 43 annuités avant d’avoir atteint l’âge de 64 ans, c’est-à-dire à 62 ans ou 63 ans, sans pour autant relever du dispositif des carrières longues.
Ces cas sont assez complexes, mais ils existeront et ne seront pas anodins. Nous considérons qu’il faut leur permettre de prendre leur retraite dès 43 années de cotisations.
Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 3392 rectifié quater est présenté par MM. Capus, Chasseing, Malhuret, Menonville, Verzelen, Grand, Guerriau, Médevielle, Decool et Lagourgue, Mme Mélot, M. Wattebled, Mme Paoli-Gagin, M. A. Marc et les membres du groupe Les Indépendants - République et Territoires.
L’amendement n° 3408 est présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon.
Ces amendements sont ainsi libellés :
I. – Après l’alinéa 11
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…) À la première phrase, après la seconde occurrence du mot : « décret », sont insérés les mots : « qui ne peut être supérieure à la durée d’assurance mentionnée au deuxième alinéa de l’article L. 351-1 du code de la sécurité sociale » ;
II. – Après l’alinéa 28
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…) À la première phrase du II, après la seconde occurrence du mot : « décret » sont insérés les mots : « qui ne peut être supérieure à la durée d’assurance mentionnée au deuxième alinéa de l’article L. 351-1 du code de la sécurité sociale » ;
III. – Après l’alinéa 38
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…) À la première phrase du II, après la seconde occurrence du mot : « décret », sont insérés les mots : « qui ne peut être supérieure à la durée d’assurance mentionnée au deuxième alinéa de l’article L. 351-1 du code de la sécurité sociale » ;
IV. – Après l’alinéa 53
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…) À la première phrase, après la seconde occurrence du mot : « décret » sont insérés les mots : « qui ne peut être supérieure à la durée d’assurance mentionnée au deuxième alinéa de l’article L. 351-1 du code de la sécurité sociale ».
V. – Après l’alinéa 61
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…) À la première phrase, après la seconde occurrence du mot : « décret », sont insérés les mots : « qui ne peut être supérieure à la durée d’assurance mentionnée au deuxième alinéa de l’article L. 351-1 du code de la sécurité sociale » ;
La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin, pour présenter l’amendement n° 3392 rectifié quater.
Mme Vanina Paoli-Gagin. Défendu.
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 3408.
Mme Raymonde Poncet Monge. Je ne répéterai pas ce qui a déjà été dit. Le Gouvernement assure qu’un salarié en carrière longue ne pourra pas travailler au-delà de 43 annuités. Encore faudrait-il que cela soit garanti !
Dans son dispositif de carrières « super-longues », le Gouvernement, en présentant son projet de loi il y a un peu plus d’un mois, avait oublié ceux qui commencent à travailler à 18 ans puisqu’il les contraignait à cotiser 44 ans. Et il me semble que c’était aussi le cas pour ceux qui avaient commencé à travailler à 16 ans.
Mme la Première ministre s’était empressée de corriger le tir devant cette injustice par trop flagrante en annonçant que cet oubli serait corrigé, sous l’approbation de nombreux groupes à l’Assemblée nationale, notamment – il faut le souligner – le groupe Les Républicains.
Pour corriger le tir, donc, le Gouvernement avait déposé un amendement à l’article 8 qui n’a pas été discuté. Même sans avoir été débattu, il aurait pu être intégré dans le texte présenté au Sénat. Du fait de ce flou, on laisserait certains travailleurs à la carrière longue travailler 44 ans.
Je ne pense pas que le Gouvernement soit opposé à un amendement allant dans le sens de celui qu’il avait déposé à l’Assemblée nationale à la demande des députés Les Républicains, tout comme je n’imagine pas que leurs collègues du Sénat puissent voter contre.
Je ne doute donc pas que ces amendements identiques seront adoptés.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Nous abordons là un sujet bien particulier, celui des carrières longues. Mes chers collègues, chacun va devoir être attentif et bien s’accrocher pour comprendre le dispositif !
Il me semble que, dans la philosophie qui le sous-tendait initialement, ce dispositif avait pour objectif de prendre en compte ceux qui avaient commencé à travailler très tôt et avaient eu une carrière difficile, en étant non formés : je pense notamment à l’artisanat. Voilà ceux qui méritent, compte tenu de l’usure professionnelle découlant d’un métier pénible, de ne pas travailler trop longtemps : de manière générale – je ne parle pas de cas particuliers –, ils doivent partir à la retraite avant les autres.
On estime, et nous sommes d’accord sur ce point, que leur espérance de vie sera moins longue : il est donc tout à fait légitime que la société leur propose de partir plus tôt. L’idée est de permettre à ces personnes de bénéficier, en théorie, d’à peu près la même durée de retraite qu’une personne ayant eu une carrière plus facile.
Alors, pour prendre en compte ces carrières longues, l’article L. 351-1-1 du code de la sécurité sociale prévoit que l’ensemble de ce dispositif – bornes d’âge et durées – est défini par un décret. À partir de là, on peut certes parler des 43 ans d’annuité, de deux, trois ou quatre bornes d’âge, mais, j’y insiste, c’est au décret de prévoir les bornes d’âge et les durées de cotisation.
Si l’on intègre des bornes et des durées dans le dispositif, les conséquences ne sont pas forcément les mêmes. On ne peut pas prévoir telle durée pour tel type de personne, car selon l’âge et le mois de naissance, on entre, ou non, dans le dispositif.
Les 43 années, puisque c’est de cela qu’il s’agit aujourd’hui, correspondent à une durée de cotisation plancher. Ce n’est pas une durée de cotisation plafond ! Tout comme l’âge légal de 64 ans est un âge minimal de départ à la retraite, et non pas un plafond. Il faut faire la même gymnastique d’esprit pour comprendre le dispositif des carrières longues.
Mais si on s’en tenait là, ce serait trop simple, mes chers collègues… Je ne suis pas toujours d’accord avec la position de M. le ministre, mais il partage les principes à la base de mes propositions (Marques d’ironie sur les travées des groupes SER et CRCE.), et je prendrai quelques minutes pour vous les exposer.
Nous avons fait un travail de très longue haleine sur le sujet. Je n’ai pas réussi à élaborer une contre-proposition, raison pour laquelle la commission est plutôt favorable au dispositif du Gouvernement.
S’agissant des carrières longues, la loi prévoit quatre à cinq trimestres cotisés avant la fin de l’année anniversaire. Celui qui a trois trimestres n’entre pas dans le dispositif : c’est la borne suivante.
Dans le droit commun, on part quand on a atteint telle durée, quelle que soit sa date de naissance. Par exemple, si vous avez 43 ans de cotisation, vous partez à la retraite : il n’est pas question des quatre à cinq trimestres avant le début de votre année anniversaire.
Pour compliquer encore les choses, il faut prendre en compte la durée. Quand on la calcule – les 43 ans de cotisation, auxquels on ajoute deux ans en vertu de la réforme Touraine s’agissant de la borne de 16 ans, soit 45 ans –, on ne tient pas compte des mêmes trimestres que dans le régime général.
D’un côté, pour le dispositif des carrières longues, n’entrent en compte que les trimestres cotisés – les gens ont vraiment travaillé – ou réputés cotisés, parce qu’il existe une petite marge de solidarité.
De l’autre, dans le régime général, le système est très solidaire, car il prend en compte non seulement les années cotisées, mais également les indemnités journalières en cas de maladie, le chômage, les trimestres réputés cotisés, mais aussi des trimestres assimilés et des majorations que l’on a déjà évoqués. Aussi, les 43 années ne veulent pas forcément dire 43 ans de travail : elles intègrent des périodes compensées au titre de la solidarité. Le régime général est, j’y insiste, très solidaire.
Cette solidarité ne s’applique pas au régime des carrières longues. Si une personne a quatre à cinq trimestres avant la fin de sa vingtième année – une nouvelle borne –, par exemple en ayant fait une grande école pour laquelle elle est rémunérée, elle entre dans le dispositif et partira à 63 ans.
M. Bruno Retailleau. Polytechnique !
M. René-Paul Savary, rapporteur. C’est un exemple, l’école des impôts en est un autre.
Ces personnes bien portantes, qui ont un métier peu usant même si leur carrière n’est pas forcément facile, partiront à 63 ans.
En revanche, une personne qui remplit exactement les mêmes conditions – école, trimestres – mais qui a été malade et a repris le travail après une année d’indemnités journalières, partira à 64 ans, car les trimestres ne sont pas pris en compte de la même façon.
Pour profiter d’un départ anticipé, il faut être bien portant et avoir un métier pas trop difficile. Celui qui a un métier usant et qui a été malade ne bénéficie pas du dispositif.
M. Bruno Retailleau. Interrogation écrite après ! (Sourires.)
M. René-Paul Savary, rapporteur. Le dispositif est donc inégalitaire et illisible, avec ce critère des quatre à cinq trimestres notamment.
On peut toujours prévoir par amendement des bornes ou des durées de cotisation… Mais, je le répète, les dispositions sont fixées par décret. Je donnerai donc, au nom de la commission, un avis de sagesse sur certains amendements, pour essayer de rendre le système le moins inégalitaire possible.
D’autres amendements prévoient d’instituer la durée de 43 ans pour chaque borne. Cela peut être voté – je n’y vois aucun inconvénient –, mais ce n’est pas dire la vérité aux gens, car selon l’âge, le mois de naissance dans l’année, certains devront de toute façon cotiser 44 ans. On n’y peut rien, c’est la loi des mathématiques qui s’impose.
Voilà pourquoi j’aurais souhaité un dispositif plus juste que ce système illisible et inégalitaire, monsieur le ministre, et qui ne soit pas trop coûteux pour les finances publiques. Car s’il est facile de prévoir 43 annuités, on doit faire attention à l’addition à payer résultant de chaque disposition proposée.
Puisque nous faisons une réforme budgétaire pour combler des déficits et non pour les creuser, je préfère des mesures de solidarité en faveur des mères de famille plutôt que des bornes d’âge relativement inégalitaires. Il n’empêche que certaines propositions ont été avancées par Mme la Première ministre : il incombe au Gouvernement de les confirmer.
En attendant, il me semble que nous pouvons voter certaines dispositions, mais que ce serait plus difficile pour d’autres.
Finalement, vous l’aurez compris, je donnerai plutôt un avis défavorable sur les amendements visant à prévoir l’application systématique de la durée de 43 ans. Je pense qu’il ne faut pas aller dans cette voie, parce qu’on ne dit pas la vérité aux Français. Le ministre nous dira comment il compte procéder.
En revanche, en ce qui concerne le nombre de bornes d’âge – trois ou quatre –, on voit bien que ce critère peut être modifié. On n’est pas obligé de prévoir 16 ans, 18 ans, 20 ans et 21 ans ; il aurait été plus simple de mettre 17 ans, 19 ans et 21 ans. Peu importe, je n’ai pas trouvé de solution satisfaisante, tout comme vous, monsieur le ministre.
Sachons nous retrouver sur la nécessité de dire la vérité et de répondre aux problèmes. Ne ratons pas la cible : ceux qui ont commencé tôt et qui ont eu une carrière pénible.
J’émettrai un avis favorable sur l’amendement de M. le ministre, qui élargit la solidarité au travers des trimestres pris en compte par l’AVPF ou l’AVA. Nous attendions cette mesure, car il faut tout de même davantage de solidarité dans ce dispositif de carrières longues.
L’amendement n° 2128 de la commission que je vous ai présenté a été rectifié pour le rendre compatible avec les amendements n° 45, 1918 et 3407.
Mme la présidente. Je suis donc saisie d’un amendement n° 2128 rectifié, présenté par M. Savary et Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, et ainsi libellé :
I. – Alinéa 27
Rédiger ainsi cet alinéa :
…) La seconde phrase du même II est complétée par les mots : « , ainsi que les périodes validées en application des articles L. 381-1 et L. 381-2 » ;
II. – Alinéa 37
Rédiger ainsi cet alinéa :
…) La seconde phrase du même II est complétée par les mots : « , ainsi que les périodes validées en application des articles L. 381-1 et L. 381-2 » ;
Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur.
M. René-Paul Savary, rapporteur. Pardonnez-moi d’avoir été trop long, mes chers collègues, mais je devais vous expliquer le dispositif. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
Mme Sophie Primas. On a le temps !
Mme la présidente. Monsieur le rapporteur, si j’ai bien suivi et sans être excessivement formaliste, vous avez donné un avis de sagesse sur les trois amendements identiques nos 45 rectifié, 1918 et 3407, un avis favorable sur l’amendement du Gouvernement et un avis défavorable sur tous les autres. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre. M. le rapporteur a été très clair (MM. Claude Raynal et Daniel Breuiller ironisent.) sur le dispositif des carrières longues, qui est – tout le monde, tout le monde a pu le constater – extrêmement complexe.
Je voudrais simplement commencer par deux précisions de méthode à l’attention de Mme Poncet Monge.
Vous avez dit, madame la sénatrice, que le Gouvernement avait déposé deux amendements sur les carrières longues. Pour être tout à fait exact, il a déposé, le mardi soir de la deuxième semaine de débats à l’Assemblée nationale, un amendement identique aux amendements nos 45 rectifié, 1918 et 3407, visant à autoriser la création d’une quatrième borne d’âge. À l’occasion du débat du vendredi, ont été évoquées des pistes de travail sur la question de la durée de cotisation, mais aucun amendement n’a été déposé.
La deuxième précision que je vais apporter concerne un propos que vous avez tenu, toujours sur la méthode. Vous avez dit que, puisqu’il a été fait usage de l’article 47-1 de la Constitution, le Gouvernement aurait pu faire figurer son amendement dans le texte transmis au Sénat. Ce n’est pas le cas, puisque cet article et la loi organique qui le décline prévoient que le Gouvernement, en cas d’impossibilité d’une des assemblées à aller au bout de l’examen du texte, transmet à l’autre assemblée son projet de loi initial, auquel il peut ajouter les amendements de son choix, mais à condition qu’ils aient été adoptés par l’assemblée saisie du texte.
Dans la mesure où l’amendement déposé le mardi – je parle de l’amendement identique aux amendements nos 45, 1918 et 3407 – a été déposé sur l’article 8 que l’Assemblée nationale n’a jamais examiné, il n’a pas pu être adopté. L’article 47-1 interdit donc au Gouvernement de l’inscrire dans le texte qu’il vous a transmis.
Sur les différents amendements, je tiendrai un propos général avant de donner un avis sur chacun, en essayant d’être aussi méthodique que la présidente de séance le souhaite.
Je veux évoquer les questions de coûts, puisque le dispositif des carrières longues, au-delà de sa complexité de mise en œuvre, est un dispositif coûteux.
Si nous retenons le principe selon lequel tout assuré qui a travaillé au moins un trimestre avant l’année de ses 21 ans est éligible aux carrières longues, le coût est supérieur à 2 milliards d’euros.
M. Savoldelli vient de proposer que la durée de 43 ans de cotisation non seulement supplante le critère d’âge d’ouverture des droits à la retraite, mais aussi intègre trimestres cotisés et validés. Le coût serait de 7 milliards d’euros, raison pour laquelle nous ne retenons pas cette piste.
Retenir la proposition selon laquelle tout assuré pourrait partir à la retraite sans aucune autre condition que d’atteindre 43 annuités représenterait des dépenses très supérieures par rapport à ce qu’elles sont actuellement, à hauteur de 1,5 milliard d’euros.
Les amendements nos 3103 rectifié et 3726 rectifié bis suppriment le troisième critère cumulatif qui permet actuellement de prétendre à la retraite, à savoir celui de la durée de cotisation – les deux autres critères sont le fait d’avoir cotisé cinq trimestres avant une borne d’âge et d’avoir atteint un âge spécifique d’ouverture des droits – pour un coût supérieur à 300 millions d’euros. Une mesure dans le même esprit avait été examinée à l’Assemblée nationale.
Pour ces raisons, j’appelle le Sénat à faire preuve de beaucoup d’attention. En effet, nous avons souvent évoqué la nécessité que le système de retraite retrouve un équilibre budgétaire et financier. L’addition des mesures adoptées fait s’éloigner cette perspective d’équilibre en 2030, notamment celle à 300 millions d’euros relative à la surcote pour laquelle j’ai émis un avis favorable, car elle est extrêmement utile. Il serait extrêmement négatif que la réforme apporte des améliorations à certaines situations sans nous permettre d’atteindre l’équilibre en 2030.
J’en viens aux avis sur ces amendements.
L’amendement n° 4334 rectifié supprime les trois bornes d’âge. L’avis est défavorable pour les raisons budgétaires que je viens d’évoquer : cette disposition serait extrêmement coûteuse.
L’avis est défavorable sur l’amendement n° 3688 pour les mêmes raisons budgétaires.
Ces raisons expliquent également l’avis défavorable exprimé sur l’amendement n° 2635 rectifié, d’autant plus que les différentes évolutions que nous proposons et que nous soutiendrons dans un instant, comme le fait de fixer une borne d’âge à 21 ans, répondent assez largement aux préoccupations de ses auteurs.
L’avis est favorable sur les amendements nos 45 rectifié, 1918 et 3407. En effet, ils visent à créer une quatrième borne d’âge que le Gouvernement s’était déjà engagé à fixer à 21 ans.
L’avis est défavorable pour l’amendement n° 208 rectifié bis, toujours pour les mêmes raisons budgétaires.
Je demande le retrait de l’amendement n° 4336 rectifié, à défaut l’avis sera défavorable. Avec cet amendement, monsieur Savoldelli, vous n’atteignez pas votre objectif. La disposition présente dans le projet de loi intègre aux trimestres retenus dans le calcul du droit à la retraite anticipée pour carrière longue une partie des congés parentaux au titre de l’assurance vieillesse des parents au foyer ou au titre de l’assurance vieillesse des aidants. Je pense que c’est un progrès.
Je propose, au travers de l’amendement n° 4651 du Gouvernement, d’élargir cette amélioration du régime général à tous les régimes. Votre amendement, monsieur Savoldelli, supprimerait la possibilité de compter les trimestres des parents au foyer ou des aidants dans l’éligibilité au dispositif de retraite anticipée pour carrière longue.
L’avis du Gouvernement est favorable sur l’amendement n° 2128 rectifié de la commission.
Il est défavorable sur l’amendement n° 3580, toujours pour des raisons budgétaires.
L’avis est favorable sur l’amendement n° 2129 de la commission.
L’amendement n° 4341 rectifié bis introduit la même mécanique que l’amendement n° 4336 rectifié, je demande donc son retrait.
L’avis est favorable sur l’amendement n° 2130 de la commission.
Les amendements identiques nos 3103 rectifié et 3726 rectifié bis ont trait à la durée de cotisation. Ils s’inscrivent dans la lignée des discussions qui ont eu lieu à l’Assemblée nationale. Ils présentent une difficulté budgétaire du fait de leur coût de 300 millions d’euros et de la nécessité d’atteindre l’équilibre financier au fil des étapes à venir du débat parlementaire, notamment lors de la réunion de la commission mixte paritaire. À ce stade, ne souhaitant pas dégrader, à la sortie de l’examen du texte par le Sénat, les équilibres financiers du système, je demande le retrait de ces amendements même si la question soulevée mérite d’être posée.
Les raisons budgétaires m’amènent à donner un avis défavorable sur l’amendement n° 3099 rectifié.
Pour des raisons identiques, je demande le retrait des amendements nos 3392 rectifié quater et 3408.
Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Lubin, pour explication de vote.
Mme Monique Lubin. Monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, vous parlez tout le temps de contraintes budgétaires. Nous l’avons dit et je le répète : c’est bien la preuve que le véhicule législatif choisi n’est pas le bon. (M. René-Paul Savary, rapporteur, proteste.) En effet, toutes les questions relatives aux salariés arrivant en fin de carrière, à ceux qui ont du mal à la terminer ou à ceux qui travaillent depuis longtemps ne peuvent être abordées que sous le prisme budgétaire, puisque le projet de loi actuel est un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale. Or il faudrait aller bien au-delà.
Monsieur le rapporteur, j’ai noté votre expression : « Il ne faut pas rater la cible. » Les travailleurs de longue durée sont de fait la cible de ce projet de loi.
M. René-Paul Savary, rapporteur. Non ! Ce sont les carrières longues !
Mme Monique Lubin. Le problème est bien là. Vous avez suffisamment reproché à la gauche la réforme Touraine. Puisque les personnes nées après 1973 ont vu leur nombre d’années de cotisations relevé à 43, fallait-il vraiment se tourner vers ceux qui, nécessairement, travaillent depuis plus longtemps ? Voilà la cible ! Ce projet de loi ne la rate pas, c’est le moins que l’on puisse dire !
Il faut dire la vérité : selon la date de naissance, ces 43 ans peuvent en devenir 44. Par exemple, étant née pour ma part en 1963,…
M. Vincent Éblé. Quelle belle jeunesse !
Mme Monique Lubin. … cette réforme me fera travailler jusqu’à 62 ans et 9 mois. J’aurai 62 ans en 2025, mais je suis née en juillet. Dommage ! Je n’aurai pas atteint l’âge légal de départ en 2025, je devrai donc attendre 2026, soit un an de plus.
Personnellement, ce n’est pas grave, mais, pour mes copines du secteur agroalimentaire qui éviscèrent des canards dans les Landes, je peux vous assurer que ce n’est pas du tout réjouissant. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Je rejoins M. le rapporteur sur la difficulté de prendre des choix éclairés. Il est compliqué d’atténuer la brutalité de cette réforme. Cette dernière conduisait, dans sa version initiale, à des aberrations pour les départs à la retraite anticipés sur critères de pénibilité ou de carrière longue, pour lesquels le temps de travail augmente, comme pour tout le monde, de deux ans : le nombre d’annuités pouvait s’élever à 44 ou à 45, bien au-delà de la limite pour prétendre au taux plein… Il a donc fallu que le Gouvernement bricole quelque chose de compliqué pour le corriger. La moitié de son temps passé à expliquer la réforme est donc consacrée à montrer comment il avait consenti à des mesures « sociales », notamment sur les carrières longues.
Le rapporteur utilisait les mots « illisible » et « inégalitaire » au sujet de la complexité du dispositif des carrières longues, des mots qui s’appliquent bien à la loi elle-même. Ce dispositif a tellement suscité de mécontentement et d’oppositions qu’il a fallu faire là aussi du bricolage… Bravo à ceux qui ont suivi l’explication de M. le rapporteur !
En ce qui concerne les raisons budgétaires qui ont été avancées, le Gouvernement vise 18 milliards d’euros de recettes et n’accepte des mesures d’atténuation de la brutalité de la réforme qu’à hauteur de 3 milliards d’euros, même s’il parle de 6 milliards d’euros, ayant cru par erreur avoir reculé à 60 ans l’âge de la retraite anticipée pour incapacité permanente.
Le tableau d’équilibre budgétaire ayant été construit pour être à somme nulle en 2030, cette erreur dégage 3 milliards d’euros pour le Gouvernement. Les marges de manœuvre budgétaires sont donc réelles. Vous avez, monsieur le ministre, 3 milliards d’euros qui vous permettent d’accepter nos amendements.
Mme la présidente. La parole est à M. Bruno Retailleau, pour explication de vote.
M. Bruno Retailleau. Je souhaite expliquer le vote de mon groupe sur cette série d’amendements. Je sais parfaitement quelles sont les réticences de notre rapporteur au sujet des extensions du dispositif des carrières longues, ces craintes étant, il me semble, assez partagées par la commission des affaires sociales.
Nous calibrerons nos votes en suivant deux principes : ne pas faire perdre son sens à la notion de carrière longue, faire en sorte que la quasi-généralisation de ce dispositif ne mette pas à mal les principes généraux de notre système par répartition.
Une note récente l’a montré : désormais, les bénéficiaires d’une retraite anticipée pour carrière longue ont, au moins, la même espérance de vie que ceux qui n’en bénéficient pas. Les conditions ne sont plus du tout les mêmes que celles qui, en 2003, justifiaient le système créé par François Fillon. D’abord, la moindre espérance de vie que venait compenser le dispositif de carrière longue n’existe plus. Ensuite, chez ceux qui bénéficient de ce dernier, on retrouve des personnes ayant eu un métier peu pénible et dont le niveau scolaire est élevé. En étendant les carrières longues à l’infini, des élèves de Polytechnique, rémunérés et commençant à travailler à 20 ans ou 21 ans, pourraient partir à la retraite à 63 ans.
Face à ce problème, nous accepterons la proposition de quatrième borne d’âge fixée à 21 ans et voterons en faveur des amendements tendant à la créer.
En revanche, pourquoi n’ira-t-on pas dans le sens de la généralisation à tous des 43 annuités ? Cette généralisation écraserait, si j’ose dire, la mesure d’âge par rapport au nombre d’annuités et ferait ainsi perdre son sens à notre système actuel. Ce système repose sur un équilibre : la durée de cotisation est prioritaire, puis la mesure d’âge représente un filet de sécurité. Pour cette raison, pour être responsables, ne pas trop dépenser et pour financer la mesure relative aux mères de famille adoptée tout à l’heure, nous ne voterons pas en faveur des amendements généralisant les 43 annuités.
Mme Monique Lubin. Incroyable !
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe, pour explication de vote.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. J’essaie de comprendre. M. Retailleau vient d’expliquer qu’on pouvait sortir de l’École Polytechnique et bénéficier du système de carrière longue. Je ne pense pas que tout le monde ici ait fait Polytechnique pour comprendre le dispositif que notre collègue René-Paul Savary s’est évertué à nous décortiquer. (Sourires.)
Avouons que ce système n’est pas simple. Compte tenu de l’entrée en ligne de compte de plusieurs paramètres, j’ai bien compris qu’il s’agit de renvoyer à un futur décret le soin de réussir une mission presque impossible : maintenir dans ce dispositif une certaine équité.
Le groupe Union Centriste souhaite en lisser les bénéfices, même si je sais que cela peut avoir un coût. Ainsi, commencer à travailler à 14 ans ou avant entraînerait une ouverture des droits à 58 ans, après 44 années d’activité.
M. René-Paul Savary, rapporteur. Actuellement, c’est 45.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. En effet, monsieur le rapporteur, on peut donc parler de progrès. Commencer à travailler à 15 ans permettrait également de partir à la retraite à 58 ans, mais la durée de cotisation ne serait que de 43 ans. Commencer à 16 ans entraînerait un départ à 60 ans : la durée de cotisation pourrait donc être de 44 ans. Je peux continuer ainsi jusqu’à 21 ans. Le dispositif est sinusoïdal.
M. René-Paul Savary, rapporteur. Ou en marches d’escalier.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Appelez-le comme vous voulez. Quand l’entrée en activité a lieu entre 14 ans et 21 ans, les durées de cotisation serpentent de 43 à 44 ans.
Avouez-le, monsieur le ministre : ce n’est pas simple à comprendre. Si vous arrivez à convaincre cette assemblée, tant mieux, mais je doute, en tout cas, que nous puissions convaincre la population que ce dispositif est équitable et apporte un progrès social évident.
Mme la présidente. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.
M. Fabien Gay. Monsieur le ministre, mes chers collègues, heureusement que l’article 38 du règlement n’a pas été appliqué à l’explication apportée par M. le rapporteur : dix minutes n’ont pas suffi à nous faire comprendre le dispositif proposé. (Sourires sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST, ainsi que sur des travées du groupe UC.) Le comprendre est difficile, c’est vrai ; déjà hier, nous interrogions le rapporteur et le ministre à ce sujet.
Comme notre collègue vient de l’indiquer, nous ne comprenons pas pourquoi certains ayant commencé à travailler à 15 ans partiraient au même âge que ceux ayant commencé à 16 ans. Cela représente une année de cotisation supplémentaire pour les premiers. Le cas est le même pour les personnes ayant commencé à travailler à 17 ans et à 18 ans, et ainsi de suite.
L’effet de ciseaux montre que le dispositif ne fonctionne pas. L’équité et l’égalité sont mises en avant, mais celui ou celle qui a commencé à travailler à 15 ans devrait pouvoir partir avant celui ou celle qui a commencé à 16 ans ou à 17 ans. Cette logique nous semble implacable.
M. Retailleau est intervenu au sujet des carrières longues. Je pense que nous ne rencontrons pas les mêmes personnes : celles et ceux qui ont commencé à travailler à 15 ans ou 16 ans et avec lesquels mon groupe échange n’ont pas fait Polytechnique. En général, ils ont été en apprentissage, leur carrière est dure, le métier difficile. Évidemment, leur situation peut évoluer – heureusement ! –, mais souvent ils se retrouvent à la fin de leur carrière en incapacité ou, pour en revenir au constat précédent, en inactivité.
Cette réforme les pénalisera donc doublement : au début de leur carrière et à la fin. M. le ministre peut-il nous apporter des précisions sur l’effet de ciseaux ? Cette mesure sur les carrières longues est un statu quo déguisé en progrès social.
Mme Éliane Assassi. J’ai compris ce qu’il a dit !
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Breuiller, pour explication de vote.
M. Daniel Breuiller. Je l’avoue très honnêtement : je n’ai pas fait Polytechnique. Dès lors, je ne comprends pas tout au dispositif. Je remercie le rapporteur de l’avoir tout de même éclairé et détaillé, malgré sa complexité : facteurs multiples, mesures d’âge… J’ai compris qu’en rester au texte dans son état actuel maintiendrait des inégalités, comme l’ont souligné nos discussions : certains doivent-ils vraiment travailler plus longtemps que d’autres ?
Au fond, comme je l’ai également compris, le rapporteur a concédé à une ou deux reprises que nos propositions seraient plus justes, mais qu’elles étaient trop chères. Être juste à condition de ne pas être trop cher,…
M. René-Paul Savary, rapporteur. Je n’ai pas dit cela !
M. Daniel Breuiller. … j’ai du mal avec cet argument, sans doute parce que je conteste cette loi…
J’avais pourtant cru comprendre que notre collègue Pradié à l’Assemblée nationale défendait, au nom de la justice, la même durée de cotisation pour tout le monde.
Je n’ai pas tout compris, je l’admets de nouveau, mais, comme l’a indiqué mon collègue Fabien Gay, comprenons que ceux qui commencent à travailler à 15 ans ou 16 ans sont rarement ceux qui ont fait Polytechnique. Un surdoué y ayant été admis à 16 ans se trouve peut-être dans le lot, mais cela doit être assez rare ! Il s’agit plutôt de jeunes entrés en apprentissage et dont le métier est difficile.
Pour ma part, je le reconnais, je préfère la justice à l’équilibre financier d’une loi injuste. Je voterai donc en faveur des amendements qui défendent l’application à tous des 43 années de cotisation. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Olivier Dussopt, ministre. J’apporte quelques éléments pour – je l’espère – éclairer le débat.
D’abord, Mme Lubin déclarait qu’il était dommage que le véhicule législatif prenne la forme d’un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale, car cela donnerait une connotation budgétaire aux débats. Je peux vous garantir, en souriant, que si nous avions choisi de passer par un projet de loi ordinaire, mon souci de l’équilibre budgétaire d’ici à 2030 aurait été le même. Si le système n’est pas rééquilibré, il ne tiendra pas. Choisir comme véhicule un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale ou un projet de loi ordinaire ne change pas mon approche ni celle du Gouvernement.
Ensuite, pour répondre à MM. Gay et Breuiller sur les carrières longues, le système actuel, comme je l’ai indiqué au début de la séance en abordant l’article 8, retient seulement deux bornes d’âge : une à 16 ans et une à 20 ans. Il dépend surtout de trois critères cumulatifs : un assuré ayant cotisé cinq trimestres avant 20 ans pourrait partir à la retraite deux ans avant l’âge légal, soit à l’heure actuelle 60 ans, à condition, premièrement, d’avoir cotisé cinq trimestres avant cette borne, deuxièmement, d’avoir atteint ses 60 ans et, troisièmement, d’avoir réuni, pour l’instant, 42 annuités, soit 168 trimestres cotisés ; il s’agira de 172 trimestres à l’avenir.
M. le rapporteur a eu une remarque particulièrement juste. En effet, il a indiqué que celles et ceux qui bénéficient d’une retraite anticipée pour carrière longue prise le plus tôt possible sont celles et ceux qui ont une carrière particulièrement linéaire, sans exposition à des périodes de chômage ou d’arrêt maladie qui excéderaient quatre trimestres à l’échelle de leur carrière. Finalement, ceux qui ont les carrières les plus difficiles, marquées soit par la précarité soit, les deux pouvant être liés, par des problèmes de santé, sont écartés du bénéfice effectif de la retraite anticipée. Lorsque, actuellement, ils atteignent leurs 60 ans, ils ne sont pas en mesure de justifier de 158 trimestres pleinement cotisés. Il ne s’agit donc pas d’un effet ciseaux, mais d’un effet de perforateur et de mâchonnement,…
M. Fabien Gay. Il faut choisir entre les ciseaux et le perforateur !
M. Olivier Dussopt, ministre. … car la carrière se trouve perforée et donc la borne de départ mâchonnée tant cette dernière dépend de situations individuelles et tant il est impossible que les parcours suivent un tracé tout à fait rectiligne.
M. Vanlerenberghe l’évoquait également il y a un instant. Il déclarait que l’âge de départ à la retraite anticipée suivrait, en fonction de l’âge de début d’activité, une courbe sinusoïdale dès lors que les bornes d’âge seraient fixées de deux ans en deux ans, et non année par année.
Votre raisonnement, monsieur le sénateur, tiendrait parfaitement dans la seule hypothèse où les assurés commenceraient à travailler le jour de leur anniversaire. S’ils se mettaient à travailler trois, quatre ou cinq mois après, selon une rentrée scolaire ou l’obtention d’un diplôme, les bornes exploseraient, pour ainsi dire ! Certains assurés en arriveraient parfois à travailler 44 ans pour pouvoir prétendre à la retraite anticipée tandis que d’autres n’auraient besoin que de 43 ans tout juste ; de fait, la plupart des assurés devraient cotiser 43 ans et trois, quatre ou cinq mois, en fonction, simplement, de leur parcours de vie.
J’invite le Sénat à ne pas porter d’attention excessive à la borne d’âge fixée à 16 ans. Comme M. Vanlerenberghe l’a également souligné, ceux qui ont commencé à travailler à 14 ans doivent pouvoir partir à la retraite beaucoup plus tôt, donc ne pas nécessairement attendre l’âge de 58 ans. Or ce cas de figure est devenu extrêmement rare. (Mme Monique Lubin proteste.) Le départ à la retraite anticipée en ayant validé cinq trimestres avant ses 16 ans concerne quelques dizaines de personnes par an tout au plus, un peu moins de 200 à l’heure actuelle.
La raison est évidente : l’obligation de scolarité jusqu’à 16 ans a été décidée en 1959. Ainsi, ceux qui ont commencé à travailler avant 16 ans en dérogeant à cette obligation sont soit des assurés dont la liquidation intervient après avoir commencé leur carrière avant 1959 – ce reliquat statistique est de plus en plus rare – soit des assurés bénéficiant d’un statut des plus exceptionnels. Actuellement, les personnes qui commencent leur vie active avant 16 ans le font généralement au travers de dispositifs de préparation à l’apprentissage, non assujettis à cotisations et n’entrant donc pas dans le cadre de la borne en question, puisque ces dispositifs sont assimilés à de la formation.
Voilà l’équation actuelle. Elle est compliquée et renvoie aux parcours de vie et de carrière de chacun, avec des conséquences financières non négligeables.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. René-Paul Savary, rapporteur. Vous avez compris nos préoccupations, monsieur le ministre. J’ajouterai une chose : si tout le monde était soumis aux 43 annuités, la notion de carrière longue n’aurait plus lieu d’être ; il s’agirait de carrières comme les autres. Il faudrait dès lors élaborer un dispositif pour prendre en compte les carrières précoces.
Plus la retraite est anticipée, plus longue sera la retraite : il ne faut donc pas rater la cible, c’est-à-dire concentrer la retraite anticipée sur les personnes dont le métier est pénible, qui ont commencé à travailler tôt. (Exclamations sur les travées du groupe CRCE.)
Mme Monique Lubin. Pour cela, rejetons la réforme !
M. René-Paul Savary, rapporteur. Ces personnes sont usées au bout d’un certain nombre d’années. Le système actuel est trop compliqué.
Le dispositif proposé actuellement, dont la philosophie reste la même, gomme certaines injustices, même s’il ne les gomme pas toutes. Je demandais pour cette raison à M. le ministre d’essayer d’en gommer encore plus en améliorant les dispositions.
Notre système de retraite par répartition est déjà en déséquilibre, ce qui conduira dans les prochaines décennies, si nous ne faisons rien,…
M. Fabien Gay. Ne faites rien !
M. René-Paul Savary, rapporteur. … les pensions à poursuivre leur baisse relative par rapport au revenu moyen. (Exclamations sur les travées des groupes SER et CRCE.) Partir du principe selon lequel les 43 annuités sont non pas un plancher, mais un plafond conduirait, pour équilibrer le système…
M. Fabien Gay. À d’autres sources de financement !
Mme Émilienne Poumirol. Trouvez d’autres recettes !
M. René-Paul Savary, rapporteur. … sans même améliorer les pensions, à fixer la généralisation non à 43 mais à 45 annuités ! (Protestations sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
Mme Laurence Cohen. Les Français ont compris !
M. René-Paul Savary, rapporteur. Le système est certes complexe, mais faire des raccourcis ne permet pas forcément d’atteindre son objectif.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Luc Fichet, pour explication de vote.
M. Jean-Luc Fichet. Monsieur le ministre, personnellement, voyez-vous, je vous admire. Tout à l’heure, vous nous avez fait un exposé d’à peu près quinze minutes sur les départs anticipés ; nous venons de passer de nouveau cinq minutes à essayer de comprendre la complexité du dispositif de carrière longue. Je peux vous assurer qu’il est totalement incompréhensible pour le citoyen lambda…
M. Jean-Luc Fichet. … qui voudrait savoir à quel moment il partira à la retraite. Pour ma part, je ne vois pas bien comment lui expliquer s’il relève ou non des carrières longues, s’il lui manque un trimestre ou semestre ou non, et donc s’il peut prétendre à un départ anticipé. Tout cela devient extrêmement compliqué. Je salue aussi le travail du rapporteur qui a démontré sur ce point sa compréhension assez parfaite des mécanismes.
Nous parlons souvent de la complexité de notre administration. Quand on veut la contacter pour obtenir des informations, il est difficile d’y accéder : il faut désormais prendre des rendez-vous et remplir des dossiers. Je souhaite vraiment bien du plaisir aux personnes qui seront concernées par les dispositifs de cette réforme.
Au sujet des départs anticipés, les personnes frappées d’un handicap ou en difficulté devront tout de même – je le rappelle – travailler deux années de plus, ce qui m’inquiète. Cette réforme des retraites sera marquée par ce dispositif de carrière longue en plus de l’être par l’article 7. Tout d’un coup, que le travail soit une source d’épanouissement ou un exercice difficile sur le plan physique ou mental, les personnes qui mériteraient une retraite à partir de 50 ans ou de 55 ans du fait de l’effort double demandé verront leur âge de départ non pas avancé mais, au contraire, reculé de deux ans. Une fois de plus, faire entendre cela à quelqu’un est bien difficile.
Mme la présidente. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.
Mme Émilienne Poumirol. Monsieur Dussopt, vous vouliez rassurer, comme vous le disiez, Mme Lubin en précisant que, projet de loi ordinaire ou projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale, votre souci de l’équilibre reste le même. C’est là où le bât blesse.
En matière de budget, un équilibre s’établit en fonction, d’un côté, de recettes et, de l’autre, de dépenses. En ce qui vous concerne, la diminution des dépenses est privilégiée. Vous ne voulez pas entendre parler d’augmentation des recettes. Suivant le dogme du moins d’impôts et des exonérations, vous avez multiplié – je n’y reviendrai pas – les cadeaux faits aux plus riches. Puisque vous ne voulez pas entendre parler de recettes, vous avez refusé tous nos amendements.
Comme d’autres sur ces travées, je préfère la justice aux questions budgétaires. Tous ceux qui ont réuni 43 annuités avant l’âge de 64 ans devraient pouvoir partir à la retraite. C’est une question de justice !
M. Patrick Kanner. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à M. Jérôme Durain, pour explication de vote.
M. Jérôme Durain. Le débat sur cet article souligne l’enjeu de clarté et d’intelligibilité de la loi pour nos concitoyens. Bien évidemment, la question de la justice est posée, et les exemples donnés par mes collègues montrent à quel point cette réforme, en particulier pour ce qui concerne les articles 7 et 8, est considérée comme injuste.
J’ai reçu aujourd’hui par mail, comme vous tous sans doute, parce que nous sommes suivis par nos concitoyens sur les réseaux, un témoignage, que je veux vous livrer : « Je vis dans un hameau près de Louhans et je vous contacte concernant la réforme des retraites, et plus exactement sur le début de son application pour les personnes nées après le 1er septembre 1961 – ce qui est mon cas – et qui auront trois mois de plus à faire. Je trouve plus logique et en cohérence avec l’ensemble de la démarche que le démarrage se fasse sur une année pleine. Pourriez-vous prendre en compte cette demande dans le cadre d’une éventuelle négociation ? Notre Première ministre, née en 1961, qui n’est pas concernée par la réforme, pourra peut-être être sensible à cette demande ? » Certes, il s’agit d’un exemple parmi d’autres !
Quoi qu’il en soit, les gens n’y comprennent rien !
M. René-Paul Savary, rapporteur. Oui ! C’est le système français !
M. Jérôme Durain. La seule chose que les gens ont comprise, c’est que la réforme était injuste. S’il vous plaît, pouvons-nous répondre aux reproches d’injustice, d’inutile complexité et d’inintelligibilité émanant de ceux qui auront à vivre les effets de cette réforme ?
Mme la présidente. La parole est à M. Claude Raynal, pour explication de vote.
M. Claude Raynal. Très sincèrement, à ce point du débat, malgré les efforts des uns et des autres pour expliquer le dispositif – je salue à cet égard les explications de M. le rapporteur –, j’ai l’impression qu’on vote tout en aveugle. Qu’il s’agisse du coût des mesures, de leur équilibre ou de leur bilan, nous ne savons rien !
Ce qui me rassure, c’est que le rapporteur – je l’ai dit hier ou avant-hier – est honnête dans sa réflexion. Ainsi, quand il ne sait pas ou quand il pense qu’on pourrait faire mieux, il le dit, ce qui est une bonne chose.
Il ne s’agit pas de mathématiques claires et identifiées permettant de faire des sommations, mais tout de même !
