Sommaire

Présidence de M. Alain Richard

Secrétaires :

Mme Esther Benbassa, M. Daniel Gremillet.

1. Procès-verbal

2. Loi de finances pour 2023. – Suite de la discussion d’un projet de loi

Seconde partie (suite)

Travail et emploi

M. Daniel Breuiller, rapporteur spécial de la commission des finances

M. Emmanuel Capus, rapporteur spécial de la commission des finances

Mme Frédérique Puissat, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales

M. Bernard Jomier

Mme Cathy Apourceau-Poly

M. Olivier Henno

M. Stéphane Artano

Mme Céline Boulay-Espéronnier

M. Joël Guerriau

Mme Raymonde Poncet Monge

M. Martin Lévrier

M. Édouard Courtial

M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion

Mme Carole Grandjean, ministre déléguée auprès du ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion et du ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse, chargée de l’enseignement et de la formation professionnels

État B

Amendement n° II-377 de Mme Frédérique Puissat, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. – Adoption par scrutin public n° 77.

Amendement n° II-66 rectifié de Mme Nadia Sollogoub. – Rejet.

Amendement n° II-612 de Mme Corinne Féret. – Rejet.

Amendement n° II-610 de Mme Corinne Féret. – Retrait.

Amendement n° II-719 de Mme Cathy Apourceau-Poly. – Retrait.

Amendement n° II-611 de Mme Corinne Féret. – Rejet.

Amendement n° II-660 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.

Amendement n° II-606 de Mme Corinne Féret. – Rejet.

Amendement n° II-614 de Mme Corinne Féret. – Rejet.

Amendement n° II-654 rectifié de M. Jean-Jacques Lozach. – Non soutenu.

Amendement n° II-717 de Mme Cathy Apourceau-Poly. – Rejet.

Amendements identiques nos II-61 rectifié ter de M. Philippe Mouiller, II-488 de M. Daniel Breuiller et II-609 de Mme Corinne Féret. – Adoption des trois amendements.

Amendement n° II-608 de Mme Corinne Féret. – Rejet.

Amendement n° II-613 de Mme Corinne Féret. – Rejet.

Amendement n° II-661 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.

Amendement n° II-607 de Mme Corinne Féret. – Retrait.

Amendement n° II-222 de Mme Françoise Férat. – Rejet.

Amendement n° II-718 de Mme Cathy Apourceau-Poly. – Retrait.

Amendement n° II-616 de Mme Mélanie Vogel. – Rejet.

Amendement n° II-716 de Mme Cathy Apourceau-Poly. – Rejet.

Amendement n° II-619 de Mme Mélanie Vogel. – Rejet.

Amendement n° II-621 rectifié de Mme Mélanie Vogel. – Rejet.

Vote sur les crédits de la mission

Adoption, par scrutin public n° 78, des crédits de la mission « Travail et emploi », figurant à l’état B, modifiés.

Articles 47 et 48 (nouveau) – Adoption.

Article 49 (nouveau)

Amendement n° II-678 de Mme Christine Lavarde. – Rejet.

Amendements identiques nos II-28 de la commission et II-376 de Mme Frédérique Puissat, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. – Adoption des deux amendements.

Adoption de l’article modifié.

3. Organisation des travaux

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE Mme Laurence Rossignol

4. Loi de finances pour 2023. – Suite de la discussion d’un projet de loi

Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation

M. Marc Laménie, rapporteur spécial de la commission des finances

Mme Jocelyne Guidez, rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales

Mme Cathy Apourceau-Poly

Mme Brigitte Devésa

Mme Nathalie Delattre

M. Édouard Courtial

Mme Vanina Paoli-Gagin

Mme Raymonde Poncet Monge

M. André Gattolin

Mme Victoire Jasmin

Mme Patricia Mirallès, secrétaire d’État auprès du ministre des armées, chargée des anciens combattants et de la mémoire

État B

Amendements identiques nos II-5 de la commission et II-566 de M. Guillaume Gontard. – Adoption des deux amendements.

Vote sur les crédits de la mission

Adoption des crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation », figurant à l’état B, modifiés.

Article 41 – Adoption.

Article 41 bis (nouveau)

Amendement n° II-6 de la commission. – Retrait.

Amendement n° II-565 rectifié de Mme Patricia Schillinger. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Mme Patricia Mirallès, secrétaire d’État

Culture

M. Vincent Éblé, rapporteur spécial de la commission des finances

M. Didier Rambaud, rapporteur spécial de la commission des finances

Mme Sabine Drexler, rapporteur pour avis de la commission de la culture

Mme Sylvie Robert, rapporteure pour avis de la commission de la culture

Mme Sonia de La Provôté

M. Bernard Fialaire

Mme Laure Darcos

Mme Vanina Paoli-Gagin

M. Thomas Dossus

M. Julien Bargeton

M. Lucien Stanzione

M. Pierre Ouzoulias

M. Max Brisson

Mme Marie-Pierre Monier

Mme Else Joseph

Mme Rima Abdul-Malak, ministre de la culture

Suspension et reprise de la séance

État B

Amendement n° II-729 du Gouvernement. – Adoption.

Amendement n° II-507 de M. Daniel Breuiller. – Rejet.

Amendement n° II-528 rectifié de M. Thomas Dossus. – Rejet.

Amendement n° II-656 de Mme Nathalie Delattre. – Retrait.

Amendement n° II-703 de Mme Sonia de La Provôté. – Retrait.

Amendements identiques nos II-396 rectifié de Mme Marie-Pierre Monier et II-682 de M. Pierre Ouzoulias. – Adoption des deux amendements.

Amendement n° II-691 de Mme Vanina Paoli-Gagin. – Rejet.

Amendement n° II-495 de Mme Marie-Pierre Monier. – Adoption.

Amendement n° II-356 de Mme Sylvie Robert, rapporteure pour avis de la commission de la culture. – Adoption.

Amendement n° II-357 rectifié de Mme Sylvie Robert, rapporteure pour avis de la commission de la culture. – Adoption.

Amendement n° II-505 de M. Daniel Breuiller. – Rejet.

Amendement n° II-524 de M. Thomas Dossus. – Rejet.

Amendement n° II-657 de Mme Guylène Pantel. – Retrait.

Amendement n° II-496 de Mme Marie-Pierre Monier. – Rejet.

Vote sur les crédits de la mission

Adoption des crédits de la mission « Culture », figurant à l’état B, modifiés.

Article 41 quater (nouveau)

Amendement n° II-8 de la commission. – Adoption de l’amendement supprimant l’article.

Article 41 quinquies (nouveau)

Amendement n° II-9 de la commission. – Adoption de l’amendement supprimant l’article.

Médias, livre et industries culturelles

Compte de concours financiers : Avances à laudiovisuel public

M. Roger Karoutchi, rapporteur spécial de la commission des finances

Mme Joëlle Garriaud-Maylam, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères

M. Jean-Noël Guérini, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères

M. Michel Laugier, rapporteur pour avis de la commission de la culture

M. Jérémy Bacchi, rapporteur pour avis de la commission de la culture

M. Julien Bargeton, rapporteur pour avis de la commission de la culture

M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur pour avis de la commission de la culture

M. Bernard Fialaire

M. Max Brisson

Mme Vanina Paoli-Gagin

Mme Monique de Marco

M. André Gattolin

M. David Assouline

Mme Céline Brulin

Mme Sonia de La Provôté

Mme Laure Darcos

M. Jean Hingray

Mme Else Joseph

Mme Rima Abdul-Malak, ministre de la culture

médias, livre et industries culturelles

État B

Amendement n° II-526 de M. Thomas Dossus. – Retrait.

Amendement n° II-659 de Mme Nassimah Dindar. – Non soutenu.

Amendement n° II-679 de M. Stéphane Artano. – Rejet.

Amendement n° II-564 rectifié de Mme Victoire Jasmin. – Rejet.

Amendement n° II-721 de Mme Monique de Marco. – Rejet.

Amendement n° II-680 de Mme Céline Brulin. – Rejet.

Amendement n° II-523 de M. Thomas Dossus. – Rejet.

Vote sur les crédits de la mission

Adoption des crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles », figurant à l’état B.

compte de concours financiers : avances à l’audiovisuel public

État D

Amendement n° II-506 de M. Daniel Breuiller. – Retrait.

Amendement n° II-508 de M. Daniel Breuiller. – Retrait.

Vote sur les crédits du compte spécial

Adoption, par scrutin public n° 79, des crédits du compte de concours financiers « Avances à l’audiovisuel public », figurant à l’état D.

Suspension et reprise de la séance

5. Mise au point au sujet d’un vote

6. Loi de finances pour 2023. – Suite de la discussion d’un projet de loi

Recherche et enseignement supérieur

Mme Vanina Paoli-Gagin, rapporteur spécial de la commission des finances

M. Jean-François Rapin, rapporteur spécial de la commission des finances

M. Jean-Pierre Moga, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques

M. Frédéric Marchand, rapporteur pour avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable

Mme Laure Darcos, rapporteure pour avis de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication

M. Stéphane Piednoir, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication

M. Bernard Fialaire

M. Max Brisson

M. Pierre Médevielle

Mme Monique de Marco

M. Julien Bargeton

M. Yan Chantrel

M. Pierre Ouzoulias

M. Jean Hingray

M. Jacques Grosperrin

Mme Sylvie Retailleau, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche

État B

Amendement n° II-591 de M. Yan Chantrel. – Rejet.

Amendement n° II-512 de M. Daniel Breuiller. – Rejet.

Amendement n° II-593 de M. Yan Chantrel. – Rejet.

Amendement n° II-444 de Mme Monique de Marco. – Rejet.

Amendement n° II-445 de Mme Monique de Marco. – Rejet.

Amendement n° II-452 de Mme Monique de Marco. – Rejet.

Amendement n° II-592 de M. Yan Chantrel. – Rejet.

Amendement n° II-675 de M. Pierre Ouzoulias. – Rejet.

Amendement n° II-519 de M. Yan Chantrel. – Rejet.

Amendement n° II-520 de M. Yan Chantrel. – Rejet.

Amendement n° II-469 de Mme Monique de Marco. – Rejet.

Amendement n° II-687 de Mme Nathalie Delattre. – Rejet.

Amendement n° II-392 rectifié de M. Stéphane Piednoir. – Retrait.

Amendement n° II-217 rectifié de Mme Élisabeth Doineau. – Retrait.

Amendement n° II-457 de Mme Monique de Marco. – Rejet.

Amendement n° II-470 de Mme Monique de Marco. – Rejet.

Amendement n° II-365 rectifié bis de M. René-Paul Savary. – Retrait.

Amendement n° II-455 de Mme Monique de Marco. – Rejet.

Amendement n° II-674 de M. Pierre Ouzoulias. – Rejet.

Amendement n° II-395 de Mme Sylvie Robert. – Rejet.

Amendement n° II-623 de M. Laurent Lafon. – Adoption.

Amendements identiques nos II-59 rectifié ter de M. Philippe Mouiller et II-427 rectifié de M. Jean-Pierre Corbisez. – Retrait des deux amendements.

Amendements identiques nos II-64 rectifié ter de M. Philippe Mouiller et II-456 rectifié de Mme Nathalie Delattre. – Retrait des deux amendements.

Amendement n° II-655 de M. Michel Canévet. – Retrait.

Amendement n° II-521 de M. Thomas Dossus. – Rejet.

Amendement n° II-699 de M. Jacques Fernique. – Rejet.

Amendement n° II-814 de la commission. – Adoption.

Amendement n° II-502 de Mme Marie-Pierre Monier. – Retrait.

Amendement n° II-383 rectifié de M. Stéphane Piednoir. – Rejet.

Amendement n° II-382 rectifié de M. Stéphane Piednoir. – Rejet.

Amendement n° II-384 rectifié de M. Stéphane Piednoir. – Adoption.

Amendement n° II-503 de Mme Marie-Pierre Monier. – Adoption.

Amendement n° II-596 rectifié bis de Mme Annick Billon. – Devenu sans objet.

Vote sur les crédits de la mission

Adoption des crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur », figurant à l’état B, modifiés.

Après l’article 44 sexies

Amendement n° II-647 de M. Georges Patient. – Non soutenu.

Amendement n° II-728 du Gouvernement. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

7. Ordre du jour

compte rendu intégral

Présidence de M. Alain Richard

vice-président

Secrétaires :

Mme Esther Benbassa,

M. Daniel Gremillet.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à dix heures.)

1

Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

État B (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Moyens des politiques publiques et dispositions spéciales

Loi de finances pour 2023

Suite de la discussion d’un projet de loi

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Travail et emploi
Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Travail et emploi

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2023, considéré comme adopté par l’Assemblée nationale en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution (projet n° 114, rapport général n° 115, avis nos 116 à 121).

Nous poursuivons l’examen, au sein de la seconde partie du projet de loi de finances, des différentes missions.

SECONDE PARTIE (suite)

MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

Travail et emploi

Deuxième partie
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
État B

M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Travail et emploi » (et articles 47 à 49).

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Daniel Breuiller, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, monsieur, madame les ministres, mes chers collègues, avec plus de 20 milliards d’euros, la mission « Travail et emploi » est, après la mission « Écologie, développement et mobilité durables », celle qui connaît la progression la plus forte par rapport à la loi de finances initiale pour 2022.

Cependant, compte tenu du volume très important de crédits supplémentaires provenant, en 2021 et en 2022, de collectifs budgétaires, du plan de relance et de fonds de concours, nous serons en réalité dans des ordres de grandeur comparables à ceux qu’on a pu constater ces deux dernières années.

Ces mouvements en cours d’exercice et les écarts considérables entre crédits votés et exécutés ont notablement brouillé la lisibilité du budget de l’emploi et de la formation professionnelle depuis deux ans. Nous espérons nous prononcer aujourd’hui sur des bases plus conformes à ce que sera réellement l’impact de ce budget en 2023.

J’évoquerai plus particulièrement le volet de la mission relatif à la politique de l’emploi.

Tout d’abord, je voudrais dire que les moyens très importants consacrés depuis 2020 à la politique portée par cette mission ont certainement joué un rôle dans l’amélioration de la situation de l’emploi ; je pense notamment à l’apprentissage, la hausse du nombre de contrats d’apprentissage représentant près de la moitié de la baisse du nombre de chômeurs.

La dépense budgétaire s’est alourdie, mais d’autres dépenses ont diminué, et l’assurance chômage n’est plus en déficit.

En ce qui concerne la mission, le recul du chômage entraîne une nette diminution des dépenses d’allocations prises en charge par l’État, de l’ordre de 500 millions d’euros. Inversement, la progression de l’emploi majore de près de 700 millions d’euros la compensation à la sécurité sociale des exonérations de cotisations. Cette dépense atteint 5 milliards d’euros, soit un quart du budget total de la mission.

S’agissant des actions en faveur de publics spécifiques, le budget destiné aux entreprises adaptées poursuit sa progression. Le contrôle effectué par Emmanuel Capus pour la commission des finances montre que plusieurs freins subsistent au développement de ce type d’emplois. L’expérimentation de nouvelles formes d’insertion dans l’emploi des personnes handicapées n’a pas encore donné les résultats escomptés.

Les dotations pour l’insertion par l’activité économique (IAE) sont maintenues au niveau de 2022, ce qui aura pour effet de diminuer le nombre d’emplois finançables. Elles ont certes notablement augmenté depuis trois ans, mais cette stabilisation pose question, car les rémunérations des bénéficiaires de l’IAE, indexées sur le Smic, vont augmenter. À crédits égaux, il pourrait donc y avoir moins de bénéficiaires. Les acteurs de l’IAE manquent de visibilité sur la répartition territoriale de l’enveloppe entre les différents types de structures, alors que le coût des contrats sera plus élevé qu’en 2022.

Les actions en faveur de l’accompagnement renforcé des jeunes vers l’emploi prennent, quant à elles, une part accrue dans le budget de la mission, avec le contrat d’engagement jeune (CEJ) mis en place depuis le 1er mars dernier, dont la dotation atteint 1 milliard d’euros.

Ce dispositif a été introduit dans des conditions critiquables, sans évaluation préalable, au cours de l’examen du PLF pour 2022. Le recul manque pour en effectuer une évaluation approfondie, mais les premiers éléments recueillis sont plutôt encourageants.

Sa montée en charge, pour atteindre un objectif de 300 000 contrats conclus cette année, concerne essentiellement les missions locales, sur lesquelles repose en majorité cet accompagnement intensif des jeunes présentant, selon l’expression pudique de rigueur, des « besoins périphériques importants ». L’État apporte aux missions locales un soutien sensiblement supérieur à celui dont elles bénéficiaient il y a trois ou quatre ans.

Les conditions d’orientation des jeunes, soit vers Pôle emploi, soit vers les missions locales, ont été clarifiées, et il semble que le CEJ ait même permis d’améliorer les échanges entre les deux opérateurs, qui agissaient jusqu’à présent de manière trop cloisonnée.

La gestion du dispositif pourrait toutefois induire une charge administrative assez lourde, au détriment des tâches d’accompagnement, notamment pour satisfaire aux conditions d’activité minimale. Il y a sans doute matière à simplifier dans ce domaine.

De même, il faudra veiller à ce que le CEJ s’articule au mieux avec des structures comme les écoles de la deuxième chance ou l’Établissement pour l’insertion dans l’emploi (Épide).

En résumé, le CEJ me paraît améliorer le dispositif de la garantie jeunes et mérite d’être consolidé.

J’ai mentionné Pôle emploi. La subvention de l’État avait baissé jusqu’en 2021. Elle a été stabilisée en 2022 et augmente de 136 millions d’euros en 2023, mais, dans le même temps, les crédits attribués au titre de la mission « Plan de relance » ne sont pas reconduits.

Le plafond d’emplois de Pôle emploi, en très légère baisse, sera globalement maintenu en 2023 au même niveau que ces deux dernières années. Ses moyens ont été renforcés pour le CEJ, l’accompagnement des chômeurs de très longue durée et le plan de réduction des tensions de recrutement.

Toutefois, les évolutions de Pôle emploi au-delà de 2023 sont suspendues aux résultats des travaux lancés sur France Travail. Le Gouvernement, monsieur le ministre, s’est défendu de vouloir fusionner ou refondre l’organisation des acteurs du service public de l’emploi. Pour autant, à ce jour, vous n’avez pas indiqué en quoi consisterait cette réforme, vous contentant de préciser ce qu’elle ne serait pas.

À mon sens, l’enjeu porte sur une réelle coordination des acteurs de terrain, pour mieux identifier les personnes nécessitant un accompagnement, mieux orienter, mieux partager les données et assurer un meilleur suivi. Je ne sais pas, à ce stade, si France Travail répondra réellement à ce besoin.

Je relève que les prévisions indicatives pour les dépenses de fonctionnement du programme « Accès et retour à l’emploi », constituées à près de 90 % de la subvention à Pôle emploi, marquent une diminution de 11 % en 2024 et de 12 % en 2025.

Le recul du chômage ne doit pas masquer la persistance d’un nombre encore bien trop important de personnes très éloignées de l’emploi, notamment parmi les jeunes. C’est pour ces publics que les besoins d’accompagnement sont les plus élevés. L’effort en leur direction doit être maintenu, et même renforcé.

En matière d’apprentissage et de formation professionnelle, je souhaite également qu’une attention prioritaire soit portée à ceux qui ont le moins de facilité à s’insérer sur le marché du travail ou à accéder aux formations.

Telles sont les observations que je souhaitais formuler sur cette mission, dont les crédits sont confortés dans ce projet de budget. La commission des finances, qui a suivi les recommandations formulées par Emmanuel Capus et moi-même, vous en propose l’adoption. (M. Marc Laménie applaudit.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Emmanuel Capus, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, je vais pour ma part aborder le second volet de la mission, à savoir le financement de l’apprentissage et de la formation professionnelle.

Le succès de l’apprentissage, au-delà de toute prévision, est paradoxalement à la source de l’une des difficultés budgétaires majeures de cette mission, avec un poids financier qui dépasse largement celui de toutes les autres actions de ses différents programmes. C’est un sujet d’inquiétude exprimé à de multiples reprises, en commission comme en séance publique, particulièrement à l’occasion des « rallonges » budgétaires successives accordées à France Compétences.

Ces inquiétudes sont légitimes, mais l’apprentissage et la formation professionnelle constituent aussi un enjeu essentiel si nous voulons progresser vers le plein emploi. Or il reste beaucoup de chemin à parcourir, même si la situation s’est améliorée. En effet, par rapport à la fin de 2019, les emplois salariés ont progressé de 800 000 et le nombre de demandeurs d’emploi a diminué de près de 400 000.

Présenté de longue date comme la meilleure voie d’insertion professionnelle des jeunes, l’apprentissage a longtemps stagné. Le nombre annuel de contrats conclus a même baissé de 2012 à 2017, avant de remonter nettement en 2018 et en 2019, puis de « décoller » à un rythme tout à fait inattendu : près de 740 000 contrats ont été conclus en 2021, deux fois plus qu’en 2019, et autant, sinon plus, en 2022.

Sous l’angle budgétaire, la question de l’apprentissage se pose à deux niveaux assez différents. Le premier est celui du soutien de l’État à travers les aides à l’embauche. L’aide exceptionnelle mise en place en 2020 – elle concerne toutes les entreprises, y compris celles de plus de 250 salariés, et les formations allant jusqu’à bac+5 – a certainement joué dans l’essor de l’apprentissage. Mais le coût budgétaire a bondi de 1,3 milliard en 2020 à 4,2 milliards en 2021. Pour 2022, le montant sera certainement du même ordre.

La question d’un nouveau paramétrage de cette aide est aujourd’hui posée. Elle fait l’objet de discussions entre le Gouvernement et les partenaires sociaux, ce qui me paraît tout à fait approprié. Il est certainement nécessaire de faire la part des choses entre de probables effets d’aubaine et les incitations vraiment utiles au maintien de la dynamique actuelle de l’apprentissage.

Il semble exclu de revenir purement et simplement à l’aide unique d’avant 2020, mais nous ignorons, pour l’heure, si l’on s’oriente vers une diminution du montant de l’aide actuelle ou vers un ciblage sur certaines entreprises ou certains niveaux de formation. Peut-être serez-vous en mesure, madame, monsieur les ministres, de donner quelques indications sur les options privilégiées ?

En tout état de cause, tous les contrats conclus avant la fin de l’année 2022 bénéficieront pour un an de l’actuel régime des aides à l’embauche. L’effet budgétaire d’une révision à la baisse ne se fera sentir qu’à l’échéance des contrats actuels et à la conclusion de nouveaux contrats, c’est-à-dire majoritairement sur les quatre derniers mois de 2023. C’est la raison pour laquelle un amendement de réduction de crédits ne me paraît pas nécessairement efficace.

Mais c’est surtout la situation financière de France Compétences qui pose le problème budgétaire le plus difficile. L’État a dû intervenir à hauteur de près de 3 milliards d’euros en 2021, puis de nouveau de 4 milliards d’euros en 2022, ce qui n’évitera pas un déficit estimé autour de 3,5 milliards d’euros en fin d’année.

Je rappelle qu’à sa création, aucun soutien de l’État à cet opérateur n’a été envisagé. À l’inverse, la loi de 2018 prévoit le versement à l’État, par France Compétences, d’une contribution à la formation des demandeurs d’emploi de 1,6 milliard d’euros par an depuis 2019.

L’écart s’est rapidement creusé entre les ressources de France Compétences, qui évoluent en fonction de la masse salariale, et ses dépenses, à savoir le financement de l’alternance et celui du compte personnel de formation (CPF), ces deux dispositifs constituant des enveloppes ouvertes.

S’agissant plus particulièrement du CPF, qui représente environ un cinquième des dépenses, un certain nombre de mesures de lutte contre la fraude, de sécurisation et de déréférencement d’organismes ont été prises. Des dispositions législatives figurent dans la proposition de loi adoptée par l’Assemblée nationale qui sera discutée au Sénat le 8 décembre.

Le très large éventail de formations finançables rend incontestablement nécessaire une régulation, dont le principe a été introduit dans l’article 49 du projet de loi de finances, rattaché à la mission. Je soutiens ce principe et proposerai de le préciser par un amendement que nous examinerons tout à l’heure.

Par ailleurs, à travers le projet de loi de finances, l’État décharge France Compétences d’une bonne part de la contribution qu’elle lui verse au titre de la formation des demandeurs d’emploi. Comme l’a souligné la Cour des comptes, le niveau de cette contribution paraissait excessif, d’autant que les dotations du plan d’investissement dans les compétences, qu’elle vient abonder, ne sont que partiellement consommées et font l’objet de reports importants.

Une subvention à France Compétences d’un montant de 1,7 milliard d’euros est inscrite d’emblée dans les crédits de la mission. De ce point de vue, le PLF pour 2023 m’apparaît plus sincère que celui de 2022, qui passait totalement sous silence ce déficit.

L’ensemble de ces mesures atténuent la contrainte financière sur France Compétences, sans pour autant assurer, nous le savons bien, son équilibre financier.

Une révision des niveaux de prise en charge des contrats d’apprentissage est intervenue en septembre dernier, pour des économies évaluées à 200 millions d’euros en 2023. Une autre révision doit intervenir en avril 2023. Au-delà, il faudra sans doute définir des priorités en termes de niveau de soutien selon les différents types de structures et de formations.

L’image de l’apprentissage s’est profondément transformée ; c’est un acquis majeur de la réforme qu’il faut préserver. Mais il est maintenant indispensable que l’État, en lien avec les partenaires sociaux, définisse une trajectoire soutenable pour le financement de la formation professionnelle et de l’apprentissage, sans casser la dynamique en cours.

Sous le bénéfice de ces observations, la commission des finances vous propose donc, mes chers collègues, comme l’a indiqué avant moi notre collègue Daniel Breuiller, d’adopter les crédits de la mission « Travail et emploi » pour 2023. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.  M. Marc Laménie applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Frédérique Puissat, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, pour 2023, la mission « Travail et emploi » se caractérise par une progression considérable de ses crédits – +42 % – et par de nombreuses incertitudes. Nous devons nous prononcer alors que de nombreux changements sont attendus en 2023 : lancement de France Travail, redéfinition des aides à l’apprentissage, fin attendue du plan d’investissement dans les compétences (PIC), financement toujours incertain de France Compétences…

Dans ce contexte, la commission des affaires sociales propose de diminuer les crédits de cette mission sur deux postes de dépense : la subvention à France Compétences et le PIC.

Si l’on veut continuer de développer l’apprentissage et la formation professionnelle, il est urgent de sécuriser leur financement. Or, à ce stade, aucune réponse pérenne n’est apportée au déséquilibre financier de France Compétences. L’établissement accumule les déficits, alors même qu’il va recevoir 4 milliards d’euros de subventions en 2022 et qu’une enveloppe de 1,6 milliard d’euros est prévue pour 2023. Il est urgent de régler cette situation, aujourd’hui insoutenable. De premières mesures de régulation des dépenses sont engagées, mais il faut aller plus loin. Nous proposons à cet égard d’instituer un plafonnement de la prise en charge par le CPF du coût de certaines formations.

Dans cette logique, la commission propose de diminuer de 300 millions d’euros la subvention à France Compétences, la contrepartie étant une plus forte régulation des dépenses d’apprentissage et du CPF ainsi qu’une réduction plus significative de la contribution de France Compétences au PIC.

Concernant le PIC, prolongé jusqu’en 2023, nous pensons que l’année prochaine devrait être marquée par une revue des dispositifs financés par ce plan, afin d’évaluer l’opportunité de maintenir leur financement. À ce stade, les annonces du Gouvernement n’ont pas apporté de précisions sur l’avenir de ces dispositifs, ni même sur la fin effective du PIC. Sans affecter le développement de la formation dans les régions, il nous semble qu’une telle évaluation doit être rapidement engagée, et que les moyens du PIC doivent correspondre à ceux d’une dernière année d’exécution.

Considérant que ce plan doit prendre fin prochainement, que sa contribution directe à la formation et à l’insertion n’est pas mesurée, et que son pilotage n’est toujours pas satisfaisant, nous proposons de diminuer les moyens du PIC de 500 millions d’euros en autorisations d’engagement.

Si nous nous réjouissons de la diminution des dépenses d’allocation de solidarité pour les demandeurs d’emploi, signe d’une conjoncture favorable, nous n’observons pas de corrélation dans les moyens alloués à Pôle emploi, qui, eux, progressent de 17 %. Il faudra, sans tarder, évaluer la pertinence du maintien des effectifs de Pôle emploi qui avaient été accordés à titre exceptionnel lors de la crise sanitaire.

En matière d’insertion dans l’emploi, la réduction des objectifs d’entrées en contrat aidé et en emploi franc paraît adaptée à l’amélioration de la situation de l’emploi. La trajectoire de montée en charge du contrat d’engagement jeune est également cohérente. Il faudra mesurer les effets de ces dispositifs sur l’insertion dans l’emploi durable, en particulier dans le cadre de la mise en place de France Travail.

Sous réserve de ces observations, la commission a donné un avis favorable sur l’adoption des crédits de la mission et aux articles qui lui sont rattachés.

Vous l’aurez noté, monsieur le président, mes trois minutes d’intervention peuvent rapporter gros au budget de l’État ! (Sourires et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. D’autant qu’il vous restait encore dix secondes, madame Puissat… (Nouveaux sourires.)

Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de quinze minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Bernard Jomier. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Bernard Jomier. Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, le budget de la mission « Travail et emploi » pour 2023 s’élève à 20,9 milliards d’euros.

Si la progression de ce budget par rapport à 2022 semble importante, il convient de la relativiser.

D’une part, ces chiffres sont le résultat d’une plus grande compensation des exonérations de cotisations sociales, lesquelles représentent à présent un quart des crédits de la mission.

D’autre part, cette hausse affichée des crédits résulte de changements de périmètres, certains dispositifs étant financés l’an prochain par le budget du ministère du travail, après avoir été pris en charge jusqu’à la fin de 2022 par les crédits du plan de relance.

Au final, à bien y regarder, l’exercice 2023 débutera avec un niveau de crédits proche de celui de l’an dernier, et l’avenir n’est pas franchement rieur, puisque le Gouvernement a déjà acté une baisse importante du budget de la mission pour 2024 et 2025.

Il ne s’agit évidemment pas de nier que le taux de chômage s’élevait à 7,4 % à la fin du deuxième trimestre. Mais nous voulons rappeler que l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) prévoit une remontée du nombre de demandeurs d’emploi en 2023 et en 2024. Nous gardons surtout à l’esprit que nos concitoyens les plus éloignés du marché du travail sont ceux pour qui les freins préalables au retour à l’emploi sont les plus nombreux. Il est donc indispensable que les politiques publiques soient adaptées pour mieux prendre en charge ceux pour qui les obstacles semblent parfois insurmontables.

Il y aurait beaucoup à dire sur notre marché du travail. Tout d’abord parce que nous avons eu la confirmation, la semaine dernière, dans le rapport annuel de Proxinvest, que les rémunérations des dirigeants des 120 plus grandes sociétés cotées ont augmenté en moyenne de 22 % par rapport à 2019, portant la rémunération moyenne à 4,5 millions d’euros, record historique depuis quinze ans.

Quasiment le même jour, vous nous présentiez, monsieur le ministre du travail, les nouvelles règles de l’assurance chômage, de nouveau en défaveur des plus fragiles et des seniors.

Je rappelle tout de même que seuls 55 % des 55-64 ans travaillent dans notre pays, et que ce taux d’emploi reste de six points inférieur à la moyenne des pays européens.

Malgré ces constats largement partagés, le Gouvernement a choisi de réduire de 25 % la durée d’indemnisation pour tous les salariés en fin d’indemnisation nouvellement inscrits à Pôle emploi à compter du 1er février prochain. De 3 à 4 milliards d’euros d’économies seront ainsi réalisés au détriment des salariés et des chômeurs, ce qui n’est pas acceptable selon nous.

L’idée selon laquelle une baisse des droits des demandeurs d’emploi améliorerait leur entrée sur le marché du travail est un leurre. Les difficultés de recrutement actuelles viennent d’abord d’un déficit de compétences au regard des besoins des entreprises et des conditions de travail proposées. Nous ne pouvons l’ignorer.

Nous ne souscrivons pas à l’idée selon laquelle il faudrait donner toujours moins aux allocataires indemnisés par l’assurance chômage et affaiblir encore davantage le service public de l’emploi.

La réalité, aujourd’hui, c’est qu’il est toujours plus difficile d’obtenir un rendez-vous avec un conseiller Pôle emploi. Les délais sont d’autant plus importants que les horaires d’accueil sont réduits. On demande aux allocataires de se débrouiller seuls face à leur ordinateur, en somme de faire leurs démarches en ligne, ce qui occasionne de réelles difficultés pour nombre d’entre eux, car rien ne remplace un accueil physique par un professionnel formé et à l’écoute ! Le résultat, c’est qu’il n’y a jamais eu autant de contestations pour cause d’erreurs dans le calcul des indemnités notamment. Il n’y a jamais eu autant de conseillers agressés verbalement – ou pire –, tant les tensions sont importantes. Nous doutons que les choses aillent mieux avec la nouvelle réforme, qui va encore apporter de la complexité et accroître les incompréhensions.

J’entends le Gouvernement nous expliquer qu’il faudrait faire des économies… Nous lui répondons qu’un budget est constitué de dépenses, mais aussi de recettes, et que les choix opérés aujourd’hui sont avant tout politiques.

Depuis l’ouverture des débats sur le PLF, et auparavant sur le PLFSS, notre groupe a formulé de nombreuses propositions en matière de recettes. Malheureusement, le Gouvernement les rejette toutes.

Au final, qui sera impacté ? Toujours les mêmes, les plus fragiles, ceux qui subissent les contrats précaires et les périodes d’inactivité.

Je l’ai déjà mentionné : un quart des crédits de la mission se résument à des compensations d’exonérations de cotisations sociales. Nous pensons que leur impact mériterait d’être mieux évalué, d’autant que ces politiques s’inscrivent dans la durée. Ce désarmement fiscal n’est pas sans conséquence ; il coûte très cher, soit à la sécurité sociale, soit au budget de l’État…

S’agissant de l’insertion par l’activité économique, qui apporte une contribution réelle à l’insertion des personnes les plus éloignées de l’emploi, nous ferons des propositions. Si ce secteur a bénéficié d’un soutien au cours des dernières années, et qu’il emploie aujourd’hui près de 150 000 salariés, nous ne pouvons passer outre l’inquiétude des parties prenantes.

En raison de la hausse du Smic, sur lequel les rémunérations des bénéficiaires de l’IAE sont indexées, on peut craindre qu’à enveloppe constante, le nombre de postes finançables soit moindre, ce qui remettrait en cause l’élan constaté. Le secteur regroupe par ailleurs des structures de statuts différents – entreprises intermédiaires, associations intermédiaires, ateliers et chantiers d’insertion – présentant de forts écarts en matière d’aides au poste. Les acteurs de l’IAE soulignent un certain manque de visibilité pour 2023 dû aux incertitudes sur la répartition territoriale de l’enveloppe entre les différents types de structures, alors même que le coût des contrats sera plus élevé qu’en 2022.

Concernant France Compétences, je rappelle que la commission des affaires sociales a adopté, au mois de juin dernier, un rapport très complet, intitulé France Compétences face à une crise de croissance, dont Corinne Féret était corapporteure aux côtés de Frédérique Puissat et de Martin Lévrier. Nos collègues avaient formulé quarante propositions pour une meilleure régulation, tant du CPF que de l’apprentissage.

Là encore, personne ne peut ignorer que, dès 2020, France Compétences s’est trouvée dans une situation financière très déséquilibrée, occasionnant un important déficit. Celui-ci a des causes structurelles, dont les conséquences auraient dû être mieux anticipées. En pratique, les deux principaux dispositifs financés par France Compétences, l’apprentissage et le CPF, constituent des enveloppes ouvertes.

Ainsi, le nombre de places en centres de formation d’apprentis (CFA) n’est plus contingenté, chaque contrat d’apprentissage ouvrant droit à une prise en charge sur les fonds de France Compétences. Quant aux droits à la formation professionnelle, désormais monétisés, ils peuvent être directement mobilisés par les titulaires du CPF, avec tous les excès dont nous discuterons prochainement, dans le cadre de l’examen d’une proposition de loi.

Pour faire face, des subventions au titre du soutien à la trésorerie de France Compétences sont inscrites au budget pour 2023. Nous avions déjà, cet été, lors du vote de la loi de finances rectificative pour 2022, acté un soutien à cette instance, encore renforcé ce mois-ci par une nouvelle subvention de l’État à hauteur de 2 milliards d’euros.

Globalement, rien ne pourra se faire sans une plus grande responsabilisation et mobilisation des acteurs de la formation professionnelle et de l’apprentissage, ce qui passe par un dialogue renforcé avec les branches professionnelles et les partenaires sociaux. Il n’appartient ni au Parlement ni au pouvoir réglementaire de se substituer à ces derniers et de faire passer en force les réformes, aussi nécessaires soient-elles.

Je terminerai en soulignant que l’examen de cette mission intervient dans un contexte de préfiguration, encore très floue, de la réforme du service public du travail, avec la création de France Travail, censée devenir le pendant de France Compétences. Compte tenu de la situation de cette instance de gouvernance nationale, nous émettons des craintes et réaffirmons notre souhait d’une meilleure coordination des acteurs de l’emploi sur le terrain, pour mieux identifier les personnes nécessitant un accompagnement, mieux orienter, mieux partager les données et assurer un meilleur suivi.

Vous vous en doutez, mes chers collègues, dans la mesure où ce budget acte une réduction des dépenses du programme 102, dans la mesure où le compte n’y est pas davantage pour la jeunesse, notre groupe, plus que jamais opposé à toutes les coupes budgétaires et à tous ces dispositifs et contrats dont vous vantez les mérites – vous les dites fondés sur « des droits et des devoirs » alors qu’ils procèdent d’une volonté unilatérale de l’État –, n’approuvera pas les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST.)

M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, le projet de loi de finances pour 2023 prévoit une augmentation des crédits de la mission « Travail et emploi » de 4,5 milliards d’euros.

Cette augmentation masque en réalité une modification des périmètres de la mission avec l’intégration des crédits de l’activité partielle qui figuraient auparavant dans la mission « Plan de relance ».

Cette augmentation masque également la baisse des crédits du programme « Accès et retour à l’emploi », notamment la diminution de 500 millions d’euros de l’indemnisation des demandeurs d’emploi.

Le Gouvernement justifie cette diminution des crédits par l’amélioration de la situation de l’emploi et les conséquences de la réforme de l’assurance chômage.

Avec cette réforme, si le taux de chômage passe sous la barre des 9 % six mois durant, la durée d’indemnisation sera réduite de 25 %.

Concrètement, à partir du 1er février 2023, un salarié de moins de 53 ans ne sera indemnisé que pendant dix-huit mois au lieu de vingt-quatre mois aujourd’hui. Un salarié de plus de 55 ans sera indemnisé pendant vingt-sept mois, contre trente-six mois aujourd’hui.

Cette réforme va diminuer les droits des chômeurs sans avoir d’effet sur l’emploi, selon le secrétaire national de la CFDT, sauf à « brosser dans le sens du poil un électorat et à faire des économies budgétaires ».

Le Gouvernement veut en réalité réaliser 4 milliards d’euros d’économies sur le système d’assurance chômage.

