Mme le président. L’amendement n° 1595 n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour présenter l’amendement n° 1625.
Mme Émilienne Poumirol. Une nouvelle fois, le Gouvernement semble assimiler les régimes spéciaux à des privilèges et souhaite les supprimer, prétendument pour des raisons d’équité.
Comme mes collègues, je m’interroge : qu’est-ce qui justifie cette suppression ? Qui l’a décidée ? Comment ont été choisis les régimes spéciaux qui seront supprimés et ceux qui seront conservés ? Seuls cinq régimes spéciaux, représentant quelque 350 000 travailleurs au total, sont concernés par la réforme.
Il semble bien que la suppression du régime spécial du Cese serve à faire passer la disparition, que vous souhaitez, des régimes de la RATP et des IEG. Vous nous avez parlé d’équité, mais nous avons du mal à y voir clair. Quelle est votre logique ? Où est la cohérence ?
En réalité, cette suppression à la carte n’est qu’injustice. Elle traduit votre volonté de détruire les systèmes sociaux protecteurs.
Mes chers collègues, je vous propose donc, par cet amendement, de ne pas fermer le régime spécial du Cese.
Mme le président. L’amendement n° 1655 n’est pas soutenu.
La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour présenter l’amendement n° 1696.
M. Jean-Yves Leconte. Cette disposition dans ce projet de loi est assez étonnante, parce qu’elle concerne la troisième assemblée constitutionnelle de la République. Elle est assez étonnante également, puisque, à l’été 2020, nous avons voté une réforme du Conseil économique, social et environnemental destinée à faire de cette instance ainsi revue le carrefour des consultations citoyennes.
Après sa réélection, Emmanuel Macron a finalement décidé que la réforme faite en 2020 n’était plus importante et n’avait aucun sens, et il a lancé le Conseil national de la refondation. Il a prétendu faire de cette manière d’autres consultations citoyennes, en passant par-dessus les représentants de la société civile, membres du Conseil économique, social et environnemental.
On se demande donc pourquoi le Président de la République et le Gouvernement ont voulu cette réforme en août 2020, avant de finalement décider, deux ans plus tard, d’organiser autrement les consultations citoyennes, en passant outre les corps intermédiaires.
Comme Marie-Noëlle Lienemann l’a rappelé, il est étonnant que cette assemblée constitutionnelle ne soit pas consultée sur la fermeture de son régime de retraite.
La réforme de 2020 a figuré dans une loi organique. Aussi je m’interroge, comme notre collègue Victorin Lurel, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur : il serait assez étonnant que la fermeture du régime de retraite d’une assemblée de la République, que l’on ne peut par ailleurs réformer que par une loi organique, comme le régime de retraite des magistrats de l’ordre judiciaire, par exemple, puisse être effectuée dans un projet de loi de financement de la sécurité sociale !
Est-il possible d’inscrire une telle disposition dans un PLFRSS sans prendre un risque ?
Mme le président. Les amendements nos 1752, 1794, 1822 et 1849 ne sont pas soutenus.
La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour présenter l’amendement n° 1995.
Mme Laurence Rossignol. Je pense que nous devons aborder cette question avec sérieux et attention : moins la suppression en tant que telle du régime spécial du Cese que le fait que nous puissions mettre fin, à la demande du Gouvernement, au régime de retraite de l’une des trois assemblées constitutionnelles de ce pays – c’est cela le sujet ! –, sans consulter ses membres.
En fait, il y aurait des assemblées – l’Assemblée nationale et le Sénat – qui revendiqueraient la possibilité de faire évoluer elles-mêmes leur régime de retraite et une autre, le Cese, dont le régime, dans l’enthousiasme du Gouvernement à supprimer les régimes spéciaux, pourrait disparaître dans un projet de loi de financement de la sécurité sociale. Ce n’est pas une mince affaire, mes chers collègues !