Pour ce qui concerne les départs anticipés, quelles auraient pu être les différentes propositions ? Nous n’en savons rien ! Il y en a une sur la table, dont nous ne connaissons pas exactement le coût.
Pour les carrières longues, même combat ! On pourrait faire mieux. Ce n’est pas très bon, ce n’est pas très bien, c’est peut-être un peu moins coûteux que si c’était mieux. Soit !
Pour les contrats seniors, on nous parle de 800 millions d’euros ou de 1,2 milliard d’euros, on ne sait pas trop, la tête nous tourne.
Carrières progressives, le sujet viendra plus tard, mais la situation sera identique. On nous donnera un coût, mais saurons-nous s’il est exact ?
Bref, j’aurais aimé, monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, que nous disposions d’un petit tableau pour savoir ce que nous sommes en train de faire. Combien coûtent les opérations qu’on nous propose ? Si on faisait mieux, combien cela coûterait-il ? Certes, c’est un choix, mais le choix des sucres, nous sommes bien d’accord. Ce n’est pas le choix de la réforme, à laquelle nous nous opposons. Il s’agit des petits « susucres » pour faire passer la réforme, qui ont été négociés dans une salle noire. Ils apparaissent maintenant, mais sans les chiffrages. Veuillez m’excuser de vous le dire ainsi. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE.)
Mme la présidente. La parole est à M. Serge Mérillou, pour explication de vote.
M. Serge Mérillou. Depuis six jours, j’écoute attentivement tout ce qui se dit. Cela me fait penser à ce que disait François Mitterrand voilà quelques années : « Quand je ne serai plus là, il ne restera plus que des comptables et des financiers. » (Mme Sophie Primas s’exclame.)
Monsieur le ministre, vous êtes un comptable et un financier, vous êtes chirurgical et sans état d’âme. Vous ne mesurez plus le coût humain de vos arbitrages. Vous êtes perdu dans vos arbitrages techniques, auxquels, personnellement, je ne comprends plus grand-chose, mais le côté humain, vous l’avez totalement oublié.
En fait, vous êtes un Robin des bois inversé : vous prenez aux pauvres pour donner aux riches. Je le reconnais, vous avez un certain talent dans ce domaine : vous êtes efficace et constant, ce que je regrette.
M. Olivier Paccaud. Quelle caricature !
Mme la présidente. La parole est à Mme Viviane Artigalas, pour explication de vote.
Mme Viviane Artigalas. Encore une fois, on le voit bien, ces dispositifs sont là pour combler des difficultés. Bien évidemment, je n’ai pas compris tout ce que vous nous proposez, monsieur le rapporteur, monsieur le ministre. Je pense d’ailleurs que nos concitoyens ne comprendront pas non plus.
Ce que je retiens, c’est que tout le monde devra travailler jusqu’à 64 ans, ou 63 ans pour certains, je n’ai pas bien compris à quelles conditions.
On vous a proposé quelque chose de bien plus simple : laissons la loi telle qu’elle est actuellement. Les gens travailleront jusqu’à 62 ans, comme ils le souhaitent. S’ils veulent continuer à travailler, qu’ils le fassent !
Laissons les dispositifs de carrières longues ou de départ anticipé tels qu’ils sont. C’est tout de même le plus simple !
Monsieur le ministre, vous nous avez dit que cette réforme, même si elle n’avait pas figuré dans un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale, vous auriez eu à cœur l’équilibre financier. Pourquoi n’avez-vous pas eu recours à un projet de loi ordinaire ? Cela nous aurait permis d’avoir un peu plus de temps.
Au bout du compte, on prend bien les raisons pour lesquelles vous avez agi de la sorte !
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Olivier Dussopt, ministre. Monsieur Raynal, s’agissant des différents scénarios proposés dans ces amendements, j’en ai indiqué le coût. La parole qui est la mienne quand je suis devant vous, pour préciser le coût d’une mesure proposée par des parlementaires, s’appuie évidemment sur le travail de mes services. Toutefois, je n’ai pas la possibilité – c’est plutôt heureux – de modifier les tableaux d’équilibre et l’étude d’impact en même temps que j’annonce les coûts en jeu.
J’ai ainsi estimé le coût que représenterait l’adoption des deux derniers amendements présentés à 300 millions d’euros. J’essaie, chaque fois que c’est possible, en fonction des éléments dont je dispose, de préciser les coûts et d’être le plus clair possible dans mes explications.
Par ailleurs, permettez-moi de revenir sur le caractère complexe de la réforme. Un certain nombre d’entre vous ont déclaré ne pas comprendre la réforme, avoir peur de ne pas la comprendre ou ne rien comprendre du tout.
C’est vrai, c’est extrêmement compliqué. Dans la mesure où de nombreux sénateurs du groupe socialiste nous ont fait ce reproche de la complexité, je rappelle que le système des carrières longues a été créé en 2003. Comme vous, j’ai voté la loi Touraine et, alors, personne n’a proposé de modifier le système des carrières longues, ni de créer une borne à 18 ans ou à 21 ans, ni de modifier les critères d’éligibilité.
Mme Monique Lubin. Et le dispositif Hollande, juste avant ?
M. Olivier Dussopt, ministre. Il y avait certes une mesure de retour à l’âge de 60 ans pour les carrières longues, mais pas plus !
J’ai dit voilà quelques jours, sans doute après m’être quelque peu emporté, que j’ai parfois le sentiment qu’on nous reproche de nous attaquer à ce que d’autres n’ont jamais eu le courage d’ouvrir. C’est le cas pour ce qui concerne les carrières longues. (Protestations sur les travées du groupe SER.)
Enfin, monsieur Serge Mérillou, je vous ai bien entendu. Vous m’avez mis en cause à titre personnel. Selon moi, vos propos sont du même acabit que ceux de votre collègue Éric Kerrouche voilà quarante-huit heures. Cela me laisse penser que, comme beaucoup d’autres, la seule chose qui vous habite désormais est la radicalité et une mélenchonisation de l’esprit. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, INDEP, UC et Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Dans ce débat, le groupe communiste est très à l’aise. En effet, nous n’avons pas soutenu la réforme Touraine (Exclamations amusées sur les travées du groupe UC.), nous nous sommes battus bec et ongles contre cette réforme extrêmement mauvaise, qui a ouvert la porte aux suivantes. Nous nous étions également battus contre les mesures Fillon et nous luttons aujourd’hui contre votre réforme.
Selon moi, notre constance et notre combativité devraient être saluées et applaudies. Nous ne lâchons rien ! (Rires et applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)
Tout cela est mauvais et continue d’être mauvais. Tout ce que vous nous dites depuis le début ne fait que conforter notre position. Majoritairement, les gens perdront deux ans de retraite. Vous restez fidèles à une même logique, en ne prenant pas l’argent là où il se trouve. Vous demandez les mêmes efforts aux plus petits et aux plus fragiles.
Mme Émilienne Poumirol. Oui, aux pauvres !
Mme Laurence Cohen. Concernant les carrières longues, qui font l’objet des amendements en discussion, l’Institut des politiques publiques affirme que le système dit des carrières longues, réservé aux personnes ayant commencé à travailler tôt, ne profite pas principalement à celles qui sont les moins qualifiées ou les plus abîmées par leur emploi…
M. Bruno Retailleau. Exact !
Mme Laurence Cohen. On voit là qu’il y a un vrai problème.
Toutefois, comme vous ne prenez pas l’argent, comme on vous l’a proposé, en créant des recettes nouvelles, vous prenez le problème à l’envers. (Mme Émilienne Poumirol applaudit.)
Rappel au règlement
M. Jérôme Durain. Monsieur le ministre, je sais la charge de travail et l’investissement qui sont les vôtres. Quelles que soient nos opinions, nous ne pouvons que le constater, vous vous êtes dévoué à la cause. Pour autant, je crois que la fatigue et la lassitude vous éloignent de ce qu’a dit à l’instant notre collègue Serge Mérillou, qui n’est certes pas le plus agressif des socialistes ici présents ! (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.)
Quand on s’adresse à vous en évoquant la politique que vous conduisez, il convient de ne pas le prendre à titre personnel ! Il reste quelques jours de débats jusqu’à dimanche soir. Notre volonté n’est pas de mettre en cause personnellement tous ceux qui se trouvent dans cet hémicycle. Notre collègue Serge Mérillou a développé des arguments politiques auxquels notre groupe souscrit.
Article 8 (suite)
Mme la présidente. La parole est à M. Gilbert-Luc Devinaz, pour explication de vote.
M. Gilbert-Luc Devinaz. Je voudrais remercier M. le ministre et M. le rapporteur pour leurs explications. Toutefois, tout cela, comme l’a dit mon collègue Jean-Luc Fichet, est incompréhensible pour nos concitoyens. Vous avez inventé une espèce de fonction en escalier sinusoïde.
Avec mes collègues de la délégation aux entreprises, je suis en train de travailler à la simplification des normes. Le moins que l’on puisse dire, c’est que la réforme proposée, loin de simplifier les choses, est complexe.
C’est la raison pour laquelle, selon moi, la proposition de Mme Lubin est une bonne proposition pour simplifier les choses.
Rappel au règlement
M. Rachid Temal. Monsieur le ministre, nous vous connaissons depuis des années ! Nous pouvons donc nous parler sincèrement et honnêtement.
M. Pierre Ouzoulias. En camarades !
M. Rachid Temal. Nous fûmes camarades, effectivement, et ce n’est pas une insulte dans ma bouche. Chacun a le droit de construire son propre parcours, je ne juge pas.
Simplement, je suis conscient de votre implication et de votre volonté de faire avancer cette réforme. C’est votre droit le plus légitime. Toutefois, il faut accepter que d’autres parlementaires, quelles que soient les travées sur lesquelles ils siègent, aient d’autres opinions que les vôtres et qu’ils les défendent.
Notre collègue Serge Mérillou ne vous a pas cité. Il a simplement évoqué François Mitterrand – il me semble que nous avons son héritage en partage –, qui avait la vision de ce qui arriverait après lui. Ne vous sentez donc pas visé !
C’est vrai, nous n’avons pas les mêmes opinions. Alors que vous nous dites que la solution que vous présentez constitue la seule option, nous estimons qu’il en existe d’autres.
Par exemple, le capital n’a pas été inclus dans cette réforme. Sur la question des fins de carrière, nous avons une vision différente, tout comme pour ce qui concerne la possibilité, pour les étudiants, de racheter des trimestres d’études, sujet abordé par M. Rémi Cardon.
Toutes ces propositions ne sont pas des insultes ! Vous demandez à juste titre qu’on vous respecte. Pourquoi, dès lors, évoquer une « mélenchonisation » des esprits ? Car le respect vaut dans les deux sens !
Vous le savez bien, mon collègue Serge Mérillou et moi-même sommes socialistes et non par LFI. N’entrez donc pas dans ce jeu-là ! Sinon, nous n’y arriverons pas. Vous demandez le respect, ce qui est légitime. Soyez donc respectueux de l’opposition, qui défend des arguments et une vision différente de la vôtre. (Mme Émilienne Poumirol applaudit.)
Article 8 (suite)
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.
M. Pierre Ouzoulias. Je partage totalement ce que vient de nous dire M. Raynal. Selon moi, monsieur le ministre, votre projet présente vraiment une grosse défaillance : il ne comporte pas d’évaluation des conséquences de la réforme sur la fonction publique, et notamment sur le déroulement des carrières dans la fonction publique.
Permettez-moi de prendre l’exemple d’un domaine que je connais un peu, à savoir l’enseignement supérieur et la recherche. Il est évident que, avec l’augmentation de l’âge moyen, vous augmentez aussi le GVT (glissement vieillissement technicité) des établissements de l’enseignement supérieur et de la recherche. Vous le savez, ce GVT n’est pas compensé. Vous allez donc ajouter une charge financière aux établissements de recherche et d’enseignement.
Je crains sincèrement, mais je n’ai pas fait d’évaluation, que cela ne remette en question les engagements pris par votre gouvernement dans le cadre de la loi de programmation de la recherche. Sur ce point, nous aurions aimé avoir une analyse précise, car il y aura de grosses différences dans la durée des carrières.
Par ailleurs – je ne devrais pas le dire ici –, vous donnez la possibilité à certains fonctionnaires de travailler jusqu’à 70 ans. Avez-vous estimé exactement la charge pour l’État d’une telle mesure ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Mélanie Vogel, pour explication de vote.
Mme Mélanie Vogel. Monsieur le ministre, si le dispositif des carrières longues est difficile à comprendre, y compris dans cet hémicycle, le plus problématique c’est qu’il est surtout très compliqué à expliquer aux Françaises et aux Français qui nous regardent. La question de la clarté de la loi est donc posée.
Pour les Françaises et les Français qui nous écoutent, l’important n’est pas de savoir qui, des anciens socialistes ou des nouveaux macronistes, ont voté ou non la loi Touraine.
Mon père, qui a commencé à travailler à 15 ans, se moque complètement de savoir quels sont ceux qui ont voté la loi Touraine et, parmi ces derniers, qui est aujourd’hui contre la réforme.
Il aimerait simplement savoir à quel moment il pourra partir à la retraite. Le vrai problème est là.
Nous vous posons des questions pour vous donner l’occasion d’expliquer clairement aux gens qui regardent à la télévision les débats du Sénat à quel âge ils pourront partir à la retraite, en fonction de l’âge auquel ils ont commencé à travailler. Ces personnes se moquent de savoir si nous sommes ou non devenus mélenchonistes. Comment ce terme peut-il d’ailleurs intervenir dans un débat au cours duquel des sénateurs demandent des explications factuelles sur un dispositif complexe ? Si c’est cela être mélenchoniste, cela en dit plus long sur vous que sur nous ! (Applaudissements sur les travées des groupes GEST et SER.)
Rappel au règlement
Mme Raymonde Poncet Monge. Mon rappel au règlement se fonde sur l’article 36 bis du règlement et concerne les propos tenus par M. le ministre.
Hier, M. Bruno Retailleau a dit exactement la même chose, ce qui témoigne d’une certaine collusion. Selon moi, vous regrettez vraiment, monsieur le ministre, que ce qui s’est passé à l’Assemblée nationale, que vous avez feint de condamner, ne se passe pas au Sénat. Dès lors, vous usez de la provocation.
Vous regrettez vraiment que la droite montre qu’elle ne voulait pas discuter de l’article 7, chose qui n’a pas pu être démontrée à l’Assemblée nationale. Vous regrettez beaucoup que nous dégonflions une à une vos fameuses mesures sociales, qui ne sont que des atténuations – et ce n’est même pas le cas pour les carrières longues ! – de la brutalité de votre réforme.
Enfin, monsieur le ministre, c’est un effet d’optique, comme diraient les médecins. Vous allez à droite, et M. Bruno Retailleau va à l’extrême droite. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.) Tout à fait ! Nous le verrons pour ce qui concerne l’immigration et les questions sociales !
Puisque vous allez à droite et à l’extrême droite, par un effet d’optique, il vous apparaît que les socialistes auraient des positions trop radicales. Ils se « mélenchoniseraient », par transitivité, dans la mesure où Mélenchon représente, pour vous, la radicalité.
Il s’agit donc d’une provocation, que je vous conseille de ne pas tenter trop souvent, monsieur le ministre !
Article 8 (suite)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Michel Houllegatte, pour explication de vote.
M. Jean-Michel Houllegatte. Claude Raynal a dit que nous avancions à l’aveugle. Cela me fait penser à la maxime selon laquelle, si un aveugle guide un autre aveugle, ils tomberont tous deux dans la fosse. Je vous renvoie à cet égard à l’admirable tableau de Brueghel l’Ancien, La Parabole des aveugles. (Sourires.)
À l’heure actuelle, cela signifie qu’on ne peut pas être aveugle à l’inquiétude, l’angoisse et la colère de la rue. Cela veut dire aussi que nous avons un devoir de clarification et de clarté, dans les différents dispositifs que nous mettons en place.
Je comprends que le dispositif des carrières longues, issu de la réforme de 2003, soit devenu, à force de décrets, d’une certaine façon, une usine à gaz. D’où la nécessité de revenir à quelque chose de plus simple, à savoir les 43 années.
L’exemple des polytechniciens a été évoqué. Ils sont salariés de l’État dès leur première année d’études, et pourraient ainsi partir à la retraite plus tôt. Toutefois, ils ont généralement des fonctions de responsabilité, qu’ils occupent assez longtemps.
En revanche, le risque lié au « job d’été » a été évoqué dans notre hémicycle et à l’Assemblée nationale. Des étudiants qui auraient « travaillé » un mois par-ci, un mois par-là bénéficieraient de trimestres comptabilisés pour la retraite, ce qui viendrait perturber le décompte des trimestres, dans la mesure où ceux qui étudient n’ont pas des carrières pénibles.
Mme la présidente. Nous n’avons pas déclenché le compteur, mais n’en profitez pas, mon cher collègue !
M. Jean-Michel Houllegatte. Je termine donc en disant que la situation des étudiants a beaucoup évolué. Ceux qui se penchent sur cette question savent que les jobs d’été sont une nécessité pour les étudiants. Il s’agit également, sans doute, d’une des conditions de la mixité sociale dans l’enseignement supérieur. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Ne pénalisons donc pas ces étudiants, qui, d’une certaine façon, on fait des efforts et pourront peut-être, parce qu’ils auront cumulé des trimestres, partir un peu plus tôt.
Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Féret, pour explication de vote.
Mme Corinne Féret. Sur la question des carrières longues, Ouest France a titré « Une réforme dure à avaler ». Oui, cette réforme est dure à avaler pour celles et pour ceux qui seront concernés demain. Pour tout le monde, y compris pour les carrières longues, ce sera deux ans de plus, puisque l’âge de départ légal à la retraite passera de 62 ans à 64 ans !
Alors que certains, aujourd’hui, peuvent partir à 60 ans, ils travailleront demain deux ans de plus ! Vous nous dites que vous avez fait en sorte d’accompagner les carrières longues. Soit ! Mais ces travailleurs travailleront tout de même plus qu’aujourd’hui.
Cet article, qui est présenté donc comme un texte prévoyant des mesures d’accompagnement pour prévenir les effets négatifs de la réforme, est un trompe-l’œil.
Lorsque la Première ministre a annoncé des mesures d’assouplissement, nous n’y avons plus rien compris. Je veux parler des parlementaires, qui se penchent sur le sujet depuis de nombreuses semaines, mais aussi et surtout de nos concitoyens, qui ne savent plus quelle sera l’année à laquelle ils pourront envisager un départ.
Ce que nous comprenons, ce que tous comprennent, c’est que, demain, ce sera deux ans de plus pour tous. Cela, c’est inacceptable !
M. Xavier Iacovelli. Mais non, justement !
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Jean Verzelen, pour explication de vote.
M. Pierre-Jean Verzelen. Nous sommes à un moment qui me paraît politiquement embêtant. Sans doute y aura-t-il un certain nombre de rectifications de vote concernant l’article 7 voté hier.
Dans le discours ambiant, il y avait quelque chose sur l’aménagement des carrières longues. Pour de nombreux parlementaires, si on avait commencé à travailler avant 21 ans, on pourrait partir après les 43 années de cotisations.
Aujourd’hui, nous nous rendons compte que tel n’est pas le cas. Nous allons nous retrouver dans le tableau incompréhensible aperçu dans Le Parisien voilà quelques semaines : pour l’un, ce sera 43 annuités, pour l’autre, 44 annuités, selon la date à laquelle il a commencé à travailler.
Tout cela est profondément incompréhensible ! Nous nous retrouvons dans la situation de voter un tel dispositif. Moi-même, je me retrouverai demain dans un canton, où l’on me demandera le nombre d’annuités nécessaires. Et je devrai répondre : je n’ai pas compris, je ne peux pas vous expliquer…
M. Bernard Jomier. Eh oui !
M. Pierre-Jean Verzelen. Premièrement, l’équité entre les citoyens n’est pas respectée. Deuxièmement, le dispositif n’a aucune lisibilité. Je l’entends bien, il existe des impératifs financiers. Pour autant, toute réforme doit être non seulement comprise, mais aussi acceptée. Certains sont allés trop loin et ont payé cher l’absence d’acceptabilité de leurs mesures.
Il s’agit d’un point extrêmement important. Si vous avez commencé à travailler avant 21 ans, vous devez cotiser 43 ans : c’est clair, simple et juste. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme la présidente. La parole est à M. Sebastien Pla, pour explication de vote.
M. Sebastien Pla. En 2010, un jeune député socialiste s’opposait avec force au report de l’âge légal de départ à la retraite à 62 ans. Sur les réseaux, il écrivait au sujet de la réforme Woerth : « C’est un recul social pour qui commence à travailler tard et pour les plus précaires. Les critères de pénibilité sont flous. De plus, les contributions des revenus du capital sont symboliques. Je constate que la protestation se radicalise dans la rue et gagne tous les terrains, devant une réforme aussi injuste. »
M. Sebastien Pla. Ce député est aujourd’hui ministre du travail. Il reporte l’âge légal de départ à la retraite à 65 ans, refuse de faire contribuer le capital et la finance, et ignore les messages de la rue depuis plus d’un mois et demi.
M. René-Paul Savary, rapporteur. Nous ne sommes plus dans le débat !
M. Sebastien Pla. Monsieur le ministre, vous nous avez baladés en évoquant 1 200 euros par mois pour tout le monde. Cela n’a pas marché. Vous n’êtes pas crédible. Ce qui me peine, alors que vous parlez de « mélenchonisation », c’est que le président Macron utilise avec cynisme un fusible issu de la gauche pour faire passer une réforme de la droite dure, au plus grand plaisir de la droite sénatoriale. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Demande de clôture
M. Bruno Retailleau. Mes chers collègues, vous poursuivez l’obstruction ! (Protestations sur les travées du groupe SER.) Nous n’avons pas voulu recourir tout de suite à l’article 38, considérant que la question des carrières longues est importante. Nous nous sommes tous très largement exprimés et je demande donc l’application de l’article 38 du règlement. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, UC et RDPI.)
M. Lucien Stanzione. Faiblesse !
Mme la présidente. Je suis saisie, par M. Bruno Retailleau, président de groupe, d’une demande de clôture de la discussion sur les explications de vote des amendements en discussion, en application de l’article 38 du règlement.
Peuvent prendre la parole sur cette proposition un orateur par groupe et un sénateur ne figurant sur la liste d’aucun groupe.
La parole est à M. Bernard Jomier, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
M. Bernard Jomier. Pour ma part, je ne m’étonne pas que M. Retailleau invoque l’article 38. L’un de nos collègues a justement fait remarquer que, après avoir voté l’article 7, il a ensuite compris que, pour ce qui concerne les carrières longues, le compte n’y est pas !
Ne cherchons pas midi à quatorze heures ! C’est la raison pour laquelle huit de nos collègues ont changé leur vote depuis hier. Voilà pourquoi la majorité en faveur de cette réforme est en train de s’écrouler. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.) Voilà pourquoi ça se finira par un 49.3 à l’Assemblée nationale !
M. Bruno Retailleau. Vous ne respectez pas la procédure !
M. Bernard Jomier. Nous avons eu ce débat surréaliste où, voilà quelques instants, M. le ministre s’en est pris à l’un de nos parlementaires, lui qui fait partie d’un gouvernement dont un ministre fait des bras d’honneur à un député,…
Mme Dominique Estrosi Sassone. Quel rapport avec le débat ?
M. Bernard Jomier. … d’un gouvernement sur lequel la Première ministre est incapable de faire preuve d’autorité en prenant une mesure ! Comment pouvez-vous accepter cela ? Telles sont aujourd’hui, en politique, les conditions du débat.
M. Laurent Burgoa. On est loin des retraites !
M. Bernard Jomier. Vous interrompez le débat en recourant à l’article 38, parce que vous êtes face à une difficulté de fond. Au fur et à mesure que nous débattons des détails de cette réforme, vous entendez non seulement nos arguments, mais aussi nos concitoyens, dans vos départements, qui évoquent leur situation. Vous n’entendez pas les polytechniciens, vous entendez les Français, qui racontent les conséquences, pour eux, de cette réforme.
Et en entendant ces Français – car je vous fais crédit d’être à l’écoute de ce que racontent nos concitoyens dans nos départements respectifs –, vous comprenez et vous prenez acte que cette réforme est injuste. M. Retailleau l’a dit très justement tout à l’heure : cette réforme est particulièrement dommageable pour les femmes.
Voilà pourquoi vous interrompez le débat en utilisant l’article 38 ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
Mme la présidente. La parole est à M. Fabien Gay, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
M. Fabien Gay. Monsieur Retailleau, après l’obstruction silencieuse, vous avez fait un choix, voilà deux jours, le jour de la mobilisation sociale énorme et historique contre la réforme, celui de faire de l’obstruction réglementaire. Et maintenant vous franchissez une nouvelle étape : l’obstruction du débat parlementaire ! (Oh ! sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Martin Lévrier. Arrêtez !
M. Fabien Gay. Vous activez l’article 38 au moment où notre collègue Pierre-Jean Verzelen, qui a voté, hier, l’article 7,…
M. Pierre-Jean Verzelen. Non !
M. Fabien Gay. … ou plutôt qui s’est abstenu, dit qu’il est en train de se poser des questions. Tout est en train de s’effriter de votre côté !
Alors que vous disposez d’une majorité écrasante ici au Sénat, vous êtes mis en minorité…
Mme Dominique Estrosi Sassone. Occupez-vous de vous !
M. Fabien Gay. … non par la seule gauche, mais par le peuple français, qui s’est levé massivement.
Et vous utilisez le règlement, qui sert normalement – je vous le redis – à organiser nos débats et notre vie commune, pour régler une question politique…
Mmes Sophie Primas et Françoise Gatel. Non, pour voter !
M. Fabien Gay. … par l’autoritarisme, pour retrouver une autorité politique que vous êtes en train de perdre ! Chaque minute qui passe, dans ce débat, démontre plus encore que la précédente combien l’injustice est flagrante. Vous avez déjà volé les deux plus belles années de leur vie à des millions de travailleurs et de travailleuses.
Nous voilà à débattre de la pénibilité, et – ce n’est pas nous qui le disons ; c’est votre propre camp ! –, de nouveau, le compte n’y est pas. Plus nous allons nous enfoncer dans les articles, l’article 9, l’article 10, l’article 11, plus nous allons mettre au jour qu’il n’y est pas. Il apparaîtra en place publique qu’il n’y aura pas 1 200 euros pour tout le monde, que les 1 200 euros ne concerneront qu’une poignée de Français, et que le compte n’y sera pas non plus en matière de pénibilité.
Au fur et à mesure de l’avancée des articles, vous n’aurez de cesse de museler le débat parlementaire, car certains de nos collègues commencent déjà à voir que cette grande majorité de droite est en train de s’effondrer au moment même où elle se rassemble. Ces collègues de droite soit s’abstiendront soit rejoindront le camp de la gauche pour voter contre ! Vous êtes en train, par le biais du règlement, de régler un débat politique.
Mme la présidente. Veuillez conclure, mon cher collègue.
M. Fabien Gay. Nous continuerons à assumer notre position, jusqu’à l’échec de votre réforme ! (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST.)
Mme la présidente. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
M. Guillaume Gontard. Bruno Retailleau n’était pas là hier soir pour défendre son amendement.
Mmes Dominique Estrosi Sassone et Françoise Gatel. Si, il était là !
M. Martin Lévrier. Il était présent !
M. Guillaume Gontard. Nous avons dû remettre l’examen de son amendement à ce matin, avant de le reporter de nouveau.
Il est bien présent, en revanche, lorsque le débat devient intéressant, c’est-à-dire lorsqu’il ne va pas dans son sens, pour agiter le fameux article 38, qui est devenu très à la mode.
M. David Assouline. « M. Article 38 » !
M. Guillaume Gontard. Mais pourquoi ? Cela vient d’être dit : dès que la tournure du débat ne correspond pas à votre orientation, on voit bien le doute qui s’installe. On l’a vu avec le vote d’hier soir :…
Mme Dominique Estrosi Sassone. Arrêtez !
M. Guillaume Gontard. … la carte de votre partie de l’hémicycle ne s’est pas affichée totalement en bleu. Et on voit bien que, par-ci par-là, petit à petit, le doute s’installe. Vous avez du mal à assumer ce vote de l’article 7, et vous aurez du mal à l’assumer dans vos territoires respectifs.
Vous commencez à douter ; dès que le débat devient un petit peu compliqué, on agite la menace de l’article 38 !
Mme Françoise Gatel. Nous combattons l’obstruction !
M. Guillaume Gontard. Au gré de nos interventions,…
Mme Sophie Primas. Vous vous êtes beaucoup exprimés !
M. Guillaume Gontard. … nombreuses, nous avons soulevé beaucoup de questions. Je m’adresse à M. le ministre : à chaque question, la réponse fuse : « Mélenchon ! ». C’est peut-être un peu limité… Nous demandons des réponses simples !
Prenez l’intervention de ma collègue Mélanie Vogel voilà quelques instants : que répondons-nous aux gens qui nous demandent ce qui va se passer pour eux ?
M. Bruno Retailleau. Elle m’a traité de membre de l’extrême droite !
M. Guillaume Gontard. Nous n’avons pas de réponses. Or, en tant que parlementaires, nous sommes là pour obtenir des réponses lorsque nous nous adressons à M. le ministre ! Nous nous sommes adressés aussi à M. le rapporteur, sans succès. Là encore, pas de réponse.
J’aimerais pouvoir retourner en Isère et répondre de façon claire aux nombreuses questions qui me sont posées, par courriel ou sur le terrain. Des réponses claires, nous n’en avons pas. Vous voyez bien que le doute s’installe, et vous agitez l’article 38 ! (Applaudissements sur des travées des groupes GEST, SER et CRCE.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe, pour le groupe Union Centriste.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. On peut dire que depuis que nous avons commencé ce débat, qui ne date pas d’aujourd’hui, tout le monde a eu l’occasion de s’exprimer, en long, en large et en travers, sur tous les sujets, même à contretemps. Dire que le débat n’a pas lieu, c’est dire quelque chose de faux ! Vous n’avez pas la majorité ; cela vous horripile, je peux le comprendre. Mais c’est la réalité parlementaire : il faut en tenir compte.
Il est normal, me semble-t-il, que vienne un moment où l’on dit « stop », en utilisant cette ressource, l’article 38, qu’offre le règlement du Sénat.
Sur le fond, cette question – on l’a vu – est complexe, puisqu’il s’agit d’améliorer la situation des carrières longues. Le groupe Union Centriste suivra les rapporteurs et leurs recommandations, en veillant au respect de l’engagement de M. le ministre de revoir en commission mixte paritaire les modalités financières qui permettront d’améliorer le bilan financier de cette opération.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Pourquoi pas ici ?
Mme la présidente. Conformément à l’alinéa 3 de l’article 38 du règlement, je consulte le Sénat, à main levée, sur la demande de clôture.
(La clôture est prononcée.)
Article 8 (suite)
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 45 rectifié, 1918 et 3407.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. En conséquence, les amendements nos 3580 et 4341 rectifié bis n’ont plus d’objet.
M. Didier Mandelli. Nous retirons l’amendement n° 208 rectifié bis.
Mme la présidente. L’amendement n° 208 rectifié bis est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° 4336 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 3103 rectifié et 3726 rectifié bis.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 3099 rectifié.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable et que l’avis du Gouvernement est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 239 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 343 |
Pour l’adoption | 93 |
Contre | 250 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix les amendements identiques nos 3392 rectifié quater et 3408.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques.
L’amendement n° 113 rectifié bis est présenté par MM. Menonville, Levi, Guerriau et Wattebled, Mmes Herzog, Ract-Madoux et Mélot, M. Lagourgue, Mme Perrot, MM. Chasseing et Capus et Mme Paoli-Gagin.
L’amendement n° 1071 rectifié est présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Corbisez, Gold, Guérini et Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux.
L’amendement n° 4647 est présenté par M. Fernique, Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
I. – Après l’alinéa 14
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« La durée totale d’assurance et de périodes reconnues équivalentes visée à l’alinéa précédent ne peut dépasser 172 trimestres. » ;
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par quatre paragraphes ainsi rédigés :
…. – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
…. – La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du présent article est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
…. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
…. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à Mme Colette Mélot, pour présenter l’amendement n° 113 rectifié bis.
Mme Colette Mélot. Je retire cet amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 113 rectifié bis est retiré.
La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour présenter l’amendement n° 1071 rectifié.
M. Jean-Claude Requier. Cet amendement de Mme Delattre vise à corriger une injustice.
Le projet de loi prévoit que les personnes qui remplissent les conditions actuelles du dispositif carrière longue continueront de partir à la retraite à 62 ans. Les personnes qui ont eu des carrières très longues, c’est-à-dire celles qui ont commencé à travailler avant l’âge de 20 ans, pourront partir plus tôt sous réserve d’avoir cotisé la durée d’assurance requise majorée d’une année, soit quarante-quatre ans.
Cet amendement vise à faire en sorte que la durée de cotisation n’excède pas quarante-trois ans, c’est-à-dire 172 trimestres, pour les personnes qui justifient d’une carrière très longue. Nous vous proposons d’adopter cette mesure d’équité en faveur de ceux qui ont commencé à travailler très tôt.
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Fernique, pour présenter l’amendement n° 4647.
M. Jacques Fernique. C’est l’Union des entreprises de proximité du Bas-Rhin qui a insisté pour que cet amendement soit présenté ; je l’aurais défendu de toute façon. Il est demandé que pour toutes les personnes justifiant d’une carrière très longue la durée de cotisation n’excède pas quarante-trois ans, soit 172 trimestres.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Nous avons déjà largement eu ce débat – les aléas du processus législatif font que ce sujet est de nouveau soulevé à ce stade de la discussion. Tout le monde a compris que, dans le cadre actuel, la fixation d’une durée de cotisation maximale de quarante-trois ans n’était pas la solution retenue.
Il appartiendra bien sûr au Gouvernement de bien préciser les choses. En attendant, j’émets un avis défavorable sur ces amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre. Avis défavorable également, pour des raisons que j’ai précédemment développées. Monsieur Requier, 172 trimestres divisé par quatre, cela fait bien quarante-trois ans.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 1071 rectifié et 4647.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements identiques.
L’amendement n° 30 rectifié est présenté par Mmes Guidez et Sollogoub, M. Canévet, Mmes Billon et de La Provôté, MM. Capo-Canellas, J.M. Arnaud, Bonhomme, Détraigne, Kern, Levi, Belin et Cadec, Mme Canayer, MM. Chatillon, Chauvet, Decool, Delcros et Duffourg, Mme Herzog, M. Gremillet, Mme Malet, MM. Mandelli et Milon, Mmes Morin-Desailly et Muller-Bronn, M. Pellevat, Mme Perrot, M. Prince, Mme Puissat et MM. Rapin, Ravier et Wattebled.
L’amendement n° 762 rectifié est présenté par Mme M. Carrère, MM. Artano, Bilhac, Cabanel et Corbisez, Mme N. Delattre, MM. Gold, Guérini et Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux.
L’amendement n° 2866 rectifié est présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 3290 est présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Alinéas 15, 28, 38, 49 et 65
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Jocelyne Guidez, pour présenter l’amendement n° 30 rectifié.
Mme Jocelyne Guidez. Cet amendement vise à maintenir la possibilité de prendre en compte des trimestres validés dits assimilés.
L’article 8 du projet de loi prévoit de ne plus retenir que l’obligation d’avoir validé un certain nombre de trimestres cotisés pour pouvoir bénéficier de la retraite anticipée pour travailleur handicapé.
Certes, une telle mesure réduit la durée totale d’assurance requise pour bénéficier du dispositif, mais elle risque surtout de rendre encore plus difficile l’accès audit dispositif, car les trimestres assimilés, mais non cotisés, validés par exemple au titre du chômage, d’un arrêt maladie ou d’un stage, ne sont plus pris en compte.
Si la réduction de la durée d’assurance totale exigée est bienvenue, cet amendement vise à refuser la suppression de la prise en compte des trimestres validés assimilés. Cette suppression est inacceptable s’agissant de personnes qui sont largement touchées par un chômage de longue durée et ont un niveau élevé de fatigabilité.
Cet amendement a donc pour objet de maintenir la prise en compte de trimestres validés assimilés. Mais cette proposition doit aller de pair avec un engagement du Gouvernement à diminuer la durée totale d’assurance et la durée incompressible de cotisation.
Cet amendement a été travaillé avec le Collectif Handicaps.
Mme la présidente. La parole est à M. Henri Cabanel, pour présenter l’amendement n° 762 rectifié.
M. Henri Cabanel. Depuis 2003, une possibilité de départ anticipé à la retraite dès 55 ans est ouverte aux assurés handicapés qui ont accompli, alors qu’ils étaient atteints d’une incapacité permanente d’au moins 50 %, une durée minimale d’assurance, dont une partie cotisée.
Les âges de départ anticipé pour les travailleurs handicapés, fixés par décret, ne devraient pas changer, ce dont nous nous félicitons.
Par ailleurs, la condition de durée d’assurance validée serait supprimée, la seule condition de durée d’assurance cotisée étant maintenue. Grâce à ces aménagements, le nombre de bénéficiaires du dispositif devrait passer de 2 800 à 3 300 personnes.
Pour autant, nous craignons que cela ne rende l’accès au dispositif encore plus difficile. En effet, les trimestres assimilés mais non cotisés, notamment au titre du chômage, d’un arrêt maladie ou d’un stage, ne seront plus pris en compte, ce qui risque en définitive de pénaliser les travailleurs handicapés, plus largement touchés par le phénomène du chômage de longue durée.
Aussi proposons-nous de maintenir la prise en compte de trimestres validés assimilés.
Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Lubin, pour présenter l’amendement n° 2866 rectifié.
Mme Monique Lubin. Cet amendement est défendu, madame la présidente.
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 3290.
Mme Raymonde Poncet Monge. Il est vrai que la mesure dont nous sommes en train de débattre se voulait positive, mais elle se révèle contre-productive.
Il n’est pas acceptable de ne pas comptabiliser les trimestres validés assimilés de personnes qui sont largement touchées par le chômage de longue durée et dont le niveau de fatigabilité est élevé.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Le sujet de l’invalidité étant par définition très complexe, la réponse qui y est apportée ne saurait être simple ni simpliste.
Les dispositifs de retraite anticipée pour handicap sont particulièrement complexes ; nous venons d’en avoir un aperçu. Il est impossible de trouver un dispositif qui s’adapte à toutes les personnes.
Le handicap, quand il vient de bonne heure, est parfois consécutif de facteurs accidentels, et il marque l’ensemble de la carrière. Mais la situation n’est pas tout à fait la même lorsque le handicap apparaît passé un certain âge. L’âge moyen auquel est reconnu le handicap est de 46 ans. Vous voyez donc, mes chers collègues, que si l’on décide de prendre en compte les trimestres validés assimilés, on ne répondra pas à l’enjeu de ceux qui partent tard à la retraite.
J’ai analysé tous les amendements proposés par le Collectif Handicaps. Philippe Mouiller m’a parlé du sujet ; Jocelyne Guidez connaît bien le dispositif. Élisabeth Doineau et moi-même avons travaillé en commun pour vous présenter les propositions les plus cohérentes possible.
Les personnes concernées seront plus nombreuses si nous retenons la disposition telle qu’elle figure dans le texte actuel. Par ailleurs, il me semble qu’il vaut mieux ne pas en rajouter dans la complexité. Pour une fois, on a trouvé matière à simplifier un peu : c’est mieux. J’émets donc un avis défavorable sur l’ensemble de ces amendements, après une large réflexion.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre. Même avis.
J’ai développé un exemple ce matin, en réponse à une sénatrice du groupe CRCE.
Si nous ne changeons pas la loi, il faut, pour qu’une personne née en 1972 puisse prendre sa retraite à 55 ans, qu’elle ait validé 132 trimestres, dont 112 doivent avoir été cotisés. Nous proposons de conserver uniquement la condition relative aux 112 trimestres cotisés, sans que la personne ait à justifier que 20 trimestres supplémentaires auraient été validés, quand bien même ils n’auraient pas été cotisés.
Cette simplification va permettre à plus de personnes en situation de handicap d’accéder à ce départ anticipé : on passe de deux conditions obligatoirement cumulatives à une seule condition, qui est par ailleurs la plus « basse ».
Je demande le retrait de ces amendements. À défaut, l’avis du Gouvernement serait défavorable.
Mme la présidente. Madame Guidez, l’amendement n° 30 rectifié est-il maintenu ?
Mme Jocelyne Guidez. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 30 rectifié est retiré.
Je mets aux voix les amendements identiques nos 762 rectifié, 2866 rectifié et 3290.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 240 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 343 |
Pour l’adoption | 105 |
Contre | 238 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 4337 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli, est ainsi libellé :
Alinéas 16 et 17
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Pierre Laurent.
M. Pierre Laurent. Depuis le début de l’examen de l’article 38 – pardon ! – de l’article 8 (Sourires.), vous nous présentez systématiquement des reculs sociaux comme des avancées ; nous avons eu le débat sur les départs anticipés pour carrière longue et sur les retraites progressives. Nous traitons maintenant de la question de l’âge de départ anticipé pour invalidité ou inaptitude.
Notre amendement vise à supprimer la limitation de l’âge de départ anticipé pour invalidité ou inaptitude. Dans les faits, monsieur le ministre, ce que vous présentez comme une avancée n’en est absolument pas une. Aujourd’hui, l’âge de départ à taux plein pour invalidité ou inaptitude est fixé à 62 ans. Vous le maintenez à 62 ans et, à vous entendre, puisque par ailleurs vous reculez l’âge légal de départ à 64 ans, ce maintien à 62 ans devient une avancée ! Mais il n’y a là aucune avancée : c’est un statu quo !
Or, en la matière, nous devrions au contraire réfléchir à faire de nouveaux progrès, puisque cette catégorie de la population vit en moyenne presque cinq années de moins que les autres retraités et touche une pension en moyenne inférieure de 30 %. Oui, il y aurait donc des choses à modifier et à améliorer pour ceux qui sont dans ce genre de situations ! Mais ce que vous présentez comme une avancée n’en est pas une : elle est le maintien de la situation actuelle pour ces salariés.
Nous proposons, nous, de supprimer la limitation de l’âge de départ anticipé pour invalidité ou inaptitude, à la condition que cette mesure soit complétée par des dispositions nouvelles que nous avons déjà proposées et que nous continuerons de proposer, permettant de calculer différemment, pour la revaloriser, la pension de ces retraités, et d’améliorer les conditions de leur départ à la retraite.
