Sommaire
Présidence de M. Roger Karoutchi
Secrétaires :
Mme Corinne Imbert, M. Dominique Théophile.
2. Loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023. – Suite de la discussion d’un projet de loi
Demande de renvoi à la commission de l’article 1er
Motion n° 4738 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet par scrutin public n° 145.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales
M. René-Paul Savary, rapporteur de la commission des affaires sociales pour la branche vieillesse
M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion
Suspension et reprise de la séance
Amendements identiques de suppression de l’article
Amendement n° 2 rectifié de Mme Éliane Assassi
Amendement n° 129 de Mme Raymonde Poncet Monge
Amendement n° 130 de M. Guillaume Gontard
Amendement n° 131 de M. Guy Benarroche
Amendement n° 200 de Mme Florence Blatrix Contat
Amendement n° 280 de M. Rémi Féraud
Amendement n° 312 de M. Sebastien Pla. – Non soutenu.
Amendement n° 342 de Mme Isabelle Briquet
Amendement n° 366 de Mme Corinne Féret
Amendement n° 449 de M. Jean-Luc Fichet
Amendement n° 484 de M. Yan Chantrel
Amendement n° 518 de M. Hervé Gillé. – Non soutenu.
Amendement n° 567 de Mme Marie-Pierre de La Gontrie. – Non soutenu.
Amendement n° 579 de M. Christian Redon-Sarrazy
Amendement n° 666 de Mme Annie Le Houerou
Amendement n° 726 de M. Mickaël Vallet. – Non soutenu.
Amendement n° 808 de M. Olivier Jacquin
Amendement n° 821 de M. Jean-Jacques Lozach. – Non soutenu.
Amendement n° 861 de M. Jérôme Durain. – Non soutenu.
Amendement n° 896 de M. Victorin Lurel
Amendement n° 941 de M. Rémi Cardon. – Non soutenu.
Amendement n° 980 de M. Claude Raynal
Amendement n° 1008 de M. Lucien Stanzione. – Non soutenu.
Amendement n° 1029 de Mme Gisèle Jourda. – Non soutenu.
Amendement n° 1059 de M. Jean-Michel Houllegatte. – Non soutenu.
Amendement n° 1075 de M. Jean-Claude Tissot
Amendement n° 1096 de M. Vincent Éblé. – Non soutenu.
Amendement n° 1151 rectifié bis de Mme Monique Lubin
Amendement n° 1205 de M. Serge Mérillou. – Non soutenu.
Amendement n° 1238 de Mme Victoire Jasmin
Amendement n° 1268 de M. Franck Montaugé
Amendement n° 1314 de Mme Angèle Préville
Amendement n° 1338 de M. Didier Marie
Amendement n° 1371 de M. Hussein Bourgi. – Non soutenu.
Amendement n° 1404 de M. Jean-Pierre Sueur
Amendement n° 1434 de M. Éric Kerrouche. – Non soutenu.
Amendement n° 1502 de Mme Martine Filleul
Amendement n° 1541 de Mme Marie-Pierre Monier. – Non soutenu.
Amendement n° 1579 de M. David Assouline. – Non soutenu.
Amendement n° 1590 de M. Joël Bigot. – Non soutenu.
Amendement n° 1620 de Mme Émilienne Poumirol
Amendement n° 1650 de Mme Michelle Meunier. – Non soutenu.
Amendement n° 1662 de Mme Nicole Bonnefoy. – Non soutenu.
Amendement n° 1691 de M. Jean-Yves Leconte
Amendement n° 1748 de M. Jean-Marc Todeschini. – Non soutenu.
Amendement n° 1789 de M. Bernard Jomier. – Non soutenu.
Amendement n° 1817 de M. Patrick Kanner
Amendement n° 1990 de Mme Laurence Rossignol
Amendement n° 2069 de M. Éric Jeansannetas. – Non soutenu.
Amendement n° 2257 de Mme Frédérique Espagnac. – Non soutenu.
Amendement n° 3871 de Mme Cathy Apourceau-Poly
Mme Marie-Pierre de La Gontrie
Rejet, par scrutin public n° 146, des amendements identiques de suppression de l’article.
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher
3. Mise au point au sujet d’un vote
4. Loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023. – Suite de la discussion d’un projet de loi
Amendements identiques de suppression des deux premiers alinéas de l’article
Amendement n° 281 de M. Rémi Féraud. – Non soutenu.
Amendement n° 313 de M. Sebastien Pla. – Non soutenu.
Amendement n° 367 de Mme Corinne Féret
Amendement n° 450 de M. Jean-Luc Fichet
Amendement n° 505 de M. Yan Chantrel. – Non soutenu.
Amendement n° 519 de M. Hervé Gillé. – Non soutenu.
Amendement n° 568 de Mme Marie-Pierre de La Gontrie
Amendement n° 580 de M. Christian Redon-Sarrazy
Amendement n° 667 de Mme Annie Le Houerou
Amendement n° 696 de Mme Florence Blatrix Contat
Amendement n° 727 de M. Mickaël Vallet. – Non soutenu.
Amendement n° 809 de M. Olivier Jacquin
Amendement n° 822 de M. Jean-Jacques Lozach. – Non soutenu.
Amendement n° 862 de M. Jérôme Durain. – Non soutenu.
Amendement n° 897 de M. Victorin Lurel. – Non soutenu.
Amendement n° 942 de M. Rémi Cardon. – Non soutenu.
Amendement n° 981 de M. Claude Raynal
Amendement n° 1009 de M. Lucien Stanzione. – Non soutenu.
Amendement n° 1030 de Mme Gisèle Jourda. – Non soutenu.
Amendement n° 1061 de M. Jean-Michel Houllegatte
Amendement n° 1076 de M. Jean-Claude Tissot. – Non soutenu.
Amendement n° 1097 de M. Vincent Éblé
Amendement n° 1146 rectifié bis de Mme Monique Lubin
Amendement n° 1206 de M. Serge Mérillou. – Non soutenu.
Amendement n° 1239 de Mme Victoire Jasmin
Amendement n° 1269 de M. Franck Montaugé
Amendement n° 1315 de Mme Angèle Préville
Amendement n° 1339 de M. Didier Marie
Amendement n° 1372 de M. Hussein Bourgi. – Non soutenu.
Amendement n° 1405 de M. Jean-Pierre Sueur. – Non soutenu.
Amendement n° 1435 de M. Éric Kerrouche. – Non soutenu.
Amendement n° 1503 de Mme Martine Filleul
Amendement n° 1542 de Mme Marie-Pierre Monier. – Non soutenu.
Amendement n° 1591 de M. Joël Bigot. – Non soutenu.
Amendement n° 1621 de Mme Émilienne Poumirol
Amendement n° 1651 de Mme Michelle Meunier. – Non soutenu.
Amendement n° 1663 de Mme Nicole Bonnefoy. – Non soutenu.
Amendement n° 1692 de M. Jean-Yves Leconte
Amendement n° 1747 de M. Jean-Marc Todeschini. – Non soutenu.
Amendement n° 1790 de M. Bernard Jomier. – Non soutenu.
Amendement n° 1818 de M. Patrick Kanner
Amendement n° 1846 de M. David Assouline. – Non soutenu.
Amendement n° 1991 de Mme Laurence Rossignol. – Non soutenu.
Amendement n° 2070 de M. Éric Jeansannetas. – Non soutenu.
Amendement n° 2258 de Mme Frédérique Espagnac
Amendement n° 3193 de Mme Raymonde Poncet Monge
Amendement n° 3885 rectifié de Mme Éliane Assassi
Rejet, par scrutin public n° 147, des amendements identiques de suppression des deux premiers alinéas de l’article.
Amendement n° 2715 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 3018 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 3019 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 3020 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 3021 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales
Amendement n° 3022 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 3023 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 3024 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 3025 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 3026 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 3027 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 3028 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 3029 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 3030 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 3031 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 3032 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 3033 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 3034 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 3035 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 3036 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 3037 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 3043 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendements identiques de suppression des alinéas 3 et 4 de l’article
Amendement n° 282 de M. Rémi Féraud. – Non soutenu.
Amendement n° 314 de M. Sebastien Pla. – Non soutenu.
Amendement n° 343 de Mme Isabelle Briquet
Amendement n° 368 de Mme Corinne Féret
Amendement n° 451 de M. Jean-Luc Fichet
Amendement n° 506 de M. Yan Chantrel
Amendement n° 520 de M. Hervé Gillé. – Non soutenu.
Amendement n° 569 de Mme Marie-Pierre de La Gontrie
Amendement n° 581 de M. Christian Redon-Sarrazy
Amendement n° 668 de Mme Annie Le Houerou
Amendement n° 697 de Mme Florence Blatrix Contat
Amendement n° 728 de M. Mickaël Vallet. – Non soutenu.
Amendement n° 810 de M. Olivier Jacquin
Amendement n° 823 de M. Jean-Jacques Lozach. – Non soutenu.
Amendement n° 863 de M. Jérôme Durain. – Non soutenu.
Amendement n° 898 de M. Victorin Lurel
Amendement n° 943 de M. Rémi Cardon. – Non soutenu.
Amendement n° 991 de M. Claude Raynal
Amendement n° 1010 de M. Lucien Stanzione. – Non soutenu.
Amendement n° 1062 de M. Jean-Michel Houllegatte
Amendement n° 1077 de M. Jean-Claude Tissot. – Non soutenu.
Amendement n° 1098 de M. Vincent Éblé
Amendement n° 1152 rectifié bis de Mme Monique Lubin
Amendement n° 1207 de M. Serge Mérillou. – Non soutenu.
Amendement n° 1247 de Mme Victoire Jasmin
Amendement n° 1270 de M. Franck Montaugé
Amendement n° 1316 de Mme Angèle Préville
Amendement n° 1340 de M. Didier Marie. – Non soutenu.
Amendement n° 1373 de M. Hussein Bourgi. – Non soutenu.
Amendement n° 1406 de M. Jean-Pierre Sueur. – Non soutenu.
Amendement n° 1436 de M. Éric Kerrouche. – Non soutenu.
Amendement n° 1504 de Mme Martine Filleul
Amendement n° 1543 de Mme Marie-Pierre Monier. – Non soutenu.
Amendement n° 1592 de M. Joël Bigot. – Non soutenu.
Amendement n° 1622 de Mme Émilienne Poumirol
Amendement n° 1652 de Mme Michelle Meunier. – Non soutenu.
Amendement n° 1693 de M. Jean-Yves Leconte
Amendement n° 1749 de M. Jean-Marc Todeschini. – Non soutenu.
Amendement n° 1791 de M. Bernard Jomier. – Non soutenu.
Amendement n° 1819 de M. Patrick Kanner
Amendement n° 1850 de M. David Assouline
Amendement n° 1945 rectifié ter de M. Étienne Blanc
Amendement n° 1992 de Mme Laurence Rossignol. – Non soutenu.
Amendement n° 2071 de M. Éric Jeansannetas. – Non soutenu.
Amendement n° 2259 de Mme Frédérique Espagnac. – Non soutenu.
Amendement n° 3906 rectifié de Mme Éliane Assassi
Rejet, par scrutin public n° 149, des amendements identiques de suppression des alinéas 3 et 4 de l’article.
Amendements identiques de suppression des alinéas 5 à 13 de l’article
Amendement n° 283 de M. Rémi Féraud. – Non soutenu.
Amendement n° 315 de M. Sebastien Pla. – Non soutenu.
Amendement n° 344 de Mme Isabelle Briquet
Amendement n° 369 de Mme Corinne Féret
Amendement n° 452 de M. Jean-Luc Fichet
Amendement n° 507 de M. Yan Chantrel
Amendement n° 521 de M. Hervé Gillé. – Non soutenu.
Amendement n° 570 de Mme Marie-Pierre de La Gontrie
Amendement n° 582 de M. Christian Redon-Sarrazy
Amendement n° 669 de Mme Annie Le Houerou
Amendement n° 698 de Mme Florence Blatrix Contat
Amendement n° 729 de M. Mickaël Vallet. – Non soutenu.
Amendement n° 811 de M. Olivier Jacquin
Amendement n° 824 de M. Jean-Jacques Lozach. – Non soutenu.
Amendement n° 864 de M. Jérôme Durain. – Non soutenu.
Amendement n° 899 de M. Victorin Lurel
Amendement n° 944 de M. Rémi Cardon. – Non soutenu.
Amendement n° 982 de M. Claude Raynal
Amendement n° 1011 de M. Lucien Stanzione. – Non soutenu.
Amendement n° 1031 de Mme Gisèle Jourda. – Non soutenu.
Amendement n° 1063 de M. Jean-Michel Houllegatte
Amendement n° 1078 de M. Jean-Claude Tissot. – Non soutenu.
Amendement n° 1099 de M. Vincent Éblé
Amendement n° 1153 rectifié bis de Mme Monique Lubin
Amendement n° 1208 de M. Serge Mérillou. – Non soutenu.
Amendement n° 1248 de Mme Victoire Jasmin
Amendement n° 1271 de M. Franck Montaugé
Amendement n° 1317 de Mme Angèle Préville
Amendement n° 1341 de M. Didier Marie. – Non soutenu.
Amendement n° 1374 de M. Hussein Bourgi. – Non soutenu.
Amendement n° 1407 de M. Jean-Pierre Sueur. – Non soutenu.
Amendement n° 1437 de M. Éric Kerrouche. – Non soutenu.
Amendement n° 1505 de Mme Martine Filleul. – Non soutenu.
Amendement n° 1544 de Mme Marie-Pierre Monier. – Non soutenu.
Amendement n° 1593 de M. Joël Bigot. – Non soutenu.
Amendement n° 1623 de Mme Émilienne Poumirol
Amendement n° 1653 de Mme Michelle Meunier. – Non soutenu.
Amendement n° 1694 de M. Jean-Yves Leconte
Amendement n° 1750 de M. Jean-Marc Todeschini. – Non soutenu.
Amendement n° 1792 de M. Bernard Jomier. – Non soutenu.
Amendement n° 1820 de M. Patrick Kanner
Amendement n° 1848 de M. David Assouline. – Non soutenu.
Amendement n° 1993 de Mme Laurence Rossignol. – Non soutenu.
Amendement n° 2072 de M. Éric Jeansannetas. – Non soutenu.
Amendement n° 2260 de Mme Frédérique Espagnac
Amendement n° 2286 de Mme Nicole Bonnefoy. – Non soutenu.
Rejet, par scrutin public n° 150, des amendements identiques de suppression des alinéas 5 à 13 de l’article.
Amendement n° 3946 rectifié de Mme Éliane Assassi. – Rejet par scrutin public n° 152.
Amendements identiques de suppression des alinéas 14 à 16 de l’article
Amendement n° 284 de M. Rémi Féraud. – Non soutenu.
Amendement n° 316 de M. Sebastien Pla. – Non soutenu.
Amendement n° 345 de Mme Isabelle Briquet
Amendement n° 370 de Mme Corinne Féret
Amendement n° 453 de M. Jean-Luc Fichet
Amendement n° 508 de M. Yan Chantrel
Amendement n° 522 de M. Hervé Gillé. – Non soutenu.
Amendement n° 571 de Mme Marie-Pierre de La Gontrie
Amendement n° 583 de M. Christian Redon-Sarrazy
Amendement n° 670 de Mme Annie Le Houerou
Amendement n° 699 de Mme Florence Blatrix Contat
Amendement n° 730 de M. Mickaël Vallet. – Non soutenu.
Amendement n° 812 de M. Olivier Jacquin
Amendement n° 825 de M. Jean-Jacques Lozach. – Non soutenu.
Amendement n° 865 de M. Jérôme Durain. – Non soutenu.
Amendement n° 900 de M. Victorin Lurel
Amendement n° 945 de M. Rémi Cardon. – Non soutenu.
Amendement n° 983 de M. Claude Raynal
Amendement n° 1013 de M. Lucien Stanzione. – Non soutenu.
Amendement n° 1032 de Mme Gisèle Jourda. – Non soutenu.
Amendement n° 1064 de M. Jean-Michel Houllegatte
Amendement n° 1079 de M. Jean-Claude Tissot. – Non soutenu.
Amendement n° 1100 de M. Vincent Éblé
Amendement n° 1154 rectifié bis de Mme Monique Lubin
Amendement n° 1209 de M. Serge Mérillou. – Non soutenu.
Amendement n° 1240 de Mme Victoire Jasmin
Amendement n° 1272 de M. Franck Montaugé
Amendement n° 1318 de Mme Angèle Préville
Amendement n° 1342 de M. Didier Marie. – Non soutenu.
Amendement n° 1375 de M. Hussein Bourgi
Amendement n° 1408 de M. Jean-Pierre Sueur. – Non soutenu.
Amendement n° 1438 de M. Éric Kerrouche. – Non soutenu.
Amendement n° 1506 de Mme Martine Filleul. – Non soutenu.
Amendement n° 1545 de Mme Marie-Pierre Monier. – Non soutenu.
Amendement n° 1594 de M. Joël Bigot. – Non soutenu.
Amendement n° 1624 de Mme Émilienne Poumirol
Amendement n° 1654 de Mme Michelle Meunier. – Non soutenu.
Amendement n° 1664 de Mme Nicole Bonnefoy. – Non soutenu.
Amendement n° 1695 de M. Jean-Yves Leconte
Amendement n° 1751 de M. Jean-Marc Todeschini. – Non soutenu.
Amendement n° 1793 de M. Bernard Jomier. – Non soutenu.
Amendement n° 1821 de M. Patrick Kanner
Amendement n° 1847 de M. David Assouline. – Non soutenu.
Amendement n° 1994 de Mme Laurence Rossignol
Amendement n° 2073 de M. Éric Jeansannetas. – Non soutenu.
Amendement n° 2261 de Mme Frédérique Espagnac
Amendement n° 3197 de Mme Raymonde Poncet Monge
Amendement n° 3932 rectifié de Mme Éliane Assassi
Rejet, par scrutin public n° 153, des amendements identiques de suppression des alinéas 14 à 16 de l’article.
Amendement n° 3964 rectifié de Mme Éliane Assassi. – Rejet par scrutin public n° 154.
Amendement n° 3937 rectifié de Mme Éliane Assassi. – Rejet par scrutin public n° 155.
Amendement n° 3016 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 3015 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 3014 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 3013 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 3012 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 3011 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 3010 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 3009 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 3008 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 3007 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 3006 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 3005 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 3004 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 3003 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 3002 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 3001 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 3000 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 2999 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 2998 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 2997 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 2996 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 2995 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 2734 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE Mme Pascale Gruny
5. Mise au point au sujet d’un vote
M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion
M. René-Paul Savary, rapporteur de la commission des affaires sociales pour l’assurance vieillesse
Mme Marie-Pierre de La Gontrie
M. René-Paul Savary, rapporteur
7. Loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023. – Suite de la discussion d’un projet de loi
Amendement n° 4004 rectifié de Mme Éliane Assassi. – Rejet par scrutin public n° 156.
Amendement n° 4013 rectifié de Mme Éliane Assassi. – Rejet par scrutin public n° 157.
Amendements identiques de suppression des alinéas 24 à 27 et 41 de l’article
Amendement n° 285 de M. Rémi Féraud. – Non soutenu.
Amendement n° 317 de M. Sebastien Pla. – Non soutenu.
Amendement n° 346 de Mme Isabelle Briquet
Amendement n° 371 de Mme Corinne Féret
Amendement n° 454 de M. Jean-Luc Fichet
Amendement n° 509 de M. Yan Chantrel
Amendement n° 523 de M. Hervé Gillé. – Non soutenu.
Amendement n° 572 de Mme Marie-Pierre de La Gontrie
Amendement n° 584 de M. Christian Redon-Sarrazy
Amendement n° 671 de Mme Annie Le Houerou
Amendement n° 700 de Mme Florence Blatrix Contat
Amendement n° 731 de M. Mickaël Vallet. – Non soutenu.
Amendement n° 813 de M. Olivier Jacquin. – Non soutenu.
Amendement n° 826 de M. Jean-Jacques Lozach. – Non soutenu.
Amendement n° 866 de M. Jérôme Durain. – Non soutenu.
Amendement n° 901 de M. Victorin Lurel
Amendement n° 946 de M. Rémi Cardon. – Non soutenu.
Amendement n° 984 de M. Claude Raynal. – Non soutenu.
Amendement n° 1019 de M. Lucien Stanzione. – Non soutenu.
Amendement n° 1065 de M. Jean-Michel Houllegatte. – Non soutenu.
Amendement n° 1080 de M. Jean-Claude Tissot. – Non soutenu.
Amendement n° 1101 de M. Vincent Éblé
Amendement n° 1155 rectifié bis de Mme Monique Lubin
Amendement n° 1210 de M. Serge Mérillou. – Non soutenu.
Amendement n° 1249 de Mme Victoire Jasmin
Amendement n° 1273 de M. Franck Montaugé
Amendement n° 1319 de Mme Angèle Préville
Amendement n° 1343 de M. Didier Marie. – Non soutenu.
Amendement n° 1376 de M. Hussein Bourgi
Amendement n° 1409 de M. Jean-Pierre Sueur. – Non soutenu.
Amendement n° 1439 de M. Éric Kerrouche. – Non soutenu.
Amendement n° 1507 de Mme Martine Filleul. – Non soutenu.
Amendement n° 1546 de Mme Marie-Pierre Monier
Amendement n° 1595 de M. Joël Bigot. – Non soutenu.
Amendement n° 1625 de Mme Émilienne Poumirol
Amendement n° 1655 de Mme Michelle Meunier. – Non soutenu.
Amendement n° 1696 de M. Jean-Yves Leconte
Amendement n° 1752 de M. Jean-Marc Todeschini. – Non soutenu.
Amendement n° 1794 de M. Bernard Jomier. – Non soutenu.
Amendement n° 1822 de M. Patrick Kanner. – Non soutenu.
Amendement n° 1849 de M. David Assouline. – Non soutenu.
Amendement n° 1995 de Mme Laurence Rossignol
Amendement n° 2074 de M. Éric Jeansannetas. – Non soutenu.
Amendement n° 2262 de Mme Frédérique Espagnac
Rejet des amendements identiques de suppression des alinéas 24 à 27 et 41 de l’article.
Amendement n° 4019 rectifié de Mme Éliane Assassi. – Rejet.
Amendement n° 4100 rectifié de Mme Éliane Assassi. – Rejet.
Amendement n° 4025 rectifié de Mme Éliane Assassi. – Rejet.
Amendement n° 4104 rectifié de Mme Éliane Assassi. – Rejet.
Amendement n° 4106 rectifié de Mme Éliane Assassi. – Rejet.
Amendement n° 2746 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 2749 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie
Mme Marie-Pierre de La Gontrie
M. René-Paul Savary, rapporteur de la commission des affaires sociales pour l’assurance vieillesse
M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion
Suspension et reprise de la séance
Amendement n° 2107 de la commission. – Adoption.
M. René-Paul Savary, rapporteur
Adoption, par scrutin public n° 158, de l’article modifié.
Renvoi de la suite de la discussion.
compte rendu intégral
Présidence de M. Roger Karoutchi
vice-président
Secrétaires :
Mme Corinne Imbert,
M. Dominique Théophile.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023
Suite de la discussion d’un projet de loi
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023, dont le Sénat est saisi en application de l’article 47-1, alinéa 2, de la Constitution (projet n° 368, rapport n° 375, avis n° 373).
Dans la discussion des articles, nous sommes parvenus à la motion n° 4738 tendant au renvoi en commission de l’article 1er.
PREMIÈRE PARTIE (suite)
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES ET À L’ÉQUILIBRE DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L’EXERCICE 2023
Demande de renvoi à la commission de l’article 1er
M. le président. Je suis saisi, par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon, d’une motion n° 4738.
Cette motion est ainsi rédigée :
En application de l’article 44, alinéa 5, du règlement, le Sénat décide qu’il y a lieu de renvoyer à la commission l’article 1er du projet de loi de financement rectificatif de la sécurité sociale pour 2023 (n° 368, 2022-2023).
Je rappelle que, en application du dernier alinéa de l’article 44 du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l’auteur de l’initiative ou son représentant pour deux minutes maximum, un orateur d’opinion contraire pour deux minutes maximum, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond, et le Gouvernement.
En outre, la parole peut être accordée pour explication de vote à un représentant de chaque groupe.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour la motion.
Mme Raymonde Poncet Monge. L’article 1er du projet de loi vise à supprimer plusieurs régimes spéciaux ou autonomes.
En réalité, les régimes spéciaux concernent non pas l’ensemble des salariés de ces branches, mais uniquement ceux qui ont les conditions de travail les plus dures.
À la RATP, les conducteurs et agents de maintenance représentent 31 000 personnes sur 45 000. À l’échelle du pays, la part de retraités recevant une pension des régimes spéciaux était, en 2019, d’environ 6 %.
Mettre fin aux régimes spéciaux et autonomes sous prétexte d’équité et de supposée universalité est une diversion visant à faire oublier que tout le monde pâtira du report de l’âge légal de départ à la retraite.
Les régimes d’EDF et de la RATP, par exemple, prévoient de meilleures anticipations de départ et une meilleure prise en compte de la pénibilité. Les travailleurs concernés sont en effet exposés à des facteurs de pénibilité qui sont décrits dans des tableaux détaillés et, par conséquent, à des risques d’incapacité importante. Après dix-sept ans de catégorie active, donc d’exposition à ces risques et facteurs de pénibilité, ils peuvent partir à 57 ans et, demain, à 59 ans.
Nous n’avons pas eu le temps de débusquer en quoi ils seraient des privilégiés. La justice sociale et l’équité voudraient que l’on applique ces mesures sérieuses de prise en compte de la pénibilité à tous les travailleurs accomplissant des travaux pénibles, plutôt que de niveler par le bas, et, comme le font ces régimes spéciaux, que l’on prévienne avant de réparer.
S’agissant des discussions en commission, je précise qu’elles ont eu lieu à huis clos, sans captation vidéo, sans que nous ayons eu le temps de nous exprimer sur tous les amendements.
Au-delà du recours abusif à l’article 47-1 de la Constitution et de l’attente lancinante de la note du Conseil d’État, les problèmes que ce texte soulève et la manière dont le débat est muselé vous forceront bien, monsieur le ministre, à reconnaître que nous avons un véritable problème démocratique.
Le groupe écologiste estime donc que le sujet des régimes spéciaux et de son impact sur la vie de milliers de travailleurs mérite, au préalable, un débat en commission bien plus approfondi. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées des groupes SER et CRCE.)
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Madame Poncet Monge, par cette motion, vous demandez en somme le retour du débat en commission. Il me semble que vous étiez présente lors de nos réunions et que, comme un certain nombre de vos collègues, vous avez pu vous y exprimer.
Formulez-vous ici une demande de rattrapage à destination des absents ?
En l’occurrence, nous avons procédé à des heures et des heures d’auditions. Nous avons reçu l’ensemble des représentants des régimes spéciaux et leur avons d’ailleurs posé un certain nombre de questions. Certains d’entre vous, qui étaient présents lors de ces auditions, mes chers collègues, ont obtenu, me semble-t-il, des réponses.
Pour ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur cette motion. Le retour en commission, c’est non.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion. Monsieur le président, madame la présidente de la commission des affaires sociales, madame la rapporteure générale, monsieur le rapporteur, madame la rapporteure pour avis, mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement émet évidemment un avis défavorable sur cette motion. (M. Pierre Laurent s’exclame.)
Les auditions ont eu lieu. En outre, la question des régimes spéciaux n’est pas nouvelle dans le paysage politique. Année après année, projet de loi de financement de la sécurité sociale après projet de loi de financement de la sécurité sociale, ce sujet est amplement débattu au sein de votre assemblée.
Nous savons que ces régimes ont été créés à un moment où ils pouvaient sembler nécessaires. Aujourd’hui, cependant, les différences qu’ils présentent par rapport au régime général ne se justifient plus : elles ne se justifient plus au regard de l’évolution des conditions de travail des personnes concernées et encore moins quand on les compare aux conditions d’exercice de salariés affiliés au régime général qui exercent les mêmes tâches et les mêmes métiers et remplissent les mêmes missions.
Il est temps d’avancer.
M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour explication de vote.
Mme Cathy Apourceau-Poly. En 2019, le gouvernement a qualifié les régimes spéciaux de privilège pour diviser les Français et faire passer la retraite par points.
Monsieur le ministre, c’est un comble aujourd’hui de vous entendre vanter le régime par répartition, alors que vous vouliez l’abattre voilà à peine quatre ans.
Vous entendez mettre fin aux régimes spéciaux sous prétexte de renforcer la justice sociale entre les futurs retraités. Vous allez plus loin et vous proposez des mesures plus dures que ne l’avait fait Nicolas Sarkozy en son temps.
Les régimes spéciaux accordent des compensations à des travailleurs exerçant des métiers pénibles, qui exigent des astreintes fréquentes et entraînent une usure physique.
Nous nous opposons à leur suppression injuste. Il faudrait que vous nous expliquiez les raisons pour lesquelles ces métiers ne nécessitent pas de mesures spécifiques d’aménagement des carrières, comme la possibilité d’anticiper les départs à la retraite afin de mieux prendre en compte la pénibilité.
Dans ces secteurs en effet, les travailleurs ont une espérance de vie souvent inférieure à celle de la moyenne des salariés.
Nous souhaitons le maintien du modèle social actuel. Les régimes spéciaux ne sont pas des privilèges. Ambroise Croizat parlait d’ailleurs de « conquis sociaux ».
Au lieu de fermer le régime de la RATP, des électriciens et des gaziers, de la Banque de France, du Conseil économique, social et environnemental (Cese) et des clercs de notaire, il faudrait généraliser ces compensations à l’ensemble des travailleurs qui accomplissent des travaux pénibles.
Notre groupe souhaite supprimer l’article 1er, qui ferme des régimes spéciaux fondés sur la reconnaissance de la pénibilité du travail. Pour cette raison, il votera la motion de renvoi à la commission déposée par le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
Monsieur le ministre, une fois de plus, nous vous demandons l’avis du Conseil d’État que vous nous cachez soigneusement depuis le début ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE, ainsi que sur des travées des groupes SER et GEST.)
M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.
Mme Émilienne Poumirol. Monsieur le ministre, les régimes spéciaux constituent selon vous des privilèges, alors qu’ils ont été pionniers en matière de droits à la retraite. Ils ont été mis en place en raison de l’organisation et de la nature du travail dans les différents secteurs concernés et sont le fruit d’une véritable conquête sociale, qui s’est construite au fil des décennies. Ces régimes fonctionnent, en outre, sur la base d’une solidarité restreinte à une profession.
Vous voulez supprimer ces supposés privilèges, alors qu’ils ne sont que la simple reconnaissance de la pénibilité du travail exercé.
Les régimes spéciaux ont été construits et négociés pour compenser les nuisances inhérentes à des métiers qui méritent pourtant une attention particulière.
Pour notre part, nous sommes convaincus que l’ensemble des salariés qui sont exposés à la pénibilité doivent partir plus tôt à la retraite, sans qu’il faille pour autant organiser un régime favorable de reconnaissance de la pénibilité.
L’équité doit être construite en accordant davantage de droits et en améliorant la qualité du travail dans les métiers difficiles, y compris ceux qui bénéficient de régimes dits spéciaux.
D’ailleurs, monsieur le ministre, j’aimerais que vous nous expliquiez pourquoi seuls cinq régimes parmi l’ensemble des régimes spéciaux sont touchés par votre réforme. Comment avez-vous fait le tri ?
Le fait de revenir en arrière et de niveler ainsi par le bas risque en outre de nuire à l’attractivité de ces professions.
Pour ces raisons, nous sommes favorables à un renvoi à la commission afin de mieux étudier les caractéristiques de ces métiers. (M. Pierre Laurent applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Monsieur le ministre, vous avez raison : il y a des salariés qui sont affiliés au régime général – surtout depuis que l’on privatise les services publics et que l’on n’embauche plus que des contractuels – et qui ont les mêmes conditions de travail.
Vous prenez l’exemple d’un conducteur de bus RATP et d’un conducteur de car Macron. J’ignore d’ailleurs pourquoi vous citez souvent les conducteurs de bus RATP, vous devez avoir un problème avec eux… Leur exposition aux facteurs de pénibilité est en effet identique. Ce n’est pas le cas des salaires et c’est d’ailleurs la raison pour laquelle vous privatisez.
Vous proposez que le conducteur de bus RATP soit soumis aux mêmes conditions que le conducteur de car Macron : il ne partirait à la retraite qu’à 64 ans, mais potentiellement avant, s’il est « cassé » ou a été licencié pour inaptitude.
Voyez-vous, les régimes spéciaux sont préventifs. Ils n’attendent pas que les gens soient cassés pour leur permettre de partir à 59 ans ou 57 ans. Il y a là une présomption, celle selon laquelle les facteurs de pénibilité altèrent l’espérance de vie.
Quand les conducteurs de car Macron atteindront 63 ans ou 64 ans, vous devrez réparer, à défaut d’avoir prévenu ! (Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées des groupes SER et CRCE.)
M. le président. Je mets aux voix la motion n° 4738, tendant au renvoi à la commission de l’article 1er.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 145 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 342 |
Pour l’adoption | 91 |
Contre | 251 |
(La motion n’est pas adoptée.)
M. le président. En conséquence, nous passons à la discussion de l’article 1er.
Article 1er
I. – Après l’article L. 2142-4-1 du code des transports, il est inséré un article L. 2142-4-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 2142-4-2. – Les salariés dont le contrat de travail est régi par le statut particulier mentionné à l’article L. 2142-4-1 et qui sont recrutés avant le 1er septembre 2023 sont affiliés à un régime spécial de retraite régi par l’article L. 711-1 du code de la sécurité sociale. »
II. – Après le troisième alinéa de l’article L. 142-9 du code monétaire et financier, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les agents titulaires régis par ce statut et recrutés avant le 1er septembre 2023 sont affiliés à un régime spécial de retraite régi par les dispositions mentionnées à l’article L. 711-1 du code de la sécurité sociale. »
III. – Les deux premiers alinéas du paragraphe 2 de l’article 1er de la loi du 12 juillet 1937 instituant une caisse de retraite et d’assistance des clercs de notaires sont remplacés par trois alinéas ainsi rédigés :
« Par. 2. – Cette caisse a pour objet la constitution, au profit de l’affilié, d’une pension en cas d’invalidité prématurée, la gestion des risques maladie, longue maladie, maternité et décès, le versement d’indemnités en cas de chômage et, éventuellement, la création d’œuvres sanitaires et sociales, dans des conditions déterminées par le décret en Conseil d’État prévu à l’article 5 de la présente loi.
« L’affiliation à cette caisse est obligatoire pour tous les clercs et employés, dès leur entrée en fonctions, selon des modalités définies par décret en Conseil d’État.
« Cette caisse a également pour objet la constitution, au profit des clercs et employés de notaire recrutés avant le 1er septembre 2023 et qui remplissent, sans aucune interruption à compter de cette date, les conditions d’affiliation à la caisse, d’une pension en cas de vieillesse et, en cas de décès, d’une pension au profit du conjoint et des enfants mineurs. »
III bis (nouveau). – Le paragraphe 1er de l’article 3 de la loi du 12 juillet 1937 instituant une caisse de retraite et d’assistance des clercs de notaires est ainsi modifié :
1° La deuxième phrase du 1° est complétée par les mots : « des clercs et employés de notaire mentionnés au troisième alinéa du paragraphe 2 de l’article 1er de la présente loi » ;
2° Après le 1°, il est inséré un 1° bis ainsi rédigé :
« 1° bis Une autre cotisation obligatoire pour tous les notaires en exercice, les chambres, les caisses et les organismes mentionnés à l’article 1er. Cette cotisation est assise sur les revenus d’activité entrant dans l’assiette des cotisations de sécurité sociale, en application de l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, de l’ensemble des clercs et employés de notaire affiliés à la caisse. Le taux de cette cotisation est fixé par décret ; »
3° À la fin de la première phrase du 3°, les mots : « visés à l’article 1er » sont remplacés par les mots : « mentionnés au deuxième alinéa du paragraphe 2 de l’article 1er ».
IV. – Le premier alinéa du I de l’article 16 de la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 relative au service public de l’électricité et du gaz et aux entreprises électriques et gazières est ainsi modifié :
1° À la première phrase, le mot : « vieillesse, » est supprimé ;
2° Après la même première phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Le fonctionnement du régime d’assurance vieillesse prévu au même article 47, pour les personnels salariés recrutés avant le 1er septembre 2023 et qui remplissent, sans aucune interruption à compter de cette date, les conditions d’affiliation à ce régime, est également assuré par cette caisse. »
V. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° À la fin du deuxième alinéa de l’article L. 160-17, les mots : « assurés mentionnés aux articles L. 712-1 et L. 712-2 » sont remplacés par les mots : « fonctionnaires et des anciens fonctionnaires de l’État, ne relevant pas de la Caisse nationale militaire de sécurité sociale, ainsi que de leurs ayants droits » ;
2° L’article L. 200-1 est ainsi modifié :
a) Après le mot : « articles », la fin du 2° est ainsi rédigée : « L. 411-1, L. 412-2 et L. 412-8 ; »
b) Après le 5°, il est inséré un 6° ainsi rédigé :
« 6° Au titre de l’assurance vieillesse, les assurés relevant de l’article L. 381-32. » ;
3° L’article L. 311-2 est complété par les mots : « ou la nature de leur statut » ;
4° La section 10 du chapitre Ier du titre VIII du livre III est ainsi rétablie :
« Section 10
« Membres du Conseil économique, social et environnemental
« Art. L. 381-32. – Les membres du Conseil économique, social et environnemental sont affiliés à l’assurance vieillesse du régime général de sécurité sociale. » ;
5° À la fin de l’article L. 411-1, les mots : « salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d’entreprise » sont remplacés par les mots : « mentionnée à l’article L. 311-2 » ;
6° Les articles L. 711-3, L. 711-6, L. 712-1, L. 712-2, L. 712-10 et L. 713-4 sont abrogés ;
7° Le second alinéa de l’article L. 711-7 est supprimé ;
8° À l’article L. 712-3, après le mot : « décédés, », sont insérés les mots : « sont aux moins égales à celles qui résultent de la législation relative au régime général de sécurité sociale. Elles » ;
9° L’article L. 712-9 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, après le mot : « invalidité », sont insérés les mots : « dont bénéficient les fonctionnaires civils » et, à la fin, les mots : « des fonctionnaires et pour ceux qui sont en activité une cotisation au moins égale de l’État » sont remplacés par les mots : « à la charge de l’employeur » ;
b) Le second alinéa est supprimé ;
10° À l’article L. 712-10-1, les mots : « L. 712-1 et L. 712-3 du premier alinéa de l’article L. 712-9 et de l’article L. 712-10 » sont remplacés par les mots : « L. 712-3 et L. 712-9 » ;
10° bis (nouveau) Après le mot : « intéressés », la fin de la seconde phrase de l’article L. 761-5 est supprimée ;
11° Le début de la première phrase de l’article L. 921-1 est ainsi rédigé : « Les personnes mentionnées à l’article L. 311-2 et les salariés des professions agricoles qui ne relèvent… (le reste sans changement). » ;
12° Au premier alinéa de l’article L. 921-2-1, après le mot : « public », sont insérés les mots : « et les personnes mentionnées à l’article L. 381-32 ».
V bis (nouveau). – Au premier alinéa de l’article L. 722-24-2 du code rural et de la pêche maritime, les mots : « L. 712-1 et L. 712-3, du premier alinéa de l’article L. 712-9 et de l’article L. 712-10 » sont remplacés par les mots : « L. 712-3 et L. 712-9 ».
VI. – Au premier alinéa de l’article L. 4163-4 du code du travail, les mots : « ainsi que » sont remplacés par les mots : « , les salariés régis par un statut particulier et ».
VII. – Le 4° du V s’applique aux membres du Conseil économique, social et environnemental entrant en fonction à compter du 1er septembre 2023. Les I à IV, les 1° à 3° et 5° à 12° du V et le VI entrent en vigueur à la même date.
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, sur l’article.
M. Fabien Gay. L’histoire sociale de notre pays est faite de luttes et de gains sociaux, mal nommés « acquis sociaux » et que nous appellerons plutôt « conquis sociaux », puisque l’on peut – c’est ce que vous voulez, messieurs les ministres – les remettre en cause.
La question de l’égalité et de la justice sociale s’est toujours réglée par le haut, et non en tirant les droits des travailleurs et des travailleuses vers le bas.
Les régimes spéciaux sont aussi un acquis lié au statut, qui tient compte de la pénibilité du travail des cheminots, des traminots, des gaziers-électriciens et de tant d’autres d’ailleurs. Nous ne connaissons chez eux aucun privilégié ni aucun milliardaire. Ces hommes et femmes assurent chaque jour une mission de service public dans des conditions difficiles.
Les régimes spéciaux étaient des régimes pionniers. Ils avaient vocation à s’étendre à l’ensemble des travailleurs et des travailleuses.
À l’occasion de la discussion de cet article 1er, j’ai une question à poser à la droite sénatoriale. Nous sommes en désaccord sur la question des retraites ; pour autant, nous pouvons nous mettre par exemple d’accord sur la question énergétique.
Nous aurons à nous prononcer prochainement sur la création de huit réacteurs pressurisés européens (EPR). Comment ferez-vous pour recruter les ingénieurs, les soudeurs et autres professionnels du nucléaire dont nous manquons, dès lors que vous cassez leur statut et mettez fin aux régimes spéciaux qui protègent leur sécurité autant que la nôtre, mais qui sont surtout un élément d’attractivité de la filière ?
Quel signal enverrez-vous, en cassant le régime spécial des industries électriques et gazières (IEG) ? Ce régime est d’ailleurs bénéficiaire et contribue à l’équilibre du régime général – en vingt ans, il a versé à trois reprises au régime général !
Voilà la question que je vous pose. Si vous y répondez, nous continuerons le débat. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE. – Mme Victoire Jasmin, MM. Thomas Dossus et Jean-Michel Houllegatte applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. Pierre Laurent, sur l’article.
M. Pierre Laurent. Nous discutons de l’article 1er, qui porte sur les régimes de retraite improprement appelés régimes spéciaux.
Soyons clairs, la question n’est pas financière : les gains escomptés par la suppression de ces régimes seront peanuts au regard des problèmes dont on parle.
Il ne s’agit pas davantage d’une question de justice sociale : on ne fait jamais de justice sociale en tirant quelques dizaines de milliers de travailleurs supplémentaires vers le bas.
La vérité, monsieur le ministre, c’est qu’en vous attaquant à ces régimes spéciaux vous voulez continuer à démanteler des services publics dont nous avons absolument besoin pour relever le pays et le sortir de la crise actuelle.
D’ailleurs, dans les secteurs concernés, la conquête de ces statuts a constitué une part du contrat à l’origine de la construction du service public ferroviaire ou, comme l’a dit Fabien Gay, du système électrique public français.
En continuant dans la voie de la suppression, vous enverrez un signal désastreux.
À la RATP – nous y reviendrons –, 4 000 postes sont à pourvoir. Or, pour faciliter la tâche de M. Castex, qui doit recruter ces 4 000 personnes, vous enverrez le signal selon lequel les conditions de travail des embauchés de demain seront encore dégradées. Vous le faites, alors même que l’on ne parvient pas à pourvoir ces emplois à cause de la dégradation des conditions de travail dans tous les métiers de la RATP.
J’aperçois en face de moi Jean-François Rapin. Au mois d’août dernier, il manquait 300 conducteurs de trains express régionaux (TER) dans les Hauts-de-France. Comment les trouverez-vous, alors que vous envoyez le signal selon lequel les conditions de travail continueront de se dégrader ?
La question qui se pose n’est pas une question de justice. Vous allez porter un coup aux capacités de reconstruction de nos services publics, dont nous avons besoin pour la transition écologique et la réindustrialisation du pays. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE. – M. Rémi Féraud applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, sur l’article.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Je prendrai l’exemple, rarement cité, des clercs de notaire.
On le sent : l’avenir du pays dépend du statut et du régime de retraite des clercs de notaire ! (Sourires sur les travées du groupe CRCE.) Il se trouve que ce dernier ne coûte pas un centime à l’État : il n’y a jamais eu la moindre subvention d’équilibre.
Par ailleurs, ce régime assez particulier est géré de façon paritaire entre les patrons – les notaires – et les clercs de notaire. D’habitude, monsieur le ministre, vous soutenez les patrons. En l’occurrence, les patrons demandent le maintien du système !
Le taux de cotisation élevé du régime s’explique par le fait qu’il est intégré, c’est-à-dire qu’il inclut à la fois la retraite de base et la retraite complémentaire.
En quoi s’attaquer à ce système ferait-il progresser l’égalité républicaine ? La profession de clerc de notaire n’est, qui plus est, pas très attractive non plus : des milliers de postes restent aujourd’hui non pourvus. Enfin, je rappelle que les notaires sont présents sur l’ensemble du territoire national.
Franchement, je ne vois pas à quoi répond ce projet de loi, si ce n’est à une vision idéologique de l’égalité par le nivellement par le bas. C’est la toise pour tout le monde !
Si, par malheur, le progrès dans un secteur amenait les autres salariés à formuler des revendications comparables, rendez-vous compte du désastre !
La réalité est que vous n’avez de cesse de fragiliser le salariat et de supprimer des statuts et avantages qui ne sont tout de même pas le Pérou !
Avec votre mesure, les clercs de notaire perdraient tout de même 25 % du taux de réversion de leur pension. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE, ainsi que sur des travées du groupe GEST. – M. Jean-Claude Tissot applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Monique Lubin, sur l’article. (Mme Victoire Jasmin applaudit.)
Mme Monique Lubin. Voilà revenu le vieux débat de la suppression des régimes spéciaux.
La droite en rêve depuis qu’ils existent et c’est un gouvernement ni de droite ni de gauche, mais surtout ni de gauche (M. Vincent Éblé sourit.), qui menace de le faire.
Quel est l’intérêt de supprimer des régimes autonomes tels que celui des gaziers ou des clercs de notaire, qui ne demandent rien à personne ?
Quel est l’intérêt de vouloir rompre un contrat avec des agents de catégorie active de la RATP qui, de toute façon, ne prennent pas leur retraite à 52 ans, mais au minimum quatre ou cinq ans plus tard ?
Quel est l’intérêt de verser au régime général des milliers de salariés, qui viendront finalement – s’il doit y en avoir un, puisque vous nous annoncez des déficits abyssaux – creuser le déficit ?
Une fois que ces transferts seront faits, que deviendra la contribution tarifaire d’acheminement (CTA), versée par les usagers d’EDF pour financer les retraites de ses agents ? Oserez-vous la prélever au bénéfice du régime général et l’expliquerez-vous à tous les clients d’EDF ?
De même, que deviendra la cotisation particulière qui est versée par les employeurs des clercs de notaire pour financer les retraites de leurs salariés ? La réclamerez-vous également aux notaires ?
Nous aurons l’occasion de l’exprimer très clairement au cours de la matinée : cette proposition est idéologique et démagogique. Elle a pour objectif de « faire passer la pilule » auprès des salariés dont vous entendez prolonger la durée de travail.
Tout le monde sait en effet que ces régimes sont enviés. Quoi de mieux, dans ces conditions, que de dresser les moyens contre les plus modestes et vice versa ? (Mme Émilienne Poumirol et M. Rémi Féraud applaudissent.)
M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, sur l’article.
Mme Céline Brulin. Par cet article 1er, qui vise à l’extinction de cinq régimes spéciaux, vous voulez faire de ces derniers le symbole censé incarner la prétendue justice de votre réforme, en mettant fin aux privilèges inconsidérés d’une toute petite minorité qui se gaverait, au détriment de la grande majorité des salariés.
Quelle est la réalité de ces régimes ?
En France, 6,8 millions de cotisants bénéficient d’un régime de base qui n’est pas le régime général, 8,6 millions de retraités – soit près d’un sur deux – bénéficient d’un régime de base qui n’est pas le régime général, 600 000 personnes en invalidité bénéficient d’un régime général qui n’est pas le régime de base. Finalement, ce sont près de 40 % des assurés sociaux qui bénéficient d’un régime différent, hors fonctionnaires d’État.
La réalité de la situation des retraites est le fruit de l’histoire des différentes caisses, le fruit de conquêtes sociales et de la négociation des différentes conventions collectives.
Par cet article, vous visez moins de 1 % de la population active et vous en faites des boucs émissaires qui seraient à l’origine de tous les maux.
Ce dont il devrait être question aujourd’hui, c’est précisément d’élargir ce que nous considérons en effet comme des régimes pionniers. Nous pourrions, par exemple, élargir le régime de ce salarié de la RATP, dont il est question ces jours-ci et qui a été exposé à de l’amiante dans son travail d’électricien, aux « nomades du nucléaire », qui travaillent dans des entreprises sous-traitantes et subissent des pressions.
Voilà qui serait une réforme de justice, au lieu de pointer des boucs émissaires.
M. le président. Veuillez conclure, ma chère collègue.
Mme Céline Brulin. La mobilisation est un front uni de l’ensemble des salariés et vous ne parviendrez pas à les diviser. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)
M. le président. La parole est à M. Gérard Lahellec, sur l’article.
M. Gérard Lahellec. Cet acharnement contre les régimes spéciaux a quelque chose d’assez indécent.
En vérité, ces derniers sont à l’origine même de nos retraites, le premier des régimes ayant été mis en place, me semble-t-il, à la Royale.
Sans comparaison excessive, il convient de rappeler que saboter la question de la pénibilité – la raison d’être de ces régimes – revient en quelque sorte à perdre de vue ce qui fait le développement de notre pays.
Pour m’en tenir au seul exemple des marins, vous nous dites, lorsque l’on vous interroge, monsieur le ministre, qu’ils continueront à bénéficier de la retraite à 55 ans, mais vous ne nous dites jamais quel sera le montant de cette retraite et sur quelle base elle sera calculée.
En procédant ainsi, vous gommez une partie essentielle de ce qui fait notre développement, alors même que vous nous avez déjà imposé en 2018 un « nouveau pacte ferroviaire » qui a remis en cause le statut des cheminots. En 2018 également a été entérinée, après deux années de négociations, la nouvelle convention collective nationale unifiée ports et manutention.
C’est toute cette histoire, mais aussi le développement durable de notre pays, que vous remettez en cause et ce n’est pas acceptable ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, sur l’article.
Mme Raymonde Poncet Monge. Nous nous opposons à la fermeture des régimes spéciaux qui ne sont que la reconnaissance, conquise par les branches, de l’exposition aux facteurs de pénibilité du travail. Les prendre en compte participe à l’attractivité des professions à l’heure d’une crise inédite en la matière.
Le Gouvernement mobilise le principe de justice afin de justifier leur fermeture, mais votre chemin pour la justice est le nivellement par le bas et la diffusion dans tous les secteurs de la crise du travail et de l’attractivité.
Ce n’est pas cela, la justice ! La justice, c’est de permettre dans chaque branche la reconnaissance de la pénibilité, en créant des catégories actives dans chacune d’elles pour les métiers pénibles.
Ces régimes sont dits pionniers, parce qu’ils existaient avant 1945 et qu’ils ont adopté une méthode de reconnaissance différenciée des pénibilités par métier afin d’en prévenir les effets sur la santé et l’espérance de vie. C’est cette méthode que devraient appliquer toutes les branches !
Vous incitez une partie des salariés qui ne bénéficient pas des mêmes droits à demander l’abaissement de la protection de ceux qui sont mieux protégés. Manœuvre éternelle de la droite pour diviser et faire diversion aux reculs que vous voulez appliquer !
Quant aux régimes autonomes, ce sont des régimes qui surcotisent pour des prestations plus généreuses que les autres régimes et sans subvention publique d’équilibre. Alors, que leur reproche-t-on ? De s’exclure de la solidarité inter-régimes ? C’est un argument qui est en partie juste, mais cela ne vous rappelle-t-il pas un autre régime autonome du même type ?
M. le président. La parole est à M. Daniel Breuiller, sur l’article.
M. Daniel Breuiller. Monsieur le ministre, selon l’exposé des motifs, l’existence des régimes spéciaux de retraite visés à cet article 1er n’apparaît plus justifiée au regard des principes d’équité et d’universalité qui sont au cœur de notre modèle social.
Je lisais récemment dans une excellente revue, Alternatives économiques, que les régimes spéciaux représentaient moins de 3,5 % de l’ensemble des cotisants de France et qu’ils ne pesaient pas tous le même poids.
Les danseurs de l’Opéra de Paris ne sont que 168 et, si j’ai bien compris, vous n’allez pas leur imposer de danser jusqu’à 64 ans…
Quant aux salariés de la Banque de France, ils sont 8 400 et ils partent déjà en moyenne à près de 62 ans. Je ne suis pas un grand spécialiste, mais leur régime me paraît ressembler au nôtre par beaucoup d’aspects, mes chers collègues ; je me demande d’ailleurs s’il ne s’agit pas de commencer par celui-là avant de s’attaquer au nôtre…
De plus, ni le régime spécial des IEG – cent cinquante-huit entreprises de production et de distribution d’électricité – ni celui de la RATP – une entreprise qui peine à recruter – ne mettent en péril l’ensemble du système. Bruno Le Maire a d’ailleurs déclaré : « C’est moins un problème financier qu’un problème d’équité. »
L’équité, c’est une vertu qui consiste à régler sa conduite sur le sentiment naturel du juste. Mes chers collègues, il n’est pas juste de niveler par le bas !
Enfin, je voudrais savoir ce que dit la note de synthèse du Conseil d’État sur ce sujet (Exclamations amusées sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE.), car il ne s’agit pas d’un problème financier. Monsieur le ministre, si vous ne voulez pas diffuser cette note, pouvez-vous au moins nous dire ce qu’elle dit sur ce sujet particulier ? (Applaudissements sur les travées des groupes GEST et SER.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, sur l’article.
M. Jean-Yves Leconte. Monsieur le ministre, les gouvernements auxquels vous avez appartenu jusqu’au gouvernement actuel ont de la suite dans les idées !
En 2017, par ordonnance, vous avez supprimé différents critères de pénibilité du régime général. Aujourd’hui, vous nous proposez de supprimer des régimes spéciaux qui tiennent compte de cette pénibilité. Vous nous proposez l’alignement par le bas des régimes spéciaux qui prennent en compte, branche par branche, la pénibilité d’un certain nombre de métiers.
Dans ces régimes spéciaux, les cotisations des salariés sont souvent supérieures à celles du régime général. Je pense en particulier au régime des industries électriques et gazières qui est en excédent de 120 millions d’euros.
Dans quelques semaines, vous nous proposerez des dispositions relatives aux métiers en tension. Comment pouvez-vous, d’un côté, nous dire qu’il y a des métiers en tension et, de l’autre, mettre fin à des régimes spéciaux qui accueillent justement nombre de ces métiers ? Pourquoi refusez-vous de maintenir les protections qui existent dans ces métiers, notamment la prise en compte de la pénibilité ?
Compte tenu des enjeux énergétiques de notre pays, nous avons besoin d’élargir les protections qui existent dans ces métiers à l’ensemble de ceux qui vont travailler à la reconstruction et à l’efficacité de notre réseau et à la mise aux normes de nos centrales nucléaires.
Pourquoi voulez-vous fermer le régime des IEG au moment même où nous avons besoin d’attirer des compétences dans ce secteur qui est déjà en tension ?
Je ne peux pas accepter que le régime de ceux qui ont des carrières longues ou pénibles soit aligné sur celui des salariés qui ont des carrières plus confortables.
Il est important de prendre en compte la pénibilité et de toujours avoir en tête que l’espérance de vie à la retraite dépend aussi de la pénibilité de la carrière. Les régimes que vous voulez supprimer prennent justement en compte ces facteurs.
Je ne peux pas me résoudre à ce que l’intérêt général ne consiste pas à attirer les gens vers le haut.
M. le président. Votre temps de parole est écoulé, monsieur Leconte.
La parole est à Mme Corinne Féret, sur l’article.
Mme Corinne Féret. Monsieur le ministre, l’article 1er qui vise à supprimer certains régimes spéciaux constitue à l’évidence un détournement de procédure.
En effet, il est bien indiqué que cette suppression n’interviendrait que pour les personnes recrutées à compter du 1er septembre 2023. Cela n’aura par conséquent aucun effet direct sur les dépenses en 2023, puisque les premières pensions versées du fait de cette modification ne le seront pas avant de très nombreuses années.
Or une loi de financement rectificative de la sécurité sociale ne peut concerner que l’année en cours, 2023 en l’occurrence. Certes, notre collègue Bruno Retailleau a déposé un amendement portant article additionnel après l’article 7 et visant à accélérer la suppression des régimes spéciaux, mais nous en débattrons à un autre moment.
Monsieur le ministre, comment justifiez-vous un tel détournement de procédure ?
Ensuite, cet article remet gravement en cause le contrat social. Je rappelle que ces régimes spéciaux ont été instaurés au moment de la création du régime général de sécurité sociale en 1945 en reconnaissance de contraintes professionnelles – horaires décalés, travail de nuit, pénibilité, conditions de travail spécifiques, etc.
J’ajoute qu’une réforme des régimes spéciaux est déjà intervenue en 2008.
Monsieur le ministre, il faut dire la vérité aux Français ! Je sais que vous avez du mal avec cette notion et nous aurons l’occasion de le voir, lorsque nous parlerons des petites pensions. Il faut dire la vérité aux Français : cette remise en cause des régimes spéciaux ne concerne pas l’ensemble des salariés du secteur qui seraient des privilégiés, comme cela a été avancé, mais uniquement celles et ceux qui ont les conditions de travail les plus difficiles.
Je le redis, la création de ces régimes spéciaux a permis de reconnaître la pénibilité au travail et les contraintes très fortes qui pèsent sur ces salariés.
M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, sur l’article.
M. Victorin Lurel. On nous propose, dans cet article, de supprimer cinq régimes spéciaux. Je ne veux pas faire de provocation, mais comment allons-nous garder notre crédibilité, mes chers collègues ?
Les Français nous regardent et, pour eux, un régime spécial ou un régime autonome, comme celui du Sénat, c’est la même chose !
Comment dire, d’un côté, que les salariés des régimes spéciaux ayant vocation à être supprimés seraient des privilégiés, des profiteurs, et que leur travail ne serait pas pénible – j’ajoute que vous ne comptez pas rétablir les quatre critères supprimés en 2017, notamment l’exposition aux pesticides ou les vibrations – et, de l’autre, que notre propre travail serait particulièrement pénible, parce que nous siégeons la nuit ?
Comment pouvons-nous être crédibles, si nous conservons notre régime autonome très spécial ? Comment voulez-vous que les Français nous croient ? Comment pouvez-vous jouer ainsi sur les bas instincts de l’être humain, l’envie, la jalousie, pour qualifier les salariés des régimes que vous voulez supprimer de profiteurs ?
Marie-Noëlle Lienemann a parlé des clercs et employés de notaire. Leur retraite est calculée, comme pour les fonctionnaires, sur les six derniers mois de salaire, leur régime est excédentaire et la profession a du mal à recruter. Ils vont beaucoup perdre avec cette réforme. Comment pouvez-vous leur demander cela ?
Nous ne sommes pas crédibles ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Tissot, sur l’article.
M. Jean-Claude Tissot. L’article 1er prouve, dès le début de ce texte, la volonté du Gouvernement de détricoter notre modèle social, en s’attaquant à des régimes spéciaux présentés comme des « sur-privilèges » auxquels il faudrait mettre fin dans les meilleurs délais.
Face à cela, il est nécessaire, une nouvelle fois, de rappeler quelques faits.
Premièrement, les régimes spéciaux représentent moins de 3,5 % de l’ensemble des cotisants en France. Heureusement, votre stratégie d’accabler une minorité pour recevoir l’assentiment de l’opinion publique ne semble pas fonctionner.
Deuxièmement, les régimes spéciaux ne sont pas une exception française, loin de là.
Monsieur le ministre, vous qui aimez comparer – vous le faites sans cesse – notre régime aux systèmes de nos voisins européens, que pensez-vous des 22 % de retraités polonais issus de régimes spéciaux ou encore des nombreux régimes spéciaux existant en Espagne, en Belgique ou en Allemagne ?
Alors que nous devrions défendre collectivement un projet d’amélioration de notre modèle social qui prenne en compte le quotidien des individus et la pénibilité de chaque profession, vous faites le choix de vous attaquer à des régimes qui étaient précurseurs par une juste appréhension du travail et de ses effets sur les travailleurs.
Comme cela a été dit, il ne faut pas oublier que, lors de la création du régime général en 1945, les régimes existants, notamment celui des cheminots, ont été maintenus, car ils apparaissaient comme un horizon à atteindre pour le régime général.
Nous reviendrons longuement sur la question de la pénibilité lors de nos débats, mais je pense que l’adoption de l’article 1er représenterait déjà une première atteinte particulièrement regrettable à notre système de protection sociale et illustrerait le manque de considération envers ces professions pénibles au quotidien.
Pour éviter de nombreux pas en arrière et une atteinte aux fondements mêmes de notre modèle social, mes chers collègues, supprimons cet article ! (Applaudissements sur des travées des groupes SER et GEST.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, sur l’article.
M. Jean-Pierre Sueur. Je rappellerai quatre principes.
Premièrement, le principe du dialogue social. Chacun voit bien qu’il est mis à mal, puisque les organisations syndicales s’opposent unanimement à ce texte.
Deuxièmement, le principe du respect des engagements pris. Il est complètement bafoué par les mesures que vous nous proposez, monsieur le ministre.
Troisièmement, le principe de transparence. Je vais revenir à ce propos sur cette fameuse note du Conseil d’État…
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Encore…
M. Jean-Pierre Sueur. … qui revient comme un serpent de mer dans ce débat.
Monsieur le ministre, soyons clairs : il ne s’agit tout de même pas d’un document classé secret-défense – on est loin de la bombe atomique ! – ou qui serait si épouvantable que l’on ne pourrait pas le laisser entre toutes les mains… Une telle conception est complètement infantilisante !
Si le Conseil d’État a réalisé un travail, c’est évidemment au service de la République. Par conséquent, les parlementaires de la République doivent pouvoir en prendre connaissance.
Cette histoire est totalement ridicule. Monsieur le ministre, cessez ces arguties ! Ce document permettrait d’éclairer le débat ; d’ailleurs, sa diffusion éviterait certainement les éventuels faux procès.
Quatrièmement, le pragmatisme. Je ne vais pas revenir sur l’exemple des clercs de notaire avancé par Marie-Noëlle Lienemann et Victorin Lurel, mais il montre clairement que vous avez choisi le dogmatisme plutôt que le pragmatisme.
De notre côté, nous plaidons pour le pragmatisme dans la prise en compte des situations spécifiques liées notamment à la pénibilité, en particulier lorsque le régime est équilibré ou, encore plus, lorsqu’il est excédentaire. (Applaudissements sur des travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à Mme Victoire Jasmin, sur l’article.
Mme Victoire Jasmin. Les salariés attendent de chacun de nous que nous les défendions, que nous défendions leur santé, leur qualité de vie au travail, les emplois et la population en général.
Vous avez supprimé les comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT). Vous voulez faire disparaître certains régimes de retraite, mais vous voulez surtout faire disparaître les travailleurs eux-mêmes !
Aux Antilles, territoire à vocation agricole, les agriculteurs et leurs proches sont victimes des pesticides, en particulier du chlordécone. Ils souffrent de cancers. Vous avez pourtant réintroduit les néonicotinoïdes, il faut le savoir ! (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Dans le même temps, par incohérence ou provocation, vous avez supprimé des critères de pénibilité. C’est injuste, malheureux et méprisant !
C’est triste, parce que, en tant qu’assemblée des territoires, nous sommes ici pour défendre la population et je vois que nous sommes dans une tout autre dynamique : détruire tout ce qui fonctionne, détruire l’humain, déshumaniser la politique. C’est vraiment dommage ! (Applaudissements sur des travées du groupe SER.)
Mme Jacqueline Eustache-Brinio. Il ne faut tout de même pas exagérer !
M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, sur l’article.
Mme Laurence Rossignol. Ce qui est intéressant avec le débat sur cet article – je m’avance un peu, en parlant de débat… (Sourires sur les travées du groupe SER.) –, c’est qu’il nous ramène à la conception que chacun de nous se fait de la justice et de l’injustice.
J’observe que ceux qui soutiennent cet article – ils veulent même parfois en durcir encore les dispositions – parlent d’injustice pour les salariés qui ont plus, pas pour ceux qui ont moins. Jamais ils ne prennent pour étalon les salariés qui ont davantage d’acquis sociaux, qui ont mieux négocié leurs rémunérations, qui ont obtenu, par des luttes sociales, de meilleures conditions de travail.
J’observe aussi que cette conception ne vaut que dans un sens : ceux qui soutiennent cet article n’ont cette perspective que pour les salariés, il en va tout autrement pour les revenus du capital. Pour eux, il est juste que les revenus du capital assurent des conditions et une qualité de vie bien meilleures que les revenus du travail. L’injustice devient subitement vertueuse !
Dans ce sens-là, vous n’êtes pas troublés, au contraire ! Vous pensez même, d’une certaine façon, que l’injustice contribue au bonheur économique : c’est la fameuse théorie du ruissellement. Or ce que vous appelez le ruissellement, c’est simplement de l’injustice qui crée encore plus d’injustice !
On parle souvent du désamour des salariés pour leur entreprise, du manque d’esprit d’entreprise, ce que l’on appelle de nos jours l’esprit corporate… Dites-vous bien que ce qui faisait l’esprit d’entreprise, la communauté de travail, c’était aussi cette somme d’avantages – les billets de train, le régime de retraite, les réductions sur l’achat d’une voiture pour ceux qui travaillaient dans l’industrie automobile, etc.
Je ne suis pas une nostalgique du capitalisme social ou du paternalisme, mais j’en vois aujourd’hui les vertus. La volonté constante de tout niveler par le bas tend à désagréger les relations sociales et l’esprit d’entreprise. (Applaudissements sur des travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. le président. La parole est à M. Didier Marie, sur l’article.
M. Didier Marie. Monsieur le ministre, mes chers collègues de la majorité sénatoriale, vous souhaitez supprimer des régimes spéciaux. Cette suppression relève d’une logique, celle du Président de la République qui « n’adore pas ce mot de pénibilité, parce qu’il donne le sentiment que le travail serait pénible ».
C’est ce qui a amené son gouvernement à vider de sa substance le compte professionnel de prévention, créé en 2015, en supprimant dès 2017 les quatre critères principaux qui permettaient aux salariés qui effectuent des travaux pénibles de cumuler des points pour partir à la retraite de manière anticipée.
C’est la même logique qui prévaut avec cet article sur les régimes spéciaux. Vous choisissez un nivellement par le bas, alors que la justice et l’équité voudraient non seulement qu’on les conserve, mais surtout que l’on s’en inspire pour prendre en compte les difficultés de nombreux métiers.
Oui, monsieur le ministre, mes chers collègues, porter des charges lourdes, travailler en horaires décalés, subir des vibrations mécaniques, travailler dans un environnement chimique dangereux, soulever des malades, tout cela est pénible.
Ces régimes sont le fruit de conquêtes sociales par les travailleurs concernés et leurs organisations syndicales. C’est le fruit d’un compromis social. Notre conception de la relation au travail diffère de la vôtre. Nous considérons que la pénibilité existe, qu’elle pèse sur la santé des salariés et qu’elle doit se traduire par des gains en espérance de vie à la retraite en bonne santé, donc par un départ anticipé.
C’est là de votre part une mesure de diversion, s’appuyant sur un postulat faux : l’opinion publique serait favorable à la suppression de ces régimes spéciaux. C’est une mesure de diversion et de division des salariés, car vous laissez croire que ceux qui bénéficient de ces conditions seraient des privilégiés, alors qu’en fait, comme tous les autres, ils subiront votre réforme qui est tout simplement néfaste.
M. le président. La parole est à M. Yan Chantrel, sur l’article.
M. Yan Chantrel. Finalement, cet article est inséparable de l’article 7. Vous voulez tout simplement appliquer aux régimes spéciaux les mêmes dispositions et les intégrer au régime général dans le cadre d’une réforme profondément injuste et brutale.
Comme vous faites une réforme des retraites injuste qui frappera durement l’ensemble des Français, vous avez voulu détourner leur attention, en cherchant des boucs émissaires. Fidèles à vos penchants sarkozystes, c’est sur ce qu’on appelle les régimes spéciaux que vous avez choisi de vous acharner.
Vous allez nous chanter la ritournelle habituelle et faire passer des règles dérogatoires pour des privilèges. Vous allez essayer de diviser les salariés de ce pays et plus généralement l’ensemble des Français.
Vous allez nous parler du chauffeur de bus de la RATP et nous demander pourquoi un chauffeur de bus a des droits particuliers à Paris et pas à Poitiers. Pourtant, la véritable question est : pourquoi le chauffeur de bus de Poitiers qui connaît également des horaires et des conditions de travail difficiles n’a-t-il pas les droits de son collègue parisien ? Qu’attendez-vous pour lui offrir une retraite digne à un âge décent, comme il le mérite ?
Au lieu de chercher à niveler par le bas, soyez à la hauteur de l’histoire de notre pays et harmonisez par le haut. C’est cela, être juste !
En vérité, ce projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale est un exercice d’équilibre budgétaire. Après avoir rempli les poches des riches avec la suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) ou de l’exit tax, avec l’introduction de la flat tax et avec toutes les autres mesures que vous avez mises en place – il y en a tellement que l’on ne peut même pas les citer toutes ! –, ce sont les salariés et les ouvriers que vous voulez faire payer. C’est profondément scandaleux ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – Mme Marie-Noëlle Lienemann applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, sur l’article.
Mme Annie Le Houerou. Nous en sommes à l’article 1er, la première mesure de votre projet de réforme, et il s’agit de la suppression de cinq régimes spéciaux qui ont été créés pour mieux compenser la pénibilité de certains métiers.
Les régimes spéciaux sont non pas des privilèges, mais la juste compensation des contraintes du travail – travail de nuit, de week-end ou en sous-sol, horaires décalés, exposition à des risques chimiques, etc.
Nous connaissons votre avis sur ces critères de pénibilité, puisque la première mesure prise par le Président de la République en 2017 a été d’en supprimer quatre : la manutention manuelle des charges, les postures pénibles, les vibrations mécaniques et l’exposition aux risques chimiques. Une entrée en matière de mépris pour ceux qui travaillent dans des conditions particulièrement difficiles.
De plus, vous choisissez de supprimer certains régimes : la RATP, mais pas celui des avocats ; celui des industries électriques et gazières, mais pas celui des médecins ; pas celui des marins – fort justement ! Pourquoi tel ou tel régime ? Sur quels critères vous êtes-vous fondés, alors que tous ces régimes sont justifiés ?
Nous pensons que ces régimes spéciaux font partie des éléments d’attractivité de ces métiers et qu’ils sont justifiés. Quelque 4 000 postes vacants à la RATP ! Ce sont des métiers qu’il faut rendre attractifs en compensant leur pénibilité, si nous voulons recruter. C’est pourtant ce que vous avez rejeté en 2017.
Contrairement à ce que vous laissez penser, ces régimes spéciaux concernent uniquement ceux qui sont soumis à des travaux difficiles et non tous les salariés.
Vous supprimez des acquis sociaux pour les travailleuses et travailleurs français. Vous protégez, encore une fois, les plus riches, ceux qui ne vivent pas de leur travail, mais qui se contentent d’attendre que le fruit de leur capital leur tombe dans les mains.
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, sur l’article.
M. Guillaume Gontard. Les régimes spéciaux reviennent à chaque réforme comme le mal absolu. Je note d’ailleurs – cela a été dit – que l’on choisit ceux qui sont concernés… Pourquoi cet acharnement ? Pourquoi vouloir revenir sur ces acquis sociaux ?
Je pense que c’est tout simplement pour diviser, cliver, mépriser les travailleurs, opposer l’agent EDF aux contractuels, le conducteur de car Macron au chauffeur de bus de la RATP. Je ne vois que cette raison.
Le problème n’est pas le statut de la RATP – Raymonde Poncet Monge l’a rappelé –, mais c’est le fait que le chauffeur d’un car Macron n’en bénéficie pas.
Diviser pour éviter de parler des vraies inégalités, des vrais privilèges, des profits records, des profiteurs de crise.
Diviser pour éviter de parler de justice sociale et d’équité, parce que vous n’aimez pas cela !
Bien plus, l’article 1er est caractéristique de la méthode du Gouvernement : quelques petits accords avec ses alliés de droite, une absence d’études et d’analyses – on les attend toujours ! –, un nivellement par le bas. Bref, tout simplement du bricolage, à l’image de l’ensemble de ce texte !
M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Fichet, sur l’article.
M. Jean-Luc Fichet. Le Président Macron a supprimé des critères de pénibilité, en expliquant qu’il ne fallait pas donner le sentiment que le travail était pénible.
En visitant le marché de Rungis, le président a peut-être – je dis bien, peut-être – entendu que les horaires, les charges lourdes, le stress, les troubles musculo-squelettiques, la charge mentale sont autant de raisons qui rendent les métiers pénibles, difficiles et peu attractifs.
En visitant le salon de l’agriculture, le Président de la République nous a expliqué que le monde agricole travaillait beaucoup, que ses métiers étaient pénibles – pas de week-end ni de jour férié – et qu’il était important de regarder avec attention les conditions de travail de ce secteur. Il a expliqué que les difficultés du monde agricole justifiaient la retraite à 64 ans pour tous.
Je pense au contraire que nous devrions nous poser la question de créer de nouveaux régimes spéciaux pour tous ceux qui travaillent dans des conditions extrêmement difficiles – les salariés de Rungis, le secteur agricole, etc. Nous devons faire en sorte que ces métiers redeviennent attractifs, tant par les conditions de travail que par l’espérance d’une retraite agréable après la vie professionnelle.
M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé, sur l’article.
M. Franck Montaugé. Monsieur le ministre, par cet article, vous comptez mettre fin à la plupart des régimes spéciaux que notre système de retraite permet actuellement. Ces régimes constituent, selon vous, une dépense exagérée qui ne serait plus soutenable par notre système de retraite.
En réalité, et vous le savez, les dépenses liées aux régimes spéciaux demeurent contenues en proportion des recettes totales de cotisations sociales.
Plus encore, ces régimes permettent à des secteurs et à des cadres d’emploi de rester attractifs là où la main-d’œuvre, pourtant essentielle, peine à être trouvée.
Par ailleurs, nous avons bien noté – c’est un exemple – que vous préservez la faculté pour les hauts fonctionnaires de cotiser, donc de bonifier leur future retraite sans exercer la mission de service public en rapport avec cette retraite future – ce n’est pas un regret de ma part, bien au contraire.
Vous demeurez dur avec les faibles et faible avec les forts ! Avec cet article 1er, nous avons une fois de plus la preuve que, depuis 2017, votre grand œuvre est bien de casser tous les statuts un tant soit peu protecteurs.
Le « quoi qu’il en coûte » socialement comme viatique politique, voilà votre seule boussole ! Ce n’est pas comme cela que l’on donnera au travail la place et la valeur qui doivent être les siennes en France et qu’appellent de leurs vœux toutes les composantes de notre société.
Plus encore, monsieur le ministre, au-delà de ceux qui sont directement concernés par les régimes spéciaux, les Français ne veulent pas de votre réforme. Écoutez-les !
M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville, sur l’article.
Mme Angèle Préville. Prévoir dès le début de l’examen de ce projet de loi de supprimer certains régimes spéciaux, c’est agiter un chiffon rouge ! Que pensez-vous faire ? Diviser les Français, les monter les uns contre les autres ? Pourquoi certains régimes et pas les autres ? Quelles sont les justifications de ce choix ? Au fond, pourquoi les supprimer ?
Les régimes spéciaux, c’est une longue histoire sociale de conquêtes de haute lutte, car, il faut le rappeler, rien n’a jamais été donné. C’est tout simplement la prise en compte de la dureté du travail, ce que l’on appelle maintenant pénibilité. Oui, certains métiers sont durs, abîment.
Finalement, avons-nous abandonné l’idée même de progrès social ? Oui, j’ai bien dit progrès, ce n’est pas un gros mot : le progrès, c’est un avenir qui donne envie. C’est tout l’archaïsme de ce débat : il est déconnecté de la transformation profonde de notre société, qui aspire à mieux vivre au travail. Au regard de toute la richesse produite dans notre pays, d’autres financements sont largement possibles. Voilà le vrai défi que ce texte devrait relever ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE.)
