Sommaire
Présidence de M. Gérard Larcher
Secrétaires :
Mme Françoise Férat, M. Joël Guerriau.
2. Questions d’actualité au Gouvernement
examen de la réforme des retraites au sénat et mobilisation sociale du 7 mars
M. Patrick Kanner ; Mme Élisabeth Borne, Première ministre ; M. Patrick Kanner.
Mme Véronique Guillotin ; Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée auprès du ministre de la santé et de la prévention, chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé ; Mme Véronique Guillotin.
M. Guillaume Gontard ; Mme Élisabeth Borne, Première ministre ; M. Guillaume Gontard.
interdiction de la vente de voitures thermiques neuves en 2035 (I)
M. Franck Menonville ; M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
Mme Jacqueline Eustache-Brinio ; Mme Isabelle Rome, ministre déléguée auprès de la Première ministre, chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes, de la diversité et de l’égalité des chances ; Mme Jacqueline Eustache-Brinio.
Mme Annick Billon ; Mme Isabelle Rome, ministre déléguée auprès de la Première ministre, chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes, de la diversité et de l’égalité des chances.
conséquences de la réforme des retraites sur la retraite des femmes
Mme Laurence Cohen ; M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion ; Mme Laurence Cohen.
Mme Nadège Havet ; M. Hervé Berville, secrétaire d’État auprès de la Première ministre, chargé de la mer.
M. Alain Joyandet ; Mme Catherine Colonna, ministre de l’Europe et des affaires étrangères ; M. Alain Joyandet.
impact de la réforme des retraites sur les femmes
Mme Monique Lubin ; M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion ; Mme Monique Lubin.
encadrement de l’intérim médical
M. Jean Sol ; Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée auprès du ministre de la santé et de la prévention, chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé ; M. Jean Sol.
prix des places des jeux olympiques de paris 2024
M. Claude Kern ; Mme Amélie Oudéa-Castéra, ministre des sports et des jeux Olympiques et Paralympiques.
interdiction de la vente de voitures thermiques neuves en 2035 (II)
Mme Marta de Cidrac ; M. Clément Beaune, ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des transports ; Mme Marta de Cidrac.
cours d’éducation sexuelle dans les établissements scolaires
Mme Marie-Pierre Monier ; Mme Carole Grandjean, ministre déléguée auprès du ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion et du ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse, chargée de l’enseignement et de la formation professionnels.
M. Guillaume Chevrollier ; M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires ; M. Guillaume Chevrollier.
M. Michel Canévet ; M. Hervé Berville, secrétaire d’État auprès de la Première ministre, chargé de la mer ; M. Michel Canévet.
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE M. Vincent Delahaye
3. Candidatures à une éventuelle commission mixte paritaire
4. Candidatures à une commission mixte paritaire
Conclusions de la conférence des présidents
6. Salut en séance aux auditeurs de l’Institut du Sénat
7. Loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 – Suite de la discussion d’un projet de loi
Mme Marie-Pierre de La Gontrie
M. François-Noël Buffet, président de la commission des lois
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales
M. René-Paul Savary, rapporteur de la commission des affaires sociales pour l’assurance vieillesse
Suspension et reprise de la séance
Amendement n° 1142 de M. Franck Menonville. – Retrait.
Amendement n° 2633 rectifié de Mme Monique Lubin
Amendement n° 1961 rectifié de M. Daniel Chasseing. – Retrait.
Demande de clôture par M. Bruno Retailleau sur les explications de vote sur l’amendement n° 2633 rectifié. – Adoption.
Amendement n° 2633 rectifié de Mme Monique Lubin (suite). – Rejet.
Motion n° 4766 de la commission. – Adoption, par scrutin public n° 204, de la motion déclarant l’irrecevabilité des amendements nos 2378 rectifié bis et 4322 rectifié.
Amendements n° 4146 rectifié de Mme Éliane Assassi
Demande de clôture par M. François Patriat sur les explications de vote sur l’amendement n° 2633 rectifié. – Adoption.
Amendements n° 4146 rectifié de Mme Éliane Assassi (suite). – Rejet par scrutin public n° 214.
Amendements n° 4149 rectifié de Mme Éliane Assassi. – Rejet par scrutin n° 215.
Amendements n° 4285 rectifié de Mme Éliane Assassi. – Rejet par scrutin public n° 216.
Amendement n° 4286 rectifié de Mme Éliane Assassi
Demande de clôture par M. Claude Malhuret sur les explications de vote sur l’amendement n° 4286 rectifié. – Adoption.
Amendements n° 4286 rectifié de Mme Éliane Assassi. – Rejet par scrutin public n° 217.
Demande de clôture par M. Claude Malhuret sur les explications de vote sur les amendements identiques nos 1895 rectifié, 1909 et 3403. – Adoption.
Amendements identiques nos 1895 rectifié de Mme Nathalie Delattre, 1909 de M. Martin Lévrier et 3403 de Mme Raymonde Poncet Monge (suite). – Adoption, par scrutin public n° 218, des trois amendements.
Amendement n° 10 rectifié ter de M. Michel Savin. – Rectification.
Amendement n° 2986 rectifié bis de M. Rémi Cardon. – Devenu sans objet.
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher
8. Mise au point au sujet d’un vote
9. Loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 – Suite de la discussion d’un projet de loi
Amendement n° 4293 rectifié bis de Mme Éliane Assassi. – Rejet par scrutin public n° 221.
Amendement n° 4287 rectifié de Mme Éliane Assassi. – Rejet.
Amendement n° 4294 rectifié bis de Mme Éliane Assassi. – Rejet par scrutin public n° 222.
Amendement n° 4295 rectifié de Mme Éliane Assassi. – Rejet par scrutin public n° 223.
Amendement n° 4298 rectifié bis de Mme Éliane Assassi. – Retrait.
Amendement n° 4299 rectifié bis de Mme Éliane Assassi. – Rejet par scrutin public n° 224.
Amendement n° 4302 rectifié bis de Mme Éliane Assassi. – Rejet par scrutin public n° 225.
Amendement n° 2973 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 4303 rectifié bis de Mme Éliane Assassi. – Rejet par scrutin public n° 226.
Amendement n° 4233 rectifié bis de Mme Éliane Assassi. – Devenu sans objet.
Amendement n° 3627 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.
Amendement n° 3598 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.
Amendement n° 4309 rectifié bis de Mme Éliane Assassi. – Rejet.
Amendement n° 3604 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.
Amendement n° 3608 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.
Amendement n° 4317 rectifié de Mme Éliane Assassi. – Rejet par scrutin public n° 231.
Amendement n° 4318 rectifié de Mme Éliane Assassi. – Rejet par scrutin public n° 232.
Amendement n° 3609 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.
Amendement n° 3610 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.
Amendement n° 3612 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Retrait.
Amendement n° 3614 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.
Amendement n° 3615 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Retrait.
Amendement n° 3617 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.
Adoption, par scrutin public n° 233, de l’article modifié.
Renvoi de la suite de la discussion.
10. Ordre du jour
Nomination de membres d’une éventuelle commission mixte paritaire
Nomination de membres d’une commission mixte paritaire
compte rendu intégral
Présidence de M. Gérard Larcher
Secrétaires :
Mme Françoise Férat,
M. Joël Guerriau.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Y a-t-il des observations ?…
La parole est à M. Jacques Fernique.
M. Jacques Fernique. Je souhaite qu’il soit procédé à une rectification du compte rendu analytique officiel, qui tient lieu de procès-verbal jusqu’à la parution du compte rendu intégral.
À la page 70, en bas de la colonne de droite, alors que vous vous soumettiez au Sénat le sous-amendement de Mme Poncet Monge, monsieur le président, le compte rendu analytique vous fait dire qu’il s’agirait du sous-amendement n° 4765, alors que vous avez appelé, me semble-t-il, le sous-amendement n° 341 – en tout cas un numéro différent.
On se rappelle que c’est ce moment qui a déclenché la sortie de l’hémicycle des membres de mon groupe, ainsi que de ceux des groupes SER et CRCE. Je demande donc qu’au procès-verbal le numéro indiqué soit celui que vous avez réellement prononcé, d’autant que c’est notamment la difficulté de pouvoir voter en connaissance de cause qui a entraîné notre départ. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST et sur des travées du groupe SER.)
M. le président. Le procès-verbal est adopté sous réserve de la vérification de l’observation que M. Jacques Fernique vient de faire.
2
Questions d’actualité au Gouvernement
M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.
La séance est retransmise en direct sur Public Sénat et sur notre site internet.
J’appelle chacun de vous, mes chers collègues, au respect, qu’il s’agisse du respect des uns et des autres ou de celui du temps de parole.
examen de la réforme des retraites au sénat et mobilisation sociale du 7 mars
M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Patrick Kanner. Ma question s’adresse à Mme la Première ministre.
Onze mots. En onze mots, vous allez sacrifier 18 millions de Français sur l’autel de la rentabilité financière, les onze mots de cette simple phrase tirée de votre projet de loi : « Le mot “soixante-deux” est remplacé par le mot “soixante-quatre”. »
Depuis que le Président de la République a souhaité que soit mise en œuvre cette réforme inutile et injuste, vous faites tout pour que le débat démocratique ne puisse pas se dérouler, car vous êtes minoritaires dans le pays et au Parlement.
La nuit dernière, votre gouvernement de droite, madame la Première ministre, était main dans la main avec la droite sénatoriale de M. Retailleau pour empêcher que l’on discute correctement du report de deux ans de l’âge de la retraite (Marques d’ironie et protestations sur les travées du groupe Les Républicains.), alors que le même jour des millions de Français étaient dans la rue pour dire non.
Votre volontarisme, c’est en fait de l’entêtement. Votre équilibre financier, c’est en fait un nouvel impôt sur la vie. Votre intérêt général, c’est en fait la préservation des privilèges.
Pourtant, les vrais sujets ne manquent pas : inflation, précarité, services publics fragilisés. La France est au bord de l’implosion sociale et vous regardez ailleurs. Vous mettez en place une réforme des retraites qui pèse sur le dos des salariés sans appeler à la solidarité des plus riches.
Mais là-haut, à l’Élysée, on n’écoute pas. On n’entend pas les Français. Je me fais l’écho de l’intersyndicale et je répète ses mots : « Le silence du Président de la République constitue un grave problème démocratique qui conduit à une situation qui pourrait devenir explosive. »
Madame la Première ministre, pouvez-vous demander au Président d’entendre les Français ? Pouvez-vous lui demander de recevoir l’intersyndicale comme elle le demande ? Pouvez-vous lui demander de retirer cette réforme ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST. – Mme Esther Benbassa applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la Première ministre.
Mme Élisabeth Borne, Première ministre. Monsieur le sénateur Patrick Kanner, comme toutes les réformes précédentes, celle que nous portons pour les retraites suscite certaines oppositions qui s’expriment notamment dans la rue. (Marques d’approbation ironique sur les travées des groupes SER et CRCE.) C’est le droit des syndicats et de nos concitoyens. Ce droit, je le respecte, bien évidemment, et je respecte les Français et les syndicats qui font entendre leur opposition dans le respect de nos lois.
Hier, une journée de mobilisation s’est tenue, avec sensiblement le même nombre de manifestants qu’à la fin du mois de janvier,… (Vives protestations sur les travées des groupes SER et CRCE.)
M. Hussein Bourgi. Darmanin vous donnera leur nombre exact !
Mme Élisabeth Borne, Première ministre. … dans la plupart des cas sans débordements. (Exclamations sur les mêmes travées.)
Je veux saluer les forces de l’ordre mobilisées pour veiller à la sécurité de cette journée d’action.
Je veux aussi saluer la responsabilité des manifestants. Je regrette bien sûr que des incidents aient émaillé certains cortèges, par exemple à Paris ou à Marseille. (Protestations sur les travées des groupes SER et CRCE.)
Je condamne les coupures d’électricité dans certains tribunaux, dans certaines universités, dans certains quartiers et dans certaines permanences parlementaires. (Brouhaha sur les travées des groupes SER et CRCE.)
Le droit de grève, ce n’est pas le droit au blocage ou la volonté de mettre notre économie à genoux. Hier soir, l’intersyndicale a demandé à être reçue. Le Gouvernement est toujours prêt et ouvert au dialogue, comme il l’a montré ces derniers mois. (Marques d’ironie sur les travées des groupes SER et CRCE.)
Si les organisations syndicales souhaitent évoquer certains points particuliers, la porte du ministre du travail, Olivier Dussopt, reste toujours ouverte. (Vives protestations sur les travées des groupes SER et CRCE.)
M. Fabien Gay. On veut voir le Président de la République !
Mme Élisabeth Borne, Première ministre. Car, je le rappelle, c’est bien dans la concertation et le dialogue que ce texte a été construit. (Protestations sur les travées du groupe SER.) C’est après trois mois de concertation avec les organisations syndicales et patronales, ainsi qu’avec les groupes parlementaires, que nous avons décidé de décaler progressivement l’âge légal de départ à la retraite à 64 ans, et non pas à 65 ans, comme prévu initialement. (Exclamations ironiques sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
Je rappelle aussi que c’est grâce au dialogue que nous avons décidé de revaloriser les plus petites pensions des retraités actuels.
M. Fabien Gay. Les 1 200 euros, plus personne n’y croit !
Mme Élisabeth Borne, Première ministre. Je vous rappelle encore que c’est grâce au dialogue que nous avons amélioré le texte sur la pénibilité. Ces sujets ne vous semblent peut-être pas assez importants, monsieur le sénateur Gay ; pourtant, ils le sont !
Sur la pénibilité, les transitions emploi-retraite, la prise en compte des trimestres de travaux d’utilité collective – les fameux TUC des années 1980 –, les changements sont significatifs. Nous sommes prêts à en faire d’autres. J’ai, par exemple, eu l’occasion de dire que j’étais ouverte à une surcote pour toutes celles qui auront atteint la durée de cotisation à 63 ans.
M. Pascal Savoldelli. Et les superprofits ?
Mme Élisabeth Borne, Première ministre. Toutes ces questions sont au cœur du débat au Parlement. Vous en discutez actuellement au sein même de cet hémicycle.
M. Pascal Savoldelli. On est bâillonnés !
Mme Élisabeth Borne, Première ministre. Je le répète, nous sommes prêts à faire évoluer, à améliorer et à enrichir ce texte dans le respect des équilibres que nous avons définis.
Mais, pour y parvenir, nous devons pouvoir débattre loyalement, ouvertement et franchement. Je peine à comprendre, monsieur le président Kanner, votre ton, vos insinuations et vos attaques. Comme vous le savez, le Gouvernement n’intervient pas dans l’organisation des débats au Sénat. (Rires ironiques sur les travées des groupes SER et CRCE.)
Mesdames, messieurs les sénateurs, le temps de la concertation a eu lieu. Le débat au Parlement doit se tenir, dans le respect des uns et des autres, sans blocage et avec une volonté de discussion sincère.
M. Pascal Savoldelli. Et les amendements de la nuit dernière !
Mme Élisabeth Borne, Première ministre. C’est le fondement de notre démocratie. Nous ne pouvons pas, nous ne devons pas opposer la légitimité de la rue à celle de nos institutions.
Depuis quelques jours et jusqu’à la fin de la semaine, la discussion va se poursuivre au Sénat. Plus de cent heures de débats sont prévues au total. Vous avez les cartes en main pour agir, pour enrichir le texte, pour donner à tous les Français le débat démocratique qu’ils réclament. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP, ainsi que sur des travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, pour la réplique.
M. Patrick Kanner. Madame la Première ministre, vous n’étiez pas dans l’hémicycle la nuit dernière : vous auriez peut-être tenu un discours différent.
M. Martin Lévrier. Nous, nous y étions !
M. Patrick Kanner. Finalement, quand j’ai employé le mot d’entêtement, je me suis trompé : j’aurais dû parler d’aveuglement vis-à-vis de notre pays.
Plutôt que de répliquer à votre propos, je veux parler aux Français : ils pourront compter sur nous, sur notre détermination, pour faire face à cette mauvaise réforme, indigne au regard de leurs intérêts. Je vous le dis très simplement, ils peuvent compter sur nous, au Sénat, pour être leurs porte-voix ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
avenir des petites maternités
M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – M. Michel Canévet applaudit également.)
Mme Véronique Guillotin. Madame la ministre chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé, la presse a beaucoup commenté les conclusions du rapport du chef de la maternité de l’hôpital Necker sur l’avenir des petites maternités.
Ce rapport, qui a été adopté à une large majorité par l’Académie de médecine, pas plus tard qu’hier, préconise la fin des accouchements dans plus d’une centaine de maternités de niveau 1 qui pratiquent moins de 1 000 accouchements par an.
Ce rapport traduit l’ambition de renforcer la sécurité des parturientes face aux difficultés rencontrées par ces maternités : manque de personnel, recours trop fréquent à l’intérim, perte d’attractivité…
L’objectif, nous le partageons tous. Une maternité qui n’est plus capable d’assurer la sécurité des mères et des bébés doit, bien sûr, suspendre son activité d’accouchement.
Pour autant, ériger en dogme le critère du nombre de naissances pour justifier la fermeture d’une maternité reviendrait à nier les disparités territoriales. La fermeture d’une salle de naissance proche d’une zone urbaine n’aura pas les mêmes conséquences pour les femmes qu’en zone rurale ou de montagne, où l’accès au réseau routier et aux moyens de transport est bien plus difficile.
Une étude menée en 2013 en Bourgogne a montré l’effet négatif sur la santé périnatale de temps d’accès supérieurs à quarante-cinq minutes.
Ce rapport a le mérite de poser le problème, mais les réponses ne peuvent s’appuyer sur de simples calculs mathématiques. Elles doivent prendre en compte les particularités de chaque territoire et le fonctionnement de chaque établissement. Pour vous donner un exemple, en Lorraine, sur dix-neuf maternités, nous en avons dix de type 1 et quatorze qui pratiquent moins de 1 000 accouchements par an.
Vous comprendrez donc que ce rapport soulève des questions et des inquiétudes.
Aussi, madame la ministre, pouvez-vous nous dire si vous comptez vous appuyer sur ce rapport pour un futur plan national de périnatalité ?
Ce rapport est-il une commande ou une initiative spontanée ?
Enfin, quelle sera la ligne choisie par le Gouvernement pour assurer un suivi de grossesse et un accouchement en toute sécurité pour toutes les femmes de notre pays ? (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE et sur des travées du groupe UC. – M. Jean-Baptiste Lemoyne et Mme Elsa Schalck applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé.
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée auprès du ministre de la santé et de la prévention, chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé. Madame la sénatrice Guillotin, je vous prie d’excuser l’absence du ministre de la santé et de la prévention, François Braun.
Vous évoquez le rapport sur la planification de la périnatalité rendu par l’Académie nationale de médecine. François Braun et moi-même avons pris connaissance des analyses et propositions de ce rapport. Je le rappelle, l’Académie est une structure indépendante : elle a rendu un avis scientifique qui n’engage en rien le Gouvernement.
Je veux être très claire : la remise de ce rapport ne signifie aucunement, comme certains s’amusent à le laisser entendre, que l’on fermera massivement des maternités ou que l’on remettra en cause, du jour au lendemain, trente ans de politique périnatale dans notre pays.
La question que pose ce rapport est importante et renvoie à l’équilibre nécessaire entre proximité et sécurité des actes. Je le redis, la sécurité n’est pas négociable. Notre volonté est de bâtir ensemble des solutions qui permettent de garantir une offre pour toutes, en assurant la qualité et la sécurité de la prise en charge.
Entre un territoire périurbain et un territoire rural, les solutions à construire seront, de fait, très différentes. C’est la philosophie de notre action et l’esprit du Conseil national de la refondation (CNR), avec des solutions territoire par territoire, coconstruites avec l’ensemble des acteurs.
J’ajoute que la santé des femmes est un enjeu essentiel sur lequel nous allons agir et agissons déjà, à tous les niveaux. Je pense à la formation des professionnels. Nous sommes pleinement engagés dans une réflexion globale avec l’ensemble des acteurs sur l’évolution des filières et métiers pour améliorer les conditions d’exercice, mieux reconnaître leurs compétences et renforcer l’attractivité des métiers.
En la matière, le Gouvernement agit déjà. C’est le sens de la loi du 25 janvier 2023 visant à faire évoluer la formation des sages-femmes, loi qui permettra désormais à celles-ci d’obtenir le diplôme d’État de docteur en maïeutique.
Il faut le redire aujourd’hui dans le contexte particulier de la Journée internationale des droits des femmes, le Gouvernement est pleinement mobilisé pour accompagner et protéger la santé de toutes les femmes, au quotidien. Nous voulons mieux accompagner les femmes qui connaissent l’épreuve d’une fausse couche, au travers du renforcement des dispositifs d’accompagnement psychologique et de la création de parcours dédiés.
Vous connaissez ma détermination, et celle de François Braun, pour améliorer l’accès à la santé de nos concitoyens sur tout le territoire. Nous sommes pleinement mobilisés.
M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour la réplique.
Mme Véronique Guillotin. Madame la ministre, votre réponse claire a levé les inquiétudes suscitées par ce rapport. Comme vous, je pense que nous ne devons pas déroger à l’impératif de sécurité.
Bien évidemment, toutes les solutions permettant de répondre aux problématiques des maternités devront être trouvées territoire par territoire, maternité par maternité. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE et sur des travées du groupe INDEP.)
réforme des retraites
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. Guillaume Gontard. Madame la Première ministre, en cette Journée internationale des droits des femmes, nous aurions préféré vous interroger, par la voix de Mélanie Vogel, sur les politiques que vous ne mettez pas en œuvre en faveur de l’égalité salariale et de l’égalité des femmes et des hommes en matière de retraite.
Mais, considérant la mobilisation tout à fait historique – oui, historique ! – de la journée d’hier, considérant l’entrave gravissime au débat parlementaire intervenue la nuit dernière dans cet hémicycle, ma question sera la suivante : allez-vous retirer votre réforme des retraites inique… (Marques d’impatience sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. Christian Cambon. Assez !
M. Guillaume Gontard. … avant que le blocage démocratique, politique, économique et social du pays ne soit complet ? (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. Emmanuel Capus. C’est vous, le blocage !
M. le président. La parole est à Mme la Première ministre.
Mme Élisabeth Borne, Première ministre. Monsieur le président Guillaume Gontard, tout d’abord, puisque vous évoquez l’organisation interne des débats au Sénat, je voudrais vous rappeler que je suis attachée à la séparation des pouvoirs…
Mme Pascale Gruny. Très bien !
Mme Élisabeth Borne, Première ministre. … et que le déroulement des débats est la prérogative de chaque assemblée.
Je note toutefois que les débats avancent. Vous avez voté hier la première partie du texte et vous avez déjà pu débattre plusieurs heures de l’article 7. J’ai donc toute confiance dans le Sénat pour conduire dans les meilleures conditions le débat.
Monsieur le président Gontard, comme vous l’avez souligné, votre question intervient le 8 mars, Journée internationale des droits des femmes. Je voudrais donc profiter de ce moment pour vous dire ma mobilisation personnelle et celle de mon gouvernement pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes.
L’égalité entre les femmes et les hommes est la grande cause des deux quinquennats d’Emmanuel Macron. (M. Hussein Bourgi le conteste.) Je me bats pour l’égalité et pour les droits des femmes depuis des années. Alors, j’ai veillé à ce que ce projet pour nos retraites tienne compte au mieux des carrières des femmes et œuvre à réduire les inégalités.
Notre projet protège celles qui ont commencé à travailler tôt, en améliorant le dispositif consacré aux carrières longues, notamment en y intégrant les congés parentaux.
Notre projet protège celles qui ont des carrières incomplètes, en permettant la validation des trimestres de congé parental ou des périodes de congé des proches aidants, lesquels sont souvent des femmes, et en ne modifiant pas l’âge d’annulation de la décote, qui concerne une femme sur cinq.
Notre projet protège celles et ceux qui ont des revenus modestes tout au long de leur vie professionnelle. Ce sont à la fois les retraités futurs et les retraités actuels qui bénéficieront d’une revalorisation de la pension minimale : pour les deux tiers, ce sont des femmes.
Ainsi, dans les prochaines années, l’écart de pension entre les femmes et les hommes va se réduire d’un tiers.
Comme depuis le début, nous restons attentifs aux propositions constructives et nous sommes ouverts à des évolutions du texte, notamment pour réduire les inégalités de pension entre les femmes et les hommes. Cela peut passer par une surcote pour toutes celles qui auront la durée nécessaire de cotisation à 63 ans – vous aurez l’occasion d’en débattre tout à l’heure, mesdames, messieurs les sénateurs.
Mais la retraite ne peut pas, à elle seule, corriger toutes les inégalités d’une vie professionnelle. C’est pourquoi nous devons également continuer à nous battre pour l’égalité tout au long de la vie professionnelle. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Mmes Jocelyne Guidez, Évelyne Perrot et Daphné Ract-Madoux applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour la réplique.
M. Guillaume Gontard. Madame la Première ministre, vos discours faussement pédagogiques, encore plus ceux sur l’égalité hommes-femmes, ne convainquent personne de quoi que ce soit, si ce n’est de rejoindre les cortèges des manifestations !
Vous portez la responsabilité de cette réforme, dont personne ne veut. Vous portez la responsabilité du blocage du pays. Vous portez la responsabilité d’un choix constitutionnel, celui de l’article 47-1, qui muselle le Parlement. Vous portez, avec vos alliés de droite, la responsabilité du déni démocratique qui est à l’œuvre. Demain, vous porterez la responsabilité de l’arrivée de l’extrême droite au pouvoir !
M. Roger Karoutchi. C’est vous qui provoquez l’arrivée de l’extrême droite !
M. Guillaume Gontard. Madame la Première ministre, vous avez déjà trahi maintes fois les promesses formulées devant le Parlement en juillet dernier. Cessez de mentir aux Françaises et aux Français !
Cessez de dissimuler vos négociations d’antichambre avec les lambeaux de la droite ! Cessez de vous faire dicter votre action politique, ou bien remaniez le Gouvernement et intégrez Les Républicains à votre coalition ! Revenez alors devant le Parlement nous présenter avec sincérité le projet de casse sociale et de régression sociétale, le projet de droite qui est le vôtre ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
En attendant, nous vous demandons solennellement, au nom de l’immense majorité du peuple français et de l’intersyndicale, de retirer ce projet inutile, car, comme l’a si bien dit le porte-parole du Gouvernement, le pays a d’autres urgences à gérer. (Applaudissements sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE.)
interdiction de la vente de voitures thermiques neuves en 2035 (I)
M. le président. La parole est à M. Franck Menonville, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP et sur des travées du groupe UC.)
M. Franck Menonville. Monsieur le ministre de la transition écologique, l’interdiction de la vente de voitures neuves à moteur thermique en 2035 a été validée par le Parlement européen le 14 février dernier. Le vote des représentants des États membres pour l’entériner devait avoir lieu hier. Heureusement, il a été reporté sine die grâce à l’abstention de l’Allemagne. Dorénavant, plusieurs pays s’opposent au tout électrique, mettant en avant leurs doutes quant à l’incidence de cette évolution technique et technologique sur l’industrie.
Cette interdiction n’a fait l’objet d’aucune étude d’impact préalable. Les conséquences pourraient être très lourdes : disparition de centaines de milliers d’emplois en Europe ; désindustrialisation historique au profit de la Chine ou d’autres pays peu respectueux de l’environnement ; perte de capacité d’innovation, notamment en matière de carburants propres.
De plus, il faut tenir compte de l’utilisation des véhicules électriques, qui n’est absolument pas adaptée à nos territoires ruraux en matière d’autonomie de batterie, de distance à parcourir et de matériel de recharge. Sur le cycle de vie du produit, son empreinte écologique n’est pas neutre. On sait que la production des batteries et leur recyclage soulèvent de nombreuses difficultés et accentuent notre dépendance.
Renault, par la voix de son président, Jean-Dominique Senard, pense que, en 2050, grâce à la recherche-développement, le moteur thermique pourrait disposer du même bilan carbone que l’électrique.
Loin de moi l’idée d’opposer thermique et électrique, mais je veux néanmoins rappeler que notre pays est l’un des leaders des petits moteurs diesel et que nous disposons encore de grandes capacités d’évolution et d’innovation.
Ne nous enfermons donc pas dans le tout électrique en excluant le thermique, mais mobilisons-nous plutôt pour une mobilité toujours plus propre !
Monsieur le ministre, quelle est la position de la France sur ce dossier ? Nous devons protéger notre industrie automobile et nos compétences, garantir nos intérêts…
M. le président. Il faut conclure !
M. Franck Menonville. … et ne nous fermer aucune piste de développement et d’innovation. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP, ainsi que sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Monsieur le sénateur Menonville, le 29 juin dernier, l’Union européenne a validé la réglementation que vous évoquez, par le biais d’un accord entre États membres, et un vote est intervenu le 14 février dernier. Depuis quelques jours, l’Allemagne menace, pour des raisons politiques internes relatives à sa coalition gouvernementale, de ne pas tenir sa parole. (Murmures sur des travées du groupe Les Républicains.)
Si les choses devaient en rester là, ce serait à la fois un très mauvais signal au regard de nos engagements climatiques et un danger pour notre industrie. (Protestations sur les mêmes travées.)
Les émissions de gaz à effet de serre des véhicules thermiques sont plus importantes, à elles seules, que toutes les émissions agricoles, que toutes les émissions industrielles, que toutes les émissions liées à la construction.
Les biocarburants sont une impasse. Nous n’avons pas la surface nécessaire pour compenser les hydrocarbures et nous en aurons besoin pour le maritime et l’aérien. Il faudra utiliser le e-fuel, les carburants de synthèse, pour les moteurs qui ne pourront pas être électrifiés, en particulier dans l’aérien et le maritime, si l’on veut viser la neutralité carbone.
L’échéance de 2035 signifie non pas la fin des moteurs thermiques, mais la fin de la vente des moteurs neufs. (Exclamations sur des travées du groupe Les Républicains.) Les véhicules diesel ou hybrides continueront évidemment à circuler.
Monsieur le sénateur, je sais que votre intérêt pour l’industrie de notre pays est réel. Avec Clément Beaune et Bruno Le Maire, notre obsession est précisément de faire en sorte qu’un cap clair soit donné aux industriels.
Depuis quelques jours, les constructeurs et équipementiers Valeo, Volkswagen, Stellantis et Renault insistent sur la nécessité de ne pas envoyer de contre-signal au moment où ils investissent des milliards d’euros, par exemple avec le pôle ElectriCity dans les Hauts-de-France, pour être prêts le moment venu.
Ne pas respecter notre engagement reviendrait à se laisser tailler des croupières par l’industrie chinoise, qui fabrique des véhicules électriques avec des usines à charbon. Se préparer au changement, l’assumer et l’accompagner, c’est la voie qui est souhaitable, à la fois pour le climat, pour l’industrie et pour nos emplois. (Applaudissements sur des travées des groupes RDPI et INDEP.)
journée du 8 mars
M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Eustache-Brinio, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Jacqueline Eustache-Brinio. « Femme, vie, liberté » : en ce 8 mars, madame la ministre chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes, comment ne pas penser, avec le cœur lourd, à toutes les femmes victimes d’oppression dans le monde, et particulièrement aux Iraniennes et aux Afghanes ?
Mme Françoise Gatel. Très bien !
Mme Jacqueline Eustache-Brinio. Courageusement, elles se battent chaque jour, au péril de leur vie, pour dénoncer des régimes qui nient leur existence, qui veulent les rendre invisibles et qui les empêchent d’accéder à la culture, à l’école, au savoir et donc à leur émancipation, allant jusqu’à empoisonner des centaines d’écolières en Iran !
Leur force et leur courage nous obligent à l’action.
À l’image de ce qu’était l’apartheid racial en Afrique du Sud, ces femmes sont victimes d’un véritable apartheid sexuel.
En 1973, les Nations unies adoptaient le texte de la Convention internationale sur l’élimination et la répression du crime d’apartheid, qui a permis de prendre des mesures à l’échelle internationale en vue d’éliminer et de réprimer le crime d’apartheid.
En ce cinquantième anniversaire de cette convention, la France s’honorerait en portant une initiative auprès des Nations unies pour étendre cette convention à l’apartheid sexuel, en proposant d’inclure ce type de discrimination à l’article II définissant le terme « apartheid ».
Cette proposition, lancée par la Ligue du droit international des femmes, est soutenue par de nombreux juristes et intellectuels, parmi lesquels Shirin Ebadi, Iranienne et prix Nobel de la paix.
La France, pays des droits de l’homme, pays des Lettres persanes, aura-t-elle l’ambition et le courage de porter cette demande aux Nations unies, en y associant ses partenaires européens ? (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC, ainsi que sur des travées des groupes RDPI et RDSE. – M. Jean-Pierre Sueur applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes, de la diversité et de l’égalité des chances.
Mme Isabelle Rome, ministre déléguée auprès de la Première ministre, chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes, de la diversité et de l’égalité des chances. Madame la sénatrice, oui, bien sûr, nous pensons aujourd’hui, en cette Journée internationale des droits des femmes, à toutes les femmes qui sont opprimées un peu partout dans le monde.
La France est d’ailleurs l’un des rares pays à s’être doté d’une diplomatie féministe, que porte avec conviction Catherine Colonna, notamment à l’occasion du Forum génération Égalité de 2021, au cours duquel il a été décidé de consacrer 40 milliards de dollars à l’égalité femmes-hommes à travers le monde.
Avec Catherine Colonna, une de nos priorités est d’universaliser la convention d’Istanbul, qui est un des textes fondateurs des droits des femmes, puisqu’il reconnaît la violence structurelle des sociétés à l’égard des femmes. Les pays qui ont ratifié cette convention doivent prendre des mesures d’éducation, de prévention et de sanction pour protéger les femmes et les enfants. Nous avons l’ambition de porter haut et fort cette convention internationale.
Par ailleurs, nous avons lancé en 2019 un fonds de soutien aux organisations féministes dans le monde, le FSOF. J’ai rencontré un certain nombre de représentantes de ces organisations : elles sont toutes très satisfaites de l’aide qui leur est apportée.
J’ajouterai que la France, qui est le pays de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, est aussi le pays des droits des femmes. (M. Gérard Longuet s’exclame.) Lorsqu’elle inscrira au sommet de son édifice juridique, c’est-à-dire dans la Constitution, le droit à l’interruption volontaire de grossesse, peut-être sera-t-elle aussi un phare pour toutes les femmes du monde et leur enverra-t-elle un signe d’espoir. (M. André Reichardt proteste.)
Nous pensons bien sûr à toutes ces femmes, et notre mobilisation est totale pour les droits des femmes dans le monde entier. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. Rachid Temal. Et la réponse à la question ?
M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Eustache-Brinio, pour la réplique.
Mme Jacqueline Eustache-Brinio. Madame la ministre, j’attendais un oui ou un non à ma question, rien d’autre !
Nous ne pouvons pas laisser, par notre inaction – car c’est bien de cela qu’il s’agit –, régner un tel climat de terreur envers ces femmes et ces jeunes filles à travers le monde.
Les courageuses Iraniennes et Afghanes, et toutes les femmes opprimées, combattantes de la liberté, modèles de résistance, nous donnent une leçon.
Elles ont besoin de preuves tangibles de notre soutien. Ne les décevons pas ! Ne brisons pas leur rêve ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
lutte contre les féminicides
M. le président. La parole est à Mme Annick Billon, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et INDEP.)
Mme Annick Billon. Madame la Première ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, en cette journée symbolique du 8 mars, Journée internationale des droits des femmes, ma question s’adresse à Mme la ministre chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes.
Avant-hier, un homme a été placé en garde à vue à Poitiers : il est suspecté d’avoir défenestré sa femme.
Trois jours auparavant, en Gironde, un homme poignardait la sienne.
Depuis le 1er janvier dernier, vingt-six femmes ont été tuées par leur conjoint ou ex-conjoint.
Pourtant, le Président de la République a déclaré depuis 2017 l’égalité entre les femmes et les hommes grande cause nationale ; pourtant, le Grenelle des violences conjugales s’est tenu en 2019 ; pourtant, le budget consacré à l’égalité a sensiblement progressé ; pourtant, le Parlement a adopté pas moins de quatre lois.
Les chiffres sont là : quelque 130 femmes ont été tuées en 2017 et 106 en 2022. Les personnels chargés de traiter ces affaires restent insuffisamment formés. De fait, des drames auraient pu être évités si les procédures légales avaient été respectées : une plainte pour violences conjugales doit être immédiatement transmise au procureur.
Madame la ministre, vous avez récemment présenté le dispositif qui doit permettre d’aider les femmes en situation de danger à s’extraire des griffes de leur conjoint violent avant qu’il ne soit trop tard. Permettez-moi de regretter le manque d’ambition du calendrier de ce « pack nouveau départ ». Un premier test de trois mois doit être mené dans le Val-d’Oise avant d’être étendu à quatre autres territoires, dont seulement un rural et un ultramarin. La généralisation du pack au niveau national n’est envisagée que d’ici à 2025 ou à 2026.
Si le Gouvernement est convaincu par ce dispositif, pourquoi attendre aussi longtemps pour le généraliser ? Pourquoi ne pas accélérer son déploiement ? Pourquoi risquer la vie d’au moins 300 femmes ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées du groupe CRCE. – MM. Hussein Bourgi et Jean-Pierre Sueur applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes, de la diversité et de l’égalité des chances.
Mme Isabelle Rome, ministre déléguée auprès de la Première ministre, chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes, de la diversité et de l’égalité des chances. Merci, madame la sénatrice, chère Annick Billon, pour votre question.
Tout d’abord, permettez-moi d’exprimer une pensée pour toutes ces victimes. Les féminicides sont bien trop nombreux.
Depuis 2017, vous l’avez rappelé, beaucoup a été fait, que ce soit en matière de protection des victimes ou d’outils de protection : déploiement massif de plus de 3 000 téléphones grave danger, bracelet anti-rapprochement, augmentation considérable, de plus de 80 %, des places d’hébergement d’urgence, formation massive de 150 000 policiers et gendarmes.
Nous avons avancé et nous irons encore plus loin. La Première ministre a annoncé dès le début du mois de septembre 2022 le lancement du nouveau dispositif qu’est le « pack nouveau départ » afin d’aider les victimes à quitter leur conjoint, c’est-à-dire à s’extraire des griffes de ce bourreau. En effet, il est difficile de partir quand on a été pendant des années humiliée, dévalorisée et harcelée. L’objectif de ce pack est de pouvoir accorder aux victimes un certain nombre d’aides matérielles dont elles ont besoin : allocation, aide au retour à l’emploi ou à la formation, aide pour la garde d’enfant, accompagnement psychologique et, si besoin, hébergement d’urgence.
L’intérêt de ce dispositif est qu’il peut être accordé sur demande de tout signalant, c’est-à-dire potentiellement un travailleur social, un médecin, un avocat, un soignant ou une association. Ce signalant peut saisir un référent unique à la caisse d’allocations familiales ou à la Caisse centrale de la Mutualité sociale agricole (CCMSA) dans les zones rurales. Il donnera ainsi droit à toutes ces aides de manière prioritaire.
L’expérimentation durera douze semaines dans le premier territoire, le Val-d’Oise. Ensuite, vous l’indiquiez, quatre autres territoires suivront pour une expérimentation d’un an au total. Il faut non pas fabriquer une usine à gaz,…
M. le président. Il faut conclure.
Mme Isabelle Rome, ministre déléguée. … mais répondre le mieux possible aux besoins des victimes. Pour cela, il faut un peu de temps. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
conséquences de la réforme des retraites sur la retraite des femmes
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)
Mme Laurence Cohen. Monsieur le président, monsieur le ministre du travail, mes chers collègues, en affirmant que les femmes seront les grandes gagnantes de la réforme des retraites, le Gouvernement instrumentalise leur cause.
En réalité, cette réforme est dirigée contre les femmes. Elle ne corrige en rien les inégalités salariales de 28 % et les inégalités de pension de 40 %. Votre étude d’impact révèle que les femmes devront reporter l’âge auquel elles prennent leur retraite bien plus tard que les hommes.
Vous le savez et vous le saviez donc depuis le début. Cela ne vous empêche pas de continuer à tenter de nous vendre le contraire.
Il faut dire que la majorité sénatoriale vous aide bien. Quel triste et scandaleux spectacle donné hier avec l’utilisation de l’article 38 du règlement du Sénat, qui a bâillonné l’opposition avec l’accord des droites unies : Les Républicains, les centristes et les macronistes ! (Vives protestations sur les travées du groupe Les Républicains. – Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST.)
M. Max Brisson. C’est le règlement !
Mme Laurence Cohen. Votre réforme est bien une réforme de droite, monsieur Dussopt !
Alors ma question est simple : en ce 8 mars 2023, journée internationale de lutte pour les droits des femmes, sortirez-vous enfin du déni et renoncerez-vous à votre réforme qui a mis hier encore des millions de femmes et d’hommes dans la rue ? (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST.)
M. le président. La parole est à M. le ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion.
M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, madame la sénatrice Laurence Cohen, nous sommes – vous l’avez dit – le 8 mars, Journée internationale des droits des femmes, et vous interrogez le Gouvernement sur le contenu de la réforme des retraites en ce qui les concerne précisément.
Mme la Première ministre l’a mis en avant tout à l’heure : nous avons voulu et avons fait en sorte que la réforme que nous défendons apporte des améliorations, de plusieurs ordres, à leur situation.
Vous savez et nous savons tous que la revalorisation des plus petites pensions est envisagée de manière qu’elle soit plus bénéfique aux femmes qu’aux hommes.
M. Victorin Lurel. Et dans les outre-mer ?
M. Olivier Dussopt, ministre. Pourquoi sera-t-elle plus bénéfique aux femmes ? Parce que, à l’heure actuelle, malheureusement, elles ont dans notre pays les plus petites retraites ; j’y reviendrai.
De la même manière, pour calculer l’éligibilité au départ anticipé à la retraite des carrières longues ou l’éligibilité au minimum de pension, nous retenons pour les parents au foyer un certain nombre de trimestres cotisés au titre de l’assurance vieillesse.
De la même manière, nous sommes ouverts à des amendements – ils n’ont pas pu être examinés à l’Assemblée nationale, mais ils sont déposés au Sénat – permettant de prendre en compte, pour relever le niveau de retraite des femmes, les indemnités journalières versées avant 2012. Nous sommes également ouverts à des amendements permettant d’améliorer, au sens plus large, la situation des parents confrontés à des situations très sensibles. Je pense notamment au devenir du calcul des pensions de retraite en cas de perte d’un enfant pour les familles qui ont plus de trois enfants.
Votre assemblée est saisie d’un certain nombre de propositions, notamment celle que défend le président Retailleau (Exclamations sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)…
M. Olivier Dussopt, ministre. … visant à surcoter les trimestres acquis par les femmes une fois qu’elles ont atteint la durée d’affiliation requise et avant l’âge d’ouverture des droits. Je peux vous assurer qu’il faut considérer cette proposition équilibrée avec la plus grande ouverture d’esprit possible.
Madame la sénatrice, vous avez rappelé que nous sommes le 8 mars. Puisque vous avez gardé du temps pour me répondre, peut-être pourrons-nous convenir en cette Journée internationale des droits des femmes que la vraie inégalité de pension naît non pas de notre système de retraite, mais des inégalités professionnelles. Nous devons porter tous nos efforts sur le chantier de l’égalité professionnelle tout au long de la vie pour que les pensions soient les mêmes entre les femmes et les hommes. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour la réplique.
Mme Laurence Cohen. Avec vous, monsieur le ministre, le 8 mars, c’est la journée du recul des droits des femmes ! (Protestations sur les travées du groupe RDPI.) Vous nous avez affirmé des contrevérités. Je suis en accord avec une seule chose : il faudrait, en effet, une grande loi Travail.
L’égalité entre les femmes et les hommes consiste à mettre fin aux inégalités salariales, à revaloriser les métiers féminisés – aides-soignantes, auxiliaires de vie, métiers du soin et du lien, agents de propreté, lesquels ont manifesté ce matin devant le Sénat –, mais aussi à compter comme des taux pleins les cotisations des emplois à temps partiel et à augmenter le taux d’emploi des femmes. Cela serait autant d’argent pour les caisses de sécurité sociale, permettant de renflouer le prétendu déficit justifiant ce projet régressif.
Voilà ce que serait une réforme de justice et d’égalité pour les femmes, une réforme féministe ! En ce 8 mars, les femmes sont dans la rue pour le crier. Le peuple est encore dans la rue, que cela vous plaise ou non. Toutes et tous diront non aux deux ans de vie que vous voulez leur voler ! (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE et SER.)
M. le président. La parole est à Mme Nadège Havet, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – MM. Teva Rohfritsch et Michel Canévet applaudissent également.)
Mme Nadège Havet. Ma question s’adresse à M. le secrétaire d’État chargé de la mer.
« La place de l’Océan dans l’agenda politique international » n’est pas « à la mesure de son rôle dans les équilibres […] planétaires » : le Président de la République dressait ce constat il y a un an, à Brest, en conclusion du premier sommet mondial qui était consacré à la question. Ce sommet, un rassemblement inédit des dirigeants mondiaux, était organisé dans le cadre de la présidence française du Conseil de l’Union européenne, traduisant une volonté de faire avancer les dossiers.
À cette occasion avait été lancée une coalition de près de cinquante États affirmant un objectif : parvenir, enfin, après des années de négociations, à un texte contraignant sur la gouvernance de la haute mer pour mieux protéger cet espace. C’est désormais chose faite.
Après celui de décembre dernier, un deuxième accord de la plus haute importance a été conclu ce 4 mars à New York, sous l’égide de l’ONU. Il vient acter la mise en place d’un futur traité international relatif à la conservation et à l’utilisation durable de la biodiversité marine en haute mer. Les mesures qui y figurent ont été jugées essentielles pour nos écosystèmes, notamment la création d’aires marines protégées, désormais entérinée.
Je profite de cette prise de parole pour saluer une nouvelle fois les travaux menés par nos collègues Teva Rohfritsch et Michel Canévet sur les fonds marins. (Marques d’impatience sur les travées du groupe SER. – M. Rachid Temal mime la brasse.)
Le groupe RDPI tient à saluer cette avancée majeure pour la protection de nos océans, puits de carbone essentiels à la régulation climatique et à la lutte contre le réchauffement. Nous saluons le rôle actif joué par la France dans cette recherche d’un accord mondial.
Monsieur le secrétaire d’État, pourriez-vous nous détailler les avancées contenues dans ce traité essentiel et les actions qu’il reste à mener pour la mise en œuvre concrète de cet instrument international juridiquement contraignant ? (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé de la mer.
M. Hervé Berville, secrétaire d’État auprès de la Première ministre, chargé de la mer. Madame la sénatrice Nadège Havet, je me permets d’abord de vous remercier pour votre engagement dans la préservation des océans,…
M. Rachid Temal. Et aussi pour la question !
M. Hervé Berville, secrétaire d’État. … et de saluer celui de votre groupe et du sénateur Teva Rohfritsch.
Vous l’avez indiqué, dans la nuit de samedi à dimanche, les États membres des Nations unies ont conclu un accord sur la protection de la biodiversité marine en haute mer, soit un espace situé à 370 kilomètres des côtes.
Ce n’est pas le fruit du hasard : il y a plus d’un an, le Président de la République et l’Union européenne ont relancé les négociations sur ce texte, enlisées depuis quinze ans. Ce traité représente un tournant majeur pour la protection des océans, puisqu’il est juridiquement contraignant et vise à préserver un espace qui couvre 45 % de la surface de la planète.
Il est décisif pour au moins trois raisons.
La première raison est que ce traité contraint les États à mener des études d’impact environnemental pour toute nouvelle activité en haute mer.
La deuxième raison est qu’il ouvre la voie à la création très concrète d’aires marines protégées en haute mer.
La troisième raison, montrant à quel point ce traité est historique, est que, pour la première fois dans l’histoire des négociations environnementales, les décisions ne seront plus prises par consensus, lequel permettrait des blocages par certains États, mais à la majorité, évitant cet écueil afin d’établir, partout, des aires marines protégées.
Quelles seront les prochaines étapes ?
M. Rachid Temal. La grève des marins-pêcheurs !
M. Hervé Berville, secrétaire d’État. En premier lieu, pour entrer en vigueur, il faudra que soixante États ratifient le traité. Notre objectif est que ce soit le cas d’ici à la conférence des Nations unies sur les océans qui se tiendra en France en 2025, à Nice.
En second lieu, il faut poursuivre le combat pour la protection des océans. La France continuera notamment à mobiliser pour l’interdiction de l’exploitation minière des grands fonds marins, un combat essentiel.
Nous ne pourrons pas gagner la course contre la montre climatique si nous ne protégeons pas les océans et la haute mer. C’est tout l’intérêt de ce traité conclu par les États membres des Nations unies. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
place de la france en afrique
M. le président. La parole est à M. Alain Joyandet, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Alain Joyandet. Madame la Première ministre, la France, libératrice du Mali, est chassée d’Afrique – Centrafrique, Burkina Faso, etc. – presque sans préavis.
La France, grande puissance diplomatique dont le langage doit être normalement universel et qui se doit de parler à tout le monde, se fâche avec ses partenaires. Nous avons même réussi à nous fâcher simultanément – il faut le faire ! – avec le Maroc et l’Algérie !
L’échec diplomatique est cuisant, et il est dramatique pour l’avenir. Je comptais vous demander quelle était votre politique pour l’Afrique, mais le Président de la République a déclaré le 27 février dernier : « Il n’y a plus de politique africaine de la France. » Est-ce vrai ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l’Europe et des affaires étrangères.
Mme Catherine Colonna, ministre de l’Europe et des affaires étrangères. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je connais, monsieur Joyandet, votre intérêt pour l’Afrique. Or, depuis quelque temps, voyez-vous, l’Afrique a changé, la France aussi. (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jacques Grosperrin. Les ministres aussi, on en changera bientôt !
Mme Catherine Colonna, ministre. L’Afrique a changé depuis un certain temps, mais je suis sûre que l’ancien secrétaire d’État que vous êtes s’en est aperçu…
L’Afrique est, pour les décennies qui viennent, une terre de croissance, d’opportunités et de création. Le Président de la République a pu le constater, par exemple, lors de son déplacement la semaine dernière auprès des entrepreneurs et des artistes réunis à l’institut français de Kinshasa.
De plus, l’Afrique a changé, monsieur le sénateur, parce qu’elle n’entend plus se faire dicter par l’extérieur ce qui est bon pour elle. Les pays africains défendent leurs intérêts, avec raison, comme nous le faisons tous.
La France aussi a changé. Nous voulons sortir des visions datées. L’Afrique, ou plutôt les pays africains – vous le savez, il y a plusieurs Afrique –, ne sont pas spectateurs d’une concurrence entre puissances. Nous avons sur ce continent des partenaires et des défis communs, mais également des atouts à faire valoir : nos liens humains, nos diasporas, nos entrepreneurs, nos universités, nos réseaux culturels et le dynamisme de nos jeunesses.
La France a aussi changé parce qu’elle met en place des outils pour développer ces nouveaux partenariats. Nous savons qu’il nous faut lutter davantage contre la désinformation et les manipulations de l’information. Nous savons également quelles forces sont à l’œuvre, avançant leur stratégie qui n’est certainement pas en faveur de la paix, ni de la stabilité, ni de la prospérité des pays considérés.
En additionnant toutes nos actions, nous resterons un partenaire actif de ce continent, dans notre intérêt, dans celui de nos peuples et dans l’intérêt de l’Europe également.
M. Jacques Grosperrin. Laborieux !
M. le président. La parole est à M. Alain Joyandet, pour la réplique.
M. Alain Joyandet. Si les choses ont changé, la France doit reprendre son destin en main, en Afrique comme ailleurs. Nous refusons, à la suite de la déclaration franco-américaine de novembre 2022, un éventuel copilotage de nos bases en Afrique avec nos alliés des États-Unis d’Amérique. La France est suffisamment grande pour développer seule une vraie politique en Afrique.
Madame la ministre, vous avez des moyens à votre disposition. Vous savez que nous disposons de bases prépositionnées en Afrique. Les accords sur ces bases ont été renégociés en 2010 ; ils sont vivants et utiles. Inutile de vouloir tout casser ! Les déclarations que nous avons entendues sont particulièrement inquiétantes.
Vous avez un corps diplomatique qu’il faudrait protéger et non casser. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC, ainsi que sur des travées du groupe SER. – Mme Marie-Noëlle Lienemann applaudit également.) Il est exceptionnel ! Avec ce corps, nous avons défini une ligne claire et intelligente pour l’Afrique : ni ingérence ni dédain. Nous ne laisserons pas tomber les pays du continent, mais, en même temps, nous ne sommes pas des colonialistes. Nous devons combattre cette idée : le Président de la République ne doit pas laisser dire que la France est un État néocolonialiste. (Mme Catherine Conconne s’exclame.) Il y va de l’honneur de la France et de notre image : nous ne devons plus être humiliés.
M. le président. Il faut conclure.
M. Alain Joyandet. Sur tous ces sujets, madame la ministre, le Sénat peut vous aider, notamment la commission des affaires étrangères et son président, Christian Cambon.
M. le président. Il faut conclure !
M. Alain Joyandet. Nous vous demandons un débat parlementaire. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et SER. – Mme Marie-Noëlle Lienemann applaudit également.)
impact de la réforme des retraites sur les femmes
M. le président. La parole est à Mme Monique Lubin, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST.)
Mme Monique Lubin. « Cette réforme protège les femmes qui ont commencé à travailler tôt, les femmes qui sont dans des métiers difficiles, les femmes qui ont dû interrompre leur carrière » : ce sont vos propos, madame la Première ministre ; vous venez, d’ailleurs, de les réitérer.
Aujourd’hui, j’ai une pensée pour les femmes que je connais dans mon département des Landes, où l’industrie agroalimentaire est très présente. Plus particulièrement, je pense à cette femme ayant témoigné, lors d’un important mouvement de grève dans une entreprise de transformation agroalimentaire, qu’elle se levait à quatre heures du matin pour aller travailler sur une chaîne d’éviscération de volailles à plusieurs kilomètres de chez elle pour un salaire à peine supérieur au Smic après de nombreuses années d’ancienneté.
Vous le voyez, madame la Première ministre, tous les critères que vous avez cités sont réunis dans son cas. J’aimerais que vous m’expliquiez comment cette loi améliorera la future retraite de cette salariée. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE. – M. Guillaume Gontard applaudit également.)
M. Jean-Marc Todeschini. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion.
M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion. Madame la sénatrice Lubin, si j’ai bien compris votre question, vous avez pris l’exemple d’une femme travaillant dans une industrie agroalimentaire sur une chaîne de préparation de volailles, un travail qui est donc très physique. Si j’ai bien compris également, ce travail est posté et les départs pour s’y rendre ont lieu extrêmement tôt. Vous voulez savoir ce qui, dans notre projet de loi, permettra d’aider cette femme.
Dans notre projet de loi, au titre de la pénibilité, nous améliorons le compte professionnel de la prévention et nous diminuons de cinquante à trente le nombre de nuits de travail posté permettant d’obtenir des points au titre de la pénibilité. Si cette femme est exposée simultanément, d’une part, à des températures extrêmement basses, comme cela peut être le cas dans l’industrie agroalimentaire, et, d’autre part, à de la manutention présentant un aspect particulièrement pénible ou à des travaux de nuit, elle pourra aussi obtenir plus de points.
Si vous adoptez cet article 9, grâce à notre projet de loi, la branche professionnelle à laquelle appartient cette femme sera tenue, et même obligée, de négocier un accord de prévention de la pénibilité que nous cofinancerons à hauteur de 1 milliard d’euros. Les postures pénibles, les vibrations, le port de charges lourdes seront pris en compte et lui permettront à la fois de bénéficier de prévention, de formation à la reconversion, d’un suivi médical renforcé et, si malheureusement l’usure professionnelle faisait son œuvre, de la possibilité d’un départ anticipé.
Mme Corinne Féret. Vous avez supprimé ces critères !
M. Olivier Dussopt, ministre. Vous avez précisé, madame la sénatrice, que cette femme a travaillé toute sa vie pour un niveau de salaire très proche du Smic. Grâce à notre projet de loi, grâce au relèvement du minimum contributif, et donc des pensions les plus basses, nous pourrons l’aider à partir avec une retraite meilleure.