Mme la présidente. L’amendement n° 3569, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon, est ainsi libellé :
Alinéa 17
Après les deux occurrences du mot :
décret
insérer les mots :
en Conseil d’État
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Cet amendement vise à associer le Conseil d’État à la rédaction des décrets qui fixeront, d’une part, les conditions de l’abaissement de l’âge de départ pour les assurés reconnus inaptes au travail et pour ceux qui justifient d’une incapacité permanente et, d’autre part, le taux de ladite incapacité permanente.
Je souhaite revenir sur les inaptitudes. Rappelons que, selon le rapport de 2019 de la Haute Autorité de santé sur la désinsertion professionnelle, 95 % des salariés déclarés inaptes sont licenciés, et ce malgré l’obligation de reclassement à la charge de l’employeur.
Il s’ensuit pour le salarié une perte durable d’emploi, d’autant plus dommageable pour les seniors. D’après l’enquête Emploi 2012, en cinq ans, le taux de licenciement pour inaptitude a fortement augmenté, passant de quatre à six licenciements pour 1 000 emplois en CDI.
En outre, selon la Drees, les départs anticipés à la retraite bénéficient davantage aux personnes sans incapacité : 42 % de ces dernières sont déjà retraitées dans l’année qui précède l’âge légal, contre 19 % seulement des personnes handicapées. Par ailleurs, actuellement, les départs anticipés au titre du handicap restent très marginaux.
J’ajouterai que, lors de l’examen de l’article 7, vous avez moqué, faisant en sorte que nous ne puissions pas en débattre, les amendements qui visaient à exclure certains métiers – aide à domicile, ouvrier du bâtiment, auxiliaire de puériculture, caissière – de l’application du report de l’âge d’ouverture des droits de 62 à 64 ans. La discussion de ces amendements-là, que vous avez fait tomber – c’est bien dommage… –, vous aurait pourtant permis d’entendre que, dans ces métiers, on part davantage pour inaptitude qu’à la retraite « normale ». Nous vous aurions donné les taux d’inaptitude de ces métiers, notamment ceux que je connais, ceux de l’aide et du soin, et leur évolution.
Mme la présidente. L’amendement n° 3568, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon, est ainsi libellé :
Alinéa 17
Compléter cet alinéa par les mots :
suite à des négociations avec les organisations syndicales et patronales représentatives au niveau national et interprofessionnel
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Le groupe écologiste pense qu’il est urgent de renforcer le dialogue social dans les entreprises et dans les branches professionnelles. Monsieur le ministre, vous avez rompu ce dialogue par une réforme injuste, en restant sourd à une intersyndicale unie et au complet.
Il s’agit donc ici de réinvestir les corps intermédiaires, que vous n’avez pas écoutés lors du quinquennat précédent. Le président Macron promettait une forme nouvelle de dialogue social pour le deuxième quinquennat. Nous vous soumettons à cet effet une proposition visant à associer les partenaires sociaux et à passer des paroles aux actes.
Afin de répondre aux enjeux au plus proche du terrain, les organisations syndicales doivent jouer un rôle primordial dans la gestion des départs anticipés pour incapacité.
Je rappelle par ailleurs que toutes les organisations syndicales vous demandent de retirer votre réforme. Lors de la sixième journée d’action contre la réforme des retraites, le 7 mars, elles ont réuni 3,5 millions de personnes dans la rue, faisant de cette mobilisation l’une des plus importantes depuis 1995. Elles appellent à une nouvelle journée de mobilisation le 11 mars ; vous avez encore du temps pour retirer votre réforme !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Pour ce qui est de l’inaptitude et de l’invalidité, après consultation de toutes les études et de tous les documents relatifs à cette question, concernant tous les métiers, nous avons jugé bon de maintenir la condition d’âge à 62 ans. Avis défavorable sur l’amendement n° 4337 rectifié.
L’amendement n° 3569 a pour objet de renvoyer à un décret en Conseil d’État la fixation des paramètres mentionnés à l’alinéa 17. Avis défavorable également.
Quant à une concertation préalable à la publication du décret, il importe au Gouvernement de l’organiser. Là aussi, avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 4337 rectifié.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 241 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 343 |
Pour l’adoption | 92 |
Contre | 251 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix l’amendement n° 3569.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques.
L’amendement n° 29 rectifié est présenté par Mmes Guidez et Sollogoub, M. Canévet, Mmes Billon et de La Provôté, MM. J.M. Arnaud, Bonhomme, Détraigne, Kern, Levi, Belin et Cadec, Mme Canayer, MM. Capo-Canellas, Chatillon, Chauvet, Decool, Delcros et Duffourg, Mme Herzog, M. Gremillet, Mme Malet, MM. Mandelli et Milon, Mmes Morin-Desailly et Muller-Bronn, M. Pellevat, Mme Perrot, M. Prince, Mme Puissat et MM. Rapin, Ravier et Wattebled.
L’amendement n° 2859 rectifié est présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 4335 rectifié bis est présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 19
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Jocelyne Guidez, pour présenter l’amendement n° 29 rectifié.
Mme Jocelyne Guidez. L’alinéa 19 de l’article 8 du PLFRSS vise à supprimer la possibilité que les assurés en situation de handicap puissent bénéficier d’une retraite à taux plein, quelle que soit leur durée de cotisation, à 65 ans. Cet amendement vise à maintenir cette possibilité.
En effet, selon l’alinéa 1er ter de l’article L. 351-8 du code de la sécurité sociale, les assurés justifiant d’une incapacité permanente au moins égale à un taux fixé par décret qui atteignent l’âge mentionné à l’article L. 161-17-2 bénéficient du taux plein même s’ils ne justifient pas de la durée requise d’assurance ou de périodes équivalentes dans le régime général et un ou plusieurs autres régimes obligatoires. L’alinéa 19 de l’article 8 vise à abroger l’alinéa 1er ter de l’article L. 351-8 du code de la sécurité sociale.
L’objet du présent amendement est de maintenir ces droits existants pour les personnes en situation de handicap, quelle que soit leur durée de cotisation, puisqu’elles ont souvent des carrières hachées. Cet amendement vise donc à supprimer l’alinéa 19 de l’article 8 du PLFRSS.
Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Lubin, pour présenter l’amendement n° 2859 rectifié.
Mme Monique Lubin. Cet amendement est défendu !
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Claude Varaillas, pour présenter l’amendement n° 4335 rectifié bis.
Mme Marie-Claude Varaillas. Les personnes justifiant d’une incapacité permanente peuvent à partir de 62 ans bénéficier d’une retraite à taux plein, quelle que soit la durée de cotisation. Or, monsieur le ministre, vous proposez, à l’alinéa 19, la suppression de l’alinéa 1er ter de l’article L. 351-8 du code de la sécurité sociale. Cela jette le trouble.
Je le rappelle, le rapport souligne que cette garantie ne changera pas. D’ailleurs, l’étude d’impact abonde dans ce sens. Si les assurés atteints d’une incapacité de travail n’ont pas la possibilité de bénéficier actuellement d’un départ anticipé, ils bénéficient en revanche d’une retraite à taux plein dès 62 ans, et ce quelle que soit la durée de cotisation validée. Cette dernière possibilité est maintenue.
Pourquoi alors supprimer cet alinéa ? Même si nous comprenons que renvoyer à un article où la limite d’âge est augmentée de deux ans placerait les personnes justifiant d’une incapacité permanente dans une attente inutile, nous souhaitons que cet âge soit mentionné à l’article L. 351-8 du code de la sécurité sociale. En effet, monsieur le ministre, cela va mieux en l’écrivant !
Mme Céline Brulin. Très bien !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. La difficulté du débat est visible. Ces amendements sont identiques, mais celui de Mme Jocelyne Guidez n’est pas hors sujet – quoique… –, puisqu’elle parle du handicap, tandis que Mme Varaillas évoque l’incapacité permanente. L’un de ces amendements est lié au travail et l’autre non.
L’alinéa 19 de l’article 8 du projet de loi vise à supprimer l’alinéa 1er ter de l’article 351-8, car ce dernier est repris à l’alinéa 20 de l’article 8.
Il n’existe pas de confusion, me semble-t-il, mais M. le ministre sera plus précis. Il n’y a aucune remise en cause de ces âges anticipés, aussi bien en matière d’incapacité permanente que d’inaptitude.
Par conséquent, la commission demande le retrait de ces amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre. Je confirme qu’aucun changement n’a lieu : 55 ans pour les travailleurs handicapés, 62 ans pour bénéficier d’un taux plein pour les assurés inaptes ou justifiant d’une incapacité permanente.
Sur le plan de la légistique, les assurés inaptes et en situation d’incapacité permanente ont été regroupés au sein du même alinéa – le deuxième alinéa de l’article 351-8 –, et ce dans un souci de simplicité, puisqu’il s’agit de la même situation.
Cela explique que l’alinéa 1er ter de ce même article 351-8 soit supprimé, puisqu’il s’agit d’une simplification opérée à l’occasion de la rédaction de ce projet de loi.
Le Gouvernement demande le retrait de ces amendements. À défaut, l’avis serait défavorable.
Mme Jocelyne Guidez. Je retire l’amendement n° 29 rectifié, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 29 rectifié est retiré.
Qu’en est-il de l’amendement n° 2859 rectifié, madame Lubin ?
Mme Monique Lubin. Je le retire également, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 2859 rectifié est retiré.
Qu’en est-il de l’amendement n° 4335 rectifié bis, madame Varaillas ?
Mme Marie-Claude Varaillas. Retrait.
Mme la présidente. L’amendement n° 4335 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 4576, présenté par MM. Lévrier, Iacovelli, Hassani, Patriat, Bargeton et Buis, Mme Cazebonne, MM. Dagbert et Dennemont, Mme Duranton, M. Gattolin, Mme Havet, MM. Haye, Kulimoetoke, Lemoyne, Marchand, Mohamed Soilihi et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud, Richard et Rohfritsch, Mme Schillinger, M. Théophile et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :
I. - Après l’alinéa 20
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…) Après le 4° bis, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° Les assurés dont l’âge mentionné au premier alinéa de l’article L. 351-1 est abaissé, dans des conditions prévues à l’article L. 351-1-1 ; »
II. - Après l’alinéa 31
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…° L’article L. 643-4 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« …° Des assurés dont l’âge mentionné au premier alinéa de l’article L. 643-1 est abaissé dans des conditions prévues au même article ; »
III. - Après l’alinéa 41
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…° L’article L. 653-4 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« …° Des assurés dont l’âge mentionné au premier alinéa de l’article L. 653-2 est abaissé dans des conditions prévues au II du même article. » ;
IV. - Après l’alinéa 46
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…° Après le septième alinéa du I de l’article L. 14, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le coefficient de minoration n’est pas applicable aux assurés dont l’âge mentionné au premier alinéa de l’article L. 24 est abaissé dans les conditions prévues à l’article L. 25 bis. » ;
V. - Après l’alinéa 73
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Les articles L. 732-25 et L. 781-33 sont complétés par une phrase ainsi rédigée : « Le coefficient de minoration n’est pas applicable aux assurés dont l’âge mentionné à l’article L. 732-18 est abaissé dans les conditions prévues à l’article L. 732-18-1. » ;
La parole est à M. Martin Lévrier.
M. Martin Lévrier. Cet amendement de coordination vise à permettre aux assurés nés en 1962 et en 1963 de partir à la retraite de manière anticipée pour carrière longue, selon les conditions actuelles, avec une pension à taux plein.
Mme la présidente. Le sous-amendement n° 4760, présenté par M. Savary et Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Amendement 4576, alinéa 8
Remplacer les mots :
L. 643-1 est abaissé dans des conditions prévues au
par la référence :
L. 643-3 est abaissé dans des conditions prévues au II du
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter ce sous-amendement et pour donner l’avis de la commission.
M. René-Paul Savary, rapporteur. Il s’agit d’un sous-amendement de correction d’une erreur matérielle. Sous réserve de son adoption, l’avis de la commission sera favorable sur l’amendement n° 4576, qui vise à apporter une précision.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 4331 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli, est ainsi libellé :
Alinéa 24
Après le mot :
décret
insérer les mots :
après négociation avec les organisations syndicales et patronales représentatives au niveau national et interprofessionnel
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Nous proposons d’inscrire dans le texte que les conditions de départ pour carrière longue et les conditions de départ anticipé à la retraite soient l’objet d’une négociation préalable avec les organisations syndicales et patronales. « Quoi de plus normal ? », me direz-vous, mes chers collègues.
À ce stade, le projet de loi prévoit que la condition d’âge au premier alinéa soit abaissée d’au moins deux ans, ce que nous approuvons, mais dans des conditions fixées par décret.
Nous pensons que les organisations syndicales doivent être associées, d’autant plus que le Gouvernement ne cesse de mettre en avant les trois mois de concertation qu’il y aurait eu en amont de ce projet de loi. Or le résultat est visible dans la rue avec un front syndical qui n’a jamais été aussi uni.
Il est clair que votre réforme est rejetée en bloc par l’ensemble des salariés et que la contestation continue, à juste titre.
Aussi peut-être pouvons-nous tenter ensemble de réintroduire un peu de concertation, au moins au travers de cet amendement. D’ailleurs, notre groupe souhaiterait que la demande de l’intersyndicale d’être reçue par le Président de la République soit entendue et fasse l’objet d’une réponse positive.
En attendant, reconnaître le rôle des corps intermédiaires serait un premier pas. Cela ferait du bien à notre démocratie sociale.
Tel est l’objet de cet amendement.
Mme la présidente. Je suis saisie de douze sous-amendements identiques.
Le sous-amendement n° 5228 est présenté par M. Gontard.
Le sous-amendement n° 5241 est présenté par Mme Raymonde Poncet Monge.
Le sous-amendement n° 5254 est présenté par Mme Mélanie Vogel.
Le sous-amendement n° 5267 est présenté par M. Daniel Salmon.
Le sous-amendement n° 5280 est présenté par M. Paul Toussaint Parigi.
Le sous-amendement n° 5293 est présenté par M. Joël Labbé.
Le sous-amendement n° 5306 est présenté par M. Jacques Fernique.
Le sous-amendement n° 5319 est présenté par M. Thomas Dossus.
Le sous-amendement n° 5331 est présenté par Mme Monique de Marco.
Le sous-amendement n° 5344 est présenté par M. Ronan Dantec.
Le sous-amendement n° 5357 est présenté par M. Daniel Breuiller.
Le sous-amendement n° 5370 est présenté par M. Guy Benarroche.
Ces douze sous-amendements sont ainsi libellés :
Amendement 4331, alinéa 5
Après le mot :
après
Insérer les mots :
avis du Conseil d’État et
La parole est à M. Gontard, pour présenter le sous-amendement n° 5228.
M. Guillaume Gontard. L’amendement n° 4331 rectifié vise à consolider les dispositions qui seront prises par décret quant aux conditions de départ pour carrière longue et de départ anticipé par un avis éclairé préalable, intervenant de manière complémentaire à une négociation avec les organisations syndicales et patronales, et à l’inscrire dans le texte.
Chacun de nos sous-amendements vise à ajouter une institution à consulter : chambre de commerce, Association pour l’emploi des cadres (Apec), Agence nationale pour la formation professionnelle des adultes (Afpa), Cap emploi, Conseil d’État ou comité de suivi des retraites.
Il nous semble important de mentionner dans le projet de loi l’ensemble des institutions qui seront consultées, afin de s’assurer que le Gouvernement les consulte directement, puisque les dispositions seront ensuite précisées par décret. Le cas a déjà été soulevé concernant le Conseil d’État ; mon collègue Daniel Breuiller l’a signifié à plusieurs reprises.
Il semble important de prévoir la consultation de ces institutions dans le texte. Ma présentation vaut également pour les sous-amendements nos 5229 à 5240.
Mme la présidente. La parole est Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter le sous-amendement n° 5241.
Mme Raymonde Poncet Monge. Ce sous-amendement et les sous-amendements nos 5242 à 5253 sont défendus.
Mme la présidente. La parole est à Mme Mélanie Vogel, pour présenter le sous-amendement n° 5254.
Mme Mélanie Vogel. Ce sous-amendement et les sous-amendements nos 5255 à 5266 sont défendus.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Salmon, pour présenter le sous-amendement n° 5267.
M. Daniel Salmon. Ce sous-amendement et les sous-amendements nos 5268 à 5279 visent à associer largement des institutions pour éclairer les dispositions prises par le décret.
Chers collègues de la droite de cet hémicycle, vous invoquez à tout moment le « bon sens ». Mais, en ce moment, le bon sens est-il vraiment sur vos travées ? N’est-il pas plutôt dans la rue ? Nous aurons peut-être bientôt des réponses.
En outre, vous expliquez tout à travers le prisme de la démographie, qui est très réducteur. Prenons quelques chiffres : en 1950, nous avions cinq actifs pour un retraité contre 1,7 actif pour un retraité en 2020. Ces chiffres, souvent avancés, doivent être croisés avec ceux de la productivité. Ainsi, en prenant une base 100 en 1950, la productivité d’un travailleur était alors de 100 contre 700 en 2015. Cela permet de relativiser ce paramètre démographique.
Ce productivisme est le fruit du machinisme, de la robotique, du progrès technologique, dont vous êtes très friands. À quoi bon ces progrès si, réforme après réforme, le temps passé à la retraite se réduit comme une peau de chagrin ?
Le progrès technologique ne serait donc pas au service de l’homme, mais un facteur d’asservissement ? Dommage ! Ne serait-ce pas parce que la richesse produite est captée par une minorité ? Peut-être aurons-nous des réponses bientôt.
La démographie est un paramètre, comme l’âge de départ et le nombre d’années de cotisation.
Or, vous restez, comme l’expliquait ma collègue Raymonde Poncet Monge, sous votre lampadaire, sans rechercher d’autres paramètres à activer.
Mme la présidente. Le sous-amendement n° 5280 n’est pas soutenu.
La parole est à M. Labbé, pour présenter le sous-amendement n° 5293.
M. Joël Labbé. Ce sous-amendement et les sous-amendements nos 5294 à 5305 sont défendus.
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Fernique, pour présenter le sous-amendement n° 5306.
M. Jacques Fernique. Ce sous-amendement et les sous-amendements nos 5307 à 5318 visent à consolider les dispositions qui sont prises par décret à l’aide d’un avis éclairé préalable – celui-ci intervient de manière complémentaire aux négociations avec les organisations syndicales et patronales – quant aux conditions de départ pour carrière longue et aux conditions de départ anticipé à la retraite, dans ce texte.
Dans chacun de ces sous-amendements, je propose la prise en compte de l’avis d’une institution ou d’un corps intermédiaire.
En effet, il nous faut aider le Gouvernement à trouver le chemin de l’écoute des partenaires sociaux, des institutions en prise directe avec la société, des corps intermédiaires, et ce en amont de la publication du décret.
Mme la présidente. La parole est à M. Thomas Dossus, pour présenter le sous-amendement n° 5319.
M. Thomas Dossus. Ce sous-amendement et les sous-amendements nos 5320 à 5330 sont défendus.
Mme la présidente. Les sous-amendements nos 5331 et 5344 ne sont pas soutenus.
La parole est à M. Daniel Breuiller, pour présenter le sous-amendement n° 5357.
M. Daniel Breuiller. Ce sous-amendement et les sous-amendements nos 5358 à 5369 sont défendus.
Mme la présidente. La parole est à M. Guy Benarroche, pour présenter le sous-amendement n° 5370.
M. Guy Benarroche. Ce sous-amendement et les sous-amendements nos 5371 à 5382 sont défendus !
Mme la présidente. Je suis saisie de douze sous-amendements identiques.
Le sous-amendement n° 5229 est présenté par M. Gontard.
Le sous-amendement n° 5242 est présenté par Mme Raymonde Poncet Monge.
Le sous-amendement n° 5255 est présenté par Mme Mélanie Vogel.
Le sous-amendement n° 5268 est présenté par M. Daniel Salmon.
Le sous-amendement n° 5281 est présenté par M. Paul Toussaint Parigi.
Le sous-amendement n° 5294 est présenté par M. Joël Labbé.
Le sous-amendement n° 5307 est présenté par M. Jacques Fernique.
Le sous-amendement n° 5320 est présenté par M. Thomas Dossus.
Le sous-amendement n° 5332 est présenté par Mme Monique de Marco.
Le sous-amendement n° 5345 est présenté par M. Ronan Dantec.
Le sous-amendement n° 5358 est présenté par M. Daniel Breuiller.
Le sous-amendement n° 5371 est présenté par M. Guy Benarroche.
Ces douze sous-amendements sont ainsi libellés :
Amendement 4331, alinéa 5
Après le mot :
après
Insérer les mots :
avis de l’Agence nationale pour la formation professionnelle des adultes et
Ces sous-amendements ont déjà été défendus, à l’exception des sous-amendements nos 5281, 5332 et 5345, qui ne sont pas soutenus.
Je suis saisie de douze sous-amendements identiques.
Le sous-amendement n° 5230 est présenté par M. Gontard.
Le sous-amendement n° 5243 est présenté par Mme Raymonde Poncet Monge.
Le sous-amendement n° 5256 est présenté par Mme Mélanie Vogel.
Le sous-amendement n° 5269 est présenté par M. Daniel Salmon.
Le sous-amendement n° 5282 est présenté par M. Paul Toussaint Parigi.
Le sous-amendement n° 5295 est présenté par M. Joël Labbé.
Le sous-amendement n° 5308 est présenté par M. Jacques Fernique.
Le sous-amendement n° 5321 est présenté par M. Thomas Dossus.
Le sous-amendement n° 5333 est présenté par Mme Monique de Marco.
Le sous-amendement n° 5346 est présenté par M. Ronan Dantec.
Le sous-amendement n° 5359 est présenté par M. Daniel Breuiller.
Le sous-amendement n° 5372 est présenté par M. Guy Benarroche.
Ces douze sous-amendements sont ainsi libellés :
Amendement 4331, alinéa 5
Après le mot :
après
Insérer les mots :
avis de l’Association pour l’emploi des cadres et
Ces sous-amendements ont déjà été défendus, à l’exception des sous-amendements nos 5282, 5333 et 5346, qui ne sont pas soutenus.
Je suis saisie de douze sous-amendements identiques.
Le sous-amendement n° 5231 est présenté par M. Gontard.
Le sous-amendement n° 5244 est présenté par Mme Raymonde Poncet Monge.
Le sous-amendement n° 5257 est présenté par Mme Mélanie Vogel.
Le sous-amendement n° 5270 est présenté par M. Daniel Salmon.
Le sous-amendement n° 5283 est présenté par M. Paul Toussaint Parigi.
Le sous-amendement n° 5296 est présenté par M. Joël Labbé.
Le sous-amendement n° 5309 est présenté par M. Jacques Fernique.
Le sous-amendement n° 5322 est présenté par M. Thomas Dossus.
Le sous-amendement n° 5334 est présenté par Mme Monique de Marco.
Le sous-amendement n° 5347 est présenté par M. Ronan Dantec.
Le sous-amendement n° 5360 est présenté par M. Daniel Breuiller.
Le sous-amendement n° 5373 est présenté par M. Guy Benarroche.
Ces douze sous-amendements sont ainsi libellés :
Amendement 4331, alinéa 5
Après le mot :
après
Insérer les mots :
avis de l’Association nationale pour l’amélioration des conditions de travail et
Ces sous-amendements ont déjà été défendus, à l’exception des sous-amendements nos 5283, 5334 et 5347, qui ne sont pas soutenus.
Je suis saisie de douze sous-amendements identiques.
Le sous-amendement n° 5232 est présenté par M. Gontard.
Le sous-amendement n° 5245 est présenté par Mme Raymonde Poncet Monge.
Le sous-amendement n° 5258 est présenté par Mme Mélanie Vogel.
Le sous-amendement n° 5271 est présenté par M. Daniel Salmon.
Le sous-amendement n° 5284 est présenté par M. Paul Toussaint Parigi.
Le sous-amendement n° 5297 est présenté par M. Joël Labbé.
Le sous-amendement n° 5310 est présenté par M. Jacques Fernique.
Le sous-amendement n° 5323 est présenté par M. Thomas Dossus.
Le sous-amendement n° 5335 est présenté par Mme Monique de Marco.
Le sous-amendement n° 5348 est présenté par M. Ronan Dantec.
Le sous-amendement n° 5361 est présenté par M. Daniel Breuiller.
Le sous-amendement n° 5374 est présenté par M. Guy Benarroche.
Ces douze sous-amendements sont ainsi libellés :
Amendement 4331, alinéa 5
Après le mot :
après
Insérer les mots :
avis de Cap emploi et
Ces sous-amendements ont déjà été défendus, à l’exception des sous-amendements nos 5284, 5335 et 5348, qui ne sont pas soutenus.
Je suis saisie de douze sous-amendements identiques.
Le sous-amendement n° 5233 est présenté par M. Gontard.
Le sous-amendement n° 5246 est présenté par Mme Raymonde Poncet Monge.
Le sous-amendement n° 5259 est présenté par Mme Mélanie Vogel.
Le sous-amendement n° 5272 est présenté par M. Daniel Salmon.
Le sous-amendement n° 5285 est présenté par M. Paul Toussaint Parigi.
Le sous-amendement n° 5298 est présenté par M. Joël Labbé.
Le sous-amendement n° 5311 est présenté par M. Jacques Fernique.
Le sous-amendement n° 5324 est présenté par M. Thomas Dossus.
Le sous-amendement n° 5336 est présenté par Mme Monique de Marco.
Le sous-amendement n° 5349 est présenté par M. Ronan Dantec.
Le sous-amendement n° 5362 est présenté par M. Daniel Breuiller.
Le sous-amendement n° 5375 est présenté par M. Guy Benarroche.
Ces douze sous-amendements sont ainsi libellés :
Amendement 4331, alinéa 5
Après le mot :
après
Insérer les mots :
avis du Centre animation ressources d’information sur la formation et
Ces sous-amendements ont déjà été défendus, à l’exception des sous-amendements nos 5285, 5336 et 5349, qui ne sont pas soutenus.
Je suis saisie de douze sous-amendements identiques.
Le sous-amendement n° 5234 est présenté par M. Gontard.
Le sous-amendement n° 5247 est présenté par Mme Raymonde Poncet Monge.
Le sous-amendement n° 5260 est présenté par Mme Mélanie Vogel.
Le sous-amendement n° 5273 est présenté par M. Daniel Salmon.
Le sous-amendement n° 5286 est présenté par M. Paul Toussaint Parigi.
Le sous-amendement n° 5299 est présenté par M. Joël Labbé.
Le sous-amendement n° 5312 est présenté par M. Jacques Fernique.
Le sous-amendement n° 5325 est présenté par M. Thomas Dossus.
Le sous-amendement n° 5337 est présenté par Mme Monique de Marco.
Le sous-amendement n° 5350 est présenté par M. Ronan Dantec.
Le sous-amendement n° 5363 est présenté par M. Daniel Breuiller.
Le sous-amendement n° 5376 est présenté par M. Guy Benarroche.
Ces douze sous-amendements sont ainsi libellés :
Amendement 4331, alinéa 5
Après le mot :
après
Insérer les mots :
avis des Chambres de commerce et d’industrie et
Ces sous-amendements ont déjà été défendus, à l’exception des sous-amendements nos 5286, 5337 et 5350, qui ne sont pas soutenus.
Je suis saisie de douze sous-amendements identiques.
Le sous-amendement n° 5235 est présenté par M. Gontard.
Le sous-amendement n° 5248 est présenté par Mme Raymonde Poncet Monge.
Le sous-amendement n° 5261 est présenté par Mme Mélanie Vogel.
Le sous-amendement n° 5274 est présenté par M. Daniel Salmon.
Le sous-amendement n° 5289 est présenté par M. Paul Toussaint Parigi.
Le sous-amendement n° 5300 est présenté par M. Joël Labbé.
Le sous-amendement n° 5313 est présenté par M. Jacques Fernique.
Le sous-amendement n° 5326 est présenté par M. Thomas Dossus.
Le sous-amendement n° 5338 est présenté par Mme Monique de Marco.
Le sous-amendement n° 5351 est présenté par M. Ronan Dantec.
Le sous-amendement n° 5364 est présenté par M. Daniel Breuiller.
Le sous-amendement n° 5377 est présenté par M. Guy Benarroche.
Ces douze sous-amendements sont ainsi libellés :
Amendement 4331, alinéa 5
Après le mot :
après
Insérer les mots :
avis du Comité de suivi des retraites et
Ces sous-amendements ont déjà été défendus, à l’exception des sous-amendements nos 5289, 5338 et 5351, qui ne sont pas soutenus.
Je suis saisie de douze sous-amendements identiques.
Le sous-amendement n° 5236 est présenté par M. Gontard.
Le sous-amendement n° 5249 est présenté par Mme Raymonde Poncet Monge.
Le sous-amendement n° 5262 est présenté par Mme Mélanie Vogel.
Le sous-amendement n° 5275 est présenté par M. Daniel Salmon.
Le sous-amendement n° 5288 est présenté par M. Paul Toussaint Parigi.
Le sous-amendement n° 5301 est présenté par M. Joël Labbé.
Le sous-amendement n° 5314 est présenté par M. Jacques Fernique.
Le sous-amendement n° 5327 est présenté par M. Thomas Dossus.
Le sous-amendement n° 5339 est présenté par Mme Monique de Marco.
Le sous-amendement n° 5352 est présenté par M. Ronan Dantec.
Le sous-amendement n° 5365 est présenté par M. Daniel Breuiller.
Le sous-amendement n° 5378 est présenté par M. Guy Benarroche.
Ces douze sous-amendements sont ainsi libellés :
Amendement 4331, alinéa 5
Après le mot :
après
Insérer les mots :
pris après avis du Fonds de solidarité vieillesse et
Ces sous-amendements ont déjà été défendus, à l’exception des sous-amendements nos 5288, 5339 et 5352, qui ne sont pas soutenus.
Je suis saisie de douze sous-amendements identiques.
Le sous-amendement n° 5237 est présenté par M. Gontard.
Le sous-amendement n° 5250 est présenté par Mme Raymonde Poncet Monge.
Le sous-amendement n° 5263 est présenté par Mme Mélanie Vogel.
Le sous-amendement n° 5276 est présenté par M. Daniel Salmon.
Le sous-amendement n° 5287 est présenté par M. Paul Toussaint Parigi.
Le sous-amendement n° 5302 est présenté par M. Joël Labbé.
Le sous-amendement n° 5315 est présenté par M. Jacques Fernique.
Le sous-amendement n° 5328A est présenté par M. Thomas Dossus.
Le sous-amendement n° 5340 est présenté par Mme Monique de Marco.
Le sous-amendement n° 5353 est présenté par M. Ronan Dantec.
Le sous-amendement n° 5366 est présenté par M. Daniel Breuiller.
Le sous-amendement n° 5379 est présenté par M. Guy Benarroche.
Ces douze sous-amendements sont ainsi libellés :
Amendement 4331, alinéa 5
Après le mot :
après
Insérer les mots :
avis du Fonds de réserve des retraites et
Ces sous-amendements ont déjà été défendus, à l’exception des sous-amendements nos 5287, 5340 et 5353, qui ne sont pas soutenus.
Je suis saisie de douze sous-amendements identiques.
Le sous-amendement n° 5238 est présenté par M. Gontard.
Le sous-amendement n° 5251 est présenté par Mme Raymonde Poncet Monge.
Le sous-amendement n° 5264 est présenté par Mme Mélanie Vogel.
Le sous-amendement n° 5277 est présenté par M. Daniel Salmon.
Le sous-amendement n° 5290 est présenté par M. Paul Toussaint Parigi.
Le sous-amendement n° 5303 est présenté par M. Joël Labbé.
Le sous-amendement n° 5316 est présenté par M. Jacques Fernique.
Le sous-amendement n° 5328B est présenté par M. Thomas Dossus.
Le sous-amendement n° 5341 est présenté par Mme Monique de Marco.
Le sous-amendement n° 5354 est présenté par M. Ronan Dantec.
Le sous-amendement n° 5367 est présenté par M. Daniel Breuiller.
Le sous-amendement n° 5380 est présenté par M. Guy Benarroche.
Ces douze sous-amendements sont ainsi libellés :
Amendement 4331, alinéa 5
Après le mot :
après
Insérer les mots :
avis de la Caisse de prévoyance et de retraite de la Société nationale des chemins de fer français et
Ces sous-amendements ont déjà été défendus, à l’exception des sous-amendements nos 5290, 5341 et 5354, qui ne sont pas soutenus.
Je suis saisie de douze sous-amendements identiques.
Le sous-amendement n° 5239 est présenté par M. Gontard.
Le sous-amendement n° 5252 est présenté par Mme Raymonde Poncet Monge.
Le sous-amendement n° 5265 est présenté par Mme Mélanie Vogel.
Le sous-amendement n° 5278 est présenté par M. Daniel Salmon.
Le sous-amendement n° 5291 est présenté par M. Paul Toussaint Parigi.
Le sous-amendement n° 5304 est présenté par M. Joël Labbé.
Le sous-amendement n° 5317 est présenté par M. Jacques Fernique.
Le sous-amendement n° 5329 est présenté par M. Thomas Dossus.
Le sous-amendement n° 5342 est présenté par Mme Monique de Marco.
Le sous-amendement n° 5355 est présenté par M. Ronan Dantec.
Le sous-amendement n° 5368 est présenté par M. Daniel Breuiller.
Le sous-amendement n° 5381 est présenté par M. Guy Benarroche.
Ces douze sous-amendements sont ainsi libellés :
Amendement 4331, alinéa 5
Après le mot :
après
Insérer les mots :
avis de la Caisse de retraite du personnel de la Régie autonome des transports parisiens et
Ces sous-amendements ont déjà été défendus, à l’exception des sous-amendements nos 5291, 5342 et 5355, qui ne sont pas soutenus.
Je suis saisie de douze sous-amendements identiques.
Le sous-amendement n° 5240 est présenté par M. Gontard.
Le sous-amendement n° 5253 est présenté par Mme Raymonde Poncet Monge.
Le sous-amendement n° 5266 est présenté par Mme Mélanie Vogel.
Le sous-amendement n° 5279 est présenté par M. Daniel Salmon.
Le sous-amendement n° 5292 est présenté par M. Paul Toussaint Parigi.
Le sous-amendement n° 5305 est présenté par M. Joël Labbé.
Le sous-amendement n° 5318 est présenté par M. Jacques Fernique.
Le sous-amendement n° 5330 est présenté par M. Thomas Dossus.
Le sous-amendement n° 5343 est présenté par Mme Monique de Marco.
Le sous-amendement n° 5356 est présenté par M. Ronan Dantec.
Le sous-amendement n° 5369 est présenté par M. Daniel Breuiller.
Le sous-amendement n° 5382 est présenté par M. Guy Benarroche.
Ces douze sous-amendements sont ainsi libellés :
Amendement 4331, alinéa 5
Après le mot :
après
Insérer les mots :
avis de la Caisse des dépôts et consignations et
Ces sous-amendements ont déjà été défendus, à l’exception des sous-amendements nos 5292, 5343 et 5356, qui ne sont pas soutenus.
Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Nous pensons qu’il est déjà un peu tard pour consulter les organismes évoqués dans les différents sous-amendements, que ce soit les organisations syndicales ou patronales représentatives, à l’échelon tant national qu’interprofessionnel.
Pour discuter, négocier ou travailler la question des âges anticipés, il est nécessaire qu’une large concertation ait lieu. Et il incombe au Gouvernement d’en tenir compte dans la perspective de l’élaboration du décret.
La concertation doit donc être menée au préalable. Il faut prendre des mesures de prévention – vous êtes attachés à la prévention – en même temps que les mesures d’âge anticipé, qui sont des mesures de réparation.
Il est envisagé de modifier l’alinéa 24. Mais ce dernier est rattaché à l’alinéa 23, qui fixe par décret les âges de départ anticipé des professionnels libéraux. Il n’y a aucune raison de prendre de faire une distinction entre ces derniers et les autres. En fait, il y a eu une erreur au départ.
La commission demande le retrait de l’amendement n° 4331 rectifié et des sous-amendements s’y rattachant. À mon sens, ce que vous proposez ne correspond pas à ce que vous souhaitiez.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre. Tout d’abord, l’amendement et les sous-amendements proposés concerneraient uniquement les professions libérales. Je ne suis pas certain que ce soit votre objectif.
Je souhaite souligner deux éléments.
D’une part, le Gouvernement a mené une concertation. Celle-ci n’a pas permis de lever l’ensemble des désaccords.
D’autre part, je précise que tous les organismes dont la consultation est obligatoire selon les textes ont évidemment été consultés. Et nous mènerons toutes les concertations interprofessionnelles nécessaires.
Le Gouvernement demande le retrait de l’amendement n° 4331 rectifié et des différents sous-amendements, faute de quoi l’avis serait défavorable.
Mme la présidente. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.
M. Guillaume Gontard. Monsieur le ministre, je vous remercie de vos explications. Il est important que l’ensemble de ces organismes soient consultés. Nous retirons l’ensemble de nos sous-amendements.
Mme la présidente. Tous les sous-amendements portant sur l’amendement n° 4331 rectifié sont retirés.
La parole est à M. Pierre Laurent, pour explication de vote.
M. Pierre Laurent. Par l’amendement n° 4331 rectifié, nous abordons une fois de plus un problème majeur.
Nous demandons que les dispositions soient prises après négociation – et non pas consultation ! – avec les organisations syndicales et patronales représentatives aux échelons national et interprofessionnel.
Le problème est global. La négociation n’a pas eu lieu et n’a en aucun cas abouti sur l’ensemble de ces dispositions.
Nous sommes face à un problème majeur pour élaborer la loi. Si nous continuons d’avancer ainsi, avec la situation qui est en train de se mettre en place dans le pays, à un moment où les organisations syndicales représentatives – j’ignore si on mesure la gravité de ce que cela signifie – sont obligées de déclarer que le Président de la République est la seule personne avec laquelle elles souhaitent maintenant discuter, nous faisons également face à une crise majeure de la négociation avec les organisations syndicales.
On nous dit que notre amendement est peut-être mal placé ou mal rédigé.
Mme Cathy Apourceau-Poly. On va le déplacer !
M. Pierre Laurent. Si c’est le seul problème, vous pouvez assez aisément nous aider à le rectifier.
Comme chacun sait qu’il y a un défaut de construction majeure dans ce projet de loi, on ne veut pas évidemment pas le corriger à ce stade du débat.
Néanmoins, à force de ne pas le corriger et de ne pas tenir compte des amendements que nous avons présentés dans le même esprit depuis le début de l’examen de ce projet de loi, vous êtes en train de provoquer une crise majeure qui n’est pas près de s’éteindre dans le pays si vous continuez ainsi.
Peut-être notre amendement comporte-t-il un petit défaut de rédaction. Mais ce qui est certain, c’est que nous mettons le doigt sur un problème fondamental ; cela conduira à un blocage qui n’est pas près d’être levé si vous ne corrigez pas le tir.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 4331 rectifié.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 242 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 332 |
Pour l’adoption | 92 |
Contre | 240 |
Le Sénat n’a pas adopté.
L’amendement n° 3573, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon, est ainsi libellé :
Alinéa 30
Après le mot :
décret
insérer les mots :
en Conseil d’État
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Nous souhaitons alerter. Si le projet de réforme maintient le dispositif de retraite anticipée pour les travailleurs handicapés, il renvoie à un nouveau décret pour fixer l’âge de départ anticipé.
L’association Collectif Handicaps demande que l’âge de départ à la retraite anticipée soit fixé à 55 ans pour les travailleurs handicapés et directement inscrit dans le code de la sécurité sociale.
De plus, afin d’accéder à la retraite anticipée à 55 ans pour handicap, il faut remplir deux conditions cumulatives – nous en avons parlé –, valider une certaine durée d’assurance, des trimestres cotisés et des trimestres assimilés.
Le Gouvernement propose de ne plus retenir que la condition de durée cotisée ; c’est un progrès. Mais cela ne réduit pas la durée totale d’assurance nécessaire pour bénéficier du dispositif. Dès lors, la durée de cotisation reste donc la même et est trop longue.
Enfin, le report de l’âge légal de départ à la retraite à 64 ans pénalisera les personnes en situation de handicap qui ne peuvent pas bénéficier des dispositifs dérogatoires.
Ce sont les collectifs qui le disent, même si vous prétendez que tout va bien parce que l’âge serait maintenu à 55 ans.
En effet, les personnes qui ne bénéficient pas des dispositions dérogatoires, qui ne remplissent pas les conditions administratives nécessaires et qui rencontrent de grandes difficultés pour se maintenir en emploi jusqu’à l’âge de départ à la retraite connaîtront une augmentation.
D’après l’Insee, en 2018, les personnes considérées comme handicapées, car fortement limitées dans les activités de la vie quotidienne, liquident leurs droits à la retraite à 62,4 ans en moyenne, donc plus tardivement que les personnes sans incapacité. Étant par ailleurs moins souvent en emploi, elles passent en moyenne, après l’âge de 50 ans – écoutez bien –, 8,5 années sans emploi ni retraite contre 1,8 an pour les personnes sans incapacité. Cet écart s’est accru depuis 2013, sous l’effet de la réforme des retraites de 2010.
Mme la présidente. Il faut conclure, ma chère collègue.
Mme Raymonde Poncet Monge. Défendre les personnes handicapées, c’est aussi cela.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Cet amendement a pour objet le renvoi à un décret en Conseil d’État pour fixer l’âge de départ anticipé à la retraite pour une aptitude applicable aux professionnels libéraux. Or un simple décret suffira. Avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 3575, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon, est ainsi libellé :
Alinéa 40
Après le mot :
décret
insérer les mots :
en Conseil d’État
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Cet amendement, comme tous ceux qui concernent l’écriture réglementaire de la borne d’âge pour les inaptitudes et l’invalidité par décret, est un amendement d’appel, afin de s’assurer que ces bornes seront à l’avenir conservées et qu’elles ne bougeront pas. En effet, il nous semble que tout est possible.
Monsieur le ministre, il me semble que vous avez failli les modifier, car, dans le rapport sur les objectifs de la réforme, vous mettez en avant le non-report de l’âge comme étant une mesure sociale ; vous avez donc dû y penser à un moment donné.
Vous comptabilisez d’ailleurs, de façon tout à fait étonnante 3,1 milliards d’euros en 2030, sauf si vous comptiez leur imposer deux ans de plus et que vous y avez renoncé. Dans ce cas, il faut enlever ces 3,1 milliards d’euros.
Déjà concernant l’âge d’ouverture des droits en 2019, M. Emmanuel Macron déclarait qu’il était hypocrite de décaler l’âge de départ à la retraite. Or voilà que, quatre ans plus tard, nous discutons d’un projet de loi le mettant en place. Alors, comment croire la parole de ce gouvernement ?
