M. Jean-Yves Leconte. Vous aviez sept ans pour changer la donne !
M. Gérald Darmanin, ministre. Monsieur le sénateur, je vous en prie, je vous ai écouté avec attention : ce sont bien 11 000 postes que vous avez supprimés. Et ensuite vous nous dites, comme le coq de Chantecler qui pense qu’il fait se lever le soleil, qu’il est terrible de voir les gens mal reçus en préfecture. Si vous n’aviez pas supprimé tous ces postes lorsque vous étiez en responsabilité, il en serait allé autrement.
J’en viens aux contrôles aux frontières : ils seraient contraires au droit européen et scandaleux, dites-vous. Mais qui a mis en place ces contrôles aux frontières en 2015 ? Qui donc ? Je ne me rappelle plus très bien…
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Et qui les remet en place chaque fois ?
M. Gérald Darmanin, ministre. Trois fois, sous des gouvernements de gauche, vous avez demandé ces contrôles aux frontières. Huit pays ont rétabli ces contrôles. (M. Jean-Yves Leconte proteste.)
Permettez-moi de vous répondre, monsieur Leconte !
M. Alain Richard. M. Leconte a vraiment du mal à écouter…
M. Gérald Darmanin, ministre. Ce sont là des vérités que vous ne voulez pas entendre. Vous devriez rencontrer plus souvent Bernard Cazeneuve, car vous êtes manifestement bien éloigné de la politique qu’il défendait lorsqu’il exerçait la responsabilité du ministère de l’intérieur.
M. Thomas Dossus. C’est sûr !
M. Thomas Dossus. On vous en remercie !
M. Gérald Darmanin, ministre. … car vous nous feriez une crise d’urticaire. Vos deux ministres de l’intérieur défendaient exactement ce que nous défendons : vous devriez plutôt vous en réjouir. (Mme Marie-Pierre de La Gontrie et M. Jean-Yves Leconte protestent.)
Cinq de vos camarades sociaux-démocrates ont instauré des contrôles aux frontières de l’Union européenne. Pourquoi ? Non pas pour des raisons migratoires, mais pour lutter contre le terrorisme.
Si nous avons rétabli les contrôles aux frontières dans la période récente, c’était après l’attaque de la basilique de Nice, qui a entraîné la mort de trois personnes. À l’époque, personne – en ces jours de procès des auteurs des attentats de Nice, vous n’irez pas dire le contraire – ne contestait notre souhait de retrouver la maîtrise de nos frontières.
Quant aux visas Balladur, combien de temps avez-vous été en responsabilité ?
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Et vous ?
M. Gérald Darmanin, ministre. Mais moi, je ne suis pas contre la suppression de ces visas ! Voilà toute la différence entre nous ! (Vives exclamations sur les travées du groupe SER.)
M. Alain Richard. Chers collègues, pourriez-vous écouter le ministre sans crier ?
M. Gérald Darmanin, ministre. Vous pensez, monsieur le sénateur, qu’il faut permettre à tous les étrangers présents à Mayotte de venir sur le sol réunionnais et sur le sol métropolitain. On voit bien que vous n’êtes pas allés très souvent à Mayotte. Allez le dire à vos collègues mahorais ! La situation à Mayotte est totalement insolite, chacun en est convaincu.
Les visas Balladur s’appellent ainsi parce qu’ils ont été instaurés sous le Premier ministre du même nom. Cela ne rajeunira personne… À l’époque, je n’étais même pas en classe de sixième, mais vous, monsieur le sénateur, vous faisiez déjà de la politique. (Murmures.)
Vous dites qu’il existe deux types d’asiles, mais vous confondez les sujets : il y a l’asile d’un côté et l’immigration de l’autre. Quand 70 % des demandes d’asile reçoivent une réponse négative après leur passage devant la Cour nationale du droit d’asile (CNDA), c’est bien qu’il existe un problème d’orientation, monsieur le sénateur !
Il faut soit fermer les yeux, soit être extrêmement naïf pour ne pas voir qu’il existe, d’une part, des gens qui méritent absolument l’asile, et, d’autre part, des personnes qui utilisent l’asile pour rester illégalement sur le territoire de la République. Chacun le sait ! Rencontrez les agents de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra), ils vous le diront, sans la moindre idéologie.