Je rappelle que, dans le passé, le Cese a déjà procédé à un certain nombre de réformes de ses prestations. Nous savons tous qu’il y a un problème de financement de ce régime. Tout le monde a dû lire le rapport de la Cour des comptes, dont le Gouvernement a dû s’inspirer, avec gourmandise, j’imagine.
En 2013, le Cese a réduit par deux le niveau des pensions, augmenté les cotisations et pris un ensemble d’autres mesures pour assainir son régime. Il l’a fait lui-même !
Alors que, en 2013, cette assemblée parlementaire a été capable de prendre des mesures pour assainir son régime, une intervention du Gouvernement serait nécessaire en 2023 pour assainir sa situation et mettre fin à son régime ?
Mes chers collègues, réfléchissez bien à ce que vous êtes en train de faire.
Mme le président. L’amendement n° 2074 n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Frédérique Espagnac, pour présenter l’amendement n° 2262.
Mme Frédérique Espagnac. Il est défendu, madame la présidente.
Mme le président. L’amendement n° 4019 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli, est ainsi libellé :
Alinéa 30
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Les régimes spéciaux attaqués dans l’article 1er ont été largement réformés dans une logique de nivellement par le bas, nous l’avons dit à plusieurs reprises. C’est à cette logique que nous nous opposons, vous l’avez compris.
Vous nous dites que les régimes spéciaux sont vécus comme une injustice profonde et que la réforme serait un instrument d’égalité qui mettrait fin aux privilèges insupportables de quelques profiteurs. Nous vous répondons depuis le début de notre discussion que nous avons une autre conception de ces régimes, qui sont pour nous des pionniers et qui devraient tirer l’ensemble de notre système de retraite vers le haut. Il ne faut donc pas les supprimer.
Le Président de la République en appelle au bon sens des travailleurs et des travailleuses et leur demande de travailler toujours plus et plus longtemps. Mais où est le bon sens, mes chers collègues, sachant que l’espérance de vie des ouvriers est inférieure de 6,4 ans à celle des cadres ?
Où est le bon sens sachant que 25 % des hommes et 13 % des femmes qui font partie des 5 % les plus pauvres meurent avant l’âge de 62 ans ?
Où est le bon sens sachant que, pour beaucoup, les dernières années de travail avant la retraite sont souvent rythmées par des problèmes de santé ? Je vous rappelle que 14 % des ouvriers ont un niveau d’incapacité physique élevé dès la première année de leur retraite !
Où est le bon sens quand vous condamnez les travailleurs les plus âgés à la précarité et aux difficultés à joindre les deux bouts, si je puis m’exprimer ainsi ?
Les études économiques menées sur le report de 60 ans à 62 ans de l’âge de départ à la retraite ont montré que cette mesure n’avait aucun effet vertueux et qu’elle ne favorisait pas l’emploi des seniors. En 2019, à 61 ans, un quart des employés et un tiers des ouvriers n’étaient ainsi ni en emploi ni en retraite.
Votre réforme aura pour principal effet d’allonger encore, pour les personnes concernées, les périodes de non-emploi avant la retraite.
Mme le président. L’amendement n° 4100 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli, est ainsi libellé :
Alinéa 31
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Il est défendu, madame la présidente.
Mme le président. L’amendement n° 4025 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli, est ainsi libellé :
Alinéa 33
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Il est également défendu.
Mme le président. L’amendement n° 4104 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli, est ainsi libellé :
Alinéa 34
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Mme Éliane Assassi. Idem, madame la présidente !
Mme le président. L’amendement n° 4106 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli, est ainsi libellé :
Alinéa 35
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Cet amendement vise à remettre en cause le détricotage de notre système de retraite.
L’alinéa 35 de l’article 1er prévoit d’importantes modifications, notamment pour les professeurs des écoles et les documentalistes des établissements privés. Évidemment, lorsqu’il s’agit de s’attaquer aux travailleurs des établissements, vous êtes tous au rendez-vous !