M. Rachid Temal. À quel âge ?
M. Olivier Dussopt, ministre. Madame la sénatrice, si cette femme a commencé, comme celles que je connais dans mon département de l’Ardèche, à travailler extrêmement tôt, grâce à notre effort elle pourra partir à la retraite plus tôt également, parce que nous protégeons les carrières longues. (À quel âge ? sur des travées du groupe SER.)
Voyez-vous, madame la sénatrice, un article de ce projet de loi porte sur l’âge d’ouverture des droits. L’examen de celui-ci reprendra tout à l’heure, et, une fois l’obstruction que vous essayez de mettre en place surmontée (Protestations sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.), nous pourrons peut-être nous intéresser ensuite à ce qui permettra à cette femme d’être protégée. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)
M. Rachid Temal. Soyons sérieux !
M. le président. La parole est à Mme Monique Lubin, pour la réplique.
Mme Monique Lubin. Monsieur le ministre, je savais que vous m’apporteriez une réponse parfaite, claire, formatée… (Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains.) J’ai bien dit « formatée » : il suffit d’appuyer sur le bouton et tout sort sans problème…
Vous parlez des critères de pénibilité. Une fois de plus, je ferai remarquer que vous les avez retirés. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST. – Mme Laurence Cohen applaudit également.) Nous en avions proposé de véritables, et vous vous êtes empressé de les rejeter.
Vous parlez des carrières longues. Si cette femme n’a pas eu la chance de commencer à travailler avant 18 ans, elle travaillera deux ans de plus, c’est-à-dire de 62 à 64 ans. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
Mme Monique Lubin. Lorsque cette réforme a été annoncée, vous avez cherché les uns et les autres – je veux y insister – à instrumentaliser la cause des femmes pour mieux vendre votre projet. Or les économistes qui se sont penchés sur la question ont immédiatement démonté votre argumentaire.
Comme l’a exprimé ces derniers jours Violaine Lucas, présidente de l’association Choisir la cause des femmes, sur un tout autre sujet – celui de l’hommage rendu à Gisèle Halimi –,…
M. le président. Il faut conclure.
Mme Monique Lubin. … les femmes ne veulent plus être instrumentalisées, qu’il s’agisse des ouvrières des Landes ou de celles qui combattent en mémoire des plus illustres, en particulier, précisément, Gisèle Halimi. (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST. – Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
encadrement de l’intérim médical
M. le président. J’appelle chacun à respecter son temps de parole.
La parole est à M. Jean Sol, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean Sol. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, l’encadrement de la rémunération de l’intérim médical par la loi du 26 avril 2021 visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification, dite loi Rist, entrera en application dans le secteur public à partir du 3 avril prochain. Dès lors, une vive inquiétude monte un peu partout en France, madame la ministre déléguée chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé.
Des ruptures d’activité se profilent : fermetures de services d’urgence, de maternités, de services de chirurgie, fragilisation de la régulation médicale et des services d’aide médicale urgente (Samu), etc.
Tout cela est dû au manque de médecins. Cet encadrement, dont je comprends et partage la finalité, créera dans les territoires une situation extrêmement difficile qui accroîtra un peu plus encore l’inégalité entre Français face à l’accès aux soins.
Consciente des difficultés qui s’annoncent et qui inquiètent désormais de très nombreux élus locaux, vous avez demandé aux agences régionales de santé (ARS) d’animer des concertations locales, territoire par territoire, avec les préfets et les élus pour affiner les diagnostics, établissement par établissement.
Vous avez souhaité que les ARS élaborent des solutions avec les professionnels de santé du territoire, mais également avec les centres hospitaliers universitaires (CHU) et les établissements siège de groupement hospitalier de territoire (GHT).
Enfin, vous avez rappelé que les établissements privés s’étaient engagés à suivre le Gouvernement sur la voie d’une rémunération raisonnée.
Est-ce suffisant ? Si cela ne l’était pas, envisageriez-vous d’étendre cette régulation ? Pensez-vous, madame la ministre, que vos instructions suffiront à répondre à la pénurie qui se profile ? Pouvez-vous nous en dire plus sur le résultat du travail que vous avez confié aux ARS, car il y a désormais urgence ? Le Ségur de la santé, faute de s’être attelé à une réforme en profondeur de notre système, n’aura, en définitive, rien réglé à une situation de plus en plus difficile.
Quel est, madame la ministre, votre plan d’action pour assurer la permanence des soins ? Pour redonner confiance dans le système public et libéral de santé ? Pour que le statut des praticiens hospitaliers salariés à l’hôpital soit attractif et que la question de l’intérim ne se pose plus ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Stéphane Demilly applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé.
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée auprès du ministre de la santé et de la prévention, chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé. Monsieur le sénateur Sol, comme vous l’indiquiez, la régulation de l’intérim est une volonté constante du législateur. Elle s’est traduite par deux lois lors des deux quinquennats précédents.
En effet, nous assistons à certains endroits à des dérives qui ne sont plus acceptables et qui relèvent de l’éthique même des soignants.
Je vous donne quelques chiffres : en 2021, l’intérim représente 359 millions d’euros de dépenses, pour des rémunérations individuelles pouvant atteindre 5 000 euros journaliers. Ce n’est tout simplement pas soutenable et cela déstabilise les équipes de soins du fait d’effectifs tournants, instables, créant de l’injustice entre les professionnels eux-mêmes.
Face à ces dérives, le législateur a agi, ce à quoi je souscris. Je rappelle que la loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé plafonnait l’intérim à 1 170 euros brut par mission de vingt-quatre heures, ce qui est loin d’être négligeable. Ce montant permet de conserver de l’attractivité pour l’intérim, car il est question non pas de supprimer tout recours à cette pratique – bien entendu –, mais bien de lutter contre certaines de ses dérives.
La loi Rist devait entrer en vigueur en octobre 2021 ; du fait de crise sanitaire, vous l’avez indiqué, nous avons dû décaler la date au 3 avril prochain.
Vous avez eu la gentillesse de souligner que nous avions anticipé la perspective de cette entrée en vigueur. Nous avons demandé aux ARS un travail établissement par établissement pour faire remonter toutes les problématiques de terrain. Les agences avaient jusqu’à lundi soir pour ce faire. Nous suivons chacune des situations locales avec une très grande attention.
Nous en appelons également au secteur privé. Il doit prendre ses responsabilités et jouer le jeu de l’éthique. C’est tous ensemble que nous y arriverons.
Monsieur le sénateur, vous le voyez, nous sommes pleinement mobilisés pour accompagner les territoires et mettre fin à ces dérives inacceptables. Comptez sur notre engagement aux côtés des ARS pour apporter des réponses territoire par territoire, établissement par établissement. (M. Xavier Iacovelli applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Jean Sol, pour la réplique.
M. Jean Sol. Madame la ministre, seul un cap clair, précis et partagé en matière de coopération entre établissements de santé publics et privés, médecine de ville, ARS, représentants des usagers, élus territoriaux, avec une dose de reconnaissance, permettra, sur la base d’une participation imposée à tous les acteurs privés et publics, d’assurer l’accessibilité à des soins de qualité 24 heures sur 24 sur tout le territoire national. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
prix des places des jeux olympiques de paris 2024
M. le président. La parole est à M. Claude Kern, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Claude Kern. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, l’un des refrains de la communication du Comité d’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques (Cojop) de Paris 2024 est de faire de ces jeux un succès populaire et accessible à tous.
Le président du Cojop, Tony Estanguet, dont je salue d’ailleurs le travail, s’est lui-même félicité de la liesse suscitée par la perspective de cet événement international et populaire ; il a rappelé que les recettes de la billetterie sont indispensables à l’équilibre des comptes.
Pourtant, la réalité est tout autre : l’ouverture de la billetterie à l’issue du tirage au sort est loin d’être un succès avéré. En effet, entre la rigidité des formules proposées, notamment au travers du système de packs, un choix limité avec beaucoup d’inconnues et, surtout, des tarifs jugés prohibitifs, le compte n’y est pas.
Pour une famille passionnée de sport qui rêvait d’assister à des épreuves, la facture peut vite grimper à plusieurs milliers d’euros. Nous sommes bien loin des tarifs populaires sur lesquels une importante communication a été faite.
En creusant un peu, nous apprenons par ailleurs que la moitié des billets à 24 euros ne seront pas mis en vente : ils sont réservés par l’État pour être distribués à des jeunes et à des associations. C’est fort louable, mais comprenez, madame la ministre des sports et des jeux Olympiques et Paralympiques, que cela a de quoi créer une réelle frustration.
De plus, les études comparatives avec les Jeux précédents semblent montrer que les tarifs de cette édition sont plus élevés.
Madame la ministre, comment expliquer à des spectateurs passionnés que les jeux Olympiques de Paris 2024 n’auront de populaire que le nom ? Que comptez-vous faire pour que ces jeux Olympiques et Paralympiques (JOP) que nous attendons depuis cent ans en France soient réellement l’événement populaire annoncé et que nous souhaitons tous ? Comment comptez-vous lutter contre le sentiment actuel d’exclusion, au bénéfice des valeurs de participation et de regroupement prônées par l’olympisme ? (Applaudissements sur les travées des groupes UC, INDEP et Les Républicains. – MM. Bernard Fialaire et Pierre Laurent applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre des sports et des jeux Olympiques et Paralympiques.
Mme Amélie Oudéa-Castéra, ministre des sports et des jeux Olympiques et Paralympiques. Monsieur le sénateur Claude Kern, vous soulignez à juste titre l’importance de cet enjeu de l’accessibilité tarifaire de la billetterie pour les Jeux et, par là même, la nécessité d’organiser une grande fête populaire aux quatre coins du pays.
Nous sommes tous extraordinairement attachés à ce principe de l’accessibilité tarifaire.
Je rappellerai quelques éléments. Sur les huit millions de billets mis en vente pour le grand public par le Comité d’organisation, un million le sont à un prix de 24 euros, pour tous les sports, et que quatre millions, soit la moitié, sont à moins de 50 euros.
Évidemment, pour que certains billets soient attractifs, il faut que d’autres soient vendus à des tarifs plus élevés. Le Comité d’organisation a veillé à ce que seulement 10 % des billets soient à plus de 200 euros.
Ces prix sont dans la lignée, il est important de le rappeler, des éditions précédentes. En tant que ministre des sports, je rappelle que ce spectacle réunit les athlètes les plus exceptionnels du monde dans un moment de grande fête, qui a lieu tous les quatre ans, pour obtenir le sésame le plus important du monde.
Ces jeux sont autofinancés sur des fonds privés pour le volet olympique, et c’est la raison pour laquelle les recettes de billetterie sont importantes.
Pour ma part, je tiens à rappeler l’engouement observé à l’occasion de la mise en vente des billets. Les Français se sont fortement mobilisés, puisqu’ils représentent 50 % des acheteurs sur cent douze nationalités recensées. Je ne veux pas opposer la billetterie populaire et la billetterie territoriale, qui permettra, vous l’avez dit, aux collectivités terres de jeu de proposer une billetterie accessible pour leur public. Par ailleurs, l’État offrira un certain nombre de billets à la jeunesse, aux personnes en situation de handicap, ainsi qu’aux bénévoles du mouvement sportif.
Nous voulons être et nous serons tous ensemble au rendez-vous de l’accessibilité tarifaire et d’une grande fête populaire. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
interdiction de la vente de voitures thermiques neuves en 2035 (II)
M. le président. La parole est à Mme Marta de Cidrac, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Marta de Cidrac. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, le 14 février dernier, le Parlement européen votait l’interdiction de la commercialisation des véhicules à moteur thermique à compter de 2035. Ce vote aurait dû être entériné le 1er mars, mais il a été reporté au 7 mars, puis sine die. Est en cause le blocage de l’Allemagne, de l’Italie, de la Pologne et de la Bulgarie.
La voiture électrique est une mobilité décarbonée, silencieuse et confortable. Elle correspond à une innovation technologique. Cependant, le recyclage des batteries est, hélas ! insatisfaisant, à peine 46 % d’entre elles étant collectées. Nos collègues ultramarins pourraient d’ailleurs témoigner des problèmes environnementaux soulevés à cet égard.
La voiture électrique constitue également une menace pour notre souveraineté industrielle, dans la mesure où plus de 80 % des batteries sont importées d’Asie.
Elle représente aussi un facteur d’inégalités territoriales, l’Ademe, l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, jugeant surtout bénéfique l’impact carbone de la voiture électrique pour les trajets en ville et dans le cas de véhicules citadins.
Monsieur le ministre, à ce stade, la voiture électrique n’a pas pleinement démontré sa vertu écologique ni sa pertinence pour la stratégie industrielle de la France.
Quelle est la position de notre pays ? Emboîtera-t-il le pas à l’Allemagne, à l’Italie, à la Pologne et à la Bulgarie ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.)
M. Loïc Hervé. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports.
M. Clément Beaune, ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des transports. Madame la sénatrice Marta de Cidrac, comme l’a rappelé à l’instant Christophe Béchu, des engagements ont été pris par la France, l’Allemagne et l’ensemble des États européens, au cours de la présidence française de l’Union européenne.
Toutes les préoccupations que vous exprimez sont parfaitement fondées. Toutefois, aujourd’hui, l’alternative est assez simple : refusons-nous ou reportons-nous l’échéance de 2035 pour la fin de la vente des véhicules thermiques et non pas pour leur utilisation en général ? Ou bien est-ce que nous nous donnons les moyens de réussir cette grande ambition écologique et industrielle, en créant une production en France et en Europe ?
Mme Sophie Primas. Et les biocarburants ?
M. Clément Beaune, ministre délégué. C’est résolument cette seconde voie que nous devons prendre. Sinon, dans une décennie à peine, nous nous retrouverions ici, nous-mêmes ou d’autres, pour regretter que la France et l’Europe n’aient pas pris le virage que toutes les grandes puissances économiques et industrielles, notamment les États-Unis et la Chine prennent, en accélérant les évolutions.
Nous devons donc relever ce défi, qui est absolument considérable. J’ai échangé hier soir, à sa demande, avec mon homologue allemand, ministre des transports, qui porte cette préoccupation un peu nouvelle et, comme l’a dit Christophe Béchu, « légèrement liée à des considérations de politique intérieure », afin que nous rappelions ensemble nos engagements.
Pour relever ce défi, que devons-nous faire ? Nous devons d’abord avoir des véhicules accessibles à toutes les Françaises et à tous les Français.
M. Loïc Hervé. C’est essentiel !
M. Clément Beaune, ministre délégué. Oui, c’est absolument essentiel !
Pour ce faire, nous avons créé des aides importantes. Néanmoins, c’est vrai, les véhicules électriques, qui sont encore trop chers, représentent parfois un produit de luxe. Nous devons donc poursuivre dans cette voie.
Il convient également de développer les bornes électriques, grâce aux aides que nous déployons. Si nous renoncions maintenant, cela représenterait un formidable gâchis de l’argent public que nous avons d’ores et déjà investi.
Par ailleurs, il s’agit d’un défi industriel à relever. Nous nous y employons, avec Bruno Le Maire et Roland Lescure. Nos constructeurs sont engagés pour produire en France et en Europe des véhicules électriques plus abordables et « souverains », dans les années qui viennent. Eux-mêmes nous demandent de tenir ce cap. Sinon, ce serait un échec écologique et industriel pour la France et pour l’Europe. (Mme Sophie Primas s’exclame.) Nous pouvons et nous devons relever ce défi tous ensemble.
M. le président. La parole est à Mme Marta de Cidrac, pour la réplique.
Mme Marta de Cidrac. Monsieur le ministre, j’observe que certains de nos partenaires savent mieux défendre leurs intérêts. L’Allemagne, que vous avez citée, fait justement partie de ces pays qui ne sont pas d’accord avec la date de 2035.
Au pays de Stellantis et de Renault, je n’ai aucun doute sur la capacité de notre industrie automobile à relever ce défi. Simplement, vous vous êtes engagé dans un accord qui retient la date de 2035, laquelle me semble parfaitement prématurée au regard des enjeux industriels et environnementaux, particulièrement prégnants, pour notre pays. J’espère que vous entendrez cet appel de nos territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
cours d’éducation sexuelle dans les établissements scolaires
M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Mme Marie-Pierre Monier. Monsieur le président, madame la Première ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, la loi du 4 juillet 2001 relative à l’interruption volontaire de grossesse et à la contraception a rendu obligatoires trois séances d’éducation à la sexualité au cours d’une année scolaire.
Ces séances sont un outil indispensable au dévoilement des stéréotypes sexistes, à la lutte contre les violences faites aux femmes, à la compréhension du consentement et à la prévention des pratiques sexuelles à risque auprès des jeunes.
En cette Journée internationale des droits des femmes, je vous rappelle que le dernier rapport du Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes sur l’état des lieux du sexisme en France a révélé une recrudescence du sexisme chez les jeunes hommes : 25 % d’entre eux pensent qu’il faut parfois être violent dans une relation amoureuse, contre 11 % des hommes, tous âges confondus. Il est donc plus que jamais indispensable d’agir. Notre premier levier, c’est d’appliquer la loi !
À la fin de 2020, au cours de l’examen de la loi de finances pour 2021, j’avais alerté votre prédécesseur, M. Blanquer, de nombreuses associations signalant la non-tenue des séances d’éducation à la sexualité dans certains établissements.
Le Sénat avait adopté mon amendement, qui prévoyait d’augmenter le budget dédié à l’organisation de ces séances, pour que leur mise en œuvre soit effective. Jean-Michel Blanquer m’avait alors rétorqué qu’il n’y avait pas de problème, et la mesure avait été supprimée par l’Assemblée nationale.
Pourtant, voilà quelques mois, un rapport de l’inspection générale de l’éducation nationale a révélé que, à l’école primaire et au lycée, moins de 15 % des élèves bénéficient de ces trois séances, et moins de 20 % au collège.
Partout, sur le terrain, des enseignants, des associations féministes, des gendarmes m’alertent sur le fait que ces séances n’ont pas lieu.
Le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes demande un plan d’urgence pour leur mise en œuvre effective.
La semaine dernière, trois associations; le Planning familial, SOS homophobie et Sidaction ont décidé d’attaquer l’État en justice, pour vous mettre devant vos responsabilités. Elles gagneront, car elles ont raison.
Ma question est donc la suivante : pouvez-vous enfin reconnaître, madame la ministre, que la loi n’est pas appliquée, et nous indiquer ce que vous prévoyez pour y remédier ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’enseignement et de la formation professionnels.
Mme Carole Grandjean, ministre déléguée auprès du ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion et du ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse, chargée de l’enseignement et de la formation professionnels. Madame la sénatrice Marie-Pierre Monier, aujourd’hui, en cette Journée internationale des droits des femmes, vous posez une question sur l’éducation à la sexualité, qui concerne les filles comme les garçons.
Vous l’avez dit, il s’agit d’une mission du ministère de l’éducation nationale, mise en place par la loi du 4 juillet 2001. Depuis lors, chaque année, trois séances d’éducation à la sexualité adaptées à leurs âges doivent pouvoir être dispensées aux élèves.
Dès son arrivée, le ministre de l’éducation nationale, dont je vous prie d’excuser l’absence, a lancé une enquête, afin de connaître la réalité de ces cours dans l’ensemble du territoire.
Il a également envoyé deux circulaires aux inspecteurs de l’éducation nationale et aux chefs d’établissement pour que ces cours soient effectivement dispensés. Or il s’avère que des progrès doivent pouvoir être faits en la matière.
C’est tout le sens du plan interministériel lancé par Mme la Première ministre, qui prévoit, dans son axe 4, un renforcement de l’éducation à la sexualité, laquelle accompagne l’acculturation aux enjeux.
C’est également tout le sens de l’enquête annuelle sur la réalité des actions mises en œuvre, ainsi que du plan de formation du personnel de l’éducation nationale.
Vous avez évoqué les trois associations qui ont attaqué l’État pour la non-mise en œuvre de la loi de 2001. Permettez-moi de m’en étonner, dans la mesure où celles-ci interviennent dans nos établissements, travaillent avec nous et sont parfois financées par l’État. Certes, elles ont tout à fait le droit de déposer ce recours ; toutefois, je tiens à le dire, nous n’avons pas attendu leur action pour nous engager en la matière. (Exclamations sur les travées du groupe SER.)
M. Hussein Bourgi. Donnez-leur des moyens !
Mme Carole Grandjean, ministre déléguée. L’éducation à la sexualité est une grande cause portée par le Président de la République, qui fait l’objet d’un plan lancé par Mme la Première ministre. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
eau
M. le président. La parole est à M. Guillaume Chevrollier, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Guillaume Chevrollier. Monsieur le ministre de la transition écologique, les importants épisodes de sécheresse de l’été dernier n’étaient finalement que les prémices d’une pénurie qui s’installe désormais dans la durée.
À ce jour, nous avons deux mois de retard sur la recharge des nappes phréatiques. Une telle sécheresse hivernale est inédite.
L’accès à l’eau potable, que l’on croyait garanti à tous nos concitoyens, est aujourd’hui menacé, d’autant que nous constatons la réduction des débits des cours d’eau, qui entraîne une concentration des micropolluants et pose un vrai problème sanitaire pour la potabilité de l’eau.
Au-delà de nos concitoyens, la tension sur l’eau a bien entendu un impact sur le fonctionnement de nos entreprises, de notre agriculture – cultures et élevage – et des centrales nucléaires.
Le Sénat a mené de nombreux travaux autour de cette problématique, en présentant plusieurs pistes pour améliorer notre gestion de l’eau, qu’il s’agisse de la conciliation des usages, de la sensibilisation du grand public à la sobriété, des retenues d’eau ou de la nécessaire modernisation de l’irrigation pour nos agriculteurs.
Les propositions ne manquent pas, mais elles ont besoin de financement.
Monsieur le ministre, dans ce contexte qui nous préoccupe tous, plusieurs départements ont d’ores et déjà été placés en situation d’alerte sécheresse. Il est évident que le temps est non plus à la réaction, mais à l’anticipation indispensable et à l’adaptation de notre pays au changement climatique.
Monsieur le ministre, ma question est simple : pouvez-vous nous exposer de façon très concrète votre politique d’anticipation pour ce qui concerne l’eau ? À défaut d’avoir anticipé la crise de l’énergie, le Gouvernement prendra-t-il toutes les mesures nécessaires, afin de faire face à la crise de l’eau ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Monsieur le sénateur Guillaume Chevrollier, plus de 700 communes ont été privées d’eau potable l’été dernier et 1 260 cours d’eau ont été en rupture d’écoulement, compte tenu de l’épisode de sécheresse que nous avons connu.
À la fin de l’été, alors que le niveau des nappes était particulièrement bas, la période de recharge, jusqu’à ce début de semaine, n’a pas permis de recharger les nappes. Pire, à la suite d’un mois de février très sec, la situation s’est aggravée. Ainsi, les chiffres que vous donnez concernant les deux mois de retard, en moyenne, des nappes phréatiques sont une réalité.
Depuis vingt-quatre heures, nous avons des épisodes de pluies abondantes, lesquelles, malheureusement, ne concerneront ni le pourtour méditerranéen ni le couloir rhodanien. Certes, on peut penser et espérer que, sur une large partie nord du pays, nous aurons des pluies permettant un niveau de recharge.
Quand on parle de deux mois de retard, il s’agit non pas de deux mois de retard par rapport à la moyenne, mais de deux mois de retard par rapport à la situation d’avant l’été 2022. Une telle situation explique la préoccupation qui est la nôtre.
Ce que nous disent les experts, c’est qu’on pourrait avoir entre 10 % et 40 % de volume de pluie en moins, avec, parfois, des épisodes pluvieux trop intenses pour permettre une recharge des nappes dans de bonnes conditions. Il convient donc de lutter contre l’artificialisation et d’œuvrer en faveur de la perméabilité des sols. Sinon, la situation s’aggravera.
À très court terme, un comité d’anticipation et de suivi hydrologique s’est réuni dès le 23 février. Les préfets de bassin ont été réunis le 27 février, et tous les préfets, lundi dernier. Partout, il convient de prendre dès maintenant, si la situation le justifie, des mesures habituellement prises plus tard.
La suite interviendra dans quelques jours. Le plan « eau » comprend plus de cinquante mesures. Nous nous sommes inspirés des travaux du Sénat. Comme tout était écrit, je n’ai pas conduit des auditions avec mes collègues pour entendre les uns et les autres. Mais nous avons lu avec beaucoup d’attention les rapports sur les mesures préconisées. Vous retrouverez ainsi une partie de vos préconisations dans ce qui sera présenté, qui traitera de quantité, de qualité et de gouvernance.
L’enjeu, il est devant nous. Il nécessite une union sacrée, car, vous l’avez dit, l’eau c’est la vie. Elle est nécessaire pour l’agriculture, pour l’industrie et, bien sûr, pour nos concitoyens. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. Emmanuel Capus. Excellent !
M. le président. La parole est à M. Guillaume Chevrollier, pour la réplique.
M. Guillaume Chevrollier. Je vous remercie, monsieur le ministre, de vous inspirer des travaux du Sénat. Effectivement, dans cette crise de l’eau, le soutien financier aux collectivités locales est indispensable. Elles ont la connaissance et la maîtrise du terrain et sauront trouver les solutions les plus adaptées pour une eau, comme vous l’avez dit, « en quantité et en qualité ».
Dans le cadre d’éventuelles mesures de restriction, le Gouvernement doit informer de façon transparente, et même limpide, si j’ose dire, afin de permettre l’acceptabilité des contraintes. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
devenir de la pêche au chalut
M. le président. La parole est à M. Michel Canévet, pour le groupe Union centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Michel Canévet. Monsieur le président, madame la Première ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, la France est un grand pays maritime et nous tenons à ce qu’il le demeure. Toutefois, la filière halieutique connaît, il est vrai, de nombreuses difficultés.
Ainsi, le PAI, le plan d’accompagnement individuel, prévoit de sortir 90 navires de la flotte française. Je pense également aux inquiétudes liées au carburant, dont le coût met en péril l’équilibre économique de nombreux armements. Des solutions doivent être trouvées.
Par ailleurs, les pêcheurs « en ont marre » d’être culpabilisés – d’être montrés du doigt – par les prises accessoires de dauphins, liées à l’augmentation de la population de cette espèce dans l’océan Atlantique.
Toutefois, la principale source d’inquiétude est liée au projet d’interdiction du chalutage dans les aires maritimes protégées, proposé par la Commission européenne voilà quelques jours. En effet, imagine-t-on que, demain, on ne puisse plus aller pêcher les coquilles Saint-Jacques en baie Saint-Brieuc ? Imagine-t-on qu’on ne puisse plus, demain, manger des langoustines ou de la lotte pêchée au large de l’archipel des Glénan ? (Exclamations amusées. – Françoise Gatel applaudit.) Imagine-t-on encore qu’on ne puisse plus manger les huîtres de pleine mer, tout simplement parce qu’on ne pourrait pas les récupérer ? Non !
Je souhaite donc connaître la position du Gouvernement sur cette proposition de la Commission européenne. De manière plus générale, quelles sont les propositions faites pour accompagner la filière pêche dans les difficultés qu’elle rencontre aujourd’hui ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé de la mer.
M. Hervé Berville, secrétaire d’État auprès de la Première ministre, chargé de la mer. Monsieur le sénateur Michel Canévet, je vous remercie de votre mobilisation dans ce magnifique territoire qu’est le Finistère pour le maintien et le développement de la filière pêche française.
Vous l’avez dit, la proposition de la Commission européenne d’interdire tout engin de fond dans les aires marines protégées a été évoquée voilà quelques semaines à Bruxelles.
Je le dis très clairement – cela a été rappelé par la Première ministre et le Président de la République au salon de l’agriculture et par moi-même, voilà deux semaines, lorsque je me suis rendu dans le Calvados – : la France est totalement, clairement et fermement opposée à cette proposition d’interdiction des engins de fond dans les aires marines protégées, et ce pour au moins trois raisons.
Mme Laurence Rossignol. Ah bon ? C’est honteux !
M. Bernard Jomier. On parle d’aires protégées !
M. Hervé Berville, secrétaire d’État. Premièrement, une telle proposition méconnaît les efforts menés depuis des années par les pêcheurs, lesquels ont permis la reconstitution de nombreux stocks, dont ceux de coquilles Saint-Jacques. Sur ce sujet, je connais l’attachement du sénateur Alain Cadec. (M. Stéphane Le Rudulier applaudit.)
Deuxièmement, cette proposition représente une prime aux mauvais élèves ! En effet, tous les pays ayant créé des aires marines protégées se retrouveraient sanctionnés et obligés d’interdire ces engins de fond.
Troisièmement, l’adoption d’une telle proposition constituerait une folie pour la souveraineté alimentaire de notre pays. Nous dépendons déjà à plus de 80 % – un très bon texte du sénateur Alain Cadec avait évoqué ce sujet – des importations pour les produits de la pêche. Et nous continuerions à augmenter ces importations !…
Nous le disons très clairement, il faut arrêter d’opposer le développement de la filière halieutique à la protection de la biodiversité marine. Nous pouvons traiter ces deux questions de front, nous l’avons démontré en France depuis des années.
La priorité du Gouvernement, c’est de faire en sorte d’avoir des capacités de production, d’entraîner toute la filière vers la décarbonation et la réduction de la dépendance aux énergies fossiles. Nous avons témoigné notre engagement en soutenant la filière avec, par quatre fois, la prolongation des aides aux carburants. Nous défendons, partout sur le territoire, cette belle filière. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP, ainsi que sur des travées du groupe UC.)
Mme Françoise Gatel. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Michel Canévet, pour la réplique.
M. Michel Canévet. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État, de cet engagement fort du Gouvernement, qui touche à une question de souveraineté. Les marins-pêcheurs l’attendent.
En effet, Alain Cadec, même s’il est plutôt un pêcheur d’ormeaux (Sourires.), est aussi attaché à ces questions. Nous sommes tous mobilisés. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et INDEP.)
M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d’actualité au Gouvernement.
Notre prochaine séance de questions d’actualité au Gouvernement aura lieu le mercredi 15 mars, à quinze heures.
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures vingt, est reprise à seize heures trente-cinq, sous la présidence de M. Vincent Delahaye.)
PRÉSIDENCE DE M. Vincent Delahaye
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
3
Candidatures à une éventuelle commission mixte paritaire
M. le président. J’informe le Sénat que des candidatures pour siéger au sein de l’éventuelle commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 ont été publiées.
Ces candidatures seront ratifiées si la présidence n’a pas reçu d’opposition dans le délai d’une heure prévu par notre règlement.
4
Candidatures à une commission mixte paritaire
M. le président. J’informe également le Sénat que des candidatures pour siéger au sein de la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi tendant à renforcer l’équilibre dans les relations commerciales entre fournisseurs et distributeurs ont été publiées.
Ces candidatures seront ratifiées si la présidence n’a pas reçu d’opposition dans le délai d’une heure prévu par notre règlement.
5
Conférence des présidents
M. le président. Les conclusions adoptées par la conférence des présidents, réunie ce jour, sont consultables sur le site internet du Sénat.
En l’absence d’observations, je les considère comme adoptées.
Conclusions de la conférence des présidents
SEMAINE RÉSERVÉE PAR PRIORITÉ AU GOUVERNEMENT
Mercredi 8 mars 2023
À 15 heures
- Questions d’actualité au Gouvernement
• Délai limite pour l’inscription des auteurs de questions : mercredi 8 mars à 11 heures
À 16 h 30, le soir et la nuit
- Suite du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023, dont le Sénat est saisi en application de l’article 47-1, alinéa 2, de la Constitution (texte n° 368, 2022-2023)
Jeudi 9 mars 2023
À 10 h 30, 14 h 30, le soir et la nuit
- Suite du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023, dont le Sénat est saisi en application de l’article 47-1, alinéa 2, de la Constitution (texte n° 368, 2022-2023)
Vendredi 10 mars 2023
À 9 h 30, 14 h 30, le soir et la nuit
- Suite du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023, dont le Sénat est saisi en application de l’article 47-1, alinéa 2, de la Constitution (texte n° 368, 2022-2023)
Samedi 11 mars 2023
À 9 h 30, 14 h 30, le soir et la nuit
- Suite du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023, dont le Sénat est saisi en application de l’article 47-1, alinéa 2, de la Constitution (texte n° 368, 2022-2023)
Dimanche 12 mars 2023
À 9 h 30, 14 h 30 et le soir
- Suite du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023, dont le Sénat est saisi en application de l’article 47-1, alinéa 2, de la Constitution (texte n° 368, 2022-2023)
SEMAINE SÉNATORIALE
Mardi 14 mars 2023
À 14 h 30 et le soir
- Proposition de loi organique visant à permettre à Saint-Barthélemy de participer à l’exercice de compétences de l’État, présentée par Mme Micheline Jacques (texte de la commission n° 405, 2022-2023) (demande du groupe Les Républicains)
Ce texte a été envoyé à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale avec une saisine pour avis de la commission des affaires sociales.
• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 6 mars à 12 heures
• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 8 mars matin
• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : lundi 13 mars à 12 heures
• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mardi 14 mars à 14 heures
• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 13 mars à 15 heures
- Proposition de loi visant à faciliter la mise en œuvre des objectifs de « zéro artificialisation nette » au cœur des territoires, présentée par M. Jean-Baptiste Blanc, Mme Valérie Létard et plusieurs de leurs collègues (procédure accélérée ; texte n° 205, 2022-2023) (demande de la commission spéciale)
Ce texte a été envoyé à une commission spéciale.
• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : vendredi 3 mars à 12 heures
• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 8 mars après-midi
• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : lundi 13 mars à 12 heures
• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mardi 14 mars matin
• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 13 mars à 15 heures
Mercredi 15 mars 2023
À 15 heures
- Questions d’actualité au Gouvernement
• Délai limite pour l’inscription des auteurs de questions : mercredi 15 mars à 11 heures
De 16 h 30 à 20 h 30
(Ordre du jour réservé au groupe UC)
- Proposition de loi visant à adapter la défense extérieure contre l’incendie à la réalité des territoires ruraux, présentée par M. Hervé Maurey, Mme Françoise Gatel et plusieurs de leurs collègues (texte de la commission n° 377, 2022-2023)
Ce texte a été envoyé à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale.
• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 27 février à 12 heures
• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 1er mars matin
• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : jeudi 9 mars à 12 heures
• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mercredi 15 mars matin
• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 45 minutes
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mardi 14 mars à 15 heures
- Proposition de loi tendant à garantir la continuité de la représentation des communes au sein des conseils communautaires, présentée par Mme Françoise Gatel et plusieurs de ses collègues (texte de la commission n° 379, 2021-2022)
Ce texte a été envoyé à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale.
• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 27 février à 12 heures
• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 1er mars matin
• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : jeudi 9 mars à 12 heures
• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mercredi 15 mars matin
• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 45 minutes
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mardi 14 mars à 15 heures
Le soir
- Débat préalable à la réunion du Conseil européen des 23 et 24 mars 2023
• Intervention liminaire du Gouvernement
• 5 minutes attribuées respectivement à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, à la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, à la commission des finances et à la commission des affaires européennes
• Temps attribué aux orateurs des groupes : 1 h 30
• Réponse du Gouvernement
• Conclusion par la commission des affaires européennes : 5 minutes
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : mardi 14 mars à 15 heures
Jeudi 16 mars 2023
À 9 heures
- Sous réserve de leur dépôt, conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 (demande du Gouvernement en application de l’article 48, alinéa 3, de la Constitution)
• Lors de la séance, seuls peuvent intervenir le Gouvernement, le représentant de la commission saisie au fond pour une durée ne pouvant excéder cinq minutes et, pour explication de vote, un représentant par groupe pour une durée ne pouvant excéder cinq minutes chacun ainsi qu’un représentant des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe pour une durée ne pouvant excéder trois minutes
• Délai limite pour les inscriptions des orateurs des groupes : mercredi 15 mars à 15 heures
De 10 h 30 à 13 heures et de 14 h 30 à 16 heures
(Ordre du jour réservé au groupe Les Indépendants)
- Proposition de loi visant à mieux protéger les locataires bénéficiant d’une allocation de logement et vivant dans un habitat non décent, présentée par M. Jean-Louis Lagourgue et plusieurs de ses collègues (texte n° 821, 2021-2022)
Ce texte a été envoyé à la commission des affaires économiques.
• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 6 mars à 12 heures
• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 8 mars à 9 h 30
• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : lundi 13 mars à 12 heures
• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mercredi 15 mars à 9 h 30
• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 15 mars à 15 heures
- Proposition de loi relative aux outils de lutte contre la désertification médicale des collectivités, présentée par M. Dany Wattebled et plusieurs de ses collègues (texte n° 102, 2022-2023)
Ce texte a été envoyé à la commission des affaires sociales.
• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 6 mars à 12 heures
• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 8 mars matin
• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : lundi 13 mars à 12 heures
• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mercredi 15 mars matin
• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 15 mars à 15 heures
De 16 heures à 20 heures
(Ordre du jour réservé au groupe RDSE)
- Proposition de loi visant à permettre une gestion différenciée de la compétence « Eau et Assainissement », présentée par M. Jean-Yves Roux et plusieurs de ses collègues (texte de la commission n° 382, 2021-2022)
Ce texte a été envoyé à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale.
• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 27 février à 12 heures
• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 1er mars matin
• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : jeudi 9 mars à 12 heures
• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mercredi 15 mars matin
• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 45 minutes
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 15 mars à 15 heures
- Proposition de loi portant réforme de la loi du 9 février 1895 sur les fraudes en matière artistique, présentée par M. Bernard Fialaire et plusieurs de ses collègues (texte de la commission n° 403, 2022-2023)
Ce texte a été envoyé à la commission de la culture, de l’éducation et de la communication.
• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 6 mars à 12 heures
• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 8 mars matin
• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : lundi 13 mars à 12 heures
• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mercredi 15 mars matin
• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 45 minutes
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 15 mars à 15 heures
SEMAINE RÉSERVÉE PAR PRIORITÉ AU GOUVERNEMENT
Mardi 21 mars 2023
À 9 h 30
- Questions orales
À 14 h 30 et le soir
- deux conventions internationales examinées selon la procédure d’examen simplifié :
=> Projet de loi autorisant l’approbation de l’accord de sécurité sociale du 6 novembre 2014 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Serbie (procédure accélérée ; texte n° 81, 2022-2023)
=> Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume des Pays-Bas relatif à la coopération en matière de défense et au statut de leurs forces sur les territoires caribéens et sud-américain de la République française et du Royaume des Pays-Bas (texte n° 288, 2022-2023)
• Délai limite pour demander le retour à la procédure normale : vendredi 17 mars à 15 heures
- Sous réserve de leur dépôt, conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi visant à ouvrir le tiers-financement à l’État, à ses établissements publics et aux collectivités territoriales pour favoriser les travaux de rénovation énergétique (procédure accélérée)
• Lors de la séance, seuls peuvent intervenir le Gouvernement, le représentant de la commission saisie au fond pour une durée ne pouvant excéder cinq minutes et, pour explication de vote, un représentant par groupe pour une durée ne pouvant excéder cinq minutes chacun ainsi qu’un représentant des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe pour une durée ne pouvant excéder trois minutes
• Délai limite pour les inscriptions des orateurs des groupes : lundi 20 mars à 15 heures
- Sous réserve de leur dépôt, conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi tendant à renforcer l’équilibre dans les relations commerciales entre fournisseurs et distributeurs
• Lors de la séance, seuls peuvent intervenir le Gouvernement, le représentant de la commission saisie au fond pour une durée ne pouvant excéder cinq minutes et, pour explication de vote, un représentant par groupe pour une durée ne pouvant excéder cinq minutes chacun ainsi qu’un représentant des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe pour une durée ne pouvant excéder trois minutes
• Délai limite pour les inscriptions des orateurs des groupes : lundi 20 mars à 15 heures
- Proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, visant à mieux protéger et accompagner les enfants victimes et covictimes de violences intrafamiliales (texte de la commission n° 401, 2022-2023)
Ce texte a été envoyé à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale.
• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 6 mars à 12 heures
• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 8 mars matin
• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : jeudi 16 mars à 12 heures
• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mardi 21 mars à 14 heures
• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 20 mars à 15 heures
- Proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant fusion des filières à responsabilité élargie des producteurs d’emballages ménagers et des producteurs de papier et amplification des encarts publicitaires destinés à informer le public sur la transition écologique (texte n° 305, 2022-2023)
Ce texte a été envoyé à la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable.
• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : vendredi 10 mars à 12 heures
• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 15 mars matin
• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : lundi 20 mars à 12 heures
• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mardi 21 mars matin
• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 20 mars à 15 heures
Mercredi 22 mars 2023
À 15 heures
- Questions d’actualité au Gouvernement
• Délai limite pour l’inscription des auteurs de questions : mercredi 22 mars à 11 heures
À 16 h 30 et, éventuellement, le soir
- Débat à la suite du dépôt du rapport public annuel de la Cour des comptes (demande de la Conférence des Présidents)
• Présentation du rapport annuel
• Temps attribué au groupe à la commission des finances : 10 minutes
• Temps attribué à la commission des affaires sociales : 10 minutes
• Temps attribué aux orateurs des groupes : 1 heure
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : mardi 21 mars à 15 heures
- Éventuellement, suite de la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant fusion des filières à responsabilité élargie des producteurs d’emballages ménagers et des producteurs de papier et amplification des encarts publicitaires destinés à informer le public sur la transition écologique (texte n° 305, 2022-2023)
SEMAINE RÉSERVÉE PAR PRIORITÉ AU GOUVERNEMENT
Mardi 28 mars 2023
À 14 h 30 et le soir
- Projet de loi pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration (procédure accélérée ; texte n° 304, 2022-2023)
Ce texte a été envoyé à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale.
• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : vendredi 10 mars à 17 heures
• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 15 mars matin
• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : jeudi 23 mars à 12 heures
• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mardi 28 mars à 9 h 30 et 13 h 30 et mercredi 29 mars matin
• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 27 mars à 15 heures
Mercredi 29 mars 2023
À 15 heures
- Questions d’actualité au Gouvernement
• Délai limite pour l’inscription des auteurs de questions : mercredi 29 mars à 11 heures
À 16 h 30 et le soir
- Suite du projet de loi pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration (procédure accélérée ; texte n° 304, 2022-2023)
Jeudi 30 mars 2023
À 10 h 30, 14 h 30 et le soir
- Suite du projet de loi pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration (procédure accélérée ; texte n° 304, 2022-2023)
Éventuellement, vendredi 31 mars 2023
À 9 h 30, 14 h 30 et le soir
- Suite du projet de loi pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration (procédure accélérée ; texte n° 304, 2022-2023)
SEMAINE SÉNATORIALE
Mardi 4 avril 2023
À 9 h 30
- Questions orales
À 14 h 30 et le soir
- Explications de vote des groupes puis scrutin public solennel sur le projet de loi pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration (procédure accélérée ; texte n° 304, 2022-2023)
• Temps attribué aux orateurs des groupes pour les explications de vote, à raison d’un orateur par groupe : 7 minutes pour chaque groupe et 3 minutes pour les sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe
• Délai limite pour les inscriptions de parole : lundi 3 avril à 15 heures
• Délai limite pour le dépôt des délégations de vote : mardi 4 avril à 12 h 30
- Proposition de loi créant une résidence d’attache pour les Français établis hors de France, présentée par M. Le Gleut et plusieurs de ses collègues (texte n° 843, 2021-2022) (demande du groupe Les Républicains)
Ce texte a été envoyé à la commission des finances.
• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 27 mars à 12 heures
• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 29 mars matin
• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : lundi 3 avril à 12 heures
• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mardi 4 avril en début d’après-midi
• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 3 avril à 15 heures
- Proposition de loi visant à renforcer la prévention et la lutte contre l’intensification et l’extension du risque incendie, présentée par M. Bacci, Mme Loisier, MM. Martin et Rietmann (texte n° 206, 2022-2023) (demande de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable et de la commission des affaires économiques)
Ce texte a été envoyé à la commission spéciale.
• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : vendredi 24 mars à 12 heures
• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mardi 28 mars en début d’après-midi
• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : lundi 3 avril à 12 heures
• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mardi 4 avril en début d’après-midi
• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 3 avril à 15 heures
Mercredi 5 avril 2023
À 15 heures
- Questions d’actualité au Gouvernement
• Délai limite pour l’inscription des auteurs de questions : mercredi 5 avril à 11 heures
De 16 h 30 à 20 h 30
(Ordre du jour réservé au groupe UC)
- Deuxième lecture de la proposition de loi, modifiée par l’Assemblée nationale en première lecture, visant à favoriser l’accès de tous les étudiants à une offre de restauration à tarif modéré (texte n° 38, 2021-2022)
Ce texte a été envoyé à la commission de la culture, de l’éducation et de la communication.
• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 27 mars à 12 heures
• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 29 mars matin
• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : lundi 3 avril à 12 heures
• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mercredi 5 avril matin
• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 45 minutes
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mardi 4 avril à 15 heures
- Proposition de loi visant à renforcer l’accès des femmes aux responsabilités dans la fonction publique, présentée par Mmes Billon, Filleul, Vérien et plusieurs de leurs collègues (texte n° 123, 2022-2023)
Ce texte a été envoyé à la commission des lois.
• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 27 mars à 12 heures
• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 29 mars matin
• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : lundi 3 avril à 12 heures
• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mercredi 5 avril matin
• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 45 minutes
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mardi 4 avril à 15 heures
Le soir
- Éventuellement, suite de la proposition de loi visant à renforcer la prévention et la lutte contre l’intensification et l’extension du risque incendie, présentée par M. Bacci, Mme Loisier, MM. Martin et Rietmann (texte n° 206, 2022-2023)
Jeudi 6 avril 2023
De 10 h 30 à 13 heures puis de 14 h 30 à 16 heures
(Ordre du jour réservé au groupe CRCE)
- Proposition de loi visant à revaloriser le statut de secrétaire de mairie, présentée par Mmes Brulin, Cukierman, Gréaume, Varaillas, Assassi et plusieurs de leurs collègues (texte n° 598, 2021-2022)
Ce texte a été envoyé à la commission des lois.
• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 27 mars à 12 heures
• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 29 mars matin
• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : lundi 3 avril à 12 heures
• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mercredi 5 avril matin
• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 5 avril à 15 heures
- Proposition de loi relative à la maîtrise de l’organisation algorithmique du travail, présentée par M. Savoldelli, Mmes Apourceau-Poly, Cohen et plusieurs de leurs collègues (texte n° 770, 2021-2022)
Ce texte a été envoyé à la commission des affaires sociales.
• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 27 mars à 12 heures
• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 29 mars matin
• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : lundi 3 avril à 12 heures
• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mercredi 5 avril matin
• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 5 avril à 15 heures
De 16 heures à 20 heures
(Ordre du jour réservé au groupe SER)
- Proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, visant à protéger le groupe Électricité de France d’un démembrement (texte n° 341, 2022-2023)
Ce texte a été envoyé à la commission des finances.
• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 27 mars à 12 heures
• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 29 mars matin
• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : lundi 3 avril à 12 heures
• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mercredi 5 avril matin
• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 45 minutes
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 5 avril à 15 heures
- Proposition de loi constitutionnelle visant à créer une loi de financement des collectivités territoriales et de leurs groupements et à garantir la compensation financière des transferts de compétences, présentée par M. Kerrouche et plusieurs de ses collègues (texte n° 869 rectifié, 2021-2022)
Ce texte a été envoyé à la commission des lois, avec une saisine pour avis de la commission des finances.
• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 27 mars à 12 heures
• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 29 mars matin
• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : lundi 3 avril à 12 heures
• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mercredi 5 avril matin
• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 45 minutes
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 5 avril à 15 heures
SEMAINE DE CONTRÔLE
Mardi 11 avril 2023
À 14 h 30 et le soir
- Débat sur le thème « L’avenir de la ressource en eau : comment en améliorer la gestion ? » (demande de la délégation sénatoriale à la prospective)
• Temps attribué à la délégation sénatoriale à la prospective : 8 minutes
• Temps attribué aux orateurs des groupes : 1 heure
• Possibilité pour le Gouvernement de prendre la parole après chaque orateur pour une durée de 2 minutes ; possibilité pour l’orateur de répliquer pendant 1 minute
• Temps de réponse du Gouvernement : 5 minutes
• Conclusion par la délégation sénatoriale à la prospective : 5 minutes
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : vendredi 7 avril à 15 heures
- Débat sur le thème « Harcèlement scolaire : quel plan d’action pour des résultats concrets ? » (demande du groupe Les Républicains)
• Temps attribué au groupe Les Républicains : 8 minutes
• Réponse du Gouvernement pour une durée équivalente
• Après la réponse du Gouvernement, séquence de 16 questions-réponses :
2 minutes, y compris la réplique
Possibilité de réponse du Gouvernement pour une durée équivalente
Possibilité pour le Gouvernement de répondre à une réplique pendant 1 minute et à l’auteur de la question de répondre de nouveau pendant 1 minute
• Conclusion par le groupe Les Républicains : 5 minutes
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : vendredi 7 avril à 15 heures
- Proposition de loi pour une école de la liberté, de l’égalité des chances et de la laïcité, présentée par M. Brisson et plusieurs de ses collègues (texte n° 320, 2022-2023) (demande du groupe Les Républicains)
Ce texte a été envoyé à la commission de la culture, de l’éducation et de la communication.
• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 3 avril à 12 heures
• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 5 avril matin
• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : vendredi 7 avril à 12 heures
• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mardi 11 avril en début d’après-midi
• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : vendredi 7 avril à 15 heures
Mercredi 12 avril 2023
À 15 heures
- Questions d’actualité au Gouvernement
• Délai limite pour l’inscription des auteurs de questions : mercredi 12 avril à 11 heures
À 16 h 30
- Débat d’actualité
• Délai limite de transmission par les groupes des propositions de thème et de format : mardi 4 avril à 15 heures
• Délai limite pour les inscriptions de parole : mardi 11 avril à 15 heures
- Sous réserve de leur dépôt, conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif aux jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 et portant diverses autres dispositions (demande du Gouvernement)
• Lors de la séance, seuls peuvent intervenir le Gouvernement, le représentant de la commission saisie au fond pour une durée ne pouvant excéder cinq minutes et, pour explication de vote, un représentant par groupe pour une durée ne pouvant excéder cinq minutes chacun ainsi qu’un représentant des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe pour une durée ne pouvant excéder trois minutes
• Délai limite pour les inscriptions des orateurs des groupes : mardi 11 avril à 15 heures
- Débat sur la pollution lumineuse (demande de l’office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques)
• Temps attribué à l’office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques : 8 minutes
• Réponse du Gouvernement pour une durée équivalente
• Après la réponse du Gouvernement, séquence de 16 questions-réponses :
2 minutes, y compris la réplique
Possibilité de réponse du Gouvernement pour une durée équivalente
Possibilité pour le Gouvernement de répondre à une réplique pendant 1 minute et à l’auteur de la question de répondre de nouveau pendant 1 minute
• Conclusion par l’office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques : 5 minutes
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : mardi 11 avril à 15 heures
Jeudi 13 avril 2023
À 10 h 30
- Questions orales
À 14 h 30
- Débat sur l’état de la justice dans les outre-mer (demande du groupe SER)
• Temps attribué au groupe Socialiste, Écologiste et Républicain : 8 minutes
• Réponse du Gouvernement pour une durée équivalente
• Après la réponse du Gouvernement, séquence de 16 questions-réponses :
2 minutes, y compris la réplique
Possibilité de réponse du Gouvernement pour une durée équivalente
Possibilité pour le Gouvernement de répondre à une réplique pendant 1 minute et à l’auteur de la question de répondre de nouveau pendant 1 minute
• Conclusion par le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain : 5 minutes
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : mercredi 12 avril à 15 heures
Suspension des travaux en séance plénière :
du lundi 17 au dimanche 30 avril 2023
Prochaine réunion de la conférence des présidents :
mercredi 5 avril 2023 à 14 heures
6
Salut en séance aux auditeurs de l’Institut du Sénat
M. le président. Messieurs les ministres, mes chers collègues, je suis heureux de saluer la présence dans nos tribunes des auditrices et des auditeurs de la sixième promotion de l’Institut du Sénat. (Applaudissements.)
Sur l’initiative de notre ancien collègue Jean-Léonce Dupont, le bureau du Sénat avait décidé, en 2015, de mettre en œuvre ce programme de formation en vue de mieux faire connaître les modalités de fonctionnement et les enjeux de notre démocratie parlementaire à des personnalités d’horizons géographiques et professionnels très divers.
Les dix-huit auditeurs de cette sixième promotion, issus d’une dizaine de départements différents, représentent en effet toutes les sphères d’activité professionnelle : publique, économique, agricole, sportive, éducative, universitaire ou encore scientifique.
Tout au long de leurs travaux, qui ont commencé ce matin et s’achèveront à la fin du mois de juin, ils rencontreront plusieurs de nos collègues sénateurs et des fonctionnaires du Sénat.
En votre nom à tous, je leur souhaite une excellente session au Sénat, et je suis certain que, à l’issue de ces trois mois, ils pourront être les témoins privilégiés de la place essentielle de notre institution au sein de la Ve République et de la qualité du travail parlementaire. (Nouveaux applaudissements.)
7
Loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023
Suite de la discussion d’un projet de loi
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023, dont le Sénat est saisi en application de l’article 47-1, alinéa 2, de la Constitution (projet n° 368, rapport n° 375, avis n° 373).
Rappels au règlement
M. le président. La parole est à M. Pierre Laurent, pour un rappel au règlement.
M. Pierre Laurent. Mon rappel au règlement s’appuie sur l’article 44 bis de notre règlement.
Parmi les mesures déclenchées cette nuit pour accélérer la clôture autoritaire des débats sur l’article 7 et sur le projet de loi relatif aux retraites, la commission des affaires sociales a invoqué l’article 44 bis du règlement pour déclarer irrecevables plusieurs centaines de sous-amendements qui ont été déposés après la réécriture de l’article 7, et qui sont devenus subitement irrecevables alors que les amendements qu’ils reproduisaient avaient, eux, été déclarés recevables par la même commission. La présidente Deroche – cela figure au compte rendu – a d’ailleurs reconnu qu’il s’agissait des mêmes amendements !
Mais le vice-président Karoutchi nous a en quelque sorte livré l’explication de texte : à partir du moment où l’article réécrit devenait un amendement, cela rendrait impossible de le sous-amender en en contestant le sens. Et, en effet, l’article 44 bis du règlement rend impossible le dépôt d’un sous-amendement contraire à l’amendement auquel il s’applique.
Reste qu’il y a là un détournement du sens de notre règlement ! Si nous acceptons cette interprétation, en effet, alors il suffit de transformer un article entier – c’est ainsi que les choses se sont passées cette nuit – en un amendement de réécriture pour le rendre inamendable ! En d’autres termes, l’article, qui est en lui-même constitutionnellement amendable et contestable, devient, par le jeu d’une réécriture, un amendement, en tant que tel inamendable.
Il y va donc bien d’une atteinte de fait au droit constitutionnel d’amendement des parlementaires.
M. David Assouline. C’est grave ! Très grave, même !
M. Pierre Laurent. Il nous faut donc être extrêmement vigilants, mes chers collègues, quant à ce précédent – car c’est un précédent qui a été créé –, qui ouvre la porte à toutes les manipulations contre le droit d’amendement.
M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue.
M. Pierre Laurent. Et je dis à nos collègues du groupe Les Républicains : si vous voulez assumer le vote de ce projet de loi, faites-le (Marques d’impatience sur les travées du groupe Les Républicains.),…
M. le président. Votre temps de parole est écoulé.
M. Pierre Laurent. … mais ne manipulez pas le règlement du Sénat ! (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST.)
M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour un rappel au règlement.
Mme Céline Brulin. Mon rappel au règlement se fonde sur l’article 44 de la Constitution : « Les membres du Parlement et le Gouvernement ont le droit d’amendement. »
Cette nuit, en effet, des sous-amendements ont été déclarés irrecevables sans même avoir été examinés par la commission, de l’aveu même de sa présidente ! Nombre des nôtres avaient trait à des demandes de précision technique manifestement parfaitement recevables.
Ce droit inaliénable d’amendement a été utilisé par la commission pour reformuler l’article 7 dans une version quasi identique au texte originel, dans le seul but de faire disparaître les amendements des groupes de gauche, qui relaient dans cette enceinte les préoccupations de nos concitoyens, hier encore mobilisés très massivement.