Notre travail est entravé : les personnes éligibles à l’asile mettent beaucoup trop de temps à l’obtenir et vivent ainsi une très grande paupérisation, parce que tous ceux qui ne sont pas éligibles à l’asile utilisent cette procédure comme une voie d’immigration illégale. C’est la vérité première, et beaucoup l’ont dit. C’est si vrai que je n’ai qu’à vous renvoyer aux précédents débats parlementaires : Manuel Valls et Bernard Cazeneuve défendaient la même position.
Vous affirmez que, depuis 1982, quelque trente textes ont été examinés : tous, vous faites ainsi le procès de votre propre passé. En un quinquennat, nous n’en avons présenté qu’un seul !
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Et quel est son bilan ?
M. Gérald Darmanin, ministre. Si trente textes ont été pris en quarante ans, c’est parce que la situation est difficile, en raison d’une jurisprudence complexe, des engagements internationaux de la France et des phénomènes migratoires liés à la déstabilisation de certains pays. Quoi qu’il en soit, les trente textes en quarante ans ne sont pas un argument valable, puisque nous n’en avons présenté qu’un seul en six ans.
Enfin, vous avez parlé des personnes en situation irrégulière, que nous acceptons en trop grand nombre et que nous n’avons pas régularisées.
En 2012, lorsque M. Hollande est arrivé aux responsabilités, 208 000 irréguliers sur le territoire national étaient inscrits à l’aide médicale d’État (AME). Par nature, nous ne connaissons pas exactement le nombre d’irréguliers, mais l’AME reste le chiffre le moins contestable, car un grand nombre d’irréguliers s’y inscrivent pour pouvoir se faire soigner.
En 2017, ils étaient 315 000, ce qui représente une augmentation de plus de 100 000 personnes sous votre responsabilité ! Certes, sous le quinquennat du président Macron, ce chiffre est passé de 315 000 à 350 000, notamment car nous ne pouvions pas, en 2020 et 2021, renvoyer des étrangers dans leur pays à cause de la crise de la covid, l’espace aérien étant fermé.
Cette augmentation est certes importante et elle mérite d’être régulée, monsieur le président de la commission des lois, mais elle n’a rien à voir avec l’augmentation exponentielle que vous avez connue, monsieur le sénateur Leconte.
À l’époque, d’ailleurs, vous n’avez pas eu le courage, contrairement à notre Première ministre et au ministre du travail, de proposer des régularisations par le biais d’une loi. Vous avez préféré faire passer la circulaire Valls, dont je rappelle qu’elle proposait 30 000 régularisations – 23 000 au titre du rapprochement familial et 7 000 au titre du travail.
Ne donnez pas des leçons de régularisation et d’humanité quand vous n’avez pas été capables, en votre temps, d’assumer vos responsabilités. Sur de tels sujets, il faut être plus constructif et objectif, monsieur le sénateur.
Monsieur Laurent, il ne s’agit pas de généraliser le juge unique au sein de la CNDA, mais de l’autoriser – voilà qui est très différent – et de laisser à la CNDA le choix de sa formation.
Soit elle considère que les affaires sont simples, aussi bien pour accorder l’asile que pour le refuser – voyez le cas des Ivoiriens, par exemple, dont l’immense majorité ne bénéficie pas de l’asile sans que cela pose de question de principe –, et elle statue sous la forme du juge unique.
Soit il s’agit de cas complexes – orientation sexuelle, réfugiés issus de pays divisés, comme le Soudan, ou encore la situation des ressortissants d’Afghanistan qui ont fui les talibans, à l’origine de la jurisprudence Kaboul –, et nous laissons alors à la CNDA la possibilité de siéger en formation collégiale ou en formation de juge unique.
Bref, le Gouvernement ne propose pas la généralisation du juge unique : au contraire, il laisse le choix à la cour. Cette demande est formulée en partie par le Conseil d’État lui-même, dans le rapport de son ancien vice-président Bruno Lasserre. Certes, vous ne disposez pas encore du texte du Gouvernement, mais permettez-moi de vous corriger : il ne s’agit en rien de généraliser le juge unique.
Monsieur Benarroche, j’ai bien compris les interrogations de votre groupe, mais il n’est pas possible de dire que des milliers de places d’hébergement sont supprimées à Calais.