Cette réduction des durées d’indemnisation contraindra les personnes sans emploi à accepter des métiers pénibles et mal payés.

À l’opposé du projet du Gouvernement, nous considérons qu’il faut revaloriser le travail et lui redonner tout son sens afin que chacun y retrouve goût, avec de bons salaires et de bonnes conditions de travail.

En refusant d’augmenter les salaires et de revaloriser les métiers essentiels, vous portez la responsabilité de la dévalorisation du sens du travail, qui est un lieu non plus d’épanouissement, mais de mal-être et de souffrance.

Ce projet de loi de finances pour 2023 prévoit également la réforme du service public de l’emploi avec le projet France Travail, dont les contours demeurent très flous.

Si un préfigurateur a été nommé pour préparer sa mise en place dès 2024, les acteurs ne disposent d’aucun élément précis sur son périmètre et son contenu.

Pourtant, les enjeux sont multiples. Quid des jeunes les plus éloignés du travail, qui affrontent des problématiques dites « périphériques » et qui doivent être remobilisés ? Aucun financement n’est aujourd’hui fléché vers de réelles solutions, et les missions locales ont trop peu de leviers d’action.

Enfin, s’agissant de l’inspection du travail, nous alertons sur la situation du personnel, notamment celle des inspectrices et des inspecteurs, confrontés à une crise de perte de sens doublée d’un manque de reconnaissance de leur direction.

Face à un capitalisme de plus en plus agressif, nous avons besoin d’une inspection du travail forte pour faire respecter le travail, mais aussi celles et ceux qui travaillent.

Les crédits de fonctionnement des services déconcentrés de l’État, et donc de l’inspection du travail, n’augmentent que de 2 % en 2023.

Si l’effort ne s’accentue pas, il y a peu de chances que ces difficultés se résorbent.

Le Gouvernement réfléchit-il à de nouvelles évolutions de l’organisation de l’inspection du travail ?

Selon le rapport de notre collègue député Pierre Dharréville, entre la fin de 2017 et mars 2022, le nombre des agents chargés du contrôle des entreprises a diminué de 250 équivalents temps plein (ETP).

Sur le terrain, cela se traduit par un nombre élevé de postes vacants au sein des sections de contrôle. Le taux de vacance serait en moyenne de 15 %. Cette situation empêche l’inspection du travail de remplir ses missions en certains endroits du territoire et crée des ruptures d’égalité.

Le budget pour 2023 est censé permettre à la France d’atteindre le plein emploi, mais, en réalité, nous passons du chômage de masse à la précarité de masse.

Pour l’ensemble de ces raisons, notre groupe votera contre les crédits de la mission « Travail et emploi ». (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE. – Mmes Raymonde Poncet Monge et Victoire Jasmin applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. Olivier Henno. (Mme le rapporteur pour avis applaudit.)

M. Olivier Henno. Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, permettez-moi d’abord de saluer le travail des rapporteurs, qui viennent de nous exposer les réalités et le contenu de la mission que nous examinons.

Avec plus de 20 milliards d’euros qui lui sont consacrés dans le projet de loi de finances pour 2023, la mission « Travail et emploi » enregistre, avec la mission « Écologie, développement et mobilité durables », la plus forte progression par rapport à la loi de finances pour 2022.

Notre analyse s’effectue – espérons que cela dure ! – dans un contexte globalement rassurant sur la question de l’emploi en France.

Le recul continu du chômage se poursuit. Selon les prévisions de l’Insee, le taux de chômage devrait ainsi s’élever à 7,4 % en fin d’année. Aussi, nous saluons les efforts qui ont été déployés depuis plusieurs années pour parvenir au plein emploi, objectif primordial pour notre société.

La tendance à l’augmentation des crédits de la mission « Travail et emploi » est bienvenue pour mener à bien les réformes qui visent à développer les compétences professionnelles des Français et à réduire les inégalités d’accès à l’emploi.

S’agissant de l’apprentissage, cela a été dit, il faut saluer la progression sur le plan quantitatif. Les chiffres qui ont été cités parlent d’eux-mêmes. Saluons également un changement de regard et une approche culturelle différente de l’apprentissage de la part des jeunes, de leur famille et des entreprises.

Certes, nous ne sommes pas encore au niveau de l’Allemagne. J’aime à raconter le cas de l’entreprise Bayer, cette grande entreprise chimique, qui affiche à l’entrée de son siège comme première fierté le nombre d’apprentis embauchés chaque année, avant même le chiffre d’affaires ou le nombre de salariés. C’est une culture, c’est le modèle rhénan.

En résumé, sur le plan quantitatif, les objectifs en nombre d’apprentis sont atteints ; cependant, il y a un « mais » : l’approche qualitative des contrats d’apprentissage qui sont signés nous oblige à constater que bon nombre de contrats concernent des bac+2 ou des bac+3, voire des masters.

Ces contrats sont même devenus, pour beaucoup d’étudiants, un moyen de financer des études trop souvent coûteuses. Est-ce là le rôle de l’apprentissage ? Pourquoi pas, mais un certain nombre de conditions doivent être respectées.

La première est la clarté des objectifs. Je doute que telle ait été notre vision à l’époque du débat sur la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel. Depuis lors, les objectifs ont légèrement évolué et nous devons veiller à ce que cette évolution ne se fasse pas aux dépens des « décrocheurs » – je n’aime pas ce terme –, des métiers à faible qualification ou des métiers en tension. Il convient de veiller également à respecter l’équilibre financier.

À ce sujet, mes chers collègues, lorsque l’on parcourt vos rapports, on constate, cela a été dit, que France Compétences doit régulièrement recourir à des emprunts. Cela souligne certes une dynamique, mais à quel prix ?

Depuis 2020, les dépenses de guichet dépassent largement le produit des contributions des employeurs. En 2021, ce dernier s’élevait à 8,8 milliards d’euros alors que les dépenses en faveur de l’alternance représentaient 9,3 milliards d’euros.

À ces dépenses s’ajoutent celles qui sont liées au compte personnel de formation, estimées à 2,7 milliards d’euros pour 2021. À ce sujet – j’aperçois Martin Lévrier –, il faudra bien évidemment lutter contre la fraude au CPF, mais aussi réguler le dispositif. (M. Martin Lévrier acquiesce.)

La régulation du CPF est nécessaire. Reste à savoir si elle sera suffisante pour éviter un déficit significatif en 2023…

La question se pose également de l’équilibre financier de France Compétences, dont le déficit pourrait être, en 2023, de l’ordre de 4 milliards d’euros. Cela appelle de nouveaux emprunts et des soutiens complémentaires au budget de l’État.

Une telle situation en matière de financement de l’apprentissage et de formation professionnelle n’est pas acceptable. Le retour à l’équilibre financier, à moyen terme bien sûr, mais le plus rapidement possible, n’est pas une option, c’est une exigence !

L’enveloppe budgétaire du programme 102, « Accès et retour à l’emploi », baisse légèrement, de l’ordre de 5 %, en raison des prévisions de diminution du nombre de bénéficiaires en fin de droits à l’assurance chômage.

Au sein de ce programme, nous saluons l’augmentation des crédits du secteur de l’IAE, par l’intermédiaire du FIE, le fonds d’inclusion dans l’emploi. – ah, les sigles !

Grâce à sa dynamique et à la qualité de ses structures, qui ont fait leurs preuves ces dernières années, la politique de l’IAE est l’un des outils les plus pertinents pour remettre des hommes et des femmes en situation durable de travail.

Cette action est indispensable si nous voulons collectivement atteindre l’objectif de 7 % de demandeurs d’emploi de longue durée. Pour ce faire, l’intelligence des parcours et des accompagnements socioprofessionnels doit être mobilisée, afin d’aller chercher celles et ceux qui souffrent de freins à l’emploi et qui en sont les plus éloignés.

Le programme 102 voit également la traduction budgétaire du contrat d’engagement jeune, créé par la dernière loi de finances. L’accompagnement des quelque 300 000 jeunes pour l’année 2023, dont 200 000 nouveaux bénéficiaires, justifie les quelque 800 millions d’euros qui sont prévus pour les missions locales et pour Pôle emploi.

Le dispositif des maisons de l’emploi, créé par Jean-Louis Borloo, doit mériter toute notre attention. C’est pourquoi notre groupe a déposé, par l’intermédiaire de Françoise Férat, un amendement visant à sécuriser les crédits qui y sont consacrés et à les augmenter.

Le dispositif « territoires zéro chômeur de longue durée » fait consensus. Le temps de l’expérimentation touche à sa fin, les résultats sont positifs et la limite des cinquante territoires sera bientôt atteinte.

Il est temps à présent de réfléchir, madame, monsieur les ministres, à la décision que nous allons prendre à l’égard des 134 nouveaux postulants.

Je ne reviens pas sur la question de l’assurance chômage. Le Sénat a bien travaillé sur cette réforme et le débat parlementaire a été de bonne facture. Je salue d’ailleurs la présence conjointe des deux ministres. Madame, monsieur les ministres, j’ai l’impression qu’entre vous, c’est du sérieux ! (Sourires.)

Nous avons bien travaillé sur les incitations à l’emploi, sur la gouvernance, mais aussi sur la validation des acquis de l’expérience (VAE).

J’insiste sur la vigilance que nous apporterons aux moyens qui lui sont consacrés, car la VAE doit devenir une troisième voie, au même titre que la formation initiale et la formation continue. Nous serons également vigilants sur le financement du groupement d’intérêt public (GIP) et sur la question des jurys.

En ce qui concerne la gouvernance, je réaffirme notre cap : France Travail doit se construire sur le paritarisme et le dialogue social. C’est sur ce principe également que nous devons réformer France Compétences. Le déficit de cette institution démontre qu’en matière de bonne gestion, l’étatisation n’est pas une assurance, bien au contraire.

L’étatisation, pas plus que la libéralisation, n’est pas la solution. Il existe une troisième voie, celle du paritarisme, qui est notre cap pour France Travail, comme elle l’est pour la réforme de France Compétences, l’assurance chômage, les retraites Agirc-Arrco ou encore le « 1 % logement ». De ce point de vue, France Travail sera regardée comme un symbole.

Je dirai un dernier mot sur l’inspection du travail, qui est en crise. Pourtant, dans un monde où l’auto-entrepreneuriat connaît parfois des abus, nous avons besoin d’une inspection du travail qui soit forte. Dans le contexte inflationniste actuel, l’augmentation de 2 % des crédits paraît bien faible.

Pour conclure, mes chers collègues, je veux dire notre attachement à un service public de l’emploi performant, qui ferait l’objet d’une approche personnalisée.

Alors que de nombreux métiers sont en tension – on le lit tous les jours dans la presse – et à en juger par les besoins que les professionnels nous remontent du terrain, le retour à l’emploi des personnes qui en sont éloignées depuis trop longtemps est un des grands défis de notre pays. C’est pourquoi nous voterons les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – M. Emmanuel Capus, rapporteur spécial, et Mme le rapporteur pour avis applaudissent également.)

M. Jérôme Bascher. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Stéphane Artano. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

M. Stéphane Artano. Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, je tiens d’abord à remercier les rapporteurs et à saluer la qualité du travail de notre collègue rapporteur pour avis Frédérique Puissat.

Il n’est pas toujours aisé d’évaluer la pertinence d’une enveloppe budgétaire dans un contexte d’inflation persistante et de défis considérables pour le travail et l’emploi. Il faut donc prendre en compte, dans nos analyses, ces nombreuses inconnues pour l’année 2023.

« Protéger les Français et aller vers le plein emploi » : telles sont les ambitions du Gouvernement pour 2023. Avec une hausse de 6,7 milliards d’euros par rapport à 2022, on note un réel effort pour dynamiser l’embauche des apprentis. Il faut donc poursuivre les efforts qui ont été déployés depuis 2017 pour parvenir au plein emploi.

En effet, je reste persuadé que le travail est un levier d’insertion incontournable dans notre société. À cet égard, je tiens à saluer les associations, entreprises et ateliers d’insertion qui œuvrent au quotidien pour que chacun puisse s’insérer et s’épanouir dans notre société.

En ce sens, on ne peut que se réjouir de la progression des crédits de la mission « Travail et emploi ». Cette tendance haussière reste indispensable pour mener à bien les réformes visant à réduire les inégalités d’accès à l’emploi et à développer les compétences professionnelles de tous les Français.

L’augmentation du budget de la mission doit tout de même être relativisée. En effet, il faut prendre en compte dans notre analyse la disparition du programme « Cohésion » de la mission « Plan de relance ».

J’en viens plus précisément aux crédits du programme 102, « Accès et retour à l’emploi », qui sont en légère baisse de 5 %, en raison des prévisions de diminution du nombre de bénéficiaires des allocations de solidarité des personnes en fin de droits à l’assurance chômage.

Au sein du même programme, il faut souligner l’augmentation des crédits du secteur de l’IAE, par l’intermédiaire du fonds d’inclusion dans l’emploi, ce qui est en soi une très bonne chose.

S’agissant de la traduction budgétaire du CEJ, créé par la dernière loi de finances, les 800 millions d’euros prévus devraient permettre aux missions locales et à Pôle emploi d’accompagner environ 300 000 jeunes pour l’année 2023, dont 200 000 nouveaux bénéficiaires.

Ce dispositif hérité du plan de relance doit continuer de monter en puissance, afin de permettre aux jeunes les plus en difficulté d’entrer de manière pérenne sur le marché du travail.

Je note aussi une augmentation de 30 millions d’euros pour l’accompagnement des publics les plus éloignés de l’emploi, qui est naturellement à encourager. Cela étant, je considère que les crédits consacrés aux entreprises adaptées à l’emploi des personnes en situation de handicap restent encore insuffisants.

Je poursuis avec les crédits du programme 103, « Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi », qui vise à soutenir les actifs et les entreprises dans leur phase de transition et de montée en compétences.

On note que les crédits de paiement de ce programme s’élèvent à 12,6 milliards d’euros, contre 6 milliards d’euros dans la loi de finances initiale pour 2022.

La principale hausse concerne évidemment le soutien au développement des contrats d’apprentissage et de professionnalisation. Cette hausse des crédits s’explique naturellement par le rapatriement des crédits dédiés à l’activité partielle, qui figuraient auparavant dans la mission « Plan de relance ».

Enfin, je m’interroge sur la pertinence de la structure France Travail. Les crédits que nous sommes amenés à analyser sont-ils suffisants pour rééquilibrer les comptes ? Madame, monsieur le ministre, pouvez-vous nous éclairer sur la situation de France Travail et nous indiquer les ajustements que vous envisagez pour parvenir à l’équilibre budgétaire ?

Par ailleurs, la question de la gouvernance de France Compétences est toujours épineuse. Qu’en est-il à ce stade ?

Dans l’attente de ces réponses, et tout en restant vigilant, le groupe RDSE votera, dans sa grande majorité, vous l’aurez compris, les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – M. Emmanuel Capus, rapporteur spécial, applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme Céline Boulay-Espéronnier. (Mme le rapporteur pour avis applaudit.)

Mme Céline Boulay-Espéronnier. Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, les crédits de la mission « Travail et emploi » sont examinés dans un contexte bien particulier, où il nous faut respecter un savant jeu d’équilibriste entre la maîtrise des dépenses, d’une part, et l’indispensable soutien aux politiques de l’emploi, d’autre part.

Le présent budget accompagne une situation de l’emploi globalement favorable, la France connaissant un recul du taux de chômage à 7,4 % actuellement.

Cependant, nous sommes toujours mal classés au sein de l’Union européenne. Surtout, la croissance ne pourra que reculer en 2023 sous les effets conjugués de l’inflation et des problèmes énergétiques, ce qui devrait se répercuter sur le marché du travail.

La promesse présidentielle de parvenir au plein emploi sous ce quinquennat semble donc malheureusement assez illusoire.

Comme l’ont souligné nos rapporteurs, les crédits de la mission évoluent à la hausse, mais cette dernière est à relativiser, car elle s’explique surtout par la réintégration dans son périmètre de dispositifs portés en 2021 et en 2022 par le plan de relance, notamment les aides à l’apprentissage et à l’activité partielle.

En tenant compte des lois de finances rectificatives votées en 2022, les budgets de cette année et de l’année prochaine seraient même très proches, contrairement au message diffusé par le Gouvernement.

Concernant les réformes envisagées, je formulerai plusieurs réserves et interrogations.

Monsieur le ministre, vous avez annoncé une réforme du service public de l’emploi, avec la création d’un nouvel organisme, France Travail. Il s’agit de simplifier les parcours, en mettant en commun les informations et stratégies d’accompagnement, notamment avec un point d’entrée unique dans le service public de l’emploi.

Les différents acteurs qui ont été auditionnés au Sénat ont exprimé leurs réserves, estimant le projet de loi très flou. Ils ne disposent d’aucun élément précis sur son périmètre et son contenu.

Une concertation a été engagée, mais elle manque de transparence dans ses objectifs et n’associe pas le Parlement. Nous veillerons donc avec une extrême vigilance à ce que cette nouvelle structure ne se transforme pas en usine à gaz et ne soumette pas les différents opérateurs à des contraintes inappropriées.

Vous avez annoncé par ailleurs une expérimentation concernant les bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA), qui dépend précisément de la création de France Travail. L’organisme sera chargé de mettre en place un contrôle et un accompagnement renforcés.

Nous sommes favorables à un suivi qui soit enfin efficace. La Cour des comptes vient en effet de pointer les défaillances du dispositif d’accompagnement en matière de retour à l’emploi : la moitié des allocataires du RSA le sont encore au bout de quatre ans et 29 % d’entre eux après sept ans.

Un budget de 20 millions d’euros est prévu pour le lancement de l’expérimentation dans une dizaine de territoires pilotes pendant douze mois. On peut se demander si l’expérimentation, puis sa généralisation pourront se conduire à moyens constants sur le terrain.

À l’image de nos rapporteurs, je souhaiterais faire part de notre inquiétude concernant France Compétences, structure créée en 2018 pour réformer la formation professionnelle.

France Compétences a bénéficié de transferts de trésorerie exceptionnels dans les deux lois de finances rectificatives de cette année. Malgré un apport s’élevant à 4 milliards d’euros, son déficit pourrait atteindre 3,4 milliards d’euros en 2022. La Cour des comptes s’alarme ainsi d’une « impasse financière ».

Ce déficit est clairement lié à la réforme du financement de l’apprentissage sous le précédent quinquennat. Depuis 2020, les CFA sont financés par les entreprises en fonction du nombre de contrats signés et l’État s’est substitué aux régions pour compléter le financement.

La multiplication des contrats d’apprentissage fait basculer France Compétences dans le rouge.

Les crédits que nous sommes une nouvelle fois invités à voter pour rééquilibrer ses comptes interrogent sur le fonctionnement et la pertinence de la structure. Notre groupe soutiendra donc l’amendement de la rapporteure de la commission des affaires sociales Frédérique Puissat, dont nous saluons la qualité du travail, visant à réguler les dépenses de France Compétences.

De même, nous suivrons son avis éclairé pour dégager des économies sur les crédits affectés au plan d’investissement dans les compétences. En effet, ce dernier, qui doit prendre fin l’année prochaine, n’a pas démontré son utilité en matière d’insertion et de formation professionnelle.

L’économie totale ainsi réalisée serait de 800 millions d’euros. Ces mesures sont pleinement cohérentes avec notre préoccupation de maîtrise des dépenses publiques de l’État.

S’agissant enfin de la relance de l’apprentissage, je me réjouis que la dynamique se poursuive, avec une hausse de 38 % du nombre de contrats entre 2020 et 2021. Le Gouvernement prévoit la signature de plus de 800 000 contrats cette année, ce qui contribue à améliorer l’emploi des jeunes.

Ce succès est dû, en partie, aux aides qui ont été versées dans le cadre de la crise sanitaire. Je m’interroge donc sur l’éventuelle suppression, le 31 décembre prochain, de l’aide à l’embauche d’apprentis de plus de 18 ans.

Cette aide exceptionnelle contribue à relancer l’attractivité de nombreux métiers. Je pense notamment à la filière agricole, où 40 % des agriculteurs ont plus de 55 ans et partiront à la retraite d’ici à 2030, alors que seul un départ sur trois est remplacé. Les petites structures agricoles ne pourront plus recruter d’apprentis sans cette aide à l’embauche, qui couvre la première année de salaire.

À la veille des concertations qui seront menées avec les partenaires sociaux, je tenais à rappeler cette situation et souhaiterais connaître, madame, monsieur les ministres, votre sentiment sur ce point.

Le groupe Les Républicains votera ce budget en augmentation, avec les mesures d’économies que nous avons indiquées. Notre groupe souhaite que l’examen de la loi de finances permette de faire bouger les lignes tracées par le Gouvernement.

Nous visons ainsi un budget maîtrisé, tenant compte des difficultés actuelles, mais protégeant notre pays d’une dette devenant abyssale. Protéger les Français et leurs emplois passe aussi et surtout par cette discipline. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Joël Guerriau. (M. Emmanuel Capus, rapporteur spécial, et M. Martin Lévrier applaudissent.)

M. Joël Guerriau. Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, atteindre le plein emploi est un objectif à la fois économique et social.

Économique, évidemment, car davantage d’emplois, c’est un accroissement d’activité s’accompagnant d’une meilleure intégration par le travail ; social aussi, parce qu’un accroissement d’activité, c’est davantage de recettes publiques pour financer la solidarité.

Ce sont les entreprises qui nous permettront d’atteindre cet objectif, je l’espère d’ici la fin du quinquennat. Il n’y a d’emploi durable que par la création de valeur ajoutée. C’est d’abord sur les entrepreneurs et les travailleurs que nous comptons pour y parvenir.

Mais la puissance publique peut et doit aider à atteindre le plein emploi, notamment en facilitant l’intégration des publics les plus éloignés du marché du travail.

Ces leviers d’action se trouvent dans la mission que nous examinons aujourd’hui.

Les crédits de la mission « Travail et emploi » dépassent cette année les 20 milliards d’euros. Ils augmentent de près de 29 % par rapport à la loi de finances initiale. C’est considérable.

Cette hausse appelle toutefois plusieurs remarques. La première concerne l’effort de sincérité budgétaire du Gouvernement. En effet, les crédits inscrits dans cette mission pour 2023 sont largement supérieurs à ceux qui étaient inscrits dans la loi de finances initiale pour 2022, mais sont pour autant nettement inférieurs à ceux qui ont été finalement débloqués en 2022 après les deux projets de loi de finances rectificative.

C’est pourquoi le Gouvernement aura finalement maîtrisé la dépense associée à la mission que si et seulement si les crédits qui lui sont consacrés ne sont pas significativement augmentés, en cours d’année, par la voie d’un projet de loi de finances rectificative.

La deuxième remarque répond à des interrogations exprimées par plusieurs de nos collègues. En effet, alors que la vocation des politiques budgétées dans cette mission est de stimuler l’emploi, on pourrait penser que les crédits sont amenés à diminuer lorsque la situation du marché du travail s’améliore. Mais la situation n’est pas si évidente.

Et pour cause : la plupart des mécanismes déployés par le Gouvernement pour faciliter l’intégration par le travail sont plus structurels que conjoncturels, c’est-à-dire qu’ils ont vocation à se maintenir sans tenir compte de la situation du marché de l’emploi.

Cela m’amène à ma troisième et dernière remarque, qui concerne l’apprentissage.

Nous sommes nombreux ici à soutenir depuis longtemps l’apprentissage comme vecteur d’intégration des jeunes au marché du travail. Le Gouvernement a mis les bouchées doubles pour encourager les entreprises à en embaucher.

Les résultats sont nets : le nombre d’entrées en apprentissage a doublé entre 2019 et 2021, passant de 370 000 à 740 000 jeunes. En outre, le montant des aides à l’embauche d’alternants est passé de 1,3 milliard d’euros en 2020 à 4,5 milliards d’euros en 2021.

Sur ce point, je partage l’analyse de notre rapporteur spécial, Emmanuel Capus, dont je tiens à saluer le travail.

M. Emmanuel Capus, rapporteur spécial. Très bien ! Excellent ! (Sourires.)

M. Joël Guerriau. Il faut à la fois reconnaître le succès de l’apprentissage et poser la question de l’efficacité de la dépense publique.

Sur ce sujet, le Gouvernement a engagé des négociations avec les partenaires sociaux et la dynamique de dialogue me semble positive.

Je l’ai dit d’emblée : le seul emploi durable, c’est la création de valeur ajoutée par les entreprises. L’emploi aidé améliore les statistiques du chômage, mais il pèse sur les finances publiques et masque la compétitivité réelle du pays.

L’apprentissage ne doit donc pas être une nouvelle forme d’emploi aidé, qui serait source d’éventuels effets d’aubaine pour les entreprises.

J’espère cependant, monsieur le ministre, que Bercy ne cédera pas à la tentation d’une approche strictement budgétaire pour évaluer le dispositif de l’apprentissage.

M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de linsertion. Cela ne nous ressemble pas !

M. Joël Guerriau. Beaucoup d’effets positifs, notamment sur les plans de la cohésion sociale et de l’éducation des jeunes, n’apparaîtront jamais dans les comptes, mais sont extrêmement précieux.

J’ajouterai enfin un mot sur les mécanismes de soutien aux entreprises adaptées. Contrairement aux dispositifs, qui sont financés par la mission, permettent l’intégration par le travail et doivent répondre aux logiques du marché, ces crédits répondent à un impératif éthique.

Permettre aux personnes en situation de handicap de trouver leur place dans la société, d’y contribuer par leur travail, de se sentir utiles au quotidien, tout cela rend notre société plus humaine et plus équitable.

C’est pourquoi je tiens à saluer l’augmentation des dotations en faveur de l’emploi des personnes handicapées à hauteur de 467 millions d’euros, soit une progression de près de 9 % par rapport à 2022.

Comme l’an dernier, ces aides seront complétées par une contribution, à hauteur de 50 millions d’euros, de l’Association de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées (Agefiph).

Notre groupe votera les crédits de cette mission, sous réserve de l’adoption des amendements proposés par nos rapporteurs spéciaux.

M. Emmanuel Capus, rapporteur spécial. Très bien ! Bravo !

M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.

Mme Raymonde Poncet Monge. Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, quelques semaines seulement après que le Gouvernement eut officialisé la contre-réforme de l’assurance chômage, nous nous trouvons face à un texte qui amorce sa mise en œuvre.

Ainsi, 20 millions d’euros sont alloués à l’expérimentation France Travail, dont les contours et missions restent flous, si ce n’est de répondre à l’injonction du « travailler plus ». Le projet se met progressivement en place, sans que ni le Parlement ni les partenaires sociaux soient pleinement saisis de son contenu.

Ce 49.3 de l’expérimentation vise peut-être à nous mettre, nous et les partenaires sociaux, devant le fait accompli, à l’occasion de la clôture prochaine et définitive des discussions sur la reconduction de la convention tripartite Pôle emploi-État-Unédic.

Cette convention prendra fin, d’ailleurs, sans que le Gouvernement ait été à la hauteur de ses promesses budgétaires. Lors de sa signature en 2015, un financement de 1,5 milliard d’euros avait été promis. Nous n’en sommes aujourd’hui qu’à 1,2 milliard d’euros.

La hausse des crédits alloués cette année à Pôle emploi n’est qu’un rattrapage d’années consécutives d’austérité et de baisse des effectifs, l’État transférant peu à peu la charge de Pôle emploi sur l’Unédic, au détriment, donc, des prestations qu’il convient, alors, de diminuer.

La pérennisation des équivalents temps plein accordée à Pôle emploi pour la mise en œuvre du contrat d’engagement jeune en 2020 explique la hausse actuelle des crédits. Elle ne masque guère la dégradation constante des conditions de travail au sein de l’agence. Aussi les écologistes s’opposeront-ils aux réductions d’emplois.

Selon les syndicats, la proportion de personnels en contrat à durée déterminée (CDD) à Pôle emploi serait passée de 5 % environ en 2019 à 13 % en 2021, avec de fortes disparités locales, certains sites atteignant même un taux de 50 %. L’établissement chargé de l’emploi en France diffuse le CDD comme norme !

Alors que, en 2017, les conseillers avaient en moyenne en portefeuille 46 demandeurs d’emploi en accompagnement global et 336 en accompagnement suivi, ils en ont aujourd’hui respectivement 54 et 406.

De l’avis général, les réformes successives ont porté atteinte à la sécurité des agents, provoqué des pertes de sens au travail et une gestion parfois erratique des dossiers, du fait de changements incessants dans le calcul des indemnités.

Malgré tout, le Gouvernement se réjouit de la baisse du chômage, qui est en partie en trompe-l’œil, et réduit en conséquence les crédits du programme 102, « Accès et retour à l’emploi ».

Or, de l’avis même de l’Insee, un tiers de la hausse du taux d’activité à la mi-2022 résulte des contrats en alternance, notamment en apprentissage, soit des emplois hautement subventionnés, profitant largement, selon la Cour des comptes aux plus diplômés et non aux 1,5 million de jeunes sans emploi ni formation.

Ces derniers dépendent en réalité des CEJ, qui, malgré un certain succès – 200 000 contrats en 2022 –, restent en nombre insuffisant en projection 2023.

Comme c’est le cas pour toute personne éloignée de l’emploi, ils dépendent beaucoup des emplois aidés, comme des parcours emploi compétences (PEC), qui, eux, diminuent de 20 000, passent de douze à six mois et voient leur durée totale maximale réduite à dix-huit mois, sans explication ni justification.

De plus, la baisse du chômage pour 2023 est une hypothèse assez hasardeuse. Elle ne tient pas compte des travaux de l’Unédic, qui prévoit un tassement de la progression des emplois salariés dès l’année prochaine, ni de ceux de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), qui table sur une remontée du chômage jusqu’en 2024.

Dans un contexte où la réforme de l’assurance chômage aura pour effet de rendre les fins de droits plus précoces et de permettre la réalisation de plusieurs milliards d’économies, la hausse des crédits de la mission est en trompe-l’œil.

Par exemple, la hausse du programme 103 s’explique très largement par le transfert des crédits dédiés à l’activité partielle, qui figuraient auparavant dans la mission « Plan de relance », passant de 11,9 milliards d’euros à 7 milliards d’euros au PLF pour 2023 en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement.

Ces jeux budgétaires ne masquent pas les insuffisances d’une politique de l’emploi qui reste antisociale et tournée vers la baisse des droits des demandeurs d’emploi.

En conséquence, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires ne votera pas les crédits de cette mission. (M. Daniel Breuiller, rapporteur spécial, applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Martin Lévrier. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. Martin Lévrier. Monsieur le président, monsieur, madame les ministres, mes chers collègues, j’ai déjà eu l’occasion de le dire à cette tribune : le plein emploi n’est pas une utopie. Le taux de chômage, au sens du Bureau international du travail, a baissé de 2,2 points depuis l’arrivée d’Emmanuel Macron à l’Élysée pour atteindre son niveau le plus bas depuis quinze ans.

Le Gouvernement porte l’ambition du plein emploi et les crédits dont la mission « Travail et emploi » est dotée le démontrent. Ils atteignent un montant total de 20,29 milliards d’euros en autorisations d’engagement, soit une hausse de 28 %, et de 20,88 milliards d’euros en crédits de paiement, soit une hausse de 42,57 %.

Cette hausse de près de 6,2 milliards d’euros en crédits de paiement s’explique majoritairement par des changements de périmètre : des dispositions jusque-là financées par le plan de relance, à l’instar de la prime à l’apprentissage et d’une partie de l’activité partielle, font désormais l’objet d’un financement de droit commun.

Notons qu’à périmètre comparable l’augmentation est de 1,1 milliard d’euros en crédits de paiement et d’environ 1 milliard en autorisations d’engagement, ce qui est largement dû à la dynamique de compensation des exonérations de cotisation. Cette augmentation se décompose ainsi : un peu plus de 600 millions d’euros pour la compensation des exonérations de cotisation des emplois créés en 2022, 350 millions d’euros au titre de la partie formation du fonds national pour l’emploi et 50 millions d’euros pour le financement de dispositifs de transition collective.

Afin de bien mesurer la portée de ces crédits, le moyen le plus efficace est d’en lister les principales modifications par rapport à l’année précédente.

La mise en œuvre de la loi du 2 août 2021 conduit à renforcer les crédits dédiés à la prévention en santé au travail.

Une enveloppe de 350 millions d’euros – je viens de l’évoquer – est inscrite en droit commun au titre de la partie formation du fonds national pour l’emploi et de dispositifs de transition collective jusque-là financés dans le cadre du plan de relance.

Le plan d’investissement dans les compétences est financé à hauteur de 2,5 milliards d’euros, dont 1,6 milliard pour son volet régional.

Le budget de l’insertion par l’activité économique est augmenté afin de financer 7 000 ETP supplémentaires dans les structures d’insertion – l’objectif du Gouvernement est d’atteindre 240 000 bénéficiaires.

Les crédits pour l’accès des jeunes à l’emploi sont reconduits avec un objectif de 300 000 contrats d’engagement jeune.

Une aide aux missions locales est prévue avec un budget de plus de 630 millions d’euros.

Mes chers collègues, le travail mené à bien par les gouvernements qui se sont succédé depuis cinq ans porte ses fruits. Nous devons donc continuer selon les mêmes principes et non chercher à raboter arbitrairement certaines dépenses. Combattre le chômage pour atteindre le plein emploi n’est pas une charge ; c’est un investissement.

C’est la raison pour laquelle nous ne pouvons pas accepter l’amendement n° II-377 de Mme la rapporteure pour avis qui vise à réduire les crédits à hauteur de 800 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 550 millions d’euros en crédits de paiement.

Quant à l’amendement n° II-376, qui a également été déposé par la commission des affaires sociales, il est issu d’une proposition du rapport d’information France Compétences face à une crise de croissance, mais il en détourne en partie le sens.

Si l’idée d’un reste à charge pour certaines formations a été évoquée, c’est afin que les partenaires sociaux s’en emparent et proposent des solutions pertinentes. Cette démarche nous paraîtrait plus cohérente, même si cet amendement va dans la bonne direction.

Mes chers collègues, je le redis, dans ce nouveau contexte qui casse les habitudes de la gestion du chômage de masse, nous devons continuer à investir dans toutes les solutions pertinentes pour atteindre le plein emploi.

Avant de conclure, je rappellerai les huit chantiers identifiés comme prioritaires par le ministère au cours des prochaines années et sur lesquels il nous faudra travailler en bonne intelligence : la rénovation du service public de l’emploi par la création de France Travail ; la réforme de l’accompagnement des bénéficiaires du RSA et une meilleure insertion des publics les plus éloignés de l’emploi ; la poursuite du déploiement du contrat d’engagement jeune ; le perfectionnement de l’assurance chômage ; l’amplification de la dynamique de l’apprentissage ; la préparation des actifs aux compétences de demain ; le soutien à l’emploi des seniors et la garantie de l’avenir de notre système de retraite.

Mes chers collègues, pour parvenir au plein emploi, l’État est pleinement mobilisé. Bien que très attentif à la maîtrise des dépenses publiques, il donne, au travers de ses budgets, de solides garanties et des moyens sans précédent pour que chacun puisse accéder à l’emploi ou s’y maintenir et que chaque entreprise ait les compétences nécessaires aux métiers de demain.

C’est donc bien naturellement que le groupe RDPI votera les crédits de la mission « Travail et emploi ». (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP.)

M. Emmanuel Capus, rapporteur spécial. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Édouard Courtial. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Édouard Courtial. Monsieur le président, monsieur, madame les ministres, mes chers collègues, le travail plutôt que l’assistanat, le sens de l’effort plutôt que le nivellement par le bas, le mérite, l’équilibre des droits et des devoirs : voilà les valeurs que le groupe Les Républicains porte et assume dans cet hémicycle et sur le terrain.

Cela se traduit dans l’analyse que nous faisons de cette mission et dans les propositions que nous faisons.

Ces crédits financent principalement des dispositifs concourant à la politique de l’emploi et enregistrent une très forte augmentation. Ils s’inscrivent dans un contexte particulièrement favorable qui doit être indéniablement salué. La situation de l’emploi s’est améliorée : par rapport à la fin de 2019, l’emploi salarié a progressé de 800 000 personnes et le nombre de demandeurs d’emploi a diminué de près de 400 000.

La dépense budgétaire portée par cette mission s’est alourdie, mais d’autres dépenses ont diminué, notamment l’indemnisation du chômage. L’Unédic sera en excédent cette année pour la première fois depuis 2008. Quant à la progression de la masse salariale, elle se répercute évidemment sur les recettes de l’État et des organismes de protection sociale.

En outre, des moyens très importants ont été consacrés ces trois ou quatre dernières années à des dispositifs dont beaucoup étaient antérieurs à la crise. D’autres ont été mis en place durant la crise, mais ils sont destinés à être en partie pérennisés, notamment en direction des jeunes ou des chômeurs de longue durée. Ainsi, les moyens qui leur sont alloués progressent de plus de 15 %.

Il est à noter la montée en charge du contrat d’engagement jeune avec un objectif de 300 000 contrats pour 2023. Les premières données sur le déploiement de ce dispositif sont d’ailleurs encourageantes, même s’il est encore trop tôt pour mesurer son effet sur l’insertion professionnelle des jeunes.

Les objectifs fixés paraissent cohérents et exigeront d’assurer la bonne articulation des CEJ avec les autres dispositifs d’insertion des jeunes, en particulier dans le cadre du projet France Travail, dont l’objectif est d’harmoniser les actions d’accompagnement vers l’emploi.

L’inclusion par le travail des personnes en situation de handicap est une absolue nécessité. Comme nos deux commissions, j’appelle à l’adoption de l’article 47 permettant de prolonger les expérimentations favorisant l’emploi de travailleurs handicapés par des entreprises adaptées.

Je partage également les réserves du rapporteur pour avis quant à l’opportunité de maintenir les emplois francs, dont les premières évaluations n’ont pas permis de mesurer l’impact sur l’emploi dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville.

Je suis particulièrement favorable à la hausse des compensations des exonérations de cotisations sociales sur les entreprises, particulièrement en faveur des services d’aide à domicile et de la déduction des heures supplémentaires, dispositif aussi appelé Tepa, dont Les Républicains sont à l’origine.

Sur ces deux sujets, les enjeux pour nos compatriotes sont majeurs : le premier en raison du vieillissement de la population, le second dans le contexte économique que nous connaissons.

Enfin, je tiens à me féliciter du succès de l’apprentissage, qui est essentiel malgré le poids financier qu’il représente. Il enregistre une dynamique très positive avec une hausse de 38 % des contrats entre 2020 et 2021. C’est un atout pour notre jeunesse et un dispositif plébiscité par nos entreprises, surtout dans les territoires ruraux.

Néanmoins, il est indéniable qu’il nous faut réfléchir à la soutenabilité de son financement – c’est un enjeu majeur. Il repose sur la prise en charge des contrats selon un niveau déterminé par les branches professionnelles. Il est assuré par France Compétences, dont les ressources sont principalement issues des contributions des employeurs à la formation professionnelle et à l’apprentissage.

Or, depuis 2020, ces dépenses de guichet dépassent largement le produit des contributions des employeurs. Face à ce déséquilibre chronique, France Compétences doit régulièrement recourir à des emprunts de court terme pour faire face à ses besoins de trésorerie. Ainsi, le PLF pour 2023 prévoit une enveloppe de 1,68 milliard d’euros pour l’établissement ; à cette dotation s’ajoute un ensemble de mesures qui permettraient de limiter les dépenses de l’opérateur.