M. le président. La parole est à M. Thomas Dossus, sur l’article.
M. Thomas Dossus. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le premier article de ce projet de loi prévoit la suppression de régimes de retraite spécifiques à un certain nombre de professions.
Cette place, en début de texte, ne doit rien au hasard. Elle est étonnante : on aurait pu débattre du rétablissement d’un certain nombre de facteurs de pénibilité au travail, on aurait pu débattre de progrès social… Non !
En réalité, la ficelle est un peu grosse. Personne n’est dupe de cette tentative de diversion. Vous voulez monter les Français les uns contre les autres, mais vous n’y arriverez pas. Il n’y a aucune justice sociale, aucun progrès social dans le recul des droits des travailleurs. Personne ne souhaite niveler par le bas les conditions de travail. Vous ne parviendrez pas à briser l’union de tous les travailleurs contre votre projet de réforme.
Cela a été dit, la particularité des régimes spéciaux ne vient pas de nulle part. Elle est le fruit d’une histoire, l’histoire sociale de notre pays, de notre République – parce que, oui, la République française est sociale. Justement, où sont les défenseurs de ce roman national, des valeurs de notre République ? Où sont celles et ceux qui n’ont de cesse de défendre l’universalisme, ce phare que devraient être la France et son modèle, celles et ceux qui ont la République à la bouche, mais uniquement pour nous diviser ?
Nous sommes face à une crise du travail, de l’emploi de l’attractivité d’un certain nombre de métiers, qui met notamment à mal nos services publics. Votre engouement à détériorer en permanence les conditions et statuts de celles et ceux qui portent notre société, les essentiels, les premiers de cordée met à mal notre société et notre République. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST et sur des travées des groupes SER et CRCE.)
M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, sur l’article.
M. Olivier Jacquin. Monsieur le président, monsieur le ministre, comme agriculteur, je suis rompu à des conditions de travail difficiles. Je crois pouvoir en parler.
Comme parlementaire, je me suis spécialisé dans les questions de transport et j’ai réalisé diverses immersions pour mieux comprendre ce milieu. J’ai ainsi accompagné un conducteur de train – ce n’est pas l’objet de nos débats – et un conducteur de métro. Je pourrais vous en parler, mais je vous parlerai plutôt des conducteurs de bus de la RATP de la grande couronne. Allez faire un tour dans les bus de nuit dans la Seine-Saint-Denis : vous verrez l’épreuve que représente le contact avec des usagers à la limite de la violence. Vous verrez si de telles situations font envie !
M. Philippe Pemezec. La Seine-Saint-Denis, c’est vous qui l’avez faite ainsi !
M. Olivier Jacquin. J’ai envie de vous parler de ce régime spécial de la RATP, avec ses horaires atypiques, la fréquence des astreintes, l’usure physique, pour les uns liée au travail souterrain, pour les autres, soumis au contact avec des usagers difficiles, au travail en surface, à l’air libre.
Dans un contexte d’ouverture à la concurrence, de crise du recrutement, le mal-être des conducteurs est important. Plus de 4 000 offres de conducteurs ne sont pas pourvues en Île-de-France.
La dérégulation que vous proposez via la suppression du régime spécial de la RATP ne facilitera certainement pas les choses, bien au contraire : elle contribuera à rendre cette profession encore plus injuste. C’est absolument inacceptable et c’est la raison pour laquelle nous demandons la suppression de cet article. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – M. Jacques Fernique applaudit également.)
Mme Laurence Rossignol. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Houllegatte, sur l’article.
M. Jean-Michel Houllegatte. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le système de retraite est un ensemble complexe, qui produit de multiples interactions. Dès lors que l’on modifie l’un des éléments, celui-ci interagit avec d’autres, générant des effets induits, qu’il est important de discerner. C’est pourquoi le cadre du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale est trop étriqué pour traiter l’ensemble du sujet.
J’en veux pour preuve – nous en avons discuté hier – l’irrecevabilité de nombreux amendements et les nombreuses demandes de rapports, dès lors que l’on est en dehors du cadre de financement de la sécurité sociale. Nous abordons l’article qui supprime certains régimes spéciaux sous un angle budgétaire, sans nous soucier d’une vision globale sur ces régimes et des conséquences qui découleront de leur suppression.
Comme l’ont souligné de nombreux orateurs, ces régimes spéciaux sont le fruit d’une histoire, l’aboutissement de longues négociations, la prise en compte d’une spécificité liée aussi à l’intérêt national.
Ils sont souvent discrédités et jetés en pâture à l’opinion, sans tenir compte de l’ensemble des conditions dans lesquelles s’exercent les professions concernées, de leurs contraintes particulières, certes, mais aussi de l’ambition qui a présidé à leur création : en 1945, il fallait reconstruire, relever les défis et mobiliser l’ensemble des acteurs et des citoyens.
En 2023, nous avons l’immense défi de la transition énergétique, du développement des transports collectifs, des énergies et mobilités. Tels sont les enjeux pour lesquels il faut désormais une ambition politique. Cette ambition ne pourra jamais être atteinte en stigmatisant ceux qui doivent en être les acteurs. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Laurence Rossignol. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme la rapporteure générale.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avant d’attaquer l’examen des très nombreux amendements à l’article 1er, je souhaite réagir à ce qui a d’ores et déjà pu être dit sur les régimes spéciaux.
Premièrement, il ne s’agit pas de supprimer les régimes spéciaux : il s’agit de fermer le régime de retraite. (Exclamations sur les travées du groupe CRCE.) Les autres risques de sécurité sociale continueront à être couverts par les régimes spéciaux.
Attention, chers collègues du groupe CRCE ! Vous qui êtes férus de sémantique, soyez prudents : ce n’est pas une suppression, c’est une fermeture, et d’un seul risque.
Mme Annick Jacquemet et M. Jean-Michel Arnaud. Très bien !
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Deuxièmement, vous avez beaucoup fait appel à l’histoire. Pour ce qui me concerne, je respecte l’histoire et ceux qui se sont battus pour ces régimes spéciaux – ils font, de fait, partie de l’histoire. Reste que nous avons avancé : les choses se passent différemment aujourd’hui. Cela me fait penser à la « mutabilité », terme qui désigne l’adaptation à la vie contemporaine, dans l’intérêt général.
Puisque vous demandiez un référendum hier, je vous propose d’organiser un référendum pour demander aux Français s’ils veulent ou non maintenir les régimes spéciaux. (Chiche ! et vives exclamations sur les travées des groupes SER et CRCE.) Vous verrez que le résultat ne sera pas le même, parce que les choses ont changé ! (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.)
M. le président. Mes chers collègues, c’est encore moi qui fais la police dans cette assemblée !
De la même manière que nous avons écouté tous les intervenants à l’article 1er, nous écouterons dans le calme tous ceux qui défendent leur amendement. Je vous demande de ne pas interrompre les orateurs qui ne sont pas membres de votre groupe.
Veuillez poursuivre, madame la rapporteure générale – et vous seule. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC. – M. Martin Lévrier applaudit également.)
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je tiens à rappeler que les régimes spéciaux devaient avoir un caractère provisoire lorsqu’ils ont été créés, ainsi que cela transparaît dans la rédaction de l’article L. 711-1 du code de la sécurité sociale : « demeurent provisoirement soumises à une organisation spéciale de sécurité sociale […] les branches d’activités ou entreprises… » Les régimes spéciaux n’étaient pas faits pour durer.
Vivait-on après la Libération comme l’on vit aujourd’hui ? Non !
Ces métiers sont-ils aussi pénibles qu’ils l’étaient hier ? (Oui ! sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.) Non !
Quand on parle par exemple des conducteurs de bus aujourd’hui, ne doit-on pas réfléchir en termes de branche plutôt que de statut ? (Marque d’approbation sur les mêmes travées.) Il me semble que oui. Être un chauffeur de la RATP à Paris, n’est-ce pas la même chose que l’être dans une autre ville ? Je pose la question.
Ces débats ont lieu dans toutes les familles. Tous se demandent : est-ce juste ? Est-ce équitable ? Non, cela ne l’est pas.
Si nous souhaitons fermer ces régimes spéciaux de retraite, c’est parce qu’ils sont, aujourd’hui, déficitaires et qu’ils le sont de façon importante.
Il n’est qu’à regarder le coût de la subvention publique versée à la SNCF – sa situation est différente, puisque ce régime est déjà fermé, mais l’État compense encore, et aujourd’hui encore plus qu’avant –, à la RATP et aux industries électriques et gazières : 5,7 milliards d’euros. Certes, il s’agit des trois régimes spéciaux les plus importants, mais la somme est énorme ! Est-ce juste ? C’est la solidarité nationale qui intervient. Les autres régimes sont financés par des taxes, payées par l’ensemble des Français : c’est encore la solidarité nationale. Là aussi, est-ce normal ?
En fait, pour beaucoup de régimes spéciaux, le nombre des cotisants est largement inférieur à celui des pensionnés. C’est pourquoi il faut les faire entrer dans le régime de base d’aujourd’hui.
Mes chers collègues, nous aurons l’occasion, au travers des amendements que vous présenterez, de revenir sur chacun de ces régimes spéciaux.
Si nous sommes évidemment attachés à l’histoire, il faut ouvrir les yeux et s’adapter au présent. Fermer ces régimes spéciaux aujourd’hui n’est tout de même pas très difficile en soi ! (M. Pierre Laurent s’exclame.) En effet, qu’est-ce que cela représente par rapport à l’ensemble des Français qui feront des efforts du fait de l’adoption de projet de loi ? Il convient de se poser la question.
On demande des efforts à tous les Français, quels qu’ils soient ! (Applaudissements sur des travées du groupe UC. – M. Bruno Retailleau applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. René-Paul Savary, rapporteur de la commission des affaires sociales pour la branche vieillesse. Je ferai ce rappel très factuel : la majorité sénatoriale est constante dans ses positions. Voilà quatre ans que nous présentons un projet de réforme qui prend en compte une convergence des régimes spéciaux. Monsieur le ministre, je vous remercie de nous avoir rejoints sur cette philosophie.
Vous proposez une fermeture aux nouveaux entrants. Ce n’est pas d’une redoutable brutalité, puisque ceux qui sont actuellement dans le régime pourront continuer à bénéficier de leur retraite pendant en moyenne vingt ans, à l’issue d’une carrière d’une quarantaine d’années. La fermeture des régimes n’interviendra donc pas avant au moins soixante ou soixante-dix ans. Que les choses soient bien claires.
Nous verrons, à l’article 7, que nous pensons que nous pouvons accélérer un peu les choses : il n’est pas nécessaire que le processus dure autant d’années.
Par ailleurs, mes chers collègues, vous avez décrit des métiers particulièrement durs, pénibles et, parallèlement, vous avez mentionné le manque d’attractivité. Je crois que, plus on met en exergue la brutalité de ces métiers, moins on trouvera de nouveaux entrants ! (Exclamations ironiques sur les travées du groupe SER.)
M. Patrick Kanner. C’est spécieux !
M. René-Paul Savary, rapporteur. Par ailleurs, il me semble important qu’il n’y ait pas de différence de traitement au sein des entreprises concernées. Les Français sont sensibles à ce que le chauffeur de bus de Paris soit traité à l’égal de celui qui travaille dans d’autres grandes villes, puisqu’il est soumis aux mêmes contraintes. Pensez-vous normal que la pension des uns soit calculée sur les six derniers mois, alors que celle des autres l’est sur les vingt-cinq meilleures années ? Cette inégalité peut sans doute se réduire dans le temps. Pour notre part, nous le pensons.
Nous proposons d’aligner les règles applicables aux différents métiers et de faire en sorte que l’on prenne en compte les difficultés. Il faudra bien qu’un jour on arrive à harmoniser les statuts pour ceux qui exercent le même métier, que ce soit dans la fonction publique ou dans le secteur privé…
Les âges de départ doivent être rapprochés pour ceux qui exercent le même métier, qu’ils soient actifs ou sédentaires, quelle que soit la région où ils travaillent. Il ne s’agit pas d’occulter les difficultés : il existe des catégories actives dans les régimes spéciaux, dans le régime de la fonction publique… N’est-il pas légitime d’aligner les âges de départ ? Les superactifs peuvent également être pris en compte.
On le voit, la réforme est très progressive quant à la fermeture des régimes spéciaux.
On peut se demander pourquoi on ne nous propose la fermeture que de cinq régimes. C’est la question qui se pose au Gouvernement et M. le ministre y répondra sans doute.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Olivier Dussopt, ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, dans le prolongement des propos de M. le rapporteur, la question qu’il faut se poser lorsque l’on parle des régimes spéciaux est celle de l’équité.
Cela signifie non pas qu’il faille supprimer la prise en compte de la pénibilité, mais qu’il faut faire en sorte que l’ensemble des salariés voient les conditions d’exercice de leurs activités prises en compte de la même manière. La pénibilité, l’exposition à l’usure doivent être mesurées de la même façon, dans une logique d’effectivité des conditions d’exercice plutôt que dans une logique de statut. En effet, derrière une logique de statut, il peut y avoir des inégalités et, derrière un même statut, l’effectivité de l’exposition à la pénibilité et des conditions de travail n’est évidemment pas la même.
Nous avons cette volonté et nous aurons l’occasion, lors de l’examen de l’article 9, dans quelques heures,…
Plusieurs sénateurs du groupe CRCE. Dans quelques jours !
M. Olivier Dussopt, ministre. … d’avancer sur la prise en compte des critères ergonomiques comme sur l’amélioration du compte professionnel de prévention et, ainsi, de faire en sorte que les salariés et, au-delà, l’ensemble des travailleurs exposés à des conditions d’exercice difficiles soient mieux protégés.
Nous avons fait le choix de proposer au Parlement la fermeture du régime d’assurance vieillesse uniquement pour cinq régimes spéciaux et de conserver tout particulièrement les avantages et conditions de régimes spécifiques – je pense à la Comédie-Française et à l’Opéra de Paris, essentiellement pour des questions d’âge et d’aptitude physique requise pour la pratique de la danse et la représentation des spectacles.
Monsieur Lahellec, nous ne voulons pas toucher à la question du régime spécial des marins et des pêcheurs. À travers eux, en réalité, nous pensons à tous ceux qui sont affiliés à l’Établissement national des invalides de la marine (Enim). En effet, le métier de marin-pêcheur est le plus exposé à des conditions d’exercice particulièrement difficiles.
M. Michel Canévet. C’est vrai !
M. Olivier Dussopt, ministre. Ce qui est encore plus dramatique, c’est qu’il s’agit du métier où la part des accidents mortels est la plus importante : pour les pêcheurs en haute mer, notamment en eau très froide, le moindre accident peut être absolument tragique et mortel. C’est l’une des raisons pour lesquelles nous avons fait le choix de maintenir l’Enim.
Pour le reste, en matière de régimes d’assurance vieillesse, l’objectif est de parvenir à une véritable harmonisation, à l’exception des trois régimes que je viens d’évoquer.
Pour conclure, je formulerai trois remarques. Les deux premières portent sur les régimes spéciaux et la troisième a trait à une question que j’ose qualifier de « récurrente » dans le débat depuis hier.
La première remarque concerne la question de l’équilibre économique et financier des régimes spéciaux. En réalité, la plupart de ces régimes ne sont pas équilibrés. De fait, on ne peut pas considérer qu’un régime est équilibré quand il l’est grâce au versement d’une subvention de l’État ou au paiement d’une contribution par les usagers.
Je pense au régime des IEG, puisque la contribution tarifaire d’acheminement, qui porte mal son nom, s’élève à 1,8 milliard d’euros. Pardon de le dire ainsi, mais il est plus facile d’équilibrer un régime quand il bénéficie d’une contribution fiscale spécifique à hauteur de 1,8 milliard d’euros !
La notion d’équilibre des régimes ne tient donc pas dès lors que l’on retire les subventions spécifiques versées par l’État à certains régimes – par exemple, la RATP – ou des contributions ayant un caractère fiscal payées sur la facture de chacun des consommateurs – je pense aux IEG.
Nous avons un devoir de responsabilité par rapport au coût pour la collectivité que représentent aujourd’hui des régimes qui, par leur logique de statut, entretiennent des iniquités, alors même qu’ils sont coûteux pour l’ensemble des contribuables. Tout cela n’est évidemment pas légitime.
La seule question, derrière le financement des régimes spéciaux, se résume à cette alternative : est-ce au contribuable qu’il revient de financer les dispositions particulières d’un régime spécial, quand bien même il serait considéré que ce dernier détermine l’attractivité des métiers, ou est-ce aux entreprises dans lesquelles subsisteront des régimes spéciaux, au titre de l’application de la clause du grand-père, qu’il revient d’assurer l’attractivité des métiers par le dialogue social et un financement spécifique, quitte à ce que ce financement passe, selon les cas, par l’usager ou le client plutôt que par le contribuable général ? C’est la question de l’équité. Revient-il au contribuable ou à l’employeur, dans le cadre du dialogue social, d’assurer l’attractivité d’un métier ?
La deuxième remarque concerne une solution qui a été proposée à l’occasion des différentes interventions : s’il existe une difficulté ou une forme d’iniquité – c’est peut-être, d’ailleurs, une façon de la reconnaître –, il faudrait que l’ensemble de celles et de ceux qui exercent des métiers identiques ou proches puissent bénéficier des mêmes conditions.
J’ai notamment entendu que les agents de conduite des métros et des bus d’autres communes que celles qui sont couvertes par la RATP devraient pouvoir bénéficier des mêmes conditions de départ anticipé.
Souvent, cette solution nous est proposée au nom du pragmatisme. C’est la démonstration que le pragmatisme et le réalisme ne font pas toujours bon ménage, en tout état de cause qu’ils ne sont pas synonymes ! En effet, une telle mesure aurait un coût absolument impossible à financer, sauf à renchérir de manière drastique le coût des services rendus par celles et ceux qui seraient concernés, ce qui est évidemment inenvisageable.
La troisième et dernière remarque n’a pas grand-chose à voir avec les régimes spéciaux. À plusieurs reprises est revenue, aujourd’hui comme hier, la question de la fameuse note de synthèse du Conseil d’État. (Exclamations sur des travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
Sans vouloir faire offense à quiconque en le rappelant, je répète, comme je l’ai dit hier, que le Conseil d’État est bicéphale : il a un rôle de juridiction et un rôle de conseiller du Gouvernement. Un certain nombre de documents qu’il produit dans le cadre des conseils qu’il délivre au Gouvernement sont publics, conformément à une décision orale prise par le président François Hollande en 2015. D’autres, qui concernent les lois de finances ou les lois de financement de la sécurité sociale, n’ont pas de caractère public : seuls un certain nombre de parlementaires, du fait de leurs prérogatives de contrôle et d’évaluation, peuvent y avoir accès, s’ils le souhaitent et dans des conditions déterminées par la loi, mais aussi par le secrétariat général du Gouvernement. Je souligne, au passage, qu’y avoir accès ne signifie pas être autorisé à les publier.
Le secrétariat général du Gouvernement est à la disposition de ceux qui, parmi vous, mesdames, messieurs les sénateurs, disposent de ces prérogatives – je ne doute pas qu’il y en ait parmi vous, parce que vous êtes, sur ce plan, organisés comme le sont les députés – et souhaiteraient consulter ces documents. Cependant, s’il est dans votre droit de me demander, autant de fois que vous le souhaitez, de rendre publique une note qui n’a pas vocation à l’être, il est dans le mien de maintenir ma réponse et même de considérer qu’elle a un caractère définitif.
Au reste, je m’étonne de devoir rappeler à un ancien président de la commission des lois le principe de séparation des pouvoirs et le rôle du Conseil d’État. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, UC et Les Républicains.)
Rappels au règlement
M. Fabien Gay. Monsieur le président, mon rappel au règlement se fonde sur l’article 36 de notre règlement.
Monsieur le ministre, vous le savez, nos travaux sont extrêmement suivis. D’ailleurs, les salariés des industries électriques et gazières ont décidé, dès hier soir, avec leur syndicat majoritaire, la CGT, de reprendre leur outil industriel en main, dans le nucléaire, l’hydroélectrique et le thermique.
M. Marc-Philippe Daubresse. Cela s’appelle de la pression !
M. Fabien Gay. De Flamanville à Tricastin, à Martigues ce matin, à Paluel, à Saint-Alban, à Ajaccio, ce sont d’ores et déjà 4 000 mégawattheures en moins sur le réseau électrique. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Marc-Philippe Daubresse. Ils prennent l’économie en otage !
M. Fabien Gay. Dans le même temps, les Robins des Bois ont, dès hier, procédé à des centaines de distributions d’électricité à celles et ceux qui en avaient été privés ou ont basculé les artisans, commerçants ou petites collectivités au tarif zéro.
Ils se rappellent, d’ailleurs, que vous avez refusé le tarif réglementé pour toutes les collectivités que nous avions proposé, comme vous avez refusé de sortir du marché européen de l’électricité.
Pour notre part, nous les soutenons et saluons leur mobilisation.
Nous reposons la question – je l’adresse directement à M. Retailleau, président du groupe Les Républicains : alors que nous partageons le souci de la souveraineté électrique et énergétique de la France et alors que nous voterons, au mois de juin ou juillet prochain, la création de huit nouveaux EPR, comment y parviendrons-nous sans salariés sous statut et sans régimes spéciaux ?
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Vous l’avez déjà dit !
M. Fabien Gay. Comment attirerons-nous des talents sans attractivité ? Il faut nous le dire !
M. Marc-Philippe Daubresse. Il faut un régime spécial pour cela ?
M. Fabien Gay. À moins que vous ne vous satisfassiez du dumping social et que nous allions chercher des travailleurs et des travailleuses de l’autre côté du monde… À moins que vous ne vous satisfassiez de ce qui a empêché la naissance de l’EPR de Flamanville et que ce soit, en réalité, l’organisation du dumping social que vous vouliez.
Il faut répondre à cette question ! Vous ne pourrez pas rester silencieux aujourd’hui. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)
M. le président. Monsieur Gay, votre rappel au règlement ne portait pas sur l’organisation de nos travaux ! C’est un détournement manifeste de procédure. C’est le premier et le dernier.
Je le dis clairement : si, dans la suite de la discussion, un orateur recourt au rappel au règlement pour détourner la procédure, je lui retirerai la parole immédiatement. (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC. – M. Martin Lévrier applaudit également.)
La parole est à M. Pierre Laurent, pour un rappel au règlement.
M. Pierre Laurent. Monsieur le président, mon rappel au règlement se fonde sur l’article 23 bis A, dont le premier alinéa prévoit que « les sénateurs s’obligent à participer de façon effective aux travaux du Sénat ».
J’ai une question à poser à nos collègues du groupe Les Républicains : estiment-ils, par l’attitude qu’ils ont adoptée depuis hier, qu’ils participent aux travaux du Sénat ? (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Marc-Philippe Daubresse. Nous avons deux rapporteurs !
M. Pierre Laurent. Leur attitude consiste à boycotter les travaux du Sénat et je demande au groupe s’il va continuer ainsi…
M. le président. Monsieur Laurent, votre rappel au règlement est aussi un détournement de procédure !
Cela suffit ! Je vous retire la parole. (Protestations sur les travées du groupe CRCE. – M. Pierre Laurent poursuit son intervention hors micro, sous les exclamations du groupe Les Républicains.)
La parole est à M. Claude Raynal, pour un rappel au règlement
M. Claude Raynal. Monsieur le président, mon rappel au règlement se fonde sur l’article 33 du règlement, relatif à la police de la séance.
Sur la forme, je n’ai pas de commentaire à faire sur votre intervention de tout à l’heure. Sur le fond, je partage l’idée que nous devons nous respecter et nous écouter au sein de cette assemblée. J’aurais cependant apprécié que votre interpellation soit élargie à l’ensemble des intervenants.
Je le dis très amicalement, l’intervention de Mme la rapporteure générale, qui s’adresse à une partie de l’hémicycle en lui posant des questions, appelle des réponses. Je rappelle que, une fois que l’on a pris la parole, on ne peut plus intervenir de nouveau dans le débat. Dès lors, comment répondre à des questions qui nous sont posées après coup ?
J’en appelle donc évidemment, sur la forme, au respect de la parole de chacun dans le débat, mais aussi à ce que les rapporteurs s’abstiennent de telles interpellations. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Marc-Philippe Daubresse. En plus, ils veulent encadrer le débat…
M. le président. Acte vous est donné de votre rappel au règlement, mon cher collègue.
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour un rappel au règlement.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Monsieur le président, ce rappel au règlement se fonde sur l’article 36 du règlement, relatif à l’organisation de nos travaux.
Nous sollicitons une suspension de séance de quelques minutes pour réorganiser les dossiers de séance à la suite de nombreuses erreurs matérielles dans l’ordre des signataires des amendements. (Exclamations sur les travées du groupe UC.)
M. le président. Acte vous est donné de votre rappel au règlement, ma chère collègue.
Il n’y a pas de suspension de droit pour corriger des erreurs matérielles, mais une brève suspension permettra à chacun de se calmer…
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix heures cinquante-cinq, est reprise à onze heures.)
M. le président. La séance est reprise.
Article 1er (suite)
Amendements identiques de suppression de l’article
M. le président. Je suis saisi de cinquante et un amendements identiques.
L’amendement n° 2 rectifié est présenté par Mmes Assassi et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, MM. Ouzoulias et Savoldelli et Mme Varaillas.
L’amendement n° 129 est présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel.
L’amendement n° 130 est présenté par M. Gontard.
L’amendement n° 131 est présenté par MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Labbé, Parigi et Salmon.
L’amendement n° 200 est présenté par Mme Blatrix Contat.
L’amendement n° 280 est présenté par M. Féraud.
L’amendement n° 312 est présenté par M. Pla.
L’amendement n° 342 est présenté par Mme Briquet.
L’amendement n° 366 est présenté par Mme Féret.
L’amendement n° 449 est présenté par M. Fichet.
L’amendement n° 484 est présenté par M. Chantrel.
L’amendement n° 518 est présenté par M. Gillé.
L’amendement n° 567 est présenté par Mme de La Gontrie.
L’amendement n° 579 est présenté par M. Redon-Sarrazy.
L’amendement n° 666 est présenté par Mme Le Houerou.
L’amendement n° 726 est présenté par M. M. Vallet.
L’amendement n° 808 est présenté par M. Jacquin.
L’amendement n° 821 est présenté par M. Lozach.
L’amendement n° 861 est présenté par M. Durain.
L’amendement n° 896 est présenté par M. Lurel.
L’amendement n° 941 est présenté par M. Cardon.
L’amendement n° 980 est présenté par M. Raynal.
L’amendement n° 1008 est présenté par M. Stanzione.
L’amendement n° 1029 est présenté par Mme G. Jourda.
L’amendement n° 1059 est présenté par M. Houllegatte.
L’amendement n° 1075 est présenté par M. Tissot.
L’amendement n° 1096 est présenté par M. Éblé.
L’amendement n° 1151 rectifié bis est présenté par Mme Lubin.
L’amendement n° 1205 est présenté par M. Mérillou.
L’amendement n° 1238 est présenté par Mme Jasmin.
L’amendement n° 1268 est présenté par M. Montaugé.
L’amendement n° 1314 est présenté par Mme Préville.
L’amendement n° 1338 est présenté par M. Marie.
L’amendement n° 1371 est présenté par M. Bourgi.
L’amendement n° 1404 est présenté par M. Sueur.
L’amendement n° 1434 est présenté par M. Kerrouche.
L’amendement n° 1502 est présenté par Mme M. Filleul.
L’amendement n° 1541 est présenté par Mme Monier.
L’amendement n° 1579 est présenté par M. Assouline.
L’amendement n° 1590 est présenté par M. J. Bigot.
L’amendement n° 1620 est présenté par Mme Poumirol.
L’amendement n° 1650 est présenté par Mme Meunier.
L’amendement n° 1662 est présenté par Mme Bonnefoy.
L’amendement n° 1691 est présenté par M. Leconte.
L’amendement n° 1748 est présenté par M. Todeschini.
L’amendement n° 1789 est présenté par M. Jomier.
L’amendement n° 1817 est présenté par M. Kanner.
L’amendement n° 1990 est présenté par Mme Rossignol.
L’amendement n° 2069 est présenté par M. Jeansannetas.
L’amendement n° 2257 est présenté par Mme Espagnac.
L’amendement n° 3871 est présenté par Mme Apourceau-Poly.
Ces cinquante et un amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Laurence Cohen, pour présenter l’amendement n° 2 rectifié.
Mme Laurence Cohen. Cet amendement de suppression exprime notre désaccord face à la suppression des régimes spéciaux. Nous plaidons, a contrario, pour leur généralisation.
En effet, il s’agit de régimes pionniers en matière de droit à la retraite, en cela qu’ils reconnaissent la pénibilité physique du travail, qui raccourcit parfois la durée de vie.
La pénibilité, ce sont les contraintes liées au maintien de services 365 jours par an et 24 heures sur 24, dans des conditions exigeantes : travail de nuit, horaires décalés, astreintes, port de charges lourdes, environnement de travail bruyant, exposition à des substances cancérogènes, mutagènes et toxiques pour la reproduction (CMR)…
En outre, les régimes spéciaux indexent les pensions sur les salaires, au contraire du régime général, qui les indexe sur les prix. Ce type d’indexation induit chaque année une perte de pouvoir d’achat pour les retraités. Aussi, sur quinze ans, le recul est estimé à 20 points. Autrement dit, une pension qui représentait, au moment de la liquidation, en 2015, 80 % du Smic, ne représentera plus, en 2030, que 60 % du Smic.
L’indexation sur les prix fait donc basculer une grande partie des retraités dans la pauvreté et dans la dépendance aux aides sociales. C’est pourquoi il est absolument urgent d’amorcer dès maintenant un retour pour toutes et tous à l’indexation sur les salaires. Cela constitue une condition sine qua non de la pérennité du système par répartition.
Ainsi, nous demandons la généralisation des régimes spéciaux au régime général et donc la suppression de cet article.
Madame la rapporteure générale, je vous invite, avant de donner des arguments, à être sûre de votre fait. Nous avons auditionné, en commission des affaires sociales, M. Nicolas Mitjavile, directeur général de la Caisse nationale des industries électriques et gazières (Cnieg), qui nous a dit que son régime était parfaitement équilibré. Il a même évoqué une trésorerie de 700 millions d’euros, gérée par l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss).
Nous voulons débattre de nos désaccords, mais faisons-le sur le fondement d’arguments qui reposent sur la réalité des faits.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 129.
Mme Raymonde Poncet Monge. Ne sachant pas comment justifier sa réforme, le Gouvernement a tenté d’invoquer, en faisant preuve d’un certain culot, la justice sociale. Ainsi sont avancés, dans l’exposé des motifs, les principes d’équité, d’universalité, etc.
Procéder à une politique de justice et d’équité, ce serait appliquer des mesures ambitieuses et sérieuses de prise en compte de la pénibilité à tous les travailleurs de toutes les branches qui accomplissent des travaux pénibles ou qui sont exposés à des facteurs de pénibilité, plutôt que de niveler les droits sociaux par le bas.
La vraie question est de savoir si ces régimes spéciaux sont justifiés ou non par la pénibilité des métiers classés en catégorie active. Je rappelle que des tableaux très pertinents, comportant de nombreuses subdivisions définissent les critères de pénibilité, que nous essayons, en vain, de faire reconnaître – notamment en vue d’ouvrir, dans les autres branches, la possibilité de profiter de départs anticipés.
J’ai entendu, lors des auditions que nous avons menées en commission, quelqu’un dire que, dans ces régimes spéciaux, les salariés partaient parfois à la retraite sans « être cassés ». Ah bon ? Tout est dit lorsque l’on qualifie – et certains l’ont fait – d’« effet d’aubaine » le départ anticipé de salariés qui ont été exposés à des risques, mais ne sont pas « cassés ».
Les effets d’aubaine ne sont jamais ceux des employeurs… Ceux que l’on traque sans répit, ce sont ceux dont bénéficient les travailleurs, c’est-à-dire des salariés qui sont couverts par leur appartenance à une catégorie active ou à un régime spécial et qui partent à la retraite – quelle honte en effet… –, alors qu’ils pouvaient continuer de travailler jusqu’à l’apparition des premiers symptômes de dégradation de leur santé.
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour présenter l’amendement n° 130.
M. Guillaume Gontard. La suppression des régimes spéciaux concerne les industries électriques et gazières, la RATP, les clercs et employés de notaires, la Banque de France et les membres du Conseil économique, social et environnemental, pour les agents qui seront recrutés à compter du 1er septembre 2023.
La suppression de ces régimes spéciaux constitue une stratégie supplémentaire du Gouvernement pour faire oublier le principal : le report de l’âge légal de départ à la retraite à 64 ans. Ce gouvernement est prêt à toutes les manœuvres pour opposer les Français les uns aux autres. Les régimes spéciaux sont stigmatisés pour pouvoir niveler par le bas les droits à la retraite. Le but de ce gouvernement est clair : fissurer le front uni qui se dresse contre cette réforme injuste.
Cette stigmatisation est d’autant plus injuste que les régimes spéciaux concernent non pas l’ensemble des salariés de ces professions, mais seuls ceux qui occupent des fonctions impliquant des conditions de travail difficiles. À titre d’exemple, seuls 5 % des salariés de la RATP sont concernés par son régime spécial.
Si certains régimes spéciaux ont été supprimés, c’est seulement parce que la réforme du régime général a ouvert aux salariés des conditions proches de ces régimes.
Les régimes spéciaux protègent les salariés en prenant en compte la pénibilité de leur travail. Ils sont également nécessaires pour attirer de nouveaux salariés vers des secteurs tendus, au sein desquels les difficultés de recrutement ne vont que s’accroître.
Cette volonté de suppression est totalement hors sol, puisque le but est de remplacer les régimes spéciaux par le compte professionnel de prévention (C2P), dispositif inutile et même contre-productif, dont la Cour des comptes estime qu’il n’est pas à la hauteur des objectifs qui lui ont été assignés. Le C2P n’a plus aucune vertu de prévention.
Cela dit, il n’y a là rien d’étonnant : cette réforme injuste s’inscrit dans la continuité de la politique menée par Emmanuel Macron depuis 2017. La pénibilité et la souffrance au travail qui touchent les salariés sont complètement ignorées par ce gouvernement.
Le Président de la République avait ainsi supprimé quatre critères de pénibilité en 2017 : les postures pénibles, les vibrations mécaniques, les manipulations de charges lourdes et les agents chimiques dangereux. Et voilà que le Gouvernement veut maintenant supprimer ce qu’il reste de droits aux salariés qui travaillent dans des conditions difficiles !
M. le président. La parole est à M. Thomas Dossus, pour présenter l’amendement n° 131.
M. Thomas Dossus. Tout d’abord, je tiens à alerter le président Retailleau qui, dans son intervention en discussion générale, nous enjoignait de choisir entre la société du droit à la paresse et celle du travail que la paresse et la langueur semblent avoir gagné les rangs de son groupe, qui se livre à un non-débat. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains. – Rires sur les travées du groupe CRCE.)
Madame la rapporteure, vous avez demandé que l’on fasse faire des efforts à tous les Français. Comme l’ont dit certains de mes collègues, un régime n’est pas étudié dans ce projet de loi : le nôtre. Quel exemple donnons-nous aux Français en nous attaquant à plusieurs régimes, mais pas au nôtre ?
Vous continuez de dérouler la maxime « forts avec les faibles, faibles avec les forts » : vous êtes durs avec les travailleuses et les travailleurs tandis que ceux qui bénéficient des superprofits et de la rente sont exemptés.
Pourtant, ce sont bel et bien celles et ceux qui travaillent qui savent ce qu’est la valeur du travail : une valeur non pas morale, mais économique et marchande, comme l’a rappelé notre collègue Laurence Rossignol. Ce sont bel et bien ces travailleurs du public et du privé qui font tourner le pays et le maintiennent à flot depuis la pandémie.
Nous aurions aimé débattre en préambule des facteurs de pénibilité, plutôt que de niveler les droits vers le bas pour tout le monde.
Monsieur le ministre, nous aimerions vous suivre lorsque vous prétendez vouloir sortir de la logique de statut pour aboutir à la reconnaissance de plusieurs facteurs de pénibilité et d’usure, mais l’article 1er ne le permet pas. Il s’agit d’un article de division, auquel nous disons « non ! », comme à ceux qui le suivent.
Si vous voulez que nous vous suivions sur les facteurs d’usure et de pénibilité, demandez l’examen en priorité de l’article 9, afin que nous puissions débattre de ces facteurs avant de procéder à un nivellement vers le bas pour tout le monde.
M. le président. La parole est à Mme Florence Blatrix Contat, pour présenter l’amendement n° 200.
Mme Florence Blatrix Contat. L’article 1er supprime, pour les agents recrutés à compter du 1er septembre 2023, les régimes spéciaux de retraites de cinq entités. Cet amendement vise à revenir sur cette suppression.
En réalité, les régimes spéciaux concernent non pas l’ensemble des salariés des secteurs concernés, mais uniquement ceux qui ont les conditions de travail les plus pénibles. Ainsi, en 2019, les retraités recevant une pension au titre des régimes spéciaux représentaient environ 6 % de l’ensemble des retraités.
Mettre fin aux régimes spéciaux sous prétexte d’équité et d’une supposée universalité est une diversion pour faire oublier que chacun va pâtir du report de l’âge légal.
Il est faux d’affirmer que les régimes spéciaux sont un privilège à abolir. La situation devant l’emploi est inégale. Certaines professions, par leurs horaires, les effets qu’elles produisent sur le corps et le stress qu’elles engendrent, sont particulièrement pénibles. Les régimes spéciaux sont la contrepartie de sujétions particulières.
Par ailleurs, les métiers concernés sont essentiels à notre pays et relèvent de secteurs qui rencontrent des difficultés de recrutement. La mise en cause des régimes spéciaux de retraite renforcera cette carence. Prendre en compte la pénibilité est non pas un privilège, mais une mesure de justice sociale.
Il s’agit de régimes pionniers, souvent issus de la négociation. Votre volonté de les supprimer est idéologique et dogmatique. Plutôt que de chercher à aligner les droits des salariés vers le bas en supprimant les régimes spéciaux, il faut au contraire que l’ensemble des salariés exposés à la pénibilité puissent partir plus tôt. Voilà en quoi consisterait la justice sociale !
M. le président. La parole est à M. Rémi Féraud, pour présenter l’amendement n° 280.
M. Rémi Féraud. Cet amendement vise à supprimer l’article 1er, car on ne supprime pas des décennies d’histoire sociale de la France de la sorte, sans aucune négociation, sans aucune compensation et sans aucun accord avec la moindre organisation syndicale.
La suppression des régimes spéciaux est l’arbre qui cache la forêt. M. Retailleau a déclaré qu’il souhaitait supprimer des cas flagrants d’injustice. Or ce genre de cas, il y en a beaucoup et il y en a de vrais.
Vous avez supprimé l’ISF à un moment où les inégalités de patrimoine augmentaient – rétablissons-le !
Vous avez supprimé la flat tax, ce qui fait que le travail est bien plus taxé que le capital – supprimons-la !
Vous avez refusé d’instaurer un minimum jeunesse alors que les jeunes représentent un quart des bénéficiaires des Restos du cœur – instaurons-le !
Vous avez refusé de taxer les superprofits. Nous avons appris ce matin que la Compagnie maritime d’affrètement Compagnie générale maritime (CMA GGM) avait réalisé, en 2022, 23,5 milliards d’euros de bénéfice net, qui n’est taxé qu’à 2 %, à la faveur de l’application d’une taxe au tonnage plutôt que d’une imposition sur les bénéfices. Supprimons ce privilège !
S’il s’agit de supprimer des privilèges, nous avons des idées : commençons par supprimer le régime spécial des superprofits et des très riches dans ce pays ! Dès lors, vous nous trouverez à vos côtés.
En attendant, nous proposons de supprimer cet article et, pourquoi pas, d’organiser, comme l’a suggéré la rapporteure générale, un référendum. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Émilienne Poumirol. Bravo !
M. le président. L’amendement n° 312 n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Isabelle Briquet, pour présenter l’amendement n° 342.
Mme Isabelle Briquet. Les régimes dits spéciaux résultent de luttes et de conquêtes sociales. Quel besoin y a-t-il de les supprimer, qui plus est en les présentant comme des régimes de faveur ? Aucun besoin, aucune urgence.
Les dépenses des régimes spéciaux diminuent de façon constante en part du PIB et avec elles les ressources nécessaires pour assurer leur équilibre budgétaire.
Aussi, la manifestation de cette volonté de suppression des régimes spéciaux s’apparente plutôt à une manœuvre de diversion pour atténuer la seule réalité de cette réforme : le report de l’âge légal, dont tout le monde pâtira incontestablement.
Par ailleurs, à l’heure où les secteurs concernés peinent à recruter, la mise en cause de certains régimes spécifiques de retraite est contre-productive. Il est au contraire nécessaire de renforcer l’attractivité des secteurs déficitaires en emplois. Cette mesure est donc pour le moins malvenue.
M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret, pour présenter l’amendement n° 366.
Mme Corinne Féret. Cet amendement vise à supprimer l’article 1er, car si vous dites, monsieur le ministre, souhaiter mettre fin aux régimes spéciaux sous prétexte d’équité et d’une supposée universalité, il s’agit en réalité d’une diversion pour faire oublier que cette réforme, c’est deux ans de plus pour tous ! N’oublions pas l’argument majeur de cette réforme.
Une fois de plus, vous faites preuve d’une volonté de diviser les Français entre ceux qui seraient privilégiés et les autres. Or ceux qui seraient privilégiés travaillent dans des conditions extrêmement pénibles. Mais ce n’est vraisemblablement pas votre priorité, puisque vous avez supprimé, dès 2017, quatre critères de pénibilité sur dix. Cela dit tout de votre conception de la pénibilité, que vous n’appelez même plus ainsi, mais « usure professionnelle ».
Par ailleurs, je tiens à revenir sur les propos du rapporteur René-Paul Savary selon lesquels cette mesure ne serait pas brutale, car elle s’appliquerait de manière progressive d’ici à 43 ans. Dans ce cas, pourquoi M. Retailleau, qui appartient au même groupe politique que lui, a-t-il déposé un amendement portant article additionnel après l’article 7, et seulement à ce stade de l’examen du texte – pourquoi ne pas l’avoir déposé sur l’article 1er pour en discuter dès maintenant ?– visant à supprimer les régimes spéciaux dès 2023 ? Si ce n’est pas une mesure brutale, je ne sais pas comment la qualifier.
Il est vrai que la totalité des membres du groupe Les Républicains ne figurent pas parmi les cosignataires de cet amendement. Au reste, c’est votre affaire, cela ne nous regarde pas… Pour autant, je constate, une fois de plus, votre silence dans ce débat si important pour l’avenir de nos concitoyens. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Fichet, pour présenter l’amendement n° 449.
M. Jean-Luc Fichet. À l’heure où les secteurs concernés sont, pour plusieurs d’entre eux, en manque d’agents et de salariés, la mise en cause des services spéciaux de retraite renforcera cette carence de recrutement.
M. le rapporteur Savary nous a expliqué, en somme, qu’il ne fallait pas parler de ces métiers difficiles afin de ne pas aggraver les difficultés de recrutement. Cette méthode me semble un peu juste…
La fin des régimes spéciaux est une diversion pour faire mieux passer la pilule du passage à la retraite à 64 ans. Certaines professions, par leurs horaires, les effets qu’elles produisent sur le corps ou le stress qu’elles engendrent, sont particulièrement pénibles et sont parfois même source de souffrances.
En vue de réduire le nombre de salariés se retrouvant en situation de longue maladie à la suite de nombreuses interventions de chirurgie ou à cause de troubles musculo-squelettiques, il vaudrait mieux ne pas relever de deux ans l’âge de départ à la retraite.
Aussi, je propose de supprimer cet article.
M. le président. La parole est à M. Yan Chantrel, pour présenter l’amendement n° 484.
M. Yan Chantrel. Ce débat, qui porte sur les régimes spéciaux, nous permet de constater que deux visions du modèle social français s’opposent…
M. Laurent Duplomb. Une de droite et une de gauche !
M. Yan Chantrel. Selon vous, non seulement il n’est plus possible de prélever le moindre euro supplémentaire sur les grandes entreprises et les grandes fortunes, mais il faudrait même diminuer leur taux de prélèvement.
En conséquence, afin de maintenir l’équilibre du budget, vous avez, hier, baissé les prestations de l’assurance chômage, et vous voulez maintenant détricoter les régimes spéciaux, qui protègent celles et ceux qui exercent des métiers pénibles.
Pour vous, la vie et le marché se confondent : l’utilité se mesure à la seule valeur commerciale. Avant de vous demander comment améliorer la vie des êtres humains et le sort de la planète qui les nourrit, vous commencez toujours par vous demander à quoi consentiront les puissances de l’argent.
Or, pour les puissances de l’argent, chaque crise est l’occasion de réclamer de l’aide de la part de l’État. À l’inverse, dans les temps de prospérité, elles crient à la spoliation si on leur demande de contribuer davantage à la solidarité nationale.
La vision que nous défendons depuis le début de l’examen de ce texte, c’est celle d’Ambroise Croizat, qui s’était promis, à la Libération, que la retraite serait « non plus une antichambre de la mort, mais une nouvelle étape de la vie ». Vivre décemment jusqu’à son dernier souffle, laisser en paix les corps brisés par l’usure, voilà la grande conquête du XXe siècle sur laquelle vous voulez revenir avec cette réforme.
M. Jean-François Husson. Il faut arrêter !
M. Yan Chantrel. Vous voulez sacrifier cet âge de la vie durant lequel, après avoir consacré l’essentiel de son existence au travail salarié, on dédie son temps libéré à sa vie familiale, à ses parents dépendants, à ses enfants, à ses petits-enfants, aux vies associative, culturelle, sportive, caritative, démocratique, qui sont essentielles à la vie de notre pays. Voilà ce que vous voulez supprimer ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées du groupe CRCE.)
M. le président. Les amendements nos 518 et 567 ne sont pas soutenus.
La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy, pour présenter l’amendement n° 579.
M. Christian Redon-Sarrazy. Monsieur le ministre, selon vous et votre gouvernement, supprimer les régimes spéciaux, c’est de la justice sociale. Quelle est donc votre vision du milieu du travail ? Pour vous, la justice sociale passe systématiquement par un alignement par le bas.
Certains régimes spéciaux sont des régimes autonomes, qui trouvent leur équilibre dans des niveaux de contribution ou de cotisations délibérément plus élevés que la moyenne. Il s’agit d’un choix des partenaires.
D’autres, dans des secteurs d’activité bien spécifiques, résultent de conquêtes sociales – qui ont d’ailleurs été validées à l’époque par des exécutifs appartenant à votre majorité – et visent à prendre en compte les conditions d’exercice particulières de certains métiers.
La pénibilité, les risques professionnels, le fait que le travail puisse altérer les capacités physiques et morales et priver les travailleurs et travailleuses d’années de vie en bonne santé – ou d’années de vie tout court ! – vous vous en moquez !
Plutôt que de prendre une mesure dogmatique, posez-vous les bonnes questions !
M. Philippe Bas. Ah !
M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour présenter l’amendement n° 666.
Mme Annie Le Houerou. Cet amendement vise à maintenir les régimes spéciaux de retraite visés par l’article 1er, à savoir ceux des industries électriques et gazières, de la RATP, de la Banque de France, du Cese, des notaires et des clercs de notaires. Il n’est pas inutile de répéter que ces régimes spéciaux ont été créés pour compenser la pénibilité des métiers qui y sont exercés.
M. Marc-Philippe Daubresse. Ah oui, c’est pénible d’être clerc de notaire !
Mme Annie Le Houerou. En 2019, les retraités recevant une pension d’un régime spécial représentaient seulement 6 % environ de l’ensemble des retraités. En les supprimant, le Gouvernement va mécaniquement soumettre les travailleurs de ce régime au droit commun, c’est-à-dire les intégrer au régime général, les privant ainsi d’une compensation suffisante de la pénibilité de leur métier.
M. Marc-Philippe Daubresse. Ce que veulent deux Français sur trois !
Mme Annie Le Houerou. Mettre fin aux régimes spéciaux, c’est une diversion pour faire oublier la confiscation par le Gouvernement de deux années de retraite à tous les Français. Ne nous laissons pas berner : une vraie mesure de justice sociale et d’équité serait d’appliquer les mesures de prise en compte de la pénibilité à tous les travailleurs et travailleuses qui accomplissent des travaux pénibles.
En 2017, vous avez supprimé des critères de pénibilité en échange d’un suivi médical personnalisé qui serait offert aux travailleurs concernés. En quoi consiste ce suivi médical, si ce n’est en un constat des effets de la pénibilité, un constat du fait que, après des années de dur labeur, les salariés sont « cassés » ?
Ceux qui travaillent dans l’industrie agroalimentaire, ceux qui accompagnent nos aînés, ceux qui construisent nos maisons et nos routes, ceux qui nous transportent midi et soir ne veulent pas que l’on mesure les effets de leur travail sur leur santé ; ils les ressentent tous les jours et les mesurent tous les matins en se levant !
Ce qu’ils demandent, c’est le respect de leur métier et de leur personne. Ils demandent que l’on prévienne leurs douleurs et que l’on travaille sur les facteurs de pénibilité. Or la santé au travail et la prévention au travail ne sont pas à la hauteur de leurs attentes.
Mme Émilienne Poumirol. Très bien !
M. le président. L’amendement n° 726 n’est pas soutenu.
La parole est à M. Olivier Jacquin, pour présenter l’amendement n° 808.
M. Olivier Jacquin. Cet amendement vise à supprimer l’article 1er, car cette réforme des retraites est injuste, injustifiée et inopportune. Elle rencontre l’opposition de la majorité des Françaises et des Français.
La suppression des régimes spéciaux ne peut en aucun cas résorber les problèmes de financement du système de retraites, dont le Conseil d’orientation des retraites (COR) a démontré qu’il n’était pas au bord du gouffre, comme voudrait le faire croire le Gouvernement.
L’article 1er tend à supprimer les régimes dits spéciaux, qui ont été obtenus par les luttes et les conquêtes sociales des salariés et de leurs organisations syndicales représentatives pour faire valoir, dans certains secteurs d’activité, des conditions particulières, difficiles, voire pénibles d’exercice.
À l’heure où les secteurs concernés sont, pour plusieurs d’entre eux, en manque d’agents ou de salariés, la mise en cause des régimes spécifiques de retraite renforcera cette carence. Par exemple, quelque 4 000 emplois de chauffeurs de car ne sont pas pourvus en Île-de-France. Le secteur des transports rencontre des problèmes de recrutement très importants, qui contribuent à l’embolie de nombreux réseaux.
Ainsi, plutôt que de tout supprimer de manière démagogique, le Gouvernement serait mieux inspiré de retirer sa réforme, de reprendre de véritables négociations avec les partenaires sociaux et d’étudier, profession par profession, l’opportunité de revenir intégralement ou en partie sur certains régimes dits spéciaux.
Une bonne réforme des retraites est une réforme qui allie sauvegarde de la répartition et progrès social, pas une réforme qui stigmatise certains et monte les Français les uns contre les autres.
M. le président. Les amendements nos 821 et 861 ne sont pas soutenus.
La parole est à M. Victorin Lurel, pour présenter l’amendement n° 896.
M. Victorin Lurel. Nous demandons que cet article soit supprimé. Les arguments présentés par les uns et les autres me semblent suffisants pour que je concentre mon propos sur d’autres motifs.
Monsieur le ministre, vous avez déclaré qu’un régime spécial devrait se suffire à lui-même et ne saurait faire appel à personne d’autre que ses clients ou ses agents. Selon vous, nous ne pourrions en aucun cas faire appel au contribuable par l’impôt. Cet argument m’interpelle, car cela reviendrait à ne plus tenir compte de l’utilité sociale des activités. Or si nous allons au bout de cette logique, nous devrions supprimer tous les services publics : les usagers devraient tout financer.
Cette conception restrictive du régime par répartition m’interpelle. Nous savons depuis longtemps que les régimes spéciaux sont en partie financés par des subventions et des impôts, ce qui est tout à fait normal, dans la mesure où les emplois qu’ils couvrent sont d’utilité sociale. C’est le rôle du travail.
Je ne me retrouve pas non plus dans votre conception de la valeur travail, en cela que le capital est une accumulation de travail mort tandis que les salariés représentent du travail vivant. Or ces derniers payent des impôts. Dès lors, pourquoi le capital ne devrait-il pas également contribuer à la solidarité nationale ? (Mmes Victoire Jasmin et Marie-Noëlle Lienemann applaudissent.)
M. le président. L’amendement n° 941 n’est pas soutenu.
La parole est à M. Claude Raynal, pour présenter l’amendement n° 980.
M. Claude Raynal. Je m’exprimerai en quelque sorte ès qualités, car je ne suis pas sûr que beaucoup de mes collègues comptent intervenir sur le sujet de la Banque de France. En tant que président de la commission des finances, je me dois de dire quelques mots sur la suppression du régime de retraite de cette dernière.
Tout d’abord, cette mesure concernant environ 10 000 salariés, sa portée est limitée.
Par ailleurs, le régime de la Banque de France est totalement aligné sur celui de la fonction publique, en matière d’âge de départ comme de durée de cotisation.
En outre, les pensions versées aux retraités de ce régime n’ont jamais rien coûté à l’État. En revanche, l’État a perçu à de nombreuses reprises des excédents de la couverture des engagements du régime de retraite de ce régime, par solidarité avec le régime général, pour un montant qui s’élèverait à plus de 1 milliard d’euros à ce jour.
Enfin, les flux futurs de pensions sont déjà intégralement couverts. Alors quoi ? Quelle est la logique de la suppression de ce régime autonome, si ce n’est – et il est toujours très dangereux de s’engager sur ce terrain moral – une supposée exemplarité ?
Mes chers collègues, quelle façon extraordinaire, de la part de l’État, de remercier les salariés d’une institution qui, par la politique monétaire très conciliante qu’elle a menée ces dernières années, a protégé le budget de celui-ci ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – M. Pierre Laurent applaudit également.)
M. le président. Les amendements nos 1008, 1029 et 1059 ne sont pas soutenus.
La parole est à M. Jean-Claude Tissot, pour présenter l’amendement n° 1075.
M. Jean-Claude Tissot. Dans la même logique que les précédents, cet amendement vise à supprimer l’article 1er. Issus de longues luttes sociales menées par les salariés du privé comme du public, les régimes spéciaux ont été conçus de manière à être adaptés à des professions exercées dans des conditions de travail particulières, bien souvent difficiles et pénibles.
Avec mes collègues du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, je considère que la suppression des régimes spéciaux visés par cet article n’est, sous couvert d’un prétexte d’équité, qu’une diversion pour faire oublier que tout le monde va pâtir du report de l’âge légal de départ à la retraite.
En effet, comme nous le soulignerons en présentant plusieurs autres amendements sur l’article 1er, une grande partie des régimes spéciaux concernés sont excédentaires et ces excédents proviennent d’un taux de cotisation bien plus élevé que la moyenne du régime général.
Vouloir présenter comme de mauvais élèves des professions qui ont fait, voilà des décennies, le choix de surcotiser constitue une orientation étonnante pour un gouvernement disant défendre le budget de la Nation « à l’euro près »…
Monsieur le ministre, il est temps de comprendre les spécificités de ces professions et d’entendre les difficultés quotidiennes des salariés des industries électriques et gazières, sur lesquels nous devons compter pour rebâtir notre souveraineté énergétique. Il est temps de comprendre les spécificités du régime des salariés de la Banque de France, de celui des clercs de notaire, et de celui des salariés du Cese. Il est grand temps, enfin, de prendre correctement en compte la pénibilité, le stress quotidien, l’environnement du travail et les horaires atypiques des salariés de la RATP.
Pour toutes ces raisons, supprimons l’article 1er, qui ne représente rien d’autre qu’un retour en arrière. (Mme Émilienne Poumirol applaudit.)
M. le président. L’amendement n° 1096 n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Monique Lubin, pour présenter l’amendement n° 1151 rectifié bis.
Mme Monique Lubin. Je voudrais que les choses soient bien claires. (Ah ! sur des travées du groupe Les Républicains.) Je suis ravie que cela vous plaise, mes chers collègues !
La suppression des régimes spéciaux ne consiste pas uniquement en l’alignement de l’âge de départ à la retraite. Cela modifiera aussi la base de calcul du montant de la retraite, puisque l’on passera de la rémunération des six derniers mois pour la RATP et les gaziers et de la moyenne des dix meilleures années pour les clercs de notaire à la moyenne des vingt-cinq meilleures années – on sait ce que cela a donné en 1993 pour les salariés du privé –, et que cela modifiera également la durée de cotisation.
Évidemment, grâce à la « clause du grand-père », les agents actuels ne seront pas concernés. Vous espérez donc, monsieur le ministre, que les choses se passeront en douceur, mais l’ambiance risque tout de même d’être un peu curieuse quand se côtoieront, dans la même entreprise, deux catégories de personnel exerçant le même métier, mais n’ayant pas les mêmes avantages !
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Alors, il faut voter l’amendement de M. Retailleau !
Mme Monique Lubin. En outre, cela a déjà été évoqué : où se trouve l’urgence de ce projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale (PLFRSS), puisque l’effet comptable de la réforme ne se fera réellement sentir que dans de très nombreuses années ?
Par ailleurs, madame la rapporteure générale, vous nous avez menacés d’un référendum,…
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission. Oh, « menacés »…
Mme Monique Lubin. … mais c’est facile ! Vous – et tous les autres – martelez, depuis que ces régimes existent, que ceux-ci sont illégitimes : cela a forcément fini par s’imprimer dans la tête des Français ! Évidemment, il est beaucoup plus simple de désigner à la vindicte de nos concitoyens le voisin qu’ils croisent tous les jours et qui est peut-être un peu plus chanceux qu’eux que le très fortuné, qui bénéficie de beaucoup plus d’avantages, mais qu’ils ne croisent jamais parce qu’il ne vit pas avec eux !
Du reste, cette idée est si peu ancrée dans la tête de nos concitoyens que, finalement, même quand on supprime des régimes spéciaux, ils ne le savent pas ; pour la SNCF, par exemple, personne ne l’a encore compris… (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. L’amendement n° 1205 n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Victoire Jasmin, pour présenter l’amendement n° 1238.
Mme Victoire Jasmin. L’amélioration continue de la qualité de vie et des conditions de travail nécessite, par équité et pour ne pas déstabiliser les professions et les entreprises concernées, de supprimer cet article.
En effet, la suppression, au travers du présent article, de cinq régimes spéciaux suscite des interrogations, car nous devons au contraire créer les conditions de la cohésion sociale, impliquer davantage les partenaires sociaux et valoriser, d’ailleurs de façon urgente, les travailleurs. L’existence des régimes spéciaux est toujours justifiée par les contraintes spécifiques à chacun de ces métiers. Il est en outre de notre devoir de rendre ces filières attractives.
Monsieur le ministre, vous avez supprimé les CHSCT et vous voulez déshumaniser encore davantage les entreprises et les métiers ! Il faut supprimer cet article inutile et injuste !
Mme Laurence Cohen. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour présenter l’amendement n° 1268.
M. Franck Montaugé. Monsieur le ministre, par cet article, vous souhaitez mettre fin à cinq régimes spéciaux de notre système de retraite. Ces régimes entraîneraient, selon vous, des dépenses exagérées que notre système de retraite ne pourrait plus supporter.
En réalité, vous le savez, les dépenses liées aux régimes spéciaux demeurent contenues au regard des recettes totales des cotisations sociales. Surtout, ces régimes permettent de maintenir l’attractivité de secteurs et de cadres d’emploi dont la main-d’œuvre essentielle peine à être trouvée. Je pense particulièrement au régime de la RATP, déjà évoqué, puisque les possibilités de départ anticipé profitent à ceux qui font vivre ce service public essentiel : conducteurs, agents de station, agents chargés de la maintenance des voies, etc.
Non, monsieur le ministre, le départ anticipé de ces personnes n’est ni un privilège hérité de l’ancien monde ni une dépense exagérée, vu la nécessité et la pénibilité de leurs métiers, et, si les économies engendrées par la suppression de ces régimes sont, pour vous, essentielles, c’est avant tout en raison de leur caractère symbolique d’éradication méthodique des statuts en général et de ceux-là en particulier !
Depuis 2017, malgré la hausse sans précédent des revenus des placements financiers, vous refusez d’augmenter la contribution sociale généralisée (CSG) sur les revenus du capital ; vous avez également permis à des foyers très aisés de profiter de déductibilités et de dégrèvements de cotisations, grâce à l’instauration de la flat tax ; et je ne reviens pas sur la prospérité outrancière de CMA CGM, que vous entendez au contraire sanctuariser.
Surtout, au-delà des personnes concernées par les régimes spéciaux, les Français ne veulent pas de votre réforme, monsieur le ministre. Écoutez-les donc…
M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour présenter l’amendement n° 1314.
Mme Angèle Préville. Tout le problème est là : c’est parce que les dégâts du travail n’ont pas été corrigés, parce que l’on a renoncé à améliorer les conditions de travail et parce qu’il n’a même pas été envisagé de prévoir des sources de financement en lien avec la nouvelle donne de la société contemporaine – je pense notamment, comme mes collègues, aux profits exorbitants, qui sont très peu taxés par ailleurs – que nous en sommes là.
Cette réforme est socialement injuste, car les régimes spéciaux permettent de tenir compte de la dureté du travail ; j’emploie à dessein ce mot et non celui de « pénibilité ». Les risques, notamment psycho-sociaux, sont peut-être plus prégnants encore que par le passé, les amplitudes horaires et la pénibilité perdurent. Il n’y a donc pas de régime de faveur, il n’y a que la prise en compte de cette dureté, qui abîme.
Oui, tous ceux qui font le même travail doivent avoir les mêmes droits et il doit s’agir des meilleurs droits possible, puisque nous sommes pour le progrès social. C’est tout le questionnement autour du « bonheur différé » que constitue la retraite. En quelque sorte, ces régimes spéciaux sont la compensation de ce qui n’a pas été pensé en amont. Comment demander de travailler plus longtemps dans de telles conditions, qui restent dures ?
M. Marc-Philippe Daubresse. Alors, instaurons la retraite à 57 ans pour tous !
Mme Angèle Préville. Comme le dit le philosophe Denis Maillard, « avant tout droit à la retraite, les travailleurs demandent aujourd’hui un droit de retrait de la comédie inhumaine du travail ».
M. Marc-Philippe Daubresse. Comme si le travail était une comédie !
Mme Angèle Préville. Puisque toute la réflexion consistant à repenser le travail n’a pas été menée – on a été, d’une certaine manière, paresseux, oublieux, aveugles aux évolutions rapides de la société –, défaire ce qui existe sans rien proposer constitue une régression inacceptable.
M. Marc-Philippe Daubresse. C’est du Karl Marx !
Mme Angèle Préville. Aussi, je propose, avec mes collègues, de supprimer cet article, qui met fin à cinq régimes spéciaux. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à M. Didier Marie, pour présenter l’amendement n° 1338.
M. Didier Marie. Si certains régimes sont dits « spéciaux », c’est non pas parce qu’ils constitueraient des lieux de privilèges, mais parce qu’ils fonctionnent sur le fondement d’une solidarité restreinte à une profession – comme pour les marins ou les militaires – ou à une entreprise – comme pour la RATP – prenant en compte certaines formes de pénibilité subies par leurs travailleurs : horaires atypiques, fréquence des astreintes ou encore usure physique.
Est-ce à dire que ces travailleurs ont été choyés, privilégiés ? Non, c’est même l’inverse. Ce sont les travailleurs du régime général qui sont, trop souvent, délaissés, défavorisés, au regard de l’évolution des modes toujours plus astreignants de production. J’en veux pour preuve la sous-déclaration croissante des accidents du travail et des maladies professionnelles. Écoutez, à cet égard, ce que dit la Cour des comptes, qui a récemment signalé la sinistralité hors norme dont souffrent certains secteurs, notamment les métiers du soin et du lien, et qui nécessiterait des mesures spécifiques.
En réalité, les régimes spéciaux étaient précurseurs d’une juste appréhension du travail et de ses effets sur les travailleurs. Ils ont veillé à maintenir l’équilibre nécessaire entre la vie au travail et la vie en bonne santé à la retraite. L’objectif devrait donc être d’aligner le régime général sur ces régimes, afin de prendre en considération la spécificité des différents métiers, et non l’inverse.
J’ajoute qu’il est tout de même extraordinaire de supprimer des acquis sociaux issus, pour bon nombre, d’accords obtenus en 1945, juste après la Libération, au travers d’un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale, sans dialogue, sans négociation avec les partenaires sociaux, sans même l’once d’une compensation ! Vous appelez cela l’équité ; pour moi, moins d’avantages et deux ans de plus, c’est de la brutalité.
C’est la raison pour laquelle il faut supprimer cet article. (Applaudissements sur des travées des groupes SER et CRCE.)
M. le président. L’amendement n° 1371 n’est pas soutenu.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour présenter l’amendement n° 1404.
M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur le ministre, vous avez fait allusion précédemment à un ancien président de la commission des lois. Comme nous ne sommes que deux dans cet hémicycle à pouvoir nous prévaloir de ce titre, j’ai cru comprendre que vous vous adressiez à moi ; je crois avoir bien compris… (Sourires sur les travées du groupe SER.)
François Hollande a un jour décidé de rendre publics les avis du Conseil d’État. Je crois que vous avez une certaine connaissance de M. François Hollande et que, à cette époque, vous partagiez bien des choses avec lui. (Applaudissements sur quelques travées du groupe SER.)
M. Jean-Pierre Sueur. Je ne comprends pas votre argumentation. Je ne vous l’apprends pas, le Conseil d’État a deux fonctions : il est un juge et le conseiller du Gouvernement ; il existe d’ailleurs une littérature abondante sur la compatibilité entre ces deux missions. En tant que conseiller du Gouvernement – c’est de cela qu’il s’agit ici –, le Conseil d’État donne de bons conseils au Gouvernement et je suppose qu’il fait état, dans la note dont il est question, d’appréciations judicieuses.
M. Xavier Iacovelli. Ce n’est pas le sujet !
M. Jean-Pierre Sueur. Je ne vois pas en quoi le fait, pour le Gouvernement, pour vous, monsieur le ministre, de décider de partager largement ces appréciations serait contraire à la séparation des pouvoirs. Ça le serait si vous étiez contraint de le faire, mais rien ne vous y oblige, vous en avez simplement la possibilité.
Nous vous renouvelons donc cette demande, conforme à une doctrine que vous avez certainement approuvée par le passé. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE.)
M. le président. Monsieur Sueur, vous profitez de ma générosité, car vous n’avez pas vraiment défendu votre amendement… (Sourires sur les travées du groupe SER.)
M. Jean-Pierre Sueur. La parole est libre, monsieur le président !
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission. La vôtre, oui, c’est sûr !
M. le président. L’amendement n° 1434 n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Martine Filleul, pour présenter l’amendement n° 1502.
Mme Martine Filleul. Monsieur le ministre, en supprimant – ou plutôt en fermant, madame la rapporteure générale – cinq des régimes spéciaux, vous divisez pour mieux régner, vous opposez les Français les uns aux autres, vous les divisez ; voilà la stratégie.
Les régimes spéciaux ne constituent en aucun cas un privilège ni une grâce ; en l’état, c’est une compensation, un acquis, une histoire. En tout cas, nulle générosité, nulle dépense exagérée ici.
Vous parlez d’un système qui serait inégalitaire. Oui, mais certainement pas dans le sens que vous lui donnez, car ce sont les métiers qui sont inégalitaires, dans la dureté de leurs effets sur les corps et les esprits. Les ouvriers n’ont-ils pas une espérance de vie inférieure de 6,4 ans par rapport aux cadres ? Pourquoi n’auraient-ils pas le droit de percevoir, aussi longtemps que les autres catégories professionnelles, leur retraite, celle pour laquelle ils ont cotisé toute leur vie ? Loin de réparer les inégalités au travail, cette réforme les accentue.
Nous devons permettre aux travailleurs de partir à la retraite au moment où leur corps n’est pas usé ; nous le leur devons ! Malheureusement pour eux, votre rhétorique est immuable : vous voulez faire porter aux travailleurs le poids de votre réforme comptable. Ceux qui souffrent déjà aujourd’hui dans leur chair souffriront encore plus demain ; ce sera l’inégalité dans la souffrance.
Pour comble, vous simulez une concertation avec les organisations syndicales, sans jamais tenir compte de leurs demandes, de leurs propositions. Tout dialogue absent, vous le payerez et vous le payerez cher, dans la rue ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Marc-Philippe Daubresse. Une menace ?
Mme Martine Filleul. C’est pourquoi je vous invite à retirer cette réforme.
M. le président. Les amendements nos 1541, 1579 et 1590 ne sont pas soutenus. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.)
La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour présenter l’amendement n° 1620.
Mme Émilienne Poumirol. Des « privilégiés » – le mot est lâché –, telle est la vision dogmatique, monsieur le ministre, que votre gouvernement semble avoir des personnes affiliées à un régime spécial de retraite.
Je rappelle que les premiers régimes spéciaux ont été mis en place par l’État en 1673 pour les marins. Au fil des siècles, différents régimes spéciaux de retraite ont été instaurés et ils ont été conservés par le Conseil national de la Résistance au moment de la création de notre système actuel de sécurité sociale. Ces régimes sont le résultat de luttes sociales, menées par les salariés et les organisations syndicales de certains secteurs d’activité pour obtenir la reconnaissance des conditions particulières et de la pénibilité de leur travail. La mesure que vous proposez constitue donc une véritable régression sociale, comme l’était déjà, en 2017, la suppression des critères de pénibilité.
Le Gouvernement justifie la suppression des régimes spéciaux par une volonté d’équité, mais il s’agit surtout de diviser les salariés. On le sait bien, depuis Machiavel, diviser pour mieux régner, c’est la solution.
En outre, vous faites un choix arbitraire, à la carte, entre les régimes spéciaux qui seront supprimés par cette réforme et ceux qui seront conservés. Alors que plusieurs secteurs concernés pâtissent d’un manque de personnel, la mise en cause des régimes spécifiques de retraite ne fera qu’aggraver leur manque d’attractivité et leur pénurie de personnel.
Aussi, plutôt que de défendre un système de retraite adapté à la réalité, notamment à la pénibilité, des métiers, le Gouvernement choisit de détruire ces droits acquis et de niveler ainsi les retraites par le bas. C’est pourquoi nous demandons la suppression de cet article.
M. le président. Les amendements nos 1650 et 1662 ne sont pas soutenus.
La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour présenter l’amendement n° 1691.
M. Jean-Yves Leconte. Voilà un peu moins de trois ans, nous avons découvert ceux que nous avons appelés à cette époque les « premiers de corvée » : les personnes dont le métier n’est pas « télétravaillable » et qui ont tenu le pays. Or beaucoup des activités visées par la suppression de ces régimes concernent ces personnes, en particulier dans les transports publics et l’énergie.
Aussi, madame la rapporteure générale, opposer les uns aux autres, exacerber les jalousies entre les différents types de droits à pension ne me paraît pas convenable. Le premier principe de la République est de travailler à la cohésion et à la solidarité nationales, non d’expliquer aux uns qu’ils doivent perdre parce que les autres ont moins. Il n’est pas logique de procéder de cette manière.
Je veux bien croire que les évolutions technologiques fassent évoluer les pénibilités, mais celles-ci demeurent. Même si elles ne sont pas les mêmes qu’il y a soixante ans, elles doivent être prises en compte et, pour cela, il faut être crédible, ne pas avoir supprimé, il y a cinq ans, la liste des critères de pénibilité pour le régime général tout en voulant maintenant supprimer certains régimes spéciaux. Ce n’est pas convenable, surtout lorsque l’on sait que, dans les transports collectifs, il y a des métiers en tension et il est nécessaire, pour la sécurité de l’ensemble des usagers, d’avoir des agents respectés et correctement assurés.
Le secteur de l’énergie représente un enjeu important pour l’avenir de notre pays et nous devons même élargir ces régimes à tous ceux qui travaillent dans le secteur, notamment parmi les sous-traitants.
En outre,…
M. le président. Votre temps de parole est épuisé, mon cher collègue.
M. Jean-Yves Leconte. … puisque l’on évoque les premiers de corvée, les travailleurs des plateformes…
M. le président. Vous n’avez plus la parole, monsieur Leconte !
M. Jean-Yves Leconte. … sont les oubliés de cette réforme, alors qu’ils étaient… (Protestations sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. le président. Vous n’avez plus la parole !
M. Martin Lévrier. C’est systématique !
M. le président. Mon cher collègue, quand il y a cinquante et un amendements identiques, chacun a deux minutes pour présenter le sien et deux minutes seulement.
Les amendements nos 1748 et 1789 ne sont pas soutenus.
La parole est à M. Patrick Kanner, pour présenter l’amendement n° 1817.
M. Patrick Kanner. Curieuse ambiance ce matin, encore une fois : comme dans un match de football, on s’attache à comparer les durées de possession de la balle. Manifestement, il y a une partie de l’hémicycle qui maîtrise plus la balle… (Sourires. – Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Marc-Philippe Daubresse. Ce n’est pas ainsi que l’on marque des buts !
M. Patrick Kanner. Je ne sais pas s’il y aura des tirs au but – je l’espère – et nous verrons bien, plus tard, s’il y a des buts,…
M. Marc-Philippe Daubresse. Nous avons d’excellents rapporteurs pour cela !
M. Patrick Kanner. … mais n’hésitez pas à animer un peu nos débats, mes chers collègues, moins d’ailleurs pour nous que pour les Français qui nous regardent et qui attendent de nos débats des clarifications politiques.
Finalement, ces multiples amendements de suppression visent à donner un peu de sens au mot de réforme. J’ai retrouvé une phrase assez célèbre d’un fameux premier ministre britannique du XIXe siècle, Benjamin Disraeli, qui était d’ailleurs un conservateur : réformer ce qu’il faut, conserver ce qui vaut.
M. Bruno Retailleau. Très belle phrase !
M. Patrick Kanner. Oui, il faut conserver quand les choses vont plutôt bien et qu’elles ne posent pas de problèmes majeurs. Or ces régimes spéciaux sont les pionniers de notre régime général de retraite, ils correspondent à une histoire, mais aussi à un actuel et à un avenir pour beaucoup de salariés. Ce sont des conquêtes sociales qu’il convient de préserver.
Nous ne voulons pas nous associer à l’opération de démolition sociale qui est la vôtre, monsieur le ministre, et que soutient la droite sénatoriale. Je demande donc à mon tour la suppression de cet article.
M. Marc-Philippe Daubresse. Et la justice dans tout cela ?
M. le président. Si je puis me permettre une parenthèse, monsieur Kanner, Benjamin Disraeli a perdu le pouvoir au profit de Gladstone parce qu’il maltraitait la Chambre des communes. Donc attention à vos références… (Sourires. – Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour présenter l’amendement n° 1990.
Mme Laurence Rossignol. Quand je vous entends, monsieur le président, je regrette que vous soyez au plateau et non dans l’hémicycle, parce que vous contribueriez à nourrir un peu le débat. Cela dit, vous le faites bien de votre place…
Mes chers collègues, il y a une autre raison de voter la suppression de cet article, c’est le débat biaisé, en trompe-l’œil, que nous avons sur la suppression des régimes spéciaux.
En effet, deux voies sont empruntées pour supprimer ces derniers : il y a l’article 1er, proposé par le Gouvernement, et l’amendement n° 2057 de M. Retailleau. Or quelle n’a pas été ma surprise quand j’ai découvert que cet amendement serait examiné après l’article 7 ! Nous allons donc parler des régimes spéciaux une première fois ce matin, en examinant l’article 1er, et une seconde fois après l’examen de l’article 7. Cela donne l’impression qu’il y a un problème…
Je suppose qu’il s’agit d’une erreur de rédaction : l’amendement n’aurait pas dû commencer par la mention « Après l’article 7 » ; il eût été plus franc, plus sincère, d’écrire « Après la date du 7 mars, date du prochain mouvement social ». Parce que c’est de cela qu’il s’agit, en réalité : ce que vous ne voulez pas, mes chers collègues, c’est que votre amendement sur la suppression des régimes spéciaux soit discuté avant le mouvement du 7 mars prochain !