Au contraire, des milliers de places d’hébergement sont libres, à Calais et sur toute la côte d’Opale – je le dis devant tous les élus de ce secteur, d’autant que j’en suis un moi-même. Ce qui est vrai, c’est que, en laissant les migrants en marge dans des jungles ou auprès des passeurs, nous faisons le jeu de ces derniers : dans toutes les villes du Nord-Pas-de-Calais, les passeurs expliquent qu’il ne faut pas accepter les hébergements, pour garder les migrants sous la main, en leur promettant de les faire passer de l’autre côté de la frontière.
Je salue la proposition du garde des sceaux, à savoir requalifier de délit en crime les agissements des passeurs, avec des peines allant jusqu’à vingt ans de prison. C’est une bonne chose, et j’espère un vote unanime sur ce texte. Quoi qu’il en soit, on ne peut pas dire que l’État ne fait pas son travail d’hébergement et d’accompagnement à Calais. D’ailleurs, nous aurions bien aimé que beaucoup nous accompagnent pour encourager les migrants à accepter les hébergements proposés.
Monsieur Benarroche, si la proposition des groupes de gauche du Sénat est de faire pour les demandeurs d’asile ce que nous faisons pour les Ukrainiens, ce sera idéologiquement difficile pour vous. En effet, nous ne donnons pas l’asile aux Ukrainiens ! Nous leur accordons, très rapidement, une protection pour trois ans, puis ils repartent.
Si votre proposition est de mettre fin au droit d’asile et d’accorder une protection temporaire pendant un, deux ou trois ans, vous serez bien plus à droite que ceux que vous dénoncez. Tout cela est bien paradoxal.
Madame la sénatrice Benbassa, je ne répondrai pas à vos provocations ; elles sont difficiles à entendre, car elles sont insultantes pour une partie d’entre elles. Je répondrai seulement à la dernière ; vous avez évoqué mes deux grands-pères, pour vous demander si je serais ici devant vous s’ils n’avaient pas été accueillis en France. Je vous trouve bien mal renseignée !
L’un de mes grands-pères est né en Algérie, du temps où ce territoire était français. Il s’est engagé dans l’armée coloniale à 14 ans ; il ne savait ni lire ni écrire, et la France lui a énormément apporté. En 1962, il a choisi notre pays. Il était un militaire de carrière et un Français de volonté. Oui, évidemment, pour ces Français de volonté, le Gouvernement est tout à fait prêt à construire de belles histoires.
Mon second grand-père était un juif maltais, né en Tunisie. Il est venu en France dans les années 1930, pour travailler dans les mines. Il a ensuite rencontré ma grand-mère, et ainsi me voilà, manifestement pour votre plus grand plaisir… Oui, avec le texte que nous proposons, ce grand-père, qui est venu exercer en France un métier difficile, aurait été régularisé et naturalisé.
Mes deux grands-pères avaient de grandes qualités : ils aimaient la France, ils étaient travailleurs et ils n’avaient pas de casier judiciaire. Donc, oui, avec une telle loi, je serais bien là devant vous. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées du groupe RDSE. – M. Philippe Bonnecarrère applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la Première ministre.
Mme Élisabeth Borne, Première ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaite avant tout remercier les oratrices et les orateurs qui ont pris la parole ce soir.
Nous avons des points de vue différents, bien sûr – c’est le principe de la démocratie. Des malentendus, sans doute, restent à lever. Je l’ai dit, tout comme les ministres : il n’est pas question de régularisation massive. Il n’est pas non plus question de faire croire que c’est par l’immigration que nous allons régler les tensions sur le marché du travail.
Cependant, je crois fermement que, pour celles et ceux qui sont sur notre sol depuis longtemps, qui participent à la vie économique et sociale de notre pays et qui sont enfermés dans la précarité, nous devons trouver un chemin vers des régularisations ciblées, en veillant naturellement à ne pas créer des appels d’air ou à ne pas tirer vers le bas les conditions d’emploi. Je suis convaincue que, si nous travaillons ensemble de bonne foi, nous pourrons trouver des solutions et répondre à des craintes légitimes.