Pour conclure, permettez-moi deux observations.

La première concerne le CPF, dont la lisibilité et l’efficacité doivent être améliorées. Des mesures de régulation dans l’offre de formations éligibles ont été engagées fort justement par le contrôle des certifications professionnelles. La lutte contre la fraude au CPF, qui serait renforcée par une proposition de loi en cours de discussion, constituerait un levier supplémentaire, dont les effets sont toutefois difficiles à évaluer.

En outre, l’article 49 de ce PLF, introduit à l’Assemblée nationale, prévoit que la mobilisation du CPF par son titulaire pour le financement d’une action de formation fasse l’objet d’un mécanisme de régulation dont les modalités seraient définies par décret. Il est souhaitable de réguler les dépenses liées au CPF afin de recentrer le dispositif sur l’employabilité des utilisateurs et sur le développement des compétences à finalité professionnelle.

Je suis donc favorable à la disposition proposée par nos deux commissions à l’article 49 instaurant un plafonnement de la prise en charge du coût de certaines formations pour recentrer le dispositif et le rendre plus efficace.

Je défends aussi, dans une proposition de loi que j’ai déposée et qui a été cosignée par de nombreux collègues, l’idée de mieux lutter contre le démarchage téléphonique abusif, qui touche spécialement le CPF.

Ma seconde observation vise à rappeler que l’argent public n’est pas gratuit : c’est le fruit du travail des Français – du bon sens, me direz-vous, et vous aurez raison.

Cette observation justifie que nous adoptions l’amendement n° II-377 de notre collègue rapporteur pour avis, Frédérique Puissat. Dans le contexte économique et financier actuel, l’État doit faire preuve d’exemplarité et d’efficacité dans l’engagement des dépenses. À ce titre, il serait sage qu’il s’applique à lui-même les efforts qu’il exige des collectivités locales. Mieux faire avec moins est devenu, année après année, le leitmotiv forcé des collectivités que les élus qui sont en première ligne, sur le terrain, appliquent avec détermination et courage. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de linsertion. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, madame la présidente de la commission des affaires sociales, messieurs les rapporteurs spéciaux, madame la rapporteure pour avis, mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de budget que nous vous présentons, avec Carole Grandjean, augmente de 4,5 milliards d’euros en autorisations d’engagement et de 6,2 milliards d’euros en crédits de paiement par rapport au budget initial pour 2022.

Mais cette évolution est peu significative pour deux raisons.

Plusieurs dispositifs étaient financés au titre des mesures d’urgence ou du plan de relance, comme les aides à l’apprentissage, que nous maintenons. La mission « Travail et emploi » a bénéficié de plus de 7 milliards d’euros en autorisations d’engagement et de 2,7 milliards en crédits de paiement à l’occasion de la loi de finances rectificative du mois d’août dernier.

Au total, le budget du ministère bénéficiera donc de 20,3 milliards d’euros en autorisations d’engagement et de 20,9 milliards en crédits de paiement. Un seul objectif derrière ces chiffres : l’atteinte du plein emploi.

Ce budget est un budget de plein emploi, d’abord parce qu’il traduit les effets de la baisse du chômage. Ainsi, les bénéficiaires de l’allocation de solidarité spécifique, financée par l’État, sont 80 000 de moins que ce que nous redoutions l’année dernière, ce qui nous permet d’économiser 492 millions d’euros. Cela se traduit par une baisse des crédits de cette action.

C’est une bonne nouvelle, parce que cette baisse du nombre d’allocataires n’a pas été accompagnée d’une augmentation du nombre de bénéficiaires du RSA. Ce sont bien des personnes qui retrouvent un emploi : ainsi, 156 000 demandeurs d’emploi de très longue durée ont retrouvé le chemin de l’emploi au cours de la dernière année.

C’est aussi un budget de plein emploi, parce qu’il encourage l’emploi des jeunes. L’alternance voit ses crédits augmenter de 3,5 milliards d’euros, en particulier pour l’aide à l’embauche d’alternants.

C’est pour cette raison, et parce que nous connaissons cette dynamique en matière d’apprentissage et d’alternance, que le Président de la République et le Gouvernement se sont fixé un objectif d’un million d’apprentis en 2027. C’est ce qui explique la mobilisation du Gouvernement, des services et des opérateurs d’emploi.

Certains considèrent que l’apprentissage coûte très cher. Pour notre part, nous pensons que le plein emploi rapporte et que l’apprentissage est un levier majeur pour atteindre cet objectif.

De la même manière, le budget initial de l’État soutient pour la première fois la trésorerie de France Compétences par l’octroi d’une subvention de 1,7 milliard d’euros. Le soutien est même supérieur à 2 milliards d’euros lorsque l’on intègre la prise en charge par l’État du versement aux régions des crédits nécessaires au financement des pactes régionaux dans le cadre du PIC.

Je veux saluer le rapport sénatorial sur France Compétences, dont Mme la rapporteure pour avis est l’un des auteurs. Même si nous ne partageons pas la méthode consistant à diminuer les crédits, comme le propose aujourd’hui la commission des affaires sociales, ce rapport peut utilement nous aider sur le chemin du rétablissement des comptes de cet organisme.

Ce budget encourage aussi le plein emploi, parce qu’il favorise les compétences pour développer l’emploi d’aujourd’hui comme celui de demain.

Nous prévoyons ainsi 300 millions d’euros au titre du FNE-formation et 50 millions d’euros au titre du dispositif Transitions collectives. Nous sommes convaincus qu’il faut former pour réduire les tensions qui existent actuellement sur le marché du travail en matière de recrutement, mais aussi pour développer les compétences indispensables pour accompagner les transitions de fond de notre économie – je pense au secteur de la santé, mais aussi aux transitions énergétiques et numériques.

Je veux aussi souligner que ce budget est le budget de l’emploi pour tous, en particulier pour celles et ceux qui sont les plus éloignés de l’emploi. L’année 2023 sera à ce titre une année de transition, marquée par l’installation progressive de France Travail.

Vous avez été nombreux à souligner votre curiosité, voire votre impatience, de connaître la maquette, les détails, de la création de France Travail. Sans répéter ce que j’ai déjà dit, cette réforme ne consistera pas en une opération de fusion ou de rapprochement de structures ; nous ne voulons pas connaître l’embolie connue au moment de la création de Pôle emploi il y a maintenant plus de dix ans.

M. Jérôme Bascher. Cela avait surtout coûté moins cher !

M. Olivier Dussopt, ministre. En tout cas, sachez que les détails de cette réforme seront présentés à l’occasion de la fin de la phase de préfiguration, que nous avons confiée à Thibaut Guilluy, entre la fin du mois de décembre et le milieu du mois de janvier.

Dans ce contexte, nous avons préservé les moyens de Pôle emploi, alors même que le chômage a diminué. En 2023, nous accordons ainsi une subvention de 1,25 milliard d’euros à Pôle emploi – c’est un niveau de subvention qui n’avait pas été atteint depuis 2019.

Cela permet de pérenniser les effectifs accordés à l’opérateur pour la mise en œuvre du contrat d’engagement jeune et de poursuivre le déploiement du parcours de remobilisation des demandeurs d’emploi et la mobilisation au service des entreprises dans un contexte de fortes tensions de recrutement.

C’est la raison pour laquelle les effectifs de Pôle emploi resteront globalement stables : la baisse sera limitée à 31 ETP sur un total de 48 850 ETP, 52 900 si l’on prend en compte les emplois hors plafond qui sont pour l’essentiel des contrats à durée déterminée.

Ainsi, Pôle emploi est armé pour la bataille du plein emploi. En 2017, les recettes de Pôle emploi s’élevaient à 5,3 milliards d’euros, hors pactes régionaux, et ses effectifs à 49 918 personnes. En 2023, les ressources de Pôle emploi seront de 6,5 milliards d’euros et ses effectifs globaux de 52 840 ETP.

Pourquoi maintenons-nous les moyens de Pôle emploi ? Pourquoi augmentons-nous la subvention en sa faveur ? Parce que nous croyons au renforcement de l’accompagnement pour le plein emploi.

C’est d’ailleurs pour cela que nous avons aussi préservé les crédits destinés à lutter contre la pauvreté et ceux qui sont destinés à accompagner les expérimentations du service public de l’insertion et de l’emploi. En 2023, nous aurons ainsi 29 millions d’euros en autorisations d’engagement et 39 millions en crédits de paiement.

En matière d’accompagnement dans l’emploi des personnes qui en sont le plus éloignées, je veux dire quelques mots sur l’insertion par l’activité économique.

Je veux d’abord rappeler que, ces trois dernières années, le budget de l’IAE a fortement augmenté – de plus de 400 millions d’euros – dans le cadre du pacte d’ambition pour l’insertion par l’activité économique.

L’année 2023 sera là aussi une année de consolidation. Nous prévoyons néanmoins un budget en hausse qui atteindra 1,3 milliard d’euros, un chiffre qui n’a jamais été atteint et qui marque une augmentation des crédits par rapport à ce qui sera réalisé en 2022.

J’ajoute que la réalisation 2022 sera inférieure à la prévision, puisque même ces structures connaissent des difficultés de recrutement, ce qui explique que tous les crédits ne seront pas consommés. En 2023, nous financerons donc plus de postes que ce qui se sera réellement passé en 2022.

Je veux aussi souligner que le PIC IAE destiné à favoriser la formation des salariés en insertion non seulement est prolongé, mais que ses crédits augmentent de 25 % en 2023 – ils passent de 80 à 100 millions d’euros.

Toujours pour aller vers le plein emploi et permettre l’emploi de tous, je tiens à souligner devant vous le fait que les entreprises adaptées bénéficieront de plus de 500 millions d’euros, dont 15 millions au titre du fonds d’accompagnement à la transformation des entreprises adaptées.

Nous allons, dans le même temps, poursuivre les efforts pour les jeunes éloignés du marché du travail et nous reconduisons en 2023 l’objectif de 300 000 bénéficiaires du contrat d’engagement jeune avec l’accompagnement nécessaire, soit une enveloppe de 1,76 milliard d’euros.

Enfin, je tiens à souligner que les contrats aidés restent un outil traditionnellement utilisé dans les politiques de l’emploi.

En 2023, le nombre de contrats aidés diminuera pour le secteur marchand ; nous assumons cette décision, parce que le marché du travail va mieux et que d’autres dispositifs de soutien à l’emploi se développent par ailleurs. Ainsi, nous prévoyons 31 150 contrats initiative emploi (CIE) pour 2023 contre 53 200 en 2022.

En revanche, nous prévoyons un total de 80 000 places en parcours emploi compétences, les contrats aidés dans le secteur public, contre 77 700 en 2022 – nous savons que ces contrats sont particulièrement utiles aux collectivités locales.

Au-delà de ces grandes priorités et lignes d’action, je souhaite souligner que le plein emploi doit aussi être le bon emploi.

C’est la raison pour laquelle le programme 111, « Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail », sera augmenté de 16 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 18 millions d’euros en crédits de paiement, notamment pour accompagner la modernisation des services de prévention et de santé au travail.

Enfin, pour mettre en œuvre ces politiques, le ministère peut compter sur des agents dévoués, engagés et de grande qualité.

En 2023, pour la première fois depuis plus de dix ans, les effectifs du ministère augmenteront avec un schéma d’emplois en hausse de 60 ETP, ce qui permettra, d’une part, de renforcer les services du ministère, notamment au titre du renforcement du pilotage des politiques publiques et de la réinternalisation de missions réalisées aujourd’hui par des prestataires externes, d’autre part, d’accompagner la préparation des jeux Olympiques et de gérer en particulier les demandes de dérogations au droit du travail. (M. Jérôme Bascher ironise.) Cela permettra aussi d’accorder des moyens nécessaires au délégué ministériel à l’encadrement supérieur de l’État.

Entre 2011 et 2021, le schéma d’emplois était négatif d’environ 180 ETP par an en moyenne. Il a été stabilisé en 2022.

Je dois cependant souligner, pour la clarté de nos débats, que le plafond d’emplois est en baisse de 188 ETP par rapport à 2022 pour s’établir à 7 773 ETP. Cela s’explique par le maintien des renforts exceptionnels dans les services déconcentrés qui devaient disparaître en 2023 et que nous maintenons pour partie. La décrue sera donc progressive, ce qui permettra aux services du ministère du travail de l’absorber plus facilement. Ainsi, 105 ETP sur les 210 sont conservés au titre de l’accompagnement des restructurations économiques et 120 ETP sur 160 le sont au titre des mesures de correction en matière de mise en œuvre de la nouvelle organisation territoriale de l’État.

Pour conclure, je veux remercier les deux rapporteurs spéciaux et la rapporteure pour avis du Sénat, ainsi que l’ensemble des sénateurs membres des deux commissions pour la qualité de leurs travaux, de même que pour la richesse et la sincérité de nos échanges. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – M. Emmanuel Capus, rapporteur spécial, applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Carole Grandjean, ministre déléguée auprès du ministre du travail, du plein emploi et de linsertion et du ministre de léducation nationale et de la jeunesse, chargée de lenseignement et de la formation professionnels. Monsieur le président, madame la présidente de la commission des affaires sociales, messieurs les rapporteurs spéciaux, madame la rapporteure pour avis, mesdames, messieurs les sénateurs, le budget que nous vous présentons aujourd’hui encourage pleinement l’emploi des jeunes, l’emploi de long terme, parce qu’il encourage l’alternance.

Ce sont 3,5 milliards d’euros en crédits de paiement et 2,3 milliards d’euros en autorisations d’engagement qui sont consacrés dans ce budget initial aux aides à l’embauche d’alternants.

C’est une somme importante, que nous assumons, car c’est un investissement à la fois dans l’éducation des jeunes et dans les compétences des entreprises.

Le Président de la République et le Gouvernement se sont fixé un objectif d’un million d’apprentis par an d’ici à 2027. Nous sommes pleinement mobilisés vers l’objectif de faire enfin de la France une nation de l’apprentissage à tous les niveaux de qualification et dans toutes les entreprises.

Il est clair que le développement de l’apprentissage a conduit à une hausse des dépenses et à un déséquilibre financier de France Compétences, dont le financement en faveur de l’alternance s’élève à plus de 10 milliards d’euros.

Je tiens à le dire, nous assumons, car les résultats sont sans appel : le taux d’insertion dans l’emploi a fortement contribué à diminuer le taux de chômage des jeunes. L’apprentissage est une réussite, notamment pour les moins qualifiés : 72 % des jeunes trouvent un emploi durable à la suite d’un apprentissage.

Nous avons appliqué dès cet été des mesures de régulation des dépenses, en concertation avec les branches professionnelles. Cela a conduit à un mouvement général, mais non uniforme, de baisse des niveaux de prise en charge des contrats d’apprentissage afin de les rapprocher des coûts observés.

L’objectif n’est pas d’appliquer une stricte mesure d’économie, mais bien de ramener les niveaux de financement des contrats au juste prix, celui qui est constaté dans la comptabilité analytique des CFA.

Ensuite, les primes exceptionnelles de l’État qui ont été décidées dans le contexte de la crise sanitaire et qui ont permis de soutenir la formation des jeunes arrivent à échéance à la fin de l’année 2023. Des concertations sont en cours avec les partenaires sociaux en vue d’un calibrage plus adapté.

En outre, pour soutenir la trésorerie de l’opérateur, le Gouvernement a proposé au Parlement d’octroyer 2 milliards d’euros en PLFR de fin de gestion au bénéfice de France Compétences. Ce montant s’ajoute aux 2,7 milliards d’euros déjà octroyés par l’État en 2021, aux 2 milliards ouverts en 2022 par le PLFR de cet été et au 1,7 milliard qu’il est proposé d’ouvrir en PLF pour 2023 – il s’agit même de 2 milliards avec la rebudgétisation de la moitié des pactes régionaux.

Sur le CPF, la dépense sera stabilisée en 2022 par rapport à 2021 à environ 2,7 milliards d’euros, alors qu’elle avait fortement augmenté en 2020 et en 2021. C’est donc en cohérence avec nos objectifs ambitieux pour la jeunesse et en responsabilité vis-à-vis de France Compétences que l’État agit.

L’article 49, qui a été adopté par l’Assemblée nationale et que les rapporteurs spéciaux et la rapporteure pour avis souhaitent préciser par un amendement, présente un mécanisme de régulation qui vient compléter l’ensemble des mesures déjà mises en place par le Gouvernement pour mieux orienter les dépenses relatives au CPF et combattre la fraude.

Les mesures prises sur la qualité de l’offre du catalogue, le nettoyage des formations liées à la création d’une entreprise et la lutte contre la fraude ont déjà largement contribué à cette régulation.

Je pense également à la proposition de loi, portée par M. le sénateur Martin Lévrier, qui vise à lutter contre le démarchage abusif et les fraudes et qui sera très bientôt soumise à votre examen.

Enfin, un dernier mot sur la formation aux métiers d’avenir, car ce budget encourage l’emploi d’aujourd’hui comme celui de demain.

Pour faire face aux nouveaux enjeux de formation des salariés, le ministère a obtenu une enveloppe spécifique au titre du FNE-formation et du dispositif Transitions collectives (Transco) à hauteur de 350 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 160 millions en crédits de paiement.

En 2023, le FNE-formation doit permettre de poursuivre l’effort engagé en 2020, en 2021 et en 2022 afin notamment d’accompagner l’adaptation des compétences des salariés de nos entreprises vers la transition écologique, de poursuivre la digitalisation et de favoriser la souveraineté économique et énergétique.

Le dispositif Transitions collectives permet aux salariés qui subiraient les conséquences des mutations économiques de s’orienter vers des secteurs porteurs et aux entreprises dont les emplois sont fragilisés d’accompagner leurs salariés dans cette transition, en évitant des départs contraints. Il y a un enjeu fort à le faire connaître par les acteurs et c’est le rôle que nous avions confié aux délégués à l’accompagnement des reconversions professionnelles. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

Travail et emploi
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Article 47

M. le président. Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Travail et emploi », figurant à l’état B.

Je vous rappelle que, pour cette mission, la conférence des présidents a fixé la durée maximale de la discussion à deux heures quarante-cinq.

En conséquence, si nous n’avions pas terminé l’examen de cette mission à midi quarante-cinq, celui-ci se poursuivrait à la fin des missions de cette semaine ou la semaine prochaine, et nous passerions à l’examen de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation ».

ÉTAT B

(En euros)

Mission / Programme

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

Travail et emploi

20 288 956 993

20 876 966 794

Accès et retour à l’emploi

7 640 406 970

7 443 076 187

Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi

11 888 191 930

12 642 360 273

Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail

73 747 840

110 456 293

Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail

686 610 253

681 074 041

 Dont titre 2

582 957 628

582 957 628

M. le président. L’amendement n° II-377, présenté par Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Accès et retour à l’emploi

Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi

800 000 000

550 000 000

Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail

Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail

dont titre 2

TOTAL

800 000 000

550 000 000

SOLDE

- 800 000 000

- 550 000 000

La parole est à Mme le rapporteur pour avis.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur pour avis. Le Fonds monétaire international a demandé à la France de réduire ses déficits publics.

De son côté, le rapporteur général de la commission des finances du Sénat appelle à juste titre le Gouvernement à la cohérence : si l’État demande aux collectivités locales de faire un effort, il doit aussi en fournir un.

Or, dans la mission « Travail et emploi » de ce PLF pour 2023, les crédits progressent de plus de 6 milliards d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2022. On a beau tordre les chiffres dans tous les sens, voilà le résultat ! Et il me semble logique de faire des comparaisons de loi de finances initiale à loi de finances initiale, comme nous le faisons dans les collectivités locales entre budgets primitifs ou entre comptes administratifs.

Dans ce contexte, cet amendement prévoit de contribuer à l’effort dont je parlais, en réduisant les autorisations d’engagement du PIC de 500 millions d’euros, cette somme correspondant exactement à la sous-exécution des trois premières années du plan.

Il prévoit également de réduire de 300 millions d’euros la subvention allouée à France Compétences. Celle-ci s’élèverait donc à 1,4 milliard, alors même que chacune des deux lois de finances rectificatives de cette année a déjà abondé son budget de 2 milliards d’euros…

Il s’agit donc d’un amendement de cohérence et de solidarité. Alors que les élus locaux ont énormément de mal à boucler leurs budgets et font eux-mêmes des efforts importants, il ne serait pas logique de ne pas demander un effort à l’État, en laissant passer une augmentation des crédits de cette mission de plus de 6 milliards d’euros.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Emmanuel Capus, rapporteur spécial. La commission des finances comprend l’objectif de réduction de la dépense publique de cet amendement – c’est évidemment un objectif que nous partageons avec la commission des affaires sociales.

Néanmoins, il me semble que cet amendement rate sa cible et présente trois difficultés.

La première difficulté, c’est que la commission des finances a décidé d’adopter sans modification les crédits de cette mission. Adopter cet amendement serait donc contraire à cette position. Cela ne signifie pas que nous n’avons pas émis de réserves, et même exprimé des inquiétudes, sur le déficit de France Compétences. Nous pensons néanmoins qu’il faut voter les crédits en l’état.

Deuxième difficulté, si nous pensons nous aussi, comme la commission des affaires sociales, que l’enveloppe destinée à financer l’apprentissage peut être réduite, nous croyons que nous devons attendre les résultats de la concertation qui a été lancée à ce sujet.

Qui plus est, réduire les crédits de France Compétences dans le PLF pour 2023 n’aura pas d’impact sur les contrats signés jusqu’à la fin de l’année 2022, alors même que ceux-ci devront être financés en 2023. Il s’agit donc d’une fausse bonne idée.

De manière générale, la commission des finances considère qu’il est plus sincère d’inscrire dès le PLF 1,7 milliard d’euros de crédits, car il ne faut pas se leurrer : cette somme sera dépensée, elle risque même de ne pas suffire…

M. Jérôme Bascher. Il faut savoir : soit c’est sincère, soit c’est insincère !

M. Emmanuel Capus, rapporteur spécial. La troisième raison pour laquelle cet amendement me paraît manquer sa cible, c’est que cette réduction de 500 millions d’euros des crédits destinés au PIC à la fin d’un cycle va pénaliser les conseils régionaux, qui l’utilisent et le développent sur le terrain, même si, en effet, ces crédits ne sont pas intégralement consommés.

Cet amendement procède d’une bonne intention, mais il me semble, je le répète, qu’il rate sa cible. La commission des finances a émis un avis défavorable.

M. Jérôme Bascher. C’est faux ! C’est l’avis du rapporteur spécial ! Je vais faire un rappel au règlement si vous ne le précisez pas.

M. Emmanuel Capus, rapporteur spécial. C’est l’avis de la commission des finances, qui a été adopté ce matin. Peut-être étiez-vous absent, mon cher collègue, mais je confirme qu’il s’agit bien d’un avis défavorable.

M. Jérôme Bascher. On n’a pas voté !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, ministre. Cet amendement porte sur l’évolution du budget global du ministère. Il y a bien une augmentation de 6,5 milliards d’euros des crédits de paiement, mais, comme j’ai déjà eu l’occasion de le dire, à périmètre constant, la marche n’est pas aussi haute, ainsi qu’a pu l’expliquer M. Guerriau tout à l’heure. Le constat est nuancé quand on regarde ce qui a été réalisé en 2022 par rapport aux prévisions.

J’opposerai surtout deux arguments de fond.

Pour ce qui concerne France Compétences, nous faisons le choix d’apporter de la trésorerie pour éviter toute forme de rupture, ce qui ne nous empêche pas de mettre en œuvre des politiques de rationalisation.

Nous avons ainsi conduit la première vague de diminution du niveau de prise en charge des coûts de formation. Par ailleurs, une proposition de loi, qui a été adoptée à l’Assemblée nationale, va permettre de mettre en place de nouveaux outils de régulation. Nous avons prévu la possibilité d’un ticket modérateur, qui va faire l’objet d’amendements, et nous travaillons, je le répète, sur la rationalisation. C’est un chantier suivi par Carole Grandjean tout particulièrement. L’idée est de ramener progressivement France Compétences à l’équilibre. Pour autant, nous considérons que la diminution que vous proposez pourrait être dangereuse pour la trésorerie de cet organisme et le paiement des frais de formation aux CFA.

S’agissant du PIC, 2023 est une année de transition. Nous avons fait un effort de rationalisation en tenant compte des niveaux de consommation, mais aussi d’un engagement pris par le Gouvernement, voilà quelques mois, concernant la reconduction de la totalité des crédits affectés à la part régionale du PIC, que l’on appelle aussi Pric, ou pacte régional d’investissement dans les compétences.

Surtout, nous avons pris connaissance du rapport du comité scientifique d’évaluation du PIC, qui montre que ce dernier est à l’origine d’une augmentation du taux d’emploi de 10 points, de 57 % 67 %, en population générale, grâce aux formations qu’il permet, ainsi que d’une augmentation du taux d’emploi pour les bénéficiaires âgés de plus de 50 ans, de 33 % à 52 %. Il a également permis l’entrée en formation de 4,6 millions de personnes entre 2018 et 2021, ce qui représente, par rapport à la période 2010-2015, 460 000 personnes de plus formées chaque année, dont les deux tiers sont considérées comme vulnérables au risque de chômage de longue durée. Enfin, grâce au PIC, le nombre de formations préqualifiantes, lesquelles préparent aux formations qualifiantes, pour accompagner les personnes les plus éloignées de l’emploi a crû de 120 000 à 200 000. C’est considérable, et il faut s’en réjouir.

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement est défavorable à cet amendement visant à réduire les crédits de France Compétences et du PIC.

M. le président. La parole est à M. Jérôme Bascher, pour explication de vote.

M. Jérôme Bascher. Ce n’est pas tout à fait vrai que la commission des finances a donné son avis. Nous sommes passés rapidement dessus en début de séance ce matin. Il ne faut pas systématiquement tordre le règlement au risque de devenir captieux. Ce n’est pas souhaitable dans cet hémicycle.

Je reviens sur les propositions que formule Frédérique Puissat dans son amendement, que je soutiens bien évidemment, comme mes collègues de groupe.

D’une part, il y a les crédits non consommés. Il faudra bien en tenir compte un jour dans nos budgets.

D’autre part, Emmanuel Capus nous dit qu’il faudra encore en rajouter pour France Compétences. À un moment donné, ça suffit ! On ne peut pas continuer ainsi. Il faudrait aussi dire la vérité sur l’apprentissage : cela profite surtout aux étudiants du supérieur ! (Mme la ministre déléguée et M. Martin Lévrier le réfutent.) Je ne dis pas que c’est inutile, mais le constat est là. Si vous osez dire le contraire, j’attends de vous des chiffres très clairs sur plusieurs années.

Pour le reste, c’est-à-dire les moins diplômés, le problème n’est pas financier. Ce sont bien souvent les normes du droit du travail qui constituent des freins. Par exemple, un apprenti pâtissier de 16 ans ne peut pas commencer sa journée à cinq heures du matin, comme ce métier l’exige.

Il faut se préoccuper de ces problèmes, qui ne sont pas d’ordre budgétaire, mais je suis sûr que vous allez y travailler. En tout cas, on ne peut pas continuer à déverser des milliards d’euros sur France Compétences uniquement pour se faire plaisir.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Daniel Breuiller, rapporteur spécial. Je tiens d’abord à préciser que cet avis, commun aux deux rapporteurs spéciaux, a été validé ce matin en commission, mon cher collègue.

M. Jérôme Bascher. C’est celui des deux rapporteurs spéciaux !

M. Emmanuel Capus, rapporteur spécial. Validé en commission !

M. Daniel Breuiller, rapporteur spécial. Ensuite, je le confirme, il y a bien un bénéfice plus grand de l’apprentissage pour les catégories d’étudiants à haut niveau de formation, mais il y a aussi un progrès sur l’ensemble des catégories, y compris les bac–2 et bac–3. On constate une meilleure reconnaissance de l’apprentissage, qu’il convient de souligner et de soutenir.

À titre personnel, je préfère un excédent possible, couplé à de la sincérité, à un déficit masqué.

M. Emmanuel Capus, rapporteur spécial. Très bien !

Mme Frédérique Puissat, rapporteur pour avis. Allez le dire aux territoires !

M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

M. René-Paul Savary. Je précise que la commission des affaires sociales a proposé une telle réduction dans un souci d’équilibre budgétaire. D’ailleurs, le Gouvernement semblait partager cette préoccupation, puisque Gabriel Attal, la semaine dernière, n’a eu de cesse de nous reprocher de décider des dépenses supplémentaires sans proposer d’économies en regard. Or, quand on propose une réduction de dépenses, on nous rétorque que ce n’est pas la bonne. Il faudrait mettre un peu de cohérence dans tout cela !

Si l’on fait un comparatif des comptes administratifs entre 2022 et 2023, comme l’a souligné le rapporteur de la commission des affaires sociales, on se rend compte qu’il est possible de ne pas tout budgéter dès cette année. Il sera peut-être temps d’y revenir dans le cadre d’un PLFR. Il me semble tout à fait légitime de proposer une telle réduction des dépenses publiques.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-377.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 77 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 331
Pour l’adoption 201
Contre 130

Le Sénat a adopté.

L’amendement n° II-66 rectifié, présenté par Mmes Sollogoub et N. Goulet, MM. Levi et Guerriau, Mme Guidez, M. Ravier, Mme Férat, MM. J.P. Vogel, Janssens, Détraigne et Chasseing, Mme Morin-Desailly, M. P. Martin, Mme Jacquemet, M. Wattebled, Mme N. Delattre et MM. Le Nay, Cigolotti, Moga et Lefèvre, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Accès et retour à l’emploi

 

 

 

 

Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi

 

3 500 000

 

3 500 000

Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail

 

 

 

 

Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

 

3 500 000

3 500 000

SOLDE

- 3 500 000

- 3 500 000

La parole est à M. Joël Guerriau.

M. Joël Guerriau. Le 25 septembre 2017, le Premier ministre annonçait le lancement d’un plan d’investissement dans les compétences ayant vocation à favoriser l’insertion dans l’emploi des jeunes et le retour des demandeurs d’emploi sur le marché du travail en rehaussant leur niveau de qualification.

Doté de 13,8 milliards d’euros sur la période 2018-2023, le PIC doit ainsi permettre la formation et l’accompagnement de deux millions de jeunes et de demandeurs d’emploi supplémentaires, tout en accélérant, par l’investissement, la transformation du système de formation professionnelle continue.

Afin d’évaluer la réalisation du PIC, un comité scientifique indépendant a vu le jour, doté d’un budget de 18 millions d’euros sur la même période, soit 3,5 millions d’euros annuels, ce qui nous semble aujourd’hui disproportionné. Si l’on compare ces crédits, par exemple, à ceux qui ont été affectés à l’évaluation du plan de relance, ils sont neuf fois plus importants.

C’est la raison pour laquelle nous proposons un réajustement à travers cet amendement. Nous préférons que les crédits soient affectés au plan d’investissement plutôt qu’à son évaluation.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Emmanuel Capus, rapporteur spécial. C’est une vraie question que pose notre collègue Joël Guerriau. Ce comité scientifique d’évaluation du PIC vient justement de rendre son rapport, le 24 novembre. C’est très récent, et je dois vous avouer que je n’ai pas eu le temps d’en prendre totalement connaissance.

M. Guerriau s’émeut du coût de cette évaluation, d’un montant de 3,5 millions d’euros. Pour être tout à fait honnête, je ne sais pas comment est calculé ce coût. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous donner des détails sur le fonctionnement du comité scientifique d’évaluation et sur les dépenses engagées dans le cadre de ces études ?

Au nom de la commission des finances, monsieur Bascher, puisque c’est à ce titre que nous nous exprimons de ce banc, je sollicite donc l’avis du Gouvernement. (M. Jérôme Bascher sexclame.)

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, ministre. Il s’agit effectivement de 3,5 millions d’euros de crédits pour évaluer 15 milliards d’euros, soit à peu près 3 milliards d’euros par an en moyenne. Ce coût nous paraît assez raisonnable en proportion, d’autant que le travail du conseil scientifique est très méticuleux, puisqu’il doit examiner, non seulement la mise en œuvre des actions nationales du PIC, mais aussi les actions régionales. Or, par définition, il y a autant de programmes régionaux que de régions, et les actions mises en place sont très nombreuses. Il faut regarder, cohorte par cohorte, les bénéficiaires, l’impact sur le taux d’emploi et mener un travail rétrospectif et statistique.

Malgré les efforts produits par les services ministériels, le budget de 3,5 millions d’euros est tout à fait nécessaire. Le rapport annuel du comité scientifique permet d’éclairer les travaux du Parlement, comme ceux du Gouvernement. Le dernier rapport vient juste d’être remis, comme M. Capus l’a rappelé. Nous avons véritablement besoin de ces crédits, y compris pour préparer le prochain PIC, puisque 2023, une année de transition, doit nous permettre de décider quels sont les volumes que nous devrons investir dans les compétences à partir de 2024. C’est une demande de retrait.

M. le président. Monsieur Guerriau, l’amendement n° II-66 rectifié est-il maintenu ?

M. Joël Guerriau. Oui, je souhaiterais que l’on puisse voter sur cet amendement, dont l’objet est un rééquilibrage par rapport à ce qui est consacré à l’évaluation du plan de relance.

M. le président. Quel est finalement l’avis de la commission ?

M. Emmanuel Capus, rapporteur spécial. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-66 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° II-612, présenté par Mmes Féret et Lubin, M. Kanner, Mme Conconne, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Jeansannetas et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Accès et retour à l’emploi

2 500 000 000

 

2 500 000 000

 

Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi

 

2 500 000 000

 

2 500 000 000

Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail

 

 

 

 

Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

2 500 000 000

2 500 000 000

2 500 000 000

2 500 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Victoire Jasmin.

Mme Victoire Jasmin. Cet amendement du groupe SER vise à rendre vraiment effective la garantie jeunes universelle, en donnant les moyens aux missions locales d’atteindre l’ensemble des jeunes ni en études, ni en emploi, ni en formation, soit 1,5 million de personnes.

Madame la ministre, vous venez de dire que vous aviez des objectifs ambitieux. Cet amendement peut vous aider à les atteindre.

En 2019, 1,5 million de jeunes âgés de 16 ans à 25 ans n’avaient ni emploi ni formation et ne suivaient pas d’études, selon les données de l’Insee. Par ailleurs, il apparaît qu’environ 1,2 million de ces jeunes n’ont pas accès à la garantie jeunes que vous prévoyez, soit quatre jeunes éligibles sur cinq.

Madame la ministre, les effets d’annonce et les éléments de langage doivent se traduire dans la réalité.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Emmanuel Capus, rapporteur spécial. L’avis est défavorable, s’agissant d’un amendement à 2,5 milliards d’euros. En plus, son dispositif n’est pas très clair. Vous multipliez par cinq les moyens alloués aux missions locales ; or j’ai cru comprendre que vous souhaitez en fait multiplier par cinq le nombre d’allocataires. Ce n’est pas tout à fait la même chose, puisque les missions locales accompagnent les jeunes et concrétisent leur engagement dans une activité d’une durée minimale de quinze heures hebdomadaires.

L’allocation, c’est autre chose, et votre amendement tend à tout confondre. J’ai bien compris que l’idée était de mettre en place un « RSA jeunes ». La commission y est défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, ministre. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-612.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° II-610, présenté par Mmes Féret et Lubin, M. Kanner, Mme Conconne, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Jeansannetas et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Accès et retour à l’emploi

610 000 000

 

610 000 000

 

Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi

 

610 000 000

 

610 000 000

Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail

 

 

 

 

Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

610 000 000

610 000 000

610 000 000

610 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Thierry Cozic.

M. Thierry Cozic. Cet amendement vise à garantir que les crédits fléchés vers l’indemnisation des demandeurs d’emploi augmentent au rythme de l’inflation.

Le Gouvernement propose une baisse de 21 % de cette action, soit presque 500 millions d’euros supprimés. Or cette coupe drastique n’est nulle part expliquée dans le projet annuel de performance (PAP) mis à disposition du Parlement. Il convient de garantir la stabilité de ces crédits, une fois retiré l’effet de l’inflation. Tel est l’objet du présent amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Emmanuel Capus, rapporteur spécial. Demande de retrait, sinon avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, ministre. Avis défavorable.

La baisse des crédits sur ce programme s’explique par la diminution du nombre de bénéficiaires de l’allocation de solidarité spécifique (ASS), ce qui est une très bonne nouvelle, puisque cela signifie que nombre d’entre eux retournent à l’emploi. C’est pour cette raison que nous avons réajusté les crédits en ce sens.

Je ne pense pas que le maintien d’un haut niveau de bénéficiaires de l’ASS soit le signe d’une bonne politique de l’emploi.

M. Thierry Cozic. Je retire mon amendement, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° II-610 est retiré.

L’amendement n° II-719, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

I. – Créer le programme :

Soutien au service public de l’enseignement professionnel

II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Accès et retour à l’emploi

 

 

 

 

Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi

 

200 000 000

 

200 000 000

Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail

 

 

 

 

Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail

dont titre 2

 

 

 

 

Soutien au service public de l’enseignement professionnel

200 000 000

 

200 000 000

 

TOTAL

200 000 000

200 000 000

200 000 000

200 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Mme Laurence Cohen. Notre amendement d’appel vise à abonder de 200 millions d’euros les crédits pour l’enseignement professionnel public.

Le Président de la République a annoncé la réforme de l’enseignement professionnel, suscitant des inquiétudes légitimes de la part des enseignants, qui craignent de voir l’alternance et l’apprentissage devenir la priorité au détriment de l’enseignement professionnel.

Pour notre part, nous refusons cette mise en concurrence, car nous pensons que les deux sont nécessaires. Nous refusons surtout la casse de l’enseignement professionnel, qui, comme vous le savez, mes chers collègues, forme les citoyennes et les citoyens en leur donnant des bases techniques solides, au bénéfice de la formation professionnelle, au gré des besoins des employeurs, sans socle théorique. Cela n’est pas notre vision. C’est pourquoi nous proposons de changer l’affectation de cette somme de 200 millions d’euros.

J’en profite pour rappeler que le groupe CRCE n’est pas très favorable à ce jeu d’enveloppes, qui revient à déshabiller Pierre pour habiller Paul. Telle n’est pas notre conception du débat budgétaire. Aussi, jusqu’à présent, nous ne recourions pas à cette pratique, mais, avec cet amendement d’appel, nous faisons le choix d’attirer l’attention du Gouvernement sur l’importance de préserver la qualité de l’enseignement professionnel et de son encadrement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Emmanuel Capus, rapporteur spécial. Vous l’avez dit vous-même, il s’agit d’un amendement d’appel, mais il n’a pas lieu d’être dans nos débats, puisqu’il ne s’applique pas à la mission « Travail et emploi ». Demande de retrait, sinon avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Carole Grandjean, ministre déléguée. Madame la sénatrice Cohen, je salue votre engagement pour accompagner les lycées professionnels et leur réussite. Bien sûr, nous partageons cette volonté, et, vous le savez, nous sommes en train de préparer une réforme qui donnera tous les moyens aux lycées professionnels pour assurer la réussite de l’ensemble des élèves et favoriser les conditions d’enseignement pour les professeurs.