Vous le savez, nous aimerions que l’école publique et les enseignants qui en ont la responsabilité soient suffisamment dotés, aussi bien que les établissements privés. Les établissements publics devraient même, selon nous, bénéficier de dotations supplémentaires, dans un souci d’attractivité, afin de garantir une mixité que vous contrecarrez.
Cette attractivité ne peut toutefois passer par une atteinte au régime de retraite des enseignants, qui ne servirait ni l’enseignement privé ni l’enseignement public et qui, au fond, contribuerait à dégrader encore un peu plus l’ensemble de l’Éducation nationale.
L’école est régulièrement brandie comme une priorité par le Gouvernement, ce qui devient d’ailleurs inquiétant : dans les propos du Gouvernement, une priorité est en fait une cible, pour ne pas dire une proie…
Aussi, ne faites pas des retraites votre priorité : ni la retraite des enseignants ni celle de qui que ce soit ! Ne touchez à rien, comme vous savez le faire pour les profits – eux s’envolent.
Mme le président. L’amendement n° 2746 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 37
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Monique Lubin.
Mme Monique Lubin. Il est défendu, madame la présidente.
Mme le président. L’amendement n° 2749 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 41
Remplacer les mots :
du 1er septembre 2023
par les mots :
d’une date déterminée par décret en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales
La parole est à Mme Monique Lubin.
Mme Monique Lubin. Il est également défendu.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission sur l’ensemble des amendements restant en discussion ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Plusieurs amendements visent le Cese.
Je le rappelle, les membres du Cese ne sont pas des élus. Ils sont désignés, pour représenter le patronat, les syndicats et le monde associatif. Il ne s’agit pas d’un service public et la question de la séparation des pouvoirs ne s’y pose pas comme au Sénat.
Pourquoi se pencher sur ce régime spécial ? Car les cotisations patronales y atteignent 2,9 millions d’euros, pour 1,9 million d’euros de cotisations salariales, et la contribution d’équilibre, versée par l’État, représente 5,4 millions d’euros. Il est vrai qu’il n’y a que 175 membres pour 800 pensionnés… Nous avons donc choisi de mettre fin à ce régime, et l’avis de la commission est donc défavorable sur l’ensemble de ces amendements.
Il est défavorable également sur les amendements nos 4019 rectifié, 4100 rectifié, 4025 rectifié, 4104 rectifié et 4106 rectifié.
Enfin, nous sommes défavorables à l’amendement n° 2746 rectifié, dont l’adoption créerait un vide juridique pour le personnel concerné, ainsi qu’à l’amendement n° 2749 rectifié.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre. Ces amendements sont de nature différente. Les tout premiers visent l’affiliation au régime général de l’assurance vieillesse des salariés qui auraient dû être actuellement rattachés à un régime spécial.
Comme l’a dit Mme la rapporteure générale, leur adoption créerait un vide juridique préjudiciable pour les salariés en question, qui ne seraient plus affiliés au régime spécial concerné après le 1er septembre, mais qui ne pourraient pour autant être affiliés au régime général.
Pour répondre à quelques-unes des interrogations qui ont été formulées, le Parlement est-il fondé à réformer le régime spécial des membres du Cese ? La réponse est positive. En effet, ce régime est défini par une loi ordinaire du 10 juillet 1957, qui a donné lieu à un décret d’application de 1959, modifié en 2017.
Il y a quatre ans, le projet de loi visant à créer un système universel de retraite était accompagné d’avis qui précisaient que le Parlement était fondé, dans le cadre d’une loi ordinaire, quelle qu’elle soit, à réformer le régime de retraite des membres du Cese. Il y était par ailleurs précisé que la comparaison avec le régime de retraite des membres du Sénat ou de l’Assemblée nationale n’était pas pertinente, du fait des caractéristiques de rémunération et de désignation des membres du Cese.
Par ailleurs, plusieurs d’entre vous ont évoqué la situation des salariés du Cese, mais ceux-ci ne sont absolument pas concernés par les alinéas que vos amendements tendent à supprimer. Seuls sont touchés les conseillers du Cese.