Mesdames, messieurs les sénateurs, j’ai noté dans la plupart des interventions des points de convergence et une volonté de construire ensemble. Nous sommes d’accord, collectivement, pour agir aux racines de l’immigration illégale en travaillant avec les pays d’origine et de transit et en mettant notre aide au développement au service de la transition écologique et de la lutte contre la pauvreté.
J’ai aussi noté des convergences sur la question de nos procédures et du respect de notre droit. Ce n’est pas une surprise, puisque nos orientations s’inspirent, voire reprennent, sur beaucoup de points, les conclusions du rapport du président Buffet.
Enfin, je note également un consensus sur la nécessité d’intégrer mieux, notamment par le travail, ceux que nous acceptons sur notre sol. Cet enjeu est essentiel : là encore, nous pourrons avancer ensemble.
Mesdames, messieurs les sénateurs, beaucoup d’entre vous – je l’ai entendu – partagent notre volonté d’efficacité et d’équilibre. Dans les mois qui viennent, et d’abord au Sénat, nous examinerons un projet de loi pour notre politique migratoire, un projet de loi sur lequel nous pouvons travailler ensemble. J’ai confiance en notre esprit de responsabilité collective. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP. – MM. Henri Cabanel et Philippe Bonnecarrère applaudissent également.)
M. le président. Nous en avons terminé avec le débat sur la déclaration du Gouvernement relative à la politique de l’immigration.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente-cinq.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt heures cinq, est reprise à vingt et une heures trente-cinq, sous la présidence de M. Vincent Delahaye.)
PRÉSIDENCE DE M. Vincent Delahaye
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
8
Adaptation au droit de l’Union européenne dans divers domaines
Suite de la discussion et adoption en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission modifié
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans les domaines de l’économie, de la santé, du travail, des transports et de l’agriculture.
Dans la discussion du texte de la commission, nous en sommes parvenus à l’article 26.
TITRE III
DISPOSITIONS D’ADAPTATION AU DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE EN MATIÈRE DE TRANSPORTS
Article 26
I. – Le chapitre X du titre Ier du code de la voirie routière est ainsi modifié :
1° Le II de l’article L. 119-7 est ainsi modifié :
a) À la fin de la première phrase, les mots : « poids lourds pour l’utilisation de certaines infrastructures » sont remplacés par les mots : « véhicules pour l’utilisation d’infrastructures routières » ;
b) À la fin de la deuxième phrase, les mots : « mises en œuvre lors du renouvellement des contrats de délégation de service public conclus antérieurement au 1er janvier 2010 » sont remplacés par les mots : « applicables aux contrats de concession conclus à partir du 1er janvier 2010 et pour lesquels la procédure de consultation a été initiée avant le 24 mars 2022 et a donné lieu à la consultation des entreprises avec une réponse de leur part avant cette date » ;
2° Est ajoutée une section 4 ainsi rédigée :
« Section 4
« Dispositions communes aux péages applicables aux véhicules de transport de marchandises par route et aux véhicules de transport de personnes
« Art. L. 119-11. – Les péages applicables aux véhicules de transport de marchandises par route et aux véhicules de transport de personnes dont le poids total autorisé en charge est supérieur à 3,5 tonnes, prévus par les contrats de concession pour lesquels la procédure d’appel d’offres a été initiée avant le 24 mars 2022 sans toutefois donner lieu à une consultation des entreprises avec réponse de leur part avant cette date, ou pour lesquels la procédure d’appel d’offres est initiée après le 24 mars 2022, sont modulés en fonction de la classe des émissions de dioxyde de carbone (CO₂) du véhicule, au sens de l’article 7 octies bis de la directive 1999/62/CE du Parlement européen et du Conseil du 17 juin 1999 relative à la taxation des véhicules pour l’utilisation d’infrastructures routières.
« Peuvent être prévues une exonération et des réductions des péages mentionnés au premier alinéa du présent article pour les véhicules à émission nulle, dans des conditions définies par décret.
« Les péages prévus par les contrats mentionnés au même premier alinéa peuvent être modulés en fonction du moment de la journée, du type de journée ou de la saison pour réduire la congestion et les dommages causés aux infrastructures, optimiser l’utilisation des infrastructures ou promouvoir la sécurité routière.
« Les modulations de péage prévues aux premier et troisième alinéas sont fixées de sorte qu’elles restent sans effet sur le montant total des recettes de l’exploitant.