Ces amendements portaient par exemple sur l’allongement de la durée de cotisation ou sur le report de l’âge légal de départ à la retraite, ces sujets sur lesquels vous nous disiez vouloir débattre !
Que n’a-t-on entendu ici sur l’examen de ce texte à l’Assemblée nationale ? Mais ce qui se passe au Sénat est l’autre face d’une même pièce : il s’agit toujours d’empêcher le travail parlementaire sur ce texte ; et cela n’honore pas le Sénat ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Où est passée la « sagesse » que vous convoquez régulièrement, mes chers collègues ? Où est la rigueur légendaire du Sénat ? Disparue dans de basses manœuvres, qui n’effaceront pas, mes chers collègues, la détermination du peuple français à rejeter cette très mauvaise réforme ! (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST. – M. Daniel Breuiller applaudit également.)
Mme Cathy Apourceau-Poly. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour un rappel au règlement.
M. Fabien Gay. Mon rappel au règlement se fonde sur le même article de la Constitution.
Je m’exprime devant vous avec solennité, mes chers collègues, et animé d’une colère froide. Nos débats sont très suivis à l’extérieur. Beaucoup nous ont dit qu’ils comptaient sur nous toutes et nous tous pour échanger et avoir un débat de fond sur ce texte ainsi que, pour ce qui concerne les élus de gauche, pour nous y opposer et y faire échec, car nous sommes dans l’opposition.
Depuis jeudi, nous faisons de la politique, pensons-nous, en menant un débat argumenté, précis et documenté ; c’est bien le rôle du Parlement. Tant que nous ne sommes pas passés à la VIe République, tant que nous n’avons pas changé de Constitution, chaque parlementaire a le droit de déposer un amendement et de le défendre. (M. Didier Mandelli s’exclame.)
Même si la droite accusait la gauche de pratiquer une obstruction « cordiale » et qu’en réponse nous vous reprochions votre obstruction « silencieuse », nous avancions dans le débat. Celui que nous avons eu ce dimanche, projet contre projet, répartition contre capitalisation, a été utile, je le pense. Qui peut dire ici que nous avons perdu du temps ?
C’est pourquoi, hier, nous avons été très surpris (Sourires ironiques au banc des commissions.) qu’au moment d’arriver au cœur du projet vous déclenchiez la mise en œuvre d’une série d’articles du règlement : pour la première fois, l’article 38 restreignant la parole, puis l’article 44 bis, la réécriture de l’article 7 du projet de loi le rendant inamendable. Enfin, et sans pouvoir nous l’expliquer, vous avez déclaré nos amendements – devenus sous-amendements – anticonstitutionnels au nom du principe d’égalité devant la loi, alors qu’une demi-heure auparavant ils ne l’étaient pas…
Si l’on ajoute à ce tableau les décisions prises ce matin, de nouvelles dispositions étant mobilisées pour réduire encore le temps de parole, cela devient un véritable coup de force. Ce coup de force, certes, est permis par le règlement. Mais le règlement n’est là que pour organiser notre vie commune ! Lorsqu’on l’utilise pour régler une question politique, c’est que l’on est au bord d’une crise démocratique.
En réalité, l’utilisation de toutes ces règles prouve votre fébrilité et montre que vous avez besoin d’autoritarisme pour établir votre autorité politique, que vous avez perdue – vous le savez, vous êtes minoritaires.
Que chacun se rassure parmi celles et ceux qui luttent hors de cette enceinte : nous restons utiles et déterminés, aujourd’hui comme samedi prochain, pour le retrait de ce projet ! (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST.)
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour un rappel au règlement.
M. Pascal Savoldelli. Ce rappel au règlement se fonde sur l’article 44 bis de notre règlement.
Le recours exceptionnel à l’article 38 du règlement du Sénat, et cela en pleine nuit, le jour même d’une mobilisation historique de grande ampleur contre cette réforme des retraites, recours décidé main dans la main avec le Gouvernement, nous semble constituer une attaque en règle, particulièrement grave, contre notre démocratie parlementaire.
L’utilisation de cet article clôture en effet un débat parlementaire d’une façon qui n’honore pas notre institution.
J’ai bien entendu Mme la Première ministre invoquer tout à l’heure la séparation des pouvoirs. Pourtant, nous ne pouvons que constater la constitution, ou du moins le renforcement, du bloc de droite libérale, comme une sorte de remaniement ministériel qui annoncerait de futurs changements institutionnels.
Mais dans quel régime politique nous trouvons-nous ? Ces pratiques sont honteuses ! Si vous êtes en train de préparer – en douce, encore une fois ! – un changement institutionnel synonyme d’un nouveau régime politique, dites-le-nous !
Vous ignorez avec arrogance, pour la déconsidérer, la colère des Françaises et des Français. Il est pourtant difficile de ne pas voir que personne ne veut perdre ses deux plus belles années de retraite pour les échanger contre les deux années de travail les plus difficiles !
Le jour même de la journée internationale de lutte pour les droits des femmes, vous vous apprêtez à faire passer en force, par un coup de force institutionnel, un article, l’article 7, qui pénalisera en premier lieu les femmes, vous le savez !
Je veux m’adresser à M. le président du Sénat, Gérard Larcher – je le prie de m’écouter. Monsieur le président Gérard Larcher, dans la nuit d’hier à aujourd’hui, vous avez été davantage le président du groupe Les Républicains que le président du Sénat en vous soumettant à l’agenda du Gouvernement (Protestations scandalisées sur les travées des groupes Les Républicains et UC. – Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST.) via l’article 38, dont l’utilisation fut réclamée par le président Retailleau et applaudie par les centristes !
Monsieur le président Larcher, vous décrédibilisez notre institution… (Nouvelles protestations sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. Max Brisson. Pas de menace !
M. Pascal Savoldelli. … et le travail parlementaire !
Je m’adresse donc à ce nouveau bloc de droite :…
M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue.
M. Pascal Savoldelli. … soyez raisonnables, retirez cette réforme ! (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST.)
M. Roger Karoutchi. Le règlement impose de sanctionner quiconque interpelle ainsi le président de séance !
M. Olivier Paccaud. La règle, ce n’est pas uniquement quand ça vous arrange !
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour un rappel au règlement.
M. Guillaume Gontard. Je fais ce rappel au règlement sur le fondement de la décision du Conseil constitutionnel du 11 juin 2015 sur le caractère effectif de l’exercice du droit d’amendement et les exigences de clarté et de sincérité du débat parlementaire.
Cela vient d’être rappelé, la dernière séance de notre assemblée, pendant laquelle a régné – c’est le moins que l’on puisse dire – une très grande confusion, s’est révélée à plusieurs égards particulièrement problématique.
La liste des irrégularités qui ont pu y être constatées est longue ; mes collègues la compléteront.
La commission, notamment, et de l’aveu même de la présidente de la commission des affaires sociales, n’a pas réellement examiné les sous-amendements déposés. Cette dernière a déclaré ne pas avoir examiné certains sous-amendements, comme l’atteste le compte rendu analytique de la séance, page 69, mais a ensuite déclaré irrecevables ces mêmes sous-amendements, pour ensuite déclarer les avoir examinés, ce qui est matériellement impossible !
C’est sur un mauvais fondement que la commission a déclaré les sous-amendements irrecevables en raison de leur soi-disant contradiction avec l’amendement de réécriture : c’est l’article 44 bis, alinéa 3 qui seul a été cité alors qu’aurait dû être invoqué l’article 44 bis, alinéa 9 pour soulever une exception d’irrecevabilité fondée sur les motifs prévus à l’article 44 bis, alinéa 4.
La présidente de la commission des affaires sociales a omis des informations. Elle n’a cité aucun article du règlement pour déclarer irrecevables les sous-amendements visant à introduire des exceptions pour différents métiers, alors qu’elle aurait dû clairement énoncer qu’elle se fondait pour ce faire sur l’article 44 bis, alinéa 10.
Elle a également anticipé la décision du Sénat en déclarant irrecevables ces amendements alors qu’elle n’était fondée qu’à demander que le Sénat se prononce sur leur seule irrecevabilité.
La présidence de séance n’a pas éclairci la procédure ni garanti la clarté et la sincérité des débats. La distinction entre les deux formes d’irrégularité ainsi que leurs fondements réglementaires respectifs n’ont pas non plus été spécifiés par la présidence. Il aurait été souhaitable que soient précisés les différents fondements et énumérés les amendements concernés.
Enfin, certains sous-amendements ont finalement été discutés en séance sans que les sénateurs puissent s’en saisir, puisqu’ils n’ont pas été distribués. Ils ont été rejetés par le Sénat avant d’être déclarés irrecevables a posteriori.
M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue. (« Ça suffit ! » sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Guillaume Gontard. Tel est le cas du sous-amendement n° 4765 de Raymonde Poncet Monge.
M. le président. La parole est à M. Thomas Dossus, pour un rappel au règlement. (Et allez !… sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Thomas Dossus. Je fonde mon intervention sur la même décision du Conseil constitutionnel du 11 juin 2015 relative aux exigences de clarté et de sincérité du débat parlementaire.
L’organisation de la séance de la nuit dernière, qui s’est déroulée dans la confusion absolue, a perturbé la clarté des débats : les droits ouverts aux sénateurs par le règlement de notre assemblée n’ont pas été respectés.
La séance a refusé des rappels au règlement en parfaite contradiction avec l’article 36, alinéa 3, du règlement, qui dispose que « la parole est accordée sur-le-champ à tout sénateur qui la demande pour un rappel au règlement ».
De surcroît, les sénateurs ont dû voter dans la précipitation et la confusion sur une motion dont ils n’avaient pas le texte sous les yeux : la version papier de la motion tendant à opposer l’exception d’irrecevabilité n’a pas été distribuée aux sénateurs avant le vote. La volonté de passer en force n’excuse pas tout ; il faut en tenir compte. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – Mme Marie-Noëlle Lienemann applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Monique de Marco, pour un rappel au règlement.
Mme Monique de Marco. À mon tour de formuler un rappel au règlement sur le fondement de la décision du Conseil constitutionnel du 11 juin 2015.
Sur le fond, les irrecevabilités sont contestables pour plusieurs raisons. Une partie de nos sous-amendements ont été déclarés irrecevables au motif qu’ils contrediraient l’article 7. Cela est très contestable : nos sous-amendements ne contredisent pas l’amendement ; ils se contentent d’en limiter la portée. Nous contestons une interprétation très extensive du mot « contredire ».
Par ailleurs, bien que cela ne relève pas à proprement parler du règlement, une seconde partie de nos sous-amendements, qui visaient à exempter certains métiers du report de l’âge légal, ont été déclarés irrecevables au motif qu’ils méconnaîtraient le principe d’égalité devant la loi.
Là aussi, cela est parfaitement contestable : nous connaissons la jurisprudence constante du Conseil constitutionnel, qui autorise que le législateur règle de façon différente des situations différentes ou qu’il déroge au principe d’égalité pour des raisons d’intérêt général. Le principe d’égalité n’est en aucun cas un principe absolu, et vous ne sauriez affirmer avec certitude que ces amendements étaient inconstitutionnels : seul le Conseil constitutionnel aurait pu le faire !
Nous nous demandons également pourquoi ce motif n’a pas été invoqué pour déclarer l’irrecevabilité de nos amendements dont les dispositifs sont similaires…
Monsieur le président, quand on se livre à un coup de force réglementaire comme celui d’hier, il est préférable de se montrer d’une incontestable rigueur ! Pour reprendre sereinement l’examen de ce projet de loi, le Sénat s’honorerait à annuler toutes les opérations de vote qui ont eu lieu après la reprise de deux heures quarante-cinq. (Mme Raymonde Poncet Monge applaudit.)
M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour un rappel au règlement.
M. David Assouline. Mon rappel au règlement se fonde aussi sur la décision du Conseil constitutionnel du 11 juin 2015.
Ce que l’on a vu cette nuit n’est pas anodin ; cela restera un moment historique pour cette assemblée. Même ceux qui y siègent depuis un certain temps n’ont jamais vu ça,…
M. Roger Karoutchi. On n’a jamais vu une telle obstruction, en même temps…
M. David Assouline. … et ils le disent.
Il y a eu des moments de tension, des moments de combat, des successions de rappels au règlement, des batailles de procédure : c’est la vie des assemblées. Par contre, l’arbitraire, qui tombe d’un coup, avec cette violence, au milieu de la nuit, pour faire disparaître des milliers d’amendements, puis des milliers de sous-amendements, en moins de trois quarts d’heure, c’est autre chose ! Je demanderai des vérifications : était-ce matériellement possible ? S’il faut une enquête pour vérifier que ces 2 000 sous-amendements étaient bel et bien irrecevables, nous pouvons la faire !
Attention, ce faisant, vous ne rendez peut-être pas un service au Gouvernement. En effet, ce qui a frappé et mobilisé l’opinion, c’est que, à l’Assemblée nationale, cet article central, qui est la loi – c’est toute la loi : tout le reste n’existe pas s’il n’y a pas cette mesure qui instaure un impôt de deux ans sur la vie des Français ! –, n’a pas été discuté ; tout le monde attendait que la discussion ait lieu ici. Et c’est précisément sur cet article, pas sur les autres, qu’il s’est passé ce qui s’est passé. Il y a eu, ici, près de cinquante heures de discussions tranquilles sur tous les autres articles. (M. Didier Mandelli s’exclame.)
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. « Tranquilles », c’est ça…
M. David Assouline. Et c’est sur cet article-là, à propos duquel la France attendait un débat, que le couperet est tombé ! (Brouhaha sur les travées du groupe Les Républicains.)
Le Conseil constitutionnel pourra apprécier la sincérité des débats parlementaires s’il s’avère qu’aucune des deux assemblées n’a pu discuter sérieusement et sur le fond de l’article 7 ! (Applaudissements sur des travées des groupes SER et GEST.)
M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour un rappel au règlement.
Mme Laurence Rossignol. Mon rappel au règlement est fondé sur l’article 44 bis du règlement du Sénat.
Le Conseil constitutionnel a deux exigences à l’égard de nos travaux : la clarté et la sincérité. Je vais examiner ce qui s’est passé hier à l’aune de ces deux conditions.
En ce qui concerne la sincérité de l’amendement déposé par M. Savary hier soir, nous avons longuement discuté en commission. M. Savary a longuement développé son soutien à l’article 7 ; jamais – jamais ! – il n’a été question d’un amendement du rapporteur réécrivant une partie de cet article 7.
M. Bernard Jomier. C’est vrai.
Mme Laurence Rossignol. Cet amendement est sorti hier soir à deux heures trente du matin au seul motif de priver le Sénat du débat qui l’attendait sur l’article 7 !
Mme Cathy Apourceau-Poly. Exactement.
Mme Laurence Rossignol. Je commence donc par dire que le débat d’hier était insincère : c’est une manœuvre qui a eu lieu. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST. – Mme Esther Benbassa applaudit également.)
En ce qui concerne la clarté, si, cette nuit, le Sénat a voté cet amendement – ou, plutôt, si des sénateurs l’ont voté –, c’est dans la plus grande confusion, entre deux suspensions de séance, au moment où nous cherchions encore à déterminer quelles seraient les conséquences de son adoption éventuelle sur les amendements que nous avions précédemment déposés, et au moment où l’on nous informait que les sous-amendements que nous étions en train de déposer étaient « contraires » à l’amendement déposé par M. Savary.
« Contraires », vraiment ? Changer une date, c’est « contraire » ? Depuis quand ? Depuis quand modifier une date dans un amendement est-il contraire au sens de cet amendement ? Tel était l’objet de certains de nos sous-amendements… (Applaudissements sur des travées des groupes SER et CRCE.)
Hier soir, donc, mes chers collègues, vous avez voté un amendement dans des conditions qui ne respectent ni l’exigence de sincérité ni l’exigence de clarté que le Conseil constitutionnel nous demande de respecter. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST. – Mme Esther Benbassa applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour un rappel au règlement.
M. Jean-Pierre Sueur. Mon rappel au règlement se fonde sur l’article 44 bis, alinéa 4 : les sous-amendements ne sont recevables qu’à la condition de n’avoir « pas pour effet de contredire le sens des amendements auxquels ils se rapportent ». (Voilà ! sur les travées du groupe Les Républicains.)
Or, parmi les sous-amendements qui ont été déposés, il en est un grand nombre qui ne contredisent pas l’amendement auquel ils se rapportent. Il est parfaitement légitime de déposer des sous-amendements tendant à limiter l’effet de l’amendement, à en réduire la portée, à en restreindre les conséquences ou à en compléter les dispositions. Tout cela est légitime, puisqu’il n’y a là nulle « contradiction » !
Monsieur le président, j’ai donc l’honneur de vous demander qu’il soit procédé à un examen de l’ensemble des sous-amendements,…
M. Fabien Gay. Il a raison.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Exactement !
M. Jean-Pierre Sueur. … afin que l’on puisse déterminer, sous-amendement par sous-amendement, s’il y a bien contradiction – car la commission a été, en trois quarts d’heure, dans l’impossibilité de le faire –, de telle manière que tous les sous-amendements qui ne sont pas contraires à l’amendement viennent en débat en séance publique. À défaut, c’est à un véritable déni du droit fondamental d’amendement et de sous-amendement qui est le nôtre que nous assisterions. (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, pour un rappel au règlement.
M. Patrick Kanner. À mon tour, sur le fondement de l’ensemble des alinéas de l’article 44 bis, de prendre la parole pour un rappel au règlement.
Ce qui s’est passé hier soir est particulièrement inédit au sein du Sénat. Je ne reviendrai pas sur les arguments qui ont été développés par mes collègues voilà un instant. Mais les événements de cette nuit s’inscrivent dans un contexte ; et ce contexte a été aggravé ce matin par la conférence des présidents.
Le déclenchement de l’article 38 de notre règlement ne relève pas de l’autorité de la conférence des présidents : la décision de demander la priorité pour l’examen d’un amendement non plus. En revanche, l’article 42 peut être déclenché sur la base d’une décision de la conférence des présidents ; malgré notre opposition, il en a été ainsi décidé.
Cela veut dire, monsieur le président, que le droit d’amendement et de sous-amendement, pour ce qui reste de notre débat, va être encadré comme jamais au Sénat par la décision qui a été prise et par la capacité dont s’est dotée la majorité sénatoriale de « plier » les arguments de l’opposition qu’ici nous représentons. Je le regrette : c’est une bien mauvaise image qui a été donnée hier soir.
Tous les arguments développés par Mme Rossignol feront naturellement l’objet d’une réflexion en vue d’un éventuel recours devant le Conseil constitutionnel.
Je ne sais pas si je peux vous dire de vous ressaisir…
M. Vincent Segouin. Nous « ressaisir », vraiment ?
M. Patrick Kanner. … pour que le débat puisse aller jusqu’au bout dans les meilleures conditions. (Brouhaha sur les travées du groupe Les Républicains.)
Oui, vous ressaisir !
Tous ces rappels au règlement n’ont qu’un objectif, mes chers collègues : faire que le Sénat puisse travailler dans de bonnes conditions un texte aussi important pour nos concitoyens. Telle est la volonté qui est la nôtre ; je ne suis pas sûr qu’elle soit partagée par vous tous. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur des travées du groupe CRCE. – Exclamations indignées sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Max Brisson. C’est vous qui avez bloqué ! Pourquoi avoir déposé tant d’amendements ?
M. David Assouline. Continuez à vous asseoir sur la démocratie !
M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour un rappel au règlement.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Tous ceux qui ont participé à la dernière séance de nuit – nous étions nombreux – ont pu constater l’extrême désordre dans lequel le Sénat a tenté de travailler.
M. Max Brisson. Grâce à qui ?
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Tout cela sera examiné de près, évidemment, par le Conseil constitutionnel. Notre collègue Laurence Rossignol a rappelé comment le Conseil a, dans ses jurisprudences successives, instauré désormais la nécessité du respect de la sincérité et de la clarté du débat parlementaire. Nous aurons certainement l’occasion de revenir sur ces principes ultérieurement au cours de nos débats – j’en ai le pressentiment.
Je voudrais évoquer la façon dont les sous-amendements ont été traités ; plusieurs collègues l’ont fait, mais je souhaite compléter leurs commentaires.
Lorsque Mme la présidente Deroche a fait connaître l’irrecevabilité décrétée – c’est le mot qui convient – sur des sous-amendements qui n’avaient même jamais été lus par la commission, il s’est passé un phénomène encore plus caricatural.
À trois heures du matin, le groupe CRCE a déposé de nouveaux sous-amendements, en nombre. La présidente de la commission a dit, je cite le compte rendu analytique : « D’autres sous-amendements viennent d’être déposés dans la même veine ; ils sont pareillement en contradiction avec l’amendement du rapporteur. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, la commission les déclare donc irrecevables. »
Une présidente de commission, à son banc, a donc décrété par principe, hier soir, que des sous-amendements qu’elle n’avait même pas vus ni lus étaient irrecevables. C’est en contradiction totale avec le règlement et les règles de recevabilité desdits sous-amendements.
Nous demandons donc que ces sous-amendements soient examinés formellement par la commission, que leur irrecevabilité soit explicitée et que, in fine, ils soient réellement examinés par le Sénat. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE.)
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. François-Noël Buffet, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. Je souhaite réagir à ce qui vient d’être dit.
Hier soir, le rapporteur a déposé un amendement visant à réécrire totalement une partie de l’article 7. C’est sur la base de cette réécriture que nos collègues de l’opposition ont déposé 3 000 sous-amendements, qui étaient en réalité la reprise de leurs anciens amendements : ils ont donc changé de nature. Selon la règle, dès lors qu’un sous-amendement est contraire à l’amendement sur lequel il porte, il est déclaré irrecevable : c’est un principe admis par tout le monde depuis longtemps, et c’est, je le redis, la règle normale et habituelle. (Nombreuses dénégations sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. le président. S’il vous plaît, mes chers collègues !
M. François-Noël Buffet, président de la commission des lois. Nos collègues de l’opposition ont clairement indiqué – cela a d’ailleurs été constaté, me semble-t-il, par la présidente de la commission – que la rédaction de ces sous-amendements était absolument identique à celle des amendements qui avaient été déposés. Voilà pourquoi leur analyse a été si rapide.
Mmes Éliane Assassi et Marie-Pierre de La Gontrie. La commission ne les a même pas lus !
M. François-Noël Buffet, président de la commission des lois. Par ailleurs, le président Kanner a fait référence à la conférence des présidents de ce matin. J’y ai participé. Il y a été clairement dit que la politique des groupes d’opposition était de ne pas voter le texte et d’utiliser tous les moyens en leur possession pour s’opposer à ce vote. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et RDPI. – M. Bernard Fialaire applaudit également.)
M. Max Brisson. Voilà
M. François-Noël Buffet, président de la commission des lois. Mais il a également été dit par les représentants de l’opposition que la majorité sénatoriale pouvait utiliser tous les moyens mis à sa disposition par le règlement pour voter le texte. (Mêmes mouvements.)
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Dans le respect de la Constitution !
M. le président. La parole est à M. Jérôme Durain, pour un rappel au règlement.
M. Jérôme Durain. Que nous n’allions pas au bout de l’examen de ce texte arrangerait bien certains membres de la majorité sénatoriale, parfaitement embarrassés de cette situation. (MM. Max Brisson et Roger Karoutchi ironisent.)
Mme Cathy Apourceau-Poly. Exactement !
M. Jérôme Durain. Je reviendrai sur la formule de la présidente Deroche hier. Je cite la page 69 du compte rendu analytique :
« La même motion s’appliquerait aux nouveaux sous-amendements reçus…
« M. Pierre Laurent. - Alors on éteint la lumière ? » – elle est restée allumée… (Sourires.)
« Mme Catherine Deroche, présidente de la commission. - … y compris ceux que la commission n’a pas eu le temps d’examiner. […] En effet, ils sont dans la même veine que les précédents. »
Que l’on oppose l’irrecevabilité à des sous-amendements qu’on a lus, pourquoi pas, mais que l’on infère de l’état d’esprit des groupes d’opposition le contenu de leurs sous-amendements, c’est extrêmement grave ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST.)
M. David Assouline. C’est très grave !
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour un rappel au règlement.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. M. Buffet nous explique qu’une partie des amendements ont changé de nature en devenant, par nécessité et par cohérence, des sous-amendements à l’amendement déposé par M. Savary : ce n’est vrai que pour une partie d’entre eux.
Mme Deroche a effectivement motivé ainsi l’irrecevabilité d’un certain nombre de sous-amendements : on le conteste, mais l’argument pourrait être à la limite discutable.
En revanche, toute une série de sous-amendements ont été « retoqués » ou déclarés irrecevables au motif de non-respect de l’égalité républicaine. Or un motif d’ordre constitutionnel demeure le même, qu’il s’agisse d’un amendement ou d’un sous-amendement. Si l’amendement respecte potentiellement l’égalité républicaine, comment pourrait-il en aller différemment quand il devient un sous-amendement ? (Applaudissements sur les travées des groupes GEST et SER.)
M. le président. Acte est donné de ces rappels au règlement.
La parole est à Mme la présidente de la commission. (Brouhaha sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Laissez-moi parler ! Ce n’est pas votre habitude, mais forcez-vous un peu de temps en temps ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et RDPI.)
M. Rachid Temal. La parole est à la défense !
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Je voudrais revenir brièvement sur les questions soulevées au cours du débat d’hier, sur la régularité de la procédure tout d’abord et sur le « comment ».
L’exception d’irrecevabilité est bien prévue par notre règlement, et, jusqu’à sa récente réforme, les commissions y avaient notamment recours pour proposer au Sénat de déclarer irrecevables des amendements qui créaient une habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance ou à élargir le champ d’une ordonnance.
D’une façon générale, l’exception d’irrecevabilité permet au Sénat de ne pas examiner des amendements ou des sous-amendements contraires à la Constitution.
Je l’ai dit clairement hier soir, les amendements que l’amendement de la commission a fait tomber hier soir étaient des amendements d’obstruction : catalogue des professions, suppressions d’alinéas en rafale après l’examen de soixante-dix-sept amendements de suppression. (Protestations sur les travées du groupe SER.)
On se calme ! Nous avons encore toute la soirée à passer ensemble ! (Mêmes mouvements.)
Ils sont d’ailleurs assez classiques et on peut les retrouver sur les différentes réformes des retraites. Leur seul objet est dilatoire. Les amendements portant sur le fond du texte ont été préservés. L’objet de l’amendement présenté par M. Savary était donc de faire tomber tous ces amendements dilatoires pour pouvoir nous consacrer au fond du texte et avoir un vrai débat, conformément à ce qu’attendent de nous nos concitoyens.
Les sous-amendements déposés en masse quelques minutes après l’amendement du rapporteur étaient les mêmes. (Vous ne les avez même pas lus ! sur des travées des groupes SER et CRCE.)
Pas du tout, j’y ai même passé du temps ! Ceux qui étaient en commission hier ont bien vu que je n’étais pas présente en début de réunion, car je relisais dans une autre salle les sous-amendements, présentés initialement d’ailleurs comme des amendements !
Mme Cathy Apourceau-Poly. Ils étaient marqués comme étant des sous-amendements !
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Absolument pas, je peux vous les ressortir !
M. le président. Veuillez poursuivre, madame la présidente.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Quoi qu’il en soit, des sous-amendements ont été déposés. Certains groupes ne se sont au demeurant même pas donné la peine de les modifier. (Protestations sur les travées des groupes SER et CRCE.) Par leur nombre et par leur objet, ils avaient le même objectif que les amendements : empêcher le déroulement de la discussion et gagner du temps.
Ces sous-amendements d’obstruction ont été déposés conformément au règlement, tout comme l’exception d’irrecevabilité. Nous assumons, nous aussi, de répondre à l’obstruction permise par le règlement par des moyens permis par le même règlement.
La clarté des débats y gagne certainement lorsque nous sortons de ces longs tunnels de discussion qui n’ont d’autre objet que de refaire à l’envi la discussion générale. Or ce que nous souhaitons, nous, c’est passer à l’examen des articles sur le fond. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-Marc Todeschini. C’est votre interprétation !
M. Victorin Lurel. C’est un procès d’intention !
M. David Assouline. Ce n’est pas vrai !
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Monsieur Assouline, je vous l’ai dit hier : arrêtez de hurler en permanence ! Vous ne vous en rendez même pas compte ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.) Chacun le sait, on hurle quand on manque d’arguments ! (Protestations sur les travées du groupe SER.)
M. David Assouline. Je ne hurle pas !
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Certains orateurs se sont étonné que l’exception d’irrecevabilité arrive après l’examen en commission et soit opposée à des sous-amendements étant identiques à des amendements examinés par la commission, reconnaissant ainsi qu’il s’agissait bien des mêmes et qu’il ne fallait donc pas des heures à la commission pour les examiner.
Je voudrais tout d’abord rappeler qu’un amendement recevable ne fait pas forcément un sous-amendement recevable. (Exclamations sur les travées du groupe SER.) Un amendement vise à modifier le texte, un sous-amendement vise à modifier un amendement dont il ne doit pas contredire le sens.
Je voudrais ensuite indiquer que l’exception d’irrecevabilité s’oppose en séance : ce n’est pas parce qu’un amendement a été examiné en commission qu’elle ne peut pas, par la suite, lui être opposée en séance. C’est vrai de toutes les irrecevabilités.
C’est ce que nous avons fait. Je puis vous assurer que ces sous-amendements, pour être allée dans la salle où ont été examinés, ont occupé hier un très grand nombre d’administrateurs : aucun amendement n’est passé au travers les mailles du filet ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et RDPI. – Mme Colette Mélot applaudit également.)
M. Jérôme Durain. Hier soir, vous avez dit l’inverse !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. René-Paul Savary, rapporteur de la commission des affaires sociales pour l’assurance vieillesse. Je partage une partie de vos propos : nous avons eu quarante-huit heures de discussion avant d’arriver à cet article 7 !
M. Rachid Temal. C’est normal !
M. David Assouline. Vous voulez brader le débat !
M. René-Paul Savary, rapporteur. Deux articles sont déterminants dans cette réforme des retraites.
Tout d’abord, l’article 1er, qui vise à fermer les régimes spéciaux. Nous y étions favorables à droite, vous y étiez défavorables à gauche dans un premier temps, puis vous avez fini par proposer des dates de fermeture plus tardives, preuve que nous pouvons parfois être d’accord…
M. Pierre Laurent. C’est faux !
M. René-Paul Savary, rapporteur. Ensuite l’article 2, qui aborde la question importante de l’emploi des seniors. Des propositions ont été faites par le Gouvernement – l’index seniors –, d’autres par la droite – le CDI seniors. Vous vous y êtes opposés, c’est votre droit, mais les débats ont duré quatre heures : sur quarante-huit heures de discussion, quatre heures de débat de fond ! Le reste était un monologue sur votre vision apocalyptique du monde du travail…
M. David Assouline. C’est subjectif !
M. René-Paul Savary, rapporteur. … et votre volonté de vous opposer à la réforme. Vous n’avez pas défendu un seul de vos amendements. Si tel avait été le cas, d’ailleurs, ceux qui vous écoutent auraient changé d’avis ! (Marques d’indignation sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
Mme Cathy Apourceau-Poly. Ça m’étonnerait !
M. René-Paul Savary, rapporteur. Certes, vous avez eu un effet de surprise. Mais votre vivacité à déposer en une minute trois mille sous-amendements n’a eu d’égale que la vivacité de lecture de Mme la présidente de la commission pour les juger irrecevables ! Quel effet de surprise ! (Mme Éliane Assassi proteste. – Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et RDPI. – Mme Colette Mélot applaudit également.)
M. Rachid Temal. Ce n’est pas terminé !
M. René-Paul Savary, rapporteur. Y avait-il préméditation de votre part ? Nous pourrions, au vu du déroulé des événements, vous soupçonner de vouloir entraver le bon déroulement des débats ! Quand on dépose d’un coup trois mille sous-amendements, n’est-ce pas pour s’opposer au débat ?
M. Max Brisson. Très bien !
M. René-Paul Savary, rapporteur. Avouez donc clairement que vous ne voulez pas voter cette réforme ni débattre d’un sujet sociétal ! N’hésitez pas à le dire ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Patrick Kanner se lève pour prendre la parole.)
M. le président. Vous avez déjà eu la parole, monsieur Kanner, vous ne pouvez plus vous exprimer !
M. Jean-Pierre Sueur. Nous demandons une suspension de séance, monsieur le président ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains. – On réclame une suspension sur plusieurs travées du groupe SER. – Tumulte.)
M. le président. C’est au président de séance d’apprécier l’opportunité d’une suspension ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Nous allons interrompre nos travaux pour cinq minutes.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures treize, est reprise à dix-sept heures dix-sept.)
M. Patrick Kanner. Vous avez été si prompt, monsieur le président, que je n’ai pas eu le temps de vous exposer pourquoi je souhaitais une interruption de séance. J’aimerais que la commission des affaires sociales puisse se réunir pour examiner l’ensemble des sous-amendements ayant été déclarés irrecevables. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Cela dit, j’aurais formulé cette demande avant la suspension, vous auriez sans doute refusé…
M. le président. Ainsi que vous l’a dit sa présidente, la commission a examiné ces sous-amendements. Nous passons à l’examen des amendements.
DEUXIÈME PARTIE (Suite)
DISPOSITIONS RELATIVES AUX DÉPENSES DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L’EXERCICE 2023
TITRE Ier (Suite)
RECULER L’ÂGE DE DÉPART EN TENANT COMPTE DES SITUATIONS D’USURE PROFESSIONNELLE
Article 7 (suite)
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° L’article L. 161-17-2 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, le mot : « soixante-deux » est remplacé par le mot : « soixante-quatre » et, à la fin, l’année : « 1955 » est remplacée par l’année : « 1968 » ;
b) Au deuxième alinéa, l’année : « 1955 » est remplacée par l’année : « 1968 », la date : « 1er juillet 1951 » est remplacée par la date : « 1er septembre 1961 » et, après le mot : « décembre », la fin est ainsi rédigée : « 1967, de manière croissante, à raison de trois mois par génération. » ;
c) Les 1° et 2° sont abrogés ;
2° L’article L. 161-17-3 est ainsi modifié :
a) À la fin du 2°, la date : « 31 décembre 1963 » est remplacée par la date : « 30 août 1961 » ;
b) Au 3°, la date : « 1er janvier 1964 » est remplacée par la date : « 1er septembre 1961 » et l’année : « 1966 » est remplacée par l’année : « 1962 » ;
c) À la fin du 4°, les mots : « entre le 1er janvier 1967 et le 31 décembre 1969 » sont remplacés par les mots : « en 1963 » ;
d) À la fin du 5°, les mots : « entre le 1er janvier 1970 et le 31 décembre 1972 » sont remplacés par les mots : « en 1964 » ;
e) À la fin du 6°, l’année : « 1973 » est remplacée par l’année : « 1965 » ;
3° Au 1° de l’article L. 351-8, les mots : « à l’article L. 161-17-2 augmenté de cinq » sont remplacés par les mots : « au premier alinéa de l’article L. 161-17-2 augmenté de trois ».
II. – Le code des communes est ainsi modifié :
1° L’article L. 416-1 est abrogé ;
2° Le début de l’article L. 417-11 est ainsi rédigé : « Les agents et anciens agents des réseaux souterrains des égouts qui remplissent les conditions mentionnées au dixième alinéa du 1° du I de l’article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite peuvent… (le reste sans changement). »
III. – Le code des pensions civiles et militaires de retraite est ainsi modifié :
1° L’article L. 12 est ainsi modifié :
a) La première phrase du i est ainsi modifiée :
– après les mots : « les militaires », sont insérés les mots : « et anciens militaires » ;
– après le mot : « invalidité », la fin est supprimée ;
b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Les bonifications acquises, en application des règles qui les régissent, pour services accomplis dans différents emplois classés dans la catégorie active et la bonification prévue au i peuvent se cumuler, dans la limite de vingt trimestres. » ;
2° L’article L. 13 est ainsi modifié :
a) À la fin de la seconde phrase du premier alinéa du I, les mots : « fixé à cent soixante trimestres » sont remplacés par les mots : « celui mentionné au 6° de l’article L. 161-17-3 du code de la sécurité sociale » ;
b) Les II et III sont abrogés ;
3° L’article L. 14 est ainsi modifié :
a) À la fin du 1 du I, les mots : « la limite d’âge du grade détenu par le pensionné » sont remplacés par les mots : « l’âge d’annulation de la décote prévu à l’article L. 14 bis » ;
b) Le même I est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« L’effet en durée d’assurance de l’une des bonifications mentionnées au dernier alinéa de l’article L. 12 ou du cumul mentionné au même dernier alinéa peut être additionné à la majoration de durée d’assurance mentionnée à l’article 78 de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites, dans la limite de vingt trimestres. » ;
c) À la première phrase du premier alinéa du II, le mot : « cinquante-deux » est remplacé par le mot : « cinquante-quatre » ;
4° Le paragraphe Ier du chapitre II du titre III du livre Ier est complété par un article L. 14 bis ainsi rédigé :
« Art. L. 14 bis. – L’âge d’annulation de la décote est égal :
« 1° Pour le fonctionnaire civil, à l’âge mentionné à l’article L. 161-17-2 du code de la sécurité sociale augmenté de trois années ;
« 2° Pour le fonctionnaire bénéficiant d’un droit au départ au titre du deuxième alinéa du 1° du I de l’article L. 24, à l’âge anticipé mentionné au même deuxième alinéa augmenté de trois années ;
« 3° Pour le fonctionnaire bénéficiant d’un droit au départ au titre des troisième à dernier alinéas du 1° du I de l’article L. 24, à l’âge minoré mentionné au même troisième alinéa augmenté de trois années ;
« 4° Pour le militaire mentionné à la première phrase du premier alinéa du II de l’article L. 14 ou le fonctionnaire mentionné aux 2° à 4° de l’article L. 556-8 du code général de la fonction publique, à la limite d’âge de leur grade ;
« 5° Par dérogation au 2° du présent article, pour les fonctionnaires bénéficiant d’un droit au départ à l’âge anticipé au titre d’un emploi dont la limite d’âge est fixée à 64 ans, à cet âge. » ;
5° Le I de l’article L. 24 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est complété par le mot : « soit » ;
b) Le premier alinéa du 1° est ainsi modifié :
– les mots : « civil est radié des cadres par limite d’âge, ou s’il » et les mots : « , à la date de l’admission à la retraite, » sont supprimés ;
– après le mot : « sociale », la fin est supprimée ;
c) Au début du second alinéa du 1°, sont ajoutées deux phrases ainsi rédigées : « Par dérogation au premier alinéa du présent 1°, la liquidation de la pension peut, pour les fonctionnaires occupant ou ayant occupé un emploi classé en catégorie active, intervenir à compter d’un âge anticipé égal à l’âge mentionné au premier alinéa de l’article L. 161-17-2 du code de la sécurité sociale diminué de cinq années. Cette faculté est ouverte à la condition que le fonctionnaire puisse se prévaloir, au total, d’au moins dix-sept ans de services accomplis indifféremment dans de tels emplois, dits services actifs. » ;
d) Le 1° est complété par onze alinéas ainsi rédigés :
« En outre, l’occupation de certains de ces emplois permet de porter l’âge anticipé à un âge minoré égal à l’âge mentionné au premier alinéa de l’article L. 161-17-2 du code de la sécurité sociale diminué de dix années, dès lors que le fonctionnaire peut se prévaloir de services dits super-actifs, accomplis indifféremment :
« a) Dans le corps des identificateurs de l’institut médico-légal de la préfecture de police ;
« b) Dans les réseaux souterrains en tant que fonctionnaire des réseaux souterrains des égouts ;
« c) En tant que personnel de surveillance de l’administration pénitentiaire ;
« d) En tant que fonctionnaire des services actifs de la police nationale appartenant au corps mentionné au 1° de l’article L. 556-8 du code général de la fonction publique.
« Les services super-actifs peuvent être comptabilisés comme services actifs.
« Le droit à la liquidation à l’âge minoré est ouvert à la condition d’avoir accompli, au total, une durée de services super-actifs égale à :
« – pour le fonctionnaire ou l’ancien fonctionnaire des réseaux souterrains et le fonctionnaire ou l’ancien fonctionnaire du corps des identificateurs de l’institut-médico-légal, douze années de services super-actifs, dont la moitié de manière consécutive, et d’avoir accompli trente-deux années de services effectifs au sens de l’article L. 13 du présent code ;
« – pour le fonctionnaire ou l’ancien fonctionnaire des services actifs de police mentionnée plus haut ainsi que pour le surveillant ou l’ancien surveillant pénitentiaire, vingt-sept années de service super-actifs, déduction faite des services militaires obligatoires.
« Lorsque le fonctionnaire a occupé plusieurs emplois parmi ceux mentionnés aux dixième et onzième alinéas du présent 1° et se prévaut de durées de services super-actifs cumulées, la condition de durée de service applicable pour bénéficier de l’âge de départ minoré est celle associée à l’emploi que le fonctionnaire a occupé le plus longtemps.
« Bénéficie d’un droit à la liquidation à l’âge minoré l’ingénieur ou l’ancien ingénieur du contrôle de la navigation aérienne ayant effectué dix-sept années de service dans les services actifs ; »
e) Il est ajouté un 6° ainsi rédigé :
« 6° Par limite d’âge. » ;
6° Après l’article L. 24, il est inséré un article L. 24 bis ainsi rédigé :
« Art. L. 24 bis. – Les services accomplis par un fonctionnaire dans un emploi classé en catégorie active au cours de la période de dix ans précédant sa titularisation sont comptabilisés comme des services actifs pour l’acquisition du droit au départ anticipé mentionné au deuxième alinéa du 1° du I de l’article L. 24.
« De même, les services accomplis par le fonctionnaire dans des fonctions incombant aux fonctionnaires mentionnés aux a à d du même 1° au cours de la période de dix ans précédant sa titularisation sont comptabilisés comme services super-actifs permettant un droit au départ à l’âge minoré mentionné au même article L. 24. » ;
7° L’article L. 25 est ainsi modifié :
a) Après la seconde occurrence du mot : « âge », la fin du 1° est ainsi rédigée : « minoré ou anticipé dans les conditions définies aux deuxième à dernier alinéas du 1° du I de l’article L. 24 du présent code » ;
b) Au 2°, deux fois, et à la fin des 3° et 4°, les mots : « de cinquante-deux ans » sont remplacés par les mots : « défini à l’article L. 161-17-2 du code de la sécurité sociale abaissé de dix années ».
IV. – À la première phrase des articles L. 732-25 et L. 781-33 du code rural et de la pêche maritime, les mots : « à l’article L. 161-17-2 du code de la sécurité sociale augmenté de cinq » sont remplacés par les mots : « au premier alinéa de l’article L. 161-17-2 du code de la sécurité sociale augmenté de trois ».
V. – Au 2° de l’article L. 5421-4 du code du travail, les mots : « à l’article L. 161-17-2 du même code augmenté de cinq ans » sont remplacés par les mots : « au 1° de l’article L. 351-8 du même code ».
VI. – Le chapitre Ier du titre Ier du livre IX du code de l’éducation est complété par un article L. 911-9 ainsi rédigé :
« Art. L. 911-9. – Quand ils atteignent la limite d’âge en cours d’année scolaire, les enseignants du premier et du second degrés, les personnels d’inspection ainsi que les maîtres contractuels et agréés des établissements d’enseignement privés sous contrat restent en fonction à leur demande, si les besoins du service le justifient, jusqu’à la fin de l’année scolaire. »
VII. – Le code général de la fonction publique est ainsi modifié :
1° L’article L. 556-1 est ainsi modifié :
a) Au 1°, le mot : « premier » est remplacé par le mot : « deuxième » ;
b) Sont ajoutés trois alinéas ainsi rédigés :
« Toutefois, le fonctionnaire occupant un emploi qui ne relève pas de la catégorie active et auquel s’applique la limite d’âge mentionnée au 1° du présent article ou une limite d’âge qui lui est égale ou supérieure peut, sur autorisation, être maintenu en fonctions jusqu’à l’âge de soixante-dix ans.
« Le refus de l’autorisation est motivé.
« Le bénéfice cumulé de ce maintien en fonctions et des reculs de limite d’âge prévus aux articles L. 556-2 à L. 556-5 ne peut conduire le fonctionnaire à être maintenu en fonctions au-delà de soixante-dix ans. » ;
2° L’article L. 556-7 est ainsi modifié :
a) Après la référence : « L. 556-1 », la fin du premier alinéa est ainsi rédigée : « bénéficie, à sa demande et sous réserve de son aptitude physique, d’une prolongation d’activité jusqu’à l’âge fixé au même 1°. » ;
b) À l’avant-dernier alinéa, les mots : « le maintien en » sont remplacés par les mots : « la prolongation d’ » ;
c) Au dernier alinéa, les mots : « maintien en » sont remplacés par les mots : « prolongation d’ » ;
3° Après le mot : « est », la fin de l’article L. 556-8 est ainsi rédigée : « fixée comme suit :
« 1° À cinquante-sept ans pour les fonctionnaires appartenant au corps d’encadrement et d’application et au corps de commandement ;
« 2° À soixante ans pour les commissaires de police ;
« 3° À soixante et un ans pour les commissaires divisionnaires de police et pour les commissaires généraux de police ;
« 4° À soixante-deux ans pour les emplois de contrôleur général et d’inspecteur général des services actifs de la police nationale, de chef de service de l’inspection générale de la police nationale et de directeur des services actifs de l’administration centrale et de la préfecture de police. » ;
4° L’article L. 556-11 est complété par trois alinéas ainsi rédigés :
« Toutefois, l’agent contractuel occupant un emploi auquel s’applique la limite d’âge mentionnée au premier alinéa ou une limite d’âge qui lui est égale ou supérieure peut, sur autorisation, être maintenu en fonctions jusqu’à l’âge de soixante-dix ans.
« Le refus d’autorisation est motivé.
« Le bénéfice cumulé de ce maintien en fonctions et des reculs de limite d’âge prévus à l’article L. 556-12 ne peut conduire l’agent contractuel à être maintenu en fonctions au-delà de soixante-dix ans. »
VIII – Au deuxième alinéa de l’article L. 6151-3 du code de la santé publique, les mots : « de soixante-sept ans » sont remplacés par les mots : « mentionné au 1° de l’article L. 556-1 du code général de la fonction publique ».
IX. – Le code de justice administrative est ainsi modifié :
1° L’article L. 133-7-1 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est ainsi modifié :
– après le mot : « résultant », sont insérés les mots : « du 1° de l’article L. 556-1 du code général de la fonction publique ou de l’article 1er » ;
– après le mot : « public », sont insérés les mots : « et, le cas échéant, à l’issue des reculs et prolongations de limite d’âge mentionnés aux articles L. 556-2 à L. 556-5 du même code » ;
– après les mots : « l’âge », la fin est ainsi rédigée : « mentionné au cinquième alinéa de l’article L. 556-1 dudit code pour exercer les fonctions de conseiller d’État ou des fonctions dans lesquelles ils sont mis à disposition ou détachés. » ;
b) Le dernier alinéa est supprimé ;
2° Le premier alinéa de l’article L. 233-7 est ainsi modifié :
– les mots : « de la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 relative à la limite d’âge dans la fonction publique et le secteur public » sont remplacés par les mots : « du 1° de l’article L. 556-1 du code général de la fonction publique, le cas échéant à l’issue des reculs et prolongations de limite d’âge mentionnés aux articles L. 556-2 à L. 556-5 du même code » ;
– après les mots : « l’âge », la fin est ainsi rédigée : « mentionné au cinquième alinéa de l’article L. 556-1 dudit code pour exercer l’une des fonctions dévolues aux premiers conseillers ou des fonctions dans lesquelles ils sont mis à disposition ou détachés. » ;
3° L’article L. 233-8 est abrogé.
X. – La loi n° 57-444 du 8 avril 1957 instituant un régime particulier de retraites en faveur des personnels actifs de police est ainsi modifiée :
1° L’article 1er est ainsi modifié :
a) À la première phrase du premier alinéa, après le mot : « agents », sont insérés les mots : « et anciens agents » ;
b) Le troisième alinéa est supprimé ;
2° L’article 2 est abrogé.
XI. – Le III de l’article 125 de la loi n° 83-1179 du 29 décembre 1983 de finances pour 1984 est ainsi modifié :
1° Au début, sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :
« III. – Les sapeurs-pompiers professionnels, y compris pour la durée de services accomplis sur les emplois de directeur départemental, de directeur départemental adjoint et de sous-directeur des services d’incendie et de secours de tous grades, bénéficient, à compter de l’âge de cinquante-sept ans et sous certaines conditions, notamment d’une durée minimale de service susceptible d’être prise en compte dans la constitution de leurs droits à pension du régime de retraite des agents des collectivités locales et d’une durée de dix-sept ans de service effectif en qualité de sapeur-pompier professionnel, d’une bonification du temps du service accompli pour la liquidation de leur pension de retraite, dans la limite de cinq annuités.
« Cet avantage est également accordé aux sapeurs-pompiers professionnels radiés des cadres pour invalidité imputable au service, aux sapeurs-pompiers professionnels reclassés pour raison opérationnelle et aux sapeurs-pompiers professionnels admis au bénéfice d’un congé pour raison opérationnelle. » ;
2° L’avant-dernier alinéa est supprimé.
XII. – À l’article 1er de la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 relative à la limite d’âge dans la fonction publique et le secteur public, après le mot : « dispositions », sont insérés les mots : « du 1° ».
XIII. – La loi n° 86-1304 du 23 décembre 1986 relative à la limite d’âge et aux modalités de recrutement de certains fonctionnaires civils de l’État est ainsi modifiée :
1° L’article 1er est ainsi modifié :
a) Après le mot : « membres », sont insérés les mots : « du corps » ;
b) Les mots : « l’âge limite résultant » sont remplacés par les mots : « la limite d’âge résultant du 1° de l’article L. 556-1 du code général de la fonction publique ou de l’article 1er » ;
c) Après le mot : « public », sont insérés les mots : « et, le cas échéant, à l’issue des reculs et prolongations de limite d’âge mentionnés aux articles L. 556-2 à L. 556-5 du même code » ;
d) Les mots : « la limite d’âge qui était en vigueur avant l’intervention de la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 précitée » sont remplacés par les mots : « l’âge mentionné au cinquième alinéa de l’article L. 556-1 dudit code » ;
e) Les mots : « fonctions, de » sont remplacés par les mots : « fonctions de » ;
f) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Le maintien en activité, y compris dans des fonctions exercées par la voie du détachement ou de la mise à disposition, jusqu’à l’âge mentionné au même cinquième alinéa est accordé sur demande, en considération de l’intérêt du service et de l’aptitude de l’intéressé. » ;
2° L’article 4 est abrogé.
XIV. – La loi n° 89-1007 du 31 décembre 1989 relative au corps des ingénieurs du contrôle de la navigation aérienne est ainsi modifiée :
1° L’article 4 est abrogé ;
2° À l’article 5, après le mot : « ingénieurs », sont insérés les mots : « et anciens ingénieurs ».
XV. – L’article 24 de la loi n° 96-452 du 28 mai 1996 portant diverses mesures d’ordre sanitaire, social et statutaire est ainsi modifié :
1° Le II est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les mots : « des corps mentionnés au I ci-dessus » sont remplacés par les mots : « appartenant ou ayant appartenu aux corps du personnel de surveillance de l’administration pénitentiaire » ;
b) La seconde phrase du deuxième alinéa est supprimé ;
c) Le troisième alinéa est ainsi modifié :
– la première phrase est supprimée ;
– à la seconde phrase, les mots : « leur être accordée » sont remplacés par les mots : « être accordée aux fonctionnaires mentionnés au c du 1° de l’article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite » ;
2° Le III est abrogé.
XVI. – La première phrase de l’article 78 de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites est ainsi modifiée :
1° Les mots : « aux fonctionnaires relevant de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, dont la limite d’âge est fixée à soixante-deux ans » sont remplacés par les mots : « aux personnes ayant ou ayant eu la qualité de fonctionnaire hospitalier, au sens de l’article L. 5 du code général de la fonction publique, » ;
2° Les mots : « I de l’article L. 24 du même code » sont remplacés par les mots : « deuxième alinéa du 1° du I de l’article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite ».
XVII. – L’article 93 de la loi n° 2003-1312 du 30 décembre 2003 de finances rectificative pour 2003 est ainsi modifié :
1° Le I est ainsi modifié :
a) À la première phrase du premier alinéa, après le mot : « appartenant », sont insérés les mots : « ou ayant appartenu » ;
b) Le deuxième alinéa est supprimé ;
2° Le II est abrogé.
XVIII. – Au quatrième alinéa du II de l’article 3 de la loi n° 2005-5 du 5 janvier 2005 relative à la situation des maîtres des établissements d’enseignement privés sous contrat, les mots : « de soixante-deux ans » sont remplacés par les mots : « mentionné à l’article L. 161-17-2 du code de la sécurité sociale ».
XIX. – L’article 37 de la loi n° 2010-751 du 5 juillet 2010 relative à la rénovation du dialogue social et comportant diverses dispositions relatives à la fonction publique est ainsi modifié :
a) À la fin de la première phrase du I, les mots : « soixante-sept ans » sont remplacés par les mots : « l’âge mentionné au 1° de l’article L. 556-1 du code général de la fonction publique » ;
b) Le dernier alinéa du III est ainsi rédigé :
« III. – Par dérogation au premier alinéa du 1° du I de l’article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite, l’âge d’ouverture du droit à pension applicable aux fonctionnaires mentionnés au présent III est fixé à soixante-deux ans. Par dérogation à l’article L. 14 bis du code des pensions civiles et militaires de retraite, leur âge d’annulation de la décote est fixé à soixante-cinq ans. »
XX. – A. – Par dérogation à l’article L. 13 du code des pensions civiles et militaires de retraite, la durée des services et de bonifications requise pour les fonctionnaires nés :
1° Avant le 1er septembre 1961, est celle applicable avant l’entrée en vigueur du présent article ;
2° Entre le 1er septembre 1961 et le 31 décembre 1964, est celle fixée aux 2° à 5° de l’article L. 161-17-3 du code de la sécurité sociale.
B. – Par dérogation à l’article L. 13 du code des pensions civiles et militaires de retraite et au A du présent XX :
1° La durée des services et de bonification requise pour les fonctionnaires bénéficiant, au titre de la catégorie active, d’un droit au départ à l’âge anticipé est fixée :
a) Pour ceux nés avant le 1er septembre 1966, à celle applicable avant l’entrée en vigueur du présent article ;
b) Pour ceux nés à compter du 1er septembre 1966, à 169 trimestres à compter du 1er septembre 2023. Cette durée augmente d’un trimestre par génération pour les générations nées en 1968 et 1969 ;
2° Pour les fonctionnaires bénéficiant, au titre de la catégorie super-active, d’un droit au départ à l’âge minoré, cette durée est fixée :
a) Pour ceux nés avant le 1er septembre 1971, à celle applicable avant l’entrée en vigueur du présent article ;
b) Pour ceux nés à compter du 1er septembre 1971, à 169 trimestres à compter du 1er septembre 2023. Cette durée augmente d’un trimestre par génération pour les générations nées en 1973 et 1974.
C. – Par dérogation à l’article L. 13 du code des pensions civiles et militaires de retraite, la durée de services et de bonifications requise pour les fonctionnaires civils, autres que ceux mentionnés aux A et B du présent XX et les militaires remplissant les conditions de liquidation de la pension avant l’âge de soixante ans est égale :
1° Pour ceux pouvant liquider leur pension avant le 1er septembre 2023, à celle applicable avant l’entrée en vigueur du présent article ;
2° Pour ceux pouvant liquider leur pension à compter du 1er septembre 2023, à 169 trimestres. Cette durée augmente d’un trimestre par an à compter du 1er janvier 2025 pour atteindre, au 1er janvier 2027, la durée mentionnée au 6° de l’article L. 161-17-3 du code de la sécurité sociale.
D. – Par dérogation au III de l’article L. 14 du code des pensions civiles et militaires de retraite, l’âge à compter duquel le coefficient de majoration s’applique est :
1° Pour les fonctionnaires mentionnés au 1° du A, au 1° du C, au a du 1° du F et au a du 2° du F du présent XX, celui applicable avant l’entrée en vigueur du présent article ;
2° Pour les fonctionnaires mentionnés au 1° du F du présent XX, à l’âge défini au même 1° augmenté de cinq années ;
3° Pour les fonctionnaires mentionnées au 2° du F du présent XX, à l’âge défini au même 2° augmenté de dix années ;
E. – 1. Pour l’application du 1° de l’article L. 14 bis du code des pensions civiles et militaires de retraite, l’âge d’annulation de la décote des fonctionnaires nés avant le 1er janvier 1968 est égal à soixante-sept ans. Par dérogation, pour ceux nés avant le 1er janvier 1958, l’âge d’annulation de la décote est celui applicable avant l’entrée en vigueur du présent article.