Néanmoins, il s’agit pour nous d’envisager une complémentarité avec la voie de l’apprentissage. Or la proposition que vous faites de transférer des fonds de l’apprentissage vers le lycée professionnel n’est pas pertinente, dans la mesure où l’apprentissage reste une voie de réussite que nous souhaitons continuer à soutenir. À notre sens, les deux modèles ne s’opposent pas.

Nous voulons également préparer les conditions de la réussite du lycée professionnel, lequel accueille, vous le savez, 60 000 apprentis, en augmentation de 42 % en deux ans. Nous y travaillerons demain ensemble. Nous avons d’ores et déjà engagé des discussions avec les partenaires sociaux, lancé des groupes de travail. Nous continuerons ainsi à construire les modalités de cette réforme, qui sera appliquée progressivement. C’est une demande de retrait, sinon avis défavorable.

M. le président. Madame Cohen, l’amendement n° II-719 est-il maintenu ?

Mme Laurence Cohen. Je vais le retirer, mais je souhaite auparavant remercier Mme la ministre de son effort d’explication, qui permet de montrer quel est l’objectif du Gouvernement. Je préfère cela à la fin de non-recevoir que nous a opposée M. le rapporteur spécial, sans argumentation valable.

Madame la ministre, j’attire tout de même votre attention sur l’enseignement professionnel. Les choses ont cependant pu être dites dans l’hémicycle et nous avons pu faire valoir notre point de vue. Je retire l’amendement, qui, de toute façon, ne serait pas voté.

M. le président. L’amendement n° II-719 est retiré.

Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° II-611, présenté par Mmes Féret et Lubin, M. Kanner, Mme Conconne, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Jeansannetas et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Accès et retour à l’emploi

150 000 000

 

150 000 000

 

Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi

 

150 000 000

 

150 000 000

Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail

 

 

 

 

Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

150 000 000

150 000 000

150 000 000

150 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Victoire Jasmin.

Mme Victoire Jasmin. Avec cet amendement, initialement travaillé avec l’Union des employeurs de l’économie sociale et solidaire (Udes), nous proposons une hausse des crédits permettant de maintenir le nombre de parcours emploi compétences et la durée totale de vingt-quatre mois des PEC en renouvellement, en ajoutant 150 millions d’euros au programme « Accès et retour à l’emploi », afin de soutenir l’insertion dans l’emploi réel.

En effet, le Gouvernement propose, dans ce PLF pour 2023, de réduire le nombre de nouvelles entrées en PEC à 80 000, contre 100 000 en 2022. Il faut plus d’ambition pour nos jeunes.

M. le président. L’amendement n° II-660, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Accès et retour à l’emploi

150 000 000

 

150 000 000

 

Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi

 

150 000 000

 

150 000 000

Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail

 

 

 

 

Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

150 000 000

150 000 000

150 000 000

150 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.

Mme Raymonde Poncet Monge. Notre amendement tient aussi compte de cette diminution des parcours emploi compétence. Il faut le rappeler, lorsque l’on a porté un coup aux contrats aidés en 2018, on a provoqué un vaste plan social silencieux, avec la suppression de 250 000 contrats, et ce alors même que la direction de l’animation, de la recherche, des études et des statistiques (Dares) précisait en 2017 que les contrats aidés permettaient de soutenir effectivement l’emploi.

Voilà que le Gouvernement passe un nouveau coup de rabot sur ces contrats parcours emploi compétences, sans que cela nous semble justifié d’aucune manière.

Il faut mettre fin aux changements intempestifs dans la prise en charge de ces publics, notamment dans certaines régions. En Île-de-France, par exemple, en mars dernier, un arrêté préfectoral limitait les possibilités de renouvellement à six mois et le taux de prise en charge à 45 %, un coup de canif énorme pour les acteurs.

En Ardèche, la transformation des contrats aidés en parcours emploi compétences s’est accompagnée d’une baisse de 72 % du nombre de contrats entre 2017 et 2018.

En 2022, on compte au total 67 000 bénéficiaires en parcours emploi compétences, ce qui est peu compte tenu du nombre de personnes éloignées de l’emploi dans le pays et du nombre d’acteurs, collectivités ou associations, qui peuvent accueillir ces personnes et bénéficier d’un appui grâce à ce dispositif.

Il faut donc faire plus. En conséquence, nous proposons d’allouer 150 millions d’euros à ces contrats, ce qui correspond tout simplement au maintien pour 2023 des paramètres appliqués en 2022. Ce sont 100 000 emplois pour une durée totale de vingt-quatre mois, renouvellement inclus et taux de prise en charge compris.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Emmanuel Capus, rapporteur spécial. Je veux d’abord revenir sur ce qu’a dit tout à l’heure Mme Cohen. Il ne s’agit pas d’un manque de respect que de vous renvoyer au Gouvernement, mais il se trouve que je suis rapporteur spécial de la mission « Travail et emploi ». Or les crédits dont vous sollicitiez l’augmentation relèvent de la mission « Enseignement supérieur », à laquelle je suis totalement étranger. Aussi, je préférais que Mme la ministre vous fasse une réponse complète et charpentée, que je ne suis pas en mesure de vous apporter, d’autant que nous sommes dans un temps contraint. Madame la sénatrice, n’y voyez aucune marque de désinvolture ou de désintérêt de ma part.

Mme Laurence Cohen. Merci pour votre explication.

M. Emmanuel Capus, rapporteur spécial. Je reviens aux deux amendements en discussion commune. L’avis est défavorable, car le PLF pour 2023 prévoit un maintien des entrées en contrat aidé dans le secteur non marchand, les fameux PEC, au même niveau qu’en 2022, la diminution portant sur les contrats dans le secteur marchand, qui ne sont pas visés par votre amendement.

La relance des contrats aidés est intervenue dans le contexte exceptionnel de la crise sanitaire. La situation, aujourd’hui, n’est objectivement plus la même. Traditionnellement, la commission des finances est assez réservée sur ce type de dispositif. L’avis est défavorable sur ces deux amendements, qui visent à majorer de 150 millions d’euros la dotation pour les contrats aidés.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, ministre. Même avis, pour les mêmes raisons.

M. le président. Mes chers collègues, il reste 22 amendements à examiner en cinquante minutes. Je vous encourage à être synthétiques dans vos prises de parole pour éviter que la fin de l’examen de la mission ne soit reportée en fin de semaine.

La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour explication de vote.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Nous ne nous exprimerons plus par la suite, monsieur le président !

Nous allons soutenir les propositions faites par nos collègues, même si le groupe CRCE pense que ces contrats ne sont pas la panacée. Pour les personnes les plus éloignées de l’emploi, il faut de véritables formations et de vrais métiers, et non pas de petits contrats qui s’arrêtent un jour ou l’autre.

Cela dit, on a supprimé nombre de contrats aidés ces dernières années. Des budgets alloués par l’État à Pôle emploi, notamment pour les contrats PEC en faveur des municipalités, ont été suspendus. Nous avons été interpellés par des maires, qui, du jour au lendemain, ont été avertis que leurs contrats PEC étaient interrompus. C’est un coup dur supplémentaire pour les petites communes. Notre jugement est un peu différent pour ces contrats en municipalité, car il y a souvent des formations proposées et la possibilité de se remettre le pied à l’étrier.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-611.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-660.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° II-606, présenté par Mmes Féret et Lubin, MM. Temal et Kanner, Mme Conconne, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Jeansannetas et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Accès et retour à l’emploi

135 488 395

 

135 488 395

 

Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi

 

135 488 395

 

135 488 395

Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail

 

 

 

 

Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

135 488 395

135 488 395

135 488 395

135 488 395

SOLDE

0

0

La parole est à M. Bernard Jomier.

M. Bernard Jomier. Les ateliers et chantiers d’insertion (ACI) salarient et accompagnent chaque année environ 165 000 personnes, soit plus de la moitié des effectifs de l’insertion par l’activité économique.

Le budget pour 2023 prévoir une diminution de 6 % du nombre de postes dans ces ACI. C’est regrettable ! D’une part, les ACI ont démontré leur capacité de développement, avec une croissance de près de 30 % des contrats signés entre 2018 et 2022, et, d’autre part, ils s’adressent aux personnes les plus éloignées de l’emploi.

Aussi, avec cet amendement, nous proposons de mobiliser pleinement la capacité des ateliers et chantiers d’insertion à accompagner vers et dans l’emploi les personnes qui en sont le plus exclues.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Emmanuel Capus, rapporteur spécial. C’est le premier amendement d’une série assez importante d’amendements qui visent à majorer les crédits destinés aux structures d’insertion par l’activité économique.

L’IAE est incontestablement une forme très pertinente d’accompagnement vers l’emploi, notamment pour les chômeurs de très longue durée, les bénéficiaires du RSA ou des jeunes très éloignés de l’emploi. Les crédits sont en légère progression en 2023, mais les structures de l’IAE auraient sans doute souhaité disposer d’une marge budgétaire plus importante, d’où cette série d’amendements.

Toutefois, je vous rappelle que le secteur a été particulièrement soutenu ces quatre dernières années. Les crédits, qui s’élevaient à 840 millions d’euros en 2018 et à 900 millions d’euros en 2019, sont passés à 1,3 milliard d’euros en 2023, soit une augmentation de l’ordre de 50 %.

Compte tenu de cette progression, du niveau de consommation de crédits en 2022, qui est d’environ 1,2 milliard d’euros, de la légère augmentation cette année et du nécessaire effort budgétaire, dont nous parlons beaucoup depuis le début de l’examen des crédits de la mission, il ne me semble pas souhaitable d’aller au-delà de la dotation prévue pour 2023.

La commission demande le retrait de cet amendement. À défaut, l’avis serait défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, ministre. Comme cela a été souligné, les crédits de l’IAE ont augmenté de 400 millions d’euros depuis 2018, atteignant un montant record de plus de 1,3 milliard d’euros. L’IAE n’avait jamais bénéficié d’un tel soutien.

L’objectif reste inchangé : atteindre en 2025 122 000 ETP, soit environ 240 000 personnes, qui pourront être accompagnées en matière d’IAE, avec une trajectoire de montée en puissance tenant compte de la réalité. Or la réalité est que ces structures rencontrent aussi des difficultés de recrutement.

Le budget que nous prévoyons est en hausse. Il permettra d’absorber l’augmentation du Smic et de financer 5 000 à 7 000 postes de plus qu’en 2022. Je prends pour base de comparaison non pas la prévision pour 2022, mais les chiffres réels. En effet, nous savons d’ores et déjà que les crédits prévus pour 2022 dédiés au financement des postes ne seront pas tous consommés et que notre objectif ne sera pas atteint.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-606.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° II-614, présenté par Mmes Féret, Jasmin et Lubin, M. Kanner, Mme Conconne, MM. Fichet et Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Jeansannetas et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

I. – Créer le programme :

Fonds dédié à la santé mentale des travailleurs

II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Accès et retour à l’emploi

Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi

100 000 000

100 000 000

Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail

Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail

dont titre 2

Fonds dédié à la santé mentale des travailleurs

100 000 000

100 000 000

TOTAL

100 000 000

100 000 000

100 000 000

100 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Victoire Jasmin.

Mme Victoire Jasmin. Cet amendement vise à créer un programme spécifique pour la santé mentale, en particulier pour celle des travailleurs.

La France se caractérise par un déficit de reconnaissance des maladies psychiques au travail comme maladies professionnelles, bien que la loi du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi, dite loi Rebsamen, dispose que les maladies psychiques peuvent être reconnues comme maladies d’origine professionnelle.

Le coût économique de ces maladies, entre 1,9 milliard d’euros et 3 milliards d’euros par an, est élevé. Mais nous constatons que le Gouvernement n’œuvre pas beaucoup à améliorer leur prise en compte.

Nous souhaitons donc créer un nouveau programme « Fonds dédié à la santé mentale des travailleurs » de 100 millions d’euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement.

J’espère vivement que vous voudrez bien prendre la situation en compte, mes chers collègues.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Emmanuel Capus, rapporteur spécial. Cet amendement vise à créer un nouveau programme ouvrant un fonds dédié à la santé mentale doté de 100 millions d’euros.

On peine à voir le rapport entre les deux constats dressés par les auteurs de l’amendement, c’est-à-dire, d’une part, les difficultés que nous avons à reconnaître davantage les maladies mentales dans l’entreprise et, d’autre part, le fait qu’il y ait de plus en plus de reconnaissance en maladies professionnelles, notamment, des syndromes dépressifs.

Et je ne vois pas bien non plus en quoi la création d’un fonds de 100 millions d’euros pourrait améliorer les sanctions à l’égard des comportements qui sont dénoncés dans l’exposé des motifs.

Je comprends la préoccupation des auteurs de l’amendement et leur souhait de mener une politique renforçant la lutte contre les maladies professionnelles, notamment les maladies mentales. Mais je m’interroge sur les actions que financeraient les 100 millions demandés. L’exposé des motifs me semble extrêmement flou sur la question.

La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Carole Grandjean, ministre déléguée. Madame la sénatrice, nous partageons votre volonté d’améliorer la prise en charge de la santé mentale et la prévention. Le Gouvernement est pleinement engagé à cet égard.

Cet engagement se traduit tout d’abord par le travail effectué par l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (Anact), qui a publié des guides pour accompagner les acteurs concernés.

De plus, la loi du 2 août 2021 améliore la prévention en santé au travail, grâce, notamment, au rendez-vous de liaison, aux services de prévention santé au travail, à la lutte contre la désinsertion professionnelle et à d’autres outils dédiés à l’enjeu de la santé mentale.

L’examen du texte a d’ailleurs montré l’attachement fort de l’ensemble des parlementaires des deux chambres à la prise en compte du problème dans le renforcement de la prévention en santé au travail.

Par ailleurs, je rappelle le travail des comités régionaux de reconnaissance des maladies professionnelles, qui ont été renforcés par le quatrième plan Santé au travail (PST 4). Lancé au mois de décembre 2021, ce dernier identifiait plusieurs axes pour renforcer le traitement des risques psychosociaux au travail : les TPE-PME ont été mieux outillés ; la prévention dans le secteur agricole, particulièrement confronté aux enjeux de santé au travail, a été améliorée ; des consultants ont été formés ; l’accompagnement des entreprises, notamment lors d’évolutions organisationnelles, a été développé. Une dotation exceptionnelle de 2,1 millions d’euros avait alors été débloquée.

L’enjeu fait donc d’ores et déjà l’objet d’un suivi et d’un accompagnement importants de la part du Gouvernement. Avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-614.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° II-654 rectifié n’est pas défendu.

Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° II-717, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Accès et retour à l’emploi

100 000 000

100 000 000

Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi

100 000 000

100 000 000

Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail

Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail

dont titre 2

TOTAL

100 000 000

100 000 000

100 000 000

100 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Il s’agit d’un amendement d’appel visant à abonder les crédits de l’IAE de 100 millions d’euros supplémentaires, afin d’augmenter le nombre de postes consacrés à ce secteur en 2023.

Si le Gouvernement souhaite atteindre le plein emploi, il doit mettre des moyens à la hauteur de cette ambition, en s’adressant à celles et ceux qui sont le plus éloignés du marché du travail.

Le secteur de l’IAE est dynamique, porté par les entreprises d’insertion, les entreprises de travail temporaire d’insertion et les entreprises d’insertion par le travail indépendant. Cet amendement vise à lui envoyer un signal de soutien.

M. le président. Les trois amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° II-61 rectifié ter est présenté par M. Mouiller, Mmes Puissat et Deroche, M. Mandelli, Mmes L. Darcos et Di Folco, M. Cambon, Mmes Dumont et F. Gerbaud, MM. Bouchet et Burgoa, Mme Chauvin, M. Longuet, Mmes Lassarade et Thomas, M. J.P. Vogel, Mme Gosselin, M. Frassa, Mme Belrhiti, MM. Hugonet et Belin, Mmes Berthet et Micouleau, MM. Courtial, Brisson, Sautarel et Milon, Mmes Malet, Gruny et M. Mercier, MM. Perrin et Rietmann, Mme Lopez, MM. Bonhomme, Bonne, Meignen et B. Fournier, Mme Schalck, MM. Piednoir et Charon, Mmes Canayer, Borchio Fontimp, Dumas et de Cidrac et MM. Bouloux et Favreau.

L’amendement n° II-488 est présenté par MM. Breuiller, Gontard, Benarroche, Dantec et Dossus, Mme de Marco, MM. Fernique, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel.

L’amendement n° II-609 est présenté par Mme Féret, MM. Marie et Kanner, Mme Conconne, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Lubin, Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Jeansannetas et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Accès et retour à l’emploi

30 000 000

30 000 000

Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi

30 000 000

30 000 000

Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail

Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail

dont titre 2

TOTAL

30 000 000

30 000 000

30 000 000

30 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Frédérique Puissat, pour présenter l’amendement n° II-61 rectifié ter.

Mme Frédérique Puissat. La mesure envisagée dans cet amendement pèse un peu moins sur le budget que la proposition de Mme Apourceau-Poly : son coût est de 30 millions d’euros.

Monsieur le ministre, il est vrai que nous sommes tous attachés aux structures d’insertion par l’activité économique et que les gouvernements précédents ont fait un effort considérable en la matière. En outre, un texte législatif a été discuté récemment dans cet hémicycle. Personne ne doute de l’intérêt que nous portons au sujet.

En revanche, en regardant les chiffres avec précision, on s’aperçoit que, même en considérant la sous-consommation en 2022, à laquelle vous avez fait référence, l’augmentation de 1,27 % au global ne rattrape pas la hausse unitaire de 9,5 %.

Dès lors, les structures ont deux solutions : arrêter de faire des contrats ou privilégier elles-mêmes certains contrats, les moins coûteux, c’est-à-dire les associations intermédiaires, au détriment des chantiers d’insertion.

Or nous considérons qu’il n’appartient pas aux structures d’effectuer ces choix, car il s’agit de choix politiques.

Dans ces conditions, il faut soit faire un choix politique en mettant plutôt l’accent sur les associations intermédiaires, sans tenir compte des besoins du terrain, soit accorder une rallonge de l’ordre de 30 millions d’euros. Par cet amendement, nous vous proposons de retenir la deuxième option.

M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° II-488.

Mme Raymonde Poncet Monge. Le Gouvernement nous annonce le retour au plein emploi. Il nous semble indispensable qu’une telle amélioration profite à celles et ceux qui sont les plus éloignés du marché du travail.

Pour cela, nous proposons de soutenir l’insertion par l’activité économique en augmentant les crédits de la mission pour 2023.

Car, si le budget présenté pour 2023 est en augmentation en valeur, il est en réalité, compte tenu de la hausse du Smic, en diminution en nombre d’ETP finançables. La loi prévoit en effet que les montants unitaires des aides aux postes sont indexés sur le Smic.

Aussi l’adoption de cet amendement permettrait-elle de poursuivre la dynamique du pacte d’ambition pour l’insertion par l’activité économique. Je vous invite donc à préserver cette dynamique par un effort budgétaire, car c’est un investissement.

M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour présenter l’amendement n° II-609.

M. Bernard Jomier. Si le budget est effectivement en augmentation en valeur, puisqu’il passe de 1,299 milliard d’euros à 1,316 milliard d’euros, il est en réalité en diminution en raison du nombre d’ETP finançables compte tenu de la hausse du Smic.

Par ailleurs, la loi prévoit que les montants unitaires des aides aux postes sont indexés sur le Smic, d’où la nécessité de majorer cette ligne de 30 millions d’euros.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Emmanuel Capus, rapporteur spécial. Avis défavorable, comme sur l’ensemble des amendements de ce type, ainsi que je l’ai indiqué précédemment.

Les trois amendements identiques sont évidemment très sympathiques et généreux. Mais n’oublions pas – c’est le rôle de la commission des finances d’y veiller – que nous devons faire attention aux dépenses publiques. Nous avons même dit qu’il fallait réduire le budget de la mission « Travail et emploi ».

Aussi ne pouvons-nous pas répondre favorablement à cette demande, aussi légitime soit-elle. Les acteurs de l’IAE font, certes, un travail formidable, mais ils ont vu leur budget progresser très sensiblement ces quatre dernières années, à hauteur de 400 millions d’euros ; M. le ministre l’a rappelé.

Par ailleurs, le budget continue d’augmenter cette année, à hauteur de 16 millions d’euros environ. Certes, cela ne couvre sans doute pas les effets de l’inflation. Mais, au titre de la commission des finances, il m’est impossible d’émettre un avis favorable sur ces amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, ministre. Même avis, pour les mêmes raisons.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Daniel Breuiller, rapporteur spécial. Comme rapporteur spécial, je confirme qu’Emmanuel Capus a bien donné l’avis de la commission. Mais – nous avons parlé de santé mentale –, comme signataire de l’un des amendements identiques, je ne voudrais pas sembler atteint de schizophrénie. (Sourires.) Je précise donc qu’il y a eu beaucoup de discussions en commission des finances avant d’aboutir à cet avis.

M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour explication de vote.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Nous retirons notre amendement pour donner plus de poids aux amendements identiques de nos collègues, qui demandent un peu moins. Nous allons être raisonnables…

M. le président. L’amendement n° II-717 est retiré.

Je mets aux voix les amendements identiques nos II-61 rectifié ter, II-488 et II-609.

(Les amendements sont adoptés.)

M. le président. L’amendement n° II-608, présenté par Mmes Féret et Lubin, M. Kanner, Mme Conconne, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Jeansannetas et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Accès et retour à l’emploi

81 817 310

81 817 310

Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi

81 817 310

81 817 310

Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail

Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail

dont titre 2

TOTAL

81 817 310

81 817 310

81 817 310

81 817 310

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Victoire Jasmin.

Mme Victoire Jasmin. Cet amendement du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain a pour objet la revalorisation salariale des postes permanents dans les ateliers chantiers d’insertion et les associations intermédiaires, pour un montant total de 81 817 310 euros. Il s’agit de maintenir la qualité de l’accompagnement dans ces différentes structures.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Emmanuel Capus, rapporteur spécial. Demande de retrait, ou, à défaut, avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, ministre. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-608.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° II-613, présenté par Mmes Féret et Lubin, M. Kanner, Mme Conconne, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Jeansannetas et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Accès et retour à l’emploi

50 000 000

50 000 000

Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi

50 000 000

50 000 000

Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail

Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail

dont titre 2

TOTAL

50 000 000

50 000 000

50 000 000

50 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Victoire Jasmin.

Mme Victoire Jasmin. Cet amendement du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain vise à développer la formation dans l’IAE.

Le budget formation pour l’insertion par l’activité économique est porté à 100 millions d’euros en 2023 au sein du plan d’investissement dans les compétences, en augmentation de plus de 25 % par rapport à 2022.

Il s’agit de prendre en compte les nouveaux besoins pour permettre la réalisation de toutes les formations dans ce cadre.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Emmanuel Capus, rapporteur spécial. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, ministre. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-613.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° II-661, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Accès et retour à l’emploi

50 000 000

50 000 000

Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi

50 000 000

50 000 000

Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail

Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail

dont titre 2

TOTAL

50 000 000

50 000 000

50 000 000

50 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.

Mme Raymonde Poncet Monge. L’expérimentation Territoire zéro chômeur de longue durée (TZCLG), menée entre 2016 et 2021, est un dispositif dynamique ayant permis à plus d’un millier de personnes éloignées de l’emploi de retrouver du travail.

Cinquante nouveaux territoires peuvent désormais être intégrés au dispositif entre juillet 2021 et juillet 2024 ; l’association estime même être en mesure de couvrir soixante territoires d’ici à 2023.

Ainsi, afin que l’expérimentation, qui – rappelons-le – permet le retour vers des emplois en CDI à forte utilité sociale et environnementale, répondant à l’aspiration d’y trouver du sens, et participe au dynamisme des territoires puisse vraiment se déployer, il faut que les crédits alloués soient suffisants.

Dès lors, par cet amendement, nous souhaitons augmenter les moyens dévolus à l’expérimentation TZCLG, en vue notamment de l’augmentation du nombre de territoires habilités, afin qu’aucun projet mature ne soit refusé par manque de crédits.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Emmanuel Capus, rapporteur spécial. Cet amendement vise à majorer de 50 millions d’euros les crédits pour l’expérimentation TZCLG. Or ces crédits ont déjà progressé notablement en 2021, passant de 33 millions d’euros à 45 millions d’euros.

Cet amendement vise donc à multiplier les crédits par trois sur un an. Je ne suis pas certain, malgré l’extension du dispositif à de nouveaux territoires volontaires, qu’une telle montée en charge soit réaliste.

Compte tenu du niveau constaté des embauches dans les entreprises à but d’emploi depuis le début de l’expérimentation – certes, tout le monde s’en satisfait sur le terrain –, le montant demandé paraît un peu excessif pour cette année.

La commission demande le retrait de cet amendement. À défaut, l’avis serait défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, ministre. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-661.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° II-607, présenté par Mmes Féret et Lubin, MM. Temal et Kanner, Mme Conconne, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Jeansannetas et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Accès et retour à l’emploi

20 000 000

20 000 000

Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi

20 000 000

20 000 000

Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail

Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail

dont titre 2

TOTAL

20 000 000

20 000 000

20 000 000

20 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Victoire Jasmin.

Mme Victoire Jasmin. Cet amendement du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain a pour objet d’augmenter le fonds de développement de l’inclusion (FDI), pour un montant total de 20 millions d’euros.

Il serait temps que nous mettions ce dispositif en cohérence avec le niveau élevé du chômage. Lorsque nous proposons des mesures pour essayer de trouver des solutions, notamment en matière de structures d’accompagnement de nos jeunes, aucune n’est retenue. Cela me surprend considérablement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Emmanuel Capus, rapporteur spécial. Je précise que nous avons déjà augmenté les crédits de 30 millions d’euros. Il s’agirait donc de 20 millions d’euros complémentaires.

La commission demande le retrait de cet amendement, faute de quoi l’avis serait défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, ministre. Même avis.

Mme Victoire Jasmin. Je retire cet amendement, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° II-607 est retiré.

Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° II-222, présenté par Mme Férat et les membres du groupe Union Centriste, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Accès et retour à l’emploi

5 000 000

5 000 000

Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi

5 000 000

5 000 000

Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail

Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail

dont titre 2

TOTAL

5 000 000

5 000 000

5 000 000

5 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Olivier Henno.

M. Olivier Henno. Nous proposons une augmentation de 5 millions d’euros pour le dispositif des maisons de l’emploi, créé par Jean-Louis Borloo.

M. le président. L’amendement n° II-718, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Accès et retour à l’emploi

5 000 000

5 000 000

Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi

5 000 000

5 000 000

Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail

Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail

dont titre 2

TOTAL

5 000 000

5 000 000

5 000 000

5 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Mme Laurence Cohen. Cet amendement est similaire à celui de nos collègues centristes.

Nous trouvons tout à fait dommageable de mettre en danger un outil précieux sur les territoires et auquel les maires sont particulièrement attachés. Il est important d’établir un lien de proximité avec les personnes qui sont éloignées de l’emploi. C’est l’objet de notre amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Emmanuel Capus, rapporteur spécial. Au Sénat, nous sommes tous attachés aux maisons de l’emploi.

Toutefois, ces deux amendements visent à reconduire les financements de l’année dernière. Or le rapporteur spécial à l’Assemblée nationale a déjà introduit par amendement la hausse de 5 millions d’euros que vous sollicitez. La demande ainsi donc satisfaite. C’est la raison pour laquelle je ne l’ai pas déposé d’amendement sur le sujet cette année, contrairement aux années précédentes.

Je demande donc le retrait des deux amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, ministre. Même avis.

Pour une raison qui m’échappe un peu, le financement des maisons de l’emploi est systématiquement pourvu par amendements parlementaires plutôt que dans la maquette initiale du PLF. Nous avons reconduit cette tradition.

Comme l’a indiqué M. le rapporteur spécial, l’amendement du rapporteur spécial à l’Assemblée nationale tel qu’il a été intégré à l’occasion de l’engagement de l’article 49.3 de la Constitution permet de satisfaire ces deux amendements.

Mme Laurence Cohen. Je retire mon amendement, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° II-718 est retiré.

Je mets aux voix l’amendement n° II-222.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° II-616, présenté par Mmes M. Vogel et Poncet Monge, MM. Gontard, Benarroche, Dantec, Dossus, Fernique et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon, est ainsi libellé :

I. – Créer le programme

Adaptation du monde du travail au changement climatique

II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Accès et retour à l’emploi

Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi

Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail

Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail

dont titre 2

5 000 000

5 000 000

Adaptation du monde du travail au changement climatique

5 000 000

5 000 000

TOTAL

5 000 000

5 000 000

5 000 000

5 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Mélanie Vogel.

Mme Mélanie Vogel. Cet amendement vise à évaluer les coûts et les modalités d’adaptation du monde du travail à la crise climatique.

Nous le savons toutes et tous, le réchauffement climatique est déjà là. Si nous continuons sur la même trajectoire, il fera en moyenne 3,2 degrés de plus d’ici à la fin du siècle.

Quand bien même nous prendrions dès aujourd’hui les décisions nécessaires pour éviter la catastrophe, certains effets de la crise climatique sont irréversibles. Face à ces derniers, nous n’avons pas le choix : il nous faut nous adapter dès maintenant.

L’adaptation concerne le monde du travail. Avec une simple hausse des températures mondiales de 1,5 degré, malheureusement inéluctable, plus de 20 millions de travailleurs seraient exposés chaque année à un risque de décès en raison d’une chaleur excessive. De même, 2,2 % des heures de travail annuelles pourraient être perdues à l’échelle mondiale.

Le boom d’utilisation de la climatisation constaté cet été est plus qu’une impasse ; c’est un accélérateur de la crise. Nous devons donc aller vers d’autres changements : horaires de travail, rythmes sur l’année, adaptabilité des tâches et lieux de travail aux vagues de chaleur…

À cet effet, l’une des propositions du rapport d’information sénatorial sur la sécurité sociale écologique, dont j’ai eu l’honneur d’être la rapporteure, était d’évaluer la prévalence des pics de chaleur dans les années à venir, afin d’encourager les employeurs à s’y préparer pour préserver la santé des travailleurs et des travailleuses.

Mon amendement n’est que le reflet de cette proposition. Il vise à instaurer des fonds pour réaliser une étude dédiée à l’évaluation des coûts et des modalités d’adaptation du monde du travail de demain à la réalité du réchauffement climatique.

Nous demandons évidemment au Gouvernement de lever le gage.

M. le président. L’amendement n° II-716, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Accès et retour à l’emploi

Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi

4 000 000

4 000 000

Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail

Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail

dont titre 2

4 000 000

4 000 000

TOTAL

4 000 000

4 000 000

4 000 000

4 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Cet amendement d’appel vise donc à augmenter de 4 millions d’euros en 2023 les crédits de l’agence nationale pour la formation professionnelle des adultes (Afpa).

Ces dernières années, l’Afpa a subi des diminutions successives du nombre d’emplois. Ainsi, la loi de finances pour 2022 a réduit de 94 ETP travaillés le plafond d’emploi de l’Afpa.

Dans ce PLF pour 2023, le plafond d’emploi est fixé à 5 487 ETP, ce qui représente une nouvelle diminution de 61 ETP par rapport à l’année 2022 ; nous le regrettons.

Cette politique d’austérité à l’égard d’un opérateur qui a déjà vu ses effectifs diminuer dans des proportions significatives au cours des dernières années ne paraît évidemment pas justifiée.

Le projet annuel de performance de la mission « Travail et emploi » prévoit : « L’année 2023 sera marquée par plusieurs chantiers d’importance sur la stratégie globale de l’établissement public et la politique de certification professionnelle que l’agence conduit pour le ministère du travail. Il a été décidé de transférer à l’Afpa plusieurs missions sur la politique du titre professionnel du ministère du travail aujourd’hui assurées par les services déconcentrés. »

Pour l’ensemble de ces raisons, il convient de maintenir le plafond d’emploi à son niveau de 2022. C’est le sens de cet amendement.

M. le président. L’amendement n° II-619, présenté par Mmes M. Vogel et Poncet Monge, MM. Gontard, Benarroche, Dantec, Dossus, Fernique et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon, est ainsi libellé :

I. – Créer le programme :

Étude sur les modalités de mise en œuvre d’un congé menstruel

II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Accès et retour à l’emploi

Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi

Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail

Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail

dont titre 2

2 000 000

2 000 000

Étude sur les modalités de mise en œuvre d’un congé menstruel

2 000 000

2 000 000

TOTAL

2 000 000

2 000 000

2 000 000

2 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Mélanie Vogel.

Mme Mélanie Vogel. Cet amendement vise à étudier la création d’un congé menstruel.

Je ne vous apprendrai rien en disant que près de la moitié de la population française a, a eu ou aura ses règles pendant environ trente-huit ans de sa vie.

Cette réalité objective, vécue par une moitié de la population pendant quasiment la moitié de sa vie, trois jours par mois, est entourée d’un tabou : on ne dit pas qu’on a ses règles ; on se passe des tampons discrètement, comme si c’était une honte. Aucune mesure sociale ne traite le fait que les règles affectent nos vies, provoquant pendant quelques jours des douleurs ou des effets handicapants pour travailler.

Certaines femmes et personnes menstruées ont l’impression qu’on leur enfonce des clous dans le ventre, qu’on leur coupe les organes, ont des bouffées de chaleur, des maux de tête, des vertiges, etc.

Il s’agit parfois des effets de l’endométriose, mais pas toujours. Personnellement, j’ai parfois tellement mal que je ne peux pas me lever, alors que je ne souffre pas d’endométriose.

Or la société ne prévoit rien en vue de traiter cette réalité. Le monde du travail a été bâti par des hommes pour des hommes, et les femmes s’emploient à ne pas faire exister cette spécificité, de peur d’être discriminées.

Beaucoup d’adaptations sont souhaitables pour prendre en compte l’existence des menstruations. L’une d’entre elles, qui doit s’intégrer à un ensemble de mesures, est le congé menstruel. Je vous propose donc de réfléchir à sa création.

En Espagne, il est possible de prendre trois jours de congé, cinq en cas de symptômes aigus. En France, plusieurs entreprises ont choisi d’expérimenter avec succès ce dispositif. Si cela va dans le bon sens, il faudrait qu’il soit étendu, d’autant que – je le rappelle – 68 % des Françaises sont favorables à l’instauration d’un congé menstruel.

M. le président. L’amendement n° II-621 rectifié, présenté par Mme M. Vogel, MM. Gontard, Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi, Mme Poncet Monge et M. Salmon, est ainsi libellé :

I. – Créer le programme :

Étude pour un congé parental égalitaire

II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Accès et retour à l’emploi

Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi

Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail

Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail

dont titre 2

2 000 000

2 000 000

Étude pour un congé parental égalitaire

2 000 000

2 000 000

TOTAL

2 000 000

2 000 000

2 000 000

2 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Mélanie Vogel.

Mme Mélanie Vogel. Cet amendement concerne une étude sur un congé parental égal.

En France, l’égalité entre les femmes et les hommes dans l’ensemble des espaces de la société est très loin d’être atteinte, en particulier s’agissant des salaires et de la charge parentale.

L’un des événements majeurs qui structurent cette inégalité est l’arrivée d’un premier enfant dans un couple hétérosexuel. La charge de la parentalité revient majoritairement à la mère, ce qui affecte durablement sa carrière et conditionne un rôle social au sein de la famille et, plus largement, au sein de la société.

L’existence de cette inégalité est favorisée, encouragée, construite par notre société, qui attribue principalement à la mère – à celle qui a accouché –, de manière totalement disproportionnée par rapport au père ou au deuxième parent la charge de s’en occuper après la naissance, par un congé parentalité absolument inégalitaire.

En effet, bien que le congé paternité ait été un peu allongé, il demeure plus court que le congé maternité, sans aucune justification. De plus, de nombreux pères rencontrent des difficultés pour l’obtenir auprès de leurs employeurs et employeuses. En conséquence – les études le démontrent –, si le salaire de la mère était supérieur ou à peu près similaire à celui de son conjoint avant le congé maternité, ce n’est plus le cas ensuite.

Par ailleurs, l’inégalité entre les deux parents vis-à-vis du congé parentalité crée une forte discrimination à l’embauche, puisque les employeurs savent qu’une femme en âge de procréer pourrait partir en congé maternité alors que ce risque est presque nul pour un homme en âge de procréer.

Aucune raison ne justifie pourtant le fait, dès lors que nous reconnaissons qu’un enfant a deux parents, de ne pas reconnaître le même congé pour les deux parents. La seule manière d’assurer l’égalité est la création d’un congé parental égal et obligatoire. Plusieurs modèles existent déjà ; c’est le cas en Suède ou en Espagne.

Ainsi, je vous propose simplement d’étudier comment nous pourrions instaurer un congé parental obligatoire de seize semaines pour aller vers une société plus égalitaire.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Emmanuel Capus, rapporteur spécial. Ces quatre amendements sont en discussion commune, mais n’ont en commun que le gage, car ils portent sur des sujets extrêmement variés.

L’adaptation au changement climatique fait partie des axes de travail de l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail. Il ne nous semble pas opportun de créer un fonds spécial d’adaptation qui serait crédité de 5 millions d’euros.

L’Afpa est fortement soutenue par l’État et a bénéficié d’une subvention complémentaire en projet de loi de finances rectificative (PLFR). Elle doit par ailleurs continuer à se restructurer.

Nous comprenons bien l’idée du congé menstruel et du congé parental égalitaire. Mais il s’agit de sujets qui dépassent largement les compétences de la mission « Travail et emploi ». Ces débats sociétaux sont, certes, importants. Mais il ne me semble pas que l’étude d’une nouvelle évolution législative – c’est bien ce que vous appelez de vos vœux – nécessite des crédits supplémentaires. Cela entre dans le périmètre des fonctions et des crédits inhérents au ministère du travail et à la direction générale du travail (DGT).

La commission demande donc le retrait de ces quatre amendements, faute de quoi l’avis serait défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, ministre. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-616.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-716.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-619.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-621 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Travail et emploi », figurant à l’état B.

Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits, modifiés.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Je rappelle que l’avis de la commission est favorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 78 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 331
Pour l’adoption 240
Contre 91

Le Sénat a adopté.

J’appelle en discussion les articles 47 à 49, qui sont rattachés pour leur examen aux crédits de la mission « Travail et emploi ».

Travail et emploi

État B
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Article 48 (nouveau)

Article 47

Le titre III de la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa du I de l’article 78, l’année : « 2022 » est remplacée par l’année : « 2023 » ;

2° Au début du premier alinéa du I de l’article 79, les mots : « Pour une durée de quatre ans, à compter du 1er janvier 2019 et jusqu’au 31 décembre 2022 » sont remplacés par les mots : « À compter du 1er janvier 2019 et jusqu’au 31 décembre 2023 ». – (Adopté.)

Article 47
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Article 49 (nouveau) (début)

Article 48 (nouveau)

I. – L’article L. 5122-1 du code du travail est complété par des V et VI ainsi rédigés :

« V. – Les employeurs mentionnés à l’article L. 5424-1 peuvent placer en position d’activité partielle, dans les conditions prévues au présent chapitre, leurs salariés de droit privé pour lesquels ils ont adhéré au régime d’assurance chômage en application de l’article L. 5424-2, dès lors qu’ils exercent à titre principal une activité industrielle et commerciale dont le produit constitue la part majoritaire de leurs ressources.

« Ces employeurs bénéficient d’une allocation d’activité partielle selon les modalités prévues au présent chapitre.