Nous devons être rassurés au sujet des dispositions réglementaires prises, à savoir qu’elles seront maintenues en l’état et non modifiées, lorsque vous voudrez de nouveau augmenter les gains au travers d’une nouvelle réforme.
Les associations ne veulent pas que les dispositions de maintien de l’âge pour les invalides et les inaptes passent par décret, précisément, parce que la confiance à l’égard de ce gouvernement a été un peu altérée.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Avis défavorable. Nous pensons qu’un décret simple suffit et qu’il n’y a pas besoin d’un décret en Conseil d’État.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 3575.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 243 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 344 |
Pour l’adoption | 91 |
Contre | 253 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 2864 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéas 58 à 59
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Émilienne Poumirol.
Mme Émilienne Poumirol. Nous connaissons le faible niveau – je dirais même le très faible niveau – des retraites agricoles, à telle antienne que nous avons récemment légiféré, à la suite de l’appel d’André Chassaigne à l’Assemblée nationale.
Le travail agricole est particulièrement pénible. Il est responsable de nombreuses pathologies, en particulier de troubles musculo-squelettiques, a fortiori en cas de carrière longue et lorsqu’on a commencé à travailler tôt, ce qui est souvent le cas dans les métiers agricoles.
Cet amendement vise donc à supprimer le décalage à 62 ans de l’âge de départ anticipé à la retraite pour les travailleurs du régime agricole ayant eu une carrière longue.
Mme la présidente. L’amendement n° 3584, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon, est ainsi libellé :
Alinéa 59
Après le mot :
décret
insérer les mots :
en Conseil d’État
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Cet amendement vise à s’assurer que l’intention du législateur sera respectée.
Sur ce projet, après avoir refusé d’écouter les organisations syndicales – ou, plus précisément, après les avoir écoutées sans les entendre –, après avoir décidé d’utiliser la procédure d’examen selon un temps contraint qu’implique l’article 47-1 de la Constitution, le Gouvernement procède à de multiples recours à des décrets.
En raison notamment de l’importance du décret mentionné dans ce cas et des difficultés de prise en compte des points de vue des acteurs concernés, il semble indispensable au groupe Écologiste – Solidarité et Territoires que le Conseil d’État soit associé à la rédaction du décret.
Par cet amendement, le Conseil d’État sera ainsi saisi du projet préparé par le Gouvernement, et son avis devra être recueilli après une consultation des organismes dont l’avis est souhaité.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Selon moi, l’adoption de l’amendement n° 2864 rectifié, qui tend à supprimer des dispositions relatives aux professions et les salariés agricoles, n’irait pas dans le bon sens. Avis défavorable.
Les auteurs de l’amendement n° 3584 demandent un décret en Conseil d’État. Nous estimons qu’il vaut mieux en rester à un décret simple. Avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 2864 rectifié.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 244 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 343 |
Pour l’adoption | 95 |
Contre | 248 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix l’amendement n° 3584.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 245 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 343 |
Pour l’adoption | 90 |
Contre | 253 |
Le Sénat n’a pas adopté.
L’amendement n° 3579, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon, est ainsi libellé :
Alinéa 67
Après les deux occurrences du mot :
décret
insérer les mots :
en Conseil d’État
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Cet amendement vise à associer le Conseil d’État fixant le taux minimum d’incapacité permanente permettant de justifier d’un départ anticipé à la retraite, ainsi que les conditions d’abaissement de l’âge pour les personnes reconnues inaptes au travail.
Selon les services du ministère du travail, l’inaptitude est déclarée « lorsqu’aucune mesure d’aménagement ou d’adaptation de votre poste de travail actuel n’est possible ». Qu’en est-il dans les faits ? Selon le rapport de 2019 de la Haute Autorité de santé sur la désinsertion professionnelle, près de 95 % des salariés déclarés inaptes sont licenciés, et ce malgré l’obligation de reclassement qui incombe à l’employeur.
Il s’ensuit, pour le salarié, une perte durable d’emploi, qui est bien sûr beaucoup plus longue pour les seniors.
Le chiffre de 100 000 salariés déclarés inaptes à leur poste est régulièrement avancé de façon parcellaire ; il n’existe d’ailleurs aucun chiffre à l’échelle nationale qui consoliderait ce phénomène.
Il faudrait donc inciter les entreprises à s’engager sur des politiques opérantes de prévention en amont de la déclaration de licenciement pour inaptitude, mais également s’assurer que la recherche de reclassement a bien été menée. Pour cela, il faut non pas réduire – arrêtons de réduire ! –, mais augmenter les moyens de la médecine du travail et de l’inspection du travail.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Il s’agit, là encore, d’une demande de décret en Conseil d’État au lieu d’un décret simple. Avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 3587, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon, est ainsi libellé :
Alinéa 69
Compléter cet alinéa par les mots :
en Conseil d’État
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Il ne s’agit évidemment pas de contester la situation des anciens prisonniers de guerre ou évadés de guerre. Ces victimes, fussent-elles passées ou récentes, ont le droit à notre entière considération et aux dispositions les plus favorables, afin de tenir compte de leur situation.
Cet amendement a pour objet les dispositions réglementaires que le Gouvernement pourrait décider de prendre. Nous sommes désormais en droit d’avoir une telle défiance envers lui lorsqu’il s’agit de décider de tout ce qui a trait à l’âge, compte tenu de ce qui s’est produit sur l’article 7, alors même que lors du précédent quinquennat – cela a été dit, mais il est utile de le rappeler – le Président de la République s’était engagé à ne pas décaler l’âge.
Un tel décalage peut ainsi être modulé à tout moment. Par exemple, il suffit – on le voit – que la Commission européenne demande de nouvelles économies, pendant que nous continuons de baisser les impôts pour que nous en arrivions à engager de nouvelles réformes structurelles sur les dépenses publiques, et particulièrement sur celles de notre sécurité sociale.
Face à cela, nous ne pourrons même pas nous protéger derrière le Parlement, puisque le recours à l’article 47-1 de la Constitution pourra de nouveau nous contraindre, comme nous le vivons actuellement.
La défiance, la méfiance qui s’est créée et qui est partagée par les associations ne pourra qu’être alimentée par la façon dont les débats peuvent tourner. Nous proposons donc que le Conseil d’État prenne ces décrets.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 3591, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon, est ainsi libellé :
Alinéa 73
Compléter cet alinéa par les mots :
en Conseil d’État
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Je le rappelle, le conseil de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA), consulté pour avis sur le PLFRSS pour 2023, a émis un avis défavorable. Parmi les causes avancées, on retrouve les mesures relatives aux personnes en situation de handicap. En effet, il apparaît aux membres du conseil « contestable de présenter certaines mesures de statu quo ou de faibles avancées, telles que le maintien de la retraite anticipée pour inaptitude à 62 ans et pour handicap à 55 ans, ou la réduction de la durée d’assurance nécessaire pour accéder à la retraite anticipée, comme des progrès sociaux. » Nous vous l’avons longuement dit sur ces travées, et la CNSA est d’accord avec nous !
Avec des taux de chômage et de pauvreté légèrement supérieurs à la moyenne nationale, une fatigabilité importante et des carrières en dents de scie, les personnes en situation de handicap sont fortement pénalisées par le report de l’âge de la retraite, et je ne parle pas de celles qui peuvent bénéficier de l’âge dérogatoire à 55 ans.
La réforme proposée n’apporte donc, selon la majorité des membres du Conseil, aucune réponse à la hauteur des enjeux – c’est quand même le sujet – et tendra même à renforcer la précarisation de ces personnes. En effet, les personnes en situation de handicap en emploi sont nettement plus âgées que la moyenne. Elles occupent plus souvent des professions peu qualifiées et travaillent plus à temps partiel. On retrouve quelque peu les mêmes caractéristiques que pour les carrières des femmes.
Selon l’Insee, en 2020, parmi les personnes reconnues handicapées, 61 % sont employées ou ouvriers et 32 % sont à temps partiel. Le taux de chômage de ces personnes atteint 14 %. En 2022, il y avait 460 131 demandeurs d’emploi en situation de handicap.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 3591.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 246 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 344 |
Pour l’adoption | 91 |
Contre | 253 |
Le Sénat n’a pas adopté.
L’amendement n° 2131, présenté par M. Savary et Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 78
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
… - À la seconde phrase du premier alinéa de l’article 12 de l’ordonnance n° 2002-411 du 27 mars 2002 relative à la protection sanitaire et sociale à Mayotte, la référence : « 1° ter » est remplacée par la référence : « 2° ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. René-Paul Savary, rapporteur. Amendement de coordination.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. En application de l’article 42, alinéa 10, de notre règlement et conformément à la décision de la conférence des présidents lors de sa réunion du 8 mars, je vous rappelle que les prises de parole et explications de vote sur chaque article de ce projet de loi sont limitées à un seul orateur par groupe politique et à un seul sénateur ne figurant sur la liste d’aucun groupe.
La parole est à Mme Monique Lubin, pour explication de vote.
Mme Monique Lubin. Nous voterons contre cet article, parce que nous considérons que les salariés travaillant depuis longtemps – vous connaissez mon argumentation – seront les premiers pénalisés par le dispositif. Même s’ils bénéficieront toujours d’un report anticipé par rapport à la nouvelle borne d’âge qui sera mise en place par le projet de loi, ils verront malgré tout leur durée de travail prolongée de deux ans maximum.
Je vais vous présenter une autre raison qui nous a poussés à voter contre cet article. Je vais vous lire un message que j’ai reçu :
« J’ai eu 61 ans le 27 février. » (Marques d’impatience sur les travées du groupe Les Républicains.) Un peu de respect, s’il vous plaît !
« Je suis au chômage depuis déjà deux ans ; il ne me reste plus qu’un an de droits à Pôle emploi. Je n’ai pas retrouvé d’emploi depuis mon licenciement en décembre 2020. J’aurais dû être à la retraite en mars 2024, mais si cette réforme passe, mon départ à la retraite sera décalé de six mois. Ce seront six mois sans aucun revenu, hormis le RSA. Est-ce que le gouvernement a prévu quelque chose ? »
M. René-Paul Savary, rapporteur. Le CDI seniors !
Mme Monique Lubin. Un certain nombre de Français seront dans cette situation ; je vous l’assure !
Je terminerai par quelque chose qui ne plaira peut-être pas à M. Retailleau, et tant pis si je dois me faire rappeler à l’ordre. M. le ministre pointait tout à l’heure nos « contradictions », par rapport à la réforme Touraine, etc.
Je rappellerai juste que c’est un décret du président Hollande pris le 3 juillet 2012 qui a remis en place la retraite partielle à 60 ans pour un grand nombre de Français ayant pu depuis bénéficier de carrières longues.
Mme Sophie Primas. Il faut bien qu’il ait fait au moins une chose positive, Hollande ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Monique Lubin. Rendons à César ce qui est à César. (Applaudissements sur des travées du groupe SER.)
M. Olivier Dussopt, ministre. Je n’aurais pas qualifié François Hollande de César ; plutôt de Néron !
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Je ne vous livre pas un scoop : notre groupe votera contre l’article 8. Comme vous avez rejeté tous nos amendements de suppression de cet article, vous n’êtes pas étonnés.
Ce qui est présenté dans cet article comme une avancée sociale, à savoir des départs anticipés pour certains travailleurs, n’est souvent que le simple maintien du statu quo. J’ai déjà beaucoup parlé dans cet hémicycle des femmes. L’amendement présenté par Bruno Retailleau a pour objet non pas d’améliorer leur situation, mais d’amortir quelque peu les conséquences pour quelques-unes de ces femmes.
Dans un rapport de l’inspection générale des affaires sociales (Igas) du mois d’octobre 2022, il est souligné que les femmes et les hommes déclarés en situation d’inaptitude ou de handicap, c’est-à-dire des situations où il est incompatible de rester dans le maintien à un poste de travail, vivent quatre ans et sept mois de moins que les autres pour les hommes et quatre ans et un mois de moins pour les femmes. C’est sans compter leur plus faible niveau de pension, du fait de parcours particulièrement chaotiques. Les personnes en situation d’inaptitude ou de handicap touchent en moyenne 30 % de moins que les autres.
De plus, le Gouvernement maintient à 58 ans l’âge de départ pour celles et ceux qui ont commencé à travailler avant 16 ans, soit moins de 1 % des générations touchées par la réforme.
On voit bien que cet article 8 est dans le prolongement de ceux que nous avons étudiés depuis le début, notamment de l’article 7. Il tend en effet à aggraver les conditions de vie des Françaises et des Français. Pour toutes ces raisons, nous voterons contre. (Applaudissements sur des travées du groupe CRCE.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Il suffit de reprendre l’ensemble de nos amendements pour voir ce que nous pensons des mesures visant à atténuer la brutalité de la réforme.
Cela a été calculé pour les départs anticipés, dont les carrières longues. Les scientifiques qui ont fait des analyses statistiques montrent que les départs anticipés au motif d’une carrière longue vont, dans le régime général, augmenter de deux ans, sauf pour les carrières « super-longues », et toutes les mesures d’atténuation de la brutalité dont vous avez parlé ici et massivement dans les médias. Ainsi, in fine, selon les catégories, les carrières longues vont correspondre à un allongement allant de six mois minimum à un an et demi, pour les carrières longues.
Je le rappelle, pour les départs pour pénibilité, c’est deux ans ferme !
(M. Vincent Delahaye remplace Mme Laurence Rossignol au fauteuil de la présidence.)
PRÉSIDENCE DE M. Vincent Delahaye
vice-président
M. le président. La parole est à M. Philippe Mouiller, pour explication de vote.
M. Philippe Mouiller. Le groupe Les Républicains votera l’article 8.
Je ne reviendrai pas dans le détail de cet article, dont les dispositions sont compliquées. Nous avons eu des précisions sur les carrières longues durant notre débat. Je tiens à souligner le travail de nos rapporteurs, qui maîtrisent parfaitement la situation. Nous avions besoin de ce regard de professionnels, pour pouvoir nous faire une idée précise de notre positionnement politique sur le texte.
Je ne reviendrai pas non plus sur l’ensemble des éléments de l’article. Nous avons essayé, au travers de cet article, d’apporter une plus-value au texte initial du Gouvernement via des mesures de justice sociale – certains diront qu’elles ne sont pas suffisantes –, comme la surcote de 5 % pour les femmes, les carrières anticipées ou les dispositions concernant les personnes handicapées ou invalides.
Nous avons essayé de balayer au maximum les situations les plus complexes pour apporter, par la touche du Sénat et par le travail des rapporteurs et de la commission, des mesures justes qui tendent à améliorer l’acceptabilité de ce texte. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Olivier Henno, pour explication de vote.
M. Olivier Henno. Nous voterons cet article.
Depuis 2003, tous ceux qui se penchent sur les textes de réforme des retraites souhaitent trouver des mesures visant à introduire de la justice, pour les seniors, pour les femmes et pour les carrières longues.
Nous voterons cet article, parce que – cela a été dit par le sénateur Vanlerenberghe et par un certain nombre d’entre nous – la question des carrières longues et de la pénibilité est un véritable sujet. Même si cela a été mentionné, cette question va beaucoup évoluer.
Selon moi, le dispositif – comme dans tous les domaines, d’autres parlementaires se pencheront après nous sur le système de retraite, rien n’étant jamais figé – est intéressant non seulement pour aujourd’hui, mais également pour demain, car il permet de s’adapter aux changements de la réalité de la vie professionnelle et des carrières longues.
C’est tout l’intérêt de cet article 8 et du travail effectué par les rapporteurs. (Applaudissements sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Nous sommes également d’accord aussi pour adopter cet article 8, qui comprend des mesures relatives aux départs anticipés pour carrière longue, à la retraite progressive et à l’état de santé des personnes handicapées, à la prise en compte des trimestres au titre de l’assurance vieillesse des parents au foyer ou des aidants, à l’assouplissement des conditions d’accès des travailleurs handicapés, en abaissant le taux d’incapacité permanente à 50 %.
Nous sommes aussi favorables à la proposition du rapporteur visant à permettre aux mères de famille de partir plus tôt.
M. le président. Je mets aux voix l’article 8, modifié.
J’ai été saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l’une, du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et, l’autre, du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 247 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 339 |
Pour l’adoption | 245 |
Contre | 94 |
Le Sénat a adopté.
Après l’article 8
M. le président. L’amendement n° 2223 rectifié, présenté par M. Iacovelli, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 351-4 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Le II est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, la deuxième occurrence du mot : « quatre » est remplacée par le mot : « treize » ;
b) Aux troisième et sixième alinéas, le mot : « quatrième » est remplacé par le mot : « treizième » ;
2° Au deuxième alinéa du III, le mot : « quatrième » est remplacé par le mot : « treizième » ;
3° Aux IV et V, le mot : « quatre » est remplacé par le mot : « treize ».
La parole est à M. Xavier Iacovelli.
M. Xavier Iacovelli. Actuellement – vous le savez –, les trimestres acquis pour l’éducation des enfants peuvent être partagés entre les parents, si la demande est faite avant le quatrième anniversaire de l’enfant. Nous sommes tous attachés à favoriser l’égalité femmes-hommes. Nous constatons également que le deuxième parent s’implique de plus en plus dans l’éducation de l’enfant.
Cet amendement vise à allonger l’âge de la demande, qui pourrait aller jusqu’au treizième anniversaire, et ainsi assouplir le dispositif du congé parental d’éducation.
M. le président. Le sous-amendement n° 4981, présenté par Mme Poncet Monge, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :
I. Les occurrences « treize » sont remplacées par « quinze ».
II. Les occurrences « treizième » sont remplacées par « quinzième ».
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Ce sous-amendement est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. L’amendement de M. Iacovelli est important, parce que les trimestres sont accordés au titre de l’éducation de l’enfant pendant les quatre années suivant sa naissance ou son adoption.
Il ne paraît donc pas anormal que les parents doivent formuler leur choix dans le délai de six mois suivant le quatrième anniversaire de la naissance ou de l’adoption de l’enfant. Cette disposition-là mérite d’être débattue, parce qu’elle est tout à fait significative.
D’ailleurs, ces majorations se retrouveront dans le calcul pour la surcote. C’est pour cela que nous ne sommes pas enclins à modifier les règles, qui sont bien établies.
En revanche, je pense effectivement que nous partageons le constat sur le déficit d’information. C’est la raison pour laquelle il me semblait important d’inscrire le sujet à l’ordre du jour.
L’information des assurés, qui est insuffisante, sur les possibilités d’un tel choix mérite d’être développée. Nous pensons que M. le ministre nous donnera des précisions pour faire en sorte que les caisses de retraite s’engagent dans cette communication.
Mais il ne nous a pas semblé judicieux de changer les critères à un moment où ce dispositif va être de plus en plus connu.
Ce dispositif pourra toujours être revu, parce que, je le rappelle, le COR publiera un rapport sur les droits sociaux, notamment sur la réversion. Ainsi, je pense que la meilleure information pourra être discutée à ce moment-là.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement n° 2223 rectifié et sur le sous-amendement n° 4981.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre. Le Gouvernement demande le retrait de l’amendement et du sous-amendement.
Premièrement, comme l’a indiqué M. le rapporteur, il existe aujourd’hui des critères. Nous les avons non pas modifiés, mais améliorés, grâce à la surcote.
Mais, à nos yeux, si ces critères et droits familiaux devaient être modifiés dans le temps, il faudrait plutôt le faire à l’occasion du débat sur les congés familiaux et les droits familiaux. Nous cherchons l’uniformisation et l’harmonisation vers le haut. Nous souhaitons faire en sorte que, par exemple, les trimestres d’accueil de l’enfant – quatre en régime général, deux en régime de la fonction publique – soient harmonisés pour rétablir l’égalité.
Deuxièmement, nous avons fait le choix, à propos des droits familiaux, d’apporter dans ce texte des améliorations à règle constante. Cela a été le cas avec la surcote – j’ai commencé par ce point – et ce sera le cas, si votre assemblée le veut bien, sur la question de la majoration de 10 % des pensions pour les parents qui ont eu trois enfants et qui la perdent en cas de décès d’un enfant en bas âge. Cela fait partie des points que nous pouvons traiter rapidement, parce que cela ne change rien à l’attribution des droits ; cela change simplement les conditions de leur exercice.
La Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement, au bénéfice du chantier sur les droits familiaux.
M. Xavier Iacovelli. Je retire mon amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 2223 est retiré et, en conséquence, le sous-amendement 4981 n’a plus d’objet.
L’amendement n° 6 rectifié quinquies, présenté par Mme Billon et les membres du groupe Union Centriste, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Le V de l’article L. 351-4 est ainsi modifié :
a) Il est ajouté une phrase ainsi rédigée :
« Ce délai n’est pas applicable en cas de perte de l’autorité parentale ou de son exercice consécutive à une condamnation pénale au titre des crimes ou délits prévus à la section 1 du chapitre Ier du titre II du livre II du code pénal, ou aux paragraphes 1 et 2 des sections 1 et 3 du chapitre II du même titre II, lorsque ces crimes ou délits ont été commis à l’encontre de l’enfant. » ;
b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque la majoration a été répartie entre les parents conformément aux dispositions prévues au II, les trimestres attribués au parent condamné et dont la pension n’a pas encore été liquidée sont attribués à l’autre parent. » ;
2° L’article L. 351-12 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« L’assuré ne peut bénéficier de la majoration prévue au premier alinéa s’il a été privé de l’exercice de l’autorité parentale ou s’est vu retirer l’autorité parentale consécutivement à une condamnation pénale au titre des crimes ou délits prévus à la section 1 du chapitre Ier du titre II du livre II du code pénal, ou aux paragraphes 1 et 2 des sections 1 et 3 du chapitre II du même titre II, lorsque ces crimes ou délits ont été commis à l’encontre d’un des enfants. »
II. – L’article L. 18 du code des pensions civiles et militaires est complété par un VI ainsi rédigé :
« VI : Le titulaire ne peut bénéficier de la majoration prévue au I s’il a été privé de l’exercice de l’autorité parentale ou s’est vu retirer l’autorité parentale consécutivement à une condamnation pénale au titre des crimes ou délits prévus à la section 1 du chapitre Ier du titre II du livre II du code pénal, ou aux paragraphes 1 et 2 des sections 1 et 3 du chapitre II du même titre II, lorsque ces crimes ou délits ont été commis à l’encontre d’un des enfants. »
III. - Les dispositions du présent article sont applicables pour les privations et retraits de l’exercice de l’autorité parentale prenant effet à compter du 1er septembre 2023.
La parole est à Mme Annick Billon.
Mme Annick Billon. Depuis l’entrée en vigueur de la loi du 28 décembre 2019 visant à agir contre les violences au sein de la famille, la pension de réversion n’est pas due dans le cas où le conjoint survivant est ou a été condamné pour avoir commis des violences conjugales à l’encontre de l’époux assuré.
L’amendement que je vous présente s’inscrit dans le prolongement de ces dispositifs. Il a pour objet de priver un parent condamné pour violence et maltraitance à l’encontre de son ou de ses enfants, de l’ensemble des majorations ou bonifications liées aux enfants. Un enfant est tué par l’un de ses parents tous les cinq jours en France en moyenne, et 45 % des Français suspectent au moins un cas de maltraitance dans leur environnement immédiat – famille, voisins, collègues, amis, proches –, sachant que les parents représentent 86 % des auteurs présumés de maltraitance.
L’objet de cet amendement – en réalité, il s’agit d’une mesure de bon sens – est de priver le parent maltraitant du bénéfice pour le calcul de ses droits à la retraite des majorations de durée d’assurance pour éducation ou de la majoration de pension liées aux enfants.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Ma chère collègue, je vous remercie d’avoir déposé cet amendement. Le problème est réel. Il faut que de telles mesures puissent s’appliquer. Avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre. Madame la sénatrice Billon, je souhaite vous remercier de votre amendement. Nous avons discuté de cette piste-là. Nous avions craint, à l’origine, qu’une telle mesure ne soit qu’une peine complémentaire décidée par le juge dans le cadre d’une sanction. Mais la rédaction que vous proposez permet effectivement de donner suite à ce projet.
Cette disposition tendra à priver des parents condamnés par un juge pour des crimes et des délits de maltraitance, de violence sur leurs enfants, des trimestres de majoration – les trimestres d’accueil de l’enfant ou d’éducation –, mais aussi de la majoration de 10 %, dans le cas où ils auraient trois enfants. Avis favorable.
M. Xavier Iacovelli. Très bien !
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 6 rectifié quinquies.
(L’amendement est adopté.) – (Applaudissements sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 8.
L’amendement n° 4568 rectifié, présenté par Mmes Rossignol, Lubin, Poumirol et Meunier, M. Montaugé, Mmes S. Robert, Blatrix Contat, Harribey, de La Gontrie et M. Filleul, M. Michau, Mmes Jasmin et Conway-Mouret, MM. Durain, Bouad, M. Vallet, Temal, Cardon, Redon-Sarrazy et Gillé, Mme Conconne, M. Tissot, Mme Monier, M. Stanzione, Mme Le Houerou et MM. Devinaz et P. Joly, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le deuxième alinéa du II de l’article L. 351-4 du code de la sécurité sociale est complété par une deuxième phrase ainsi rédigée : « Le bénéfice de cette majoration en faveur de la mère assurée sociale ne peut être inférieur à deux trimestres. »
La parole est à Mme Laurence Rossignol.
Mme Laurence Rossignol. Tout d’abord, je me réjouis que l’amendement de ma collègue Annick Billon, présidente de la délégation aux droits des femmes, vienne d’être adopté.
Les amendements que je vais présenter concernent tous les majorations de durée d’assurance qui sont dues au titre de l’éducation des enfants. Il y a deux types de majoration : celles qui sont liées à la naissance de l’enfant ou à l’adoption et celles qui sont liées à leur éducation.
Pour les enfants nés après 2010, il est prévu que les parents peuvent choisir de répartir entre l’un et l’autre à leur gré – quatre trimestres pour le père ou deux ou un – les fameux trimestres liés à l’éducation des enfants.
Cette disposition – j’en vois bien l’idée – tendait probablement à encourager à la répartition des tâches entre le père et la mère. Mais le problème est que nous ne vivons pas dans un monde idéal où nous serions déjà parvenus au moment où la charge des enfants reposerait de manière totalement égalitaire entre le père et la mère.
Aujourd’hui, la charge mentale, c’est-à-dire les tâches ménagères, la responsabilité familiale, repose toujours très principalement sur la mère. Je pourrais vous donner un certain nombre de statistiques sur la répartition des tâches. Très récemment, j’en ai vu passer une selon laquelle plus de 80 % des rendez-vous pris sur Doctolib pour des enfants sont pris par la mère ! Voilà qui en dit long sur la charge mentale qui pèse sur l’un ou l’autre des deux parents.
Les amendements que nous vous proposons visent à prendre acte du fait qu’aujourd’hui encore, ce sont les femmes qui sont pénalisées dans leur carrière professionnelle par le fait d’être mère de famille.
J’en tiens pour preuve également que plus de la moitié des femmes réduisent leur temps de travail, leurs ambitions professionnelles, changent leur projet de carrière après la naissance d’un enfant.
Mes différents amendements – certains concernent les enfants biologiques, tandis que les autres portent sur les enfants adoptés – visent à assurer l’égalité et, surtout, à protéger les femmes qui verraient leurs trimestres passer entièrement entre les mains du père.
En l’occurrence, l’amendement n° 4568 rectifié tend à imposer que le bénéfice de la majoration au titre de l’éducation ne puisse être inférieur à deux trimestres pour la mère ; le père ne peut pas s’attribuer les quatre trimestres.
M. le président. L’amendement n° 4570 rectifié, présenté par Mmes Rossignol, Lubin, Poumirol et Meunier, M. Montaugé, Mmes S. Robert, Blatrix Contat, Harribey, de La Gontrie et M. Filleul, M. Michau, Mmes Jasmin et Conway-Mouret, MM. Durain, Bouad, M. Vallet, Temal, Cardon, Redon-Sarrazy et Gillé, Mme Conconne, M. Tissot, Mme Monier, M. Stanzione, Mme Le Houerou et M. P. Joly, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le deuxième alinéa du II de l’article L. 351-4 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée : « Seuls les pères salariés conjoints ou concubins de la mère salariée ou les personnes salariées liées à elle par un pacte de solidarité ayant fait valoir la totalité des droits au congé prévu par les articles L. 1225-35 du code du travail et L. 331-8 du présent code peuvent bénéficier de la majoration de la durée d’assurance. »
La parole est à Mme Laurence Rossignol.
Mme Laurence Rossignol. Cet amendement un peu sioux tend à préciser que seuls les pères salariés ayant pris la totalité de leur congé de paternité peuvent obtenir des trimestres au titre de l’éducation des enfants.
Il s’agit d’éviter qu’un père n’ayant pas utilisé les vingt-huit jours de congé de paternité puisse ensuite prétendre au bénéfice de deux, trois ou quatre trimestres au titre de l’éducation de ses enfants, alors même qu’il ne s’est pas impliqué dès leur naissance. (Murmures sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)
M. le président. L’amendement n° 4573 rectifié, présenté par Mmes Rossignol, Lubin, Poumirol et Meunier, M. Montaugé, Mmes Blatrix Contat, Harribey, de La Gontrie, S. Robert et M. Filleul, M. Michau, Mmes Jasmin et Conway-Mouret, MM. Durain, Bouad, M. Vallet, Temal, Cardon, Redon-Sarrazy et Gillé, Mme Conconne, MM. Tissot et Kerrouche, Mme Monier, M. Stanzione, Mme Le Houerou et M. P. Joly, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la seconde phrase du quatrième alinéa du II de l’article L. 351-4 du code de la sécurité sociale, les mots : « partagée par moitié entre les deux parents » sont remplacés par les mots : « attribuée à la mère ».
La parole est à Mme Laurence Rossignol.
Mme Laurence Rossignol. Cet amendement vise à garantir qu’en cas de conflit, les droits soient non plus partagés à parts égales entre les deux parents, mais attribués intégralement à la mère.
Si le père n’a pu faire valoir auprès de la Cnav qu’il a bien élevé les enfants, ou en cas de doute à ce sujet, il me semble en effet que les trimestres doivent revenir à la mère.
M. le président. L’amendement n° 4569 rectifié, présenté par Mmes Rossignol, Lubin, Poumirol et Meunier, M. Montaugé, Mmes S. Robert, Blatrix Contat, de La Gontrie, Harribey et M. Filleul, M. Michau, Mmes Jasmin et Conway-Mouret, MM. Durain, Bouad, M. Vallet, Temal, Cardon, Redon-Sarrazy et Gillé, Mme Conconne, MM. Tissot et Kerrouche, Mme Monier, M. Stanzione, Mme Le Houerou et MM. Devinaz et P. Joly, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après la deuxième phrase du deuxième alinéa du III de l’article L. 351-4 du code de la sécurité sociale, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Le bénéfice de cette majoration en faveur de la mère assurée sociale ne peut être inférieur à deux trimestres. »
La parole est à Mme Laurence Rossignol.
Mme Laurence Rossignol. Il s’agit, par cet amendement, de garantir que le bénéfice de la majoration en faveur de la mère assurée sociale ne puisse être inférieur à deux trimestres.
M. le président. L’amendement n° 4571 rectifié, présenté par Mmes Rossignol, Lubin, Poumirol et Meunier, M. Montaugé, Mmes S. Robert, Blatrix Contat, Harribey, de La Gontrie et M. Filleul, M. Michau, Mmes Jasmin et Conway-Mouret, MM. Durain, Bouad, M. Vallet, Temal, Cardon, Redon-Sarrazy et Gillé, Mme Conconne, M. Tissot, Mme Monier, M. Stanzione, Mme Le Houerou et M. P. Joly, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après la deuxième phrase du deuxième alinéa du III de l’article L. 351-4 du code de la sécurité sociale, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Seuls les pères salariés conjoints ou concubins de la mère salariée ou les personnes salariées liées à elle par un pacte de solidarité ayant fait valoir la totalité des droits au congé prévu par les articles L. 1225-35 du code du travail et L. 331-8 du présent code peuvent bénéficier de la majoration de la durée d’assurance. »
La parole est à Mme Laurence Rossignol.
Mme Laurence Rossignol. Cet amendement est défendu.
M. le président. L’amendement n° 4572 rectifié, présenté par Mmes Rossignol, Lubin, Poumirol et Meunier, M. Montaugé, Mmes S. Robert, Blatrix Contat, Harribey et de La Gontrie, M. Michau, Mmes M. Filleul, Jasmin et Conway-Mouret, MM. Durain, Bouad et M. Vallet, Mme Conconne, MM. Cardon, Redon-Sarrazy, Gillé, Temal, Tissot et Kerrouche, Mme Monier, M. Stanzione, Mme Le Houerou et M. P. Joly, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la troisième phrase du deuxième alinéa du III de l’article L. 351-4 du code de la sécurité sociale, les mots : « est partagée par moitié entre les deux parents » sont remplacés par les mots : « attribuée à la mère ».
La parole est à Mme Laurence Rossignol.
Mme Laurence Rossignol. Cet amendement clôt une série d’amendements tendant à prendre en compte les inégalités entre les femmes et les hommes en général, ainsi que celles qui sont liées à la charge des enfants et à la carrière professionnelle, pour contrer leur répercussion sur le bénéfice de ces trimestres.
Mes chers collègues, je vous invite à voter ces mesures d’égalité, en attendant le grand jour où nous pourrons constater que nous sommes effectivement à égalité dans la répartition des tâches. Nous en sommes encore loin. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. L’amendement n° 4568 rectifié vise à partager les quatre trimestres de majoration à parts égales entre les deux membres du couple. Pour autant, le dispositif qu’il tend à modifier est encore récent et n’est pas suffisamment connu. Une information est nécessaire, mais il serait insuffisant de la limiter au site Info Retraite. Elle pourrait, par exemple, être faite au niveau des caisses d’assurance retraite et de santé au travail (Carsat).
N’oublions pas que les majorations accordées dans ce contexte atteignaient huit trimestres pour la maternité avant que les règles européennes ne nous contraignent à rééquilibrer cette distribution. C’est alors que quatre trimestres sont restés attribués à la mère, les quatre autres, appuyés sur l’éducation et répartis entre les parents, étant la cible de cet amendement. Tout cela ne concerne en outre que les salariés du privé, les fonctionnaires ne bénéficient en tout et pour tout que de deux trimestres pour la maternité.
En ajoutant encore des règles, le risque est toutefois que ce dispositif manque son objectif.
Je le répète, une étude sur les droits sociaux doit être lancée par le Conseil d’orientation des retraites dans un délai contraint ; ses membres dans notre assemblée, Monique Lubin et Jean-Marie Vanlerenberghe, savent combien de tels travaux sont intéressants. Il faudra à cette occasion mettre cette problématique sur la table, en même temps que d’autres droits, comme les treize dispositifs de réversion, qui sont très inégalitaires.
Je préfère attendre le fruit de cette réflexion et ne pas prendre de décision immédiate.
La commission émet un avis défavorable sur ces amendements, même si Mme Laurence Rossignol soulève des questions intéressantes.
M. Vincent Éblé. Elle soulève des questions, mais il ne faut surtout pas y répondre !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre. Les tâches ménagères sont-elles mal partagées, voire très déséquilibrées ? Oui ; mille fois oui ! Cela fait partie des questions que j’ai déjà évoquées, tant l’inégalité professionnelle elle-même est parfois nourrie par les inégalités de partage des tâches.
Le système que nous connaissons aujourd’hui, fondé sur un choix de partage des trimestres d’éducation entre les deux parents jusqu’aux quatre ans de l’enfant, est-il connu ? Non. Il nous faut trouver les moyens de diffuser l’information dans la population.
Nous sommes attachés aux principes de partage et de liberté. Cela ne nous empêche pas de travailler à une amélioration du système. Mais il nous est difficile de donner un avis favorable sur des amendements tendant à contraindre les modalités de répartition.
Enfin, comme l’a dit M. le rapporteur, et comme je l’ai dit moi-même, nous entendons ouvrir un chantier sur les droits familiaux, y compris sur les questions d’harmonisation, notamment entre le régime général et le régime de la fonction publique. Il me paraît plus judicieux de lui réserver l’ensemble de ces sujets, à l’exception des quelques mesures de progrès que nous avons adoptées et de celles qui viendront encore.
Nous demandons donc le retrait de ces amendements. À défaut, l’avis du Gouvernement serait défavorable.
M. le président. La parole est à M. Xavier Iacovelli, pour explication de vote.
M. Xavier Iacovelli. Je suis souvent d’accord avec Mme Rossignol sur de tels sujets, mais je ne suis pas forcément favorable à tous ces amendements.
Je voterai l’amendement n° 4568 rectifié, car le dispositif proposé va dans le sens de l’égalité. Il existe effectivement un risque d’emprise de l’homme sur la femme aboutissant à la mobilisation des quatre trimestres à son avantage. L’idée d’attribuer automatiquement deux trimestres à la mère et de laisser les deux autres au partage entre les deux parents nous convient donc.
Mais il me semble effectivement que nous avons besoin d’une réflexion plus large sur les autres propositions dont nous sommes saisis. Le projet relatif aux droits familiaux que le ministre a annoncé en sera peut-être l’occasion. Je ne voterai pas contre ces amendements, mais je m’abstiendrai.
L’égalité est un vrai sujet. Je ne suis pas certain que nous allions dans le bon sens en privant les pères et en les contraignant. Travaillons plutôt à des dispositifs favorisant le partage des tâches, s’agissant notamment d’éducation des enfants.
M. le président. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.
M. Pierre Ouzoulias. En matière d’égalité entre les femmes et les hommes, nous savons où conduit toujours la liberté. Regardez cet hémicycle ; si le principe de liberté avait été respecté, pas une seule femme n’y siégerait. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Sophie Primas. Je ne suis pas d’accord !
Mme Laurence Rossignol. Prenez la parole pour le dire !
M. Pierre Ouzoulias. Madame Primas, vous pourrez parler après moi ; je pense que le débat sera intéressant !
Il nous faut donc prendre des décisions importantes, car nous savons, comme élus, que sans un dispositif légal pour permettre aux femmes de progresser, nous n’y parvenons pas. Mme Rossignol a avancé des propositions en ce sens très cohérentes et réfléchies, fruit de son expérience d’ancienne ministre.
Vous affirmez qu’il n’y a pas d’urgence ? Mais nous siégeons aujourd’hui pour examiner un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale présenté dans une urgence extrême ! Pourquoi donc n’y aurait-il pas d’urgence sur l’égalité entre hommes et femmes ? C’est un sujet aussi urgent que le reste. Nous voterons ces amendements. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)
M. le président. La parole est à Mme Sylvie Robert, pour explication de vote.
Mme Sylvie Robert. Je suis cosignataire de ces amendements, qui pointent un phénomène extrêmement important : la répartition inégale des temps et des tâches dans la sphère parentale et domestique, qui reste prégnante dans notre société. Si la loi ne s’y attelle pas, nous risquons d’attendre encore très longtemps pour que le problème soit réglé.
Certains de nos collègues considèrent que les jeunes générations d’hommes participent plus aux tâches ménagères. Mais les statistiques sont claires : cela évolue très lentement. Ce ne sont pas les femmes qui en font moins ; ce sont simplement les hommes qui en font un petit peu plus.
Il est vrai que nous assistons à une prise de conscience du phénomène. Mais la répartition traditionnelle des tâches en matière parentale reste très ancrée.
Ces amendements ont pour vertu de nous rappeler que, sans la loi tendant à favoriser l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, dite loi sur la parité », beaucoup de femmes ne seraient pas en politique aujourd’hui. C’est la preuve que la loi permet d’avancer.
Pour ce qui est de la répartition des trimestres, nous savons bien que, dans la sphère familiale, entre un homme et une femme, les relations sont beaucoup plus complexes que l’on ne pourrait parfois se l’imaginer.
M. René-Paul Savary, rapporteur. Bien sûr !
Mme Sylvie Robert. Je voterai donc ces amendements, car il s’agit bien d’un problème de société ; ce n’est pas juste une question de manque d’information.
M. le président. La parole est à Mme Annick Billon, pour explication de vote.
Mme Annick Billon. Je remercie notre collègue Laurence Rossignol d’avoir déposé ces amendements, qui nous permettent de débattre de l’égalité des chances, de l’égalité tout court et de l’égalité entre les hommes et les femmes devant la retraite.
Comme vous, ma chère collègue, je suis persuadée que la répartition des tâches est profondément inégale et que certaines de nos collègues n’auraient pas siégé dans cet hémicycle s’il n’y avait pas eu de la contrainte. Nous avançons souvent sous la contrainte ; de nombreux exemples le démontrent.
Ainsi, sans la loi relative à la représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des conseils d’administration et de surveillance et à l’égalité professionnelle, dite Copé-Zimmermann, il n’y aurait pas autant de femmes dans les conseils d’administration et dans les conseils de surveillance ; sans la mise en place du seuil des 1 000 habitants, il n’y aurait pas autant de femmes dans les conseils municipaux des communes de plus de 1 000 habitants ; sans l’imposition du binôme mixte pour l’élection des conseillers départementaux, nous n’aurions pas d’assemblées paritaires. Oui, en matière d’égalité, nous avançons seulement sous la contrainte.
Un bémol, tout de même : efforçons-nous de ne pas aggraver la complexité déjà importante de notre système de retraite.
Comme présidente de la délégation aux droits des femmes, je vais m’associer à ces amendements pour le principe et parce que ce sujet a sa place dans notre débat. Attention toutefois à ne pas transformer notre système de retraite en usine à gaz.
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Les amendements de Laurence Rossignol ont un grand intérêt : ils nous permettent d’explorer de nouveaux leviers pour réduire l’inégalité entre les hommes et les femmes. Jusqu’à maintenant, les dispositifs visant cet objectif qui ont été examinés dans ce texte étaient d’ordre financier, à l’instar de l’amendement relatif à la surcote.
À l’inverse, ces amendements ne coûtent rien, n’aggravent aucun déficit et auront pour effet de réduire les inégalités entre les femmes et les hommes.
Je trouve particulièrement ingénieux et adapté le dispositif de l’amendement n° 4570 rectifié, qui me semble être de nature à modifier les comportements en faveur d’une meilleure répartition des tâches entre les femmes et les hommes, grâce à un effet de levier.
Je voterai donc ces amendements avec beaucoup d’intérêt.