2. Pour l’application des 2° et 3° de l’article L. 14 bis du code des pensions civiles et militaires de retraite, l’âge d’annulation de la décote des fonctionnaires mentionnés respectivement aux 1° et 2° du F du présent XX est égal respectivement à soixante-deux ans et à cinquante-sept ans. Par dérogation, pour les fonctionnaires actifs nés avant le 1er janvier 1963 et les fonctionnaires super-actifs nés avant le 1er janvier 1968, l’âge d’annulation de la décote est celui applicable avant l’entrée en vigueur du présent article.
F. – Par dérogation à l’article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite :
1° Pour les fonctionnaires relevant du deuxième alinéa du 1° du I du même article L. 24 et nés :
a) Avant le 1er septembre 1966, l’âge anticipé est fixé à 57 ans ;
b) À compter du 1er septembre 1966, l’âge anticipé résultant des dispositions antérieures à la présente loi augmente de trois mois par génération jusqu’à cinquante-neuf ans ;
2° Pour les fonctionnaires relevant des troisième à dernier alinéas du même 1° et nés :
a) Avant le 1er septembre 1971, l’âge minoré est fixé à 52 ans ;
b) À compter du 1er septembre 1971, l’âge minoré résultant des dispositions antérieures à la présente loi augmente de trois mois par génération jusqu’à cinquante-quatre ans.
G. – Par dérogation aux 2°, 3° et 4° de l’article L. 25 du code des pensions civiles et militaires de retraite, l’âge avant lequel la liquidation ne peut intervenir, applicable avant l’entrée en vigueur de la présente loi, est :
1° Pour les militaires nés avant le 1er septembre 1971, fixé à 52 ans ;
2° Pour les militaires nés à compter du 1er septembre 1971, rehaussé de trois mois à compter du 1er septembre 2023 et augmente de trois mois par an à partir du 1er janvier 2024 jusqu’à atteindre l’âge de cinquante-quatre ans.
XXI. – Les cotisations versées avant la publication de la présente loi en application des articles L. 351-14, L. 351-14-1, L. 634-2-1, L. 643-2, L. 653-5, L. 742-2, L. 742-4 et L. 742-7 du code de la sécurité sociale, de l’article L. 9 bis du code des pensions civiles et militaires de retraite et des articles L. 732-27-1 et L. 732-52 du code rural et de la pêche maritime ainsi que celles versées en application des dispositions réglementaires ayant le même objet applicables aux fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales et aux ouvriers régis par le régime des pensions des ouvriers des établissements industriels de l’État par l’assuré né à compter du 1er septembre 1961 lui sont remboursées à sa demande, à la condition qu’il n’ait fait valoir aucun des droits aux pensions personnelles de retraite auxquels il peut prétendre au titre des régimes de retraite de base et complémentaires légalement obligatoires.
Le montant des cotisations à rembourser est calculé en revalorisant les cotisations versées par l’assuré par application chaque année du coefficient annuel de revalorisation mentionné à l’article L. 161-23-1 du code de la sécurité sociale.
Les demandes de remboursement sont présentées dans un délai de deux ans à compter de la promulgation de la présente loi.
XXII. – Les assurés ayant demandé leur pension avant l’entrée en vigueur de la présente loi et dont la pension entre en jouissance après le 31 août 2023 bénéficient, sur leur demande, d’une annulation de leur pension ou de leur demande de pension. Les conditions de cette annulation sont fixées par décret.
XXIII. – Le 6° du III est applicable aux services accomplis en qualité d’agent contractuel à compter de l’entrée en vigueur de la présente loi.
XXIV. – Le présent article est applicable aux fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales ainsi qu’aux ouvriers régis par le régime des pensions des ouvriers des établissements industriels de l’État, dans des conditions déterminées, en tant que de besoin, par décret en Conseil d’État.
XXV. – 1. Les VII, IX, XII et XIII entrent en vigueur deux mois après la promulgation de la présente loi.
2. Les autres dispositions du présent article, à l’exception des VI et VIII, s’appliquent aux pensions prenant effet à compter du 1er septembre 2023.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 1142, présenté par M. Menonville, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 3
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…) Le même premier alinéa est complété par les mots : « , excepté pour les femmes assurées sociales ayant eu deux enfants ou plus pour lesquelles l’âge est fixé à soixante-trois ans » ;
La parole est à M. Franck Menonville.
M. Franck Menonville. Il est retiré, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 1142 est retiré.
L’amendement n° 2633 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
I. - Après l’alinéa 5
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les femmes assurées sociales, l’âge mentionné au premier alinéa est abaissé d’autant de trimestres qu’accordés automatiquement à la mère pour chaque enfant au titre de l’incidence sur la vie professionnelle de la maternité, dans la limite de huit trimestres. Cet âge ne peut, au titre de l’application de la phrase précédente, être inférieur à soixante-deux ans. » ;
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
IV. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
…. – La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du présent article est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
…. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à Mme Monique Lubin.
Mme Monique Lubin. La surcote de 5 % prévue par le rapporteur René-Paul Savary pour les femmes prenant leur retraite à 64 ans, mais ayant tous leurs trimestres à l’âge de 63 ans, ne nous semble pas tout à fait juste.
Aujourd’hui, une femme qui arrive à 62 ans avec tous ses trimestres et qui décide volontairement de travailler jusqu’à 64 ans peut bénéficier de 10 % de surcote : avec la proposition de la commission, elle perd donc 5 points. (Brouhaha.)
Un peu de silence à droite, c’est difficile de parler au micro ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. Laissez-la parler.
Cela dit, madame Lubin, certains de vos collègues de groupe sont eux-mêmes en train de discuter au fond de l’hémicycle…
Mme Monique Lubin. C’est mon oreille gauche qui est plus sensible… (Sourires sur les travées du groupe SER.)
Nous proposons donc que les mères de famille ayant tous leurs trimestres puissent prendre leur retraite à 62 ans : elles auront en effet atteint la durée totale de cotisation grâce aux trimestres acquis pour enfants. C’est un amendement de justice et de logique.
M. le président. L’amendement n° 1961 rectifié, présenté par MM. Chasseing, Guerriau et Decool, Mme Mélot, MM. Lagourgue, Grand, Wattebled, Menonville, A. Marc et Capus, Mme Paoli-Gagin, M. Laménie, Mme Thomas et MM. Calvet, Milon, Levi et Chatillon, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 5
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…) Est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« L’âge mentionné au premier alinéa est abaissé de six mois pour les femmes assurées sociales, pour chacun de leurs enfants, au titre de l’incidence sur la vie professionnelle de la maternité, notamment de la grossesse et de l’accouchement, dans la limite de vingt-quatre mois. Cet âge ne peut, au titre de l’application de la phrase précédente, être inférieur à soixante-deux ans. » ;
La parole est à Mme Colette Mélot.
Mme Colette Mélot. Il est retiré.
M. le président. L’amendement n° 1961 rectifié est retiré.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 2633 rectifié ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Il est effectivement intéressant de penser aux carrières des mères de famille, qui se traduisent par des pensions n’étant pas toujours à la hauteur.
Les majorations d’assurance accordées aux mères de famille sont utiles, à la fois pour combler les carrières de ces dernières et les aider à parvenir au taux plein. Elles sont également intéressantes pour reconnaître leur volonté de concilier carrière et maternité.
Ces majorations sont cependant différentes selon qu’il s’agit du régime public ou du régime privé : quatre trimestres pour la maternité, plus quatre trimestres à distribuer pour l’éducation des enfants dans privé, contre seulement deux trimestres dans le public. C’est un point qu’il convient de souligner.
La différence, madame Lubin, entre le fait d’avancer l’âge de départ d’un an et prévoir une surcote, c’est que la surcote respecte la philosophie de la réforme : on continue de travailler, on part à 64 ans, mais avec une récompense. Car les Français l’ont bien compris, il s’agit de travailler plus !
Par ailleurs, la surcote présente comme autre avantage d’augmenter la pension des mères de famille et de réduire l’écart entre les niveaux de pension hommes-femmes.
C’est la raison pour laquelle nous avons choisi ce dispositif, qui de surcroît – c’est un argument de plus en sa faveur – n’est pas discriminatoire au regard de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme. Abaisser d’un an l’âge de départ de certaines femmes constituerait en effet une différence de traitement par rapport aux hommes.
Je vous invite donc à soutenir notre amendement, qui constitue la meilleure réponse aux difficultés des mères de famille. J’émets donc un avis défavorable sur votre amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion. L’avis du Gouvernement est défavorable, et ce pour plusieurs raisons.
La première concerne la question d’égalité que M. le rapporteur, vient d’évoquer – je n’y reviendrai pas.
La deuxième raison relève de la mécanique même de l’amendement défendu par Mme Lubin.
La surcote est accessible aujourd’hui – elle le sera demain selon les mêmes modalités – à deux conditions cumulatives : avoir atteint l’âge d’ouverture des droits tel que fixé au régime général et avoir atteint la durée d’affiliation au régime requise pour pouvoir faire valoir ses droits à taux plein. La surcote intervient donc après l’âge d’ouverture des droits (AOD) et à la condition de disposer de l’intégralité des trimestres requis pour bénéficier d’une retraite à taux plein.
Votre amendement, madame la sénatrice, pose une difficulté en ce qu’il crée des âges différenciés non entre les femmes et les hommes, mais entre les mères et les hommes – puisqu’il faudrait bénéficier de trimestres au titre de la maternité.
Notre préférence va à l’amendement présenté par la commission des affaires sociales – dont j’ai déjà eu l’occasion de parler – et dont le président Bruno Retailleau est à l’initiative, car il permet de cumuler les avantages des deux systèmes.
Premier avantage, il permet aux femmes ayant eu une carrière hachée – elles y sont plus exposées que les hommes – de pouvoir continuer à mettre en œuvre et à utiliser des trimestres validés au titre de la maternité pour compléter la durée d’affiliation requise, et ainsi de pouvoir partir à l’âge d’ouverture des droits, nonobstant les conditions de fixation de celui-ci, à taux plein et sans décote. C’est donc un élément de protection, si tant que le nombre de trimestres ainsi validés suffit.
Deuxième avantage, si un assuré – plus généralement, une assurée, mais le terme demeure générique – a atteint à la fois l’âge de 63 ans et la durée d’affiliation requise – 168 trimestres aujourd’hui, 172 en 2027 –, la surcote devient non pas possible, mais automatique pour les trimestres cotisés entre les 63 ans – si tant est que la durée d’assurance requise (DAR) est atteinte – et les 64 ans, ce qui à l’échelle d’une année représente une majoration non pas des trimestres acquis, mais de la totalité de la pension de 5 % à hauteur de 1,25 % par trimestre.
La préférence du Gouvernement, je le répète, va donc à l’amendement adopté par la commission, car il permet à la fois de garder le bénéfice d’une majoration de durée pour les assurés, principalement les femmes, ayant une carrière hachée ou incomplète, et une possibilité de surcote pour celles qui ont une carrière complète.
Cela répond à une évolution de la société, qui a vu le taux d’emploi des femmes progresser – c’est heureux –, cependant que concilier vie professionnelle et maternité est moins difficile qu’il y a vingt, trente ou quarante ans. C’est cet intérêt-là que nous trouvons à l’amendement de la commission, alors que celui que vous proposez prévoit des âges différenciés qui ne nous paraissent pas très acceptables en droit au regard du principe d’égalité. Par ailleurs, il méconnaît le double aspect que j’ai évoqué tout à l’heure.
M. le président. La parole est à Mme Michelle Meunier, pour explication de vote.
Mme Michelle Meunier. Nous sommes aujourd’hui le 8 mars, journée internationale de lutte pour les droits des femmes. Cet amendement tombe donc à pic !
On le répète à l’envi, les femmes seront les grandes perdantes de cette réforme des retraites. Pour ma part, je voterai cet amendement. En termes de financement – nous sommes bien dans un PLFRSS –, il n’induit aucun surcoût : il pas plus coûteux que la surcote de 5 % prévue par l’amendement déposé par René-Paul Savary. Qui plus est, sur le fond, cette réforme est surtout injuste envers les femmes.
Par ailleurs, je m’étonne : pourquoi tous les amendements ont-ils été retirés avant d’être discutés ? Où sont l’esprit du Sénat et son sens du débat ? Où est la démocratie ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Puisqu’il est question d’égalité, moi, ce que j’aimerais, c’est l’égalité entre les mères et les femmes pour une retraite à taux plein avec quarante-trois annuités de cotisation ! On déroge ici à cette égalité !
Une autre égalité serait d’accorder ces 5 % à tous ceux – hommes, femmes, mères ou non – ayant atteint le taux plein à 63 ans.
Monsieur le rapporteur, vous avez affirmé que ces mères de famille, en travaillant un an de plus, percevront une meilleure pension. Mais c’est méconnaître le mécanisme de la surcote ! Une surcote est actuarielle : c’est-à-dire qu’elle est neutre par rapport au patrimoine retraite et à l’augmentation de 5 % !
Car vous oubliez un petit détail, à savoir qu’elles travailleront un an de plus. Or, pendant ce temps, elles ne toucheront pas de pension. Le patrimoine retraite, qui est la somme des pensions perçues durant toute la durée de la retraite, est alors strictement égal dans un cas comme dans l’autre. Les femmes gagneront moins avec cette réforme, car elles pouvaient déjà auparavant bénéficier d’une surcote, mais à 62 ans, et non pas à 63 ans, comme l’a rappelé ma collègue.
Ne dites donc pas que vous augmentez les pensions : si ces femmes travaillent jusqu’à 70 ans, leur pension augmentera aussi, mais elles perdront en patrimoine retraite !
Demande de clôture
M. le président. La parole est à M. Bruno Retailleau.
M. Bruno Retailleau. Monsieur le président, sur le fondement de l’article 38, alinéa 1, du règlement, je demande la clôture des explications de vote sur l’amendement n° 2633 rectifié. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Protestations sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
Mme Cathy Apourceau-Poly. C’est honteux !
M. David Assouline. Vous ne pouvez pas faire ça !
M. Bernard Jomier. Il n’y a qu’un amendement !
M. le président. Je suis saisi, par M. Bruno Retailleau, président du groupe Les Républicains, d’une demande de clôture des explications de vote sur l’amendement n° 2633 rectifié. (Exclamations indignées sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
En application de l’article 38, alinéa 1, du règlement, la clôture peut être proposée lorsqu’au moins deux orateurs d’avis contraire sont intervenus.
Peuvent prendre la parole sur cette proposition un orateur par groupe et un sénateur ne figurant sur la liste d’aucun groupe.
La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Mme Laurence Rossignol. Monsieur le président Retailleau, vous avez fait tomber quasiment tous nos amendements sur l’article 7 ! (On s’en félicite sur les travées du groupe Les Républicains.) Vous voulez le débat le plus restreint possible. Même vos collègues ne peuvent présenter leurs amendements. C’est la secte Jones, un vrai suicide collectif !
Nous avons un amendement important qui porte sur les bonifications pour les agentes de la fonction publique et les majorations de durée d’assurance pour les femmes du secteur privé, et vous ne voulez même pas discuter celui-là ! Un 8 mars ! Vous rendez-vous compte ? C’est une honte ! (Vifs applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST. – Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Stéphane Le Rudulier. Mais vous ne voulez pas discuter !
Mme Laurence Rossignol. C’est non plus une application du règlement, mais une volonté délibérée de faire taire l’opposition par tous les moyens, y compris sur des sujets déterminants. Vous n’allez pas nous expliquer que nous sommes hors sujet avec cet amendement !
Et tout à l’heure, sur les amendements de M. Savary, aurons-nous le droit de nous exprimer ? Faut-il demander la permission écrite, avec les formes, au président de séance ?
« Monsieur le président, pourriez-vous nous indiquer si nous aurons le droit de nous exprimer ?
« Je vous remercie beaucoup de votre attention. »
Est-ce cela l’idée : nous humilier ? Mais ce n’est pas nous que vous humiliez ; ce sont les femmes, toutes les femmes ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST. – Exclamations sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. David Assouline. Je n’ai jamais vu cela !
M. le président. La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. Sur l’application de cet article 38, on entend beaucoup de récriminations, mais j’aimerais que nous nous souvenions des conditions dans lesquelles nous avons fixé tous ensemble cette règle de « bien vivre ensemble ». (M. David Assouline s’exclame.)
Cette disposition est issue d’une recommandation faite dans un rapport réalisé en mars 2015 par un membre UMP de la majorité de l’époque et un membre PS de l’opposition. Le bureau du Sénat a adopté ce rapport. Cette recommandation a été inscrite à l’article 10 de la proposition de résolution que le président Larcher a déposée. Vous pouvez aller voir les travaux, tant en commission qu’en séance : cet article 10, désormais article 38 dans notre règlement, qui est un peu notre constitution commune, n’a fait l’objet d’aucune remise en cause ni d’aucun amendement. Il a été adopté sans modification, ce qui montre qu’il a reçu un large assentiment. Autrement dit, il n’y a pas eu de révolution au Palais du Luxembourg.
J’ajoute que ce « chantier » sur le règlement faisait suite à de premières réflexions entamées par Jean-Pierre Bel, à l’époque président du Sénat.
J’ai entendu hier un orateur s’exprimant des travées de la gauche dire que « nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude ». Cet adage s’applique parfaitement à la situation que nous vivons aujourd’hui. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Mme Laurence Cohen. Monsieur le président Retailleau, vous dégainez l’article 38 pour nous empêcher de parler. Du côté du groupe Les Républicains, on va chercher à minimiser cette atteinte en expliquant que nous sommes déjà mercredi et que nous avons suffisamment débattu…
M. David Assouline. Pas de l’article 7 !
Mme Laurence Cohen. Telle n’est pas la conception que nous avons du débat.
L’article 7 est vraiment le cœur de la réforme, et, en plus, vous attaquez un amendement, le 8 mars… (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Eh oui, mes chers collègues, ne vous en déplaise, c’est la journée de lutte pour les droits des femmes. Or cet amendement ouvre justement un débat sur notre conception de l’égalité professionnelle et des retraites, notre conception de la progression des salaires et des carrières féminines.
Et vous n’en voulez pas !
Par ailleurs, j’entends une petite musique dans les rangs LR, approuvée par le Gouvernement, et que j’ai dénoncée au nom de mon groupe lors de la discussion de la motion référendaire : vous voulez favoriser non pas les femmes en général, mais les mères de famille ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) C’est un choix vraiment problématique. Nous, nous voulons l’égalité absolue pour toutes les femmes.
Enfin, monsieur Retailleau, vous n’avez pas dû lire l’amendement de ma collègue, qui porte justement sur les droits familiaux, ce qui devrait vous intéresser, vous qui considérez que le modèle familial « papa, maman, les enfants » est le nec plus ultra ! Réfléchissez un peu ! (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST. – Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Bruno Retailleau s’esclaffe.)
M. Max Brisson. Caricature !
M. Olivier Paccaud. Eh oui ! Nous défendons la famille traditionnelle ! (M. André Reichardt renchérit.)
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
Mme Raymonde Poncet Monge. J’invite les Français à réécouter les trois interventions sur l’amendement avant que ne soit opposée la demande de clôture. Elles portaient vraiment sur le fond. Quand je parlais de patrimoine retraite et de calcul actuariel, j’étais sur le fond.
J’en déduis que vous ne voulez pas que nous débattions de l’article 7.
Je vous rappelle quand même qu’à l’Assemblée nationale vous avez osé prendre les syndicats à témoin, en regrettant que l’article 7 ne soit pas débattu.
Nous y sommes ! Nous avons jusqu’à dimanche et nous aurions pu passer au moins deux jours sur l’article 7. Mais vous ne voulez pas discuter de cet article, parce qu’il porte en lui les conséquences inégalitaires et brutales de ce texte pour les travailleurs. C’est avec cet article que vous allez leur prendre 18 milliards d’euros.
En revanche, vous êtes tout à fait disposés à parler des autres articles, ceux qui rendent aux travailleurs 3 milliards d’euros sur ce qu’ils ont payé.
Pas de référence aux 18 milliards d’euros et à leurs conséquences sur la pénibilité du travail, sur les femmes, sur les ouvriers, mais tout, jusqu’à dimanche, sur les 3 petits milliards d’euros pour atténuer la brutalité de cette réforme, lesquels sont l’unique objet de la communication gouvernementale.
Nous voulons bien discuter des mesures d’atténuation de la brutalité de la réforme, mais, avant, il faut parler de son caractère précisément brutal, c’est-à-dire de l’article 7, que vous voulez escamoter pour mieux mettre l’éclairage sur les mesures d’accompagnement. (Applaudissements sur les travées des groupes GEST et SER.)
M. le président. Mes chers collègues, il y a encore beaucoup d’amendements sur l’article 7, ce qui nous permettra, je l’espère, d’aborder le fond du sujet.
Pour l’instant, nous sommes dans l’application du règlement, dont l’article 38 prévoit strictement les modalités du débat sur la proposition de clôture, formulée en l’occurrence par le groupe Les Républicains, avec un orateur par groupe.
La parole est à M. Michel Canévet, pour le groupe Union Centriste.
M. Michel Canévet. Quand j’entends mes collègues, j’ai l’impression que certains confondent débat et obstruction. (Exclamations sur les travées des groupes SER et CRCE.) À quoi a-t-on assisté depuis plusieurs jours si ce n’est à des tentatives d’obstruction ? Ce n’est pas du débat !
Le débat pourrait avoir lieu si vous étiez respectueux de la capacité de chacun à pouvoir s’exprimer. (Protestations sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
Le groupe Union Centriste regrette que, par l’obstruction, par la prolongation des débats, par des amendements qui n’ont aucun sens et qui sont similaires les uns aux autres, le débat soit entravé. Seraient-ils présentés rationnellement, alors le débat pourrait avoir lieu. De fait, nous n’avons pas d’autre choix que de soutenir la proposition qui vient d’être faite pour pouvoir avancer et examiner les vrais sujets à l’ordre du jour. (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)
M. le président. Conformément à l’article 38, alinéa 3, je consulte le Sénat sur cette proposition.
(La clôture est prononcée.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 2633 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Exception d’irrecevabilité
M. le président. Je suis saisi, par M. Savary et Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, d’une motion n° 4766.
Cette motion est ainsi rédigée :
Constatant que les amendements n° 2378 rectifié bis et n° 4322 rectifié sont contraires au principe d’égalité devant la loi des citoyens, consacré par l’article 6 de la Déclaration des droits de l’Homme de 1789, le Sénat les déclare irrecevables en application de l’article 44 bis, alinéa 10, du Règlement du Sénat.
En application de l’article 44 bis, alinéa 10, du règlement, ont seuls droit à la parole l’auteur de la demande d’irrecevabilité, un orateur d’opinion contraire, la commission saisie au fond – chacun disposant de deux minutes et demie –, ainsi que le Gouvernement.
Aucune explication de vote n’est admise.
La parole est à M. le rapporteur, pour la motion.
M. René-Paul Savary, rapporteur. Cette motion a pour objet de déclarer irrecevables les amendements n° 2378 rectifié bis et 4322 rectifié pour les mêmes motifs que ceux que nous avons opposés hier. Ces amendements, qui concernent des catégories particulières d’assurés, sont contraires au principe d’égalité consacré par l’article VI de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. (On se plaint sur plusieurs travées des groupes SER, CRCE et GEST que la motion n’a pas été distribuée. – Le texte est distribué dans l’hémicycle.)
M. le président. La parole est à M. David Assouline, contre la motion.
M. David Assouline. C’est dans la même veine que la clôture !
Nous avons donné des explications la nuit dernière et nous avons continué tout à l’heure.
Vous avancez un argument de fond, à savoir la rupture de l’égalité républicaine, alors que la commission et les services de la séance n’ont jamais jugé comme tels ces amendements. Il s’agit donc d’un artifice.
Cela me permet de revenir sur l’article 38. Je ne sais pas si vous vous réalisez à quel point votre attitude est arbitraire.
M. Didier Mandelli. Il y a eu un vote !
M. David Assouline. Je reconnais la légitimité de cet article dans notre règlement, mais c’est l’usage que vous en faites que je n’accepte pas. Votre argument pour justifier le recours à cet article consiste à dire que nous nous livrerions à de l’obstruction par le dépôt de milliers d’amendements identiques.
M. Serge Babary. En effet, ça suffit !
M. David Assouline. Or vous venez de l’utiliser sur le seul amendement maintenu en discussion, empêchant ainsi des explications de vote différenciées, alors que vous avez accepté ces derniers jours cinquante heures d’interventions multiples sur des amendements parfois secondaires. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.)
Les choses sont claires… Pour moi, rien n’est secondaire, mais l’amendement précédent était vraiment important.
En fait, vous ne voulez pas discuter de l’article 7, qui n’a déjà pas été débattu à l’Assemblée nationale. C’est un scandale !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre. Le Gouvernement ne conteste jamais, sur ce texte comme sur les autres, les décisions procédurales des commissions. Je m’en remets évidemment à la sagesse du Sénat.
M. Assouline vient de dire qu’un certain nombre d’amendements pouvaient avoir un caractère secondaire. Dont acte ! Il ne m’avait pas échappé que de nombreux amendements, transformés ensuite en sous-amendements, étaient assez surprenants ou redondants, soit dit sans juger de leur recevabilité. Il en est ainsi de celui qui prévoyait la possibilité de maintenir à 62 ans l’âge de départ à la retraite des internes en médecine… Si vous connaissez beaucoup d’internes en médecine de 62 ans ou 64 ans, je suis curieux de les connaître. (Mme la rapporteure générale de la commission des affaires sociales applaudit.)
Cela montre bien le caractère répétitif de l’opération.
M. David Assouline. Ce n’est pas le cas avec cet amendement !
M. le président. Je mets aux voix la motion n° 4766, tendant à opposer l’exception d’irrecevabilité.
Je rappelle que l’adoption de cette motion rendrait ces amendements irrecevables.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Je rappelle que le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 204 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 344 |
Pour l’adoption | 251 |
Contre | 93 |
Le Sénat a adopté.
En conséquence, les amendements nos 2378 rectifié bis et 4322 rectifié sont déclarés irrecevables.
Article 7 (suite)
M. le président. L’amendement n° 4431 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 4
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…) Après le même deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les fonctionnaires de l’État qui résident en Polynésie française et qui justifient de leurs intérêts matériels et moraux sur ce territoire, l’âge d’ouverture du droit à une pension de retraite est celui prévu au premier alinéa du présent article diminué de deux années. » ;
La parole est à M. Gérard Lahellec.
M. Gérard Lahellec. Aujourd’hui, 20 % des exploitants agricoles ou des employés sont en incapacité et 34 % des ouvriers sont contraints dans les activités de la vie quotidienne dès leur entrée à la retraite.
C’est la preuve, s’il en fallait une, que l’allongement de la durée de la vie n’est pas un argument pour justifier le report de l’âge légal de départ à la retraite. Cela est encore moins vrai dans les territoires ultramarins. En effet, l’espérance de vie y est de six années en moyenne inférieure à celle des habitants de la métropole. La réforme doit donc tenir compte de ces réalités.
Nous souhaitons que l’âge de départ à la retraite à 64 ans ne soit pas retenu pour les fonctionnaires de l’État habitant la Polynésie française. Nous ne pouvons pas ajouter de l’inégalité à l’inégalité. Cette réforme risque de creuser encore les écarts et les habitants des outre-mer méritent mieux.
M. le président. Le sous-amendement n° 4768, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Amendement n° 4431 rectifié, alinéa 4
Supprimer les mots :
matériels et
La parole est à Mme Monique Lubin.
Mme Monique Lubin. Défendu.
M. le président. Le sous-amendement n° 4767, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Amendement n° 4431 rectifié, alinéa 4
Supprimer les mots :
et moraux
La parole est à M. Franck Montaugé.
M. Franck Montaugé. Dans le cadre d’un débat dont la majorité sénatoriale a sciemment dégradé la qualité et le niveau par le recours à des règles de procédure, je trouve personnellement très utile que ces sous-amendements nous permettent d’évoquer les différentes catégories socioprofessionnelles de la population française qui sont mises à mal par ce projet de réforme des retraites inique.
Cet amendement de nos collègues du groupe CRCE vise à modifier les critères permettant aux fonctionnaires résidant en Polynésie française de prendre leur retraite. Avec ce sous-amendement, nous proposons de ne prendre en compte que les intérêts matériels, la notion d’intérêt moral étant pour le moins subjective.
M. le président. Le sous-amendement n° 4769, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Amendement n° 4431 rectifié, alinéa 4
Après le mot :
territoire
insérer les mots :
depuis au moins trois mois
La parole est à Mme Monique Lubin.
Mme Monique Lubin. Cet amendement tend à fixer un délai minimal pour la prise en compte des critères ouvrant droit au départ à la retraite pour les fonctionnaires résidant en Polynésie française et prévus par cet amendement. Il semble préférable de prévoir un délai de trois.
Comme l’a dit ma collègue Raymonde Poncet Monge, nous avions en tête de discuter de l’article 7, symbole de la brutalité de ce projet de loi, afin de l’amender pour le rendre moins brutal, même si nous souhaitons toujours sa suppression.
Par les artifices que vous utilisez, vous nous empêchez d’aborder le cœur de ce texte brutal et les conséquences qu’il aura sur des millions de salariés dans ce pays.
M. le président. Le sous-amendement n° 4770, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Amendement n° 4431 rectifié, alinéa 4
Après le mot :
territoire
insérer les mots :
depuis au moins quatre mois
La parole est à M. Jean-Michel Houllegatte.
M. Jean-Michel Houllegatte. Je voudrais profiter de ce sous-amendement pour attirer l’attention sur les fonctionnaires de l’État qui résident en Polynésie française : policiers, contrôleurs aériens, personnel du Haut-Commissariat.
Ces fonctionnaires touchent une bonification de salaire pour tenir compte du coût de la vie en Polynésie française. Ce différentiel entre les grilles indiciaires est de 0,84, c’est-à-dire qu’un fonctionnaire de l’État en poste sur ce territoire a un salaire 1,84 fois supérieur à ce qu’il serait en métropole. Il paie donc des cotisations sur ce salaire majoré.
En 2008, le ministre de l’outre-mer de l’époque, Yves Jégo, a considéré que l’indemnité temporaire de retraite (ITR), qui permettait aux pensions d’être majorées de 84 %, donnait lieu à des dérives, des fonctionnaires métropolitains étant attirés par la bonification. On a appelé cela les retraites « cocotiers »… Il a donc été décidé de supprimer progressivement ce dispositif sur vingt ans, mais les fonctionnaires qui feront le choix de rester en Polynésie vont voir leur retraite dégradée par rapport au coût de la vie.
Aussi, il importe de proposer des mesures compensatoires, sachant qu’une négociation est en cours avec les services du haut-commissaire, pour faire en sorte que les fonctionnaires d’État souhaitant rester en Polynésie française puissent avoir des conditions de vie décentes.
M. le président. Le sous-amendement n° 4771, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Amendement n° 4431 rectifié, alinéa 4
Après le mot :
territoire
insérer les mots :
depuis au moins cinq mois
La parole est à Mme Monique Lubin.
Mme Monique Lubin. Défendu.
M. le président. Le sous-amendement n° 4772, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Amendement n° 4431 rectifié, alinéa 4
Après le mot :
territoire
insérer les mots :
depuis au moins six mois
La parole est à M. Lucien Stanzione.
M. Lucien Stanzione. Monsieur le président, laissez-nous le temps d’intervenir !
L’amendement concerne la retraite des fonctionnaires d’État en Polynésie française. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.) Il semble préférable de prévoir un délai de six mois pour apprécier les intérêts matériels et moraux ouvrant droit à la retraite.
M. le président. Le sous-amendement n° 4773, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Amendement n° 4431 rectifié, alinéa 4
Remplacer les mots :
deux années
par les mots :
neuf mois
La parole est à M. Bernard Jomier.
M. Bernard Jomier. Ces sous-amendements sont importants. Jean-Michel Houllegatte a très bien expliqué quelle était la problématique.
Ce délai anticipé de départ à la retraite pour les fonctionnaires de l’État résidant en Polynésie française et justifiant des intérêts requis doit être, à notre sens, inférieur à la durée prévue par les auteurs de l’amendement.
Nous sommes bien évidemment ouverts à une discussion avec le rapporteur sur cette question.
M. le président. Le sous-amendement n° 4774, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Amendement, n° 4431 rectifié, alinéa 4
Remplacer les mots :
de deux années
par les mots :
d’une année
La parole est à M. Jérôme Durain.
M. Jérôme Durain. Dans le droit fil des amendements défendus par mes collègues Houllegatte et Jomier, nous estimons qu’un départ avancé d’un an – et non de deux ans – pour les fonctionnaires de l’État résidant en Polynésie française serait plus justifié.
M. le président. Le sous-amendement n° 4775, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Amendement n° 4431 rectifié, alinéa 4
Remplacer les mots :
de deux années
par les mots :
de dix-huit mois
La parole est à M. Jérôme Durain.
M. Jérôme Durain. Dans le même esprit, nous proposons là de réduire à dix-huit mois le délai prévu à l’amendement. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Cet amendement tend à opérer une distinction entre le régime hexagonal et celui de la Polynésie française. Il y a des propositions tout à fait intéressantes.
Vous l’avez dit, le dispositif ITR s’éteindra en 2028. M. le ministre nous le précisera dans son avis. Cependant, vous avez raison, il conviendrait sans doute de tenir compte de cette majoration de pension.
Il existe déjà beaucoup de possibilités pour un départ à la retraite anticipé. Nous passons beaucoup de temps sur l’article 7, qui consacre l’âge de 64 ans, mais nous passerons aussi beaucoup de temps sur les dérogations à prévoir.
Nous ne souhaitons pas aller à l’encontre de la philosophie de cette réforme, qui est plutôt de promouvoir un effort collectif sur la durée de travail. C’est la raison pour laquelle je donne un avis défavorable sur l’amendement.
Quant aux sous-amendements, ils méritent une étude approfondie de manière à en mesurer les effets. La commission n’a pas pu les examiner, mais j’estime qu’ils sont irrecevables. (Exclamations sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. Victorin Lurel. C’est une discrimination contre les outre-mer !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stanislas Guerini, ministre de la transformation et de la fonction publiques. Sur cet amendement et ces sous-amendements, vous donnez des explications très générales,…
M. Victorin Lurel. Si vous voulez des chiffres, nous les avons !
M. Stanislas Guerini, ministre. … à savoir les différences de coût de la vie entre les territoires ultramarins et métropolitain, sur un point très particulier, qui est celui du statut des fonctionnaires résidant en Polynésie française.
M. Victorin Lurel. Et aussi à Wallis-et-Futuna, en Nouvelle-Calédonie, à Saint-Pierre-et-Miquelon, à La Réunion, etc.
M. Stanislas Guerini, ministre. L’amendement vise à différencier l’effort contributif demandé à tous les actifs du pays. J’y suis défavorable pour des raisons d’équité.
Ensuite, à travers les sous-amendements, vous abordez deux sujets bien particuliers qui ne sont pas touchés par la réforme que nous sommes en train d’examiner. Tout d’abord, notre texte ne concerne pas les intérêts matériels et moraux. Ensuite, l’indemnité temporaire de retraite, vous l’avez dit, a été mise en extinction depuis 2008. Elle n’a été remise en cause par aucun gouvernement depuis lors, y compris des gouvernements socialistes.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Ça vous rappelle votre jeunesse ! (Sourires sur les travées du groupe SER.)
M. Stanislas Guerini, ministre. Ce dispositif n’a aucun rapport direct avec la réforme des retraites.
Cela dit, pour ne pas être accusé de répondre à côté, je vous signale qu’en réponse à une question d’actualité au Gouvernement, le 11 octobre dernier à l’Assemblée nationale, j’ai tenu à garantir le respect absolu des intérêts matériels et moraux, qui ont été définis très clairement par une jurisprudence du Conseil d’État.
Avec mon collègue Jean-François Carenco, je préside une commission relative à l’indemnité temporaire de retraite, qui s’est réunie le 17 février dernier, et j’ai pris des engagements dans ce cadre pour que nous puissions apporter des réponses.
Les élus ultramarins qui participent à cette commission savent que, d’ici à l’examen du projet de loi de finances pour 2024, nous aurons trouvé des solutions en vue de mettre en place un mécanisme dérogatoire à l’extinction de l’ITR, laquelle, j’y insiste, n’a été remise en cause par aucun gouvernement depuis 2008.
L’avis est donc défavorable sur cet amendement et ces sous-amendements.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. René-Paul Savary, rapporteur. J’ai commis une erreur en parlant d’irrecevabilité. En fait, j’émets, personnellement, un avis défavorable sur les sous-amendements puisque ceux-ci n’ont pas été examinés en commission. (Ah ! sur les travées du groupe SER.)
M. David Assouline. Lapsus révélateur !
M. Rachid Temal. La nuit a porté conseil…
M. René-Paul Savary, rapporteur. Pourquoi pas…
M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.
M. Victorin Lurel. Je soulève ce sujet depuis le début de notre discussion : ce texte ne tient aucun compte des réalités outre-mer.
Vous évoquez l’ITR. Le problème se pose non seulement en Polynésie, mais également en Nouvelle-Calédonie, à Wallis-et-Futuna, à La Réunion, à Saint-Pierre-et-Miquelon – il existe un régime différent en Guadeloupe, en Martinique et en Guyane.
L’extinction de l’ITR est liée à l’existence de fraudes. Personne n’a contesté qu’il existait un système frauduleux. Résultat : les engagements pris en 2008 ont commencé à être appliqués en 2019, et l’État n’a jamais tenu compte des compensations de l’intégration des primes dans l’assiette des rémunérations et du fait que les économies réalisées resteraient dans les territoires.
Résultat, encore : les militaires et les fonctionnaires d’État sont en situation de pauvreté. Vous dites qu’il n’y a pas d’impact : or si, il y en a ! Et les documents de la Caisse nationale d’assurance vieillesse (Cnav) indiquent que la situation est la même en Martinique, en Guadeloupe et ailleurs.
En Martinique, la pension de retraite du régime général est de 540 euros, et les carrières sont hachées. Pour obtenir le minimum contributif, il faut 120 trimestres. Or, chez nous, on n’atteint pas 110 trimestres ! Les victimes de ce système sont donc les femmes. Ce projet est kafkaïen et surréaliste.
Vous invoquez l’irrecevabilité de nos amendements, en vous fondant sur un soi-disant traitement inégal selon les territoires. Or il faut davantage de différenciation pour mieux tenir compte des réalités ! Ce que vous faites est fou… (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST. – Mme Laurence Cohen applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Jérôme Durain, pour explication de vote.
M. Jérôme Durain. Je souscris aux arguments qui ont été développés par notre collègue Victorin Lurel.
Un point de méthode : j’ai bien compris que ce débat vous agaçait prodigieusement, qu’il allait beaucoup trop lentement et qu’il fallait accélérer. Dont acte.
M. Didier Mandelli. Ce n’est pas un débat !
M. Jérôme Durain. Vous ne voulez pas de la main que nous vous tendons pour vous aider à vous sortir du guêpier dans lequel vous vous êtes fourrés en vous embarquant dans la défense d’un texte aussi mal fagoté…
M. François Patriat. Vous ne voulez pas le voter !
M. Jérôme Durain. Vous ne voulez pas que nous vous aidions à échapper à l’impopularité qu’il vous faudra assumer partout, dans chaque ville, village, préfecture et sous-préfecture.
Puisque vous voulez gagner du temps, il serait bon que nous ayons des dérouleurs correctement ficelés ! Or, sur le dérouleur papier dont nous disposons, les sous-amendements que nous venons d’examiner n’apparaissent pas. Quant au tableau électronique accroché dans l’hémicycle, il présente les sous-amendements dans un ordre différent du dérouleur numérique… Un peu plus de méthode nous aidera à aller beaucoup plus vite ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Monsieur le rapporteur, vous avez cessé de recourir à l’argument de l’irrecevabilité, mais je pense que vous l’invoquerez un peu plus tard…
Monsieur le président, j’avais demandé la parole pour intervenir après M. le ministre, mais vous ne m’avez pas vue…
Monsieur le ministre Dussopt, puisque vous prétendez ne pas vouloir vous mêler, au nom de la séparation des pouvoirs, des irrecevabilités décrétées par le Sénat, je vous demande d’aller jusqu’au bout et de vous abstenir de commenter cette décision, surtout en reprenant les mêmes exemples que ceux de M. le rapporteur. En effet, ce faisant, vous ne respectez pas la séparation des pouvoirs ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Vincent Segouin. Oh là là !
Mme Raymonde Poncet Monge. Beaucoup plus grave, avec cette décision, nous pourrions même croire que vous les avez inspirés. (Mêmes mouvements. – Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. Vincent Segouin. Incroyable !
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.
M. Fabien Gay. Je soutiens, bien sûr, l’amendement n° 4431 rectifié.
Monsieur le rapporteur, l’article 38 ayant été déclenché, nous n’avons pas eu le temps d’avoir, hier, le débat sur l’espérance de vie. Notre amendement vise à contredire votre argument selon lequel – j’essaie de ne pas caricaturer vos propos –, puisque nous vivons plus longtemps, il faudrait travailler plus longtemps.
Or pourquoi vit-on plus longtemps ? C’est la question ! L’allongement de l’espérance de vie est lié, à la fois, à la santé publique, qui a beaucoup progressé, à la vaccination, à l’alimentation, au progrès technique et à la robotisation, notamment au travail. Tout cela permet de vivre plus longtemps en bonne santé.
Il faut aussi évoquer les lois protectrices des travailleurs et travailleuses. Au début du XXe siècle, on travaillait 10 heures par jour et six jours par semaine. Puis ont été votés les congés payés, la journée de 8 heures, et plus tard les 35 heures et le partage du temps de travail.
Si l’on décide de revenir en arrière, on sera à rebours de l’Histoire et, à un moment donné, un problème se posera en termes d’espérance de vie.
Par ailleurs, si nous gagnons de l’espérance de vie, pourquoi consacrer celle-ci seulement au capital ? Nous pourrions choisir de la convertir en un temps libéré des contraintes du capital et donc en un droit à la retraite qui permettrait d’être utile autrement.
Enfin – et, durant ces cinq jours, vous n’avez jamais répondu sur ce dernier argument –, on travaille moins que dans les années 1980, mais on est beaucoup plus productif ! Alors qu’auparavant un salarié produisait en valeur 25 000 euros, il en produit aujourd’hui 80 000 euros. Où sont passés les gains de productivité ?
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue !
M. Fabien Gay. Dans le travail ? dans les salaires ? dans les pensions de retraite ? Non, ils ont été volés par le capital ! (Applaudissements sur des travées du groupe GEST.)
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 4768.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 205 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 343 |
Pour l’adoption | 93 |
Contre | 250 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix le sous-amendement n° 4767.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 206 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 343 |
Pour l’adoption | 93 |
Contre | 250 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix le sous-amendement n° 4769.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 207 :
Nombre de votants | 332 |
Nombre de suffrages exprimés | 331 |
Pour l’adoption | 81 |
Contre | 250 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix le sous-amendement n° 4770.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 208 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 343 |
Pour l’adoption | 93 |
Contre | 250 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix le sous-amendement n° 4771.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 209 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 343 |
Pour l’adoption | 93 |
Contre | 250 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix le sous-amendement n° 4772.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 210 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 343 |
Pour l’adoption | 93 |
Contre | 250 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix le sous-amendement n° 4773.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 211 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 343 |
Pour l’adoption | 93 |
Contre | 250 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix le sous-amendement n° 4774.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 212 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 343 |
Pour l’adoption | 93 |
Contre | 250 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix le sous-amendement n° 4775.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 213 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 343 |
Pour l’adoption | 93 |
Contre | 250 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix l’amendement n° 4431 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 4146 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli, est ainsi libellé :
Alinéa 8
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Cet amendement vise à supprimer le recul progressif de l’âge de départ à la retraite des générations nées entre 1961 et 1967. C’est là le cœur battant de votre texte et le cœur de la colère, car cette contre-réforme va s’abattre sur les plus âgés, celles et ceux qui auraient pu espérer être enfin libérés, d’ici peu, du travail.
Pour ceux qui sont nés en 1961, et qui auront donc 62 ans cette année, une nouvelle vie aurait pu commencer. Alors qu’ils allaient pouvoir profiter de leur famille ou s’engager dans des associations, vous leur ajoutez des trimestres de cotisation. Vous infligez ce couperet, trois mois par trois mois.
Mais trois mois, ce n’est rien pour vous ! En effet, une nuit après l’autre, au Sénat, vous avez confirmé vos choix.
C’est un choix de société que vous avez fait et que vous assumez, on le voit bien : vous n’irez pas chercher d’autres recettes, vous ne taxerez pas, vous n’imposerez pas… Que vous reste-t-il, alors ? Le prélèvement le plus brutal qu’un gouvernement peut imposer au peuple : lui retirer de belles années de retraite, après la maltraitance des corps au travail et l’angoisse – entretenue – du lendemain. Vous êtes les porte-voix du désespoir !
Vous devrez rendre des comptes demain à la rue et aux salariés de vos villes respectives. Car la France est dans la rue, celle qui vous a élu, monsieur le ministre, non pour appeler de ses vœux la politique que vous menez – cela a été dit à plusieurs reprises –, mais, vous le savez, pour faire barrage à d’autres candidats.
Vous avez méprisé l’Assemblée nationale. Et, aujourd’hui, la droite sénatoriale nous bâillonne ! (Exclamations amusées sur les travées des groupes Les Républicains et UC. – M. Yves Bouloux lève les bras au ciel.) Nous sommes victimes de l’article 38 du règlement et des motions d’irrecevabilité déposées jour après jour.
Cela ne vous fait peut-être pas plaisir que je vous le dise, mes chers collègues, mais c’est la vérité ! Vous nous bâillonnez !
Mme Sophie Primas. Ce qui nous ferait plaisir, c’est d’examiner ce texte jusqu’au bout !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. J’apporterai quelques précisions qui vaudront également réponse sur les trois amendements suivants.
Dans l’ensemble de ces amendements, il est fait mention de durées de cotisation qui augmentent progressivement, de génération en génération. Cette augmentation est progressive – tant mieux –, et non brutale, contrairement à ce que l’on peut entendre. Il n’est donc pas vrai que l’on « prend deux ans » aux gens ; il est question d’un trimestre par année, et donc d’une progression.
Vous pouvez toujours vous y opposer en déposant des sous-amendements… Il y aurait aussi une autre technique : supprimer la référence à 169 trimestres pour une génération, à 170 pour la suivante, etc. Mais cela ne ferait pas forcément avancer le débat. Vous êtes opposés à la réforme ; nous y sommes favorables !
En revanche, M. Gay m’a posé une question intéressante (Exclamations réjouies sur les travées du groupe CRCE.), celle de la productivité, qui mérite un débat.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Vous voyez que le débat peut être intéressant !
M. René-Paul Savary, rapporteur. La productivité est meilleure en France que dans d’autres pays. Cela signifie que les conditions de travail ne sont pas si mauvaises que cela ! (Protestations sur des travées des groupes CRCE, SER et GEST.)
Mme Marie-Arlette Carlotti. Pas du tout !
M. René-Paul Savary, rapporteur. Cela veut dire que nos employés, nos salariés, nos travailleurs ont de meilleures conditions que chez nos voisins. Cela mérite d’être souligné, et cela change du tableau misérabiliste qui nous a été dressé ces derniers jours !
M. Rachid Temal. Et les salaires ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Mais la question de la productivité n’est pas la seule à se poser. Il faut aussi considérer les bassins de population et les heures travaillées. En France, par habitant, on travaille 630 heures par an. Dans un pays que vous connaissez bien, madame Schillinger, qui est situé à quelques dizaines de kilomètres de chez vous, on travaille 940 heures par an.
On voit donc que certains pays ont une conception du travail différente de la nôtre, et cela mérite d’être signalé.
Puisque notre production est insuffisante, et puisque le nombre d’heures travaillées est trop bas pour conforter notre modèle social, il nous appartient de prendre nos responsabilités. C’est la raison pour laquelle nous demandons que soit fourni cet effort collectif : travailler plus globalement, à la fois pour produire davantage et faire en sorte que nos jeunes trouvent du travail, mais également pour améliorer l’équilibre de notre système de retraite.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Augmentez le taux d’emploi des femmes !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre. L’amendement que vient de présenter Mme Apourceau-Poly vise à supprimer un alinéa de l’article ; les trois amendements suivants visent à supprimer les alinéas précédents : cela remet en cause la montée en puissance de la réforme dite Touraine.
L’avis est donc défavorable sur cet amendement, comme il le sera sur les trois amendements suivants pour les mêmes raisons.
Madame la sénatrice, vous m’avez interpellé en invoquant la France qui m’a élu.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Je ne parlais pas de vous, mais du Gouvernement !
M. Olivier Dussopt, ministre. Vous avez dit « monsieur le ministre », donc j’ai pensé que c’était à moi que vous vous adressiez…
Il se trouve que le territoire qui m’a élu est une circonscription du nord de l’Ardèche, et plus particulièrement une commune, Annonay, chère à mon cœur puisque j’y suis né, que j’y ai grandi et que j’y habite.
Or, hier, de dix heures à quinze heures, un tiers des foyers de cette commune ont été privés d’électricité à la suite d’une coupure sauvage et volontaire, liée au mouvement social. (Protestations sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST.) Des écoles ont fermé, des personnes hospitalisées à domicile et placées sous respirateur artificiel ont été mises en danger, des personnes sont restées coincées dans des ascenseurs, des commerces ont fermé et des restaurants n’ont pas pu ouvrir… C’est à cette France que je pense quand je défends cette réforme ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.
M. Fabien Gay. Merci, monsieur le rapporteur, de votre réponse.
Vous avez répondu à la question portant sur la pénibilité. Il est vrai que le travail à l’usine est moins pénible aujourd’hui qu’il y a cinquante ans, mais il y a toujours des métiers difficiles, y compris dans les usines, et sur les chantiers – lors de mes visites, je n’y ai pas vu beaucoup d’exosquelettes, mais ils existeront peut-être demain… (Sourires sur les travées du groupe CRCE.)
En revanche, vous n’avez pas répondu à ma question sur les gains de productivité !
En 1980, un salarié produisait en valeur 25 000 euros de richesses ; aujourd’hui, il produit l’équivalent de 80 000 euros. Où sont passés ces gains de productivité ? Ni dans les salaires ni dans les pensions de retraite ! Dix points ont donc été volés au travail par le capital. Êtes-vous d’accord, monsieur le rapporteur ? (Non ! sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Bruno Retailleau. La productivité horaire baisse !
M. Fabien Gay. Ce n’est pas moi, le groupe communiste ou la gauche qui disons cela : ces chiffres sont fondés. Il faut bien que l’on en débatte ! Où sont les gains de productivité ?
Sur la productivité horaire, nous avons déjà dit que l’ouvrier français était l’un des plus productifs, notamment par rapport aux ouvriers allemands.
À cet égard, monsieur le rapporteur, si votre idéal ce sont les jobs à un euro et les travailleurs pauvres, nous ne le partageons pas. En France, il y a 10 % de retraités pauvres, et c’est déjà trop ; mais en Allemagne, ils sont 21,5 % ! Est-ce la société dans laquelle vous voulez vivre ? Pas nous !
Encore une fois, où sont passés les gains de productivité, et comment mieux les partager.
Demande de clôture
M. le président. La parole est à M. François Patriat. (Ah ! sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. François Patriat. Monsieur le président, en application de l’article 38, alinéa 1, du règlement, je demande la clôture des explications de vote sur l’amendement n° 4146 rectifié.
M. le président. Mes chers collègues, je suis saisi par M. François Patriat, président du groupe RDPI, d’une demande de clôture des explications de vote sur l’amendement n° 4146 rectifié.
Je vous rappelle que, en application de l’article 38, alinéa 1, du règlement, la clôture peut être proposée lorsqu’au moins deux orateurs d’avis contraire sont intervenus. Peuvent prendre la parole sur cette proposition un orateur par groupe et un sénateur ne figurant sur la liste d’aucun groupe.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
Mme Raymonde Poncet Monge. Cela signifie-t-il que nous ne pourrons pas commenter les propos tenus précédemment ? Pour ma part, je vais m’y employer…
Monsieur le rapporteur, vous avez du mal à percevoir qui travaillera deux ans de plus… Vous devez savoir qu’à l’âge de 62 ans pile, 35 % des femmes liquident leur retraite – elles sont plus nombreuses que les hommes à le faire. Pour elles, ces deux années supplémentaires de travail, ce sont deux ans ferme !
Je vous l’ai déjà signalé, à l’âge de 61 ans, plus d’une personne sur deux n’est plus en emploi : certains perçoivent les minima sociaux, ou sont au chômage de longue durée, ou souffrent d’une affection de longue durée (ALD), ou sont dans une situation d’inactivité, et ce quelquefois sans ressources. Ces personnes qui pouvaient partir à la retraite à 62 ans, elles aussi, prennent deux ans ferme.
Quant aux gains de productivité, il arrive qu’ils soient le résultat de l’intensification du travail et de la souffrance au travail. Ces gains ne sont donc pas tous vertueux !
M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Houllegatte, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
M. Jean-Michel Houllegatte. Je soutiens l’amendement n° 4146 rectifié.
Pour ce qui concerne les gains de productivité, il est évident que le système de retraite par répartition doit permettre, aussi, la répartition de la richesse produite par le travail.
Il me semble que c’est Michel-Édouard Leclerc qui disait qu’il faudrait taxer les robots. Il convient en effet d’envisager l’hypothèse – certes absurde – d’une société totalement automatisée, dans laquelle personne ne cotiserait, car personne ne travaillerait : comment seraient répartis les gains de productivité ?
Nous soutenons l’amendement n° 4146 rectifié parce que cette réforme est brutale et suscite des frustrations. Si la mobilisation est d’une telle ampleur, c’est aussi parce que les gens sont frustrés !
Les personnes nées en 1961 se sont projetées dans l’avenir, d’autant plus qu’elles reçoivent régulièrement – comme nous tous – un relevé de situation individuelle (RIS), ainsi qu’une estimation indicative globale. Au vu de ces documents, on peut estimer le nombre de trimestres restant à travailler, et même prévoir un ajustement si ce nombre est insuffisant. Leur annoncer de façon brutale qu’elles vont travailler un, deux ou trois trimestres supplémentaires, cela crée des frustrations, parce qu’elles avaient d’autres projets.
La question du rapport au travail se pose ; j’aurai l’occasion d’y revenir ultérieurement.
M. le président. Conformément à l’article 38, alinéa 3, du règlement, je consulte le Sénat sur cette proposition.
(La clôture est prononcée.)
Article 7 (suite)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 4146 rectifié.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 214 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 343 |
Pour l’adoption | 93 |
Contre | 250 |
Le Sénat n’a pas adopté.
L’amendement n° 4149 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli, est ainsi libellé :
Alinéa 9
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Cet amendement vise à supprimer l’alinéa portant la durée de cotisation à 170 trimestres dès la génération 1963.
M. le rapporteur, qui a bien compris le sens de nos amendements, l’a indiqué à l’instant.
En 2013, le groupe communiste a combattu la réforme Touraine. Nous considérons naturellement son accélération comme l’approfondissement d’une logique mortifère pour les travailleurs et les travailleuses.
En portant la durée de cotisation à 170 trimestres dès la génération 1963, vous ne prenez pas en compte les réalités du travail.
Il existe en effet, pour de nombreux Français et Françaises, une zone grise, plus ou moins longue, très inconfortable, où les femmes et les hommes ne sont ni en emploi ni à la retraite.
C’était le cas de près de 16,7 % des personnes âgées de 62 ans en 2021, dont 3 % étaient au chômage et 13,7 % en inactivité et dépendaient essentiellement du revenu de solidarité active (RSA), d’une pension d’invalidité ou du revenu de leur conjoint.
Le taux d’emploi des plus de 60 ans est faible. Il s’élève à 35,5 %, contre 46,4 % au sein de l’Union européenne. Or plus on avance en âge, moins on a de chances d’avoir un emploi, surtout si on n’a pas décroché de titre scolaire.