« Art. L. 119-12. – Les péages mentionnés à l’article L. 119-11 sont majorés d’une redevance pour coûts externes liée à la pollution atmosphérique due au trafic établie conformément aux exigences et valeurs de référence mentionnées aux annexes III bis et III ter de la directive 1999/62/CE du Parlement européen et du Conseil du 17 juin 1999 relative à la taxation des véhicules pour l’utilisation d’infrastructures routières.
« La majoration prévue au premier alinéa du présent article ne s’applique pas aux véhicules qui relèvent de la norme EURO la plus stricte pendant les quatre années suivant l’entrée en vigueur de cette classification.
« Il peut être dérogé à la majoration définie au même premier alinéa lorsque celle-ci aurait pour effet de détourner les véhicules les plus polluants, entraînant ainsi des conséquences négatives en termes de sécurité routière et de santé publique.
« Art. L. 119-13. – Un décret en Conseil d’État pris après avis consultatif de l’Autorité de régulation des transports détermine les conditions d’application de la présente section. »
II. – Au 2° de l’article L. 421-102 du code des impositions sur les biens et services, les mots : « poids lourds pour l’utilisation de certaines infrastructures » sont remplacés par les mots : « véhicules pour l’utilisation d’infrastructures routières ».
III. – À la fin du deuxième alinéa du B du V de l’article 55 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021, les mots : « poids lourds pour l’utilisation de certaines infrastructures » sont remplacés par les mots : « véhicules pour l’utilisation d’infrastructures routières ».
IV (nouveau). – L’exonération et les réductions prévues au deuxième alinéa de l’article L. 119-11 du code de la voirie routière sont en vigueur jusqu’au 31 mars 2025.
V (nouveau). – L’article L. 119-12 du code de la voirie routière entre en vigueur le 25 mars 2026.
M. le président. L’amendement n° 21, présenté par Mme Préville, M. Jacquin, Mme Meunier, MM. P. Joly, Marie, Tissot et Kanner, Mme Van Heghe, MM. Fichet et J. Bigot, Mme Bonnefoy, MM. Devinaz, Gillé et Houllegatte, Mme M. Filleul et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 8
Après le mot :
route
insérer les mots :
dont le poids total autorisé en charge est supérieur à 2,5 tonnes
La parole est à Mme Angèle Préville.
Mme Angèle Préville. L’article 26 transpose dans le code de la voirie routière la directive européenne 2022/362 du Parlement européen et du Conseil du 24 février 2022, qui fixe de nouvelles règles relatives à la modulation des péages autoroutiers en fonction des émissions de CO2 des véhicules poids lourds et à la création d’une redevance pour coûts externes liés à la pollution atmosphérique pour les poids lourds.
Au sein de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, le rapporteur a souhaité préciser le tonnage minimal des véhicules utilitaires lourds qui seront concernés par ces nouvelles obligations.
S’appuyant sur la directive, l’amendement du rapporteur adopté en commission tend à fixer à 3,5 tonnes la valeur minimale du poids total autorisé en charge à partir de laquelle les véhicules de transport de marchandises par route et les véhicules de transport de personnes seront taxés.
Nous estimons que cette valeur minimale de tonnage exclut de fait, pour le transport de marchandises par route, les grands véhicules utilitaires légers (VUL), dont le poids total autorisé est généralement situé entre 2,5 et 3,5 tonnes.
Or, comme le souligne le rapport sénatorial de Mme Nicole Bonnefoy et de M. Rémy Pointereau, issu des travaux de la mission d’information relative au transport de marchandises face aux impératifs environnementaux et publié en mai 2021, le parc de ces VUL n’a cessé de croître ces dernières années.
Ils sont de plus en plus utilisés pour le transport de fret et concurrencent ainsi les poids lourds, y compris sur les longues distances. Toujours d’après le rapport d’information précité, « les VUL sont soumis à une réglementation plus souple que les poids lourds ».
Leur développement peut dès lors participer à une forme de déréglementation du secteur, notamment sociale et environnementale, par contournement des règles qui s’appliquent uniquement aux poids lourds. Le risque que certaines entreprises de transport routier puissent jouer sur les effets de seuils en développant leur flotte de VUL, pour échapper ainsi à la taxe, est réel.