M. le président. La parole est à M. Pierre Laurent, pour explication de vote.
M. Pierre Laurent. Je soutiens également tous ces amendements. Nous les voterons.
Nous savons que si nous ne créons pas d’obligations supplémentaires, la situation n’évoluera pas assez vite, alors même que les attentes sont très importantes. Comme dans d’autres domaines, la société exige de nous non plus des paroles, non plus des intentions, mais bien des avancées concrètes !
Beaucoup d’hommes résistent à un partage réel, mais il en existe beaucoup également qui se posent la question, avec de bonnes intentions, mais sans vraiment franchir le pas et sans aller suffisamment vers une meilleure répartition des tâches. L’amendement qui tend à conditionner le partage des trimestres majorés à la consommation du congé de paternité me semble susceptible d’encourager efficacement ces hommes qui s’interrogent.
Il nous faut émettre un signal pour aider la société tout entière à franchir le pas. C’est pourquoi je soutiens totalement ces amendements.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.
Mme Laurence Rossignol. Chers collègues de la majorité sénatoriale – je vous le dis très gentiment –, lorsque vous souhaitez débattre de politique familiale, en général, je réponds présente. Je suis donc un peu désolée qu’alors que nous abordons l’articulation entre retraite et politique familiale, vous nous laissiez débattre seuls, comme depuis le début de l’examen de ce texte. Ce petit regret étant exprimé, j’espère que nous aurons d’autres occasions pour discuter du sujet.
Faisons un petit rappel historique. Auparavant, les huit trimestres accordés pour la naissance d’un enfant étaient destinés aux femmes. L’Union européenne ayant considéré que cette politique était discriminatoire à l’égard des hommes, l’allocation a été divisée en deux : quatre trimestres liés à la naissance sont restés attribués aux femmes, quatre autres ont été attachés à l’éducation et répartis entre les deux parents, selon des modalités dont ceux-ci décident.
Or cette évolution ne correspond à la réalité ni de la vie des familles ni des répercussions des inégalités sur les femmes. Certaines des mesures que je propose par ces amendements visent donc à mieux protéger ces dernières.
Xavier Iacovelli l’a dit, cette répartition doit intervenir avant les 4 ans de l’enfant. Il n’est pas farfelu d’imaginer qu’un homme puisse dire à sa femme qu’il va prendre tous les trimestres sans s’impliquer outre mesure dans l’éducation des enfants. Nous pouvons sans doute nous accorder sur ce point. Grâce à ces amendements, au moins deux de ces trimestres reviendront à la mère.
En outre, en cas de désaccord entre les parents, le code permet au père de prouver ensuite qu’il s’est occupé tout seul de l’éducation des enfants. Ces amendements visent donc à protéger les femmes en prenant acte des inégalités qui règnent encore aujourd’hui.
M. le président. La parole est à Mme Sophie Primas, pour explication de vote.
Mme Sophie Primas. Je réponds à votre appel, madame la présidente Rossignol, et je vous remercie de ce débat. Vous avez raison : dès lors que l’on peut discuter de nouveaux sujets, sans répéter sans cesse les mêmes choses, le débat est intéressant…
Sans être une spécialiste des affaires sociales, je suis très sensible à vos arguments. Je comprends toutefois que le mécanisme que vous décrivez est récent et peu connu des hommes comme des femmes ayant eu des enfants durant les quatre dernières années. Les Français ne se le sont pas approprié.
Il me semble dès lors un peu contradictoire d’ouvrir un dispositif aux hommes pour les encourager à s’occuper des enfants et de leur éducation, pour le refermer immédiatement sous prétexte qu’étant des hommes, ils vont sans doute profiter des femmes.
Le rapporteur nous a indiqué qu’une étude était en cours et que les droits familiaux feront l’objet d’un projet de loi. À mon sens, un peu de temps supplémentaire permettrait de mener la réflexion à son terme et de résoudre cette petite contradiction.
C’est pourquoi, à titre personnel, je m’abstiendrai sur ces amendements.
M. le président. La parole est à Mme Laure Darcos, pour explication de vote.
Mme Laure Darcos. Je remercie à mon tour Laurence Rossignol de ses propositions. Je me pose quant à moi une autre question : il me semble que nous évoquons un phénomène générationnel. Les hommes de la jeune génération, celle qui est actuellement concernée par le congé parental, s’en saisissent beaucoup plus. Or ce sont eux qui se trouveront encore plus motivés en ce sens par le bénéfice d’un partage des trimestres. Le projet de loi en discussion est, par ailleurs, appelé à toucher des hommes et des femmes qui ne sont plus du tout dans les âges des congés parentaux.
Je crains donc que ces mesures pénalisent d’un côté des hommes de bonnes volontés qui ignoraient le système en place et sans pour autant concerner des hommes qui n’auraient de toute façon pas pu en bénéficier, parce qu’il n’existait pas. (Murmures sur les travées des groupes CRCE et SER.)
Peut-être ai-je mal compris, mais ces amendements me paraissent faire sens pour la génération concernée par le congé parental actuellement et qui pratique déjà le partage des tâches. Pour autant, il me semble difficile de désavantager les hommes plus âgés qui n’ont pas pris ces congés ou qui travaillaient dans des entreprises qui ne leur ont pas permis de le faire.
M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour explication de vote.
Mme Angèle Préville. Oui, il y a urgence, monsieur le ministre ; ces amendements sont nécessaires ! Combien de temps encore nous faudra-t-il attendre dans ce long chemin vers l’égalité ? Au rythme où nous allons, beaucoup trop longtemps !
Notre but est que l’égalité s’installe vraiment. Or nous savons tous que sans contrainte, il n’y a pas de progrès. J’en suis particulièrement consciente : sans les lois relatives aux élections, notamment, je n’aurais pas été élue dans ma commune : l’imposition de la parité m’a permis d’être maire adjointe en 2014 puis élue au conseil départemental en 2015, par le biais des binômes. Je suis ici grâce à l’inscription dans la loi de ces principes.
On ne peut pas faire comme si tout ce qui a été évoqué jusqu’à présent n’existait pas, comme si tout allait bien. Les injustices vécues par les femmes sont multiples ; elles se nichent dans beaucoup de petites choses. C’est cela que nous devons regarder en face.
Le cadre posé dans ces amendements me semble légitime et approprié à la réalité que nous vivons. Il s’agit de préserver l’égalité sans rien enlever au droit des pères qui s’impliquent effectivement.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Exactement
M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour explication de vote.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Le débat est en effet intéressant, comme le sont les points de vue transpartisans qui s’expriment.
Ne cédons pas pour autant aux idées fausses : on peut s’interroger quant à cet effet générationnel, et nous connaissons tous des exemples inverses. Il ne s’agit en rien ici de déposséder les pères : l’amendement n° 4568 rectifié tend simplement à préciser que, dans le couple parental, la mère ne saurait bénéficier de moins de la moitié des trimestres restants. C’est équilibré et cela préserve les intérêts de chacun, tout en veillant à celui de la mère.
M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour explication de vote.
Mme Véronique Guillotin. Je voterai en faveur de ces amendements. Il s’agit, me semble-t-il, d’un marqueur important en matière d’égalité entre les hommes et les femmes. On le constate avec les élections : il est difficile de progresser dans ce domaine sans inscrire clairement ces principes dans la loi.
L’allongement de la durée de la retraite a ainsi souvent été défendu au travers d’amendements qui n’étaient peut-être pas toujours à propos. Cela a mis plusieurs années, mais nous l’inscrivons dans ce texte.
Je rêve, quant à moi, que l’égalité avance. Je voterai donc ces amendements.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Nous avons évoqué au cours de nos débats les difficultés d’accès à l’emploi des femmes, en constatant que leur taux d’emploi était inférieur à celui des hommes. Une des solutions à ce problème, préconisée par les associations féministes et les syndicats, se trouve dans la socialisation des tâches domestiques, à travers la création d’un service public de la petite enfance et de l’accompagnement des personnes dépendantes.
À l’instar des propositions de Laurence Rossignol, ces pistes s’inscrivent dans une réflexion visant à permettre aux femmes et aux hommes de connaître la pleine égalité.
J’entends qu’il serait peut-être trop original, voire un peu embêtant de voter ces amendements au Sénat, parce que nous n’y aurions pas suffisamment réfléchi, et qu’il faudrait plutôt privilégier un autre véhicule ou lancer une étude d’impact. Nous savons pourtant que ces mesures sont dénuées de conséquences budgétaires.
À mon sens, de tels arguments ne doivent pas nous conduire à renoncer. Ces amendements permettent au contraire aux parlementaires de prendre l’initiative à partir de réflexions qui traversent la société depuis un certain temps. Il serait regrettable que nous décidions d’attendre encore parce qu’il s’agit des femmes ; c’est toujours ce que l’on nous oppose dès lors qu’il est question de travailler pour l’égalité.
Mme Sophie Primas. Ce n’est pas du tout ce que nous avons dit.
Mme Laurence Cohen. Pour toutes ces raisons, avec l’ensemble de mon groupe, je soutiendrai les amendements de Mme Rossignol.
M. le président. La parole est à M. Olivier Henno, pour explication de vote.
M. Olivier Henno. Il est bon que les hommes s’expriment également sur ce sujet. (Mmes Sophie Primas et Agnès Canayer applaudissent.) Mon silence était dicté non pas par la prudence, mais par la réflexion, assortie d’une part de doute.
Je vois bien la distinction entre les congés, de maternité ou de paternité, et la charge que chacun des parents prend dans l’éducation des enfants, celle-ci pouvant évoluer. Je suis donc assez favorable à un partage des trimestres, mais il ne me paraît pas souhaitable de le figer, même si je comprends les raisons pour lesquelles cela nous est proposé. Je vous l’ai toutefois dit : je conserve ma part de doute. Je m’abstiendrai.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Je voterai l’amendement n° 4568 rectifié, qui me semble positif en termes d’égalité.
En revanche, je trouve les autres amendements dirimants et je ne peux pas les soutenir.
Par exemple, l’amendement n° 4570 rectifié présente un problème de calendrier. Le partage des trimestres intervient après le congé parental. Or il n’est pas possible, selon moi, de punir a posteriori un père qui n’aurait pas pris ce congé au moment de la naissance de l’enfant, peut-être en raison d’une situation de carrière qui l’aurait empêché de se libérer. Ce problème de concordance de temps emporte donc des conséquences qui me semblent excessives. (Murmures sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. le président. La parole est à Mme Sylvie Vermeillet, pour explication de vote.
Mme Sylvie Vermeillet. Je ne fais pas partie de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes du Sénat, mais comme membre de la commission des finances, il ne m’aura pas échappé que ces amendements ne coûtent rien.
Quand il sera nécessaire de créer une délégation au droit des hommes, il sera temps de corriger ces amendements. Mais, ce soir, je vais les voter ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 4568 rectifié.
(L’amendement est adopté.) – (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 8.
Je mets aux voix l’amendement n° 4570 rectifié.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, adopte l’amendement.) – (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 8.
Je mets aux voix l’amendement n° 4573 rectifié.
(L’amendement est adopté.) – (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 8.
Je mets aux voix l’amendement n° 4569 rectifié.
(L’amendement est adopté.) – (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 8.
Je mets aux voix l’amendement n° 4571 rectifié.
(L’amendement est adopté.) – (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 8.
Je mets aux voix l’amendement n° 4572 rectifié.
(L’amendement est adopté.) – (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 8.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt heures, est reprise à vingt et une heures trente.)
M. le président. La séance est reprise.
6
Mise au point au sujet d’un vote
M. le président. La parole est à M. Henri Cabanel, pour une mise au point au sujet d’un vote.
M. Henri Cabanel. Monsieur le président, lors du scrutin du n° 247, mes collègues Stéphane Artano, Christian Bilhac, Maryse Carrère, Éric Gold, Jean-Noël Guérini et Jean-Yves Roux souhaitaient s’abstenir.
M. le président. Acte vous est donné de votre mise au point, cher collègue. Elle figurera dans l’analyse politique du scrutin concerné.
7
Communication relative à une commission mixte paritaire
M. le président. J’informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à ouvrir le tiers-financement à l’État, à ses établissements publics et aux collectivités territoriales pour favoriser les travaux de rénovation énergétique est parvenue à l’adoption d’un texte commun.
8
Loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023
Suite de la discussion d’un projet de loi
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023.
Dans la discussion des articles, nous poursuivons l’examen d’amendements tendant à insérer des articles additionnels après l’article 8.
Après l’article 8 (suite)
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements identiques et de trois sous-amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 1577 est présenté par Mme Billon.
L’amendement n° 1915 rectifié est présenté par MM. Iacovelli, Lévrier, Hassani, Patriat, Bargeton et Buis, Mme Cazebonne, MM. Dagbert et Dennemont, Mme Duranton, M. Gattolin, Mme Havet, MM. Haye, Kulimoetoke, Lemoyne, Marchand, Mohamed Soilihi et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud, Richard et Rohfritsch, Mme Schillinger, M. Théophile et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
L’amendement n° 2346 rectifié ter est présenté par MM. Capus, Grand, Guerriau, Médevielle, Verzelen, Chasseing, Decool et Lagourgue, Mmes Mélot et Paoli-Gagin et MM. Wattebled, Menonville et Malhuret.
L’amendement n° 3410 est présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon.
L’amendement n° 4462 rectifié est présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli.
Ces cinq amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le VI de l’article L. 351-4 du code de la sécurité sociale est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Par dérogation au premier alinéa du présent VI, en cas de décès de l’enfant avant la fin de la quatrième année suivant sa naissance ou son adoption, la majoration prévue audit II est égale à quatre trimestres.
« En cas de condamnation définitive d’une personne pour meurtre dans les situations prévues aux 1°, 3° et 4° ter de l’article 221-4 du code pénal lorsque la victime est l’enfant ouvrant droit à la majoration prévue au II du présent article, la personne condamnée ne peut bénéficier de cette majoration. »
La parole est à Mme Annick Billon, pour présenter l’amendement n° 1577.
Mme Annick Billon. Cet amendement vise à attribuer une majoration de durée d’assurance au titre de l’éducation de quatre trimestres en cas de décès de l’enfant avant la fin de la quatrième année suivant sa naissance ou son adoption.
L’article L. 351-4 du code de la sécurité sociale prévoit actuellement qu’en cas de décès de l’enfant, la majoration de durée d’assurance reste due, sous réserve de remplir les conditions au service de la majoration : durée d’assurance préalable requise et exercice de l’autorité parentale.
Le nombre de trimestres est néanmoins proportionnel au nombre d’années durant lesquelles l’assuré a résidé avec l’enfant, avant son décès.
Cet amendement vise donc à attribuer un nombre de quatre trimestres à l’assuré au titre de la majoration de durée d’assurance visée au II de l’article L. 351-4 du code de la sécurité sociale, quelle que soit la durée de résidence avec l’enfant au moment du décès. L’attribution en cas de décès resterait néanmoins soumise aux autres conditions requises.
En cas de décès de l’enfant du fait d’un des deux parents, ce dernier serait toutefois privé du droit de bénéficier de cette majoration éducation.
M. le président. La parole est à M. Didier Rambaud, pour présenter l’amendement n° 1915 rectifié.
M. Didier Rambaud. Cet amendement est défendu.
M. le président. La parole est à M. Emmanuel Capus, pour présenter l’amendement n° 2346 rectifié ter.
M. Emmanuel Capus. Comme l’a bien expliqué Annick Billon, l’objet de ces amendements identiques est de mettre fin à une double, voire à une triple peine.
En effet, les parents qui ont le malheur de perdre un enfant se voient en plus privés des quatre trimestres de majoration auxquels ils avaient droit au titre de l’éducation de leur enfant.
Il s’agit donc de mettre fin à cette douloureuse iniquité et de rétablir un semblant de justice vis-à-vis de parents qui sont confrontés à la douleur immense qu’est la perte d’un enfant avant 4 ans.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 3410.
Mme Raymonde Poncet Monge. Cet amendement est défendu.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour présenter l’amendement n° 4462 rectifié.
Mme Laurence Cohen. Ma présentation vaudra également défense de l’amendement n° 4001 rectifié.
L’amendement n° 4462 rectifié a été suggéré à mon groupe par ma collègue députée Karine Lebon, qui tenait beaucoup à ce que je le défende – je sais que vous avez abordé ce sujet avec elle, monsieur Dussopt –, et nous y tenons aussi.
Les enfants donnent droit à des trimestres supplémentaires pour différents motifs.
Des trimestres supplémentaires sont tout d’abord accordés en contrepartie de l’incidence sur la vie professionnelle de la maternité ou de l’accueil d’un enfant adopté et des démarches préalables à cet accueil.
Des trimestres sont ensuite accordés en contrepartie de l’éducation de l’enfant, à raison de quatre trimestres dans les quatre années suivant la naissance ou l’adoption de celui-ci. Pour les agents de la fonction publique, une majoration de 10 % est de plus accordée à partir du troisième enfant.
Afin de bénéficier de cette majoration, le parent doit justifier de l’exercice de l’autorité parentale, au cours des quatre années suivant la naissance ou l’adoption de l’enfant s’il travaille dans le secteur privé, ou pendant neuf années avant le seizième anniversaire de l’enfant pour la fonction publique.
Or de trop nombreux parents, déjà confrontés au drame que constitue la perte d’un enfant avant l’âge de 4 ou de 9 ans, se voient refuser ce droit.
À la douleur d’avoir perdu leur enfant s’ajoute un sentiment d’injustice, puisque suivant les cas, ce sont 4 trimestres ou 10 % des trimestres de leur compte retraite qui sont supprimés, et qu’il leur est demandé de travailler plus longtemps avant de pouvoir bénéficier de leur pension.
Par cet amendement, mon groupe propose de mettre fin à cette injustice en rendant automatique la majoration de 10 % dans le secteur public dès la naissance de l’enfant si ce dernier décède avant les 9 ans requis.
Cela ne ramènera en rien l’enfant décédé. Cela n’apaisera pas non plus la douleur des parents. Une telle disposition vise simplement à ne pas ajouter de la douleur à la douleur.
M. le président. Le sous-amendement n° 4948, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Remplacer le mot : « quatrième »
Par le mot : « première »
La parole est à Mme Monique Lubin.
Mme Monique Lubin. Ce sous-amendement, comme les deux suivants, vise à modifier les dates de décès de l’enfant pour l’obtention de la majoration. Le sujet étant délicat, je considère cet amendement comme défendu.
M. le président. Le sous-amendement n° 4947, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 4
remplacer le mot : « quatrième »
Par le mot : « deuxième »
La parole est à Mme Monique Lubin.
Mme Monique Lubin. Cet amendement est défendu.
M. le président. Le sous-amendement n° 4949, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Remplacer le mot : « quatrième »
Par le mot : « troisième »
La parole est à Mme Monique Lubin.
Mme Monique Lubin. Il est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. La commission accueille favorablement ces amendements identiques, qui visent à remédier à une injustice très bien exposée par nos collègues.
À titre personnel, je suis d’autant plus favorable à une telle disposition que, en 2020, j’ai rapporté la proposition de loi visant à améliorer les droits des travailleurs et l’accompagnement des familles après le décès d’un enfant de notre collègue centriste Guy Bricout, qui prévoyait la mise en œuvre d’un certain nombre de dispositifs d’accompagnement des parents qui vivent le drame familial terrible qu’est la perte d’un enfant.
Le congé de deuil avait été allongé de cinq jours à douze jours, les prestations familiales, maintenues pendant trois mois et nous avions instauré une aide automatique pour les obsèques.
Par ces amendements identiques, mes chers collègues – et je vous en remercie –, vous proposez d’ajouter une disposition qui avait été oubliée. Avis très favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion. Le sujet est effectivement tragique, puisqu’il s’agit de garantir le maintien de la majoration de quatre trimestres pour des parents qui perdent un enfant en bas âge.
Cette majoration est en effet supprimée lorsque l’enfant décède en bas âge, ce qui n’est pas le cas s’il décède à 15 ans, à 20 ans ou à 25 ans.
Je vous confirme, madame Cohen, que j’ai effectivement discuté de ce sujet avec Mme la députée Lebon lors d’une audition devant la délégation aux droits des femmes de l’Assemblée nationale.
Le maintien des quatre trimestres sera non seulement acquis, mais il sera également harmonisé entre tous les régimes de retraite, car comme l’a souligné Mme Lebon à cette occasion, ce n’est pas le cas actuellement.
En revanche, l’adoption des sous-amendements nos 4948, 4947 et 4949 produirait l’effet inverse de l’objectif en amoindrissant la protection des parents.
Je demande donc leur retrait, madame Lubin. À défaut, j’y serais défavorable.
Par ailleurs, je serai également favorable aux amendements identiques nos 1576, 1916 2535 et 4001 rectifié, qui seront présentés dans un instant. Dans la même logique que les présents amendements identiques, ces amendements visent à maintenir la majoration de 10 % dont bénéficient les parents qui ont trois enfants, y compris lorsqu’ils perdent un enfant en bas âge.
Mme Monique Lubin. Je retire les sous-amendements nos 4948, 4947 et 4949, monsieur le président.
M. le président. Les sous-amendements nos 4948, 4947 et 4949 sont retirés.
La parole est à Mme Michelle Meunier, pour explication de vote.
Mme Michelle Meunier. Je salue les avis favorables de Mme la rapporteure générale et de M. le ministre.
La réponse des législateurs ne sera jamais à la hauteur du drame vécu par les familles qui perdent un enfant – étant moi-même dans ce cas, je sais de quoi je parle –, mais nous devons nous efforcer de ne pas être aveugles et sourds, afin de prendre en compte les situations de manière pertinente.
Ces amendements nous honorent, et je vous en remercie, mes chers collègues.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 1577, 1915 rectifié, 2346 rectifié ter, 3410 et 4462 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 8.
Je suis saisi de quatre amendements identiques.
L’amendement n° 1576 est présenté par Mme Billon.
L’amendement n° 1916 est présenté par MM. Iacovelli, Lévrier, Hassani, Patriat, Bargeton et Buis, Mme Cazebonne, MM. Dagbert et Dennemont, Mme Duranton, M. Gattolin, Mme Havet, MM. Haye, Kulimoetoke, Lemoyne, Marchand, Mohamed Soilihi et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud, Richard et Rohfritsch, Mme Schillinger, M. Théophile et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
L’amendement n° 2535 est présenté par M. Gontard, Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon.
L’amendement n° 4001 rectifié est présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au premier alinéa du III de l’article L. 18 du code des pensions civiles et militaires de retraite, les mots : « par faits de guerre » sont supprimés.
La parole est à Mme Annick Billon, pour présenter l’amendement n° 1576.
Mme Annick Billon. Monsieur le ministre, je vous remercie de l’avis favorable que vous avez d’ores et déjà donné sur cet amendement, qui vise à faciliter l’accès à la majoration de pension de 10 % pour les fonctionnaires parents de trois enfants ayant connu le décès d’un enfant.
Actuellement, afin de bénéficier de cette majoration, il est nécessaire pour le fonctionnaire d’avoir élevé les trois enfants pendant au moins neuf ans avant l’âge où ils ont cessé d’être à charge. Cette condition de durée ne s’applique toutefois pas dans le cas où l’enfant est décédé par faits de guerre.
Le présent amendement permet la convergence du régime de la fonction publique vers le régime général en supprimant la mention du décès pour faits de guerre de l’article L. 18 du code des pensions civiles et militaires de retraite. Ainsi, la perte d’un enfant ne privera pas les parents du bénéfice de la majoration de pension.
Vous l’aurez compris, mes chers collègues, il s’agit d’un amendement de bon sens et de cohérence.
M. le président. La parole est à M. Xavier Iacovelli, pour présenter l’amendement n° 1916.
M. Xavier Iacovelli. Cet amendement a été excellemment défendu par la présidente Billon, ainsi que par M. le ministre, par anticipation.
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour présenter l’amendement n° 2535.
M. Guillaume Gontard. Cet amendement vise à faciliter l’accès à la majoration de pension de 10 % pour les fonctionnaires parents de trois enfants qui ont connu le décès d’un enfant.
Aujourd’hui, les fonctionnaires, magistrats et militaires peuvent obtenir une majoration de 10 % de leur pension de retraite lorsqu’ils ont élevé au moins trois enfants dont la filiation est établie ou recueillie.
La pension est majorée de 10 % pour les trois premiers enfants, puis de 5 % par enfant au-delà du troisième.
Pour obtenir cette majoration, il faut toutefois avoir élevé ses trois enfants pendant neuf ans avant l’âge où ils ont cessé d’être à charge. Cette condition de durée ne s’applique pas dans le seul cas où l’enfant est décédé par faits de guerre.
Nous souhaitons que cette dernière mention soit supprimée de l’article L. 18 du code des pensions civiles et militaires de retraite, afin que la perte d’un enfant ne prive pas les parents du bénéfice de la majoration de pension.
Qu’il ait été élevé pendant neuf ans ou moins, la perte d’un enfant est une dure épreuve. Nous estimons qu’il est anormal d’ajouter à cette épreuve la privation de la majoration de pension de retraite de 10 %.
Au sein de cette réforme à la fois injuste et brutale, l’adoption du présent amendement permettrait du moins de réparer l’injustice instaurée par l’article L. 18 du code des pensions civiles et militaires de retraite.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour présenter l’amendement n° 4001 rectifié.
Mme Laurence Cohen. Cet amendement est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 1576, 1916, 2535 et 4001 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 8.
L’amendement n° 2390, présenté par M. Benarroche, Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de douze mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l’impact chiffré de la mise en œuvre de la politique des trois âges dans la gestion des droits pour les carrières longues.
La parole est à M. Daniel Breuiller.
M. Daniel Breuiller. Par cet amendement, mon collègue Guy Benarroche demande qu’une étude sérieuse soit menée concernant les effets de l’instauration de trois bornes d’âge de départ anticipé pour les carrières longues et très longues.
Le Gouvernement prétend en effet conserver le dispositif carrières longues en l’aménageant – nous avons pu constater tout à l’heure à quel point il deviendrait complexe. Ces aménagements consistent à fixer trois bornes d’âge – 16 ans, 18 ans et 20 ans – marquant le début d’une carrière longue ou très longue.
Ainsi, en 2030, ceux qui ont commencé à travailler avant 16 ans pourront continuer à partir à la retraite à 58 ans, tandis que qui ont commencé entre 16 ans et 18 ans pourront partir à 60 ans et ceux qui ont commencé entre 18 ans et 20 ans, à 62 ans.
Le Gouvernement capitalise sur l’argument social de valorisation des longues carrières que constituent ces bornes d’âge. En réalité, moins de 1 % des personnes ayant commencé à travailler à 16 ans pourront partir à 58 ans.
Contrairement à ce qui est annoncé, ceux qui ont effectué des carrières longues et très longues paieront directement les conséquences de la réforme.
On nous assure le maintien du départ anticipé de deux ans pour les carrières longues, mais le dispositif est décliné pour suivre le recul de l’âge légal à 64 ans.
Nous proposons de supprimer la fixation des trois bornes d’âge, dont la mention ne garantit aucunement un départ anticipé à la hauteur d’une longue vie de labeur.
Le présent amendement a donc pour objet de demander un rapport pour éclairer la représentation nationale sur ce sujet dont la complexité ne fait aucun doute, sauf sans doute pour notre collègue Poncet Monge. (Sourires.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 3691 rectifié, présenté par Mmes Monier et Préville, M. Magner, Mmes de La Gontrie et Conconne, MM. Todeschini, Montaugé, P. Joly et Féraud, Mmes G. Jourda et Briquet, M. Lurel, Mme S. Robert, M. Jomier, Mme Carlotti, MM. Chantrel et Kerrouche, Mmes Meunier, Poumirol et Le Houerou, M. Tissot, Mme Conway-Mouret et MM. Cardon, Stanzione, Devinaz et Jacquin, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans les six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport évaluant l’application de l’article 74 de la loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008 de financement de la sécurité sociale pour 2009. Il se prononce notamment sur l’opportunité pour le Gouvernement de mettre en œuvre une harmonisation par le haut des différents régimes de pensions de réversion.
La parole est à Mme Marie-Pierre Monier.
Mme Marie-Pierre Monier. Le système de pension de réversion, profondément modifié par l’article 74 de la loi du 17 décembre 2008 de financement de la sécurité sociale pour 2009, présente de nombreuses disparités selon les régimes.
Ainsi, en ce qui concerne le montant des pensions, les salariés du privé bénéficient d’un taux de réversion supérieur. La pension de réversion représente en effet 54 % de la pension du défunt dans le régime de base et 60 % dans les régimes complémentaires, contre 50 % dans le public.
La pension du régime de base du privé est toutefois conditionnée à un montant de ressources, alors qu’il n’y a pas de plafonnement dans le public.
Les conditions d’âge différent également entre le public et le privé. Dans le privé, si le conjoint survivant a moins de 60 ans, il devra attendre cet âge avant de réclamer sa pension de réversion du régime complémentaire, et s’il a moins de 55 ans, il sera privé de l’intégralité de sa pension de réversion au titre du régime de base comme du régime complémentaire.
À l’inverse, dans le régime de la fonction publique, aucune condition d’âge n’est exigée pour percevoir la pension de réversion.
Enfin, les conditions de remariage ne sont pas identiques entre privé et public. Dans le privé, si le conjoint survivant se remarie, il perd en effet sa pension de réversion complémentaire, mais conserve son droit à une pension de réversion du régime de base, alors que, dans le public, des conditions plus strictes sont appliquées, puisque le remariage, voire une simple mise en couple prive totalement le conjoint de sa pension de réversion.
Pour mettre fin à ces disparités manifestes, je demande la remise d’un rapport par le Gouvernement étudiant l’opportunité d’harmoniser par le haut les différents régimes de pension de réversion.
Il est d’autant plus important de s’attaquer à ce sujet que les femmes représentent 88 % des 14,4 millions de bénéficiaires de pensions de réversion, et que plus de 1 million de ces dernières n’ont d’autre pension de retraite que leur pension de réversion.
M. le président. Le sous-amendement n° 4986, présenté par Mme Poncet Monge, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :
Amendement n° 3691 rectifié
Alinéa 3
Remplacer le mot :
« six »
par :
« trois ».
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Mes chers collègues, je salue l’intérêt de l’amendement de ma collègue socialiste. Compte tenu de l’urgence de la situation, je propose que le rapport soit remis dans trois mois.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Ma chère collègue Monier, comme l’a indiqué le rapporteur de la branche vieillesse, un rapport a été demandé au Conseil d’orientation des retraites sur le sujet des droits familiaux, que vous avez fort bien présenté.
Sachez donc que la commande est passée. J’espère que nous disposerons des éléments le plus tôt possible, mais je ne puis toutefois vous garantir que ce rapport sera remis d’ici à six mois, et encore moins d’ici à trois mois, comme le demande notre collègue Poncet Monge. En tout état de cause, votre demande sera en partie satisfaite par ce rapport. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 4986.
(Le sous-amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 424, présenté par M. Benarroche, Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au plus tard le 31 mars 2024, le Gouvernement remet au Parlement un rapport évaluant le nombre et la nature des recours auprès de la commission nationale chargée d’examiner les demandes relatives à la retraite anticipée des travailleurs en situation de handicap afin de mesurer les effets des dispositions du 2° du I de l’article 8 de la loi n°…. de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023.
La parole est à M. Daniel Breuiller.
M. Daniel Breuiller. En sus des amendements relatifs à la situation des personnes en situation de handicap qui ont été adoptés par notre assemblée, cet amendement a pour objet de demander un rapport évaluant le nombre et la nature des recours déposés auprès de la commission nationale chargée d’examiner les demandes de retraite anticipée des travailleurs en situation de handicap.
Il nous semble en effet nécessaire de renseigner la représentation nationale sur la réalité des suites données à ces demandes.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Les éléments qui nous ont été communiqués pour préparer l’examen du présent texte font effectivement état d’un nombre important de recours. Nous avons toutefois prévu des dispositions visant à faciliter ces derniers, ce qui devrait permettre une amélioration de la situation. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre. Les données les plus récentes dont nous disposons indiquent que sur la période 2018-202, seulement soixante recours ont été déposés.
Je demande le retrait de cet amendement. À défaut, j’y serais défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 424.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Demande de renvoi en commission de l’article 9
M. le président. Je suis saisi, par Mmes Poumirol et Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, d’une motion n° 5392.
Cette motion est ainsi rédigée :
En application de l’article 44, alinéa 5, du Règlement, le Sénat décide qu’il y a lieu de renvoyer à la commission l’article 9 du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023
La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour la motion.
Mme Émilienne Poumirol. Les sénatrices et les sénateurs du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain demandent le renvoi en commission de l’article 9, relatif à l’usure professionnelle.
Les dispositions prévues par cet article ne sont en effet pas à la hauteur des besoins des salariés en matière de reconnaissance et de compensation de la pénibilité.
Je souhaite d’abord insister sur le changement de sémantique. Alors que nous parlons de « pénibilité », notion qui induit une responsabilité collective liée aux conditions de travail, vous introduisez aujourd’hui, monsieur le ministre, une notion d’« usure professionnelle » qui renvoie à une responsabilité individuelle. C’est très différent.
Cet article constitue ensuite un approfondissement du détricotage massif de la prise en compte de la pénibilité engagé par le Président de la République Emmanuel Macron dès son premier quinquennat en 2017.
Les quatre facteurs de pénibilité supprimés en 2017 – les postures pénibles, les vibrations mécaniques, la manutention de charges lourdes et les agents chimiques dangereux – ne sont pas réintégrés, mais les travailleurs usés par l’exposition à ces facteurs de pénibilité auraient droit à une visite médicale à 61 ans, soit quelques mois avant une hypothétique retraite anticipée, et pour autant que la médecine du travail soit en mesure d’assurer ces consultations.
Enfin, la cotisation spécifique qui vise à inciter les employeurs à réduire l’exposition de leurs salariés à des facteurs de risque a été définitivement abandonnée.
Plutôt que de prévenir activement les mécanismes de pénibilité au travail, le Gouvernement préfère donc les constater en fin de carrière, quand il est déjà trop tard, car le travailleur a subi la pénibilité pendant toute sa carrière. Il importerait au contraire d’accentuer la prévention en encadrant les conditions de travail.
Nous demandons donc le renvoi de cet article en commission, afin de remettre à plat les questions relatives à la pénibilité.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix la motion n° 5392, tendant au renvoi à la commission.
(La motion n’est pas adoptée.)
M. le président. En conséquence, nous passons à la discussion de l’article 9.
Article 9
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Après l’article L. 221-1-4, il est inséré un article L. 221-1-5 ainsi rédigé :
« Art. L. 221-1-5. – I. – Il est créé un fonds d’investissement dans la prévention de l’usure professionnelle auprès de la commission des accidents du travail et des maladies professionnelles mentionnée à l’article L. 221-5 au sein de la Caisse nationale de l’assurance maladie mentionnée à l’article L. 221-1. Le montant de la dotation de la branche Accidents du travail et maladies professionnelles du régime général au fonds est fixé chaque année par arrêté.
« II. – Le fonds a pour mission de participer au financement par les employeurs d’actions de sensibilisation et de prévention, d’actions de formation mentionnées à l’article L. 6323-6 du code du travail et d’actions de reconversion et de prévention de la désinsertion professionnelle à destination des salariés particulièrement exposés aux facteurs mentionnés au 1° du I de l’article L. 4161-1 du même code.
« III. – Les orientations du fonds, qui encadrent l’attribution des ressources du fonds dans les conditions prévues au IV du présent article, sont définies par la commission mentionnée à l’article L. 221-5 après avis de la formation compétente du Conseil d’orientation des conditions de travail. Elles se fondent sur une cartographie des métiers et activités particulièrement exposés aux facteurs mentionnés au 1° du I de l’article L. 4161-1 du code du travail, qui s’appuie sur les listes établies, le cas échéant, par les branches professionnelles, en application de l’article L. 4163-2-1 du même code. La commission établit cette cartographie, notamment pour les secteurs dans lesquels les branches n’ont pas conclu de conventions, en se fondant sur les données disponibles relatives à la sinistralité et aux expositions professionnelles. La commission peut, dans ce cadre, être assistée d’un comité d’experts, dont le fonctionnement et la composition sont définis par décret.
« IV. – Le fonds peut financer :
« 1° Des entreprises en vue de soutenir leurs démarches de prévention des risques mentionnés aux 1° du I de l’article L. 4161-1 du code du travail et leurs actions de formation en faveur des salariés exposés à ces facteurs ;
« 2° Des organismes de branche mentionnés à l’article L. 4643-1 du même code et ayant conventionné avec la Caisse nationale de l’assurance maladie mentionnée à l’article L. 221-1 du présent code dans des conditions définies par voie réglementaire ;
« 3° L’organisme mentionné à l’article L. 6123-5 du code du travail, qui répartit la dotation ainsi reçue, dans les conditions prévues au 5° du même article L. 6123-5, entre les commissions paritaires interprofessionnelles régionales mentionnées à l’article L. 6323-17-6 du même code, pour le financement de projets de transition professionnelle.
« V. – Le fonctionnement de ce fonds, les conditions de sa participation au financement des actions mentionnées au II du présent article, les modalités d’identification des métiers et activités exposant aux facteurs mentionnés au 1° du I de l’article L. 4161-1 du code du travail ainsi que les modalités de gestion et d’affectation de ses ressources sont précisés par décret en Conseil d’État. » ;
2° L’article L. 351-1-4 est ainsi modifié :
a) À la fin du premier alinéa du I, les mots : « et ayant entraîné des lésions identiques à celles indemnisées au titre d’une maladie professionnelle » sont supprimés ;
b) Le III est ainsi modifié :
– l’avant-dernier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « L’avis de la commission pluridisciplinaire n’est pas requis pour les assurés justifiant d’une incapacité permanente reconnue au titre d’une maladie professionnelle. » ;
– la dernière phrase du dernier alinéa est supprimée ;
3° Le premier alinéa du II de l’article L. 351-6-1 est complété par les mots : « et pour la détermination de la durée d’assurance mentionnée au troisième alinéa du même article L. 351-1 » ;
4° L’article L. 434-2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les victimes titulaires d’une rente sont informées, selon des modalités prévues par décret, du bénéfice des dispositions prévues à l’article L. 351-1-4 avant un âge fixé par décret. »
II. – L’article L. 732-18-3 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° À la fin du I, les mots : « et ayant entraîné des lésions identiques à celles indemnisées au titre d’une maladie professionnelle » sont supprimés ;
2° Le III est ainsi modifié :
a) L’avant-dernier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « L’avis de la commission pluridisciplinaire n’est pas requis pour les assurés justifiant d’une incapacité permanente reconnue au titre d’une maladie professionnelle. » ;
b) La dernière phrase du dernier alinéa est supprimée.
III. – A. – La quatrième partie du code du travail est ainsi modifiée :
1° À l’article L. 4162-1, les mots : « à l’article L. 2133-1 » sont remplacés par les mots : « à l’article L. 2331-1 » ;
2° Après l’article L. 4163-2, il est inséré un article L. 4163-2-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 4163-2-1. – Dans le cadre de conventions, notamment celles prévues aux articles L. 2241-4 et L. 4162-1, les branches professionnelles peuvent établir des listes de métiers ou d’activités particulièrement exposés aux facteurs mentionnés au 1° du I de l’article L. 4161-1, en vue de l’application de l’article L. 221-1-5 du code de la sécurité sociale. » ;
3° La seconde phrase du troisième alinéa de l’article L. 4163-5 est ainsi rédigée : « Il définit le nombre de points auxquels ouvrent droit les expositions simultanées à plusieurs facteurs de risques professionnels, en fonction du nombre de facteurs auxquels le salarié est exposé. » ;
4° L’article L. 4163-7 est ainsi modifié :
a) Le I est ainsi modifié :
– au premier alinéa, le mot : « trois » est remplacé par le mot : « quatre » ;
– il est ajouté un 4° ainsi rédigé :
« 4° Le financement des frais afférents à une ou plusieurs actions mentionnées aux 1°, 2° ou 3° de l’article L. 6313-1 dans le cadre d’un projet de reconversion professionnelle et, le cas échéant, de sa rémunération dans le cadre d’un congé de reconversion professionnelle lorsqu’il suit cette action de formation en tout ou partie durant son temps de travail, en vue d’accéder à un emploi non exposé aux facteurs de risques professionnels mentionnés au I de l’article L. 4163-1. » ;
b) Le III est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« L’organisme gestionnaire mentionné à l’article L. 4163-14 exerce une action de communication sur le dispositif à l’égard des employeurs mentionnés à l’article L. 4163-4 et des bénéficiaires du compte professionnel de prévention. »
5° La sous-section 1 de la section 3 du chapitre III du titre VI du livre Ier est complétée par des articles L. 4163-8-1 à L. 4163-8-3 ainsi rédigés :
« Art. L. 4163-8-1. – Lorsque le titulaire du compte professionnel de prévention décide de mobiliser tout ou partie des points inscrits sur le compte pour l’utilisation mentionnée au 4° du I de l’article L. 4163-7, ces points sont convertis en euros :
« 1° Pour abonder son compte personnel de formation afin de financer les coûts pédagogiques afférents à son projet de reconversion professionnelle ;
« 2° Le cas échéant, pour assurer sa rémunération pendant son congé de reconversion professionnelle.
« Art. L. 4163-8-2. – Le projet de reconversion professionnelle mentionné au 4° du I de l’article L. 4163-7 fait l’objet d’un accompagnement par l’un des opérateurs financés par l’organisme mentionné à l’article L. 6123-5 au titre du conseil en évolution professionnelle mentionné à l’article L. 6111-6. Cet opérateur informe, oriente et aide le salarié à formaliser son projet.
« Art. L. 4163-8-3. – Les commissions paritaires interprofessionnelles régionales mentionnées à l’article L. 6323-17-6 assurent l’instruction et la prise en charge administrative et financière des projets de reconversion professionnelle, dans des conditions fixées par décret. » ;
6° Au deuxième alinéa de l’article L. 4163-15 les mots : « , 2° et 3° » sont remplacés par les mots : « à 4° » ;
7° Après l’article L. 4624-2-1, il est inséré un article L. 4624-2-1-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 4624-2-1-1. – Les salariés exerçant ou ayant exercé, pendant une durée définie par voie réglementaire, des métiers ou activités particulièrement exposés aux facteurs mentionnés au 1° du I de l’article L. 4161-1 bénéficient d’un suivi individuel spécifique défini comme suit :
« 1° À l’occasion de la visite de mi-carrière prévue à l’article L. 4624-2-2, le professionnel de santé au travail apprécie l’état de santé du salarié et identifie, le cas échéant, ses altérations. En fonction de son diagnostic, il peut proposer des mesures individuelles d’aménagement, d’adaptation ou de transformation du poste de travail ou des mesures d’aménagement du temps de travail, dans les conditions prévues à L. 4624-3. Il peut également orienter le salarié, le cas échéant, vers la cellule pluridisciplinaire de prévention de la désinsertion professionnelle prévue à l’article L. 4622-8-1 et vers les dispositifs prévus aux 1° et 2° de l’article L. 323-3-1 du code de la sécurité sociale. Il informe le salarié des modalités d’accès au conseil en évolution professionnelle.