M. Marc-Philippe Daubresse. Parce que le Parlement est sous pression de la rue !
Mme Laurence Rossignol. C’est d’ailleurs étonnant, parce que, si vous êtes si sûrs que les Français détestent tous les régimes spéciaux…
M. Marc-Philippe Daubresse. Deux sur trois !
Mme Laurence Rossignol. … et que vous seriez certains de recueillir une immense adhésion autour de cette suppression, eh bien, soumettez votre amendement au vote dès maintenant, avec l’article sur les régimes spéciaux ! Peut-être les Français vous soutiendront-ils ! Peut-être même déclencherez-vous une manifestation de soutien à votre amendement de suppression des régimes spéciaux ! Peut-être y aura-t-il autant de gens dans la rue pour votre amendement qu’il y en a contre cette réforme !
M. Marc-Philippe Daubresse. Ce sont les plus protégés qui sont dans la rue, non les plus exposés !
Mme Laurence Rossignol. L’amendement n° 2057 devrait être examiné ici, mais ce n’est pas le cas. Donc nous voterons pour la suppression de l’article 1er. (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes SER, GEST et CRCE.)
M. le président. Les amendements nos 2069 et 2257 ne sont pas soutenus.
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour présenter l’amendement n° 3871.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Le capitalisme contemporain se caractérise par de multiples dynamiques, qui se déploient tant dans les conditions que dans l’organisation du travail : on appelle cela la précarisation.
Depuis plus de vingt ans, on assiste à la précarisation et à la flexibilisation de l’emploi et des temps de travail, avec une banalisation des emplois précaires, le développement du travail à temps partiel ainsi que la normalisation du travail flexible et irrégulier. À tout cela, il faut ajouter l’insécurité de l’emploi, que de plus en plus de travailleurs perçoivent du fait des multiples restructurations d’entreprises et des licenciements qui vont avec.
Depuis plus de vingt ans, la pénibilité déclarée par les salariés est en nette hausse, sur le plan tant physique, avec le port de charges lourdes, les mouvements répétitifs ou l’exposition à de multiples nuisances, que mental, avec l’exigence d’une vigilance constante, les polyvalences forcées, le raccourcissement des délais ou encore l’exigence d’une réponse immédiate à la demande du marché.
Cette précarisation a des conséquences directes sur la santé des travailleurs, à commencer par l’insuffisance ou l’irrégularité des revenus, qui rendent difficile le maintien en bonne santé. En témoignent l’explosion des pathologies musculo-squelettiques ainsi que les fluctuations du nombre d’accidents du travail, qui sont trop souvent le corollaire des fluctuations de l’activité économique.
Ainsi, au-delà des atteintes physiques et mentales subies par les salariés, il convient de s’interroger profondément sur les conditions et l’organisation du travail. Il est grand temps de réduire le temps de travail prescrit et de revenir à la retraite à 60 ans. En effet, si, comme vous, j’accorde une grande importance à l’emploi et au travail, cela ne doit pas se faire au détriment de la santé des travailleurs. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE. – Mme Martine Filleul applaudit également.)
M. le président. Avant de demander l’avis de la commission et du Gouvernement sur ces amendements, je demande aux rapporteurs et au ministre de ne procéder à aucune interpellation, afin de tenir compte du rappel au règlement de M. Raynal. Veuillez donc répondre globalement à l’ensemble des amendements, sans interpeller personne.
Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Merci de la liberté de parole que vous accordez aux rapporteurs, monsieur le président…
En tout état de cause, nous serons très vigilants dans nos propos, et ce tout au long du débat.
D’abord, beaucoup d’interventions ont évoqué les acquis sociaux, auxquels un attachement fort a été exprimé, ce que l’on comprend bien. Néanmoins, au fil du temps, ces acquis ont parfois été remis en cause – on a ainsi augmenté la durée de cotisation, puisque l’âge de départ, qui était jadis à 60 ans, est passé à 62 ans –, mais les gouvernements qui se sont succédé n’ont jamais remis cette évolution en cause !
Mme Cécile Cukierman. Hélas !
M. René-Paul Savary, rapporteur. Ensuite, c’est vrai, l’accélération de la convergence ne figure pas à l’article 1er, qui est relatif à la fermeture des régimes spéciaux aux nouveaux entrants. La convergence consiste à accélérer le report de l’âge de la retraite et c’est bien l’article 7 qui en traite ; en outre, il s’agit d’une dépense. C’est la raison pour laquelle nous n’avons pas trouvé de moyen d’examiner dans le cadre de l’article 1er l’amendement n° 2057, qui relève, vous en conviendrez, de l’article 7.
M. Rachid Temal. C’est dommage !
M. René-Paul Savary, rapporteur. Enfin, j’ai bien compris que certaines interventions comportaient une interpellation relative aux inégalités dans la prise en compte de la pénibilité. Là encore, la commission a souhaité gommer ces inégalités. En effet, la pénibilité du métier de chauffeur de bus, par exemple, n’est pas prise en compte de la même manière selon que l’on travaille à la RATP, où l’on relève du régime d’un service public ou que l’on travaille dans le secteur privé, puisque, dans le public, la pénibilité relève des services actifs. Or, entre les services actifs et les services « super-actifs », il y a bien des possibilités de convergence.
Vous souhaitez… Pardon, monsieur le président : « certains d’entre vous » souhaitent favoriser la réduction des inégalités en prenant en compte la situation de ceux qui commencent plus jeunes. Mais, cela a été rappelé par M. le ministre, il en résulterait alors une dégradation des comptes publics et du solde des régimes de retraite, qu’il faudrait donc compenser. Cela signifierait que, en contrepartie, on devrait soit augmenter la durée de cotisation de ceux qui n’ont pas de facteurs de pénibilité – ceux qui ne travaillent pas dans les secteurs ou les métiers concernés devraient travailler plus longtemps –, soit recourir à l’impôt. Or notre système est un système contributif, dans lequel 80 % des recettes procèdent des cotisations des salariés et 20 % de la solidarité, dans un souci de justice sociale, et plus on augmente la part des impôts dans un système par répartition, plus on le remet en cause.
C’est pourquoi nous n’avons pas choisi ce dispositif, car nous n’entendons pas remettre en cause le système par répartition. Telle est la position de la commission, qui explique notre avis défavorable sur ces amendements, ce qu’Élisabeth Doineau va préciser maintenant. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. La commission émet un avis défavorable sur l’ensemble de ces amendements.
Je rappelle que la fermeture des régimes spéciaux ne concerne que le risque vieillesse, pas l’ensemble des autres risques, comme je l’ai dit précédemment. Cela répond à des enjeux de lisibilité, d’équité et de confiance, surtout dans le système de retraite par répartition. D’ailleurs, nous le voyons bien, les sondages pratiqués auprès de l’ensemble de la population le montrent : la jeunesse n’a absolument pas confiance dans notre système actuel.
Les régimes spéciaux, cela a été rappelé et c’est important de le dire, ont été créés par l’ordonnance du 4 octobre 1945 et maintenus à titre provisoire jusqu’à ce jour. Certains ont toutefois été supprimés depuis. C’est le cas par exemple du régime vieillesse des entreprises minières ou encore de celui de la SNCF, qui ont été alignés sur le régime général.
Il a été dit qu’il n’y avait aucune urgence à procéder à l’extinction de ces régimes. C’est justement pour cette raison que nous vous proposons la clause du grand-père !
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Vous avez dit l’inverse tout à l’heure !
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Leur extinction se fera très progressivement.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Ce n’est pas clair !
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. On peut toutefois comprendre que d’autres propositions soient faites à cet égard…
La poursuite du mouvement d’extinction des régimes spéciaux est aussi une question d’équité entre les assurés. Ces régimes dérogatoires se justifient de plus en plus difficilement par des critères objectifs. Vos témoignages l’ont d’ailleurs montré, une approche par branche ou par métier n’est pas équitable.
Vous avez parlé de la fluidité du marché du travail. Je pense que l’affiliation au régime général permettra de fluidifier davantage le marché du travail en réduisant la complexité du système et la variation des droits sociaux en fonction du régime d’affiliation.
Enfin, comme l’a indiqué le ministre, l’affiliation au régime d’assurance vieillesse de droit commun permettra de bénéficier du compte professionnel de prévention et donc de la prise en compte des effets de l’exposition à certains risques professionnels. Cette avancée pourra être complétée par des dispositifs conventionnels d’entreprise ou de branche sur le modèle de la SNCF. À cet égard, les représentants de la SNCF que nous avons auditionnés nous ont indiqué que la prise en compte de la pénibilité dans certains métiers était un progrès.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre. Je serai bref, car les arguments pour défendre ces amendements de suppression, et c’est assez logique, ont déjà été très largement avancés lors des prises de parole sur l’article.
J’apporterai simplement trois précisions, la première en écho à ce que vient de dire Mme la rapporteure générale. L’affiliation des nouveaux embauchés au régime général de l’assurance vieillesse leur permettra, comme cela a été dit, de bénéficier du C2P et des nouveaux dispositifs que nous proposons sur des critères ergonomiques, ce qui n’est pas le cas pour les bénéficiaires des régimes spéciaux, en tout cas pas automatiquement.
Ma deuxième précision porte sur la soutenabilité et la solidité financières des régimes spéciaux, des inquiétudes ayant été exprimées sur le fait que la fermeture du flux pourrait poser des difficultés de financement des pensions des retraités actuels. D’abord, bon nombre de régimes ont la capacité de faire face à ce financement. Par ailleurs, comme nous l’avons fait pour la SNCF, nous veillerons à garantir la soutenabilité de ces régimes dans les futurs textes financiers, notamment dans les futurs projets de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS).
Ma troisième précision sera de nature lexicale. Pour défendre leur amendement, certains intervenants ont parlé de « privilégiés », d’« inégalités ». Ce n’est pas le champ lexical du Gouvernement. Pour notre part, nous considérons que la fermeture des régimes spéciaux, et donc l’harmonisation des régimes, est une question d’équité. Nous ne parlons pas de « privilégiés ».
Nous savons que ces régimes ont été élaborés au fil du temps et que celles et ceux qui bénéficient de cette situation ne l’ont pas nécessairement construite. Ils ont adhéré à un régime spécial lorsqu’ils ont signé leur contrat de travail.
En revanche, l’équilibre financier de ces régimes et la nécessité de les subventionner ne sont pas des arguments suffisants. Ce sont des arguments majeurs concernant certains régimes, beaucoup d’entre eux étant déséquilibrés, mais la question de l’équité et de l’harmonisation des règles en termes de cotisations, de déroulement de carrière et d’âge de départ à la retraite sont des raisons tout aussi importantes, qui justifient, selon nous, la fermeture en flux des régimes spéciaux.
Pour ces différentes raisons, le Gouvernement émet bien évidemment un avis défavorable sur ces amendements de suppression.
M. le président. Avant de mettre aux voix ces amendements de suppression, je donne la parole à M. Martin Lévrier, pour explication de vote. (Exclamations amusées sur les travées des groupes SER et CRCE.)
M. Martin Lévrier. Mes chers collègues, je prends la parole pour répondre à ceux qui se sont demandé pourquoi j’étais là puisque je ne parlais jamais. Il se trouve que je préfère écouter plutôt que de m’exprimer à tout propos. (Mêmes mouvements.) Ainsi, je ne coupe jamais la parole aux autres !
Je vous ai bien écoutés, chers collègues. Je résumerai, en essayant d’être exhaustif, tout ce que vous avez dit concernant exclusivement la suppression des régimes spéciaux de retraite.
Vous nous avez expliqué que ces régimes pionniers furent les premiers à prendre en compte la pénibilité, qu’ils s’appliquent à des métiers en tension, soit du fait d’un manque d’agents, soit pour des raisons d’accidentologie et non de remplacement des agents arrêtés. Vous avez ajouté que ces régimes sont équilibrés, voire excédentaires, et que cette réforme augmenterait les difficultés de recrutement. Vous pensez que l’article 1er a pour but de diviser les travailleurs et de faire des bénéficiaires des régimes spéciaux des boucs émissaires, que l’on veut faire croire que ces agents sont des privilégiés. Vous dites que cet article remet en cause le contrat social, qu’il vise un nivellement par le bas et qu’il n’a d’autre objet que de faire diversion pour faire oublier les autres articles.
J’ai résumé en une minute trente – j’espère n’avoir rien oublié – ce que vous avez dit en deux heures et demie – et il me reste 37 secondes ! Quant aux rapporteurs et au ministre, ils vous ont apporté des réponses claires. (Exclamations sur les travées du groupe SER.) Je partage leur point de vue.
M. le président. La parole est à M. Daniel Breuiller, pour explication de vote.
M. Daniel Breuiller. Ah, l’équité !
Je comprends que les actionnaires de notre pays – mais pas tous –, qui viennent d’encaisser 59,8 milliards d’euros, jugent scandaleux les avantages des chauffeurs de bus de la RATP, dont les conditions de travail sont si favorables que leur employeur ne parvient plus à recruter (Sourires sur les travées du groupe SER.) ou encore les avantages inouïs des clercs de notaire ! Je pense en particulier au 0,1 % des Français qui ont touché les deux tiers de ces dividendes, soit 40 milliards d’euros en 2022, sachant que vous en cherchez 13 pour équilibrer le système de retraite.
D’ailleurs, 200 millionnaires répartis dans treize pays demandent aux dirigeants du monde entier d’être davantage taxés. En France, selon l’association Oxfam, taxer nos milliardaires à hauteur de 2 % permettrait de financer le déficit prétendument hors de contrôle du système de retraite via le FRR (Fonds de réserve des retraites), judicieusement créé par Lionel Jospin pour faire face au papy-boom. Si cela se révélait trop douloureux, de nombreux bénévoles jeunes retraités des Restos du cœur pourraient accueillir ces milliardaires trop taxés ! Une telle mesure permettrait d’économiser deux ans de vie.
Enfin, puisqu’il me reste quelques instants, je tiens à dire que je ne comprends pas comment des sénateurs peuvent défendre, au nom de l’équité, la clôture des régimes spéciaux – j’ai bien dit : « clôture » – des chauffeurs de bus et des clercs de notaire sans réfléchir à leur propre régime autonome et sans voir que, pour les Français, celui-ci n’est pas équitable. D’ailleurs, si nous faisions un référendum, des vents mauvais, je le crains, souffleraient sur notre assemblée.
Monsieur le ministre, alors que nous avons un jeune Président de la République qui veut bouleverser et rénover la démocratie, il fait finalement du Richelieu ! Il maintient secrète la note de synthèse du Conseil d’État, qu’il refuse de diffuser, alors qu’elle éclairerait les Français et les parlementaires. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Je relève d’abord l’inconséquence de notre rapportrice (M. Martin Lévrier s’exclame.), qui suggère un référendum sur les régimes spéciaux, pensant peut-être le gagner, mais le refuse sur l’ensemble de cette réforme, en particulier sur le report à 64 ans de l’âge de départ à la retraite, lequel est massivement rejeté par les Français.
Madame la rapportrice, je ne crois plus que les Français soient obnubilés par les régimes spéciaux. Ils ont bien compris que le démantèlement des statuts et des régimes spéciaux revenait à poursuivre la dégradation massive des conditions du salariat dans ce pays et qu’il entraînerait leur précarisation.
Les Français considèrent que la France est l’un des pays où les salariés sont les moins bien traités et où les conditions de travail sont mauvaises, et c’est lié au déficit de certains régimes spéciaux. On a tellement externalisé, sous-traité, filialisé, que l’on a précarisé le travail, baissé les salaires, réduit les avantages sociaux. On a tué l’idée qu’une entreprise, c’est une communauté humaine dans laquelle les uns et les autres sont solidaires grâce à un statut, des garanties, une protection sociale.
Vous parlez d’équité, mais peut-on comparer aujourd’hui la situation du salarié d’une grande entreprise et celle de l’employé du sous-traitant de énième rang de cette même entreprise ? On ne peut pas parler d’équité : le sous-traitant est mal payé, précarisé…
M. le président. Vous n’avez plus la parole, madame Lienemann !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Je ne dis pas que les autres ont des avantages, mais le fait est que cet article n’est pas une avancée.
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Briquet, pour explication de vote.
Mme Isabelle Briquet. Cela a été dit, les régimes dits spéciaux ne sont pas une concentration de privilèges, dont les cotisants au régime général seraient injustement privés.
M. Laurent Duplomb. Enfin, tout de même…
Mme Isabelle Briquet. C’est pourtant ce que le Gouvernement s’efforce de faire croire pour que cette réforme, aussi inique qu’inutile, ait l’air un tant soit peu juste.
Vouloir fermer des régimes qui prennent en compte des contraintes particulières et la pénibilité de certaines professions, c’est se faire une curieuse idée de la justice ! Je pense ainsi, cela a été dit, au régime des industries électriques et gazières, mais aux autres aussi.
Il serait plus juste de s’inspirer de ces régimes, les travailleurs du régime général étant depuis trop longtemps délaissés au regard de l’évolution des modes de production. Ces régimes spéciaux sont donc des précurseurs en ce qu’ils appréhendent plus justement le travail et ses effets sur les travailleurs.
Pour vous, la justice, ce n’est pas aller vers le mieux pour tous, c’est s’assurer d’une régression sociale collective.
Monsieur le ministre, cette réforme va à contre-courant, comme vous le démontreront les Françaises et les Français le 7 mars prochain.
M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour explication de vote.
Mme Céline Brulin. Je voterai évidemment ces amendements de suppression de l’article 1er pour des raisons de fond, notamment parce que, madame la rapporteure, vous semblez penser que les régimes spéciaux n’ont plus lieu d’être aujourd’hui, car la pénibilité au travail serait un phénomène du XIXe siècle qui n’existe plus.
Je rappelle que, par exemple, les salariés qui font les trois-huit dans nos centrales nucléaires ont une espérance de vie inférieure à celle d’autres salariés. Je rappelle aussi que les autres salariés des IEG ne prennent pas leur retraite par anticipation : ils partent en moyenne à l’âge de 62,9 ans, soit exactement l’âge moyen de départ en France. Vous parlez d’équité, la voilà !
Nous avons souvent ici des débats sur la différenciation, c’est-à-dire sur la possibilité de prendre en considération des réalités différentes et de mener des politiques publiques qui en tiennent compte. Or je suis surprise de constater qu’un certain nombre d’entre vous sont à la recherche d’un égalitarisme parfait, que je ne m’explique pas, qui ne prend en compte ni les difficultés de recrutement ni la réalité de la pénibilité.
Enfin, madame la rapporteure, vous évoquez les chauffeurs de bus qui ne bénéficient pas du régime des chauffeurs de la RATP. Eh bien, ouvrons le débat ! Nous disons depuis le début que les régimes spéciaux sont pionniers et qu’ils ont vocation à être étendus à d’autres catégories de salariés.
Enfin, j’évoquerai une raison, qui paraît peut-être moins de fond, mais qui n’en est pas moins importante. Pouvez-vous nous expliquer quel sera l’effet direct sur les recettes et les dépenses de la sécurité sociale en 2023, qui sont l’objet même de ce PLFRSS, de la fermeture des régimes spéciaux ? Vous avez dit vous-même, monsieur le rapporteur, que ne seraient concernés par cette fermeture que les nouveaux entrants. Cette mesure n’aura donc absolument aucun impact sur les recettes et les dépenses de 2023. Elle n’a donc rien à faire dans ce texte ! (Applaudissements sur des travées des groupes CRCE et SER.)
M. le président. La parole est à Mme Florence Blatrix Contat, pour explication de vote.
Mme Florence Blatrix Contat. Les régimes spéciaux sont le résultat de conquêtes sociales, cela a déjà été dit, et ont été créés dans le cadre de négociations. Ils sont une juste compensation de conditions de travail difficiles, de perspectives de carrière et d’évolution de salaire parfois plus limitées qu’ailleurs.
Aujourd’hui, on stigmatise de nouveau ces régimes et ceux qui bénéficieraient prétendument d’avantages exorbitants. On évoque sur certaines travées l’équité pour justifier cette nouvelle régression. On cherche surtout à faire quelques économies de bouts de chandelle sur le dos des travailleurs et à faire diversion pour mieux masquer l’injustice que constitue l’allongement de la durée du travail. Vous cherchez surtout à opposer les Français les uns aux autres pour justifier cette réforme.
Vous évoquez le coût de ces régimes. Cet argument en dit long sur la philosophie de votre réforme, une réforme paramétrique destinée à réaliser des économies. Votre problème, ce sont bien les déficits et la dette que vous avez creusés en supprimant l’impôt de solidarité sur la fortune, en refusant de trouver des ressources nouvelles issues, par exemple, de la taxation des superprofits.
Dans un très bon rapport, nos collègues communistes ont démontré que l’évasion et l’optimisation fiscales coûtaient entre 30 milliards et 36 milliards d’euros au minimum à l’État, voire 50 milliards d’euros si l’on prend en compte certains critères. On voit bien que les économies que l’on cherche à réaliser sur les régimes spéciaux et sur l’ensemble des retraités sont sans commune mesure avec les ressources dont on se prive pour réduire nos déficits.
Cette réforme et cette volonté de supprimer les régimes spéciaux illustrent l’esprit de la start-up nation, dans laquelle on décore, certes discrètement, un champion de l’optimisation fiscale tout en stigmatisant ceux qui travaillent et en réduisant leurs droits.
Cette réforme est injuste, comme le démontre cet acharnement sur les régimes spéciaux. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.
M. Fabien Gay. Je ne suis pas d’accord avec mon collègue Martin Lévrier.
M. Martin Lévrier. Ah !
M. Fabien Gay. Nous n’avons pas obtenu de réponses à toutes nos questions. Pour ma part, j’ai encore deux ou trois questions.
Il est beaucoup question d’égalité, d’équité. Pour vous, les régimes spéciaux, c’est horrible. Il faut en finir et mettre tout le monde au même niveau. Vous l’aurez compris, ce n’est pas notre choix.
Je voudrais comprendre selon quels critères il a été décidé d’éteindre ou de sauvegarder tel ou tel régime. Pourquoi est-ce qu’on s’attaque aux régimes de la RATP et des IEG, des clercs de notaire et de la Banque de France, mais pas à ceux de l’Opéra de Paris, de la Comédie française, des marins-pêcheurs, des avocats et des professions libérales ?
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission. Le ministre l’a dit, mais vous ne l’avez pas écouté !
M. Fabien Gay. Monsieur le ministre, on vous pose la question : quels sont les critères ?
M. Martin Lévrier. Ça a été dit, il faut écouter !
M. Fabien Gay. On vous l’a déjà dit, casser le statut coûtera très cher. Aujourd’hui, lorsqu’un nouvel embauché bénéficie, par exemple, du statut des IEG, il passe un contrat avec la Nation. Il sait qu’il partira plus tôt à la retraite, qu’il est protégé par un statut. En contrepartie, il accepte d’être moins payé que dans le privé et de travailler de jour et de nuit toute l’année. Casser le statut, cela signifie payer ces salariés beaucoup plus cher, autrement vous aurez un problème d’attractivité.
Je vous repose la question, monsieur le ministre : comment allez-vous faire dans les entreprises électriques et gazières, mais aussi à la RATP ? Le grand problème de la RATP, c’est qu’il lui manque des milliers de chauffeurs, on vous l’a dit. Sachez que cette année, plus de 300 personnes ont abandonné leur poste sans même passer par la case du service des ressources humaines ! La voilà, la réalité, aujourd’hui !
C’est la même chose chez les cheminots. On vous l’avait dit en 2018 que la SNCF aurait du mal à recruter ! C’est aujourd’hui le cas. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. Depuis le début de notre séance, je trouve que le silence est parfois le plus cruel des mensonges ! (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) Il faut expliquer ce silence, et le silence complice du ministre. C’est vrai, monsieur Dussopt, que vous avez émis un avis extrêmement bref !
Il faut dire la vérité aux Françaises et aux Français sur les régimes spéciaux. Quel problème pose le régime spécial de la RATP en Île-de-France ? Le problème, ce n’est pas le régime en tant que tel, ce ne sont pas non plus les privilèges de ceux qui en bénéficient. Le véritable sujet, c’est la mise en concurrence de la RATP avec Keolis et Transdev ! Vous proposez aux machinistes de la RATP et aux cheminots de prendre un sac à dos social ! Vous en faites des routards du malheur en leur proposant d’aller travailler dans le privé et en cassant tous les statuts. Or les statuts sont une garantie du service public.
L’enjeu, ce ne sont pas les régimes spéciaux. Vous êtes en train de livrer la France pieds et poings liés à des intérêts étrangers ! Ainsi, quand vous choisissez Transdev en Île-de-France ou Keolis, vous donnez à l’un des principaux investisseurs, qui est un capitaliste allemand, le moyen d’entrer sur le marché du transport français. La voilà, la vérité !
Votre silence est cruel, mes chers collègues, c’est un mensonge ! Alors que les Français, qui manifestent, ont tant de sujets d’inquiétude – l’inflation, les retraites –, vous voulez leur imposer deux ans de travaux forcés ! Depuis deux jours, vous êtes incapables d’avancer des arguments et de présenter votre projet de société. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE et SER.)
M. Marc-Philippe Daubresse. Il y a des silences qui valent mieux que certaines prises de parole !
M. Pascal Savoldelli. Le Parlement est en difficulté à cause de vous !
M. le président. Des explications de vote, ce n’est pas ça ! (M. Pierre Laurent s’exclame.)
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission. Les explications de vote, ce ne sont pas des injures !
M. le président. Vous ne respectez pas le règlement ! Monsieur le vice-président Laurent, vous devriez être le premier à le respecter !
M. Pascal Savoldelli. Est-ce qu’on vous dérange, monsieur le président ?
M. le président. Rien ne me dérange ! Je demande simplement que le règlement du Sénat soit respecté et vous devez le respecter comme tout le monde !
M. Pascal Savoldelli. Ce n’est pas moi qui ai choisi Pécresse comme candidate !
M. le président. Monsieur Savoldelli, ne m’obligez pas à appliquer des articles du règlement plus sévères !
La parole est à M. Rémi Féraud, pour explication de vote.
M. Rémi Féraud. Ce débat est absolument essentiel. Il est très concret : sommes-nous ici pour résoudre des problèmes qui existent dans notre pays ou pour les aggraver ?
Nous parlons de plusieurs régimes spéciaux, notamment de celui de la RATP. Quel est l’un des principaux problèmes que nous rencontrons aujourd’hui dans notre pays ? C’est la crise dans les transports publics, en particulier en Île-de-France. Nous faisons face à une difficulté financière et à des difficultés de recrutement.
Lorsque nous dénonçons les injustices dans certaines lois de nature financière, vous nous répondez que, certes, c’est injuste, mais qu’il faut penser à l’attractivité. Ici, nous faisons face à un enjeu d’attractivité. Allons-nous rendre de nouveau attractifs les métiers de la RATP, notamment de machiniste et de conducteur de bus, en fermant le régime spécial de la RATP ? Non ! Au contraire, nous allons aggraver le problème, qui est d’abord, on le sait, un problème d’attractivité.
Notre assemblée a déjà refusé d’augmenter le versement mobilité des entreprises afin de financer les transports publics en Île-de-France. Elle a par ailleurs refusé d’augmenter, comme elle aurait dû le faire, la participation financière de l’État. Aujourd’hui, nous serions bien inspirés, je pense, de refuser la suppression du régime spécial de la RATP, parce que nous allons aggraver des problèmes que nous devrions plutôt résoudre, à savoir le manque d’attractivité des métiers dans le secteur des transports publics et les difficiles conditions de travail des personnels. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à M. Pierre Laurent, pour explication de vote.
M. Pierre Laurent. Dans les réponses qui nous ont été faites, on a beaucoup entendu le mot « convergence ». Or, en matière de droit social, la convergence, toute l’histoire du droit social le montre, c’est la généralisation progressive des dispositions les plus protectrices. Cela n’a jamais été le contraire !
M. Marc-Philippe Daubresse. Vous voulez la retraite à 57 ans pour tous ? Qui va la financer ?
M. Pierre Laurent. Que ce soit en matière de temps de travail, de congés payés, de pénibilité ou, aujourd’hui, de droits des femmes, c’est en généralisant une disposition plus protectrice que les précédentes que l’on fait progresser le droit social. Alors que vous nous proposez de faire exactement le contraire, vous parlez de convergence !
Si nous avions réellement engagé une discussion sur la convergence au sens du droit social, les syndicats auraient été les premiers à accepter d’y participer. Or, s’ils sont tous opposés à la réforme aujourd’hui, c’est parce que ce n’est pas le cas.
En matière de pénibilité, vous allez vers la suppression de toutes les garanties collectives. Vous voulez individualiser ce droit. La voilà, la réalité ! Vous supprimez les régimes spéciaux parce qu’ils offrent des garanties collectives. C’est cela, à la vérité, que vous voulez supprimer.
Je dis, à l’instar de mes collègues, que nous allons vers des pénuries d’effectifs dramatiques dans des secteurs stratégiques. Quand les transports publics ne fonctionneront pas en Île-de-France pendant les jeux Olympiques l’année prochaine, vous serez les premiers à verser des larmes de crocodile sur l’image de la France dans le monde entier. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)
M. le président. La parole est à M. Claude Raynal, pour explication de vote.
M. Claude Raynal. Je ne suis pas d’accord avec notre collègue Gay. Pour ma part, j’ai trouvé l’intervention de Martin Lévrier excellente ! (Sourires.) D’abord, je le remercie d’avoir pris la parole. (Nouveaux sourires.) Ensuite, je le remercie d’avoir effectué une synthèse aussi brillante de nos travaux. Certes, il ne nous a pas livré son point de vue personnel,…
M. Martin Lévrier. Si !
M. Claude Raynal. … mais on a au moins eu droit à une synthèse.
Vous nous avez fait la démonstration extraordinaire, cher collègue, qu’en discutant d’un amendement de suppression, on pouvait traiter de dizaines de sujets différents. Il fallait faire cette démonstration et je vous remercie de nous y avoir aidés. Je dois dire que j’ai été très heureux de voir notre groupe être aussi prolixe et faire autant de propositions, qui ne seront malheureusement pas reprises.
Le ministre nous a parlé d’équité. Le débat entre équité et égalité est toujours compliqué. Des livres sur ce sujet sont publiés tous les ans. Dans le cas précis qui nous occupe, l’équité consiste à bien prendre en compte les différences entre les professions. L’objectif est non pas l’égalité, mais l’équité. Il s’agit de mieux rendre compte des difficultés du travail. Peut-être faudrait-il d’ailleurs régulièrement regarder ce point. Nous ne travaillons pas du tout sur un projet de loi équitable. Il s’agit plutôt de tout tailler à la serpe pour atteindre un niveau plutôt bas.
Par ailleurs, la rapporteure générale nous a dit qu’il n’y avait pas d’urgence à faire converger les régimes de retraite, la preuve étant que vous proposez la clause du grand-père. Mais s’il n’y a pas d’urgence, que faisons-nous ? Nous avions le temps de traiter cette question tranquillement.
Enfin, et ce sera mon dernier point, notre système est financé à 80 % par les cotisations et à 20 % par la solidarité nationale. Si ces taux étaient respectivement de 75 % et de 25 %, notre système fonctionnerait toujours sur la base de la répartition !
M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour explication de vote.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Je vais tenter de tenir des propos qui vous agréent, monsieur le président, afin de ne pas être rappelée à l’ordre !
Afin d’y voir clair et avant de décider de notre vote, il faut bien comprendre quels sont les enjeux.
J’ai écouté avec attention la rapporteure générale et le rapporteur Savary, puis j’ai lu l’amendement n° 2057 de M. Retailleau et d’un certain nombre de ses collègues. Depuis, je ne m’y retrouve plus !
J’ai compris que vous souteniez la fermeture de certains régimes spéciaux. L’amendement de M. Retailleau, que nous examinerons beaucoup plus tard, ce qui est vraiment dommage pour la clarté de nos débats, tend à anticiper cette fermeture, même si, prudemment, aucune date précise ni trop proche n’est indiquée.
Mme Doineau nous dit de ne pas nous inquiéter, que ça va bien se passer – comme dirait votre ami Darmanin ! –, puisque l’extinction des régimes spéciaux se fera lentement grâce à la clause du grand-père. M. Savary nous le dit aussi. Je le redis : je n’y comprends plus rien !
Êtes-vous pour la fermeture des régimes spéciaux maintenant ? Êtes-vous pour la fermeture des régimes spéciaux plus tard ? Souhaitez-vous que cette fermeture soit anticipée ? Voterez-vous l’amendement tout à l’heure ?
Je vous conseille de faire comme moi et de voter la suppression de cet article. Autrement, vous allez vous aussi avoir la tête qui tourne ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – M. Guillaume Gontard applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Patrice Joly, pour explication de vote.
M. Patrice Joly. Défendre les régimes spéciaux de retraite, c’est lutter contre une forme de régression sociale, inspirée par les adeptes d’une philosophie néolibérale qui prétendent ici, aujourd’hui, agir au nom de l’égalité. Cela nous a été dit.
La suppression proposée vise en réalité un alignement vers le bas et, finalement, la destruction de ce qui peut être qualifié de droit visant à une plus grande justice sociale.
Il faut plutôt voir ces régimes spéciaux comme des modèles. Ils ont servi de point d’appui à la mise en place d’une couverture vieillesse généralisée. Nous pouvons encore nous en inspirer pour continuer à améliorer le régime général d’assurance vieillesse, notamment par la prise en compte des spécificités des différents métiers, dont la nature évolue, tout comme la pénibilité qui les caractérise.
Je voterai donc l’amendement visant à maintenir ces régimes spéciaux. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à M. Yan Chantrel, pour explication de vote.
M. Yan Chantrel. Comme l’ensemble de mes collègues sur ces travées, je ne peux que constater, et déplorer, le silence de cathédrale qui règne dans les travées de la droite. Votre bâillon, monsieur Retailleau, est solidement attaché sur les parlementaires de votre groupe. Vous pratiquez, en somme, ce qu’on pourrait appeler l’occlusion parlementaire,…
M. Marc-Philippe Daubresse. Cela vaut mieux que la diarrhée verbale !
M. Yan Chantrel. … faute d’être capables de défendre une réforme dont vous êtes pourtant les coauteurs.
M. Daniel Laurent. Ce n’est pas une explication de vote !
M. Yan Chantrel. J’ai néanmoins relevé un propos du rapporteur Savary que je trouve particulièrement scandaleux, et révélateur de votre brutalité vis-à-vis des plus démunis. Il a dit, à propos des métiers pénibles, que « plus on met en exergue la brutalité de ces métiers, moins on trouvera de nouveaux entrants ». Je répète : « Plus on met en exergue la brutalité de ces métiers, moins on trouvera de nouveaux entrants. » (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-François Husson. Voyez les enseignants !
M. Yan Chantrel. Cela en dit long sur votre insensibilité et votre volonté d’invisibiliser les métiers qui abîment les corps. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE et GEST. – Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.) La brutalité, vous ne voulez pas qu’elle soit connue… C’est typique de cette majorité sénatoriale, qui ne souhaite pas agir, justement, pour rendre ces métiers moins pénibles, en améliorant les conditions de travail, en aménageant le temps de travail, en le réduisant, même, éventuellement… Surtout, en faisant jouer la reconnaissance de la Nation, qui doit permettre un départ à la retraite à un âge décent, avec une pension décente ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret, pour explication de vote.
Mme Corinne Féret. Je rappelle que les régimes spéciaux ne constituent pas des privilèges : ils représentent l’héritage de régimes fonctionnant sur la base d’une solidarité interprofessionnelle ou propre à une entreprise. Ils prévoient des règles de départ à la retraite spécifiques, car ils prennent en compte une pénibilité spécifique à laquelle les travailleurs qui cotisent sont exposés : horaires atypiques, fréquence des astreintes, usure physique…
En raccrochant ces régimes spéciaux au régime général, le Gouvernement prévoit pour l’ensemble des nouveaux entrants dans ces régimes un départ à la retraite à 64 ans, avec 43 annuités, sans mesures suffisantes pour prendre en compte la pénibilité intrinsèque à ces métiers. C’est l’article 9 qui concerne la prévention et la réparation de l’« usure professionnelle » – je préfère utiliser le mot de pénibilité. Mais nous n’en débattrons qu’après avoir voté sur ces amendements.
Il aurait été extrêmement intéressant et constructif, chers collègues du groupe Les Républicains, d’entendre vos interventions et de connaître votre point de vue sur ces amendements de suppression et sur la remise en question des régimes spéciaux. Là encore, je considère que le débat est tronqué, puisque nous ne connaissons pas votre point de vue sur ces amendements.
M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.
M. Olivier Jacquin. Je souhaite revenir sur les propos partiels de Mme la rapporteure. Auparavant, je salue les propos de Pascal Savoldelli sur la RATP. Oui, nous jouons les prolongations : le silence de la majorité est éloquent. Avec le nouveau pacte ferroviaire, en 2018, elle a voté pour l’ouverture à la concurrence, dont la suppression des régimes spéciaux est la conséquence. Pascal Savoldelli a rappelé à juste titre les difficultés de recrutement de Keolis, qui peine à trouver des chauffeurs de bus en Île-de-France.
Vous avez dit, madame la rapporteure, qu’une partie des régimes spéciaux avaient été créés à titre temporaire en 1945 et devaient être supprimés. Celui des mineurs l’a été, en effet. Je tiens à vous préciser, madame la rapporteure, qu’il n’y a plus de mineurs en France…
En fait, il reste une mine de sel en France, dans notre département de Meurthe-et-Moselle. Des mineurs descendent encore tous les jours à 400 mètres de fond pour travailler. Je vous invite, madame la rapporteure, monsieur le ministre, à visiter cette mine. Un circuit touristique permet d’ailleurs d’y déjeuner : je vous invite à le faire, tout comme Jean-François Husson…
M. Jean-François Husson. J’y suis déjà allé !
M. René-Paul Savary, rapporteur. Moi aussi !
M. Olivier Jacquin. M. le président Karoutchi serait aussi le bienvenu ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. Un séjour dans une mine de sel… Pas dans l’immédiat ! (Sourires.)
La parole est à M. Thomas Dossus, pour explication de vote.
M. Thomas Dossus. Nous avons entendu très peu d’explications convaincantes sur la place de cet article dans le texte. La rapporteure nous a dit qu’il n’y avait pas urgence à fermer ces régimes. J’en reviens donc à notre débat d’hier, sur l’architecture de ce véhicule législatif. Quelle urgence y a-t-il donc à modifier le PLFSS deux mois après son adoption par notre assemblée ? Je comprends pourquoi vous vous entêtez à garder confidentielle la note du Conseil d’État : cela tient certainement à la fragilité de la place de cet article dans le texte…
J’ai parlé tout à l’heure de la paresse, voire de la torpeur qui avait gagné les rangs de la majorité sénatoriale. Mais on pourrait parler aussi de la vôtre, monsieur le ministre : issu de la gauche, vous avez rapidement glissé vos pas dans les pantoufles du sarkozysme et de la recherche fainéante du bouc émissaire.
Mme Frédérique Puissat. Un peu de respect !
M. Marc-Philippe Daubresse. Souvenez-vous de Mme Touraine et de sa réforme…
M. Thomas Dossus. Contre le nivellement par le bas et la casse du service public, nous demandons et nous voterons la suppression de cet article. (Mme Raymonde Poncet Monge applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.
M. Guillaume Gontard. Je souhaite remercier M. Lévrier, seul de son groupe à avoir pris la parole ce matin. Ce constat est assez troublant, et révélateur d’une obstruction silencieuse qui est en train de s’installer. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Pourtant, l’article 1er porte sur les fameux régimes spéciaux, auxquels on s’attaque, comme à chaque réforme. Nous avons entendu des arguments très différents. Mme la rapporteure nous dit qu’il n’y a pas urgence à revenir sur la clause du grand-père. M. Retailleau nous propose un amendement, après l’article 7, qui n’est pas anodin, puisqu’il changera en fait la nature de l’article 1er.
Je souhaiterais donc des explications. Y a-t-il urgence, ou non ? Que pensent les ministres de cet amendement du président Retailleau ? Hier soir, ils ont donné des avis sur des amendements qui n’avaient pas été présentés, ils pourraient donc le faire maintenant. (Mme Raymonde Poncet Monge applaudit.)
M. René-Paul Savary, rapporteur. C’est hors sujet…
M. le président. La parole est à M. Didier Marie, pour explication de vote.
M. Didier Marie. Nous devrions nous inquiéter collectivement d’une tendance de fond, qui n’a pas dû vous échapper et qui fait l’objet d’un certain nombre de publications. Cette tendance de fond touche particulièrement la jeunesse et se manifeste par une baisse constante de l’intérêt pour le travail, qui disparaît derrière le souhait de profiter du temps libre et de moments considérés comme plus épanouissants. (M. Laurent Duplomb s’exclame.)
Cette tendance est l’une des raisons du désamour des Français pour bon nombre de métiers qui apparaissent, à tort ou à raison, comme peu attractifs. La conséquence est qu’on observe des tensions extrêmes dans certains secteurs, comme la restauration, l’entretien, le bâtiment, les transports, l’énergie.
Ajoutez la remise en cause d’un certain nombre d’acquis sociaux, le refus d’augmenter le Smic et de convoquer une grande conférence sur les salaires, ajoutez la perte de pouvoir d’achat : pour beaucoup, travailler, ce n’est plus la santé, pour paraphraser Henri Salvador.
Et vous leur envoyez le message que la pénibilité n’existe pas ! Ceux qui bénéficiaient d’une prise en compte de celle-ci au travers de leur régime de retraite vont perdre ce qui n’était pas un avantage, mais une juste prise en compte de leur engagement professionnel.
Si nous voulons réhabiliter le travail et réduire les tensions dans un certain nombre de secteurs, ce n’est pas en alignant par le bas les acquis sociaux que l’on y arrivera. C’est la raison pour laquelle il faut maintenir ces cinq régimes dits spéciaux et surtout engager des négociations avec les partenaires sociaux sur la pénibilité. Mais ce mot a été rayé du projet de loi et ne fait l’objet d’aucun article…
M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.
M. Victorin Lurel. J’aimerais faire un rappel au règlement, sur la base de l’article 36, alinéa 5, de notre Règlement…
M. le président. Non, vous avez la parole pour explication de vote.
M. Victorin Lurel. Comme m’y autorise l’alinéa 5 de l’article 36, je souhaite m’exprimer depuis la tribune.
M. le président. Pardon ?
M. Victorin Lurel. Je vous en cite les termes exacts : « L’orateur parle à la tribune ou de sa place. Le Président peut l’inviter à monter à la tribune. » (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) M’interdirez-vous de monter à la tribune ?
M. Daniel Laurent. Quel cinéma !
M. le président. Vous interviendrez de votre place, comme tous les orateurs précédents.
M. Victorin Lurel. Il y a un problème d’interprétation, à tout le moins : je devrais pouvoir monter à la tribune. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. Monsieur Lurel, vous avez déjà utilisé une minute de votre temps de parole.
M. Victorin Lurel. On dira que c’est de l’obstruction, mais c’est l’arme du parlementaire démuni. (Brouhaha sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. Pas si démuni que cela…
M. Victorin Lurel. Comme Laurence Rossignol l’a dit, les ministres ne nous ont pas répondu, non plus que la majorité sénatoriale. Nous voterons donc un peu à l’aveugle.
Nous allons accélérer la mise en extinction, c’est-à-dire la mort, de ces régimes, qui disparaîtraient avant 2025. Nous aimerions avoir une explication. J’ai même cru entendre le président Retailleau dire qu’on n’attendra pas 43 ans pour la mise à mort de ces régimes…
M. Daniel Laurent. C’est terminé !
M. Victorin Lurel. Pourriez-vous éclairer notre vote ?
M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.
M. Jean-Yves Leconte. Il y a une logique qui ne nous surprend pas. Le Gouvernement a supprimé les critères de pénibilité en 2017 par ordonnance. À présent, il veut supprimer plusieurs des régimes spéciaux qui prennent en compte cette pénibilité. Il respecte une forme de logique, même si ce n’est pas la nôtre.
Mais lorsque nous vous interrogeons sur la capacité des services publics à recruter, en particulier dans les transports, ou sur l’avenir de notre secteur énergétique, qu’il s’agisse d’EDF ou de ses sous-traitants, nous ne recevons aucune réponse. Comment assurer l’attractivité des métiers en tension ? Pas de réponse. C’est étonnant, de la part d’un ministre chargé de l’emploi. Nous sommes convaincus, nous, que les régimes spéciaux, s’ils ne sont pas la réponse parfaite, contribuent à rendre ces métiers attractifs. À ce titre, ils mériteraient d’être élargis et non fermés.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Pardon de nous répéter, mais il semble que vous n’entendiez pas. Ces régimes spéciaux offrent des droits associés à la pénibilité de façon fine et pertinente, puisqu’ils sont conçus en fonction d’un tableau d’exposition aux risques au fil de la carrière.
Selon la pénibilité, on peut bénéficier d’une majoration de la durée de service, qui se traduit par une anticipation de l’âge du départ à la retraite. C’est un dispositif de départ anticipé, en somme.
Monsieur le ministre, vous voulez renvoyer les travailleurs concernés au compte professionnel de prévention, qui ne procure que deux ans, au plus, d’anticipation. Or 60 ans hier, 62 ans aujourd’hui, c’est trop tard, monsieur le ministre ! C’est pourquoi votre réforme contraindra l’assurance maladie à dépenser 1 milliard d’euros de plus pour les maladies de longue durée.
Il faut s’inspirer du système des catégories actives pour les métiers du soin et de l’aide. Si vous ne voulez pas accroître les départs pour inaptitude – alors que c’est déjà la première cause de départ –, il faut non seulement permettre les départs à 57 ans, comme à la RATP, mais aussi réduire la semaine de travail.
Non, monsieur le rapporteur Savary, il ne suffit pas de faire silence sur la dureté de ces métiers pour améliorer leur attractivité. Déjà, il n’y a plus d’aides-soignants et d’aides à domicile pour entrer dans nos services. La solution, ce n’est pas les exosquelettes, mais la réduction du temps de travail. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) Il faut, en fait, élargir à ces branches l’esprit et la méthode des régimes spéciaux. (MM. Thomas Dossus et Guillaume Gontard applaudissent.)
M. le président. La parole est à Mme Xavier Iacovelli, pour explication de vote.
M. Xavier Iacovelli. Nous ne voterons pas les amendements de suppression de cet article.
Depuis que le débat sur les retraites a commencé, d’abord à l’Assemblée nationale, puis au Sénat, vous nous demandez d’écouter les Français.
Très bien, mais alors il ne faut pas avoir l’oreille sélective. Aujourd’hui, les Français demandent la suppression de ces régimes spéciaux. (Protestations sur les travées des groupes SER, GEST et CRCE.) Je les ai entendus, les Français : ils demandent pourquoi un plombier, un boulanger, un coiffeur auraient moins de droits qu’un chauffeur de la RATP à Paris. Nous devons donc harmoniser les régimes…
M. Fabien Gay. Par le haut !
M. Xavier Iacovelli. … et, pour rétablir une forme d’équité, supprimer ces régimes spéciaux.
Non, madame de La Gontrie, nous n’avons pas la tête qui tourne – en tout cas pas dans la majorité présidentielle. Nous sommes cohérents, au contraire. Ce gouvernement est le seul qui aura eu le courage de supprimer les régimes spéciaux, en conservant la clause du grand-père. C’est pourquoi nous ne voterons pas l’amendement de M. Retailleau, et je m’en excuse auprès de lui.
M. le président. La parole est à Mme Victoire Jasmin, pour explication de vote.
Mme Victoire Jasmin. Il faut supprimer cet article, et même tout le texte ! La situation est inquiétante et c’est une erreur de ne pas avoir impliqué les partenaires sociaux.
Vous négligez les salariés concernés par ces régimes spéciaux alors que les cabinets de conseil s’engraissent régulièrement sur les carences, les défaillances et les incohérences de votre gouvernement.
Il faut valoriser le travail en protégeant davantage les travailleurs et en créant des conditions d’attractivité pour ces métiers. Nécessaires, ils doivent être justement reconnus et attractifs. Il faut également, pour le développement économique et social, que cet article, injustifié, soit supprimé.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.
Mme Laurence Rossignol. Bien entendu, je voterai ces amendements, non seulement pour défendre les régimes spéciaux, mais parce que je pense qu’autre chose se joue dans cette affaire.
Voilà plusieurs années que j’observe les libéraux faire des régimes spéciaux une obsession.
C’est une obsession de la droite post-gaulliste. Sous de Gaulle, les régimes spéciaux n’étaient pas un sujet : on défendait le programme du Conseil national de la Résistance (CNR) ou l’ordonnance de 1945 sur la sécurité sociale.
Cette obsession s’est développée avec la financiarisation de l’économie et la distorsion de la juste répartition entre le capital et le travail. Plus notre pays est fragmenté, plus vous incitez nos concitoyens à chercher les responsables de leurs souffrances à côté d’eux, au plus proche d’eux.
En fait, c’est une méthode assez facile, qui consiste à faire croire au salarié que, s’il n’est pas assez payé, c’est à cause du chômeur ; au chômeur que, s’il n’est pas assez indemnisé, c’est à cause de celui qui est au RSA ; et à ce dernier que, s’il n’a pas de travail, c’est à cause de l’immigré, qui le lui prend.
Je me fais du souci quand je vois l’« archipélisation », comme dit Jérôme Fourquet, de la République, quand je constate l’atomisation de sentiment national collectif, que nous sommes en train de perdre.
M. Laurent Duplomb. Parce que vous en faites trop !
Mme Laurence Rossignol. Nous ne le perdons pas simplement parce que les gens perdent en identité nationale, mais parce que le progrès social et le progrès républicain, qui faisaient le ciment du sentiment national et de la cohésion des citoyens dans la République, ne sont plus au rendez-vous. Avec la suppression des régimes spéciaux, vous contribuez à faire encore davantage s’effondrer ce qui fait la République. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à M. Bruno Retailleau, pour explication de vote. (Ah ! sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST. – Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Bruno Retailleau. Je ne voudrais pas que la séance soit suspendue, monsieur le président, sans que j’aie pu remercier les oppositions au Sénat d’avoir cité tant de fois mon nom ! (Sourires.) Honnêtement, je n’en mérite pas tant : merci, mes chers collègues, d’avoir donné un peu de notoriété au nom que vous avez fait résonner dans cet hémicycle.
Bien sûr, nous n’allons pas voter ces amendements, et nous voterons l’article 1er, puisque nous sommes favorables à la fermeture de ces régimes spéciaux. Nous sommes même favorables à une accélération…
M. Laurent Duplomb. Exactement !
M. Bruno Retailleau. … et à une convergence en 2040.
M. Bruno Retailleau. Pourquoi mon amendement a-t-il été déposé sur la seconde partie ? Non par un calcul de calendrier – que vous faites vous-même –, mais parce qu’il tend à modifier le régime de versements des prestations, et qu’il concerne donc la partie consacrée aux dépenses.
Si nous voulons l’extinction, ou en tout cas la fermeture, de ces régimes spéciaux, madame Rossignol, c’est précisément parce que nous pensons qu’ils abîment le commun et concourent à l’archipélisation.
M. Laurent Duplomb. Exactement !
M. Bruno Retailleau. Comment expliquer aux Français que, pour des mêmes travaux, pour la même pénibilité, vous partez à 52 ans à Paris, et dix ans plus tard ailleurs ? Ce n’est pas compréhensible, évidemment, cher Fabien Gay. Il n’y a pas de lien entre la souveraineté énergétique, que nous aimons, que nous voulons vous et moi promouvoir, et les régimes spéciaux.
Vous nous reprochez de ne pas participer au débat. Nous y participerons, bien entendu, pour défendre les amendements par lesquels nous voulons enrichir le texte. Il n’y a pas de silence : nous nous exprimons, très régulièrement, par la voix de nos rapporteurs…
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Ils s’expriment au nom de la commission !
M. Bruno Retailleau. Nous ne tomberons pas dans le piège que vous nous tendez. Vous voulez faire de l’obstruction (Protestations sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.), pas nous : nous voulons examiner l’ensemble du texte et nous réservons donc notre temps de parole pour défendre nos positions et nos propositions. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Depuis le début de ce débat, on nous explique que cette réforme répond à des exigences de nature budgétaire et comptable pour rééquilibrer un système de retraite par répartition supposément déficitaire.
Pourtant, il apparaît qu’en supprimant le régime spécial de la RATP, vous allez créer un déficit supplémentaire. Ce n’est pas moi qui le dis, mais Christophe Rolin, le directeur de la caisse de retraite de la RATP, que la commission des affaires sociales a auditionné le 1er février dernier. Il nous a indiqué que la suppression de ce régime spécial provoquerait, à partir d’octobre 2023, entre 20 millions et 25 millions d’euros de déficit supplémentaire, alors que les agents sous statut continueraient de partir à la retraite entre 56 et 57,5 ans, pour les personnels de catégorie A. Personne ne part à 52 ans, monsieur Retailleau, vérifiez vos sources…
Quel impact aura votre réforme, monsieur le ministre ? Un impact sur le niveau de pension des agents de la RATP. Le contribuable, lui, sera contraint de compenser l’aggravation du déficit : celui-ci s’élève à 780 millions d’euros par an aujourd’hui, avec votre réforme, la note passera à 1,2 milliard d’euros par an d’ici quatre ans.
Chez les électriciens et gaziers, l’âge moyen de départ anticipé est de 57 ans, essentiellement pour les services actifs, qui concernent 20 % des agents, les plus exposés à la pénibilité, et le taux de service est de 100 % : il faut donc savoir raison garder.
Mettre fin aux régimes spéciaux sous prétexte d’équité et d’une prétendue universalité est une diversion, pour faire oublier que tout le monde va pâtir du report de l’âge légal.
La justice sociale et l’équité consisteraient justement à appliquer des mesures sérieuses de prise en compte de la pénibilité à l’ensemble des travailleurs qui accomplissent des travaux pénibles, plutôt que de niveler par le bas. Voilà pourquoi il faut absolument supprimer cet article.
Rappel au règlement
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Mon rappel au règlement se fonde sur l’article 46 bis. Monsieur Retailleau, vous avez indiqué il y a quelques minutes que votre groupe s’exprimait par la voix des rapporteurs. Je suis désolée que vous quittiez l’hémicycle au moment où je m’adresse à vous, ce qui est d’une courtoisie relative… (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Les rapporteurs sont là pour exprimer le point de vue de la commission, pas pour exprimer le point de vue d’un groupe. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, GEST et CRCE.)
Article 1er (suite)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques de suppression nos 2 rectifié et suivants.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 146 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 341 |
Pour l’adoption | 98 |
Contre | 243 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à treize heures, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Gérard Larcher.)
PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher
M. le président. La séance est reprise.
3
Mise au point au sujet d’un vote
M. le président. La parole est à M. Henri Cabanel, pour une mise au point au sujet d’un vote.
M. Henri Cabanel. Lors du scrutin public n° 146, portant sur les amendements identiques de suppression de l’article 1er du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale, notre collègue Nathalie Delattre souhaitait s’abstenir.
M. le président. Acte est donné de votre mise au point, mon cher collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin concerné.
4
Loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023
Suite de la discussion d’un projet de loi
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023, dont le Sénat est saisi en application de l’article 47-1, alinéa 2, de la Constitution.
Dans la discussion des articles, nous poursuivons, au sein de la première partie, l’examen de l’article 1er.
PREMIÈRE PARTIE (suite)
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES ET À L’ÉQUILIBRE DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L’EXERCICE 2023
Article 1er (suite)
Amendements identiques de suppression des deux premiers alinéas de l’article
M. le président. Je suis saisi de soixante et onze amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les quarante-sept premiers sont identiques.
L’amendement n° 281 est présenté par M. Féraud.
L’amendement n° 313 est présenté par M. Pla.
L’amendement n° 367 est présenté par Mme Féret.
L’amendement n° 450 est présenté par M. Fichet.
L’amendement n° 505 est présenté par M. Chantrel.
L’amendement n° 519 est présenté par M. Gillé.
L’amendement n° 568 est présenté par Mme de La Gontrie.
L’amendement n° 580 est présenté par M. Redon-Sarrazy.
L’amendement n° 667 est présenté par Mme Le Houerou.
L’amendement n° 696 est présenté par Mme Blatrix Contat.
L’amendement n° 727 est présenté par M. M. Vallet.
L’amendement n° 809 est présenté par M. Jacquin.
L’amendement n° 822 est présenté par M. Lozach.
L’amendement n° 862 est présenté par M. Durain.
L’amendement n° 897 est présenté par M. Lurel.
L’amendement n° 942 est présenté par M. Cardon.
L’amendement n° 981 est présenté par M. Raynal.
L’amendement n° 1009 est présenté par M. Stanzione.
L’amendement n° 1030 est présenté par Mme G. Jourda.
L’amendement n° 1061 est présenté par M. Houllegatte.
L’amendement n° 1076 est présenté par M. Tissot.
L’amendement n° 1097 est présenté par M. Éblé.
L’amendement n° 1146 rectifié bis est présenté par Mme Lubin.
L’amendement n° 1206 est présenté par M. Mérillou.
L’amendement n° 1239 est présenté par Mme Jasmin.
L’amendement n° 1269 est présenté par M. Montaugé.
L’amendement n° 1315 est présenté par Mme Préville.
L’amendement n° 1339 est présenté par M. Marie.
L’amendement n° 1372 est présenté par M. Bourgi.
L’amendement n° 1405 est présenté par M. Sueur.
L’amendement n° 1435 est présenté par M. Kerrouche.
L’amendement n° 1503 est présenté par Mme M. Filleul.
L’amendement n° 1542 est présenté par Mme Monier.
L’amendement n° 1591 est présenté par M. J. Bigot.
L’amendement n° 1621 est présenté par Mme Poumirol.
L’amendement n° 1651 est présenté par Mme Meunier.
L’amendement n° 1663 est présenté par Mme Bonnefoy.
L’amendement n° 1692 est présenté par M. Leconte.
L’amendement n° 1747 est présenté par M. Todeschini.
L’amendement n° 1790 est présenté par M. Jomier.
L’amendement n° 1818 est présenté par M. Kanner.
L’amendement n° 1846 est présenté par M. Assouline.
L’amendement n° 1991 est présenté par Mme Rossignol.
L’amendement n° 2070 est présenté par M. Jeansannetas.
L’amendement n° 2258 est présenté par Mme Espagnac.
L’amendement n° 3193 est présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon.
L’amendement n° 3885 rectifié est présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli.
Ces quarante-sept amendements sont ainsi libellés :
Alinéas 1 et 2
Supprimer ces alinéas.
Les amendements nos 281 et 313 ne sont pas soutenus.
La parole est à Mme Corinne Féret, pour présenter l’amendement n° 367.
Mme Corinne Féret. Cet amendement vise à supprimer les alinéas 1 et 2 de l’article 1er, qui concernent le régime spécial de la RATP.
Nous estimons que supprimer ce régime spécial alors que le secteur connaît déjà des problèmes de sous-effectifs de conducteurs ne va pas dans le bon sens. Comment recruter lorsque l’attractivité des métiers concernés est encore réduite ?
M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Fichet, pour présenter l’amendement n° 450.
M. Jean-Luc Fichet. L’observation des conditions de travail de l’ensemble des agents et des salariés de la RATP montre que leur activité est éprouvante sur le plan physique. En plus, le rythme des horaires est source de fatigue mentale. Tout cela justifiait l’existence d’un régime spécial.
Si la RATP a beaucoup recruté pendant de nombreuses années, nous assistons au phénomène inverse actuellement, en dépit d’un régime de retraite encore favorable à ce jour.
Par conséquent, cet amendement vise à plaider en faveur des agents de la RATP et à ne pas fermer leur régime spécial de retraite.
M. le président. Les amendements nos 505 et 519 ne sont pas soutenus.
La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour présenter l’amendement n° 568.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Le président du Sénat, qui est un élu francilien, et moi-même, qui suis une élue parisienne, connaissons la situation extrêmement difficile de la RATP et, par conséquent, des usagers, une situation que pouvez également constater lorsque vous prenez les transports en commun à Paris, mes chers collègues.
Il y a une difficulté de financement – elle est majeure, mais je ne m’attarderai pas sur le sujet –, une difficulté d’équipements, mais aussi une difficulté de personnels : nous manquons d’agents.
Revenir sur ce régime spécial, qui reconnaît incontestablement la pénibilité du travail des agents, dont, me semble-t-il, personne ne doute au sein de cet hémicycle – peut-être que certains s’interrogeront sur la pénibilité d’autres professions dans la suite de la discussion –, puisque nous nous représentons bien leurs conditions de travail.
Il faut quand même rappeler que des critères de pénibilité ont été supprimés par Emmanuel Macron ; nous aurons l’occasion, j’imagine, d’en parler au cours de l’examen du texte.
Aujourd’hui, alors qu’il n’y a pas assez d’agents et que les conditions de travail sont pénibles, on propose une modification des régimes spéciaux. Tout cela n’est pas très sérieux.
La question de l’état de nos transports en commun se pose d’ailleurs de manière particulièrement accrue dans la perspective des jeux Olympiques (JO). Par rapport à cet objectif, la tension est extrême.
Toutes ces raisons nous semblent justifier la suppression des alinéas 1 et 2.
M. le président. La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy, pour présenter l’amendement n° 580.
M. Christian Redon-Sarrazy. Monsieur le ministre, contrairement à vous, j’établis un lien direct entre régime de retraite et recrutement.
Vous avez renvoyé tout à l’heure le débat sur le sujet au dialogue social. Mais le dialogue social doit porter sur les périodes aussi bien d’activité que de retraite ; elles ne peuvent pas être déconnectées. Les conditions particulières d’exercice de ces métiers, qui – je le rappelle – participent à un service public essentiel pour l’activité quotidienne du pays, justifient des mesures particulières. Votre gouvernement a foulé aux pieds les critères de pénibilité. Vous remettez maintenant en question les conditions de départ à la retraite adaptées aux spécificités de ces métiers.
J’en viens à la question du recrutement. Sur 1 500 postes à pourvoir à la RATP en 2022, près de la moitié seulement ont été pourvus. Les choix que vous effectuez ne faciliteront sans doute pas la tâche de votre ancien Premier ministre dans la perspective des JO de 2024. Il connaîtra sans doute la situation de son homologue de la SNCF ou plutôt celle que vivent les usagers de la SNCF, dont je fais partie.
Je connais bien le problème en tant qu’élu de Haute-Vienne, avec les désagréments de la ligne Paris-Orléans-Limoges-Toulouse (Polt) ou la suppression pour plusieurs mois d’un train Limoges-Périgueux, non pas en raison de travaux, mais parce qu’il « manque deux personnes au poste d’aiguillage de Négrondes et de La Coquille », ce qui empêche la circulation des trains à ces endroits.
Si vous considérez qu’aucun lien n’existe entre statut et recrutement, je vous invite à méditer ces exemples. Nous voterons la suppression des deux premiers alinéas de l’article.
M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour présenter l’amendement n° 667.
Mme Annie Le Houerou. Cet amendement a pour objet de supprimer les alinéas 1 et 2 de l’article 1er, qui ferment le régime spécial de retraite de la RATP.
En effet, certains personnels de la RATP sont autorisés à ouvrir leurs droits à la retraite dix ans avant les salariés du régime général, c’est-à-dire à 52 ans. Cela n’implique d’ailleurs pas forcément que tous prennent leur retraite à cet âge.
Cette dérogation concerne les métiers les plus pénibles : horaires atypiques, travail de nuit, mouvements répétitifs entraînant des troubles musculo-squelettiques. En réalité, moins de 5 % des salariés de la RATP pouvaient partir à l’âge minimal.
La réforme remet donc en cause des dispositifs conquis après de longues luttes par les salariés du secteur en raison de la pénibilité de leur emploi. Sous prétexte d’équité et de justice sociale, elle vise à diviser les Français sur le sujet des retraites, alors même que d’autres régimes spéciaux, comme celui des médecins ou des avocats, sont maintenus.
Selon la Caisse de retraites du personnel de la RATP, à la suite de la suppression du régime spécial de la RATP, 2 000 à 3 000 entrées par an en moins sont à prévoir, ce qui représente 20 millions d’euros à 30 millions d’euros de cotisations retraite en moins chaque année.
En raison de l’ouverture du marché à la concurrence, on estime qu’environ 19 000 salariés quitteront la RATP pour rejoindre des filiales ou des entreprises concurrentes. Cela entraînera inévitablement des difficultés de recrutement et des vacances de postes.
La suppression de ce régime spécial aura donc des conséquences néfastes sur l’attractivité de la RATP. De même, dans le contexte actuel de bifurcation écologique, nous avons besoin de chauffeurs de bus et de métro, de techniciens, ainsi que d’ingénieurs de l’énergie.
Nous devons donc reconnaître la pénibilité de ces métiers pour renforcer leur attractivité et pallier les difficultés de recrutement. Tel est l’objet de cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Florence Blatrix Contat, pour présenter l’amendement n° 696.
Mme Florence Blatrix Contat. Cet amendement a pour objet de supprimer les alinéas 1 et 2, qui ferment le régime spécial des retraites de la RATP.
En effet, les salariés de la RATP sont soumis à des sujétions importantes et à une pénibilité particulière. Les conditions de travail se dégradent de plus en plus : horaires atypiques, fréquence des astreintes, usure physique, mais aussi augmentation des incivilités auxquelles les agents sont confrontés… Tout cela affecte la condition physique et mentale des travailleurs.
S’y ajoute le recours, désormais systématique, au travail de nuit, afin d’augmenter la productivité, ce qui dégrade également les conditions de travail. Les conducteurs de bus, eux, sont confrontés à la dégradation continue des conditions de circulation sous l’effet de la densification de la population et des nouvelles mobilités, qui rendent la conduite de plus en plus stressante sans aucune compensation.
Prendre en compte ces divers critères de pénibilité n’est donc pas un luxe ; c’est avant tout une mesure de justice sociale.
Aussi, nous estimons qu’au lieu de niveler les droits des salariés par le bas en supprimant le régime spécial, il faut permettre à l’ensemble des salariés exposés à la pénibilité de partir plus tôt à la retraite.
Les transports franciliens – métro, RER, bus – connaissent actuellement des sous-effectifs de conducteurs qui ont largement dégradé les conditions de transport des habitants de la région parisienne ces derniers mois. Comment recruter quand on réduit encore l’attractivité des métiers concernés ?
M. le président. L’amendement n° 727 n’est pas soutenu.
La parole est à M. Olivier Jacquin, pour présenter l’amendement n° 809.
M. Olivier Jacquin. Cet amendement vise à ne pas fermer le régime spécial de retraite de la RATP.
Les horaires atypiques, la fréquence des astreintes ou encore l’usure physique affectent la condition physique et mentale des travailleurs. Ce n’est pas un luxe que de prendre en compte divers critères de pénibilité : c’est avant tout une mesure de justice sociale. Ainsi, nous estimons qu’au lieu de niveler les droits des salariés par le bas en supprimant le régime spécial, il faut permettre à l’ensemble des salariés exposés à la pénibilité de partir plus tôt à la retraite.
Les transports franciliens – métro, RER, bus –, en plus de devoir assumer la réorganisation totale due à l’ouverture à la concurrence, que notre groupe a combattue lors de l’examen de la loi d’orientation des mobilités en 2019, subissent une crise majeure de ressources humaines. Le mal-être des conducteurs, notamment des conducteurs de bus, est immense, comme le prouvent les mouvements sociaux, particulièrement en grande couronne.
Dès lors, comment pallier les problèmes de recrutement si l’on réduit encore davantage l’attractivité des métiers ? Nous ne comprenons pas votre logique
Le mouvement « Stop galère » a été lancé par les associations d’usagers et partis de gauche d’Île-de-France cet hiver face à cette triple ineptie : attaque sociale contre les travailleurs de la RATP, hausse du passe Navigo, baisse des financements.
Ce n’est pas aux travailleurs et aux usagers de payer les pots cassés d’une mauvaise réforme des retraites et d’une mauvaise compensation par l’État des pertes de recettes d’Île-de-France Mobilités du fait de la crise sanitaire comme des mauvais calculs en vue du Grand Paris Express.
Enfin, le Gouvernement et la majorité sénatoriale n’ont de cesse de crier à l’injustice contre la situation qui prévaut en Île-de-France et celle des autres réseaux de transports en commun dans le pays. Mais pourquoi toujours vouloir niveler les régimes par le bas ?
Vous voulez supprimer le régime spécial de la RATP, comme une conséquence de l’ouverture à la concurrence que vous, majorité sénatoriale, avez votée. Vous étiez alors moins silencieux.
Je vous invite de nouveau à aller faire un tour un soir avec un conducteur de bus, par exemple, en Seine-Saint-Denis, en deuxième couronne ; nous reparlerons ensuite du sujet.
M. le président. Les amendements nos 822, 862, 897 et 942 ne sont pas soutenus.
La parole est à M. Claude Raynal, pour présenter l’amendement n° 981.
M. Claude Raynal. Cela va bien vite ; je vais donc parler doucement ! (Rires.)
Cet amendement vise à ne pas fermer le régime spécial de retraite de la RATP. Les horaires atypiques, la fréquence des astreintes ou encore l’usure physique affectent la condition physique et mentale des travailleurs. Ce n’est pas un luxe que de prendre en compte divers critères de pénibilité.
Je le rappelle, ces derniers ne concernent en réalité que très peu de salariés au sein de la RATP – moins de 5 % des personnes peuvent ouvrir des droits des droits à la retraite dix ans avant les salariés du régime général –, en l’occurrence ceux qui ont les métiers les plus pénibles.
Les mesures prévues pour faire suite à la suppression des régimes spéciaux sont insuffisantes. En effet, l’extinction de ces derniers a pour objet de supprimer l’ensemble des dispositifs de départ anticipé pour les remplacer par le C2P.
Ne nous étonnons donc pas qu’un mouvement de refus à l’égard de ce texte existe ! Pour ma part, je m’oppose à ces alinéas et je propose de ne pas fermer ce régime spécial.
M. le président. Les amendements nos 1009 et 1030 ne sont pas soutenus.
La parole est à M. Jean-Michel Houllegatte, pour présenter l’amendement n° 1061.
M. Jean-Michel Houllegatte. Comme cela a été rappelé, en 2024, la France accueillera les jeux Olympiques et Paralympiques. Des millions de personnes devront être transportées en région parisienne. La question des transports est sans doute le point clé de la réussite de ces jeux et sera déterminante pour l’image de la France à l’étranger.
Or nous pouvons être raisonnablement inquiets. Actuellement, il y a une certaine tension autour du planning de réalisation des infrastructures, s’agissant des travaux à effectuer comme de leur financement, qui n’est pas encore totalement bouclé.
Pour relever le défi, la RATP lance le recrutement de 2 700 chauffeurs de bus et de 400 agents de maintenance. Cela représente plus de 3 100 postes à pourvoir.
En jetant le discrédit sur les agents de la RATP, qui seraient des privilégiés, et en fermant ce régime spécial à compter du 1er septembre prochain pour les nouvelles embauches, vous compliquez la tâche de Jean Castex pour mener à bien son recrutement. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.) Je sais que l’ancien Premier ministre devient encombrant, surtout lorsqu’il visite avec bonhomie et succès le salon de l’agriculture, mais ce n’est pas une raison pour lui mettre des bâtons dans les roues.
Par ailleurs, nous le savons, la fermeture du régime spécial des agents de la RATP, est au mieux un artifice, au pire un appât pour se concilier une soi-disant opinion publique et s’en octroyer les faveurs, afin de faire passer une réforme qui n’est en réalité que brutale et surtout pas nécessaire. (M. Patrick Kanner applaudit.)
M. le président. L’amendement n° 1076 n’est pas soutenu.
La parole est à M. Vincent Éblé, pour présenter l’amendement n° 1097.
M. Vincent Éblé. Mes chers collègues, vous n’ignorez pas que les horaires atypiques, la fréquence des astreintes et l’usure affectent désormais fortement la condition physique et mentale des travailleurs. C’est singulièrement vrai dans le secteur des transports. Prendre en compte divers critères de pénibilité n’est pas un luxe ; c’est avant tout une mesure de justice sociale.
Ainsi, nous estimons au contraire qu’au lieu de niveler les droits des salariés par le bas en supprimant les régimes spéciaux, il faut permettre à l’ensemble des salariés exposés à des pénibilités élevées de bénéficier de conditions favorables de départ à la retraite.
En Île-de-France, le métro, le RER ou les bus connaissent actuellement, et singulièrement depuis la crise de la pandémie du covid-19, des sous-effectifs de conducteurs qui ont amplement dégradé les conditions de transport ces derniers mois.
Cette question n’est pas seulement celle de la protection des salariés ; c’est aussi celle des usagers de la région parisienne, en particulier ceux de la grande couronne, que je côtoie personnellement chaque jour.
Comment recruter quand on réduit encore l’attractivité des métiers ? C’est une véritable question. Nous devons nous en préoccuper.
Par conséquent, je propose de ne pas fermer le régime spécial de retraite de la RATP. Il faut au contraire prendre en considération les spécificités particulières de ce métier.
L’adaptation de nos réglementations et de notre législation à des conditions particulières relève de l’exigence de notre travail de parlementaires. Nous ne pouvons pas être dans l’uniformisation. Il faut tenir compte des règles particulières et, en l’occurrence, ne pas faire disparaître ce régime spécial.
M. le président. La parole est à Mme Monique Lubin, pour présenter l’amendement n° 1146 rectifié bis.
Mme Monique Lubin. Je voudrais revenir sur le contrat passé entre les agents de la RATP et leur employeur.
En effet, le choix d’une profession peut, certes, être lié à l’attrait du métier, mais il peut aussi être fonction de l’organisme employeur.
En l’occurrence, nous parlons de métiers compliqués : conduire un bus ou une rame dans les tunnels du métro à Paris pendant toute une journée ou plusieurs heures à la suite peut, selon certains points de vue, ne pas être considéré comme très enrichissant. Dans ces conditions, l’un des attraits du métier peut résider dans cette forme de compensation que constitue la possibilité de partir plus tôt à la retraite.
On se focalise sur les dispositions en vigueur actuellement, c’est-à-dire sur le départ à 52 ans. Mais l’audition du président-directeur général de la RATP a mis en évidence que l’âge de départ réel pour les carrières actives était non pas de 52 ans, mais plutôt de 56 ans ou 57 ans.
Cela faisait peut-être sourire certains de nos collègues ce matin, mais il est exact que l’attractivité du métier se réduit particulièrement – plusieurs des orateurs qui m’ont précédée l’ont relevé –, comme d’ailleurs pour d’autres professions.
Le changement envisagé pourrait accentuer le manque de séduction de ces métiers à l’avenir.
M. le président. L’amendement n° 1206 n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Victoire Jasmin, pour présenter l’amendement n° 1239.
Mme Victoire Jasmin. Cet amendement vise à maintenir le régime spécial de retraite de la RATP, à renforcer l’attractivité de ces métiers, mais aussi, et surtout à tenir compte des critères de pénibilité et d’utilité face aux besoins réels de ce secteur. Il s’agit également de favoriser le transport collectif, d’anticiper les jeux Olympiques de 2024 et de favoriser les mobilités douces pour tenir compte du réchauffement climatique.
Il faut aussi, monsieur le ministre, favoriser l’emploi dans le secteur, qui peine véritablement à recruter suffisamment de personnes en raison de son manque d’attractivité.
De grands besoins existent. Il est important de faire bénéficier les salariés concernés de retraites dignes, afin de favoriser le secteur des transports, un secteur ô combien utile pour nos concitoyens.
M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour présenter l’amendement n° 1269.
M. Franck Montaugé. La suppression du régime de la RATP est une attaque en règle, une de plus, contre nos services publics.
Comme cela a été rappelé, les agents de la RATP délivrent quotidiennement un service absolument indispensable à des millions de Franciliens. Or, faute de moyens suffisants – car c’est aussi de cela qu’il s’agit –, ce service perd des capacités pour répondre aux besoins des usagers. C’est indiscutable !