En effet, pour la plupart, les salariés du Cese sont des fonctionnaires en détachement ou mis à disposition par leur administration d’origine. Ils sont donc affiliés au régime de retraite de cette dernière. Il y a, certes, un certain nombre de contractuels, mais ceux-ci sont rattachés à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) ou à l’Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l’État et des collectivités (Ircantec). Il n’y a donc pas de difficulté particulière.
D’ailleurs, si le Parlement adopte cette réforme, le nouveau régime d’assurance vieillesse des conseillers du Cese relèvera de l’Ircantec, ce qui souligne le lien avec la mission d’intérêt public qui est la leur.
Mme la rapporteure générale a évoqué le déséquilibre de ce régime. Certes, les sommes en jeu sont moins importantes que pour d’autres régimes. Mais il n’y a que 175 cotisants pour environ 800 pensionnés, et une subvention d’équilibre de 5,4 millions d’euros est nécessaire chaque année.
Mme le président. La parole est à M. Vincent Éblé, pour explication de vote sur l’amendement n° 4013 rectifié.
M. Vincent Éblé. Je considère que l’explication que M. le ministre vient de nous donner ne diminue en rien la nécessité d’une consultation du Cese, qu’il s’agisse de ses salariés ou, plus encore, de ses membres.
Il serait parfaitement justifié que nous demandions à cet organisme son avis avant de réformer son dispositif de retraite.
Mme le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Je veux bien croire que, comme l’a dit M. le ministre, le Parlement puisse délibérer sur le système de retraite du Cese.
Toutefois, qu’il y ait obligation légale ou possibilité légale, dans tous les cas, il s’agit de créer des liens entre des assemblées prévues par la Constitution, et une question de forme se pose. Nous pouvons statuer sur ce dispositif, peut-être, mais pas sans avoir entendu les membres du Cese. Ce n’est qu’après leur avoir demandé comment ils comptent faire face au déséquilibre entre le nombre de cotisants et celui des bénéficiaires que nous pourrons délibérer valablement.
Ce que je trouve tout à fait inacceptable et décidément cavalier, c’est que le Sénat n’ait pas pris soin de demander son avis au Cese, alors même qu’y siègent essentiellement les partenaires sociaux et les grandes associations, bref, les forces vives de la Nation.
Je sais qu’il est de bon ton chez certains de mépriser ces corps intermédiaires. Je crois d’ailleurs que cela constitue l’une des fragilités actuelles de notre démocratie et du rapport que les Français ont à la vie politique et sociale.
Au-delà de l’obligation légale ou de la possibilité légale, l’acte politique qu’accomplirait le Sénat ne serait pas responsable.
Vous savez, mes chers collègues, que notre Sénat pourrait tout aussi bien être mis en cause. Le populisme ambiant peut trouver partout des échos. Soyons donc très respectueux de toutes les institutions, notamment quand elles représentent les forces vives de la Nation (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.
M. Victorin Lurel. M. le ministre vient de nous déclarer que le Parlement pouvait légiférer. Cela va de soi ! Il a aussi parlé d’une loi ordinaire, datant de 1957, et de ses décrets d’application, pris en 2017.
Que je sache, cette loi n’a donc pas fait l’objet d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC). L’article 71 de la Constitution est clair : il faut une loi organique. Au-delà de la forme, donc, justement évoquée par Marie-Noëlle Lienemann, il y a un problème de fond, d’inconstitutionnalité. Si ce texte fait l’objet d’une QPC, cela apparaîtra clairement.
Sur le plan idéologique et philosophique, par ailleurs, nous ne pouvons que voter contre. Le Président de la République a voulu affaiblir le Cese, comme tous les corps intermédiaires, s’instituant en Conducator ou en Lider maximo.