« 2° Le diagnostic mentionné au 1° du présent article est tracé dans le dossier médical en santé au travail du salarié mentionné au L. 4624-8 et permet, si le professionnel de santé au travail l’estime nécessaire, de réévaluer les modalités du suivi individuel de son état de santé ;
« 3° Une visite médicale est organisée entre le soixantième et le soixante et unième anniversaire du salarié. À cette occasion, si l’état de santé du salarié le justifie, le professionnel de santé au travail informe celui-ci de la possibilité de bénéficier de la pension pour inaptitude prévue à l’article L. 351-7 du code de la sécurité sociale et transmet, le cas échéant, un avis favorable au médecin-conseil. Cette visite tient lieu de visite médicale au titre du suivi individuel du salarié.
« Un décret en Conseil d’État définit les conditions d’application du présent article. »
B. – Pour l’application de l’article L. 4624-2-1-1 du code du travail, les salariés ayant atteint au 1er septembre 2023 un âge qui dépasse l’échéance prévue à l’article L. 4624-2-2 du même code pour effectuer la visite médicale de mi-carrière prévue au même article L. 4624-2-2 bénéficient de l’examen prévu au 1° de l’article L. 4624-2-1-1 dudit code à l’occasion de leur premier examen réalisé après le 1er septembre 2023. Les 2° et 3° du même article L. 4624-2-1-1 leur sont applicables à l’issue de cet examen.
C. – La sixième partie du code du travail est ainsi modifiée :
1° Au 5° de l’article L. 6123-5, après la référence : « L. 6323-17-1 », sont insérés les mots : « et de projets de reconversion professionnelle mentionnés au 4° du I de l’article L. 4163-7 » ;
2° L’article L. 6323-17-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le projet de transition professionnelle des salariés concernés par les facteurs de risques professionnels mentionnés au 1° du I de l’article L. 4161-1 peut être financé par la dotation versée par France compétences aux commissions paritaires interprofessionnelles régionales au titre du fonds d’investissement dans la prévention de l’usure professionnelle, en vue d’accéder à un emploi non exposé aux facteurs de risques professionnels mentionnés au même article L. 4161-1, si le projet de transition professionnelle du salarié fait l’objet d’un cofinancement assuré par son employeur, dans des conditions fixées par décret. » ;
3° Le I de l’article L. 6323-17-2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour bénéficier du projet de transition professionnelle financé par le fonds mentionné à l’article L. 221-1-5 du code de la sécurité sociale, le salarié doit justifier d’une durée minimale d’activité professionnelle dans un métier concerné par les facteurs de risques professionnels mentionnés au 1° du I de l’article L. 4161-1 du présent code. Cette durée minimale d’activité, déterminée par décret, n’est pas exigée pour le salarié mentionné à l’article L. 5212-13. »
IV. – Au IV de l’article 109 de la loi n° 2022-1616 du 23 décembre 2022 de financement de la sécurité sociale pour 2023, le nombre : « 128,4 » est remplacé par le nombre : « 150,2 » et le nombre : « 9 » est remplacé par le nombre : « 9,7 ».
V. – Les branches professionnelles engagent, dans les deux mois suivant la promulgation de la présente loi, une négociation en vue d’aboutir à l’établissement des listes de métiers ou d’activités particulièrement exposés aux facteurs mentionnés au 1° du I de l’article L. 4161-1 dans les conditions prévues à l’article L. 4163-2-1. Pour les dépenses engagées en 2023, le fonds établit ses orientations mentionnées à l’article L. 221-1-5 du code de la sécurité sociale en se fondant sur les données disponibles relatives à la sinistralité et aux expositions professionnelles.
VI. – A. – Il est créé, au sein de la Caisse nationale de l’assurance maladie, un fonds pour la prévention de l’usure professionnelle, destiné à soutenir les employeurs, d’une part, des établissements et services mentionnés aux 1° et 2° de l’article L. 5 du code général de la fonction publique et, d’autre part, des établissements publics locaux et des établissements, dotés ou non de la personnalité morale, créés ou gérés par des personnes morales de droit public autres que l’État et ses établissements publics, accueillant des personnes en situation de handicap, des personnes confrontées à des difficultés spécifiques ou des personnes âgées, qui proposent des prestations de soins et dont le financement relève des objectifs de dépenses mentionnés au I de l’article L. 314-3 du code de l’action sociale et des familles et à l’article L. 314-3-2 du même code.
B. – Le fonds concourt au financement :
1° Des actions de sensibilisation et de prévention de l’usure professionnelle par les établissements et services mentionnés au A ;
2° Des dispositifs d’organisation du travail permettant l’aménagement des fins de carrière au sein des établissements et services mentionnés au A qui sont particulièrement exposés à des facteurs d’usure professionnelle.
La nature des actions mentionnées au 1°, la nature et l’éligibilité aux dispositifs mentionnés au 2° ainsi que les conditions d’appréciation par l’employeur sont définies par décret.
C. – Le fonds est alimenté par une dotation des régimes obligatoires de base d’assurance maladie dont le montant est fixé chaque année par arrêté des ministres chargés de la santé, de la sécurité sociale et des comptes publics.
D. – Les modalités d’application du présent VI, notamment la gouvernance de ce fonds, sont précisées par décret.
Motion d’ordre et demande de priorité
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, en application de l’article 46 bis, alinéa 2 du règlement, la commission demande l’examen séparé de l’amendement n° 2132 présenté par les rapporteurs au nom de la commission.
Par ailleurs, en application de l’article 44, alinéa 6, du règlement, la commission demande également la priorité d’examen de vote sur cet amendement.
M. Éric Kerrouche. Et ça, ce n’est pas de l’obstruction ?
M. le président. Je suis saisi par la commission d’une demande d’examen séparé de l’amendement n° 2132, ainsi que d’une demande de priorité, afin que cet amendement soit examiné et mis aux voix avant l’ensemble des amendements en discussion commune.
Je rappelle que, aux termes de l’article 44, alinéa 6, de notre règlement, lorsqu’elle est demandée par la commission saisie au fond, la priorité est de droit, sauf opposition du Gouvernement.
Quel est l’avis du Gouvernement sur cette demande de priorité ?
M. le président. La priorité est ordonnée.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Nous n’avons pas l’amendement !
M. Vincent Éblé. Il n’a pas été distribué !
M. le président. Mes chers collègues, la distribution de l’amendement est en cours.
Rappels au règlement
Mme Corinne Féret. Monsieur le président, sur le fondement de l’article 46 bis de notre règlement, je sollicite une suspension de séance, afin de nous permettre de nous organiser. La priorité demandée par la présidente de la commission bouleverse en effet l’ordonnancement de nos travaux.
Par ailleurs, monsieur le président, pourriez-vous rappeler le numéro de l’amendement appelé en priorité ?
M. le président. Il s’agit de l’amendement n° 2132, dont la distribution est en cours, ma chère collègue.
La parole est à Mme Éliane Assassi, pour un rappel au règlement.
Mme Éliane Assassi. Nous n’avons pas encore l’amendement sous les yeux, mais nous comprenons bien ce qui se trame.
L’amendement n° 2132 de M. Savary devait être examiné après de nombreux amendements au sein de l’article 9. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains. – Brouhaha.)
Nous avons besoin de travailler. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.) De même que ma collègue Féret, je sollicite donc une suspension de séance. (Non ! sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Martin Lévrier. Enfumage !
Mme Éliane Assassi. Regardez donc la position de l’amendement n° 2132 dans la liasse ! Nous avons besoin de travailler, car nous sommes des gens sérieux et responsables. Suspension de séance ! (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST. – Vives protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour un rappel au règlement.
M. Guillaume Gontard. Sur le fondement de l’article 44 bis, je demande également que nous disposions d’un peu de temps pour nous réorganiser.
L’appel de cet amendement en priorité, qui relève de la manipulation, nous déstabilise évidemment.
MM. Éric Kerrouche et Vincent Éblé. C’est fait pour !
M. Guillaume Gontard. Je ne sais pas comment vous arrivez à travailler dans de telles conditions, mes chers collègues, mais tout cela manque de sérieux.
Je demande donc une suspension de séance,… (Vives protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Bruno Retailleau. Non !
M. Guillaume Gontard. … afin de reprendre le débat sur des bases saines, comme nous l’avons fait jusqu’à présent.
M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, pour un rappel au règlement.
M. Patrick Kanner. Monsieur le ministre, depuis quelques heures et même quelques jours, vous nous accusez de toutes les turpitudes,… (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Martin Lévrier. À raison !
M. Xavier Iacovelli. Assumez !
M. Patrick Kanner. … voire, ai-je cru comprendre, de « mélenchonisation ». (Oui ! sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Xavier Iacovelli. C’est M. Gontard qui l’a dit !
M. Patrick Kanner. L’examen de ce projet de loi doit se poursuivre au Sénat. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-François Husson. Vous faites tout pour accélérer !
M. Patrick Kanner. Ne soyez pas déloyaux, mes chers collègues. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.) Vous tentez de bouleverser l’ordonnancement des amendements par cette priorité. Celle-ci est peut-être tout à fait réglementaire, mais ce type de manœuvre relève non pas de l’obstruction, mais du sabotage du bon travail parlementaire. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST et protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Dominique Estrosi Sassone. Le sabotage est ailleurs !
Mme Cathy Apourceau-Poly. C’est honteux !
M. le président. Mes chers collègues, je vais accorder une suspension de séance de cinq minutes. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Toutefois, auparavant, je rappelle que j’ai été saisi d’une demande de priorité de la part de la commission. Le Gouvernement a donné un avis de sagesse et j’ai donc ordonné cette priorité.
Par ailleurs, en application de l’article 46 bis, alinéa 2 du règlement, je suis saisi par la commission d’une demande d’examen séparé de l’amendement n° 2132 à l’article 9.
Il n’y a pas d’opposition ?…
Il en est ainsi décidé.
Je vous précise avant la suspension de séance que l’adoption de cet amendement ferait tomber une soixantaine d’amendements. (Exclamations sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. David Assouline. Rien que cela !
Mme Raymonde Poncet Monge. C’est le but !
M. le président. L’adoption de l’amendement n° 2132 ferait tomber les amendements identiques de suppression nos 301 à 3790, ainsi que les amendements identiques nos 44 rectifié, 2369 rectifié, 3436 rectifié, 2637 rectifié et 3823, l’amendement n° 430 rectifié, les amendements identiques nos 43 rectifié, 2366 rectifié, 2639 rectifié bis et 3352, et les amendements nos 3136 et 3922 rectifié. La discussion commune reprendrait à l’amendement n° 3308.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Mon rappel au règlement est fondé sur l’article 46 bis, qui indique très clairement que les amendements doivent être examinés en commençant par « les amendements de suppression et ensuite les autres amendements ».
Monsieur le président, vous venez d’énoncer – je vous en remercie – l’ordre d’examen des amendements et vous avez annoncé également que l’adoption de l’amendement examiné en priorité ferait tomber d’autres amendements qui sont pourtant des amendements de suppression. Il y a donc à mon sens une distorsion par rapport à l’application normale du règlement. (M. Roger Karoutchi le conteste.)
Roger Karoutchi n’a pas besoin de secouer la tête pour dire non. Je le connais depuis tellement longtemps que sa façon de procéder n’a plus de secret. (Sourires sur les travées du groupe SER.)
Je veux aussi aborder la question délicate – et je suggère aux élus qui siègent à droite de l’hémicycle d’être attentifs à ce point – de la clarté et de la sincérité du débat parlementaire, à propos de laquelle nous saisirons le Conseil constitutionnel.
M. Christian Cambon. On le sait !
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Pourquoi ? L’amendement n° 2132 vient d’être distribué grâce à la diligence des services de la séance, et nous pouvons les en remercier, car il n’était même pas dans la liasse des amendements. Cela signifie que nous n’avons aucune visibilité sur le périmètre de la discussion, et nous pouvons nous étonner qu’un amendement à l’alinéa 4 de l’article 9 fasse tomber des amendements de suppression.
C’est la raison pour laquelle nous nous opposons à cette demande de réorganisation du débat.
M. Xavier Iacovelli. Elle a été décidée.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Par ailleurs, monsieur le président, vous nous accordez cinq minutes de suspension de séance, et je vous en remercie. Mais si nous voulons que les travaux se fassent dans des conditions correctes et si nous voulons éviter que leur réorganisation ne porte excessivement atteinte à la clarté et à la sincérité du débat, une suspension de trente minutes serait plus raisonnable. (Vives protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. Ma chère collègue, l’article du règlement que vous avez cité comprend également les termes suivants : « sauf décision contraire de la Conférence des Présidents ou décision du Sénat sur proposition de la commission saisie au fond ». En l’occurrence, il y a eu une proposition de la commission saisie au fond, et nous nous conformons donc à une pratique constante dans notre assemblée. Il n’y a donc pas d’ambiguïté sur l’application du règlement. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)
Compte tenu de l’importance du sujet, je suspends la séance pour dix minutes. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Patrick Kanner applaudit.)
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt-deux heures cinq, est reprise à vingt-deux heures quinze.)
M. Guillaume Gontard. Mon rappel au règlement se fonde sur l’article 44 bis, qui porte sur la sincérité des débats. En effet, j’ai clairement manifesté que je demandais la parole pour un rappel au règlement avant la suspension de séance et vous ne l’avez pas autorisé alors que cette prise de parole est de droit.
On nous dit que si l’amendement est adopté, cela supprimera un certain nombre de nos amendements. J’aimerais que la commission nous donne une explication très claire et très précise pour justifier cela. Encore une fois, j’aimerais des explications très précises, parce qu’il s’agit d’un problème constitutionnel. Je considère qu’il faut rétablir un peu de sérieux dans nos travaux, parce que depuis deux jours, ce que vous faites, chers collègues de la droite, c’est tout de même du grand n’importe quoi. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
Nous avons déposé un certain nombre d’amendements sur le fond, qui ne portent pas sur n’importe quoi, puisqu’ils visent les risques professionnels. Ce n’est pas faire n’importe quoi dans ce texte ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Sophie Primas. Vous déposez soixante amendements identiques !
M. Guillaume Gontard. Vous me donnerez, madame Primas, le nombre de risques professionnels qui existent, et vous verrez alors que l’on pourrait déposer bien plus que soixante amendements sur la question des risques professionnels (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Quand on travaille sur un texte, on le travaille au fond ou on ne le travaille pas. Nous avons décidé de le travailler au fond,…
M. Xavier Iacovelli. Et nous d’aller au bout !
M. Guillaume Gontard. De votre côté, faites comme vous voulez ! En tout cas, la manière dont se passent les débats montre qu’ils ne sont ni sérieux ni sincères. Je veux donc avoir des réponses très claires et très précises sur les raisons et la manière dont cet amendement pourrait faire tomber l’ensemble de ceux que nous avons déposés.
En outre, j’aimerais que l’on revienne à davantage de sérénité. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.) Je rappelle que sur les 3 000 amendements déposés,…
M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue.
M. Guillaume Gontard. …1 000 viennent de la droite et 2 000 de la gauche : si nous ne pouvons pas défendre ceux que nous avons déposés, je ne comprends pas où va le débat. (Applaudissements sur les travées des groupes GEST et SER.)
M. le président. Monsieur Gontard, je le précise, lorsque j’ai été saisi des deux demandes de suspension de séance, j’ai aussitôt accordé cette suspension. C’est la raison pour laquelle je ne vous ai pas donné la parole.
Ensuite, pour la clarté des débats, j’ai précisé à l’avance quels amendements tomberaient si celui de la commission était adopté.
Plusieurs voix sur les travées du groupe SER. Mais pourquoi tomberaient-ils ?
M. le président. La parole est à M. Éric Kerrouche, pour un rappel au règlement.
M. Éric Kerrouche. Monsieur le président, mes chers collègues du groupe Les Républicains, a priori, nous savons encore tous lire même si j’imagine que vous en doutez.
M. Jean-François Husson. Ce n’est pas au niveau.
M. Éric Kerrouche. Vous devriez vous calmer, mon cher collègue ; ça va bien se passer…
M. Jean-François Husson. Ne soyez pas pédant !
Mme Dominique Estrosi Sassone. Assez !
M. Éric Kerrouche. Vous comprendrez que l’on a besoin d’une explication, puisque, encore une fois, les amendements de suppression au titre de l’article 46 bis de notre règlement sont considérés comme prioritaires.
La question est donc toute simple : dans quelle mesure l’amendement dont l’examen a été appelé en priorité par Mme la présidente de la commission peut-il avoir cette conséquence sur les amendements de suppression ? Notre demande d’explication ne me semble pas du tout indue.
M. Roger Karoutchi. C’est évident !
M. Éric Kerrouche. Monsieur Karoutchi, si vous avez la réponse, j’en suis content : cela veut dire que l’on pourrait nous la donner. C’est aussi simple que cela.
Laissez-moi juste vous donner un conseil : ce n’est pas parce que vous êtes juridiquement majoritaires que vous avez politiquement raison ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST. – Exclamations ironiques sur les travées des groupes RDPI et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Pierre Laurent, pour un rappel au règlement.
M. Pierre Laurent. Mon rappel au règlement est sur la base de l’article 46 bis.
La commission et la droite sénatoriale viennent de déclencher la énième manœuvre procédurière depuis mardi soir. Je tiens à faire remarquer que, cette fois-ci, vous la déclenchez sur un article majeur du projet de loi.
Mme Dominique Estrosi Sassone. Ce n’est pas l’article 7 !
M. Pierre Laurent. C’est celui sur lequel l’ensemble des organisations syndicales insistent le plus depuis le début de l’examen du texte avec l’article 7. Ce n’est donc pas un article mineur ; c’est un article majeur du projet de loi.
Vous déclenchez une procédure qui vise à faire tomber sur cet article des dizaines et des dizaines d’amendements, alors que nous discutons d’une question absolument essentielle pour l’intérêt des travailleurs et pour leur vie.
M. Jean-François Husson. Et les travailleuses !
M. Pierre Laurent. Vous faites une demande de priorité en désorganisant les débats. Bien évidemment, c’est un droit de la commission, mais je ferai remarquer, avec tout le respect que je dois aux services de la séance, qui mènent un travail remarquable depuis le début, que – si je puis dire – ils ont eux-mêmes du mal à suivre et à nous distribuer les amendements en temps utile. En effet, vous cachez les procédures que vous allez déclencher,…
M. Jean-François Husson. Et vous ?
M. Pierre Laurent. … ce qui empêche les services de la séance de préparer correctement les dossiers et d’informer correctement les parlementaires pour qu’ils puissent travailler.
Il y a donc de l’insincérité dans la manière dont vous organisez les débats, et vous les désorganisez volontairement pour nuire à la qualité de la discussion. (M. Xavier Iacovelli s’impatiente.)
Enfin, je voudrais insister sur ce qu’a dit ma collègue Marie-Pierre de La Gontrie, en répétant qu’il y a un sérieux problème à faire tomber tous les amendements de suppression, ce qui empêche le débat sur l’article, avant même d’entrer dans le débat sur l’amendement.
Par ailleurs, comme on vient aussi de le dire, vous ne justifiez à aucun moment, puisqu’il n’y a pas eu de réunion de la commission,… (Marques d’impatience sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.
M. Pierre Laurent. … les raisons pour lesquelles ces amendements tomberaient.
M. le président. La parole est à M. Rémi Féraud, pour un rappel au règlement.
M. Rémi Féraud. Ce rappel au règlement se fonde sur l’article 44 bis, qui prévoit – rappelons-le quand même – que le Gouvernement et les sénateurs ont « le droit de présenter des amendements et des sous-amendements aux textes soumis à discussion devant le Sénat » et que les amendements « sont recevables s’ils s’appliquent effectivement au texte qu’ils visent » et s’ils ont « un lien, même indirect, avec le texte en discussion ». Pour ce qui est des amendements de suppression, nous sommes exactement dans la lettre et dans l’esprit de cet article 44 bis.
Maintenant qu’il a été distribué, nous avons pu regarder l’amendement proposé par la commission des affaires sociales. Cet amendement n’a en lui-même pas beaucoup d’intérêt. Il est tout de même très bref, puisqu’il vise, après la référence : « 1°» à insérer les mots « et au a du 2° » et à l’alinéa 7 à remplacer les mots : « aux 1 » par les mots : « au 1° et au a du 2°». (Exclamations ironiques sur les travées des groupes SER et GEST.)
Mme Raymonde Poncet Monge. C’est fondamental !
M. Jean-François Husson. Il sait lire.
M. Rémi Féraud. Est-ce que l’amendement de la commission change fondamentalement l’article 9 du projet de loi ? Est-ce que, dans l’esprit, il fait tomber les amendements de suppression ayant pour objet de débattre véritablement de l’article 9 ? À l’évidence, non.
D’ailleurs, je vois l’empressement dont on a fait preuve pour dire que cet amendement faisait tomber soixante ou soixante-dix amendements de suppression, comme si c’était là l’objectif unique de l’amendement présenté par la commission des affaires sociales.
M. Patrick Kanner. Cela y ressemble !
M. Rémi Féraud. Ce n’est pas cela l’esprit de nos discussions parlementaires. Si l’amendement de la commission est examiné en priorité, ce doit être pour clarifier notre débat, et cela ne peut pas être dans le seul objet de faire tomber des amendements de suppression. Il faut donc revoir l’ordre de discussion de nos amendements. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. le président. La parole est à M. Daniel Breuiller, pour un rappel au règlement.
M. Daniel Breuiller. Ce rappel au règlement est au titre de l’article 46 bis.
En reprenant l’argumentaire qui vient d’être exposé par mon collègue Féraud sur la question des amendements de suppression, je voudrais ajouter que la qualité d’une démocratie se mesure au traitement qui est infligé aux minorités.
La commission s’honorerait à expliquer de façon détaillée les motifs de cette demande de priorité. Nous traitons d’un sujet qui porte sur l’usure professionnelle et sur la pénibilité. Cela concerne des centaines de milliers de nos concitoyens. Je pense que nos débats sur cet article pourraient relever d’une qualité plus grande que celle qu’annonce le recours à cette procédure. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour un rappel au règlement.
Mme Laurence Cohen. C’est un rappel au règlement au titre de l’article 46 bis. Nous contestons l’organisation de l’examen du début de cet article 9, et nous contestons la priorité demandée pour l’amendement de M. Savary.
Premièrement, le principe de disjonction des amendements de suppression est reconnu par le Sénat. Les amendements de suppression sont toujours discutés en amont et séparément des autres amendements, car l’objet de ces discussions est précisément à part.
Comme nous l’avons dit à plusieurs reprises, il a été extrêmement difficile de nous y retrouver dans le méli-mélo qui a suivi la demande de priorité. Mes chers collègues du groupe Les Républicains, ne dites pas que c’était facile parce que nous avons, comme tout le monde ici, étudié le texte et travaillé à l’améliorer par des amendements.
Je veux donc remercier M. le président d’avoir accepté la suspension de séance pour que l’on retrouve de la sérénité et qu’on ait le temps de comprendre où l’on en était.
En effet, mes chers collègues, heureusement qu’il sait présider et qu’il n’a pas écouté les rumeurs qui venaient de certaines travées, sinon la séance n’aurait pas été suspendue, alors même que plusieurs des collègues présents dans l’hémicycle n’avaient pas l’amendement du rapporteur. C’est la moindre des choses en démocratie.
Deuxièmement, puisque la commission juge que l’adoption de son amendement en ferait tomber d’autres et que l’on vous a demandé à plusieurs reprises des explications sur ce point, parce que les raisons n’en sont ni limpides ni logiques, en tant que membre de la commission des affaires sociales, je demande que celle-ci se réunisse pour étudier les raisons qui font tomber les amendements. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST.)
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Bien évidemment, nous aurions réuni la commission si l’amendement avait été réécrit, mais il ne l’est pas. C’est exactement le même que celui que la commission a examiné. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
Mme Cathy Apourceau-Poly. Mais il n’était pas dit qu’il en ferait tomber d’autres !
M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour un rappel au règlement.
M. David Assouline. Il y a un aveu, si c’est exactement le même ! Vous savez très bien que dans l’organisation des débats, vous auriez pu le nicher à cet endroit. Si maintenant vous le faites en disant que cela fait tomber les autres, c’est parce que vous voulez écourter nos débats, et vous voulez empêcher que nous défendions nos arguments. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
Je veux vous avertir et je m’adresse à vous, chers collègues qui siégez à la droite de l’hémicycle : vous êtes plus tributaires que nous de la fonction que remplit cette chambre, parce que vous la dirigez. Vous êtes en train de faire quelque chose que vous n’aviez jusque-là pas osé faire pendant tous les mandats où vous avez été majoritaires, ici.
M. Bruno Retailleau. L’obstruction, c’est pire.
M. David Assouline. Vous savez que quand on est responsable d’une chambre parlementaire on la défend.
Or, vous vous êtes mis en quelque sorte dans une seringue qui fonctionne ainsi : lors du débat sur les retraites en 2010, alors que vous étiez au Gouvernement, vous n’avez jamais utilisé ce type de procédure, parce que l’examen du texte est allé à son terme et qu’alors il y a toujours un vote. Vous vouliez le vote et celui-ci intervient si l’examen du texte est mené à son terme.
M. Roger Karoutchi. En quoi est-ce un rappel au règlement ?
M. David Assouline. Vous vous êtes mis dans une seringue qui est celle que le Gouvernement a voulue : en recourant à l’article 47-1 de la Constitution, il a fixé un délai pour l’examen du texte par les deux chambres. Au lieu de contester cela, vous vous soumettez à ce délai des cinquante jours et vous voulez absolument que le vote ait lieu avant dimanche soir. Vous avez donc accepté de soumettre le Sénat à la volonté de l’exécutif. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST. – Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Claude Raynal, pour un rappel au règlement.
M. Roger Karoutchi. Lequel ?
M. Claude Raynal. L’article 46 bis, monsieur Karoutchi. Allons, soyez raisonnable !
Cette manœuvre que vous menez fera tomber soixante-dix amendements, ce qui représentera autant de prises de parole en moins sur le sujet qui nous intéresse aujourd’hui. Nous allons les remplacer pas soixante-dix rappels au règlement – c’est intelligent ! –, et c’est de droit.
M. Roger Karoutchi. Ce n’est pas raisonnable.
M. Claude Raynal. Je préférerais qu’on évite cela et que l’on travaille au fond. Soyons tout de même sérieux sur les méthodes ! Celles que vous employez ne sont pas sérieuses : il faut retrouver un peu de calme et traiter le sujet.
En outre – et cela peut se retrouver facilement en remontant le fil de la discussion –, d’amendement en amendement, vous nous indiquez que les articles importants auxquels nous devons consacrer du temps sont les articles 7, 8, 9 et 10. Je ne fais que reprendre les propos du rapporteur. Ces articles traitent des sujets majeurs et dès que nous y arrivons, vous coupez le débat. Ce n’est pas possible ! (Vifs applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. le président. Je précise que si les amendements de suppression tombent, il en restera 140 à examiner.
La parole est à M. Thomas Dossus, pour un rappel au règlement.
M. Thomas Dossus. Mon rappel au règlement est fondé sur l’article 44 bis.
L’examen du texte est déjà contraint. Le recours à l’article 47-1 est le péché originel. En effet, il s’agit d’un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale et sur ce point le Gouvernement vous a suivi, chers collègues du groupe Les Républicains, puisqu’il a utilisé le même véhicule législatif que celui que vous utilisez chaque année pour introduire un amendement sur votre projet de réforme des retraites. C’est donc là qu’est le péché originel.
Il faut y ajouter l’article 42 du règlement du Sénat, qui a déjà bien contraint le débat parlementaire, puisqu’il nous a empêchés de prendre la parole pour explication de vote à plusieurs reprises.
Vous disposez également de l’article 38 du règlement, que vous pouvez déclencher quand vous le voulez.
Mais finalement, sur cet article 9, vous avez décidé de recourir à un autre élément de procédure, l’article 46 bis de notre règlement. Je ne vous ferai pas l’injure de relire, après notre collègue Rémi Féraud, le dispositif de l’amendement appelé en priorité, mais reconnaissez que son objet est assez anecdotique.
Quoi qu’il en soit, même si celui-ci était adopté, tous nos amendements gardent leur raison d’être, puisqu’ils visent à supprimer l’article 9. L’amendement de la commission, qui ne propose que des précisions rédactionnelles, ne change pas la portée. Par conséquent, nous demandons que ces amendements puissent être examinés.
Sans compter que vous fragilisez vous-même le texte du Gouvernement, le texte que vous défendez, en sapant le droit d’amendement des parlementaires. C’est extrêmement dangereux !
En réalité, vous êtes en train d’inventer le 49.3 sénatorial…
M. Roger Karoutchi. Si seulement c’était vrai !
M. Thomas Dossus. … pour accélérer les débats en permanence.
Vous voulez faire bosser les Français deux ans de plus, mais vous n’êtes même pas capables de bosser ce week-end ! Voilà la réalité ! (Protestations sur les travées des groupes Les Républicains, UC et RDPI.)
M. Thomas Dossus. C’est la seule raison pour laquelle vous cherchez à hâter les débats. C’est la seule solution que vous avez trouvée. (Applaudissements sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE.)
M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour un rappel au règlement.
Mme Céline Brulin. Mon rappel au règlement se fonde aussi sur l’article 44 bis du règlement du Sénat.
Je rappelle que notre assemblée adopte régulièrement des demandes de priorité pour permettre l’examen de certains amendements importants. Quand la priorité est ordonnée, elle l’est au nom de la clarté et de la cohérence de nos débats, raison pour laquelle 9 fois sur 10 – que dis-je ? 9,9 fois sur 10 – cette priorité fait consensus.
Mme Éliane Assassi. Tout à fait !
Mme Céline Brulin. Ici, quelle cohérence y aurait-il à examiner en priorité l’amendement de la commission, dont je ne conteste ni l’intérêt ni la légitimité, dans la mesure où il vise à inclure les agents chimiques parmi les facteurs pris en compte dans le fonds d’investissement dans la prévention de l’usure professionnelle, et à rendre secondaires des amendements qui, pour prendre un exemple, visent à instruire la différence qui existe entre l’usure, caractéristique individuelle, et la pénibilité, caractéristique d’un métier ?
M. Daniel Breuiller. Exactement !
Mme Céline Brulin. Quelle cohérence y aurait-il à en discuter avant des amendements qui ont pour objet d’associer les partenaires sociaux à la définition des missions du fonds de prévention de l’usure professionnelle ?
M. Emmanuel Capus. Et quelle cohérence y a-t-il à présenter soixante-dix amendements de suppression identiques ?
Mme Céline Brulin. Il me semble que, compte tenu du climat actuel, l’association des partenaires sociaux ne serait pas du luxe.
Quelle cohérence y aurait-il à ce que le vote de l’amendement de la commission rende sans objet l’amendement de notre collègue Canévet, par exemple, qui vise à laisser la main à la branche AT-MP, et donc également aux partenaires sociaux, pour faire fonctionner ce fonds ?
Il n’y en a aucune ! La véritable raison vient d’être avouée : il s’agit de faire tomber un maximum d’amendements.
Mes chers collègues, nous ne sommes pas là pour faire du chiffre ni de la comptabilité. (Exclamations sur les travées des groupes Les Républicains et UC.) Notre légitimité est indexée non pas sur le nombre d’amendements qui deviendront sans objet, mais sur notre capacité à améliorer les dispositions de ce texte. Monsieur le rapporteur, vous nous dites depuis le début que vous souhaitez débattre de l’article 9. Alors, débattons-en ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Houllegatte, pour un rappel au règlement.
M. Jean-Michel Houllegatte. Comme Mme Brulin, mon rappel au règlement est fondé sur l’article 44 bis de notre règlement.
Vous m’excuserez, mais, dans la mesure où je ne suis pas juriste, j’ai besoin de comprendre. Ce que je crois savoir, c’est que deux aspects priment dans les débats juridiques : il y a, d’un côté, ce que l’on appelle le fond et, de l’autre, la forme.
En l’occurrence, j’ai l’impression que nous sommes face à des artifices de forme, destinés à gagner la partie sur ce que l’on pourrait qualifier de « tapis vert », même si nos fauteuils sont rouges. (Sourires.)
Ce que j’ai besoin de comprendre, c’est tout simplement pourquoi le fait d’exhumer l’amendement n° 2132, parce qu’il s’agit bien de l’exhumer, fait tomber tous les autres amendements de la série.
J’essaie de réfléchir de manière logique. Peut-être pourrait-on reconnaître implicitement, à partir du moment où l’on discute de cet amendement, qui a trait au fond du projet de loi et non à la forme, que l’article existe toujours, qu’il n’a pas été supprimé et que, dans ces conditions, il ne peut plus l’être ?
Je ne suis pas sûr que mon raisonnement soit logique et fondé, mais nous avons tous besoin, ici, dans cet hémicycle, de comprendre ce point.
M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour un rappel au règlement.
M. Ronan Dantec. Si un amendement rend les autres amendements sans objet, c’est qu’il restructure le débat.
M. Serge Babary. Sur quel article du règlement vous fondez-vous ?
M. Ronan Dantec. Je pensais que vous aviez suivi : l’article 44 bis du règlement. Vous devriez m’écouter davantage, mon cher collègue. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
L’amendement de la commission traite de l’usure professionnelle en tendant à remplacer les mots : « aux 1° » par les mots : « au 1° et au a du 2° »… Ce n’est pas sérieux !
Effectivement, beaucoup d’amendements de suppression ont été déposés sur cet article. Il nous semble en effet que le dispositif proposé ne répond en rien aux questions posées. Nos amendements visent à favoriser le dialogue sur le thème de l’usure professionnelle, sujet d’autant plus essentiel que l’âge légal de départ à la retraite a été reporté.
Les débats auraient pu être extrêmement intéressants et structurés.
M. le ministre aurait par exemple pu nous dire qu’il avait attentivement écouté les propos de M. Patriat et annoncer qu’il lançait dès aujourd’hui une filière industrielle de production d’exosquelettes, pour équiper, demain, la quasi-totalité des travailleurs français. (Sourires sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE.) Cela permettrait de créer de l’emploi dans une filière, qui est déjà au cœur de la recherche et pour laquelle des fonds importants sont débloqués. Nous aurions pu échanger sur cette généralisation des exosquelettes, qui servent à limiter l’usure au travail. Mais ce débat n’aura pas lieu.
M. Jean-François Husson. Sur quel article du règlement se fonde votre intervention, monsieur Dantec ?
M. Ronan Dantec. Il n’est pas possible de discuter sérieusement d’un article aussi important que l’article 9, en examinant un amendement qui ne tend à prévoir que des modifications rédactionnelles.
Les Français nous regardent. Nous abordons des problématiques essentielles pour leur avenir.
Cet après-midi, nous sommes parvenus à faire l’inverse de ce que nous montrons ce soir en votant ensemble un amendement important : gardons la même logique ! Si nous n’en changeons pas, les Français seront extrêmement déçus.
M. le président. La parole est à M. Guy Benarroche, pour un rappel au règlement.
M. Guy Benarroche. Mon rappel au règlement est fondé sur l’article 44 bis du règlement.
Clarifions les choses d’entrée de jeu : nous essayons de vous faire dire ce qui a bien pu vous pousser à recourir aux procédés que vous avez utilisés et que vous continuez à employer ce soir.
Pour nous, la raison en est simple. J’ai entendu un certain nombre de collègues dire la même chose : vous n’avez qu’une seule volonté, non pas celle de débattre sur ce texte pour l’améliorer ou envoyer les messages qui permettraient à nos interlocuteurs, citoyens et syndicats, d’accepter un certain nombre de mesures, et de peser sur un certain nombre d’autres dispositions. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.) Prenez la parole si vous souhaitez vous exprimer, mes chers collègues !
Vous ne voulez tout simplement pas débattre et vous avez pour seul objectif de faire voter ce texte sans qu’aucune discussion ait lieu sur les paragraphes, les points, les articles les plus importants, pourtant listés par le rapporteur lui-même.
M. Jean-François Husson. Si vous abrégiez, on gagnerait du temps et on pourrait le faire !
M. Guy Benarroche. Je ne vous entends pas quand vous parlez d’aussi loin, mon cher collègue.
Aujourd’hui, vous déployez une stratégie, mais vous le faites en dissimulant chaque manœuvre,…
Mme Dominique Estrosi Sassone. N’importe quoi !
M. Guy Benarroche. … ce qui nuit à la sincérité des débats.
Vous opposez un certain nombre de vos amendements aux nôtres, et vous les faites examiner selon un ordre qui nous empêche de débattre. C’est le cas notamment lorsque vous supprimez des sous-amendements.
En plus, vous le faites sans même prendre la peine d’expliquer votre démarche. Vous pourriez au moins avancer quelques arguments : c’est ce que nous vous demandons. Expliquez-nous pourquoi nos amendements deviendraient sans objet à la suite de l’adoption de l’amendement de la commission.
Nous ne le comprenons pas, pas davantage que votre tactique ou les moyens de procédure auxquels vous avez recours. Et, excusez-moi de le dire, mais si nous ne le comprenons pas, je pense que beaucoup des personnes qui suivent nos débats ne le comprennent pas non plus.
M. le président. La parole est à M. Alain Richard, pour un rappel au règlement. (Exclamations ironiques sur des travées des groupes SER et CRCE.)
M. Alain Richard. Monsieur le président, nous discutons du règlement et des procédures législatives.
M. Claude Raynal. Sur quel article fondez-vous votre rappel au règlement ?
M. Éric Kerrouche. Quel article, monsieur Richard ?
M. Alain Richard. Si M. Kerrouche tolère que je puisse m’exprimer…
M. Éric Kerrouche. C’était une simple demande de précision !
M. Alain Richard. Peut-être, mais si nous nous interrompons aussi énergiquement à chaque fois que quelqu’un prononce une syllabe, nos échanges ne s’apparentent plus à un débat démocratique, monsieur Kerrouche. (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes RDPI, INDEP, RDSE, UC et Les Républicains.) Acceptez-vous de vous taire ?
M. David Assouline. Heureusement que vous ne parlez pas plus souvent !
M. Alain Richard. Si vous êtes d’accord pour écouter mon raisonnement, je ne prendrai que quelques instants. Sont mis en discussion commune – nous sommes habitués à ce mode de fonctionnement, mes chers collègues – des amendements qui portent sur les mêmes éléments d’un texte et dont l’adoption serait contradictoire : lorsque plusieurs amendements portent sur un même point, ils sont mis en discussion commune, parce que l’adoption de l’un entraînerait la perte de sens des autres.
M. David Assouline. Ce n’est pas ce que nous contestons ici !
M. Alain Richard. Ce qui s’applique en ce moment est exactement la même chose, et c’est une question de logique ; M. Houllegatte l’a dit très justement. Le droit est une logique.
Si l’amendement appelé en priorité est placé devant tous les autres amendements en discussion commune, cela entraîne que, s’il est voté, le Sénat adopte une disposition de l’article, et que, par conséquent, il a écarté l’ensemble des amendements de suppression dudit article.
Mme Éliane Assassi. Ça va, on a compris la leçon !
M. Alain Richard. C’est aussi simple que cela, et nous recourons à cette pratique pour tous nos débats législatifs. Cela ne me semble pas être une grande découverte.
M. le président. La parole est à Mme Monique Lubin, pour un rappel au règlement.
Mme Monique Lubin. Mon rappel au règlement se fonde sur l’article 46 bis du règlement du Sénat.
Les amendements que vous envisagez de faire disparaître sont parfaitement dans l’esprit de l’article et du texte. Nous ne comprenons donc pas pourquoi l’amendement de la commission les ferait « tomber ».
Permettez-moi de vous le rappeler, l’une des premières actions que ce gouvernement a menées en 2017 a été de supprimer les critères de pénibilité que nous avions introduits dans la loi. Vous comprendrez par conséquent que nous ne vous accordions pas une totale confiance à ce sujet.
Vous ne vous étonnerez pas non plus que nous souhaitions travailler à fond les dispositions de cet article. Nous voulons redonner aux travailleurs les garanties qu’ils ont perdues à cause de votre politique.
Après que le Sénat a voté un allongement de deux ans de la durée du travail et créé des dispositifs pour carrière longue qui repoussent davantage encore l’âge de départ à la retraite, les salariés attendent de nous que nous soyons extrêmement convaincants sur l’article 9.
J’ai d’ailleurs entendu M. le rapporteur se demander plusieurs fois au cours de ces débats si nous parviendrions à examiner l’article 7, mais aussi l’article 9.
M. René-Paul Savary, rapporteur de la commission des affaires sociales pour l’assurance vieillesse. Je m’en inquiète encore !
Mme Monique Lubin. Nous y sommes, monsieur le rapporteur, et nous voulons débattre de tout ! Ces salariés, à qui vous allez demander de travailler deux ans de plus, notamment ceux qui ont des carrières longues, c’est-à-dire ceux qui travaillent déjà depuis longtemps, ont le droit d’être protégés. Or ce sont souvent ceux qui le sont le moins.
Nous demandons que tous nos amendements puissent être discutés. C’est de cette manière que nous pourrons travailler du mieux possible, et dans les meilleures conditions.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour un rappel au règlement.
Mme Raymonde Poncet Monge. Mon rappel au règlement se fonde sur l’article 44 bis de notre règlement et porte la sincérité et la clarté des débats.
Je voudrais expliquer pourquoi votre refus de nous laisser présenter nos amendements de suppression de l’article 9 n’est pas sans importance. Exposer les raisons pour lesquelles nous proposons de supprimer un article revient en fin de compte à inciter chacun à prendre du champ.
En l’espèce, nous discutons ici de la pénibilité, sujet d’autant plus essentiel que la durée du travail a été allongée de deux ans.
Il est absolument nécessaire d’étudier toutes les implications de ce report de l’âge de départ à la retraite. D’ailleurs, le fait d’appeler à la suppression de l’article 9 n’a d’autre objet que de vérifier si, grâce aux mesures proposées par la majorité, les fameuses mesures d’accompagnement, et au vu de l’ampleur et de l’importance du sujet, le compte y est.