Outre que la gestion est tout aussi discutable, vous voulez réduire l’intérêt que de potentiels candidats pourraient trouver à travailler dans cette grande entreprise. À la RATP, ceux qui font vivre ce service public essentiel – conducteurs, agents de station, personnel chargé de la maintenance des voies, etc. – bénéficient de possibilités de départ anticipé. Les horaires sont difficiles. Les astreintes ou l’usure pèsent sur la santé physique et psychique des salariés. Dans ce contexte, un régime spécial peut aussi être considéré non seulement comme normal, mais aussi comme un atout à préserver. C’est mon avis.
En réalité, vous raisonnez à l’envers. Il s’agirait de mieux protéger l’ensemble des métiers pénibles au lieu de supprimer les dernières protections qui en préservent encore l’attractivité.
Pour ces raisons, le régime spécial de la RATP, comme les autres régimes spéciaux, doit être préservé. Par conséquent, je m’opposerai, et nous nous opposerons à une telle suppression.
M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour présenter l’amendement n° 1315.
Mme Angèle Préville. Cet amendement vise à ne pas fermer le régime spécial de retraite de la RATP.
En effet, les conditions de travail n’ont guère changé au sein de la RATP : il y a toujours des horaires atypiques, de la fréquence d’astreinte, du travail de nuit et des amplitudes horaires et de l’usure qui affectent les conditions physiques et mentales des travailleurs.
Ce n’est pas un régime privilégié ; c’est juste une mesure de justice sociale. Ainsi, plutôt que de niveler les droits des salariés par le bas, toujours en supprimant ces régimes spéciaux, il faut au contraire permettre à l’ensemble des salariés de bénéficier d’un départ plus précoce à la retraite.
Dans un article paru cette semaine dans l’hebdomadaire Le 1, Pierre Rosanvallon évoque le sentiment qu’une règle générale écrase la réalité particulière de chacun. Or la réalité particulière de chacun, vécue par les salariés de la RATP, n’est pas celle d’un régime usurpé ou favorisé. C’est au contraire celui d’une compensation accordée pour une vie au travail particulièrement dure. C’était la règle du jeu.
Par ailleurs, les transports franciliens – métro, RER, bus – connaissent des sous-effectifs, notamment de conducteurs, qui seront un problème lors des jeux Olympiques l’année prochaine. C’est l’image de la France qui est en jeu.
Gouverner, c’est anticiper. Examinons donc de près comment répondre à la problématique du recrutement. Si nous n’y parvenons pas, comment ferons-nous pour offrir une bonne image de la France lors des jeux Olympiques ?
M. le président. La parole est à M. Didier Marie, pour présenter l’amendement n° 1339.
M. Didier Marie. Première question à se poser : les métiers de la RATP sont-ils pénibles ? Compte tenu des horaires, du travail de nuit, des astreintes, de l’usure physique, des conditions de circulation de plus en plus difficiles en Île-de-France et du stress lié au comportement d’un certain nombre de clients, la réponse est évidemment oui !
Deuxième question : les agents de la RATP abusent-ils de ce régime spécial ? Non ! Ils partent en moyenne après 52 ans, âge auquel ils pourraient prétendre à la retraite.
Troisième question : la suppression de leur régime facilitera-t-elle les recrutements ? Là encore, la réponse est non ! Les besoins liés à la Coupe du monde de rugby de 2023 et aux jeux Olympiques en 2024 sont énormes, et les conditions de réussite de ces événements sont liées, comme cela a été rappelé, à la qualité des déplacements dans notre région.
Quatrième question : voulez-vous faire une mauvaise manière à M. Castex,…
M. Patrick Kanner. Mais oui !
M. Didier Marie. … à qui l’on prête de grandes ambitions,… pour la RATP bien évidemment ? Il doit faire face à une dégradation des conditions de déplacement des usagers franciliens et il peine à recruter les 2 500 nouveaux agents dont il aura besoin.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Sauvez le soldat Castex !
M. Didier Marie. Pour ces raisons, ce régime ne doit pas être fermé. Il faut au contraire s’en inspirer pour de nombreux autres métiers. Si vous voulez éviter le départ des agents de la RATP vers d’autres réseaux ou la concurrence, leur régime doit être préservé.
M. le président. Les amendements nos 1372, 1405 et 1435 ne sont pas soutenus.
La parole est à Mme Martine Filleul, pour présenter l’amendement n° 1503.
Mme Martine Filleul. Cet amendement vise à ne pas fermer le régime spécial de retraite de la RATP. Les métiers de la RATP souffrent d’un véritable manque d’attractivité, et les Franciliens en ressentent les conséquences quotidiennement.
Il suffit de prendre les transports en commun pour se rendre compte de l’effet du manque de personnels sur les réseaux franciliens. L’année dernière, sur 1 500 postes de chauffeurs de bus qui manquaient, 700 postes seulement ont été pourvus. S’attaquer au régime spécial de la RATP, c’est rendre encore moins attractifs ces métiers et, par conséquent, aggraver les difficultés que le réseau connaît déjà.
En outre, le projet de suppression du régime spécial de la RATP est à contretemps et paradoxal. En effet, rendre attractifs les métiers de la RATP, c’est rendre attractifs les transports en commun pour les Franciliens.
Ce faisant, vous vous en prenez une fois de plus aux services publics de transports, alors même qu’ils sont la solution face au réchauffement climatique, dont les effets dévastateurs sont dès aujourd’hui palpables.
Alors que vous poussez pour la mise en place des zones à faibles émissions (ZFE), vous ne faites rien en parallèle pour développer significativement les transports en commun, dont les Français ont besoin au quotidien. Au contraire, vous les en dégoûtez et tombez dans le piège de l’écologie punitive.
Mes chers collègues, pour éviter un nivellement par le bas pour les employés de la RATP et assurer la sauvegarde des services publics, je vous invite à voter la suppression des alinéas 1 et 2 de l’article 1er.
M. le président. Les amendements nos 1542 et 1591 ne sont pas soutenus.
La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour présenter l’amendement n° 1621.
Mme Émilienne Poumirol. Je propose moi aussi la suppression des alinéas 1 et 2 de l’article 1er, qui ferment le régime général spécial de la RATP.
Ainsi que notre collègue Claude Raynal l’a rappelé, moins de 5 % des agents de la RATP sont concernés. Ils travaillent dans des conditions bien particulières et souvent difficiles, prises en compte par ce régime spécial de retraite.
Pour augmenter la productivité, la RATP a de plus en plus recours au travail de nuit. On voit que les conditions de travail se dégradent.
Les conducteurs de bus doivent également faire face à des conditions de circulation de plus en plus difficiles qui rendent la conduite de plus en plus stressante, sans parler des horaires atypiques ou encore des astreintes.
Ces conditions de travail dégradées ont des conséquences sur les plans physique et psychique pour les travailleurs de la RATP. Doit-on pour autant considérer ces derniers comme des privilégiés ? Il est indispensable de prendre en compte divers critères de pénibilité : c’est là que résident l’équité et la justice sociale.
L’équité suppose le renforcement des droits, et non leur réduction. Elle implique une meilleure qualité de vie au travail pour les métiers difficiles, y compris pour ceux qui bénéficient de régimes spéciaux.
La question de l’attractivité a été abordée par plusieurs de mes collègues ; je n’y reviens pas. J’observe simplement que la mesure va dégrader la qualité des services publics de transport en Île-de-France.
C’est pourquoi nous demandons la suppression de ces alinéas.
M. le président. Les amendements nos 1651 et 1663 ne sont pas soutenus.
La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour présenter l’amendement n° 1692.
M. Jean-Yves Leconte. Cet amendement tend lui aussi à supprimer les alinéas ayant pour objet la fin du régime spécial de la RATP.
Il est indéniable que les transports publics et, d’une manière générale, les mobilités connaissent actuellement des mutations technologiques, des révolutions d’habitudes, d’usages et de besoins probablement inédites depuis l’avènement du chemin de fer.
Toutefois, les conditions de travail, notamment les horaires et les astreintes, restent très exigeantes pour les agents du secteur, en particulier pour ceux de la RATP. La justice, l’efficacité, c’est-à-dire le besoin de personnels pour assurer ces services, et même la nécessité de veiller à la sécurité des usagers, qui n’est pas un petit sujet, imposent de prendre en compte la pénibilité.
La multiplication des acteurs – je pense notamment aux travailleurs des plateformes, qui sont aussi présents dans le secteur de la mobilité – pourrait appeler une réflexion globale sur la manière de prendre en compte la pénibilité, les contraintes et les risques inhérents à de tels métiers. Mais, aujourd’hui, il se trouve qu’un régime les prend déjà en considération : celui de la RATP. Il est donc souhaitable de le maintenir.
On montre du doigt de prétendus « privilégiés », alors même que leur régime est celui qui tient compte de leurs contraintes particulières. Selon nous, c’est là qu’est la logique. Voilà pourquoi nous défendons ce système.
M. le président. Les amendements nos 1747 et 1790 ne sont pas soutenus.
La parole est à M. Patrick Kanner, pour présenter l’amendement n° 1818.
M. Patrick Kanner. Je ne pensais pas qu’un jour, nous défendrions autant les intérêts de Jean Castex dans cet hémicycle… (Sourires sur les travées des groupes SER et CRCE.) Mais nous le faisons avec force et détermination !
Mes chers collègues, plusieurs orateurs ont décrit ce qu’était le régime spécial de la RATP, mais la pédagogie est l’art de la répétition.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Alors, on est dans le grand art !
M. Patrick Kanner. Au total, 40 000 collaborateurs de la RATP relèvent du statut, tandis que 5 500 ont un CDI de droit privé. Toutefois – vous le savez –, seules quelques catégories peuvent bénéficier d’un départ anticipé. Il s’agit des conducteurs, des agents des stations ou encore des agents de sûreté : autant de personnes exerçant des métiers que l’on peut réellement qualifier de pénibles.
En outre, la possibilité d’un départ anticipé à 52 ans n’est que très peu utilisée, et vous le savez pertinemment. La décote qui en résulte est si forte que les salariés de la RATP ne font valoir leurs droits que de manière très marginale.
Enfin, pour que les salariés de la RATP cessent d’être présentés, à tort, comme des nantis, je rappelle que pour bénéficier d’une retraite à taux plein, ils doivent cotiser aussi longtemps que les salariés relevant du régime général.
Vous l’aurez compris, nous demandons le maintien de ce régime spécial, que nous défendons tout simplement parce qu’il est juste.
M. le président. Les amendements nos 1846, 1991 et 2070 ne sont pas soutenus.
La parole est à Mme Frédérique Espagnac, pour présenter l’amendement n° 2258.
Mme Frédérique Espagnac. Cet amendement vise à empêcher la fermeture du régime spécial de retraite de la RATP.
Les horaires atypiques, la fréquence des astreintes ou encore l’usure affectent les conditions physiques et mentales des travailleurs. Il est indispensable de prendre en compte divers critères de pénibilité. Mes collègues l’ont déjà dit, c’est avant tout une mesure de justice sociale.
Nous estimons qu’au lieu de niveler les droits des salariés par le bas en supprimant les régimes spéciaux, il faut permettre à l’ensemble des salariés exposés à la pénibilité de partir plus tôt à la retraite.
Les transports franciliens – le métro, le RER et le bus – subissent tous des sous-effectifs de conducteurs, ce qui a largement dégradé les conditions de transport au cours des derniers mois pour les habitants de la région parisienne. Comment recruter quand on réduit encore l’attractivité des métiers ? (Applaudissements sur des travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 3193.
Mme Raymonde Poncet Monge. Chers collègues de la majorité sénatoriale, pour les travailleurs relevant des tableaux de pénibilité, les droits sont effectivement ouverts à 52 ans et 57 ans. En fait, ces âges de départ n’ont de réalité que dans vos discours. Pour autant, la possibilité de partir reste une liberté.
Puisque les salariés partent en moyenne plus tard, le report de l’âge légal ne serait pas gênant, arguent certains. C’est un mauvais raisonnement. La moyenne n’est pas tout. La CFE-CGC le dit bien : ce qui est perdu, c’est la liberté d’arbitrer avec sa pension. Et la liberté, ce n’est pas rien !
Si un certain nombre partent à 52 ans, l’âge moyen de départ est de 56 ans. En effet, il n’y a pas que l’âge, il y a aussi la décote, et 85 % des intéressés attendent la fin de la décote. Et ceux qui pourraient partir à 57 ans partent plutôt à 57 ans et demi.
Lors des débats de ce matin, j’ai entendu certains affirmer que les salariés concernés étaient vraiment favorisés, puisque leur retraite est calculée sur la base des six derniers mois de travail. Mais encore faut-il préciser que leur taux de remplacement est de 65 %, et non de 75 % ; c’est également le cas pour les fonctionnaires. On ne peut pas présenter une telle disposition comme un privilège.
D’ailleurs, ces salariés sont de plus en plus nombreux – le chiffre a été multiplié par trois l’année dernière – à opter pour le cumul emploi-retraite, c’est-à-dire à continuer de travailler après leur départ à la retraite.
M. le président. La parole est à M. Pierre Laurent, pour présenter l’amendement n° 3885 rectifié.
M. Pierre Laurent. Dans la situation actuelle de la RATP, la suppression de ce régime spécial serait proprement irresponsable.
Le mouvement « Stop galère » réunit des dizaines de milliers d’usagers, sur l’initiative des élus de gauche de la région d’Île-de-France, qui tirent la sonnette d’alarme.
La situation est très préoccupante, et elle ne sera pas simple à régler, car elle recouvre, entre autres, une très forte crise de recrutement. (Mme Cathy Apourceau-Poly acquiesce.) Je ne citerai que quelques chiffres : 26 % des bus ne circulaient plus à Paris à la fin de l’année 2022, faute de conducteurs. On constate les mêmes difficultés sur les RER. Au total, la RATP a connu 1 000 démissions, et l’absentéisme s’accroît : tout cela à cause de la dégradation des conditions de travail.
Ceux qui soutiennent la suppression de ce régime nous assurent que celle-ci n’aura aucune conséquence, alors qu’il est bien évident qu’elle en aura. Comment allons-nous résoudre la très grave crise de recrutement ? Prenez au moins la peine de répondre à cette question.
La privatisation vers laquelle s’obstine Valérie Pécresse achèvera de semer le chaos. Il semble d’ailleurs que Jean Castex n’y soit pas très favorable et que ses réserves soient partagées dans les couloirs ministériels. Cette privatisation conduira potentiellement 18 000 salariés à changer d’entreprise. Le chaos dans les transports franciliens ? Il est devant nous !
Dans ce contexte, la mesure que vous proposez aura inévitablement des conséquences catastrophiques. Expliquez-nous réellement quelles mesures vous allez prendre pour résoudre les problèmes de recrutement que connaît la RATP.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Très bien !
M. le président. L’amendement n° 2715 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer les mots :
avant le 1er septembre 2023
les mots :
jusqu’à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales qui ne peut être ultérieure au 1er janvier 2050
La parole est à Mme Monique Lubin.
Mme Monique Lubin. Nous abordons une série d’amendements de repli. Je reconnais qu’en l’occurrence, nous sommes un peu joueurs. (Exclamations ironiques sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. Claude Kern. Gamins !
Mme Monique Lubin. Non, pas gamins ; joueurs ! Au moins, nous mettons un peu d’ambiance. Sinon, nos débats seraient tellement tristes ! (Exclamations sur les travées des groupes Les Républicains et UC.) Vous voyez ? Cela vous fait réagir. C’est bien la preuve que ça marche !
Nous proposons de modifier les dates d’entrée en vigueur du dispositif envisagé. Comme vous l’avez compris, nous sommes résolument opposés la clôture de ces régimes spéciaux. Au cas où nous ne serions pas encore parvenus à vous convaincre, nous allons continuer à vous apporter des arguments, peut-être pas nouveaux – j’en conviens –, pour montrer en quoi il s’agit à nos yeux d’une rupture du pacte social.
À tout le moins, il faut repousser la date de suppression du régime pour augmenter les chances de mener à bien une discussion et, surtout, protéger les salariés. Comme je l’ai indiqué, ces derniers ont signé un contrat. Ce contrat doit, selon nous, être respecté.
M. le président. L’amendement n° 3018 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer les mots :
avant le 1er septembre 2023
par les mots :
jusqu’à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales qui ne peut être ultérieure au 1er janvier 2049
La parole est à Mme Émilienne Poumirol.
Mme Émilienne Poumirol. Nous sommes effectivement opposés à la fermeture des régimes spéciaux, en particulier celui de la RATP. Dès lors, nous considérons que la rupture du contrat passé entre la RATP et ses agents doit repoussée le plus tard possible.
Nous proposons que la date soit déterminée par décret en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales et qu’elle ne puisse pas être ultérieure au 1er janvier 2049.
M. le président. L’amendement n° 3019 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer les mots :
avant le 1er septembre 2023
par les mots :
jusqu’à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales qui ne peut être ultérieure au 1er janvier 2048
La parole est à M. Jean-Luc Fichet.
M. Jean-Luc Fichet. Pour contribuer à égayer l’ambiance générale, je reprends nos arguments.
Pour les salariés de la RATP, il est très difficile d’entendre que le couperet est censé tomber le 1er septembre 2023. C’est rapide, brutal et inacceptable.
Aussi, par cet amendement, nous proposons de reporter l’entrée en vigueur de la fermeture du régime spécial de retraite de la RATP à une date déterminée par un décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales, au plus tard au 1er janvier 2048. (Marques d’impatience sur des travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. Jean-François Husson. Et maintenant, vous allez proposer 2047 ?
M. le président. L’amendement n° 3020 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer les mots :
avant le 1er septembre 2023
par les mots :
jusqu’à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales qui ne peut être ultérieure au 1er janvier 2047
La parole est à Mme Viviane Artigalas.
Mme Viviane Artigalas. Il s’agit d’un autre amendement de repli. Vous comprendrez que nous utilisions tous les moyens à notre disposition pour essayer de nous faire entendre. (Protestations sur les travées des groupes RDPI, UC et Les Républicains.)
Mme Frédérique Puissat. On l’avait compris ! (Rires sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Xavier Iacovelli. Vous refusez de voter ! Assumez l’obstruction !
Mme Cathy Apourceau-Poly. C’est vous, l’obstruction, avec votre gouvernement !
Mme Viviane Artigalas. Mes chers collègues, à l’instar de la rue, nous vous disons depuis un bon moment déjà que nous sommes contre cette réforme des retraites.
La suppression du régime de retraite de la RATP est une véritable rupture du pacte social, à plus forte raison si elle entre en vigueur dès cette année 2023. Elle concernera des personnes ayant également choisi leur profession pour les quelques avantages correspondants, qui compensent un peu les nombreuses difficultés de leur travail ; nous les connaissons tous. Prenant parfois les transports franciliens, je vois combien ces métiers peuvent être pénibles, particulièrement en banlieue.
Cet amendement de repli est comparable par son objet à ceux que mes collègues viennent de présenter. Mais cela me permet d’insister, la pédagogie étant effectivement l’art de la répétition.
Je propose que la suppression soit reportée, au plus tard, au 1er janvier 2047.
M. le président. L’amendement n° 3021 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer les mots :
avant le 1er septembre 2023
par les mots :
jusqu’à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales qui ne peut être ultérieure au 1er janvier 2046
La parole est à M. Yan Chantrel.
M. Yan Chantrel. Nos débats le confirment, cette réforme des retraites est à la fois injuste et brutale. L’article 1er, dont nous parlons depuis ce matin, n’en est qu’une illustration parmi d’autres.
La suppression des régimes spéciaux témoigne parfaitement du manque d’empathie dont font preuve non seulement ce gouvernement, mais aussi la majorité sénatoriale, qui le soutient.
Pour les chauffeurs de bus intra-urbains, la pénibilité au travail est bien réelle. J’en veux pour preuve les troubles musculo-squelettiques que ces professionnels sont susceptibles de développer. Ce métier fait particulièrement mal au dos. Je vous invite à l’essayer ne serait-ce qu’une journée : vous verrez ! C’est le résultat d’une combinaison de facteurs, d’ailleurs bien détaillés, de risques biomécaniques causés par les vibrations et de facteurs de risque aigus liés au port de charges.
Comme par hasard, ce sont là deux des quatre risques que vous avez supprimés du compte professionnel de prévention, mécanisme que nous avions introduit par nos précédentes réformes.
Avec l’article 1er, le Gouvernement pousse encore plus loin la brutalité de 2017. Demain, les nouveaux travailleurs des régimes spéciaux relèveront mécaniquement du droit commun, c’est-à-dire du régime général, qui ne compense la pénibilité que de manière très insuffisante ; c’est le moins que l’on puisse dire.
Les chauffeurs de métro, les mineurs, qui ne voient que rarement la lumière du jour, les chauffeurs de bus parisiens qui se lèvent tôt parce qu’ils habitent en banlieue ; tous ces travailleurs qui subissent la dureté de leur métier ne pourront plus bénéficier du régime spécial qui les protégeait jusque-là, en leur permettant de partir à la retraite avant que leur corps ne soit complètement usé.
Rappel au règlement
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Mon rappel au règlement se fonde sur le sixième alinéa de l’article 44 de notre règlement. Il s’agit plus précisément d’une demande de priorité, afin de modifier l’ordre de discussion des articles ou des amendements du texte.
Ma demande de priorité porte sur l’amendement n° 2057 rectifié bis, présenté par M. Retailleau. Cet amendement tend à mettre en œuvre dès 2023 la suppression des régimes spéciaux : c’est exactement le sujet dont nous sommes en train de débattre. Or, par une mécanique légistique qui m’est totalement étrangère – mais je salue la direction de la séance et le groupe Les Républicains d’avoir pu l’imaginer –, cet amendement est censé n’être examiné qu’après l’article 7, rendant notre discussion quelque peu exotique.
Puisque nous parlons de la suppression des régimes spéciaux, il faut examiner maintenant l’amendement visant à la mettre en œuvre dès 2023.
M. Roger Karoutchi. Ce n’est pas possible !
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Certes, je ne représente ni la commission, ni la présidence, ni le Gouvernement.
M. Roger Karoutchi. Voilà !
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Mais je peux tout de même demander que le Sénat se prononce sur ce point. (Applaudissements sur des travées du groupe SER.)
M. le président. Ma chère collègue, l’amendement que vous évoquez ne peut, me semble-t-il, être mis en discussion que lors de l’examen de la deuxième partie du texte.
Pouvez-vous nous le confirmer, madame la rapporteure générale ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. En effet, monsieur le président. Ainsi que nous l’avons déjà indiqué ce matin, l’amendement en question relève de la deuxième partie du texte.
M. le président. L’amendement n° 3022 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer les mots :
avant le 1er septembre 2023
par les mots :
jusqu’à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales qui ne peut être ultérieure au 1er janvier 2045
La parole est à M. Olivier Jacquin.
M. Olivier Jacquin. Ainsi que M. Savoldelli l’a rappelé ce matin, la suppression du régime spécial de la RATP est la conséquence directe de la loi d’orientation des mobilités, qui a permis l’ouverture des transports parisiens à la concurrence ; j’observe d’ailleurs que, sur ce sujet, nos collègues de la majorité étaient alors bien plus bavards.
Cet amendement du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain vise à repousser l’entrée en vigueur de la fermeture du régime spécial de retraite de la RATP à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales, au plus tard au 1er janvier 2045.
M. le président. L’amendement n° 3023 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer les mots :
avant le 1er septembre 2023
par les mots :
jusqu’à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales qui ne peut être ultérieure au 1er janvier 2044
La parole est à Mme Frédérique Espagnac.
Mme Frédérique Espagnac. Cet amendement vise à repousser la date d’entrée en vigueur de la fermeture du régime spécial de retraite de la RATP à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales, au plus tard au 1er janvier 2024. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. Ma chère collègue, je doute qu’il s’agisse de 2024.
Mme Frédérique Espagnac. Vous avez raison, monsieur le président ; je vous prie de m’excuser. Il s’agit évidemment de 2044 ! (Mêmes mouvements.)
M. le président. Vous voyez que je veille ! (Sourires.)
L’amendement n° 3024 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer les mots :
avant le 1er septembre 2023
par les mots :
jusqu’à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales qui ne peut être ultérieure au 1er janvier 2043
La parole est à M. Patrice Joly.
M. Patrice Joly. Je n’évoquerai pas le caractère injuste et brutal de la suppression de ce régime spécial : je privilégierai une approche très pragmatique.
Comme chacun sait, au regard des enjeux liés à la nécessité de décarboner notre société, le développement des transports publics est indispensable. Il s’agit de réduire l’utilisation de la voiture individuelle.
Or, du fait de leurs caractéristiques, les métiers du secteur des transports publics en Île-de-France nécessitent un régime de protection particulier prenant en compte leurs contraintes propres.
Compte tenu des difficultés de recrutement constatées aujourd’hui, il est urgent de repousser le plus possible la suppression de ce régime, dont certaines dispositions favorisent l’attractivité des métiers des transports publics en Île-de-France.
C’est la raison pour laquelle cet amendement vise à reporter la mesure au plus tard au 1er janvier 2043, au terme de concertations, qui paraissent nécessaires et légitimes, avec les organisations syndicales et patronales.
M. le président. L’amendement n° 3025 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer les mots :
avant le 1er septembre 2023
par les mots :
jusqu’à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales qui ne peut être ultérieure au 1er janvier 2042
La parole est à Mme Angèle Préville.
Mme Angèle Préville. Cet amendement de repli vise à repousser l’entrée en vigueur de la fermeture du régime spécial de retraite de la RATP à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales – j’insiste sur ce point –, au plus tard au 1er janvier 2042.
Oui, les syndicats ont leur mot à dire, car ils sont au plus près de la réalité sociale. Il serait judicieux et particulièrement vertueux de les écouter, qui plus est dans le contexte actuel.
Les syndicats connaissent les nouvelles réalités du travail. La loi générale se heurte aux singularités croissantes des métiers et des carrières. Le monde du travail devenant de plus en plus complexe, il est important d’écouter les organisations syndicales.
M. le président. L’amendement n° 3026 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer les mots :
avant le 1er septembre 2023
par les mots :
jusqu’à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales qui ne peut être ultérieure au 1er janvier 2041
La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy.
M. Christian Redon-Sarrazy. Vous l’avez compris, les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain sont fermement opposés à cet article. Je ne reviendrai pas sur les motifs, répétés à de nombreuses reprises par mes collègues, qui en justifient la suppression. D’ailleurs, si j’en crois certains hochements de tête, ces arguments sont partagés par un certain nombre d’entre nous, y compris à la droite de cet hémicycle.
À mon sens, ce qui importe avant tout, c’est de prendre en compte l’avis des organisations syndicales et patronales. Leur consultation a fait cruellement défaut au cours des précédents échanges. L’élaboration de ce texte en témoigne.
Avec cet amendement, nous proposons de commencer par écouter les organisations syndicales et patronales ; la fermeture du régime spécial serait mise en œuvre par décret en Conseil d’État, au plus tard le 1er janvier 2041.
M. le président. L’amendement n° 3027 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer les mots :
avant le 1er septembre 2023
par les mots :
jusqu’à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales qui ne peut être ultérieure au 1er janvier 2040
La parole est à Mme Isabelle Briquet.
Mme Isabelle Briquet. La suppression du régime spécial de la RATP est lourde de conséquences, ne serait-ce que pour l’attractivité d’un secteur déjà en tension. Le manque de personnel met à mal ce service essentiel pour les usagers.
Aussi, cet amendement du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain vise, lui aussi, à repousser l’entrée en vigueur de la fermeture du régime spécial de retraite de la RATP à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État, toujours après concertation des organisations syndicales et patronales, au plus tard au 1er janvier 2040.
M. le président. L’amendement n° 3028 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer les mots :
avant le 1er septembre 2023
par les mots :
jusqu’à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales qui ne peut être ultérieure au 1er janvier 2039
La parole est à M. Jean-Yves Leconte.
M. Jean-Yves Leconte. Par ce nouvel amendement de repli, nous proposons la date limite du 1er janvier 2039.
J’insiste sur le fait que la mobilité dans les villes, en particulier à Paris, concerne de plus en plus d’acteurs. En conséquence, une réforme, quelle qu’elle soit, mérite une concertation entre les organisations syndicales et patronales, afin que les critères de pénibilité puissent être pris en compte pour l’ensemble des travailleurs du secteur. Aujourd’hui, tel n’est pas le cas.
Mais il est inique de supprimer le régime qui assure aux agents de la RATP la prise en compte de cette pénibilité.
M. le président. L’amendement n° 3029 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer les mots :
avant le 1er septembre 2023
par les mots :
jusqu’à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales qui ne peut être ultérieure au 1er janvier 2038
La parole est à Mme Victoire Jasmin.
Mme Victoire Jasmin. Cet amendement de repli du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain vise à repousser l’entrée en vigueur de la fermeture du régime spécial de retraite de la RATP à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après une réelle concertation et implication des organisations syndicales et patronales, au plus tard au 1er janvier 2038.
Ce faisant, l’on pourra agir en faveur des métiers concernés, renforcer leur attractivité et développer le transport collectif.
M. le président. L’amendement n° 3030 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer les mots :
avant le 1er septembre 2023
par les mots :
jusqu’à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales qui ne peut être ultérieure au 1er janvier 2037
La parole est à M. Franck Montaugé.
M. Franck Montaugé. Avec ces amendements, nous nous plaçons dans l’hypothèse, que nous ne souhaitons pas, d’un vote positif sur le texte.
Ainsi, nous prenons acte de l’incapacité du Gouvernement à discuter sereinement avec les organisations syndicales de la RATP pour aboutir à une date plausible de sortie du régime spécial de retraite.
À ce titre, il nous paraît sage de passer par un décret en Conseil d’État, après discussion avec les organisations syndicales et patronales, au plus tard au 1er janvier 2037.
M. le président. L’amendement n° 3031 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer les mots :
avant le 1er septembre 2023
par les mots :
jusqu’à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales qui ne peut être ultérieure au 1er janvier 2036
La parole est à Mme Corinne Féret.
Mme Corinne Féret. Cet amendement de repli vise à reporter la suppression du régime spécial de retraite de la RATP au plus tard au 1er janvier 2036, au terme évidemment d’une concertation – j’insiste sur l’importance d’une concertation – avec les organisations syndicales et patronales.
On cherche à supprimer un certain nombre de régimes spéciaux sans tenir compte des difficultés que certains secteurs rencontrent d’ores et déjà. Je pense tout particulièrement à la RATP.
On peut se demander pourquoi le Gouvernement veut supprimer ces régimes spéciaux. Combien de personnes seraient concernées ? Sont-elles vraiment trop avantagées ? Nous en avons parlé longuement ce matin. Mais ces grands points d’interrogation demeurent.
Au regard des importants événements qui nous attendent dans les prochains mois, les besoins de la RATP sont grands, notamment en matière d’attractivité. En effet, ainsi que l’a déjà rappelé mon collègue, les jeux Olympiques de 2024 impliquent de faire appel à de nombreux recrutements, ce qui soulève déjà des difficultés.
Remettre en cause un aspect particulier d’un tel contrat de travail ne peut bien évidemment pas aller dans le bon sens !
M. le président. L’amendement n° 3032 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer les mots :
avant le 1er septembre 2023
par les mots :
jusqu’à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales qui ne peut être ultérieure au 1er janvier 2035
La parole est à Mme Annie Le Houerou.
Mme Annie Le Houerou. Cet amendement de repli tend à proposer que la date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales soit au plus tard le 1er janvier 2035.
Une telle concertation est nécessaire et garante de la cohésion sociale, qui, comme vous le savez, est ébranlée.
Si l’on regarde de près les conséquences de l’application de cet article, on constate que vous n’êtes pas prêts !
Les agents des organismes concernés par la fermeture des régimes spéciaux seront désormais affiliés au régime de droit commun pour l’assurance vieillesse. Ils demeureront couverts pour les autres risques de sécurité sociale, tels que la maladie, la maternité, les accidents du travail, les maladies professionnelles, le décès ou l’invalidité, dans le cas des agents de la RATP, notamment.
En conséquence, pour la retraite complémentaire, les salariés nouvellement embauchés dans les secteurs et les organismes concernés seront affiliés à l’Agirc-Arrco, organisme géré de façon paritaire par les organisations patronales et salariales, qui y tiennent !
Une telle mesure – cela figure dans l’exposé des motifs – nécessitera à terme une révision du circuit du financement des régimes. Il faudra conduire des travaux pour en évaluer les conséquences.
N’est-il donc pas prématuré de proposer la fermeture des régimes spéciaux, en l’espèce de celui de la RATP, dès ce PLFRSS pour 2023, alors que vous ne connaissez pas encore toutes les incidences financières qui en découlent ?
Le vote de tels alinéas est inutile à ce stade. Ne serait-il pas plus sage de reporter cette disposition, afin de ne pas mettre la charrue avant les bœufs ?
M. le président. Il faut conclure.
Mme Annie Le Houerou. Car il se pourrait que les bœufs soient renversés par la charrue le 7 mars prochain ! (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. L’amendement n° 3033 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer les mots :
avant le 1er septembre 2023
par les mots :
jusqu’à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales qui ne peut être ultérieure au 1er janvier 2034
La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. À ce stade de la discussion, chacun a, me semble-t-il, compris que nous sommes contre la suppression des régimes spéciaux,… (Marques d’ironie sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Ah bon ?
M. Roger Karoutchi. Ce n’était pas clair !
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. … que le gouvernement est pour cette suppression et que certains collègues LR – pas tous ! – souhaitent qu’elle soit immédiate.
Ainsi, nous faisons un geste d’ouverture, nous cherchons un compromis (Exclamations ironiques sur des travées des groupes UC et Les Républicains.), en proposant toute cette série de dates qui visent à instaurer, en lieu et place de la clause du grand-père, la clause de l’arrière-grand-père. (Mêmes mouvements.) Dans mon cas personnel, ce serait en 2034.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Là, c’est la clause de l’arrière-arrière-grand-père !
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. En tout état de cause, comme j’ai compris que, dans cette assemblée, il fallait trouver une majorité, et comme je ne suis pas totalement certaine que M. Retailleau y parvienne, nous pourrions en chercher le chemin ensemble. (Marques d’amusement sur des travées du groupe Les Républicains.)
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Oh ! C’est gentil…
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Peut-être ce chemin se trouve-t-il dans l’un des amendements qui viennent d’être présentés et qui visent à retarder davantage la mise en œuvre de cette réforme. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. L’amendement n° 3034 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer les mots :
avant le 1er septembre 2023
par les mots :
jusqu’à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales qui ne peut être ultérieure au 1er janvier 2033
La parole est à M. Didier Marie.
M. Didier Marie. Par cette série d’amendements, et c’est particulièrement vrai de celui que j’ai l’honneur de vous présenter, nous cherchons à prémunir les agents de la RATP qui sont actuellement en activité, donc susceptibles de bénéficier dans les années à venir d’un départ anticipé – leur régime leur permet aujourd’hui de le faire –, de l’éventuelle adoption d’un amendement de M. Retailleau, l’amendement n° 2057 rectifié bis, qui a pour objet d’insérer un article additionnel après l’article 7 pour appliquer la réforme dès 2023, c’est-à-dire cette année, en revenant sur la clause du grand-père.
Nous avons expliqué qu’il ne fallait pas remettre en cause ce régime protecteur, en raison des éléments de pénibilité que nous avons détaillés. Personne ici ne semble d’ailleurs les contester, puisque je n’ai entendu aucun de mes collègues dire que les métiers de la RATP n’étaient pas, pour une bonne part d’entre eux, pénibles. Malheureusement, vous ne semblez pas nous entendre…
Aussi, nous vous proposons une forme de compromis pour garantir aux salariés actuels qu’ils pourront bien bénéficier d’un départ à la retraite anticipée s’ils le souhaitent.
Nous faisons également un geste en direction de M. Castex, pour qu’il puisse satisfaire ses ambitions et recruter les 2 500 agents dont il aura besoin dans les années à venir.
Si vous supprimez dès 2023, par l’amendement de M. Retailleau, la possibilité de bénéficier de ce régime, alors – cela va de soi – bon nombre de ceux qui pourraient être intéressés par l’idée de rejoindre la RATP dans les dix prochaines années lui tourneront le dos et iront travailler ailleurs.
C’est la raison pour laquelle je propose, par mon amendement, la date de 2033 : pile dans dix ans ! (Applaudissements sur des travées du groupe SER.)
M. le président. L’amendement n° 3035 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer les mots :
avant le 1er septembre 2023
par les mots :
jusqu’à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales qui ne peut être ultérieure au 1er janvier 2032
La parole est à M. Jean-Michel Houllegatte.
M. Jean-Michel Houllegatte. Vous l’avez compris, nous ne sommes pas favorables à la fermeture du régime spécial de la RATP.
Néanmoins, dans l’hypothèse où elle devrait intervenir, il faut laisser place à la négociation pour accorder à ceux qui seraient concernés des compensations et pour renforcer l’attractivité des métiers.
Je vous ferai remarquer que lors de l’exercice similaire pour la SNCF, il y a eu place à la négociation et à des contreparties.
Il est une question que l’on peut et que l’on doit se poser, dans l’hypothèse où nous ouvririons la porte à une telle négociation : est-ce que la RATP a les moyens d’octroyer à ses futurs salariés les compensations indispensables qui permettront, d’une certaine façon, de garantir l’attractivité des métiers ?
En réalité, la RATP n’a plus les moyens de procéder à de telles compensations. Son chiffre d’affaires consolidé s’est élevé en 2021 à 5,8 milliards d’euros et le montant de sa dette à presque 5,7 milliards d’euros. La RATP doit mettre en place un plan d’investissements d’un montant de plus de 2 milliards d’euros. Pour l’exercice 2022, son résultat opérationnel s’élève à quelque 193 millions d’euros, et son résultat net est négatif, quelque 26 millions d’euros, contre 207 millions d’euros en 2021.
Cela veut dire que la situation financière de la RATP demeure fragile ; ses marges de manœuvre sont extrêmement limitées. Il est donc nécessaire de donner du temps à la RATP pour lui permettre, et nous lui faisons confiance, de redresser sa situation financière, en dégageant des marges,…
M. le président. Il faut conclure.
M. Jean-Michel Houllegatte. … qui permettront d’octroyer des compensations.
M. le président. L’amendement n° 3036 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer les mots :
avant le 1er septembre 2023
par les mots :
jusqu’à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales qui ne peut être ultérieure au 1er janvier 2031
La parole est à Mme Martine Filleul.
Mme Martine Filleul. Comme mes collègues, je présente un amendement qui vise à repousser la date d’entrée en vigueur de la fermeture du régime spécial de la retraite de la RATP à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État, après concertation des organisations syndicales et patronales au plus tard le 1er janvier 2031.
Tout d’abord, le moment est particulièrement malvenu au regard des difficultés de recrutement, que nous avons largement abordées aujourd’hui. La RATP ne fait pas envie, ses métiers ne sont pas attractifs, alors qu’elle sera confrontée à des échéances particulièrement importantes, que nous devons tous ensemble réussir ; je pense par exemple aux jeux Olympiques.
Ensuite, le moment est malvenu, parce que nous sommes au pied du mur. Le réchauffement climatique nous impose de développer rapidement les transports en commun. Or, pour cela, il faut compter sur des salariés qui ont envie de relever, avec succès, ce défi.
Enfin, ainsi que l’a dit mon collègue, il faut que nous nous donnions le temps de la concertation. Plutôt que de bloquer la France,…
M. Xavier Iacovelli. C’est vous qui la bloquez !
Mme Martine Filleul. … il faut que la concertation réussisse à convaincre les premiers concernés et que nous puissions obtenir leur adhésion.
M. le président. L’amendement n° 3037 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer les mots :
avant le 1er septembre 2023
par les mots :
jusqu’à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales qui ne peut être ultérieure au 1er janvier 2030
La parole est à M. Vincent Éblé.
M. Vincent Éblé. Je me suis légèrement déplacé dans l’hémicycle de façon à être plus proche du micro, afin de nous faire gagner de précieuses minutes ; nous en avons bien besoin pour aller au bout de ce débat. (Rires sur les travées du groupe SER.)
La place où je me trouve est celle de notre illustre prédécesseur le sénateur Victor Hugo. Je ne doute pas qu’en raison de sa condition francilienne et même parisienne, ainsi que de son attachement au monde du travail, il eût apprécié, voire soutenu le présent amendement. (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées du groupe CRCE. – Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Ce n’est pas bien de faire parler les morts !
M. Vincent Éblé. Il s’agit de modifier la date de la fermeture du régime spécial de retraite de la RATP, que le sénateur Retailleau propose de fixer au mois de septembre 2023.
C’est infiniment trop rapide et abrupt, voire violent, si l’on se place du point de vue de la nécessité de négocier avec les organisations syndicales et patronales, en l’occurrence le patron Castex. Il faut un décret en Conseil d’État.
Pour ma part, je proposerai une date qui me paraît bien plus raisonnable et qui permet de conduire cette discussion ; celle du 1er janvier 2030. Cela ne me semble pas trop rapide et laisse le temps d’approfondir les conditions qui permettraient de conduire cette fermeture du régime spécial de retraites, fermeture que par ailleurs nous ne souhaitons pas, mais qui pourrait éventuellement être adoptée par notre assemblée.
Il s’agit, vous l’avez compris, d’un amendement de repli.
M. le président. L’amendement n° 3043 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer les mots :
avant le 1er septembre 2023
par les mots :
jusqu’à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales qui ne peut être ultérieure au 1er janvier 2029
La parole est à M. Patrick Kanner.
M. Patrick Kanner. Monsieur le président, je salue votre calme olympien, qui nous permet de travailler dans de bonnes conditions, et j’en suis très heureux. (Oh ! sur les travées des groupes UC et Les Républicains.).
M. Jean-Michel Arnaud. On ne travaille pas !
M. Xavier Iacovelli. On voit qu’il ne travaille pas souvent !
M. Patrick Kanner. Ce débat, c’est du travail pour nous ; vous l’aurez compris !
En 2015, Mme Élisabeth Borne a été nommée à la tête de la RATP. J’ai regardé s’il y avait eu une réflexion sur le régime spécial de la RATP. Je n’ai rien trouvé. Je ne sonderai ni les reins ni le cœur de Mme Élisabeth Borne (Exclamations sur les travées des groupes UC et Les Républicains.), mais il y a fort à penser que lorsque l’on est patron de la RATP, un tel régime spécial n’est pas si catastrophique que cela pour les agents !
Je propose qu’après concertation avec les organisations syndicales et patronales, nous reportions au plus tard au 1er janvier 2029 l’application de la disposition prévue par le texte que nous sommes en train d’examiner.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 3045 rectifié est présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 3913 rectifié est présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 2
Remplacer les mots :
avant le 1er septembre 2023
par les mots :
avant une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales qui ne peut être ultérieure au 1er janvier 2028
La parole est à M. David Assouline, pour présenter l’amendement n° 3045 rectifié.
M. David Assouline. Nous avons essayé dans un premier temps de vous montrer que cette réforme et ce débat sont hors-sol.
Ce débat est hors-sol, car il n’y avait aucune urgence à le nicher dans une loi de financement de la sécurité sociale alors que le sujet est ample et nécessite d’examiner davantage de paramètres, relatifs notamment au travail, aux nouvelles technologies et aux projections à dix ans, vingt ans ou trente ans.
Il est d’autant plus hors-sol qu’il arrive au moment où l’inflation est terrible, où les gens ont de plus en plus de mal à vivre, où les salaires stagnent et ne sont pas à la hauteur, où les classes moyennes, qui se paupérisent, s’ajoutent à celles qui sont déjà pauvres, et où il y a une forte tension. Et l’on vient nous dire, alors même que certains font des milliards d’euros de bénéfice à la faveur de la crise, qu’il faut absolument faire payer de deux ans de leur vie les plus démunis du pays !
En plus d’être hors-sol, il est aussi hors temps ! Supprimer le régime spécial de la RATP, c’est porter une accusation contre un secteur qui souffre particulièrement ; je pense non seulement aux travailleurs, mais également aux usagers.
Actuellement, l’ensemble des transports d’Île-de-France, la RATP comprise, est en voie d’effondrement, à cause de la gestion désastreuse du gouvernement et de Valérie Pécresse (Protestations sur des travées du groupe Les Républicains.),
Mme Frédérique Puissat. Défendez votre amendement !
M. David Assouline. … c’est-à-dire la droite unie, comme dans cet hémicycle ! (Mêmes mouvements. – Brouhaha.)
Au moment où l’on ne sait pas si le service va pouvoir continuer pour les Franciliens, à la veille des jeux Olympiques, on vient nous dire qu’un tel statut serait un privilège. Mais si c’était le cas, pourquoi la RATP n’arrive-t-elle pas à recruter des agents ? Ils devraient tous se ruer sur ce statut privilégié !
Pour cette raison, il ne faut absolument pas adopter cette mesure (Marques d’impatience sur des travées du groupe Les Républicains. – Brouhaha.),…
M. le président. Il faut conclure.
M. David Assouline. … parce qu’elle est hors temps.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour présenter l’amendement n° 3913 rectifié.
Mme Laurence Cohen. C’est aussi un amendement de repli.
À mon sens, nos argumentations, qui sont vraiment diverses et variées sur ce même sujet peuvent, parce qu’elles sont pédagogiques (Murmures sur des travées du groupe Les Républicains.), convaincre un certain nombre de nos collègues siégeant sur les travées de droite. C’est en tout cas mon but à ce moment de notre réflexion.
Dans un contexte où Île-de-France Mobilités rencontre des difficultés majeures, il est juste de préserver l’attractivité de tels métiers et de prendre du recul quant à l’ouverture prochaine de la mise en concurrence prévue pour les bus en 2025, pour les tramways en 2029 et pour les RER en 2039. Cette ouverture à la concurrence aura des conséquences aussi bien sur la qualité que sur la fiabilité du régime.
Il nous paraît donc indispensable de préserver le régime spécial de la RATP, d’où nos amendements de suppression. Mais comme vous les avez refusés, nous vous présentons cet amendement de repli.
Vous savez pertinemment que, malgré des campagnes de recrutement régulières, la RATP peine à attirer des salariés. Rien d’étonnant ! L’abandon progressif du statut a un effet négatif sur l’attractivité de l’entreprise, où 75 % du personnel travaille avec des horaires atypiques et décalés. L’allocation complémentaire de déplacement est en décalage au regard de leurs frais de transport, et ils sont confrontés à l’abandon progressif des compensations. Dans la maintenance, la précarisation est aussi de mise à la RATP.
Aussi, supprimer ce régime spécial ne fera que dégrader les conditions de travail, donc les conditions de transport de millions de voyageurs en Île-de-France.
Votre mesure va entraîner une dégradation brutale des droits des nouveaux entrants. Alors même que vous vous vantez d’un dialogue social au sein des branches, la réalité est que vous passez outre les discussions qui ont permis l’obtention de ce droit grâce à des négociations de branches justement, et vous balayez d’un revers de la main un régime qui a pour vertu de prendre en compte la pénibilité spécifique de cette filière.
Tel est le sens de notre amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur l’ensemble des amendements ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. La commission émet un avis défavorable sur l’ensemble des amendements de suppression, puisqu’ils sont contraires aux dispositions que nous avons adoptées.
Les amendements visant à repousser la date de la fermeture – c’est la clause non plus du grand-père, mais de l’arrière-grand-père, et l’on pourrait aussi bien dire de l’arrière-grand-mère –…
M. Roger Karoutchi. Exactement.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. … ont également reçu un avis défavorable.
Il a beaucoup été dit que l’on parlait de « privilèges ». Pour ma part, je n’ai jamais parlé de privilèges. Je pense qu’un tel régime était nécessaire au moment où il a été mis en place.
Vous évoquez un pacte social et la justice sociale. Comme je l’ai indiqué, tous les Français qui ne sont pas affiliés à un régime spécial exercent une forme de solidarité nationale vis-à-vis des bénéficiaires de tels régimes.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Et le régime des sénateurs ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Selon moi, ce n’est ni juste ni équitable.
Les efforts des Français ne sont évidemment pas à géométrie variable. C’est un point qu’il faut regarder avec attention.
Par ailleurs, l’environnement de ces métiers a évidemment changé. Certains sont encore pénibles ; d’autres le sont devenus à cause de nouveaux phénomènes. Mais nombre de progrès techniques ont été réalisés, des moyens modernes ont été mis en place pour que ces métiers s’exercent de façon beaucoup plus sereine pour certains ; je ne dis pas que c’est le cas pour tous les métiers ! Il est important de tenir compte de ces progrès techniques.
Les critères de pénibilité seront pris en compte dans le compte professionnel de la prévention. C’est là aussi un progrès qu’il faut noter.
Par ailleurs, le dialogue social, tout comme les discussions par branches, par métiers et par entreprises, se tiendront. C’est indiqué dans le projet de loi.
Vous avez beaucoup abordé les difficultés de recrutement. Aujourd’hui, il existe un régime spécial pour les agents RATP, et il y a des difficultés de recrutement. Or on rencontre aussi de telles difficultés ailleurs, là où il n’existe pas de régime spécial.
Je pense qu’il y a besoin de réenchanter un certain nombre de métiers…
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. « Réenchanter » ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. … et de faire des campagnes d’attractivité.
Quoi qu’il en soit, la commission émet un avis défavorable sur l’ensemble de ces amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion. Les amendements de suppression ont été défendus avec les mêmes arguments que ceux que nous avons pu entendre lors de la discussion générale sur l’article. Je serai donc bref. Le Gouvernement est défavorable aux différents amendements en discussion.
Je voudrais simplement souligner trois points et faire une remarque.
Premier point, Mme la sénatrice Poncet Monge a indiqué que les départs à l’âge minimum d’ouverture des droits des agents de la RATP étaient peu nombreux et que le fait de ne pas avoir atteint leur durée de cotisation au moment de l’ouverture des droits invitait les salariés concernés à continuer de travailler pour atteindre l’âge de suppression de la décote. C’est effectivement ainsi que les choses se passent, et cela tombe bien, puisque nous ne supprimons ni ne relevons l’âge d’annulation de la décote ! Cela devrait vous rassurer, voire vous inviter à retirer votre amendement, madame la sénatrice ! (Sourires sur des travées du groupe RDPI.)
Deuxième point, aujourd’hui, le régime de la RATP n’est évidemment pas équilibré : pour 40 000 cotisants, il y a à peu près autant de retraités de droit direct, sans compter les pensions de réversion. Cela explique que l’État verse une subvention d’équilibre de 700 millions d’euros et que nous soyons conduits à proposer la fermeture d’un tel régime.
Troisième point, Mme Poncet Monge a insisté sur la nécessité de faire respecter l’engagement pris entre la RATP, ses agents et un régime spécial au moment de la signature du contrat de travail. Or la clause du grand-père que nous prévoyons le garantit. Dans le texte que nous vous avons présenté, il est proposé que la fermeture intervienne pour les flux des nouveaux embauchés à partir du 1er septembre 2023.
Je termine en formulant une remarque.
Ce matin, plusieurs intervenants ont partagé leurs interrogations sur la place d’un article relatif à la fermeture du régime général de l’assurance vieillesse pour les régimes spéciaux dans un PLFSS, et notamment un PLFRSS.
Le lien est pourtant évident : à partir du 1er septembre 2023, les nouveaux embauchés des entreprises bénéficiant d’un régime spécial seront affiliés à la Caisse nationale d’assurance vieillesse (Cnav), donc au régime général de l’assurance vieillesse. Cela implique mécaniquement que des recettes de cotisations de ces nouveaux embauchés seront transférées de la caisse des régimes spéciaux vers celle du régime général, en l’occurrence la Cnav.
Voilà qui démontre la nécessité, et, me semble-t-il, la pertinence en droit d’inscrire une telle réforme dans un PLRFSS.
M. le président. La parole est à M. Daniel Breuiller, pour explication de vote.
M. Daniel Breuiller. Je partage avec Vincent Éblé l’idée selon laquelle Victor Hugo aurait voté nos amendements. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.), lui qui a bataillé dans cet hémicycle contre le travail des enfants et contre le sénateur Thénard, partisan du maintien des règles sociales les plus dures.
Mes chers collègues, soyons tous Hugo et ne soyons pas Thénard !
La situation alarmante de la RATP devrait nous inciter à faire preuve de sagesse. Elle est alarmante pour les agents ; les mille démissions le prouvent. Elle l’est aussi pour les usagers – d’ailleurs, nous devrions plutôt parler des « usagés » – lorsque des services de bus et de métro sont annulés.
Vous évoquez la suppression du régime spécial, et ce dès 2023 s’agissant de la proposition du collègue Retailleau, en faisant preuve d’un sens du dialogue social que je qualifierai d’expéditif.
Je doute fort que M. Castex trouve heureuses toutes ces décisions, alors même qu’il souhaite rétablir et améliorer le climat social au sein de la RATP. Surtout, je vous partage une réflexion : est-ce véritablement à nous d’en décider ? Pourquoi ne faisons-nous pas confiance aux partenaires sociaux pour gérer, à l’intérieur de chaque branche, les rapports sociaux ?
Au fond, vous traitez les salariés de la RATP de la même façon que vous traitez les millions de Français qui manifestent et refusent cette réforme, c’est-à-dire en restant non seulement muets, mais également sourds à leurs protestations et à leurs exigences !
D’ailleurs, monsieur le ministre, le régime spécial de la RATP est-il évoqué dans le rapport du Conseil d’État qui vous a été remis et que vous persistez à maintenir secret ?
M. le président. Il faut conclure.
M. Daniel Breuiller. Quelles propositions y a-t-il dans ce rapport ? (Applaudissements sur les travées des groupes GEST et SER. – Exclamations sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Avant de vouloir fermer le régime protecteur – je dis bien « protecteur », et non « spécial » – de la RATP, il faudrait s’interroger sur fait que les embauches de contractuels, c’est-à-dire de personnels n’en bénéficiant pas, se sont multipliées.
Ces contractuels, qui sont près de 5 000, sont déjà soumis au régime général. Un tiers des recrutements sont des contractuels. Mais comme cela ne va pas assez vite, vous fermez le régime avec la clause du grand-père !
Entre-temps, vous avez ouvert le secteur à la concurrence. Or les salariés qui sont transférés dans le privé perdront leur statut, mais garderont leur régime de retraite.
J’espère que vous suivez…
M. Michel Savin. Pas trop !
Mme Raymonde Poncet Monge. Vous souhaitez un référendum sur les régimes spéciaux ? Ce n’est pas plus dur qu’un référendum constitutionnel !
Il y a donc des contractuels qui n’ont ni statut ni régime de retraite et du personnel transféré au privé qui perd son statut, mais garde son régime de retraite ; c’est très brutal ! Et les agents bénéficiant de la clause du grand-père gardent les deux ! D’ailleurs, monsieur le ministre, ce n’est pas moi qui ai parlé de rupture de contrat ; mais on ne prête qu’aux riches ! Enfin, les nouveaux embauchés auront le statut, mais ne bénéficieront plus de l’ancien régime de retraite.
Je ne sais pas si vous avez suivi.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Non !
Mme Raymonde Poncet Monge. Il y avait quatre combinaisons de dérégulation ; vous les couvrez toutes !
Moi je vous propose une seule option, plus simple : garder ce qui existe depuis 1945, c’est-à-dire le statut et le régime de retraite anticipée ! (Mme Laurence Cohen applaudit.)
Mme Cathy Apourceau-Poly. Exactement !
M. le président. La parole est à Mme Monique de Marco, pour explication de vote.
Mme Monique de Marco. Je citerai non pas Victor Hugo, mais Georges Moustaki (Exclamations sur les travées des groupes Les Républicains et RDPI.), qui chantait…
M. Martin Lévrier. Ma solitude !
Mme Monique de Marco. … ceci : « Nous avons toute la vie pour nous amuser. Nous avons toute la mort pour nous reposer. »
Je serais tentée de dire : « Nous avons toute la vie pour travailler. Il ne restera que la mort pour nous reposer ». Voilà le refrain de votre partition ! Voilà le sinistre programme qu’esquisse votre réforme ! Voilà le projet que nous combattons argument après argument tandis que vous, visiblement à défaut d’arguments, restez relativement muets.
En cas de recul de l’âge de départ à la retraite à 64 ans, comme le prévoit le présent projet de loi, le départ du personnel de la RATP sera décalé de 52 ans à 54 ans pour la catégorie B, c’est-à-dire les conducteurs, sous réserve d’avoir travaillé vingt-sept ans, et de 57 ans à 59 ans pour la catégorie A, c’est-à-dire les opérateurs machinistes et les agents de maintenance, sous réserve aussi d’avoir effectué vingt ans.
Je vous en prie : postulez donc à un emploi à la RATP ; n’hésitez pas à frapper à la porte de M. Castex, puisque ces emplois sont si confortables ! Comme vous souhaitez par ailleurs maintenir le régime autonome des sénateurs, c’est bien qu’à vos yeux, la pénibilité du travail mérite moins d’être prise en compte dans ces emplois que dans notre propre fonction.
Monsieur le rapporteur Savary, vous avez précédemment dit que plus on met en avant la pénibilité des métiers, plus on nuit à leur attractivité. Votre solution serait donc de cacher la poussière sous le tapis et de faire l’autruche face à la réalité des conditions de travail de nos concitoyens !
Pour nous, faire fi de la dureté de ces métiers, qui sont indispensables au fonctionnement de la communauté, revient à mentir à la population. Ce n’est pas sérieux !
C’est pourquoi nous demandons la suppression des alinéas concernant les agents de la RATP.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Tous les salariés du secteur du transport en France, en particulier les chauffeurs de bus, ont des conditions de travail éprouvantes, quel que soit l’endroit où ils exercent. Partout se font jour des difficultés de recrutement. Et ce n’est pas en fermant le régime spécial de la RATP que vous apporterez la moindre amélioration à la situation de tous les autres salariés !
Selon nos rapporteurs, la pénibilité sera traitée avec des accords de branche qui prendront en compte la spécificité de ces métiers. Je vous le dis tout net : si de bons accords de branche existaient vraiment pour l’ensemble des professions du transport, nous pourrions nous interroger sur le maintien d’une différenciation.
Mais en supprimant ce régime avant toute négociation de branche globale aboutissant à une amélioration des conditions de travail, de salaires et de retraite de ces métiers, vous cassez toute possibilité de rapport de force permettant d’espérer une convergence vers le haut.
Mme Poncet Monge a très bien expliqué la fragmentation de ces métiers. Elle a décrit comment, en les mettant en opposition les uns contre les autres, on les tire tous vers le bas. Conclusion : les salariés n’ont plus le sentiment que leur métier peut être porteur.
J’en viens à la question de la pénibilité. Je vous invite à prendre un bus de la RATP et à constater la tension qui y règne et la différence entre la situation actuelle et celle qui prévalait voilà une cinquantaine d’années.
Il faut maintenir le régime pour favoriser une convergence vers le haut…
M. le président. Il faut conclure !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. … dans le domaine des transports. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.
M. Guillaume Gontard. Les réformes des retraites impactent toutes les travailleuses et tous les travailleurs. Nous discutons aujourd’hui de la suppression d’un certain nombre de régimes spéciaux, dont celui de la RATP, sur proposition de l’ensemble des droites.
Je ne peux pas m’empêcher d’avoir à l’esprit ceux qui regardent nos débats aujourd’hui et se demandent à juste titre pourquoi le régime autonome des sénateurs n’est pas concerné. Il me semble que nous devons pouvoir aborder sereinement cette question.
On le sait, la séparation des pouvoirs interdit de modifier notre système de retraite par le biais de ce véhicule législatif. Le Sénat lui-même est le seul à avoir la possibilité de réformer son propre régime. C’est la raison pour laquelle l’ensemble des groupes de gauche et écologistes, mus par un devoir d’exemplarité et de cohérence, ont déposé une résolution invitant le bureau du Sénat à une réflexion transparente sur notre régime et sur son évolution, en lien avec le statut de l’élu.
M. René-Paul Savary, rapporteur de la commission des affaires sociales pour l’assurance vieillesse. Ce n’est pas une explication de vote !
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. En effet !
M. Guillaume Gontard. On le voit bien, les spécificités sont nécessaires, et il faut en tenir compte. Il ne nous semble donc pas concevable d’aborder le débat en mettant un tel sujet sous le tapis.
Avant de monter les Français les uns contre les autres par cette suppression de régimes spéciaux, qui correspondent évidemment à de véritables spécificités, il serait sage – c’est la marque du Sénat – d’ouvrir le dossier de notre propre régime et de mener cette réflexion dans le temps. Il n’y a aucune urgence à traiter de la question des régimes spéciaux par ce véhicule législatif.
M. le président. La parole est à M. Pierre Laurent, pour explication de vote.
M. Pierre Laurent. Madame la rapporteure générale, nous avons avancé des arguments sur le lien entre ce que vous vous préparez à voter et la très grave crise de recrutement que connaît la RATP. Je partage en partie vos propos lorsque vous indiquez que la réforme à venir n’explique pas à elle seule des difficultés qui existent déjà actuellement. La crise a en effet plusieurs sources.
En revanche, prétendre qu’un recul de plus de dix ans de la possibilité de partir à la retraite – car c’est de cela qu’il s’agit – n’aura aucune conséquence supplémentaire sur cette situation est un pas qu’il me semble un peu difficile de franchir.
En supposant que vous assumiez la position que vous vous apprêtez à prendre, il vous faudra être plus sérieux quant à ses effets, afin de prévoir des compensations. Pour le moment, nous n’en voyons aucune. Vous pourriez proposer des mesures nouvelles, par exemple une très forte augmentation des salaires des conducteurs de bus de la RATP. Mais vous n’en faites rien.
En vérité, vous dégradez la situation et vous affirmez que cela ne changera rien. Or tout le monde sait que la réforme changera beaucoup de choses.
Monsieur le ministre, vous faites valoir que des compensations de l’ordre de 700 millions d’euros sont nécessaires en raison d’un déséquilibre entre actifs et retraités et vous prétendez supprimer le problème en fermant la caisse. Mais vous ne le réglez pas ! Le déficit du régime lié au déséquilibre entre actifs et retraités existe toujours. Vous le faites changer de caisse, mais vous ne le faites pas disparaître.
Cessez donc de présenter des arguments des subterfuges qui ne correspondent à rien. Vous manipulez les chiffres, mais, derrière ceux-ci, il n’y a que du vent ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE, ainsi que sur des travées des groupes SER et GEST.)
M. le président. La parole est à M. Claude Raynal, pour explication de vote.
M. Claude Raynal. Notre collègue Laurent, que j’ai écouté avec attention, a développé certains arguments que j’avais moi-même à l’esprit.
On fait mine de se demander si le métier, compte tenu des progrès techniques et technologiques, est aussi difficile qu’autrefois et si le régime dont nous discutons est finalement encore nécessaire.
Je me suis rendu aux vœux de la RATP. Ce n’était pas des vœux classiques. M. Castex a peu parlé, mais il a laissé la place à ses salariés, en particulier à des chauffeurs, jeunes et plus anciens. Ceux-ci ont évoqué leur métier avec beaucoup d’émotion et beaucoup d’esprit de maison. Ils donnaient le sentiment de faire partie d’une famille. Mais ils ont aussi fait part de toutes les difficultés qu’ils rencontraient.
On pourrait considérer que le métier de chauffeur de bus a beaucoup évolué par rapport à la période de mon grand-père, voilà cinquante ans, quand il fallait une minute d’efforts pour bien orienter le levier de vitesse et passer la troisième. Il existe maintenant beaucoup d’aides à la conduite.
Pour autant, la responsabilité de ces agents est très lourde, face à une circulation dense, face aux risques de traversées de piétons, de trottinettes, etc. Nerveusement, c’est un métier compliqué.
M. Vincent Segouin. Oh là là !
M. Claude Raynal. Je sais bien qu’ici aussi, c’est difficile nerveusement !
M. le président. Il faut conclure !
M. Claude Raynal. Il importe donc, à mon sens, de revenir sur cette fermeture, qui est une mauvaise idée.
M. le président. La parole est à Mme Victoire Jasmin, pour explication de vote.
Mme Victoire Jasmin. L’ancien Premier ministre Jean Castex a besoin de nous ! Il a besoin de notre soutien, dans cette affaire, qui s’apparente à un sabotage à son encontre, à l’encontre de la RATP, mais aussi à l’encontre des salariés.
Il a en effet un défi à relever : la France doit réussir les jeux Olympiques de 2024. Il nous faut donc, pour convaincre de nouveaux candidats, maintenir le régime spécial de retraite de la RATP, avec les organisations syndicales et patronales, afin de favoriser l’attractivité des différents métiers et les déplacements de nos concitoyens et de nos invités.
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.
M. Fabien Gay. J’ai entendu beaucoup d’arguments, justifiés, sur les conditions d’accueil et de transport des millions de visiteurs qui viendront pour les jeux Olympiques. En Seine-Saint-Denis, nous sommes d’ailleurs très heureux : c’est nous qui allons accueillir les JO, avec le Stade de France et la piscine ! (Sourires sur les travées du groupe CRCE.)
En réalité, les conditions de transport sont dégradées pour des millions de Franciliens dès maintenant. Dans mon département, il faut certains jours attendre quarante minutes le bus 148 au Blanc-Mesnil pour aller à Bobigny. Quand il arrive, on ne peut pas toujours monter dedans tant il est plein. Telles sont aujourd’hui les conditions de transport, et donc les conditions de travail des traminots.
Il reste une question à laquelle vous ne répondez pas. Beaucoup d’agents démissionnent ; on en a compté 300 l’an dernier. Certains d’entre eux ne passent même pas par la direction des ressources humaines ; ils abandonnent leur travail du jour au lendemain. Pourquoi ? En raison des conditions de travail dégradées et des salaires bloqués. À la RATP, on commence en dessous du Smic et on ne franchit cette ligne que grâce aux primes. C’est cela, la réalité ! S’y ajoutent la question du statut, l’ouverture à la concurrence et la privatisation prochaine.
Monsieur le ministre, nous aurions apprécié que M. Clément Beaune soit à vos côtés aujourd’hui pour nous répondre. Idem s’agissant de Mme Agnès Pannier-Runacher pour les salariés des industries électriques et gazières. Vos collègues sont-ils favorables à l’extinction et à la casse des statuts ? Face à cette dégradation des conditions de travail, à la fermeture du régime spécial, à la mise à mal du statut, comment comptez-vous recruter ? Il va falloir nous répondre !
Certes, les JO sont un enjeu. Mais c’est bien aujourd’hui que nous devons régler la crise des transports que subissent des millions de Franciliens ! Or cette réforme va aggraver le problème. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE, ainsi que sur des travées des groupes SER et GEST.)
M. le président. La parole est à M. Patrice Joly, pour explication de vote.
M. Patrice Joly. Nos échanges sur la retraite et sur les régimes spéciaux en témoignent, on ne peut pas isoler ces questions d’autres sujets de société qui leur sont liés : l’évolution du travail et de ses caractéristiques selon les différents secteurs d’activité ; l’approche renouvelée du lien au travail de nos concitoyens ; la question du financement des solidarités, en particulier entre générations et entre Français, financement auquel chacun doit, selon la Constitution, participer selon ses capacités financières.
Je reviens sur les régimes spéciaux. Ce texte n’est ni juste ni légitime. Faut-il rappeler qu’une part importante des Français ayant voté au second tour pour le Président de la République ne l’ont pas fait dans la perspective de cette réforme ? Vous le savez comme moi.
Il apparaît donc nécessaire de donner du temps à la mise en œuvre de la fermeture des régimes spéciaux, en particulier de celui de la RATP, si celle-ci devait être votée. La date butoir de septembre 2023 n’est pas acceptable, car elle ne permet pas de disposer du temps nécessaire à la concertation avec les organisations syndicales et patronales représentatives.
Je voterai tout amendement qui visera à reporter cette date, ouvrant ainsi la voie à une réelle concertation.
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe SER.)
M. Marc Laménie. Comme beaucoup le savent, je reste un défenseur du ferroviaire. La RATP en fait partie, de même que la SNCF. Cela a été rappelé à propos des régimes historiques. En 2018, j’ai ainsi été le seul de mon groupe à ne pas voter la loi pour un nouveau pacte ferroviaire. (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST.)
Je suis fidèle à mes convictions et à mes engagements, et je respecte mes collègues de tous les groupes. Je souligne néanmoins le travail effectué par la commission des affaires sociales.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Merci !
M. Marc Laménie. Madame la rapporteure générale, vous avez mené plus de trente auditions. Vous avez démontré votre compétence sur l’ensemble du texte, notamment sur cet article 1er et sur les amendements qui visent à ne pas fermer le régime spécial de retraite de la RATP.
Vous avez indiqué en commission que la caisse du personnel de la RATP comptait plus de 42 000 cotisants pour environ 50 000 pensionnés. Vous avez évoqué l’attractivité des métiers, qui sont de plus en plus difficiles – cela vaut pour les conducteurs de bus, mais aussi pour les autres –, à toutes les échelles et sur tous les territoires.
Pour autant, je me rangerai à l’avis de nos rapporteurs. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Rires sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST.)
M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. J’ai écouté attentivement l’intervention de M. Laménie, et je l’invite à renouveler ce type de prises de parole. Lui a donné des arguments, venant certes d’un autre bord politique, qui nous font réfléchir. (Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-François Husson. Vous devriez faire comme lui !
M. David Assouline. C’est beaucoup plus intéressant qu’un débat dans lequel la droite, majoritaire dans l’hémicycle, n’a rien à dire parce qu’elle attend son heure.
Cela montre que ce que nous propose le Gouvernement et dont nous discutons aujourd’hui n’est qu’un cheval de Troie. En réalité, vous ne proposez pas de mener cette évolution progressivement. Vous ouvrez le chemin pour que la droite s’y engouffre et supprime tout de suite ces régimes, sans clause du grand-père.
Mme Victoire Jasmin. Exactement !
M. David Assouline. Il s’agit également d’une diversion. Tout le monde a bien compris que nous discutions du report de deux ans pour tous de l’âge de départ légal. C’est cela qui suscite l’indignation majoritaire dans le pays.
Alors, vous vous proposez de monter les Français les uns contre les autres, en leur expliquant que, finalement, cela ne concernerait que quelques privilégiés et que tous ne seraient pas vraiment touchés. Vous essayez de créer de l’agitation à propos de soi-disant nantis parmi les travailleurs. Mais cela ne prend pas !
C’est aussi pour cette raison que nous sommes opposés à votre texte et que nous soutenons ces amendements.
Puisqu’il s’agit spécifiquement de la RATP, permettez-moi enfin de rappeler que nous nous trouvons actuellement dans une situation catastrophique pour les transports.
M. le président. Il faut conclure !
M. David Assouline. On ne saurait dès lors rogner sur le statut de ces travailleurs, sous peine d’amoindrir l’efficacité de ce service public. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour explication de vote.
Mme Annie Le Houerou. Vous souhaitez donc fermer le régime spécial de la RATP. Or un rapport de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) de 2015 alerte sur la concentration très élevée en particules fines chargées de métaux dans les couloirs du métro. Les employés courent donc un risque pour leur santé pendant leur travail.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Les usagers aussi !
Mme Annie Le Houerou. Ce rapport très documenté indique que les conséquences de cette situation sur la santé des agents sont réelles. Ceux-ci subissent des risques respiratoires et cardiovasculaires liés à cette exposition chronique aux particules de l’air des enceintes ferroviaires souterraines, les couloirs du métro et du RER.
Or vous n’avez pas prévu de rétablir parmi les critères de pénibilité les risques chimiques ou l’exposition aux produits dangereux, que vous avez retirés en 2017. Cette réforme est donc injuste et prématurée. Elle nécessite un travail approfondi avec les organisations syndicales.
C’est pourquoi je voterai pour ces amendements de suppression et contre la fermeture rapide du régime spécial de la RATP.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 367 et suivants.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 147 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 340 |
Pour l’adoption | 98 |
Contre | 242 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Rappel au règlement
M. Victorin Lurel. Monsieur le président, mon rappel au règlement se base sur l’article 32, alinéa 4.
Il ne s’agit pas d’une loufoquerie. Le silence est entretenu sur les travées de la droite, et nos collègues qui y siègent semblent avoir des secrets à partager. Notre collègue Laménie ne serait peut-être pas intervenu en ces termes s’il en avait été dans le secret.
Monsieur le président, vous incarnez le Sénat et vous pouvez décider, conformément à l’article du règlement que j’ai cité, que le Sénat se réunisse en comité secret dès lors que trente-cinq sénateurs ou le Gouvernement le demandent. Je vous demande donc, pour le compte de mes collègues de droite, de mettre aux voix cette possibilité.
M. le président. Monsieur le sénateur, puisque je suis l’incarnation du Sénat, permettez-moi de vous rappeler que le comité secret se tient pendant les périodes de guerre. Cela ne correspond pas encore, me semble-t-il, à la situation dans laquelle se trouve notre pays. (Rires et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Victorin Lurel. Monsieur le président, si vous m’autorisez une réponse sur le ton de l’humour : nous sommes en guerre sociale ou au moins face à l’équivalent moral d’une guerre ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.) Je demande donc le comité secret.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 3045 rectifié et 3913 rectifié.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 148 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 340 |
Pour l’adoption | 98 |
Contre | 242 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Amendements identiques de suppression des alinéas 3 et 4 de l’article
M. le président. Je suis saisi de quarante-six amendements identiques.
L’amendement n° 282 est présenté par M. Féraud.
L’amendement n° 314 est présenté par M. Pla.
L’amendement n° 343 est présenté par Mme Briquet.
L’amendement n° 368 est présenté par Mme Féret.
L’amendement n° 451 est présenté par M. Fichet.
L’amendement n° 506 est présenté par M. Chantrel.
L’amendement n° 520 est présenté par M. Gillé.
L’amendement n° 569 est présenté par Mme de La Gontrie.
L’amendement n° 581 est présenté par M. Redon-Sarrazy.
L’amendement n° 668 est présenté par Mme Le Houerou.
L’amendement n° 697 est présenté par Mme Blatrix Contat.
L’amendement n° 728 est présenté par M. M. Vallet.
L’amendement n° 810 est présenté par M. Jacquin.
L’amendement n° 823 est présenté par M. Lozach.
L’amendement n° 863 est présenté par M. Durain.
L’amendement n° 898 est présenté par M. Lurel.
L’amendement n° 943 est présenté par M. Cardon.
L’amendement n° 991 est présenté par M. Raynal.
L’amendement n° 1010 est présenté par M. Stanzione.
L’amendement n° 1062 est présenté par M. Houllegatte.
L’amendement n° 1077 est présenté par M. Tissot.
L’amendement n° 1098 est présenté par M. Éblé.
L’amendement n° 1152 rectifié bis est présenté par Mme Lubin.
L’amendement n° 1207 est présenté par M. Mérillou.
L’amendement n° 1247 est présenté par Mme Jasmin.
L’amendement n° 1270 est présenté par M. Montaugé.
L’amendement n° 1316 est présenté par Mme Préville.
L’amendement n° 1340 est présenté par M. Marie.
L’amendement n° 1373 est présenté par M. Bourgi.
L’amendement n° 1406 est présenté par M. Sueur.
L’amendement n° 1436 est présenté par M. Kerrouche.
L’amendement n° 1504 est présenté par Mme M. Filleul.
L’amendement n° 1543 est présenté par Mme Monier.
L’amendement n° 1592 est présenté par M. J. Bigot.
L’amendement n° 1622 est présenté par Mme Poumirol.
L’amendement n° 1652 est présenté par Mme Meunier.
L’amendement n° 1693 est présenté par M. Leconte.
L’amendement n° 1749 est présenté par M. Todeschini.
L’amendement n° 1791 est présenté par M. Jomier.
L’amendement n° 1819 est présenté par M. Kanner.
L’amendement n° 1850 est présenté par M. Assouline.
L’amendement n° 1945 rectifié ter est présenté par M. E. Blanc, Mme Goy-Chavent, MM. Mandelli et Saury, Mmes V. Boyer et Belrhiti, MM. Genet, Pellevat, Frassa, Bascher, Houpert, Segouin, Sautarel et Bonne, Mme Estrosi Sassone, MM. Rojouan et Piednoir et Mme Bonfanti-Dossat.
L’amendement n° 1992 est présenté par Mme Rossignol.
L’amendement n° 2071 est présenté par M. Jeansannetas.
L’amendement n° 2259 est présenté par Mme Espagnac.
L’amendement n° 3906 rectifié est présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli.
Ces quarante-six amendements sont ainsi libellés :
Alinéas 3 et 4
Supprimer ces alinéas.