Or le Cese est au sommet de la hiérarchie des corps intermédiaires. L’affaiblir, le diminuer, au lieu de l’augmenter, c’est porter atteinte à la démocratie et à la Constitution. (Mme Victoire Jasmin applaudit.)
Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° 4013 rectifié.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
Mme le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 157 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 339 |
Pour l’adoption | 98 |
Contre | 241 |
Le Sénat n’a pas adopté.
La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 346 et suivants.
M. Jean-Yves Leconte. Je vous remercie, monsieur le ministre, des éléments d’information que vous nous avez apportés. Ceux-ci ne suffisent pas à étayer une certitude, mais je puis comprendre que ce faisceau d’informations vous laisse raisonnablement penser qu’il est jouable d’agir cette manière. Reste l’article 71 de la Constitution, qui fait planer, compte tenu des dates mentionnées et des recours possibles, une incertitude juridique assez forte.
Peu importe, à ce stade, cette interrogation, qui sera tranchée lors de l’examen des recours qui seront déposés. La question est politique : une assemblée, en l’occurrence le Sénat, peut-elle décider pour une autre assemblée prévue par la Constitution sans même avoir recueilli son avis ?
Dans cette partie de l’hémicycle, nous ne pensons pas, vu l’importance du Cese, qu’il soit opportun de prendre ce type de décision sans avoir consulté les nombres de l’institution concernée. Ce ne serait pas raisonnable !
Nous ne pourrons donc pas voter une telle réforme du régime de retraite du Cese.
Mme le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour explication de vote.
Mme Annie Le Houerou. L’amendement n° 2746 rectifié vise à ne pas affilier au régime complémentaire Agirc-Arrco les populations très éloignées du salariat que sont les loueurs de meublés et vendeurs de biens sur des plateformes.
En effet, l’article 1er du projet de loi modifie l’article L. 921-1 du code de la sécurité sociale relatif au champ d’application des institutions de retraite complémentaire, pour tenir compte de l’affiliation des salariés des régimes spéciaux au régime général et complémentaire à compter du 1er septembre 2023.
La rédaction proposée aboutit à affilier à ces régimes toutes les personnes relevant de l’article L. 311-2 du code de la sécurité sociale, notamment, par renvoi, toutes les populations visées par l’article L. 311-3 du même code.
Or certaines de ces populations étant très éloignées du salariat – loueurs de meublés, vendeurs de biens sur des plateformes comme leboncoin.fr –, elles ne relèvent pas du régime Agirc-Arrco, par décision des partenaires sociaux qui en sont les gestionnaires.
La rédaction du projet de loi aboutirait à faire adhérer obligatoirement ces populations au régime Agirc-Arrco.
Je soutiens donc cet amendement, qui tend à ne pas modifier l’article en question, dont la rédaction actuelle permet de viser tous les salariés, y compris ceux qui relèvent aujourd’hui des régimes spéciaux. Son texte a d’ailleurs été rédigé en concertation avec l’Agirc-Arrco.
Mme le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Comme je l’ai déjà dit, nous sommes face à un paquet-cadeau, dans lequel sont rassemblés des régimes qui n’ont rien à voir.
D’un côté, il y a la RATP et les IEG. Ce qui est en jeu, là, c’est une pression, par la dérégulation du travail, sur le salaire socialisé, donc sur le partage des richesses – comme dans tout ce projet de loi, d’ailleurs. De l’autre, nous avons trois régimes spéciaux, choisis un peu au hasard. À l’Assemblée nationale, certains disaient : « Pile, nous perdons, face, vous gagnez ! »
Il s’agit tout de même de la troisième chambre de la République… Et elle a réformé son régime en 2013 ! Y a-t-il eu une évaluation ? Pourquoi voulez-vous reprendre la main ? Je vois dans ce projet le reflet d’une volonté de prendre le pouvoir sur les corps intermédiaires.
Nous voterons donc pour la suppression de cette mesure. De grâce, ne faisons pas l’amalgame entre les différents régimes mêlés dans votre paquet, car ils ont des objectifs et des motivations très différentes.