L’âge constitue avec le sexe le premier motif déclaré des expériences de discrimination liée au travail, loin devant l’origine ethnique, pointait en 2018 France Stratégie.
Allonger la durée de cotisation ne peut que pénaliser l’ensemble des travailleurs de la génération née en 1963. Pour ces raisons, nous demandons la suppression de l’alinéa 9.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour explication de vote.
Mme Céline Brulin. Monsieur le rapporteur, vous avez invoqué, dans votre avis sur l’ensemble de ces amendements, la stricte application de l’accélération de la durée de cotisation. « Circulez, il n’y a rien à voir ! »…
Permettez-moi d’évoquer un cas particulier qui témoigne de la brutalité de cette réforme.
Je veux vous parler de ce jardinier, qui travaille dans les services d’une ville de Seine-Maritime dirigée par un ancien Premier ministre favorable à la retraite à 67 ans que vous aurez identifié…
Depuis 1981, ce jardinier est exposé aux postures pénibles, au risque chimique, aux vibrations et gestes répétitifs, mais aussi, me dit-il, à l’accroissement des surfaces à traiter, puisque dans ladite ville, des réductions d’effectifs sont visiblement à l’œuvre.
Lorsqu’il contacte la responsable des ressources humaines chargée des retraites, il apprend qu’une personne née en juin 1963 peut bénéficier du dispositif carrières longues, mais que, étant né en septembre de la même année, il devra pour sa part travailler neuf mois de plus.
M. Jean Sol. C’est le bagne !
Mme Céline Brulin. J’ai rencontré ce jardinier dans une manifestation. Il portait une pancarte où était indiqué : « 42 ans de bonne conduite, 9 mois ferme ».
Nous contestons fondamentalement l’allongement et l’accélération de la durée de cotisation, mais il existe des situations particulières qui méritent d’être prises en compte.
En effet, certaines personnes se retrouveront dans une situation extrêmement difficile dans les prochains mois. (Mmes Laurence Cohen et Michelle Meunier applaudissent.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 4149 rectifié.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 215 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 343 |
Pour l’adoption | 93 |
Contre | 250 |
Le Sénat n’a pas adopté.
L’amendement n° 4285 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Fabien Gay.
M. Fabien Gay. S’agissant des âges de départ et des trimestres cotisés, nous voudrions obtenir si possible, monsieur le ministre, une confirmation.
Vous parlez d’une réforme de justice… Mais pour que cette réforme soit juste, il faudrait au moins qu’elle soit compréhensible par toutes et tous et qu’on y voie clair.
Ainsi, si je commence à travailler à 14 ans, je peux partir à 58 ans, mais après 44 années de cotisation. En revanche, si je commence à travailler à 15 ans, je peux partir au même âge, mais avec 43 annuités.
Si je commence maintenant à travailler à 16 ans, je peux partir à 60 ans avec 44 annuités, mais si c’est à 17 ans, il me faudra 43 annuités pour partir à 60 ans et ainsi de suite jusqu’à l’âge de 21 ans !
Je me demande, monsieur le ministre, comment vous avez construit ce tableau et ce qu’il a de juste.
Commencer à travailler à 14 ans, ce n’est pas tout à fait la même chose que de commencer à travailler à 15 ans. Pourquoi devrait-on cotiser davantage pour partir au même âge ?
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Mon avis sera défavorable, mais c’est un bon exemple.
Prenons la personne que vous citez et qui a commencé à travailler à 16 ans. Actuellement, s’il lui manque quatre ou cinq trimestres, sa durée de cotisation sera égale à la durée d’assurance requise plus deux ans, soit 45 ans, en application de la loi actuelle.
Qui a voté cette loi ? (Pas nous ! sur les travées du groupe CRCE.)
Peut-être pas vous, mais vous, mes chers collègues (M. le rapporteur se tourne vers les travées du groupe SER.), avez voté cette loi !
Or qu’est-il proposé dans le projet de loi en discussion ? Il est proposé que ces personnes, à qui il manque quatre ou cinq trimestres avant la fin de l’année de leurs 16 ans, puissent travailler moins longtemps.
Nous aurons l’occasion d’en discuter lors de l’examen de l’article 8, qui vise à compenser un certain nombre d’inégalités. À un mois près, vous « tapez » la borne suivante et, en conséquence, vous « prenez » deux ans de plus. Cela mérite un débat.
Vivement que nous arrivions à l’article 8 ! (Sourires et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes UC, INDEP et RDPI.)
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre. J’ai déjà exprimé sur cette question l’avis défavorable du Gouvernement.
J’ajoute aux propos de M. le rapporteur que, pour pouvoir partir à la retraite dans le cadre des dispositifs carrières longues, il ne suffit pas, actuellement, d’avoir quatre ou cinq trimestres cotisés avant le dernier jour de l’année civile de vos 16 ans, de vos 18 ans demain ou de vos 20 ans.
Il faut aussi justifier des quatre ou cinq trimestres cotisés avant la borne d’âge, atteindre l’âge d’ouverture des droits telle que prévue par la loi – c’est-à-dire 58 ans si vous avez commencé à travailler avant 16 ans – et il faut par ailleurs avoir atteint la durée de cotisation requise, soit en l’état de la loi, la DAR plus deux ans, intégralement cotisée, sans tenir compte des trimestres qui ne seraient que validés et cotisés.
Cela explique que, entre les principes de départ au titre des carrières longues et la bonification effective, il y ait un écart.
Bien souvent, en effet, dans la carrière des uns et des autres, les trimestres dont on dispose une fois parvenu à l’âge légal ne sont pas tous des trimestres cotisés. Une partie d’entre eux peuvent être validés, par exemple, au titre du service militaire.
Ce décalage rend assez inopérantes les comparaisons de date à date ou d’anniversaire à anniversaire puisque, en réalité, cela renvoie au parcours de vie de chacun.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 4285 rectifié.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 216 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 343 |
Pour l’adoption | 93 |
Contre | 250 |
Le Sénat n’a pas adopté.
L’amendement n° 4286 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli, est ainsi libellé :
Alinéa 11
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Michelle Gréaume.
Mme Michelle Gréaume. Nous venons d’échanger en vue de la suppression de l’article 7, qui est le cœur de votre contre-réforme sociale.
À défaut d’avoir pu supprimer la globalité de cet article, nous nous attacherons à retirer du texte les dispositions qui nous semblent les plus problématiques, à savoir celles qui sont relatives à l’allongement de l’âge légal de départ à la retraite.
Les alinéas cités dans notre amendement sont précisément ceux qui décaleront, demain, l’âge légal de 62 à 64 ans et, partant, allongeront les carrières de tous les Français de deux ans supplémentaires.
Nous avons eu l’occasion d’en discuter longuement : selon les chiffres de la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares) publiés en janvier 2023 pour l’année 2021, le constat est affligeant : depuis six ans, le Gouvernement n’a pas réussi à enrayer le chômage des 55 ans et plus.
Aujourd’hui, la frontière des 60 ans se matérialise par une chute d’activité de 68 % à 59 ans à environ 43 % à 61 ans, et jusqu’à 13 % à 64 ans.
En reculant l’âge légal de départ à la retraite, vous créez une trappe de pauvreté dont les Français de plus de 55 ans qui perdent leur emploi ne pourront pas sortir.
La réforme de l’indemnisation invalidité joue, elle aussi, contre les travailleurs. Je ne citerai qu’un seul exemple, celui d’un couple de boulangers de mon département.
Elle a un cancer, lui a des problèmes cardiaques. Après des années à maintenir coûte que coûte leur activité, ils ont fini par vendre leur atelier.
Or, avec les nouveaux modes de calcul des pensions d’invalidité, ils ne touchent plus que 900 euros, à respectivement 58 ans et 60 ans. Comment vont-ils vivre ces prochaines années ? Quelle retraite auront-ils ? (Marques d’impatience sur les travées du groupe Les Républicains.)
Comme tous les artisans et commerçants de notre pays, leur outil de travail est le patrimoine de toute une vie. Ils pensaient l’utiliser fièrement pour l’avenir de leur enfant, pour les études de leurs petits-enfants.
Eh bien non ! Comme de nombreux travailleurs qui ont réussi à mettre un peu d’argent de côté, votre réforme va les dévaliser.
Pendant ce temps-là, les fraudeurs aux cotisations sociales, les évadés fiscaux, les profiteurs de la crise dorment sur leurs deux oreilles ! (Protestations sur les mêmes travées.)
M. le président. Je vous remercie, ma chère collègue.
Mme Michelle Gréaume. Reculer l’âge de départ à la retraite, c’est accroître la misère.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Nous aurons l’occasion, à l’article 8, d’aborder la question de l’invalidité. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.
M. Fabien Gay. Voilà une question, parmi d’autres – les gains de productivité, par exemple –, à laquelle vous n’avez pas répondu.
Nous continuons donc de développer nos arguments, les uns après les autres. C’est ainsi que se déroule un débat : nous vous posons une question, vous y répondez, nous avançons un contre-argument. Nous allons au bout de l’exercice et à un moment donné, il y en a un qui marque un point.
Nous ne sommes pas encore allés au bout, mais nous avons marqué beaucoup de points, même si vous maîtrisez le match…
M. René-Paul Savary, rapporteur. Eh oui !
M. Fabien Gay. C’est le jeu, mais, pour notre part, nous respectons le règlement à la lettre.
M. René-Paul Savary, rapporteur. Nous aussi !
M. Fabien Gay. L’une des questions en attente de réponse, monsieur le rapporteur, est la suivante.
Vous souhaitez décaler la borne de l’âge légal de départ à la retraite de 62 à 64 ans pour la placer sur l’espérance de vie en bonne santé. Parlons donc du vécu des gens et partons des réalités.
Ce n’est pas grave ! Chaque fois que nous parlons du vécu des gens, j’entends des « Ah ! ». Notre rôle est pourtant bien de parler du vécu des gens.
En déplaçant la borne de 62 à 64 ans, soit l’espérance de vie en bonne santé, vous faites donc le choix délibéré de contraindre la moitié des gens à ne pas partir à la retraite en bonne santé. Cela pose tout de même question.
Pour notre part, nous pensons que, après une dure vie de labeur, le travail, source d’émancipation et de lien social, certes, mais aussi de souffrances physiques et psychiques, la retraite doit être vécue, pendant des années, au moins en bonne santé.
Si l’on place la borne au moment de l’espérance de vie en bonne santé, alors un certain nombre de personnes – nous en connaissons, dans certains métiers en particulier – ne profiteront pas de leur retraite.
On ne profite pas de la retraite quand on tombe malade de suite et quand, pendant deux ans, on alterne entre les rendez-vous médicaux et l’hôpital !
Il faut donc bien que nous ayons ce débat. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)
M. le président. La parole est à M. Claude Raynal, pour explication de vote.
M. Claude Raynal. Je reconnais que ces évocations de personnes touchées par la réforme sont difficiles à entendre. En même temps, elles correspondent à la réalité. De ce point de vue, ce débat est passionnant. Il faut sortir de la théorie et voir comment ce que nous votons se traduit concrètement pour les uns et pour les autres.
Nous devons tous, me semble-t-il, l’accepter, écouter ces témoignages et nous faire notre propre opinion.
M. le rapporteur m’a un peu surpris voilà quelques minutes, lorsqu’il a fait un lien un peu trop direct entre la productivité et l’idée que, si les Français avaient une forte productivité, c’est qu’ils ne sentaient pas si mal au travail. C’est tout de même un drôle de lien !
J’ai recherché des éléments et j’en ai trouvé assez facilement. L’enquête européenne sur les conditions de travail, réalisée en 2021 auprès de 71 000 personnes par Eurofound – il y en a une d’ailleurs chaque année –, place la France en queue de peloton parmi les trente-six pays étudiés.
Près de 40 % des actifs en emploi chez nous se trouvent dans un emploi dit « tendu », où les exigences sont plus élevées que les ressources permettant d’y répondre.
Sachez, mes chers collègues, monsieur le rapporteur, vous qui n’avez sans doute pas lu cette étude,…
M. René-Paul Savary, rapporteur. En effet, je ne sais pas lire !
M. Claude Raynal. … que sur ces sujets-là, nous sommes au niveau de l’Albanie, de la Slovaquie et de la Pologne.
Je ne dis pas que ces pays ne sont pas des exemples, mais il faut cesser selon moi de faire ce lien un peu rapide entre productivité et plaisir d’être au travail. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. J’entends la fébrilité de M. le rapporteur, qui souhaite que l’on parvienne à l’article 8, très certainement pour discuter de quelques-unes de ses propositions.
Nous en sommes cependant à l’article 7, selon lequel la quasi-majorité des départs anticipés sont des départs rendus possibles par la mobilisation du compte professionnel de prévention (C2P), c’est-à-dire par la pénibilité, et de moins au titre des carrières longues ou « superlongues ».
Aux termes de l’article 7, le départ anticipé est retardé de deux ans. Là aussi, c’est deux ans ferme, monsieur le rapporteur !
Même si vous apportez quelques améliorations, n’allons pas trop vite à l’article 8 et aux quelques mesures d’accompagnement que vous proposez. Commençons par constater et par acter que les départs anticipés pour pénibilité seront retardés de deux ans.
S’agissant de l’invalidité permanente, nous avons et vous avez certes des propositions, mais pour l’instant, reconnaissons que rien n’a changé. C’est inscrit dans la loi : on part toujours à 62 ans.
C’est pourquoi je vous dis, monsieur le ministre, que les 3,1 milliards d’euros que vous consacrez à des mesures d’accompagnement n’ont pas lieu d’être, puisque vous maintenez le dispositif existant.
Vous avez construit l’équilibre financier de votre réforme en comptant indûment ces 3,1 milliards d’euros. Je vous propose de passer l’invalidité permanente à 60 ans. Dans ce cas alors, vous pourrez traduire ce montant en mesures d’accompagnement.
M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Houllegatte, pour explication de vote.
M. Jean-Michel Houllegatte. Les différents amendements qui nous ont été proposés concernent les personnes nées entre 1961 et 1965.
C’est le cas de la majorité d’entre nous ici présents ; cela tombe bien, c’est donc un peu notre génération.
Cette génération 1961-1965 a connu les évolutions du monde du travail : d’abord la fin des Trente Glorieuses, puis de nombreuses restructurations.
À cet égard, j’invite les amateurs de littérature à lire les livres de Nicolas Mathieu, notamment Leurs enfants après eux et Connemara.
Nicolas Mathieu y décrit ces enfants un peu perdus, dont les parents ont perdu leur travail en raison des restructurations qui ont eu lieu en Lorraine. Il montre les difficultés de ces derniers et combien ils ont dû, au travers du travail, essayer de les surmonter.
Ces difficultés viennent aussi des mutations économiques comme le développement de l’automatisation, la numérisation, etc.
C’est à cette époque – soulignons que c’est Martine Aubry (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.), au travers de la loi du 17 janvier 2002 de modernisation sociale, qui a introduit la notion de santé mentale dans le code du travail – que l’on a commencé à parler, dans le monde du travail, de risques psychosociaux.
Cette génération, dont nous ne dirons peut-être pas qu’elle a été sacrifiée, a vécu une profonde mutation du monde du travail. Elle en reste profondément marquée et peut-être un peu meurtrie, prenons-en garde.
Dans un article paru dans le quotidien Ouest-France, un manifestant évoquait en ces termes cette souffrance au travail, qui est certes, de nos jours, de mieux en mieux prise en considération : « Ma vie professionnelle a été un marathon, dit-il. J’ai l’impression qu’on a reculé la ligne d’arrivée de ce marathon. » On peut le déplorer.
Si des avancées sont à noter, veillons sur cette génération sacrifiée 1961-1965.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Beaucoup a déjà été dit sur cette génération, qui s’attendait à partir à la retraite et qui voit brutalement le mur reculer.
Permettez-moi d’insister sur les faits et sur le niveau des pensions. L’accélération des délais de la réforme Touraine et le report de deux de l’âge légal de départ à la retraite produiront un effet particulièrement préoccupant sur le niveau des pensions.
Selon les simulations, la pension moyenne nette passerait ainsi de 61,2 % du salaire moyen en 2021 à 51,6 % en 2050, soit une baisse de 15,7 %. Elle tomberait ensuite à seulement 45,4 % en 2070, soit une baisse de 25,8 %.
Il s’agit d’une chute brutale du niveau de vie des retraités, lequel, jusqu’à présent, et malgré une baisse récente ces deux ou trois dernières années,…
M. René-Paul Savary, rapporteur. C’est bien pour cela qu’il faut réformer !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. … restait assez proche du niveau de vie moyen des Français.
Nous allons, demain, connaître des situations terribles, puisque le nombre de retraités pauvres ne fera que s’accroître. Ainsi, le niveau de vie relatif des retraités par rapport à celui de la population passerait de 100 % à 89 % en 2050 et à 84 % en 2070.
En tout état de cause – c’est la raison pour laquelle nous avons déposé des amendements sur les recettes –, même en restant dans le système actuel, nous aurons besoin de nouvelles recettes pour équilibrer les retraites.
Demande de clôture
M. le président. La parole est à M. Claude Malhuret. (Exclamations sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. Claude Malhuret. Monsieur le président, en application de l’article 38, alinéa 1, du règlement, je demande la clôture des explications de vote sur l’amendement n° 4286 rectifié. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – Protestations sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST.)
M. le président. Mes chers collègues, je suis saisi par M. Claude Malhuret, président du groupe Les Indépendants – République et Territoires, d’une demande de clôture des explications de vote sur l’amendement n° 4286 rectifié.
Je vous rappelle que, en application de l’article 38, alinéa 1, du règlement, la clôture peut être proposée lorsqu’au moins deux orateurs d’avis contraire sont intervenus. Peuvent prendre la parole sur cette proposition un orateur par groupe et un sénateur ne figurant sur la liste d’aucun groupe.
La parole est à Mme Corinne Féret, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Mme Corinne Féret. Il faut s’attendre, dans les heures qui viennent, à des demandes récurrentes de ce type.
M. René-Paul Savary, rapporteur. En effet !
Mme Corinne Féret. Elles visent à nous empêcher d’avoir un débat de fond et un débat sérieux. (Protestations sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. Roger Karoutchi. C’est de l’obstruction !
Mme Corinne Féret. Toutes les interventions précédentes ont été sérieuses, fondées, argumentées. (Mêmes mouvements.)
M. Max Brisson. Ce n’est pas sérieux !
Mme Corinne Féret. Vous avez certes le droit d’activer l’article 38 du règlement du Sénat, mais vous imaginez bien que nous y sommes totalement opposés.
Une fois encore, vous bafouez le rôle du Sénat.
M. Max Brisson. C’est vous !
M. Roger Karoutchi. Vous rabaissez le Sénat par votre obstruction !
Mme Corinne Féret. C’est une atteinte à la démocratie.
On nous regarde et on nous écoute à l’extérieur. Les gens verront ce qui se passe ici, lorsqu’on engage le débat sur des amendements qui sont totalement justifiés, puisqu’ils portent sur le fond même de la réforme et sur la concrétisation du recul de l’âge de départ à la retraite.
Beaucoup de nos concitoyens subiront en effet les conséquences, non pas dans les années à venir, mais dès l’année prochaine, de cette réforme brutale et de ce recul de l’âge de départ.
M. le président. La parole est à M. Guy Benarroche, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
M. Guy Benarroche. Depuis quelques heures, j’essaie de comprendre à quel moment les demandes de clôture sur le fondement de l’article 38 seront demandées…
J’ai ainsi pensé à de nombreux critères et je me suis dit que finalement, l’application de cet article pourrait se justifier. Moi-même, je pourrais l’invoquer, dès lors que nous aurions affaire à des débats sans aucune valeur ni tenue, dans lesquels aucun argument ne serait développé, dans lesquels aucun d’entre nous ou de ceux qui nous regardent sur Public Sénat ou sur d’autres chaînes de télévision n’apprendrait quoi que soit du projet de loi sur les retraites.
Or ce n’est pas le cas. J’en déduis que le critère de déclenchement ne peut être celui-là, puisque, de fait, j’apprends moi-même beaucoup de choses en écoutant mes collègues, de tous bords d’ailleurs, lorsqu’ils veulent bien donner un certain nombre d’arguments et non pas camper sur des postures. (Mme Jacqueline Eustache-Brinio ironise.)
Dans ces conditions, je me suis dit que l’article 38 devait être utilisé pour une autre raison. Cette raison, me semble-t-il – peut-être fais-je erreur, il faudrait faire une étude statistique –, est que… (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Pardonnez-moi, mes chers collègues, vous avez demandé l’application de l’article 38 ; j’ai le droit d’exprimer ma position, et vous n’êtes pas obligés de me couper la parole !
En réalité, en étudiant les deux situations dans lesquelles vous avez utilisé cet article et en les comparant à celles dans lesquelles vous ne l’avez pas fait, il semblerait – nous verrons si cela se confirme – que vous l’utilisiez à partir du moment où vous estimez que le débat devient suffisamment intéressant et prend appui sur des arguments auxquels vous ne souhaitez pas répondre, car vous ne voulez pas prolonger les débats.
Je suis persuadé, en effet, que vous auriez des contre-arguments à nous opposer, mais que vous ne pouvez pas le faire, conformément à la ligne de conduite que vous vous êtes fixée.
Ne pouvant pas argumenter, vous écourtez les débats au moyen de l’article 38. Dites-moi si je me trompe, mais je pense être dans le vrai. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées du groupe SER.)
M. Olivier Paccaud. Quel talent !
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. On ne peut pas dire que le débat qui s’était engagé sur cet amendement fût inintéressant.
Nous étions au cœur d’une discussion sur le niveau des pensions et sur les effets de seuil de cette réforme, problème politique récurrent propre à ce type de projet.
Or vous bâclez les discussions comme la réflexion. Savez-vous ce que cela révèle, chers collègues ? Quand on est embarrassé, quand on se sait en décalage avec le peuple, on essaie d’écourter les choses. Ni vu ni connu, à la sauvette !
Que M. Macron et ses amis de LREM nous expliquent qu’il faut aller plus vite, nous en avons l’habitude : ils passent leur temps à nous dire que les parlementaires sont trop nombreux, que le Parlement est trop lent et qu’il faut multiplier les procédures d’urgence. À la limite, c’est dans leur culture, pourrais-je dire, de contournement du Parlement.
Mais vous, mes chers collègues de la majorité sénatoriale Les Républicains, cela ne devrait pas être votre culture ! Que vous soyez quelque peu agacés par la force de nos arguments, je peux l’admettre (Protestations sur les travées des groupes Les Républicains et UC.), mais vous devriez comprendre que nos concitoyens attendent de vous des explications et des réponses, que vous entreteniez le débat.
En réalité, vous avez peur de l’opinion publique.
Mme Dominique Estrosi Sassone. Mais non !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Vous vous sentez en position de faiblesse et c’est cela qui justifie votre stratégie visant à écourter le débat. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST.)
M. le président. Conformément à l’article 38, alinéa 3, du règlement, je consulte le Sénat sur cette proposition.
(La clôture est prononcée.)
Article 7 (suite)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 4286 rectifié.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 217 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 343 |
Pour l’adoption | 93 |
Contre | 250 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je suis saisi de trois amendements identiques.
L’amendement n° 1895 rectifié est présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Corbisez, Gold, Guérini et Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux.
L’amendement n° 1909 est présenté par MM. Lévrier, Iacovelli, Hassani, Patriat, Bargeton et Buis, Mme Cazebonne, MM. Dagbert et Dennemont, Mme Duranton, M. Gattolin, Mme Havet, MM. Haye, Kulimoetoke, Lemoyne, Marchand, Mohamed Soilihi et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud, Richard et Rohfritsch, Mme Schillinger, M. Théophile et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
L’amendement n° 3403 est présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Après l’alinéa 11
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Au début de l’article L. 173-7, sont insérés les mots : « À l’exception des versements mentionnés au IV de l’article L. 351-14-1, » ;
La parole est à Mme Nathalie Delattre, pour présenter l’amendement n° 1895 rectifié.
Mme Nathalie Delattre. L’article L. 351-14-1 du code de la sécurité sociale, créé par la réforme des retraites de 2003, prévoit un mécanisme de rachat d’années d’études pour les assurés salariés.
Depuis 2003, donc, les assurés peuvent ainsi racheter jusqu’à douze trimestres d’assurance vieillesse au titre des années d’études supérieures.
Le tarif du rachat, qui varie selon l’âge et le niveau de revenus, est déterminé selon un principe de neutralité actuarielle, c’est-à-dire qu’il pèse intégralement sur son bénéficiaire.
Si ce versement est pris en compte dans le calcul d’une retraite classique, les trimestres ainsi rachetés ne sont pas retenus dans le cadre de dispositifs de retraite anticipée pour carrière longue ou pour les travailleurs handicapés.
Il nous faut donc corriger ce point, tout comme le mécanisme mis en place par la réforme des retraites de 2014, qui a établi un tarif préférentiel de rachat de trimestres pour certains assurés, notamment les apprentis au titre des périodes d’apprentissage du 1er juillet 1972 au 31 décembre 2013.
En effet, ces derniers cotisaient sur une assiette forfaitaire trop faible pour leur permettre de valider une durée d’assurance vieillesse égale à celle de leur contrat.
Nous souhaiterions donc que les assurés ne soient pas pénalisés par l’absence de prise en compte de ces versements dans le cadre d’un départ anticipé pour carrière longue ou en tant que travailleur handicapé.
Aussi, nous proposons que ces versements soient désormais pris en compte tant dans la période cotisée que pour apprécier la condition de début d’activité au titre du dispositif de retraite pour carrière longue.
M. le président. La parole est à M. Martin Lévrier, pour présenter l’amendement n° 1909.
M. Martin Lévrier. Comme cela été indiqué, cet amendement vise à permettre la prise en compte, dans le cadre d’un départ anticipé pour carrière longue ou en tant que travailleur handicapé, des trimestres d’apprentissage effectués avant 2014 et rachetés à tarif réduit.
C’est pour nous une question de justice sociale que de nous assurer que tous les citoyens ayant eu un statut d’apprenti puissent obtenir l’avantage de leurs trimestres d’apprentissage.
Je crois profondément à l’apprentissage, à ces jeunes qui choisissent cette filière, et je pense tout particulièrement à ceux qui ont subi des accidents de la vie.
C’est pourquoi je tenais à vous présenter cet amendement qui a été déposé à l’Assemblée nationale et qui me tient particulièrement à cœur.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 3403.
Mme Raymonde Poncet Monge. En préalable, je tiens à exprimer mon émotion (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.) : cet amendement fait partie des dix-sept survivants parmi les cent cinquante-sept amendements que j’avais déposés et qui avaient été déclarés recevables par la commission – eux-mêmes étaient des survivants… C’est donc vraiment un grand moment d’émotion !
L’article 27 de la loi du 20 janvier 2014 garantissant l’avenir et la justice du système de retraites a ouvert la possibilité pour certaines catégories d’assurés, par dérogation au principe de neutralité actuarielle, de bénéficier d’une diminution du coût de leurs versements.
C’est notamment le cas pour les apprentis, dont le nombre a récemment explosé. À la fin de 2022, la Dares en dénombrait 980 000. Je précise d’ailleurs que c’est l’augmentation du nombre d’apprentis qui explique l’essentiel de l’amélioration des statistiques de l’emploi – avec les radiations, mais, là, c’est une autre question…
Il faut pouvoir garantir à ces assurés qu’ils ne soient pas pénalisés par l’absence de prise en compte des versements, notamment dans le cas d’un départ anticipé pour carrière longue ou en tant que travailleur handicapé. Le contraire serait injuste d’autant que, précisément, leur carrière commence très tôt.
En conséquence, notre amendement vise à ce que ces versements soient désormais pris en compte dans la période cotisée, les rendant de ce fait éligibles au titre du dispositif de retraite pour carrière longue. Il s’agit – enfin – d’une mesure de justice et de bon sens.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Je remercie les auteurs de ces amendements de les avoir déposés. Ils visent à corriger une anomalie dans le calcul des trimestres, notamment en cas de carrière longue et pour les apprentis. Or les apprentis sont les premiers concernés par le dispositif de carrière longue, puisqu’ils commencent à travailler tôt, souvent à partir de 15 ans ou 16 ans.
Cet exemple montre bien la différence de calcul entre les carrières longues, pour lesquels on ne prend en compte que les trimestres cotisés ou réputés cotisés, et le droit commun. Une carrière normale sera à terme une carrière de 43 années – nous devons prendre en compte cette nouvelle situation, dont nous reparlerons – et elle intégrera des trimestres cotisés, des trimestres réputés cotisés, des trimestres assimilés et des majorations de pension pour les mères de famille.
Il existe des différences de traitement et il est nécessaire de prendre cette situation en compte.
Mes chers collègues, je donne bien volontiers mon avis sur ces amendements, parce qu’ils se rattachent naturellement à l’article 7 du texte.
Quand Raymonde Poncet Monge évoque le compte professionnel de prévention, elle sait bien que ce sujet ne relève pas de cet article.
Quand Marie-Noëlle Lienemann évoque les petites pensions, elle sait bien que cela est traité dans l’article 10.
Nous devons tout simplement suivre le déroulé des articles. C’est ainsi que nous éviterons d’utiliser l’article 38 du règlement du Sénat. (Ah ! sur les travées du groupe SER.) Traitons les sujets au bon moment ! Cela clarifiera nos débats.
En tout cas, la commission est tout à fait favorable à ces amendements identiques. (M. Stéphane Piednoir applaudit.)
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre. Ces amendements sont identiques à un amendement déposé par la députée Christine Le Nabour qui n’a pas pu être examiné à l’Assemblée nationale.
Comme cela a été dit par les différents intervenants, leur adoption permettra d’intégrer, dans les périodes prises en compte pour l’éligibilité au départ anticipé au titre des carrières longues, les trimestres effectués en apprentissage, tout particulièrement ceux qui ont fait l’objet d’un rachat de trimestres au tarif préférentiel.
C’est une mesure de justice et le Gouvernement y est favorable.
M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Houllegatte, pour explication de vote.
M. Jean-Michel Houllegatte. Je voudrais poser une question à René-Paul Savary.
On parle ici, à juste titre, des apprentis, mais d’autres catégories pourraient être concernées par ce type de dispositif, dont une que j’ai particulièrement à cœur : je pense aux aides familiaux, qu’on retrouve en grand nombre dans le secteur agricole et dans les commerces. Or le statut de ces personnes est flou.
Par exemple, il arrive souvent que des enfants aident leurs parents à tenir leur commerce, parfois avant de reprendre l’activité à leur compte.
Ces aides versent rarement des cotisations, mais est-ce qu’ils ne pourraient pas racheter des trimestres correspondant à cette activité professionnelle pour améliorer leur situation au moment de leur départ à la retraite ?
M. le président. La parole est à Mme Monique Lubin, pour explication de vote.
Mme Monique Lubin. Je trouve ces amendements intéressants, même si le rachat de trimestres coûte cher aux assurés.
Monsieur le rapporteur, je vous prends au mot : vous nous dites qu’on peut discuter sur des amendements de fond.
M. René-Paul Savary, rapporteur. Débattre !
Mme Monique Lubin. Nous débattons… Soit !
Alors, pourquoi avoir déclenché l’article 38 sur mon amendement qui portait sur une surcote de 5 %, c’est-à-dire sur une question de fond ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. C’est un sujet qui concerne l’article 8 !
Mme Monique Lubin. Allez, allez…
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Le groupe CRCE votera ces amendements. Nous pensons qu’ils constituent une avancée.
Souvent, on nous explique qu’en augmentant les cotisations on nuit à l’emploi et à la compétitivité des entreprises, comme si la baisse des cotisations était le fin du fin de la création d’emplois.
Je vous rappellerai que, dans un article publié dans Les Échos en juin 2022, on apprend que les deux tiers des 200 000 emplois créés par le secteur privé durant la période de référence relèvent de l’apprentissage.
C’est donc moins la baisse des cotisations que le soutien apporté au développement de l’apprentissage qui a permis de faire baisser le niveau du chômage.
M. le président. La parole est à M. Claude Raynal, pour explication de vote.
M. Claude Raynal. Je veux moi aussi m’étonner de l’utilisation qui est ici faite de l’article 38 de notre règlement : il suffira de relire nos débats pour se rendre aisément compte que depuis le début nous débattons du fond.
D’ailleurs, monsieur Savary, vous avez une pratique amusante : depuis l’article 2, vous nous dites que nous devons avancer pour traiter les sujets et aller vite, notamment pour atteindre cet article 7. Maintenant que nous sommes à l’article 7, vous nous dites d’avancer pour aller à l’article 8… Il est un peu étrange de nous renvoyer en permanence au sujet d’après ! (Exclamations sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
Ce procédé doit cesser, d’autant que le Sénat s’est honoré d’ouvrir, sur ce texte, bien plus d’heures de séance que l’Assemblée nationale. Vous avez voulu ouvrir des séances ; utilisez-les ! (Brouhaha sur les travées du groupe Les Républicains.)
Ce n’est pas la peine d’annoncer que nous allons travailler jusqu’à dimanche soir pour nous retrouver désemparés vendredi, si nous allons trop vite… (Rires sur les travées du groupe SER. – Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Sophie Primas. Il reste 1 128 amendements !
M. Claude Raynal. Tenez votre parole ! Vous nous dites vous-même que nous devons aller jusqu’à dimanche soir ; alors, allons-y, et dans le calme !
Pour conclure, je voudrais quand même féliciter Raymonde Poncet Monge. Je crois qu’on peut l’applaudir, parce que, dans quelques instants, devrait être adopté le premier amendement qui provient de cette partie de l’hémicycle ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. le président. La parole est à M. Philippe Bas, pour explication de vote.
M. Philippe Bas. Je ne méconnais pas la force d’un certain nombre d’arguments qui viennent de nous être présentés. Je suis moi-même un passionné de l’apprentissage et je considère qu’il est essentiel dans notre pays que les jeunes adoptent cette disposition d’esprit essentielle qui consiste à choisir ses études en vue d’un métier et à faire l’apprentissage du métier en situation de travail.
Pour autant, il me semble que ces amendements, dont la rédaction est approximative, n’ont pas été suffisamment étudiés. En ce qui me concerne, je voterai donc contre et je suggère à tous mes collègues de s’y opposer. En tout cas, je m’y opposerai jusqu’à ce qu’on ait pu en améliorer le contenu. (Marques de perplexité sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Olivier Dussopt, ministre. Madame Lubin, les trimestres travaillés en apprentissage sont comptés comme cotisés depuis 2013, parce que la rémunération des apprentis a alors atteint un niveau qui le permet.
Il a été prévu dans la loi de 2013, applicable à partir de 2014, la possibilité d’un rachat, dont le coût se situe autour de 1 500 euros le trimestre.
Cette somme peut paraître élevée, mais elle présente l’avantage d’être fixe pendant toute la carrière, alors que tous les rachats de trimestres sont fondés sur une somme qui tient compte d’une méthode actuarielle et qui peut atteindre 5 000 euros à 6 000 euros, si le rachat a lieu à la fin de la carrière.
Ces trimestres rachetés sont pris en compte pour la durée de cotisation requise pour avoir accès à une retraite à taux plein sans décote, mais pas pour l’éligibilité au départ au titre des carrières longues.
Cet amendement vise à permettre l’accès au dispositif de départ anticipé pour carrière longue sur la base de ces trimestres rachetés, sachant que nous ne changeons rien aux conditions de rachat fixées en 2014.
Par ailleurs, je veux rassurer M. Bas : il s’agit bien d’intégrer ces trimestres rachetés dans le cadre de l’éligibilité au départ anticipé pour les carrières longues, alors que ces trimestres ont été réalisés dans le cadre d’un contrat d’apprentissage qui n’était pas suffisamment rémunéré pour être considéré comme cotisé.
Je peux surtout vous rassurer sur le fait que la rédaction proposée reçoit pleinement l’approbation des services de mon ministère. (Applaudissements sur les travées du RDPI. – Sourires sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)
Demande de clôture
M. le président. La parole est à M. Claude Malhuret.
M. Claude Malhuret. Plusieurs orateurs ont défendu ces amendements, un orateur s’est exprimé contre, le rapporteur et le ministre ont également exprimé leur position. Par conséquent, en application de l’article 38, alinéa 1, de notre règlement, je demande la clôture des explications de vote sur ces trois amendements identiques. (Protestations sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. Jean-Michel Houllegatte. Le débat était terminé !
M. le président. Je suis saisi par M. Claude Malhuret, président du groupe Les Indépendants – République et Territoires, d’une demande de clôture des explications de vote sur les amendements identiques nos 1895 rectifié, 1909 et 3403.
Mes chers collègues, je vous rappelle que, en application de l’article 38, alinéa 1, du règlement, la clôture peut être proposée lorsqu’au moins deux orateurs d’avis contraire sont intervenus. Peuvent prendre la parole sur cette proposition un orateur par groupe et un sénateur ne figurant sur la liste d’aucun groupe.
La parole est à M. Guillaume Gontard, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
M. Guillaume Gontard. Je suis heureux que le président Malhuret ait enfin trouvé le livre vert, mais là, je suis un peu estomaqué !
La majorité sénatoriale a découvert la nuit dernière l’article 38 du règlement et je comprends que ce soit rigolo de l’utiliser, mais nous sommes en train de débattre d’amendements identiques issus de trois groupes – le RDSE, le RDPI et les écologistes. Le rapporteur a même dit, me semble-t-il, qu’ils étaient intéressants et M. Bas a fait part de ses doutes quant à leur rédaction.
Il me semble que ces échanges, vrais et par ailleurs sereins, sont utiles. Ils correspondent à la manière dont le Sénat travaille de manière générale.
L’usage que la majorité sénatoriale fait de l’article 38 depuis cette nuit est scandaleux, mais c’est encore pire en l’espèce !
Qu’est-ce qui vous énerve aujourd’hui ? Pourquoi ne voulez-vous pas débattre ? Qu’est-ce qui vous gêne dans cet article 7 ? Pourquoi cette obstruction quasi continue ? (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Malhuret a trouvé le livre vert et il va nous sortir des articles 38 à la chaîne ! Je pense que vous pourriez retirer cette demande, mon cher collègue, pour qu’on puisse débattre sereinement et voter ces amendements qui sont importants.
Mme Sophie Primas. On va les voter !
M. Guillaume Gontard. J’ajoute que l’amendement présenté par Raymonde Poncet Monge sera peut-être le seul, parmi ceux qui ont été déposés dans cette partie de l’hémicycle, à être adopté par le Sénat pour enrichir le texte. Et vous savez bien que, depuis le début de nos débats, Raymonde Poncet Monge n’a pas ménagé sa peine ! (Rires et applaudissements sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE. – M. Bruno Belin applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
M. Bernard Jomier. Il me semble, monsieur Malhuret, que nos échanges sur ces amendements étaient terminés. Le ministre s’était exprimé et j’ai l’impression qu’il n’y avait plus de demande de parole. (Si ! et protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Mais si !
M. Bernard Jomier. Le déclenchement de l’article 38 amène maintenant chacun des groupes de l’opposition à s’exprimer. Vous êtes en train de tourner en ridicule l’application de cet article. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST. – Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Vous ne pouvez pas arguer de la moindre obstruction à l’occasion de la discussion de ces amendements. (Nouvelles protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Sophie Primas et M. Philippe Mouiller. Vous faites de l’obstruction depuis le début !
M. Bernard Jomier. Si vous déclenchez l’article 38 sur chaque amendement, il va y avoir des prises de parole de nos trois groupes…
M. Max Brisson. On ne s’en lasse pas !
M. Bernard Jomier. … pour pointer du doigt le fait qu’une telle application indiscriminée revient à faire obstacle au débat.
Je vous appelle donc à ne pas voter l’application de l’article 38 sur ces amendements et vous verrez qu’il n’y aura pas une pluie d’interventions. (On en doute sur les travées du groupe Les Républicains.)
Le débat est épuisé, il y aura peut-être un collègue qui s’exprimera – je n’en sais rien. Nous avons eu un débat apaisé et intéressant. Le ministre y a également apporté des éléments constructifs.
Si vous ne voulez pas de ce type de discussion, alors nous allons effectivement passer quatre jours à entendre des interventions de pure forme qui n’auront aucun intérêt.
M. Martin Lévrier. Cela ne changera pas !
M. Bernard Jomier. La majorité dispose naturellement des armes du règlement, mais vous avez la responsabilité que la conduite de nos débats soit apaisée. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Mme Céline Brulin. Je suis un peu frappée par le fait que notre collègue Malhuret, qui donne des leçons de démocratie à la terre entière, soit choqué que chacun puisse défendre ses amendements et ses positions. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)
Je trouve que le débat qui vient de s’engager contribue d’autant plus à nos discussions que c’est la première fois, me semble-t-il, que nous parlons de l’apprentissage. J’ai d’ailleurs été particulièrement intéressée d’entendre l’argumentation de Philippe Bas et je pense que ce sujet mérite d’être approfondi.
La mandature actuelle de l’Assemblée nationale détient le record du nombre de 49.3 – je crois que nous en sommes déjà à onze… Voulez-vous vraiment lui faire concurrence avec votre article 38 ?
J’ai entendu, ici, pis que pendre, parfois pour de très bonnes raisons, de la manière dont s’étaient déroulés les débats à l’Assemblée nationale. Il ne faudrait pas que l’image qui reste du Sénat soit la même ! (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Philippe Mouiller. Donnez l’exemple !
Mme Céline Brulin. Mes chers collègues, nos concitoyens ne sont pas férus comme vous des articles du règlement du Sénat. Ils attendent un débat démocratique approfondi sur un sujet qui engage leur vie. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)
Vos procédures, vos manœuvres, ils n’en ont que faire ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.) Ils veulent que, les uns et les autres, nous argumentions et que nous défendions, comme cela est légitime, nos options, nos projets de société, en l’espèce sur l’apprentissage. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST.)
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Ils veulent qu’on avance !
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Delattre, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.
Mme Nathalie Delattre. Je ne souhaite pas particulièrement m’exprimer sur le recours à l’article 38. Je veux surtout saluer l’avis favorable de la commission et sortir un peu de ce débat stérile.
Le groupe du RDSE n’est pas dans une manœuvre d’obstruction. Nous avons déposé peu d’amendements et, si nous en avons déposé, c’est pour améliorer le texte.
Nous sommes regardés par nombre de personnes qui sont concernées par cet article et par ces trois amendements. Nous avons été sensibilisés par beaucoup d’associations de personnes handicapées et j’aimerais que ces amendements ne soient pas pris en otage et que nous puissions, en notre âme et conscience, les voter. Il s’agit d’une mesure juste et je vous demanderai donc, mes chers collègues, de suivre l’avis favorable de la commission.
M. le président. La parole est à M. Bruno Retailleau, pour le groupe Les Républicains.
M. Bruno Retailleau. Ce qu’a proposé Bernard Jomier était très intéressant. Il a proposé une sorte d’entente pour que nous nous concentrions, avec l’accord de l’ensemble des groupes, sur ce qui constitue le cœur de la réforme.
C’est ce que le président Gérard Larcher vous a proposé ce matin juste avant la conférence des présidents, messieurs les présidents des groupes de gauche, et vous avez refusé, parce que vous voulez faire de l’obstruction. (Protestations sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST.) Vous ne voulez pas que le Parlement puisse voter ce texte.
L’obstruction, c’est un parlement qui se fait hara-kiri. L’obstruction, c’est la négation du parlementarisme. L’obstruction, c’est une prise en otage d’une minorité sur l’ensemble de l’institution. (Applaudissements sur des travées des groupes Les Républicains et RDPI.)
M. Vincent Éblé. La faute à qui ?
M. Bruno Retailleau. Vous nous obligez à recourir à l’article 38. (Protestations sur les travées du groupe CRCE.) Si chacun est raisonnable, si chacun discute au fond des articles sans volonté d’obstruction, alors oui, chacun pourra jouer le jeu.
M. Vincent Éblé. Qui a mis le couperet à dimanche ?
M. Bruno Retailleau. La balle est dans votre camp ! Tout à l’heure, nous avons examiné neuf sous-amendements à un amendement de Mme Assassi, des sous-amendements d’obstruction ! Et je pourrais en citer des centaines ! Les Français doivent le savoir. (Brouhaha sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
Mme Éliane Assassi. Ne criez pas !
M. Bruno Retailleau. L’article 38 est justement fait pour neutraliser une manœuvre d’obstruction et l’obstruction, c’est la négation du rôle du Parlement ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. le président. La parole est à M. François Patriat, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
M. François Patriat. J’écoute nos débats avec attention, patience et acuité, sans vociférer ni interrompre et en essayant de laisser l’opposition s’exprimer le plus longtemps possible.
En revanche, il y a une chose que je ne supporte pas, mes chers collègues, c’est l’hypocrisie.
L’hypocrisie consiste ici à dire qu’on veut débattre de l’apprentissage – en ce qui me concerne, c’est un sujet qui me passionne et je serais donc heureux qu’on puisse en débattre –, mais pour vous, le débat n’est qu’un prétexte. C’est quand même un problème !
J’étais en conférence des présidents ce matin et j’ai entendu les présidents de trois groupes d’opposition dire clairement qu’ils ne voulaient pas qu’on aille au bout de l’examen de ce texte. Ils l’ont dit ! (M. Jean-Marc Todeschini s’exclame.)
Si vous voulez nous faire croire que vous voulez débattre plus, c’est uniquement pour atteindre votre objectif : ne pas aller au bout de l’examen de ce texte. Vous voulez vous dessaisir de votre pouvoir de voter la loi et je dénonce cette hypocrisie. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, INDEP, UC et Les Républicains.)
M. le président. Conformément à l’article 38, alinéa 3, du règlement, je consulte le Sénat sur cette proposition.
(La clôture est prononcée.)
Article 7 (suite)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 1895 rectifié, 1909 et 3403.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
Je rappelle que l’avis de la commission est favorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 218 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 344 |
Pour l’adoption | 344 |
Contre l’adoption | 0 |
Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, INDEP, et Les Républicains.)
M. Hervé Gillé. Tout ça pour ça !
M. Pascal Savoldelli. Et M. Bas a voté pour !
M. le président. Je suis saisi de six amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 10 rectifié ter, présenté par MM. Savin, Daubresse, Hugonet et Pellevat, Mme Belrhiti, M. Milon, Mme Dumont, MM. Joyandet et Bacci, Mme Puissat, M. C. Vial, Mmes Di Folco, Berthet et Micouleau, MM. Burgoa, Cadec, Panunzi et D. Laurent, Mme M. Mercier, MM. Mandelli et Charon, Mmes Joseph et L. Darcos, MM. Piednoir et Bouchet, Mme Bourrat, M. B. Fournier, Mme Malet, M. Paccaud, Mme Demas, MM. Brisson et Rojouan, Mmes Drexler et Lassarade, MM. Chatillon et Belin, Mme Borchio Fontimp et MM. Genet, Husson et Rapin, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 12
Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :
…° L’article L. 351-14-1 est ainsi modifié :
a) Le I est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« …° Les périodes pendant lesquelles une personne a été inscrite en tant que sportif de haut niveau sur la liste mentionnée au premier alinéa de l’article L. 221-2 du code du sport et qui n’ont pas été prises en compte à un autre titre dans un régime de base. » ;
b) Est ajouté un paragraphe ainsi rédigé :
« …. – Par dérogation aux conditions prévues au I, le montant du versement de cotisations prévu pour la prise en compte des années civiles mentionnées au 3° du même I au cours desquelles l’assuré a été inscrit en tant que sportif de haut niveau sur la liste mentionnée au premier alinéa de l’article L. 221-2 du code du sport, peut être abaissé par décret, dans des conditions et limites tenant notamment au nombre de trimestres éligibles à ce montant spécifique. »
II. – Après l’alinéa 144
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La limite du nombre total de trimestres validés prévue au 7° de l’article L. 351-3 du code de la sécurité sociale est augmentée par décret.
La parole est à M. Michel Savin.
M. Michel Savin. Cet amendement devrait aussi faire l’unanimité dans cet hémicycle !
Son objectif est de permettre aux sportifs de haut niveau inscrits sur les listes ministérielles mentionnées au premier alinéa de l’article L. 221-2 du code du sport de valider jusqu’à trente-deux trimestres. Cette durée est plus adaptée à la durée moyenne des carrières sportives.
Cet amendement propose également d’ouvrir pour ces athlètes le rachat de trimestres – c’est une bonne avancée.
Pour autant, monsieur le ministre, tous les athlètes ne sont pas concernés par cette mesure. Certains sportifs, femmes et hommes, qui ont fait briller les couleurs de la France lors des compétitions olympiques ou des championnats du monde ne bénéficient pas de ce dispositif. Je parle de tous ceux qui étaient en activité avant la réforme de 2012 : n’ayant pas cotisé ni validé de trimestres, ils ne bénéficient pas de ce dispositif.
J’avais déposé un amendement pour corriger cette situation, mais il a été déclaré irrecevable. Monsieur le ministre, le droit à pension prévu au 7° de l’article L. 351-3 du code de la sécurité sociale est-il ouvert à toute personne inscrite sur la liste ministérielle des sportifs de haut niveau avant 2012 ? Sinon, pouvez-vous, ce soir, vous engager à ce que le Gouvernement corrige cette injustice.
Je rappelle qu’aujourd’hui 10 % des personnes éligibles font appel à ce dispositif. Il n’a donc pas d’impact fort sur les finances de l’État. Pour autant, c’est une mesure de justice pour celles et ceux qui ont fait briller les couleurs de la France sur tous les terrains du monde – certains sont aujourd’hui en grande difficulté financière. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. Les cinq amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 9 rectifié ter est présenté par MM. Kern et Laugier, Mme Sollogoub, MM. Levi et Canévet, Mmes Herzog, Billon, Guidez, Dindar et de La Provôté, MM. Longeot, Duffourg et Prince, Mme Vérien, M. J.M. Arnaud, Mmes Ract-Madoux et Saint-Pé, MM. Détraigne et Chauvet, Mme Férat, M. Le Nay, Mmes Devésa, Jacquemet et Morin-Desailly et M. Moga.
L’amendement n° 2298 rectifié quater est présenté par Mmes Boulay-Espéronnier et Thomas.
L’amendement n° 2475 est présenté par M. Dossus, Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon.
L’amendement n° 141 rectifié bis est présenté par MM. Théophile, Iacovelli, Lévrier, Hassani, Patriat, Bargeton et Buis, Mme Cazebonne, MM. Dagbert et Dennemont, Mme Duranton, M. Gattolin, Mme Havet, MM. Haye, Kulimoetoke, Lemoyne, Marchand, Mohamed Soilihi et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud, Richard et Rohfritsch, Mme Schillinger et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
L’amendement n° 2922 rectifié est présenté par M. Kanner, Mmes Lubin, Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mmes Blatrix Contat et Assassi, M. Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Ces cinq amendements sont ainsi libellés :
I. – Après l’alinéa 12
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…° Le I de l’article L. 351-14-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« …° Les périodes pendant lesquelles une personne a été inscrite en tant que sportif de haut niveau sur la liste mentionnée au premier alinéa de l’article L. 221-2 du code du sport et qui n’ont pas été prises en compte à un autre titre dans un régime de base. » ;
II. – Après l’alinéa 144
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La limite du nombre total de trimestres validés prévue au 7° de l’article L. 351-3 du code de la sécurité sociale est augmentée par décret.
La parole est à M. Claude Kern, pour présenter l’amendement n° 9 rectifié ter.
M. Claude Kern. Nous savons tous que l’activité des sportifs de haut niveau impose un engagement personnel très important qui est susceptible de décaler l’entrée dans la vie professionnelle.
Aussi, pour compenser cette situation, un dispositif de validation de trimestres a été mis en place en 2012 pour les sportifs qui sont inscrits sur la liste des sportifs de haut niveau.
Le nombre maximal de trimestres qui peuvent ainsi être acquis est limité à seize, soit quatre ans, ce qui correspond à une olympiade.
Avec cet amendement, nous souhaitons porter ce nombre maximal de validation de trimestres à trente-deux, soit deux olympiades.
Par ailleurs, il ouvre la possibilité aux sportifs de haut niveau de racheter des périodes antérieures ou postérieures à 2012.
M. le président. La parole est à Mme Céline Boulay-Espéronnier, pour présenter l’amendement n° 2298 rectifié quater.
Mme Céline Boulay-Espéronnier. Tout a été dit par mes collègues sur l’importance des sportifs, sur ce qu’ils incarnent et sur le fait qu’ils représentent la France à l’international.
Mon amendement vise à permettre au pouvoir réglementaire de porter à 64 le nombre maximal de trimestres validés, soit seize années, conformément à la durée des carrières sportives de nos meilleurs compétiteurs.
M. le président. La parole est à M. Thomas Dossus, pour présenter l’amendement n° 2475.
M. Thomas Dossus. Cet amendement concerne lui aussi les sportifs de haut niveau, catégorie très large, qui ne concerne évidemment pas que les millionnaires du ballon rond.
En réalité, on parle de Françaises et de Français qui réalisent des performances significatives dans des sports que l’on ne regarde qu’une fois tous les quatre ans, lors des jeux Olympiques, mais qui ont enduré des années et des années d’efforts et d’entraînements pour assouvir l’ambition d’une Nation sportive, l’ambition de la France, que le Président de la République exprime parfois de façon un peu abrupte.
Pour récompenser cet engagement personnel, je propose, contrairement à mes collègues, de laisser le Gouvernement libre de déterminer par décret le nombre de trimestres pouvant être validés.
Comme mon collègue Savin, je m’interroge sur l’opportunité d’étendre le dispositif à la période précédant 2012.
M. le président. La parole est à M. Bernard Buis, pour présenter l’amendement n° 141 rectifié bis.
M. Bernard Buis. Cet amendement de notre collègue Dominique Théophile et cosigné par l’ensemble des membres de notre groupe vise à répondre à une forte attente du monde sportif.
Depuis 2012, un dispositif de validation de trimestres, financé par le ministère des sports, a été mis en place pour les sportifs inscrits sur la liste des sportifs de haut niveau. Le nombre de trimestres maximal pouvant être ainsi acquis est limité à seize, ce qui correspond à quatre années, soit une olympiade.
Le présent amendement vise à porter le nombre maximum de trimestres pouvant être validés à trente-deux, soit deux olympiades, et à permettre aux sportifs de haut niveau de racheter des périodes antérieures ou postérieures à 2012.
À l’heure où la France est terre de jeux Olympiques, cet amendement tend à s’assurer que les sportifs ne soient en rien pénalisés pour leur engagement.
M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, pour présenter l’amendement n° 2922 rectifié.
M. Patrick Kanner. Le président Macron, en novembre dernier, a déclaré qu’il ne fallait pas politiser le sport.
Je ne suis pas du tout d’accord avec cette approche, parce que je pense que le sport est éminemment politique. C’est aussi en organisant de très grands événements sportifs, et pas seulement par son action sur les sujets militaires, comme nous pouvons malheureusement le voir aujourd’hui, qu’un grand pays comme le nôtre entre dans la catégorie des nations qui démontrent leur force en soutenant une stratégie de soft power.
En 2021, les jeux Olympiques de Tokyo ont permis aux sportifs français de ramener plus de trente médailles. Le Président de la République a souligné à juste titre que ce n’était pas assez et qu’il faudrait faire mieux. Pourquoi ? Parce qu’il y va effectivement de l’image de la France et parce que ces événements sportifs constituent un élément de notre rayonnement international.
En somme, mes chers collègues, le sport est politique, au meilleur sens du terme – d’ailleurs, le mot « politique » n’a pas de mauvais sens !
Bien loin de l’image du sportif professionnel multimillionnaire qui peut exister dans certains sports, comme le football, voire le basket ou encore le rugby,…
M. Max Brisson. Ah non !
M. Patrick Kanner. Il y a des rugbymen millionnaires dans les pays anglo-saxons !
Bien loin de cette image, les sportifs de haut niveau qui s’illustrent dans des sports très différents manquent de reconnaissance et vivent parfois de salaires de misère, malgré leur engagement extraordinaire.
Par cet amendement, nous vous proposons de doubler le nombre maximum de trimestres pouvant être validés pour les porter à trente-deux, soit huit ans ou deux olympiades. (M. Jean-Marc Todeschini applaudit.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Voilà des amendements intéressants sur lesquels nous pouvons nous réunir sans débattre pendant des heures !