Les amendements nos 282 et 314 ne sont pas soutenus.
La parole est à Mme Isabelle Briquet, pour présenter l’amendement n° 343.
Mme Isabelle Briquet. Cet amendement vise à ne pas fermer le régime spécial de retraite de la Banque de France.
En effet, la motivation avancée au soutien d’une telle évolution interroge. Vous mettez en exergue certains régimes à titre d’exemple, mais celui de la Banque de France ne coûte pas ; il rapporte au contribuable.
Entériner un basculement vers le régime général coûterait plus cher, alors même que le seul objet de cette réforme est la réduction du déficit. Il est donc clair qu’il s’agit d’une simple stratégie pour diviser les salariés, qui seront bien tous lésés par le recul de l’âge de la retraite.
M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret, pour présenter l’amendement n° 368.
Mme Corinne Féret. Cet amendement d’appel vise à supprimer les alinéas 3 et 4, relatifs au régime spécial de retraite de la Banque de France, que nous ne souhaitons pas fermer.
Outre les raisons qui viennent d’être avancées, il faut souligner qu’aucune concertation avec les organisations syndicales n’a été organisée et que les agents concernés ont appris dans la presse que leur régime spécial allait être fermé. Ce n’est pas acceptable.
M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Fichet, pour présenter l’amendement n° 451.
M. Jean-Luc Fichet. On évoque la fermeture des régimes spéciaux, mais cette formulation est inexacte : il ne s’agit que de certains régimes spéciaux très ciblés. Nous ne comprenons pas selon quels critères il a été décidé de retenir la RATP, mais pas, par exemple, l’Opéra de Paris.
Nous avons défendu avec conviction et pédagogie – l’art de la répétition ! – le régime spécial de la RATP, et nous avons demandé le report de la date de sa fermeture à 2048.
Les arguments déployés à cette occasion valent pour tous les régimes spéciaux, donc pour celui de la Banque de France. Nous plaidons pour que celui-ci ne soit pas fermé et que des négociations aient lieu avec les partenaires sociaux.
M. le président. La parole est à M. Yan Chantrel, pour présenter l’amendement n° 506.
M. Yan Chantrel. Par cet amendement, je propose la suppression des alinéas portant sur la fermeture du régime spécial de retraite de la Banque de France. De manière cohérente, nous sommes fermement opposés à la suppression de l’ensemble des régimes spéciaux évoqués dans cet article 1er, car nous considérons que ces mesures sont injustifiées.
À ce titre, le régime spécial de retraite de la Banque de France est un exemple pertinent, puisqu’il est largement excédentaire, avec plus de 1,8 milliard d’euros reversés dans le pot commun depuis 2020.
Ce régime spécial a donc une incidence positive certaine pour la préservation de notre modèle social. Il est excédentaire grâce à des surcotisations actées collectivement par les cotisants de ce régime.
Les départs anticipés, à 57 ans notamment, ne concernent qu’une infime partie des agents, qui exercent les activités les plus pénibles.
De plus, comme l’ont déjà rappelé certains de mes collègues, malgré le rôle central de la Banque de France, cette institution bicentenaire subit une diminution constante de ses effectifs et une dégradation continue des conditions de travail ainsi qu’une quasi-stagnation des salaires.
Alors que le secteur privé possède déjà le quasi-monopole du secteur financier et bancaire, cette nouvelle attaque envers les agents de la Banque de France risque de profondément affecter le rôle joué par l’institution, que ce soit en matière de stratégie monétaire, de stabilité financière ou encore de services économiques rendus à la collectivité.
Mes chers collègues de la majorité sénatoriale, si votre objectif est de réaliser des économies, ne supprimez pas ce régime spécial, qui est excédentaire et qui participe du bon fonctionnement de cette institution.
M. le président. L’amendement n° 520 n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour présenter l’amendement n° 569.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Cet amendement vise également à maintenir le régime spécial de la Banque de France. Nous sommes en effet défavorables à toutes les fermetures de régimes spéciaux.
Je souhaite d’ailleurs adresser un message de solidarité à nos collègues Levi, Burgoa, Paccaud, Laugier, Duffourg, Dumont, Billon, Cadec, de La Provôté, Marc, Chatillon, Perrot, Morin-Desailly et Hingray, signataires de l’amendement n° 123 rectifié, qui avait le même objet que le mien. Mes chers collègues, je tiens à vous dire que vous n’êtes pas seuls. (Rires sur les travées du groupe SER.) Vous pouvez voter nos amendements, outrepassant ainsi ce que la presse qualifie de « bâillon Retailleau », et dont les effets semblent désormais s’étendre au-delà de votre groupe, monsieur Retailleau.
Nous sommes disposés à discuter avec les signataires de cet amendement, dont l’un est d’ailleurs membre de votre groupe. Nous pourrons ainsi convaincre nos collègues du bien-fondé de nos positions. (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy, pour présenter l’amendement n° 581.
M. Christian Redon-Sarrazy. Monsieur le ministre, la question vous a déjà été posée ce matin et à l’instant par mon collègue Fichet : comment justifiez-vous le choix des régimes spéciaux que vous supprimez ?
Si vous reconnaissez que certains peuvent perdurer, c’est que vous admettez que les secteurs d’activité concernés méritent un traitement différencié.
Dans ces conditions – je m’adresse à la fois à M. le ministre et à mes collègues de la majorité sénatoriale, qui soutiennent le Gouvernement –, pourquoi ne pas ouvrir la réflexion sur de nouveaux métiers ou de nouvelles activités ?
Malheureusement, cette question ne vous effleure pas. Vous ne vous interrogez pas sur le quotidien de ceux qui sont en première ligne, en deuxième ligne, voire en troisième ligne. Vous semblez n’écouter que ceux qui sont au quartier général.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous demandons la suppression des alinéas 3 et 4.
M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour présenter l’amendement n° 668.
Mme Annie Le Houerou. Par cet amendement, nous souhaitons que le régime spécial de la Banque de France, institution vieille de plus de deux cents ans, soit maintenu.
Les fonctionnaires de la Banque de France ont accepté depuis longtemps de s’aligner sur le régime général de la fonction publique, soit sur un taux de cotisation de 11,1 %, et ils ont accepté la suppression, en 2007, de la majoration de leur pension de retraite.
Malgré les efforts consentis, le Gouvernement veut pénaliser encore ces agents.
Le régime de retraite des salariés de la Banque de France s’autofinance grâce à des investissements. La caisse qui le gère peut verser 100 % des promesses de retraite faites aux agents.
Ce régime s’équilibre de lui-même, entre les cotisations des agents – il comptait 7 850 cotisants en 2021 –, celles de l’employeur et les réserves accumulées pendant 215 ans.
Il est excédentaire, si bien qu’il a pu verser des excédents à la collectivité ces trois dernières années et que le montant des réserves atteignait 15,4 milliards d’euros fin 2021.
L’âge légal de départ à la retraite est d’ailleurs de 62 ans pour tous les agents de la Banque de France.
Vous voulez pourtant remettre en cause ce régime, monsieur le ministre, alors même que le coût de son intégration au régime général serait supérieur aux sommes qu’il rapporte aujourd’hui à l’État.
Nous demandons qu’une concertation soit menée avec les organisations syndicales, afin de débattre d’une éventuelle suppression de ce régime. Je précise que les organisations syndicales ont découvert la nouvelle dans la presse ; c’est inacceptable !
En tout état de cause, supprimer ce régime dans le cadre de ce PLFSS rectificatif pour 2023 serait prématuré. Laissons la négociation se faire !
M. le président. La parole est à Mme Florence Blatrix Contat, pour présenter l’amendement n° 697.
Mme Florence Blatrix Contat. L’article 1er supprime, pour les agents recrutés à partir du 1er septembre 2023, les régimes spéciaux de retraite de certaines entités.
Ayant demandé la suppression de cet article, nous réclamons, en toute cohérence, la suppression des alinéas 3 et 4, afin de maintenir le régime spécial de la Banque de France.
Ce régime ne correspond à aucun privilège pour les hommes et les femmes travaillant au sein de cette institution. Ces derniers partent à la retraite à 62 ans, comme tout le monde et avec la même durée de cotisation.
Les départs anticipés sont, certes, possibles, mais le recours très marginal à ce dispositif ne justifie pas à lui seul la suppression de ce régime spécial.
Comme l’a indiqué le gouverneur de la Banque de France, ce régime est autonome et dispose d’une réserve de 15,4 milliards d’euros.
Cette institution a consenti d’importants efforts pour assurer l’efficience et la maîtrise des coûts des services. Les effectifs ont en effet diminué de 25 %, au prix d’une dégradation continue des conditions de travail, tandis que, depuis 2007, la modération salariale est la règle.
Or on remercie ces personnels en annonçant la fin de leur régime spécial par voie de presse, sans concertation préalable. Supprimer ce régime revient au fond à dire aux agents qu’ils auraient été gagnants à ne faire aucun effort.
M. le président. L’amendement n° 728 n’est pas soutenu.
La parole est à M. Olivier Jacquin, pour présenter l’amendement n° 810.
M. Olivier Jacquin. Je ne comprends pas toujours la logique de cette réforme, et je connais mal le statut des agents de la Banque de France. Je connaissais nettement mieux ceux des agents de la SNCF et de la RATP, sur lesquels je me suis exprimé tout à l’heure.
Devant tant d’incertitudes et d’incompréhension, j’estime qu’au lieu de supprimer certains régimes spéciaux par démagogie, vous seriez mieux inspiré, monsieur le ministre, de retirer cette réforme et de reprendre de véritables négociations avec les partenaires sociaux, afin d’étudier, profession par profession, l’opportunité de revenir intégralement ou en partie sur certains régimes dits spéciaux.
Une bonne réforme des retraites n’est pas une réforme qui dresse les Français les uns contre les autres en stigmatisant certains ; c’est une réforme qui allie sauvegarde de la répartition et progrès social.
M. le président. Les amendements nos 823 et 863 ne sont pas soutenus.
La parole est à M. Victorin Lurel, pour présenter l’amendement n° 898.
M. Victorin Lurel. En guise de défense de cet amendement, je plagierai mes collègues de droite : « La Banque de France dispose d’une caisse de réserve des employés dont les capitaux sont placés. Cette caisse est alimentée par les cotisations des agents. La Banque se contente de verser si besoin un complément afin d’assurer l’équilibre financier du régime. Les promesses faites aux agents et aux retraités sont provisionnées à 100 % depuis 2019, avec des provisions comptables représentant 12 milliards d’euros en 2020. Cette façon de faire permet de distribuer des pensions essentiellement financées par les marchés financiers sans faire appel aux contribuables. »
De plus, quand les taux d’intérêt sont supérieurs aux charges, le surplus est versé au Trésor public. En 2021, ce montant s’élevait tout de même à 690 millions d’euros.
Mes chers collègues, je me suis permis de citer l’objet de l’amendement n° 123 rectifié, que Marie-Pierre de La Gontrie évoquait tout à l’heure, car il me semble que cela traduit des ruminations de nature ontologique, pour ne pas dire existentielle ; vous avez visiblement des doutes !
M. le président. L’amendement n° 943 n’est pas soutenu.
La parole est à M. Claude Raynal, pour présenter l’amendement n° 991.
M. Claude Raynal. Les 10 000 agents de la Banque de France bénéficient d’un régime non pas spécial, mais autonome. Or il n’y a pas une feuille de papier à cigarette entre le régime autonome de la Banque de France et celui du Sénat.
Je vous le dis donc avec un peu de gravité, mes chers collègues : on ne peut pas, d’un côté, défendre notre propre régime comme certains l’ont fait avec des arguments certes valables et, de l’autre, souhaiter la suppression des mêmes régimes lorsqu’ils ne sont pas à la main du Sénat.
Le régime autonome de la Banque de France est totalement aligné sur celui de la fonction publique, que ce soit en termes d’âge de départ ou de durée de cotisation. Non seulement il n’a jamais coûté à l’État, comme d’autres, mais comme l’indiquait Victorin Lurel – et c’est tout à fait remarquable –, ce régime reverse à l’État l’excédent de couverture des engagements de retraite.
Je salue, pour conclure, l’amendement de Pierre-Antoine Levi, dont l’objet était identique, car il y a une certaine cohérence dans le fait de défendre à la fois le régime sénatorial et celui de la Banque de France, qui sont au fond les mêmes.
Pierre-Antoine Levi, qui est à la fois un voisin et un ami, me reproche souvent de passer les trois quarts de ses amendements au sécateur de l’article 40 de la Constitution. Je me désole que, cette fois-ci, il ait de lui-même supprimé un amendement qui n’avait pas été déclaré irrecevable au titre de l’article 40 ! (Sourires et applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. L’amendement n° 1010 n’est pas soutenu.
La parole est à M. Jean-Michel Houllegatte, pour présenter l’amendement n° 1062.
M. Jean-Michel Houllegatte. Les salariés de la Banque de France sont-ils des privilégiés ?
Il faut rappeler qu’ils ont subi de profondes restructurations depuis quinze ans. Le projet stratégique mis en œuvre à l’horizon 2020 s’est traduit par la fermeture de quarante-deux caisses sur soixante et onze et la suppression de toute implantation permanente dans vingt agglomérations.
Par ailleurs, cinquante-quatre succursales départementales sur quatre-vingt-seize ont été vidées de leur substance, l’essentiel de leur activité ayant été transféré dans des centres à distance.
Ce premier plan a été suivi d’un second, visant à la fermeture de quatorze caisses supplémentaires du fait de la diminution drastique de l’utilisation des espèces au quotidien par nos concitoyens.
La Banque de France est ainsi passée de 20 000 à 9 290 salariés en dix ans. Vous imaginez donc, mes chers collègues, l’ampleur de l’effort d’adaptation qui a été demandé aux salariés.
La Banque de France rend des services d’intérêt général. Elle assure en effet une médiation du crédit, fournit des analyses de conjoncture et réalise des cotations économiques et financières d’entreprises, de collectivités territoriales ou de territoires.
Pour les particuliers, elle gère les fichiers centraux de renseignements et traite notamment les cas de surendettement, ainsi que le droit au compte, qu’on appelle trivialement interdit bancaire.
Les métiers de la Banque de France nécessitent de l’expertise de haut niveau, dans un contexte où les compétences financières sont très recherchées par des cabinets privés de cotation.
L’attractivité du statut est un gage d’indépendance qui permet à la Banque de France d’assumer ses missions de service public dans de bonnes conditions. Telles sont les raisons pour lesquelles il convient de préserver le statut de ses agents.
M. le président. L’amendement n° 1077 n’est pas soutenu.
La parole est à M. Vincent Éblé, pour présenter l’amendement n° 1098.
M. Vincent Éblé. Je souhaite défendre à mon tour le maintien du régime autonome de retraite de la Banque de France.
Afin d’étayer l’analyse du M. Raynal, que je partage pleinement, je citerai les propos du gouverneur général de la Banque de France dans un courrier qu’il vous a adressé, monsieur le ministre. François Villeroy de Galhau, qui n’est ni un dangereux gauchiste ni un insoumis, défend en effet le maintien du régime dont bénéficient ses salariés. Il ajoute de sa main la phrase suivante : « Je suis naturellement à votre disposition sur ce sujet mineur au regard de la réforme d’ensemble, mais essentiel pour la Banque de France et la poursuite de sa transformation ».
Mes chers collègues, la disposition que nous examinons emporte un enjeu majeur pour cette institution bancaire tout à fait essentielle qu’est la Banque de France.
Il convient donc de mesurer les conséquences que le sacrifice de ce régime de retraite particulier sur l’autel de la démagogie pourrait avoir sur le fonctionnement d’un certain nombre d’institutions tout à fait essentielles dans notre République.
Ce régime existe non pas pour privilégier je ne sais quelle catégorie d’agents, mais parce que les revendications légitimes des salariés qui assument ce service public ont été satisfaites par le biais de la création d’un régime autonome.
M. le président. La parole est à Mme Monique Lubin, pour présenter l’amendement n° 1152 rectifié bis.
Mme Monique Lubin. J’ai parfois l’impression que ce texte, imaginé au départ par le Gouvernement uniquement pour reculer l’âge de la retraite pour la majorité des salariés du privé, lui permet de régler un certain nombre de situations que la droite garde en travers de la gorge depuis quelque temps, en particulier les régimes spéciaux.
Entre le régime de la RATP, dont nous avons longuement débattu, et celui des gaziers, dont nous discuterons bientôt, le texte aborde le régime spécial de la Banque de France.
Nul ne doute que les salariés de la Banque de France bénéficient de conditions de travail bien meilleures que les gaziers ou les chauffeurs de bus ou de métro, même si ceux qui exercent les plus hautes responsabilités ont certainement une charge mentale importante.
On se demande tout de même ce que ces salariés ont bien pu faire pour que, d’un coup, alors qu’ils ne demandent rien à personne et que leur système de retraite est excédentaire, l’on se propose de régler le compte de leur régime de retraite au détour d’un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous demandons la suppression des alinéas 3 et 4.
M. le président. L’amendement n° 1207 n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Victoire Jasmin, pour présenter l’amendement n° 1247.
Mme Victoire Jasmin. En proposant de supprimer le régime autonome de la Banque de France, le Gouvernement, qui n’est pas en reste lorsqu’il s’agit de privilégier des cabinets de conseil, jette la suspicion sur les salariés de cette institution.
Il importe au contraire que le régime des salariés de la Banque de France soit maintenu. Ce dernier fonctionne sans contribution de l’État, si bien que son impact financier est neutre pour la collectivité.
Il me paraît donc nécessaire de privilégier le dialogue social et de maintenir, pour l’heure, ce régime excédentaire, et même exemplaire. Il n’y a aucune raison de punir les agents de la Banque de France.
M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour présenter l’amendement n° 1270.
M. Franck Montaugé. Monsieur le ministre, vous voilà de nouveau tel qu’en vous-même, pourfendeur et même « casseur » de tous les statuts un tant soit peu protecteurs.
Vous prônez en effet l’équilibre du régime général tout en supprimant la caisse autonome de la Banque de France, qui n’obéit nullement aux codes de la sécurité sociale.
Je vous pose la donc la question : pourquoi mettre fin aux acquis sociaux lorsqu’ils n’ont rien d’anormal et qu’ils profitent aux bénéficiaires sans pénaliser personne, ce qui est le cas de celui-ci ?
Le régime de la Banque de France est protecteur et profitable à tous les salariés de l’institution. Sa transparence et son autonomie de gestion sont gages de l’efficacité que vous lui connaissez : elles ne peuvent pas justifier son extinction.
Ce régime n’est pas le privilège de quelques-uns ; il s’inscrit dans le contrat national en matière de service public. Il n’y a donc absolument aucune raison de le supprimer.
M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour présenter l’amendement n° 1316.
Mme Angèle Préville. Cet amendement vise à maintenir le régime spécial de retraite de la Banque de France.
Ce régime autonome ne présente aucun risque financier, puisqu’il ne fait appel à aucune contribution de l’État. C’est même tout le contraire, puisque ce régime est excédentaire. Dans ce contexte, sa suppression est incompréhensible.
Il est du reste pour le moins singulier de donner en quelque sorte en pâture plusieurs régimes spéciaux, dont celui-ci. S’il est facile de stigmatiser, de telles méthodes ont des relents de démagogie, voire de populisme.
Cette façon de viser certains métiers et de les livrer à la vindicte est détestable. Le courage eût été de tout mettre sur la table.
Une réforme des retraites ne peut pas confiner à du travail mal fait. Le choix des boucs émissaires est-il aléatoire ? Avez-vous procédé à un tirage au sort ? Ce régime est-il visé en raison du seul terme de « banque » ?
Tenez-vous compte des changements profonds qu’a connus le monde du travail ces trois dernières années ? De nouvelles souffrances au travail sont apparues, en lien avec les transformations récentes, notamment les restructurations.
On constate des surinvestissements dans la vie professionnelle qui peuvent mener jusqu’au burn-out. Les impératifs de productivité sont de plus en plus contraignants. Et si c’était trop ?
Il nous faut réfléchir à ces réalités nouvelles et aux courants forts qui traversent nos sociétés. Nous devons regarder en face les démissions, les changements de métier et les choix de vie qu’ils emportent.
M. le président. Les amendements nos 1340, 1373, 1406 et 1436 ne sont pas soutenus.
La parole est à Mme Martine Filleul, pour présenter l’amendement n° 1504.
Mme Martine Filleul. Cet amendement vise à maintenir le régime spécial de retraite de la Banque de France.
Comme je l’ai indiqué tout à l’heure, monsieur le ministre, nous rejetons en bloc votre stratégie de nivellement par le bas, qui s’appuie sur la division des Français. Ces derniers vous mettent par ailleurs en minorité sur ce texte.
La suppression des différents régimes spéciaux relève bien d’un nivellement par le bas, car cela ne permettra pas d’aboutir à une égalité entre les Français. C’est un leurre !
C’est pourquoi nous nous opposons en tout point à la suppression des régimes spéciaux. L’urgence n’est pas là. Aujourd’hui, il faut protéger les Français qui sont en grande difficulté.
Le régime de retraite de la Banque de France est un cas d’école, car c’est un régime autonome qui est aujourd’hui excédentaire. Sa suppression, qui n’entraînera pas d’économies, n’a pas sa place dans ce projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale.
L’âge de la retraite pour les salariés de la Banque de France est de 62 ans. Un départ anticipé à 57 ans est, certes, prévu, mais il ne concerne que les métiers pénibles et le recours à cette possibilité reste plus que marginal au sein de la Banque de France.
Par ailleurs, cette caisse a dégagé de forts excédents depuis 2020. Depuis 2014, elle a reversé 30 milliards d’euros à l’État.
De fait, alors même que la présente réforme vise à réduire un prétendu déficit, un basculement vers le régime général coûterait plus cher que la situation actuelle.
À la lumière de ce constat, je vous invite donc, mes chers collègues, à voter la suppression des alinéas 3 et 4 de l’article 1er.
M. le président. Les amendements nos 1543 et 1592 ne sont pas soutenus.
La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour présenter l’amendement n° 1622.
Mme Émilienne Poumirol. L’un des arguments du Gouvernement pour justifier la suppression de certains régimes spéciaux de retraite serait leur coût ; M. Dussopt l’évoquait tout à l’heure à propos de la RATP.
Or le régime de la Banque de France est un régime autonome et financièrement excédentaire qui, depuis quelques années, reverse plusieurs milliards d’euros à la collectivité nationale.
De fait, un basculement vers le régime général coûterait plus cher que le maintien de la situation actuelle.
De plus, le régime spécial de la Banque de France ne correspond à aucun privilège, puisque les hommes et les femmes qui travaillent à la Banque de France partent à la retraite à 62 ans, comme le reste de la population et avec le même nombre d’annuités de cotisation.
Enfin, je note qu’il n’y a eu aucune concertation, qu’aucune rencontre avec les organisations syndicales n’a été organisée et que les personnels ont appris leur sort par voie de presse. Quel mépris !
La Banque de France a pourtant consenti des efforts importants, puisque ses effectifs ont diminué de 25 % depuis 2015, ce qui a eu pour conséquence une détérioration des conditions de travail.
Les agents de la Banque de France n’ont accepté ces efforts qu’en contrepartie du maintien de leur régime de retraite. Et ils devraient aujourd’hui travailler jusqu’à 64 ans, comme tout le monde ? C’est inacceptable.
M. le président. L’amendement n° 1652 n’est pas soutenu.
La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour présenter l’amendement n° 1693.
M. Jean-Yves Leconte. Pourquoi un régime autonome et pas un autre ? Pourquoi un régime spécial et pas un autre ?
On a l’impression que, comme dans une salle de casino, le conseil des ministres qui s’est réuni pour établir la liste des régimes visés par cette suppression s’est laissé guider par le hasard.
Avec ses trente-trois régimes complémentaires et généraux, il est vrai que notre système est quelque peu complexe. Il convient toutefois de respecter l’histoire de chacun de ces régimes, ainsi que les travailleurs qui se sont engagés dans telle ou telle carrière.
Il n’est pas acceptable de supprimer un régime sans concertation, surtout dans le seul but de faire main basse sur une cagnotte.
Il faudrait non pas supprimer les régimes un par un, au gré d’on ne sait quelle explication, car rien n’explique de supprimer tel régime et pas un autre, mais travailler posément à la refonde du système. Alors que les carrières ne sont plus linéaires, les salariés devraient notamment pouvoir passer d’un régime à l’autre sans être handicapés dès lors qu’ils sont polypensionnés.
Or le Gouvernement procède de manière totalement erratique, sans stratégie claire.
Dans ces conditions, j’estime préférable de conserver le système tel qu’il est.
M. le président. Les amendements nos 1749 et 1791 ne sont pas soutenus.
La parole est à M. Patrick Kanner, pour présenter l’amendement n° 1819.
M. Patrick Kanner. Je m’associe à mon tour à la demande de suppression de ces alinéas prévoyant la suppression du régime autonome de la Banque de France.
Mon collègue Leconte vient d’évoquer la main basse que le Gouvernement envisage de faire sur la cagnotte. Mais c’est chose faite : tous les ans, cette caisse reverse à peu près 2 milliards d’euros à la collectivité nationale. C’est incompréhensible !
Si la suppression du régime de la RATP peut avoir des relents idéologiques et dogmatiques, celui de la Banque de France ne pose pas de difficulté ; il fonctionne très bien et n’embête personne.
De plus, les salariés de la Banque de France ont consenti des efforts, en particulier depuis 2015. Nous ne comprenons donc pas cette disposition. Mais peut-être pourrez-vous nous l’expliquer, monsieur le ministre ?
Je le rappelle, la Banque de France a connu une baisse d’effectifs de 25 % depuis 2015, ce qui, loin des fantasmes de confort que cette institution peut alimenter, a contribué à dégrader les conditions de travail. Mais les efforts ne s’arrêtent pas là, puisque la modération salariale est une règle d’or au sein de cette institution depuis 2007.
Ce régime autonome fait partie des éléments d’attractivité que les salariés intégrant la Banque de France prennent en compte.
Cette disposition est donc à côté de la plaque au regard de l’objectif que le Gouvernement veut atteindre par la suppression des régimes spéciaux, et que nous dénonçons.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous souhaitons la suppression des alinéas 3 et 4.
M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour présenter l’amendement n° 1850.
M. David Assouline. Lorsque tout a été dit, il n’est pas nécessaire d’en rajouter. En guise de bonne volonté, je n’argumenterai pas davantage sur le maintien de ce régime spécial. (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. Étienne Blanc, pour présenter l’amendement n° 1945 rectifié ter.
M. Étienne Blanc. Dans la droite ligne de l’amendement n° 1944 rectifié ter, que j’ai défendu hier sur l’article liminaire, la présentation de cet amendement de suppression des alinéas 3 et 4 est l’occasion d’évoquer le régime par capitalisation. Ce n’est pas une obsession, mais j’estime que l’on peut difficilement éluder ce sujet dans le cadre d’un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale.
Je considère que la suppression du régime spécifique de la Banque de France serait une erreur.
Tout d’abord, le régime est « calé » sur le régime général. Comme un grand nombre de Français, les bénéficiaires prennent leur retraite à 62 ans.
Ensuite, il fonctionne par capitalisation. Or nous sommes un certain nombre à penser que le régime par capitalisation est moins fragile que le régime par répartition pour des raisons démographiques que nous avons largement évoquées.
En outre, ce régime ne demande rien aux contribuables, mais il verse un excédent au Trésor public, ce que peu de régimes sont susceptibles de faire.
Supprimer ce régime est tout de même assez curieux à une époque où l’on se pose la question de l’équilibre de nos comptes sociaux. J’observe que si l’on avait géré de la même manière la retraite des fonctionnaires, avec le même dispositif, la France aurait fait une économie budgétaire de l’ordre de 50 milliards d’euros.
Enfin, comme il faut parfois faire un peu de politique, c’est un régime qui nous permet de constater ce qu’est une véritable conversion de la gauche. Jamais je n’aurai entendu Mme Lienemann défendre avec autant de conviction un régime de capitalisation ! (M. Sébastien Meurant applaudit.) Jamais je n’aurai vu mon excellent collègue M. Bocquet défendre avec autant de vigueur un régime de capitalisation. Cher Pierre Laurent, vous avez eu des mots extraordinaires pour défendre la capitalisation, tout cela sous l’autorité de M. Raynal. Décidément, il se passe cet après-midi au Sénat quelque chose d’assez exceptionnel. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. Les amendements nos 2071 et 2259 ne sont pas soutenus.
La parole est à Mme Cécile Cukierman pour présenter l’amendement n° 3906 rectifié.
Mme Cécile Cukierman. Plus que d’un régime spécial, il s’agit d’un régime pionnier. Cela n’aura échappé à personne, créé huit ans après la Banque de France, ce régime pionnier date de 1808 et est donc bien antérieur au régime général des retraites, qui a été créé au lendemain de la guerre en 1945.
Je veux rassurer mon collègue Étienne Blanc ou, du moins, inverser les rôles. Il aura fallu attendre d’en venir dans cet article 1er à la situation des agents de la Banque de France et à leur système de retraite pour que nous puissions enfin présenter des amendements communs. Nous ne pouvons que nous en féliciter.
Au-delà de l’ironie, cela démontre une chose fondamentale : s’il y a eu à travers l’histoire un régime pionnier ou des régimes spéciaux, c’est bien parce qu’il existe parfois des spécificités qui doivent, tant sur le mode de financement que sur la reconnaissance de pénibilité, être plus ou moins dissociés du régime général.
Par conséquent, en défendant ici et maintenant le maintien du régime de la Banque de France, il s’agit non pas de demander une généralisation – en tout cas, pour ce qui me concerne – de ce système par capitalisation à l’ensemble des salariés de notre pays, mais simplement de préserver un système qui existe, parce qu’il n’y aurait pas d’intérêt économique, si ce n’est peut-être pour l’État – mais je n’oserais porter une telle accusation, monsieur le ministre – à récupérer l’excédent de cette caisse de retraite au service de son budget. (Mme Laurence Cohen applaudit.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Nous avons entendu de part et d’autre de l’hémicycle de nombreux arguments concernant le système de la Banque de France. J’ajouterai certains éléments complémentaires.
Tout d’abord, ceux qui en bénéficient sont-ils des privilégiés ? Je crois qu’il ne faut pas analyser la situation sous cet angle : nous n’avons d’ailleurs jamais utilisé ce terme, pas même au sein de la commission. Mieux vaut examiner précisément de quoi il s’agit. En réalité, ceux qui sont concernés sont des agents administratifs, auxquels il faut ajouter ceux qui travaillent dans les deux centres industriels produisant les billets de banque. Les métiers peuvent donc un peu varier.
La particularité du système tient au fait que l’on recense aujourd’hui 7 852 cotisants pour 14 647 pensionnés de droit direct, auxquels s’ajoutent 2 972 pensionnés de droit dérivé. C’est là qu’est en réalité le déséquilibre : les pensions à distribuer sont nombreuses pour peu de cotisants.
Certes, il y a cette subvention d’équilibre qui permet de placer les recettes au même niveau que les dépenses. Mais il faut préciser que cet équilibre est atteint grâce à une contribution de l’employeur à hauteur de 87 %.
Sans revenir sur l’histoire de la Banque de France, qui a versé moins de dividendes à un moment donné, de sorte qu’elle se retrouve aujourd’hui avec plus de moyens, on ne peut que craindre que le déséquilibre de ce régime spécial ne soit en réalité trop important pour que l’employeur ait à jamais les moyens de le compenser. C’est la raison pour laquelle nous proposons d’y mettre fin ou, en tout cas, de le fermer.
La commission, qui souhaite maintenir l’article 1er, a donc émis un avis défavorable sur l’ensemble de ces amendements identiques.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre. Je ferai trois observations.
Premièrement, contrairement à ce que j’ai entendu à plusieurs reprises, le régime de retraite de la Banque de France est bien un régime spécial. Il apparaît au neuvième alinéa de l’article R. 711-1 du code de la sécurité sociale, qui liste les régimes que l’on qualifie de « spéciaux » et mentionne tous ceux que nous sommes amenés à examiner aujourd’hui, dont celui de la SNCF, mais au titre de la clause du grand-père.
Deuxièmement, en ce qui concerne la capacité que ce régime et son employeur de référence ont à verser à l’État quand la situation financière est bonne – quand donc il y a des excédents et donc des financements possibles –, rien de ce que nous faisons ne la remet en cause : les excédents sont versés lorsque les produits des placements financiers qui sont l’actif du régime spécial de retraite permettent à la fois de couvrir l’intégralité des dépenses de pensions et d’apporter une participation sous forme de versement exceptionnel à l’État.
L’application de ce que l’on appelle communément la clause du grand-père permet l’extinction extrêmement progressive du régime et le maintien à son profit des actifs et des réserves, comme nous le faisons pour chaque régime spécial mis en extinction ; nous aurons l’occasion d’y revenir dans la suite de l’examen du texte.
Par conséquent, la capacité qu’aura le régime à verser des excédents à l’État quand c’est possible reste tout à fait acquise.
Troisièmement, il faut souligner qu’en réalité, le régime général est un système dont le personnel de la Banque de France est déjà très familier.
Mme la rapporteure générale l’a dit, le régime spécial est en déséquilibre, avec 8 000 cotisants pour 14 000 pensionnés. Lorsque nous regardons le flux d’embauche de la Banque de France, l’établissement recrute entre 300 et 400 personnes par an, dont les trois quarts comme contractuels. Seulement un quart d’entre elles sont recrutées comme titulaires et sont donc bénéficiaires du régime spécial de retraite.
En outre, si vous êtes recruté comme titulaire à la Banque de France et si, pour une raison ou une autre, vous y travaillez moins de quinze ans, lorsque vous quittez l’établissement pour rejoindre un autre employeur, vous êtes reversé au régime général et vous perdez toute forme d’acquis au titre du régime spécial.
En réalité, l’extinction à laquelle nous procédons permet aussi de rétablir une forme d’égalité, y compris parmi les actuels recrutés de la Banque de France.
Enfin, je confirme les propos de Mme la rapporteure générale, et j’avais déjà souligné ce paradoxe ou du moins cette situation contre-intuitive : il s’agit d’un régime de capitalisation qui a été défendu à l’Assemblée nationale comme ici par les groupes de gauche. Certes, la capitalisation est collective, mais cela reste de la capitalisation. Le régime sert 550 millions d’euros de pensions par an, dont seulement 40 millions d’euros sont assurés par des cotisations, soit un taux de 7 %. Tout le reste correspond au produit ou, plus exactement, aux dividendes de placements sur les marchés financiers, ce qui est le propre de la capitalisation.
On peut donc souscrire à l’observation d’Étienne Blanc en reconnaissant que la situation est quelque peu contre-intuitive.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur l’ensemble de ces amendements.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Pour ma part, je fais tout de même une petite différence entre les situations qui nous sont présentées ici.
En effet, il existe des régimes spéciaux dont on parle souvent, comme ceux de la RATP ou des industries électriques et gazières. Je qualifierais ces régimes de « protecteurs » au regard de la pénibilité des métiers de ces secteurs. Nous les défendons donc sans ambiguïté.
Il existe également des régimes autonomes, dont celui du Sénat, qu’on pourrait qualifier de régimes « particuliers », parce qu’ils se sont constitués de façon particulière.
Il me semble qu’en traitant ensemble le régime des clercs de notaire, celui de la Banque de France et celui de la RATP, on crée une certaine confusion au détriment des régimes « protecteurs », que nous défendons, car ils prennent en compte la pénibilité des métiers dans leur système de retraite.
Certains régimes, comme le nôtre, fonctionnent avec des surcotisations, grâce à une participation généreuse de l’employeur ou bien avec des fonds de réserve que l’on fait fructifier, c’est-à-dire que le régime – vous avez raison de le dire – est basé sur la capitalisation, fût-elle collective. Elle n’est pas forcément liée aux droits individuels, mais pour garder ces droits, il faut justifier d’un certain nombre d’années d’affiliation au système. Toutefois, on ne peut pas dire que ce qui est versé relève de la solidarité inter-régimes.
Il me semble que l’on pourrait traiter en soi la question des régimes particuliers dits « autonomes ». S’ils figurent à cet endroit du texte, c’est pour entretenir une certaine confusion et peut-être pour préparer une réforme future, dans laquelle tous les régimes seraient regroupés au sein d’un même régime universel.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Nous défendons un principe : le maintien des systèmes de retraite qui fonctionnent et qui donnent satisfaction aux salariés comme d’ailleurs, dans un certain nombre de professions, aux hauts responsables et au patronat.
Ces régimes, que ce soit celui des clercs de notaires ou celui de la Banque de France, sont très antérieurs à la création du régime général lors de la Libération. Or personne à l’époque n’a considéré nécessaire à l’égalité républicaine de mettre tout le monde sous la même toise. Ces régimes relèvent, si je puis dire, d’un système résiduel qui ne coûte rien à l’État et qui donne satisfaction ; excusez du peu ! Pour une fois que quelque chose semble donner satisfaction, pourquoi le changer ?
M. Sébastien Meurant. Bravo !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Mais notre critique de la capitalisation est d’un autre ordre. Car ce que nous refusons, c’est le basculement de l’actuelle répartition vers la capitalisation. On peut avoir ce débat. Personnellement, je suis prête à le mener. Je pourrais vous donner vingt-cinq exemples qui montrent la manière dont les retraites en Suède ou au Royaume-Uni ont fondu comme neige au soleil au moment de la crise financière. Ce débat est légitime.
Toutefois, chers collègues du groupe Les Républicains, vous ne pouvez pas dire, la main sur le cœur, que tout ce que vous faites, c’est pour sauver le régime par répartition tout en préparant en réalité les conditions d’un basculement massif vers la capitalisation. Si c’est cela que vous voulez, assumez-le en le disant vraiment, sans passer par la petite porte de la détérioration du système général, pour expliquer ensuite à ceux qui partiront tard à la retraite ou qui n’auront pas une pension suffisante, qu’ils doivent faire de la capitalisation.
M. le président. Il faut conclure.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Vous êtes dans ce jeu de basculement. Il n’est ni honnête ni normal que vous éludiez le débat. (Applaudissements sur des travées du groupe CRCE.)
M. le président. La parole est à M. Pierre Laurent, pour explication de vote.
M. Pierre Laurent. Premièrement, les arguments soi-disant comptables ou financiers avancés par Mme la rapporteure et M. le ministre ont, en l’occurrence, peu de valeur. Le gouverneur de la Banque de France, dont je pense qu’il doit savoir un peu compter, dit que ce régime ne correspond « à aucun privilège des hommes et des femmes de la Banque de France, qui partent à la retraite à 62 ans comme tout le monde, avec la même durée de cotisation ». La différence est qu’il « est provisionné dans nos comptes. C’est donc en réalité un régime autonome plutôt vertueux. »
Ce régime est soutenu par les syndicats de la Banque de France et par le gouverneur de la Banque de France, et sa gestion est vertueuse.
Deuxièmement, cher collègue Étienne Blanc, ce n’est pas un régime par capitalisation au sens où vous l’entendez,…
MM. Sébastien Meurant et Étienne Blanc. Si !
M. Pierre Laurent. … puisque sa base repose sur des cotisations sociales payées par les salariés, correspondant au système par répartition.
Il est en effet complété par un régime lié à la situation particulière de la Banque de France, mais nous reconnaissons nous-mêmes depuis le début de ce débat qu’il peut parfaitement exister des régimes qui, du fait de leur histoire, sont des régimes particuliers sans déroger aux règles générales. Mais puisqu’ils sont bien gérés, pourquoi les changer ? C’est exactement ce que nous disons.
Allons au-delà des différences qui peuvent nous animer dans ces débats. Les groupes de gauche proposent de maintenir le régime de la Banque de France, et quatorze collègues centristes avaient déposé un amendement allant dans le même sens. Cet amendement a disparu pour une raison que j’ignore, mais les quatorze collègues centristes sont toujours là. Cher collègue Étienne Blanc, vous faites partie des dix-huit parlementaires du groupe Les Républicains qui ont déposé un amendement identique. Si nous joignons nos voix et si tout le monde s’y met, nous aurons fait œuvre utile cet après-midi en préservant ce régime. (Applaudissements sur des travées du groupe CRCE.)
M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.
M. Victorin Lurel. Mon propos est dans la même veine que celui de M. Laurent. Personnellement, je n’ai aucun mal à être aussi pragmatique que vous et je n’empêcherai pas la Banque de France de faire son travail de banquier, qui consiste à banquer, bancariser, monétariser et placer. Il s’agit d’un régime mixte, qui ne repose pas sur la capitalisation au sens strict du terme. Pourquoi donc l’empêcher ?
Je m’interroge. Il me semble – cela vaut peut-être uniquement pour la politique monétaire – que la Banque de France est indépendante, et cela a donné lieu au débat que l’on sait au Parlement. Certes, on peut s’interroger sur le fait d’imposer un nouveau régime de retraite aux agents concernés. Mais imaginez que l’on impose cela au Sénat ! Vous me direz qu’il s’agit d’un régime autonome, en faisant une distinction spécieuse entre les régimes spéciaux et des régimes autonomes. Or le régime de la Banque de France est vraiment autonome : il s’autofinance – c’est un fait ! – et ne fait pas appel au contribuable. Il fait des placements financiers et lorsqu’il y a des excédents, il les reverse au Trésor public.
On ne sombre pas pour autant dans ce que nous savons et que l’histoire a condamné, comme les crises de 1929 et de 2008 en ont témoigné. L’avenir, ce n’est pas la capitalisation pour le grand public. Mais, en l’occurrence, nous parlons d’un petit public de quelques milliers de personnes qui abondent les finances publiques.
Je voterai donc les amendements visant à maintenir ce régime.
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.
M. Guillaume Gontard. Comme l’a souligné ma collègue Raymonde Poncet Monge, on voit bien les questionnements qui surgissent sur ce régime spécifique. Il s’agit d’un régime autonome, très spécifique, par capitalisation, sur lequel l’on ne peut en effet que s’interroger.
Cependant, nous voterons ces amendements, car ce qui pose problème, c’est surtout la technique utilisée pour introduire ces différents régimes spécifiques dans le texte, sous la forme d’un gros paquet qui permet de les montrer du doigt en insinuant qu’ils sont un problème et de les monter les uns contre les autres. Nous voterons donc ces amendements dans leur globalité tout en conservant des questionnements sur ce régime spécifique.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 343 et suivants.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 149 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 338 |
Pour l’adoption | 108 |
Contre | 230 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Amendements identiques de suppression des alinéas 5 à 13 de l’article
M. le président. Je suis saisi de cinquante et un amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les quarante-six premiers sont identiques.
L’amendement n° 283 est présenté par M. Féraud.
L’amendement n° 315 est présenté par M. Pla.
L’amendement n° 344 est présenté par Mme Briquet.
L’amendement n° 369 est présenté par Mme Féret.
L’amendement n° 452 est présenté par M. Fichet.
L’amendement n° 507 est présenté par M. Chantrel.
L’amendement n° 521 est présenté par M. Gillé.
L’amendement n° 570 est présenté par Mme de La Gontrie.
L’amendement n° 582 est présenté par M. Redon-Sarrazy.
L’amendement n° 669 est présenté par Mme Le Houerou.
L’amendement n° 698 est présenté par Mme Blatrix Contat.
L’amendement n° 729 est présenté par M. M. Vallet.
L’amendement n° 811 est présenté par M. Jacquin.
L’amendement n° 824 est présenté par M. Lozach.
L’amendement n° 864 est présenté par M. Durain.
L’amendement n° 899 est présenté par M. Lurel.
L’amendement n° 944 est présenté par M. Cardon.
L’amendement n° 982 est présenté par M. Raynal.
L’amendement n° 1011 est présenté par M. Stanzione.
L’amendement n° 1031 est présenté par Mme G. Jourda.
L’amendement n° 1063 est présenté par M. Houllegatte.
L’amendement n° 1078 est présenté par M. Tissot.
L’amendement n° 1099 est présenté par M. Éblé.
L’amendement n° 1153 rectifié bis est présenté par Mme Lubin.
L’amendement n° 1208 est présenté par M. Mérillou.
L’amendement n° 1248 est présenté par Mme Jasmin.
L’amendement n° 1271 est présenté par M. Montaugé.
L’amendement n° 1317 est présenté par Mme Préville.
L’amendement n° 1341 est présenté par M. Marie.
L’amendement n° 1374 est présenté par M. Bourgi.
L’amendement n° 1407 est présenté par M. Sueur.
L’amendement n° 1437 est présenté par M. Kerrouche.
L’amendement n° 1505 est présenté par Mme M. Filleul.
L’amendement n° 1544 est présenté par Mme Monier.
L’amendement n° 1593 est présenté par M. J. Bigot.
L’amendement n° 1623 est présenté par Mme Poumirol.
L’amendement n° 1653 est présenté par Mme Meunier.
L’amendement n° 1694 est présenté par M. Leconte.
L’amendement n° 1750 est présenté par M. Todeschini.
L’amendement n° 1792 est présenté par M. Jomier.
L’amendement n° 1820 est présenté par M. Kanner.
L’amendement n° 1848 est présenté par M. Assouline.
L’amendement n° 1993 est présenté par Mme Rossignol.
L’amendement n° 2072 est présenté par M. Jeansannetas.
L’amendement n° 2260 est présenté par Mme Espagnac.
L’amendement n° 2286 est présenté par Mme Bonnefoy.
Ces 46 amendements sont ainsi libellés :
Alinéas 5 à 13
Supprimer ces alinéas.
Les amendements nos 283 et 315 ne sont pas soutenus.
La parole est à Mme Isabelle Briquet, pour présenter l’amendement n° 344.
Mme Isabelle Briquet. Cet amendement vise à ne pas fermer le régime spécial de retraite des clercs de notaires.
Là encore, pourquoi vouloir démanteler un régime financièrement autonome ?
Là encore, si ce régime spécial existe, c’est pour une raison bien particulière. Avant la mise en place de leur caisse, les salariés des études notariales n’avaient pas droit à une couverture de retraite, n’étant pas classés comme ouvriers ou fonctionnaires. Ils devaient pour ceux qui le pouvaient acheter des points de retraite auprès de la société de secours mutuel.
Là encore, ce régime correspond à un souci de justice et de protection des salariés. Sa fermeture ne trouve donc aucune justification.
M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret pour présenter l’amendement n° 369.
Mme Corinne Féret. Cet amendement de suppression des alinéas 5 à 13 concerne le régime spécial de retraite des clercs et employés de notaire.
Je précise que la population des salariés du notariat est féminisée à près de 88 %. La suppression du régime aura donc un impact important sur les droits à la retraite de ces femmes.
J’interroge M. le ministre : pourquoi vouloir toujours et encore niveler vers le bas ?
M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Fichet, pour présenter l’amendement n° 452.
M. Jean-Luc Fichet. Si ce qui nous est proposé venait à être adopté, ce serait la fin du régime de retraite et de sécurité sociale auquel chaque salarié du notariat est attaché. Cela entraînerait de surcroît la fin de l’action sociale profitant aux salariés de la caisse.
En contrepartie de cotisations supérieures à celles du régime général, les salariés du notariat bénéficient d’une pension de retraite calculée sur les dix dernières années. Avec les dispositions que vous proposez, elle serait calculée sur les vingt-cinq dernières années, ce qui entraînerait mécaniquement une baisse du niveau des pensions.
Pourquoi vouloir supprimer un régime qui est autosuffisant ? L’objectif est-il d’absorber les réserves de la caisse des clercs de notaires ?
Interrogé par la profession, le Gouvernement n’a apporté aucune réponse. Silence ! Les débats à l’Assemblée nationale n’ont pas plus éclairé la situation.
Afin de ne pas participer à une réduction drastique des droits à la retraite des clercs de notaire, nous nous opposons à la fermeture de leur régime spécial.
M. le président. La parole est à M. Yan Chantrel, pour présenter l’amendement n° 507.
M. Yan Chantrel. En cohérence avec notre opposition globale à cet article 1er, nous proposons également la suppression des alinéas ayant pour objet la fermeture du régime spécial de retraite des notaires et clercs de notaire.
Instituée par la loi du 12 juillet 1937, la caisse de retraite et de prévoyance des employés de notaire a représenté un véritable gain social pour les personnes réalisant des études notariales qui ne bénéficiaient logiquement pas encore d’un régime de retraite.
Conservé lors de la création du régime général, ce régime spécial s’est progressivement développé en se concentrant uniquement sur les pensions de retraite. Comme cela a été rappelé, ce régime n’a jamais été déficitaire depuis sa création.
En effet, grâce à une surcotisation importante des employés et à une contribution de 4 % des employeurs, ce régime est largement excédentaire et pérenne.
Alors que la profession connaît déjà des difficultés pour recruter des personnels formés, une atteinte à son régime spécial pourrait fortement ralentir son développement.
Il convient également de rappeler que l’âge de départ à la retraite pour ce régime est actuellement de 63 ans et dix mois.
De plus, avec près de 88 % de femmes parmi les salariés du notariat, la suppression de ce régime porterait un nouveau coup dur à la retraite des femmes, qui subissent déjà une inégalité de salaire et des carrières souvent hachées.
Ainsi, mes chers collègues, comme cela a été proposé sur plusieurs travées de cet hémicycle, revenons sur la fermeture de ce régime excédentaire et protecteur de ses salariés.
M. le président. L’amendement n° 521 n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour présenter l’amendement n° 570.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. En réalité, l’article 1er, c’est un peu l’auberge espagnole. On voit bien en le lisant que, parmi les régimes visés, les deux seuls qui intéressent le Gouvernement sont celui de la RATP et celui des industries électriques et gazières.
J’imagine que certains autres ont été écartés. Pour l’Opéra de Paris, l’explication est assez évidente ; comme je l’expliquais à M. Temal, passé un certain âge, il est difficile de porter le tutu. Dans le cas des marins et des dockers, le Gouvernement a dû se dire que la situation était déjà suffisamment compliquée et qu’il valait mieux éviter une grève.
Toutefois, il fallait quand même donner l’impression que l’on s’intéressait à tout le monde. Par conséquent, ceux qui ont été rattrapés par la patrouille, ce sont les membres du Conseil économique, social et environnemental, les clercs de notaire et la Banque de France.
On voit bien que tout cela n’a aucune cohérence. C’est pourquoi, de manière générale et parce que nous défendons ces régimes spéciaux historiques, nous souhaitons la suppression d’une telle disposition.
M. le président. La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy.
M. Christian Redon-Sarrazy. Cet amendement vise à supprimer les alinéas qui remettent en question le régime des clercs et des employés de notariat. En effet, on parle de « clercs de notaire » par simplification, mais il y a aussi les employés de notariat, dont certains – je vous le rappelle – commencent leur carrière au Smic ou à peine.
Ce régime spécial de sécurité sociale, qui a été créé de haute lutte en 1937, est parfaitement géré. Il a strictement respecté les obligations diverses et variées qui ont pu lui être imposées au cours des réformes antérieures successives. Il est équilibré et juste pour tous les salariés du notariat.
Cet équilibre a été obtenu par des efforts dont on ferait bien de s’inspirer, notamment en matière de ressources mobilisables pour le système de retraite : pas de plafond pour le calcul des cotisations ; prise en compte de la totalité des salaires et des primes dans l’assiette des cotisations. Toutefois, il existe bien d’autres pistes encore pour améliorer les recettes du régime de retraite, comme l’égalité salariale ou l’emploi des seniors. Nous aurons sans doute l’occasion d’en reparler dans la suite des débats.
M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour présenter l’amendement n° 669.
Mme Annie Le Houerou. Par cet amendement, nous souhaitons préserver le régime spécial de retraite des clercs et employés de notaire.
Ce régime compte 76 000 clercs et employés de notaire et 80 000 retraités. Il est donc équilibré.
Instauré en 1937, le régime de sécurité sociale du secteur notarial a pour spécificité d’être doté de l’autonomie financière, d’être multibranches – maladie, retraite et recouvrement – et de servir une action sociale pour les personnes en situation de fragilité.
Cette caisse est un régime excédentaire pérenne, financé par les cotisations supérieures des employés et abondé par la contribution de 4 % des employeurs, qui n’accorde aucun avantage au niveau de l’âge de départ à la retraite. Ce régime est donc parfaitement autonome et très bien géré.
La caisse est excédentaire depuis plusieurs années, car les actifs, clercs et salariés de notaires, cotisent à taux plein, tout comme les retraités polypensionnés et les retraités ne bénéficiant pas d’une retraite complète.
Le présent amendement tend à revenir sur la suppression de ce régime spécial, car celle-ci ne ferait que renforcer les difficultés de recrutement que rencontre la profession. Il s’agit d’une mesure injustifiée et néfaste pour son attractivité. Une étude de l’observatoire prospectif des métiers et des qualifications des collaborateurs du notariat indique qu’il manquerait 3 000 à 5 000 salariés dans le secteur.
Cette réforme risque en outre de pénaliser davantage les femmes, qui représentent plus de 88 % des collaboratrices de la profession. Mais nous ne sommes pas dupes : vous dressez les Français les uns contre les autres ! C’est pourquoi nous serons présents ici, au Sénat, le 7 mars prochain, pour nous y opposer et soutenir ceux et celles, nombreux, qui seront dans la rue.
Au vu des nombreuses sollicitations…
M. le président. Il faut conclure !
Mme Annie Le Houerou. … des clercs et employés de notaires, qui nous ont longuement présenté leur régime spécial, je pense qu’ils seront eux aussi très nombreux dans la rue.
M. le président. La parole est à Mme Florence Blatrix Contat, pour présenter l’amendement n° 698.
Mme Florence Blatrix Contat. L’article 1er, que nous examinons depuis ce matin, prévoit de supprimer certains régimes spéciaux.
Et, depuis ce matin, nous défendons ces régimes, car ils ont leur utilité, et ils tirent souvent leur légitimité de l’existence de sujétions ou d’une histoire particulière.
Mon amendement vise à empêcher la suppression du régime spécial de retraite des collaborateurs de notaires, catégorie qui englobe notamment les clercs, mais aussi l’ensemble des employés.
Le régime est paritaire, dans la mesure où il a fait l’objet d’une négociation entre salariés et employeurs. Or les employeurs, les notaires eux-mêmes, en souhaitent le maintien. C’est un point important.
Ce régime autonome a été créé en 1937, en même temps qu’a été mis en place l’ensemble de la protection sociale des collaborateurs du notariat. Le secteur dans son ensemble y est donc très attaché.
La suppression de ce régime aurait pour conséquence une importante baisse du montant des pensions, vraisemblablement de l’ordre de 25 %. Sans compter que ces collaborateurs devront subir un report de l’âge de départ à la retraite de 62 ans à 64 ans, ce qui détériorera encore davantage les conditions de travail au sein des études.
La réforme pénalisera les femmes, qui sont très majoritaires – près de 90 % – dans les études.
Une telle régression sociale est d’autant moins justifiée que le régime n’est pas déficitaire, ne bénéficie d’aucune subvention d’équilibre et dispose de réserves s’élevant à 800 millions d’euros.
La profession rencontre des difficultés de recrutement : ne supprimons pas son régime spécial !
M. le président. L’amendement n° 729 n’est pas soutenu.
La parole est à M. Olivier Jacquin, pour présenter l’amendement n° 811.
M. Olivier Jacquin. Autant je me sentais qualifié tout à l’heure pour évoquer le régime spécial de la RATP, voire celui du secteur ferroviaire, autant je vous avoue que je ne connais pas bien celui des notaires et des clercs de notaires ; c’était également le cas pour celui de la Banque de France.
Plutôt que de supprimer de manière démagogique l’ensemble des régimes spéciaux, le Gouvernement serait bien inspiré de retirer sa réforme, d’engager de véritables négociations avec les partenaires sociaux et d’étudier, profession par profession, la possibilité de maintenir intégralement ou en partie certains régimes dits « spéciaux ».
Une bonne réforme des retraites doit conjuguer sauvegarde de la répartition et progrès social : cela ne peut pas être une réforme qui stigmatise certains et monte les Français les uns contre les autres.
M. le président. Les amendements nos 824 et 864 ne sont pas soutenus.
La parole est à M. Victorin Lurel, pour présenter l’amendement n° 899.
M. Victorin Lurel. J’avoue être assez estomaqué par l’obsession de nos collègues : supprimer les dispositifs qui fonctionnent !
Vous proposez à des personnes qui n’ont rien demandé depuis quatre-vingt-six ans de remplacer leur régime actuel, dans lequel le montant des pensions est calculé sur la base du salaire annuel moyen perçu au cours des dix meilleures années de leur carrière – c’était la période de référence en vigueur dans la fonction publique avant la réforme Balladur –, un montant qui peut atteindre jusqu’à 75 % du dernier salaire versé, tout comme dans la fonction publique, par un régime dans lequel le montant des pensions est calculé à partir des vingt-cinq meilleures années, ce qui entraînera leur baisse, et qui suppose un report de l’âge de départ à la retraite de 62 à 64 ans.
Pour parler vulgairement, il faut quand même être un peu gonflé ! (Rires sur les travées du groupe SER.)
Comment voulez-vous qu’une telle réforme soit acceptée ? On tente de dresser un petit groupe d’individus, que vous estimez privilégiés, contre l’ensemble des Français pour susciter je ne sais quelle envie, je ne sais quelle jalousie sociale !
Êtes-vous bien certains que cela vous permettra de séduire les électeurs, alors que vous voyez bien que votre propre base électorale refuse cette réforme ? Car il y a du bon sens dans votre électorat, comme chez tous les Français. Comment pouvez-vous soumettre une telle mesure à la représentation nationale ?
Je voterai avec enthousiasme et allégresse les amendements de suppression.
M. Vincent Éblé. Très bien !
M. le président. L’amendement n° 944 n’est pas soutenu.
La parole est à M. Claude Raynal, pour présenter l’amendement n° 982.
M. Claude Raynal. J’ai peur de ne rien avoir à ajouter aux propos de Victorin Lurel, qui, comme d’habitude, a déjà tout dit sur le sujet. (Sourires.)
Notre collègue a raison. C’est extraordinaire : quand un système fonctionne en France, on se débrouille toujours pour que cela ne dure pas ! On l’a bien vu tout à l’heure avec le régime de retraite de la Banque de France ; c’est le cas maintenant avec celui des clercs et des employés de notaires.
Franchement, ces régimes concernent un public restreint. Y toucher, alors que personne ne s’en soucie, peut être une source de difficultés. Qui plus est, la population visée est essentiellement féminine. Or on a déjà longuement expliqué qu’il y avait un problème de rémunération des femmes dans ce pays.
Au demeurant, les Français ne se font pas une idée précise des avantages de ce régime. On présente toujours les clercs et les employés de notaires comme des privilégiés. Même si je sais bien qu’on ne le dit pas de cette façon-là – ce ne sont pas les termes officiels employés par les membres du Gouvernement –, il y a derrière cette réforme l’idée qu’ils ont des privilèges.
Encore une fois, ce système de retraite est ancien. Il existait bien avant la mise en place du régime général. Il adhère désormais au répertoire de gestion des carrières unique (RGCU), qui fait respecter les bornes fixées par la loi en termes d’âge légal de départ à la retraite, ainsi que les 167 trimestres de cotisation nécessaires pour obtenir une retraite à taux plein.
Je précise par ailleurs que ce régime spécial est le fruit d’un accord entre les clercs, les employés de notaires et les notaires eux-mêmes.
Enfin, je rappelle que ces professions rencontrent actuellement des difficultés pour recruter.
On invoque toujours le principe d’exemplarité, mais, en l’espèce, il y a des gens qui vont payer cher cette réforme, sans même savoir pourquoi on la leur impose, et nous ne le savons pas non plus !
M. le président. Les amendements nos 1011 et 1031 ne sont pas soutenus.
La parole est à M. Jean-Michel Houllegatte, pour présenter l’amendement n° 1063.
M. Jean-Michel Houllegatte. Les clercs de notaires sont-ils des nantis ?
Chacun d’entre nous a déjà fréquenté à un moment donné de sa vie une étude notariale et a été en contact direct avec des clercs de notaires ou des collaborateurs d’étude.
En fin de compte, ces clercs sont les « petites mains »,…
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Un peu de respect !
M. Jean-Michel Houllegatte. … les rouages essentiels de la chaîne notariale.
Ils s’occupent en effet de la préparation et de la rédaction des actes de l’étude, des transactions immobilières, des successions et des donations. Surtout – et c’est peut-être le plus important –, ils vérifient l’authenticité des documents, des titres de propriété ou l’exactitude des inventaires. Ils transmettent, classent et répertorient tous les actes notariaux.
Leur travail est assez stressant, dans la mesure où – on le sait très bien – les procédures notariales se sont considérablement complexifiées depuis quelques années.
En outre, la dématérialisation, même si elle offre un réel confort aux signataires, est une source d’anxiété, d’angoisse pour ces clercs de notaire, qui sont chargés, souvent dans un domaine de compétence qui n’est pas le leur, de garantir la bonne transmission des actes notariés, ces derniers étant désormais complètement décentralisés ; je l’ai personnellement vécu.
Ce ne sont pas des nantis : les clercs de notaires gagnent en moyenne entre 2 200 euros et 2 300 euros. La réforme que vous proposez entraînera une baisse du taux de remplacement de 25 %. Il ne faudrait pas – nous l’avons évoqué tout à l’heure à propos de la Banque de France – déstabiliser une profession qui joue actuellement un rôle essentiel dans la rédaction des actes administratifs.
M. le président. L’amendement n° 1078 n’est pas soutenu.
La parole est à M. Vincent Éblé, pour présenter l’amendement n° 1099.
M. Vincent Éblé. Nous abordons désormais la question du régime de retraite des clercs de notaires.
Vous en conviendrez, ce n’est pas un sujet pour Victor Hugo ; ce serait plutôt pour Honoré de Balzac ! (Sourires.) Cela étant, ce dernier n’a jamais été un élu, autant que je sache, de notre assemblée, et, comme il est mort en 1850, s’il avait dû siéger, il l’aurait fait à la Chambre des pairs.
Quoi qu’il en soit, la question du régime spécial des clercs peut paraître secondaire, mais, comme viennent de le dire nos collègues, il n’en est rien. Cette profession est tout à fait respectable,…
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Comme toutes les professions !
M. Vincent Éblé. … éminemment utile au fonctionnement administratif de notre société.
Si des circonstances particulières ont abouti, voilà fort longtemps, à la création d’un système de retraite qui ne pèse pas sur les comptes publics, du moins, pas sur ceux de l’État, et qui s’autofinance, je ne vois pas bien les raisons pour lesquelles on le remettrait en cause et on en perturberait le fonctionnement. Pourquoi modifier ce qui fonctionne correctement ?
Je serais d’avis de ne rien changer à ce régime, qui, encore une fois, est très utile et permet d’attirer l’attention sur une profession particulière indispensable à notre fonctionnement administratif.
M. le président. La parole est à Mme Monique Lubin, pour présenter l’amendement n° 1153 rectifié bis.
Mme Monique Lubin. De même que pour les personnels de la Banque de France, je me demande ce que les clercs de notaires ont bien pu faire pour mériter subitement un tel sort ?
Cela fait très certainement un moment qu’ils entendent parler de ce projet de réforme des retraites du Gouvernement, mais je ne pense pas qu’ils s’attendaient à faire partie de la liste des « récipiendaires », si je puis le dire ainsi.
Comme l’a dit Marie-Noëlle Lienemann, tout cela ne sert peut-être qu’à justifier la fin du régime spécial des agents de la RATP et de l’industrie gazière. Finalement, on intègre dans la réforme deux régimes de retraite qui concernent très peu d’individus et qui sont parfaitement autonomes, afin, en quelque sorte, d’emballer le tout et de faire passer la pilule plus facilement…
Je me permettrai une autre remarque, que j’ai déjà formulée à propos de la RATP.
Imaginez-vous ce que donnera la cohabitation, dans une étude notariale – je ne sais pas comment cela se passe dans les grandes villes, mais, dans les petites communes, lorsqu’une étude regroupe une dizaine de salariés, c’est vraiment un maximum –, de certains salariés qui bénéficieront du régime spécial actuel, quand les autres, parce qu’ils auront été recrutés deux ans plus tard, dépendront du régime général ! Imaginez-vous ces personnes se côtoyer pendant trente ans, alors que leur avenir et leur retraite différeront totalement. Tout cela ne me paraît pas optimal en termes de gestion du personnel.
Encore une fois, la suppression de ce régime sert de prétexte, et c’est injuste. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. L’amendement n° 1208 n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Victoire Jasmin, pour présenter l’amendement n° 1248.
Mme Victoire Jasmin. Cet amendement a pour objet de maintenir le régime spécial des clercs de notaires. Si la réforme proposée par le Gouvernement et la droite est adoptée, elle pénalisera très fortement les femmes, qui représentent 88 % des effectifs de cette branche. Celles-ci devront travailler plus longtemps, alors que le régime actuel n’est pas déficitaire : il ne perçoit aucune subvention d’équilibre de la part du régime général de la sécurité sociale ou même de l’État. J’en propose le maintien pour plusieurs raisons.
Tout d’abord, il est dans l’intérêt des salariés concernés, que nous devons défendre, de le préserver. Les clercs de notaires eux-mêmes nous le demandent. Vous avez sans doute tous reçu, mes chers collègues, leurs différents courriers, ainsi que les courriers que nous ont adressés les notaires eux-mêmes.
Ensuite, ce maintien est nécessaire si l’on veut conserver l’attractivité du métier, protéger les salariés et écouter les partenaires sociaux.
Enfin, le maintien du régime se justifie par la nécessaire gestion prévisionnelle des emplois et des compétences. En outre-mer, et particulièrement en Guadeloupe, les notaires font déjà face à de grosses difficultés pour résoudre les problèmes d’indivision successorale.
Je crois que nous devons tout mettre en œuvre ici, en tant qu’élus représentant les territoires, pour aider ces professionnels à obtenir ce qui leur est dû, mais aussi pour faire en sorte que ce secteur n’ait aucune pénurie à déplorer.
M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour présenter l’amendement n° 1271.
M. Franck Montaugé. Monsieur le ministre, votre obsession de souhaiter la suppression des régimes spéciaux vous conduit à prendre des mesures vexatoires, qui vont bien au-delà de leur dimension politique initiale.
J’ai été particulièrement touché par les nombreux courriels envoyés par des clercs de notaires, souvent des femmes, qui ne comprennent pas cette stigmatisation et vivent mal le traitement que vous leur réservez.
Les considérations budgétaires ne peuvent pas à elles seules expliquer la suppression du régime des employés et des clercs de notaires. Pour preuve, celui-ci est excédentaire et n’a jamais été abondé par des subventions d’équilibre depuis sa création en 1937. Bien au contraire, il a largement participé à la solidarité nationale en se faisant le vecteur de diverses compensations. Votre idéologie budgétaire tient donc là son antithèse.
Mettre fin à ce régime financièrement autonome serait parfaitement injuste à l’égard de celles et ceux qui l’ont alimenté. Un régime qui s’autofinance est soutenable grâce aux cotisations de ses affiliés.
Votre réforme induira une profession à deux vitesses, significativement différenciée : il y aura à la fois ceux qui demeureront sous l’empire de l’ancien régime et ceux qui seront affiliés au régime général, parfois au sein d’une même étude !
Comble de l’injustice, ce régime profite aujourd’hui pour une large part à des femmes, plus exposées que les hommes aux aléas professionnels et à ceux de la vie familiale. Elles représentent plus de 80 % des employés du notariat.
Au lieu de protéger celles qui font vivre le secteur et doivent souvent s’investir dans le même temps dans leur vie familiale, votre réforme leur fera subir son injustice. Vous les plongez dans la difficulté : c’est de la pure régression sociale ! Retirez s’il vous plaît cette mesure injuste et inéquitable ! (Applaudissements sur des travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour présenter l’amendement n° 1317.
Mme Angèle Préville. Voilà donc les clercs de notaires visés à leur tour ! Je croyais avoir compris que le rétablissement d’un certain équilibre des comptes sociaux était l’un des fondements de la réforme. Peut-être est-ce finalement une simple idéologie de façade, qui tombe dès lors que l’on creuse un peu le sujet.
Vous faites preuve tout du moins d’une certaine désinvolture coupable, qui est tout bonnement incompréhensible et brouille le message que vous adressez aux Français. Ces derniers ne sont plus dupes.
Votre réforme a-t-elle pour objet de remettre en cause ce qui fonctionne ?
Comme l’a rappelé ma collègue Corinne Féret, la profession de clerc de notaire est féminisée à près de 90 %. La suppression de ce régime de retraite serait donc un très mauvais coup porté à la retraite des femmes. Ce régime est pourtant autosuffisant et ne pose aucune difficulté.
Mais sûrement s’agit-il de donner des gages. À qui ? Pourquoi ? Nul ne le sait. Les clercs de notaires sont en tout cas des boucs émissaires, sacrifiés sur l’autel de la réforme, des victimes expiatoires en quelque sorte.
M. le président. Les amendements nos 1341, 1374, 1407, 1437, 1505, 1544 et 1593 ne sont pas soutenus.
La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour présenter l’amendement n° 1623.
Mme Émilienne Poumirol. Le Gouvernement a choisi, sans s’appuyer sur des critères tangibles, les caisses de retraite qu’il entendait inclure ou non dans sa réforme.
La caisse de retraite et de prévoyance des clercs et employés de notaires (CRPCEN) est un exemple de votre volonté d’agir à votre aise, monsieur le ministre : le fait du prince, sans doute !
En effet, cette caisse est autonome. Les actifs du secteur cotisent pour ceux qui sont partis à la retraite. Ainsi, les clercs et les employés de notaires ne veulent ni de votre réforme ni de l’argent public.
Ces professionnels sont contre votre réforme, parce qu’elle est injuste et inutile. En cela, ils pensent comme les 70 % de nos concitoyens qui s’opposent à votre projet.
Cette caisse, qui a été créée huit ans avant la sécurité sociale, n’avait aucune raison d’adhérer au régime général à la Libération. Pour autant, son autonomie n’a pas à être remise en cause aujourd’hui.
Grâce à une bonne gestion, les clercs et employés de notaires ont créé un système excédentaire. Il serait donc profondément injuste de supprimer ce régime.
À plusieurs reprises, les clercs ont prouvé leur capacité à se réformer. Ainsi, ils paient aujourd’hui davantage de cotisations que les autres et n’ont pas défini de plafond sur leurs revenus. Quant aux notaires, ils doivent payer une cotisation de 4 % sur leurs honoraires et émoluments.
Dans ces conditions, quelles sont les raisons qui ont poussé le Gouvernement à faire un tel choix ? Comment justifier l’introduction dans le régime général d’un système qui fonctionne aussi bien ? Peut-être y a-t-il une raison cachée, comme l’ont dit tout à l’heure mes collègues… Peut-être cette fin des régimes spéciaux sert-elle à noyer le poisson, en quelque sorte, pour que l’on oublie la réforme des régimes de la RATP et des IEG.
Votre réforme, si elle aboutit, sera très injuste. Malgré la bonne gestion financière de la caisse, il faut s’attendre à une baisse de 25 % des pensions et à deux ans de travail supplémentaires : c’est inacceptable !
Enfin, cette profession est majoritairement – 88 % – composée de femmes. Mon amendement se justifie donc d’autant plus que l’on sait que votre réforme…
M. le président. Il faut conclure.
Mme Émilienne Poumirol. … les pénalisera davantage.
M. le président. L’amendement n° 1653 n’est pas soutenu.
La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour présenter l’amendement n° 1694.
M. Jean-Yves Leconte. Notre collègue Jean-Michel Houllegatte a très bien expliqué tout à l’heure combien cette profession était indispensable à notre pays compte tenu du rôle important qu’elle joue dans l’élaboration des actes administratifs.
Il est assez surprenant de vous entendre dire qu’il faudrait remplacer un régime spécial qui fonctionne, notamment parce que les actifs cotisent davantage, par un système dont vous dites vous-même – je me souviens de l’objet de l’amendement retiré par Valérie Boyer hier – qu’il ne fonctionnera pas et que son financement ne sera pas garanti même après l’entrée en vigueur de la réforme.
Comment voulez-vous que les Français vous fassent confiance si vous proposez de « casser » un système qui fonctionne et de le remplacer par un dispositif qui, de votre propre aveu, n’est pas viable, car son financement ne sera de toute façon pas assuré ?
Nous sommes favorables au maintien des régimes qui fonctionnent. Nous sommes des réformistes : si certaines choses doivent évoluer, nous soutiendrons les réformes. Mais elles doivent être mises en œuvre de manière progressive, en tenant compte du fait que les personnes doivent pouvoir changer de système. Il est en revanche impensable de reconstruire un régime sur la base d’un dispositif que l’on critique soi-même et dans lequel on n’a pas confiance.
Pour les clercs de notaires, le passage d’un système où l’on prend en compte le salaire annuel moyen des dix meilleures années à un mode de calcul fondé sur les vingt-cinq meilleures années est particulièrement préoccupant, surtout quand on sait que cette profession est majoritairement composée de femmes. Rendez-vous compte des conséquences que cette réforme aura pour ces dernières ; je pense notamment aux carrières hachées.
M. le président. Veuillez conclure !
M. Jean-Yves Leconte. Pourquoi persistez-vous à mener des actions qui entament la confiance des Français dans l’avenir ?
M. le président. Les amendements nos 1750 et 1792 ne sont pas soutenus.
La parole est à M. Patrick Kanner, pour présenter l’amendement n° 1820.
M. Patrick Kanner. Mes chers collègues, vous connaissez certainement l’adage : Errare humanum est, perseverare diabolicum…
On ne comprend pas, monsieur le ministre, votre entêtement à liquider, à supprimer un régime qui fonctionne correctement. Je joins ma voix à celle de tous nos collègues qui se sont exprimés jusqu’ici pour dénoncer cette mauvaise manière, d’autant que ces mesures touchent une minorité de nos concitoyens.
Le régime de retraite des clercs de notaires se conforme aux règles du régime général : l’âge de départ à la retraite est fixé à 62 ans, et il faut 167 trimestres de cotisation pour une retraite complète.
De plus, ce régime, qui est excédentaire, n’a jamais eu besoin, depuis sa création en 1937, de subventions publiques. Ce ne sera plus le cas à terme si vous le faites disparaître.
Une fois de plus, vous proposez une réforme qui est censée rééquilibrer – nous reviendrons sur ce point le moment venu – notre système de retraite, mais qui, en définitive, le déstabilise et, manifestement, le menace.
Maintenons l’ensemble de ces régimes spéciaux, autofinancés, d’autant plus que leur suppression serait plus néfaste qu’autre chose pour notre système de retraite par répartition.
M. le président. Les amendements nos 1848, 1993 et 2072 ne sont pas soutenus.
La parole est à Mme Frédérique Espagnac, pour présenter l’amendement n° 2260.
Mme Frédérique Espagnac. Le régime de retraite des clercs de notaires n’est pas déficitaire et ne bénéficie d’aucune subvention d’équilibre provenant soit du régime général de la sécurité sociale soit du budget de l’État.
Repousser l’âge de départ de la retraite de 62 ans à 64 ans n’améliorera pas les conditions de travail au sein des études et pénalisera les femmes, qui représentent 88 % des effectifs. Les femmes devront travailler plus longtemps, plus durement, sans disposer d’une meilleure retraite, car tous les scénarios démontrent qu’elles seront les principales perdantes de cette réforme.
Je voterai donc contre la suppression de ce régime.
M. le président. L’amendement n° 2286 n’est pas soutenu.
Les quatre amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 1946 rectifié ter est présenté par M. E. Blanc, Mme Goy-Chavent, MM. Mandelli et Saury, Mmes V. Boyer et Belrhiti, MM. Genet, Pellevat, Frassa, Bascher, Houpert, Segouin et Sautarel, Mme Estrosi Sassone, MM. D. Laurent, Tabarot, Rojouan et Piednoir et Mme Bonfanti-Dossat.
L’amendement n° 2224 rectifié est présenté par MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mmes M. Carrère et N. Delattre, MM. Gold, Guérini et Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux.
L’amendement n° 2351 est présenté par MM. Canévet, Duffourg, Prince et Levi, Mme Saint-Pé, M. Détraigne, Mme de La Provôté, M. Le Nay et Mmes Morin-Desailly et Devésa.
L’amendement n° 3920 rectifié est présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Alinéas 5 à 8
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Étienne Blanc, pour présenter l’amendement n° 1946 rectifié ter.