Mme le président. La parole est à Mme Isabelle Briquet, pour explication de vote.
Mme Isabelle Briquet. Lors de nos débats, beaucoup ont exprimé le souhait de revaloriser les pensions des femmes, ou au moins de réduire l’écart avec celles des hommes.
De ce point de vue, les régimes spéciaux incarnent une réelle différence. Les écarts de pensions entre les hommes et les femmes y sont relativement réduits, comme d’ailleurs dans la fonction publique en général, alors qu’ils culminent dans le secteur privé, notamment chez les non-salariés.
Ainsi, la pension moyenne des femmes, en proportion de celle des hommes, chez les monopensionnés à carrière complète, représente, en 2020, quelque 87 % pour les fonctionnaires civils d’État et pour les fonctionnaires territoriaux et hospitaliers, et 82 % pour les assurés des autres régimes spéciaux, contre 71 % pour les salariés relevant du régime général et 63 % pour les non-salariés.
Plutôt que de fermer ces régimes, il vaudrait mieux les conforter, car ils constituent une réelle avancée, au Cese comme ailleurs.
Mme le président. La parole est à M. Patrice Joly, pour explication de vote.
M. Patrice Joly. Le Gouvernement propose de supprimer le régime spécial des membres du Cese, après celui des agents des IEG.
Dans les deux cas, il s’agit d’actes politiques, qui remettent en cause les fondements de notre souveraineté et de notre démocratie. La suppression du régime spécial des IEG s’inspire d’une philosophie libérale, qui porte une logique de privatisation et de dérégulation d’un secteur pourtant essentiel à la souveraineté de notre pays.
Parallèlement, en proposant de supprimer le régime spécial du Cese, le Gouvernement s’attaque au représentant des corps intermédiaires, mais il est vrai que le Président de la République n’a pas encore réussi à comprendre l’importance de telles institutions ni la manière de travailler avec elles… Il est donc essentiel de s’opposer à cette suppression.
D’ailleurs, la procédure suivie est peut-être légale, voire constitutionnelle, mais la légitimité de cette manière d’agir, sans consultation, pose problème. Je soutiendrai donc les amendements qui suppriment cette mesure.
Mme le président. La parole est à M. Yan Chantrel, pour explication de vote.
M. Yan Chantrel. Bien entendu, je soutiens moi aussi ces amendements.
Monsieur le ministre, je viens de lire un entretien que vous avez donné au journal Le Parisien, à paraître demain. Vous y déclarez : « La réforme des retraites ne fera pas de perdants. »
Voici donc une liste, non exhaustive, des situations dans lesquelles des personnes seront objectivement perdantes à la réforme. Si, comme vous, on ne considère comme perdantes que les personnes dont la pension diminue, il y aura bien des perdantes et des perdants.
Tout d’abord, il y a les personnes qui, sans la réforme, auraient bénéficié d’une surcote, parce qu’elles ont choisi de travailler au-delà de l’âge du taux plein. Celles-ci verront leur surcote annulée ou diminuée d’une proportion allant jusqu’à 10 points de pourcentage. Et, avec le passage accéléré à 43 annuités, les personnes nées avant 1974 pourraient voir leur pension baisser, notamment si elles ne décalent pas leur départ.
Au-delà du seul montant de la pension, c’est principalement par le décalage de l’âge de départ que la réforme fait des perdants et, surtout, des perdantes.
Par exemple, une personne fonctionnaire, née en 1963, qui devait partir dans deux ans à taux plein, puisqu’elle aura 62 ans, devra partir dans deux ans et demi, pour la même pension.
De tels cas sont très nombreux. En voici un autre exemple : avec un début de carrière à 18 ans, sans interruption, le départ à la retraite devait se faire, avant réforme, à 62 ans ; après réforme, ce sera à 63 ans. Arrêtez donc les mensonges et retirez cette réforme injuste, qui ne fait que des perdants ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)