Pour éviter un tel risque, nous proposons d’inclure les grands VUL de transport de marchandises dans l’assiette de la taxe, en permettant d’appliquer les péages dès que le poids du véhicule est supérieur à 2,5 tonnes.
M. le président. Quel est l’avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable ?
M. Cyril Pellevat, rapporteur pour avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. L’adoption de cet amendement conduirait à opérer une surtransposition de la directive Eurovignette.
Les nouvelles obligations imposées par la dernière version de cette directive en matière de modulation et de majoration des péages s’appliquent en effet aux véhicules utilitaires lourds qui sont définis comme les véhicules ayant une masse en charge maximale techniquement admissible supérieure à 3,5 tonnes.
En outre, s’agissant des véhicules utilitaires légers, l’article L. 122-4 du code de la voirie routière prévoit déjà de mettre en place une tarification différenciée selon les niveaux d’émissions des véhicules dans les futurs contrats de concessions autoroutières.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Clément Beaune, ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des transports. Je partage l’avis de M. le rapporteur pour avis : cet amendement tend à aller au-delà des cadres de la directive.
Par ailleurs, dans le code de la voirie routière, les véhicules utilitaires légers (VUL) font l’objet d’une réglementation particulière, qui peut être modulée en fonction de la performance environnementale.
En tout état de cause, nous ne saurions mettre en place un tel changement de seuil.
L’avis du Gouvernement est donc défavorable.
M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour explication de vote.
Mme Angèle Préville. Je proposais précisément que nous soyons plus ambitieux que la directive européenne, ainsi que nous pouvons en décider ! Ce serait bénéfique pour la transition écologique.
M. le président. L’amendement n° 61, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 10
Supprimer cet alinéa.
II. – Alinéa 11
Remplacer les mots :
aux premier et troisième alinéas
par les mots :
au premier alinéa
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Clément Beaune, ministre délégué. Les alinéas 10 et 11 ont été ajoutés sur l’initiative de la commission, afin de préciser que la modulation horaire des péages et la modulation CO2 s’opéraient sans recette supplémentaire pour la concession.
Toutefois, les précisions mentionnées à l’article 10 nous apparaissent comme inutiles et redondantes : une telle répétition du principe nuirait à la compréhension du texte.
Quant à l’alinéa 11, il est pertinent, mais sa rédaction doit être légèrement adaptée pour tenir compte de la suppression de l’alinéa 10 que nous proposons.
Mesdames, messieurs les sénateurs, ces ajustements techniques, que le Gouvernement vous soumet, ne modifient pas l’article au fond.
M. le président. Quel est l’avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable ?
M. Cyril Pellevat, rapporteur pour avis. La commission a estimé que la modulation horaire constituait une possibilité qu’il était nécessaire d’ajouter dans la nouvelle section IV relative aux véhicules lourds, de marchandises et de voyageurs.
À choisir, il serait d’ailleurs sans doute plus opportun de supprimer certaines dispositions déjà redondantes dans les sections II ou III pour les intégrer à la section IV, laquelle est plus complète, puisqu’elle concerne les différents types de transports lourds.
L’avis est donc défavorable sur cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 53 rectifié bis, présenté par MM. Fernique, Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 10
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
« Les péages prévus par les contrats mentionnés au premier alinéa peuvent appliquer une redevance de congestion sur tout tronçon de leur réseau routier affecté par la congestion. Une telle redevance de congestion ne peut être appliquée que sur les tronçons routiers régulièrement saturés, et uniquement pendant les périodes habituelles de congestion sur la base de critères objectifs liés au niveau auquel les routes et leurs abords sont affectés par la congestion, mesurés entre autres en termes de retards moyens ou de longueur moyenne des files.
« Une redevance de congestion imposée sur tout tronçon du réseau routier s’applique d’une manière non discriminatoire à toutes les catégories de véhicules. Elle reflète les coûts imposés par un véhicule aux autres usagers de la route, et de manière indirecte à la société.
« La redevance prévue aux deux alinéas précédents s’applique aux véhicules dont le poids total autorisé en charge est égal ou supérieur à 2,5 tonnes. Elle ne s’applique pas aux minibus, autobus et autocars.
La parole est à M. Jacques Fernique.