M. Étienne Blanc. Par cohérence, et dans la droite ligne de ce que j’indiquais tout à l’heure à propos du régime de retraite de la Banque de France, permettez-moi de regretter de nouveau que le Sénat ait adopté l’article liminaire sans le modifier. Ainsi, le Sénat a refusé d’ouvrir la porte à un système de retraite par capitalisation, privant la France d’un dispositif efficace, qui contribue à la fois à favoriser le dynamisme économique et à garantir un niveau de retraite convenable.
J’ai défendu ce système de retraite par capitalisation pour la Banque de France, et la cohérence veut que je le fasse aussi pour les notaires.
Il s’agit ici d’un régime spécial qui ne coûte rien à l’État, qui est efficace, qui permet de payer les retraites, d’apporter des réponses en termes de prestations maladie et de recouvrement des cotisations. Le régime fonctionne efficacement.
Permettez-moi d’ajouter un mot à propos de son financement. On a laissé entendre tout à l’heure qu’il serait critiquable, parce qu’il reposerait sur une sorte de taxe parafiscale.
Mais de quoi parlons-nous ? Rien n’est prélevé sur les droits que perçoivent les notaires pour le compte de la puissance publique. La cotisation de 4 % ne porte que sur les émoluments, c’est-à-dire tout ce qui est tarifé, et les honoraires, c’est-à-dire tout ce qui ne l’est pas, mais qui est tout de même plafonné pour éviter les excès. Ce prélèvement de 4 % n’est donc pas une taxe parafiscale.
D’ailleurs, je m’interroge : de quel droit vous permettez-vous d’y toucher ? Je ne sais pas si l’on ne devrait pas se pencher sur la conformité d’une telle mesure à la Constitution.
En résumé, le régime de retraite des clercs de notaire est efficace, ne coûte rien à l’État, fonctionne parfaitement bien, et n’est pas financé au moyen d’une taxe parafiscale : il faut le conserver !
M. le président. La parole est à M. Stéphane Artano, pour présenter l’amendement n° 2224 rectifié.
M. Stéphane Artano. Cet amendement est défendu.
M. le président. La parole est à M. Michel Canévet, pour présenter l’amendement n° 2351.
M. Michel Canévet. Comme mes collègues cosignataires de cet amendement, j’ai été sensibilisé par les clercs et employés de notaires de nos départements au bon fonctionnement de leurs caisses de retraite et de prévoyance. Nous avons estimé qu’il serait intéressant d’obtenir des éclaircissements de la part de la commission et du Gouvernement sur le devenir de ces dernières.
M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour présenter l’amendement n° 3920 rectifié.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Par cet amendement, nous proposons de maintenir le régime spécial de retraite des clercs et employés de notaires.
N’oublions pas que ce régime a été créé pour répondre aux spécificités du secteur et garantir la protection sociale de ses salariés.
Gardons en tête que le maintien de ce régime spécial est nécessaire, car les clercs et employés de notaires sont confrontés à des conditions de travail particulières : horaires atypiques, rythme de travail soutenu, en plus de l’exigence de qualifications élevées.
Ils doivent par ailleurs respecter des obligations de discrétion et de confidentialité qui tiennent à la nature de leur activité et qui sont primordiales – c’est indéniable –, mais qui font évidemment peser une lourde pression sur ces travailleurs.
Or la disparition de ce régime spécial serait préjudiciable aux employés du secteur, notamment en comparaison de ceux des autres secteurs, ce qui pourrait compromettre leur niveau de protection sociale.
Pour la même raison, les employeurs pourraient rencontrer des difficultés à l’avenir pour recruter et fidéliser un personnel qualifié, ce qui pourrait avoir une incidence sur la qualité du service rendu aux usagers.
C’est pourquoi nous sommes favorables au maintien de ce régime spécial. Avec cet amendement, nous proposons de préserver les droits et la protection sociale des clercs et des employés de notaires et, par la même occasion, la qualité du service rendu aux usagers de ce secteur professionnel.
Mes chers collègues, cessez de toucher à ce qui fonctionne ! Ressaisissez-vous, il est encore temps de réfléchir et de revenir en arrière sur cette réforme injustifiée.
Pour terminer, je suis également convaincue que la réforme des régimes de retraite de la Banque de France et des clercs de notaire – ce sont eux qui paieront les pots cassés demain – est un prétexte pour « casser » le régime spécial de la RATP.
M. le président. L’amendement n° 3946 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli, est ainsi libellé :
Alinéa 13
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Je partage l’ensemble des propos qui viennent d’être tenus sur les clercs de notaire. Eux aussi, sous couvert d’égalité, voient tomber leur régime.
Nous l’avons dit, l’intégralité du texte s’inscrit dans une telle logique. Vous prenez la question à l’envers : plutôt que d’accorder des droits plus avantageux et, finalement, plus en phase avec la société à l’ensemble des salariés, vous préférez pénaliser celles et ceux qui bénéficient de régimes plus protecteurs, régimes que nous qualifions pour notre part de pionniers.
Il est vrai que certaines professions sont moins physiques que d’autres et se résument essentiellement à un travail de bureau.
Cela n’empêche pas la pénibilité, la souffrance au travail, l’usure et les difficultés. Longues études ou pas, longues carrières ou pas, tout le monde devra travailler plus longtemps.
En fait, vous refusez absolument de voir cette logique selon laquelle il n’est pas question, pour nous, de privilégier l’argent et le système libéral par rapport à la vie et à l’humain.
C’est pourquoi nous présentons cet amendement de suppression.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Les premiers amendements évoquaient la fermeture du régime spécial des notaires et clercs de notaire. Je pense qu’il s’agit d’une erreur. Comme le disait Patrick Kanner, errare humanum est !
Les amendements suivants, dont ceux de MM. Étienne Blanc, Stéphane Artano, Michel Canévet et Mme Éliane Assassi, avaient le bon objet.
M. Michel Canévet. Merci !
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je souhaite apporter quelques éléments un peu différents des propos qui ont été tenus. Je précise que l’ensemble des clercs et employés de notaires dont la durée de travail hebdomadaire est de dix-sept heures trente maximum sont déjà au régime de base.
En réalité, dans un même cabinet notarial, les salariés peuvent relever de deux régimes différents. Il n’est pas question de considérer les uns comme des nantis par rapport aux autres, comme de petites mains ou je ne sais quoi d’autre, ainsi que j’ai pu l’entendre.
Ce sont simplement des professionnels qui remplissent dans les offices notariaux des tâches importantes. À ce titre, nous devons bien les considérer.
La mesure que nous vous proposons concerne les personnes qui seront employées à partir du 1er septembre 2023. Toutes celles qui vous ont écrit – il est important de le rappeler – seront maintenues dans leur régime actuel.
Si nous nous posons la question de la fermeture de ce régime spécial, c’est aussi, là encore, en raison d’un déséquilibre entre le nombre de cotisants et le nombre de pensionnés. On recense en effet environ 63 000 cotisants pour 71 000 pensionnés de droit direct et plus de 7 600 de droit dérivé.
Sur un plan plus technique, on peut parler d’un régime intégré, car il inclut à la fois la retraite de base, la retraite complémentaire et la retraite additionnelle, ce qui correspond à un régime supplémentaire facultatif, comme dans les entreprises du privé.
La commission émet un avis défavorable sur l’ensemble de ces amendements, qui sont contraires à nos propositions.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre. Madame la rapporteure générale a dit l’essentiel.
Je souligne que le régime des clercs de notaire affiche effectivement un déséquilibre démographique, le nombre de cotisants étant inférieur au nombre de bénéficiaires. C’est évidemment de nature à poser un problème à terme.
Par ailleurs, l’une des motivations principales de la fermeture des régimes spéciaux en flux est le rétablissement de l’égalité.
À cet égard, je suis assez frappé de voir combien, au travers de leurs amendements, certains défendent finalement une situation particulière. Sous prétexte que le système fonctionne, il faudrait ne rien changer, au risque de faire perdurer des situations qui relèvent parfois – je le dis de la manière la plus prudente possible – d’une forme de situation de rente au regard de l’égalité recherchée. (Protestations sur les travées des groupes SER et CRCE. – M. Sébastien Meurant proteste également.)
L’égalité se traduit aussi par l’application de règles identiques en matière de cotisation, d’affiliation et donc de niveau de la pension, pour des métiers comparables qui, lorsqu’ils sont exposés à l’usure, feront l’objet de la prévention visée à l’article 9.
Par ailleurs, je confirme les propos de Mme la rapporteure générale : aujourd’hui, dans les études, il y a déjà cohabitation entre les salariés bénéficiant du régime spécial et les autres. Tous les salariés qui travaillent à mi-temps ou moins relèvent du régime général.
En outre, l’ensemble des salariés des études qui sont situées dans les départements d’outre-mer sont couverts non pas par le régime spécial des clercs et employés de notaire, mais par le régime général, quelle que soit leur quotité de temps de travail.
C’est donc une véritable marche vers l’égalité que nous proposons au travers de cette disposition.
Enfin, le régime des clercs et employés de notaire a une particularité. Au-delà de la description qui en est faite, il peut être qualifié de régime de passage. Statistiquement, très peu de clercs ou d’employés d’étude y restent en réalité durablement.
De ce fait, affilier tout le monde au régime général permet de garantir une plus grande lisibilité à l’échelle d’une carrière.
Pour conclure – cela a été évoqué de manière indirecte –, les réserves du régime, qui sont maintenues, et la clause du grand-père doivent rassurer sur la capacité du régime à faire face aux engagements en matière de gestion et de paiement des pensions des personnes qui y resteront affiliées après le 1er septembre 2023.
Pour toutes ces raisons, l’avis du Gouvernement est défavorable sur ces amendements.
M. le président. La parole est à M. Daniel Breuiller, pour explication de vote.
M. Daniel Breuiller. « Le rat est un des éléments de l’Opéra, car il est à la première danseuse ce que le petit clerc est au notaire. Le rat, c’est l’espérance. » (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains.) Ces mots de Camille Laurens ouvriront mon propos.
Tout d’abord, monsieur le ministre, je vous remercie de ne pas avoir fermé le régime spécial de l’Opéra de Paris, qui bénéficie aujourd’hui à 186 ayants droit, malgré votre souci d’égalité, qui vous conduit à ratiboiser tout le monde.
Le texte dont nous débattons depuis deux jours aborde les enjeux financiers liés à la préservation de la retraite par répartition. L’article 1er s’attaque aux régimes spéciaux, en l’occurrence à celui des clercs de notaire parmi cinq autres.
Cet article fait-il partie de la corbeille de mariage entre la majorité sénatoriale et le Gouvernement ? Était-il exigé pour le mariage ou s’agit-il d’une décision solitaire du Gouvernement, qui aurait été ensuite désapprouvée – j’ai entendu des remarques en ce sens – du côté droit de l’hémicycle ?
Je trouve qu’il n’est pas tout à fait correct de lancer ainsi à la vindicte populaire les clercs de notaire, une profession peu rémunérée et massivement féminisée.
Enfin, je m’interroge toujours sur le texte choisi comme véhicule législatif, à savoir un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale.
Je continue de ne pas comprendre pourquoi nous débattons de mesures qui n’ont pas d’impact financier sur le bilan rectificatif de la sécurité sociale. J’aimerais savoir ce que dit la note d’analyse du Conseil d’État sur le sujet… (Rires.)
M. le président. La parole est à M. Jacques Fernique, pour explication de vote.
M. Jacques Fernique. Monsieur le ministre, je crains que, par légèreté ou, plus exactement, par souci de remplir suffisamment une charrette de régimes spéciaux condamnés, afin que les agents de la RATP, les gaziers et les électriciens aient de la compagnie, vous ne commettiez un acte irréfléchi, inutile et maladroit, en d’autres termes un « pas de clerc » ! (Sourires.)
J’espère que le Sénat vous empêchera de faire ce pas. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. le président. La parole est à M. Sébastien Meurant, pour explication de vote.
M. Sébastien Meurant. Je vous avoue que j’éprouve quelques difficultés à me positionner.
Il me semblait que la liberté était un principe défendu par la droite – et un peu au-delà – comme un principe d’organisation de la vie sociale.
Nous nous intéressons aujourd’hui à des systèmes que des organisations ont elles-mêmes mis en place – en 1808, ou peu avant la Deuxième Guerre mondiale… – et qui fonctionnent.
Si notre régime général de retraite fonctionnait, nous n’en serions pas là ! Je ne comprends pas pourquoi il faudrait s’attaquer à ce qui fonctionne.
En recherchant l’égalité, nous risquons de tomber dans l’égalitarisme et le nivellement par le bas. Tellement de choses ne fonctionnent pas en France ! (M. Jacques Fernique applaudit.) Si nous pouvions – Dieu sait si la liste est longue – commencer par nous attaquer à ce qui ne fonctionne pas !
Sur le plan des principes – je m’adresse là à mes amis du côté droit de l’hémicycle –, la liberté est la règle, et l’interdiction l’exception.
Nous répétons à longueur de temps que l’État, la société, les entreprises et les individus sont corsetés par des normes sans cesse plus nombreuses. Il suffit de regarder nos codes, celui du travail par exemple, tous plus épais qu’à l’étranger, pour s’en convaincre. Et nous voudrions encore changer les règles, en l’occurrence celles qui fonctionnent ?
J’avoue mon incompréhension, et je voterai contre la suppression de ces régimes, qui sont bénéficiaires et qui plaisent à la fois aux employeurs et aux salariés !
M. Jacques Fernique. Bravo !
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Je ne reviendrai pas sur l’argument selon lequel ce régime, qui satisfait les salariés comme les notaires, ne coûte rien à l’État.
Monsieur le ministre, vous défendez l’égalité pour la rendre irrecevable pour nos concitoyens. Pour vous, l’égalité, c’est niveler par le bas. Cela n’a jamais été, dans l’histoire républicaine, la conception de l’égalité, qui a toujours été adossée à la notion de progrès pour tous.
Ce qui me frappe par-dessus tout, ce sont les grandes déclarations que vient de faire M. Véran selon lesquelles la réforme des retraites ne ferait pas de perdants.
Mme Monique Lubin. Il n’y aura que des perdants !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Il y aura en effet des perdants et, dans ce cas précis, systématiquement des perdantes, cette profession étant avant tout exercée par des femmes.
Ainsi, en tout cas, les nouvelles embauchées verront le niveau de leur retraite reculer de manière significative.
C’est là qu’intervient la clause du grand-père, ou l’égoïsme organisé : « Vous n’avez rien à dire ; la mesure ne vous concerne pas. Elle concerne vos enfants et vos futurs collègues ; ce n’est pas grave ! Ne pensez qu’à vous ! »
Eh bien non ! Les clercs de notaire, comme les notaires, pensent à l’avenir de leur métier et de leurs salariés.
Franchement, monsieur le ministre, quand on voit les problèmes du pays, l’immense inflation, les graves difficultés de pouvoir d’achat, n’avez-vous vraiment rien d’autre à faire que de vous occuper des clercs de notaire, qui ne posent aucune difficulté à la Nation ?
Je n’ai jamais entendu le matin en prenant mon café des gens me dire : « Madame la sénatrice, quel scandale ces clercs de notaire ! Ils sont en train de nous ruiner ! Quels privilégiés ! »
Franchement, vous accumulez les mauvais coups, métier par métier, là où il n’y a aucune nécessité !
Nous voterons contre la suppression de ce régime. (Applaudissements sur des travées des groupes CRCE, SER et GEST.)
M. Vincent Segouin. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Rachid Temal, pour explication de vote.
M. Rachid Temal. Cette réforme aurait pu être idéologique. Nous aurions alors pu entendre le Gouvernement nous annoncer la fermeture de l’ensemble des régimes spéciaux.
Mais, là, nous nous retrouvons dans une situation assez bizarre. Personnellement, je plains les clercs de notaire : il a fallu choisir des gens pour accompagner les agents de la RATP dans la charrette. J’imagine cette réunion intéressante, à l’Élysée ou à Matignon, au cours de laquelle on s’est demandé, entre autres questions, qui serait placé dans la charrette, qui pourrait servir de camouflage, quelle serait la quantité suffisante… Tout cela n’est pas sérieux !
Par ailleurs, je rebondis sur les explications de Mme la rapporteure générale et de M. le ministre. Très honnêtement, nous parlons de 70 000 personnes, dont le salaire net se situe entre 1 500 euros et 2000 euros et dont le régime de retraite, qui est équilibré, fonctionne parfaitement.
On nous oppose le fait que plusieurs régimes coexistent déjà au sein de la profession. C’est vrai, mais cela ne pose pas de problème !
M. le ministre propose d’aligner par le bas. Nous pensons au contraire aligner par le haut. C’est en cela, monsieur le ministre, que nous ne pouvons pas être d’accord.
Vous nous dites qu’il y a plusieurs caisses. Or n’importe quel citoyen est affilié, au cours de sa vie, à plusieurs caisses. Ce n’est donc pas un problème de caisses. Trouvez-nous des arguments solides !
La véritable question qui vous est posée est : pourquoi les clercs de notaires et pas les autres ?
Pourquoi, en outre, toutes les informations relatives à cette réforme, notamment la note du Conseil d’État, ne sont-elles pas communiquées à la représentation nationale ? Jusqu’à preuve du contraire, le Parlement doit pouvoir disposer de tous les éléments pour légiférer convenablement.
En définitive, cette réforme est bricolée. Les points de vue changent fréquemment et, malheureusement, des gens perdront beaucoup si vos propositions sont adoptées.
Pour toutes ces raisons, je voterai pour ces amendements. (Applaudissements sur des travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à M. Michel Canévet, pour explication de vote.
M. Michel Canévet. Convaincu par les explications de Mme la rapporteure générale et de M. le ministre, que je remercie, je retire mon amendement. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe SER.)
M. le président. L’amendement n° 2351 est retiré.
La parole est à Mme Florence Blatrix Contat, pour explication de vote.
Mme Florence Blatrix Contat. Permettez-moi de revenir sur l’argument de Mme la rapporteure générale selon lequel cohabiteraient, dans les études, des salariés qui sont soumis au régime du CRPCEN et d’autres qui ne le sont pas.
En réalité, le seuil de dix-sept heures trente correspond à moins d’un mi-temps. Ce cas de figure ne concerne donc que très peu de personnes, ou alors de manière temporaire.
Pour l’écrasante majorité des salariés du notariat – ce ne sont pas que des clercs ; il y a parmi eux des collaborateurs de premier niveau, dont les salaires sont très faibles –, renoncer à ce régime représenterait une perte de revenus.
Par ailleurs, j’ai été profondément choquée quand le ministre a parlé de « rente » à propos des travailleurs. Tout de même, où est la rente, quand depuis cinq ans, sous ce quinquennat comme sous le précédent, on n’a jamais aussi peu taxé le capital ? La rente n’est pas du côté des travailleurs ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées des groupes CRCE et GEST.)
M. Rachid Temal. Bravo !
M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.
M. Victorin Lurel. À la différence de mon collègue, je ferai non pas un pas de clerc, mais un pas de sénateur, auquel le président Larcher nous a, savamment et avec beaucoup d’humour, initiés.
J’ignore pour quelle raison mes collègues ont une dent contre les clercs, disons la cléricature, au sens laïque du terme. Pour ma part, je défendrai la cléricature. Ne sommes-nous pas nous-mêmes, disons-le clairement, une forme de cléricature dont on ne touche pas au régime ?
Madame la rapporteure générale nous explique qu’en deçà de dix-sept heures trente de travail hebdomadaire, les clercs de notaire sont affiliés au régime général. Mais c’est déjà le cas pour la fonction publique !
Lorsque vous travaillez moins de vingt-huit heures par semaine, vous êtes affilié non pas à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL), mais à l’institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l’État et des collectivités publiques (Ircantec). Ce n’est donc pas une spécificité de ce régime.
Le ministre nous dit par ailleurs : « Vous comprenez, cela se fait déjà dans les outre-mer ». Pour une fois, les outre-mer sont pionniers…
Non, monsieur le ministre, la loi Macron, c’est 25 % de plus pour les notaires. Une cotisation de 4 % est appliquée au chiffre d’affaires. En quoi cela gêne-t-il ?
Il est vrai que le fondement juridique, voire constitutionnel de tout cela pose question, parce qu’il revient au Parlement de voter les taxes de toute nature. S’agit-il d’une taxe ?
J’ai entendu M. le ministre plaider pour que soient mis à contribution uniquement les usagers et clients, et pas le contribuable. Je ne comprends pas cet acharnement. Nous voterons ces amendements avec allégresse ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées du groupe GEST.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 344 et suivants.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 150 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 340 |
Pour l’adoption | 109 |
Contre | 231 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix les amendements identiques nos 1946 rectifié ter et suivants.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 151 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 340 |
Pour l’adoption | 124 |
Contre | 216 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix l’amendement n° 3946 rectifié.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 152 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 341 |
Pour l’adoption | 106 |
Contre | 235 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Amendements identiques de suppression des alinéas 14 à 16 de l’article
M. le président. Je suis saisi de soixante-treize amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les quarante-huit premiers sont identiques.
L’amendement n° 284 est présenté par M. Féraud.
L’amendement n° 316 est présenté par M. Pla.
L’amendement n° 345 est présenté par Mme Briquet.
L’amendement n° 370 est présenté par Mme Féret.
L’amendement n° 453 est présenté par M. Fichet.
L’amendement n° 508 est présenté par M. Chantrel.
L’amendement n° 522 est présenté par M. Gillé.
L’amendement n° 571 est présenté par Mme de La Gontrie.
L’amendement n° 583 est présenté par M. Redon-Sarrazy.
L’amendement n° 670 est présenté par Mme Le Houerou.
L’amendement n° 699 est présenté par Mme Blatrix Contat.
L’amendement n° 730 est présenté par M. M. Vallet.
L’amendement n° 812 est présenté par M. Jacquin.
L’amendement n° 825 est présenté par M. Lozach.
L’amendement n° 865 est présenté par M. Durain.
L’amendement n° 900 est présenté par M. Lurel.
L’amendement n° 945 est présenté par M. Cardon.
L’amendement n° 983 est présenté par M. Raynal.
L’amendement n° 1013 est présenté par M. Stanzione.
L’amendement n° 1032 est présenté par Mme G. Jourda.
L’amendement n° 1064 est présenté par M. Houllegatte.
L’amendement n° 1079 est présenté par M. Tissot.
L’amendement n° 1100 est présenté par M. Éblé.
L’amendement n° 1154 rectifié bis est présenté par Mme Lubin.
L’amendement n° 1209 est présenté par M. Mérillou.
L’amendement n° 1240 est présenté par Mme Jasmin.
L’amendement n° 1272 est présenté par M. Montaugé.
L’amendement n° 1318 est présenté par Mme Préville.
L’amendement n° 1342 est présenté par M. Marie.
L’amendement n° 1375 est présenté par M. Bourgi.
L’amendement n° 1408 est présenté par M. Sueur.
L’amendement n° 1438 est présenté par M. Kerrouche.
L’amendement n° 1506 est présenté par Mme M. Filleul.
L’amendement n° 1545 est présenté par Mme Monier.
L’amendement n° 1594 est présenté par M. J. Bigot.
L’amendement n° 1624 est présenté par Mme Poumirol.
L’amendement n° 1654 est présenté par Mme Meunier.
L’amendement n° 1664 est présenté par Mme Bonnefoy.
L’amendement n° 1695 est présenté par M. Leconte.
L’amendement n° 1751 est présenté par M. Todeschini.
L’amendement n° 1793 est présenté par M. Jomier.
L’amendement n° 1821 est présenté par M. Kanner.
L’amendement n° 1847 est présenté par M. Assouline.
L’amendement n° 1994 est présenté par Mme Rossignol.
L’amendement n° 2073 est présenté par M. Jeansannetas.
L’amendement n° 2261 est présenté par Mme Espagnac.
L’amendement n° 3197 est présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon.
L’amendement n° 3932 rectifié est présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli.
Ces quarante-huit amendements sont ainsi libellés :
Alinéas 14 à 16
Supprimer ces alinéas.
Les amendements nos 284 et 316 ne sont pas soutenus.
La parole est à Mme Isabelle Briquet, pour présenter l’amendement n° 345.
Mme Isabelle Briquet. Cet amendement vise à ne pas fermer le régime spécial de retraite des industries électriques et gazières.
Intervention après intervention, nous nous évertuons à démontrer l’intérêt plus que douteux de fermer les régimes spéciaux. À ce titre, l’exemple du régime spécial de retraite des industries électriques et gazières est éclairant.
Il est prévu de mettre un terme à ce régime, car il coûterait cher au contribuable. Or ce régime est à l’équilibre, grâce à la contribution tarifaire d’acheminement.
Sa suppression entraînerait l’affiliation de nouveaux salariés au régime général et, partant, de nouvelles dépenses pour le système des retraites. J’ai la faiblesse de croire que l’intérêt d’une telle démarche n’est pas évident.
Sont donc remis en cause les régimes à l’équilibre, qui protègent et sont efficaces.
Étant donné les particularités des missions, stratégiques pour le pays, des agents concernés et de la pénibilité des tâches sur certains postes, il serait logique, voire nécessaire de conserver ce régime particulier.
M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret, pour présenter l’amendement n° 370.
Mme Corinne Féret. Cet amendement tend à supprimer les alinéas 14 à 16, qui visent à fermer le régime spécial de retraite des industries électriques et gazières.
Nous n’avons pas obtenu de réponses à un certain nombre de nos questions. Combien de personnes seraient concernées ? Sont-elles véritablement trop avantagées ?
Dans les industries électriques et gazières, seulement 23 % des agents partent cinq ans avant l’âge légal de départ à la retraite, car ils bénéficient d’une reconnaissance de la pénibilité, qui varie en fonction des métiers : travail de nuit, exposition à des substances dangereuses, etc.
La part de cotisations retraite des agents de ces industries s’élève à 13 % du salaire, contre 10 % pour les salariés du privé.
La fin du régime spécial entraînerait véritablement une perte d’activité, au moment où ce secteur connaît des difficultés de recrutement.
Madame la rapporteure générale, vous avez évoqué l’évolution des métiers et la disparition, pour certains d’entre eux, d’un certain niveau de pénibilité.
Dites-moi si les emplois suivants sont dans ce cas : conducteur de travaux, monteur électricien, monteur de ligne, plombier, menuisier, chauffeur de camion magasinier… Ces emplois sont retenus dans le statut national du personnel des industries électriques et gazières pour relever du régime spécial de retraite.
Ces métiers existent toujours. La pénibilité est toujours là. Comment les agents qui exercent ces fonctions verront-ils la pénibilité de leur travail reconnue demain ? Comment sera-t-elle prise en compte ?
Remettre en cause ce régime spécial est une véritable rupture du contrat social.
M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Fichet, pour présenter l’amendement n° 453.
M. Jean-Luc Fichet. À un moment donné, il faudra bien prendre le temps de nous expliquer pourquoi tel régime spécial doit faire l’objet de modifications et pas tel autre.
Des critères ont sans doute été retenus par des gens très savants sur le sujet… Pour l’heure en tout cas, le grand public ne connaît pas ces critères.
Les régimes spéciaux ont été mis en place au fil du temps, parce que la pénibilité des métiers a été reconnue et avec elle, les conséquences qu’elle pourrait avoir sur la vie ou l’espérance de vie des travailleurs.
Chaque fois qu’une tempête importante frappe le territoire, nous sommes bien contents de rester peu de temps sans électricité ou sans gaz, grâce à l’intervention, jour et nuit et dans des conditions parfois extrêmes, des électriciens et des gaziers.
Lorsque les réparations ne sont pas faites assez vite, nous téléphonons et demandons pourquoi nous sommes restés plus de six heures sans électricité !
Les électriciens et les gaziers sont donc de grands professionnels, qui font un travail difficile. Ils méritent de la considération et non pas une modification à la baisse de leur régime de retraite.
Il est possible que nous n’arrivions pas à vous convaincre. Je crois malheureusement que les événements des prochains jours auront force d’explication rude et vous amèneront à retirer ce projet, qui, somme toute, est très inéquitable.
M. le président. La parole est à M. Yan Chantrel, pour présenter l’amendement n° 508.
M. Yan Chantrel. Monsieur le ministre, vous aimez rappeler que les régimes spéciaux coûtent au contribuable 1,8 milliard d’euros.
J’ai donc fait les comptes : faisons-les ensemble !
La suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune coûte 4 milliards d’euros par an au contribuable. Or cela fait six ans qu’il a été supprimé. Faites les comptes et vous arriverez rapidement au résultat qui correspond au soi-disant déficit que nous sommes censés combler avec cette réforme !
Les superprofits, que vous refusez obstinément de taxer, ce sont cette année 80 milliards d’euros pour le CAC 40 qui échappent au service public.
Les aides publiques aux entreprises atteignent 256 milliards d’euros ; elles sont attribuées sans contrepartie sociale ou environnementale et bénéficient très peu aux TPE-PME.
Enfin, la fortune des quarante-deux milliardaires français se chiffre à 546 milliards d’euros.
Rapportons ces montants à ce qui manque aux régimes spéciaux, qui ont leur histoire, leur légitimité et leur nécessité !
Depuis le début, vous voulez diviser les Français, mais ils comprennent que votre politique est de faire pleuvoir des milliards d’euros de cadeaux fiscaux sur les plus riches et sur les plus grandes entreprises, qui accumulent comme jamais les profits depuis 2017.
Voilà le fond du problème, et vous ne l’abordez jamais ! Vous avez d’ailleurs choisi de passer par un PLFRSS pour user des avantages du 47-1, tandis que, depuis juin dernier, vous multipliez les 49.3.
M. le président. Il faut conclure !
M. Yan Chantrel. En tout cas, nous continuerons inlassablement, aux côtés de nos compatriotes, à lutter contre cette réforme injuste et brutale.
M. le président. L’amendement n° 522 n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour présenter l’amendement n° 571.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. La commission des affaires sociales a auditionné le directeur de la caisse nationale des industries électriques et gazières, M. Nicolas Mitjavile, qui a fait part de plusieurs points d’alerte, pour ne pas dire d’inquiétudes.
Tout d’abord, sur la date de mise en œuvre. Selon lui, cette réforme peut tourner en catastrophe industrielle du fait de l’informatique. Il est tout à fait possible que l’on ne soit pas capable de la mettre en œuvre.
Ensuite, elle sera délicate à appliquer d’un point de vue managérial, car il sera difficile de faire travailler ensemble des personnes qui relèvent de régimes différents.
Enfin, il a attiré l’attention des parlementaires sur la question de l’attractivité des métiers – nous avons déjà évoqué ce sujet, notamment à propos de la RATP.
Attaquer le régime de retraite des IEG, alors que l’on nous expliquait il y a seulement quelques semaines que l’on allait avoir des problèmes d’approvisionnement en énergie, cela relève du génie – visiblement, le Gouvernement n’en manque pas ! (Sourires sur les travées du groupe SER.)
Tout cela me paraît extrêmement périlleux. C’est pour cette raison que, comme les orateurs qui m’ont précédé, je demande la suppression de cette disposition.
M. le président. La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy, pour présenter l’amendement n° 583.
M. Christian Redon-Sarrazy. Nous sommes opposés à la suppression du régime des industries électriques et gazières. Là aussi, comme vient de le faire ma collègue, parlons recrutement, attractivité des métiers et besoins en compétences pour ce secteur dans les années qui viennent.
Notre souveraineté énergétique commence par la souveraineté en compétences. La capacité de ces industries à recruter dépend bien sûr des salaires et des perspectives de carrière, mais n’oubliez pas que les conditions de retraite sont également un élément d’attractivité.
Aussi, je ne comprends pas la volonté de supprimer ce régime, sauf à ce que vous ayez délibérément prévu que seuls des intérimaires ou des détachés assureront demain les missions essentielles de l’acheminement de l’électricité dans notre pays – sécurité de nos installations, service public de dépannage en cas d’intempéries, etc.
Soyons bien conscients que ce secteur est l’une des plus belles conquêtes industrielles du siècle dernier.
Je crois que, au regard de la place de l’énergie dans le quotidien des Français, en particulier dans leur budget, ces besoins en compétences et en personnel méritent une réponse à la hauteur des enjeux. Et il ne me semble pas que la suppression de ce qui est l’une des spécificités du service public en soit une.
M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour présenter l’amendement n° 670.
Mme Annie Le Houerou. L’adoption de cet amendement – je vous invite à le voter largement, mes chers collègues ! –, permettra de préserver le régime spécial de retraite des industries électriques et gazières.
Les régimes spéciaux sont le résultat de longues luttes des travailleurs et des travailleuses pour faire reconnaître la pénibilité de leur métier. Ce ne sont en aucun cas des privilèges ; ce sont des acquis – je dirais même que ce sont des conquis sociaux.
La branche professionnelle des industries électriques et gazières regroupe 139 800 salariés et 160 employeurs. Ce sont les entreprises qui exercent en France des activités de production, de transport, de distribution, de commercialisation et de fourniture d’électricité et de gaz, en particulier EDF et Engie, qui rassemblent 70 % des salariés de la branche.
Ce sont ceux qui sont à pied d’œuvre lorsqu’il y a une tempête ou des inondations, jusqu’à ce que le service public soit rétabli. Cela constitue des contraintes et des astreintes fortes.
Dans ce secteur, les difficultés de recrutement sont nombreuses. Les entreprises doivent former des agents et des ingénieurs, que ce soit dans le nucléaire, l’hydraulique ou les énergies renouvelables. Elles s’efforcent de les garder et de les fidéliser, car ce sont des compétences précieuses.
Cet article s’attaque aux métiers dont la pénibilité est la plus importante. La prise en compte de la pénibilité s’appuie sur un système baptisé service actif.
En 2022, la caisse de retraite des industries électriques et gazières a rapporté 120 millions d’euros de plus que le versement des pensions au régime général. De plus, 1,6 milliard d’euros ont été versés au total entre 2005 et 2020 vers les régimes de retraite ayant moins d’actifs que de retraités, comme celui des agriculteurs ou des artisans.
Ce régime ne coûte donc rien à la collectivité. Le supprimer ne rapportera aucune recette supplémentaire. En revanche, les impacts de cette réforme peuvent être inquiétants pour le secteur : la coexistence de deux régimes différents peut notamment poser des problèmes de gestion.
M. le président. La parole est à Mme Florence Blatrix Contat, pour présenter l’amendement n° 699.
Mme Florence Blatrix Contat. Cet amendement vise à ne pas fermer le régime spécial des industries électriques et gazières.
Ce statut a subi des attaques permanentes et, s’il comporte des avantages, c’est qu’il prévoit aussi beaucoup de servitudes, ainsi qu’un déroulement de carrière très modéré et lissé.
Ce régime spécial est la contrepartie de conditions de travail particulières et d’une forte pénibilité : astreintes, heures passées à genoux devant les coffres électriques, interventions exigeantes physiquement en haut des pylônes à toute heure du jour et de la nuit, etc.
Prendre en compte divers critères de pénibilité et les objectiver, c’est avant tout une mesure de justice sociale. Je le répète, ces régimes spéciaux sont la contrepartie de sujétions particulières.
Cessons de niveler les droits des salariés par le bas, en supprimant les régimes spéciaux. Permettons au contraire que l’ensemble des salariés exposés à la pénibilité puissent partir plus tôt à la retraite.
Par ailleurs, face aux défis énergétiques qui sont devant nous, ces métiers sont essentiels à notre pays, alors même que ces secteurs font déjà face à des difficultés de recrutement. La mise en cause de ce régime spécial de retraite dégradera encore notre capacité à recruter.
M. le président. L’amendement n° 730 n’est pas soutenu.
La parole est à M. Olivier Jacquin, pour présenter l’amendement n° 812.
M. Olivier Jacquin. Monsieur le ministre, je vous avoue que, comme parlementaire, je me sens moins qualifié pour parler du régime spécial de retraite des industries électriques et gazières – EDF, Engie, RTE, GRT gaz, GRDF, Enedis, etc. – que des régimes de la RATP ou de la SNCF.
Pour autant, le Parlement vient d’examiner un texte sur le développement des énergies renouvelables et un autre sur la filière nucléaire.
Nous avons bien vu à cette occasion le fort besoin de recrutement dans les filières énergétiques, alors même que nous devons faire face au dérèglement climatique qui a pour conséquence directe l’augmentation des événements météorologiques ayant un impact toujours plus fort sur les réseaux et que nous faisons face à une crise énergétique majeure du fait de la guerre en Ukraine, nous obligeant à réinterroger notre souveraineté énergétique.
Supprimer brutalement les régimes dits « spéciaux » ne donne absolument aucun signe favorable envers ces secteurs pour des professions souvent très difficiles.
Monsieur le ministre, plutôt que de tout supprimer de manière démagogique, il me semble que vous seriez mieux inspiré de retirer cette réforme, d’ouvrir de véritables négociations avec les partenaires sociaux et d’étudier, profession par profession, l’opportunité de revenir intégralement ou en partie sur certains régimes dits spéciaux.
Une bonne réforme des retraites est une réforme qui allie sauvegarde de la répartition et progrès social ; ce n’est pas une réforme qui stigmatise certains et qui monte les Français les uns contre les autres.
M. le président. Les amendements nos 825 et 865 ne sont pas soutenus.
La parole est à M. Victorin Lurel, pour présenter l’amendement n° 900.
M. Victorin Lurel. Tout d’abord, j’aimerais dire à M. le ministre que l’on ne généralise pas toujours ce qui est positif, en particulier lorsque les outre-mer sont pionnières.
Je pense à l’article 10 de ce texte, qui prévoit de relever à 100 000 euros le seuil de récupération sur succession de l’Aspa, l’allocation de solidarité aux personnes âgées, contre 39 000 euros aujourd’hui, c’est-à-dire le seuil à partir duquel vous commencez à payer une quote-part sur la solidarité nationale qui a été octroyée à votre père ou à votre mère.
Je reviens à cet article. Une discrimination, c’est lorsque l’on traite de manière identique des situations différentes. Là, il s’agit de situations différentes. On a tenté d’instiller depuis longtemps des critères de pénibilité, d’invalidité ou de handicap dans le système de retraite.
Vous avez rogné tout cela, en supprimant quatre critères et en alignant non pas vers le haut, mais vers le bas – je ne dis pas du mal du régime général en disant cela, mais il est évident que, en agissant ainsi, vous appauvrissez les gens.
Pour conclure, je veux revenir sur la notion d’héritage. En ce qui me concerne, je crois aux symboles. Or le régime des IEG est d’une certaine façon l’héritage du Conseil national de la Résistance, dont se réclament beaucoup de gens, y compris à droite – les gaullistes sociaux.
Vous mettez fin à cet héritage prestigieux et, dans le même temps, vous semblez vouloir récupérer le symbole du CNR, en reprenant son acronyme et en créant un Conseil national de la refondation – en matière de symbole, on ne peut faire pire ! (Sourires sur les travées des groupes SER et CRCE.)
M. le président. L’amendement n° 945 n’est pas soutenu.
La parole est à M. Claude Raynal, pour présenter l’amendement n° 983.
M. Claude Raynal. Le régime spécial des industries électriques et gazières concerne près de 140 000 salariés travaillant dans 157 entreprises de la branche.
On ne peut pas, d’un côté, vanter sans cesse les vertus des accords sociaux négociés par les organisations syndicales et patronales, qui permettent de trouver par branche des solutions, et, de l’autre, remettre ces dernières en cause par une autre procédure, fût-elle parlementaire. Les partenaires sociaux des IEG se sont mis d’accord sur un système, et il y a une forme de grossièreté à vouloir les remplacer. Qui sommes-nous pour cela ?
Ce régime prend en compte des métiers dont la pénibilité est importante, en se fondant sur un système baptisé « service actif », qui ne concerne finalement que 23 % des personnels des IEG – eux seuls peuvent prétendre à ce dispositif.
Ce régime ne concerne donc pas l’ensemble des salariés de ce secteur, mais uniquement ceux qui connaissent des contraintes particulières.
En raison de la décote imposée, les salariés, même s’ils ont conservé le droit de partir plus tôt, retardent de plus en plus leur âge de départ. L’âge moyen de départ à la retraite est de 60 ans et devrait atteindre les 62 ans en 2024.
Par ailleurs, revenir sur le régime spécial ne répond à aucune rationalité économique, puisque ce dernier est excédentaire. Cet excédent a d’ailleurs rapporté 120 millions d’euros de plus que le versement des pensions au régime général.
Dans ce contexte général, nous devrions éviter de causer des soucis à des agents auxquels on demande déjà beaucoup et auxquels nous demanderons encore plus dans les années qui viennent.
M. le président. Les amendements nos 1013 et 1032 ne sont pas soutenus.
La parole est à M. Jean-Michel Houllegatte, pour présenter l’amendement n° 1064.
M. Jean-Michel Houllegatte. Avec ce projet de loi budgétaire, on bouscule en fait tout un édifice.
Nous avons examiné en janvier le projet de loi d’accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires. Dans l’hypothèse où les débats publics et la future programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) acteraient la relance effective du nucléaire dans notre pays, la réussite de ce programme suppose deux conditions.
La première, c’est la confiance des populations qui habitent près des installations. Je ne m’étendrai pas sur ce point, mais je mentionne tout de même que le projet de démembrement de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), introduit par un amendement gouvernemental lors de la navette parlementaire, va altérer considérablement cette confiance et compliquer la concertation. L’art de se tirer une balle dans le pied !
La seconde condition, c’est la capacité à mobiliser les compétences. Et là, on se tire une balle dans l’autre pied !
Le Gouvernement semble ne pas avoir compris que la situation énergétique de notre pays est extrêmement grave. Il s’agit d’un enjeu stratégique national de souveraineté, de compétitivité pour nos entreprises, de confort pour nos concitoyens et de décarbonation de notre économie dans un contexte d’urgence climatique.
Un article publié dans L’Usine nouvelle de décembre dernier indique que, pour construire de nouveaux réacteurs en France, la filière nucléaire doit recruter au moins 10 000 personnes par an à partir de 2023, dont 3 000 pour les seuls besoins d’EDF. Aucune filière industrielle n’a de tels plans de charge devant elle.
Or que fait-on ? On réduit son attractivité ! Aussi, dans l’hypothèse où le régime spécial serait fermé, il est évident que, pour compenser ce manque d’attractivité, EDF devra offrir des augmentations salariales aux nouveaux entrants. Mais je ne pense pas que l’entreprise ait, en ce moment, les moyens de le faire…
Ce projet de loi va donc pénaliser la mise en œuvre de la future programmation pluriannuelle de l’énergie. (Mme Émilienne Poumirol applaudit.)
M. le président. L’amendement n° 1079 n’est pas soutenu.
La parole est à M. Vincent Éblé, pour présenter l’amendement n° 1100.
M. Vincent Éblé. Je n’ai pas grand-chose à ajouter à ce qu’ont déjà dit mes collègues. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.)
Je ne puis qu’insister sur le caractère absolument stratégique de ce secteur d’activité dans la période que nous traversons : nous faisons face à des enjeux de conversion de notre modèle environnemental et de durabilité de nos politiques industrielles, singulièrement en matière de production énergétique.
Je ne crois pas qu’il soit tout à fait opportun de venir bousculer, par une réforme qui ne paraît pas justifiée, les équilibres patiemment construits pour les salariés de ce secteur en raison des spécificités très grandes de leurs métiers. Il faut donc maintenir le régime particulier des IEG.
M. le président. La parole est à Mme Monique Lubin, pour présenter l’amendement n° 1154 rectifié bis.
Mme Monique Lubin. Voilà un bel exemple de service public qui a été peu à peu démantelé !
Quelle belle idée pourtant de distribuer l’énergie, un bien vital, partout en France grâce à un service public, donc de manière égale entre tous les Français. Je dois reconnaître que nombre de gouvernements ont une responsabilité dans ce démantèlement – certains plus que d’autres, mais j’aimerais pouvoir dire que nous n’y avons pris aucune part…
Aujourd’hui, la France est en danger en termes de fourniture d’énergie, et ce projet de loi, en s’attaquant au statut et au régime de retraite des salariés du secteur, va nous donner le coup de grâce !
Pourtant, nous avons besoin de ces salariés. Nous sommes d’ailleurs bien contents de les trouver lorsque nous subissons des coups du sort.
Je pense par exemple à la tempête Klaus, qui a frappé les Landes en 2009, durant laquelle une grande partie de notre massif forestier est tombée. Nombre de gens se sont alors retrouvés dans une situation apocalyptique que nous n’aurions jamais cru connaître ; heureusement, les agents des IEG étaient là pour faire face à cette crise.
Nous devons continuer de soutenir ces salariés !
M. le président. L’amendement n° 1209 n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Victoire Jasmin, pour présenter l’amendement n° 1240.
Mme Victoire Jasmin. Cet amendement vise à maintenir le régime de retraite des industries du gaz et de l’électricité.
Contrairement à ce qui est proposé dans ce texte, il faut valoriser ces filières, qui sont indispensables pour le développement économique du pays.
Remettre en cause ces régimes spéciaux, c’est aussi diminuer l’attractivité des nombreux métiers des différentes filières concernées. Là encore, c’est une très grave erreur.
Il est au contraire nécessaire de mettre en adéquation la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences avec nos besoins. Nous avons voté récemment une loi sur les énergies renouvelables, et nous devons organiser correctement notre mix énergétique sur le territoire national.
Il faut de l’attractivité pour renouveler les effectifs, pérenniser les emplois et sauver notre mix énergétique. Nous devons surtout répondre à l’enjeu stratégique. Dès le mois de juillet dernier, j’ai attiré l’attention sur ce qui nous attendait dans le contexte de guerre en Ukraine et de menaces sérieuses sur le territoire hexagonal.
Nous avons encore la chance d’avoir du soleil, mais supprimer le régime de retraite des IEG serait une grave erreur. Monsieur le ministre, je vous en supplie, retirez ce texte !
M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour présenter l’amendement n° 1272.
M. Franck Montaugé. La suppression du régime spécial et la casse de fait du statut des IEG constituent un non-sens et un détournement de procédure grossier que je veux ici dénoncer.
La procédure dérogatoire pour l’adoption des projets de loi de financement de la sécurité sociale n’a jamais eu pour vocation d’introduire insidieusement de véritables réformes sociales de fond relevant par principe du domaine de la loi ordinaire.
De surcroît, les conséquences multiples de la suppression des régimes spéciaux qu’opère l’article 1er sont manifestes. Elles n’ont pas été évaluées dans toutes leurs implications productives, sociales et managériales, et leurs effets directs budgétaires ne sont pas avérés.
Les futurs salariés des IEG n’ont pas à faire les frais des difficultés actuelles d’EDF, dont le seul responsable est l’État français, en particulier ceux qui l’ont dirigé depuis des décennies.
La suppression des régimes spéciaux des IEG pour les seuls personnels recrutés à compter du 1er septembre 2023 est sans effet direct sur les dépenses et les recettes, puisqu’elle se borne à introduire un changement de régime d’affiliation de ces personnels au profit du régime général sans affecter directement le montant des cotisations versées. Elle n’a donc rien à faire dans un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale.
Elle confirme simplement que le grand œuvre du président des riches et de ses gouvernements successifs est bien, depuis 2017, la suppression des statuts historiques qui ont contribué à la force industrielle et sociale de la France, telle qu’elle était issue du Conseil national de la Résistance.
On savait que le ruissellement vers le bas était une fable. On voit ici que le ruissellement vers le haut est la nouvelle forme de spoliation de ce qui reste du capital social. Les Français l’ont compris, et ils vont vous le rappeler dans les jours à venir !
M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour présenter l’amendement n° 1318.
Mme Angèle Préville. Cet amendement vise à ne pas fermer le régime spécial de retraite des industries électriques et gazières.
Le secteur de l’énergie est d’une importance stratégique ; c’est d’autant plus vrai aujourd’hui que le mur des investissements dans les installations de production d’électricité est devant nous.
La fermeture de ce régime spécial des métiers de l’énergie est un non-sens absolu, car ces métiers sont durs. Fermer ce régime est particulièrement brutal.
Jusqu’à présent, les six derniers mois étaient pris en compte ; on va passer aux vingt-cinq meilleures années. Le départ était à 62 ans au plus tard ; il va passer à 64 ans. Les durées de cotisation ont évolué : de 37,5 ans en 2007, on est passé à 43 ans.
Or nous avons besoin de salariés qui se sentent bien dans leur travail ; c’est notre intérêt et c’est le leur. Nous avons tout simplement besoin de salariés de l’énergie et la question de l’attractivité se pose. La dureté du travail est évidente pour ces salariés ; or certains critères de pénibilité – températures extrêmes, bruits, travail de nuit et en équipes successives, agents chimiques dangereux – semblent être supprimés. Il y a un flou, et il serait bon que nous ayons des éclaircissements à ce sujet.
Autrement dit, tous ceux qui assurent notre approvisionnement en énergie et qui sont là pour rétablir l’énergie, par exemple lors d’une tempête, d’une inondation, d’un incendie ou d’une catastrophe industrielle, doivent être protégés.
Nous avons bénéficié jusqu’à présent de leur travail et du service qu’ils nous ont rendu. En effet, nous avons toujours pu compter sur eux. Ils travaillent dans des environnements particulièrement extrêmes, par tous les temps, et je salue leur amour du bel ouvrage. Ils sont fiers de ce qu’ils font, et nous sommes satisfaits des services qu’ils rendent.
C’est pourquoi ce régime spécial doit être maintenu.
M. le président. L’amendement n° 1342 n’est pas soutenu.
La parole est à M. Hussein Bourgi, pour présenter l’amendement n° 1375.
M. Hussein Bourgi. Toutes et tous nous sommes témoins de l’engagement et de l’abnégation des agents dont nous parlons depuis plusieurs minutes.
Souvenons-nous de 1999 et de la tempête Lothar dans le nord de la France, puis, le lendemain, de la tempête Martin dans le sud du pays. Ma collègue Monique Lubin a fait référence à la tempête Klaus de 2009. Dans nos départements, nous subissons régulièrement des épisodes cévenols ou méditerranéens, ainsi que des inondations.
Chaque fois que les élus et les ministres arrivent, ils rencontrent trois types de personnes pour les saluer et les remercier : les agents de la sécurité civile, en particulier les sapeurs-pompiers ; les agents des services des routes, qui sont là pour déblayer et ôter les arbres qui bloquent la circulation ; enfin, les agents qui sont là pour rétablir l’électricité.
À chaque fois, les élus et les ministres saluent ces agents et tirent une légitime fierté de ce service public qui sait se mobiliser pour rétablir des conditions de vie et de travail normales pour les Françaises et les Français.
Ce régime spécial est mérité. Il vient saluer l’engagement et la pénibilité de ce travail. J’ai parlé des périodes exceptionnelles, mais je pourrais vous parler de l’engagement de ces hommes et de ces femmes au quotidien : c’est moins spectaculaire, il n’y a pas de caméra de télévision, pas d’élu qui va à leur rencontre, mais, chaque fois qu’il y a un accident sur la route, qu’un camion rentre dans un pylône ou qu’un arbre tombe sur une ligne électrique, ce sont ces hommes et ces femmes qui se mobilisent pour rétablir le courant.
Voilà la réalité ! Le régime spécial vient sanctionner positivement la pénibilité du travail et l’engagement de ces hommes et de ces femmes au quotidien. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – Mme Marie-Noëlle Lienemann applaudit également.)
M. le président. Les amendements nos 1408, 1438, 1506, 1545 et 1594 ne sont pas soutenus.
La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour présenter l’amendement n° 1624.
Mme Émilienne Poumirol. Cet amendement vise à ne pas fermer le régime spécial de retraite des industries électriques et gazières, qui s’applique aux 156 entreprises de la branche des IEG, dont EDF et Engie, et qui compte plus de 135 000 cotisants au 31 décembre 2021. EDF est le principal employeur du secteur, avec 44,7 % des effectifs des IEG.
La réforme va supprimer les notions de service actif et de service insalubre, qui donnent droit à des majorations de durée permettant une retraite anticipée à ceux qui occupent ces postes pénibles.
Le régime d’EDF prévoit une meilleure prise en compte de la pénibilité, car certains de ses travailleurs subissent une espérance de vie inférieure à la moyenne des Français ou des incapacités de travail importantes.
Pour notre part, nous souhaitons que ces mesures protectrices, qui tiennent compte de la pénibilité des métiers, puissent être appliquées à l’ensemble des Français dont les conditions de travail sont pénibles et usantes.
Une nouvelle fois, la notion de pénibilité au travail semble négligée par le Gouvernement.
M. le président. Les amendements nos 1654 et 1664 ne sont pas soutenus.
La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour présenter l’amendement n° 1695.
M. Jean-Yves Leconte. Nous parlons ici du régime spécial des entreprises électriques et gazières.
Nous sommes devant un paradoxe assez stupéfiant : d’un côté, pas un jour ne se passe depuis un an sans que nous fassions, ici même, un bilan désastreux de la politique énergétique menée depuis vingt-cinq ans dans notre pays ; de l’autre, on nous propose, aujourd’hui, de supprimer ce régime.
Nous savons tous que cette politique énergétique nous mène dans le mur. Or voter la suppression du régime spécial en constitue en fait un prolongement !
Il conviendrait pourtant de changer de politique énergétique et de tirer les conséquences de ce que nous constatons depuis un an.
Hussein Bourgi a rappelé que ces agents sont mobilisables à chaque instant, en astreinte permanente, pour effectuer des tâches pénibles et souvent dangereuses. Le système en place prend en compte la pénibilité de ce travail, et vous voudriez voir ces agents basculer dans le régime général ! Ce n’est pas logique.
Nous avons besoin de ces compétences. Nous devons maintenir cette attractivité, la prise en compte de la pénibilité et les exigences à l’égard des personnels des entreprises électriques et gazières.
Savons-nous combien nous avons besoin de compétences dans ce domaine ?
M. le président. Il faut conclure !
M. Jean-Yves Leconte. Savons-nous combien les centrales nucléaires ont besoin de ces compétences ?
Dès lors, pourquoi ne changeons-nous pas la politique énergétique en donnant un coup d’arrêt à ce que nous faisons depuis vingt-cinq ans dans ce domaine et en refusant de passer au régime général ?
M. le président. Les amendements nos 1751 et 1793 ne sont pas soutenus.
La parole est à M. Patrick Kanner, pour présenter l’amendement n° 1821.
M. Patrick Kanner. Les alinéas 14 à 16 de l’article 1er de ce projet de loi constituent la quatrième pierre à l’entreprise de démolition et de déconstruction de notre histoire sociale.
Monsieur le ministre, pour reprendre une expression maintenant consacrée par l’un de vos collègues, vous avez donc décidé de « bordéliser » un secteur majeur de notre souveraineté énergétique !
C’est un choix extrêmement lourd, et les mobilisations ont commencé dès aujourd’hui chez ces personnels, qui ont été décrits avec beaucoup de force, de vigueur, de justice et de justesse par nos collègues.
Ce régime de retraite ne date pas d’hier : il a été fondé en 1859 par les salariés de la compagnie parisienne du gaz à partir d’une caisse de secours et de prévoyance – d’autres entreprises ont ainsi pu créer leur régime.
Au moment de la création du régime général des assurances sociales en 1930, puis en 1945, certains travailleurs bénéficiant de régimes de retraite plus protecteurs ont été reconnus. Et il est vrai que le régime spécial des IEG est gravé dans la loi fondatrice du 22 juin 1946.
Dès lors, monsieur le ministre, le régime de retraite des IEG symbolise finalement une période chère à notre cœur à toutes et tous, celle du Conseil national de la Résistance et des jours heureux.
Vous vous y attaquez ce soir par ces alinéas, monsieur Dussopt. Vous allez, vous, entrer dans l’histoire des fossoyeurs de notre protection sociale. (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées du groupe CRCE.)
M. le président. L’amendement n° 1847 n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour présenter l’amendement n° 1994.
Mme Laurence Rossignol. J’ai déjà eu l’occasion de dire ce matin quelle était à mon sens la philosophie – ou plutôt l’idéologie, car cela ne mérite pas le mot « philosophie » – qui sous-tend cet acharnement contre les régimes spéciaux.
Et j’ai dit ce matin que vous raisonniez à l’inverse, en pensant que la suppression des régimes spéciaux allait aplanir les conflits d’identité dans notre société : je crains, au contraire, qu’elle ne les exacerbe.
En fait, ce qu’il y a derrière, dans cette idéologie, c’est l’idée d’un salarié souple, flexible, totalement mobile et capable de passer d’un métier à un autre ou d’un poste à un autre.
L’autre jour, alors que quelqu’un lui demandait s’il pensait qu’une infirmière pouvait exercer son métier jusqu’à 64 ans, le Président de la République a eu cette réponse étonnante : à 64 ans, elle aura déjà changé de métier. Non ! Les gens ne changent pas de métier tout le temps ; cela ne marche pas ainsi dans la vie. Leur savoir-faire, leur expérience, leur stabilité ne font pas d’eux des êtres totalement adaptés en permanence aux besoins du marché.
En fait, en vous attaquant aux régimes spéciaux, vous dévalorisez l’identité, le savoir-faire et la fierté que donnent un métier et l’appartenance à une entreprise aussi importante dans le service public des Français que celle qui fait l’objet de cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 2073 n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Frédérique Espagnac, pour présenter l’amendement n° 2261.
Mme Frédérique Espagnac. Mes chers collègues, en vous entendant, depuis ce matin, sur la suppression des régimes spéciaux, je me dis que nous ne devons pas être nombreux à avoir des parents ayant exercé des métiers pénibles.
Enfant, je voyais mon père partir la nuit comme le jour, en cas de tempêtes, d’inondations, de feux, de neige, quarante-huit heures durant, et parfois plus même, sans compter ses heures, pour réparer et rebrancher au plus vite les installations électriques en haut des pylônes.
La pénibilité et la dangerosité, c’était son quotidien, de même que le stress permanent qu’un incident intervienne pendant les dépannages ou qu’il mette en danger la vie d’un membre de son équipe ou la sienne.
Comme l’a dit mon collègue Hussein Bourgi, combien de nous, en tant qu’élus, ont rendu hommage, au lendemain des tempêtes, dans nos territoires, à ces hommes et ces femmes qui travaillent pour le bien et la sécurité de tous nos concitoyens, souvent dans les pires conditions ?
Vous demandez aujourd’hui la suppression de leurs régimes spéciaux, qui est une mesure de justice sociale et d’équité prenant en compte la pénibilité de leur travail.
Chers collègues, auriez-vous la mémoire courte ? Bruno Retailleau, que je respecte, a dit tout à l’heure que les régimes spéciaux abîmaient le commun. Au contraire ! Dans ce cas, ils le garantissent, ainsi que le bon fonctionnement de notre pays et de ses services publics.
Nous avons besoin de ces hommes et de ces femmes, de ces personnels qui sont aujourd’hui un enjeu stratégique pour notre pays.
Enfin, le régime de retraite des industries gazières et électriques est adossé au régime général depuis 2008. Il ne doit rien à la solidarité nationale ; au contraire, il y contribue, en lui apportant des recettes.
Au travers du slogan « on meurt plus tôt, on part plus tôt », ce régime est présenté comme un régime pionnier par ses bénéficiaires, prenant en compte la pénibilité au travail liée à une espérance de vie entamée et au bouleversement des conditions de vie.
Mes chers collègues, leur régime si spécial doit être maintenu. Je vous le demande solennellement. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 3197.
Mme Raymonde Poncet Monge. Je veux rebondir sur les tempêtes.
Dans le domaine de la reconnaissance purement symbolique et verbale, on peut tracer un parallèle avec ce que l’on a connu durant la covid-19 : au final, les métiers de soins et d’aide n’ont rien obtenu de plus ! De même, malgré les propos tenus après la tempête de 1999, on remet aujourd’hui en cause le système des électriciens et des gaziers.
On pourrait répéter mot pour mot ce qui a été dit pour la RATP : ce sont, en fin de compte, des régimes qui reconnaissent et préviennent l’exposition à des risques et à des facteurs de pénibilité spécifiques. Ce sont donc des systèmes protecteurs, et même pionniers au sens où ils devraient constituer un exemple ou un modèle pour les autres branches.
Comme cela nous a été dit lors des auditions en commission, nous sommes passés, en très peu de temps, pour les industries électriques et gazières, de 15 ans de service actif pour pouvoir partir à 55 ans à 17 ans de service actif pour partir à 57 ans, puis à 17 ans pour partir à 59 ans.
On nous parle du C2P, mais, comme je l’ai dit tout à l’heure au sujet de la RATP, le C2P permet un départ anticipé deux ans avant ! Avec un âge légal à 64 ans, on va passer d’un départ à 59 ans, reconnaissant 17 ans de pénibilité et d’exposition aux risques, à un départ à 62 ans.
En outre, le taux d’invalidité permanente, contenu jusqu’alors par la prévention que permettait le départ précoce, rejoindra celui du régime général.
M. le président. Il faut conclure !
Mme Raymonde Poncet Monge. Il y aura donc 20 % d’invalides permanents à 62 ans.
M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour présenter l’amendement n° 3932 rectifié.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Les retraités des IEG, qui représentent un peu moins de 1 % de l’ensemble des retraités, ont un régime qui n’a jamais été tributaire ni de l’État ni des autres régimes. Pourquoi cet acharnement à le supprimer ?
Pour des raisons financières ? Non, car le régime est excédentaire.
Pour des raisons d’équité ? Non, car le régime participe au financement d’autres régimes, qui comptent moins d’actifs que de retraités, comme ceux des agriculteurs et des artisans.
En raison de la contribution tarifaire d’acheminement, censée coûter 1,7 milliard d’euros aux usagers ? Pourtant, cette contribution est une imposition de toute nature, et non une aide d’État qui se substitue – c’est le choix qui a été fait lors de la libéralisation du secteur en 2004 par le gouvernement Raffarin – à la part du tarif d’électricité et de gaz naturel, qui a assuré son financement, la part des droits spécifiques passés correspondant aux activités régulées. La CTA est acquittée sur le prix global par le client final, donc par le contribuable.
Comment pouvez-vous garantir la pérennité du régime, alors que nous savons que la fameuse clause du grand-père conduira à appliquer le régime général à tout nouvel entrant, avec par conséquent de moins en moins de cotisants ? Ce régime ne pourra pas survivre.
Aucune des raisons que vous invoquez ne tient donc la route.
Ne nous y trompons pas : aujourd’hui comme en 2004, la suppression du régime des IEG est à chercher dans votre volonté de démantèlement du service énergétique français, c’est-à-dire dans vos intentions de dépeçage et de dislocation d’EDF via un plan Hercule qui peut revenir à chaque instant, malgré l’opposition unanime des organisations syndicales et de ceux qui défendent un service à 100 % public.
Engie, entreprise privée, n’a jamais caché son rêve de sortir du statut national. C’est la seule justification de l’article 1er, que ce soit pour les IEG ou la RATP.
M. le président. L’amendement n° 3964 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli, est ainsi libellé :
Alinéas 15 et 16
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Le régime des électriciens et gaziers est profondément lié à l’importance que notre pays accordait à la question énergétique et à la volonté de bâtir des entreprises publiques puissantes, capables de relever les défis de l’électrification de notre pays de l’après-guerre.
Ce régime s’est consolidé au fil du temps pour garantir aux électriciens et aux gaziers un haut niveau de droits, correspondant aux contraintes et à la pénibilité de leur mission.
On parle ici de femmes et d’hommes profondément engagés dans le service public de l’électricité et du gaz.
Aujourd’hui, nous sommes de nouveau face à des défis majeurs : relance du nucléaire en France, construction de nouveaux EPR, nécessité de renforcer nos réseaux de distribution pour faire face à l’essor des énergies renouvelables, déploiement au niveau industriel du véhicule électrique… La liste est loin d’être exhaustive.
Pour assurer cette transition énergétique, il faudra des agents de plus en plus qualifiés. Il sera nécessaire de consolider les compétences et les savoir-faire et de recréer un tissu industriel de qualité. En effet, aujourd’hui, le régime spécial de retraite des IEG fait partie d’un pacte global, qui reflète notamment un certain nombre d’astreintes et de difficultés au travail.
Dès lors, quelle erreur historique que de vouloir supprimer un régime qui est aussi un vecteur d’attractivité dans un secteur essentiel ! La suppression du régime spécial des IEG ne traduit, en vérité, que votre volonté de remettre en cause leur statut et d’achever, par là même, les missions de service public.
En effet, la caisse des IEG, comme nous l’avons dit à plusieurs reprises, était excédentaire. Elle a largement contribué à alimenter les comptes du régime général ces dernières années.
Les électriciens et les gaziers cotisent à un niveau supérieur et se constituent mutuellement des droits à la retraite correspondant à leur situation. C’est un modèle vers lequel il faut se tourner. Il s’agit, à nos yeux, non pas de régimes spéciaux, mais, je le réaffirme, de régimes pionniers.
Nous sommes attachés à la défense de ces conquis sociaux. C’est pourquoi nous demandons la suppression des alinéas 15 et 16.
M. le président. L’amendement n° 3937 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli, est ainsi libellé :
Alinéa 16
Remplacer les mots :
avant le 1er septembre 2023
par les mots :
avant une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après accord des organisations syndicales et patronales
La parole est à M. Pierre Laurent.
M. Pierre Laurent. Le sujet dont nous débattons est grave. En effet, nous discutons non pas d’un régime de retraite, mais du pacte que nous allons passer pour l’avenir, ou que nous allons rompre, avec l’ensemble des salariés des industries électriques et gazières.
Nous savons tous que la sécurité de l’approvisionnement énergétique du pays est de nouveau une question d’avenir et qu’elle est sur la table. Il va falloir procéder à la plus grande mutation de notre système électrique depuis la construction du parc électronucléaire et du parc hydraulique de la France.
Soit nous sommes capables de réussir cette mutation, et nous répondrons possiblement aux enjeux d’industrialisation, de souveraineté et d’urgence climatique, avec du nucléaire et avec des EnR, soit nous n’en sommes pas capables, et alors rien ne sera possible. Or nous n’y parviendrons pas sans une mobilisation générale et durable de l’ensemble des professions IEG dans le pays.
Votre projet fait exactement l’inverse : il propose, au travers de cette question de régime de retraite, de rompre le pacte national qui a été passé avec les salariés des IEG depuis la Libération. Et il est en train de provoquer la plus grande grève du secteur depuis des années – pendant que nous discutons ici, elle est en train de s’étendre dans tout le pays –, pour s’opposer au projet que vous voulez passer en force.
Ce pacte, vous l’avez déjà beaucoup abîmé. La question qui est devant nous est de savoir si vous allez l’achever ou si, au contraire, nous allons le relancer pour l’étendre à toutes les professions IEG d’aujourd’hui et à celles que nous devrons embaucher et former pour construire la réussite du nouveau projet énergétique pour la France. (Mmes Cathy Apourceau-Poly, Laurence Cohen et Émilienne Poumirol applaudissent.)
M. le président. L’amendement n° 3016 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 16
Remplacer les mots :
avant le 1er septembre 2023
par les mots :
jusqu’à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales qui ne peut être ultérieure au 1er janvier 2050
La parole est à Mme Monique Lubin.
Mme Monique Lubin. Monsieur le président, nous avions envie de continuer le débat – encore qu’il n’y en ait pas vraiment… – sur les régimes spéciaux, notamment sur celui des gaziers. C’est pourquoi nous avions décliné un certain nombre d’amendements, visant à proposer différentes dates.
Toutefois, comme il nous semble que notre parole a été entendue sur le sujet dans cet hémicycle, nous considérons que cet amendement, ainsi que les suivants, sont défendus.
M. le président. L’amendement n° 3015 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 16
Remplacer les mots :
avant le 1er septembre 2023
par les mots :
jusqu’à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales qui ne peut être ultérieure au 1er janvier 2049
Cet amendement a déjà été défendu.
L’amendement n° 3014 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 16
Remplacer les mots :
avant le 1er septembre 2023
par les mots :
jusqu’à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales qui ne peut être ultérieure au 1er janvier 2048
Cet amendement a déjà été défendu.
L’amendement n° 3013 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 16
Remplacer les mots :
avant le 1er septembre 2023
par les mots :
jusqu’à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales qui ne peut être ultérieure au 1er janvier 2047
Cet amendement a déjà été défendu.
L’amendement n° 3012 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 16
Remplacer les mots :
avant le 1er septembre 2023
par les mots :
jusqu’à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales qui ne peut être ultérieure au 1er janvier 2046
Cet amendement a déjà été défendu.
L’amendement n° 3011 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 16
Remplacer les mots :
avant le 1er septembre 2023
par les mots :
jusqu’à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales qui ne peut être ultérieure au 1er janvier 2045
Cet amendement a déjà été défendu.
L’amendement n° 3010 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 16
Remplacer les mots :
avant le 1er septembre 2023
par les mots :
jusqu’à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales qui ne peut être ultérieure au 1er janvier 2044
Cet amendement a déjà été défendu.
M. le président. L’amendement n° 3009 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 16
Remplacer les mots :
avant le 1er septembre 2023
par les mots :
jusqu’à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales qui ne peut être ultérieure au 1er janvier 2043
Cet amendement a déjà été défendu.
L’amendement n° 3008 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 16
Remplacer les mots :
avant le 1er septembre 2023
par les mots :
jusqu’à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales qui ne peut être ultérieure au 1er janvier 2042
Cet amendement a déjà été défendu.
L’amendement n° 3007 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 16
Remplacer les mots :
avant le 1er septembre 2023
par les mots :
jusqu’à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales qui ne peut être ultérieure au 1er janvier 2041
Cet amendement a déjà été défendu.
L’amendement n° 3006 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 16
Remplacer les mots :
avant le 1er septembre 2023
par les mots :
jusqu’à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales qui ne peut être ultérieure au 1er janvier 2040
Cet amendement a déjà été défendu.
L’amendement n° 3005 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 16
Remplacer les mots :
avant le 1er septembre 2023
par les mots :
jusqu’à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales qui ne peut être ultérieure au 1er janvier 2039
Cet amendement a déjà été défendu.
L’amendement n° 3004 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 16
Remplacer les mots :
avant le 1er septembre 2023
par les mots :
jusqu’à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales qui ne peut être ultérieure au 1er janvier 2038
Cet amendement a déjà été défendu.
L’amendement n° 3003 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 16
Remplacer les mots :
avant le 1er septembre 2023
par les mots :
jusqu’à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales qui ne peut être ultérieure au 1er janvier 2037
Cet amendement a déjà été défendu.
L’amendement n° 3002 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 16
Remplacer les mots :
avant le 1er septembre 2023
par les mots :
jusqu’à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales qui ne peut être ultérieure au 1er janvier 2036
Cet amendement a déjà été défendu.
L’amendement n° 3001 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 16
Remplacer les mots :
avant le 1er septembre 2023
par les mots :
jusqu’à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales qui ne peut être ultérieure au 1er janvier 2035
Cet amendement a déjà été défendu.
L’amendement n° 3000 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 16
Remplacer les mots :
avant le 1er septembre 2023
par les mots :
jusqu’à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales qui ne peut être ultérieure au 1er janvier 2034
Cet amendement a déjà été défendu.
L’amendement n° 2999 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 16
Remplacer les mots :
avant le 1er septembre 2023
par les mots :
jusqu’à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales qui ne peut être ultérieure au 1er janvier 2033
Cet amendement a déjà été défendu.
L’amendement n° 2998 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 16
Remplacer les mots :
avant le 1er septembre 2023
par les mots :
jusqu’à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales qui ne peut être ultérieure au 1er janvier 2032
Cet amendement a déjà été défendu.
L’amendement n° 2997 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 16
Remplacer les mots :
avant le 1er septembre 2023
par les mots :
jusqu’à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales qui ne peut être ultérieure au 1er janvier 2031
Cet amendement a déjà été défendu.
L’amendement n° 2996 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 16
Remplacer les mots :
avant le 1er septembre 2023
par les mots :
jusqu’à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales qui ne peut être ultérieure au 1er janvier 2030
Cet amendement a déjà été défendu.
L’amendement n° 2995 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 16
Remplacer les mots :
avant le 1er septembre 2023
par les mots:
jusqu’à une date déterminée par décret pris en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales qui ne peut être ultérieure au 1er janvier 2029
Cet amendement a déjà été défendu.
L’amendement n° 2734 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 16
Remplacer les mots :
avant le 1er septembre 2023
par les mots :
jusqu’à une date déterminée par décret en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales, qui ne peut être ultérieure au 1er janvier 2028
Cet amendement a déjà été défendu.
Quel est l’avis de la commission sur l’ensemble des amendements restant en discussion ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Tout comme vous, chers collègues, nous rendons hommage aux femmes et aux hommes qui interviennent en cas de tempête ou de dommages sur les lignes électriques ou les canalisations gazières.
Je veux aussi associer à cet hommage tous ceux qui interviennent pour la maintenance du réseau et qui sont des sous-traitants. De fait, 80 % de travaux de maintenance sont réalisés par des sous-traitants qui, eux, n’ont pas de régime spécial… (Exclamations sur les travées des groupes SER et CRCE.)
Mme Laurence Cohen. Intégrez-les !
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je veux aussi indiquer que ce régime concerne 135 427 cotisants, pour plus de 180 000 pensionnés. C’est là qu’est le déséquilibre, en réalité.
En outre, l’État intervient à hauteur de 3 141 millions d’euros – sur 5,184 milliards d’euros. C’est énorme !
Dans ces conditions, on peut considérer qu’il est normal de se poser la question de la fermeture de ce risque vieillesse – je rappelle que tous les autres risques continueront de relever du régime spécial de la Caisse nationale des industries électriques et gazières.
Certains ont parlé de l’excédent, mais l’excédent, c’est la contribution tarifaire ! Chacun de nous y contribue…
Pour toutes ces raisons, nous avons émis un avis défavorable sur l’ensemble de ces amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre. Le Gouvernement fait siens l’intégralité des propos de Mme la rapporteure générale. Son avis sera donc défavorable.
Je veux simplement apporter trois compléments.
Premièrement, dans les présentations d’amendements, il est parfois sous-entendu – le terme n’est peut-être pas le mieux choisi – qu’il y aurait une rupture du pacte social.
Or, au risque de la répétition, je rappelle que nous maintenons les régimes spéciaux pour celles et ceux qui en bénéficient.
M. Patrick Kanner. Nous pensons à leurs successeurs !
M. Olivier Dussopt, ministre. Seuls les nouveaux embauchés à partir du 1er septembre seront affiliés au régime général de l’assurance vieillesse.
Il est important de le souligner, car toutes celles et tous ceux qui imaginent ou qui laissent penser que, demain, l’ensemble des salariés des IEG seraient privés de leur régime spécial ne sont pas dans le vrai. Ce sont uniquement les nouveaux qui le seront.
Cela m’amène à un point qui a été évoqué rapidement, à savoir les conséquences de ce que l’on pourrait appeler le « tarissement du flux », par rapport à un régime spécial qui doit gérer les retraités actuels et celles et ceux qui gagneront leur retraite sous couvert, toujours, de ce régime.
Nous l’avons déjà fait pour la SNCF, lorsque nous avons mis en place l’extinction du statut – et pas seulement, pour le coup, du régime d’assurance vieillesse. Et, de la même manière que nous avons garanti le financement des retraites de la SNCF, nous garantirons bien évidemment la soutenabilité du financement du régime de retraite des industries électriques et gazières.
Deuxièmement, il a été dit à plusieurs reprises que ce régime avait été mis en place à la Libération et qu’il relevait, finalement, de l’héritage du Conseil national de la Résistance. En réalité, il procède très directement de l’ordonnance du 4 octobre 1945 ; et celle-ci, qui venait acter la création des régimes spéciaux de manière générale, précisait de manière explicite que cette démarche était provisoire et que l’objectif était d’aller vers le régime général.
M. Max Brisson. Exactement !
M. Olivier Dussopt, ministre. Lorsque l’on revendique l’héritage de cette période, il faut aller jusqu’au bout des textes. C’est peut-être en avançant progressivement vers un régime général que nous y sommes le plus fidèles…
Troisièmement, je veux souligner qu’il n’y a pas d’excédent. Il peut y avoir parfois, telle ou telle année, des reversements. Mais un régime qui s’équilibre et qui produit de légers excédents parce qu’il bénéficie d’une contribution payée par l’ensemble des usagers – des clients, des abonnés –, à hauteur de 1,7 milliard d’euros par an, n’est pas un régime équilibré. (Mme Marie-Noëlle Lienemann proteste.) Je précise, pour la bonne compréhension du débat, que des jurisprudences et des dispositions législatives précisent que la CTA est bien une taxe affectée.