L’honnêteté me conduit à dire que nous sommes tout à fait favorables à certaines mesures que vous proposez, monsieur le rapporteur, à commencer par celle que vous défendez avec cet amendement n° 2132 sur l’exclusion des agents chimiques dangereux.
Mais, en nous empêchant de présenter nos amendements de suppression – alors que nous serions prêts, je le répète à voter certaines mesures –, vous nous empêchez d’expliquer le sens de nos votes à venir.
Pour terminer, permettez-moi de rappeler que 10 % de nos amendements ont été frappés d’irrecevabilité au titre de l’article 40 de la Constitution, et que 90 % d’entre eux l’ont été au titre de l’article 45 de la Constitution et de l’absence de lien, direct ou indirect, avec le texte, ce qui était totalement faux.
Et maintenant, nous sommes confrontés à une vague d’artifices de procédure qui visent à supprimer encore plusieurs de nos amendements, qui nous permettraient pourtant d’expliquer nos prises de position.
En termes de clarté et de sincérité des débats, le compte n’y est vraiment pas ! Sur l’article 9, nous voulions nous exprimer, mais nous ne le pourrons pas : on ne débattra que des 140 amendements que vous daignez laisser en discussion. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. le président. La parole est à M. Yan Chantrel, pour un rappel au règlement.
M. Yan Chantrel. Mon rappel au règlement se fonde également sur l’article 44 bis du règlement du Sénat.
Mes chers collègues, ce qui se passe depuis quelques jours au sein de cet hémicycle est particulièrement grave. Si on remonte le fil de l’histoire, vous avez commencé à recourir à tous ces procédés au moment des manifestations massives de mardi dernier,… (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi qu’au banc des commissions.)
Mme Dominique Estrosi Sassone. Non, nous l’avons fait quand vous êtes passés à l’obstruction massive ; ce n’est pas pareil !
M. Yan Chantrel. … lorsque vous avez pu constater que les Françaises et les Français s’étaient massivement mobilisés. (Marques d’approbation sur les travées des groupes SER et CRCE.) À partir de là, vous avez commencé avec vos manœuvres, dont chacun sait qu’elles sont vouées à accélérer l’examen du texte.
Mais pourquoi souhaitez-vous aller plus vite ? C’est tout simplement parce que plus nous parlons du texte, plus nous parlons du fond, plus cela vous dérange !
M. André Reichardt. Mais arrêtez !
M. Yan Chantrel. C’est parce que nous mettons en exergue l’injustice de ce projet de loi, à tel point que plus nous la dénonçons, plus les désistements se multiplient dans vos rangs. De plus en plus de sénateurs se rétractent en effet et modifient leur vote.
Vous savez pertinemment que, si nous continuons à débattre, de plus en plus de nos collègues dans cet hémicycle se rendront compte que cette réforme est injuste et brutale. (Nouvelles protestations sur les travées des groupes RDPI, UC et Les Républicains.)
Mme Françoise Gatel. Mais non !
M. Yan Chantrel. Justement, cet article 9, sur la pénibilité, est sans aucun doute, avec l’article 7 que vous avez voté, l’un des plus injustes.
Ce que vous nous dites finalement, c’est que si l’on débattait du fond, d’autres sénateurs parmi vos amis pourraient encore se rétracter,…
M. Christian Cambon. N’importe quoi !
M. Yan Chantrel. … comme ceux qui l’ont fait à l’article 7.
Les Français ont le droit à ce débat, notamment ceux qui ont les métiers les plus pénibles. Il serait à l’honneur du Parlement de laisser la discussion se dérouler. Or, actuellement, vous foulez aux pieds les droits des parlementaires, et vous les écrasez avec vos artifices ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST. – Protestations sur les travées des groupes RDPI, INDEP, UC et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Vincent Éblé, pour un rappel au règlement.
M. Vincent Éblé. Mon rappel au règlement se fonde, non pas sur l’article 44 bis, comme pour la plupart des précédents intervenants, mais sur l’article 46 bis de notre règlement, dont le deuxième alinéa dispose : « Les amendements sont mis aux voix dans l’ordre ci-après : les amendements de suppression et ensuite les autres amendements en commençant par ceux qui s’écartent le plus du texte proposé et dans l’ordre où ils s’y opposent, s’y intercalent ou s’y ajoutent. Toutefois, lorsque le Sénat a adopté une priorité ou une réserve dans les conditions fixées à l’alinéa 6 de l’article 44, l’ordre de mise aux voix est modifié en conséquence. Lorsqu’ils viennent en concurrence, et sauf décision contraire de la conférence des Présidents ou décision du Sénat sur proposition de la commission saisie au fond, les amendements font l’objet d’une discussion commune, à l’exception » – écoutez bien, mes chers collègues ! – « des amendements de suppression et de rédaction globale de l’article. »
Monsieur le président, nous contestons formellement votre interprétation de cet article, qui conduirait à la disparition de l’ensemble des amendements de suppression de l’article 9 si l’amendement de la commission était adopté. D’après nous, ces amendements devraient être examinés en premier lieu et avant tout autre ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. Roger Karoutchi. C’est n’importe quoi !
M. le président. La parole est à M. Henri Cabanel, pour un rappel au règlement.
M. Henri Cabanel. Mon rappel au règlement se fonde sur l’article 44 bis du règlement du Sénat et porte sur la clarté des débats.
Cet article 9 sur la pénibilité est – on l’a dit – vraiment très important. Moi aussi, je suis surpris, comme beaucoup de nos collègues, par cette demande de priorité de la commission et par les effets qu’aurait l’adoption de l’amendement du rapporteur, à savoir que beaucoup d’amendements deviendraient sans objet.
Je suis d’autant plus surpris que j’aurais souhaité que la majorité sénatoriale puisse clairement expliquer à l’autre moitié de l’hémicycle pourquoi elle a recouru à ce procédé.
Un sénateur du groupe SER. On n’attend que ça !
M. Henri Cabanel. Puisque la majorité sénatoriale ne s’exprime pas à ce sujet, ce que je regrette, je vais essayer, très humblement, et sans polémique, de l’expliquer.
Les membres de mon groupe, eux non plus, n’ont pas présenté beaucoup d’amendements, mais eux aussi subiront la disparition des leurs.
Malgré tout, je pense que, pour la sérénité des débats, il faut aussi reconnaître que cette accumulation d’amendements de suppression de l’article 9 – il y a 55 amendements identiques ! – est excessive, d’autant que d’autres amendements nous auraient permis de débattre sereinement. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC, RDPI et INDEP. – Marques d’approbation au banc des commissions.)
J’ignore ce que vous ressentez, mais, personnellement, j’ai honte de vivre ce que l’on est en train de vivre en ce moment.
Mme Monique Lubin. Il n’y a aucune raison à cela !
M. Henri Cabanel. Nous sommes loin d’un débat de fond, alors qu’il y a quelques instants encore nous échangions sereinement ; c’était d’ailleurs très intéressant.
Les membres du groupe RDSE veulent aller jusqu’au bout des débats et voter ou non ce texte. Nous sommes prêts à travailler jusqu’à dimanche à minuit s’il le faut.
Ce que je vous demande, mes chers collègues de gauche, et nous vous l’avons déjà demandé à plusieurs reprises, c’est de dire à vos collègues de la majorité sénatoriale si, oui ou non, vous voulez que l’on aille au bout des débats pour voter sur ce texte ! (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE, RDPI, INDEP, UC et Les Républicains. – Protestations sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST.)
M. le président. La parole est à Mme Michelle Meunier, pour un rappel au règlement.
Mme Michelle Meunier. Tout comme mon collègue, je ne suis pas coutumière des rappels au règlement ; c’est même probablement la première fois que j’en fais un depuis que je suis sénatrice. Le mien se fonde sur l’article 44 bis de notre règlement.
Je ne comprends pas, à l’instar de plusieurs de mes collègues, ce que cette affaire de disjonction de l’amendement de la commission vient faire tout à coup dans nos débats. Quel sens cela donnera-t-il à l’article 9, monsieur le rapporteur ? On attend une réponse…
M. René-Paul Savary, rapporteur. Je vous la donnerai dès que j’aurai la parole !
Mme Michelle Meunier. … qui soit moins formelle que celle que vous avez apportée, une réponse qui soit plus sur le fond. Car c’est le fond, les dispositions de l’article 9 qui nous intéressent !
M. le président. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour un rappel au règlement.
M. Pierre Ouzoulias. J’interviens à mon tour sur le fondement de l’article 46 bis du règlement du Sénat pour compléter l’excellent argumentaire de notre collègue Vincent Éblé.
M. Roger Karoutchi. Pitié, pas vous !
M. Pierre Ouzoulias. Mes chers collègues, vous voulez éliminer les amendements de suppression. Je vous pose une question de pure logique ; ce n’est ni une question politique ni une question de règlement. Comment faire pour supprimer les amendements de suppression d’un article ? La seule solution consiste à supprimer l’article. Ce que je vous propose, par conséquent, c’est de supprimer l’article 9, et on avancera beaucoup plus vite ! (Rires et applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)
M. Jacques Grosperrin. Vous devenez grotesques !
M. le président. La parole est à M. Daniel Salmon, pour un rappel au règlement.
M. Daniel Salmon. Mon rappel au règlement est fondé sur l’article 44 bis de notre règlement.
Vous rendez-vous compte, mes chers collègues, qu’en agissant ainsi, vous enjambez la question de la pénibilité, de l’usure au travail ? Vous le savez pourtant, à l’heure actuelle, les Français se questionnent sur le sens du travail et leurs conditions de travail. Cet article 9 tombait donc à point nommé : c’était le moment adéquat pour débattre de ces sujets.
Les travailleuses de l’agroalimentaire, les tâcherons du bâtiment ne semblent pas vous intéresser. C’est dommage ! J’avais une autre image de votre rapport au travail. Apparemment, ces sujets ne semblent pas vous concerner.
Votre unique but est d’accélérer, de tronquer le débat. Le bruit, les travaux répétitifs, le froid, le chaud, l’humidité, les pressions de tous ordres, qu’elles soient physiques ou psychiques, ne vous intéressent pas.
Nos échanges ne me semblent pas du tout sincères aujourd’hui. Je vous demande par conséquent de vous reprendre. Vous risquez d’obérer totalement un débat nécessaire et attendu par les Françaises et les Français. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour un rappel au règlement.
M. Daniel Chasseing. Je voudrais revenir sur une loi qui fait consensus, la loi Touraine de 2014, qui a allongé à quarante-trois annuités la durée de cotisation requise pour partir à la retraite à taux plein ; je considère que le président Hollande a fait voter cette mesure pour le bien de notre système des retraites.
Cette disposition s’appliquera toujours à l’issue de l’adoption de la réforme dont nous débattons, si ce n’est que son application sera avancée de 2035 à 2027.
Prenons un exemple pour éclairer nos débats. Sachez qu’après quarante-trois ans, toutes les personnes qui auront commencé à travailler à 21 ans partiront justement à l’âge de 64 ans…
Les deux principaux paramètres de la réforme, le relèvement de l’âge légal de départ à la retraite, et le nombre de trimestres d’assurance nécessaires pour obtenir une retraite à taux plein, doivent s’accompagner d’une meilleure prise en compte de la pénibilité, ce qui correspond précisément à l’objet de l’article 9.
Il est urgent d’avancer sur le sujet : il faut améliorer le C2P, valoriser les personnes exposées à la pénibilité, aux temps partiels, créer un fonds d’investissement dans la prévention de l’usure professionnelle financé par la branche AT-MP, encourager la mise en place de négociations en vue d’aboutir à l’établissement d’une liste des métiers pénibles, ouvrir le droit à des points pour les salariés exposés à des facteurs de risques professionnels, favoriser la formation, réduire la durée du travail et encourager le départ anticipé à la retraite des personnes exerçant des métiers pénibles.
M. Emmanuel Capus. Très bien !
M. Daniel Chasseing. Toutes ces mesures figurent à l’article 9 !
Nous aurions, certes, préféré une vraie loi Travail, qui aurait résulté d’une concertation avec les partenaires sociaux, mais cet article apporte des aménagements véritablement constructifs, qui pourront encore faire l’objet d’améliorations, en lien avec les partenaires sociaux. (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP, RDPI, UC et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour un rappel au règlement.
M. René-Paul Savary, rapporteur. 36 15 ! (Rires.)
Mme Cathy Apourceau-Poly. Cela vous fait rire, monsieur Savary ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Je plaisantais.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Ce n’est pas drôle du tout. (Vives exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Philippe Pemezec. Mais pour qui vous prenez-vous ?
Mme Cathy Apourceau-Poly. Allons, mes chers collègues, restez calmes ! Ne vous excitez pas, tout va bien se passer ! (Mêmes mouvements.)
M. le président. Mes chers collègues, laissez Mme Apourceau-Poly s’exprimer !
Mme Cathy Apourceau-Poly. Madame la présidente de la commission, je pense que vous n’avez pas dû comprendre ma collègue Laurence Cohen tout à l’heure,…
M. Philippe Pemezec. Dites tout de suite que nous sommes des idiots !
Mme Cathy Apourceau-Poly. … lorsqu’elle vous a demandé légitimement de réunir la commission des affaires sociales.
Les plus de soixante-dix amendements que vous allez rendre sans objet ont été jugés recevables, madame la présidente.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Tout à fait, ils ont déjà été examinés !
Mme Cathy Apourceau-Poly. Vous êtes en train d’employer tous les artifices possibles pour nous empêcher de défendre nos amendements de suppression. Or nous nous apprêtions à les présenter en développant des arguments importants, en évoquant notamment les actions de prévention nécessaires à mettre en place à nos yeux.
Finalement, si notre assemblée avait pu débattre de ces amendements, elle n’y aurait consacré que deux heures et demie. Or, compte tenu des différents rappels au règlement que vous avez provoqués, qui relèvent, je le rappelle, du droit des parlementaires, nous en sommes déjà à une heure de discussion !
Alors, réfléchissez bien à ce que vous faites, mes chers collègues, parce qu’il me semble que vous vous êtes fait prendre à votre propre jeu !
M. le président. La parole est à M. Jérôme Durain, pour un rappel au règlement.
M. Jérôme Durain. Mon rappel au règlement se fonde sur l’article 44 bis du règlement du Sénat.
Tout d’abord, je vais réitérer les demandes d’explications qu’ont formulées un certain nombre d’orateurs sur la décision d’appeler en priorité l’amendement n° 2132 de la commission, et celle de disjoindre celui-ci des autres amendements en discussion commune.
Je ferai ensuite une remarque, qui pourra vous paraître naïve : sur un plan purement arithmétique, la procédure a été enclenchée à vingt et une heures et cinquante-quatre minutes. Or, si l’on tient compte du fait que tous les auteurs des amendements de suppression de l’article 9 n’étaient pas présents dans l’hémicycle au moment de la demande de priorité, vous risquez de ne pas gagner une seule minute dans cette affaire !
Pire, nous aurons passé plus d’une heure, une heure et demie, à parler de la forme, et pas du fond ! (Protestations sur les travées des groupes RDPI, UC et Les Républicains.)
Vous pouvez nous adresser tous les reproches que vous voulez, mais celui qui dira ici que les membres des trois groupes de gauche n’ont pas travaillé sur le fond du texte et n’avaient pas, à la faveur des amendements de suppression, des questions fondamentales à poser, qui intéressent les Français dans leur vie quotidienne, ne rend pas justice aux efforts que nous avons fournis.
Enfin, permettez-moi de vous dire que, si nous avions à expliquer aux Français, après le leur avoir présenté dans le détail, que c’est à cause de l’amendement de la commission que nous venons de passer une heure à ne parler de rien d’important, alors que nous aurions pu discuter de plein de sujets qui les concernent, je crains que l’image du Sénat n’en sorte pas grandie ! (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE et SER.)
M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, pour un rappel au règlement.
M. Patrick Kanner. Les sénateurs ici présents ont beaucoup d’heures de vol en politique. (Sourires.)
Un sénateur du groupe Les Républicains. Certains plus que d’autres !
M. Patrick Kanner. Mais s’il n’y a pas beaucoup de perdreaux de l’année dans cet hémicycle, il y a en revanche des arroseurs arrosés. J’en vois beaucoup sur le côté droit de l’hémicycle !
M. Durain vient de le rappeler, si vous voulez nous brider en termes de temps de parole, nous avons aussi des moyens à notre disposition : vous utilisez l’article 46 bis du règlement, nous utilisons notre droit d’user de rappels au règlement !
Mais il faut arrêter maintenant ! Parlons du fond ; ça fait plus une heure et demie que nous ne parlons pas du fond !
Si vous pensez que nous allons plier le genou, mettre notre robe de bure et nous passer la corde au cou, la réponse est non !
M. Roger Karoutchi. Vous allez y être contraints !
M. Patrick Kanner. Pouvons-nous faire preuve d’intelligence ? Nous avons des choses à dire, vous avez des choses à dire et à défendre. Mes chers collègues de droite, vous faites fausse route en appelant en priorité cet amendement intéressant, mais qui n’est pas cardinal, pour contourner des amendements de suppression, reconnus comme essentiels. Ressaisissez-vous et nous serons en mesure de montrer aux Français que la Haute Assemblée défend leurs intérêts, quelles que soient les travées ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. Mickaël Vallet. Bravo !
M. Jean-François Husson. Pour l’instant, c’est l’inverse !
M. le président. La parole est à M. Jacques Fernique, pour un rappel au règlement.
M. Jacques Fernique. C’est un rappel au règlement sur le fondement des articles 46 bis et 36. Nous découvrons, et vous aussi, le fait qu’il n’y a pas de limite aux rappels au règlement.
Vous tentez de raccourcir nos débats, surtout quand ils portent sur des enjeux essentiels de la réforme, en ouvrant les vannes des débats de procédure. Il est temps de mesurer les avantages et les inconvénients de votre méthode.
On vit une période assez inédite. Je suis nouveau ici, mais beaucoup me disent qu’ils n’ont jamais vu ça. Prenons en compte les uns et les autres l’image que donne notre Sénat et avançons sur le fond. Il y a encore un certain nombre d’heures d’ici au moment où le carrosse se transformera peut-être en citrouille, dimanche à minuit ! (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. Jean-François Husson. Il ne tient qu’à vous ! Parlez moins et agissez plus !
M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Fichet, pour un rappel au règlement.
M. Jean-Luc Fichet. Nous exprimons le fond de nos pensées. Depuis le début, nous accrochons sur la pénibilité. Le Président de la République a d’abord supprimé les quatre critères les plus importants. Puis, il propose ensuite, avec l’allongement du départ à la retraite, il repousse pour les personnes handicapées et en difficulté l’âge légal de 62 ans à 64 ans. Ce soir, à travers cet article 9, nous aurions pu discuter de ces questions de pénibilité, mais vous faites tomber tous nos amendements. C’est très révélateur de la perception qui est la vôtre du travail !
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Il en reste 140 !
M. Jean-Luc Fichet. En matière de procédure visant à écarter certains amendements, je connais l’article 40 de la Constitution. On nous l’oppose assez souvent pour déclarer irrecevables nos propositions, au motif qu’elles entraîneraient de nouvelles dépenses. Mais, ici, il n’y a pas de nouvelles dépenses ; il s’agit seulement d’un débat de fond. Je regrette vraiment la situation dans laquelle nous nous trouvons !
M. le président. La parole est à M. Rémi Cardon, pour un rappel au règlement.
M. Rémi Cardon. Mon rappel au règlement se fonde sur le fondement de l’article 42 bis. Chers collègues, au moment d’aborder la question de la pénibilité, vous devenez pénibles ! (Protestations sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. René-Paul Savary, rapporteur. Quel bon mot !
M. Rémi Cardon. Pour vous, c’est enfin le grand soir ; vous êtes totalement convertis au macronisme ! (Mêmes mouvements.) M. Macron a dit au mois d’octobre 2019 qu’il n’aimait pas le mot de pénibilité, car il donne le sentiment que le travail est pénible. On vous proposait de débattre sur des amendements relatifs à la pénibilité, vous ne voulez pas. Mais je suis assez inquiet sur votre comportement : jouez-vous au bonneteau ? Vous essayez de changer les règles alors que la réforme des retraites est déjà compliquée pour les Français. Et vous, vous en rajoutez !
Ressaisissez-vous, retirez cet amendement et revenons à la case départ de ce « macronpoly » !
Article 9 (suite)
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, sur l’article.
Mme Raymonde Poncet Monge. L’article 9 prévoit la création de fonds d’investissement dans la prévention de l’« usure professionnelle ». « Usure professionnelle » plutôt que « pénibilité au travail » : nous notons les mots du pouvoir autant que le pouvoir des mots.
Pourtant, usure et pénibilité sont intrinsèquement corrélées. À des mots, nous répondrons donc par des chiffres. Les données scientifiques disponibles permettent d’estimer que 8,5 % des cancers sont d’origine professionnelle ! Selon la chercheuse Dominique Méda, pour plus de 43 % des Français, leur emploi implique de déplacer des charges lourdes. Pour 57 % des Français, leur travail implique des positions douloureuses ou fatigantes. Selon la dernière enquête Surveillance médicale des expositions des salariés aux risques professionnels, 2 millions de personnes sont exposées à au moins un agent cancérogène. Selon l’Insee, il y a onze ans d’écart d’espérance de vie sans incapacité séparent les hommes, les ouvriers et cadres, comme dans une moindre mesure les femmes.
À quand, monsieur le ministre, une réforme des retraites dont l’espérance de vie en bonne santé sera le paramètre central ?
Depuis 2017, le nombre de morts au travail a de nouveau grimpé passant à 719. La Confédération européenne des syndicats (CES) donne comme objectif pour 2030 zéro mort au travail. Vous avez du pain sur la planche !
Ainsi, ne devrait-on pas parler de pénibilité ? Lorsque nous parlons d’usure, ce sont les corps qui s’usent par le travail, ce qui renvoie à une réalité individuelle constatée, donc curative, alors que quand lorsqu’on parle de pénibilité, ce sont les métiers qui sont pénibles, d’où une présomption « d’usure » et une notion préventive.
M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret, sur l’article.
Mme Corinne Féret. Ce soir, j’ai honte ! J’ai honte parce qu’avec votre décision, vous dites aux Français que vous empêchez le débat sur un sujet essentiel de cette réforme : la pénibilité que des milliers de salariés vivent au quotidien.
Oui, j’ai honte que le Sénat soit dans cette situation et que nous ne puissions pas en parler.
Pour autant, vous n’allez pas m’empêcher de parler dans le cadre de cette intervention sur l’article et de dire tout ce que j’avais prévu d’évoquer.
Le droit à la retraite est une grande conquête sociale. On ne peut pas parler de retraite sans parler du travail et des conditions de travail. Or, dans votre projet de réforme, monsieur le ministre, la question de la pénibilité au travail est posée de manière pour le moins problématique. Que vous le vouliez ou non, certains métiers sont dangereux, pénibles !
Mais le Gouvernement préfère parler d’usure professionnelle que de pénibilité. Or ce n’est pas la même chose. La pénibilité porte sur le travail sur ses conditions, donc sur une responsabilité collective, alors que l’usure professionnelle porte sur les corps des travailleurs, donc sur une responsabilité individuelle. Nous n’avons pas les mêmes valeurs !
Il est toujours utile de rappeler que lors du premier quinquennat d’Emmanuel Macron, en 2017 – c’était à peine hier –, l’exécutif a supprimé par ordonnance quatre critères de pénibilité sur dix introduits en 2015 : le port de charges lourdes, les postures pénibles, les vibrations mécaniques, comme celles des marteaux-piqueurs, et l’exposition aux risques chimiques, qui n’ouvrent donc plus la possibilité de partir tôt.
Nous avions proposé un amendement pour réintroduire ces critères dans le compte professionnel de prévention. Mais, là encore, dans la mesure où le véhicule législatif choisi est un projet de loi de financement rectificatif de la sécurité sociale, on ne nous permet pas de débattre de ces vrais enjeux, et on déclare nos amendements irrecevables. Voilà comment nous sommes empêchés de débattre !
Avec votre réforme, force est de constater que vous demandez à des Français déjà exposés de travailler davantage ! (Marques d’impatience sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Marie-Arlette Carlotti applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, sur l’article.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Un grand auteur a un jour confié à un journaliste : « Au fur et à mesure que l’épreuve de l’usine avance, il faut puiser au plus profond de ses ressources pour pouvoir continuer à tenir, et on se raccroche à tout ce qui peut nous faire tenir ». Non, chers collègues, il ne s’agit d’un auteur ni du XIXe siècle ni du XXe siècle. C’est un contemporain qui décrit le travail dans un abattoir d’aujourd’hui. Il s’agit des mots du défunt écrivain Joseph Ponthus, auteur du livre À la ligne, lors d’une interview sur France Culture voilà trois ans.
Lors de l’examen de cette réforme, que ce soit à l’Assemblée nationale ou, ici, au Sénat, vous n’avez de cesse d’essayer de segmenter les hommes et les femmes de ce pays, entre les supposés privilégiés des régimes spéciaux et les autres, le droit des nouveaux entrants et les autres bénéficiant de la clause du grand-père. Ce constat s’applique jusqu’à vos choix sémantiques.
On ne doit pas dire « ouvrier », mais on doit dire « opérateur de production ». On ne dit plus « chaîne », mais « ligne ». On ne doit surtout pas évoquer le mot de « pénibilité » lorsque l’on parle du travail. Cette euphémisation des termes que l’on constate depuis des années, que j’observe depuis nos débats de vendredi dernier et que je déplore, dans les rares propos de la droite comme dans les vôtres, monsieur le ministre, sont symptomatiques de votre déconnexion de la dure réalité du travail d’une grande partie des travailleurs de ce pays. Je me risque même à affirmer que cela traduit un certain mépris de classe !
M. Xavier Iacovelli. Sérieusement ?
Mme Cathy Apourceau-Poly. C’est dur ; c’est même très dur de travailler à l’usine, comme en témoigne le surcoût en rente d’invalidité de 1,8 milliard d’euros par an en cas de relèvement de deux ans de l’âge de départ à la retraite. Face à cela, vous comptez ne doter que de 250 millions d’euros par an votre fonds jusqu’en 2027.
En résumé, alors même que la pénibilité au travail devrait être un sujet central de ce projet de loi, le Gouvernement n’y consacre qu’un article largement insuffisant ! (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST.)
M. le président. Je rappelle que la conférence des Présidents a décidé qu’il n’y avait qu’une prise de parole sur l’article par groupe.
L’amendement n° 2132, présenté par M. Savary et Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 4, alinéa 5, deuxième phrase, et alinéa 10
Après la référence :
1°
insérer les mots :
et au a du 2°
II. – Alinéa 7
Remplacer les mots :
aux 1°
par les mots :
au 1° et au a du 2°
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter cet amendement appelé en priorité.
M. René-Paul Savary, rapporteur. Je peux enfin m’exprimer. Je m’impatientais.
Certains m’ont demandé des explications. Dans la vie, j’ai appris que l’on récoltait ce que l’on sème. (Exclamations à gauche.) Vous récoltez ce que vous avez semé la semaine dernière. La semaine dernière, vous n’avez pas tenu vos engagements.
M. Éric Kerrouche. Quels engagements ? Qu’est-ce que cela signifie ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Demandez à vos présidents de groupe ; ils savent bien de quoi je parle ! (Marques d’étonnement sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. Martin Lévrier. Tout à fait ! Il y a eu un accord !
M. René-Paul Savary, rapporteur. Tenez vos engagements ! Il y a des accords qui permettent de travailler dans de bonnes conditions, avec des fixations de date pour répondre aux exigences tout à fait compréhensibles de certains. Mais, en contrepartie, il était question que l’on puisse débattre et aller au bout du texte.
Mme Monique Lubin. Nous voulons aller jusqu’au bout !
M. René-Paul Savary, rapporteur. Vous savez combien je me préoccupe de la question de la pénibilité. Mais face à tous ces amendements de suppression sur un article aussi important, j’ai demandé l’autorisation de présenter mon amendement en priorité.
Pourquoi ? Parce que les agents chimiques ne sont pas pris en compte, ni dans le C2P ni dans les propositions qui sont faites à travers la création d’un fonds d’investissement. C’est une divergence que nous avons avec le Gouvernement. Voilà pourquoi je veux qu’on en discute. Je ne veux pas qu’il sorte un texte non voté, en raison de l’obstruction, sans avoir pu apporter des améliorations. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et INDEP.)
Entrons maintenant dans le cœur du sujet. La commission a souhaité, à la demande des syndicats, qu’on reprenne des mesures de prévention sur les agents chimiques. Actuellement, ces derniers sont traités complètement différemment. On pense aux agents chimiques qui sont vendus et distribués, mais on ne pense pas à tous ces travailleurs qui sont exposés à la fumée, aux poussières ! Ce sont pourtant bien des agents chimiques. On doit le prendre en compte plutôt avec des actions de prévention que des actions de réparation.
C’est la raison pour laquelle il nous a paru indispensable d’inscrire cette disposition dès à présent ouvrant droit au fonds d’investissement qui va être créé. Il n’est réservé qu’aux troubles ergonomiques. Il y a, certes, une dissociation dans la pénibilité, mais on ne découpe pas les gens en tranches !
Pour autant, certains facteurs sont faciles à exprimer, comme ceux qui figurent dans le C2P : travail de nuit, travail en équipe, etc. Pour eux, c’est facile, on peut déterminer des points, car on sait qui a travaillé la nuit et qui a travaillé en équipe. Mais il existe des facteurs plus complexes – ce n’est pas pour autant qu’il faut les mettre de côté –, notamment les facteurs ergonomiques : 50 % des accidents du travail à 80 % des maladies professionnelles sont liés à des facteurs ergonomiques. C’est la raison pour laquelle ce dispositif prévoit une amélioration.
Par ailleurs, nous avons proposé un autre dispositif qui n’était pas non plus à l’ordre du jour. C’est un dispositif ô combien important, puisqu’il s’agit, dans le cadre du C2P, de prendre notamment en compte les activités partielles pour les plafonner avant les années de retraite et les consacrer à rémunération complète en fin de carrière pour les personnes exposées à différents facteurs de risque, l’idée étant qu’elles puissent finir plus progressivement leur carrière. Vous voyez que ce sont des améliorations importantes, surtout quand on demande un effort pour travailler plus longtemps : il vaut mieux terminer de façon progressive !
C’est une mesure de prévention plus importante que la mesure de réparation. Actuellement, c’est un âge anticipé. Les travailleurs la choisissent parce qu’ils y voient un moyen de partir plus précocement. Mais ce n’est pas un service qu’on leur rend. Il vaut mieux éviter qu’ils restent trop longtemps sous des facteurs d’usure et de pénibilité.
Je souhaite vivement, monsieur le ministre, que nos propositions soient prises en compte. Cette inscription des facteurs chimiques au titre du fonds d’investissement est un élément tout à fait important. J’attends de votre part un engagement ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP. – Mme Monique Lubin applaudit également.)
M. le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants, afin de réorganiser les débats.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt-trois heures quinze, est reprise à vingt-trois heures trente-cinq.)
M. le président. La séance est reprise.
Mes chers collègues, sur l’amendement n° 2132, je suis saisi des sous-amendements nos 5500 à 5654.
Ces sous-amendements ont été publiés sur le dossier législatif en ligne.
La parole est à M. le ministre.
M. Olivier Dussopt, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, hier soir, lorsque nous nous sommes quittés, le dérouleur affichait 1 037 amendements restant en discussion. Par curiosité, ce matin, lorsque je me suis réveillé, j’ai regardé où en était le dérouleur. Nous en étions à 1 250 : 200 sous-amendements avaient été déposés pendant la nuit.
Puis, au fil de cette journée, vous avez débattu, examiné, et voté un nombre considérable d’amendements, mais le nombre d’amendements inscrits au dérouleur ne cesse d’augmenter !
M. Patrick Kanner. Une vis sans fin !
M. Hussein Bourgi. C’est la productivité. (Sourires sur les travées du groupe SER.)
M. Olivier Dussopt, ministre. C’est effectivement une vis sans fin !
Nous avons regardé les sous-amendements qui ont été déposés. Certains ont été défendus, d’autres ont été retirés, d’autres enfin ont été rejetés. Nous avons eu des séries de sous-amendements qui, lorsqu’une demande de rapport était formulée avec une date de remise au 1er avril 2024, tendait à proposer plutôt le 2 avril, puis le 3 avril, puis le 4 avril, puis le 5 avril, etc. (Mme Annie Le Houerou le conteste.)
Nous avons eu, voilà un instant, communication des 150 ou 160 sous-amendements déposés sur l’amendement n° 2132 de M. le rapporteur.
M. Guillaume Gontard. Je demande la parole !
Mme Sophie Primas. Laissez le ministre parler !
M. Olivier Dussopt, ministre. Monsieur le sénateur, depuis quelques jours, je me perfectionne dans le règlement du Sénat : il se trouve que la parole du Gouvernement est libre ! Je peux donc m’exprimer quand je le souhaite sur tous les sujets qui intéressent le Gouvernement ! (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, INDEP, UC et Les Républicains.)
Ces 160 sous-amendements font le tour du dictionnaire des produits chimiques et des agents chimiques de France ! C’est une volonté manifeste d’obstruction. Il n’y a pas de volonté de débat ; il n’y a pas de volonté de construction ; il y a une volonté de blocage. Ce blocage se mesure par les chiffres : 5 700 ou à 5 800 amendements ont été déposés, exception faite des irrecevabilités.
J’ai entendu, mesdames, messieurs les sénateurs socialistes, votre réflexion : ce sera une vis sans fin ; ça va monter, monter, monter !
En réalité, ce que vous voulez, c’est que le Sénat soit privé de sa capacité à voter ce texte. (Protestations sur les travées du groupe SER. – Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, INDEP, UC et Les Républicains.) Vous voulez que le Sénat se voie confisquer sa capacité à délibérer démocratiquement. D’une certaine manière, mesdames, messieurs les sénateurs, vous opposez ce que vous appelez la légitimité de la rue à la légitimité du Parlement. Or nous croyons en la légitimité du Parlement ! (Vives protestations sur les travées du groupe SER.)
M. David Assouline. C’est la réponse du berger à la bergère !
M. Olivier Dussopt, ministre. Un certain nombre de présidents de groupe, un certain nombre de sénateurs ont eu recours à l’utilisation d’un certain nombre d’articles du règlement du Sénat. Vous avez tous reconnu que si l’opposition avait la possibilité d’utiliser le règlement pour faire de l’obstruction, selon vos propres mots, la majorité pouvait avoir recours au règlement pour garantir un bon déroulement du débat. Il se trouve que le Gouvernement peut aussi le faire.
Mme Françoise Gatel. Très bien !
M. Olivier Dussopt, ministre. Par conséquent, en application de l’article 44, alinéa 2 de la Constitution, le Gouvernement s’oppose à l’examen de l’ensemble des sous-amendements déposés sur l’amendement n° 2132 de M. le rapporteur qui n’ont pas été soumis à l’examen de la commission. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, INDEP, UC et Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe RDSE.)
M. David Assouline. Scandale !
M. le président. Conformément à l’article 44, alinéa 2 de la Constitution et à l’article 46 bis alinéa 4 du règlement, le Gouvernement s’oppose à l’examen des sous-amendements à l’amendement n° 2132 qui n’ont pas été antérieurement soumis à la commission.
Madame la présidente de la commission, confirmez-vous que l’ensemble de ses sous-amendements n’ont pas été soumis antérieurement à la commission avant l’ouverture du débat ?
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Je le confirme, monsieur le président.
M. le président. Dans ces conditions, ces sous-amendements ne peuvent pas être examinés.
Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 2132 ?
M. Olivier Dussopt, ministre. Le Gouvernement partage pleinement la préoccupation de la commission sur la prévention du risque chimique.
Les obligations du code du travail, qui prévoient la suppression des expositions aux agents les plus dangereux, pour d’autres, la limitation au minimum possible en mettant en œuvre tous les moyens de protection disponibles sont notre boussole en la matière. L’inspection du travail en assure le respect au quotidien.
Le quatrième plan santé au travail renforce les actions de prévention sur le terrain contre le risque chimique. Je rappelle que les TPE peuvent, via les caisses d’assurance retraite et de la santé au travail (Carsat), obtenir des aides financières à cette fin. Les conventions d’objectifs et de gestion à a branche AT-MP sont autant d’outils que nous mobilisons en la matière.
Il y a 22 000 substances enregistrées à l’échelon européen, avec des situations d’exposition, des normes d’exposition maximum qui sont extrêmement variées. De la pétrochimie au coiffeur, en passant par les employés de la propreté, de nombreux salariés français sont potentiellement concernés.
Le Gouvernement – M. le rapporteur le sait – est extrêmement réservé sur l’extension du financement du fonds d’investissement dans la prévention de l’usure professionnelle à la question des agents chimiques. Pourquoi cette réserve ? Pour deux raisons.
Premièrement, nous considérons que la meilleure prévention en la matière est de respecter les normes limitant le niveau d’exposition et de respecter les interdictions. Nous ne sommes pas dans un champ de prévention ; nous sommes dans un champ de sécurité.
Deuxièmement, aujourd’hui, les employeurs ont une obligation : assurer la sécurité de leurs employés. Dans ce cadre, ils doivent à la fois respecter les normes d’exposition, tout comme ils doivent respecter les normes d’interdiction lorsque les agents chimiques sont particulièrement dangereux.
Les mêmes employeurs ont une obligation en matière d’équipement personnel et collectif de sécurité. Le Gouvernement ne souhaite pas que le fonds d’investissement dans la prévention de l’usure professionnelle (Fipu) puisse être mobilisé pour financer des équipements de protection individuelle, qui relèvent aujourd’hui d’une obligation de protection des employeurs. Il est difficile de définir un champ aussi ténu d’intervention du Fipu en matière d’usure professionnelle sur la question des agents chimiques, à part peut-être sur la question de la formation au titre de la prévention, mais en aucun cas sur les éléments de sécurité, qui sont d’ores et déjà à la charge des employeurs dans le cadre de cette obligation.
C’est la raison pour laquelle nous avions émis cette réserve, qui me conduit à une demande de retrait.
L’amendement ayant été adopté par la commission des affaires sociales, j’ai bien conscience que cette discussion continuera dans le cadre de la navette parlementaire.
Rappels au règlement
Mme Éliane Assassi. Mon rappel au règlement se fonde sur l’article auquel nous avons eu recours à plusieurs reprises ce soir.
Je vais essayer de garder toute ma sérénité.
Nous ne sommes pas surpris par l’annonce que vient de faire M. le ministre, car elle était très prévisible. Ce soir, c’est l’article 44, alinéa 2 de la Constitution. Demain, ce sera peut-être l’article 44, alinéa 3 – le Gouvernement en a le droit.
Nous ne sommes pas dupes. Pour reprendre une expression que j’ai entendue lors de la conférence des présidents, mercredi matin, nous ne sommes pas des « perdreaux de l’année ».
La majorité de droite sénatoriale a usé de pratiquement toutes les procédures que lui offre notre règlement. (M. Roger Karoutchi s’exclame.) Oui, vous le savez bien, monsieur Karoutchi ! Et maintenant, c’est au tour du Gouvernement, avec le soutien de la majorité sénatoriale, de nous bâillonner.
Mes chers collègues, que vous dire, après avoir déjà tant dit ?
M. Philippe Tabarot. Rien ! Restez silencieuse…
Mme Éliane Assassi. Que dire, sinon que c’est un signe de faiblesse politique ?
Monsieur le ministre, votre gouvernement est faible politiquement. Vous faites preuve de fébrilité, parce que vous savez que votre réforme est rejetée majoritairement dans le pays, ce qui vous met très mal à l’aise, tout simplement, car elle est injuste.
Aussi, vous réalisez un nouveau coup de force coorganisé, qui va rejaillir…
M. le président. Merci !
Mme Éliane Assassi. … mesdames, messieurs les sénateurs de la majorité, sur les mobilisations de samedi et mercredi prochain. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour un rappel au règlement.
M. Guillaume Gontard. Mon rappel au règlement se fonde sur l’article 44 bis de notre règlement.
Monsieur le président, j’avais déjà demandé deux fois la parole, sans succès.
M. le président. Vous l’avez déjà eu une fois !
M. Guillaume Gontard. En tant que président de groupe, j’ai été visé par une mise en cause directe de M. le rapporteur, qui nous reproche de ne pas respecter un accord. Je suis particulièrement choqué par cette accusation. De quoi parlez-vous ? Pour ma part, je le dis clairement, je n’ai signé aucun accord. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Christian Cambon. Et la parole donnée ?
M. Guillaume Gontard. C’est le contraire qui serait grave. Il faut redescendre sur terre et en revenir à un débat parlementaire un peu sérieux.
Je veux bien, monsieur le ministre, que vous donniez des conseils aux parlementaires sur leur manière de fonctionner. Vous nous reprochez de multiplier les amendements, ce qui freinerait le débat. Je constate tout de même que, jusqu’à l’article 7, nous avons débattu sereinement. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. René-Paul Savary, rapporteur. C’était un monologue !
M. Guillaume Gontard. Ce n’est pas moi qui le dis. J’ai lu nombre d’articles de presse qui louaient le travail sérieux et serein du Sénat, qui avançait.
Que s’est-il passé ensuite ? Il y a eu cette nuit du 7 au 8 mars, qui restera, je le pense, dans la mémoire du Sénat, dans le mauvais sens du terme. (Marques d’impatience sur les travées des groupes Les Républicains et INDEP.)
Vous avez voulu museler le Sénat, en allant plus vite que la musique. Vous avez voulu nous censurer.
M. le président. Votre temps de parole est terminé, mon cher collègue.
M. Guillaume Gontard. À partir de là, nous n’avions plus d’autre choix… (Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à M. Yan Chantrel, pour un rappel au règlement.
M. Yan Chantrel. Mon rappel au règlement est fondé sur son article 44 bis.
Monsieur le ministre, tout a commencé au moment de la discussion de l’article 7, lorsque plus de 1 000 amendements que nous avions déposés ont été supprimés à cause de diverses manœuvres. Vous avez refusé le débat. Comme nous souhaitons débattre sur le fond, nous déposons des sous-amendements reprenant nos propositions.
Monsieur le ministre, je sais que le débat parlementaire est difficile pour vous.
M. Yan Chantrel. En effet, ici, au Sénat, il n’y a pas de 49.3, donc nous débattons. Je me doute que cela vous dérange de ne pas pouvoir brutaliser la Haute Assemblée, comme vous l’avez fait avec l’Assemblée nationale.