M. Patrick Kanner. Article 38 ? (Sourires.)
M. René-Paul Savary, rapporteur. Économisons-nous pour les sujets sur lesquels nous nous opposons.
Il s’agit d’augmenter le nombre de trimestres pouvant être validés au titre de l’inscription en tant que sportif de haut niveau. Il est proposé de passer de seize à trente-deux trimestres, avec l’accord du Gouvernement.
Or M. le ministre s’est justement engagé – il va nous probablement nous le confirmer – à passer à trente-deux trimestres par décret.
La commission est favorable aux cinq amendements identiques.
L’adoption de l’amendement de M. Savin permettrait d’abaisser par décret le montant des cotisations qui s’avèrent superfétatoires ; or cela aussi est fixé par décret. La commission est donc favorable à cet amendement, sous réserve d’une rectification qui conduirait à retirer le b) du I.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre. Le Gouvernement est favorable aux amendements nos 9 rectifié ter, 141 rectifié bis, 2298 rectifié quater, 2475 et 2922 rectifié et il sera favorable à l’amendement n° 10 de M. Savin, sous réserve de la modification proposée par M. le rapporteur dans un souci de clarté, à savoir la suppression de la partie relative au montant des cotisations.
Par ailleurs, ma collègue ministre des sports s’est engagée à ce que le décret porte la durée possible à trente-deux trimestres contre seize actuellement.
Enfin, monsieur le sénateur Savin, vous proposez que le niveau des cotisations puisse être revu à la baisse. Nous travaillons sur un dispositif différent, qui relèvera directement du ministère des sports. Notre objectif est de permettre aux sportifs d’avoir les trente-deux trimestres pour la période qui vient et de pouvoir les racheter pour la période avant 2012.
Le plus simple est de prévoir un rachat selon les règles du droit commun. Si le ministère des sports souhaite un accompagnement plus marqué dans le cadre de la rédaction du décret, nous y sommes ouverts, mais cela doit faire l’objet d’un travail en commun sur les paramètres.
M. le président. La parole est à M. Michel Savin, pour explication de vote.
M. Michel Savin. Je suis d’accord pour rectifier l’amendement dans le sens proposé par M. le rapporteur.
M. le président. Il s’agit donc de l’amendement n° 10 rectifié quater.
Veuillez poursuivre, mon cher collègue.
M. Michel Savin. J’entends bien la proposition de M. le ministre de travailler également sur la période antérieure à 2012, ce qui permettrait de répondre à une vraie demande, que notre collègue Patrick Kanner a rappelée.
Aujourd’hui, des sportifs de haut niveau, qui ont fait briller les couleurs de la France, touchent 1 000 euros de salaire. Ce n’est pas convenable.
J’espère que votre déclaration permettra et à la ministre des sports et au ministre du budget de trouver une solution qui puisse répondre à cette attente.
M. le président. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.
M. Pierre Ouzoulias. Proposer aux sportifs, par la voie réglementaire, de racheter des trimestres est un dispositif vraiment très intéressant et une façon de renforcer la nation sportive.
Je veux cependant exprimer un très gros regret : il existe non seulement des sportifs de haut niveau, mais aussi des chercheurs de haut niveau. J’aurais aimé que ce dispositif puisse aussi s’appliquer aux doctorants. J’ai proposé un amendement en ce sens, mais celui-ci ne sera malheureusement pas examiné.
Aujourd’hui, 30 % des doctorants n’ont pas de contrat doctoral. Autrement dit, ils offrent trois ans de leur temps à l’État, sans aucune reconnaissance de la Nation.
J’espère vivement, monsieur le ministre, que vous pourrez corriger cette inégalité. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. Philippe Bas, pour explication de vote.
M. Philippe Bas. Je veux simplement dire que ces amendements sont excellents.
M. le président. La parole est à Mme Mélanie Vogel, pour explication de vote.
Mme Mélanie Vogel. Je me réjouis du soutien unanime apporté à une disposition qui me semble déroger de manière pertinente au principe d’égalité devant la loi. Voilà qui démontre le caractère totalement idéologique de votre décision de déclarer irrecevables tous nos amendements prévoyant des dérogations similaires.
Mme Sophie Primas. Vos sous-amendements !
Mme Mélanie Vogel. Vous avez raison, madame Primas : nos amendements étaient recevables, alors que nos sous-amendements, dont les dispositions étaient identiques, ont été déclarés irrecevables ; je vous remercie de me le faire remarquer !
J’y insiste, cela démontre que le sort réservé à nos milliers de sous-amendements était parfaitement idéologique et injustifié. (Applaudissements sur les travées des groupes GEST et SER.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 10 rectifié quater, 9 rectifié ter, 2298 rectifié quater, 2475, 141 rectifié bis et 2922 rectifié.
J’ai été saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l’une, du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires et, l’autre, du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Je rappelle que l’avis de la commission est favorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 219 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 338 |
Pour l’adoption | 324 |
Contre | 14 |
Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les amendements nos 77 rectifié, 1914, 2021 et 3404 sont identiques.
L’amendement n° 77 rectifié est présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Corbisez, Fialaire, Gold et Guérini, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux.
L’amendement n° 1914 est présenté par MM. Iacovelli, Lévrier, Hassani, Patriat, Bargeton et Buis, Mme Cazebonne, MM. Dagbert et Dennemont, Mme Duranton, M. Gattolin, Mme Havet, MM. Haye, Kulimoetoke, Lemoyne, Marchand, Mohamed Soilihi et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud, Richard et Rohfritsch, Mme Schillinger, M. Théophile et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
L’amendement n° 2021 est présenté par M. Vanlerenberghe et les membres du groupe Union Centriste.
L’amendement n° 3404 est présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Après l’alinéa 12
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Au II de l’article L. 351-14-1, les mots : « au délai de présentation de la demande, fixé à dix ans à compter de la fin des études » sont remplacés par les mots : « à l’âge de l’assuré à la date de la demande, qui ne peut être inférieur à trente ans ».
La parole est à Mme Nathalie Delattre, pour présenter l’amendement n° 77 rectifié.
Mme Nathalie Delattre. L’allongement de la durée des études constitue une grande avancée, un atout pour notre société, mais il a pour conséquence indirecte un déficit d’années de cotisation.
C’est la raison pour laquelle la réforme des retraites de 2003 a mis en place un dispositif de rachat de trimestres au titre des périodes d’études supérieures. Le tarif élevé de ce rachat, déterminé sur le principe de la neutralité actuarielle, le rendait difficile d’accès. De fait, il était surtout utilisé par des assurés proches de la retraite.
La réforme des retraites de 2014 a permis aux jeunes actifs de racheter jusqu’à quatre trimestres d’assurance au titre des années d’études à un tarif préférentiel pendant les dix années suivant la fin de leurs études.
Cependant, force est de reconnaître que ce dispositif s’adresse à des jeunes dont tous ne sont pas encore préoccupés par la constitution de la retraite ou pleinement au fait des possibilités de rachat.
Dans ces conditions, il nous paraît légitime de leur donner un peu plus de temps pour racheter ces trimestres d’études à un tarif aidé, ce qui leur permettra aussi de s’installer dans la vie professionnelle.
Aussi, cet amendement vise à ce que les trimestres puissent faire l’objet d’un rachat jusqu’à un âge fixé par décret, mais qui ne saurait être inférieur à 30 ans.
M. le président. La parole est à M. Xavier Iacovelli, pour présenter l’amendement n° 1914.
M. Xavier Iacovelli. Le rachat à tarif réduit de trimestres au titre des périodes d’études supérieures permet aux assurés de valider plus facilement leur durée d’assurance pour atteindre le taux plein plus rapidement et ainsi améliorer considérablement leur pension de retraite.
Cependant, les conditions d’accès au rachat sont aujourd’hui beaucoup trop restrictives. Ce dispositif s’adresse en effet à de jeunes actifs, plus intéressés par l’élaboration et la conduite de leur vie professionnelle présente que par la constitution de leur retraite future. Mes chers collègues, à l’âge de 33-35 ans, nous n’étions pas particulièrement disposés – et nous n’en avions pas la possibilité – à racheter des trimestres.
Cet amendement a pour objet d’étendre l’âge auquel il est possible de racheter ces trimestres jusqu’à au moins 30 ans. Laissons le temps à chacun de vivre ce moment charnière après les études ; laissons à nos concitoyens le temps de définir leur projet de carrière avant de penser à la retraite. Offrons-leur du temps et de la flexibilité sans leur porter préjudice sur le long terme.
M. le président. La parole est à M. Claude Kern, pour présenter l’amendement n° 2021.
M. Claude Kern. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 3404.
Mme Raymonde Poncet Monge. La loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites a créé un dispositif de rachat à tarif réduit de trimestres au titre des périodes d’études supérieures.
Ce dispositif permet aux assurés qui ont fait des études supérieures – parfois longues – de valider plus facilement leur durée d’assurance avant d’entamer leur carrière pour atteindre le taux plein et améliorer ainsi leur pension de retraite.
Mais cette possibilité de rachat semble trop limitée dans le temps : les assurés ont dix ans après la fin de leur dernière année d’études pour racheter l’équivalent de quatre trimestres. Ce délai nous paraît trop contraignant : à la sortie de leurs études, les jeunes actifs sont davantage préoccupés par leur insertion dans un monde du travail de plus en plus difficile : le taux de chômage des jeunes a été multiplié par 3,5 en quarante ans et, lorsque ceux-ci parviennent enfin à travailler, beaucoup occupent des emplois précaires. Selon France Stratégie, 35 % des 15-29 ans ont un contrat temporaire – CDD, intérim, apprentissage.
Dès lors, on comprend que la préoccupation première de ces jeunes soit d’abord le travail, l’insertion et la décohabitation, qui se fait de plus en plus tardivement.
Pour toutes ces raisons, il nous semble logique d’assouplir les conditions d’accès au rachat au titre des études supérieures. Il s’agit de prendre en compte la nouvelle réalité de l’insertion des jeunes sur le marché de l’emploi, de plus en plus difficile et tardive.
M. le président. La parole est à M. Rémi Cardon, pour présenter l’amendement n° 2986 rectifié bis.
M. Rémi Cardon. Cet amendement vise à étendre la durée pendant laquelle les étudiants et anciens étudiants peuvent effectuer une demande de rachat à tarif réduit de leurs trimestres d’études supérieures.
Actuellement, cette durée est fixée à dix ans après la fin des études. Or celle-ci ne coïncide pas forcément avec la capacité financière idoine, comme l’a souligné M. Iacovelli. Mais encore faut-il agir pour éviter ce genre de situation. Il est triste d’en arriver là !
On sait qu’il est difficile d’obtenir un prêt étudiant, d’acheter une première voiture, de s’installer quand on devient jeune actif.
Nous proposons de faire passer le délai de rachat à quinze ans après la fin des études pour permettre aux anciens étudiants de racheter leurs trimestres plus tardivement et faciliter d’autant leur parcours de vie. Rassurez-vous, cet amendement ne coûte pas un euro.
À cet égard, je rappelle que la majorité présidentielle a refusé le repas à 1 euro à l’Assemblée nationale ! (Exclamations sur les travées du groupe RDPI.)
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Nous sommes au Sénat !
M. Rémi Cardon. J’espère que la grosse coalition réunissant Les Républicains, les centristes et les sénateurs soutenant le Gouvernement votera la proposition de loi sur le repas à 1 euro et que les centristes ne vont pas se faire blouser dans cette affaire ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Mickaël Vallet. Bravo !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Tout se passait bien jusque-là ! Je pensais même que nous avions retrouvé notre sérénité… (Sourires.)
La question du rachat de trimestres est importante. Monsieur Cardon, vous proposez de porter le délai de dix à quinze ans. Or le Gouvernement propose un rachat jusqu’à l’âge de 30 ans, faisant disparaître ainsi la notion de délai. Il me semble préférable de nous ranger à cette dernière proposition, qui constitue une amélioration par rapport à la situation actuelle.
Monsieur le ministre, pouvez-vous nous apporter des précisions sur le décret, notamment sur la limite d’âge de 30 ans que vous souhaitez fixer ?
La commission est favorable aux amendements identiques et demande le retrait de celui de M. Cardon ; à défaut, elle y sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre. Le Gouvernement est favorable aux amendements identiques nos 77 rectifié, 1914, 2021 et 3404.
Comme l’a souligné M. le rapporteur, nous nous engageons à porter l’âge de rachat des trimestres d’études à 30 ans. Nous inscrirons cette possibilité dans le décret.
Nous le verrons tout à l’heure, mais nous souhaitons également que les trimestres de stage puissent être rachetés jusqu’à 25 ans, alors qu’ils ne peuvent l’être aujourd’hui que dans les deux ans suivant le stage, c’est-à-dire quand beaucoup de bénéficiaires sont encore étudiants.
Monsieur Cardon, je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement : vous raisonnez sur une durée, alors que nous fixons une borne d’âge.
M. le président. La parole est à M. Daniel Breuiller, pour explication de vote.
M. Daniel Breuiller. Je souhaite m’exprimer sur les amendements identiques nos 1895 rectifié de notre collègue Delattre, 1909 de notre collègue Lévrier et 3403 de ma collègue Poncet Monge.
Je suis corapporteur spécial de la commission des finances sur la mission « Travail et emploi ». En cette qualité, j’ai eu l’occasion de souligner dans cet hémicycle l’importance pour notre pays de la réussite de l’apprentissage, complimentant au passage le Gouvernement, ce que je ne fais pas tous les jours, même si l’apprentissage concerne davantage aujourd’hui des bac+4 que des bac–3.
J’avais demandé la parole sur l’article avant que mon collègue Philippe Bas ne s’exprime et avant que Claude Malhuret ne réclame l’application de l’article 38, ce qui m’a empêché d’intervenir. Mais peut-être M. le président ne m’avait-il pas vu…
Au fond, ce n’est pas très grave, puisque les amendements ont été votés à l’unanimité, y compris par Philippe Bas, qui avait pourtant expliqué à quel point ils étaient mal écrits et devaient être rejetés. D’ailleurs, je me demande encore si son intervention n’avait pas simplement pour but de permettre l’activation de l’article 38 ! (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
On ne me voit pas, on intervient contre, avant de voter pour, puis on clôt les débats… Mes chers collègues, cette attitude est peu glorieuse. Votre volonté de corseter les débats les transforme en pantomimes. La pièce a été si mauvaise que même les acteurs l’ont quittée avant sa fin. C’est ce que je vais faire ce soir ! (M. Daniel Breuiller se lève et quitte l’hémicycle.)
M. François Bonhomme. Bonne nouvelle !
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Vous êtes hors sujet !
Mme Jacqueline Eustache-Brinio. Acceptez d’être minoritaires !
M. le président. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.
M. Pierre Ouzoulias. Monsieur le ministre, l’âge moyen d’entrée dans la carrière pour les métiers d’enseignant et d’enseignant-chercheur est aujourd’hui de 35 ans.
Un fonctionnaire qui devient chercheur ne va donc commencer à gagner suffisamment sa vie pour racheter des parts qu’à partir de cet âge. Si vous fixez une limite à 30 ans, vous lui interdisez de facto de racheter des trimestres.
Ce qui se joue derrière, mes chers collègues, monsieur le ministre, c’est la fuite des cerveaux. Jusqu’à présent, les chercheurs étaient mal payés, mais ils avaient une bonne retraite. Aujourd’hui, ils seront mal payés et ils auront une mauvaise retraite. Nous pouvons donc être certains qu’ils partiront à l’étranger.
Notre objectif est de les garder ; pour ce faire, il faut leur offrir de bons salaires et une bonne retraite. Monsieur le ministre, l’enjeu est fondamental : il s’agit de la Nation française et de sa capacité à développer des connaissances qui nous permettront d’affronter les enjeux futurs. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)
M. le président. La parole est à M. Rémi Cardon, pour explication de vote.
M. Rémi Cardon. Je ne comprends pas trop l’argument de M. le rapporteur : si l’on ajoute quinze ans à l’âge moyen d’entrée sur le marché du travail des jeunes actifs, qui est de 22-23 ans, on aboutit à 37 ans.
Ma proposition est donc plus pertinente que celle de M. Iacovelli et je vous propose de la voter.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.
Mme Laurence Rossignol. Pourquoi poser une limite d’âge aussi proche de la fin des études ? Quels sont les jeunes qui, à 30 ans, peuvent racheter leurs trimestres de cotisations ?
M. Jean-Marc Todeschini. Les fils de riches !
Mme Laurence Rossignol. Je vais vous donner la réponse, mes chers collègues : ce sont ceux dont les parents vont prendre en charge ce rachat, ceux dont les parents vont se préoccuper de leur retraite – visiblement, beaucoup s’en préoccupent en ce moment – et ceux dont les parents ont suffisamment d’épargne pour mettre sur la table les quelques milliers d’euros nécessaires.
À quoi sert donc cette limite d’âge sinon à empêcher le plus grand nombre d’étudiants issus des classes populaires, qui ne sont pas des « fils de » ou des étudiants dont les parents ont payé une grande partie des études, à racheter leurs trimestres ? De fait, ils ne pourront jamais le faire ! Le principe même d’une limite d’âge n’est pas compréhensible et n’a d’autre fin que de réaliser des économies en profitant de son caractère dissuasif.
Je voterai donc l’amendement de M. Cardon qui me paraît meilleur. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE.)
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Je suis tout à fait d’accord avec ce qui vient d’être dit, notamment par Pierre Ouzoulias.
À 30 ans, les personnes qui ont fait des études longues ne pensent pas forcément à leur retraite. Je pense qu’il faudrait prévoir un délai qui leur permette de procéder ultérieurement à des rachats, si elles le souhaitent.
M. le président. La parole est à M. Olivier Henno, pour explication de vote.
M. Olivier Henno. Ce débat sur la limite d’âge est intéressant et juste. Il concerne notamment les professeurs qui, avant d’être titularisés, ont été maîtres auxiliaires et qui, au moment où leur était ouverte la possibilité de racheter leurs trimestres ou leurs années, n’ont pas eu les moyens de le faire.
Cette fenêtre de rachat devrait être ouverte beaucoup plus longtemps ; au fond, ce ne serait que justice. En effet, la période de rachat peut parfois être fermée parce que les personnes concernées avaient des charges de famille ou autres ou n’avaient pas les moyens nécessaires.
Cette situation crée une injustice de fait qu’il est indispensable d’examiner de très près. (Mme Marie-Noëlle Lienemann applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Hervé Gillé, pour explication de vote.
M. Hervé Gillé. Monsieur le rapporteur, la question du rachat de trimestres d’études est l’exemple type d’un sujet sur lequel le débat peut s’instaurer pour aller au fond des choses.
Les éléments qui sont sur la table tendent à démontrer que la proposition de M. Cardon, qui répond aux préoccupations de M. Ouzoulias, pourrait tous nous agréer.
Je pense donc, monsieur le ministre, que nous pourrions aller vers le mieux-disant en la matière, puisque, de toute évidence, l’engagement financier semble relatif. Cela nous permettrait de satisfaire le plus grand nombre et de démontrer qu’un débat parlementaire de qualité peut aboutir à des accords intelligents. (M. Jérôme Durain applaudit.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Olivier Dussopt, ministre. Je souhaite rassurer M. Ouzoulias : le décret fixera un âge de rachat qui soit au minimum de 30 ans.
M. Olivier Dussopt, ministre. Nous pensons qu’il est utile d’avoir une borne collective lisible. Le système est aujourd’hui très peu utilisé par manque de lisibilité. C’est vrai pour les études comme pour les stages.
Il nous paraît utile de fixer une borne publique, connue, « de droit commun », pour celles et ceux qui ont eu une durée d’études classiques, à 30 ans minimum.
Malgré tout, il nous paraît également utile de poser une limite d’âge. En effet, le système de rachat de trimestres prévu par la loi est actuaire, c’est-à-dire que plus on rachète tard, plus le rachat coûte cher. De même, une limite d’âge permet aussi d’avoir une borne et une cible connues à un moment de la vie où le trimestre est encore accessible.
En ce qui concerne les personnes qui font des études extrêmement longues pour devenir chercheur, la formulation « au minimum 30 ans » retenue par les auteurs des amendements permettra une adaptation, dans le décret, en fonction des cursus. Ceux qui le souhaitent pourront ainsi racheter des trimestres d’études dans de bonnes conditions.
Pour être tout à fait transparent et complet, je dois préciser que, du fait de la méthode actuaire, plus on rachète les trimestres tard, plus ils sont chers. Il en va de même pour tous les systèmes de rachat, à l’exception de celui des anciens trimestres d’apprentissage que nous avons adopté.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 77 rectifié, 1914, 2021 et 3404.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, l’amendement n° 2986 rectifié bis n’a plus d’objet.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt heures, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de M. Gérard Larcher.)
PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher
M. le président. La séance est reprise.
8
Mise au point au sujet d’un vote
M. le président. La parole est à M. Alain Duffourg.
M. Alain Duffourg. Lors du scrutin n° 219 sur les amendements identiques nos 9 rectifié ter et suivants, l’ensemble de mon groupe souhaitait voter pour, à l’exception de Mme Nathalie Goulet, qui souhaitait s’abstenir.
M. le président. Acte vous est donné de cette mise au point, mon cher collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.
9
Loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023
Suite de la discussion d’un projet de loi
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus, au sein de l’article 7, aux amendements identiques nos 83 rectifié, 1911 et 3405.
Article 7 (suite)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L’amendement n° 83 rectifié est présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Corbisez, Gold, Guérini et Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux.
L’amendement n° 1911 est présenté par MM. Iacovelli, Lévrier, Hassani, Patriat, Bargeton et Buis, Mme Cazebonne, MM. Dagbert et Dennemont, Mme Duranton, M. Gattolin, Mme Havet, MM. Haye, Kulimoetoke, Lemoyne, Marchand, Mohamed Soilihi et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud, Richard et Rohfritsch, Mme Schillinger, M. Théophile et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
L’amendement n° 3405 est présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Après l’alinéa 12
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…° Le 1° de l’article L. 351-17 est ainsi rédigé :
« 1° L’âge jusqu’auquel l’assuré peut présenter une demande, qui ne peut être inférieur à 25 ans ; »
La parole est à Mme Nathalie Delattre, pour présenter l’amendement n° 83 rectifié.
Mme Nathalie Delattre. La loi Touraine de 2014 a permis la valorisation des stages dans la durée de vie au travail et leur intégration au système des retraites en ouvrant aux étudiants la possibilité de demander la prise en compte des périodes de stage en entreprise, dans la limite de deux trimestres.
Ce dispositif permet aux assurés de rallonger leur durée d’assurance et, dans certains cas, d’atteindre le taux plein, afin d’améliorer leur niveau de vie à la retraite – c’est une très bonne chose.
Ce droit, conditionné au versement de cotisations à un tarif préférentiel, impose toutefois que la demande soit présentée dans un délai qui ne peut excéder deux ans après le stage. Ce délai, particulièrement court, explique pourquoi ce dispositif est très peu utilisé. Les étudiants et les jeunes actifs à qui il s’adresse n’ont soit pas connaissance de ce dispositif, soit pas les moyens de racheter ces périodes de stage.
Aussi, cet amendement vise à assouplir le dispositif pour que ce rachat puisse intervenir jusqu’à un âge qui ne saurait être inférieur à 25 ans.
M. le président. La parole est à M. François Patriat, pour défendre l’amendement n° 1911.
M. François Patriat. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 3405.
Mme Raymonde Poncet Monge. La loi du 20 janvier 2014 garantissant l’avenir et la justice du système de retraite permet aux étudiants de demander le rachat de leurs périodes de stages en entreprise, dans la limite de deux trimestres.
Ce dispositif, bien que modeste, est une bonne chose, car il permet de valider plus facilement la durée d’assurance requise pour le taux plein et d’améliorer ainsi, indirectement, le niveau de la pension.
Toutefois, la demande de rachat doit être effectuée dans un délai de deux ans maximum après le stage. En l’état, le dispositif se heurte donc à deux problèmes.
D’une part, c’est un dispositif méconnu : la plupart des jeunes qui cherchent d’abord à s’insérer ignorent son existence et n’en prennent connaissance que lorsque le délai est dépassé.
D’autre part, il s’adresse à de jeunes actifs, qui ne sont pas pleinement en capacité de racheter ces périodes de stage en début de carrière. Je rappelle que le taux horaire de gratification est de 4 euros minimum. Les stages s’accompagnent souvent d’une situation de précarité. Les stagiaires doivent bien souvent compter sur la solidarité familiale ou sur des emprunts.
De plus, à l’issue du stage, l’insertion professionnelle est parfois difficile. Il est impossible pour certains anciens stagiaires de racheter leurs trimestres tout en remboursant leur emprunt. Le dispositif semble donc inadapté.
Aussi, le Groupe Écologiste – Solidarité et Territoires propose d’assouplir les conditions de rachat de trimestres de stage et appelle à ce qu’une information à l’intention des stagiaires figure dans la convention de stage pour lutter contre le non-recours à ce dispositif.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur de la commission des affaires sociales pour l’assurance vieillesse. Nous sommes tout à fait favorables à l’allongement de ce délai de rachat. Je vous prie, monsieur le ministre, de nous préciser vos intentions sur le sujet.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion. Le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement.
Il s’agit d’une mécanique similaire à celle des amendements que nous avons examinés avant la suspension. Si l’amendement est adopté, la loi disposerait que l’âge minimum jusqu’auquel le rachat est possible est de 25 ans, mais l’intention du Gouvernement est de prendre un décret fixant cet âge à 30 ans, afin de tenir compte de la diversité des parcours.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 83 rectifié, 1911 et 3405.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 3595 est présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon.
L’amendement n° 4290 rectifié est présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéas 13 à 15
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Je profite de la défense de cet amendement pour revenir sur le mécanisme de la décote. En effet, la réforme de l’âge de départ a pour conséquence d’augmenter le nombre de personnes touchées par ce dispositif.
Vous vous vantez, monsieur le ministre, de ne pas déplacer l’âge de la décote, qui est tout de même de 67 ans… Comptiez-vous le porter à 69 ans ? Ce serait tout de même difficile. Vous vouliez initialement reporter l’âge légal à 65 ans. À quel âge serait alors intervenue la décote ? À 70 ans ?
Ce qu’il aurait fallu faire, monsieur le ministre, c’est soit, comme le propose le Groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, supprimer la décote, soit, a minima, la remettre à 65 ans.
Les études de la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) réalisées en 2020 montrent comment, de réforme en réforme, le nombre de personnes touchées par une décote progresse. Selon le département des études statistiques de la Cnav, ce nombre a par exemple progressé de trois points pour la génération 1952.
Les femmes, vous le savez, sont particulièrement affectées par ce mécanisme. Elles sont 20 %, soit deux fois plus que les hommes, à devoir attendre l’âge de 67 ans pour mettre fin à ce mécanisme.
On dit souvent de la décote qu’elle est une double peine, car les carrières hachées éloignent des conditions requises pour bénéficier du taux plein. Je rappelle que, décote ou non, la pension a toujours un coefficient de proratisation, contrairement à ce que l’on pense souvent. Or si ce coefficient est juste, à condition que les minima soient assez hauts, en cela qu’il tient compte du prorata de la carrière, la décote a un effet démultiplicateur – c’est en cela que l’on parle de double peine – qu’il conviendrait d’annuler.
Monsieur le ministre, vous nous expliquez que vous ne retardez pas l’âge de la décote, mais ne pas aggraver une situation ne constitue pas une mesure sociale !
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour présenter l’amendement n° 4290 rectifié.
M. Pascal Savoldelli. Actuellement, les égoutiers ont droit à un départ anticipé à la retraite à l’âge de 52 ans, à condition d’avoir au moins réalisé douze années de service, dont six consécutives. Compte tenu de la difficulté de ce métier, c’est la moindre des choses.
Excusez-moi d’entrer dans les détails, mais les égoutiers décrochent à coups de pelles les graisses de cuisine accumulées sur les parois, retirent les lingettes qui peuvent boucher les évacuations, ratissent les collecteurs pour éviter les ensablements et peuvent patauger jusqu’à la taille pour pousser des wagons remplis de déchets.
Aux difficultés physiques s’ajoutent des risques sanitaires : ils peuvent être exposés, sous terre, à de l’hydrogène sulfuré – qui, en très grande concentration, peut se révéler mortel – ou à des particules d’amiante.
Ces conditions de travail ne sont pas sans conséquences. Le médecin Claude Danglot, qui est désormais retraité, avait mis au jour un écart d’espérance de vie de sept ans entre un égoutier et un ouvrier. Je vous le dis avec solennité : dix ans après leur départ à la retraite, sur dix égoutiers, sept ou huit sont morts.
Je ne cherche pas à faire polémique, mais j’ose espérer que mes collègues Retailleau, Patriat et Malhuret ne recourront pas à l’article 38 sur un sujet d’une telle gravité. Voilà une occasion de faire œuvre de responsabilité !
Comme ce sujet nous invite à prendre un peu de hauteur par rapport à la vivacité de nos débats, je citerai Aimé Césaire, pour dire qu’il faut laisser de l’espérance aux égoutiers : « C’est quoi une vie d’homme ? C’est le combat de l’ombre et de la lumière… C’est une lutte entre l’espoir et le désespoir, entre la lucidité et la ferveur… Je suis du côté de l’espérance, mais d’une espérance conquise, lucide, hors de toute naïveté. »
Mes chers collègues, maintenons le régime spécial des égoutiers. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. La commission a réfléchi à la question et considère que le recul de l’âge doit s’appliquer aussi bien aux sédentaires qu’aux actifs et aux super-actifs.
Les égoutiers font un travail remarquable et très important. Toutefois, dans la logique de ce texte, il est plus raisonnable de ne pas supprimer cette disposition.
De plus, les durées d’exposition n’ont pas été allongées pour ce type de métier. Il est important qu’on n’enferme pas ces agents dans un dispositif où ils resteraient exposés longtemps à des facteurs de risque. Il convient plutôt de trouver un dispositif qui leur permette, une fois réalisée la période obligatoire, de poursuivre leur carrière dans un métier moins exposé.
Aussi, la commission émet un avis défavorable sur ces amendements identiques.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stanislas Guerini, ministre de la transformation et de la fonction publiques. Mesdames, messieurs les sénateurs, jamais vous ne m’entendrez nier la difficulté et la pénibilité associées au métier qu’exercent les agents des souterrains égoutiers. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle ils font partie des catégories dites « super-actives », qui bénéficient d’un âge de départ anticipé à 52 ans, et bientôt à 54 ans.
Aussi, dans le cadre de cette réforme, nous avons décidé de laisser inchangée la durée de service, en l’occurrence douze ans de services en tant qu’égoutier et trente-deux ans de service dans la fonction publique au total, pour qu’ils puissent profiter de cet âge de départ anticipé.
De plus, nous avons facilité l’accès à des dispositifs permettant à ces agents de changer de métier à un moment de leur carrière.
M. Pascal Savoldelli. Ça non !
M. Stanislas Guerini, ministre. Nous avons défendu dans cet hémicycle une avancée considérable : la portabilité complète, à la fois des durées de service et de toutes les bonifications associées aux métiers des catégories actives. Nous avons également supprimé la clause d’achèvement, qui imposait aux agents des catégories actives de terminer leur carrière en tant qu’agents de ces catégories. Ce faisant, nous nous sommes dotés d’outils d’aménagement de carrière.
Par ailleurs, nous devons aussi travailler non seulement sur des dispositifs de réparation, c’est-à-dire la possibilité de partir plus tôt à la retraite, mais surtout sur des dispositifs de prévention – nous aurons l’occasion d’en discuter à l’article 9.
Ainsi, nous allons créer des fonds de prévention de l’usure et de la pénibilité. Nous sommes en discussion avec les employeurs territoriaux – puisqu’il s’agit d’agents de la fonction publique territoriale – qui nous rejoignent sur la question. C’est en construisant et en investissant sur des outils collectifs de prévention de l’usure et de la pénibilité, en complément des mesures de réparation, que l’on répondra réellement aux préoccupations des agents qui exercent les métiers les plus exposés et les plus pénibles.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur ces amendements.
Mme Laurence Rossignol. J’ai bien écouté M. le ministre. Si j’avais eu un doute sur l’opportunité de voter ces amendements, il aurait fini de me convaincre : il faut les voter !
Monsieur le ministre, une petite musique descend du château, sous forme d’éléments de langage, jusque dans les ministères, selon laquelle les gens devraient changer de métier. J’ai vu voilà quelques jours une vidéo dans laquelle il était demandé au Président de la République, au salon de l’agriculture, si une infirmière pouvait travailler jusqu’à 64 ans. Celui-ci a répondu : « J’espère que d’ici là, elle aura changé de métier ! »
D’une part, nous manquons d’infirmières, donc cela nous arrangerait bien si elles ne changeaient pas de métier ; d’autre part, cette idée du salarié flexible, adaptable, qui changerait de métier comme on change de start-up ou comme on change ses actions en bourse, ce n’est pas ce que les gens veulent ! Cette vision dénote une forme de mépris pour les savoir-faire que les travailleurs ont acquis dans leur métier. Ôtez-vous cela de l’esprit, même si, en ce moment cela vous arrange de dire cela.
Par ailleurs, mon collègue Savoldelli nous a donné des chiffres que, personnellement, j’ignorais, et qui ont dû interpeller chacun d’entre nous : sur dix agents qui partent à la retraite à 54 ans, sept ou huit ne sont plus là dix ans plus tard. Vous parlez de fonds de prévention – formidable ! –, mais il faudra dix ans pour que nous en observions les premiers résultats !
Tous ceux qui sont déjà en catégorie active et qui sont exposés depuis vingt ou trente ans doivent pouvoir partir suffisamment jeunes à la retraite pour pouvoir profiter un peu de ce temps. Le fonds de prévention concernera les prochaines générations, pas celles visées dans l’immédiat par votre réforme.
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. Chers collègues, je ne sais pas comment vous dire les choses autrement : faisons preuve de sagesse. L’amendement pourra être examiné à l’Assemblée nationale dans le cadre de la navette.
Ces chiffres n’ont rien d’idéologique, ils n’ont rien à voir avec une quelconque étiquette politique. Vous ne les avez d’ailleurs pas contestés. Chers collègues, avant 55 ans, la surmortalité des égoutiers est de 97 %… Nous pouvons débattre, faire vivre le clivage gauche-droite, etc., mais enfin là, quand même…
Comme vous, j’ai eu un parcours d’élu et je connais les travaux d’assainissement. Dans le département du Val-de-Marne, nous travaillons d’ailleurs avec le privé, dont les expertises enrichissent celles du secteur public.
Ce sont certes des invisibles, mais ne pas maintenir ce régime spécial dépasse l’entendement. Nous pourrons toujours en discuter dans le cadre de la navette, mais maintenez-le !
Monsieur le ministre, je partage les propos de ma collègue Rossignol sur le fait de changer de métier. Je ne vais pas m’inventer une histoire, mais j’ai eu l’occasion de rencontrer énormément de gens exerçant des métiers extraordinaires dans la fonction publique.
Vous savez, il y a des femmes et des hommes qui aiment leur métier et qui n’ont pas envie d’en changer. Dans leurs équipes, ils ont rencontré des gens formidables, de l’humanité, ils ont créé du lien social. Ce n’est pas à eux de changer, c’est à nous de créer les conditions pour qu’ils puissent s’épanouir un minimum !
Je vous demande donc de faire preuve de sagesse, mes chers collègues. Personne ne perdrait son identité à ce qu’on se rassemble sur ces amendements. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Pascal Savoldelli. Merci !
M. Stanislas Guerini, ministre. Je suis heureux qu’on puisse le tenir, car nous avons peu parlé des métiers de la fonction publique. Nous pouvons évidemment nous retrouver sur plusieurs éléments.
Je passe mes journées à réfléchir à des moyens d’améliorer la situation des agents de la fonction publique, dont beaucoup sont bien sûr extraordinairement attachés à leur métier et aiment ce qu’ils font, car cela a du sens et qu’ils servent l’intérêt général.
Nous devons donc réfléchir à la fois aux mécanismes de réparation et aux mécanismes d’adaptation. En cela, il y a une différence fondamentale entre vous et nous : vous opposez l’un à l’autre. Vos interventions sont d’ailleurs quelque peu contradictoires.
Tout d’abord, vous dites que ces agents ne veulent pas changer de métier. Or c’est déjà sur ce principe que reposent les bénéfices liés au mécanisme de la catégorie super-active, puisque, comme je vous l’ai dit, ils doivent servir douze ans en tant qu’égoutiers et trente-deux ans dans la fonction publique. Nous avons donc déjà limité la période d’exposition à la pénibilité en la réduisant, pour ce métier en particulier, à douze ans. Il s’agit d’une durée de service plus courte que les dix-sept ans ou vingt-sept ans associés aux autres métiers de la fonction publique. Le système a donc déjà été construit pour permettre de changer de métier. (M. Pascal Savoldelli proteste.)
Au fond, les trois questions que nous devons nous poser sur les métiers comportant une réelle pénibilité sont les suivantes : est-il possible d’aménager son temps de travail ? Est-il possible d’aménager son poste de travail, c’est-à-dire améliorer les conditions de travail ? (Exclamations sur les travées du groupe CRCE.)
M. Pascal Savoldelli. Il n’y a pas de télétravail possible pour les égoutiers !
Mme Céline Brulin. Dans quel monde vivez-vous ?
M. Stanislas Guerini, ministre. Est-il possible de changer de métier ?
Nous apportons des réponses à ces trois questions dans le projet de loi.
Sur l’aménagement du temps de travail, nous introduisons la retraite progressive, c’est-à-dire la possibilité de se mettre à temps partiel en fin de carrière, qui n’existait pas auparavant pour la fonction publique – nous aurons l’occasion d’en débattre.
Sur l’aménagement du poste de travail, nous menons une politique de prévention, que je ne veux pas opposer à celle de réparation. Je ne baisse pas les bras. Dans la fonction publique territoriale, il existe, au sein de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) un fonds national de prévention. Savez-vous combien il y a sur ce fonds ? 15 millions d’euros ! Savez-vous combien sont utilisés chaque année pour la prévention ? 5 millions d’euros !
Mme Cathy Apourceau-Poly. Et c’est un problème !
M. Stanislas Guerini, ministre. Ce fonds est largement sous-utilisé.
La révolution culturelle managériale que nous devons faire, c’est investir davantage sur l’adaptation des métiers et la prévention. (Marques d’ironie sur les travées du groupe CRCE.) Je vois que le mot « managérial » vous fait réagir, mais je l’assume ! L’attention managériale est celle qui est portée à adapter les postes.
Peut-on changer de métier ? Oui, des parcours doivent être proposés aux agents publics qui le souhaitent pour leur donner la possibilité de se former. Actuellement, nous ne le faisons pas suffisamment. Ces fonds de préventions permettront de financer des formations pour que les agents puissent changer de métier.
Vous voyez, il n’y a pas de fatalité. Nous avons une différence fondamentale : vous dites parfois que deux ans de travail supplémentaire, c’est deux ans de prison ferme ; ce n’est pas ma vision ! (M. Pascal Savoldelli proteste vivement.)
Je ne nie pas la pénibilité des métiers, mais nous devons être capables d’apporter des solutions concrètes et immédiates !
M. Pascal Savoldelli. Ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit ! On parle de gens qui meurent ! Vous faites de la polémique !
M. Bernard Bonne. Tout le monde meurt !
M. le président. La parole est à M. Claude Raynal, pour explication de vote.
M. Claude Raynal. Monsieur le ministre, vous êtes moyennement convaincant. Dans un propos, il y a toujours du juste et du moins juste, on en comprend une partie…
Ce qui pose problème, c’est la gestion des délais. Nous connaissons le discours entrepreneurial, faisant état d’une vision positive de la fonction publique qui se mobilise, qui change, etc. Nous sommes nombreux à avoir été élus locaux et nous savons qu’il faut parfois mobiliser et motiver les agents pour que les choses changent, notamment dans les communes.
Le problème, c’est la différence entre le temps du discours et celui de sa mise en pratique. Nous devons penser à la réalité actuelle, à savoir que, dès maintenant, les agents vont être amenés à travailler deux ans de plus. Voilà la réalité !
Les mesures dont vous parlez, si tant est qu’elles soient mises en œuvre, mettraient dix ou quinze ans à porter leurs fruits. En attendant, vous ne résolvez rien. La réalité des chiffres qui vous ont été présentés continuera. Nous devons garder cela à l’esprit et trouver des solutions de court terme. C’est pourquoi nous voterons ces amendements.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Je reprends à mon compte l’argument de M. Raynal sur la temporalité. La réalité, c’est que les gens n’ont qu’une vie. Nous ne pouvons pas nous contenter de leur dire que nous ferons mieux dans dix ans grâce à la prévention, que les métiers auront évolué, que les mutations d’emplois seront plus faciles… En effet, pourquoi ne pas repenser la durée de départ à la retraite dans ce cas ?
Sauf que pour ceux dont nous parlons, c’est ici et maintenant qu’il faut agir. Même en travaillant avec la meilleure volonté du monde sur votre fonds de pension, vous ne préviendrez pas les risques du jour au lendemain ni n’organiserez la mutation de ceux qui exercent ce métier depuis longtemps.
Puisque vous nous annoncez une loi Travail, j’espère que nous aurons l’occasion de discuter de la façon dont le système a parcellisé les tâches, de la façon dont les travailleurs sont non plus considérés comme les acteurs d’une collectivité, l’entreprise, mais comme des unités, plus ou moins interchangeables à cause des contrats précaires et de la sous-traitance, devant accomplir une tâche à l’instant t.
Or, historiquement, toutes les logiques de promotion sociale dans l’emploi ont été liées à la continuité des salariés dans une même entreprise ou branche, grâce à la formation en continu. Nous avons tué cette logique, chacun étant désormais circonscrit dans sa propre tâche et devant trouver un nouvel emploi dès la fin de l’accomplissement de celle-ci.
Vous allez dire à tous ces agents : « Maintenant, tu dois travailler plus longtemps même si tu n’es pas apte à le faire. » Ce n’est pas en disant aux gens qu’ils vont travailler plus et qu’ils devront se former pour arriver à suivre, que nous allons régler le problème.
La première des choses à faire, c’est de maintenir le système actuel : les égoutiers ne doivent pas partir à la retraite au-delà de 52 ans. Cela ne nous empêchera pas de débattre sur l’évolution du travail, la formation continue, etc. (Applaudissements sur des travées du groupe GEST. – M. Yan Chantrel applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.
M. Fabien Gay. Mon collègue Pascal Savoldelli défend cet amendement avec passion, et même une certaine émotion, car s’il rencontre, comme beaucoup d’entre nous, de nombreux travailleurs et travailleuses qui exercent des métiers utiles et essentiels, le métier d’égoutier est à part.
En effet, l’espérance de vie d’un égoutier est dégradée de dix-sept ans par rapport à celle d’un cadre et de dix ans par rapport à celle d’un ouvrier. Nous devons entendre cela.
Pour ma part, je ne comprends pas qu’on ait supprimé les régimes spéciaux des gaziers et électriciens. Je n’imagine pas un électricien de 63 ans et 9 mois escalader un pylône pour nous remettre l’électricité un 31 décembre en plein froid…
Mais revenons-en aux égoutiers : monsieur le ministre, quand vous nous répondez qu’un égoutier, qui finit sa carrière à 52 ans, peut se mettre à temps partiel à partir de 40 ans ou 45 ans, vous méconnaissez la situation de l’assainissement. Un chef de famille ne peut se permettre de se mettre à temps partiel et de percevoir un salaire dégradé. Personne ne le souhaite !
Par ailleurs, vous affirmez que l’on peut changer durant sa vie. Oui, bien sûr, et nous croyons d’ailleurs à la formation tout au long de sa vie. Mais croyez-vous sincèrement qu’un égoutier, qui travaille en horaires décalés, de nuit, et exerce un métier pénible, va rentrer chez lui après sa journée et se dire : « Allez, je vais bosser pour passer un concours et prendre un autre boulot de cadre C dans la fonction publique ! » Personne n’y croit !
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. C’est caricatural !
M. Fabien Gay. Les égoutiers sont usés par la vie ! Si vos propositions sont belles sur le papier, elles ne fonctionnent pas dans la réalité. Nous vous demandons donc de faire au moins un geste pour les égoutiers.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Di Folco, pour explication de vote.
Mme Catherine Di Folco. En ce qui concerne les conditions de travail dans la fonction publique, nous avons élaboré, à l’occasion de l’examen de la loi de transformation de la fonction publique, deux mesures qui peuvent peut-être permettre à ces personnes de ne pas terminer leur carrière en étant complètement usées.
Première mesure, nous avons prévu un entretien à mi-carrière dans ces métiers difficiles pour que les salariés étudient avec leur employeur les moyens d’éviter d’aller jusqu’au bout de la pénibilité et puissent envisager un reclassement.
La seconde mesure, le droit à une période de préparation au reclassement, est également destinée aux agents ayant souffert d’une pénibilité telle qu’il leur faut se préparer à exercer de nouvelles fonctions.
Ce sont des mesures intéressantes pour éviter l’usure professionnelle.
M. René-Paul Savary, rapporteur. Très bien !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 3595 et 4290 rectifié.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 220 :
Nombre de votants | 345 |
Nombre de suffrages exprimés | 342 |
Pour l’adoption | 101 |
Contre | 241 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 4293 rectifié bis, présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli, est ainsi libellé :
Alinéas 18 à 20
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Michelle Gréaume.
Mme Michelle Gréaume. Avec votre permission, monsieur le président, je présenterai également l’amendement n° 4287 rectifié. (Marques de satisfaction sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. J’appelle donc en discussion l’amendement n° 4287 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli, et ainsi libellé :
Alinéa 19
Supprimer cet alinéa.
Veuillez poursuivre, ma chère collègue.
Mme Michelle Gréaume. Monsieur le ministre, vous entendez faire travailler plus longtemps tous les Français, en faisant mine de leur accorder plus.
Nous voulons vous interpeller sur la suppression, par l’article 7, d’un passage de l’article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite. L’adoption de cet article entraînerait ainsi la disparition de cette phrase : « Le maximum de bonification est donné aux militaires qui quittent le service à cinquante-neuf ans. »
Monsieur le ministre, pouvez-vous nous aider à y voir plus clair ? Les militaires quittant le service à 59 ans bénéficieront-ils toujours d’une bonification maximum ?
Nous pensons que les carrières des militaires sont d’une pénibilité particulièrement intense, engageant le corps du travailleur vers son éventuel sacrifice pour la Nation, dans des conditions de travail éprouvantes, qui méritent et nécessitent, pour leur bien et la sûreté de notre armée, un âge de départ adapté et une bonification conséquente.
L’amendement n° 4293 rectifié bis vise donc à refuser la limitation du cumul des bonifications à hauteur de vingt trimestres ainsi que la suppression du maximum de bonification pour les militaires quittant le service à 59 ans.
L’amendement de repli n° 4287 rectifié tend à maintenir le système de bonification maximale pour tous les militaires quittant le service à 59 ans.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Je comprends l’objet de ces amendements, mais la suppression des alinéas visés irait à l’encontre de l’effet que vous recherchez, madame Gréaume.
Bien sûr, le cumul des bonifications, que celles-ci soient du cinquième pour les militaires ou du dixième pour les aides-soignantes, a un plafond : on le limite en général à cinq, parce que l’on ne souhaite pas que ces personnes, qui sont plus exposées que d’autres, restent trop longtemps dans le dispositif. S’agissant d’un mécanisme qui permet de partir plus tôt, on pourrait imaginer qu’elles restent pour cette raison dans un métier qui, même si elles l’aiment, est très exposé ; ce ne serait pas leur rendre service.
Lui semblant plus judicieux de limiter ces bonifications, la commission a émis un avis défavorable sur ces deux amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 4293 rectifié bis.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 221 :
Nombre de votants | 345 |
Nombre de suffrages exprimés | 337 |
Pour l’adoption | 93 |
Contre | 244 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix l’amendement n° 4287 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 4294 rectifié bis, présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli, est ainsi libellé :
Alinéas 21 et 22
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Michelle Gréaume.
Mme Michelle Gréaume. Cet amendement de repli vise à supprimer le plafonnement du cumul de l’ensemble des bonifications à vingt trimestres.
Nous avons besoin des militaires et nous risquons d’avoir encore plus besoin d’eux prochainement ; ce n’est pas un bon coup à leur faire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Cet amendement relève du même esprit que les précédents : avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 4294 rectifié bis.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
M. Gérard Longuet. Ce n’est pas de l’obstruction, cela ?
M. Éric Kerrouche. C’est le règlement !
Mme Michelle Gréaume. C’est pour remercier les militaires de leur engagement !
M. le président. Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 222 :
Nombre de votants | 333 |
Nombre de suffrages exprimés | 332 |
Pour l’adoption | 81 |
Contre | 251 |
Le Sénat n’a pas adopté.
L’amendement n° 4295 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli, est ainsi libellé :
Alinéa 24
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Pierre Ouzoulias.
M. Pierre Ouzoulias. Il me semble important d’évoquer un problème de fond, celui de l’attractivité des métiers de la fonction publique.
Toutes nos collectivités, notamment dans les Hauts-de-Seine, sont confrontées à des difficultés de recrutement. Les collectivités ne peuvent plus embaucher, notamment dans l’aide sociale à l’enfance. Il y a une perte d’attractivité très forte et générale de tous les métiers de la santé, de la police, de l’enseignement. Cette situation s’explique par la perte importante de pouvoir d’achat depuis une vingtaine d’années, laquelle demeure élevée, même si elle a été un peu compensée par l’augmentation du point indice.
La question de fond que nous devrions nous poser est celle du rôle de la retraite dans l’attractivité des emplois de la fonction publique. C’est un débat de fond, monsieur le ministre, car les collectivités sont confrontées à un problème d’embauche qui est dirimant et dont il faut s’occuper.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Nous sommes dans la même série d’amendements de suppression d’alinéas, les uns après les autres : avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 4295 rectifié.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 223 :
Nombre de votants | 345 |
Nombre de suffrages exprimés | 344 |
Pour l’adoption | 93 |
Contre | 251 |
Le Sénat n’a pas adopté.
L’amendement n° 4298 rectifié bis, présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli, est ainsi libellé :
Alinéa 36
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Michelle Gréaume.
Mme Michelle Gréaume. Le Gouvernement imagine sûrement pouvoir limiter la colère qui gronde dans le pays en épargnant certains régimes spéciaux des effets de ce projet de réforme impopulaire.
Dans cette logique, monsieur le ministre, vous prétendez prendre en compte certaines spécificités du travail des policiers, des pompiers, des surveillants pénitentiaires ou encore des militaires.
Pourtant, vous leur demandez tout de même de « participer à l’effort collectif ». J’aimerais comprendre ce qu’il y a de « collectif » dans un système dans lequel seuls les travailleurs sont mis à contribution, pendant que le capital et la fortune des ultrariches prospèrent sans que vous leur demandiez quoi que ce soit.
Ce prétendu effort collectif ne trompe donc personne, monsieur le ministre, pas plus que les postures en demi-teinte. Quand on considère le sort que votre projet de réforme réserve aux militaires, on voit bien que vous n’êtes que dans les éléments de langage.
Concrètement, les efforts que vous leur demandez, ce sont deux ans de plus ; c’est cela que vous ne dites pas. Car pour cette profession et pour ceux dont la limite d’âge est supérieure ou égale à 57 ans, vous décalerez de deux ans l’application de la décote pour carrière longue. Ainsi, votre projet n’a qu’un objectif : réaliser des économies sur le dos de celles et ceux qui se sont épuisés par une vie de labeur, au service de la Nation.
Les spécificités du régime des militaires tiennent à plusieurs points essentiels, monsieur le ministre, parmi lesquels figure la nécessité de manifester la reconnaissance de la Nation à ces hommes et à ces femmes qui l’ont servie en intégrant les corps de l’armée.
Parce que nous estimons que cette reconnaissance est un devoir de l’État, nous vous demandons, au travers de cet amendement, de ne pas décaler l’application de la décote dite « carrière longue ».
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stanislas Guerini, ministre. Vous me parlez d’éléments de langage, madame la sénatrice, mais – je vous le dis avec beaucoup de respect –, il me semble que c’est plutôt vous qui y recourez, avec un discours très généraliste et un amendement dont le dispositif est totalement à côté de la plaque par rapport au système de bonification des militaires.
En effet, votre amendement vise à supprimer l’âge d’annulation de la décote, c’est-à-dire à faire perdre aux militaires tout le bénéfice de ce dispositif. J’ajoute que le départ avancé à la retraite des militaires repose sur une durée de service et non, contrairement à d’autres métiers de la fonction publique, sur un âge d’ouverture des droits.
Or, dans le cadre de cette réforme, nous proposons de modifier l’âge d’ouverture des droits, mais de laisser inchangés la durée de service et l’âge d’annulation de la décote, ce qui n’aura donc pas de conséquence pour les militaires. C’est en cela que vous êtes à côté de la plaque.
Par conséquent, la meilleure manière de leur rendre honneur – et il faut le faire – pour l’engagement qui est le leur, est d’être précis et pointu. L’adoption de cet amendement retirerait des droits aux militaires ; je vous invite donc à le retirer, madame la sénatrice.
M. le président. Madame Gréaume, l’amendement n° 4298 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Michelle Gréaume. Je vais le retirer, monsieur le président.
Toutefois, monsieur le ministre, j’aurais aimé que vous expliquiez davantage votre avis défavorable sur les amendements nos 4293 rectifié bis et 4287 rectifié concernant les bonifications. Vous vous êtes contenté d’émettre un avis défavorable, sans préciser les raisons pour lesquelles la mention des bonifications n’apparaissait plus dans le code.
M. le président. L’amendement n° 4298 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 4299 rectifié bis, présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli, est ainsi libellé :
Alinéa 37
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Michelle Gréaume.
Mme Michelle Gréaume. Il est défendu ! (Marques de satisfaction sur les travées des groupes RDPI, UC et Les Républicains.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Toujours la même affaire : avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 4299 rectifié bis.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 224 :
Nombre de votants | 345 |
Nombre de suffrages exprimés | 344 |
Pour l’adoption | 93 |
Contre | 251 |
Le Sénat n’a pas adopté.
L’amendement n° 4302 rectifié bis, présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli, est ainsi libellé :
Alinéas 40 à 43
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Céline Brulin.
Mme Céline Brulin. Le recul de deux ans de l’âge de départ, que nous évoquons maintenant depuis quelque temps, s’appliquera aux fonctionnaires relevant des catégories dites « actives » et « super-actives », qui concernent les seuls agents de la fonction publique exerçant des missions présentant « un risque particulier ou des fatigues exceptionnelles », afin de bénéficier d’un départ anticipé à la retraite.
Il s’agit notamment des agents de la pénitentiaire, des agents de la fonction publique hospitalière, des agents de police ou encore des sapeurs-pompiers. L’allongement de leur carrière de deux années supplémentaires représente un recul social extrêmement important pour des professions pourtant unanimement reconnues comme particulièrement difficiles et entraînant une fatigue accrue, ce qui justifie pleinement ces départs anticipés.
Certes, avec cette réforme, ces agents pourraient partir à la retraite plus tôt que les autres fonctionnaires – c’est l’argument dont vous usez et abusez –, mais ils devront tout de même travailler deux années de plus à des tâches particulièrement pénibles et usantes, après une carrière déjà bien longue. J’ajoute que ces métiers font aussi l’objet au quotidien d’une fatigue morale et psychologique – la violence ou le travail avec des usagers en très grande souffrance –, qui justifie à nos yeux un départ moins tardif.
Quelque 700 000 personnes seraient touchées par cette mesure injuste, si elle était adoptée en l’état. C’est un nouveau coup dur qui leur est porté et qui succède à celui de la réforme Woerth de 2010, laquelle avait déjà décalé leur départ anticipé à la retraite.
Selon nous, l’âge légal de départ pour les catégories actives et super-actives ne devrait pas être repoussé, car la pénibilité de leur mission, elle, ne faiblit pas.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. En effet, le choix a été fait de demander à toutes les professions de participer à l’effort collectif. Si l’on maintient toutes sortes de différences entre les uns et les autres, on continuera d’avoir des statuts différents : selon que l’on travaille dans le privé ou dans le public, même si l’on exerce le même métier, on ne sera pas traité de la même manière. (Protestations sur les travées du groupe CRCE.) Si l’on relève d’un régime spécial, la pénibilité, l’inaptitude et les facteurs d’usure professionnelle seront pris en compte différemment.