Lorsqu’un régime bénéficie d’une taxe affectée, il est plus facile pour lui d’atteindre l’équilibre ! Cela s’appelle le financement de la solidarité par les contribuables.
Pour ces raisons, ainsi que pour celles qu’a évoquées Mme la rapporteure générale, le Gouvernement est défavorable à l’ensemble de ces amendements.
M. le président. La parole est à M. Rachid Temal, pour explication de vote.
M. Rachid Temal. Monsieur le ministre, vous évoquez l’ordonnance du 4 octobre 1945. Mais allez jusqu’au bout : s’il y avait, à l’époque, la volonté d’aller vers un régime général, il y avait également l’idée d’ouvrir ces régimes spécifiques à d’autres catégories de professions et de métiers. Votre lecture est partiale, pour ne pas dire autre chose !
Mme la rapporteure générale affirme que ces gens travaillent de façon formidable : je crois que tout le monde en est d’accord. Mais, juste après, elle nous dit qu’elle tient à les faire tomber dans le régime classique… Je ne pense pas que soit la bonne réponse.
En effet, au-delà du travail des agents, que l’on salue chaque jour, c’est la politique industrielle ou énergétique française qui est en jeu. Nous aurions pu trouver un accord pour la refonder avant même de toucher au statut des agents. C’est dans ce sens-là qu’il fallait faire les choses.
Bien entendu, nous voterons pour les amendements.
Pour terminer, monsieur le ministre, pourrions-nous avoir la note du Conseil d’État, qui éclairerait nos débats et ferait avancer la réflexion ? Vous n’avez toujours pas répondu à cette question… (Applaudissements sur des travées des groupes SER et GEST.)
M. le président. La parole est à M. Yan Chantrel, pour explication de vote.
M. Yan Chantrel. Monsieur Dussopt, vous utilisez, dans vos différentes interventions, les termes de « flux » et de « stock » pour parler des travailleurs et travailleuses et de retraite… Mais ce ne sont pas des objets ! Ce sont des hommes et des femmes, autant de vies, d’ailleurs, que vous violentez et brutalisez avec cette réforme.
M. Yan Chantrel. Vous avez parlé, dans une intervention précédente, de « situation de rente ». Quelle blague ! Les vraies situations de rente sont pour celles et ceux qui profitent de la crise et que vous exonérez systématiquement de toute contribution et de toute participation minimale à la solidarité nationale.
Vous êtes constamment – on peut vous reconnaître une constance et une cohérence sur ce point depuis 2017 ! – faible avec les puissants et impitoyable avec les travailleuses et les travailleurs les plus modestes, les fameux « essentiels » de notre pays.
Vous n’aimez pas le travail, ni les travailleurs et les travailleuses. (Protestations sur les travées des groupes Les Républicains, UC et RDPI.)
M. Marc-Philippe Daubresse. Ne commencez pas comme à l’Assemblée nationale ! Tout ce qui est excessif est insignifiant…
M. Yan Chantrel. Les Français, d’ailleurs, ne sont pas dupes. Ils ont bien conscience que votre politique ne va toujours que dans un seul sens.
Cette brutalité suscite la colère légitime de nos compatriotes, qui manifestent en masse pacifiquement depuis plusieurs semaines, dans une situation économique pourtant très difficile, où ils doivent la plupart du temps se priver de journées de salaire pour défendre un droit collectif, celui de bénéficier, après une vie de travail, d’une pension de retraite décente à un âge décent. (M. Laurent Duplomb proteste.)
Nous vous demandons donc de retirer cette réforme injuste et brutale. (Applaudissements sur des travées des groupes SER et GEST.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Pendant longtemps, les Français ont été fiers de leurs services publics de l’électricité et du gaz, de la SNCF, de leurs hôpitaux et de leur école publique.
M. Roger Karoutchi. Hélas, c’est fini…
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Ils étaient fiers du modèle républicain, cette sorte d’armature qui servait aussi au développement économique du pays.
Or ils constatent que vos choix libéraux ont détricoté et affaibli considérablement ces piliers de notre République et de notre pays. Et vous nous donniez des leçons : il fallait ouvrir les marchés, casser les statuts, dynamiser les salariés…
Qu’observe-t-on aujourd’hui ? Jamais l’état énergétique de notre pays n’a été aussi catastrophique. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Bruno Retailleau. Grâce à qui ?
M. Arnaud Bazin. Grâce à vos alliances avec les écologistes !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Non, grâce à vous, les libéraux ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
C’est vous qui avez accepté le marché européen de l’énergie, l’accès régulé à l’électricité nucléaire historique (Arenh), qui tue EDF, ainsi que le prix du marché adossé au gaz – ce n’est pas notre cas ! Telle est la réalité.
M. Laurent Duplomb. Et les antinucléaires ?
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Vous nous avez également expliqué que les salariés étaient des nantis, qu’il fallait casser les statuts et banaliser leur protection sociale…
M. Philippe Pemezec. Mensonges !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Alors que l’on manque de compétences et de personnels motivés,…
M. Laurent Duplomb. C’est sûr !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. … alors que nous sommes confrontés à des situations difficiles, comme l’ont rappelé mes collègues, des gens ont – encore heureux ! – la dignité de défendre ce service public au quotidien. Et c’est à eux que vous dites aujourd’hui que vous allez saper leur système de retraite !
M. le président. Il faut penser à conclure !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Je crois que, si vous voulez être dignes du sursaut qu’attendent les Français sur les plans économique, énergétique et social, vous devez refuser d’abandonner le régime des IEG.
M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret, pour explication de vote.
Mme Corinne Féret. Supprimer, prétendument au nom de l’équité et de la justice sociale, certains régimes spéciaux bien ciblés, en particulier dans des secteurs pourtant stratégiques pour la Nation – celui de l’IEG en est vraiment la preuve –, qui reposent sur la pleine mobilisation des salariés dans l’exercice de leur mission de service public, s’apparente davantage à de la provocation qu’à une quelconque volonté de justice entre les salariés du régime général et ceux des services publics.
Une telle proposition est totalement incohérente et incompréhensible.
Je m’interroge sur plusieurs points. Pourquoi le Gouvernement veut-il les supprimer ? Combien de personnes seraient concernées ? Surtout, sont-elles véritablement trop avantagées ? Seraient-elles des nantis ?
Monsieur le ministre, permettez-moi une petite incursion dans ma vie privée. Il se trouve que je suis la fille d’un gazier qui est aujourd’hui à la retraite. Or je ne crois pas qu’il ait été un nanti, un privilégié.
Il a exercé ses missions, ses fonctions, son métier dans les conditions qui étaient les siennes, parfois difficiles, et, comme cela a été dit par mes collègues, parfois, aussi, au péril de sa vie. Mais il fallait exercer cette mission de service public ! Alors, non, il n’y a pas de nantis ! Il n’y a pas de privilégiés.
Enfin, à vous écouter, monsieur le ministre, nous aurions tort de nous inquiéter, puisque votre proposition ne porte que sur les nouveaux recrutés, à partir du 1er septembre 2023, donc avec un effet lointain.
Je veux, pour ma part, attirer votre attention sur l’amendement dont nous ne pourrons débattre qu’au moment de l’examen de l’article 7, celui qui a été déposé par notre collègue Bruno Retailleau et qui vise à mettre en application…
M. le président. Il faut conclure !
Mme Corinne Féret. … cette réforme sur les régimes spéciaux dès le mois de septembre 2023.
M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour explication de vote.
Mme Éliane Assassi. Cette suppression du statut des IEG m’interroge à plusieurs égards. Prévue aux alinéas 14 à 16 de l’article 1er, une telle mesure induit plusieurs incertitudes. J’aimerais bien que M. le ministre les éclaircisse.
Tout d’abord, si les nouveaux embauchés des IEG versent, à partir du 1er septembre prochain, leurs cotisations au régime de droit commun, Cnav ou Agirc-Arrco, et non plus à la Cnieg, il est certain que les recettes manqueront. Qui comblera ce manque ? La cotisation employeur du régime spécial ? La contribution tarifaire d’acheminement ?…
Dans l’étude d’impact, il est précisé que la suppression devrait conduire à ce qu’il y ait 4 490 nouveaux affiliés au régime général entre septembre et décembre 2023, et autant de moins pour les régimes concernés, qui accuseront un manque à gagner sur les cotisations de plusieurs dizaines de millions d’euros de recettes.
La fermeture des principaux régimes spéciaux de retraite au profit du régime général affectera directement les recettes, puisque les changements de régime d’affiliation des nouveaux embauchés dans les secteurs concernés entraîneront, dès 2023, une modification des flux de cotisations finançant les régimes. Et ce phénomène ira croissant d’année en année.
En conséquence, le besoin de financement des régimes fermés augmentera, mais leurs modalités de financement permettront de garantir leur soutenabilité financière à court terme. Il ne devrait donc pas y avoir de problème pour payer les retraites à court terme. En revanche, qu’en sera-t-il, monsieur le ministre, à moyen et à long terme ?
Dans le cadre de la neutralité du régime des IEG, il ne sera pas question de recevoir des subventions publiques ni de financement de la part des autres organismes de sécurité sociale. Comment comptez-vous faire ? Comment éviterez-vous la faillite du régime ?
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Tout d’abord, je veux dire que l’on peut être un défenseur résolu du régime des IEG sans pour autant être partisan de la fuite en avant nucléaire…
Vous avez raison, monsieur le ministre, le recours aux sous-traitants existe dans le secteur nucléaire. C’est d’ailleurs une manière de ne pas faire face à son coût et à sa dangerosité.
Pour ma part, je ne pense pas qu’il s’agisse là d’une rupture de contrat. J’ai bien compris la clause du grand-père, dont le problème est non pas que vous la mainteniez, mais qu’elle posera un problème de cohésion, comme cela a d’ailleurs été dit par le président de la Cnieg : les nouveaux entrants qui travailleront sur les mêmes pylônes électriques n’auront pas le même régime que leurs collègues qui seront protégés par la clause du grand-père.
Aussi, les responsables des ressources humaines vous remercieront pour cette contribution à la cohésion des équipes au sein de l’entreprise…
Ce que j’ai dit pour la RATP vaut également dans le cas donc nous discutons. Ils devront gérer plusieurs collectifs, qui exerceront pourtant les mêmes activités : ceux qui auront le statut et qui bénéficieront de l’ancien régime de retraite leur permettant de partir à la retraite avant d’être cassés – c’est la clause du grand-père ; ceux qui auront le statut, mais sans bénéficier du régime de retraite – ce sont les nouveaux entrants ; enfin, ceux qui n’auront ni le statut ni le régime – ce sont les sous-traitants.
Un problème de cohésion des équipes se posera donc dans ces entreprises, qui ont pourtant bien besoin d’homogénéité. (Marques d’impatience sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. Il faut conclure !
Mme Raymonde Poncet Monge. Enfin, l’attractivité reste largement considérée comme un élément essentiel de couverture sociale du secteur.
M. le président. La parole est à M. Pierre Laurent, pour explication de vote.
M. Pierre Laurent. Monsieur le ministre, comme nous parlons devant les Français, pour reprendre votre expression, je ne puis vous laisser tenir de tels propos sur les ordonnances de 1945. En effet, vous vous êtes livré à une imposture en prétendant que votre action se situerait dans leur filiation !
En 1945, le Gouvernement mis en place par le général de Gaulle compte deux ministres communistes, tous deux ouvriers syndicalistes, chargés de mettre en œuvre ces ordonnances : Ambroise Croizat, qui amorce la création de la sécurité sociale, avec l’ambition de la généraliser, et Marcel Paul, qui travaille à la création d’EDF.
Au sein d’EDF, Marcel Paul et les syndicalistes construisent un régime de sécurité sociale ayant vocation, dans leur esprit, à s’étendre à l’ensemble du monde du travail. (Mme Marie-Noëlle Lienemann applaudit.) Or vous faites exactement le contraire ! Vous ne pouvez donc pas vous réclamer d’eux ; c’est une imposture.
Les héritiers de Marcel Paul et d’Ambroise Croizat se trouvent sur ces travées, pas au banc du Gouvernement ! Ils sont dans la rue, pas aux côtés de ceux qui mettent en pièces le régime de sécurité sociale des agents d’EDF ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST.)
M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour explication de vote.
M. Franck Montaugé. Je profite de cette prise de parole pour rendre hommage aux centaines de milliers d’agents, hommes et femmes, gaziers et électriciens qui, depuis 1946, sont l’honneur industriel de la France.
Il se trouve que je suis issu d’une famille de gaziers et d’électriciens. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Laurent Duplomb. Et moi de paysans !
M. Franck Montaugé. Je l’assume pleinement, d’ailleurs.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Ce n’est pas dégradant !
M. Franck Montaugé. J’en suis même plutôt fier ! (Applaudissements sur des travées des groupes SER et CRCE.)
C’était mon entreprise, aussi vais-je en parler avec un peu d’émotion et beaucoup de respect.
Nous assistons, par la volonté du Gouvernement, à l’affaiblissement du pacte social de cette entreprise. Or il faut s’interroger sur ses causes.
Je partage les arguments de certains collègues : affaiblir le pacte social des électriciens et de gaziers n’est pas une bonne manière d’aborder les grands projets que la France doit mener en matière énergétique. Cela semble évident, et pourtant, le Gouvernement y va ! Pourquoi le fait-il ? Parce qu’il existe un projet de vente à la découpe d’EDF et de ce qui reste de Gaz de France. (Mmes Marie-Noëlle Lienemann et Émilienne Poumirol applaudissent.) Cette idée n’a jamais quitté l’esprit des gouvernants actuels. C’est un élément fondamental.
Ainsi, je soutiens les électriciens et les gaziers qui se mobilisent : ils ont raison, et nous serons avec eux jusqu’au bout ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Vous persistez dans votre volonté de destruction malgré les chiffres que nous vous livrons et les démonstrations que nous vous faisons depuis le début de nos débats.
Cela vaut pour le Gouvernement, mais aussi pour nos collègues siégeant à la droite de cet hémicycle : contrairement aux gaziers et aux électriciens, vous n’affrontez pas la tempête, chers collègues. Vous courbez le dos, sans mesurer les conséquences de votre attitude !
Comment renforcerez-vous l’attractivité des métiers ? Comment répondre aux besoins de recrutement de ces entreprises pour faire face aux défis du XXIe siècle ? Comment lutterez-vous contre la sous-traitance en cascade qui casse le service public et exige que les IEG réparent les erreurs dues au manque de formation de ces salariés ?
Nous voyons bien qu’une autre logique doit être adoptée. Ce régime devrait tirer vers le haut l’ensemble des protections de tous les salariés.
Vous affirmez, monsieur le ministre, que c’est à cause du régime spécial des IEG que les factures énergétiques explosent et que les Français paient ce régime spécial. C’est faux ! Ces régimes ont toujours contribué à la solidarité nationale, en reversant leurs excédents aux caisses déficitaires.
Par ailleurs, je rappelle que ces salariés que vous pointez du doigt cotisent à hauteur de 13 %, tandis que les salariés dans le privé le font en moyenne à hauteur de 10 %. Comment réglerez-vous cette situation ?
Enfin, ces salariés travaillent en trois-huit ; ils sont présents à toute heure dans les installations. Pourtant, vous les pointez du doigt. Vous avez déclaré que ce régime pesait 1,7 milliard d’euros. Or vous avez fait cadeau de centaines de milliards d’euros aux grands patrons sans aucune contrepartie – cherchez l’erreur ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE. – M. Hussein Bourgi applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour explication de vote.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Comme le rappellent les premiers concernés, c’est-à-dire les électriciens et les gaziers des près de 157 entreprises de la branche des IEG, il est impensable de faire cohabiter deux régimes.
Outre l’injustice pour les nouveaux embauchés, qui devront accomplir les mêmes tâches que leurs collègues, mais en relevant d’un régime différent, ces travailleurs et travailleuses savent bien qu’il s’agit de la disparition assurée et assumée de leur statut.
Comment pouvez-vous nier la dégradation rapide de l’équilibre entre cotisants actifs et retraités, qui constituera un énième prétexte pour remettre en cause les dispositifs statutaires ?
Or ce statut et ces régimes spéciaux de retraite et de sécurité sociale – la Caisse d’assurance maladie des industries électriques et gazières (Camieg) – sont la juste contribution sociale due aux agents qui assurent le service public de l’énergie 365 jours par an et 24 heures sur 24, et par tous les temps, pour la Nation et les usagers.
Pourtant, sous couvert, encore une fois, d’une prétendue équité, vous entendez supprimer ce régime pionnier, qui prend en compte la pénibilité par des anticipations de départ. Ce faisant, vous tirez tout le monde vers le bas. Votre véritable crainte, c’est justement que ce régime ne serve de modèle à d’autres.
Il y a peu, les salariés de mon département ont été mobilisés jour et nuit à la suite d’une tornade dans les villages autour de Bihucourt. Je vois encore le ministre Darmanin féliciter, le cœur sur la main, les pompiers, mais aussi les agents EDF ! Et la seule récompense que vous leur proposez, avec nos collègues de droite, c’est de supprimer leur régime… Je trouve cela scandaleux.
Mme Laurence Cohen. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Patrice Joly, pour explication de vote.
M. Patrice Joly. Je dois vous faire part de mon étonnement de voir le Gouvernement proposer la suppression du régime de retraite des agents des IEG.
Au-delà de ce qui a déjà été dit sur l’engagement de ces derniers et sur la qualité de leur action, est-ce le bon moment de les déstabiliser en suscitant, par cette proposition, des craintes et des aigreurs ?
Nous devons pourtant répondre à des questions beaucoup plus essentielles pour notre pays sur les sujets énergétiques, pour assurer notre souveraineté et faire face aux risques qui pèsent sur l’humanité.
Je pense bien sûr aux conséquences de la guerre en Ukraine et aux évolutions du paysage géopolitique, mais aussi aux sujets environnementaux, notamment la décarbonation de notre économie. Pour relever ces défis, notre pays a besoin de paix sociale, afin que les Français, là où ils sont, puissent agir le plus utilement possible.
En conséquence, je voterai pour tout amendement qui tendra au maintien de ce régime spécial.
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.
M. Guillaume Gontard. Ces amendements sont importants, et je m’étonne qu’ils ne fassent pas plus débat et que l’on n’entende pas davantage d’interventions du côté droit de l’hémicycle… Nous touchons pourtant le cœur d’un enjeu fondamental : les questions énergétiques et climatiques, sur lesquels vous n’avez d’ailleurs aucune visibilité.
Pourtant, vous décidez de revenir sur le régime des IEG. Nous savons évidemment que derrière la suppression de ce régime se cache la suppression d’un statut qui a été créé en 1946. Or il ne l’a pas été pour rien ! Il l’a été parce que la question énergétique est fondamentale pour notre pays. Nous avons besoin que nos fonctionnaires et ceux qui travaillent dans ce domaine soient indépendants.
Les avantages de ce statut permettent d’attirer et de fidéliser des travailleurs dans une profession à la fois difficile et usante. Pourquoi nous en priverions-nous ?
Nous sommes dans un jeu de domino : après avoir fait tomber le régime spécial, le statut suivra à l’évidence. Vous l’avez d’ailleurs suggéré, monsieur le ministre, en prenant l’exemple de la SNCF, pour laquelle on commence à voir les résultats de vos réformes : de la même manière, une vente à la découpe sera organisée, comme cela a été expliqué par mes collègues.
Je me pose la question : quel est le but de la destruction, un par un, de nos services publics ? Qu’est-ce qui vous gêne dans ce régime ? Que des salariés aient une bonne protection ? Qu’ils puissent faire leur métier correctement ? Est-ce une petite politique comptable ? Ou peut-être êtes-vous simplement entraînés par votre dogmatisme libéral ? (Mme Marie-Noëlle Lienemann et M. Jacques Fernique applaudissent.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.
M. Jean-Yves Leconte. Je m’étonne moi aussi du silence de l’autre côté de l’hémicycle. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Michel Savin. Cela vous énerve ?
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Nous faisons ce que nous voulons !
M. Jean-Yves Leconte. Je suis toujours étonné que, au nom de l’égalité, on construise un système dans lequel les équipes compteront, d’un côté, des personnes bénéficiant encore d’un système qui prend en compte la pénibilité, et, de l’autre, des personnes rattachées au régime général.
Toutefois, ce qui me stupéfait, c’est que, malgré les ambitions que nous affichons pour la politique énergétique de la France et pour notre indépendance énergétique, malgré les erreurs que nous avons tous commises en la matière…
M. Laurent Duplomb. Pas tous !
M. Jean-Yves Leconte. … et que nous ne devons pas reproduire, nous faisons fi du fait que, pour mener cette politique, nous avons besoin d’engager des femmes et des hommes et de les protéger comme ils le sont actuellement.
Je ne comprends pas comment, vu les effets de la politique menée depuis vingt ou trente ans en matière de libéralisation et de déstructuration des services publics de l’énergie, vous pouvez ne pas vouloir y mettre un coup d’arrêt.
Nous devons assurer l’égalité dans les équipes et protéger les agents, afin qu’ils soient mobilisés pour appliquer une politique essentielle pour le pays.
Il est inacceptable de fragiliser la base de notre ambition pour la politique énergétique de la France, c’est-à-dire les femmes et les hommes qui la construisent, qui la maintiennent, et qui, lorsque notre pays rencontre des problèmes, sont d’astreinte, jour après jour, pour les corriger.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.
Mme Laurence Rossignol. J’écoute avec attention les quelques interventions prononcées au banc des commissions ou de l’autre côté de l’hémicycle. Elles sont rares,…
M. Fabien Genet. Mais de qualité !
Mme Laurence Rossignol. … donc nous pouvons les écouter avec beaucoup de concentration.
Mme la rapporteure générale a défendu tout à l’heure la fin du régime de sécurité sociale des IEG, en arguant qu’il était injuste que les 80 % de sous-traitants qui travaillent dans le secteur n’en bénéficient pas. Quelle incroyable démonstration !
Souvenons-nous de ce qui s’est passé : avant la libéralisation des industries de réseaux, réalisée sur l’initiative de directives européennes, il n’y avait pas de sous-traitance. Il n’y avait que des travailleurs sous statut. Il y avait un service public de l’électricité, un service public du gaz, un service public du ferroviaire, un service public de la poste… (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Laurent Duplomb. Frustration socialiste !
Mme Laurence Rossignol. C’est précisément à cause de l’ouverture à la concurrence et pour soumettre ces services au marché qu’il a fallu baisser les cotisations salariales, s’en prendre au statut des salariés et transférer des activités à la sous-traitance.
C’était pour détruire le statut que la sous-traitance a été instaurée. Et vous venez maintenant nous expliquer que, pour ne pas être injuste avec les sous-traitants, il faudrait achever le statut ? Quelle belle démonstration de ce que le libéralisme inflige depuis trente ans, à la fois à nos services publics et à nos consommateurs !
En effet, la belle fable selon laquelle les consommateurs allaient être les bénéficiaires de la dérégulation des réseaux en Europe a été battue en brèche. Cela n’a fait qu’affaiblir l’ensemble de nos services publics de réseaux : cela va mal pour EDF comme pour la SNCF ! Tout va mal, et vous faites en sorte que ça aille encore plus mal ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. le président. La parole est à M. Thomas Dossus, pour explication de vote.
M. Thomas Dossus. Nous en sommes encore à discuter de l’article 1er, car il s’agit d’un article fourre-tout. Nous sommes passés de régime en régime, chacun ayant ses propres spécificités, son propre financement et sa propre histoire. Celui des IEG est très important. Vous avez décidé de mettre fin, de manière globale, à plusieurs régimes. Mais sur celui-ci, vous vous trompez lourdement.
Il s’agit d’un régime qui est certes protecteur, mais aussi extrêmement stratégique, et même critique ! Il existe des scénarios plus précis et plus inquiétants pour l’avenir que ceux du COR : ce sont ceux du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec).
Nous avons examiné plusieurs textes portant sur les questions énergétiques. Et quels que soient les choix que nous ferons et les directions que nous prendrons, nous aurons besoin de l’expertise et de l’expérience des IEG.
Or vous décidez de fragiliser ce secteur. Au lieu de renforcer l’attractivité, vous affaiblissez nos métiers d’avenir. Votre réforme est à rebours non seulement du progrès social, mais aussi des enjeux climatiques, qui sont ceux du siècle.
En désarmant la France sur ces questions, vous tirez, une nouvelle fois, notre pays vers le bas. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées des groupes SER et CRCE.)
M. le président. La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy, pour explication de vote.
M. Christian Redon-Sarrazy. Je me permettrai de prolonger le propos de mon collègue Franck Montaugé, car il me semble qu’il avait encore bien des choses à dire à l’issue du temps de parole qui lui était imparti.
Le projet récurrent de démembrement de notre système énergétique est toujours dans les tiroirs. Et j’ai l’impression que la remise en question du statut des salariés des IEG marque le début du processus.
Permettez-moi de tracer un parallèle avec le secteur des télécoms et du numérique. Nous avons vu ce qu’a donné la mise en marché du haut débit et du très haut débit. Le ministère a mis en place des modes « sous-traitance opérateur commercial (Stoc) ». Il y a eu le mode Stoc I, puis il a fallu passer au mode Stoc II, car le résultat du premier était catastrophique…
Il a fallu organiser des systèmes de contrôle et parfois infliger des pénalités aux opérateurs qui intervenaient en cascade, là où auraient pu le faire des personnes compétentes. C’est une question de choix !
Je ne parle même pas de l’inégalité territoriale induite par ce modèle. Demain, avec votre réforme, l’accès ne sera pas garanti de la même façon partout, comme il peut l’être actuellement grâce aux personnes qui ont le statut.
Mes chers collègues, il faut donc voter contre la suppression de ce régime spécial, qui remettra en question des acquis fondamentaux pour nos territoires.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Olivier Dussopt, ministre. Madame Assassi, je vous répondrai sur deux points.
Premièrement, vous avez pointé à raison, en citant les différentes fiches d’impact que nous vous avons remises en présentant PLFSSR, que, dès la fin de l’année 2023, quelque 4 490 salariés seraient versés au régime général – les nouveaux embauchés –, ce qui représenterait autant d’inscriptions en moins auprès du régime spécial. Aussi vous inquiétez-vous pour la pérennité du financement du système.
Nous avons notifié à toutes les entreprises concernées par une réforme du régime spécial en flux que nous nous engageons évidemment à garantir le financement des retraites à verser, que ce soient les retraites actuelles ou celles des salariés qui partiront à la retraite en bénéficiant du régime spécial dans le cadre de la clause du grand-père.
Nous avons fait de même, dans un contexte quelque peu différent, dans le cadre du pacte ferroviaire. À titre d’exemple – ce sera discuté à l’occasion de l’examen des prochains textes financiers –, des transferts devraient être prévus entre la Cnav et le régime spécial pour garantir ce financement.
Je le répète bien volontiers devant vous : engagement a été pris d’assurer la soutenabilité et le financement des régimes spéciaux tant qu’ils auront des retraites à verser à des retraités, actuels ou futurs, relevant du régime spécial.
Deuxièmement, M. Retailleau a déposé un amendement après l’article 7, car c’est de cette partie du texte qu’il relève de manière organique, visant à accélérer le régime de convergence tout en maintenant la clause du grand-père.
Si je souligne sa constance, car je sais qu’il dépose cet amendement de manière systématique, j’en profite pour affirmer publiquement que le Gouvernement n’est pas favorable à cette mesure. Nous en discuterons lorsque cet amendement sera examiné, mais comme vous m’avez interrogé directement sur cette question, madame Assassi, j’apporte une réponse tout aussi directe.
Par ailleurs, madame Cohen, je n’ai à aucun moment déclaré que la CTA était responsable de l’explosion des factures énergétiques. Ce que j’ai dit, en revanche, c’est qu’il s’agissait d’une taxe affectée payée par l’ensemble des consommateurs, donc par les contribuables. Je n’ai pas fait de lien entre l’augmentation du prix de l’énergie que nous connaissons et la CTA, puisque celle-ci est remarquablement stable.
Enfin, si j’ai employé les mots « flux » et « stock », ce que j’essaye de faire le moins possible, je n’ignore pas que nous parlons d’êtres humains. Peut-être est-ce un défaut de langage que nous adoptons trop facilement au cours des débats, mais il permet de discerner ce qui relève des nouveaux embauchés et ce qui relève des bénéficiaires du régime actuel.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 345 et suivants.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 153 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 340 |
Pour l’adoption | 98 |
Contre | 242 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix l’amendement n° 3964 rectifié.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 154 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 339 |
Pour l’adoption | 98 |
Contre | 241 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix l’amendement n° 3937 rectifié.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 155 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 339 |
Pour l’adoption | 99 |
Contre | 240 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Mes chers collègues, si vous en êtes d’accord, je vais mettre aux voix par un vote unique les amendements nos 3016 rectifié à 2734 rectifié, que Mme Lubin a défendus globalement. (Marques d’assentiment.)
Je mets aux voix ces amendements.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Mes chers collègues, je vous remercie d’avoir été présents si nombreux, prolixes pour certains, patients pour d’autres… (Rires et applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, INDEP et RDPI.) Cela nous a permis d’avoir un débat !
Nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt heures, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de Mme Pascale Gruny.)
PRÉSIDENCE DE Mme Pascale Gruny
vice-président
Mme le président. La séance est reprise.
5
Mise au point au sujet d’un vote
Mme le président. La parole est à M. Henri Cabanel.
M. Henri Cabanel. Lors du scrutin n° 155 sur l’amendement n° 3937 rectifié, mon collègue Bernard Fialaire souhaitait voter contre.
Mme le président. Acte est donné de votre mise au point, mon cher collègue. Elle figurera dans l’analyse politique du scrutin.
6
Rappels au règlement
Mme le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour un rappel au règlement.
Mme Éliane Assassi. Mon rappel au règlement se fonde sur le chapitre XIV de notre règlement, relatif, entre autres, aux conditions de dépôt des projets de loi.
Monsieur le ministre, l’article 39 de la Constitution édicte, à son alinéa 2, ce principe intangible : « Les projets de loi sont délibérés en conseil des ministres après avis du Conseil d’État et déposés sur le bureau de l’une des deux assemblées. » Un avis a donc été rédigé sur ce projet de loi ; le contraire serait anticonstitutionnel.
Or vous avez affirmé hier, monsieur le ministre : « Sur les projets de loi de financement de la sécurité sociale comme sur les projets de loi de finances, le Conseil d’État ne rend pas d’avis : il remet au secrétariat général du Gouvernement une note de synthèse. »
Pouvez-vous me confirmer solennellement vos propos d’hier niant l’existence d’un tel avis ? Et, si cet avis existe, pouvez-vous agir concrètement pour le faire publier, afin d’éclairer nos travaux ?
Quant à la note que vous évoquez et qui, selon la presse, souligne l’inconstitutionnalité de votre projet de loi, il me paraîtrait justifié que nous en ayons connaissance.
Je vous demande donc de nouveau avec solennité de permettre au Sénat d’en prendre connaissance au plus vite, afin d’éclairer nos travaux. (Mmes Laurence Cohen et Raymonde Poncet Monge applaudissent.)
Mme le président. La parole est à M. le ministre.
M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion. Ce doit être la quatrième ou la cinquième fois que j’apporte cette précision…
Je vous le confirme, madame Assassi, sur les textes financiers – projets de loi de finances et projets de loi de financement de la sécurité sociale –, le Conseil d’État remet au secrétariat général du Gouvernement, donc au Gouvernement, une note. Cette dernière comprend un certain nombre d’observations et d’appréciations sur les dispositions envisagées et sur leur recevabilité, mais il ne s’agit pas d’un avis au sens usuel.
En outre, en 2015, le président François Hollande a décidé, par une décision orale – le président du groupe socialiste au Sénat l’a rappelée hier ou avant-hier –, que les avis, au sens strict, du Conseil d’État émis sur les projets de loi avant examen en conseil des ministres seraient rendus publics. Depuis lors, cela constitue une doctrine constante.
Il a été décidé à la même époque et par le même Président de la République que les notes, avec des appréciations, des commentaires et des évaluations, remises au Gouvernement par le Conseil d’État dans le cadre de son rôle de conseil sur les textes financiers ne seraient pas rendues publiques.
Vous le savez, je ne suis pas Président de la République,…
M. Jean-François Husson. Pas encore… (Sourires.)
M. Olivier Dussopt, ministre. … je n’ai donc pas autorité pour revenir sur une telle décision.
Aujourd’hui, en application de la décision orale du Président de la République en exercice en 2015, les avis du Conseil d’État sur les projets de loi sont rendus publics, mais ses notes sur les textes financiers sont remises au secrétariat général du Gouvernement sans être publiées. Seuls certains parlementaires, au titre de leurs fonctions de contrôle et de prérogatives particulières, peuvent en demander la consultation.
Mme le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour un rappel au règlement.
M. Laurent Duplomb. Encore un ?
M. Laurent Duplomb. Il y en a un peu marre tout de même !
Mme Laurence Rossignol. Mon rappel se fonde sur le chapitre XIV de notre règlement.
Je ne m’étais pas encore exprimée sur cette affaire, mais la réponse du ministre, que j’ai entendue plusieurs fois – reconnaissons-lui tout de même une certaine constance – m’amène à réagir.
Vous dites, monsieur le ministre, que le président Hollande a décidé, en 2015, de rendre publics les avis du Conseil d’État sur les projets de loi et non ses notes. Mais il n’est écrit nulle part que ces notes ne peuvent pas être rendues publiques ! Il relève du pouvoir discrétionnaire du Gouvernement, en l’espèce du vôtre, de décider de rendre publique une note qui ne l’est pas obligatoirement.
Vous jouez donc sur la nuance entre publicité obligatoire et publicité non obligatoire. L’absence d’obligation n’interdit pas la publication. C’est ce que mes collègues ont déjà demandé à plusieurs reprises.
Mme le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour un rappel au règlement.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Mon rappel au règlement est également fondé sur le chapitre XIV.
Je voudrais comprendre. Monsieur le ministre, vous affirmez qu’il n’y a pas d’avis du Conseil d’État sur ce texte.
Pourtant, il est indiqué dans le décret de présentation au Parlement du PLFSS pour 2023 :
« La Première ministre […]
« Décrète :
« Le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023, délibéré en conseil des ministres après avis du Conseil d’État, sera présenté à l’Assemblée nationale par le ministre », etc. Il y avait donc bien un « avis » !
Par ailleurs, puisque notre collègue Savary est présent, je me permets de l’interroger : mon cher collègue, avez-vous pris connaissance, en tant que président de la mission d’évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss), de cet avis ou de cette note, et ne serait-il pas opportun que vous nous en décriviez le contenu ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)
Mme Éliane Assassi. Très bien !
Mme le président. La parole est à M. le ministre.
M. Olivier Dussopt, ministre. Madame Rossignol, la décision de rendre publique une note du Conseil d’État sur un texte financier devrait, par parallélisme des formes, être prise par le Président de la République, ce que je ne suis pas.
En outre, en rappelant la règle fixée depuis la décision orale du Président Hollande, j’exprime ma fidélité à sa doctrine, de même qu’en matière de politique économique.
Mme Laurence Rossignol. C’est bien votre seule fidélité à cette époque…
Mme Éliane Assassi. C’était une décision purement orale !
Mme le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. René-Paul Savary, rapporteur de la commission des affaires sociales pour l’assurance vieillesse. Je m’exprime ici surtout en tant que président de la Mecss.
Soyez-en assurés, mes chers collègues, nous avons fait notre travail. J’ai d’ailleurs été étonné que vous ne me posiez pas la question plus tôt… (Rires et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.) Mais vous vous êtes repris, et c’est très bien !
Oui, j’ai fait en sorte de connaître toutes les informations nécessaires et, en tant que président de la Mecss, je puis en effet avoir accès à ces documents, même si je ne fais pas la publicité de mes actions. Contrairement à l’Assemblée nationale, nous travaillons sur le fond, dans la discrétion, de façon à pouvoir vous présenter des textes travaillés différemment ; c’est le principe du bicamérisme et c’est une différence que nous cultivons.
Mme Éliane Assassi. Et vos collègues de la Mecss ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Cette note, que j’ai consultée, ne contient rien de scandaleux. Elle appelle simplement l’attention sur quelques dispositions qui peuvent éventuellement poser une question de constitutionnalité et qui, du reste, ne nous avaient pas échappé.
M. Thomas Dossus. Lesquelles ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Par exemple sur l’index seniors, sur le recouvrement des cotisations Agirc-Arrco par l’Urssaf et sur la prise en compte des visites médicales, qui n’entrent pas tout à fait dans le cadre d’un PLFRSS.
Bref, il n’y a rien d’extraordinaire : ce sont des alertes tout à fait courantes, qui ne remettent pas en cause nos débats au Sénat.
Mme le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour un rappel au règlement.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Je n’avais aucun doute que vous aviez fait votre travail en tant que président de la Mecss, monsieur Savary. Mais pourquoi n’y avons-nous pas eu accès également, en tant que membres de cette mission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Il n’y a pas eu de réunion !
Mme Cathy Apourceau-Poly. Pourquoi ne nous avez-vous pas remis les notes que vous êtes allé chercher pour faire votre travail ? Pourquoi nous avez-vous empêchés de faire le nôtre, en tant que membres de la Mecss ? (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains.)
Cela dit, je vous rassure, nous allons les chercher, puisque nous pouvons le faire !
M. Laurent Duplomb. Eh bien voilà !
M. René-Paul Savary, rapporteur. Faites votre travail !
Mme le président. La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour un rappel au règlement.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Mon rappel au règlement se fonde sur l’article 19 bis A de notre règlement.
Ce qui est en train de se passer est important et grave. (Marques d’ironie sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Philippe Pemezec. Ah oui ?
M. Laurent Duplomb. Qu’est-ce qui n’est pas grave ?
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Si vous êtes gênés par ce que je dis, vous n’êtes pas obligés de m’écouter, chers collègues. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) Nous sommes tous parlementaires, ici, donc respectez ceux qui s’expriment ! (Protestations sur les mêmes travées.)
M. Fabien Genet. Vous aussi, respectez-nous ! Voilà 48 heures que nous vous écoutons !
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Madame la présidente, puis-je m’exprimer sans subir ces quolibets ?
Mme le président. Poursuivez sans les écouter, madame de La Gontrie.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Depuis le début de ce débat, il a été demandé à plusieurs reprises par divers collègues la communication de ce qui a été présenté d’abord comme un avis, mais qui serait, d’après les dires du ministre, une note.
À plusieurs reprises, nos collègues du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires ont interrogé le Gouvernement.
Je suis frappée et surprise, pour ne pas dire choquée,…
M. Laurent Duplomb. Oh !
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. … que le président de la Mecss, par ailleurs rapporteur du texte, n’ait pas cru devoir préciser à ces occasions qu’il avait été, lui, en mesure d’accéder à ce document !
M. René-Paul Savary, rapporteur. Mais c’est la loi !
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Il me semble que le résumé assez désinvolte qu’il vient de faire pose également problème. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Fabien Genet. Vous n’êtes jamais contente !
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Je vais suivre votre conseil, madame la présidente, je ne vais pas écouter nos collègues…
Je demande donc au rapporteur de nous faire un compte rendu précis et rigoureux du contenu de cette note, étant entendu que les autres membres de la Mecss pourront sans doute se la procurer dès demain ou après-demain.
M. Laurent Duplomb. Tout ça pour ça…
Mme le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour un rappel au règlement.
M. Guillaume Gontard. Mon rappel au règlement est fondé sur l’article 19 bis.
Nous nous trouvons face à un problème : monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, vous ne pouvez pas dire que l’on ne vous a pas demandé et redemandé, depuis l’ouverture de la séance – je pense en particulier à mon collègue Daniel Breuiller – de nous transmettre cette note !
J’entends les explications de M. le ministre, mais, franchement, ce document est demandé par tout le monde et, a priori, d’après ce que vous dites, vous n’avez rien à cacher. Vous nous avez même dit que l’on pouvait en lire certains éléments dans les journaux et que nous n’avions qu’à nous y référer… Il faut être sérieux : nous examinons un texte important, et il me semble que vous pourriez transmettre cette note.
Quant à vous, monsieur le rapporteur, vous venez de nous expliquer – cela arrive en effet un peu tard – que vous avez eu connaissance de cette note. Eh bien, je demande, moi aussi, une note sur la note (Sourires.), c’est-à-dire un compte rendu précis qui soit transmis aux membres de la commission, afin que nous disposions de l’ensemble des éléments nécessaires.
Mme le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. René-Paul Savary, rapporteur. Quand on me pose une question, je réponds ! Mme Lienemann, toujours pertinente, m’a posé la question : j’ai répondu. C’est vrai, je ne vous le cache pas, j’ai été surpris que l’on ne me l’ait pas posée pas plus tôt.
Chacun ses prérogatives, chacun ses responsabilités et, au travers des dispositions que nous adoptons année après année, nous montrons que nous sommes capables de prendre les nôtres.
Cette note est confidentielle. (Exclamations sur les travées du groupe GEST.) Mais c’est la loi, mes chers collègues ! Cette note peut être consultée par certains parlementaires : la présidente de la commission des affaires sociales, la rapporteure générale et le président de la Mecss.
Mme Éliane Assassi. Les membres de la Mecss !
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Uniquement le président de la Mecss !
M. René-Paul Savary, rapporteur. Ceux-ci ne doivent en aucun cas la rendre publique ! C’est comme si vous me demandiez de porter atteinte, par exemple, au secret médical ! (Protestations sur les travées du groupe SER.) C’est de la même nature !
En conséquence, je suis ouvert à l’idée d’en parler publiquement, car je puis légalement le faire. Donc nous pouvons en discuter si vous le souhaitez, mais, en aucun cas, je le répète, cette note ne peut être publiée.
Telle est la loi. Je la respecte et je suis sûr que vous êtes dans les mêmes dispositions d’esprit.
Mme le président. La parole est à M. Daniel Breuiller, pour un rappel au règlement.
M. Daniel Breuiller. Je m’appuie toujours sur l’article 19 bis de notre règlement.
Je me suis exprimé à de nombreuses reprises sur le sujet. Je pensais qu’il existait ici une confraternité parlementaire, qui aurait permis de renseigner un tout jeune sénateur, comme je le suis,…
M. Bruno Sido. Un sénateur récent !
M. Daniel Breuiller. … sur le fait que certains de nos collègues avaient accès à cette note.
Toutefois, c’est accessoire. Ce qui ne l’est pas, c’est que nous allons débattre prochainement de l’article 2, qui est, selon cette note, probablement inconstitutionnel.
Nous allons donc consacrer du temps, sans avoir aucune information, à la discussion d’un article, qui a d’ailleurs été supprimé par nos collègues de l’Assemblée nationale ! C’est substantiel, et c’est une atteinte à la sincérité de nos débats. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
Mme Frédérique Puissat. Lisez la presse !
Mme le président. La parole est à Mme Monique Lubin, pour un rappel au règlement.
Mme Monique Lubin. Nous allons aussi…
Mme le président. Sur quel article se fonde votre rappel au règlement, ma chère collègue ?
Mme Monique Lubin. Sur l’article 19 bis A.
Monsieur le président de la Mecss, vous n’avez certes pas le droit de nous photocopier cette note, nous le savons, mais vous pouvez peut-être nous la lire !
Mme Éliane Assassi. Eh oui !
Mme Monique Lubin. Cela nous éviterait un voyage, qui nous ferait perdre du temps, alors que nous avons beaucoup de travail. (Mme Laurence Cohen applaudit.)
Mme le président. La parole est à M. Yan Chantrel, pour un rappel au règlement.
M. Yan Chantrel. Mon rappel se fonde sur l’article 19 bis, et j’espère que, par cette intervention, nous aurons gain de cause !
Monsieur le rapporteur, je constate que vous n’avez pas fait droit à la requête exprimée par ma collègue Marie-Pierre de La Gontrie lors de son rappel au règlement. Elle vous a demandé d’indiquer non pas de manière cavalière, mais précisément, les éléments contenus dans ce document, afin d’éclairer nos débats.
Nous assistons depuis le début de la discussion à une véritable collusion entre le Gouvernement et la majorité sénatoriale,…
M. Vincent Éblé. C’est clair !
M. Yan Chantrel. … y compris sur ce sujet, comme s’il y avait un pacte pour ne pas divulguer certains éléments sur ce projet de réforme… Mais qu’avez-vous donc à cacher ? Divulguez-les-nous !
Nous sommes ici pour débattre, pour parler du fond. Donc, parlons-en, et donnez-nous tous les éléments, non de manière cavalière, comme vous l’avez fait, mais dans le détail et avec précision, afin que le Parlement soit informé comme il se doit et qu’il puisse débattre pleinement, comme M. Breuiller l’a très bien dit, de l’article 2.
Mme le président. La parole est à M. Pierre Laurent, pour un rappel au règlement.
M. Pierre Laurent. Ce rappel au règlement se fonde également sur le chapitre XIV de notre règlement.
Monsieur le ministre, une chose n’est pas très claire. J’ai bien écouté toutes vos réponses, et il y a bien eu, sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023, un « avis » du Conseil d’État. J’ai entre les mains le texte du décret de présentation du Parlement qui l’indique.
Par conséquent, pour le PLFRSS dont nous discutons, pourquoi y aurait-il non pas un « avis », mais seulement une « note » du Conseil d’État ?
M. Philippe Mouiller. Il a déjà répondu !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Il est écrit « après avis du Conseil d’État » !
M. Pierre Laurent. Vous certifiez qu’il n’y a pas d’« avis » sur les PLFSS, mais si, il y en a un. Il y a quelque chose qui n’est pas clair. Nous aimerions donc des précisions.
7
Loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023
Suite de la discussion d’un projet de loi
Mme le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023, dont le Sénat est saisi en application de l’article 47-1, alinéa 2, de la Constitution.
Dans la discussion des articles, nous poursuivons, au sein de la première partie, l’examen de l’article 1er.
PREMIÈRE PARTIE (suite)
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES ET À L’ÉQUILIBRE DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L’EXERCICE 2023
Article 1er (suite)
Mme le président. L’amendement n° 4004 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli, est ainsi libellé :
Alinéa 23
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Cet amendement d’apparence technique tend à supprimer l’affiliation au régime de la sécurité sociale des travailleurs sous statut.
Loin de n’être que la traduction de la suppression des régimes spéciaux, l’article dont nous débattons, qui instaure l’affiliation obligatoire de ces derniers au régime général, constitue un véritable dévoiement du régime général de la sécurité sociale, lequel pourrait désormais intégrer tout travailleur, quel que soit son statut.
C’est la technique du « pied dans la porte » : le Gouvernement semble préparer l’élargissement à d’autres régimes spéciaux, épargnés pour le moment, de l’affiliation au régime général.
En tout état de cause, rien ne l’empêcherait de le faire, sinon la nécessité de revenir devant le Parlement. Mais il ne manquerait pas de s’y plier, avec l’assentiment de la droite sénatoriale, toujours prompte à donner ses voix à une nouvelle régression sociale.
Au-delà des quelques régimes dits « spéciaux » qui demeurent à l’issue de cette réforme des retraites, peut-être le Gouvernement envisage-t-il également d’intégrer au régime général d’autres risques sociaux qui sont toujours couverts par les régimes spéciaux, dans un mouvement consistant à se demander, en se frottant les mains : « Après les droits à la retraite, quoi d’autre ? »
Un dernier point suscite notre interrogation, mais il y a sûrement une explication : pourquoi n’avoir pas procédé à ce que vous qualifiez de « précision légistique » lors de l’enterrement du régime spécial pour les nouveaux entrants cheminots ?
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. La suppression de cet alinéa entraînerait un vide juridique pour le personnel concerné. Du reste, c’est contraire à la position de la commission.
La commission émet donc un avis défavorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° 4004 rectifié.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
Mme le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 156 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 339 |
Pour l’adoption | 98 |
Contre | 241 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Amendements identiques de suppression des alinéas 24 à 27 et 41 de l’article
Mme le président. Je suis saisie de cinquante-deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 4013 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli, est ainsi libellé :
Alinéas 24 à 41
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Nous entamons maintenant le débat sur le système de retraite des membres du Conseil économique, social et environnemental (Cese).
De manière générale, nous nous opposons à la remise en cause des régimes spéciaux, mais, pour ce qui concerne le Cese, une autre considération doit entrer en ligne de compte : même si elle n’est pas d’ordre parlementaire, cette institution est malgré tout mentionnée dans la Constitution comme une assemblée délibérante consultative.
Nous n’accepterions pas – la Constitution le prévoit d’ailleurs – que l’Assemblée nationale ou le Sénat voient leur système de retraite défini par une autre instance qu’eux-mêmes. Il serait donc correct que, avant toute délibération destinée à remettre en cause ce système, le Sénat demande au Cese son analyse de l’avenir de son système de retraite.
Il serait opportun de le consulter pour savoir, premièrement, s’il a la même évaluation des risques financiers et de l’équilibre – un rapport du Sénat avait évoqué le sujet – et, deuxièmement, s’il a des propositions concrètes à formuler. En effet, je suppose que cet organe doit réfléchir, comme toutes les assemblées, à la pertinence de son système de retraite au regard de ce que nos concitoyens pensent de nos assemblées.
Je n’insiste pas sur notre système à nous, mais le groupe CRCE trouve inacceptable que l’on n’ait pas au préalable saisi le Cese sur son régime de retraite. (Marques d’approbation sur les travées du groupe CRCE.)
Mme le président. Les quarante-quatre amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 285 est présenté par M. Féraud.
L’amendement n° 317 est présenté par M. Pla.
L’amendement n° 346 est présenté par Mme Briquet.
L’amendement n° 371 est présenté par Mme Féret.
L’amendement n° 454 est présenté par M. Fichet.
L’amendement n° 509 est présenté par M. Chantrel.
L’amendement n° 523 est présenté par M. Gillé.
L’amendement n° 572 est présenté par Mme de La Gontrie.
L’amendement n° 584 est présenté par M. Redon-Sarrazy.
L’amendement n° 671 est présenté par Mme Le Houerou.
L’amendement n° 700 est présenté par Mme Blatrix Contat.
L’amendement n° 731 est présenté par M. M. Vallet.
L’amendement n° 813 est présenté par M. Jacquin.
L’amendement n° 826 est présenté par M. Lozach.
L’amendement n° 866 est présenté par M. Durain.
L’amendement n° 901 est présenté par M. Lurel.
L’amendement n° 946 est présenté par M. Cardon.
L’amendement n° 984 est présenté par M. Raynal.
L’amendement n° 1019 est présenté par M. Stanzione.
L’amendement n° 1065 est présenté par M. Houllegatte.
L’amendement n° 1080 est présenté par M. Tissot.
L’amendement n° 1101 est présenté par M. Éblé.
L’amendement n° 1155 rectifié bis est présenté par Mme Lubin.
L’amendement n° 1210 est présenté par M. Mérillou.
L’amendement n° 1249 est présenté par Mme Jasmin.
L’amendement n° 1273 est présenté par M. Montaugé.
L’amendement n° 1319 est présenté par Mme Préville.
L’amendement n° 1343 est présenté par M. Marie.
L’amendement n° 1376 est présenté par M. Bourgi.
L’amendement n° 1409 est présenté par M. Sueur.
L’amendement n° 1439 est présenté par M. Kerrouche.
L’amendement n° 1507 est présenté par Mme M. Filleul.
L’amendement n° 1546 est présenté par Mme Monier.
L’amendement n° 1595 est présenté par M. J. Bigot.
L’amendement n° 1625 est présenté par Mme Poumirol.
L’amendement n° 1655 est présenté par Mme Meunier.
L’amendement n° 1696 est présenté par M. Leconte.
L’amendement n° 1752 est présenté par M. Todeschini.
L’amendement n° 1794 est présenté par M. Jomier.
L’amendement n° 1822 est présenté par M. Kanner.
L’amendement n° 1849 est présenté par M. Assouline.
L’amendement n° 1995 est présenté par Mme Rossignol.
L’amendement n° 2074 est présenté par M. Jeansannetas.
L’amendement n° 2262 est présenté par Mme Espagnac.
Ces amendements sont ainsi libellés :
Alinéas 24 à 27 et 41
Supprimer ces alinéas.
Les amendements nos 285 et 317 ne sont pas soutenus.
La parole est à Mme Isabelle Briquet, pour présenter l’amendement n° 346.
Mme Isabelle Briquet. Nous avons déjà eu l’occasion de le dire : nous sommes opposés à la fermeture des régimes spéciaux.
Ces régimes correspondent à des conditions particulières de travail et trouvent pleinement leur légitimité aujourd’hui, alors que la façon dont on appréhende le travail s’est profondément modifiée.
La volonté de fermer ces régimes n’obéit à aucune logique sociale ni économique. Elle s’inscrit seulement dans une stratégie de diversion destinée à justifier une réforme portant préjudice à l’ensemble des salariés, en différant de deux ans l’âge du départ à la retraite.
C’est pourquoi cet amendement vise à supprimer la fermeture du régime spécial de retraite du Conseil économique, social et environnemental.
Mme le président. La parole est à Mme Corinne Féret, pour présenter l’amendement n° 371.
Mme Corinne Féret. Cet amendement vise à supprimer les alinéas 24 à 27 et 41 de l’article 1er, qui portent sur le régime spécial du Conseil économique, social et environnemental.
Ma collègue l’a rappelé, nous nous opposons à la suppression des régimes spéciaux.
J’ai envie de vous poser encore et toujours les mêmes questions, monsieur le ministre : pourquoi supprimer le régime spécial du Conseil économique, social et environnemental ? Comment a été effectué le tri entre les régimes spéciaux ? Je rappelle qu’il existe quarante-deux régimes spéciaux, dont cinq sont concernés par le projet de loi.
Toutes ces questions restent en suspens depuis le début de l’examen du texte.
Mme le président. La parole est à M. Jean-Luc Fichet, pour présenter l’amendement n° 454.
M. Jean-Luc Fichet. Monsieur le ministre, mes chers collègues, pourquoi le Cese ? Pourquoi ce régime spécial est-il particulièrement ciblé ?
Pour ma part, je ne connais pas ce régime spécial. Je pense donc qu’il faut se rallier à la position de Mme Lienemann et consulter d’abord les membres de cette assemblée sur leur régime, sur la vision qu’ils en ont et sur les critiques qu’ils peuvent en faire. Si des modifications devaient y être apportées, cela devrait se faire à leur avantage.
Mme le président. La parole est à M. Yan Chantrel, pour présenter l’amendement n° 509.
M. Yan Chantrel. En cohérence avec nos précédentes interventions, nous proposons la suppression des alinéas prévoyant la fermeture du régime spécial de retraite du Cese.
Au-delà de la fermeture de ce régime spécial et de la réforme des retraites, peut-être pourrions-nous mener une réflexion plus large sur le statut des élus locaux ? Je suis sûr d’ailleurs que cela vous intéressera, car cela nous concerne tous et toutes.
On constate en effet une importante crise des vocations. Il est difficile d’obtenir une représentation ou une mixité, à l’image de notre pays. Je puis en témoigner personnellement : quand on n’a pas un emploi protégé, quand on a une carrière hachée, il est difficile de s’engager sans filet, sans aucune protection éventuelle. La réinsertion n’est pas toujours évidente ensuite. De nombreux élus locaux ont beaucoup de difficultés à se réinsérer, l’exercice d’un mandat n’étant pas forcément valorisé.
Je pense que nous devons réfléchir à un moyen de protéger nos élus pour qu’ils puissent s’engager. Il faut favoriser l’engagement, et ce n’est pas notre chambre qui va s’y opposer, bien au contraire. Le régime des retraites fait partie de la solution. Prévoir un statut pour l’élu, c’est lui permettre de cotiser pleinement pour bénéficier d’un régime de retraite.
Nous devons approfondir cette réflexion pour permettre une avancée de la démocratie, pour notre pays et pour que davantage de personnes, d’où qu’elles viennent, puissent s’engager.
Mme le président. L’amendement n° 523 n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour présenter l’amendement n° 572.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Il est défendu, madame la présidente.
Mme le président. La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy, pour présenter l’amendement n° 584.
M. Christian Redon-Sarrazy. Alors que nous sommes parvenus au dernier régime que vous avez choisi de sacrifier, nous n’avons toujours pas eu d’explication sur vos choix de suppression.
Peut-être avez-vous simplement décidé de supprimer certains régimes pour montrer que vous ne visez pas seulement les deux régimes emblématiques de la RATP et des industries électriques et gazières, lesquels sont sans doute les véritables cibles de votre projet de loi ?
Nous souhaitons donc la suppression des alinéas 24 à 27 et 41 de l’article 1er, qui organisent la fermeture du régime du Cese.
Mme le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour présenter l’amendement n° 671.
Mme Annie Le Houerou. Par cet amendement, nous demandons le maintien du régime spécial des membres du Cese.
Le Cese est composé d’élus, engagés au service de l’intérêt général. Ils exercent des responsabilités dans des syndicats, des organisations de jeunesse, des coopératives, des organisations représentant les artisans, etc. Ils défendent la protection de la nature et de la biodiversité.
Dans une tribune publiée le 18 janvier dernier, des membres du Cese ont tracé six axes de transformation incontournables pour un système de retraite à la hauteur des défis du XXIe siècle : faire contribuer les revenus financiers du capital ; entrer dans une autre relation avec les entreprises pour conforter la cotisation sociale, en prévoyant, par exemple, un système de modulation ; réexaminer tous les dispositifs d’exonération de cotisations sociales patronales, qui encouragent souvent les bas salaires, etc.
Quand je lis ces recommandations, je m’interroge. Cette réforme ne me semble pas avoir sa place dans un PLFRSS. La réflexion n’est pas aboutie.
Pourquoi le régime spécial du Cese figure-t-il dans la liste de régimes spéciaux dont la mise en extinction est prévue ? Quels critères le Gouvernement a-t-il retenus pour fermer ces régimes spéciaux en particulier ? Après de nombreuses heures de discussion, je ne l’ai toujours pas compris !
Il n’y a aucune urgence à inscrire cet article dans le texte. Le Cese mériterait que nous le consultions sur ce sujet, comme sur les autres éléments de cette réforme des retraites.
Mme le président. La parole est à Mme Florence Blatrix Contat, pour présenter l’amendement n° 700.
Mme Florence Blatrix Contat. Cet amendement vise à préserver le régime spécial du Cese.
Dans l’histoire de notre République, le Conseil économique, social et environnemental occupe une place particulière. Toucher au régime spécial de ses salariés sans les consulter ni leur permettre de délibérer est une forme de provocation politique grave.
Le Conseil économique, social et environnemental est né de la Résistance, du travail de conviction des syndicalistes résistants. C’est sur son modèle que, en 1957, les pères fondateurs de l’Europe ont créé, dans le traité de Rome, un Conseil économique et social européen. Les travaux du Cese contribuent à éclairer les citoyens et les législateurs que nous sommes sur tous les grands sujets sociaux et environnementaux.
L’actuel Président de la République n’aime pas le Cese de manière générale. Il n’apprécie guère l’indépendance des organisations syndicales, des associations et de toutes les autres expressions libres de la société civile.
Aussi, dès 2017, le bruit avait couru de sa suppression pure et simple et de la dispersion de ses agents. Finalement, il a été beaucoup transformé, le nombre de ses membres a été réduit pour tenter de le marginaliser.
S’opposer à la suppression du régime spécial du Conseil économique, social et environnemental, c’est aussi s’opposer à son affaiblissement. Ne touchons pas à cette assemblée délibérative essentielle pour notre République et notre démocratie.
Mme le président. Les amendements nos 731, 813, 826 et 866 ne sont pas soutenus.
La parole est à M. Victorin Lurel, pour présenter l’amendement n° 901.
M. Victorin Lurel. Je me rallie à ce qu’a dit Marie-Noëlle Lienemann. Il me semblerait de bonne politique de consulter au préalable cette institution constitutionnelle.
Le titre XI de la Constitution…
Mme le président. Monsieur Lurel, vous avez la parole non pas pour un rappel au règlement, mais pour défendre votre amendement !
M. Victorin Lurel. C’est ce que je fais, madame la présidente ! L’amendement n° 901 vise à supprimer les alinéas 24 à 27 et 41. Permettez-moi d’expliquer pour quelles raisons nous demandons leur suppression, conformément au règlement de notre assemblée.
Nous pensons que la suppression du régime spécial du Cese présente un risque d’inconstitutionnalité. Disant cela, je ne fais pas un rappel au règlement !
Nous disons d’abord qu’il faut au préalable consulter le Cese ; nous rappelons ensuite que l’article 71 de la Constitution prévoit que la composition du Conseil économique, social et environnemental et ses règles de fonctionnement sont fixées par une loi organique.
J’estime donc que le régime de retraite fait partie des règles de fonctionnement du Cese. Or on le modifie dans un PLRFSS.
Tel est l’objet de cet amendement. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
Mme le président. Les amendements nos 946, 984, 1019, 1065 et 1080 ne sont pas soutenus.
La parole est à M. Vincent Éblé, pour présenter l’amendement n° 1101.
M. Vincent Éblé. Cet amendement a été assez bien défendu par les intervenants précédents. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Pour ma part, je soutiendrai les amendements visant à prévoir le maintien de ce régime spécial, pour les mêmes raisons que celles que nous avançons depuis le début de l’examen de l’article 1er.
Nous considérons que les régimes spéciaux sont non pas des privilèges, mais tout simplement une adaptation de notre réglementation et de notre législation aux particularités de certains métiers et de certains statuts, qu’il s’agisse du fonctionnement institutionnel des organismes dans lesquels exercent les salariés ou de particularités liées aux conditions de travail qui sont propres à certains métiers.
Il n’y a aucune raison d’uniformiser de façon aveugle et systématique l’ensemble des dispositifs relatifs à la retraite, car il existe de nombreuses façons d’exercer sa responsabilité professionnelle.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous proposons le maintien de ce régime particulier.
Mme le président. La parole est à Mme Monique Lubin, pour présenter l’amendement n° 1155 rectifié bis.
Mme Monique Lubin. Le Cese est composé d’élus engagés, en règle générale dans un certain nombre d’associations ou de structures défendant l’intérêt général. Ils exercent des responsabilités dans des syndicats, des organisations de jeunesse ou des coopératives et défendent un grand nombre de nobles causes. Bref, ce sont des gens engagés, comme les élus dont j’ai entendu parler précédemment.
Leur régime de retraite, comme celui des clercs de notaire, concerne peu de gens. Nous nous demandons donc bien pourquoi il est question de le supprimer dans ce projet de loi.
Une fois de plus, nous avons l’impression que la fermeture de deux ou trois régimes particuliers sert à justifier celle des régimes des industries électriques et gazières et de la RATP, que vous souhaitiez supprimer depuis un moment.
Nous demandons la suppression des alinéas 24 à 27 et 41, parce que nous considérons que ce projet de loi, conçu uniquement pour reporter de deux ans l’âge de départ à la retraite et permettre à l’État de faire des économies, ne devrait pas menacer l’avenir d’un certain nombre de salariés de ce pays, qui n’ont rien demandé, qui ne bénéficient pas de privilèges particuliers et dont le régime de retraite n’aggrave pas en règle générale la situation du régime général.
Rien ne justifie donc qu’on leur empoisonne la vie !
Mme le président. L’amendement n° 1210 n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Victoire Jasmin, pour présenter l’amendement n° 1249.
Mme Victoire Jasmin. Je suis pour le maintien du régime de retraite du Cese. On ne peut pas s’attaquer à ce régime dans un PLFRSS, cela a été dit.
Je ne comprends pas pourquoi le Gouvernement fait le choix de perturber un système démocratique. Dans une véritable démocratie, on ne s’attaque pas à ce qui fonctionne. Ce que vous proposez aujourd’hui, monsieur le ministre, au nom du Gouvernement, conduirait à créer des dysfonctionnements.
En 2017, souvenez-vous, vous avez voulu éliminer le Sénat, et peut-être l’ensemble des personnes qui y travaillent. Comme vous avez compris que cela n’était pas possible, parce que nous défendons la démocratie, vous vous attaquez aujourd’hui au Cese, que vous voulez faire disparaître.
Or cette instance joue un rôle très important pour les Français, pour la société et pour la démocratie.
Mme le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour présenter l’amendement n° 1273.
M. Franck Montaugé. Toujours dans votre logique, qui confine à l’obsession, de destruction des statuts ou des dispositifs un tant soit peu protecteurs, vous voulez mettre fin au régime spécial du Cese. Or rien ne justifie sa suppression. Son régime spécial participe de l’attractivité des métiers de cette institution de la République.
Je rappelle ici les contributions importantes de cette chambre à la démocratie sociale et participative, dont notre pays a tant besoin pour évoluer dans tous les domaines. La qualité de travail des fonctionnaires du Cese est à cet égard remarquable. Il faut la préserver. Or l’article 1er la sacrifie.
Cette suppression est aussi une nouvelle démonstration du peu de considération que vous avez, monsieur le ministre, comme le Président de la République, pour les corps intermédiaires, contrairement à nous, qui avons le plus grand respect pour le Cese et les fonctionnaires concernés.
Nous nous opposerons donc à la suppression du régime de retraite des fonctionnaires du Cese en rejetant l’article 1er.
Mme le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour présenter l’amendement n° 1319.
Mme Angèle Préville. Cet amendement vise à ne pas fermer le régime spécial de retraite du Conseil économique, social et environnemental.
Une telle fermeture constitue de nouveau une stigmatisation injustifiée d’un régime spécial. Le nivellement par le bas est non pas une réforme, mais une régression.
Il est en outre singulier – c’est une question épineuse – de statuer sur le régime de retraite d’une assemblée délibérante, comme l’a rappelé notre collègue Marie-Noëlle Lienemann.
La question demeure entière à cette heure : pourquoi ce choix ? L’engagement des membres du Conseil économique, social et environnemental est-il à questionner ? Leurs recommandations, leurs travaux, leurs préconisations posent-ils problème ?
Pourtant, on ne peut nier le travail de fond qui est mené par le Conseil.
Mme le président. L’amendement n° 1343 n’est pas soutenu.
La parole est à M. Hussein Bourgi, pour présenter l’amendement n° 1376.
M. Hussein Bourgi. À l’instar de mes collègues qui sont intervenus juste avant moi, j’insisterai sur l’importance de conserver le régime spécial du Cese.
Monsieur le ministre, il existe plusieurs dizaines de régimes spéciaux en France. Pour quelles raisons avez-vous choisi d’en fermer quelques-uns parmi tant d’autres ? Pour quelles raisons budgétaires et financières, idéologiques, politiques ou juridiques ? Nous avons besoin d’être éclairés.
Je ne voudrais pas que, derrière le choix de ces régimes spéciaux, on puisse suspecter un délit de sale gueule… Je ne voudrais pas que ces choix soient un acte de défiance politique de la part du Gouvernement.
Je formulerai une seconde observation, qui s’adresse à vous, monsieur le ministre, mais aussi à nos collègues de la majorité sénatoriale.
Le Cese n’est pas n’importe quel organisme. C’est une instance importante pour la démocratie nationale, à l’instar de l’Assemblée nationale et du Sénat. Pourquoi cautionnerions-nous ici la remise en cause du régime spécial du Cese ? Pourquoi les dispositions le concernant ne s’appliqueraient-elles pas demain à l’Assemblée nationale ou au Sénat ?
Vous l’avez compris, mes chers collègues, nous faisons face ici à un acte politique. Je vous invite donc tous et toutes au sursaut, parce que le sale coup que le Gouvernement porte au Cese aujourd’hui, il pourrait le porter demain aux régimes autonomes de l’Assemblée nationale ou du Sénat, ou à d’autres aspects.
Il me semble donc qu’il nous appartient de faire preuve de solidarité avec une autre chambre, saisie et consultée par le Gouvernement et le Président de la République sur la fin de vie, par exemple. On ne peut pas louer en permanence la qualité scientifique des travaux du Cese et son expertise et lui préparer un sale coup ! (Applaudissements sur des travées du groupe SER. – M. Jacques Fernique applaudit également.)
Mme le président. Les amendements nos 1409, 1439 et 1507 ne sont pas soutenus.
La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, pour présenter l’amendement n° 1546.
Mme Marie-Pierre Monier. Cet amendement vise à préserver le régime spécial de retraite du Conseil économique, social et environnemental.
La méthode interroge : pourquoi procéder de cette manière à la suppression de ce régime propre à notre troisième assemblée ? Comme mes collègues, je pense que la suppression de ce régime, parmi tous ceux qui existent, a pour objectif d’enrober celle des régimes spéciaux de la RATP et des industries électriques et gazières.
Depuis 2017, le Président de la République a fait part à plusieurs reprises de son peu de considération pour le Cese. On peut penser que le grand débat national, la Convention citoyenne pour le climat et, plus récemment, le lancement du Conseil national de la refondation sont autant d’exemples de cas dans lesquels le Gouvernement a voulu passer outre cette instance. Pourtant, elle est représentative des forces vives économiques, associatives et syndicales de notre pays, 175 élus y étant engagés au service de l’intérêt général.
La suppression dans ce véhicule législatif du régime de retraite propre au Cese constitue une autre preuve du manque de considération du Gouvernement à son égard.
À l’instar de mon collègue qui s’est exprimé juste avant moi, je m’interroge : pourquoi le Sénat devrait-il être une exception ? Pourquoi ne nous interrogerions-nous pas sur le fonctionnement de notre propre caisse de retraite ?
Mme le président. L’amendement n° 1595 n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour présenter l’amendement n° 1625.
Mme Émilienne Poumirol. Une nouvelle fois, le Gouvernement semble assimiler les régimes spéciaux à des privilèges et souhaite les supprimer, prétendument pour des raisons d’équité.
Comme mes collègues, je m’interroge : qu’est-ce qui justifie cette suppression ? Qui l’a décidée ? Comment ont été choisis les régimes spéciaux qui seront supprimés et ceux qui seront conservés ? Seuls cinq régimes spéciaux, représentant quelque 350 000 travailleurs au total, sont concernés par la réforme.
Il semble bien que la suppression du régime spécial du Cese serve à faire passer la disparition, que vous souhaitez, des régimes de la RATP et des IEG. Vous nous avez parlé d’équité, mais nous avons du mal à y voir clair. Quelle est votre logique ? Où est la cohérence ?
En réalité, cette suppression à la carte n’est qu’injustice. Elle traduit votre volonté de détruire les systèmes sociaux protecteurs.
Mes chers collègues, je vous propose donc, par cet amendement, de ne pas fermer le régime spécial du Cese.
Mme le président. L’amendement n° 1655 n’est pas soutenu.
La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour présenter l’amendement n° 1696.
M. Jean-Yves Leconte. Cette disposition dans ce projet de loi est assez étonnante, parce qu’elle concerne la troisième assemblée constitutionnelle de la République. Elle est assez étonnante également, puisque, à l’été 2020, nous avons voté une réforme du Conseil économique, social et environnemental destinée à faire de cette instance ainsi revue le carrefour des consultations citoyennes.
Après sa réélection, Emmanuel Macron a finalement décidé que la réforme faite en 2020 n’était plus importante et n’avait aucun sens, et il a lancé le Conseil national de la refondation. Il a prétendu faire de cette manière d’autres consultations citoyennes, en passant par-dessus les représentants de la société civile, membres du Conseil économique, social et environnemental.
On se demande donc pourquoi le Président de la République et le Gouvernement ont voulu cette réforme en août 2020, avant de finalement décider, deux ans plus tard, d’organiser autrement les consultations citoyennes, en passant outre les corps intermédiaires.
Comme Marie-Noëlle Lienemann l’a rappelé, il est étonnant que cette assemblée constitutionnelle ne soit pas consultée sur la fermeture de son régime de retraite.
La réforme de 2020 a figuré dans une loi organique. Aussi je m’interroge, comme notre collègue Victorin Lurel, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur : il serait assez étonnant que la fermeture du régime de retraite d’une assemblée de la République, que l’on ne peut par ailleurs réformer que par une loi organique, comme le régime de retraite des magistrats de l’ordre judiciaire, par exemple, puisse être effectuée dans un projet de loi de financement de la sécurité sociale !
Est-il possible d’inscrire une telle disposition dans un PLFRSS sans prendre un risque ?
Mme le président. Les amendements nos 1752, 1794, 1822 et 1849 ne sont pas soutenus.
La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour présenter l’amendement n° 1995.
Mme Laurence Rossignol. Je pense que nous devons aborder cette question avec sérieux et attention : moins la suppression en tant que telle du régime spécial du Cese que le fait que nous puissions mettre fin, à la demande du Gouvernement, au régime de retraite de l’une des trois assemblées constitutionnelles de ce pays – c’est cela le sujet ! –, sans consulter ses membres.
En fait, il y aurait des assemblées – l’Assemblée nationale et le Sénat – qui revendiqueraient la possibilité de faire évoluer elles-mêmes leur régime de retraite et une autre, le Cese, dont le régime, dans l’enthousiasme du Gouvernement à supprimer les régimes spéciaux, pourrait disparaître dans un projet de loi de financement de la sécurité sociale. Ce n’est pas une mince affaire, mes chers collègues !
Je rappelle que, dans le passé, le Cese a déjà procédé à un certain nombre de réformes de ses prestations. Nous savons tous qu’il y a un problème de financement de ce régime. Tout le monde a dû lire le rapport de la Cour des comptes, dont le Gouvernement a dû s’inspirer, avec gourmandise, j’imagine.
En 2013, le Cese a réduit par deux le niveau des pensions, augmenté les cotisations et pris un ensemble d’autres mesures pour assainir son régime. Il l’a fait lui-même !
Alors que, en 2013, cette assemblée parlementaire a été capable de prendre des mesures pour assainir son régime, une intervention du Gouvernement serait nécessaire en 2023 pour assainir sa situation et mettre fin à son régime ?
Mes chers collègues, réfléchissez bien à ce que vous êtes en train de faire.
Mme le président. L’amendement n° 2074 n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Frédérique Espagnac, pour présenter l’amendement n° 2262.
Mme Frédérique Espagnac. Il est défendu, madame la présidente.
Mme le président. L’amendement n° 4019 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli, est ainsi libellé :
Alinéa 30
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Les régimes spéciaux attaqués dans l’article 1er ont été largement réformés dans une logique de nivellement par le bas, nous l’avons dit à plusieurs reprises. C’est à cette logique que nous nous opposons, vous l’avez compris.
Vous nous dites que les régimes spéciaux sont vécus comme une injustice profonde et que la réforme serait un instrument d’égalité qui mettrait fin aux privilèges insupportables de quelques profiteurs. Nous vous répondons depuis le début de notre discussion que nous avons une autre conception de ces régimes, qui sont pour nous des pionniers et qui devraient tirer l’ensemble de notre système de retraite vers le haut. Il ne faut donc pas les supprimer.
Le Président de la République en appelle au bon sens des travailleurs et des travailleuses et leur demande de travailler toujours plus et plus longtemps. Mais où est le bon sens, mes chers collègues, sachant que l’espérance de vie des ouvriers est inférieure de 6,4 ans à celle des cadres ?
Où est le bon sens sachant que 25 % des hommes et 13 % des femmes qui font partie des 5 % les plus pauvres meurent avant l’âge de 62 ans ?
Où est le bon sens sachant que, pour beaucoup, les dernières années de travail avant la retraite sont souvent rythmées par des problèmes de santé ? Je vous rappelle que 14 % des ouvriers ont un niveau d’incapacité physique élevé dès la première année de leur retraite !
Où est le bon sens quand vous condamnez les travailleurs les plus âgés à la précarité et aux difficultés à joindre les deux bouts, si je puis m’exprimer ainsi ?
Les études économiques menées sur le report de 60 ans à 62 ans de l’âge de départ à la retraite ont montré que cette mesure n’avait aucun effet vertueux et qu’elle ne favorisait pas l’emploi des seniors. En 2019, à 61 ans, un quart des employés et un tiers des ouvriers n’étaient ainsi ni en emploi ni en retraite.
Votre réforme aura pour principal effet d’allonger encore, pour les personnes concernées, les périodes de non-emploi avant la retraite.
Mme le président. L’amendement n° 4100 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli, est ainsi libellé :
Alinéa 31
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Il est défendu, madame la présidente.
Mme le président. L’amendement n° 4025 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli, est ainsi libellé :
Alinéa 33
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Il est également défendu.