« VI. – Les salariés mentionnés à l’article L. 243-1-2 du code de la sécurité sociale qui sont employés par une entreprise ne comportant pas d’établissement en France peuvent être placés en position d’activité partielle lorsque l’employeur est soumis, pour ces salariés, aux contributions et cotisations sociales d’origine légale ou conventionnelle et aux obligations d’assurance contre le risque de privation d’emploi au titre de la législation française.

« Ces employeurs bénéficient d’une allocation d’activité partielle selon les modalités prévues au présent chapitre. »

II. – Le I s’applique aux demandes d’autorisation adressées par les employeurs mentionnés au même I à l’autorité administrative à compter du 1er janvier 2023 et au titre des heures chômées à compter de la même date. – (Adopté.)

Article 48 (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Article 49 (nouveau) (interruption de la discussion)

Article 49 (nouveau)

L’article L. 6323-4 du code du travail est complété par un IV ainsi rédigé :

« IV. – La mobilisation du compte personnel de formation par son titulaire pour le financement d’une action de formation fait l’objet d’un mécanisme de régulation dont les modalités sont définies par décret en Conseil d’État. »

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° II-678, présenté par Mme Lavarde, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Rédiger ainsi cet alinéa :

« IV. – La mobilisation des droits inscrits sur le compte personnel de formation prend en charge le coût de la formation dans la limite d’un plafond et en addition d’une participation financière du bénéficiaire. Les modalités de ce plafond et de cette participation financière sont définies par décret en Conseil d’État. »

La parole est à Mme Christine Lavarde.

Mme Christine Lavarde. Cet amendement s’inscrit dans la même logique que les amendements identiques déposés par M. le rapporteur spécial et Mme le rapporteur pour avis, mais va plus loin. En effet, les amendements identiques visent à rendre possible une modulation de prix pour certaines formations, alors que l’amendement que je présente a pour objet un plafonnement pour toutes les formations et l’introduction d’un ticket modérateur.

À mon sens, ce qui est gratuit n’a pas de valeur. Par conséquent, si l’on veut pleinement engager les gens dans un processus de formation autrement qu’à la suite d’un coup de fil où on leur rappelle qu’ils ont un compte personnel de formation et où on les invite à ne pas oublier d’utiliser les crédits afférents, il faut les faire participer un peu et avoir ainsi la garantie qu’ils seront véritablement acteurs de leur formation.

Évidemment, l’idée n’est pas de faire payer le ticket modérateur à tout le monde. Quand la formation s’inscrit dans une procédure de retour à l’emploi ou de réorientation professionnelle, cela n’a pas lieu d’être, parce qu’il s’agit véritablement d’un accompagnement vers le marché du travail. En revanche, pour toutes les autres formations qui, parfois, sans être des formations de confort, supposent un engagement moindre, introduire ce plafonnement et ce ticket modérateur me paraît utile.

M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° II-28 est présenté par M. Capus, au nom de la commission des finances.

L’amendement n° II-376 est présenté par Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 2

Rédiger ainsi cet alinéa :

« IV. – La prise en charge du coût de la formation mentionnée au I par la mobilisation des droits inscrits sur le compte personnel de formation peut être plafonnée selon des modalités définies par décret en Conseil d’État. Ce décret détermine les formations concernées et, pour ces mêmes formations, les cas dans lesquels ce plafonnement n’est pas applicable. »

La parole est à M. le rapporteur spécial, pour présenter l’amendement n° II-28 et pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n° II-678.

M. Emmanuel Capus, rapporteur spécial. Cet amendement de la commission des finances, élaboré en collaboration avec la commission des affaires sociales, a un même objectif de régulation, mais est plus raisonnable et plus limité. En quelque sorte, il est moins budgétaire.

M. Emmanuel Capus, rapporteur spécial. Je rappelle que l’augmentation forte et non maîtrisée des dépenses induites par l’utilisation du compte personnel de formation justifie la mise en place de mécanismes régulateurs, ainsi que le prévoit l’article 49, introduit à l’Assemblée nationale par le Gouvernement.

Nous souhaitons élargir ce mécanisme de régulation en prévoyant qu’un plafonnement soit possible. Nous n’allons donc pas aussi loin que Mme Lavarde : il ne s’agit pas de mettre en place un ticket modérateur obligatoire, ce que laisse supposer la rédaction de son amendement.

C’est d’ailleurs la raison pour laquelle la commission demandera le retrait de l’amendement n° II-678 au profit des amendements identiques de la commission des finances et de la commission des affaires sociales.

M. le président. La parole est à Mme le rapporteur pour avis, pour présenter l’amendement n° II-376.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur pour avis. Je rappelle que, parmi les propositions du rapport d’information que Corinne Féret, Martin Lévrier et moi-même avons produit, figurait l’instauration d’un reste à charge, dans l’objectif de recentrer le compte personnel de formation sur l’employabilité des utilisateurs et sur le développement des compétences à finalité professionnelle.

En ce sens, nous rejoignons tout à fait les objectifs de Christine Lavarde, qui a une vision budgétaire des missions confiées à France Compétences et dont je comprends tout à fait la position.

En effet, régulièrement, à l’occasion de l’examen des projets de loi de finances rectificative, 2 milliards d’euros sont prévus pour France Compétences, ce qui nous conduit à nous interroger sur notre capacité à équilibrer le budget de cet organisme.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Carole Grandjean, ministre déléguée. L’enjeu est d’accompagner le compte personnel de formation de sorte qu’il atteigne aujourd’hui sa maturité.

Le compte personnel de formation rencontre un vif succès, avec 5,5 millions d’ouvertures de comptes de formation qui donnent accès aux droits à formation.

Néanmoins, nous partageons avec vous la conviction que mettre en place un mécanisme de régulation est nécessaire pour que ces fonds soient mobilisés à des fins d’employabilité et de maintien dans l’emploi, comme d’accompagnement des compétences sur des projets professionnels.

L’amendement de Mme la sénatrice Lavarde tend à généraliser la mise en place d’un ticket modérateur. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis défavorable.

Sur les modalités d’usage du compte personnel de formation, le dialogue social est en cours. Le Gouvernement l’accompagne et attend qu’il se prononce sur les modalités d’orientation vers un projet professionnel solide.

Le Gouvernement s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée sur les amendements identiques nos °II-28 et II-376.

M. le président. Madame Lavarde, l’amendement n° II-678 est-il maintenu ?

Mme Christine Lavarde. Oui, je le maintiens, monsieur le président, quand bien même j’ai peut-être une lecture trop budgétaire !

Monsieur le rapporteur spécial, j’ai indiqué dans cet amendement que les modalités du plafond et de la participation financière seraient définies par décret. Par conséquent, cela ne signifie pas que ce sera obligatoire pour tout le monde.

Mme la ministre se déclare prête à faire des réformes, mais n’allons surtout pas trop vite ! À chaque fois que nous examinons un texte budgétaire, nous abondons le budget de France Compétences de 2 milliards d’euros supplémentaires. Je veux bien que les milliards pleuvent, mais il faut vraiment engager la réflexion sur ce sujet. (M. Jean-François Husson sexclame.)

C’est ce que je propose de faire. Ensuite, un décret fixera les critères permettant la non-application du plafond et du ticket modérateur.

Si l’on ne fait rien, on continuera à être harcelé au téléphone et l’on acceptera des formations seulement parce que l’on aura acquis assez de droits et l’on y renoncera parce que, au moment voulu, l’argent manquera !

Je le répète : il faut engager la réflexion sur le sujet !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Olivier Dussopt, ministre. La proposition de loi adoptée par l’Assemblée nationale, qui sera prochainement en discussion au Sénat, interdira purement et simplement le démarchage téléphonique, ce qui est une bonne chose, et traitera le sujet par d’autres moyens.

Si votre amendement était adopté, madame la sénatrice, le décret ne pourrait plus permettre une exonération totale du ticket modérateur. Ce serait problématique pour des demandeurs d’emploi de très longue durée qui, confrontés à des difficultés financières, ne pourraient plus accéder à une formation. Cette rédaction pose vraiment problème.

C’est la raison pour laquelle le Gouvernement préfère les amendements nos II-28 et II-376, sur lesquels il a émis un avis de sagesse.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-678.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-28 et II-376.

(Les amendements sont adoptés.)

Mme Christine Lavarde. C’est un moindre mal ! (Sourires.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 49, modifié.

(Larticle 49 est adopté.)

M. le président. Mes chers collègues, nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Travail et emploi ».

Article 49 (nouveau) (début)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Discussion générale

3

Organisation des travaux

M. le président. Mes chers collègues, au regard du nombre d’amendements à examiner et dans la mesure où l’organisation de la journée de demain le permet, en accord avec la commission des finances, nous pourrions porter, à titre exceptionnel, la durée maximale prévisionnelle de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » de deux heures trente à trois heures trente.

Il n’y a pas d’opposition ?…

Il en est ainsi décidé.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures quinze.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à douze heures quarante, est reprise à quatorze heures quinze, sous la présidence de Mme Laurence Rossignol.)

PRÉSIDENCE DE Mme Laurence Rossignol

vice-présidente

Mme la présidente. La séance est reprise.

4

Article 49 (nouveau) (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Deuxième partie

Loi de finances pour 2023

Suite de la discussion d’un projet de loi

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation
Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation

Mme la présidente. Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances pour 2023, considéré comme adopté par l’Assemblée nationale en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution.

Nous poursuivons l’examen, au sein de la seconde partie du projet de loi de finances, des différentes missions.

Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation

Moyens des politiques publiques et dispositions spéciales
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
État B

Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » (et articles 41 et 41 bis).

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Marc Laménie, rapporteur spécial de la commission des finances. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, les crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » continuent leur inexorable baisse, malheureusement liée à la démographie.

L’année 2023 se caractérise par une réduction particulièrement marquée de 161 millions d’euros, les crédits tombant à 1,9 milliard d’euros. Celle-ci est due à la diminution du nombre des bénéficiaires de pensions militaires d’invalidité et de la retraite du combattant, combinée à une revalorisation limitée de ces pensions. Si l’année 2023 se démarque par une revalorisation de droit commun qui doit s’élever à 4 %, cette revalorisation reste inférieure à l’inflation de 2022 qu’elle a pour objet de compenser.

Cependant, cette approche globale cache un certain nombre d’éléments, qu’il faut également souligner.

L’année 2022 a vu un renforcement particulièrement important de l’effort de la Nation envers les harkis et autres rapatriés, ce qui est un témoignage de respect et de reconnaissance. Les crédits qui leur sont dédiés ont été multipliés par quatre entre l’exécution 2021 et la prévision 2023.

Les actions qui ne sont pas liées aux rentes versées aux anciens combattants sont globalement en hausse. C’est notamment le cas des crédits dédiés à la politique de la pierre, soit l’entretien des tombes de morts pour la France, les nécropoles nationales et les hauts lieux de la mémoire nationale, du fait de la forte dimension immobilière de ces actions.

De plus, l’année 2023 ne prévoit plus de prélèvement sur la trésorerie, dont le niveau est désormais faible, de l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONACVG), opérateur principal de la mission sur lequel j’ai réalisé cette année un contrôle budgétaire. À ce titre, je remercie les membres et les fonctionnaires de la commission des finances, ainsi que les services du ministère des armées de leur coopération et collaboration. À ce moment de mon propos, je veux également mentionner l’Institution nationale des Invalides, qui est également un opérateur majeur.

Enfin, le gain pour les finances publiques lié aux baisses de crédits de la mission est largement symbolique. L’article 3 quinquies, qui étend le bénéfice de la demi-part fiscale des veuves d’anciens combattants, représentait un coût de 130 millions d’euros lorsqu’il abaissait la condition d’âge de décès de l’époux à 60 ans. Or, en votant des amendements identiques du Gouvernement, de la commission des affaires sociales et de plusieurs de nos collègues, nous avons fait le choix de supprimer totalement la condition d’âge de décès de l’époux ancien combattant. Quel est le chiffrage du dispositif qui résulte de l’adoption de ces amendements, madame la secrétaire d’État ?

La baisse de 160 millions d’euros en crédits sera donc compensée par le renforcement des dépenses fiscales sur la mission. Là encore, il s’agit d’exprimer notre respect et notre reconnaissance à l’égard de valeurs hautement symboliques pour l’ensemble du monde combattant.

Ainsi, s’il est possible de regretter la revalorisation toujours inférieure à l’inflation des rentes viagères, la baisse globale des crédits ne doit pas non plus cacher les efforts budgétaires consentis pour les harkis et autres rapatriés, ainsi que ceux qui sont consentis pour les veuves d’anciens combattants.

En tant qu’élus, nous sommes tous dévoués et impliqués dans nos territoires pour œuvrer en faveur du devoir de mémoire, ce qui passe par une coopération avec l’éducation nationale. Jocelyne Guidez préside le groupe d’études Monde combattant et mémoire. Là encore, c’est une marque de reconnaissance et de respect pour l’ensemble des associations de mémoire, véritables porte-drapeaux qui s’engagent fortement pour la mémoire, en cherchant notamment à impliquer les jeunes.

Je vous invite donc, mes chers collègues, à voter les crédits de la mission. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et RDPI.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure pour avis.

Mme Jocelyne Guidez, rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, malgré la baisse de 7,4 % des crédits de la mission, en raison d’une diminution des bénéficiaires des prestations servies aux anciens combattants, le budget prévu pour 2023 permettra de revaloriser de 3,5 % les pensions militaires d’invalidité et la retraite du combattant.

Après une revalorisation exceptionnelle de 7 % en 2022, je salue la décision du Gouvernement de répercuter dès 2023 la hausse de la rémunération des fonctionnaires sur le point de pension militaire d’invalidité (PMI), alors que les règles de calcul auraient conduit à n’en tenir compte qu’en 2024. Compte tenu de l’inflation, cette revalorisation, qui représentera un coût de 41 millions d’euros, demeure toutefois insuffisante pour soutenir les pensionnés. Nous devrons donc être attentifs à ce que les pensions servies aux anciens combattants ne subissent pas le même décrochage que celui qui a été constaté entre 2005 et 2021. Sur ce point, je vous fais confiance, madame la secrétaire d’État.

Je salue l’adoption, en première partie du projet de loi de finances, de l’amendement de la commission des affaires sociales tendant à accorder une demi-part fiscale aux conjoints survivants de plus de 74 ans, quel que soit l’âge du décès de l’ancien combattant. Cette mesure de justice renforcera le soutien de la Nation aux familles d’anciens combattants. Je sais aussi que cela a été votre combat, madame la secrétaire d’État.

Je m’interroge toutefois sur l’âge à partir duquel le conjoint survivant d’un ancien combattant peut bénéficier de cette demi-part. Le fait qu’il doive attendre l’âge de 74 ans ne me paraît pas justifié, cet âge ne correspondant à aucune autre ouverture de droit. Il pourrait être envisagé d’accorder cette demi-part dès 67 ans, soit l’âge du taux plein pour la retraite. Je sais que cela a un coût, mais il faudra y revenir. Je n’ai pas déposé d’amendement, car je pense qu’une décision préalable s’impose. Nous devrons donc poursuivre nos travaux sur ce dispositif, afin d’en évaluer les effets et de le rendre, à terme, plus juste pour l’ensemble des familles de combattants.

Soulignons que l’augmentation de 3,8 millions d’euros de la subvention versée à l’ONACVG permettra de financer la pérennisation des maisons Athos, qui offrent un accompagnement très utile aux blessés psychiques et à leurs familles. Sur ce point, je tiens à remercier le Gouvernement, puisqu’une maison supplémentaire va être construite.

Le maintien à 25 millions d’euros de la dotation d’action sociale de l’ONACVG, malgré la baisse du nombre d’anciens combattants, permettra à l’Office de soutenir ses ressortissants en difficulté et d’accompagner les pupilles de la Nation et les victimes du terrorisme.

Les moyens consacrés aux liens entre les armées et la jeunesse et à la mémoire progresseront pour assurer le financement des journées de défense et de citoyenneté, l’entretien de sépultures de guerre et de hauts lieux de la mémoire nationale, ainsi que de commémorations liées au quatre-vingtième anniversaire de la Seconde Guerre mondiale.

Toutefois, les moyens alloués à la jeunesse et à la mémoire devraient progresser bien plus significativement.

Il me paraît nécessaire que le budget consacré au monde combattant soit à terme sanctuarisé et que les actions en faveur du lien entre les armées et la Nation et en faveur de la mémoire combattante soient renforcées.

Les nouvelles générations de combattants, dont les besoins évoluent, devront être accompagnées par l’ONACVG. En outre, l’Office pourrait renforcer les liens entre les armées et la Nation, en valorisant l’engagement citoyen en faveur du monde combattant et en soutenant davantage la transmission de la mémoire. Notre cohésion nationale en dépend, alors que les témoins des grands conflits qui ont marqué notre pays disparaissent progressivement.

Au nom de la commission des affaires sociales, je vous invite à adopter les crédits de la mission. Je salue mon collègue de la commission des finances Marc Laménie, avec lequel je travaille en bonne intelligence sur ces sujets. Madame la secrétaire d’État, je salue également nos discussions et échanges. C’est ensemble que nous irons beaucoup plus loin. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, Les Républicains et SER.)

Mme la présidente. Dans la suite de notre discussion, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque unité de discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.

La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, à l’heure d’examiner le budget relatif à la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » et, plus encore, à l’heure où la guerre est aux portes de l’Europe, je veux rendre hommage à ces femmes et ces hommes qui se sont battus pour que nous soyons libres.

Si les derniers résultats électoraux inquiètent, le groupe CRCE fait le vœu de construire une société progressiste et humaniste.

Mes chers collègues, alors que les anciens combattants étaient de nouveau dotés d’une ministre déléguée, le Gouvernement a décidé de redonner la prérogative des anciens combattants à un secrétariat d’État. Si cela peut apparaître comme un détail, nous sommes convaincus qu’un ministère en tant que tel demeurera utile tant que les contentieux ne seront pas totalement réglés ; c’est le souhait des associations d’anciens combattants.

À la lecture du rapport budgétaire relatif à cette mission, nous constatons une nouvelle baisse du budget : elle atteint 154 millions d’euros pour 2023, soit une diminution de 7,4 % par rapport à 2022. Une fois encore, cette baisse de crédits est justifiée par la diminution naturelle du nombre de bénéficiaires des pensions militaires d’invalidité, de la retraite du combattant.

Madame la secrétaire d’État, je souhaite me faire le porte-voix des associations pour vous dire qu’il suffirait de garder un budget constant d’une année sur l’autre pour satisfaire pleinement les revendications du monde combattant.

Toutefois, je veux noter deux avancées majeures.

La première avancée concerne les harkis, avec une augmentation de 3 millions d’euros de leur dotation portant sur le droit à réparation du fait des préjudices subis en raison de l’indignité de leurs conditions d’accueil et de vie dans certaines structures sur le territoire français.

La seconde était certainement la plus attendue. Je veux bien entendu parler de l’octroi du bénéfice de la demi-part fiscale pour les veuves, quel que soit l’âge de décès de l’époux. Il s’agissait d’une discrimination par l’âge contraire à nos principes constitutionnels.

Nous nous félicitons donc de ces deux mesures.

En revanche, au rayon des insuffisances et manques, plusieurs constats s’imposent.

La valeur du point de PMI s’établira au 1er janvier 2023 à 15,58 euros contre 15,05 euros en 2022. En tout état de cause, cette augmentation de seulement 3,52 % est largement inférieure à l’évolution des prix à la consommation. La retraite du combattant basée sur 52 points passera donc à 807,48 euros, contre 782,60 euros, soit 25,48 euros de plus par an.

Dans ces conditions, un rattrapage du retard constaté sur la valeur du point de PMI serait une bonne mesure. Comme vous le savez, mes chers collègues, la valeur du point de PMI est indexée non sur l’inflation, mais sur l’indice d’ensemble des traitements bruts de la fonction publique de l’État. Sans même revenir sur le passé et l’érosion du pouvoir d’achat des anciens combattants résultant d’une inflation et d’un gel quasi total de l’indice entre 2012 et 2018, la situation apparaît préoccupante.

Madame la secrétaire d’État, il est impératif de rattraper le retard rapidement, y compris en mettant sur pied un calendrier de rattrapage. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE et SER, ainsi quau banc des commissions.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Brigitte Devésa.

Mme Brigitte Devésa. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, permettez-moi de saluer le travail de nos rapporteurs, Marc Laménie, rapporteur spécial de la commission des finances, et Jocelyne Guidez, rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales, dont je souligne tout particulièrement le sérieux et la qualité d’analyse.

Mes chers collègues, nous avons la lourde tâche, dans le cadre d’un projet de loi de finances, d’exprimer par des mesures fiscales et l’allocation de moyens, notre reconnaissance de l’inestimable sacrifice du sang versé au service de la patrie et à l’égard de celles et de ceux qui, victimes ou persécutés, doivent être indemnisés.

Disons-le, la trajectoire proposée par le Gouvernement et par vous-même, madame la secrétaire d’État, est acceptable, voire encourageante.

Ce que nous disent les chiffres, c’est que le nombre de bénéficiaires des pensions militaires d’invalidité et des prestations octroyées aux anciens combattants est en baisse du fait de l’érosion démographique, parce que la guerre, les guerres françaises, s’éloignent. Mais le devoir de mémoire n’en est que plus urgent.

Ce que nous disent les Français et les associations, c’est que le devoir de mémoire ne doit oublier personne et être le plus juste possible, y compris dans les moyens alloués.

Aussi, nous observons que la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » est à un point de bascule dont nous devons avoir conscience.

Les demandes de financement de cette mission seront étendues d’année en année, alors que, paradoxalement, les guerres s’éloignent. Cette évolution s’explique par l’élargissement du champ de la reconnaissance qu’une nation doit à ses combattants, à leurs familles et aux victimes, et des moyens que l’État doit mettre en place pour instaurer du lien entre son armée et son peuple.

De plus, l’évolution des définitions que nous déterminerons – par exemple, ce que signifie « être victime » ou être « mort pour la France » –, celle du champ d’application de ce que nous appelons la mémoire ou les mémoires ou encore celle du nombre de jours fériés auront des conséquences notables sur les budgets à venir de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation ».

Pour la première fois cette année, nous décidons que le parcours de soins au sein du service de santé des armées des maisons Athos prendra aussi en compte les blessures psychiques, y compris en accompagnant les familles de militaires souffrant de ces troubles : nous faisons évoluer la définition et la reconnaissance de ce qu’est une blessure.

De même, la reconnaissance des préjudices subis par les harkis, supplétifs et rapatriés témoigne du fait que l’État prend en compte ces questions de manière de plus en plus précise. Je salue d’ailleurs l’action du Gouvernement à ce sujet, car, en un an, les moyens de la politique de reconnaissance et de réparation en faveur des harkis ont presque été quadruplés. Le montant moyen attribué par bénéficiaire est de 8 784 euros. Que de chemin parcouru, madame la secrétaire d’État !

L’Office national des anciens combattants et victimes de guerre voit le montant de sa subvention pour charges de service public augmenter de 3,8 millions d’euros pour 2023. Il pourra ainsi soutenir le travail de la Commission nationale indépendante de reconnaissance et de réparation des préjudices subis par les harkis, mais aussi appliquer la revalorisation du point d’indice de la fonction publique.

Il voit aussi sa dotation d’action sociale de 25 millions d’euros préservée. Celle-ci est essentielle, afin de verser des aides financières aux anciens combattants, à leurs conjoints survivants, mais aussi de soutenir les pupilles de la Nation. L’Office doit avoir les moyens d’élargir et de développer ses actions destinées à promouvoir les liens entre armée et Nation en valorisant l’engagement citoyen auprès de nos armées.

Je salue les augmentations du budget relatives au lien entre l’armée et la jeunesse, par le soutien au service militaire volontaire, le financement de la Journée défense et citoyenneté (JDC), de la promotion du lien entre armée et jeunesse, des classes de défense et des cadets de la défense. Les crédits alloués progressent de 4 % en 2023 et dépassent les 24 millions d’euros.

Les crédits de la politique mémorielle progressent de 17,2 % par rapport à 2022. Leur montant était alors de 17,85 millions d’euros, en légère hausse déjà, mais insuffisant. En ce domaine, quels crédits le Gouvernement aurait-il demandés pour 2023 s’il n’y avait pas l’inflation ?

Les crédits en faveur des anciens combattants, les pensions militaires d’invalidité et les retraites de combattants constituent l’essentiel du budget alloué à la mission.

Le nombre des bénéficiaires de la retraite du combattant, âgés de 85 ans en moyenne, devrait baisser de 7 % en 2023. Cette diminution permet notamment à l’État de financer différemment les pensions militaires d’invalidité et de revoir sa politique en matière d’octroi des demi-parts.

Nous devons reconnaître que le Gouvernement a fait deux choix essentiels. D’abord, il a répercuté la hausse de 3,5 % du point d’indice de la fonction publique en juillet 2022 sur le point PMI de janvier 2023, et non 2024. Ces 41 millions d’euros supplémentaires permettront de mieux soutenir les anciens combattants face à la hausse des prix. Ensuite, il a octroyé une demi-part supplémentaire pour le calcul de l’impôt sur le revenu. Je remercie la rapporteure pour avis Jocelyne Guidez d’avoir déposé un amendement visant à faire en sorte que cette demi-part fiscale supplémentaire soit accordée aux conjoints survivants, quel que soit leur âge. Je soutiens une telle évolution.

Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2023, le groupe Union Centriste votera pour l’adoption des crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation ». (Applaudissements sur les travées des groupes UC et RDPI, ainsi quau banc des commissions.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Delattre.

Mme Nathalie Delattre. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, chaque année, une réalité s’impose : celle de la disparition des anciennes générations du feu.

Corrélativement, les crédits de paiement demandés en 2023 pour la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » sont en baisse de 7,4 %.

S’il est normal que le budget de l’État accompagne la diminution du nombre de bénéficiaires des pensions et prestations prévues pour les anciens combattants, nous devons veiller à ce qu’il continue à proposer un haut niveau de réparation, corollaire de notre haut niveau de reconnaissance. Les dispositifs de cette mission relèvent non pas de l’ordre du soutien, mais de celui du devoir, un devoir moral intangible envers tous ceux et toutes celles qui ont consenti des sacrifices au profit du destin collectif de la France.

Je suis donc convaincue que les marges budgétaires dégagées mécaniquement par le paramètre démographique doivent être l’occasion de renforcer et de compléter les mesures existantes.

Dans cette perspective, je me réjouis des avancées contenues dans le projet de loi de finances pour 2023.

Je pense notamment à la revalorisation des pensions militaires d’invalidité au 1er janvier 2023. Le calcul de la valeur du point PMI, effectué en fonction de l’indice d’ensemble des traitements de la fonction publique d’État et mis en œuvre en 2005 se révèle non satisfaisant en période de forte inflation. Je salue donc la décision prise par le Gouvernement de répercuter dès le 1er janvier 2023 la revalorisation de droit commun de 4 % du point d’indice. Nous devrons toutefois rester vigilants face à un niveau d’inflation sans cesse révisé à la hausse pour l’année prochaine.

Dans ce contexte, l’extension de l’octroi d’une demi-part fiscale aux conjoints survivants d’anciens combattants sera également de nature à soutenir le pouvoir d’achat de ses bénéficiaires. Lors de l’examen des articles de la première partie, nous avons décidé ici d’améliorer le dispositif proposé par nos collègues députés. La suppression de la condition d’âge de décès de l’époux ancien combattant pour le bénéfice par sa veuve d’une demi-part fiscale à ses 74 ans est pour nous une mesure d’équité, qui était très attendue par le monde combattant. Nous souhaitons qu’elle soit conservée par le Gouvernement.

La mission met également en œuvre les dispositifs issus de la loi du 23 février 2022, par laquelle la France reconnaît les conditions d’accueil et de vie indignes des harkis et de leurs familles, rapatriés d’Algérie après les accords d’Évian de 1962. Mais la question reste ouverte s’agissant des personnes qui ont vécu de façon tout aussi indigne en dehors des camps et des hameaux de forestage. Je compte sur le premier rapport de la commission dite Bockel, attendu au printemps 2023, pour nous apporter un éclairage sur la justesse des critères retenus dans cette loi.

Au sein de la mission, les moyens du programme 158, entièrement consacré à l’indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la Seconde Guerre mondiale, accompagnent la baisse tendancielle du nombre de bénéficiaires. C’est normal, mais, aux côtés de la politique de réparation, il est fondamental de poursuivre les actions en faveur de la mémoire. Je suis fière d’avoir représenté le Sénat à Auschwitz le 7 novembre dernier, lors de la cérémonie d’hommage aux victimes de la tragique nuit de Cristal, qui a réuni des délégations parlementaires du monde entier.

La résurgence d’un antisémitisme banalisé et dangereux doit nous conduire à être particulièrement soucieux du devoir de transmission aux jeunes générations, notamment sur ce qu’ont représenté la déportation et les camps de la mort : l’ignominie absolue.

Au fil du temps, les témoins ou les ayants droit des grands conflits disparaissent. Il nous appartient donc de conforter la politique de mémoire. Malheureusement, celle-ci concentre seulement 1,1 % des ressources du programme 169.

De « Ceux de 14 », comme les avait qualifiés Maurice Genevois, à nos soldats en opérations extérieures (Opex), sans oublier nos valeureux combattants de l’ombre, que l’année 2023 mettra à l’honneur autour de la figure de Jean Moulin, aucune des victimes de la guerre ne doit être oubliée dans le champ de nos actions. La mémoire doit s’entretenir.

Le groupe RDSE votera les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE, ainsi quau banc des commissions.)

Mme la présidente. La parole est à M. Édouard Courtial. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Édouard Courtial. « Celui qui ne sait pas d’où il vient ne peut savoir où il va, car il ne sait pas où il est. En ce sens, le passé est la rampe de lancement vers l’avenir. » Cette citation résume assez bien la mission budgétaire que nous examinons à présent, mais aussi, et surtout les enjeux qui la sous-tendent.

Plus que jamais, à l’heure où ce qui nous rassemble semble se réduire à une portion congrue tant les tensions qui agitent notre société oubliant ses repères sont importantes et diverses, faire vivre notre mémoire collective revêt une importance toute particulière. Se souvenir de notre histoire, avec lucidité, mais sans fausse honte, avec orgueil, mais sans méchanceté, se souvenir de ceux qui ont combattu, parfois jusqu’au sacrifice ultime, est fondamental. Nous le voyons dans les communes de France : commémoration après commémoration, cette flamme doit être entretenue et transmise aux générations suivantes.

Si la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » voit ses crédits constamment baisser, l’année 2023 se démarque par l’ampleur de la baisse. Comme l’ont rappelé les rapporteurs, deux caps symboliques sont franchis cette année : les crédits de la mission sont désormais inférieurs à 2 milliards d’euros et, pour la première fois, le montant consacré par l’État à la retraite du combattant est inférieur à celui qui est consacré à la demi-part fiscale des anciens combattants et de leurs veuves, principal crédit d’impôt en faveur des anciens combattants. Je salue ici l’amendement de la rapporteure pour avis, adopté en première partie, qui élargit encore le dispositif.

Ainsi, les crédits affectés aux pensions viagères, la retraite du combattant et les PMI poursuivent leur inexorable baisse, encore renforcée par l’inflation. La revalorisation exceptionnelle au 1er janvier 2022 du point PMI n’a pas atteint son objectif, qui était de rattraper l’effet de l’inflation entre 2018 et 2021, à cause d’une hypothèse d’inflation trop faible pour 2021, d’autant moins que le point d’indice, indexé sur les rémunérations publiques, décroche face à l’inflation depuis 2012.

De même, la revalorisation de droit commun de 4 %, qui doit avoir lieu au 1er janvier 2023, est inférieure à l’inflation de l’année 2022.

Les crédits des autres actions sont au contraire en hausse, surtout, mais pas uniquement, en raison de l’inflation. C’est le cas du budget de la JDC, en légère hausse de 1 million d’euros, car la cohorte 2023 est plus nombreuse que les précédentes. Bien que l’année 2023 marque un retour à la normale pour le fonctionnement de la JDC, le coût moyen par jeune devrait rester stable par rapport à 2022. Les crédits du service militaire volontaire sont stables. Dans un cas comme dans l’autre, ces augmentations sont peu significatives, car plus des trois quarts des crédits effectivement utilisés pour ces dispositifs n’apparaissent pas dans cette mission, puisqu’ils relèvent de la mission « Défense », du Fonds social européen et des budgets des collectivités territoriales.

Pour résumer, les dotations de la mission sont installées sur une trajectoire fortement descendante. Le PLF pour 2023, bien qu’il comprenne quelques revalorisations liées à l’inflation, n’inverse pas la tendance. Celles-ci, en effet, ne font que limiter l’incidence sur le budget de la réduction de la population des bénéficiaires des rentes viagères, réduction inexorable au vu de l’âge très avancé d’une majorité d’entre eux. On le voit aussi bien pour les actions relevant du programme 169 que pour celles qui relèvent du programme 158. Les rapporteurs ont donc appelé à l’adoption des crédits de la mission, ce à quoi mon groupe souscrit.

Qu’il me soit permis de rappeler pour autant que nous examinons les crédits de cette mission à quelques encablures du bruit des bombes et des cris qui résonnent en Ukraine, sur un continent ayant déjà connu tant de guerres et de souffrances. Cela appelle deux observations.

L’un des enseignements de la guerre en Ukraine est l’importance fondamentale des forces morales de la Nation. Une réflexion est engagée dans le cadre de la prochaine loi de programmation militaire sur le rôle et le redimensionnement des réserves. Il serait intéressant qu’en parallèle, notamment dans le cadre de la généralisation annoncée du service national universel, une réflexion plus poussée soit menée sur les moyens et les outils les plus efficaces pour ancrer et renforcer le lien entre les armées et la jeunesse. Force est de reconnaître en effet qu’il fait encore trop largement défaut, alors qu’il est la première brique du lien entre les armées et la Nation, dont on redécouvre aujourd’hui le caractère fondamental. La baisse tendancielle des crédits de la mission, causée par la démographie déclinante des bénéficiaires des différentes allocations de reconnaissance de la Nation, pourrait permettre de dégager des marges de manœuvre supplémentaires à cette fin.

L’autre enseignement est la faiblesse du nombre d’armes opérationnelles, et des munitions correspondantes, dont dispose l’armée française. Nous l’avons vu avec l’envoi des canons Caesar. Or son budget, dont l’importance est justifiée par l’ampleur des menaces, est souvent entamé par des dépenses qui ne devraient pas lui être directement imputées, comme celles qui sont afférentes à la JDC ou au service militaire volontaire. Cet arrangement budgétaire m’apparaît néfaste d’abord en termes de lisibilité, mais aussi, et surtout, car ces crédits sont indispensables à notre armée. Par souci de clarté et de sincérité sur les moyens effectivement attribués à la défense nationale, les crédits mobilisés pour ces deux dispositifs, s’ils restaient opérés par le ministère des armées, devraient relever intégralement de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation ».

Ainsi, renforcer les moyens et les outils consacrés à la jeunesse et à la politique de mémoire grâce des crédits stables, et, surtout, sortir certaines dépenses du budget de la mission « Défense » me semblent être des pistes à explorer. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi quau banc des commissions.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin.

Mme Vanina Paoli-Gagin. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, reconnaissance de la Nation en faveur du monde combattant, transmission de la mémoire, renforcement du lien entre l’armée et la Nation, indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie commis pendant la Seconde Guerre mondiale : les objectifs de cette mission nous obligent, et l’examen de ces crédits nous invite à une certaine solennité.

D’ailleurs, faire la liste des programmes de cette mission ne suffit pas en dire toute l’importance, car l’essentiel n’est pas là. L’essentiel, c’est le soutien que l’État apporte à tous les hommes et toutes les femmes qui sont prêts à donner leur vie pour la Nation.

Les crédits de cette mission financent principalement des pensions et des prestations destinées aux anciens combattants. Ils évoluent donc en fonction du nombre de bénéficiaires. Parce que le nombre des anciens combattants diminue pour des raisons démographiques, ces crédits baissent encore cette année, de plus de 7 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2022, et s’établissent à 1,9 milliard d’euros pour 2023.

Je tiens néanmoins à saluer un certain nombre d’avancées.

La dotation créée par la loi de février 2022 portant reconnaissance de la Nation envers les harkis et les autres personnes rapatriées d’Algérie est portée à 60 millions d’euros, ce qui constitue une augmentation de plus de 33 % par rapport à 2022.

Les crédits consacrés à la politique de la mémoire augmentent de 3 millions d’euros. Cette hausse permettra de financer des travaux de restauration nécessaires pour préserver notre patrimoine mémoriel. Je me réjouis de cet effort important : conserver ces lieux de transmission en bel état, c’est soigner la mémoire que nous livrons aux générations futures.

Je me félicite également la progression des moyens consacrés aux opérateurs accompagnant les combattants et les blessés de guerre. Cette progression est, certes, légère, mais elle est réelle.

Pour l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre, cette augmentation est la bienvenue. Elle permettra de supporter la revalorisation du point d’indice de la fonction publique, d’assurer le fonctionnement de la Commission nationale indépendante de reconnaissance et de réparation des préjudices subis par les harkis, ainsi que de financer la pérennisation des maisons Athos, un dispositif expérimental de grande valeur qui procure un soutien aux blessés psychologiques désarmés. Je me réjouis que leur accompagnement soit ainsi renforcé.

Sur l’ensemble des crédits de la mission, seuls ceux qui sont liés aux allocations viagères connaissent une baisse en 2023. Mais cette baisse est, là encore, principalement liée à la démographie des bénéficiaires. Pour le reste, tous les crédits des autres actions sont en hausse. Aussi ce budget nous semble-t-il répondre aux attentes des anciens combattants. Le groupe Les Indépendants – République et Territoires votera donc ces crédits. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi quau banc des commissions.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.

Mme Raymonde Poncet Monge. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » voit ses crédits diminuer, comme chaque année, mais plus que chaque année. Cela s’explique bien entendu par la diminution du nombre de bénéficiaires. Mais, justement, il faudrait légèrement accroître leur nombre, car certains harkis attendent toujours de bénéficier de ces crédits : vingt-deux supplétifs de statut civil de droit commun attendent toujours une aide, de 4 150 euros seulement !

Cette question se pose chaque année. Et, chaque année, le Gouvernement avance un certain nombre d’arguments contestables. La mesure ne serait pas applicable faute de base juridique, impossible à prendre, car rétroactive, ou bien parce que les avis du Conseil d’État et de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) seraient défavorables.

Pourtant, les amendements parlementaires fournissent une base juridique à cette extension. Pourtant, la jurisprudence du Conseil d’État relative à la désignation explicite ou implicite des bénéficiaires d’une mesure adoptée par le Parlement est en leur faveur. Pourtant enfin, le Conseil d’État et la CEDH n’ont pas rendu de tels jugements.

Nous parlons de quelques dizaines de milliers d’euros… D’ailleurs, ce que demandent ces hommes, ce n’est pas une aumône ou le suivi social que le ministère des armées met en place ; c’est la reconnaissance.

Nous remercions donc le rapporteur spécial Marc Laménie d’avoir déposé un amendement en ce sens. Pour lui donner plus de force, nous nous sommes permis d’en déposer un identique. Nous invitons ainsi le Gouvernement à lever le gage et à conserver l’amendement lors de la nouvelle lecture à l’Assemblée nationale. Sinon, ces personnes vont peu à peu disparaître sans jamais avoir été reconnues par l’État.