Dans la mesure où nous demandons aux gens de travailler plus, plus il y a de personnes qui sortent de ce dispositif, plus l’effort collectif pèsera sur quelques-uns. Ce n’est pas le choix que nous avons fait : avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Cher rapporteur, je partage votre idée : quand il y a un effort à faire, il faut qu’il soit équitablement réparti, ou au moins également.
Cela étant, avec la réforme de la retraite telle que vous l’envisagez, en 2030, d’après toutes les prévisions, le salaire moyen dans le privé aura augmenté de 12 % à 14 %, tandis que la simulation montre une baisse du pouvoir d’achat de 8 % pour les agents de la fonction publique, puisque vous vous êtes engagé à ne pas augmenter la participation de l’État.
Vous ne pouvez donc pas dire que vous demandez le même effort à tout le monde sachant que, in fine, en moyenne, les salaires du privé augmenteront pendant que ceux du public diminueront. C’est dans le rapport du COR !
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Todeschini, pour explication de vote.
M. Jean-Marc Todeschini. Monsieur le rapporteur, vous êtes un peu doctrinaire sur la méthode : tout le monde aligné sur le même tarif et deux ans de plus pour tout le monde. On confisque donc deux ans à nos concitoyens. Ceux qui ont été cités par notre collègue rendent des services importants et on les met souvent en valeur en période de crise. Pourtant, on les condamne au même sort que les autres, alors qu’ils ont accompli des missions qui les ont usés, fatigués.
Vous allez sans doute nous reparler des égoutiers et des métiers insalubres, mais ces fonctionnaires exercent des métiers difficiles que peu de nos concitoyens exercent.
Nous voterons cet amendement.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Stanislas Guerini, ministre. J’ai déjà rappelé les avancées que nous proposons en faveur des 700 000 agents des catégories actives : portabilité des droits, suppression de la dégressivité des bonifications, suppression de la clause d’achèvement. Ces avancées sont assez nombreuses pour renforcer les droits de ces métiers.
Je veux juste vous fournir une information : aujourd’hui, l’âge effectif de départ à la retraite, et non l’âge d’ouverture des droits, des catégories actives correspond déjà à l’âge actuel d’ouverture des droits plus deux ans. (Protestations sur les travées du groupe CRCE.) Donc, en l’occurrence, les agents publics n’ont pas attendu ce débat pour partir un peu plus tard qu’à l’âge d’ouverture des droits qui leur est applicable.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Je suis désolée de reprendre la parole, mais, si l’on veut limiter les prises de parole, il ne faut pas que les ministres interviennent…
Sans doute, quand on liquide ses droits, on prend toujours deux facteurs en compte : l’âge légal d’ouverture des droits à la retraite et la décote, dont j’ai précédemment parlé, qui a un effet multiplicateur pour les carrières incomplètes. C’est la même chose pour les catégories actives.
Je m’étonne que vous défendiez les catégories actives, puisque vous avez toujours déclaré que la prise en compte de la pénibilité ne devait justement pas conduire à les recréer.
M. René-Paul Savary, rapporteur. Non, je parlais des régimes spéciaux ! Ce n’est pas pareil !
Mme Raymonde Poncet Monge. Vous préférez une prise en compte individuelle et non collective des métiers.
En outre, je l’ai déjà souligné, ce n’est pas parce que l’âge conjoncturel de départ à la retraite est supérieur à l’âge légal que le décalage de deux ans n’a pas d’effet, s’agissant de moyennes : une partie importante de personnes se fondent, au moment de décider de leur départ, sur le critère de l’âge légal, en consentant à une décote – je n’ai plus les chiffres exacts en tête, mais l’ordre de grandeur est de 20 %. Vous allez donc obliger ces mêmes personnes à subir « deux ans ferme ». Les raisonnements fondés sur la moyenne sont toujours biaisés.
M. le président. Je veux signaler que, lorsque les ministres n’interviennent pas, vous le leur reprochez et, quand ils éclairent le débat, vous le leur reprochez également ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC, RDPI et INDEP. – Mme la présidente de la commission applaudit également.)
Je mets aux voix l’amendement n° 4302 rectifié bis.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 225 :
Nombre de votants | 345 |
Nombre de suffrages exprimés | 345 |
Pour l’adoption | 93 |
Contre | 252 |
Le Sénat n’a pas adopté.
L’amendement n° 2973 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Le Houerou et Jasmin, M. Jomier, Mmes Poumirol, Meunier et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 51
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Monique Lubin.
Mme Monique Lubin. Le recul de deux ans de l’âge de départ légal à la retraite s’appliquera également aux fonctionnaires appartenant aux catégories dites « actives » et « super-actives », qui existent depuis 1949.
Ces catégories ne s’appliquent qu’aux agents de la fonction publique exerçant des missions « présentant un risque particulier ou des fatigues exceptionnelles » et permettent de bénéficier d’un départ anticipé à la retraite après dix-sept à vingt ans de service. Ces emplois publics concernent particulièrement les agents de la pénitentiaire, les agents de la fonction publique hospitalière, les agents de police ou encore les sapeurs-pompiers.
L’allongement de deux années supplémentaires de leur carrière constitue un recul social terrible pour ces femmes et ces hommes dont les métiers sont unanimement reconnus comme particulièrement difficiles et entraînent une fatigue accrue justifiant pleinement un départ anticipé.
Avec cette réforme, ces agents pourraient certes partir à la retraite plus tôt que les fonctionnaires n’appartenant pas aux catégories actives ou super-actives, mais ils devront tout de même travailler deux années de plus à des tâches pénibles et usantes, après une carrière déjà bien longue.
Ainsi, 700 000 personnes seraient touchées par cette mesure injuste si celle-ci était adoptée en l’état. C’est un nouveau coup dur porté à ces fonctionnaires après celui de la réforme Woerth de 2010, qui a décalé de 55 à 57 ans l’âge de départ en retraite anticipée. Pour les catégories super-actives, l’âge de départ légal sera repoussé de 50 à 52 ans, alors que la pénibilité de leurs missions ne faiblit pas.
Pour ces raisons, nous demandons la suppression de cet alinéa.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Chère Monique Lubin, vous nous avez pourtant habitués à travailler correctement vos amendements ! (Marques d’étonnement et d’agacement sur les travées du groupe SER.) C’est le dixième amendement de suppression que l’on examine et la moitié d’entre eux aboutissent à l’effet contraire de celui qui est recherché.
Il n’y a pas eu de modification de la durée requise pour bénéficier du dispositif de catégorie active ou super-active, elle reste la même, malgré le report de l’âge. Vous demandez la suppression de cette disposition : vous ne souhaitez tout de même pas que les agents concernés travaillent plus longtemps dans ces catégories ? (Protestations sur les travées des groupes SER et CRCE.) Il me paraît donc plus raisonnable de retirer cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Madame Lubin, l’amendement n° 2973 rectifié est-il maintenu ?
Mme Monique Lubin. Oui, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. Hervé Gillé, pour explication de vote.
M. Hervé Gillé. Monsieur le rapporteur, il nous est difficile de vérifier les éléments que vous nous donnez.
Toutefois, le référentiel de ce projet de loi repose sur la réalité de la société de la fin des années 1990. Quand on examine d’un peu plus près les catégories actives et super-actives, on constate qu’elles incluent notamment les agents de la pénitentiaire, ceux de la fonction publique hospitalière, ceux de la police ou encore les sapeurs-pompiers. Mais regardez la réalité de ces professions dans la société des années 2020 ! Je suis sénateur de la Gironde, j’ai donc connu les récents feux hors normes. On le voit, ces métiers sont et seront de plus en plus exposés.
Avec ce projet de loi, ces agents devront travailler deux années supplémentaires.
M. René-Paul Savary, rapporteur. Ce n’est pas votre amendement qui y changera quoi que ce soit…
M. Hervé Gillé. Comment peut-on accepter ce type de proposition ? C’est un dispositif déconnecté de la réalité de ces métiers, au regard des enjeux climatiques que notre pays va subir, mais au regard aussi, par exemple, du secteur de la santé : il faudra encore de nombreuses années pour créer des conditions de travail réellement satisfaisantes et qui rééquilibrent ces métiers.
Augmenter de deux ans l’âge de départ est inacceptable.
M. le président. La parole est à M. Éric Kerrouche, pour explication de vote.
M. Éric Kerrouche. Monsieur le rapporteur, vous avez dit quelque chose d’éminemment faux en prétendant que votre choix était de reporter globalement l’âge de la retraite en demandant le même effort à tout le monde.
M. René-Paul Savary, rapporteur. Comme la réforme Touraine !
M. Éric Kerrouche. Nous sommes là au cœur de l’un des problèmes fondamentaux de cette réforme.
Ce qui compte, comme l’apprennent en général les étudiants de première année, c’est non pas la moyenne, mais l’écart par rapport à la moyenne.
Vous faites comme si passer de 62 à 64 ans, c’était la même chose pour tout le monde. Or on sait très bien que l’espérance de vie et l’espérance de vie en bonne santé sont liées, d’une part, au revenu et, d’autre part, à la catégorie socioprofessionnelle. Pourtant, vous nous expliquez très gentiment que les conséquences du report de l’âge de départ sont les mêmes pour chacun. C’est faux ! De fait, la réforme est inégalitaire et affectera certains plus que d’autres.
De même, ne pas prendre en compte les spécificités de certains métiers, qu’on encense par ailleurs, comme celui de pompier, c’est tout de même particulier !
Cette réforme repose sur une erreur de raisonnement : vous faites comme si nous étions tous pareils, alors que nous sommes fondamentalement tous différents et dans des situations sociales elles aussi différentes.
M. le président. L’amendement n° 4303 rectifié bis, présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli, est ainsi libellé :
Alinéas 61 à 63
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Notre amendement porte sur les emplois publics de catégories active et super-active.
Pour mémoire, ces deux catégories existent depuis 1949. Pour bénéficier d’une retraite anticipée, les fonctionnaires de ces catégories doivent avoir exercé des missions présentant des risques particuliers ou des fatigues exceptionnelles et totaliser une durée de service comprise entre dix-sept et vingt ans.
Sont ainsi concernés les agents de l’administration pénitentiaire, ceux de la fonction publique hospitalière, ceux de la police, les sapeurs-pompiers, les agents des dépôts mortuaires, les agents d’entretien des usines d’incinération des ordures ménagères et des services de désinfection, les fossoyeurs et les blanchisseurs des hôpitaux. Avec cette réforme, ces agents verront leur âge légal de départ à la retraite reculer de deux ans pour atteindre 59 ans.
Pour les personnels actifs de la police nationale, les personnels de surveillance de l’administration pénitentiaire, les agents des réseaux souterrains des égouts et les agents du corps des identificateurs de l’institut médico-légal de la préfecture de police de Paris, l’âge légal de départ à la retraite est porté à 64 ans.
Franchement, ce n’est pas acceptable !
Pascal Savoldelli a parlé des égoutiers, j’ai évoqué d’autres professions. Il a essayé de vous faire réagir les uns et les autres dans cet hémicycle, mais il n’a bien évidemment rien obtenu ! Vous vous obstinez, vous continuez… Il semblerait que nous vivions parfois dans deux mondes parallèles.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Défavorable, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stanislas Guerini, ministre. Vous dites, madame la sénatrice, que nous vivons dans deux mondes parallèles. Moi, je vis dans le monde réel des fonctionnaires et des agents publics, en l’occurrence des agents publics contractuels.
L’amendement que vous proposez vise à supprimer des alinéas qui prévoient pourtant des avancées pour les contractuels de la fonction publique, ce qui, je pense, devrait vous conduire à le retirer.
Ainsi, ces alinéas prévoient, pour les agents contractuels, qui exercent parfois le même métier que des agents de catégorie active, sans toutefois bénéficier ni des avantages de ce statut ni d’un contrat professionnel de prévention, de comptabiliser dans leurs années de service les années qu’ils ont effectuées en tant que contractuels. C’est une avancée pour ces agents.
C’était là une revendication ancienne des organisations syndicales – elle démontre l’intérêt du dialogue social –, à laquelle nous avons donné suite dans le cadre de la préparation de ce projet de loi.
Ces agents pourront donc partir un peu plus tôt à la retraite. C’est cette disposition que votre amendement, dont je demande le retrait, vise à supprimer.
M. le président. Madame Apourceau-Poly, l’amendement n° 4303 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Cathy Apourceau-Poly. Nous avons vraiment du mal à croire tout ce que vous nous racontez ! Nous allons vérifier vos dires, mais nous ne vous croyons pas, parce que nous avons tous compris que votre leitmotiv était de faire travailler les gens plus longtemps !
M. René-Paul Savary, rapporteur. Il fallait travailler les amendements, plutôt que les faire à la sauvette !
Mme Cathy Apourceau-Poly. Vous ne cessez de nous donner des leçons, que ce soit à Monique Lubin, à Raymonde Poncet Monge ou à moi-même. Nous n’avons pas à en recevoir de vous ! (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La courtoisie fait partie des valeurs sénatoriales : soyons-y attentifs.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Nous avons déjà entendu plusieurs fois l’argument de M. le ministre selon lequel les années effectuées en tant que contractuels par les agents de la fonction publique pourront être prises en compte dans le calcul de leur retraite. Il est vrai que c’est plutôt une avancée.
Toutefois, j’en reviens au nombre de contractuels dans la fonction publique. La participation de l’État au financement des retraites va être stabilisée. Je rappelle qu’en 2070 plus de la moitié du déficit public sera dû au manque de recettes de l’État. Vous ne m’avez pas répondu sur ce point.
Pour ne pas augmenter la masse salariale, on gèle le point d’indice, on ne crée pas d’emplois stables dans la fonction publique et on multiplie le nombre de contractuels, ce qui a pour effet de déstabiliser la même fonction publique, qui aurait pourtant besoin d’être valorisée.
En outre, nous avons mis en exergue, lors de notre débat sur la CNRACL, que l’étranglement des collectivités locales permettait de réduire la masse salariale de la fonction publique territoriale et donc les services publics. Et la boucle est bouclée !
Certes, le texte prévoit une toute petite avancée pour quelques contractuels qui seront titularisés, mais leur nombre global va continuer d’augmenter. Franchement, le compte n’y est pas !
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Vous dites souvent que vous ne modifiez pas la durée de service des emplois publics de catégorie active. Vous avez raison, mais en deux réformes, on est passé d’une durée de service de quinze ans et d’un âge de départ anticipé fixé à 55 ans à une durée de service de dix-sept ans et à un âge de départ de 57 ans, et à respectivement dix-sept ans et 59 ans avec votre réforme.
Effectivement, vous ne réduisez pas la durée de service requise, qui reste de dix-sept ans, alors que la réforme précédente avait dégradé les deux facteurs. Mais ne pas dégrader l’un des deux facteurs n’est pas ce que j’appelle un progrès social.
Vous ne modifiez pas non plus l’âge à partir duquel la retraite est soumise à une décote ou celui auquel pourront partir les personnes en situation d’invalidité. Mais une non-dégradation n’est pas non plus un progrès social ou une mesure d’accompagnement social.
Un syndicaliste à qui j’avais indiqué qu’il avait signé un accord très dégradé m’a répondu : « Oui, mais nous avons gagné par rapport à ce que nous pouvions perdre ! » C’est ce que vous nous dites souvent : ce que nous n’avons pas perdu est un progrès social. (Applaudissements sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 4303 rectifié bis.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 226 :
Nombre de votants | 345 |
Nombre de suffrages exprimés | 343 |
Pour l’adoption | 93 |
Contre | 250 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je suis saisi de cinq amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les quatre premiers sont identiques.
L’amendement n° 248 est présenté par M. Paccaud.
L’amendement n° 1910 est présenté par MM. Lévrier, Iacovelli, Hassani, Patriat, Bargeton et Buis, Mme Cazebonne, MM. Dagbert et Dennemont, Mme Duranton, M. Gattolin, Mme Havet, MM. Haye, Kulimoetoke, Lemoyne, Marchand, Mohamed Soilihi et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud, Richard et Rohfritsch, Mme Schillinger, M. Théophile et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
L’amendement n° 2954 rectifié est présenté par Mmes Monier et Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Le Houerou et Jasmin, M. Jomier, Mmes Poumirol, Meunier, Rossignol et Blatrix Contat, MM. Bourgi, Cardon et Chantrel, Mme Conway-Mouret, MM. Durain, Leconte, Temal, Tissot, Lurel, Féraud et Marie, Mme de La Gontrie, MM. Raynal et Stanzione, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin, Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mme Van Heghe, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 3747 est présenté par M. Fernique, Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Après l’alinéa 63
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
…. – L’article L. 921-4 du code de l’éducation est abrogé.
La parole est à M. Olivier Paccaud, pour présenter l’amendement n° 248.
M. Olivier Paccaud. Cet amendement vise à corriger une injustice et à rétablir l’équité entre les professeurs des écoles et les enseignants du secondaire. Il tend à prévoir un même âge légal de leur droit d’ouverture à la retraite.
Depuis 1991, un professeur des écoles ne peut prendre sa retraite en cours d’année. Il doit attendre la fin de l’année scolaire, contrairement à son collègue du secondaire. Concrètement, si l’on prend le cas de deux personnes nées un 5 septembre, le professeur des écoles devra attendre le début du mois de juillet suivant pour prendre sa retraite quand son collègue, professeur au collège, pourra ranger son ordinateur, ses cahiers, ses crayons et faire son pot de départ le 5 septembre.
Cette mesure d’équité est attendue par tous les professeurs des écoles et réclamée par les syndicats.
M. le président. La parole est à M. Martin Lévrier, pour présenter l’amendement n° 1910.
M. Martin Lévrier. Comme vient de l’expliquer mon collègue Olivier Paccaud, cet amendement vise à rétablir une égalité de traitement entre les professeurs des écoles et les enseignants du second degré.
Il tend à supprimer la disposition qui oblige les enseignants du premier degré à poursuivre leur activité jusqu’à la fin de l’année scolaire lorsqu’ils ont réuni les conditions de départ à la retraite durant cette même année.
Je n’oublie pas mes trente ans passés au service de l’enseignement et je profite de cette prise de parole pour saluer le travail des enseignants, leur dévouement, leur engagement au service des jeunes, qui seront la France de demain.
Cet amendement, qui vise à faciliter leur départ à la retraite, va dans le sens d’une meilleure prise en compte de leur parcours et d’une plus grande équité.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, pour présenter l’amendement n° 2954 rectifié.
Mme Marie-Pierre Monier. Cet amendement vise à supprimer l’article L. 921-4 du code de l’éducation, qui contraint les enseignants du premier degré à se maintenir en activité jusqu’à la fin de l’année scolaire lorsqu’ils ont atteint, au cours de cette même année, les conditions de départ à la retraite.
Je me réjouis que cette demande de suppression soit soutenue par de nombreux collègues dans notre hémicycle. Il s’agit en effet de corriger une inégalité qui n’a que trop perduré et qui, si elle n’était pas remise en question aujourd’hui, conduirait de fait ces personnels à se maintenir en poste au-delà de 64 ans.
La disposition en vigueur constitue une double peine, alors que les professeurs des écoles sont ceux qui partent le plus souvent avec une décote parmi l’ensemble des personnels de l’éducation nationale : 34 % d’entre eux sont concernés, dont 5 % partent avec une décote de moins de 5 %.
Ce départ avant d’avoir atteint le taux plein est bien sûr lié à l’impossibilité de partir en cours d’année scolaire. Il doit aussi nous conduire à nous interroger plus largement sur la nécessité d’améliorer les conditions de travail de nos enseignants et d’aménager leur fin de carrière.
J’invite d’ailleurs le Gouvernement à se saisir de ces questions, en lien avec les partenaires sociaux.
M. le président. La parole est à M. Jacques Fernique, pour présenter l’amendement n° 3747.
M. Jacques Fernique. Les instituteurs, que l’on appelle à présent « professeurs des écoles », sont les seuls actifs à ne pas pouvoir choisir la date précise de leur départ à la retraite. En clair, ils ne partent à la retraite qu’au terme d’une année scolaire complète, c’est-à-dire le 31 août.
Bien sûr, il est essentiel d’assurer la stabilité et le suivi annuel du corps enseignant auprès des élèves, mais un changement d’enseignant, s’il est bien anticipé, n’est pas source d’instabilité. J’ajoute que les temps ont changé et que l’époque de l’instituteur seul dans une classe unique n’est plus le modèle dominant, loin de là. Les conditions d’aujourd’hui, dans la grande majorité des écoles primaires, permettent un départ en cours d’année sans difficulté.
Imaginons un professeur des écoles dont la date d’anniversaire est le 15 septembre : pour partir à 64 ans, il devra travailler un an de plus pour assurer son service jusqu’à la fin de l’année scolaire. En réalité, il partira donc à 65 ans, conformément à la règle du 31 août.
Celle-ci a des conséquences concrètes très difficiles : 34 % des personnels du premier degré partent avec une décote, un taux nettement plus élevé que dans le second degré. C’est le signe que de nombreux professeurs des écoles, du fait de l’impossibilité de partir à la retraite en cours d’année scolaire, sont acculés à partir plus tôt afin de ne pas faire l’année de trop pour leur santé et de fuir une trop grande pénibilité au travail. Leur métier est difficile en fin de carrière.
Il faut supprimer cette contrainte unique et anachronique.
M. le président. L’amendement n° 4233 rectifié bis, présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 67
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
…. – L’article L. 921-4 du code de l’éducation est abrogé.
La parole est à Mme Céline Brulin.
Mme Céline Brulin. En complément de ce que viennent de dire nos collègues, j’insiste sur le fait que les professeurs des écoles sont les seuls qui ne peuvent partir à la retraite en cours d’année et qui doivent travailler une année scolaire complète, jusqu’au 31 août.
Les injustices et les inégalités par rapport à leurs collègues du second degré ont été relevées. Il faut savoir que les professeurs des écoles partent en moyenne deux ans avant ceux du second degré, pour des raisons qui ont été expliquées. Leur métier est lui aussi usant. Les enseignants ne veulent pas faire l’année de trop, qui peut parfois les conduire à des catastrophes.
En moyenne, les hommes partent à un peu plus de 61 ans et les femmes à un peu plus de 60 ans. Ces départs se font, cela été expliqué, dans un tiers des cas avec des décotes. Alors que la profession souffre d’un manque d’attractivité et que nous vivons une crise des recrutements, il faut corriger cette inégalité.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. La commission est bien entendu favorable à cet alignement.
J’aimerais savoir si MM. les ministres ont réfléchi à la question du remplacement d’un enseignant qui prendrait sa retraite au milieu d’une année scolaire ? Avez-vous des propositions à nous faire ?
Mme Éliane Assassi. Gouverner, c’est prévoir !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stanislas Guerini, ministre. Le Gouvernement est favorable à ces amendements, en accord, bien évidemment, avec le ministre de l’éducation nationale.
Vous posez la bonne question, monsieur le rapporteur, à savoir celle de l’organisation des établissements scolaires. C’est la raison pour laquelle nous menons d’ores et déjà un travail, avec le secrétaire général et la direction des ressources humaines du ministère, afin de rendre cette mesure effective et de laisser le libre choix aux professeurs de finir ou non l’année scolaire. Je pense d’ailleurs qu’un certain nombre de professeurs des écoles feront le choix de continuer de travailler et d’être devant leur classe jusqu’à la fin de l’année.
C’est dans cet état d’esprit que nous devons prendre cette mesure, que je vous invite à adopter. Cette belle avancée mettra fin à une injustice.
M. le président. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.
M. Daniel Salmon. Regardons un peu en arrière : les professeurs des écoles dont on parle aujourd’hui étaient avant des instituteurs, ils occupaient un emploi de catégorie active. Il n’y a pas si longtemps, ils partaient à la retraite à l’âge de 55 ans, puis de 57 ans. Actuellement, ils partent à 62 ans. Et vous vous dites aujourd’hui grands princes en les laissant partir en cours d’année !
Comme le disait ma collègue Raymonde Poncet Monge, on fait croire qu’une terrible dégradation est en fait une avancée sociale ! (Mme Marie-Noëlle Lienemann renchérit.) Nous faisons pourtant face au mal-être absolu des enseignants du primaire. Leurs conditions de travail se dégradent, leurs arrêts de travail sont de plus en plus fréquents et les moyens en remplacement ne sont pas toujours à la hauteur.
Les classes, quand elles ne sont pas surchargées, sont fort remplies, notamment d’enfants présentant des troubles du comportement. Les enseignants, qui sont en première ligne, on l’oublie bien souvent, sont usés.
Il faut bien entendu voter cette disposition, tout en soulignant qu’il s’agit d’un pis-aller, car on ne prend pas en compte les difficultés des enseignants, qui s’accumulent aujourd’hui.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, pour explication de vote.
Mme Marie-Pierre Monier. Je compléterai les propos de mon collègue en évoquant le salaire des enseignants, qui est bien moins attractif et qui s’est considérablement dégradé au fil des années.
M. Max Brisson. C’est hors sujet ! Il y en a marre !
Mme Marie-Pierre Monier. Je reviendrai également sur les autres paramètres vecteurs de stress pour ces personnels, qui manquent parfois de soutien de la part de leur direction et de leur hiérarchie. Cette réalité transparaît dans la dernière enquête de l’OCDE : seuls 4 % des professeurs des écoles considèrent que leur métier est valorisé – chiffre terrible !
Par ailleurs, il est vrai qu’il va falloir remplacer les enseignants qui partent à la retraite, mais cela s’anticipe, la date de leur départ étant prévue. Je ne vois donc pas où est la difficulté.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 248, 1910, 2954 rectifié et 3747.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, l’amendement n° 4233 rectifié bis n’a plus d’objet.
Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 3627, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon, est ainsi libellé :
Alinéas 64 et 65
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Je vous invite à faire preuve du même enthousiasme unanime sur cet amendement !
Nous avons beaucoup parlé des conséquences de l’article 7 sur certains métiers ; je voudrais évoquer celles qui concernent les femmes.
Cette réforme, nous le disons, est antiféministe. Selon un rapport d’information de 2013 fait au nom de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes du Sénat, toutes les réformes des retraites ont pénalisé les femmes. Celle-ci ne fait pas exception.
Alors que les femmes travaillent en moyenne sept mois de plus que les hommes, elles vont devoir, sous l’effet de cette réforme, travailler en moyenne neuf mois de plus, contre cinq mois pour les hommes. Vous me direz que cela dépend des générations, mais force est de constater que les réformes des retraites se font toujours, j’y insiste, au détriment des femmes.
À titre d’exemple, la réforme entraînera un allongement de la durée du travail de huit mois pour les femmes de la génération née en 1981, contre quatre mois pour les hommes, soit deux fois plus !
De même, si on exclut les femmes qui partiront à 67 ans – elles sont deux fois plus nombreuses à partir à cet âge pour bénéficier d’une retraite à taux plein – et les personnes en invalidité, qui ne sont pas concernées, les femmes vont devoir travailler quatorze mois de plus, contre onze mois pour les hommes.
C’est l’un des facteurs, mais pas le seul – nous en reparlerons lorsque nous aborderons le minimum contributif –, qui fait dire aux économistes que 60 % des économies réalisées au travers de cette réforme pèseront sur les femmes. Si ce n’est pas une réforme antiféministe, je vous demande ce que c’est !
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 3597 est présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon.
L’amendement n° 4304 rectifié bis est présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 64
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Daniel Salmon, pour présenter l’amendement n° 3597.
M. Daniel Salmon. Comme vous l’avez tous constaté, de nombreux sous-amendements qui étaient précédemment des amendements ont été déclarés irrecevables.
Je profite donc de cette occasion pour revenir sur deux métiers présentant un caractère de pénibilité : les métiers d’auxiliaire de puériculture et d’ambulancier. Il s’agit de métiers passionnants, mais aussi physiquement et psychologiquement usants.
Les auxiliaires de puériculture, qui sont à 97 % des femmes, portent des enfants, effectuent des tâches répétitives, dans des postures pénibles, qui finissent par user les corps.
Les ambulanciers travaillent en horaires décalés, leurs conditions de travail sont dégradées, à tel point qu’il manque aujourd’hui 15 000 ambulanciers, à la suite d’une grande vague de démissions.
Ces professionnels fatigués, parfois inaptes, jettent l’éponge alors que ces métiers sont cruciaux et vitaux pour notre société. L’allongement de la durée des cotisations est donc incompatible avec les contraintes de ces emplois.
Je sais que parler des métiers et des gens agace parfois certains d’entre vous, à droite de l’hémicycle, …
Mme Sophie Primas. Pas du tout !
M. Daniel Salmon. … et que vous préférez discuter de chiffres et de statistiques. Vous ne voyez pas que, derrière ces chiffres, il y a des femmes et des hommes en chair et en os, dont certains vont payer très cher ces deux années supplémentaires !
M. le président. La parole est à M. Gérard Lahellec, pour présenter l’amendement n° 4304 rectifié bis.
M. Gérard Lahellec. Les travailleurs du monde agricole – ils sont près de 1,3 million dans notre pays – connaissent un sort plus précaire que le reste des Français lorsqu’ils sont à la retraite.
Il ne m’a pas échappé que les lois Chassaigne 1 et 2 visant à assurer la revalorisation des pensions de retraite agricoles en France ont constitué des avancées importantes. De même, le vote de la loi visant à calculer la retraite de base des non-salariés agricoles en fonction des vingt-cinq années d’assurance les plus avantageuses ne m’a pas échappé non plus.
La situation des travailleurs de la terre reste néanmoins très compliquée aujourd’hui, alors qu’ils travaillent plus que beaucoup d’autres catégories : ils passent au moins cinquante-quatre heures par semaine au travail et ne prennent quasiment jamais de congés.
Au moment de prendre leur retraite, les assurés du régime agricole continuent de manquer de ressources et d’être dans la survie.
C’est aussi ce que nous disent les jeunes, qui observent ces métiers avec beaucoup de prudence, pour ne pas dire beaucoup de circonspection. Or nous avons besoin de centaines de milliers de jeunes pour assurer la relève dans le monde agricole. D’ailleurs, la transmission est une question de portée nationale.
Il nous apparaît donc évident qu’il faudrait améliorer substantiellement les conditions de vie des agriculteurs, augmenter le montant de leur pension et rendre leur métier plus attractif. Or nous faisons l’inverse, ce qui n’est pas une bonne chose pour notre souveraineté agricole et alimentaire.
M. le président. L’amendement n° 3598, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon, est ainsi libellé :
Alinéa 65
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. Par cet amendement, j’évoquerai les conséquences délétères de la réforme sur la vie politique locale.
Lors des dernières élections municipales, l’âge moyen des nouveaux maires était de 58,9 ans. L’Association des maires de France note que les maires sont de plus en plus âgés. En 2020, après le dernier scrutin local, 55,3 % des maires étaient âgés de plus de 60 ans. Cette réforme ne va évidemment pas arranger les choses.
De même, un amoindrissement du tissu associatif est à craindre. Selon une étude de la Caisse nationale d’assurance vieillesse de 2013, un dirigeant d’association sur deux est un retraité. Le passage à la retraite favorise la vie associative : chez les personnes âgées de 55 à 65 ans, le taux de participation des retraités est supérieur à celui des non-retraités. Enfin, 38 % des retraités, tous âges confondus, sont adhérents à au moins une association.
Selon une étude réalisée entre 2010 et 2019,…
M. le président. Il faut conclure !
M. Joël Labbé. … le taux d’engagement a diminué chez les plus âgés. Parmi les causes les plus probables de cette baisse figure le recul de l’âge du départ à la retraite.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. La présentation de l’amendement n° 4304 rectifié bis est conforme à l’objet de l’amendement.
En revanche, madame Poncet Monge, vous nous avez tenu un discours fort intéressant, comme d’habitude, mais qui n’a rien à voir avec les objets des amendements que vous avez défendus.
Dans les objets de vos amendements visant à supprimer des alinéas, vous évoquez une meilleure répartition des richesses, les milliardaires français et, ce qui est intéressant, le rétablissement de la retraite à 60 ans. Il est tout de même extraordinaire que vous restiez ancrée à ce type de proposition quand on connaît les difficultés de l’équilibre du système par répartition ! Ce n’est pas très sincère vis-à-vis de nos concitoyens, car on sait très bien que l’on ne peut plus continuer ainsi.
On sent bien que la ronéo a tourné, car le discours est toujours le même ! Ce type d’amendements pourrait être interprété par certains comme de l’obstruction, soyez donc plus attentifs à l’exposé de vos motifs…
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre. Lors de la présentation de l’amendement n° 4304 rectifié bis a été évoquée la situation des retraités de l’agriculture, qui fait justement l’objet de l’amendement. Cela me permet de souligner que, dans le cadre du projet de loi, nous allons faire en sorte que la fameuse « garantie Chassaigne » soit accordée aux agriculteurs ayant interrompu leur carrière avant son terme du fait d’une incapacité ou d’une invalidité.
Aujourd’hui, pour en bénéficier, il faut avoir une carrière intégralement complète. Nous proposons d’élargir, pour les agriculteurs exploitants, la définition de la carrière complète à ceux qui ont dû quitter cette activité avant terme pour des raisons de santé. Cela permettra à 45 000 exploitants agricoles retraités de bénéficier d’une revalorisation à hauteur de 80 euros par mois en moyenne. C’est une bonne chose, qui permet de boucher un trou dans la raquette des deux lois Chassaigne.
Dans la présentation des trois autres amendements, défendus par Mme Poncet Monge, M. Fernique et M. Labbé, la situation des femmes a été évoquée, un sujet évidemment majeur, et celle des élus locaux. Or les amendements présentés visent à supprimer des alinéas qui concernent, pour les deux premiers, les retraités de l’agriculture et, pour le dernier, la retraite des demandeurs d’emploi. L’écart est grand entre ce dont il a été question et les dispositions visées.
Par ailleurs, s’ils étaient adoptés, ces amendements n’auraient comme seul résultat que de fragiliser le régime de retraite des exploitants agricoles et des demandeurs d’emploi, raison pour laquelle le Gouvernement y est défavorable.
M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.
M. Ronan Dantec. Je suis un peu surpris par le propos de M. le ministre, même si ce n’est pas la première fois… Joël Labbé a insisté sur un point extrêmement important : les conseils municipaux des communes rurales comprennent de nombreux retraités du monde agricole.
La décennie de la soixantaine est vraiment celle de l’investissement dans la vie associative et dans la vie municipale. Nous le savons, notre système démocratique fonctionne sur l’engagement des jeunes retraités dans les conseils municipaux. Nous avons du mal, y compris dans des communes moyennes de 10 000 ou 15 000 habitants, à avoir plus d’une liste pour les élections. C’est la réalité que nous connaissons ! Si l’on ne part à la retraite qu’à 64 ans, on va se projeter dans la décennie d’après, s’investir moins longtemps dans la vie associative et hésiter à s’investir dans la vie municipale.
M. Savary a répondu en suivant une logique comptable, qui passe sous silence le déséquilibre entre les revenus du capital et les revenus du travail tels qu’ils ont évolué depuis trente ans – mais ne revenons pas sur ce point.
Monsieur le ministre, en n’intégrant pas l’ensemble des coûts induits de votre réforme, vous êtes en train d’appauvrir, de fragiliser la société française. Les conséquences en seront absolument catastrophiques dans les prochaines années, y compris pour notre vie démocratique locale.
M. le président. La parole est à Mme Michelle Meunier, pour explication de vote.
Mme Michelle Meunier. Mon explication de vote porte sur les amendements de notre collègue Raymonde Poncet Monge, qui a raison de souligner, puisque nous sommes le 8 mars, combien cette réforme est antiféministe.
Il ne s’agit pas ici de faire le concours du plus pénalisé par la réforme. En revanche, dire que cette dernière ne corrige en rien les inégalités salariales et les inégalités de pensions est une réalité, qui va contribuer à dégrader encore la situation des femmes. Les chiffres sont clairs : parmi les retraités nés en 1950, un tiers – 37 % des femmes et 28 % des hommes – n’était ni en emploi ni au chômage l’année précédant la retraite. Entre 55 et 65 ans, on se retrouve souvent dans la situation de devoir prendre du temps sur sa carrière pour s’occuper à la fois de ses parents âgés dépendants et de ses petits-enfants en raison des difficultés de l’accueil de la petite enfance.
Je voterai donc les amendements de Mme Poncet Monge.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 3597 et 4304 rectifié bis.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 227 :
Nombre de votants | 345 |
Nombre de suffrages exprimés | 342 |
Pour l’adoption | 93 |
Contre | 249 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix l’amendement n° 3598.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 3599 est présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon.
L’amendement n° 4305 rectifié bis est présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéas 66 à 67
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 3599.
Mme Raymonde Poncet Monge. Messieurs les ministres, tout comme le directeur de la Cnav, le groupe écologiste ne croit pas à l’effet dit « horizon ». Les études se multiplient et sont unanimes : la réforme de 2010 a été délétère pour l’emploi des seniors.
Selon l’Insee, le report de l’âge à 62 ans s’est certes traduit par une hausse de quatorze points du taux d’emploi à 60 ans, qui s’explique largement, je le redis, par l’effet de la noria générationnelle – mais admettons que ce soit grâce à la réforme – et par une augmentation de treize points du taux de chômage, souvent de longue durée, et de sept points du taux d’invalidité.
Selon une étude de l’Unédic publiée voilà quelques jours, cette même réforme a provoqué une hausse de 100 000 allocataires de l’assurance chômage. Le pic des ruptures de contrat à 59 ans apparaît nettement dans cette étude et n’épargne personne. Selon une étude de l’Association pour l’emploi des cadres (Apec), 81 % des 112 000 cadres de plus de 55 ans qui sont aujourd’hui au chômage ont été licenciés.
Monsieur le rapporteur, ce ne sont ni un CDI senior, dont on peut douter que la mesure d’exonération des cotisations famille permette de faire réembaucher ces cadres, ni un index seniors qui changeront la donne.
Actuellement, 1,4 million de seniors ne sont ni en emploi ni en retraite. Les études l’ont montré, le report de l’âge de la retraite à 64 ans conduira 150 000 personnes supplémentaires à percevoir les minima sociaux ou au chômage.
Les 865 000 chômeurs seniors de longue durée vont pâtir de cette réforme en raison du « déplacement » de deux ans du sas de précarité, qui ne sera pas annulé par l’effet d’horizon auquel vous croyez.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour présenter l’amendement n° 4305 rectifié bis.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Nous avons évoqué précédemment le cas des professeurs des écoles qui ne pouvaient partir à la retraite avant la fin de l’année scolaire en cours.
Ils ne sont toutefois pas les seuls à être concernés par ce mécanisme : il en est de même des maîtres contractuels de l’éducation nationale et des personnels d’inspection.
Cet amendement vise à élargir le champ des personnels de l’éducation nationale concernés – pour les maîtres contractuels, cela devrait être une évidence.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 3599 et 4305 rectifié bis.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 228 :
Nombre de votants | 345 |
Nombre de suffrages exprimés | 342 |
Pour l’adoption | 93 |
Contre | 249 |
Le Sénat n’a pas adopté.
L’amendement n° 4309 rectifié bis, présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli, est ainsi libellé :
Alinéas 75 à 78
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Fabien Gay.
M. Fabien Gay. Le projet de loi entend, par la modification de l’article L. 556-7 du code général de la fonction publique, autoriser les fonctionnaires dont la limite d’âge est inférieure à 67 ans à prévoir non plus un maintien en activité jusqu’à l’attente d’un taux plein, mais une prolongation d’activité.
Ces deux dispositifs ne relèvent pas de la même logique. Le maintien en fonction est, pour les catégories dont la limite d’âge est inférieure à 67 ans, le dernier recours après épuisement des autres voies permettant d’arriver à un taux maximum de cotisation. Il est surtout destiné à pallier une situation exceptionnelle, en général pour régulariser un dépassement irrégulier de la limite d’âge : agent détaché oublié ou fin d’année d’enseignement. Ce maintien est d’ailleurs accordé temporairement et sous réserve de l’intérêt du service.
Le caractère singulier du maintien en activité, surtout pour les catégories non sédentaires, serait-il à mettre en parallèle avec le vieillissement des effectifs, relevé dans le jaune budgétaire du projet de loi de finances pour 2022 ?
Dans la fonction publique d’État, plus d’un agent sur trois a plus de 50 ans ; près d’un sur deux dans la fonction publique territoriale, et un sur trois dans la fonction publique hospitalière, pourtant en grande partie placée en catégorie active.
Le jaune budgétaire indique que le nombre de fonctionnaires âgés de 60 ans a continué de progresser en 2019, et de manière plus prononcée, avec une hausse de 5,2 %, un mouvement entamé en 2018. Cette augmentation devrait s’accentuer dans les prochaines années en raison de l’effet démographique.
Monsieur le ministre, doit-on comprendre que vous souhaitez normaliser une situation qui devrait demeurer exceptionnelle, mais dont vous allez faire par la contrainte une habitude ? Doit-on comprendre que vous remplacez une mesure d’exception par une incitation à travailler quelques années de plus ?
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 4309 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements identiques.
L’amendement n° 84 rectifié bis est présenté par Mme N. Delattre, MM. Gold, Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Corbisez, Guérini et Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux.
L’amendement n° 2606 rectifié bis est présenté par MM. Capus, Grand, Guerriau, Médevielle, Verzelen, Chasseing, Decool et Lagourgue, Mmes Mélot et Paoli-Gagin et MM. Wattebled et Menonville.
L’amendement n° 4400 rectifié est présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli.
L’amendement n° 4646 rectifié est présenté par Mme Schillinger, MM. Mohamed Soilihi et Marchand, Mme Havet, M. Haye, Mme Duranton et MM. Buis, Rambaud et Hassani.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
I. – Après l’alinéa 83
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…° Après l’article L. 556-8, il est inséré un article L. 556-8-… ainsi rédigé :
« Art. L. 556-8-…. – La limite d’âge des fonctionnaires appartenant à l’un des cadres d’emplois de sapeurs-pompiers professionnels est fixée à soixante-deux ans. » ;
II. – Après l’alinéa 87
Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :
5° La section 3 du chapitre VI du titre II du livre VIII est ainsi modifiée :
a) Au 3° de l’article L. 826-13, après le mot : « opérationnelle, » sont insérés les mots : « à partir de l’âge de droit au départ anticipé fixé au troisième alinéa de l’article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite diminué de cinq années, » ;
b) La sous-section 4 est complétée par un article L. 826-… ainsi rédigé :
« Art. L. 826-…. – Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application de la présente section. »
III. – Alinéa 107
a) Remplacer les mots :
sapeurs-pompiers professionnels, y compris pour la durée de services accomplis sur
par les mots :
fonctionnaires occupant ou ayant occupé des emplois de sapeurs-pompiers professionnels de tous grades, y compris
b) Supprimer les mots :
de tous grades
et les mots :
à compter de l’âge de cinquante-sept ans et
IV. – Alinéa 108
Après le mot :
accordé
insérer les mots :
, sans condition de durée de service,
La parole est à Mme Nathalie Delattre, pour présenter l’amendement n° 84 rectifié bis.
Mme Nathalie Delattre. Cet amendement quelque peu technique vise, en premier lieu, à intégrer au code général de la fonction publique la limite d’âge applicable aux sapeurs-pompiers professionnels, en cohérence avec la codification des limites d’âge pour les fonctionnaires des catégories actives.
Il est ainsi proposé de décaler l’âge à partir duquel le congé pour raison opérationnelle peut être pris sur la base de l’âge de départ anticipé, afin de respecter la durée maximale de cinq années de ce congé.
En second lieu, en cohérence avec l’extension du bénéfice de l’âge de départ anticipé lorsque le fonctionnaire n’est plus en catégorie active et avec les mesures prévues pour les autres corps et cadres d’emploi, l’amendement vise à étendre le principe de portabilité à la bonification de services aux sapeurs-pompiers professionnels.
M. le président. La parole est à M. Franck Menonville, pour présenter l’amendement n° 2606 rectifié bis.
M. Franck Menonville. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. Jérémy Bacchi, pour présenter l’amendement n° 4400 rectifié.
M. Jérémy Bacchi. Certains métiers sont idéalisés dans l’imaginaire collectif. C’est notamment le cas de celui de pompier. Les pompiers sont vus, à juste titre, comme des héros prêts à courir tous les dangers pour sauver nos proches, un voisin ou nous-mêmes.
Malgré le rêve que représente cette profession, notamment chez les plus jeunes, personne n’est dupe de la difficulté de ce métier, à la fois physique et psychologique. Les situations sont variées et souvent difficiles, parce qu’elles touchent à l’intime, dans des conditions parfois dramatiques.
Il s’agit là d’un critère qui serait déjà suffisant pour considérer les sapeurs-pompiers comme appartenant à la catégorie dite « active ». Nous vous invitons donc à voter cet amendement.
Toutefois, au-delà de cette pénibilité, il est une autre réalité : celle des besoins et des moyens humains. Plus vous dégradez les conditions de travail et de carrière des pompiers, moins vous parviendrez à recruter et plus vous mettrez en danger l’ensemble de nos concitoyennes et concitoyens. Après les déserts médicaux, vivrons-nous bientôt dans des déserts complets d’assistance ? Souhaitez-vous que les pompiers soient aussi âgés que les personnes qu’ils viennent régulièrement relever après une chute ? N’ajoutons pas de la souffrance à l’injustice ! (M. Hervé Gillé applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour présenter l’amendement n° 4646 rectifié.
Mme Patricia Schillinger. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Cette disposition est tout à fait indispensable : avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stanislas Guerini, ministre. L’avis du Gouvernement, et notamment du ministre de l’intérieur, est également favorable.
Gérald Darmanin et moi-même avons reçu les organisations syndicales des sapeurs-pompiers volontaires et professionnels voilà quelques jours. Les dispositions proposées vont dans le bon sens.
M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, pour explication de vote.
M. Patrick Kanner. Mon groupe soutiendra ces amendements. Nous sommes quelques sénateurs « spécialistes » des sapeurs-pompiers, une profession que nous défendons sur l’ensemble des travées de cet hémicycle.
Nous avons commis un rapport sur la protection physique des sapeurs-pompiers, lesquels subissent très régulièrement des agressions, et pas uniquement dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville.
Ces amendements vont dans le bon sens, en apportant une – bonne – exception à la règle que vous voulez imposer à l’ensemble des Français.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 84 rectifié bis, 2606 rectifié bis, 4400 rectifié et 4646 rectifié.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Je rappelle que l’avis de la commission est favorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 229 :
Nombre de votants | 345 |
Nombre de suffrages exprimés | 345 |
Pour l’adoption | 345 |
Le Sénat a adopté.
Les pompiers font l’unanimité ! (On s’en félicite sur de nombreuses travées.)
L’amendement n° 3604, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon, est ainsi libellé :
Alinéa 110
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Cela a déjà été évoqué, et nous tenons à le dire et à le redire, depuis trente ans, le travail s’est intensifié pour toutes les catégories, y compris les cadres, catégorie à laquelle on ne pense pas forcément.
Alors que 2 % d’entre eux étaient exposés à au moins trois contraintes physiques en 1984 – je parle bien de contraintes physiques, et non temporelles, c’est-à-dire sur le rythme de travail –, ce taux est passé à 26 %, selon la Dares. Même pour eux, le travail est plus intense et plus pénible.
Pour les ouvriers, c’est pire, bien entendu ! Le taux d’ouvriers déclarant subir au moins trois contraintes de rythme – des contraintes qui touchent plutôt les cadres – était de 8,7 % en 1984, et de 53,4 % aujourd’hui, soit un sur deux ! Par ailleurs, 64 % des ouvriers sont exposés à des agents chimiques dangereux et 62 % aux vibrations mécaniques. Vous reconnaîtrez là – je l’espère, monsieur le ministre – les pénibilités que vous avez exclues du C2P.
Pour répondre à cette situation, le Gouvernement, lors du précédent quinquennat, a réagi en retirant ces critères de pénibilité, jusqu’à vider le C2P de son contenu, comme le signalait la Cour des comptes.
Nous voulons vous alerter sur les conséquences d’une telle mesure. Nous ne pouvons voter une réforme des retraites qui ne parle pas du problème central, celui du travail et des conditions de travail. Nous ne pouvons voter un texte qui ne tienne pas compte de l’accroissement de la vulnérabilité des seniors, lesquels vont devoir rester deux ans de plus, face au travail, alors même que la réforme de 2010 a conduit à une augmentation forte des arrêts maladie de longue durée des employés seniors.
Selon la Drees, le surcoût est estimé à près de 1 milliard d’euros si l’on opère un nouveau report, cette fois-ci à 64 ans.
Ces surcoûts sont des effets indirects induits de la réforme, évoqués précédemment par mon collègue. Le projet de loi contient-il des dispositions qui soient suffisamment à la hauteur pour protéger les seniors au travail ?
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je ne suis pas sûr que la suppression de l’alinéa 110, ma chère collègue, permette de répondre au souhait que vous venez d’exprimer.
S’il était adopté, cet amendement conduirait à supprimer des dispositions maintenant à 68 ans la limite d’âge applicable au vice-président du Conseil d’État – voilà qui relance l’affaire du Conseil d’État ! (Sourires.) Vous n’avez pas visé le bon alinéa.
La commission est défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 3606 est présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon.
L’amendement n° 4315 rectifié est présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéas 121 à 123
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Guillaume Gontard, pour présenter l’amendement n° 3606.
M. Guillaume Gontard. J’ai bien entendu les propos de Mme la rapporteure générale. La discussion de tous ces amendements permet de mettre en exergue, et c’est ce qui rend particulièrement intéressant notre débat de ce soir, les problématiques de la réforme, avec votre choix de passer de 62 à 64 ans de manière uniforme.
Quand on dresse la liste de l’ensemble des professions, on voit bien que certaines particularités nous obligent à trouver des aménagements, en fonction des métiers.
Nous avons d’ailleurs pu enrichir le texte au cours de la soirée puisque des amendements ont été votés, à une très large majorité, que ce soit pour les pompiers ou pour les égoutiers, par exemple. Nous avons eu des débats intéressants sur les sportifs et les instituteurs.
J’y insiste, il est important de montrer les problèmes que soulève la réforme. À y regarder de près, on voit bien qu’ajouter deux ans de travail à tous, cela ne marche pas : il faut prendre en compte la pénibilité et les spécificités des uns et des autres. Tel est le sujet de ces différents amendements.
Monsieur le ministre, je tiens tout de même à vous remercier. Là, vous êtes un peu plus silencieux, mais vous avez présenté vos arguments au cours de cette soirée, ce qui nous a permis d’échanger et d’avoir un débat intéressant.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour présenter l’amendement n° 4315 rectifié.
Mme Laurence Cohen. J’aimerais évoquer la profession des ingénieurs de contrôle de la navigation aérienne, plus connus sous le nom de contrôleurs aériens.
S’ils n’étaient pas là, le trafic aérien tournerait à la catastrophe. Ils sont près de 4 000 en France à guider, nuit et jour, les 1,7 million de vols qui ont lieu chaque année, à faire décoller et atterrir les avions en toute sécurité.
Du haut de sa tour de contrôle, l’aiguilleur du ciel est contraint de fixer plusieurs écrans et tablettes huit à douze heures d’affilée. Ce travail s’opère sous une forte astreinte cognitive, produite par la nécessité d’une synchronisation temporelle et spatiale avec le second aiguilleur, le centre météo et, naturellement, le pilote.
J’y suis particulièrement sensible, ainsi d’ailleurs que mon collègue Pascal Savoldelli, puisque l’aéroport d’Orly se situe dans le Val-de-Marne. Trop souvent, la fatigue due aux horaires alternés et à la surcharge de travail conduit ces professionnels à des burn-out. Un article du Parisien du 18 janvier dernier nous apprend que le ministère des transports s’est engagé à ne pas toucher à l’âge légal de départ à la retraite des contrôleurs du ciel, qui est aujourd’hui de 59 ans.
Pour autant, l’accélération du passage à 43 annuités pour bénéficier du taux plein met en exergue la nécessité de déplafonner la bonification du cinquième du temps de service pour ces ingénieurs de contrôle de la navigation aérienne. Car le bénéfice du complément individuel temporaire n’est qu’un patch provisoire basé sur des estimations et jamais revalorisé.
Dans un contexte où la question du pouvoir d’achat est brûlante et qu’il reste encore beaucoup de manques dans les pensions de retraite de ces ingénieurs, il nous semblait nécessaire, par le biais de cet amendement de repli, d’exprimer notre soutien à la mobilisation de certains syndicats du secteur contre cette réforme des retraites et d’attirer votre attention sur cette profession spécifique.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. En supprimant ces alinéas, mes chers collègues, vous parvenez à un résultat contraire aux objectifs que vous voulez atteindre, à savoir la revalorisation des émoluments de ces personnels.
En effet, ces dispositions prévoient l’ouverture du bénéfice de la bonification du cinquième du temps de service accompli aux anciens ingénieurs du contrôle de la navigation aérienne.
La commission est défavorable à ces amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stanislas Guerini, ministre. Je remercie le sénateur Gontard de ses propos. Encore une fois, nous portons une réforme d’efforts et nous ne le nions pas, car c’est une évidence. Mais je veux faire valoir qu’elle apporte aussi de nombreuses avancées comme la portabilité des bonifications.
Aujourd’hui, si un ingénieur du contrôle de la navigation aérienne ne termine pas sa carrière en tant qu’ingénieur en chef du contrôle de la navigation aérienne, il ne bénéficie pas des bonifications acquises au long de la carrière. C’est à cela que nous mettons fin.
Or les amendements tendent à supprimer cette nouvelle portabilité des bonifications, raison pour laquelle nous invitons leurs auteurs à les retirer.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 3606 et 4315 rectifié.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 230 :
Nombre de votants | 345 |
Nombre de suffrages exprimés | 343 |
Pour l’adoption | 92 |
Contre | 251 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 3608, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon, est ainsi libellé :
Alinéas 132 à 134
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Nous sommes en train d’achever l’examen de l’article 7, dont nous essayons d’évaluer toutes les conséquences, notamment sur les inégalités de santé au travail, afin d’éclairer le vote.
Selon l’enquête du groupement d’intérêt scientifique sur les cancers d’origine professionnelle en Seine-Saint-Denis (Giscop 93), neuf patients atteints de cancer sur dix ont été exposés à au moins un cancérogène au cours de leur vie professionnelle. Le chercheur Philippe Davezies souligne : « la grande majorité des maladies [professionnelles] reconnues (…) ne relève en effet que de deux chapitres de la pathologie professionnelle : les maladies dues à l’amiante » – elles ont souffert d’une reconnaissance tardive – « et les pathologies de l’appareil locomoteur », lesquelles ne figurent pas dans les critères pris en compte dans le C2P et n’offrent donc pas la possibilité de partir à la retraite de manière anticipée.
Les données scientifiques disponibles permettent d’estimer que 8,5 % des cancers sont d’origine professionnelle, soit une fourchette comprise entre 14 000 et 30 000 nouveaux cancers professionnels chaque année sur un total annuel reconnu inférieur à 3 000 ! Cette moindre prise en compte de l’exposition aux agents chimiques dangereux et aux poussières est la principale responsable des épidémies de cancer dues au travail.
Les travailleurs sont, de fait, inégalement exposés : si 8,5 % des cancers sont dus au travail, ce taux monte à 20 % pour les ouvriers.
M. le président. Il faut conclure.
Mme Raymonde Poncet Monge. Il faut tenir compte de l’effet de l’allongement de la durée du travail induite par cette réforme sur les inégalités de santé.
M. le président. L’amendement n° 4317 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli, est ainsi libellé :
Alinéa 133
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Pascal Savoldelli.
M. Pascal Savoldelli. Messieurs les ministres, mes chers collègues, même si nous n’avons pas à distribuer de bons ou de mauvais points, permettez-moi de remercier les 101 sénateurs et sénatrices qui ont voté en faveur d’un peu plus d’espérance de vie pour les égoutiers. La liberté de vote, ici, au Parlement, est positive ; je salue le fait que la gauche n’ait pas été seule à poursuivre cet objectif.
Les enjeux de cet amendement sont centraux par rapport à l’article 7. Nous proposons de ne pas appliquer le relèvement de l’âge légal de départ à la retraite de deux années pour la fonction publique hospitalière, ce qui va bien évidemment faire débat.
Nous sommes favorables à un retour de l’âge légal de départ à 60 ans en ce qui concerne les fonctionnaires de la fonction publique hospitalière, mais également à une prise en compte des années d’études dans le calcul de leur retraite et à une indexation des pensions sur les salaires.
Lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2023 et à l’occasion d’autres textes, 150 milliards d’euros ont tout de même été offerts au patronat ! Il me semble donc qu’apporter 10 milliards ou 15 milliards d’euros à la fonction publique hospitalière et à d’autres secteurs aurait mérité un examen plus équilibré et plus juste, au regard de ces 150 milliards d’euros de cadeaux fiscaux. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE et GEST.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. La commission est bien évidemment défavorable à cet amendement. La ronéo a encore tourné…
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stanislas Guerini, ministre. J’aurai trois remarques à vous adresser, monsieur le sénateur.
D’abord, la fonction publique hospitalière est celle qui compte le plus d’agents en catégorie active : 350 000. Dès lors, tous les dispositifs de réparation supplémentaire concernent davantage ces agents.
Ensuite, il s’agit de la fonction publique qui va le plus profiter des améliorations en termes de titularisation des contractuels que j’ai évoquées voilà quelques instants. Un peu plus de 100 000 aides-soignants contractuels, qui font le même travail que les 200 000 aides-soignants de catégorie active, verront leurs années de service comptabilisées après leur titularisation.
Enfin, si l’argument de la prévention n’est pas celui qui vous convaincra aujourd’hui, il est complémentaire. Nous créons un fonds de prévention dédié aux métiers du soin doté d’un demi-milliard d’euros sur le quinquennat qui sera concentré sur les établissements hospitaliers et médico-sociaux. Considérer le seul périmètre de la fonction publique hospitalière, comme vous le faites au travers de votre amendement, me semble restrictif. En effet, vous ne tenez pas compte des agents d’établissements médico-sociaux qui relèvent de la fonction publique territoriale.
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. Monsieur le ministre, toute réforme doit représenter un progrès de société, un progrès pour tous. Nous aurions dû être autorisés à élargir le débat parlementaire autour de nouveaux critères de pénibilité. Cet enjeu est au cœur de ce que nous disent beaucoup d’agents de la fonction publique hospitalière.
M. René-Paul Savary, rapporteur. Ça viendra, à l’article 9 !
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 4317 rectifié.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 231 :
Nombre de votants | 345 |
Nombre de suffrages exprimés | 344 |
Pour l’adoption | 100 |
Contre | 244 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Cent voix ? On progresse !
M. le président. L’amendement n° 4318 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli, est ainsi libellé :
Alinéas 135 à 139
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Fabien Gay.
M. Fabien Gay. Les dispositions de cet amendement devraient satisfaire le Gouvernement et M. le ministre Guerini. En effet, si le précédent n’avait trait qu’à la fonction hospitalière, celui-ci a le même objet, mais ses dispositions s’appliquent à tous les fonctionnaires. (Sourires sur les travées du groupe CRCE.)
Dans la même veine, nous regrettons que certains de nos amendements n’aient pas été jugés recevables. M. le rapporteur a dit que la ronéo avait tourné, mais mon collègue Pascal Savoldelli a entièrement raison : nous aurions dû débattre aujourd’hui des nouvelles conditions de travail et des nouveaux métiers où la pénibilité est grande.
Pascal Savoldelli et d’autres sénateurs travaillent notamment sur le cas des livreurs et des livreuses, un métier qui n’existait pas voilà quarante ans. Leur situation présente des contraintes inédites pour beaucoup de travailleuses et de travailleurs, comme dans les entrepôts Amazon qui s’installent partout sur nos territoires. Nous échangeons souvent dans cet hémicycle au sujet des centres-villes, des centres bourgs et de leurs commerces tués par ces grands espaces. Des études paraissent déjà au sujet des travailleurs et travailleuses qui y sont employés, lesquels ne voient pas le jour pendant plusieurs heures et travaillent à la chaîne, créant de nouvelles difficultés et pénibilités.
Nous n’avons pas pu examiner un certain nombre d’amendements relatifs à ces métiers. Je ne cherche pas à envoyer seulement du « son stéréo » au travers de mon intervention, je tiens à souligner qu’il faudra tenir compte de ces nouvelles contraintes, notamment au regard des conditions de travail, des salaires et des départs anticipés à la retraite.
Comme vous le voyez, monsieur le ministre, nous essayons de répondre à vos demandes. (Sourires sur les travées du groupe CRCE.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Monsieur Gay, l’entrepôt Amazon le plus proche de chez vous a dû être nationalisé, puisque cet amendement ne concerne que les trimestres cotisés par les fonctionnaires de catégorie active… (Sourires sur les travées du groupe CRCE et au banc des commissions.)
La commission est défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Un sénateur du groupe Les Républicains. Une obstruction plus détendue, mais une obstruction tout de même !
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 4318 rectifié.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 232 :
Nombre de votants | 345 |
Nombre de suffrages exprimés | 344 |
Pour l’adoption | 94 |
Contre | 250 |
Le Sénat n’a pas adopté.
L’amendement n° 3609, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon, est ainsi libellé :
Alinéa 140
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Monsieur le rapporteur, la ronéo n’est pas éteinte ! (Sourires sur les travées du groupe GEST.)
Les débats auraient peut-être été plus faciles si nous avions disposé d’une véritable étude d’impact sur ce projet de loi et notamment son article 7. On aurait dû la demander au Conseil d’État, en même temps que son fameux avis…
Cette réforme contient un angle mort. Les ouvriers et les employés, qualifiés comme non qualifiés, en seront les grands perdants. Les personnes immigrées, surreprésentées dans ces catégories, seront particulièrement atteintes. Selon l’Observatoire des inégalités, les postes occupés par les immigrés sont souvent ceux qui n’ont pas été acceptés par les autres actifs du fait des conditions de travail et de la rémunération – sécurité, nettoyage, bâtiment, restauration… Beaucoup de ces métiers sont essentiels au bon fonctionnement de l’économie et de la société française.
Une étude de la Dares précise : « Un emploi sur dix est occupé par un immigré. Parmi l’ensemble des quatre-vingt-sept familles professionnelles, trente-cinq métiers se distinguent par une proportion supérieure. Ces professions sont souvent exposées à des conditions de travail contraignantes et/ou à des tensions sur le marché du travail », au risque d’accidents de travail, d’épuisement et de détérioration de la santé.
Ces métiers où les immigrés sont surreprésentés sont sujets à des contraintes entraînant des limitations physiques, à des rythmes imposés, à des tâches répétitives, à des périodes d’activité durant les jours non ouvrables ou en dehors des plages habituelles et à un morcellement des journées. Vous avez là, concentrés, tous les critères de pénibilité, lesquels mériteraient d’ailleurs d’être enrichis.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Madame Poncet Monge, cette fois, je crois que vous vous êtes trompée de texte ! (Sourires.) Le projet de loi sur l’immigration ne tardera pas à arriver…
En revanche, l’objet de l’amendement est intéressant : vous proposez de laisser les maîtres d’établissement d’enseignement privé sous contrat prendre leur retraite à 62 ans et non à 64 ans. Je ne connaissais pas votre attachement à l’école privée… Je le découvre et vous en félicite !
La commission est défavorable à cet amendement. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC. – M. Martin Lévrier applaudit également.)
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 3610, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon, est ainsi libellé :
Alinéas 141 à 144
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 3612, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon, est ainsi libellé :
Alinéas 174 à 176
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Monsieur le rapporteur, les travailleurs du privé comme ceux du public font l’objet de toute notre attention. (Sourires.)
Le conseil de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) a émis un avis défavorable sur cet article 7. Selon la CNSA, « une grande loi autonomie s’avère nécessaire » – elle nous a été promise, mais nous ne la voyons toujours pas venir – « pour répondre aux besoins des personnes âgées, des personnes en situation de handicap et de leurs proches pour les prochaines années » auxquels cette réforme sera très défavorable.
Je ne reviens pas sur l’accélération du vieillissement démographique concomitant au peu de progrès réalisés pour prévenir la perte d’autonomie. En effet, si l’espérance de vie augmente, celle en bonne santé ne connaît que des évolutions désormais modestes. Pourtant, selon l’Insee, en 2050, quelque 4 millions de seniors seront en situation de perte d’autonomie.
De plus, selon une étude menée par l’observatoire Evrest, spécialisé dans l’étude des évolutions en santé au travail, « après 60 ans, la moitié des ouvriers et des employés doutent que leur état de santé leur permette, à horizon de deux années, de poursuivre leur travail actuel. » Qu’en sera-t-il quand on leur demandera de travailler quatre ans de plus ? D’autres travaux scientifiques confirment ces craintes et laissent présager la survenue d’incapacités.
Les membres du conseil de la CNSA, dans un avis motivé, « souhaitent alerter sur l’impact potentiel d’un allongement de la durée du travail sur l’équilibre des autres branches, en particulier pour les professions présentant un niveau élevé de pénibilité, si cette dernière n’était pas bien prise en compte. »
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Madame Poncet Monge, je vous sens impatiente de parler de santé au travail : c’est l’objet de l’article 9. Je n’ai pourtant pas l’impression, eu égard au grand nombre d’amendements qui ont été déposés, que vous soyez réellement pressée d’y parvenir…
Cet amendement concerne le remboursement des trimestres rachetés, comme tout le monde l’a bien compris au travers de votre présentation… La commission y est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre. Il se trouve, madame la sénatrice Poncet Monge, que vous avez voté le dispositif visant à faciliter le rachat des trimestres d’apprentissage, de stages et d’études. Or, si votre amendement était adopté, plus personne ne pourrait recourir à ces rachats : avis défavorable. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. Madame Poncet Monge, l’amendement n° 3612 est-il maintenu ?
Mme Raymonde Poncet Monge. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 3612 est retiré.
L’amendement n° 3614, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon, est ainsi libellé :
Alinéa 178
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Thomas Dossus.
M. Thomas Dossus. Nous arrivons à la fin de l’examen de l’article 7. Nous avons pu lire qu’Elon Musk figurait parmi les défenseurs de cette réforme. Au départ, je me suis un peu demandé ce qu’il en avait à faire. Mais on comprend assez vite qu’elle correspond assez bien à sa vision du monde, puisque les inégalités déjà criantes s’aggraveront.
Quelques seniors multimillionnaires qui en cachent bien d’autres, de grands patrons du CAC 40, ont pris leur retraite ces derniers mois. Ils ont cédé les rênes de leur entreprise en 2021 ou 2022 ainsi que la direction opérationnelle de leur groupe tout en restant, au moins provisoirement, présidents des conseils administration. Ces néo-retraités ont eu la liberté de choisir le moment et les conditions de leur départ, ainsi que le nom de leur successeur.
En parallèle, la présente réforme maintiendra des milliers de personnes dans le sas de précarité, sans emploi ni retraite. La Drees relevait en 2020 que le taux de pauvreté des personnes ni en emploi ni en retraite de 53 ans à 69 ans était de 32 %. De plus, en 2018, le taux de pauvreté des personnes de 65 ans ou plus, hors personnes vivant en institution, était de 8,6 %, soit plus de 1 million de personnes. Cette réforme aggravera ces inégalités, il faut la retirer !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Les dispositions de cet alinéa sont très intéressantes : la prise en compte du temps de travail acquis lors d’une titularisation constitue une avancée sociale tout à fait significative. Pourquoi vouloir la supprimer, monsieur Dossus ?
La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 3615, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon, est ainsi libellé :
Alinéa 179
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Mieux vaudrait retirer cet amendement.
M. le président. Madame Poncet Monge, l’amendement n° 3615 est-il maintenu ?
Mme Raymonde Poncet Monge. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 3615 est retiré.
L’amendement n° 3617, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon, est ainsi libellé :
Alinéa 181
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Mélanie Vogel.
Mme Mélanie Vogel. Nous en arrivons à la fin de l’examen de l’article 7. Je voudrais en profiter pour rappeler quelques informations.
Selon le rapport sur les objectifs et les effets du projet de réforme des retraites remis par le Gouvernement, le déficit serait de 12 milliards d’euros en 2027 et de 13,5 milliards d’euros en 2030. La fatalité présumée de ce déficit, dont le COR estime qu’il ne provient pas d’une dérive des dépenses, conduit les autorités à prescrire un report de l’âge d’ouverture des droits à la retraite à 64 ans et une accélération du calendrier d’application de la réforme Touraine. Pourtant, selon le COR lui-même, le problème du système de retraite provient de l’insuffisance de la trajectoire des ressources.
Un ensemble de mesures plus justes, moins brutales, ont été présentées pour financer différemment notre système : augmentation du nombre de fonctionnaires, des cotisations… Selon le COR, une hausse de 0,8 point de cotisations d’ici à 2027 suffirait à elle seule à combler le déficit attendu. Un tel effort représenterait 28 euros par mois pour le salaire moyen, sachant que celui-ci, toujours selon le COR, devrait augmenter de 128 euros d’ici à 2027. L’augmentation du taux de cotisation salariale est donc possible sans répercussions sur le pouvoir d’achat.
On peut aussi augmenter les salaires, ce qui fait automatiquement croître les cotisations sociales. On peut en finir avec les politiques d’exonération, inutiles et inefficaces. On peut aussi revoir le calendrier de remboursement de la Caisse d’amortissement de la dette sociale (Cades).
Vous avez refusé, messieurs les ministres, l’intégralité de ces mesures. Ce sont pourtant les seules qui permettraient de financer notre système de retraite de façon juste, efficace, sans faire trimer les plus précaires deux ans de plus.
Vous me répondrez sans doute que cela n’a rien à voir avec l’alinéa que cet amendement vise à supprimer. Ce n’est pas tout à fait juste, puisque ce même alinéa précise la date d’application du dispositif de l’article 7 et que nous souhaitons qu’il ne s’applique jamais ! (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Vous souhaitez décaler l’entrée en vigueur de cette réforme, qui n’aura plus d’effet en 2023.
M. David Assouline. Elle n’a presque aucune conséquence sur 2023 !
M. René-Paul Savary, rapporteur. En conséquence, ce projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale serait anticonstitutionnel. Vous avez retrouvé votre finesse d’esprit en proposant un amendement auquel la commission ne peut qu’être défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. J’informe le Sénat que l’amendement n° 2344 rectifié, déposé par notre collègue Jean-Marie Vanlerenberghe, a été retiré. (Exclamations sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.) En conséquence, les sous-amendements nos 4776 à 4865 tombent. (Exclamations sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
Nous allons donc passer au vote sur l’article 7.
Je vous indique d’ores et déjà que j’ai été saisi d’une demande de scrutin public par le groupe CRCE.
En application de l’article 42, alinéa 10, de notre règlement et conformément à la décision de la conférence des présidents lors de sa réunion de ce mercredi 8 mars, je vous rappelle que les prises de parole et explications de vote sur chaque article de ce projet de loi sont limitées à un seul orateur par groupe politique et à un seul sénateur ne figurant sur la liste d’aucun groupe, pour une durée de deux minutes.
La parole est à Mme Éliane Assassi, pour explication de vote sur l’article.
Mme Éliane Assassi. La droite sénatoriale, c’est-à-dire la majorité, avec la complicité du Gouvernement a donc, comme je l’ai dit hier soir, perdu son sang-froid sur cet article 7. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Rémy Pointereau. Mais non !
Mme Éliane Assassi. En somme, vous ne supportez plus l’exercice pleinement constitutionnel du droit d’amendement, de sous-amendement et d’expression des parlementaires.
Pour sa part, la droite sénatoriale, menée par M. Retailleau, nouveau ministre chargé des relations avec le Parlement, par Mme la présidente de la commission des affaires sociales et par les rapporteurs, a violé le règlement du Sénat en déclarant irrecevables des amendements qui étaient pourtant pleinement en lien avec cet article. (Protestations sur les travées des groupes Les Républicains et UC. – Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST.) Toutes les procédures possibles et imaginables ont été dégainées par plusieurs présidents de groupe favorables à cet article. Je le répète : c’est la démonstration d’un coup de force.
Monsieur le président, vous vous êtes assis sur votre propre règlement. La prétendue sagesse du Sénat en a pris un coup. Une ligne rouge a été franchie, ce qui porte gravement atteinte au principe constitutionnel de clarté et de sincérité des débats.
Chers collègues de la droite sénatoriale, votre objectif est de censurer l’opposition à ce projet de relèvement de l’âge de départ à la retraite à 64 ans, au cœur de l’article 7. Vous avez agi de la sorte le soir même d’une magnifique mobilisation du peuple, qui ne veut pas subir deux années de travail supplémentaires. Avec le Gouvernement, vous tentez d’imposer le dogme libéral, celui qui vise à prendre toujours plus aux plus pauvres pour donner toujours plus aux plus riches.
Avec vos procédures, vous avez empêché la discussion de nos propositions, celles qui visent à renforcer la participation des revenus des plus aisés et de la finance au régime de retraite. Vous n’avez pas voulu, protégeant actionnaires et patronat, de ce débat essentiel sur le partage des richesses. Vous bâclez le débat pour dissimuler la vérité à nos concitoyens, notamment à vos propres électeurs, également mobilisés contre ce projet, à votre grand dam.
Plusieurs voix sur les travées du groupe Les Républicains. Le temps de parole est fini !
M. le président. Il faut conclure.
Mme Éliane Assassi. Monsieur le président, nous voterons bien évidemment contre l’article 7 issu de l’accord scellé entre le Gouvernement et la majorité de droite sénatoriale. (Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST.)
M. le président. La parole est à M. Olivier Henno, pour explication de vote sur l’article. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Olivier Henno. Monsieur le président, messieurs les ministres, majoritairement, sans surprise, nous voterons en faveur de cet article 7.
Comme les rapporteurs tout au long de ce débat l’ont démontré, en votant cet article nous avons la conviction que nous allons sauver le système de retraite par répartition et lui donner un avenir. (Exclamations sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST.) Oui, mes chers collègues, c’est bien cela que nous faisons ! (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)
Nous voterons en faveur de cet article 7, par ce que nous pensons, et c’est un clivage avec la gauche, que nous avons la responsabilité d’aller au bout de l’examen de ce projet de loi au nom du système par répartition, mais aussi, pour répondre à Mme Assassi, au nom de l’image et de la crédibilité tant du Sénat que de la démocratie représentative. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.) Que deviendrait en effet la démocratie représentative si ni l’Assemblée ni le Sénat ne se prononçaient sur un texte aussi essentiel ? (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)
Pour en revenir aux arguments développés, chers collègues des travées de gauche, vous avez travaillé : si cela dépendait de la quantité de salive et d’encre, il faudrait décerner le maillot jaune à Mme Poncet Monge ! (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
Mme Éliane Assassi. Pas de mépris !
M. Olivier Henno. Nous avons tout entendu ! « Deux ans ferme » ? Comme si le travail était une prison ! Quelle triste vision de la société ! (M. Thomas Dossus s’exclame.)
Mme Éliane Assassi. Vous ne la récusez pas !
Mme Cathy Apourceau-Poly. Et la clause du grand-père ?
M. Olivier Henno. « Deux ans volés » ? Voyez-vous, je n’arrive pas à imaginer, notamment de la part de ceux qui ont voté en faveur de la réforme Touraine, que vos arguments aient été très sincères.
Vous découvrez que le système de retraite est parfois injuste ! Pourquoi ne l’avez-vous pas découvert au moment où vous examiniez la réforme Touraine ? (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)
Mme Cathy Apourceau-Poly. Nous ne l’avons pas votée !
M. Olivier Henno. Je terminerai mon intervention par deux citations. Très franchement, ce sont vos intérêts électoraux que vous défendez ! Comme l’écrit Balzac, « l’hypocrisie est seulement un hommage à l’intérêt ». Pour notre part, plutôt que l’hypocrisie, nous choisissons la responsabilité, qui est, selon Churchill, « le prix à payer du succès ». (Vifs applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains. – M. Bernard Fialaire applaudit également. – Protestations sur les travées des groupes SER et CRCE.)
M. le président. La parole est à Mme Monique Lubin, pour explication de vote.
Mme Monique Lubin. Mes chers collègues, depuis quelques secondes, nous ne sommes plus le 8 mars ! L’histoire attachera à jamais votre nom, monsieur Dussopt, à une réforme qui nous fait revenir presque quarante ans en arrière. (Protestations sur les travées du groupe RDPI.) J’espère que, dans votre for intérieur, cela ne vous fait pas particulièrement plaisir.
Surtout, l’histoire retiendra que, en ce 8 mars 2023, vous aurez voté un projet de loi qui fera travailler plus longtemps les travailleurs les plus modestes, c’est-à-dire ceux qui travaillent déjà depuis longtemps, qui ont les salaires les plus bas et les emplois les plus difficiles. Parmi ces travailleurs se trouvent une grande majorité de femmes.
Non, nous ne sommes pas des irresponsables ! Le rapport du COR, nous le connaissons.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Exactement !
Mme Monique Lubin. Et nous sommes même quelques-uns à le connaître bien mieux que vous tous ici rassemblés ! (Protestations sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
À ce jour, il n’y a pas de déficit. Certes, certaines projections mettent en avant un éventuel déficit de 13 milliards d’euros, sur 360 milliards d’euros de retraite payés tous les ans.
Nous disons qu’il faut s’intéresser à l’avenir de nos retraites. À ce titre, nous avons évoqué de nombreuses solutions. L’histoire retiendra que vous préférez faire payer les ouvriers, les salariés, les gens les plus modestes de ce pays. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, GEST et CRCE.)
M. le président. La parole est à M. Martin Lévrier, pour explication de vote. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. Martin Lévrier. Le constat du COR est clair : notre système de retraite enregistre un déficit structurel, ce qui, sur le long terme, est terriblement dangereux pour la protection des retraités.
Certes, par l’article 7, il est demandé un effort aux Français, il n’est pas question de le nier !
Plusieurs voix à gauche. Aux plus pauvres !
M. Martin Lévrier. Cet effort est indispensable, en particulier pour les jeunes. Je suis d’ailleurs très étonné que, dans cet hémicycle, nous n’ayons quasiment jamais évoqué la jeunesse… (Exclamations sur les travées du groupe SER.) Pourquoi ressent-on sur les travées du groupe socialiste ce besoin systématique de parler quand les autres ont la parole ? C’est assez pénible !
Pour ma part, je veux parler à notre jeunesse, et lui dire que, au travers de l’effort demandé à tous, nous œuvrons pour elle, pour que, dans trente ans, elle s’aperçoive que le système de retraite par répartition fonctionne, qu’il est fort et qu’il protège.
Je me réjouis que ce vote ait permis un débat. Surtout, il nous permettra de poursuivre le travail parlementaire sur les articles restant en discussion… (Marques d’ironie sur les travées des groupes SER et CRCE. – M. Martin Lévrier s’en agace.)
Ces articles protègent, je le redis, en particulier les plus fragiles.
Enfin, je rappelle que nous sommes le Parlement, que nous représentons les Français et qu’il est de notre devoir de voter l’ensemble de ce texte. Nous sommes attendus sur ce sujet et nous devons être à la hauteur. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et UC.)
Mme Cathy Apourceau-Poly. Ça, vous êtes attendus !
M. le président. La parole est à M. Bruno Retailleau, pour explication de vote. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. David Assouline. Monsieur article 38 !
M. Bruno Retailleau. Je formulerai trois remarques.
Premièrement, vous apportez ce soir la preuve d’une nouvelle démarche d’obstruction. En effet, les 90 sous-amendements de Mme Lubin visant à décaler d’une journée la remise d’un rapport, n’est-ce pas de l’obstruction ? (L’orateur brandit une liasse d’amendements. – Mme Marie-Pierre de La Gontrie l’imite en le caricaturant.)
Vous êtes en train de vous « mélenchoniser » ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.) Nous n’accepterons jamais que vous « mélenchonisiez » le Sénat !
M. Jérôme Durain. C’est la droite qui se « macronise » !
M. Bruno Retailleau. L’obstruction n’est pas la démocratie parlementaire, c’est le Parlement qui se fait hara-kiri ! C’est un 49.3 à l’envers ! (Protestations sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST. – Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Deuxièmement, vous apportez également la preuve de votre hypocrisie, en nous donnant des leçons. Vous n’avez pas abrogé le décalage d’âge de 2010. Vous l’avez au contraire aggravé en votant la loi Touraine, qui prévoyait 43 annuités et qui conduit à un âge de départ à la retraite de 65 ans. Telle est la réalité qu’il faut dire aux Français !
M. Pascal Savoldelli. Les 65 ans, c’est Fillon ! Assumez-le, c’était une réforme de droite !
M. Bruno Retailleau. Nous nous apprêtons bien sûr à voter cet article 7, alors même que vous espériez que nous ne le pourrions pas. Nous le voterons parce qu’il permettra…
M. Pascal Savoldelli. Vous le voterez parce que vous êtes pour !
M. Bruno Retailleau. …. de sauver le régime de retraite par répartition. Il s’agit bien sûr d’un levier budgétaire. Ceux qui se moquent des chiffres se moquent des gens ! Derrière les chiffres, il y a les déficits ; derrière les déficits, il y a l’argent des Français ; et derrière l’argent des Français, il y a la peine des Français.
La limite d’âge est protectrice.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Toujours pour les riches !
M. Bruno Retailleau. Relisez la fameuse étude de la Cnav, qui formulait deux hypothèses. Dans la première, il s’agissait uniquement d’augmenter le nombre d’annuités, ce qui impliquait 300 euros de retraite en moins par an. Dans la seconde, il s’agissait d’un relèvement de la durée légale, ce qui impliquait un gain de 300 euros en moyenne.
M. le président. Il faut conclure.
M. Bruno Retailleau. Cette borne d’âge est protectrice. C’est un filet de sécurité, que nous voterons dès ce soir. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP. – MM. Bernard Fialaire et Martin Lévrier applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Je regrette que vous ne laissiez s’exprimer qu’une seule personne par groupe !
Nous n’avons pas évoqué les conséquences de la réforme sur les inégalités territoriales. Les manifestations ont aussi été exceptionnelles dans le monde rural, vous devriez le savoir.
Vous connaissez les effets de la réforme de 2010. Ils seront identiques, mais aggravés, pour la réforme que vous vous apprêtez à voter.
Le Gouvernement avait déclaré l’article 7 « non négociable ». Les syndicats voulaient que nous en discutions longuement. Hier, il nous restait cinq jours de discussion et vous avez sabré cet article. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.) Ne vous réclamez donc pas des syndicats !
Nous connaissons les effets de la réforme de 2010, qui a surtout figé les situations vécues à l’approche de la soixantaine, à la suite du fameux allongement de deux ans du sas de précarité. Pour les ouvriers, cela s’est traduit par une hausse de la précarité. Pour les femmes, la durée de la retraite a diminué d’un an et diminuera encore. En effet, il n’est pas possible d’allonger la durée du travail en justifiant une telle mesure sur l’allongement de la durée de vie. On ne travaille pas plus longtemps parce qu’on vit plus longtemps. Vous nous ferez travailler plus longtemps, alors que nous resterons moins longtemps à la retraite.
Cette réforme se traduit aussi par une augmentation des personnes touchant une pension minimale. Elle atténue l’effet redistributif de la retraite.
Les enseignements tirés de l’analyse de la réforme de 2010 nous apprennent que cette réforme est injustifiée, inégalitaire et productiviste. C’est la raison pour laquelle elle est impopulaire. Il ne suffira pas de la voter ! Le mouvement social continuera jusqu’à son retrait. (Applaudissements sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE. – Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 7, modifié.
J’ai été saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l’une, du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et, l’autre, du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 233 :
Nombre de votants | 345 |
Nombre de suffrages exprimés | 316 |
Pour l’adoption | 201 |
Contre | 115 |
Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – MM. Franck Menonville et Bernard Fialaire applaudissent également.)
Après l’article 7
M. le président. Je suis saisi de six amendements identiques.
L’amendement n° 136 rectifié quinquies est présenté par Mme Noël, MM. Burgoa et Joyandet, Mme Belrhiti, M. Frassa, Mme Drexler, M. Sido et Mme Bonfanti-Dossat.
L’amendement n° 226 rectifié bis est présenté par MM. J.M. Boyer, Duplomb, D. Laurent, Cuypers, Paccaud et J.P. Vogel, Mmes Demas et Petrus, MM. Pointereau et Pellevat, Mme Chain-Larché, M. Bouchet, Mme F. Gerbaud, M. Chatillon, Mme Lopez, M. Decool, Mme Thomas, MM. Wattebled, Genet, Rietmann et Perrin, Mmes Bellurot, Raimond-Pavero et Billon, M. Rojouan et Mme Renaud-Garabedian.
L’amendement n° 238 rectifié est présenté par M. Sol.
L’amendement n° 976 rectifié bis est présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Gold et Guérini, Mme Pantel et MM. Requier et Roux.
L’amendement n° 2317 rectifié quinquies est présenté par M. Kanner, Mme G. Jourda, MM. Montaugé, Bourgi, Fichet, Féraud, P. Joly, Tissot et Magner, Mmes Artigalas et Bonnefoy, MM. Devinaz et Durain, Mmes Carlotti et Van Heghe, M. Gillé, Mmes Préville, Briquet, S. Robert, M. Filleul, Féret et Blatrix Contat, MM. Marie, Lozach et Lurel, Mme Harribey, M. Pla, Mme Monier, M. M. Vallet, Mme Rossignol, MM. Temal, Jomier et Chantrel, Mmes Espagnac et Poumirol et MM. Cardon, Redon-Sarrazy, Jacquin et Sueur.
L’amendement n° 2336 rectifié sexies est présenté par M. Stanzione.
Ces six amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 556-10 du code général de la fonction publique, il est inséré un article L. 556-10-… ainsi rédigé :
« Art. L. 556-10-… – Les emplois de sapeurs-pompiers professionnels, y compris les emplois de directeur départemental, de directeur départemental adjoint et de sous-directeur des services d’incendie et de secours de tous grades, relèvent de la catégorie active.
« Tout fonctionnaire occupant ou ayant occupé un emploi de sapeur-pompier professionnel peut être admis à faire valoir ses droits à pension à partir de l’âge de cinquante-sept ans. »
La parole est à M. Laurent Burgoa, pour présenter l’amendement n° 136 rectifié quinquies.
M. Laurent Burgoa. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. Fabien Genet, pour présenter l’amendement n° 226 rectifié bis.
M. Fabien Genet. Il est défendu.
M. le président. Les amendements nos 238 rectifié et 976 rectifié bis ne sont pas défendus.
La parole est à M. Patrick Kanner, pour présenter l’amendement n° 2317 rectifié quinquies.
M. Patrick Kanner. Cet amendement concerne les directeurs départementaux, qui sont très précieux, vous le savez, au sein des sapeurs-pompiers professionnels. Ils dirigent les corps des sapeurs-pompiers, sur les plans technique, administratif et opérationnel. Ce sont aussi les partenaires privilégiés des préfets, qui sont, de fait, leur patron.
Cet amendement vise à ce que nos combattants du feu, quel que soit l’emploi qu’ils occupent, puissent être classés en catégorie active, car le caractère dangereux de ce métier et des missions qui sont assignées à ces agents publics est reconnu par la sécurité civile.
Vous le savez, les pompiers, partenaires de cette sécurité civile, font face à de nouveaux enjeux, y compris celui du réchauffement climatique. Je voudrais de nouveau, comme nous l’avons fait à plusieurs reprises cet été, saluer leur extraordinaire engagement, notamment dans le cadre des feux de Gironde.
En la matière, nous avons besoin de recrutements, en suscitant des vocations, grâce à une fidélisation. Ce régime favorable est justifié pour prendre en compte la pénibilité au vu des horaires décalés, des contraintes physiques inhérentes à la profession des sapeurs-pompiers, quel que soit le métier exercé au sein de ce corps.
M. le président. La parole est à M. Lucien Stanzione, pour présenter l’amendement n° 2336 rectifié sexies.
M. Lucien Stanzione. L’ensemble des sapeurs-pompiers professionnels attend de nous l’écriture d’une nouvelle page.
Le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale constitue une belle occasion de reconnaître et de valoriser l’engagement des sapeurs-pompiers professionnels, dont nous connaissons l’importance fondamentale dans nos territoires.
Ces hommes et ces femmes donnent de leur temps et parfois leur vie pour porter secours à nos concitoyens. Ils peuvent aussi subir une incapacité permanente, à la suite d’accidents dus au travail ou de maladies professionnelles.
L’article que nous venons de voter les contraindra à travailler beaucoup plus longtemps. Mais dans quel but ? Pour sauver notre système de retraite ! Encore faudrait-il qu’il soit en danger ! C’est la raison pour laquelle nous vous demandons de revenir sur une telle décision.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Il est proposé de maintenir à 57 ans l’âge d’ouverture des droits applicables aux sapeurs-pompiers professionnels. Or le texte vise à reporter cet âge à 59 ans, comme les autres catégories.
Il est important, nous semble-t-il, de maintenir un écart de cinq ans par rapport à l’âge de droit commun, en vertu d’une juste répartition de l’effort.
La commission juge nécessaire que chacun contribue à l’effort de redressement de la trajectoire financière de notre système de retraite. En revanche, je le rappelle, la durée de service effective requise pour bénéficier de ce type de départ anticipé reste bien toujours fixée à dix-sept ans.
La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle se verra contrainte d’émettre un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 136 rectifié quinquies, 226 rectifié bis, 2317 rectifié quinquies et 2336 rectifié sexies.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 234 :
Nombre de votants | 345 |
Nombre de suffrages exprimés | 341 |
Pour l’adoption | 103 |
Contre | 238 |
Le Sénat n’a pas adopté.
L’amendement n° 4409 rectifié bis, présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli, est ainsi libellé :
Après l’article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 161-23-1 du code la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« Art. L. 161-23-1. - Les pensions de vieillesse servies par le régime général et les régimes alignés sur lui sont revalorisées, au 31 décembre, en fonction de l’évolution de la moyenne annuelle des salaires. »
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Cet amendement vise à revaloriser les pensions de retraite, en fonction de l’évolution du salaire moyen, afin de garantir dans le temps le taux de remplacement à 75 % des derniers salaires.
Les projections du COR montrent que les pensions des retraites décrocheront par rapport aux revenus des actifs dans les prochaines années, en raison de l’indexation des retraites sur les prix, moins favorable que celle sur les salaires.
Vous le savez, mes chers collègues, la perte du pouvoir d’achat est le premier sujet de préoccupation des Françaises et des Français. En un an, les produits alimentaires ont augmenté de 15 % environ et, après les négociations entre les grandes surfaces et leurs fournisseurs, ils devraient encore augmenter de 10 % environ.
Une telle mesure relève donc à nos yeux de la justice sociale. Elle fait d’ailleurs partie d’une proposition de loi que le groupe communiste républicain citoyen et écologiste a déposée voilà un an, qui tendait à mettre en place cinquante mesures pour un véritable bouclier social.
M. le président. Le sous-amendement n° 4874, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Amendement n° 4409, alinéa 4
Remplacer la date :
31 décembre
par la date :
1er septembre
La parole est à Mme Monique Lubin.
Mme Monique Lubin. Nous le savons, l’une des mesures ayant fortement contribué à faire baisser ou, du moins, à interdire une certaine évolution des pensions de retraite est l’indexation de celles-ci sur les prix et non plus sur les salaires.
L’amendement de nos collègues du groupe CRCE tend à revaloriser chaque année les pensions de retraite en fonction de l’évolution du salaire moyen. Par ce sous-amendement, nous jouons sur les dates. En effet, pour le pouvoir d’achat des Français, des retraités et des futurs retraités, il s’agit d’une mesure importante.
M. le président. Le sous-amendement n° 4873, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Amendement n° 4409, alinéa 4
Remplacer la date :
31 décembre
par la date :
15 septembre
La parole est à M. Yan Chantrel.
M. Yan Chantrel. Nous venons de voter l’article 7, à la fin de la journée du 8 mars. Bien que vous n’aimiez pas, en général, les témoignages, qui vous mettent très mal à l’aise en vous renvoyant la brutalité de votre réforme en pleine face, je m’apprête à vous en transmettre plusieurs.
Michèle, gouvernante dans l’hôtellerie, témoigne ainsi : « À force de tenir le balai la journée, j’ai des fourmis dans les mains la nuit. Ce métier est pénible, et on n’arrive même pas à tenir jusqu’à 60 ans, alors 64 ans ! »
Mado, femme de ménage, affirme quant à elle : « Mes genoux me font trop mal. Si j’essaie de me baisser, je n’y arrive pas non plus. On est dans l’ombre, mais on est partout. Si vous allez à l’hôtel et que vous dormez dans un lit bien fait, c’est grâce à nous. Si votre bureau est propre quand vous arrivez le matin, c’est grâce à nous. Mais personne ne nous voit. »
Ingrid, conductrice de RER, regrette : « On a l’impression que le Gouvernement se fiche de ces manifestations. Ils s’en foutent de nous, ils sont dans un autre monde. »
Je vous le confirme, ce soir, vous êtes dans un autre monde. Pendant des jours et des jours, des semaines et des semaines, des gens ont manifesté, mais vous ne les entendez pas. Vous êtes sur votre planète. Vous n’entendez pas la majorité des Français ni celle de votre propre électorat, qui vous fera payer très cher, je l’espère, lors des prochaines élections, cette réforme injuste. Car toute injustice se paie tôt ou tard. L’article 7, vous le paierez au comptant, car vous allez brutaliser des vies, ce qui est inacceptable.
Je le rappelle, vous avez déjà brutalisé le Parlement la nuit dernière ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – Mme Laurence Cohen applaudit également.)
M. le président. Le sous-amendement n° 4867, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Amendement n° 4409, alinéa 4
Remplacer la date :
31 décembre
par la date :
1er octobre
La parole est à M. Jérôme Durain.
M. Jérôme Durain. Nos collègues communistes ont le souci de garantir dans le temps le taux de remplacement à 75 % des derniers salaires, afin d’éviter tout décrochage. On connaît la sensibilité de nos compatriotes à l’inflation et les difficultés qu’un grand nombre d’entre eux rencontrent dans une période d’explosion des prix.
Dans l’état actuel des choses, un certain nombre d’entre eux sont promis à une inéluctable érosion de leur pension de retraite et, partant, de leur niveau de vie.
Ce sous-amendement, qui vise à soutenir l’amendement du groupe CRCE, tend à ajuster la date de prise d’effet de la revalorisation, pour garantir ce taux de remplacement.
M. le président. Le sous-amendement n° 4870, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Amendement n° 4409, alinéa 4
Remplacer la date :
31 décembre
par la date :
15 octobre
La parole est à M. Jean-Michel Houllegatte.
M. Jean-Michel Houllegatte. Vous connaissez la méthode « éviter, réduire, compenser ». Nous n’avons pas pu éviter le vote de l’article 7. Par ailleurs, et c’est dommage, nous n’avons pas eu l’occasion de discuter de l’amendement de M. Jean-Marie Vanlerenberghe, qui est extrêmement intéressant.
En effet, situation peu commune, quelqu’un qui soutient la majorité présidentielle proposait un rapport qui avait pour objet de revoir l’évolution des paramètres pour assurer l’équilibre financier, parce qu’il y a un doute sur l’équilibre financier de la réforme, telle qu’elle est proposée à l’heure actuelle.
Point extrêmement cocasse, il proposait, alors même que l’argument avancé est la volonté de sauver le régime de retraite par répartition, que les conditions et voies d’évolution de notre système de retraite vers un régime universel par points soient envisagées.
Il s’agissait donc de revenir à la case départ d’il y a quelques mois. Par ailleurs, cet amendement tendait à assurer l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.
Une demande de précisions et de rapport signifie bien qu’il existe un doute sur ces sujets.
Puisque nous n’avons pu éviter le vote de l’article 7, nous nous employons désormais à en réduire les conséquences, en introduisant des garanties. À cet égard, l’amendement de nos collègues du CRCE vise à garantir que le taux de remplacement sera équivalent à 75 % des derniers salaires, ce qui me paraît extrêmement juste.
Nos sous-amendements visent tout simplement à modifier la date de prise d’effet d’une telle mesure. Ce faisant, nous nous efforçons de réduire les répercussions de cette réforme néfaste. Ensuite, nous essaierons de voir comment on peut la compenser. (M. David Assouline et Mme Cathy Apourceau-Poly applaudissent.)
M. le président. Le sous-amendement n° 4868, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Amendement n° 4409, alinéa 4
Remplacer la date :
31 décembre
par la date :
1er novembre
La parole est à M. Rémi Féraud.
M. Rémi Féraud. Ce sous-amendement vise à soutenir l’amendement présenté par notre collègue Éliane Assassi, dont l’objet est de rendre votre réforme un peu moins désespérante pour les Français.
Les cadeaux fiscaux faits depuis 2017 aux détenteurs du capital et aux grandes entreprises devaient entraîner un effet de ruissellement qui profiterait aux Français.
Conclusion : six ans après, vous leur demandez un impôt sur la vie de deux ans, pour rembourser l’ensemble des efforts qui ont été faits au bénéfice de ceux qui n’en avaient pas besoin.
Cet amendement vise à éviter une double peine : qu’il n’y ait pas à la fois une mesure d’âge désespérante et un niveau de pension insuffisant. Puisque vous avez voté l’article 7 tendant à repousser l’âge de la retraite, garantissez au moins un meilleur niveau de retraite à chacun ! Il me semblait que c’était justement pour cette raison que vous vouliez voter l’article 7. Prouvez-le maintenant !
M. le président. Le sous-amendement n° 4871, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Amendement n° 4409, alinéa 4
Remplacer la date :
31 décembre
par la date :
15 novembre
La parole est à M. Patrick Kanner.
M. Patrick Kanner. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Le sous-amendement n° 4869, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Amendement n° 4409, alinéa 4
Remplacer la date :
31 décembre
par la date :
1er décembre
La parole est à M. Jean-Yves Leconte.
M. Jean-Yves Leconte. Dans les années 1980, les personnes de plus de 65 ans n’étaient plus celles qui étaient le plus sous le seuil de pauvreté, et ce grâce à notre système de retraite, qui avait pris sa pleine puissance. En effet, elles étaient les premières à avoir cotisé complètement, dans le cadre d’un nouveau système.
Le rapport du COR montre que, dans les prochaines années, la part des pensions dans le PIB baissera. Cela signifie qu’il n’existe pas de problème de financement. Pourtant, nous voyons émerger progressivement un problème de pouvoir d’achat des retraités. Telle est la préoccupation du groupe communiste, qui est aussi la nôtre.
À partir du moment où, monsieur le ministre, mesdames, messieurs les membres de la majorité sénatoriale, vous avez adopté des exigences plus grandes, qui actent un recul de l’âge de la retraite, désormais difficile à atteindre pour nombre de personnes, les pensions baisseront. C’est la raison pour laquelle nous tirons la sonnette d’alarme, en demandant un rapport pour permettre de trouver une solution et d’indexer les pensions sur l’évolution du pouvoir d’achat.
M. le président. Le sous-amendement n° 4872, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Amendement n° 4409, alinéa 4
Remplacer la date :
31 décembre
par la date :
15 décembre
La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Je profite de cette intervention pour répondre aux propos de M. Bruno Retailleau, « monsieur article 38 », qui ne reflétaient pas la vérité.
M. Bruno Retailleau. Merci, « monsieur obstruction » !
M. David Assouline. Si vous voulez ! Je suis touché au cœur !
M. Max Brisson. Ce n’est pas vrai ! Il n’en a pas !
M. David Assouline. M. Bruno Retailleau prétend que nous faisons de l’obstruction. Permettez-moi de rétablir la vérité. Depuis le début, nous voulons, à l’inverse de ce qui s’est passé à l’Assemblée nationale, discuter de l’article 7, afin qu’il puisse faire l’objet d’un vote, afin que les Français sachent qui vote quoi et qui est pour la retraite à 64 ans. Personne ne doit pouvoir se cacher de sa responsabilité devant nos concitoyens.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Cela fait quatre ans qu’on ne se cache pas !
M. David Assouline. Nous voulions donc discuter de l’article 7, parce que ce débat n’a pas eu lieu à l’Assemblée nationale.
Et c’est précisément au moment de tenir ce débat que vous avez utilisé tous les artifices et tous les coups brutaux disponibles pour empêcher qu’il soit serein.
Cela aurait pu être un très beau débat, car cet article concentre toute la réforme ! Nous aurions pu vous expliquer pourquoi 3,5 millions de Français, hier, ont dit non, malgré toute votre propagande ; nous aurions même peut-être pu vous convaincre… (MM. Max Brisson et Michel Canévet s’exclament.)
Vous avez dit que cette réforme était pour les jeunes ? Mais les jeunes, les moins de 35 ans, très majoritairement, pour plus de deux tiers d’entre eux, vous disent non ! Vous dites que vous agissez pour l’avenir ? Ceux qui aujourd’hui travaillent, qui sont l’avenir de notre pays et qui le font vivre disent, pour deux tiers d’entre eux au moins, qu’ils sont contre cette réforme ! (Brouhaha sur des travées des groupes Les Républicains, UC et RDPI.)
MM. Jean-François Husson et Martin Lévrier. Le temps de parole est écoulé !
M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue.
M. David Assouline. La seule tranche d’âge qui y est favorable, c’est celle des plus de 65 ans, qui n’est pas touchée par la réforme !
M. le président. Le sous-amendement n° 4866, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Amendement n° 4409, alinéa 4
Remplacer la date :
31 décembre
par la date :
1er janvier
La parole est à M. Éric Kerrouche.
M. Éric Kerrouche. Nous aurions pu continuer le jeu des sous-amendements pendant très longtemps (Exclamations ironiques sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. Philippe Mouiller et plusieurs de ses collègues du groupe Les Républicains. C’est donc un jeu ?
M. Éric Kerrouche. Oui, voilà exactement ce que c’est : un jeu. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
J’espère que le temps de cette interruption me sera décompté, monsieur le président.
M. le président. Vous aurez les arrêts de jeu, monsieur Kerrouche ! (Sourires.)
M. Éric Kerrouche. Et j’espère que je ne finirai pas comme le PSG…
M. Martin Lévrier. Même les arrêts de jeu n’auraient rien pu faire pour le PSG…
M. Éric Kerrouche. En l’espèce, que s’est-il passé ? Nous voulions simplement dénoncer le coup de force parlementaire que vous avez perpétré hier soir en faisant tomber des milliers d’amendements, qui concernaient la vie quotidienne des Français. (Exclamations sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
Nous voulions vous montrer, par le biais de ces sous-amendements – comme par le biais de ceux que nous avions déposés sur celui de M. Vanlerenberghe –, que nous pouvions faire comme vous et nous jeter dans la procédure pour ne jamais traiter du fond.
M. Max Brisson. C’est vous qui avez commencé !
M. Éric Kerrouche. Ces sous-amendements n’avaient pas vocation à être défendus, mais ils montrent le ridicule de la situation dans laquelle vous nous avez mis. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE.)
J’ai entendu le président Retailleau nous dire que nous nous radicalisions.
M. Jean-François Husson. Mélenchonite aiguë !
Mme Dominique Estrosi Sassone. Vous vous mélenchonisez !
M. Éric Kerrouche. Mes chers collègues, il ne restera qu’une seule image de cette soirée : vous, qui vous êtes radicalisés contre les Françaises et les Français ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE. – Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Max Brisson. Ridicule !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Vous vous doutez bien, monsieur le président, qu’il promet d’être très favorable, compte tenu des propos que nous venons d’entendre…
J’en reviens à la réalité, car le sujet est sérieux.
M. Éric Kerrouche. Il ne l’était pas avant ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Il est proposé de revaloriser les pensions en les indexant sur les salaires.
Depuis la réforme de 1993, les pensions sont indexées sur l’inflation. Cette décision avait été prise à l’époque pour répondre à des problèmes d’équilibre. Et voilà, mes chers collègues, que vous proposez de revenir à ce qui a causé le déséquilibre… Il aurait fallu consacrer 4,8 points de PIB supplémentaires aux retraites ! Mais comment financez-vous ce dispositif ? Par des cotisations supplémentaires ? Ou peut-être en demandant aux Français de travailler davantage ? C’est bien dans cette direction que nous vous proposons d’aller,…
Mme Cathy Apourceau-Poly. La taxation des superprofits !
M. René-Paul Savary, rapporteur. … pour un plus juste équilibre.
C’est la raison pour laquelle il ne faut pas revenir à cette indexation sur les salaires.
En revanche, il faut être attentif : les revalorisations des pensions sont indexées sur l’inflation ; encore faut-il qu’à chaque loi de finances cette indexation soit respectée et qu’il n’y ait pas de sous-indexation, comme on en a connu, monsieur le ministre, voilà quelques années. Cela nous paraît tout à fait important pour le pouvoir d’achat des retraités.
J’en viens aux sous-amendements.
Il s’agit de proposer des dates, toutes plus fantaisistes les unes que les autres, pour la revalorisation des pensions : 1er septembre, 15 septembre, 1er octobre, 15 octobre, et ainsi de suite. Vous auriez peut-être pu fixer aussi des horaires, mes chers collègues !
M. Éric Kerrouche. C’est une bonne idée !
M. René-Paul Savary, rapporteur. Je suis désolé de vous le dire, mais ce faisant vous vous moquez des retraités qui attendent leur pension. La date de revalorisation, c’est tout à fait important pour eux !
Bien entendu, on ne saurait suspecter ces sous-amendements d’être des sous-amendements d’obstruction… (Sourires ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Max Brisson. Surtout pas…
M. René-Paul Savary, rapporteur. Loin de moi l’idée qu’il s’agirait pour nos collègues de se moquer des retraités : leur seul but, vraisemblablement, consiste à se ridiculiser eux-mêmes.
J’émets donc un avis défavorable sur l’ensemble de ces sous-amendements comme sur l’amendement auquel ils s’appliquent ; je précise que c’est là un avis strictement personnel, puisque la commission n’a pas eu l’occasion de se réunir pour examiner ces précieuses propositions. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-Marc Todeschini. Elle aurait dû se réunir !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre. Monsieur le rapporteur vient de le dire, l’indexation des pensions de retraite remonte à 1993 et a toujours été maintenue depuis lors, sauf dans des périodes dites de « désindexation ». Vous l’avez souligné, il a pu arriver que l’indexation soit atténuée par rapport au rythme de l’inflation ou que les dates d’indexation soient modifiées. Je pense notamment aux années 2014-2015 : dix-huit mois, et non douze, s’écoulèrent alors entre deux indexations.
Toutes les prestations sociales, allocations ou minima, sont indexées sur l’inflation. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement souhaite maintenir l’indexation sur l’inflation des pensions de retraite.
Je souhaite apporter une précision : dans un certain nombre de sous-amendements tels qu’ils sont rédigés – je n’ai pu assister à la présentation orale de l’ensemble de ceux qui sont en discussion, je vous prie de m’en excuser – se trouve exprimée une inquiétude relative à la pension minimale à 85 % du Smic pour une carrière complète rémunérée au niveau du Smic.
Voilà ce que nous allons proposer dans les articles suivants du projet de loi : le minimum contributif, qui nous permet d’atteindre cet objectif de 85 % du Smic pour une carrière complète au niveau du Smic, sera indexé sur le Smic. Cette indexation permettra à tout assuré éligible à la pension minimale demandant la liquidation de sa pension via le dépôt de son dossier de demande de retraite d’avoir la garantie que sa première pension sera égale à 85 % du montant du Smic au mois de la demande.
Une fois cette pension fixée, elle intégrera le régime de toutes les pensions de retraite, c’est-à-dire qu’elle sera indexée sur l’inflation.
Pour toutes ces raisons, l’avis du Gouvernement est défavorable sur l’amendement n° 4409 rectifié bis et sur l’ensemble des sous-amendements qui s’y rapportent.
M. le président. La parole est à M. Éric Kerrouche, pour explication de vote.
M. Éric Kerrouche. Monsieur le rapporteur, vous nous avez dit que nous nous étions ridiculisés. C’est votre avis.
Mon avis, ce soir, est que vous vous êtes déshonorés. (Exclamations sur les travées des groupes Les Républicains, UC et RDPI.)
M. Max Brisson. Les grands mots ! Quel cinéma !
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.
M. Fabien Gay. Nous avons passé l’article 7, monsieur le rapporteur…
M. François Bonhomme. Déjà ? (Sourires.)
M. Fabien Gay. Il est temps de revenir à un débat serein. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
La provocation que nous voyons fleurir depuis une heure est inutile.
M. Philippe Mouiller. Des deux côtés !
M. Fabien Gay. J’ai trouvé notamment que le débat qui vient d’avoir lieu allait presque trop loin : il faut que tout le monde se respecte. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. Jean-Pierre Moga. Bravo !
M. Fabien Gay. Que vous nous disiez que nos amendements sont farfelus ou complètement loufoques quand la commission ne s’est même pas réunie pour les étudier,…
M. Max Brisson. Et c’est reparti…
M. Fabien Gay. … je trouve aussi que c’est aller trop loin.
Depuis hier, vous nous dites, en substance : « vous vous fichez des retraités », « vous voulez fabriquer des retraités pauvres ».
M. Max Brisson. Jamais nous n’avons prononcé ces mots !
M. Fabien Gay. Tels sont vos mots depuis hier ! Vous l’avez dit à plusieurs reprises !
Cela fait cinq ans que je suis parlementaire. Dans l’intervalle, tous les groupes de gauche vous ont proposé, à maintes reprises, d’augmenter les salaires et les pensions de retraite ; je vous invite donc à un peu d’humilité ! Vous dites que nous voulons fabriquer des retraités pauvres ? Vous fabriquez, vous, des travailleuses et des travailleurs pauvres à la chaîne !
Je demande donc que nous reprenions le cours d’un débat serein et que la commission se réunisse pour étudier les amendements et sous-amendements, en sorte que ce ne soit plus votre avis personnel que vous émettiez, monsieur le rapporteur, mais bien celui de la commission.
L’article 7 a certes été adopté, mais le projet de loi, quant à lui, est loin d’être adopté… Il reste treize articles et nous avons encore des propositions à faire valoir !
M. Jean-François Husson. Nous aussi !
M. Fabien Gay. Et nous allons continuer à débattre. Nous restons déterminés à faire échec à ce projet ! Il y a une mobilisation samedi prochain : nous continuons ! (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST.)
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 4874.
(Le sous-amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 4873.
(Le sous-amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 4867.
(Le sous-amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 4870.
(Le sous-amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 4868.
(Le sous-amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 4871.
(Le sous-amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 4869.
(Le sous-amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 4872.
(Le sous-amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 4866.
(Le sous-amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 4409 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Mes chers collègues, nous avons examiné 169 amendements au cours de la journée ; il en reste 1 087.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
10
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, jeudi 9 mars 2023 :
À dix heures trente, le soir et la nuit :
Suite du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023, dont le Sénat est saisi en application de l’article 47-1, alinéa 2, de la Constitution (texte n° 368, 2022-2023).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée le jeudi 9 mars 2023, à zéro heure quarante.)
nomination de membres d’une éventuelle commission mixte paritaire
La liste des candidats désignés par la commission des affaires sociales pour faire partie de l’éventuelle commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 a été publiée conformément à l’article 8 quater du règlement.
Aucune opposition ne s’étant manifestée dans le délai d’une heure prévu par l’article 8 quater du règlement, cette liste est ratifiée. Les représentants du Sénat à cette éventuelle commission mixte paritaire sont :
Titulaires : Mme Catherine Deroche, MM. René-Paul Savary, Philippe Mouiller, Mmes Élisabeth Doineau, Monique Lubin, Corinne Féret, M. Xavier Iacovelli ;
Suppléants : M. Alain Milon, Mmes Pascale Gruny, Chantal Deseyne, Sylvie Vermeillet, Raymonde Poncet Monge, M. Henri Cabanel, Mme Cathy Apourceau-Poly.
nomination de membres d’une commission mixte paritaire
La liste des candidats désignés par la commission des affaires économiques pour faire partie de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi tendant à renforcer l’équilibre dans les relations commerciales entre fournisseurs et distributeurs a été publiée conformément à l’article 8 quater du règlement.
Aucune opposition ne s’étant manifestée dans le délai d’une heure prévu par l’article 8 quater du règlement, cette liste est ratifiée. Les représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire sont :
Titulaires : Mme Sophie Primas, MM. Daniel Gremillet, Laurent Duplomb, Mme Anne-Catherine Loisier, MM. Serge Mérillou, Sebastien Pla, Jean-Baptiste Lemoyne ;
Suppléants : Mmes Anne Chain-Larché, Marie-Christine Chauvin, M. Olivier Rietmann, Mme Amel Gacquerre, MM. Franck Montaugé, Henri Cabanel, Fabien Gay.
Pour le Directeur des comptes rendus du Sénat,
le Chef de publication
FRANÇOIS WICKER