Il faut que les Français le sachent, nous avons vu, au moment de la suspension, MM. Retailleau et Dussopt sortir de l’hémicycle main dans la main pour décider ensemble d’activer l’article 44, alinéa 2 de la Constitution… (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Roger Karoutchi. C’est un rappel au règlement ?
M. Yan Chantrel. Il faudra se souvenir que la droite et le Gouvernement ont marché de concert dans cette affaire. Désormais, les Français ne peuvent plus être dupes : tout est clair et transparent. (Mme Sophie Primas s’exclame.)
M. le président. La parole est à Mme Sabine Van Heghe, pour un rappel au règlement.
Mme Sabine Van Heghe. Mon rappel au règlement est fondé sur son article 44 bis.
Monsieur le ministre, en rejetant nos sous-amendements, vous refusez le vrai débat sur la pénibilité, alors que c’est ce qu’attendent de nous tous les salariés exposés. Il est vrai qu’il est plus facile d’éviter les sujets qui fâchent que de les affronter courageusement…
Mes chers collègues de la majorité, monsieur le ministre, nous assistons à une démonstration de lâcheté et de mépris vis-à-vis des Français, que vous avez déjà condamnés à travailler deux ans de plus et qui attendent maintenant, à tout le moins, que nous nous penchions sur leurs conditions de travail et sur la santé au travail. (Mme Cathy Apourceau-Poly applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, pour un rappel au règlement.
M. Roger Karoutchi. Oh là !
M. Patrick Kanner. … c’est la manière dont les rédacteurs de la Constitution de la Ve République ont placé le Parlement sous une forme de contrôle du Gouvernement, grâce à différents articles. Il est vrai que ces mécanismes ont été modifiés par la réforme de Nicolas Sarkozy en 2008.
Messieurs les ministres, vous utilisez l’article 44, alinéa 2. Heureusement, vous ne pouvez pas utiliser le 49.3 devant le Sénat ; c’est la contrepartie de notre impossibilité de voter une motion de censure contre le Gouvernement.
Vous auriez tout aussi bien pu utiliser l’article 44, alinéa 3, à savoir un vote bloqué clair et net : on vote l’amendement n° 2132 et on arrête les débats. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) C’est peut-être d’ailleurs la prochaine étape que vous envisagez sans nous le dire.
M. Roger Karoutchi. Vous le cherchez bien !
M. Patrick Kanner. Nous voyons bien cette gradation des moyens utilisés pour nous empêcher de faire notre travail, c’est-à-dire de vous apporter la contradiction et de dire notre opposition à cette réforme dont, nous, nous ne voulons pas.
Nous sommes maintenant face à une coalition, qui n’est même plus de fait tant elle est évidente, entre les droites sénatoriales et la droite élyséenne. Nous le regrettons. Nous pensions que nous pouvions trouver d’autres solutions que celles que vous avez utilisées.
Je tiens à vous dire, messieurs les ministres, mes chers collègues de la droite sénatoriale, que nous n’allons pas abdiquer. Nous allons continuer à défendre nos arguments, peut-être avec plus de temps que ce que vous aviez imaginé, et nous le ferons avec conviction, vigueur et détermination. (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées du groupe CRCE.)
M. le président. La parole est à M. Daniel Breuiller, pour un rappel au règlement.
M. Daniel Breuiller. J’interviens au titre de l’article 44 bis du règlement.
Je constate ce soir que le Gouvernement, qui a déjà choisi de contraindre nos débats par l’article 47-1 de la Constitution, nous bâillonne encore plus grâce à un autre article constitutionnel, qui lui permet de rejeter brutalement un certain nombre de sous-amendements parlementaires. C’est son droit constitutionnel le plus strict.
Je veux le rappeler, sur toutes les travées de cet hémicycle le choix de ce véhicule législatif a été contesté, car il ne permet pas au débat d’avoir l’ampleur et la durée nécessaires. Pourtant, mes chers collègues, vous vous en êtes accommodés, et, aujourd’hui, vous vous résignez à toutes les restrictions au droit d’expression des oppositions.
Je le répète, une démocratie se révèle dans le respect qu’elle accorde aux minorités. En l’occurrence, ce respect vient à manquer.
M. Roger Karoutchi. Vous parlez 70 % du temps !
M. Daniel Breuiller. La question est finalement la suivante : pourrons-nous voter avant dimanche minuit ? Je n’en sais rien. À titre personnel, je n’ai pas un désir fou que nous passions au vote, puisque je m’oppose à ce texte.
En tout cas, si nous ne pouvons voter sur l’ensemble du projet de loi, c’est bien l’usage de l’article 47-1 de la Constitution qui aura conduit à cette situation, et non pas l’exercice de nos droits parlementaires. (Applaudissements sur les travées des groupes GEST et SER.) En effet, si vous aviez eu recours à une loi ordinaire, il y aurait certainement eu un vote.
M. Rémi Cardon. Très bien !
M. Daniel Breuiller. Enfin, s’il y a un vote avant dimanche minuit, celui-ci ne fera aucun doute. Et, si tel n’est pas le cas, la réforme sera approuvée après une CMP, qui, je l’imagine, sera conclusive. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. le président. La parole est à M. Bruno Retailleau, pour un rappel au règlement.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Sur quel article vous fondez-vous ?
Mme Monique Lubin. Sur quel article du règlement ?
M. Bruno Retailleau. Vous êtes de farouches opposants et vous vous battez avec ténacité. Ce n’est pas moi, qui ai toujours considéré que l’honneur de la politique était la défense de ses propres convictions, qui vous en ferai le reproche.
Nous avons toujours dit que nous voulions cette réforme – d’ailleurs, est-ce notre habitude de nous cacher ? –, puisque nous la votions depuis quatre ans, ici, au Sénat. Simplement, nous voulons la modifier. C’est la raison pour laquelle nous voulons aller jusqu’au bout du débat.
M. David Assouline. Allez-y !
M. Bruno Retailleau. J’ai entendu des rappels au règlement répétitifs. Mais, nous, nous voulons discuter du fond ! (Nous aussi ! sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
Non, c’est faux, vous ne voulez pas discuter du fond. Vous voulez bloquer la discussion !
En effet, vous le savez parfaitement, au rythme où nous allons, nous ne pourrons pas parler de la transition professionnelle, à l’article 13, de l’article 12, de l’assurance vieillesse pour les aidants, qui sont 4 millions, des travaux d’utilité collective (TUC), des jeunes volontaires, qui ont droit aussi à leur retraite, ou encore de la revalorisation des petites retraites. (Protestations sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
Vous avez construit, avec ingéniosité et avec une rapidité assez foudroyante, une machine à bloquer le débat et à empêcher les votes, autrement dit une machine à obstruction, reposant à la fois sur des sous-amendements et sur des rappels au règlement. (Nouvelles protestations sur les mêmes travées.)
M. Vincent Éblé. C’est l’hôpital qui se moque de la charité !
M. Bruno Retailleau. Bien sûr, une démocratie parlementaire s’honore à respecter les minorités. Mais j’exige…
Mme Cathy Apourceau-Poly. « J’exige »…
M. Bruno Retailleau. … que les droits de la minorité ne s’imposent pas à ceux de la majorité.
La démocratie, c’est que, au bout du compte, la majorité puisse voter pour faire valoir son propre avis. C’est ce que nous voulons pour cette réforme, que nous souhaitons éclairer complètement et jusqu’au bout. Nous aurions tellement mieux fait de parler ce soir de pénibilité, plutôt que d’assister à cette litanie de rappels au règlement !
Je vous le dis, l’obstruction, c’est la maladie du parlementarisme ! (Vifs applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC, INDEP et RDPI. – M. Jean-Claude Requier applaudit également. – Protestations sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret, pour un rappel au règlement.
Mme Corinne Féret. Je formule ce rappel au titre de l’article 44 bis du règlement.
Monsieur le ministre, mes chers collègues de la droite et du centre, que voulez-vous ? Nous empêcher de parler, de débattre ? Mais de quoi avez-vous peur ? Que craignez-vous ?
Le Gouvernement ne veut pas entendre les milliers de Français qui rejettent cette réforme. Et la majorité sénatoriale, une fois de plus, ne veut pas entendre les sénateurs qui s’opposent à cette réforme. (Marques d’ironie sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Christian Cambon. Mais il n’y a que vous qui parlez !
Mme Corinne Féret. Vous ne voulez pas nous laisser débattre, alors que, mes chers collègues, telle est bien notre intention, contrairement à ce qui est affirmé.
M. Laurent Burgoa. Alors, débattez !
M. Emmanuel Capus. Nous n’attendons que cela !
Mme Corinne Féret. Nous avons des propositions concrètes pour enrichir cette réforme. Nous voulons vous expliquer pourquoi nous sommes contre ce texte, tel qu’il est rédigé.
Je vous le dis tout net, vous ne réussirez pas à nous décourager : nous serons là encore demain, après-demain, et le surlendemain, jusqu’à minuit s’il le faut. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
Mme Dominique Estrosi Sassone. Nous aussi !
M. David Assouline. Vous n’irez pas à la messe, alors !
M. le président. La parole est à M. Éric Kerrouche, pour un rappel au règlement.
M. Éric Kerrouche. J’interviens moi aussi sur la base de l’article 44 bis de notre règlement.
Tout à l’heure, Alain Richard nous a dit que le droit était une logique. Ce n’est pas vrai ! C’est en politiste que je vous le dis : le droit est simplement un outil, que vous avez décidé d’utiliser ce soir contre la minorité de gauche de cet hémicycle, ce qui est problématique.
Le Parlement français est l’un des plus faibles des grandes démocraties occidentales. Or, vous concourez volontairement à nous infantiliser encore plus. Vous vous êtes mis dans la main du Gouvernement ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER.) Vous renoncez à tous vos droits.
Effectivement, monsieur Retailleau, nous sommes frontalement opposés à cette réforme, autant que vous la désirez.
Certes, nous aurions pu travailler en meilleure intelligence.
Mme Dominique Estrosi Sassone. C’est sûr !
M. Éric Kerrouche. Mais si nous avons déposé tous ces sous-amendements, c’est parce que vous aviez supprimé tous nos amendements de suppression.
Je vous le dis très tranquillement, c’est l’équilibre de la terreur : chaque fois que vous chercherez à nous marcher dessus et à nous brutaliser, nous trouverons des moyens pour nous exprimer. Et franchement, cela ne nous pose aucun problème, parce que, derrière nous, il y a des millions de Françaises et de Français, qui ne veulent pas de cette réforme. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST. – Protestations sur les travées des groupes Les Républicains, UC, INDEP et RDPI.)
M. Xavier Iacovelli. Non, ils ne sont pas derrière vous !
M. Éric Kerrouche. Nous, ici, nous sommes leurs représentants pour vous dire non ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour un rappel au règlement.
M. David Assouline. Ce rappel au règlement est fondé sur l’article 44 bis du règlement du Sénat.
Monsieur Retailleau, le parlementarisme ne vient pas de naître. Ici, j’ai connu des batailles mémorables sur la laïcité ou sur d’autres sujets. Nous avions alors cinq minutes de temps de parole sur article, cinq minutes pour présenter un amendement et cinq minutes d’explication de vote.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. On l’a échappé belle ! (Sourires sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)
M. David Assouline. En 2010, nous avons passé plusieurs semaines sur une réforme des retraites, qui était de même nature et qui imposait deux ans de plus pour les travailleurs de ce pays. Nous avons été jusqu’au bout du débat et nous avons utilisé plus de temps que celui qui nous est imparti sur ce texte, en l’occurrence jusqu’à dimanche soir.
Le problème ne vient donc pas de nous, monsieur Retailleau. Il vient du Gouvernement, qui a décidé, au travers de l’article 47-1 de la Constitution, et avec votre complicité, de limiter ce débat. Vous qui voulez aller au vote, demandez donc au ministre de lever cette contrainte, et alors nous irons jusqu’au bout de ce texte et il y aura un vote.
Alors que vous êtes des parlementaires et que, à ce titre, vous devez contrôler et tempérer l’exécutif, qui souhaite toujours se passer du débat parlementaire ou le raccourcir, vous avez choisi d’être les supplétifs du Gouvernement contre le Parlement. (Protestations sur les travées des groupes Les Républicains, UC et RDPI.)
Mme Françoise Gatel. Arrêtez !
M. Bernard Fialaire. C’est digne de Mélenchon !
M. David Assouline. Pour notre part, nous considérons que, à la base de la démocratie et de la République, il y a le parlementarisme, c’est-à-dire la liberté des députés et des sénateurs de contrôler le Gouvernement, de débattre, d’amender et d’expliquer leur vote. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à Mme Monique Lubin, pour un rappel au règlement.
Mme Monique Lubin. Mon rappel au règlement est fondé sur l’article 44 bis de notre règlement.
Monsieur le président Retailleau, vous avez souligné votre respect des élus qui défendent leurs convictions, et je vous en sais gré.
Je m’exprime ce soir en tant que cheffe de file de mon groupe sur le dossier des retraites. Ce sujet me tient particulièrement à cœur, à l’instar d’autres membres de mon groupe, que j’ai réussi à entraîner derrière ma passion. En effet, j’ai l’envie, chevillée au corps, de défendre des gens modestes, des ouvriers, des salariés, bref, des personnes avec qui je vis toujours.
Mme Sophie Primas. Nous aussi nous vivons avec des gens modestes !
Mme Monique Lubin. Je ne vous fais aucun reproche, ma chère collègue. Je parle juste de mon histoire et de mon expérience personnelle.
Je me suis engagée à défendre ce en quoi je crois profondément pour tous ces gens-là. Il se peut que les membres de mon groupe n’aient pas tous eu la même conviction au départ, mais j’ai réussi à les entraîner derrière moi.
Je vous le dis très clairement, monsieur le président Retailleau, je souhaite débattre jusqu’au bout.
M. Emmanuel Capus. Eh bien alors ?
Mme Monique Lubin. J’avais envie de discuter de l’article 7. Vous nous avez un peu coupé les ailes, mais nous avons tout de même réussi à le faire.
J’avais envie de débattre de l’article 8, ce que nous avons pu faire toute la journée, et cela de manière qualitative.
À présent, j’ai envie de débattre de la suite, de la pénibilité et de l’article 10, avec ses fameux 1 200 euros. (M. Bruno Retailleau manifeste son scepticisme.)
Mme Sophie Primas. Vous ne le montrez guère !
Mme Monique Lubin. Si, je vous assure.
Aussi, laissez-nous faire. D’ailleurs si vous n’aviez pas entrepris vos manœuvres, nous aurions déjà examiné la moitié de l’article 9. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à M. Olivier Henno, pour un rappel au règlement.
M. Olivier Henno. Avec gravité, je vais aller un peu plus loin que vous, monsieur Kerrouche : je pense que votre volonté de vous opposer à la réforme est peut-être plus forte que notre désir de la voter. (Exclamations sur des travées des groupes SER, CRCE et GEST.) Eh oui, mes chers collègues.
Toutefois, pour nous, et nous différons sur ce point, il y a quelque chose de sacré : les institutions et le Sénat ! (Applaudissements sur les travées des groupes UC, Les Républicains, INDEP, et RDPI, ainsi qu’au banc des commissions. – Protestations sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
Oui, ces institutions sont sacrées, et vous jouez avec des allumettes ! (M. Patrick Kanner s’exclame.)
Laissez-moi parler, monsieur Kanner. Je vous ai beaucoup écouté : vous êtes mal à l’aise depuis le début, parce que vous êtes dépassé par votre base radicale ! (Protestations sur les travées du groupe SER.) Alors, un peu de silence et de respect !
Vous respirez le mal-être, monsieur Kanner ! (Tumulte.)
M. Mickaël Vallet. Et chez les centristes, on est à l’aise ?
M. Olivier Henno. Vous dites vouloir débattre. Nous le voulons aussi, mais, et ce point nous différencie, nous souhaitons surtout pouvoir voter. Voter ! C’est cela aussi le rôle du Parlement ! (Vifs applaudissements sur les travées des groupes UC, Les Républicains, INDEP et RDPI, ainsi que sur des travées du groupe RDSE.) Or vous faites tout pour nous empêcher de voter, depuis le début.
Vous avez sans doute une arrière-pensée – il y en a toujours en politique. Vous espérez tirer les bénéfices de cette crise. (Protestations sur les travées du groupe SER.) Mais, détrompez-vous, c’est le populisme et les populistes qui vont tirer les marrons du feu ! (Applaudissements sur les travées des groupes UC, Les Républicains, INDEP, RDPI et RDSE.)
Nous sommes attachés au Sénat, aux institutions et à la démocratie représentative. C’est la raison pour laquelle nous sommes solidaires avec le président du Sénat. Il faut débattre et voter. Voilà l’essentiel ! (Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées des groupes UC, Les Républicains, INDEP et RDPI.)
M. David Assouline. Oui, il faut voter aux sénatoriales…
M. le président. La parole est à M. Pierre Laurent, pour un rappel au règlement.
M. Pierre Laurent. Cela fait maintenant deux heures que nous attendons d’entrer dans le débat sur l’article 9. (Exclamations sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. Jacques Grosperrin. La faute à qui ?
M. Pierre Laurent. Or nous allons y entrer par la plus petite porte qui soit, à savoir l’amendement que vous avez appelé en priorité.
Il s’agit pourtant d’un article majeur de la loi.
Mme Sophie Primas. C’est pour cela que vous voulez le supprimer ?
M. Pierre Laurent. Le sujet de la pénibilité est attendu par tous ceux qui nous regardent. Ce sont donc deux heures de perdues à cause de manœuvres procédurales, déclenchées tant par la droite sénatoriale et la commission que par le Gouvernement, en accord avec la droite sénatoriale.
Monsieur le ministre, il y avait 5 238 amendements au début de nos débats ; il en reste 1 126. Autrement dit, nous avons examiné 80 % du total. (Marques d’ironie sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
Mme Corinne Imbert. Bien sûr !
Mme Laure Darcos. Et vous allez en déposer d’autres !
M. Pierre Laurent. Il nous reste trois jours et deux nuits pour en discuter, parce que le Gouvernement a fixé une limite à dimanche soir.
Cependant, au rythme où nous avançons, il n’y a aucune raison de penser à cette heure que nous n’arriverons pas au terme du débat. Cela, c’est vous qui le décrétez.
M. Jean-François Husson. Tout est faux dans ce que vous dites !
M. Pierre Laurent. En réalité, vous êtes en train de mettre en scène depuis mardi la montée en régime des procédures pour limiter les discussions. Cela va crescendo, et c’est vous qui empêchez le débat !
Mme Françoise Gatel. Non !
M. Pierre Laurent. Chers collègues de droite, vous devriez y réfléchir à deux fois. Vous avez décidé d’être les jouets consentants du Gouvernement dans cette affaire. Vous devriez plutôt méditer ce que disait Christian Jacob, ancien président du parti Les Républicains : « On n’est pas obligé d’être la droite la plus bête du monde. » (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST.)
M. Mickaël Vallet. Bravo !
M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour un rappel au règlement.
M. Jean-Yves Leconte. Il s’agit d’un rappel au règlement au titre de l’article 44 bis du règlement de notre assemblée.
Voyez-vous, je ne suis pas un spécialiste des retraites, mais j’arrive avec des convictions, avec des interrogations et avec les problèmes spécifiques rencontrés en ce domaine par les Françaises et les Français vivant à l’étranger, que je représente.
Mes amis politiques ont exprimé leurs interrogations et condamné ce projet d’une manière globale. Toutefois, depuis deux jours, nous assistons à des échanges fructueux entre nos chefs de file et le rapporteur, pour enrichir le texte. À cet égard, je veux rendre un hommage particulier à Mme Poncet Monge, qui a suivi l’ensemble du débat. (M. Thomas Dossus applaudit.)
Pourtant, tout dérape ! Au moment précis où nous arrivons au sujet de la pénibilité, vous avancez des interprétations du règlement inédites.
L’article 46 bis est ainsi rédigé : « Les amendements sont mis aux voix dans l’ordre ci-après : les amendements de suppression et ensuite les autres amendements en commençant par ceux qui s’écartent le plus du texte proposé… ». Mais vous nous proposez de faire autrement.
Vous présentez des amendements qui ne sont pas préparés ou qui sont anecdotiques par rapport à la question de la pénibilité, qui, je le rappelle, n’est pas la préoccupation première de la majorité présidentielle. En effet, souvenez-vous, celle-ci a supprimé par ordonnance des dispositions sur ce sujet qui avaient été votées dans le cadre de la loi Touraine.
Par conséquent, il serait préférable que vous repreniez vos esprits, mes chers collègues, et que nous évitions des disputes de bac à sable pour savoir qui a commencé quoi. Retrouvons ce moment où nous pouvions laisser cours au dialogue entre spécialistes.
Monsieur le rapporteur, nous avons encore trois jours pour débattre. De grâce, cessons de jouer !
M. Philippe Tabarot. Merci de cette contribution au débat !
M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour un rappel au règlement.
M. Ronan Dantec. Mon rappel au règlement se fonde sur l’article 44 bis.
Je voudrais ce soir rendre hommage aux pères de la Constitution. Ils ont tout de même énormément réfléchi à ce qu’était le Sénat.
Nous ne sommes pas l’Assemblée nationale. Dans cette chambre, le Gouvernement peut s’imposer à sa majorité quand elle est un peu frondeuse. On voit bien la logique du 49.3, même si son usage est toujours un peu dangereux, comme l’histoire politique de ces dernières années l’a montré, y compris avec d’autres gouvernements.
Cependant, les rédacteurs ont intégré dans leurs réflexions que le Sénat était différent. Au Sénat, on ne peut pas passer en force.
M. Roger Karoutchi. Ce n’est pas ça du tout !
M. Ronan Dantec. Dans la Haute Assemblée, dès qu’un article du règlement permet de gagner du temps, il y a l’antidote dans l’article suivant. Comme nous connaissons à peu près tous le règlement – à cet égard, nous avons beaucoup progressé ces derniers jours (Sourires.) –, ces manœuvres ne peuvent pas marcher.
Aussi, soit on déclenche une bataille médiatique pour savoir qui porte la responsabilité de l’impossibilité pour le Sénat d’aller au bout de l’examen, soit le Gouvernement et la majorité sénatoriale décident de respecter l’institution : le Sénat débat, un point c’est tout.
Ce n’est donc pas la peine de sortir du chapeau un article 38, ou 42, ou autre… Si l’on veut aller au bout du texte, il faut laisser aux sénateurs tout le temps pour l’examiner !
Or quelqu’un dans cet hémicycle a le pouvoir d’accorder ce temps au Sénat : le ministre.
Il n’est absolument pas nécessaire d’arrêter l’examen du texte dimanche soir. Si le Gouvernement veut que l’on débatte, prenons une semaine de plus, et nous mènerons la discussion jusqu’à son terme. Il faudra évidemment commencer par retirer l’amendement du rapporteur Savary, pour reprendre l’ordre normal des choses.
On ne brutalise pas le Sénat ! Celui qui cherche dans le règlement des moyens d’accélérer le débat perd à tous les coups. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour un rappel au règlement.
Mme Raymonde Poncet Monge. Le groupe écologiste a déposé des amendements de fond jusqu’au dernier article, et nous aimerions bien qu’ils soient examinés.
Mme Sophie Primas. Nous aussi !
Mme Raymonde Poncet Monge. Quand on aime le travail, quand on l’invoque comme une valeur, on ne le gâche pas ! (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
La première chose que le monde ouvrier vous rappellerait, c’est que le travail se respecte et qu’il ne faut pas, j’y insiste, le gâcher.
Vous avez fait tomber des amendements de fond par diverses mesures sur lesquelles je ne reviendrai pas. Ce faisant, vous nous avez obligés à présenter des sous-amendements de moindre qualité – j’en conviens.
Je l’ai dit dès le début de nos travaux en commission des affaires sociales, ce débat aurait dû avoir pour cadre l’examen d’une loi ordinaire, précédée par une loi relative au travail. J’avais prévenu que cette discussion ne tiendrait pas dans la seringue du temps contraint que vous avez accepté. Car vous vous êtes soumis à cette contrainte !
Jamais le groupe écologiste, même inscrit dans une majorité, ne se serait soumis comme vous l’avez fait ! Ce n’est pas notre genre… (Sourires sur les travées du groupe GEST.)
M. René-Paul Savary, rapporteur. Ce sont des insoumis… (Sourires au banc des commissions.)
Mme Raymonde Poncet Monge. Vous bataillez pour savoir qui a la paternité de cette loi. Mais elle a deux pères, le parent 1 et le parent 2 ! Vous étiez contre ces appellations, mais elles conviennent ici… (Rires sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE. – Sourires sur des travées des groupes Les Républicains et UC.)
Si vous vouliez un débat sérieux, il ne fallait pas, dès le début, rendre irrecevables des amendements qui ne l’étaient pas. On vous rend la monnaie de votre pièce, c’est tout ! (Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour un rappel au règlement.
Mme Laurence Cohen. Nous avons débattu toute la journée de manière sérieuse et argumentée, notamment lors de l’examen de l’article 8, et les choses se sont passées sereinement, comme c’est l’habitude au Sénat : avec passion, argument contre argument, mais sans perte de temps particulière.
Dimanche matin, nous avons eu un débat de fond sur la capitalisation, là encore projet contre projet, projet de droite contre projet de gauche.
Sur les travées de la gauche, nous nous battons contre une réforme que vous voulez imposer à la hussarde, contre l’avis du peuple et contre le front uni de toutes les organisations syndicales, lesquelles demandent un rendez-vous avec le Président de la République, parce qu’elles veulent être entendues.
Alors que se déroulait le débat sur le fond, la droite sénatoriale a dégainé des procédures, en parfaite complicité avec le Gouvernement. Puis, celui-ci s’en est mêlé directement par la voix du ministre… Et vous vous étonnez que cela se passe mal ?
On ne discute plus du fond : on fait des rappels au règlement et on demande des scrutins publics, comme c’est notre droit de parlementaires. Vous nous faites perdre du temps à tous et toutes ! (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.) Mais ce n’est pas grave… Ce qui l’est, en revanche, c’est que vous méprisiez les gens.
En effet, cette réforme aura des conséquences extrêmes sur leur vie : vous leur volez deux ans d’existence.
M. Rémy Pointereau. Et à nous, combien d’heures d’existence volez-vous ?…
Mme Laurence Cohen. Toutefois, vous vous en fichez, puisque, contrairement à nous, cela fait quatre ans que vous votez des amendements en ce sens lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Aussi, on ne parle ni de la pénibilité ni des petites retraites, et cela vous amuse.
Mme Françoise Gatel. Non !
Mme Laurence Cohen. Quant à nous, cela ne nous amuse pas. Nous continuerons à nous battre pied à pied !
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote sur l’amendement n° 2132. (Marques d’exaspération sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Raymonde Poncet Monge. M. le rapporteur a bien écouté les organisations syndicales, mais pas tout à fait jusqu’au bout.
Elles demandent, certes – vous avez raison sur ce point, monsieur le rapporteur –, que le Fipu prenne en compte l’exposition aux agents chimiques, à côté des trois facteurs ergonomiques. Mais elles demandent aussi – vous ne l’avez pas entendu, car vous êtes un peu dur de l’oreille gauche (Sourires sur les travées du groupe GEST.) – que les six facteurs de pénibilité pris en compte pour le C2P le soient également pour le Fipu, ce qui représente en tout dix facteurs.
Cette revendication très importante fonctionne en miroir avec une autre, qui tend à ce que le C2P intègre ces dix facteurs. J’espère, monsieur le rapporteur, puisque vous écoutez les organisations syndicales, que vous avez prévu un amendement en ce sens.
Je suis quelque peu étonnée par l’argument du ministre selon lequel il faudrait exclure des critères l’exposition aux agents chimiques, du fait de l’achat par les employeurs d’équipements de protection individuels (EPI). Or cette condition vaut pour les trois facteurs ! Souhaitons que l’on n’achète pas pour 250 millions d’euros d’EPI chaque année…
Monsieur le rapporteur, j’y insiste, puisque vous êtes à l’écoute des organisations syndicales, plaidez pour que le Fipu et le C2P prennent en compte les dix facteurs de pénibilité !
M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour explication de vote.
Mme Angèle Préville. Effectivement, madame la rapporteure générale, monsieur le rapporteur, il fallait intégrer de nouveau le critère de pénibilité lié à l’exposition aux agents chimiques dangereux.
Ce rétablissement est absolument nécessaire. La suppression de ce critère de pénibilité en 2017 était une aberration totale et proprement scandaleuse. Tandis que nous avons dépassé la sixième limite planétaire, l’arrivée de nouvelles espèces chimiques sur le marché, donc dans l’environnement, est exponentielle. La Terre n’en peut plus !
Bien sûr, les risques professionnels qu’entraînent la fabrication et la manipulation de ces produits sont on ne peut plus importants et réels. Et plus il y a de nouveaux produits, plus nous devons les prendre en compte. Je voterai donc cet amendement, même s’il n’est pas suffisant.
En effet, il aurait aussi fallu réintégrer les autres critères de pénibilité supprimés en 2017. Vous rendez-vous compte de ce qu’ils représentent pour les salariés qui les vivent au quotidien ? Ils ne sont pas des moindres : manutention manuelle de charges ; postures pénibles, c’est-à-dire positions forcées des articulations ; vibrations mécaniques.
Il me semble que ces critères ne sont pas vraiment rétablis. Cette pénibilité est-elle négligeable et anecdotique ? Ne mérite-t-elle pas que l’on prenne des dispositions particulières pour protéger les travailleurs concernés ?
Plus les débats avancent, et plus ils confirment que vous vivez vraiment dans un autre monde, dans un autre pays, où le travail n’est pas pénible et où l’espérance de vie est la même pour tous… Or tel n’est pas du tout le cas !
Pouvons-nous raisonnablement à notre époque, dans le monde qui est le nôtre et dans cette société que l’on qualifie d’avancée, nier que nombre de nos concitoyennes et concitoyens travaillent dans des conditions difficiles, voire extrêmement difficiles ? Les régressions de 2017 devaient être abolies, mais il aurait aussi fallu examiner de plus près les nouvelles pénibilités.
M. le président. La parole est à M. Pierre Laurent, pour explication de vote.
M. Pierre Laurent. Cet amendement, à nos yeux extrêmement insuffisant, ne nous convient ni sur la forme ni sur le fond. Comme je le disais précédemment, il vise à nous faire entrer par la plus petite des portes dans le débat, essentiel, que nous aurions dû avoir sur la pénibilité.
Bien sûr, il vise à réintégrer le critère de pénibilité lié à l’exposition aux matières dangereuses. Nous n’y sommes pas insensibles, bien au contraire. Mais il a pour objet de laisser à l’écart tous les autres critères qui ont été exclus du projet de loi, et non de les réintégrer. Il s’agit donc d’un amendement pour solde de tout compte, en quelque sorte, alors que le débat devrait être largement ouvert sur cette question.
Présenté en priorité, afin de faire tomber tous les autres amendements, il tend à évacuer le débat fondamental sur le remplacement de la notion de pénibilité par celle d’usure professionnelle. Or cela, les syndicats le contestent, car ce n’est pas du tout la même chose !
Ce changement de termes vous permet de dire qu’il n’y a plus de métiers pénibles exercés par des salariés – ceux-là mêmes qui reçoivent une compensation en échange de la pénibilité de leur travail, notamment en termes de droits à la retraite. Il n’y a plus que des salariés plus ou moins résistants à l’usure professionnelle. Je le répète, ce n’est pas du tout la même chose.
Dans votre vision des choses – celle de l’usure professionnelle –, on peut user les salariés autant qu’on peut le faire, et on voit ce qu’il en reste avant la retraite, dans le meilleur des cas, avant d’envisager une éventuelle compensation. Cette logique, diamétralement opposée à celle qui tient compte de la pénibilité, les syndicats la contestent.
Quant au fonds que vous proposez de créer, il suscite de nombreuses questions ; je ne sais pas si nous pourrons en discuter, mais je l’espère.
Ce fonds bénéficiera-t-il aux retraités ? Non ! Il servira à financer les entreprises et – éventuellement – leurs dépenses de prévention.
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue !
M. Pierre Laurent. Cet argent n’ira jamais aux retraités, et c’est bien le problème de ce dispositif que vous essayez de nous faire avaler. (Mmes Cathy Apourceau-Poly et Laurence Cohen applaudissent.)
M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret, pour explication de vote.
Mme Corinne Féret. Si l’on peut se réjouir que le rapporteur évoque le critère de pénibilité, en particulier au travers de cet amendement, la proposition visant à l’inclure dans le Fipu est insuffisante. En effet, c’est dans le C2P qu’il faut réintroduire ce critère, comme tel était le cas avant 2017, car cela permettra aux salariés concernés de bénéficier de mesures spécifiques, notamment la possibilité de partir à la retraite plus tôt.
Au regard de ces éléments, nous nous abstiendrons sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.
M. Guillaume Gontard. Le groupe écologiste aurait pu voter cet amendement, qui vise à inclure l’exposition aux agents chimiques dangereux dans les facteurs pris en compte par le fonds prévu à l’article 9. Mais il y a d’autres critères à prendre en compte.
Nous ne pouvons pas voter, de façon isolée, un amendement qui, en outre, a pour objet de faire tomber nos propres amendements visant à le compléter !
Cette réforme des retraites injuste et brutale n’a rien d’étonnant, puisqu’elle est tout simplement dans la continuité de la politique menée par Emmanuel Macron depuis 2017. Ce gouvernement choisit d’ignorer la pénibilité et la souffrance au travail qui touchent les salariés.
Emmanuel Macron avait déclaré en 2019 : « Moi, je n’adore pas le mot de pénibilité, parce que ça donne le sentiment que le travail serait pénible. »
Oui, monsieur Macron, pour de nombreux salariés, le travail est pénible et il fait souffrir ! Lorsque vous êtes préparateur de commandes ou chef d’exposition et que vous soulevez plusieurs tonnes de produits par semaine, que vous subissez des horaires décalés, le travail de nuit, le froid, et que vous souffrez de problèmes de dos, d’épaule ou de cervicales, alors oui, le travail est pénible !
En 2017, M. Macron avait par ailleurs supprimé quatre critères de pénibilité au travail : les postures pénibles, les vibrations mécaniques, la manutention de charges lourdes et l’exposition aux agents chimiques dangereux ; ce dernier critère recouvre des risques très dangereux pour la santé, puisqu’il entraîne des pathologies très graves – cancers, insuffisances rénales, troubles de la fertilité.
Nous aurions donc pu voter cet amendement ; cependant, nous souhaitons rappeler que le Gouvernement peut faire largement mieux sur ces questions de pénibilité. Le compte professionnel de prévention, par exemple, dispositif utile censé prendre en compte les critères de pénibilité, a ainsi été jugé par la Cour des comptes comme n’étant pas à la hauteur des objectifs qui lui étaient assignés.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, pour explication de vote.
Mme Marie-Pierre Monier. L’amendement n° 2132 déposé par M. Savary vise à inclure l’exposition aux agents chimiques dangereux, au même titre que les facteurs de risques ergonomiques, parmi les facteurs pris en compte par le Fipu créé à l’article 9. On a compris que le Gouvernement n’était pas tout à fait d’accord…
Pourquoi retenir ce seul critère et ne pas réintégrer tous les critères de pénibilité qui ont été supprimés ?
Rappelons que, en 2017, l’un des premiers actes d’Emmanuel Macron avait consisté à supprimer quatre des dix critères de pénibilité instaurés au cours du quinquennat de François Hollande – l’exposition aux agents chimiques dangereux, la manutention manuelle de charges, les postures pénibles, les vibrations mécaniques –, au motif que certains critères étaient parfois complexes à mettre en place pour les entreprises.
Il est vrai que la notion de pénibilité en elle-même ne convient pas beaucoup au Président de la République, qui déclarait en 2019 : « Moi, je n’adore pas le mot de pénibilité, parce que ça donne le sentiment que le travail serait pénible. »
Or, ne lui en déplaise, il est important de réaffirmer collectivement que le travail peut être pénible, et que c’est justement en le reconnaissant que l’on peut, d’une part, améliorer les conditions de travail qui posent question, et, d’autre part aménager au mieux les conditions de départ à la retraite.
M. le président. La parole est à M. Emmanuel Capus, pour explication de vote.
M. Emmanuel Capus. J’aurais aimé que l’on parle, ce soir, des Françaises et des Français qui travaillent la nuit, qui travaillent dans le froid, dont les tâches sont difficiles, qui font les trois-huit, qui soulèvent des patients, qui portent des charges… J’avais même préparé, modestement, un petit mot à cette fin, car nous étions censés débattre de ce sujet.
J’aurais aimé que l’on parle de l’abaissement des seuils d’accessibilité, de certains critères de pénibilité, du déplafonnement du nombre de points du C2P, de la simplification de l’accès à la retraite anticipée pour incapacité, ainsi que de l’exposition aux agents chimiques et de l’intérêt, ou pas, de la prendre en compte.
Au lieu de cela, nous avons parlé toute la soirée de procédure,…
Mme Laurence Cohen. La faute à qui ?
Mme Raymonde Poncet Monge. Quel rapport avec l’amendement ?
M. Emmanuel Capus. … de la suppression d’amendements identiques.
Monsieur Kerrouche, vous n’avez pas le monopole de la représentation des Français ! Nous aussi, nous les représentons, et nous aurions aimé parler de leurs souffrances et de leurs inquiétudes au regard de la pénibilité de leurs tâches. (Exclamations sur les travées des groupes SER et CRCE.)
Au lieu de cela, vous avez fait un calcul, celui de l’obstruction. Vous avez fait le pari de nous faire perdre du temps pour ne pas voter ce texte.
Ce pari, mes chers collègues, est éminemment dangereux. Vous croyez faire les malins, mais ce n’est pas vous qui gagnerez. Et la démocratie y perdra !
Le Sénat perd en crédibilité en se mélenchonisant et en courant derrière les extrêmes ! (Protestations sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
Mme Émilienne Poumirol. On en a marre !
M. Emmanuel Capus. Finalement, les Français seront déçus par le parlementarisme !
Je voterai cet amendement, mais, malheureusement, force est de constater que nous n’aurons pas pu débattre. (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour explication de vote.
Mme Céline Brulin. Je sais bien qu’il est tard et que certains d’entre vous semblent excédés, mais il faut garder non seulement son sang-froid, mais aussi une once de crédibilité.
Notre collègue vient de nous faire la liste de toutes les questions dont il aurait aimé débattre. C’est de cela, bien sûr, qu’il faut parler ! Et c’est précisément sur ces sujets que nous avons déposé des amendements,…
M. Bruno Retailleau. Des amendements de suppression !
Mme Céline Brulin. … lesquels viennent de tomber du fait d’un énième tour de procédure.
Cela fait écho à des propos que j’ai entendus ce matin et qui ne manquaient pas de piquant. Croyez-le ou non, l’un de nos collègues nous a expliqué qu’il avait retiré son amendement sur les carrières longues, lequel visait à apporter de grands bienfaits aux personnes concernées, pour éviter que nous, poignée d’élus de gauche, le sous-amendions !
M. Roger Karoutchi. Vous aviez déposé 500 sous-amendements !
Mme Céline Brulin. Nous avons la chance que le Sénat soit observé comme il l’a rarement été. Attention que cela ne se retourne pas contre nous !
Que croyez-vous que les Français pensent ? Que vous vous moquez du monde, purement et simplement !
M. Xavier Iacovelli. Ils sont dépités, surtout !
Mme Céline Brulin. Nous sommes là pour supprimer les articles qui, selon nous, sont inacceptables, et pour améliorer la loi. Nous ne faisons rien d’autre ! Je suis impressionnée que cela vous gêne à ce point.
M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.
Mme Émilienne Poumirol. L’amendement n° 2132 de M. Savary vise à réintégrer l’exposition aux produits chimiques dans le cadre des critères de pénibilité et du Fipu.
En effet, parmi les mesures proposées à l’article 9 figure la création de ce fonds d’investissement dans la prévention de l’usure professionnelle, au sein de la branche AT-MP. L’objectif de ce fonds est de prévenir l’exposition aux risques ergonomiques, et M. le rapporteur souhaite qu’y soit intégrée l’exposition aux produits chimiques.
Ce fonds, qui serait doté de 1 milliard d’euros jusqu’en 2027, c’est-à-dire d’à peine 250 millions d’euros par an, aura pour mission de cofinancer avec les employeurs des actions de prévention : sensibilisation, aménagement de postes, formation, reconversion.
La prévention, nous le savons, est un enjeu crucial pour notre système de santé. Le Gouvernement avait parlé, lors de l’examen du PLFSS pour 2023, d’« un virage de la prévention ». L’actuel ministre de la santé est d’ailleurs « ministre de la santé et de la prévention ».
Pourtant, aucun article du présent texte ne traite de la prévention primaire, soit la prévention la plus importante, qui vise à sensibiliser sur la qualité de l’air, la qualité de l’alimentation, les mauvais effets de la sédentarité, les bienfaits du sport, les conditions de travail, etc.
Il est temps que nous changions de paradigme et que nous construisions un modèle fondé non sur le soin, mais sur la santé, en agissant non plus seulement sur les maladies, mais sur les déterminants de la santé, ce que l’on appelle partout le concept One Health.
Or, une fois encore, le Gouvernement ne semble pas avoir pris la mesure des besoins en prévention et de l’utilité de celle-ci pour préserver la santé de nos concitoyens et diminuer, à terme, nos dépenses dans ce domaine.
Les dépenses de prévention prévues dans ce projet de loi, à hauteur de 1 milliard d’euros sur cinq ans, seront d’un niveau largement inférieur à ce que coûtera le relèvement de l’âge légal de départ à la retraite de 62 ans à 64 ans.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 2132.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Je rappelle que l’avis du Gouvernement est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 248 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 241 |
Pour l’adoption | 217 |
Contre | 24 |
Le Sénat a adopté.
En conséquence, les amendements identiques n° 301 et suivants, ainsi que les amendements nos 44 rectifié, 2369 rectifié, 2637 rectifié, 3436 rectifié, 3823, 430 rectifié, 43 rectifié, 2366 rectifié, 2639 rectifié bis, 3352, 3136 et 3922 rectifié sont sans objet.
Mes chers collègues, je vais lever la séance.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
9
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, vendredi 10 mars 2023 :
À neuf heures quarante, le soir et la nuit :
Suite du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023, dont le Sénat est saisi en application de l’article 47-1, alinéa 2, de la Constitution (texte n° 368, 2022-2023).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée le vendredi 10 mars 2023, à zéro heure quarante.)
Pour le Directeur des comptes rendus du Sénat,
le Chef de publication
FRANÇOIS WICKER