En 2019, le Parlement a élargi aux veuves de plus de 74 ans le bénéfice d’une demi-part fiscale supplémentaire, à la condition que leur mari décédé soit lui-même titulaire de la carte du combattant ou d’une retraite du combattant. Quid des veuves de moins de 74 ans ? L’effet de seuil crée une rupture d’égalité malvenue. Le Sénat l’a corrigée par amendement lors de l’examen de la première partie. Nous nous en félicitons.

Là encore, nous invitons le Gouvernement à conserver cet ajout lors du débat à l’Assemblée nationale.

Nous nous interrogeons aussi sur les crédits de la JDC, qui n’augmentent que de 1 million d’euros, alors que l’année 2023 doit marquer le retour à la normale après trois années de pandémie. La dépense par participant devrait rester la même qu’en 2022, où la JDC a le plus souvent été réduite de moitié. Comment, avec un tel budget, organiser correctement cette journée, où les jeunes Françaises et Français doivent découvrir les enjeux géopolitiques qui conduisent la France à développer un appareil de défense, apprendre à connaître les caractéristiques de ce dernier, effectuer des tests de langue française, apprendre les gestes de premiers secours et suivre une formation de sécurité routière ?

Alors que les derniers poilus se sont éteints, tout comme les derniers Compagnons de la Libération, la question de la transmission de la mémoire des guerres mondiales et, plus largement, de la mémoire du XXe siècle devient de plus en plus prégnante. L’État ne remplacera évidemment jamais la transmission qui pouvait s’opérer par les témoins directs du siècle passé. Néanmoins, il est temps d’envisager une nouvelle ambition en matière de politique mémorielle, tournée vers les jeunes générations.

Le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires votera les crédits de la mission, modifiés, je l’espère, par l’amendement de notre rapporteur spécial. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST, ainsi quau banc des commissions.)

Mme la présidente. La parole est à M. André Gattolin. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. André Gattolin. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, à l’heure où la guerre fait rage à l’est de l’Europe, dans un mélange de nouvelles technologies et de guerre de position qui nous rappelle les pires moments de la Première Guerre mondiale, à l’heure où d’aucuns s’interrogent sur la nécessité de sacrifier un peu des dividendes tirés de soixante-dix années de paix pour défendre notre liberté et nos valeurs fondatrices, à l’heure où les derniers combattants de la Seconde Guerre mondiale s’éteignent comme, avant eux, leurs aînés de la Première Guerre mondiale, le travail de mémoire n’est décidément pas un luxe. Notre société est en effet emportée par l’immédiateté et l’hypertrophie du présent, au détriment du regard méthodique sur notre passé et de la volonté de se projeter dans un futur qu’on tend à juger trop incertain.

Le travail de mémoire ne se résume pas aux commémorations le temps d’une journée avant de retourner dès le lendemain aux affaires courantes. Quand les repères s’affaiblissent et l’avenir paraît menaçant, il est indispensable de savoir d’où nous venons pour savoir où nous voulons aller ensemble.

Nous saluons, dans le cadre de ce débat budgétaire, l’augmentation de 20 % des montants qui seront consacrés à la mémoire l’an prochain. Les années 2023 et 2024 marqueront en effet des anniversaires particulièrement importants. Cet effort budgétaire est bienvenu.

Puisque nous parlons de la Seconde Guerre mondiale, je veux ici vous remercier, madame la secrétaire d’État, de votre présence le 19 août dernier à Dieppe, à l’occasion du 80e anniversaire du raid allié de 1942, qui vit malheureusement la mort et la déportation de milliers de jeunes Canadiens, souvent engagés volontaires et venus sur notre continent, comme déjà leurs aînés en 1914, pour défendre notre liberté et nos valeurs communes.

Le prix du sang payé par nos concitoyens ne doit jamais être oublié. Il ne faut pas non plus oublier le sang versé par nos alliés et tous les peuples du monde entier qui se sont battus à nos côtés, parfois en lieu et place de nos propres troupes. C’est avec ces briques mémorielles du passé que nous solidifions au long cours nos relations avec des nations qui ont si activement contribué à notre histoire et à notre liberté.

J’étais à Ottawa au début de ce mois pour assister à la projection, au Musée canadien de la guerre, du documentaire de Laurent Mathieu sur la mémoire du raid de Dieppe. Il s’agit d’un travail exigeant, très apprécié de nos amis canadiens, et j’ai pu mesurer combien ce type d’engagement mémoriel, cette reconnaissance collective d’un événement trop oublié, concourt à la qualité des relations entre nos deux pays. Le travail de mémoire consolide le présent et devient ainsi un travail commun d’échafaudage de l’avenir.

À ce sujet, je formulerai deux vœux, madame la secrétaire d’État. Le 17 mai 2024, cela fera quatre-vingts ans que Félix Éboué, troisième des Compagnons de la Libération, nous aura quittés. Panthéonisé depuis 1949, il demeure trop méconnu par nombre de nos concitoyens. Même la place qui porte son nom, ici à Paris, continue, avec la complicité involontaire de la RATP, à être couramment appelée place Daumesnil. Faire connaître à nouveau l’engagement exceptionnel de Félix Éboué dans la France Libre serait, je le crois, reconnaître aussi l’apport immarcescible de la Guyane à notre pays. (Mme Victoire Jasmin applaudit.)

Je pense aussi à la diaspora indienne, discrète, qui compte quelque 200 000 personnes en métropole et bien davantage dans nos territoires d’outre-mer. Durant la Première Guerre mondiale, ils furent plus d’un million à s’engager aux côtés des Alliés et plus de 120 000 combattirent dans l’est de la France. Là encore, leurs descendants se battent pour leur mémoire. Il y va de notre honneur de ne pas les oublier.

Le groupe RDPI votera les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi quau banc des commissions.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Victoire Jasmin.

Mme Victoire Jasmin. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, c’est avec un immense respect pour ceux qui se sont battus ou qui se battent encore pour la France que j’interviens au nom du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain sur les crédits de la mission interministérielle « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation ».

Cette mission budgétaire se veut la traduction financière de la solidarité et de la reconnaissance de la Nation envers les militaires et les anciens combattants en raison de leurs engagements ou de leurs sacrifices. Passerelle entre la société civile et le monde combattant, elle est également l’occasion de créer des liens intergénérationnels fondamentaux pour le devoir de mémoire et la cohésion sociale.

Cette mission s’articule depuis le PLF pour 2022 autour de deux programmes complémentaires : le programme 169, « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation », et le programme 158, « Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la Seconde Guerre mondiale ». Elle est marquée par une réduction tendancielle des crédits, liée à la diminution démographique du nombre d’anciens combattants.

Cependant, pour l’année 2023, la baisse est d’une ampleur sans précédent. En effet, les crédits passeront en dessous de la barre des 2 milliards d’euros, avec une diminution de 161 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 154 millions d’euros en crédits de paiement. Ces baisses ont lieu malgré une revalorisation de 4 % du point PMI au 1er janvier 2023.

Si la diminution des crédits de la mission peut se justifier par le cycle naturel de la démographie, en ces temps de crises, il aurait été souhaitable que les marges de manœuvre ainsi libérées bénéficient à des mesures de revalorisation des pensions, notamment pour compenser l’inflation. De fait, année après année, les crédits consentis aux anciens combattants ne cessent de s’amoindrir.

Certaines avancées sont toutefois à saluer dans le cadre de la discussion budgétaire.

Je pense par exemple à la décision du Gouvernement de répercuter dès le 1er janvier 2023 la revalorisation du point d’indice de la fonction publique sur celle du point PMI, afin d’atténuer partiellement les effets de l’inflation pour les anciens combattants.

Autre point positif, la pérennisation des maisons Athos, pour renforcer l’accompagnement des militaires blessés psychologiquement et de leurs familles, en complément des autres programmes de réhabilitation psychosociale.

Mais la bonne nouvelle est surtout le vote de la commission des affaires sociales pour l’octroi d’une demi-part fiscale supplémentaire aux conjoints survivants de plus de 74 ans, quel que soit l’âge de décès de l’ancien combattant. Grâce à notre collègue Jocelyne Guidez, rapporteure pour avis, la commission a reconnu à l’unanimité qu’il était nécessaire de voter cette mesure.

De même, nous saluons l’article 41, qui lève le critère temporel auquel est soumis le droit à pension des victimes de terrorisme. Ce droit n’est plus lié à la date de l’acte de terrorisme dont ces personnes ont été victimes.

À ce titre, je salue une nouvelle fois le caporal Loïc Liber, seule victime survivante du terroriste Mohammed Merah, aujourd’hui tétraplégique et encore aux Invalides.

En dépit de ces avancées, le monde combattant formule, en raison de la crise sociale et financière que nous subissons actuellement, des demandes de revalorisation du pouvoir d’achat. Madame la secrétaire d’État, ces requêtes sont légitimes, et j’espère sincèrement que vous allez faire un geste en ce sens.

Je pense notamment à une proposition dont il faudrait à tout le moins étudier la faisabilité : que le bénéfice de la demi-part fiscale soit ouvert dès 65 ans au combattant ou à sa veuve.

L’évolution de l’appellation « retraite du combattant » en « allocation de reconnaissance du combattant » est également souhaitée.

La valeur du point PMI reste nettement insuffisante, au regard des préconisations de la commission tripartite, pour rattraper le retard accumulé et compenser le niveau d’inflation de 2022. Les élus de notre groupe souhaitent avoir l’assurance que ladite commission sera de nouveau appelée à se réunir au premier trimestre 2023 pour étudier cette question.

En parallèle, le nombre de points de retraite du combattant stagne, depuis 2017, à 52. Je tiens à rappeler que le passage de 48 à 50, puis à 52 points est l’une des mesures fortes des gouvernements de François Hollande. Il serait souhaitable que le nombre de points soit porté à 60 au cours de cette mandature, à raison de deux points par an dès 2024.

Je conclus mon propos en insistant sur d’autres revendications, plus anciennes, qui auraient tout lieu d’être satisfaites. M. Gattolin vient d’y faire allusion : il s’agit de notre devoir de mémoire envers les combattants originaires des régions d’outre-mer, dont de nombreux jeunes s’engagent encore dans nos armées. (M. André Gattolin acquiesce.)

Mes chers collègues, nous devons notamment saluer tous les dissidents d’outre-mer qui ont rejoint les Forces françaises libres (FFL) du général de Gaulle. (Mme la secrétaire dÉtat acquiesce.) Ces combattants ont été mis en lumière par la cinéaste Euzhan Palcy, qui vient d’ailleurs de recevoir un Oscar. Elle est récompensée aux États-Unis, alors que, pour l’heure, la France ignore encore l’histoire de ces dissidents.

Je tiens à mettre en lumière le travail d’une autre Martiniquaise, Arlette Pacquit, qui a consacré un film à la guerre d’Indochine et à tous ceux qui y ont pris part, y compris les plus méconnus ; ils ont beaucoup souffert.

Madame la secrétaire d’État, j’espère que vous allez contribuer à faire connaître cette histoire, la vraie histoire.

En espérant que ces diverses pistes de réflexion seront prochainement étudiées par le Gouvernement, les élus du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain émettent un avis favorable sur l’adoption des crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » tels qu’ils figurent dans le projet de loi de finances pour 2023 ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE, ainsi que sur des travées du groupe RDPI.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Patricia Mirallès, secrétaire dÉtat auprès du ministre des armées, chargée des anciens combattants et de la mémoire. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, c’est le premier budget que j’ai l’honneur de présenter et de défendre au Parlement ; je le fais avec émotion et fierté.

Ce budget, celui du monde combattant, de la mémoire et du lien entre les armées et la Nation, est celui de la reconnaissance et de la transmission : reconnaissance de l’engagement au service de la France, des Françaises et des Français ; transmission des valeurs républicaines, de la culture de défense et des forces morales.

Représentants de la Nation, vous êtes à l’écoute des anciens combattants, qui sont très présents dans vos territoires, et vous entretenez des relations étroites avec eux. Je vous sais, comme moi, attachés aux enjeux de ce budget.

C’est aussi pour entretenir et enrichir cette proximité que j’ai entamé et que je poursuis un dialogue nourri et fructueux avec les associations d’anciens combattants : il est inconcevable que mon action, que je veux ambitieuse et déterminée, ne soit pas menée de concert avec elles.

J’ai reçu les associations nationales et, depuis le 4 juillet dernier, je vais à leur rencontre à chacun de mes déplacements.

Je me suis fixé pour objectifs de préserver et d’améliorer les droits du monde combattant, de consolider la reconnaissance de la Nation à son égard et de nous assurer que les dispositifs existants sont pleinement déployés et perfectionnés, lorsque cela paraît nécessaire.

Tout d’abord, le budget que je vous présente aujourd’hui garantit et même augmente les droits du monde combattant. Il est doté de 1,8 milliard d’euros au titre de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation ». Le Gouvernement poursuit ainsi l’effort consistant à limiter l’évolution des crédits à due proportion de la diminution du nombre de bénéficiaires de la dette viagère tout en conservant au même niveau les crédits de solidarité.

Dans cet esprit, j’ai proposé à la Mme la Première ministre d’accélérer la revalorisation du point d’indice de pension militaire d’invalidité pour répercuter dès le 1er janvier 2023, et non en 2024, l’effet de la revalorisation des traitements des fonctionnaires décidée par le Gouvernement le 1er juillet dernier.

Comme je l’ai annoncé lors de mon audition devant le groupe d’études Monde combattant et mémoire de votre assemblée, Mme la Première ministre a arbitré en faveur de cette proposition. Le Conseil d’État étudiera cette semaine le décret destiné à introduire ladite modification dans le code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre.

La demi-part fiscale des conjoints survivants constitue un sujet majeur pour le monde combattant

J’ai travaillé en lien étroit avec le ministre délégué chargé des comptes publics, Gabriel Attal, pour atteindre une mesure plus juste, plus solidaire et plus sociale, qui marque notre profonde reconnaissance envers le monde combattant. À ce titre, je tiens à saluer l’adoption par votre assemblée, le 18 novembre dernier, de l’amendement gouvernemental et de trois amendements similaires, dont celui de la présidente du groupe d’études Monde combattant et mémoire, Jocelyne Guidez.

Ces votes vont nous permettre d’accorder dès 2023 la demi-part fiscale supplémentaire à toutes les veuves âgées de plus de 74 ans, quel que soit l’âge de décès de l’ancien combattant. Cette demande était formulée de manière récurrente par les associations d’anciens combattants depuis plusieurs années. Nous pouvons toutes et tous nous féliciter de cet acquis à l’égard de celles et ceux qui se sont battus pour la Nation.

Ce budget contient encore d’autres mesures nouvelles qui traduisent mon ambition pour le monde combattant.

La première d’entre elles concerne les blessés psychiques, les « sans blessures apparentes », comme on les désigne parfois.

L’expérimentation par l’armée de terre des maisons Athos est pérennisée. Ces structures seront désormais financées par la présente mission. Il en existe trois aujourd’hui, dont deux vont être installées dans des locaux plus adaptés, et la construction d’une quatrième sera lancée cette année.

Par ailleurs, nous allons étendre la période de prise en compte de la qualité de victime d’acte de terrorisme. Les victimes d’attentats survenus avant 1982 en bénéficieront désormais. Les dizaines de blessés de l’attentat de la synagogue de la rue Copernic en 1980 sont par exemple concernés. Une enveloppe de 1 million d’euros y est consacrée.

Enfin, 2,4 millions d’euros supplémentaires seront dédiés à l’entretien et à la rénovation du patrimoine mémoriel.

Mesdames, messieurs les sénateurs, une attention toute particulière sera accordée aux harkis et à leur famille. Vous savez combien je suis attaché à ce sujet. Il est de notre devoir que la Nation connaisse pleinement les anciens combattants qu’ils furent et qu’ils reçoivent réparation des préjudices qu’ils ont subis. Ce quinquennat est l’occasion de poursuivre les avancées significatives amorcées en leur faveur à la fin du mandat précédent.

La dotation pour le financement du droit à la réparation prévue par la loi du 23 février 2022 sera augmentée de plus de 30 %. Elle sera ainsi portée à 60 millions d’euros, contre 46 millions d’euros en 2022.

En outre, j’ai demandé que l’on renforce les moyens humains et matériels prévus pour l’instruction des dossiers concernant les harkis, notamment afin de solder en 2023 les dossiers déposés au titre du fonds de solidarité et dont l’instruction est complexe. Dès le mois de janvier 2023, l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre mobilisera six agents supplémentaires pour cette mission.

Aucune de ces démarches ne pourrait être concrétisée sans une consolidation des opérateurs du ministère des armées chargés du monde combattant : pour préserver leur action, leurs moyens sont donc reconduits.

Pour ce qui concerne l’ONACVG, le contrat d’objectifs et de performance (COP) est en application.

Le maillage départemental de cet office est un sujet qui a beaucoup inquiété le monde combattant. Souvenons-nous que, pendant l’épidémie de covid-19, les services départementaux de l’ONACVG ont maintenu un lien constant et précieux avec l’ensemble de leurs ressortissants, dont certains sont particulièrement fragiles et isolés. Je les en remercie à cette tribune.

À l’heure où le Gouvernement entend renforcer l’accès aux services publics de proximité, ce maillage ne saurait être remis en cause : le sujet est donc clos.

Grâce au budget que je vous présente, la subvention de fonctionnement de l’ONAC augmente de 3,8 millions d’euros pour atteindre 60,2 millions d’euros. De plus, nous maintenons le budget d’action sociale de cet office à un niveau élevé – il est de 25 millions d’euros –, gage de sa capacité à accompagner ses ressortissants les plus fragiles, qu’ils soient anciens combattants ou orphelins de guerre.

En parallèle, la subvention de fonctionnement de l’Institution nationale des Invalides (INI) progresse de 700 000 euros pour atteindre 13,7 millions d’euros.

Enfin, la subvention de l’Ordre national de la Libération est en légère hausse. Le Gouvernement la porte à 1,74 million d’euros pour prendre en compte le coût de la revalorisation du point d’indice de la fonction publique.

En 2023, le ministère des armées restera en pointe du travail de mémoire et de valorisation culturelle.

Nous confirmons notre politique de hausse du budget consacré à la mémoire, qui atteint presque 21 millions d’euros.

Le patrimoine mémoriel placé sous la responsabilité du ministère des armées est extrêmement riche : c’est tout un pan de notre histoire nationale. Il fera l’objet d’une attention renforcée, à hauteur de 10,37 millions d’euros en 2023 : ces crédits affichent une augmentation de 28 % par rapport à 2022.

Un budget de 1,5 million d’euros sera par ailleurs consacré aux commémorations, qu’il s’agisse des douze journées nationales ou des célébrations liées aux thématiques mémorielles, largement dédiées l’année prochaine au quatre-vingtième anniversaire de plusieurs grands épisodes de la Seconde Guerre mondiale.

Je souhaite également que l’année 2023 mette davantage en valeur les combattants en opérations extérieures, cette quatrième génération du feu. À cet égard, j’ai la volonté de travailler avec l’ensemble des acteurs pour mieux faire connaître le monument aux opérations extérieures installé dans le parc André-Citroën à Paris.

Ambitieuse et volontariste, la politique culturelle du ministère des armées prend de nombreuses formes. Elle fait de ce dernier le deuxième acteur culturel de l’État et touche tous les domaines de ce secteur, qui va du patrimoine immobilier à la bande dessinée.

Une directive culturelle triennale, couvrant la période 2021-2023, guide la mise en œuvre de cette politique. Ses objectifs sont non seulement de conserver et de valoriser l’important patrimoine culturel du ministère des armées – bâtiments historiques, musées, archives et bibliothèques –, mais aussi d’intensifier la recherche historique, notamment en soutenant de jeunes chercheurs par le biais d’allocations de thèse ou de contrats doctoraux.

Ces différents leviers renforcent le lien entre les armées et la Nation. Ils soutiennent les vocations comme l’engagement des militaires et favorisent le recrutement. En cela, la politique culturelle du ministère des armées développe les forces morales de notre pays en s’adressant à nos concitoyens et appuie activement la politique de défense.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je suis au travail.

Ce budget ouvre un mandat qui perpétuera un haut niveau d’ambition au service du monde combattant, de la mémoire et du lien armées-Nation-jeunesse.

Ce budget est donc aussi celui de la résilience de la Nation, enjeu fondamental en cette année, qui a vu réapparaître un conflit de haute intensité sur notre continent.

L’augmentation des moyens et les choix stratégiques que je vous présente aujourd’hui sont les outils nécessaires pour impulser un élan nouveau à la politique de soutien au monde combattant et de transmission de la mémoire que j’entends mener, à l’avenir, dans un dialogue permanent avec les associations, avec les territoires et avec les élus.

Sachez compter sur moi ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi quau banc des commissions. – M. Vincent Éblé applaudit également.)

Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Article 41

Mme la présidente. Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation », figurant à l’état B.

ÉTAT B

(En euros)

Mission / Programme

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation

1 924 164 355

1 930 871 498

Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation

1 832 613 254

1 839 320 397

Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale

91 551 101

91 551 101

 Dont titre 2

1 441 930

1 441 930

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° II-5 est présenté par M. Laménie, au nom de la commission des finances.

L’amendement n° II-566 est présenté par M. Gontard, Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation

92 920

92 920

 

Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale

dont titre 2

92 920

92 920

TOTAL

92 920

92 920

92 920

92 920

SOLDE

0

0

La parole est à M. le rapporteur spécial, pour présenter l’amendement n° II-5.

M. Marc Laménie, rapporteur spécial. Mes chers collègues, cet amendement, que je présente au nom de la commission des finances, tend à assurer l’indemnisation de vingt-deux supplétifs de statut civil de droit commun de la guerre d’Algérie qui se sont vu refuser l’allocation de reconnaissance sur le fondement d’une disposition législative déclarée, depuis, anticonstitutionnelle. Il s’agit, certes, d’un sujet relativement ancien, mais les intéressés méritent eux aussi respect, reconnaissance et réparation.

L’ONAC-VG a déjà pris contact avec ces personnes en tant qu’opérateur du programme 169 : le mouvement de crédits que nous vous proposons conduirait à lui confier une somme de 92 920 euros pour indemniser ces vingt-deux personnes, ce qui représente 4 195 euros par rapatrié.

Cette demande d’indemnisation est relayée par les associations de rapatriés. Je précise enfin que trois de ces personnes sont malheureusement déjà décédées.

Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° II-566.

Mme Raymonde Poncet Monge. Cet amendement est défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Patricia Mirallès, secrétaire dÉtat. Ces deux amendements identiques visent à traiter la situation d’anciens membres des forces supplétives de statut civil de droit commun.

Vous le savez, les gouvernements successifs ont voulu réserver l’allocation de reconnaissance aux anciens supplétifs de droit local, dont les conditions de rapatriement furent extrêmement dures. Au cours des dernières années, ces critères d’éligibilité ont été consolidés juridiquement. J’ajoute qu’ils ont été validés par le Conseil constitutionnel en 2013.

Pour ce qui concerne les supplétifs de droit commun ici évoqués, toutes les demandes ont été identifiées. Toutes les situations nécessitant une intervention ont d’ores et déjà été traitées via l’action sociale de l’ONACVG.

Geneviève Darrieussecq, alors ministre déléguée chargée de la mémoire et des anciens combattants, avait en effet demandé aux offices départementaux de l’ONACVG de contacter toutes les personnes qui lui avaient été signalées, afin qu’elles puissent, dans la mesure du possible, bénéficier des dispositifs d’aide de l’office.

Les vingt-six anciens supplétifs de statut civil de droit commun signalés à l’époque ont donc bien été contactés. Au total, trois d’entre eux étaient décédés ; six n’avaient pas souhaité donner suite aux sollicitations ; sept n’avaient pas exprimé de besoin particulier, l’un d’eux ayant déménagé et ne répondant plus aux courriers qui lui étaient adressés ; six n’étaient pas d’anciens combattants, mais n’en étaient pas moins accompagnés par l’ONACVG, qui poursuit d’ailleurs ce soutien actif ; et les quatre derniers avaient reçu une aide pour un montant global de 9 800 euros. Une seule nouvelle demande est apparue en 2020, mais elle a été finalement retirée par l’intéressé. Aucune demande supplémentaire n’a été enregistrée en 2021.

Dans ces conditions, ces deux amendements me semblent satisfaits. Je prie donc leurs auteurs de bien vouloir les retirer. À défaut, j’émettrais un avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Marc Laménie, rapporteur spécial. Madame la secrétaire d’État, j’entends bien vos arguments. Toutefois – Mme Poncet-Monge et les membres de son groupe ne me contrediront sans doute pas –, nos attentes restent entières. Voilà pourquoi je maintiens l’amendement de la commission.

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Patricia Mirallès, secrétaire dÉtat. Monsieur le rapporteur spécial, vous connaissez mon engagement pour les harkis ; vous savez que j’ai été rapporteure de la loi du 23 février 2022. Croyez-moi : si l’objectif n’était pas déjà atteint, je me serais engagée à ce qu’il le soit.

D’ailleurs, si cela peut vous assurer, je vous signale que les membres de mon cabinet sont à votre disposition. Vous pourrez faire le point directement avec eux.

Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. Notre amendement a avant tout pour objet de renforcer celui de M. le rapporteur spécial.

Madame la secrétaire d’État, à vous entendre, nous ne parlons que d’une série de cas individuels qu’il suffirait d’examiner un par un. Mais, pour notre part, nous avons été sollicités par une association d’anciens combattants : c’est une personne morale qui défend ces vingt-deux personnes. Si vous le souhaitez, nous pouvons vous fournir ses coordonnées. Ainsi pourrez-vous écrire à ses membres que leurs revendications sont satisfaites.

Mme la présidente. La parole est à Mme Victoire Jasmin, pour explication de vote.

Mme Victoire Jasmin. Mon intervention s’inscrit dans le droit fil des propos de Mme Poncet-Monge et de M. Laménie.

Madame la secrétaire d’État, je prends note de votre réponse. Toutefois, j’ai rencontré les représentants de plusieurs associations, notamment au cours de différentes auditions organisées au Sénat. Je vous assure qu’ils ne tiennent pas le même langage que vous.

Peut-être faudrait-il répondre directement à ces associations pour qu’elles informent leurs adhérents. Pour l’heure, quoi qu’il en soit, mieux vaut à mon sens que ces amendements soient votés.

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure pour avis.

Mme Jocelyne Guidez, rapporteure pour avis. Monsieur le rapporteur spécial, vous le savez, je suis ce dossier depuis plusieurs années et je connais bien l’association dont il s’agit, ainsi que son délégué national, M. Amorich : dès qu’il peut harponner quelqu’un, il le fait !

Cela étant, comme le souligne Mme Jasmin, il faut bel et bien écrire aux associations concernées : à l’évidence, nous sommes face à un problème de communication. Nous avons toujours travaillé en bonne intelligence avec Mme Darrieussecq, et je ne crois pas une seconde qu’elle nous ait menés en bateau.

Prenons garde : le même amendement risque d’être déposé par d’autres parlementaires l’année prochaine,…

M. Marc Laménie, rapporteur spécial. Eh oui !

Mme Jocelyne Guidez, rapporteure pour avis. … sur l’initiative de la même personne. La priorité me semble bel et bien être de résoudre ce problème de communication.

Mme la secrétaire d’État l’a rappelé : ceux qui devaient être indemnisés l’ont été et, parmi les autres, certains ne le voulaient pas. J’ajoute qu’à ma connaissance, cette demande n’est formulée que par une seule association, et même par une seule personne.

Mme Darrieussecq m’avait communiqué les noms des personnes indemnisées, de celles qui n’ont rien demandé et des trois ou quatre personnes qui ne pouvaient pas prétendre au dispositif. Je ne suis pas en mesure de vous les citer en séance, car il s’agit d’informations confidentielles. Mais je peux vous fournir les noms des intéressés, car je dispose du dossier complet.

Voilà pourquoi, tout en saluant la qualité du travail que nous accomplissons ensemble dans une parfaite entente, je m’abstiendrai sur cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Christian Cambon, pour explication de vote.

M. Christian Cambon. Avant tout, je tiens à saluer Mme la secrétaire d’État chargée des anciens combattants ; j’ai eu l’occasion d’aller avec elle à Verdun comme dans d’autres lieux de mémoire, et je souligne son engagement personnel sur ces sujets.

Nous, élus et notamment anciens maires, quand nous parlons des anciens combattants, nous pensons souvent aux vétérans des grandes guerres. Cela étant, je ne voudrais pas que l’on oublie les anciens combattants des Opex. Ces soldats nous adressent en effet beaucoup de demandes d’intervention. Ils veulent notamment savoir s’ils pourront bénéficier du statut d’ancien combattant.

La France a laissé des morts et beaucoup de blessés sur ces théâtres d’opérations. L’examen de la présente mission budgétaire me permet d’attirer l’attention du Gouvernement sur ces soldats qui, sur plusieurs continents, continuent de nous représenter en défendant nos libertés et nos valeurs. Il ne faut les oublier ni maintenant ni dans l’avenir. Le budget que nous allons voter aujourd’hui est aussi le garant de la reconnaissance qui leur sera réservée demain.

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Patricia Mirallès, secrétaire dÉtat. Monsieur Cambon, je tiens à vous rassurer : pourra être reconnu ancien combattant tout soldat qui aura passé 120 jours au combat, y compris en opération extérieure. Dès lors, les intéressés auront droit à la carte du combattant et à tous les avantages associés au statut d’ancien combattant.

Mesdames, messieurs les sénateurs, pour en revenir à aux amendements identiques, j’ai été moi-même députée et j’ai vu des amendements similaires revenir à l’Assemblée nationale au cours des cinq années précédentes : ils sont toujours déposés à la demande de M. Amorich.

Monsieur le rapporteur spécial, je vous le répète : nous ne pouvons pas vous donner toutes les informations dans cet hémicycle, mais les conseillers de mon cabinet sont à votre disposition pour vous fournir les explications nécessaires, en particulier pour ce qui concerne les quatre personnes n’ayant pas droit à ces dispositions, puisqu’elles ne sont pas reconnues anciens combattants.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-5 et II-566.

(Les amendements sont adoptés.) – (Applaudissements sur des travées du groupe SER.)

Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation », figurant à l’état B.

Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits, modifiés.

(Les crédits sont adoptés.)

Mme la présidente. J’appelle en discussion les articles 41 et 41 bis, qui sont rattachés pour leur examen aux crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation ».

Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation

État B
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Article 41 bis (nouveau)

Article 41

L’article L. 113-13 du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est complété par les mots : « , quelle que soit la date de l’acte de terrorisme dont elles ont été victimes » ;

2° Le second alinéa est supprimé. (Adopté.)

Article 41
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Culture

Article 41 bis (nouveau)

Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur les conditions dans lesquelles l’État, au travers de son opérateur, l’Office national des combattants et victimes de guerre, assure le dénombrement et le soutien des pupilles de la Nation et des orphelins de guerre.

Mme la présidente. L’amendement n° II-6, présenté par M. Laménie, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Marc Laménie, rapporteur spécial. L’article 41 bis prévoit la remise par le Gouvernement au Parlement d’un rapport sur les conditions dans lesquelles l’État, au travers de son opérateur, l’ONACVG, assure le dénombrement et le soutien des pupilles de la Nation et des orphelins de guerre.

Or cette information est déjà rendue publique par cet office, via son rapport annuel, et il serait toujours loisible aux parlementaires de demander tout complément d’information par le biais des questionnaires budgétaires.

Aussi, nous proposons de revenir sur cette demande de rapport en supprimant l’article.

Cela étant, la commission des finances reste fidèle à son esprit d’ouverture. Un autre amendement ayant été déposé sur l’article 41 bis, j’aimerais connaître l’avis du Gouvernement à cet égard.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Patricia Mirallès, secrétaire dÉtat. Monsieur le rapporteur spécial, votre amendement tend à supprimer l’article 41 bis, qui prévoit la remise par le Gouvernement au Parlement d’un rapport sur les conditions dans lesquelles l’État, via l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre, assure le dénombrement et le soutien des pupilles de la Nation et des orphelins de guerre.

Comme vous le savez, cet article résulte d’un amendement parlementaire que le Gouvernement a accepté d’inclure dans le texte considéré comme adopté en première lecture par l’Assemblée nationale, en vertu de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution.

Vous faites référence au rapport annuel de l’ONACVG. Mais, parmi tous les pupilles de la Nation, ce document ne distingue pas les orphelins de guerre dans les bilans globaux des interventions. Le rapport que le Gouvernement a accepté de remettre au Parlement apportera donc une information complémentaire. Il permettra d’éclairer les parlementaires sur un sujet qui nourrit des demandes récurrentes depuis plusieurs années. À mon sens, nous pouvons tous souscrire à un tel objectif.

De plus, par le biais de courriers, de questions écrites ou encore d’amendements, l’on m’interroge très souvent quant aux conditions d’accompagnement par l’État des pupilles de la Nation et des orphelins de guerre. Il me paraît donc nécessaire de mesurer l’efficacité du dispositif. J’y insiste, c’est précisément ce que permet le rapport demandé à l’Assemblée nationale.

En conséquence, je vous propose de retirer cet amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

Mme la présidente. Monsieur le rapporteur spécial, l’amendement n° II-6 est-il maintenu ?

M. Marc Laménie, rapporteur spécial. Madame la secrétaire d’État, nous restons bien entendu ouverts à la discussion, d’autant qu’il y a un autre amendement ensuite.

Nous en sommes tous conscients ici : tous les sujets sont importants et méritent notre respect. D’ailleurs, je profite de l’occasion pour remercier toutes les personnes présentes dans cet hémicycle pour l’examen de cette mission, à la valeur hautement symbolique.

Sous l’autorité de M. le rapporteur général, et tout en saluant M. Cambon, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, ainsi que M. Lafon, président de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication, qui nous font l’honneur de leur présence et que je remercie de leur soutien, je retire cet amendement, madame la présidente.

M. Jean-François Husson. Le Gouvernement ferait bien de s’inspirer de la bienveillance de M. le rapporteur spécial !

Mme la présidente. L’amendement n° II-6 est retiré.

La parole est à Mme la rapporteure pour avis.

Mme Jocelyne Guidez, rapporteure pour avis. Monsieur le rapporteur spécial, vous avez eu raison de retirer votre amendement.

En revanche, madame la secrétaire d’État, ce rapport, il faut que nous l’ayons. Si nous avons tendance à supprimer les demandes de rapport au Sénat, c’est parce qu’en général, nous ne les recevons jamais… Or beaucoup de questions nous sont posées sur le sujet. J’ai notamment été interpellée sur le fait que les fils d’anciens combattants disparus sont des pupilles de la Nation, alors que les fils de résistants décédés ou tués lors d’une opération ne sont pas considérés comme tels.

Un véritable travail reste à accomplir en la matière. Encore faut-il que le rapport nous soit remis.

Mme la présidente. L’amendement n° II-565 rectifié, présenté par Mme Schillinger, MM. Haye, Gattolin, Hassani, Iacovelli, Lévrier, Rambaud, Patient, Rohfritsch, Dagbert, Patriat, Bargeton et Buis, Mme Cazebonne, M. Dennemont, Mmes Duranton et Havet, MM. Kulimoetoke, Lemoyne, Marchand et Mohamed Soilihi, Mme Phinera-Horth, MM. Richard, Théophile et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

Ce rapport prévoit un chapitre consacré à la situation spécifique des orphelins des incorporés de force pendant l’occupation des territoires du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle.

La parole est à M. André Gattolin.

M. André Gattolin. Monsieur le rapporteur spécial, je salue votre décision ; je connais votre intérêt approfondi pour les questions mémorielles.

Ce n’est pas une demande de rapport pour le plaisir. Il s’agit de préciser, de dénombrer.

La situation évolue. Les survivants de la Seconde Guerre mondiale sont en train de disparaître. Une nouvelle génération d’anciens combattants apparaît, avec, par conséquent, de nouveaux pupilles de la Nation. Il est donc important d’avoir un état des lieux et une mesure permanente.

C’est d’ailleurs le sens de l’amendement que je présente avec certains collègues alsaciens de mon groupe. Nous proposons de consacrer un chapitre aux « malgré-nous » au sein du rapport demandé au Gouvernement.

Le grand historien Pascal Ory, spécialiste de la période, explique que l’occupation allemande de l’Alsace et de la Moselle, entre 1939 et 1945, a été si violente qu’elle a, paradoxalement, davantage contribué à la pleine intégration de cette région au sein de la pleine culture et intégrité nationales françaises que des siècles de tentatives en ce sens.

Ainsi, plus de 113 000 Alsaciens et 31 000 Mosellans ont été enrôlés de force de 1939 à 1945, surtout à partir de 1942. Il est indispensable, à la suite de la reconnaissance engagée par le général de Gaulle en 1963, des malgré-nous – ces personnes forcées de combattre contre la France dans l’armée de l’Allemagne nazie –, de reconnaître pleinement leurs droits et de connaître leur nombre exact.

Mme la présidente. Il faut conclure, monsieur Gattolin.

M. André Gattolin. Tel est le sens de cette demande d’ajout, qui rendra ce rapport encore plus utile.

Je vous invite donc à approuver notre amendement n° II-565 rectifié.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Marc Laménie, rapporteur spécial. Comme nous pouvons évoluer positivement, j’émets un avis favorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Patricia Mirallès, secrétaire dÉtat. Avis évidemment favorable.

Il manquait dans ce rapport des précisions sur les orphelins des habitants des départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle incorporés de force par l’armée allemande. Ces derniers peuvent se voir attribuer la qualité de pupille de la Nation si la mention « Mort pour la France » a été apposée sur l’acte de décès de leur parent.

En outre, leur sort spécifique justifie qu’une attention distincte soit portée à leur situation.

Il paraît donc pleinement justifié de leur consacrer un chapitre dans le rapport sur les conditions dans lesquelles l’État, au travers de son opérateur, l’Office national des combattants et victimes de guerre, assure le dénombrement et le soutien des pupilles de la Nation et des orphelins de guerre.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-565 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 41 bis, modifié.

(Larticle 41 bis est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Patricia Mirallès, secrétaire dÉtat. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie d’avoir adopté ce budget si important pour nos anciens combattants, au regard du sacrifice qu’ils ont accompli pour la Nation. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi quau banc des commissions.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation ».

Culture

Article 41 bis (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
État B

Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Culture » (et articles 41 quater et 41 quinquies).

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Vincent Éblé, rapporteur spécial de la commission des finances. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le montant global des crédits demandés dans le cadre du présent projet de loi de finances pour la mission « Culture » s’élève à plus de 3,7 milliards d’euros, soit une progression dépassant 7 %. Celle-ci est supérieure à l’hypothèse d’inflation retenue voilà quelques semaines pour 2023 dans le projet de loi de programmation des finances publiques (LPFP), qui devrait cependant rapidement être remise en cause si l’on observe le niveau d’inflation déjà constaté et les perspectives à court terme.

J’aborderai dans un premier temps le programme 131, « Création », dont la dotation, majorée de 10 %, dépasse 1 milliard d’euros. Cette progression des crédits peut être saluée en première analyse, dans un contexte de reprise délicate de l’activité culturelle. Cependant, elle ne lève pas toutes les inquiétudes de l’ensemble du secteur, confronté à un effet ciseaux entre, d’un côté, le redémarrage progressif, mais lent, de l’activité et, d’un autre, la hausse du coût des dépenses contraintes, notamment énergétiques.