Mme le président. L’amendement n° 4104 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli, est ainsi libellé :
Alinéa 34
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Mme Éliane Assassi. Idem, madame la présidente !
Mme le président. L’amendement n° 4106 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli, est ainsi libellé :
Alinéa 35
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Cet amendement vise à remettre en cause le détricotage de notre système de retraite.
L’alinéa 35 de l’article 1er prévoit d’importantes modifications, notamment pour les professeurs des écoles et les documentalistes des établissements privés. Évidemment, lorsqu’il s’agit de s’attaquer aux travailleurs des établissements, vous êtes tous au rendez-vous !
Vous le savez, nous aimerions que l’école publique et les enseignants qui en ont la responsabilité soient suffisamment dotés, aussi bien que les établissements privés. Les établissements publics devraient même, selon nous, bénéficier de dotations supplémentaires, dans un souci d’attractivité, afin de garantir une mixité que vous contrecarrez.
Cette attractivité ne peut toutefois passer par une atteinte au régime de retraite des enseignants, qui ne servirait ni l’enseignement privé ni l’enseignement public et qui, au fond, contribuerait à dégrader encore un peu plus l’ensemble de l’Éducation nationale.
L’école est régulièrement brandie comme une priorité par le Gouvernement, ce qui devient d’ailleurs inquiétant : dans les propos du Gouvernement, une priorité est en fait une cible, pour ne pas dire une proie…
Aussi, ne faites pas des retraites votre priorité : ni la retraite des enseignants ni celle de qui que ce soit ! Ne touchez à rien, comme vous savez le faire pour les profits – eux s’envolent.
Mme le président. L’amendement n° 2746 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 37
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Monique Lubin.
Mme Monique Lubin. Il est défendu, madame la présidente.
Mme le président. L’amendement n° 2749 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 41
Remplacer les mots :
du 1er septembre 2023
par les mots :
d’une date déterminée par décret en Conseil d’État après concertation des organisations syndicales et patronales
La parole est à Mme Monique Lubin.
Mme Monique Lubin. Il est également défendu.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission sur l’ensemble des amendements restant en discussion ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Plusieurs amendements visent le Cese.
Je le rappelle, les membres du Cese ne sont pas des élus. Ils sont désignés, pour représenter le patronat, les syndicats et le monde associatif. Il ne s’agit pas d’un service public et la question de la séparation des pouvoirs ne s’y pose pas comme au Sénat.
Pourquoi se pencher sur ce régime spécial ? Car les cotisations patronales y atteignent 2,9 millions d’euros, pour 1,9 million d’euros de cotisations salariales, et la contribution d’équilibre, versée par l’État, représente 5,4 millions d’euros. Il est vrai qu’il n’y a que 175 membres pour 800 pensionnés… Nous avons donc choisi de mettre fin à ce régime, et l’avis de la commission est donc défavorable sur l’ensemble de ces amendements.
Il est défavorable également sur les amendements nos 4019 rectifié, 4100 rectifié, 4025 rectifié, 4104 rectifié et 4106 rectifié.
Enfin, nous sommes défavorables à l’amendement n° 2746 rectifié, dont l’adoption créerait un vide juridique pour le personnel concerné, ainsi qu’à l’amendement n° 2749 rectifié.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre. Ces amendements sont de nature différente. Les tout premiers visent l’affiliation au régime général de l’assurance vieillesse des salariés qui auraient dû être actuellement rattachés à un régime spécial.
Comme l’a dit Mme la rapporteure générale, leur adoption créerait un vide juridique préjudiciable pour les salariés en question, qui ne seraient plus affiliés au régime spécial concerné après le 1er septembre, mais qui ne pourraient pour autant être affiliés au régime général.
Pour répondre à quelques-unes des interrogations qui ont été formulées, le Parlement est-il fondé à réformer le régime spécial des membres du Cese ? La réponse est positive. En effet, ce régime est défini par une loi ordinaire du 10 juillet 1957, qui a donné lieu à un décret d’application de 1959, modifié en 2017.
Il y a quatre ans, le projet de loi visant à créer un système universel de retraite était accompagné d’avis qui précisaient que le Parlement était fondé, dans le cadre d’une loi ordinaire, quelle qu’elle soit, à réformer le régime de retraite des membres du Cese. Il y était par ailleurs précisé que la comparaison avec le régime de retraite des membres du Sénat ou de l’Assemblée nationale n’était pas pertinente, du fait des caractéristiques de rémunération et de désignation des membres du Cese.
Par ailleurs, plusieurs d’entre vous ont évoqué la situation des salariés du Cese, mais ceux-ci ne sont absolument pas concernés par les alinéas que vos amendements tendent à supprimer. Seuls sont touchés les conseillers du Cese.
En effet, pour la plupart, les salariés du Cese sont des fonctionnaires en détachement ou mis à disposition par leur administration d’origine. Ils sont donc affiliés au régime de retraite de cette dernière. Il y a, certes, un certain nombre de contractuels, mais ceux-ci sont rattachés à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) ou à l’Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l’État et des collectivités (Ircantec). Il n’y a donc pas de difficulté particulière.
D’ailleurs, si le Parlement adopte cette réforme, le nouveau régime d’assurance vieillesse des conseillers du Cese relèvera de l’Ircantec, ce qui souligne le lien avec la mission d’intérêt public qui est la leur.
Mme la rapporteure générale a évoqué le déséquilibre de ce régime. Certes, les sommes en jeu sont moins importantes que pour d’autres régimes. Mais il n’y a que 175 cotisants pour environ 800 pensionnés, et une subvention d’équilibre de 5,4 millions d’euros est nécessaire chaque année.
Mme le président. La parole est à M. Vincent Éblé, pour explication de vote sur l’amendement n° 4013 rectifié.
M. Vincent Éblé. Je considère que l’explication que M. le ministre vient de nous donner ne diminue en rien la nécessité d’une consultation du Cese, qu’il s’agisse de ses salariés ou, plus encore, de ses membres.
Il serait parfaitement justifié que nous demandions à cet organisme son avis avant de réformer son dispositif de retraite.
Mme le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Je veux bien croire que, comme l’a dit M. le ministre, le Parlement puisse délibérer sur le système de retraite du Cese.
Toutefois, qu’il y ait obligation légale ou possibilité légale, dans tous les cas, il s’agit de créer des liens entre des assemblées prévues par la Constitution, et une question de forme se pose. Nous pouvons statuer sur ce dispositif, peut-être, mais pas sans avoir entendu les membres du Cese. Ce n’est qu’après leur avoir demandé comment ils comptent faire face au déséquilibre entre le nombre de cotisants et celui des bénéficiaires que nous pourrons délibérer valablement.
Ce que je trouve tout à fait inacceptable et décidément cavalier, c’est que le Sénat n’ait pas pris soin de demander son avis au Cese, alors même qu’y siègent essentiellement les partenaires sociaux et les grandes associations, bref, les forces vives de la Nation.
Je sais qu’il est de bon ton chez certains de mépriser ces corps intermédiaires. Je crois d’ailleurs que cela constitue l’une des fragilités actuelles de notre démocratie et du rapport que les Français ont à la vie politique et sociale.
Au-delà de l’obligation légale ou de la possibilité légale, l’acte politique qu’accomplirait le Sénat ne serait pas responsable.
Vous savez, mes chers collègues, que notre Sénat pourrait tout aussi bien être mis en cause. Le populisme ambiant peut trouver partout des échos. Soyons donc très respectueux de toutes les institutions, notamment quand elles représentent les forces vives de la Nation (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.
M. Victorin Lurel. M. le ministre vient de nous déclarer que le Parlement pouvait légiférer. Cela va de soi ! Il a aussi parlé d’une loi ordinaire, datant de 1957, et de ses décrets d’application, pris en 2017.
Que je sache, cette loi n’a donc pas fait l’objet d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC). L’article 71 de la Constitution est clair : il faut une loi organique. Au-delà de la forme, donc, justement évoquée par Marie-Noëlle Lienemann, il y a un problème de fond, d’inconstitutionnalité. Si ce texte fait l’objet d’une QPC, cela apparaîtra clairement.
Sur le plan idéologique et philosophique, par ailleurs, nous ne pouvons que voter contre. Le Président de la République a voulu affaiblir le Cese, comme tous les corps intermédiaires, s’instituant en Conducator ou en Lider maximo.
Or le Cese est au sommet de la hiérarchie des corps intermédiaires. L’affaiblir, le diminuer, au lieu de l’augmenter, c’est porter atteinte à la démocratie et à la Constitution. (Mme Victoire Jasmin applaudit.)
Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° 4013 rectifié.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
Mme le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 157 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 339 |
Pour l’adoption | 98 |
Contre | 241 |
Le Sénat n’a pas adopté.
La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 346 et suivants.
M. Jean-Yves Leconte. Je vous remercie, monsieur le ministre, des éléments d’information que vous nous avez apportés. Ceux-ci ne suffisent pas à étayer une certitude, mais je puis comprendre que ce faisceau d’informations vous laisse raisonnablement penser qu’il est jouable d’agir cette manière. Reste l’article 71 de la Constitution, qui fait planer, compte tenu des dates mentionnées et des recours possibles, une incertitude juridique assez forte.
Peu importe, à ce stade, cette interrogation, qui sera tranchée lors de l’examen des recours qui seront déposés. La question est politique : une assemblée, en l’occurrence le Sénat, peut-elle décider pour une autre assemblée prévue par la Constitution sans même avoir recueilli son avis ?
Dans cette partie de l’hémicycle, nous ne pensons pas, vu l’importance du Cese, qu’il soit opportun de prendre ce type de décision sans avoir consulté les nombres de l’institution concernée. Ce ne serait pas raisonnable !
Nous ne pourrons donc pas voter une telle réforme du régime de retraite du Cese.
Mme le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour explication de vote.
Mme Annie Le Houerou. L’amendement n° 2746 rectifié vise à ne pas affilier au régime complémentaire Agirc-Arrco les populations très éloignées du salariat que sont les loueurs de meublés et vendeurs de biens sur des plateformes.
En effet, l’article 1er du projet de loi modifie l’article L. 921-1 du code de la sécurité sociale relatif au champ d’application des institutions de retraite complémentaire, pour tenir compte de l’affiliation des salariés des régimes spéciaux au régime général et complémentaire à compter du 1er septembre 2023.
La rédaction proposée aboutit à affilier à ces régimes toutes les personnes relevant de l’article L. 311-2 du code de la sécurité sociale, notamment, par renvoi, toutes les populations visées par l’article L. 311-3 du même code.
Or certaines de ces populations étant très éloignées du salariat – loueurs de meublés, vendeurs de biens sur des plateformes comme leboncoin.fr –, elles ne relèvent pas du régime Agirc-Arrco, par décision des partenaires sociaux qui en sont les gestionnaires.
La rédaction du projet de loi aboutirait à faire adhérer obligatoirement ces populations au régime Agirc-Arrco.
Je soutiens donc cet amendement, qui tend à ne pas modifier l’article en question, dont la rédaction actuelle permet de viser tous les salariés, y compris ceux qui relèvent aujourd’hui des régimes spéciaux. Son texte a d’ailleurs été rédigé en concertation avec l’Agirc-Arrco.
Mme le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Comme je l’ai déjà dit, nous sommes face à un paquet-cadeau, dans lequel sont rassemblés des régimes qui n’ont rien à voir.
D’un côté, il y a la RATP et les IEG. Ce qui est en jeu, là, c’est une pression, par la dérégulation du travail, sur le salaire socialisé, donc sur le partage des richesses – comme dans tout ce projet de loi, d’ailleurs. De l’autre, nous avons trois régimes spéciaux, choisis un peu au hasard. À l’Assemblée nationale, certains disaient : « Pile, nous perdons, face, vous gagnez ! »
Il s’agit tout de même de la troisième chambre de la République… Et elle a réformé son régime en 2013 ! Y a-t-il eu une évaluation ? Pourquoi voulez-vous reprendre la main ? Je vois dans ce projet le reflet d’une volonté de prendre le pouvoir sur les corps intermédiaires.
Nous voterons donc pour la suppression de cette mesure. De grâce, ne faisons pas l’amalgame entre les différents régimes mêlés dans votre paquet, car ils ont des objectifs et des motivations très différentes.
Mme le président. La parole est à Mme Isabelle Briquet, pour explication de vote.
Mme Isabelle Briquet. Lors de nos débats, beaucoup ont exprimé le souhait de revaloriser les pensions des femmes, ou au moins de réduire l’écart avec celles des hommes.
De ce point de vue, les régimes spéciaux incarnent une réelle différence. Les écarts de pensions entre les hommes et les femmes y sont relativement réduits, comme d’ailleurs dans la fonction publique en général, alors qu’ils culminent dans le secteur privé, notamment chez les non-salariés.
Ainsi, la pension moyenne des femmes, en proportion de celle des hommes, chez les monopensionnés à carrière complète, représente, en 2020, quelque 87 % pour les fonctionnaires civils d’État et pour les fonctionnaires territoriaux et hospitaliers, et 82 % pour les assurés des autres régimes spéciaux, contre 71 % pour les salariés relevant du régime général et 63 % pour les non-salariés.
Plutôt que de fermer ces régimes, il vaudrait mieux les conforter, car ils constituent une réelle avancée, au Cese comme ailleurs.
Mme le président. La parole est à M. Patrice Joly, pour explication de vote.
M. Patrice Joly. Le Gouvernement propose de supprimer le régime spécial des membres du Cese, après celui des agents des IEG.
Dans les deux cas, il s’agit d’actes politiques, qui remettent en cause les fondements de notre souveraineté et de notre démocratie. La suppression du régime spécial des IEG s’inspire d’une philosophie libérale, qui porte une logique de privatisation et de dérégulation d’un secteur pourtant essentiel à la souveraineté de notre pays.
Parallèlement, en proposant de supprimer le régime spécial du Cese, le Gouvernement s’attaque au représentant des corps intermédiaires, mais il est vrai que le Président de la République n’a pas encore réussi à comprendre l’importance de telles institutions ni la manière de travailler avec elles… Il est donc essentiel de s’opposer à cette suppression.
D’ailleurs, la procédure suivie est peut-être légale, voire constitutionnelle, mais la légitimité de cette manière d’agir, sans consultation, pose problème. Je soutiendrai donc les amendements qui suppriment cette mesure.
Mme le président. La parole est à M. Yan Chantrel, pour explication de vote.
M. Yan Chantrel. Bien entendu, je soutiens moi aussi ces amendements.
Monsieur le ministre, je viens de lire un entretien que vous avez donné au journal Le Parisien, à paraître demain. Vous y déclarez : « La réforme des retraites ne fera pas de perdants. »
Voici donc une liste, non exhaustive, des situations dans lesquelles des personnes seront objectivement perdantes à la réforme. Si, comme vous, on ne considère comme perdantes que les personnes dont la pension diminue, il y aura bien des perdantes et des perdants.
Tout d’abord, il y a les personnes qui, sans la réforme, auraient bénéficié d’une surcote, parce qu’elles ont choisi de travailler au-delà de l’âge du taux plein. Celles-ci verront leur surcote annulée ou diminuée d’une proportion allant jusqu’à 10 points de pourcentage. Et, avec le passage accéléré à 43 annuités, les personnes nées avant 1974 pourraient voir leur pension baisser, notamment si elles ne décalent pas leur départ.
Au-delà du seul montant de la pension, c’est principalement par le décalage de l’âge de départ que la réforme fait des perdants et, surtout, des perdantes.
Par exemple, une personne fonctionnaire, née en 1963, qui devait partir dans deux ans à taux plein, puisqu’elle aura 62 ans, devra partir dans deux ans et demi, pour la même pension.
De tels cas sont très nombreux. En voici un autre exemple : avec un début de carrière à 18 ans, sans interruption, le départ à la retraite devait se faire, avant réforme, à 62 ans ; après réforme, ce sera à 63 ans. Arrêtez donc les mensonges et retirez cette réforme injuste, qui ne fait que des perdants ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 346 et suivants.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Rappels au règlement
M. Daniel Breuiller. Je souhaite formuler un rappel au règlement au titre de l’article 19 bis B de notre règlement.
Depuis hier, j’ai demandé à sept ou huit reprises la communication de l’avis du Conseil d’État. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) Chers collègues, c’est un sujet important !
Sur toutes les travées de la gauche, nos collègues l’ont demandé également. Marie-Pierre de La Gontrie et Daniel Laurent y ont insisté. On m’a répondu, avec un peu de condescendance que je n’ai pas voulu prendre pour du mépris, qu’il n’y avait pas d’avis du Conseil d’État.
Je m’interroge sur la sincérité de M. le ministre…
M. Daniel Breuiller. En effet, le décret du 23 janvier 2023, signé par la Première ministre et par vous-même, monsieur Dussopt, mentionne un « projet de loi de financement rectificatif de la sécurité sociale pour 2023, délibéré en conseil des ministres, après avis du Conseil d’État ».
Je sais bien que je ne suis qu’un jeune sénateur,…
Mme Christine Bonfanti-Dossat. Un récent sénateur !
M. Daniel Breuiller. … coupable de légèreté sans doute, mais je pense qu’il y a surtout de la légèreté dans la façon dont on mène ce débat. Et un réel problème de sincérité se pose.
Nous devrions exiger, sur toutes les travées de cette assemblée, que cet avis nous soit transmis, puisqu’il existe. (Applaudissements sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE.)
Mme le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour un rappel au règlement.
Mme Laurence Rossignol. Mon rappel au règlement se fonde sur l’article 33 de notre règlement.
Madame la présidente, je vous demande une suspension de séance de dix minutes, et cela pour deux raisons.
Tout d’abord, nous avons découvert un entretien de M. le ministre qui porte exactement sur les sujets que nous évoquons depuis jeudi. Nous voudrions prendre le temps de le lire, car, le plus souvent, les réponses que nous n’obtenons pas ici, nous finissons par les trouver dans le journal… Cela pourrait donc nous aider à accélérer les débats.
Ensuite, nous devons clarifier cette histoire d’avis du Conseil d’État. Existe-t-il, ou non ? Nous sera-t-il communiqué ?
Croyez-moi, madame la présidente, cette suspension de séance profitera à tous nos collègues, qui pourront prendre le temps de lire l’entretien accordé par M. le ministre. Celui-ci y déclare que cette réforme est de gauche, ce qui nous interpelle évidemment. Ne serait-ce pas un mensonge ?…
Mme le président. Madame Rossignol, nous allons terminer les explications de vote et voter les amendements qui restent en discussion. Vous pourrez prendre connaissance de cet entretien dans la nuit ou demain matin. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Jean-Michel Arnaud applaudit également. – Protestations sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. Vincent Éblé. Prenez le temps de nous écouter, madame la présidente !
M. Vincent Éblé. Si vous voulez nous fâcher, continuez ainsi !
Mme Laurence Rossignol. Très bien ! S’il en est ainsi, nous allons demander un scrutin public pour chaque amendement.
M. Vincent Éblé. Jusqu’au bout de la nuit s’il le faut !
Mme le président. Madame Rossignol, vous êtes vice-présidente du Sénat. Vous devriez comprendre ma position.
Mme Laurence Rossignol. C’est la vie : nous occupons tour à tour des postes différents…
Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° 4104 rectifié. (Protestations sur les travées des groupes SER et CRCE.)
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. Vincent Éblé. Nous demandions un scrutin public !
Mme le président. Je n’ai pas reçu cette demande, monsieur Éblé !
Je mets aux voix l’amendement n° 4106 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. Hussein Bourgi. C’est un coup de force !
Mme le président. Mes chers collègues, depuis hier, vous sollicitez un document. M. le ministre vous a fourni plus d’une fois des explications, tout comme M. le rapporteur et président de la Mecss. Or, à présent, vous demandez des suspensions pour consulter les journaux…
M. Vincent Éblé. C’est notre appréciation !
Mme le président. Sincèrement, il faut faire preuve d’un peu de sérieux, eu égard au sujet qui nous occupe. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
Par ailleurs, les suspensions de séance sont du seul ressort du président de séance.
Mme Laurence Rossignol. Nous le savons !
M. Vincent Éblé. Il existe plusieurs façons de présider : des bonnes et des mauvaises…
Rappels au règlement
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Chers collègues, je me fonde sur le chapitre XIV de notre règlement.
Nous avons écouté avec attention les réponses de M. le ministre, qui nous a expliqué que, dans le cas d’un PLFSS, le Conseil d’État rend non pas un avis, mais une note de synthèse. Par ailleurs, il nous a indiqué que, s’agissant d’une consultation du gouvernement, une déclaration orale de M. Hollande aurait décidé de sa non-publication.
Or dans les décrets qui ont présenté à l’Assemblée nationale et au Sénat les PLFSS, ainsi que, en l’occurrence, le présent PLFSS rectificatif, il est écrit : « Après avis du Conseil d’État ». Ce terme juridique n’est donc pas tombé du ciel !
Par conséquent, il est légitime de s’interroger et de demander à M. le ministre si un avis du Conseil d’État a été rendu, ou non, et pourquoi, dans ce dernier cas, le document qui nous est transmis fait référence à un avis.
Madame la présidente, nous n’avons toujours pas eu de réponse sur ce point.
Mme le président. La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour un rappel au règlement.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Madame la présidente, il est parfois délicat de mettre de l’ordre dans les interventions, et je comprends la difficulté de votre tâche. Néanmoins, nous demandons des scrutins publics, et il serait souhaitable qu’ils puissent avoir lieu pour préserver la paix de cette discussion.
J’en viens à mon rappel au règlement.
M. Max Brisson. Sur quel article du règlement vous fondez-vous ?
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Laissez-moi quelques instants pour le préciser… (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.)
Chers collègues, vous ne faites rien depuis deux jours. Nous, nous travaillons ! (Vives protestations sur les mêmes travées.)
M. Fabien Genet. Nous vous écoutons, c’est déjà beaucoup !
Mme le président. Madame de La Gontrie, je n’ai aucune difficulté avec les scrutins publics. En revanche, les demandes des groupes doivent porter sur les amendements mis aux voix, avec les bons numéros, ce qui n’était pas le cas, vous en conviendrez. (Mme Marie-Pierre de La Gontrie acquiesce.)
La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, pour un rappel au règlement.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. Madame la présidente, ce rappel au règlement est fondé sur les articles 42 et suivants de notre règlement.
Le sujet de l’avis ou de la note du Conseil d’État a été évoqué à plusieurs reprises. Au Sénat, les uns et les autres – majorité sénatoriale, opposition, groupes minoritaires… –, nous avons exercé alternativement des responsabilités exécutives au cours des années passées.
Or il est dans l’intérêt de tous de conserver les équilibres définis par notre Constitution. Il est important de s’en tenir aux textes fondamentaux régissant les pouvoirs publics en France et auxquels nous sommes, sur toutes ces travées, attachés.
Ainsi, l’article 39 de la Constitution dispose qu’une loi organique définit les documents accompagnant un projet de loi.
Cette loi organique, qui a été débattue dans cet hémicycle et adoptée par le Parlement, en l’occurrence, ne prévoit pas la divulgation des notes relatives aux projets de loi de finances ou de financement de la sécurité sociale (Mme Marie-Noëlle Lienemann proteste.), puisque le Conseil d’État est dans sa fonction de conseiller juridique du gouvernement.
Le Conseil d’État rend un avis dès lors qu’il s’agit d’un projet de loi ordinaire. Il produit une note dans le cas d’un projet de loi de finances ou de financement de la sécurité sociale.
Il est très important que le Parlement respecte cette prérogative du Conseil d’État de conseil juridique du Gouvernement, faute de quoi, à l’avenir, ce dernier lui demandera un avis en off, et non plus formellement. Il est essentiel de garder cet élément à l’esprit, car, encore une fois, la majorité d’un jour peut devenir la minorité de demain, et vice versa.
Par ailleurs, le président de la Mecss a dévoilé un certain nombre d’éléments nous permettant de poursuivre le débat et l’examen des articles, ce à quoi je vous appelle, mes chers collègues. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
Mme le président. La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour un rappel au règlement.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Ce rappel au règlement est fondé sur l’article 24, alinéa 2, du règlement du Sénat.
La tentative de Jean-Baptiste Lemoyne est compréhensible, mais elle n’est pas adaptée. En effet, il est question de savoir non pas si la publicité est obligatoire, mais si M. le ministre a dit la vérité.
M. Olivier Dussopt, ministre. Ce n’est pas possible ! Je croyais ne pas être à l’Assemblée nationale !
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Depuis le début, lorsque nous avons demandé cet avis au Gouvernement, il nous a été répondu non pas que nous ne l’obtiendrions pas en raison d’une absence d’obligation de publicité – nous aurions alors pu apprécier, polémiquer, contester –, mais que seule une note existait.
Or le projet de loi de financement de la sécurité sociale, tel qu’il a été déposé – son fac-similé est accessible sur le site internet de l’Assemblée nationale – et tel que Marie-Noëlle Lienemann l’a lu, précise expressément qu’il a été adopté en conseil des ministres « après avis du Conseil d’État ».
Par conséquent, madame la présidente, il s’agit de savoir pourquoi M. le ministre nous a dit autre chose que la vérité… (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme le président. Madame de La Gontrie, vos propos ne sont pas très respectueux vis-à-vis de M. le ministre.
La parole est à M. Guillaume Gontard, pour un rappel au règlement.
M. Guillaume Gontard. Madame la présidente, ce rappel au règlement est fondé sur l’article 19 bis de notre règlement.
La question de la sincérité des propos tenus se pose véritablement. Nous avons demandé, clairement et à plusieurs reprises, l’avis du Conseil d’État. M. le ministre nous a expliqué, clairement et à plusieurs reprises également, qu’il s’agissait non pas d’un avis, mais d’une note, et que nous ne pouvions pas l’obtenir. Or nous apprenons qu’il s’agit bien, en réalité, d’un avis…
Les contrevérités et les approximations, cela commence à bien faire ! Il s’agit d’un texte sérieux, qui concerne la vie des gens. Nous sommes donc en droit de connaître la vérité et d’avoir une réponse claire. Ce n’est pas attaquer quelqu’un que de le faire ; nous sommes ici pour débattre !
Mme le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. René-Paul Savary, rapporteur de la commission des affaires sociales pour l’assurance vieillesse. Jusqu’à présent, nos débats s’étaient relativement bien passés.
M. Laurent Duplomb. Relativement !
M. René-Paul Savary, rapporteur. Or certains ont parlé de « mensonge », un terme qui est limite dans son expression et qui n’apporte rien au débat. Ceux qui nous regardent, à mon sens, ont un avis plutôt négatif sur la qualité de nos débats.
Mme Éliane Assassi. Ce n’est pas vrai !
M. René-Paul Savary, rapporteur. Ce n’est pas acceptable quand une réforme touche un si grand nombre de personnes.
Par ailleurs, madame de La Gontrie, vous avez déclaré que nous ne faisions rien. Je n’accepte pas cela !
Nous travaillons toujours les textes financiers. En l’occurrence, nous travaillons sur cette réforme depuis quatre ou cinq ans. Mais cela vous a sans doute échappé, ce qui montre que vous préférez les effets de tribune à l’efficacité du travail ! (Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes UC, RDPI et INDEP.)
En ce qui concerne l’exigence de transparence et cette note…
Mme Éliane Assassi. Cet avis !
M. René-Paul Savary, rapporteur. … tout est dans le journal Le Monde, dont vous êtes des lecteurs ! Si vous ne l’avez déjà fait, lisez-le, tout y est explicité, il n’y a rien de plus.
Par ailleurs, les membres de la Mecss peuvent venir me voir. Ils auront des explications sur cette note dans la plus grande confidentialité, de la même façon que pour les matières régies par le secret fiscal, par exemple, que connaissent bien les présidents Raynal ou Éblé.
Aussi, que l’on cesse de nous donner des leçons ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC. – Mme Véronique Guillotin applaudit également.)
Mme le président. La parole est à M. le ministre.
M. Olivier Dussopt, ministre. Je confirme simplement que le document que le Conseil d’État a transmis au Gouvernement et dans lequel il donne son appréciation sur le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale est une note, qui a été approuvée par cette instance lors de sa séance du 19 janvier dernier.
En ce qui concerne les remises en cause de ma sincérité et de mon honnêteté, j’avais cru comprendre que je n’étais pas à l’Assemblée nationale. M. le rapporteur l’a justement rappelé. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et RDPI.)
Mme le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour cinq minutes.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt-trois heures dix, est reprise à vingt-trois heures vingt.)
Mme le président. La séance est reprise.
Mes chers collègues, je souhaite que nos débats conservent la sérénité qui est la marque de fabrique de notre assemblée et qui contribuent à la bonne image de nos travaux.
Aussi, je n’hésiterai pas, afin de maintenir la sérénité de nos débats, à faire usage des prérogatives que le règlement confère à la présidence de séance.
Ce rappel fait, nous reprenons le cours normal de la discussion du texte.
Rappel au règlement
Mme le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour un rappel au règlement.
M. Victorin Lurel. Il ne s’agit pas de porter atteinte à la sérénité de nos débats – j’espère que vous le croirez, madame la présidente. Cependant, en cas d’incompréhension, il est nécessaire d’aller au bout des explications.
Chacun est de bonne foi ici, me semble-t-il. J’ai consulté la loi organique du 15 avril 2009, citée par notre collègue Jean-Baptiste Lemoyne, qui est relative à l’application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution, donc à la présentation des textes.
Tout d’abord, pour les projets de loi, il n’y est pas question de notes, mais d’études d’impact.
L’article 11 de cette loi organique précise d’ailleurs que cette disposition ne s’applique pas aux projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale, aux projets de révisions constitutionnelles et aux projets de loi présentés au titre de l’article 53 de la Constitution concernant les traités internationaux. Les études d’impact ne s’appliquent donc pas dans ces cas, mais l’avis doit être communiqué.
Ensuite, la notion de « note » a été inventée. Malgré mes recherches, je n’ai pu trouver son origine. Est-ce troubler la sérénité de nos débats que de demander une clarification ? En quoi consiste cette note de synthèse ? Dans quel texte figure-t-elle ? Elle n’est pas dans cette loi organique, par ailleurs très largement censurée par le Conseil constitutionnel.
Par conséquent, j’aimerais obtenir cet avis du Conseil d’État.
Article 1er (suite)
Mme le président. L’amendement n° 2107, présenté par Mme Doineau et M. Savary, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 35
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° À l’article L. 712-13, les mots : « assurés mentionnés à l’article L. 712-1 » sont remplacés par les mots : « fonctionnaires de l’État, à l’exception de ceux relevant de la Caisse nationale militaire de sécurité sociale, » ;
La parole est à Mme la rapporteure générale de la commission des affaires sociales.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Il s’agit d’un amendement de correction, madame la présidente.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. Nous en avons terminé avec les amendements déposés à l’article 1er.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote sur l’article.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Tout d’abord, nous avons eu une discussion approfondie sur la remise en cause des régimes spéciaux, au cours de laquelle il est apparu que les salariés de la RATP et des industries électriques et gazières étaient au cœur de ces remises en cause.
Or ce n’est pas une mince affaire que de remettre en question le « pacte », pour reprendre le terme employé par notre collègue Pierre Laurent, qui a été passé avec les salariés de ces secteurs, piliers du service public, alors que notre pays connaît actuellement l’impérative nécessité de consolider ces services publics et de relever les défis en matière de transports et de transition énergétique.
Un parallèle peut être établi entre la remise en cause par la marchandisation et la financiarisation de ces services publics et le détricotage du modèle social que connaissent les salariés de ce secteur.
Vous suivez une logique selon laquelle les fondamentaux, qui ont fait la force de notre République, sont aujourd’hui considérablement affaiblis par les politiques néolibérales et subiront encore un mauvais coup au moment de relever les défis suscités.
Ensuite, je veux évoquer la pénibilité. En effet, vous vous attaquez à des métiers et des emplois où les salariés subissent des conditions de travail difficiles, des contraintes et de la pénibilité.
Or tous les mécanismes généraux de pénibilité que vous mettez en place ne sont jamais, au bout du compte, qu’une ultime réparation potentielle de la dégradation liée à leur travail, alors que ce statut leur garantissait, au contraire, une vision plus préventive et protectrice.
Mme le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour explication de vote sur l’article.
Mme Éliane Assassi. Au terme de l’examen de cet article 1er, je préciserai quelques points.
Tout d’abord, on compte 500 000 cotisants tous régimes spéciaux confondus, contre 28 millions de cotisants pour les autres régimes de retraite. La suppression des régimes spéciaux de retraite – cela a été rappelé – est un serpent de mer, qui se nourrit des rancœurs et des ressentiments. Ce n’est pas un hasard si la suppression de certains d’entre eux est discutée dès l’article 1er de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Toutefois, si nous pensons que le Gouvernement joue un jeu dangereux en opposant les Français entre eux, la mobilisation de ces derniers montre que, aujourd’hui, cette stratégie ne fonctionne pas, comme nous en aurons de nouveau, sans aucun doute, la démonstration mardi prochain.
Ensuite, même si nous n’avons eu de cesse de vous demander pourquoi vous souhaitiez supprimer ces régimes spéciaux, un certain nombre d’interrogations restent sans réponse.
Est-ce une suppression à la carte au nom de l’équité ? Mais alors, pourquoi ne pas réformer tous les régimes spéciaux ? Pourquoi en préserver certains et pas d’autres ? Où est la justice lorsque vous supprimez de manière arbitraire cinq régimes spéciaux sur dix-sept, tout en en maintenant douze, comme l’indiquait Charles de Courson à l’Assemblée nationale ?
Toujours au nom de l’équité entre tous les Français, le Gouvernement veut mettre fin aux régimes spéciaux. Supprimer les acquis des uns ferait donc le bonheur des autres. Dans ce cas, qu’en est-il des retraites chapeaux et autres parachutes dorés ?
Serait-ce parce que les régimes spéciaux sont déficitaires ? Cela n’est pas vrai : plusieurs d’entre eux, nous l’avons démontré, sont excédentaires.
Pourquoi vouloir à tout prix appliquer à tout le monde les mêmes conditions minimales prévues par le droit du travail, en rejetant les conventions collectives qui améliorent l’ordinaire ?
En toute sincérité, nous n’avons pas obtenu de réponses à l’ensemble de ces questions. C’est pour nous une raison supplémentaire de voter contre cet article.
Mme le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote sur l’article.
Mme Laurence Cohen. Le fin mot de la suppression de ces régimes spéciaux, c’est qu’il faut tirer tout le monde vers le bas en faisant travailler les uns et les autres plus longtemps : tel est l’horizon proposé par ce gouvernement avec le soutien de la droite.
Monsieur le rapporteur, vous nous l’avez dit vous-même : voilà cinq ans que vous travaillez sur ce projet de loi. On comprend, dès lors, la connivence entre le Gouvernement et les travées de la droite…
Reste la question suivante : peut-on réellement repousser l’âge légal à 64, voire à 67 ans, quand on sait que le taux d’emploi des seniors n’était, selon la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares), que de 56 % en 2021 ?
Faut-il vous rappeler que, en 2011, au lendemain de la précédente réforme, qui avait porté l’âge légal de la retraite à 62 ans, le temps de chômage des plus de 55 ans a bondi de 23 % ? Un nouveau recul de l’âge légal pourrait avoir pour conséquence d’accroître encore le chômage des seniors.
Comme le souligne l’économiste Michaël Zemmour, en se fondant sur les travaux de la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) et sur ceux de la Dares, le coût social du décalage de l’âge minimum de la retraite à 64 ans, ce serait, peu ou prou, 100 000 allocataires de minima sociaux supplémentaires et 120 000 nouvelles pensions d’invalidité, auxquels il faudrait ajouter la hausse du nombre de chômeurs indemnisés et de personnes sans emploi, mais n’ayant droit à aucune prestation spécifique.
Le tout représenterait environ 300 000 personnes de plus maintenues dans la précarité, entre emploi et retraite.
Enfin, vous répétez à l’envi que les régimes spéciaux coûtent 1,8 milliard d’euros au contribuable. Mais que dire de la suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF), qui, lui, a coûté près de 4 milliards d’euros ? Du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE), qui a englouti près de 20 milliards d’euros de cotisations sociales ? Ou encore des aides publiques aux entreprises, versées sans aucune contrepartie sociale ou environnementale, qui pèsent quant à elles 256 milliards d’euros ?
Cela fait beaucoup d’argent manquant. Voilà une note que je vous offre sur un plateau…
Mme le président. La parole est à Mme Monique Lubin, pour explication de vote sur l’article.
Mme Monique Lubin. Chers collègues de la majorité sénatoriale, l’examen de cet article de suppression des régimes spéciaux arrive à son terme.
Bien sûr, je ne souhaite pas que ce texte soit voté…
Mme Catherine Procaccia. Nous avons compris !
Mme Monique Lubin. Toutefois, il y a des chances ou des risques qu’il le soit – le terme varie, dans cet hémicycle, selon le côté où l’on se trouve. Et si tel est le cas, vous serez arrivés à vos fins.
La suppression des régimes spéciaux est un véritable serpent de mer. C’est votre rêve depuis très longtemps.
Si cette réforme aboutit, il aura suffi d’un petit projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale destiné à reculer de deux ans l’âge légal de la retraite pour mettre fin à des régimes de retraite historiques, à des régimes protégeant des pans extrêmement importants de notre économie et constituant une part de notre patrimoine social, à savoir celui de la RATP et celui des électriciens-gaziers.
En pareil cas, je serai presque tentée de dire : « Chapeau les artistes ! » En peu de temps, vous aurez réussi là où tous vos prédécesseurs ont échoué.
J’espère que les personnes concernées feront entendre leur voix dans les jours qui viennent, plus encore qu’elles ne l’ont fait précédemment. Nous, nous faisons dès à présent entendre la nôtre dans cette assemblée : mesurez-vous ce dont, in fine, vous risquez d’être comptables ?
Mme le président. La parole est à M. Yan Chantrel, pour explication de vote sur l’article.
M. Yan Chantrel. … au sujet d’un entretien, à paraître demain, que vous avez accordé à un organe de presse. Vous y affirmez que cette réforme ne fait aucun perdant…
Je vous ai interrogé sur plusieurs points précis : vous n’avez répondu à aucun. À l’évidence, vous êtes très mal à l’aise. C’est normal, du reste, car cette réforme ne fait que des perdants, notamment les titulaires des régimes spéciaux visés par l’article 1er.
La vérité, que vous refusez de reconnaître dès lors qu’elle vous dérange, nous l’avons répétée depuis le début de cette discussion : vous vous servez des retraites pour compenser les baisses d’impôt décidées en faveur des plus riches.
C’est cela, le but de votre réforme. Cette dernière est injuste. Elle est inéquitable. Elle aggravera la situation des femmes, des Français qui accomplissent des carrières hachées ou des carrières longues et de ceux qui exercent les métiers les plus difficiles ; eux aussi, d’ailleurs, sont concernés par l’article 1er.
Vous maquillez la vérité à longueur de journée pour faire passer la pilule, mais celle-ci devient de plus en plus indigeste. C’est pourquoi nos compatriotes sont de plus en plus nombreux à descendre dans la rue pour manifester contre cette réforme. Mardi prochain, nous serons évidemment à leurs côtés, pendant les suspensions de séance.
M. Xavier Iacovelli. Il n’y en aura pas !
M. Yan Chantrel. J’y insiste, cette réforme est injuste. Elle est aussi brutale qu’impopulaire. Nul ne peut accepter de perdre deux ans d’une retraite bien méritée quand les dividendes des entreprises du CAC 40 explosent sans subir la moindre surtaxation.
Écoutez les Françaises et les Français, qui sont massivement contre cette réforme…
M. Xavier Iacovelli. Ils sont majoritairement pour la fin des régimes spéciaux !
M. Yan Chantrel. … et retirez-la !
Mme le président. La parole est à M. Philippe Bas, pour explication de vote sur l’article.
M. Philippe Bas. Alors que nous arrivons à un moment important de notre discussion, à savoir la mise aux voix de l’article 1er, je vais tenter un exercice qui ne me paraît pas impossible : faire ressortir ce qu’il y a eu de positif dans ce débat.
Tout d’abord, au sujet des régimes spéciaux, dont je rappelle que ce projet de loi assure non pas la suppression, mais simplement la fermeture à compter du 31 août prochain, j’observe, non pas une approbation générale, certes, mais au moins une forme d’acceptation.
J’en veux pour preuve d’admirables amendements, notamment l’amendement n° 3045 rectifié, signé par M. Kanner, et l’amendement n° 3913 rectifié de Mme Assassi, qui tendent tous deux à reporter la fermeture des régimes spéciaux,…
Mme Éliane Assassi. Ce sont des amendements de repli !
M. Philippe Bas. … c’est-à-dire la date à partir de laquelle ces régimes ne peuvent plus admettre de nouveaux entrants, du 31 août 2023 au 31 décembre 2027.
Mes chers collègues, comme l’a dit Mme de La Gontrie tout à l’heure, un chemin s’est manifestement ouvert aujourd’hui ! (Rires et applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC. – M. Franck Menonville et Mme Véronique Guillotin applaudissent également.)
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Chiche !
M. Philippe Bas. M. Didier Marie, quant à lui, a déclaré avec raison que l’on s’acheminait vers un compromis.
Malheureusement, une journée n’aura pas suffi pour que l’on s’entende sur une date. Mais, à tout le moins, soyons fiers d’avoir fait émerger une forme de consensus sur le principe de la fermeture des régimes spéciaux. (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)
Quant à leur disparition, elle a été votée en 2010. Je n’ai pas le souvenir que la gauche, quand elle était au pouvoir, en ait remis en cause le principe. Quoi qu’il en soit, nous en discuterons après l’article 7, sur le fondement de l’excellent amendement de M. Retailleau. (Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
Mme le président. La parole est à Mme Victoire Jasmin, pour explication de vote sur l’article.
Mme Victoire Jasmin. Je l’ai souvent dit, ce projet de loi est à la fois injuste et injustifié.
Il est particulièrement injuste envers les femmes et envers les jeunes de certains territoires, qui subissent de forts taux de chômage. Quand on voit ce qui est proposé, on ne peut que dresser ce triste constat : ni le Gouvernement, ni Mme la rapporteure générale, ni les autres membres de la majorité sénatoriale n’ont pris la mesure de ce qui est en train de se passer.
Dans le secteur du gaz et, plus encore, dans celui de l’électricité, la tendance est encore et toujours à l’externalisation.
Il y a quelques mois, la Première ministre, Mme Borne, a lancé un appel à la sobriété énergétique. En la matière, notre souveraineté dépend de notre capacité d’anticipation.
Dès lors, c’est une très grave erreur que de s’attaquer au régime de retraite de ces filières, très utiles pour notre développement économique et géostratégique.
Vous allez tuer l’attractivité de métiers très importants pour notre développement. À terme, vous allez mettre à mal l’aménagement du territoire, pour lequel l’électricité joue un rôle essentiel.
Cette réforme menace également les effectifs, les emplois et les compétences des entreprises concernées : bientôt, plus personne ne voudra y entrer.
Je lance donc un appel à la raison : nous devons protéger ces régimes de retraite. Il y va de notre propre devenir. Dans ce domaine, l’externalisation est une erreur très grave et même irréversible.
Mme le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote sur l’article.
M. Guillaume Gontard. L’article 1er, qui vise un certain nombre de régimes spéciaux, est loin d’être anodin.
Tout d’abord, nous assistons à un jeu dangereux : on tente de dresser les Français les uns contre les autres, à l’heure où nous avons besoin de tout, sauf de nouveaux clivages.
Ensuite, les dispositions mises en cause ne viennent pas de nulle part. Ce sont des avantages acquis par certains métiers bien particuliers.
Surtout, ces régimes spéciaux sont une véritable garantie d’attractivité pour des métiers essentiels, ce soit dans le secteur énergétique ou à la RATP.
Le vote d’un tel article serait donc une grave erreur.
En outre, nous sommes face à un problème de cohérence : comment peut-on englober dans un même article des régimes si différents que ceux de la RATP, des électriciens-gaziers, du Conseil économique, social et environnemental (Cese) et des clercs de notaires ? Dans ces conditions, il me semble difficile de délibérer sur de telles dispositions, d’autant plus que nous ne disposons d’aucune analyse financière.
Ainsi, la réforme du Cese adoptée en 2015, qui a entraîné de nombreux changements, n’a fait l’objet d’aucune évaluation. Je pense en particulier à la trajectoire du régime de retraite de cette institution : comment prétendre le fermer sans avoir exactement où il en est ?
Enfin, qu’il s’agisse de la RATP ou des électriciens-gaziers, le Gouvernement entend, plus largement, revenir sur un statut public qui garantit une véritable indépendance.
Pour toutes ces raisons, nous voterons évidemment contre l’article 1er.
Mme le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote sur l’article.
Mme Laurence Rossignol. Avant tout, nous pouvons tous observer les vertus apaisantes d’une suspension de séance de cinq minutes : c’est mieux qu’une tasse de passiflore ! (Sourires.) Nous nous retrouvons pour un débat courtois, comme nous les aimons.
Néanmoins, si courtois soit-il, ce débat ne saurait dissimuler nos divergences profondes.
J’admire l’effort déployé par le questeur Bas, qui, décidément, s’impose fréquemment dans cet hémicycle comme un homme capable de bâtir des compromis. (Sourires sur les travées des groupes SER et CRCE.)
Mes chers collègues, M. Bas a cité deux de nos amendements. Je ne lui ferai pas l’injure de lui rappeler ce qu’est un amendement de repli. Cela étant – vous l’avez probablement remarqué vous aussi en consultant votre téléphone portable –, nombre de gens nous regardent. Nous recevons tous de nombreux SMS commentant à la fois les interventions des uns et des autres et la qualité de nos débats.
C’est pour ceux qui suivent nos discussions que je tiens à apporter la précision suivante : ces deux amendements, tendant à repousser la date de mise en extinction des régimes spéciaux, sont ce que l’on appelle dans notre jargon des amendements de repli. En procédant ainsi, nous tentons d’atténuer un tant soit peu des dispositions que nous critiquons…
Ce rappel étant formulé, je confirme que nous allons voter contre l’article 1er. Pourquoi ? Parce qu’il est emblématique de ce projet de loi et de l’idéologie qui le sous-tend.
Ce gouvernement ignore les corps intermédiaires ; il change le régime de retraite du Cese sans demander son avis ; il s’attaque en priorité au régime des électriciens-gaziers, ces héritiers d’une longue histoire sociale, qui sont souvent montrés du doigt au motif qu’ils résistent le mieux aux offensives libérales de l’exécutif.
Bref, avec cet article, le Gouvernement attaque les corps intermédiaires et les pôles de résistance les plus avancés du salariat, avant de mener sa grande offensive à l’article 7, à savoir le report de l’âge de la retraite.
Mme le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote sur l’article.
M. Jean-Yves Leconte. Nous l’avons déjà dit hier : cette réforme a d’abord pour but de masquer une mauvaise gestion.
Le Gouvernement tente en effet de récupérer quelques milliards d’euros perdus ailleurs, parce qu’il a refusé de les prélever sur les profits, parce que les cotisations ont été baissées et parce que les salaires, faute d’avoir été augmentés comme il se devait – on a préféré multiplier les primes –, n’abondent pas suffisamment les caisses de la sécurité sociale. Il manque de l’argent ? Ce sont les plus faibles qui paieront.
La première étape consiste à choisir comme victimes quelques régimes spéciaux de la sécurité sociale.
Or certains d’entre eux fonctionnent bien. D’autres ont le mérite de prendre en compte la pénibilité et la dangerosité de différents métiers. Je pense par exemple au régime des industries électriques et gazières (IEG), qui, sur un certain nombre de points, diffère nettement du régime général, en particulier depuis qu’une ordonnance de 2017 a supprimé plusieurs critères de pénibilité.
L’article 1er met ces régimes en extinction, alors qu’un certain nombre de secteurs concernés, comme celui de l’énergie, connaissent des difficultés de recrutement. Nous avons besoin de renforcer notre service public de l’énergie et, en ce sens, la suppression de ce régime est tout sauf une bonne idée.
Avec un tel article, on oppose les uns aux autres. On signifie à un certain nombre de personnes qu’elles ne pourront bénéficier du régime spécial auquel elles auraient pu prétendre, en suggérant que leurs aînés étaient des privilégiés : ce faisant, on monte les uns contre les autres.
Ce n’est pas de cette manière que l’on construit la cohésion du pays…
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Votre temps de parole est terminé !
M. Jean-Yves Leconte. Ce n’est pas de cette manière que l’on construit la confiance. Pour notre part, nous souhaitons une véritable cohésion sociale dans le pays… (Marques d’impatience sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Fini !
Mme le président. Merci, monsieur Leconte !
La parole est à Mme Corinne Féret, pour explication de vote sur l’article.
Mme Corinne Féret. Monsieur le ministre, je tiens à le rappeler même s’il s’agit d’une évidence : en supprimant les régimes spéciaux, l’article 1er s’attaque à un symbole très fort.
Institués en 1945, en même temps que le régime général de la sécurité sociale, ces régimes spéciaux assurent la reconnaissance de diverses contraintes professionnelles, qu’il s’agisse d’horaires décalés, du travail de nuit ou encore de conditions de travail spécifiques à certaines professions.
Vous les remettez en cause sous prétexte d’équité ou d’universalité : c’est une véritable diversion de votre part.
Vous tentez de faire oublier que cette réforme – votre réforme ! –, c’est tout simplement deux ans de plus au travail pour tous. Nous n’en voulons pas.
Vous cherchez une fois de plus à diviser les Français, en opposant les prétendus privilégiés et les autres. Mais est-on un privilégié quand on exerce, au quotidien, un métier dont la pénibilité est clairement constatée ?
Il est vrai que cette notion de pénibilité vous est étrangère – à preuve, on parle désormais d’« usure professionnelle ». En 2017, vous n’avez pas hésité à supprimer quatre critères de pénibilité sur dix, niant ainsi le caractère pénible de nombreux métiers.
Vous mettez véritablement en cause le contrat social conclu entre ces salariés et leur entreprise. Vous décidez unilatéralement, sans concertation avec les organisations syndicales, la fin de ces régimes spéciaux.
Les précédents orateurs l’ont rappelé, vous pénalisez des secteurs d’activité stratégiques pour notre pays, qu’il faudrait au contraire rendre plus attractifs, car ils ont déjà du mal à recruter.
Enfin, les uns et les autres nous ayant conseillé de lire la presse, je vous signale que, d’après un sondage publié ce soir même par le Journal du dimanche, seuls 32 % des Français sont favorables à votre réforme. Il est encore temps : réagissez…
Mme le président. Merci, madame Féret !
Mme Corinne Féret. Retirez cet article, retirez votre réforme !
Mme le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour explication de vote sur l’article.
Mme Annie Le Houerou. L’article 1er supprime plusieurs régimes spéciaux de retraite pour les personnes recrutées à compter du 1er septembre 2023. Il va de pair avec l’article 7, que nous examinerons dans quelques jours, puisque le Gouvernement souhaite appliquer aux régimes spéciaux les dispositions prévues à ce titre en vue de leur fusion dans le régime général.
Selon le Gouvernement, l’existence de ces régimes spéciaux n’est plus justifiée. Elle serait même inéquitable pour notre modèle social.
Chers collègues de la majorité sénatoriale, une différence d’appréciation nous oppose à vous, et c’est normal : sur les travées de cet hémicycle, vous êtes unis à droite et nous sommes unis à gauche.
Loin d’être des privilèges, comme vous le prétendez,…
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. On n’a jamais parlé de privilèges !
Mme Annie Le Houerou. … ces régimes spéciaux ont été créés pour mieux compenser la pénibilité de certains métiers. Dans les faits, ils concernent non pas l’ensemble des salariés du secteur considéré, mais ceux qui sont soumis aux conditions de travail les plus dures et à des sujétions spéciales.
À son arrivée au pouvoir, en 2017, cette majorité a supprimé quatre critères de pénibilité. Désormais, elle abolit toutes les compensations de pénibilité prévues par le biais de ces régimes spéciaux.
Vous choisissez de supprimer cinq régimes spéciaux : celui de la RATP, celui des industries électriques et gazières, celui des clercs de notaires, celui du Cese et celui de la Banque de France. Vos arguments ne nous ont pas convaincus. À nos yeux, cet article représente bel et bien une régression.
Vous faites fi du dialogue social ; vous vous dispensez de toute évaluation financière pour mener une réforme qui fera des perdants et encore des perdants : ces cinq régimes spéciaux représentent à eux seuls cinq catégories de perdants.
Nous voterons contre l’article 1er.
Mme le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour explication de vote sur l’article.
Mme Angèle Préville. Les transports et l’énergie, qui sont au cœur de l’actualité, sont essentiels à notre société. Or, de manière tout à fait singulière, les régimes spéciaux de ces deux grands secteurs sont sur le point d’être supprimés.
Procéder ainsi, c’est oublier des services dont nous avons largement profité.
Aujourd’hui, nous avons cruellement besoin de transports. Par exemple, il est indispensable de garantir un service public solide et efficace pour lutter contre les émissions de gaz à effet de serre.
En outre, chers collègues de la majorité sénatoriale, avez-vous mesuré les conséquences de la fermeture du régime spécial des électriciens et des gaziers ? C’est la filière de l’énergie tout entière qui va s’en trouver fragilisée. Quel peut bien être l’avenir énergétique de la France dans ces conditions ?
Dans ce domaine, nous allons bientôt nous retrouver face à un mur d’investissements. Pensez-vous réellement pouvoir mener ces chantiers au rabais, à moindre coût, comme si la construction de centrales nucléaires ou de stations de transfert d’énergie par pompage n’était pas un véritable enjeu industriel ?
Si, par le passé, nous avons connu de belles réussites en matière d’énergie, c’est parce que nous avions des salariés protégés, des salariés reconnus, bien dans leur travail et fiers de leur travail. Leur statut fut certainement le gage de nos succès : en le mettant à mal, nous prenons de nombreux risques.
Dans un tel contexte, la suppression de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) me paraît on ne peut plus inquiétante. En quoi cet organe indépendant de recherche et d’expertise a-t-il failli ? Apparemment, il n’y avait aucune raison de le supprimer. Le recours toujours plus large à la sous-traitance est, lui aussi, très préoccupant.
Enfin, j’évoquerai la fin du régime spécial du Cese, parce que…
Mme le président. Votre temps de parole est écoulé !
La parole est à M. Henri Cabanel, pour explication de vote sur l’article.
M. Henri Cabanel. Mes chers collègues, au sujet de l’article 1er, qui vise à supprimer un certain nombre de régimes spéciaux, j’ai bien écouté vos différentes interventions.
Certains arguments, parfois très proches, ont été présentés très longuement. Vous avez souligné l’importance de la pénibilité, qui, je vous rejoins sur ce point, est bel et bien un sujet majeur. En l’occurrence, nous sommes face à un enjeu de justice ; nous en reparlerons à l’article 9.
Certains d’entre vous ont fait valoir que, dans les secteurs considérés, il était déjà difficile de recruter ; à les entendre, c’est une raison de conserver ces régimes spéciaux. Mais les problèmes de recrutement ne touchent pas les seules professions relevant d’un régime spécial : dans l’agriculture, dans l’éducation ou encore dans la santé, on peine également à recruter – je pourrais poursuivre la liste.
Pour ma part, je privilégie une logique de simplification, d’harmonisation et de solidarité.
Pour qui un régime spécial, autonome ou non, est-il injuste ? Pour ceux qui ne pourront pas y entrer ou pour ceux qui ne disposent pas d’un régime comparable ?
Quand je croise un salarié agricole ou un maçon, ils me disent : « Pourquoi n’ai-je pas de régime spécial ? J’exerce pourtant un métier pénible. »
Je le répète, nous parlerons de la pénibilité à l’article 9. Pour l’heure, en mon âme et conscience, je vais voter l’article 1er. (Mme Véronique Guillotin applaudit.)
M. Max Brisson. Très bien !
Mme le président. La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy, pour explication de vote sur l’article.
M. Christian Redon-Sarrazy. Après une journée, non pas de débats – il n’y en a pas ! –, mais d’explication des amendements déposés par la gauche de cet hémicycle, nous sommes appelés à nous prononcer sur l’article 1er.
Monsieur le ministre, si votre gouvernement a placé l’article relatif aux régimes spéciaux en tête de ce projet de loi, ce n’est certainement pas un hasard. Vous supposez que l’opinion adhère à cette mesure, mais vous allez sans doute un peu vite en besogne…
Depuis le début de nos débats, les Françaises et les Français nous regardent. Ils sont particulièrement inquiets de leurs dépenses énergétiques. Il y a quelques semaines encore, ils subissaient les alertes de l’exécutif quant aux risques de coupures d’électricité.
Croyez-vous qu’ils soient prêts à tenir les personnels des industries électriques et gazières pour responsables de cette situation, du fait de leur système de retraite ? Je vous le certifie, la réponse est non.
Croyez-vous qu’ils considèrent les agents de la RATP, avec le régime de retraite, comme responsables de leurs problèmes de transport ? Pas plus.
Pour notre part, nous avons la faiblesse d’écouter ceux qui descendent dans la rue. Nous écouterons ceux qui manifesteront mardi prochain et nous écoutons ceux qui ont d’ores et déjà ouvert la contestation : nous ne voterons pas cet article. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote sur l’article.
Mme Émilienne Poumirol. En s’attaquant à plusieurs régimes spéciaux, l’article 1er remet en cause, non seulement un pacte social, mais aussi et surtout nos services publics, en particulier, mes collègues l’ont rappelé, les IEG.
Monsieur le ministre, ce soir, on a beaucoup parlé de pénibilité, mais vous n’en tenez pas compte. Dès 2017, votre majorité a d’ailleurs supprimé quatre critères de pénibilité, ceux-là mêmes qui provoquent le plus grand nombre de maladies professionnelles et qui, de ce fait, coûtent le plus cher à notre sécurité sociale.
Notre collègue Monique Lubin l’a dit : si cet article venait à être voté – je crains fort qu’il ne le soit –, vous aurez certes gagné, mais vous aurez tué des régimes historiques.
Votre seul but, en procédant ainsi, est de réduire les déficits publics, car, par votre politique de cadeaux fiscaux et d’exonérations de cotisations sociales, vous avez mis à mal toutes nos finances publiques.
Mme le président. La parole est à M. Jean-Luc Fichet, pour explication de vote sur l’article.
M. Jean-Luc Fichet. Les Français suivent nos travaux avec attention. Ils sont intelligents et informés ; ils se posent la question du pourquoi.
Quelle est donc la philosophie du Gouvernement ? Pourquoi réformer, maintenant et dans l’urgence, les retraites en général et les régimes spéciaux en particulier ?
La justice va mal. Les prisons sont encombrées. Les gardiens y font défaut. Nos hôpitaux sont en crise. Il ne se passe pas une journée sans que l’on cite la situation dramatique dans laquelle se trouve notre système public de santé. La sécurité ne va pas bien. Les recrutements sont difficiles. Les salaires sont bas. (Marques d’agacement au banc des commissions.)
Or, plutôt que de chercher ensemble à traiter ces différents problèmes, on en rajoute une couche, en disant aux Français : « On vous supprime les régimes spéciaux tout en vous imposant deux années de travail supplémentaires. »
Nos concitoyens devraient accepter sans piper mot : eh bien, non ! Malgré toutes les explications qui leur sont données, ils n’acceptent pas. En effet, ils le savent : la philosophie qui sous-tend cette réforme, c’est l’insidieuse mise à bas du service public au profit du privé, qui, aux yeux de la majorité sénatoriale, serait plus efficace et plus productif. Il est aussi, sans doute, plus rentable pour les actionnaires…
Certains ici ne cessent d’invoquer la valeur travail ; mais, ce qui occupe leur esprit, c’est surtout la valeur des dividendes et la rentabilité financière.
Monsieur le ministre, vous insistiez hier sur la somme qui est en jeu. Bien sûr, 17 milliards d’euros, ce n’est pas rien ; mais qu’est-ce donc comparé à 500 milliards d’euros ? Les Français ne s’y trompent pas…
Mme le président. Il faut conclure !
M. Jean-Luc Fichet. Il y a bel et bien deux poids, deux mesures.
Mme le président. La parole est à Mme Florence Blatrix Contat, pour explication de vote.
Mme Florence Blatrix Contat. Je voterai contre cet article 1er, car il s’agit, bien entendu, d’une régression sociale, mais surtout d’une offensive idéologique du gouvernement contre ces régimes spéciaux. (Murmures sur des travées du groupe Les Républicains.)
En témoignent les déclarations du ministre du travail à propos des régimes spéciaux, qui seraient devenus « archaïques, à mesure que la réalité des métiers a évolué », et selon qui « faire cela, c’est avoir le courage que personne n’avait eu jusqu’alors ».
En témoignent également celles du ministre de l’économie, lequel pense que « c’est moins un problème financier que d’équité ».
Enfin, M. Dussopt nous a indiqué précédemment que les régimes spéciaux représenteraient une forme de rente.
Pourtant, ces régimes ont déjà connu de nombreuses réformes relatives à l’allongement des durées de cotisation ou à la baisse des taux de pension, et ils tous ont fait des efforts !
Ces régimes spéciaux, nous l’avons déjà dit, sont le fruit de nombreuses conquêtes sociales. Nous sommes aujourd’hui revenus au temps des régressions sociales. Ainsi, sous prétexte que d’autres métiers seraient également pénibles, on ne devrait plus reconnaître la pénibilité de ces régimes spéciaux !
Non, plutôt que de tirer vers le bas l’ensemble des régimes, il faut aligner par le haut les pensions et les durées de cotisation sur les régimes spéciaux : nombre de secteurs rencontrent des problèmes de recrutement ; or les conditions de travail y sont pour quelque chose !
Mme le président. La parole est à M. Thomas Dossus, pour explication de vote.
M. Thomas Dossus. Les débats en cette fin de soirée nous ont fait basculer dans une autre dimension.
Nous avons un ministre qui, demain, fera la une d’un quotidien en présentant cette réforme comme « une réforme de gauche », tandis qu’aux dires de notre collègue questeur M. Bas il y aurait un « consensus » entre les groupes de cette assemblée.
Je me demande donc si je ne suis pas dans un univers parallèle. (Protestations sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. Vincent Éblé. Il faudrait plutôt dire virtuel !
M. Thomas Dossus. En réalité, le ministre continue de jongler avec ses approximations, ici comme à l’Assemblée nationale, et essaye de nous enfumer sur des détails.
Le questeur Bas, quant à lui, parle d’un consensus sur des amendements que ni lui ni son groupe n’ont votés, conformément à leur stratégie de majorité silencieuse. (Murmures sur les mêmes travées.)
Nous voilà parvenus au vote final des dispositions de cet article 1er. Pourquoi celles-ci ont-elles d’ailleurs été placées ainsi au début du texte ? Derrière ce choix, il y a une intention : opposer les Français les uns aux autres, diviser, et ce dès le début de l’examen du texte. (Exclamations sur les mêmes travées.)
Notre collègue nous l’a dit, la discussion sur la pénibilité, ce sera lors de l’article 9, mais, avant cela, il nous faut taper sur les régimes spéciaux ! Et pas n’importe lesquels, ceux de la RATP, c’est-à-dire les transports en commun, et les IEG, c’est-à-dire l’énergie et l’électrification de notre pays.
On le voit bien, nous sommes face à un gouvernement qui persiste dans le déni des enjeux climatiques et de la situation sociale. Sous couvert d’un texte financier, il prend une mesure brutale et injuste à cet article, comme il le fait à tous les autres !
Ce gouvernement ne fait que des perdants, à commencer par les générations futures. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – M. Yan Chantrel applaudit également.)
Mme le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Bien sûr, l’article 1er a toute sa place, puisqu’il est là pour annoncer les mesures de l’article 7…
Tout ce projet de loi, je l’ai dit, vise à déréguler le marché du travail, afin de déformer encore davantage le partage des richesses et du PIB, au profit des actionnaires – ils en prélèvent déjà 10 % grâce aux lois précédentes. C’est une entreprise de division !
Il s’agit de casser ces régimes – ils ont été qualifiés de pionniers –, qui pourraient servir de modèle de prévention des risques professionnels à d’autres branches. J’ai bien dit « prévention » et non « réparation », contrairement à ce que vous nous proposerez plus tard.
Les Français, comme le montre le mouvement social, sont attachés à leur modèle social. Ils ont une autre vision de la société, qui repose notamment sur la réduction du temps de travail. Et ils prennent confiance, conscients de leur force. Ils éviteront ainsi toutes les tentatives de division qui les ont affaiblis lors des réformes précédentes.
Vous l’avez remarqué, il n’y a pas de division actuellement. Au contraire, il y a une unité syndicale et politique de tous les groupes de gauche et écologistes.
Les mobilisations d’hier ont parfois été affaiblies par des divisions, mais la semaine prochaine, vous le verrez, personne ne se laissera diviser : voilà ce que vous montreront tous les Français le 7 mars prochain, les femmes le 8, les jeunes le 9 et le mouvement climatique le 10 ! (Marques d’ironie sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. Christophe-André Frassa. Ah, super…
Mme le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour explication de vote.
M. Franck Montaugé. Au risque de répéter des arguments qui ont été précédemment exposés… (Marques d’impatience sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. René-Paul Savary, rapporteur. Et de nouveau, il dit qu’il se répète…
M. Franck Montaugé. J’en ai le droit ! (Exclamations sur des travées du groupe Les Républicains.)
Mme le président. Mon cher collègue, vous seul avez la parole.
M. Franck Montaugé. C’est quinze secondes de perdues…
Nous assistons à la confrontation de deux modèles de société. Ce qui oppose les travées de droite et de gauche de notre hémicycle, c’est la place que doivent occuper les services publics dans notre vie sociale et nationale.
Malheureusement, ce gouvernement et tous ceux qui se sont succédé ces dernières années ont saisi toutes les occasions pour affaiblir les services publics et préparer l’avènement définitif des entreprises privées dans les champs qui ressortaient historiquement au service public en France.
Les services publics ont fonctionné grâce à des agents très investis dans leur mission. Aujourd’hui, la meilleure façon de casser ce pacte social, pour ainsi dire, c’est bel et bien de remettre en cause les statuts et de préparer l’arrivée des entreprises privées au capital des services publics encore existants dans notre pays.
On l’a vu pour Gaz de France, et il n’existe plus ! Tout est passé, ou presque, au privé. Les résultats sont-ils meilleurs ? Je n’en suis pas du tout convaincu, on le voit bien en ce moment… Et c’est également ce qui se passe pour EDF. (Marques d’impatience sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme le président. C’est terminé !
M. Franck Montaugé. L’enjeu, c’est de choisir la façon dont on organise notre société.
Mme le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour explication de vote.
Mme Cathy Apourceau-Poly. La suppression des régimes spéciaux de retraite est un serpent de mer qui se nourrit évidemment des rancœurs et des ressentiments. Ce n’est pas un hasard si la suppression de certains de ces régimes est discutée dès l’article 1er.
Même si le Gouvernement joue un jeu dangereux – car c’est le cas – en opposant les Français entre eux, la mobilisation montre que, aujourd’hui, cette stratégie ne fonctionne pas.
Monsieur le ministre, neuf salariés sur dix sont opposés à votre projet de reporter l’âge de départ à 64 ans. Vous n’arrivez pas à diviser les salariés, ils sont côte à côte, qu’ils soient du privé ou du public, qu’ils aient un régime spécial ou non. Non, vous n’arrivez absolument pas à les diviser. Au fond, ces salariés ont tous en commun la volonté de ne pas travailler davantage, et encore moins jusqu’à 64 ans !
Dès cet article 1er, vous remettez en cause les régimes spéciaux, que vous qualifiez d’archaïques et nous, de pionniers.
Nous assistons à une perte d’attractivité dans ces métiers, cela a été dit. Il y a un nombre insuffisant de conducteurs à la RATP ; dans les Hauts-de-France, 100 TER ont été supprimés sur 1 200 lignes, et ce faute d’attractivité.
Chez les énergéticiens, vous le savez, l’équilibre est atteint, mais vous voulez tout de même leur faire la peau. Ce sont pourtant eux que vous applaudissez lorsque surviennent des catastrophes naturelles.
Eh bien, aujourd’hui, vous ne pensez plus qu’à une chose : faire en sorte que, demain, ces salariés, qui sont chaque jour à nos côtés, n’aient plus leur régime. (Marques d’impatience sur des travées du groupe Les Républicains.)
Plusieurs sénateurs du groupe Les Républicains. Il faut s’arrêter !
Mme le président. La parole est à M. Vincent Éblé, pour explication de vote. (Mêmes mouvements.)
M. Vincent Éblé. Monsieur le ministre, vous permettrez à un membre de la commission des finances de revenir sur l’une des dispositions de l’article 1er, à savoir la fermeture du régime autonome de la Banque de France.
J’invoquerai cette fois-ci non pas notre illustre prédécesseur Victor Hugo,…
M. Xavier Iacovelli. Vous aurait-il vraiment soutenu ? Pas sûr !
M. Vincent Éblé. … mais une personnalité bien vivante, parfaitement implantée dans notre paysage économique, financier et bancaire, le gouverneur de la Banque de France, M. Villeroy de Galhau.
J’ai précédemment soulevé une question, pour laquelle je ne crois pas avoir obtenu la moindre réponse de la part ni du Gouvernement ni des promoteurs de la suppression du régime.
M. Villeroy de Galhau s’est exprimé à plusieurs reprises à ce sujet. Il vous a même adressé un courrier, monsieur le ministre, qui a circulé dans les services de la Banque de France avant d’arriver jusqu’entre mes mains.
Dans cette lettre, le gouverneur exprime sa forte réticence à l’idée de supprimer le régime autonome de la Banque de France. Selon lui, ce dernier a été totalement aligné sur celui de la fonction publique en 2007, ce qui signifie qu’il ne comporte plus aucun avantage ou privilège.
Ce régime spécial, pour ainsi dire, aurait donc l’unique spécificité d’être totalement financé, ce qui est vertueux – c’est sa seule particularité !
Cet alignement est cohérent, puisque les agents titulaires de la Banque de France sont recrutés par concours et qu’ils exercent des missions de service public non concurrentielles. De plus, depuis 2015, la Banque de France a mené une politique de maîtrise de ses coûts sans équivalent en zone euro, avec une baisse de 25 % de ses effectifs et une réduction de ses dépenses de 4 % par an en volume. (Marques d’impatience sur des travées du groupe Les Républicains.)
Mme le président. C’est terminé, monsieur Éblé !
M. Vincent Éblé. Le maintien de ce régime autonome ne représente aucun coût pour les finances publiques !
Mme le président. La parole est à M. Hussein Bourgi, pour explication de vote.
M. Hussein Bourgi. Précédemment, j’ai interrogé le ministre sur le choix de ces cinq régimes spéciaux, mais je n’ai pas reçu de réponse.
Je souhaite tout de même revenir sur la question du régime spécial des agents de la RATP, en rappelant un récent fait d’actualité de notre pays.
Lors de la dernière rentrée scolaire, il y a quelques mois maintenant, certaines autorités organisatrices de la mobilité ont rencontré des difficultés pour trouver des conducteurs pour le transport scolaire. Dans nombre de villes, d’agglomérations ou de métropoles, le nombre et la fréquence des passages des bus pour le grand public ont dû être réduits, afin de réaffecter les agents au transport scolaire, parce que, tout simplement, ces métiers étaient sous tension, à l’instar des métiers de l’éducation nationale.
Aujourd’hui, la suppression de ce régime spécial, je le crains fort, fragilisera encore davantage cette filière, ainsi que les autorités organisatrices de la mobilité, qui ont déjà du mal à recruter, partout en France.
Mme le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. René-Paul Savary, rapporteur. Je préciserai quelques points. Nous n’avons jamais parlé d’inégalités, de privilèges, de nantis ou même d’archaïsmes.
Nous avons simplement rappelé, à la suite d’une réflexion approfondie, qu’il y avait des différences historiques. Voilà pourquoi, en contrepartie d’un salaire moins élevé dans nombre de régimes spéciaux, il était possible de partir à la retraite de façon anticipée, compte tenu, justement, des pénibilités des métiers. Partir plus tôt, pour ainsi dire, c’était tout à fait légitime : cette vision de la pénibilité répondait à une logique de réparation. Aujourd’hui, nous essayons de faire de la prévention.
D’ailleurs, mes chers collègues, vous êtes impatients, je le vois bien, de débattre de l’usure professionnelle et des mesures de prévention, qui seront déclinées à l’article 9. (Murmures sur des travées du groupe SER.)
Soyez rassurés, car si nous avançons un peu plus rapidement dans les débats, peut-être arriverons-nous à faire en sorte que vous écoutiez les propositions faites par les commissions et leurs rapporteurs à propos de la prise en compte de la pénibilité.
Des pas ont été faits. Cela fait quatre ans que nous appelons de nos vœux la convergence des régimes spéciaux et nous sommes satisfaits d’avoir été rejoints par le Gouvernement et le ministre, puisque arrive enfin la fermeture du régime spécial pour les entrants, au travers de la clause du grand-père.
Madame Lubin, vous proposez, par vos amendements, cela ne nous a pas échappé, la fermeture des régimes spéciaux pour les nouveaux entrants. (Mme Monique Lubin hoche la tête en signe de désapprobation.) Cela mérite d’être dit. Il faut assumer cette mesure ; nous, nous l’assumons depuis quatre ans.
Vous avez proposé une série de dates de fermeture du régime spécial de la RATP pour les nouveaux entrants – votre date la plus proche, c’est 2027 ; nous, c’est 2025.
Vous voyez bien j’anticipe sur l’article 7… Il faut assumer cette proposition – elle est nouvelle – de fermeture des régimes spéciaux.
Mme Monique Lubin. C’est tordu, tout de même !
M. René-Paul Savary, rapporteur. Pas d’histoires de calendrier entre nous, nous réglerons l’affaire à l’article 7. (Sourires. – Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Annick Jacquemet applaudit également.)
Mme le président. La parole est à M. Pierre Laurent, pour explication de vote.
M. Pierre Laurent. Voter cet article 1er, je le redis, est une grave erreur. Cela intervient au plus au mauvais moment.
Si vous le votez, vous allez prendre de front les salariés de deux secteurs stratégiques, les transports publics urbains et l’énergie, au moment où nous avons le plus besoin d’eux.
Vous allez créer du chaos dans le pays, au lieu de servir la Nation et l’intérêt général.
Vous allez voter l’article 1er, je l’ai bien compris, mais avant cela je voudrais refroidir l’enthousiasme du questeur Bas, qui pense qu’un chemin est en train de s’ouvrir…
Eh bien, j’invite le questeur Bas à se promener un peu dans les rues de France et de Paris le 7 mars prochain. Loin de s’ouvrir, vous le verrez, le chemin sera très, très, très bouché et embouteillé.
Vous allez voter, ici, l’article 1er, mais cela ne veut pas dire que le projet de loi va entrer dans nos vies, parce que le pays se lève pour empêcher son adoption.
Pour le moment, vous ne pouvez rien faire contre cela. Le pays ne veut pas de ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST.)
Enfin, la dernière chose que je dirai au ministre, c’est qu’il a pris un risque en accordant une interview au quotidien Le Parisien, et en osant la titrer « C’est une réforme de gauche ». Est-ce de l’humour, est-ce pour combler une place vacante dans le monde des comiques ? (Rires sur les travées du groupe CRCE.)
M. Pierre Laurent. Monsieur le ministre, vous avez pris un grand risque avec un tel titre, non pas celui de convaincre le pays, mais plutôt de devenir mardi prochain la vedette de la risée populaire. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST.)
Mme le président. Je mets aux voix l’article 1er, modifié.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
Mme le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 158 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 332 |
Pour l’adoption | 233 |
Contre | 99 |
Le Sénat a adopté.
Mes chers collègues, nous avons examiné 300 amendements au cours de la journée ;…
Mme Laurence Rossignol. Pas mal !
Mme le président. … il en reste 3 284 à étudier sur le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
8
Ordre du jour
Mme le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, dimanche 5 mars 2023 :
À neuf heures trente, quatorze heures trente et le soir :
Suite du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023, dont le Sénat est saisi en application de l’article 47-1, alinéa 2, de la Constitution (texte n° 368, 2022-2023).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée le dimanche 5 mars 2023, à zéro heure vingt.)
Pour le Directeur des comptes rendus du Sénat,
le Chef de publication
FRANÇOIS WICKER