Pour les opérateurs de l’État, ces surcoûts ne seront pas intégralement compensés par la loi de finances, ce qui devrait induire une réduction des marges artistiques de 30 % en 2023 et de 50 % en 2024. La fermeture de certains opérateurs à la rentrée 2023 est malheureusement une hypothèse crédible, faute de pouvoir produire certains spectacles.

De plus, la perspective des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 constitue une source supplémentaire d’anxiété, car la probabilité d’annulations de festivals et de concerts est renforcée, en raison du manque de forces de l’ordre et de sociétés privées pour en assurer la sécurité.

Je relève en outre que l’action du ministère dans le domaine de la création peut paraître brouillée. La multiplication des objectifs assignés – seize sous-actions pour les actions nos 01 et 02 – et le recours soutenu à la labellisation fragilisent en effet sa lisibilité. J’observe par ailleurs le caractère résiduel, pour ne pas dire marginal, qu’elle peut revêtir dans les territoires, où elle se résume à un financement complémentaire des politiques territoriales.

Pour conclure sur ce programme, je m’attarderai sur deux mesures.

La première porte sur la poursuite du programme de commande publique « Mondes nouveaux », mis en place dans le cadre du plan de relance. Ainsi, 10 millions d’euros seront dédiés à ce dispositif, qui vise notamment à faire entrer la culture dans des zones où elle n’est plus assez présente : les espaces ruraux, les périphéries urbaines ou encore les cœurs de ville dégradés. Il conviendra d’être vigilant sur la réalité de l’accompagnement des artistes, de la complémentarité du dispositif avec le « 1 % artistique » et sur le droit de suite que le ministère doit avoir sur les œuvres ainsi financées, notamment dans le domaine des arts visuels.

La deuxième mesure concerne les quelque 12,7 millions d’euros qui abondent le soutien à l’emploi, dont 7 millions d’euros sont fléchés vers le fonds national pour l’emploi pérenne dans le spectacle (Fonpeps). Cette progression des crédits s’inscrit dans une trajectoire haussière révélatrice d’une sous-budgétisation constante depuis 2019. Dans ces conditions, nous nous interrogeons sur la fiabilité de la prévision budgétaire pour 2023.

Je me concentrerai à présent sur le programme 175, « Patrimoines », qui devrait être doté de 1,1 milliard d’euros en 2023, soit une progression de plus de 7 % par rapport à 2022.

Ce financement est complété par des soutiens hors budget, qui mobilisent nos concitoyens : les dons pour Notre-Dame de Paris, dont le montant, qui s’élève à 849 millions d’euros, devrait dépasser le coût des travaux, estimé à quelque 703 millions d’euros ; le loto du patrimoine, pour lequel le ministère dégèle la réserve de précaution chaque année. Ce jeu, comme l’augmentation prévue des crédits du fonds incitatif et partenarial, vient d’ailleurs compenser la tendance à la baisse des crédits déconcentrés.

Près de la moitié de la progression des crédits dédiés au programme 175 relèvent de mesures destinées à tenir compte de l’inflation et de la hausse des coûts. Sur les 37,4 millions d’euros dédiés à cet objectif, deux tiers environ sont fléchés vers les opérateurs. La majoration des coûts est déjà constatée dans plusieurs chantiers encadrés par l’État.

En ce qui concerne les chantiers, justement, nous avons noté que l’année 2023 devrait être marquée par l’ouverture de la cité de la francophonie à Villers-Cotterêts. Le coût du chantier était initialement évalué à 185 millions d’euros, avant d’être porté à 209 millions d’euros. Sa réalisation n’a d’ailleurs été permise que par la mise en place du plan de relance.

Cette expérience coûteuse doit servir de point cardinal dans la réflexion à mener sur d’autres grandes opérations d’investissement. Je pense en particulier à l’aménagement du site de Clairvaux, doté de 15 millions d’euros en autorisations d’engagement pour 2023, ce qui représente un début assez modeste – chacun pourra en convenir – au regard du coût global de l’opération.

Au-delà de la hausse des dépenses contraintes, nous relevons une hausse importante des prix d’acquisitions des œuvres les plus importantes qui ont vocation à enrichir les collections publiques. Les prix d’adjudication dans les ventes aux enchères s’établissent désormais très régulièrement à des niveaux quatre à dix fois supérieurs, voire davantage à ceux des estimations.

Enfin, si la reprise de la fréquentation des établissements recevant du public dédiés au patrimoine a été plus importante que prévu en 2022, l’horizon ne semble pas pour autant totalement dégagé en raison de plusieurs incertitudes : l’effet de l’inflation sur les dépenses culturelles, l’absence de retour de certaines clientèles, notamment les touristes chinois, et la perspective de leur fermeture le temps des jeux Olympiques et Paralympiques en 2024.

Mon collègue rapporteur spécial Didier Rambaud présentera dans quelques instants les crédits des programmes 224 et 361. (Applaudissements sur des travées du groupe SER et au banc des commissions. – M. Marc Laménie applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur spécial. (M. Julien Bargeton applaudit.)

M. Didier Rambaud, rapporteur spécial de la commission des finances. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le projet de loi de finances pour 2023 prévoit une majoration de la dotation du programme 361, « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture », d’environ 6,5 % en crédits de paiement en plus par rapport à 2022. Les crédits devraient ainsi atteindre environ 800 millions d’euros.

Les moyens financiers dédiés aux établissements d’enseignement supérieur culturel et à l’insertion professionnelle devraient progresser de 32 millions d’euros en crédits de paiement, afin de répondre à quatre objectifs : la réévaluation des bourses sur critères sociaux ; le renforcement des subventions de fonctionnement et d’investissement des écoles d’art et d’architecture ; la mise en œuvre des grands projets d’investissements de ces mêmes écoles ; enfin, le soutien aux établissements territoriaux d’enseignement supérieur, qui cible notamment le statut des enseignants au sein de ces écoles.

Une question demeure sur la dynamique baissière du taux d’insertion professionnelle des étudiants issus du domaine du spectacle vivant. Afin de répondre à ce défi, il convient de mettre en place un véritable accompagnement, en déclinant le modèle du Jeune Théâtre national (JTN), associé au Conservatoire national supérieur d’art dramatique de Paris et au Théâtre national de Strasbourg, qui organise des rencontres et des auditions, prend en charge une partie des jeunes artistes engagés à la suite de celles-ci, programme des maquettes de premiers spectacles et élabore un annuaire des artistes issus des onze écoles nationales d’art dramatique.

Par ailleurs, 13 millions d’euros sont fléchés vers des investissements structurants au sein des écoles de la création et du patrimoine. Cet apport doit être salué. Cela ne doit toutefois pas nous empêcher de rappeler l’importance des restes à payer des chantiers couverts par le programme 361.

J’en viens maintenant à un dispositif auquel je suis attaché : le pass Culture. Déployé dans toute la France depuis mai 2021 et étendu en 2022 aux jeunes de 15 ans et plus, ainsi qu’aux élèves à partir de la quatrième, le pass Culture sera ouvert aux jeunes de sixième et cinquième en 2023.

De plus, quelque 208,5 millions d’euros sont prévus en 2023 pour financer le dispositif, qui est aujourd’hui, rappelons-le, le deuxième opérateur du ministère de la culture, après la Bibliothèque nationale de France. Plus de 2,1 millions de jeunes sont actuellement inscrits sur l’application, et 14 millions de réservations de produits culturels ont été opérées via le pass, pour un montant total de 235 millions d’euros. Concrètement, 87 % des jeunes concernés ont acquis un bien culturel par cet intermédiaire.

Le pass Culture est un dispositif qui, à mes yeux, est pertinent, et je continuerai de le soutenir !

Madame la ministre, je reste toutefois attentif à sa mise en œuvre, comme vous le savez, pour que son efficacité puisse être améliorée. Le pass ne peut pas se résumer à une simple plateforme d’achats de biens et de services ; il doit être éditorialisé en vue de mettre en place un véritable parcours culturel.

Lors des prochains mois, nous allons vérifier avec mon collègue Vincent Éblé que le pass ne sert pas au financement d’achats liés au parcours scolaire. Nous allons également veiller à ce qu’il contribue à faire évoluer les pratiques culturelles. L’accent pourrait ainsi être mis sur l’accès au spectacle vivant, par exemple.

J’en profite également pour tordre le cou à quelques rumeurs qui circulent actuellement : non, le pass Culture n’est pas éligible aux parcs de loisirs !

Pour en revenir aux pistes d’amélioration du pass Culture, nous devons, je le crois, renforcer l’accès des jeunes non scolarisés à celui-ci. Seuls 3,7 % des inscrits sur l’application ont déclaré ne pas être scolarisés. Or ce ratio est plus faible que le taux de jeunes non scolarisés par rapport l’ensemble de la population visée.

N’oublions pas les zones rurales et périurbaines, où l’offre culturelle n’est – hélas ! – pas la même et où des questions liées à la mobilité se posent ; j’ai eu l’occasion de vous le dire.

En tout état de cause, le pass Culture ne doit pas résumer l’effort de l’État en faveur de l’éducation artistique et culturelle. Autrement dit, la montée en charge budgétaire de l’application ne doit pas s’effectuer au détriment des moyens qui lui sont traditionnellement dédiés. Nous ne pouvons que déplorer le fait que les indicateurs rattachés au programme mettent d’ailleurs en avant une réduction de la part des enfants et adolescents ayant bénéficié d’une action d’éducation artistique et culturelle, ainsi qu’une baisse de l’effort en faveur des territoires prioritaires.

Je reviendrai enfin sur le programme 224, « Soutien aux politiques du ministère de la culture », qui devrait être doté d’environ 810 millions d’euros en 2023. À l’instar de l’exercice précédent, la masse salariale du ministère devrait croître en 2023 et ainsi atteindre 516 millions d’euros. Il convient de noter que 67 % de cette progression résulte de mesures catégorielles, comme le plan de rattrapage indemnitaire pluriannuel, qui doit permettre de renforcer l’attractivité du ministère de la culture et d’éviter des vacances de postes prolongées.

Le projet immobilier Camus, lancé en 2019, qui prévoit la rénovation des locaux et l’aménagement de nouveaux bureaux au sein du ministère de la culture, devrait, en 2023, passer de sept à trois sites. Initialement établi à 36,6 millions d’euros, le budget prévisionnel, après avoir été actualisé en 2022, est désormais porté à 55,43 millions d’euros.

Pour l’exercice 2023, la dotation numérique du ministère devrait continuer de progresser : 26,52 millions d’euros seront ainsi dédiés au renforcement de la transformation numérique et de la cybersécurité et à la mise en place d’outils permettant de renforcer et de fiabiliser le suivi économique de l’activité des secteurs qu’il subventionne, en ciblant notamment la fréquentation au sein des opérateurs ou la dynamique du spectacle vivant.

La mise en place de ces systèmes d’information devrait contribuer à faciliter la gestion des crédits dédiés aux établissements subventionnés et permettre une meilleure prévision budgétaire.

Cela étant, compte tenu des moyens supplémentaires dédiés à la culture, que je souligne une nouvelle fois, la commission des finances a décidé d’approuver les crédits de la mission « Culture ». (M. Julien Bargeton applaudit.)

Mme la présidente. La parole est à Mme le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)

Mme Sabine Drexler, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de léducation et de la communication. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le monde du patrimoine appréhendait le niveau des crédits en 2023 après les aides exceptionnelles dont il a bénéficié pendant la crise sanitaire. Nous sommes satisfaits de constater que l’État maintient son effort, tant ce secteur nécessite des investissements qui s’accommodent mal d’un financement par à-coups.

Le niveau de l’inflation reste néanmoins un motif d’inquiétude, tant pour les musées que pour la poursuite des chantiers de restauration, car le budget pour 2023 n’en compense que partiellement les effets.

À cet égard, la commission de la culture regrette que les crédits destinés à la restauration des monuments historiques ou à la rénovation des équipements patrimoniaux des collectivités territoriales ne soient pas revalorisés, à l’exception du fonds incitatif et partenarial. Compte tenu de l’effet ciseaux auquel les collectivités sont confrontées et des problèmes d’ingénierie qu’elles rencontrent, il aurait été utile qu’elles soient davantage accompagnées.

Madame la ministre, nous souhaitons vous interpeller sur la situation préoccupante des effectifs des services déconcentrés chargés du patrimoine. Elle ne leur permet plus d’assurer correctement leur mission de conseil et d’expertise auprès des collectivités territoriales et des propriétaires privés. Il est urgent de recruter et de revaloriser l’attractivité de ces postes.

Nous sommes également préoccupés par le faible niveau des crédits alloués à l’architecture et aux sites patrimoniaux remarquables (SPR) face aux enjeux de régénération des centres anciens et de transition écologique et énergétique.

Il ne faudrait pas que le patrimoine soit la victime collatérale de ces politiques, faute d’avoir vu suffisamment tôt à quel point il constituait un levier aussi bien pour la revitalisation que pour la sobriété énergétique. Nous sommes convaincus que la réhabilitation du bâti ancien, constitue, sur le plan du développement durable, l’avenir de la construction.

Madame la ministre, parmi vos priorités figure à juste titre la transition énergétique de votre ministère. Si nous saluons les efforts destinés à améliorer les performances des bâtiments des opérateurs, nous pensons que votre action doit aller plus loin, dans la mesure où il est aujourd’hui avéré que la transition telle qu’elle est amorcée va affecter la pérennité de tout le patrimoine dont votre ministère est pourtant chargé d’assurer la préservation.

Madame la ministre, les dispositions de la loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite loi Climat et résilience, vont entraîner ni plus ni moins la disparition des caractéristiques architecturales françaises, car ni les nouvelles modalités de calcul du diagnostic de performance énergétique (DPE) ni les solutions de rénovation thermique préconisées ne sont adaptées au bâti d’avant 1948.

Sans vouloir soustraire le patrimoine aux impératifs de transition écologique, nous sollicitons votre intervention pour que les travaux de rénovation énergétique ne se traduisent ni par la perte du patrimoine ni par celle du savoir-faire de notre pays et encore moins par un gaspillage d’argent public.

Il est urgent d’engager un travail interministériel pour mieux concilier la préservation du bâti ancien et la transition écologique.

Nous avons identifié dans notre avis budgétaire plusieurs leviers d’action. Madame la ministre, nous espérons vraiment pouvoir compter sur votre engagement pour les mettre en œuvre très rapidement, car de nombreuses maisons, partout en France, ont déjà fait les frais de ce malentendu réglementaire. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)

Mme Sylvie Robert, rapporteure pour avis de la commission de la culture, de léducation et de la communication. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la nouvelle progression des crédits des programmes « Création » et « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » constitue évidemment un réel soulagement.

Madame la ministre, nous vous remercions d’être parvenue à convaincre l’ensemble du Gouvernement que le secteur culturel devait rester une priorité en 2023.

Le secteur de la création a encore besoin d’être accompagné. Si les collectivités publiques l’ont très largement soutenu pendant la crise sanitaire, sa situation demeure fragile. Il faut dire qu’il est affecté depuis sept ans par des crises successives : d’abord, les attentats de 2015 ; ensuite, la pandémie de covid-19 ; enfin, la hausse des prix de l’énergie.

Malheureusement, aucune de ces crises n’est encore véritablement surmontée : la vague d’attentats s’est traduite par un relèvement durable et considérable des coûts de sécurité des établissements ; les effets de la crise sanitaire restent encore très tangibles, aussi bien en matière de fréquentation que de recrutement, avec une véritable crise des vocations observable dans l’ensemble des différents emplois. À cela s’ajoutent les changements profonds des comportements des publics, qui mettent de plus en plus à mal les modèles économiques traditionnels des établissements publics comme privés.

Dans ce contexte, nous comprenons que la crise énergétique et l’inflation généralisée cristallisent les inquiétudes, puisqu’elles affectent non seulement les dépenses des établissements, mais également leurs recettes. Les Français réduisent leurs dépenses de loisirs, le mécénat est en baisse et les collectivités territoriales sont tentées de réduire leurs engagements financiers pour compenser la hausse de leurs dépenses.

Pour faire face à ces difficultés, nous vous savons gré d’avoir choisi de faire porter la priorité en 2023 sur l’emploi et sur le renforcement des marges artistiques des établissements. Leurs marges de manœuvre sont effectivement réduites et la hausse de leurs tarifs ou encore la révision à la baisse de leur programmation auraient des effets désastreux tant sur la fréquentation que sur la création.

Il reste néanmoins désormais à accompagner cet effort financier par un renforcement du dialogue entre votre ministère, les acteurs culturels et les collectivités territoriales. Il s’agit d’un besoin essentiel pour ce secteur, qui doit disposer de visibilité très en amont du fait des contraintes de leurs programmations. C’est vrai aussi pour les crédits d’impôt ; nous aurons l’occasion d’en débattre. L’affaire des possibles annulations de festivals en 2024 du fait des jeux Olympiques aurait pu être évitée si des concertations préalables étaient intervenues.

La commission de la culture est convaincue que le soutien à la création, à l’éducation artistique et culturelle et aux établissements d’enseignement passe par un meilleur dialogue et par le développement de nouvelles modalités de contractualisation avec les collectivités territoriales.

Nous avons ainsi émis un avis favorable sur l’adoption des crédits de la mission « Culture ». (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE et SER. – M. Laurent Lafon applaudit également.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps de l’intervention générale et celui de l’explication de vote.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de quinze minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Sonia de La Provôté. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – Mme Laure Darcos applaudit également.)

Mme Sonia de La Provôté. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, c’est une longue période chahutée que le monde de la culture traverse depuis trois ans. Si quelques éclaircies ont pu parcourir son ciel, les nuages s’amoncellent de nouveau et, avec eux, leur cortège d’inquiétudes.

En 2020, commençaient la crise sanitaire, les confinements, les restrictions et la cruelle sanction de ne pas faire partie des « essentiels ». Depuis, et parce qu’il a fallu qu’elle nous manque pour que cela soit enfin compris, la culture est considérée comme un bien vital.

Or la guerre aux portes de l’Europe, l’inflation, la crise climatique, le retour prudent et différent des publics, nous oblige à anticiper, de crainte que, de nouveau, des pans entiers de la vie culturelle nous quittent.

Les budgets examinés aujourd’hui sont pleinement concernés par ces crises, et nous saluons ici, le réel effort budgétaire accompli, madame la ministre. C’est un marqueur de la reconnaissance du rôle majeur joué par la culture dans cette bien rude période. Néanmoins, des inquiétudes demeurent, pour aujourd’hui comme pour demain. Comme cela a été souligné par nos deux rapporteures, Sylvie Robert et Sabine Drexler, nous savons tous que cette situation nécessitera à coup sûr un suivi budgétaire attentif pour réagir à temps via des projets de loi de finances rectificative.

De grands défis attendent votre ministère en 2023, qui affecteront aussi bien le programme 175, « Patrimoines », que le programme 361, « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture », et le programme 131, « Création ».

Le principal défi est celui de la hausse de l’inflation et du coût de l’énergie. L’hypothèse de +4,3 % est déjà caduque et la hausse des crédits, de 7 % pour le programme 361, de 7 % pour le programme 175 et de 10 % pour le programme 131, devrait en être atténuée d’autant.

Le soutien aux opérateurs est en progression. Mais l’estimation du surcoût énergétique le rend déjà bien insuffisant. Pour les établissements d’enseignement supérieur d’art, les conservatoires ou les écoles d’architecture, le constat est le même. En matière de patrimoine, en plus de ce surcoût, il faut faire face à une forte hausse du prix des matières premières utilisées dans les chantiers.

La réalité rattrape vite les établissements et les structures culturels. Elle s’impose à leurs arbitrages budgétaires et met ainsi en péril la programmation artistique, les horaires et les durées d’ouverture, le calendrier des créations, les tarifs et les délais des chantiers ; des annulations, des reports et des fermetures sont envisagés. À ces mesures extrêmes devra répondre un soutien extrême.

Par ailleurs, s’agissant du volet relatif aux ressources humaines, on constate, sur le terrain, le manque criant, au sein des festivals et des établissements culturels, de métiers – techniques, administratifs ou artistiques – indispensables à leur fonctionnement. Dans l’enseignement, le constat est le même. Les écoles d’architecture ont besoin de moyens supplémentaires, car des formations initiales et continues devront être mises en place pour répondre aux défis de la mise aux normes énergétiques.

Dans les directions régionales des affaires culturelles (Drac), le déficit d’attractivité est mis en exergue. Ainsi, des postes sont vacants dans le secteur du patrimoine. Par exemple, sur douze postes ouverts à la sortie de l’école de Chaillot, seuls quatre sont pourvus. Le recours aux contractuels ne pallie pas les manques.

À cette crise de la ressource en matière de professionnels s’ajoute celle qui est liée au coût des revalorisations salariales dues à l’inflation. Le ministère fait un réel effort pour compenser, quel que soit le secteur. Mais tout l’écosystème culturel, dans sa très grande diversité de statuts et de métiers, n’en bénéficiera pas : les collectivités et les acteurs privés sont eux aussi concernés. Les arbitrages ne vont pas toujours vers la compensation, et l’offre culturelle dans sa diversité en est fragilisée.

Outre ces deux sujets, madame la ministre, trois autres nous alertent.

Le premier concerne l’éducation artistique et culturelle et le rôle du pass Culture.

En ces temps où les choix budgétaires sont complexes, on ne peut que s’étonner du montant de ce dispositif, qui représente 25 % du programme 361. Cela détonne singulièrement avec la sobriété budgétaire qui s’impose aux acteurs de la culture ! La société par actions simplifiée (SAS) pass Culture ne connaît pas la crise…

Ensuite, si la part collective est une avancée pour faciliter l’accès à des actions culturelles dans les établissements scolaires du second degré, elle interroge sur son usage et sa mise en œuvre.

En matière d’éducation artistique et culturelle (EAC), le pass a une logique d’offre, à laquelle les établissements répondent : on crée la demande alors que l’EAC est avant tout un projet, une médiation vers la culture. C’est pourtant cette médiation, entre enseignants, élèves, structures, créateurs et collectivités, construite dans le temps, qui fait la réussite de l’EAC.

La labellisation proposée tend à exclure certaines actions ou artistes et à diminuer les interactions avec les collectivités. La simplification à l’extrême du process de commande confine à une ubérisation de l’EAC.

Nous ne souhaitons pas que celle-ci se résume au pass Culture, la transformant en un système d’achat dans une boutique d’actions, d’artistes et d’événements.

Le deuxième point concerne les festivals.

Ces derniers subissent une difficile loi des séries : la crise sanitaire, la crise énergétique, les surcoûts de programmation, la crise climatique, et maintenant la menace d’annulation ou de décalage liés aux jeux Olympiques (JO). À tout cela s’ajoute le retour hésitant du public.

Le « fonds festivals » ne suffira pas. Les organisateurs attendent enfin la nomination d’un référent au ministère et de référents dans les Drac. Ils entendent être défendus lors de tous les arbitrages à rendre qui les concernent.

Si les festivals les plus grands et les plus solides parviennent, non sans difficultés, à tenir, tous les autres sont en danger. Or, par leur nombre, leur diversité et leur présence dans tous les territoires, ils sont des moteurs de la vie culturelle, singulièrement durant la période estivale.

Les JO sont évidemment un rendez-vous exceptionnel et une fierté pour notre pays, mais les festivals ne doivent pas en être la victime désignée à cause d’un manque de moyens logistiques ou de compétences phagocytées par ce grand événement.

M. Pierre Ouzoulias. Très bien !

Mme Sonia de La Provôté. Enfin, le troisième point concerne la situation du patrimoine, confronté à l’arrivée du DPE. Si la transition écologique et l’amélioration énergétique du bâti sont des nécessités, cela ne doit ni nuire au patrimoine ni détériorer la qualité de nos communes.

En écho à l’intervention de notre rapporteur pour avis Sabine Drexler, je ne peux que vous alerter sur ce qui se passe en ce moment. Le DPE suit des règles inadaptées au bâti conçu avant 1949 ; il est lui-même délétère. Nul besoin d’être spécialiste pour comprendre que l’isolation par l’extérieur sur un bâti ancien en pierre ou un torchis, par exemple, est une erreur technique ! C’est aussi une faute vis-à-vis de l’identité de nos villes et villages, car cela efface les particularismes locaux et nuit à la qualité du cadre de vie.

Il y a donc urgence à faire évoluer les critères vers du bon sens. La machine à défigurer par un enlaidissement systémique est en marche.

Pour conclure, madame la ministre, vous l’avez compris : dans ces moments où tout confine à l’urgence, où il est nécessaire de faire des choix et de dégager des priorités, où le temps du dialogue est vite raccourci, voire inexistant, le ministère de la culture doit être fort. Sa voix doit être entendue et ses propositions retenues, que son interlocuteur soit un autre ministère, le Comité d’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques (Cojop) ou encore l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe). Trop nombreuses sont les annonces ou décisions où la culture et le patrimoine sont concernés et où le sentiment est pourtant donné que le ministère n’est que peu consulté !

Madame la ministre, le groupe UC votera favorablement ce budget, mais, parce que nous soutenons ardemment la culture et le patrimoine, et parce que l’essentiel est bien là, il veut témoigner ici de sa vigilance et de ses inquiétudes.

Préservons la poésie de notre pays ! Le patrimoine et les paysages en sont l’écrin ; la culture est l’air que l’on y respire. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, Les Républicains, SER et CRCE.)

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Fialaire.

M. Bernard Fialaire. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, défendre le budget de la culture pourrait seulement consister à relever ses externalités positives sur l’économie, en particulier touristique, et son rôle social. En réalité, l’État doit se comporter en promoteur, sans attendre l’exacte contrepartie comptable de son investissement.

Notre pays a la responsabilité de soutenir la culture, qui fait tout simplement partie de notre système de valeurs républicaines. Elle nous oblige. Elle est l’expression de la liberté, selon une formule kantienne. En cela, si j’ose dire, la culture est, par essence, essentielle.

À ce titre, elle a d’ailleurs trouvé sa place dans le plan de relance, qui a permis à nos acteurs et aux institutions du monde culturel de traverser la crise liée à la pandémie de covid-19.

Je salue cet effort et sa pérennisation à travers le programme de commandes publiques « Mondes nouveaux », qui se poursuivra avec un premier soutien de 10 millions d’euros en 2023 en direction du spectacle vivant et des arts visuels.

J’en profite pour rappeler que notre amendement de bonification du crédit d’impôt pour le spectacle vivant a été adopté en première partie du projet de loi de finances. Nous espérons qu’il survivra à la navette parlementaire, madame la ministre.

En attendant, mes chers collègues, la culture devra affronter d’autres difficultés. Je pense bien entendu au coût de l’énergie, ainsi qu’à la baisse du pouvoir d’achat de nos concitoyens, qui pourrait les contraindre à sacrifier les activités culturelles.

En outre, la question des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 est un sujet d’inquiétude, madame la ministre. Le monde culturel attend des réponses, car certains de ses acteurs ont besoin de se projeter dans le temps, pour des raisons évidentes de programmation.

Pour faire face à tout cela, le projet de loi de finances pour 2023 affiche une progression globale d’environ 7 % des crédits de la mission « Culture ». C’est un effort significatif, mais l’action publique doit respecter l’objectif d’équité. La culture, c’est pour tous et sur tous les territoires.

À cet égard, je souhaite tout d’abord évoquer la question du patrimoine, qui est un levier essentiel du dynamisme local et, surtout, un marqueur fort de l’identité de nos villes, départements ou régions. Les crédits du programme 175 augmenteront de 7,5 % en 2023. C’est une bonne chose, mais ce programme ne reflète pas l’ensemble de l’effort de l’État en faveur du patrimoine.

J’ajoute qu’il est fortement concentré sur les monuments historiques et les musées. Par conséquent, il n’est pas inutile de souligner l’action très volontaire des collectivités locales. Selon la Cour des comptes, ces dernières investissent en moyenne chaque année, 650 millions d’euros en direction du patrimoine, avec un regard appuyé sur le petit patrimoine de proximité, qui est aussi essentiel.

Mais tous les moyens réunis, y compris ceux de la fondation du patrimoine et de la mission Bern, dont le fameux loto, suffiront-ils à couvrir les défis auxquels est confronté notre patrimoine ?

Le renchérissement des chantiers de restauration et la nécessité d’accélérer la transition énergétique sont deux enjeux imminents. Le premier va clairement oblitérer une partie de la hausse des crédits budgétaires.

J’en viens à la transition énergétique. Il convient d’éviter de renvoyer dos à dos patrimoine et développement durable. Dans les deux cas, il s’agit de conserver notre héritage.

Aujourd’hui, nous disposons des outils technologiques pour concilier les mesures de protection du patrimoine et les objectifs du développement durable.

Il faudra évidemment bien former les architectes. Pour cela, les moyens déconcentrés de l’État destinés au patrimoine doivent être à la hauteur. Or ils sont actuellement très contraints.

Je souhaite à présent aborder la démocratisation de la culture.

L’égal accès à la culture est un objectif de la politique publique du ministère, à travers le programme 361.

Dans ce cadre, le pass Culture focalise beaucoup l’attention, pour ne pas dire les crédits, puisqu’il absorbe jusqu’à 25 % du programme. Je me réjouis de sa montée en puissance et de son ouverture à de nouvelles classes d’âge. Mais je m’interroge également sur le fait que le spectacle vivant et les musées recueillent une bien moindre attention.

Il y a donc un effort à faire pour inciter les jeunes à plus de diversité dans leurs pratiques culturelles. Il faut, comme l’avait rappelé André Malraux en 1966, « faire ce que la IIIe République avait réalisé, dans sa volonté républicaine, pour l’enseignement ; il s’agit de faire en sorte que chaque enfant de France puisse avoir droit aux tableaux, au théâtre, au cinéma, etc., comme il a droit à l’alphabet. »

Dans cette perspective, il me semblerait souhaitable que nous ne négligions pas les autres volets du programme, dont les actions plus traditionnelles d’éducation artistique et culturelle.

Mes chers collègues, je le répète, parce que la culture est au cœur de notre projet républicain, elle doit toujours être soutenue. Le groupe RDSE approuvera donc les crédits de la mission. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Laure Darcos. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

Mme Laure Darcos. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, avec le projet de loi de finances vient le temps des promesses. Celui de 2023 n’échappe pas à la règle.

Les moyens de la mission « Culture » sont abondés de 250 millions d’euros, ce qui représente une augmentation de 7,4 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2022. Il s’agit évidemment d’un motif de satisfaction, et nous aurions tort de considérer cet effort budgétaire comme négligeable. Mais est-il pour autant suffisant ? Je n’en suis pas certaine.

Tous ceux qui sont investis de la mission essentielle qui consiste à préserver le patrimoine, à favoriser l’acte de création et à promouvoir la culture pour tous s’alarment de l’augmentation exponentielle des coûts énergétiques. La filière du spectacle et le patrimoine sont particulièrement impactés.

Certes, l’État est intervenu puissamment, dans un passé récent, afin d’aider le monde de la culture à faire face aux conséquences de la crise sanitaire par un certain nombre de mesures transversales.

Le ministère de la culture a, pour sa part, apporté une réponse forte et singulière, qu’il faut saluer et qui se prolongera en 2023, afin notamment de permettre aux structures de surmonter les difficultés actuelles. Mais l’augmentation des crédits apparaît d’ores et déjà absorbée par l’inflation.

Chaque programme de la mission bénéficie d’un abondement par rapport à l’an dernier.

Le programme 175, consacré aux patrimoines, finance, comme vous le savez, les politiques de préservation et d’enrichissement du patrimoine culturel français.

Dans ce cadre est prévu l’accroissement des moyens alloués au fonds incitatif et partenarial pour les collectivités à faible potentiel financier, le renforcement du plan de sécurité des cathédrales, et un soutien renforcé à la politique d’archéologie préventive. Ce sont des propositions que nous pouvons approuver.

L’action de l’État se traduira également par un investissement accru dans la rénovation et la modernisation des établissements culturels, avec notamment l’augmentation de 3 millions d’euros de la subvention d’investissement du Centre des monuments nationaux (CMN) ou le renforcement des capacités d’investissement du musée d’Orsay, avec 1,5 million d’euros supplémentaires. Je m’en réjouis à titre personnel.

La création, à travers le programme 131, bénéficie d’une attention particulière avec l’ambition de soutenir l’emploi artistique et les artistes auteurs. Près de 13 millions d’euros sont consacrés à cette action. Je veux aussi souligner le renforcement des moyens alloués aux opérateurs de la création et la poursuite des projets d’investissements ambitieux dans les institutions emblématiques de ce secteur, à hauteur de 13,5 millions d’euros.

Enfin, la transmission des savoirs et la démocratisation de la culture, qui doivent être au cœur de notre pacte républicain, bénéficient elles aussi d’un soutien renouvelé.

Le pass Culture a désormais trouvé son rythme de croisière, et il est essentiel que chaque jeune, collégien ou lycéen, puisse bénéficier d’une offre diversifiée sur l’ensemble du territoire. L’effort en faveur de ce dispositif ne doit cependant pas se traduire par la diminution concomitante des moyens alloués aux territoires prioritaires et à l’éducation artistique et culturelle. Or tel ne semble pas être le cas concernant cette dernière.

À ce jour, l’EAC recouvre des réalités très hétérogènes par les formes qu’elle revêt, la pluralité des acteurs impliqués et la diversité des territoires où elle se déploie. Parce qu’elle est indispensable à la démocratisation de la culture et renforce l’égalité des chances, elle doit être soutenue sans réserve.

Je suis par ailleurs heureuse de constater les efforts budgétaires destinés à améliorer l’attractivité de l’enseignement supérieur « Culture », son insertion dans le paysage de l’enseignement supérieur et de la recherche, et l’insertion professionnelle des jeunes diplômés.

Pour autant, des difficultés persistantes affectent la création.

Je pense au spectacle vivant privé, confronté à de fortes contraintes conjoncturelles, notamment la hausse généralisée des coûts, mais aussi des contraintes structurelles, avec des pénuries de main-d’œuvre récurrentes. Après deux années catastrophiques en termes d’activités et de recettes, l’année 2022 a été synonyme de reprise en demi-teinte.

L’équilibre économique des festivals est, quant à lui, particulièrement dégradé. C’est toute une filière qui s’interroge sur son avenir et son modèle de développement.

Dans ce contexte, il a été demandé, malheureusement sans succès, une prolongation du crédit d’impôt spectacle vivant.

Au-delà de ce crédit d’impôt, il sera judicieux et nécessaire de réfléchir au renforcement de la filière musicale et du Centre national de la musique (CNM). Cependant, je n’anticiperai pas sur les propositions que notre collègue Julien Bargeton pourrait être amené à formuler dans le cadre de la mission parlementaire que lui a confiée Mme la Première ministre.

Je ne veux pas conclure mon intervention sans exprimer un regret à propos des réserves du Gouvernement sur les crédits d’impôt destinés aux différentes filières de la culture, que j’ai défendus en séance voilà huit jours. En raison d’une orthodoxie budgétaire poussée à l’extrême, la plupart d’entre eux n’ont pu être prolongés, mettant à mal de nombreux acteurs.

Il s’agit d’un véritable sujet d’inquiétude, même si j’ai obtenu une avancée importante pour les éditeurs de services de vidéo à la demande. Avouez toutefois, madame la ministre, que c’est une bien maigre consolation !

Telles sont, brossées à grands traits, les réflexions que je souhaitais vous soumettre.

Compte tenu des mesures positives que comporte le budget de la mission « Culture », les sénateurs du groupe Les Républicains voteront en sa faveur. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin.

Mme Vanina Paoli-Gagin. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le budget du programme « Création » dépasse pour la première fois 1 milliard d’euros. C’est une excellente nouvelle, à l’image de la hausse de 7 % des crédits dédiés à la mission « Culture ». Les aides exceptionnelles arrivent à leur fin, mais plusieurs mesures fiscales sont pérennisées jusqu’à 2024, comme le crédit d’impôt pour les représentations théâtrales d’œuvres dramatiques.

La fréquentation moyenne des lieux de spectacle vivant et des arts visuels reste inférieure au niveau observé en 2019. Il est essentiel de consolider la reprise d’activité après la crise de la covid-19 et pendant la crise de l’énergie.

Je souligne les 10 millions d’euros destinés au dispositif « Mondes nouveaux », dont l’un des objectifs est de faciliter l’accès à la culture en milieu rural, ce qui nous importe à tous ici. Notre groupe est particulièrement attaché à la démocratisation de l’offre culturelle pour tous et partout.

Je rejoins en revanche les rapporteurs de la commission, qui alertent sur la multiplication des objectifs et des labels. Ce phénomène vient souvent brouiller l’action du ministère auprès des professionnels de la culture.

Nous devons également rester en alerte sur la possibilité d’annulations ou de reports de festivals et grands événements de la culture en 2024 du fait de l’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques. Les établissements publics dédiés au patrimoine nous alertent également sur leur probable fermeture pendant les jeux. Ces événements majeurs ne doivent pas causer une crispation de l’offre culturelle. Je sais que mes collègues de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication sont particulièrement mobilisés en ce sens.

Concernant les mesures en faveur de la transmission des savoirs et de la démocratisation de la culture, je souligne les 50 millions d’euros de mesures nouvelles, qui ciblent principalement la jeunesse. C’est une très bonne chose, car la jeunesse est notre priorité.

La revalorisation des subventions destinées aux écoles nationales est un point très positif : elle permettra de participer à la rénovation thermique des bâtiments. Il ne faut pas oublier les écoles d’art territoriales, qui nécessitent des mesures similaires. Les collectivités qui en sont les propriétaires n’ont en effet pas toujours les moyens d’engager d’importantes rénovations. C’est très important pour nos territoires, madame la ministre.

Je me réjouis de la progression du pass Culture, dont la dotation augmente de 9,5 millions d’euros, pour atteindre 208,5 millions d’euros pour 2023. Rien n’est plus précieux que d’offrir à nos jeunes les moyens d’assouvir leur curiosité en matière d’offre culturelle. Les élèves des classes de sixième et de cinquième, qui s’ajouteront à la liste des bénéficiaires en 2023, pourront en témoigner.

Le programme « Patrimoines » sera doté de 1,10 milliard d’euros en crédits de paiement pour 2023, soit une augmentation de 7,5 %. C’est considérable.

Parmi les derniers crédits de paiement qui restent du plan de relance, 10 millions d’euros sont destinés au plan cathédrales. Comme l’ont souligné les rapporteurs, le financement des travaux de conservation et de restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris provient quasi exclusivement du mécénat.

Cette situation, madame la ministre, m’amène à mentionner la reconversion du site de l’abbaye de Clairvaux, dans le département de l’Aube, dont je suis élue. Vous le savez, un appel à manifestation d’intérêt a été lancé, et trois candidats ont été retenus ; ils sont encore en lice, dans le cadre d’un dialogue compétitif. L’État prend en charge une partie des travaux, avec 2 millions d’euros engagés dans le PLF pour 2023 pour restaurer le grand cloître, mais cet exemple nous appelle à réfléchir sur les moyens de mobiliser davantage les donateurs privés dans le cadre de la rénovation du patrimoine.

Aussi, j’ai défendu deux amendements concernant le financement de la culture dans le présent PLF ; ils n’ont malheureusement pas prospéré. Le premier visait à mobiliser l’épargne des Français par la création d’un livret C – C comme culture –, pour financer la création artistique et le patrimoine culturel en région. Le second tendait à lancer une souscription nationale, un peu sur le modèle de ce qui a été fait pour Notre-Dame, afin de soulager le coût des travaux engagés par l’État pour la reconversion de l’abbaye de Clairvaux. J’appelle de mes vœux une réflexion sur le sujet dans les prochains mois.

Enfin, je souligne l’urgence à soutenir la rénovation thermique des bâtiments du patrimoine, qui doivent bénéficier de l’engagement de l’État en faveur de la sobriété énergétique. Vous le savez, le coût de l’inaction en matière de transition écologique est astronomique. Et plus on attend, plus le coût est élevé. Les chantiers s’annoncent colossaux, mais essentiels.

Pour conclure, l’augmentation des crédits est bienvenue. Face aux défis, nombreux, j’appelle de mes vœux un engagement fort de la part du ministère de la culture, notamment pour réduire les inégalités territoriales en matière d’accès à l’offre culturelle et à la création. Nous devons également rester vigilants sur les conséquences de l’inflation et de la flambée des coûts de l’énergie sur les acteurs culturels les plus fragiles.

Notre groupe Les Indépendants – République et Territoires accueille favorablement les crédits de la mission « Culture ». (M. Didier Rambaud, rapporteur spécial, applaudit.)

Mme la présidente. La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, l’examen des crédits de la mission « Culture » s’établit une nouvelle fois dans un contexte d’extrême fragilité d’un secteur en pleine convalescence.

La crise de la covid-19 a profondément bouleversé les pratiques et les fréquentations du public. Si les fermetures totales, les jauges et les débats entre activités essentielles et non essentielles sont aujourd’hui un mauvais souvenir, la fréquentation n’a toujours pas retrouvé son niveau d’avant la crise. Elle a baissé de 15 % par rapport à 2019, que ce soit pour les musées ou les spectacles vivants ou les arts de la scène. Et ce chiffre n’est qu’une moyenne.

Des écosystèmes culturels déjà fragiles sont toujours en pleine incertitude. Les menaces que font peser les JO sur la saison culturelle 2024 n’aident pas à retrouver des perspectives rassurantes.

À cette situation déjà difficile est venue s’ajouter une autre crise, non plus sanitaire, mais énergétique et d’approvisionnement : l’explosion des coûts des factures d’électricité et de gaz, ainsi que des matériaux de construction impacte aussi très durement les équipements culturels et leurs opérateurs. Et là encore, les plus petits sont les plus exposés.

Face à cet état de crise multiple, il faut reconnaître que l’État a répondu présent. En témoignent les 2 milliards d’euros débloqués pour la culture durant le plan de relance, ainsi que les budgets successifs de la mission « Culture » à proprement parler, en constante augmentation. C’est d’ailleurs toujours le cas cette année, avec une augmentation de 7 % des crédits alloués.

Bien sûr, ce soutien est loin d’être parfait. On ne peut que regretter le fait que les efforts de relance soient plus importants sur le patrimoine que sur la création, l’absence de prise en compte de la relation systémique entre acteurs, surtout pour les petites structures associatives culturelles, ou encore la place de la rénovation énergétique, encore limitée dans les budgets.

Détaillons maintenant thème par thème les grandes composantes du budget.

J’évoquerai tout d’abord le patrimoine. Près de la moitié de l’augmentation du budget du programme 175 est due à la hausse des coûts et de l’inflation sur toute la chaîne de valeur culturelle. Il s’agit ainsi de financer des coûts en augmentation très forte pour les chantiers de plusieurs sites, comme les cathédrales de Soissons ou de Saint-Louis de Versailles, ainsi que des dépenses d’électricité, qui pourraient augmenter entre +128 % et +285 %, selon les estimations des rapporteurs.

Sur la création, l’effort, là aussi, est présent. Pour la première fois, le budget dépasse désormais la barre symbolique du milliard d’euros ; il faut le saluer. L’augmentation vise aussi bien à préserver les marges artistiques des opérateurs et des acteurs culturels face à l’inflation qu’à soutenir l’emploi via la revalorisation du Fonpeps, ou encore à financer plusieurs projets d’investissement et d’aménagement, comme ceux du Théâtre national de Chaillot ou de la Cité du Théâtre.

Vient enfin la transmission des savoirs, programme dont 25 % du budget est consacré au pass Culture, à hauteur de 208,5 millions d’euros. Certes, cette politique du chèque, y compris dans la culture, n’est pas l’idéal. Le dispositif pourrait en effet être mieux ciblé, mieux accompagné. L’enveloppe pourrait aussi être plus importante. Mais tout ce qui concourt à l’éveil culturel de la jeunesse, à lui offrir un accès simple à la diversité culturelle du pays, même sans médiation, doit être salué.

Nous l’avons vu, dans chacun des programmes, la crise énergétique est une donnée majeure. Et puisque l’on parle de facture énergétique, il ne faut pas oublier les collectivités territoriales. Celles-ci représentent en effet 75 % de l’investissement public en direction de la culture : 9,8 milliards d’euros en tout, contre 3,5 milliards d’euros pour l’État. Or les directeurs des affaires culturelles des collectivités anticipent des cadrages budgétaires stricts pour l’exercice 2023 et redoutent une baisse du budget des collectivités dédié à la culture de 10 à 20 %. Cette situation fait craindre que le volet culturel ne soit une variable d’ajustement pour les collectivités si celles-ci ne sont pas suffisamment soutenues, en raison de la faible reprise du secteur et malgré les filets de sécurité et autres plans de soutien.

Voilà pourquoi nous vous proposerons par le biais d’un amendement de soutenir davantage les collectivités pour absorber l’augmentation des factures de leurs équipements culturels.

Nous ne nous contenterons pas de gérer la casse, puisque nous vous proposerons également d’aller plus loin dans la planification, ce que ne fait pas ce budget. Nous souhaitons l’émergence d’un fonds correctement doté pour enclencher enfin la rénovation énergétique des équipements culturels. Plusieurs acteurs culturels ont fait part de leur volonté de s’engager dans cette voie, et nous voyons, au-delà de l’aspect climatique, que la crise énergétique leur a donné raison. Nous soutiendrons naturellement leurs revendications.

Enfin, madame la ministre, je tiens ici à me faire le relais de plusieurs inquiétudes concernant la planification culturelle à long terme de l’État. Même s’il n’est formellement pas rattaché à cette mission, le plan France 2030 est aussi un levier stratégique culturel. Or on y voit beaucoup de références aux jetons non fongibles – les non fungible tokens (NFT) –, au métavers et à d’autres gadgets technoculturels qui, à l’heure où nous parlons, au-delà de l’effet bulle médiatique, se sont souvent révélés soit des arnaques grossières, soit des gouffres financiers sans fin, comme en témoigne aujourd’hui la situation de Meta, la firme mère de Facebook.

Madame la ministre, il y a mieux à faire, ne serait-ce que pour la musique. Nous en parlerons tout à l’heure, mais le soutien au CNM doit être renforcé, que ce soit par le biais d’une fiscalité affectée plus diversifiée ou par un soutien de l’État renforcé. Nous attendons ainsi les conclusions de la mission confiée à notre collègue Julien Bargeton.

Le budget que nous examinons aujourd’hui est un budget de rémission, un budget qui tente encore de pallier les difficultés d’un secteur dont l’écosystème est riche dans notre pays, mais qui se révèle aussi d’une infinie fragilité.

Il lui manque le souffle d’une grande relance culturelle. Par conséquent, nous déterminerons notre vote sur les crédits de la mission en fonction des débats sur les amendements. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

Mme la présidente. La parole est à M. Julien Bargeton. (M. Didier Rambaud, rapporteur spécial, applaudit.)

M. Julien Bargeton. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, ce budget est inédit. Il connaît une hausse très forte, qui fait suite à de précédentes augmentations.

Les crédits de paiement s’élèvent à 3,7 milliards d’euros, soit une hausse record de 255 millions d’euros, presque 7,5 %.

D’ailleurs, tous les crédits augmentent. Il n’y a pas de hausses d’un côté et de baisses de l’autre. La hausse est globale : +7,6 % pour le patrimoine, +10 % pour la création – pour la première fois de l’existence de ce programme, et pour la première fois depuis que le ministère de la culture existe, l’enveloppe qui lui est allouée dépasse le milliard d’euros –, +6,7 % pour la transmission et la démocratisation et +4,7 % pour le soutien aux politiques transversales.

Cette hausse globale des crédits du ministère, qui concerne tous les secteurs, intervient alors même que, l’an dernier, les crédits étaient déjà en augmentation de 8 %. Nous nous réjouissons de cette hausse structurelle du budget du ministère de la culture.

Certes, il est vrai que cette augmentation s’inscrit dans un contexte d’inflation et de crise énergétique ; cela a été souligné par tous.

Certaines mesures ciblées visent à répondre à ces problèmes, notamment pour faire face au surcoût des chantiers. Ainsi, le chantier de la cathédrale de Soissons voit une augmentation de 20 % de ses crédits, et 13 millions d’euros supplémentaires sont alloués au château de Villers-Cotterêts. De fait, en raison de la hausse des coûts de l’énergie et de l’inflation, les chantiers culturels sont de plus en plus chers.

D’autres mesures visent le pouvoir d’achat des agents du ministère, qui bénéficieront de 15,2 millions d’euros consacrés à la poursuite du plan de rattrapage indemnitaire en direction des corps de catégorie A+, à la mise en œuvre de la revalorisation de la rémunération des agents contractuels et à la mise en place d’un régime indemnitaire pour les enseignants-chercheurs des écoles nationales supérieures d’architecture.

Marqué par une hausse globale et par des hausses pour faire face au contexte, le budget finance aussi des mesures innovantes.

Il en va ainsi de la deuxième phase de « Mondes nouveaux », programme novateur en direction des créateurs dans tous les champs de la création contemporaine – spectacle vivant, arts visuels, musique, design… –, qui recevra 10 millions d’euros supplémentaires en 2023.

Le plan finance également le plan d’action pour les métiers d’art, auquel 5,5 millions et demi de plus sont accordés.

En outre, au-delà des crédits stricto sensu du ministère, le budget apporte son soutien à des dispositifs innovants et utiles pour le secteur culturel, comme le loto du patrimoine, qui a permis de lever 100 millions d’euros en quatre ans pour le patrimoine dit « de proximité. »

Cela permet la poursuite d’investissements dans des institutions emblématiques. Comme sénateur de Paris, je me dois de citer les 5 millions d’euros consacrés à la salle Jean Vilar du Théâtre national de Chaillot, les 2 millions d’euros affectés à l’extension et au réaménagement de l’Institut du monde arabe ou encore les 15 millions d’euros destinés au palais de la Cité. Bref, les grands chantiers, qui restent importants, se poursuivent et gagnent en ampleur en 2023 grâce à cet effort.

Le pass Culture a beaucoup été évoqué. Je ne peux toutefois que constater que ses crédits sont souvent ponctionnés pour gager certains amendements et assurer ainsi leur recevabilité financière.

M. Pierre Ouzoulias. C’est sa seule utilité !

M. Julien Bargeton. La règle issue de la loi organique relative aux lois de finances (Lolf) impose un tel gage. Mais je regrette que ces crédits en particulier soient ciblés presque systématiquement. Il est vrai qu’ils ont été augmentés de 9,5 millions d’euros par rapport à l’année dernière, parce que l’expérimentation menée a démontré que le dispositif fonctionnait.

Les statistiques parlent d’elles-mêmes : en l’occurrence, 2,1 millions de jeunes sont inscrits sur l’application et 14 millions de réservations de produits culturels ont été opérées par le biais du pass Culture, pour un montant total de 235 millions d’euros. Enfin, 87 % des jeunes concernés ont fait l’acquisition d’un bien culturel par ce moyen.

Cette expérimentation audacieuse est donc une réussite. Elle a évolué. Alors que beaucoup d’observateurs pariaient sur son échec, elle a rencontré son public. Pour l’année prochaine, la mesure est étendue pour toucher les élèves de cinquième et de sixième, et elle le sera encore à l’avenir.

L’accroissement de la part collective du dispositif va dans le bon sens, parce que celui-ci doit être accompagné d’une médiation culturelle.

« L’audace croît à l’expérience », écrivait William Butler Yeats, prix Nobel de littérature en 1923 ; je sais que vous aimez la poésie, madame la ministre. C’est l’alliance entre audace et expérience qui a permis le succès du pass Culture : l’audace pour le créer ; l’expérimentation pour tirer les enseignements de ses premiers pas et le faire évoluer. Il faut poursuivre ainsi.

En raison de leur augmentation globale, ainsi que des éléments précis que j’ai évoqués, notre groupe votera les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – M. Didier Rambaud, rapporteur spécial, applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Lucien Stanzione.

M. Lucien Stanzione. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, en France, le droit de participer à la vie culturelle est rarement considéré comme relevant de l’égalité. La crise sanitaire a pour avantage d’avoir mis en évidence ce qui est considéré comme essentiel et ce qui ne l’est pas.

Les crédits alloués à la mission « Culture » ont enregistré une hausse remarquable, et les priorités définies pour 2023 semblent être en phase avec les besoins du secteur. Reflètent-ils pour autant une politique ambitieuse ? Peut-être.

Madame la ministre, ces moyens supplémentaires sont les bienvenus, mais ils ne sont pas suffisants. Face à l’inflation et à la fin des aides liées au covid-19, l’effort doit être plus grand. La France est forte de sa richesse culturelle. Elle est reconnue pour cela dans le monde entier. Soyons à la hauteur. Il y a urgence, car les voyants sont au rouge.

L’inégalité face à cette reprise a de quoi nous inquiéter. Le secteur souffre d’un manque de visibilité, et nos festivals sont plus que jamais menacés par la crise énergétique. Les petites structures se demandent même si elles survivront à l’hiver. Pourquoi avoir promu le « quoi qu’il en coûte » si les fermetures définitives d’établissements surviennent en 2023 et peut-être en 2024 ?

La première source de financement de la culture en France n’est pas l’État ; ce sont bel et bien les collectivités territoriales. Or, on le sait, les budgets de la culture sont les premiers touchés. Il est donc plus que jamais nécessaire de soutenir nos territoires dans leurs pratiques culturelles. Oui au fonds d’innovation territoriale en 2022, même si sa conception ne répond toujours pas au renforcement de la contractualisation entre l’État et les collectivités que nous demandons.

Plusieurs mesures fiscales positives visant à favoriser la reprise d’activité sont annoncées. Outil phare de votre budget, le pass Culture verra ses crédits augmenter, afin d’être accessible dès la sixième. Il ne remplacera toutefois jamais une politique forte d’éducation et de sensibilisation à la culture. Son utilisation reste très inégale en fonction des territoires, et il profite encore trop aux industries culturelles. Il ne saurait se substituer à l’action de l’État.

Madame la ministre, vous avez fait de la jeunesse l’une de vos priorités, et nous vous en félicitons. Mais attention à l’inachevé ! La réforme des écoles nationales supérieures d’architecture (Ensa), qui suscite l’inquiétude sur nos travées, en est un exemple, même si la modernisation de ces établissements est indispensable. Nous déplorons que les nouveaux moyens mis à disposition pour les bourses ne bénéficient qu’aux étudiants des écoles nationales, et pas à ceux des écoles territoriales.

Enfin, bien que l’année 2022 ait vu le retour des festivals à un format normal, leur avenir n’en est pas moins compromis. Dépenses énergétiques, inflation des montants des cachets, prestations extérieures, absence de personnels qualifiés, raréfaction des bénévoles, pénuries de matériel… la liste des difficultés qu’ils affrontent ne cesse de s’allonger. La réponse de l’État à ce constat se caractérise par un engagement modeste et une faible coordination avec les collectivités territoriales.

La dotation du fonds de soutien aux festivals ne sera pas revalorisée en 2023, au regard de l’inflation et du coût de l’énergie. C’est injuste. Pire, le ministre de l’intérieur a annoncé de possibles annulations et reports de festivals en 2024, en lien avec l’organisation des jeux Olympiques.

Sans concertation préalable avec les représentants des organisateurs, tels que le syndicat national des producteurs, diffuseurs, festivals et salles de spectacle musical et de variété (Prodiss), le syndicat des musiques actuelles (SMA), le syndicat national des entreprises artistiques et culturelles (Syndeac), ou les festivals eux-mêmes, le Hellfest, les Vieilles Charrues, les Eurockéennes de Belfort, le festival d’Avignon et tous les autres, il est envisagé de changer les dates ou d’annuler certains événements.

Cette nouvelle a jeté le plus grand doute sur les perspectives qui se dessinent pour ces manifestations. L’inquiétude dans notre commission est très forte à ce sujet ; n’opposons pas le sport à la culture !

Madame la ministre, nous sommes à vos côtés pour que vous fassiez entendre raison au ministre de l’intérieur et encore plus à la Première ministre, afin que sport et culture ne soient pas incompatibles en 2024. Cela ne doit pas être l’un ou l’autre ; ce sont bien le sport et la culture en même temps.

La culture, vecteur d’émancipation et d’épanouissement, anime la vie des quartiers et évite des errements à certains de nos jeunes. C’est elle qui doit venir aux Français, et non l’inverse.

Malgré ces quelques remarques et réticences, que vous prendrez sûrement à votre compte (Mme la ministre sourit.), et au vu de l’évolution positive des moyens mis en œuvre, mon groupe se prononcera en faveur de ces crédits. (Applaudissements sur les travées des groupes GEST et SER, ainsi quau banc des commissions.)

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Ouzoulias.

M. Pierre Ouzoulias. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, notre époque est celle de la crise de la médiation. Les élus de la République que nous sommes la vivent en permanence et sont ainsi troublés quand l’exécutif décide de consulter directement la Nation par l’intermédiaire de citoyens tirés au sort.

Ce déconstructionnisme social est aussi à l’œuvre dans le domaine culturel, et le pass Culture en est l’un des symptômes. Il participe de l’illusion qu’un jeune peut être, sans médiation, l’acteur de sa propre formation culturelle. Réduit à sa fonction de consommateur, il est toutefois douteux qu’il puisse s’extraire de son habitus social pour mettre à profit toutes les potentialités émancipatrices de la culture.

La médiation culturelle telle qu’elle avait été pensée par André Malraux aux origines du ministère de la culture reposait sur le principe que l’accès à la culture était entravé par des déterminismes sociaux et géographiques et qu’il fallait, pour les dépasser, « aller au-devant de ceux qui ne savent pas encore que l’offre culturelle leur est accessible ».

En s’affranchissant de leur condition sociale culturelle, les citoyens pouvaient jouir du droit constitutionnel de « l’égal accès de l’enfant et de l’adulte » à la culture. Pensée comme une œuvre de libération, la médiation devait s’exercer au plus près des publics, par une étroite collaboration avec les collectivités et les acteurs privés.

D’abord portée par l’essor des maisons de la culture, cette politique doit maintenant être reconsidérée pour s’adapter aux nouveaux usages. Ainsi, l’enquête réalisée en 2008 sur les pratiques culturelles en France a montré que le téléphone était devenu le premier terminal culturel nomade, et donc la porte d’entrée principale vers de nombreux univers culturels.

L’efficacité technique de cet outil et sa large diffusion dans la population ont apporté beaucoup de bénéfices. Elles expliquent par exemple la progression spectaculaire de l’écoute musicale journalière, qui a doublé en dix ans. Elle était de 9 % en 1973, et elle est actuellement proche de 60 %.

Néanmoins, cette banalisation des supports audio cache une socialisation de leurs usages. Les modules en baladodiffusion sont ainsi beaucoup plus suivis par les diplômés de l’enseignement supérieur que par les autres.

À l’inverse, l’utilisation de l’outil numérique semble préjudiciable à d’autres pratiques culturelles, sans doute parce que ces dernières exigent une participation plus active. C’est le cas de la lecture de livres, qui est en déclin constant, ou de la visite de musées et de monuments historiques.

Je doute que le pass Culture puisse contribuer à inverser de telles évolutions. Pour les musées et les monuments, la visite scolaire serait sans aucun doute plus efficace pour rapprocher les jeunes publics d’un patrimoine qui leur est de plus en plus étranger.

À mon sens, la crise actuelle du cinéma trouve certaines de ses causes dans cette particularisation de la pratique et dans la perte d’une culture cinématographique ouverte à la diversité de ses formes d’expression. Avec une certaine nostalgie, je me demande par quoi ont été remplacés les ciné-clubs des lycées d’antan.

En 2023, le budget de la culture connaîtra une hausse absolument indéniable. Néanmoins, on peut s’interroger sur sa contribution à la nécessaire adaptation des politiques publiques aux évolutions multiples des pratiques. La crise pandémique a montré la fragilité du modèle économique des grands établissements, fondé sur l’illusion que ceux-ci pourraient trouver leur équilibre sans dotation du ministère.

L’indispensable régénérescence de la médiation culturelle oblige à questionner les modalités de la participation de tous les opérateurs du ministère à une politique nationale qui se donnerait pour suprême dessein de rapprocher tous les publics de la culture.

Autrement dit, en termes plus techniques, quelle est la capacité de la délégation générale à la transmission, aux territoires et à la démocratie culturelle de votre ministère à influer sur les multiples politiques sectorielles mises en œuvre par des agences autonomes et financées par des taxes affectées ?

Depuis plusieurs années, la commission de la culture du Sénat alerte les ministres successifs sur la nécessité de rendre du sens au principe du droit d’accès à la culture. L’évolution des pratiques culturelles fait de cette refondation une impérieuse nécessité. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER, GEST, RDSE et UC.)

Mme la présidente. La parole est à M. Max Brisson. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Max Brisson. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, j’interviens en lieu et place de Céline Boulay-Espéronnier, empêchée au dernier moment. Je souhaite interpeller le Gouvernement sur trois sujets différents.

Le premier est la fréquentation des lieux culturels. Nous ne connaissons pas l’automne prometteur que vous annonciez au mois de juin, et le bilan actuel est très contrasté. Certains acteurs se sont bien redressés ; d’autres prennent de plein fouet les nouveaux modes de consommation et les nouvelles approches numériques, après la dure période de la pandémie.

Pour ne rien arranger, le ministre de l’intérieur a récemment annoncé l’annulation de toutes les manifestations culturelles de 2024, en marge des jeux Olympiques.

Comment avons-nous pu en arriver à une mesure si radicale ? Quelles garanties pouvez-vous donner aux organisateurs de manifestations culturelles pour 2024 ? Madame la ministre, il faut les défendre. Vous devez vous tenir à leurs côtés pour leur donner les moyens de faire face à ces défis et les assister alors qu’ils s’engagent dans une transformation stratégique durable.

Votre projet de budget prend-il vraiment en compte le fléchage nécessaire des crédits alloués pour répondre à la diversité de ces situations ? On peut parfois en douter, d’autant qu’à ces évolutions structurelles s’ajoutent les conséquences de la crise de l’énergie et de l’inflation, qui amputent et amputeront les budgets des organisateurs comme ceux des publics et, surtout, des plus fragiles d’entre eux.

Je regrette donc vivement que vos crédits ne soient pas mieux fléchés en fonction de cette diversité. Au-delà de leur hausse, je déplore que l’on ne perçoive pas une inflexion des actions pour aider les acteurs de la culture à amorcer ces mutations nécessaires. Il importe pourtant de les aider à mener à bien cette transformation.

Le deuxième sujet sur lequel j’appelle votre attention est le patrimoine. J’ai compris que vous n’aviez guère apprécié mon commentaire sur la rénovation du château de Villers-Cotterêts. (Mme la ministre sourit.)

Entendons-nous bien : la réhabilitation du bâtiment n’est pas en question, mais vous ne pouvez pas m’empêcher de penser que le projet culturel est arrivé après la décision présidentielle concernant le programme, légitime, de réhabilitation. J’ai eu le sentiment qu’il fallait remplir une case et que ce projet culturel n’était pas au cœur du chantier. Le rapporteur spécial Vincent Éblé a dit le reste quant aux dépassements budgétaires.

Par ailleurs, notre commission est attachée au rôle des architectes des Bâtiments de France (ABF). Il est souhaitable que, dans notre pays, le déploiement nécessaire des énergies renouvelables (EnR) ne nous conduise pas aux mêmes erreurs en termes de défiguration des patrimoines et des paysages que celles que nous avons pu connaître lors du déploiement d’autres réseaux. Il convient donc de préserver le rôle, la mission et la présence sur le terrain de ces agents.

Comme l’a très bien dit notre rapporteur pour avis Sabine Drexler, ce réseau exceptionnel ne doit-il pas être renforcé face à l’ampleur de la tâche qui l’attend ? Sa réduction génère des lenteurs et des prises de décisions parfois peu argumentées. Cela contribue sur le terrain à susciter des tensions avec les maires et à remettre en cause la pertinence même de l’expertise et de la raison d’être des ABF. J’en appelle à votre vigilance à ce sujet.

Je forme le vœu que l’excellent rapport de nos collègues Anne Ventalon et Pierre Ouzoulias retienne l’attention du Gouvernement. Une partie de notre patrimoine ecclésial est menacée et il est urgent d’entreprendre un travail partenarial avec les autorités religieuses, les communes et l’État. L’acceptabilité de futurs financements publics communaux et départementaux est à ce prix, et c’est une condition de la préservation de ce patrimoine.

De même, nous regrettons qu’une politique adaptée en matière de rénovation énergétique du patrimoine historique n’émerge pas de ce budget, comme l’a souligné notre rapporteur.

Enfin, le troisième sujet est le pass Culture. Sa montée en charge camoufle mal une discrimination sociale préoccupante. Ce dispositif profite-t-il vraiment à ceux qui en ont le plus besoin ? Ne serait-il pas nécessaire d’y introduire des conditions de ressources ? Ne devrions-nous pas relativiser son succès, au vu des inscriptions groupées pratiquées dans certaines écoles ?

Tels sont les éléments que je souhaitais souligner à propos des crédits de l’une des deux missions qui relèvent de votre ministère. Ceux-ci sont en hausse, il faut le saluer, comme l’a fait Sylvie Robert, notre rapporteure pour avis.

Je termine par un coup de chapeau au dialogue que vous souhaitez instaurer avec la Haute Assemblée, y compris sur le sujet sensible des restitutions et de la préservation des collections nationales. Vous trouverez ici une assemblée intransigeante sur les principes et ouverte sur les modalités. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC, ainsi quau banc des commissions. – M. Pierre Ouzoulias applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Pierre Monier. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme Marie-Pierre Monier. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, les difficultés et les incertitudes de la période actuelle n’épargnent aucun secteur, dont celui du patrimoine.

La crise sanitaire avait été l’occasion d’apporter des réponses justes, notamment en matière de soutien public aux activités les plus fragilisées. Le plan de relance a permis à la fois d’accroître fortement les crédits alloués au patrimoine et d’engendrer une dynamique générale dont les activités du secteur bénéficieront encore en 2023.

Aussi, nous saluons l’augmentation des crédits du programme 175 au même rythme que la hausse de ceux de l’ensemble de la mission, soit +7 % par rapport à l’an dernier.

Néanmoins, cette croissance doit être relativisée, car ces crédits ne seront plus complétés par ceux du plan de relance, qui avait permis de dégager 227 millions d’euros supplémentaires pour le patrimoine. Cette année, les 77 millions d’euros en plus ne compenseront que partiellement ce montant.

Cette situation fait donc naître des inquiétudes quant à la capacité de ce budget à accompagner les acteurs du patrimoine, qui vont devoir faire face à l’inflation et à l’explosion des tarifs de l’énergie, mais aussi à la poursuite de la dynamique d’investissement liée au plan de relance.

L’envolée des prix de l’énergie va continuer à peser fortement en 2023 sur l’équilibre financier de structures telles que les musées et les monuments. Parallèlement, de nombreuses collectivités, notamment les plus petites d’entre elles, ne placeront peut-être pas le patrimoine parmi leurs priorités. Elles auront besoin d’un soutien plus affirmé de l’État pour assurer la sauvegarde et l’entretien des sites dont elles ont la charge.

Lors de chaque projet de loi de finances, nous défendons une répartition plus équilibrée des crédits sur les territoires. Cette année, nous notons avec satisfaction que l’augmentation des crédits en faveur de l’entretien et de la restauration des monuments historiques, hors grands projets, profite essentiellement aux moyens déconcentrés mis à disposition des Drac pour la restauration de monuments historiques appartenant à l’État.

Parallèlement, les moyens du fonds incitatif et partenarial (FIP) destiné aux monuments historiques situés dans des collectivités à faibles ressources ont été renforcés de 2 millions d’euros.

Nous souhaitons toutefois appeler votre attention sur le mode de répartition de l’enveloppe de crédits locaux entre les différents projets. Il semble que les grosses opérations, consommant parfois plus de 50 % du total, soient favorisées. Or un tel choix se fait nécessairement au détriment d’autres projets de dimension plus restreinte. Ainsi, peu de travaux d’entretien des monuments sont réalisés, et les communes les moins sensibilisées au patrimoine ne sont pas encouragées à déposer des dossiers.

Les moyens humains des services déconcentrés de l’État – services départementaux, Drac et directions des affaires culturelles (DAC) – constituent un autre point de vigilance. Une baisse du nombre d’agents qualifiés s’accompagne forcément d’une baisse du soutien apporté aux petites collectivités.

En outre, nous ne pouvons que regretter une nouvelle fois que les crédits relatifs à l’architecture et aux espaces protégés stagnent. Qu’il s’agisse de reconquête des centres-villes ou de transition énergétique de l’habitat ancien, le dispositif « site patrimonial remarquable » est un outil très efficace, dont votre ministère devrait se saisir pleinement.

Je termine avec les crédits en faveur de l’action Patrimoine archéologique, qui dénotent un soutien continu de l’archéologie préventive et des missions de service public réalisées par l’Institut national de recherches archéologiques préventives (Inrap) et les services d’archéologie des collectivités territoriales. Pour autant, le surcroît d’activité d’aménagement qui fait suite au plan de relance nécessite des fonds supplémentaires, afin de traiter les demandes sans allonger les délais des chantiers.

Enfin, nous saluons les augmentations des crédits à destination des centres de conservation et d’études (CCE) et des fouilles archéologiques programmées, en partenariat avec le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) et les universités.

Pour conclure, si ce budget vient à l’appui des actions de valorisation et de protection du patrimoine, nous émettons quelques réserves quant à sa capacité à répondre totalement aux difficultés auxquelles sont confrontés les acteurs du secteur. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Else Joseph. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Else Joseph. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, malgré deux années difficiles, l’accès à la culture et le soutien au patrimoine doivent pouvoir rebondir.

Ce budget intervient après les actions menées dans le cadre du plan de relance, dans le contexte d’une reprise timide et de pratiques culturelles qui changent ; le mécénat diminue, et certaines aides de nos régions aussi.

Si nous saluons la hausse des crédits, nous craignons que celle-ci ne soit neutralisée par l’inflation, ce qui nous conduit à une certaine déception. Les surcoûts annoncés seront rédhibitoires et éloigneront certains publics de l’accès à la culture.

Si nous nous réjouissons évidemment l’augmentation des crédits du programme « Patrimoines », il nous semble nécessaire de réfléchir à une démarche plus ambitieuse en matière de rénovations et de réhabilitations dans nos territoires.

Voilà quelques mois, mon collègue Olivier Paccaud et moi-même avions rappelé l’importance des patrimoines privé et local : les crédits doivent aussi bénéficier à ces projets de proximité. L’innovation culturelle se fait dans les territoires ; c’est une clé pour la reprise et pour le soutien à la vie locale. Voilà un vrai signal !

Il faut ainsi encourager toutes les solutions qui permettent aux citoyens de financer des projets. Le loto du patrimoine en a été une, mais il ne saurait être l’unique. Les circuits courts peuvent aussi fonctionner dans ce domaine ; il faut donc permettre un financement direct. Les services de l’État doivent parler aux acteurs locaux sans filtre et appuyer les projets de nos collectivités.

Nous saluons la prise en compte de la crise énergétique, mais il importe aussi de constater la majoration des coûts dans les chantiers.

L’avenir de la culture, c’est d’abord la question de son accès. La reprise des entrées dans les musées est un signe positif, mais des incertitudes pèsent sur leur fréquentation et sur leurs amplitudes d’ouverture.

Les mêmes incertitudes concernent la jeunesse, ce qui me conduit à évoquer le pass Culture et la question de la création et de la découverte du patrimoine. Ce dispositif est une aide appréciable, mais la médaille a son revers : on se rapproche fâcheusement de la politique du carnet de chèques.

Le pass Culture profite à tous, mais il avantage les initiés, ceux qui savent déjà ce qu’ils vont faire. Un jeune qui aime les livres et les musées sait de quelle manière il va l’utiliser, mais un autre ne saura que faire de cette aide. Il s’agit donc d’une démarche qui confirme plus qu’elle ne suscite les initiatives culturelles.

En matière d’éducation artistique, on ne peut que déplorer une baisse des fonds. Une démarche coconstruite avec l’éducation nationale serait, à mon sens, plus judicieuse qu’une addition de crédits.

Les festivals ont bien résisté, malgré deux années rudes. Comme les acteurs du secteur l’ont indiqué, ils ont été les premiers à fermer et les derniers à ouvrir. Après ces deux années, les publics sont globalement restés fidèles – tant mieux ! –, même si nous déplorons la disparition de certains festivals. L’offre est toujours abondante. Mais pour combien de temps encore ?

À peine sommes-nous sortis de cette crise que de nouvelles difficultés se font jour, malgré un heureux événement : l’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques 2024. Sans opposer le sport à la culture, sans créer de rivalité entre les manifestations, nous regrettons un manque de visibilité et une absence de dialogue entre tous les partenaires concernés.

Les festivals sont tributaires d’aléas de toutes sortes, dont la répétition pose question. Il a été envisagé de réfléchir à un système d’assurance qui prendrait en compte les risques non seulement artistiques, mais aussi climatiques. Peut-être est-ce une piste à explorer.

Sans opposer le risque à la protection, comment se lancer durablement si les perspectives sont sombres ? Sans cette assurance, dans tous les sens du terme, le danger est que les festivals fassent les frais de la loi du marché. Quid des bénévoles et de l’engagement des collectivités territoriales si ce manque de visibilité s’installait ? Un festival se prépare au moins deux ans à l’avance.

Soutenons nos festivals, qui ne doivent pas faire les frais de ces nouvelles contraintes. Nous regrettons toujours l’absence de référent festival à l’échelon national comme régional, alors qu’il s’agit d’un sujet brûlant pour l’orientation des politiques culturelles et pour la défense de l’accès à la culture sur tout le territoire.

Quelle place voulons-nous donner à la culture dans notre société ? Soyons ambitieux et inventifs.

Nous voterons les crédits de la mission « Culture », malgré certaines insuffisances et de nombreuses réserves. Nous comptons sur vous pour gagner les arbitrages nécessaires ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC. – Mme Sabine Drexler, rapporteur pour avis, applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Rima Abdul-Malak, ministre de la culture. Madame la présidente, monsieur le président de la commission, cher Laurent Lafon, messieurs les rapporteurs spéciaux, chers Vincent Éblé et Didier Rambaud, mesdames les rapporteures pour avis, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis très heureuse d’être avec vous aujourd’hui pour évoquer le budget du ministère de la culture, dont les crédits connaissent une hausse quasi historique.

Je tiens avant tout à vous remercier des échanges constructifs et très précis que nous avons eus au fil des derniers mois, en commission ou lors de nos rendez-vous bilatéraux ; ce sont des moments toujours très utiles. Je salue également la qualité de vos rapports, qui sont des sources d’inspiration pour nos travaux au quotidien.

Vous l’avez tous dit, le monde de la culture vient de traverser deux ans de pandémie, dont nous ressentons encore les effets, mais il reste plus résilient et plus fort que dans de nombreux pays, y compris parmi nos voisins européens.

Une telle résistance s’explique par les aides déployées par l’État pendant la crise, ainsi que par la capacité d’innovation permanente et de lien entre les publics et les lieux culturels que l’ensemble de l’écosystème a su maintenir.

Bien avant cette crise sanitaire, une autre révolution est venue affecter le monde de la culture depuis au moins vingt ans : la révolution numérique, porteuse à la fois d’opportunités et de menaces pour la création et pour les auteurs. La crise sanitaire est venue accélérer ces mutations déjà en germe. Elle a amplifié la puissance des géants du numérique et a souligné les inégalités sociales de l’accès à la culture.

Les études décennales du ministère de la culture offrent un outil très précieux pour observer les évolutions structurelles ; l’enquête sur les pratiques culturelles des Français a montré le creusement d’une fracture générationnelle, précipitée par la pandémie, mais qui était présente bien avant elle. On pourrait la résumer ainsi : aux plus âgés, une culture de sortie vers les musées, les spectacles, etc. ; aux plus jeunes, une culture que l’on pourrait dire « de salon », c’est-à-dire appuyée sur une addiction aux écrans qui se développe, sans se limiter à la jeunesse. C’est vraiment à toute la population qu’il nous faut donner et redonner envie de culture en chair et en os.

Telle est en tout cas l’ambition que je porte au ministère de la culture. C’est la raison pour laquelle ce budget est historiquement haut, puisque les crédits de la mission « Culture » pour 2023 s’élèvent à 3,7 milliards d’euros, en hausse de 7,4 % par rapport à l’an passé.

Au-delà de ces crédits, le ministère disposera de crédits d’un montant de 704 millions d’euros au titre de la mission « Médias, livre et industries culturelles » – nous y reviendrons –, de 3,8 milliards d’euros consacrés à l’audiovisuel public, de 769 millions d’euros de taxes affectées et de près de 2 milliards d’euros de dépenses fiscales.

Chère Laure Darcos, j’ai bien entendu vos inquiétudes concernant la pérennité de certains crédits d’impôt. Le Gouvernement souhaite mener une évaluation précise de ces derniers avant de rediscuter de leur éventuelle prorogation. Quoi qu’il en soit, soyez assurée que nous serons très vigilants.

En additionnant ces différentes enveloppes, ce sont au total 11 milliards d’euros de financements dont le ministère de la culture aura la responsabilité. Ces crédits nous permettront de mener la politique culturelle ambitieuse que nous portons pour notre pays.

Le budget que je vous présente se veut un budget de résilience et d’action.

C’est un budget de résilience, car comme l’ont indiqué les différents orateurs, nous sommes encore en convalescence post-pandémie, et nous devons accompagner l’ensemble des secteurs culturels pour faire face à ce défi.

Parmi les défis du présent, il y a aussi la crise énergétique ; ce point a également été largement évoqué par les précédents orateurs. Nous en avons fait une priorité de ce budget, puisque 56 millions d’euros sont débloqués pour répondre aux besoins immédiats résultant du contexte énergétique que nous connaissons.

Ce budget est ensuite un budget d’action pour préparer l’avenir. Dans le cadre de la priorité donnée à la transition écologique et à la sobriété énergétique, il permet en effet d’investir à plus long terme dans des travaux significatifs visant à améliorer les performances énergétiques, notamment l’isolation thermique des bâtiments culturels.

Le budget d’investissement de la mission « Culture » s’élève en 2023 à 627 millions d’euros, soit une augmentation de 70 millions d’euros. Les travaux du musée d’Orsay, du Théâtre national de Chaillot, des écoles d’architecture de Limoges et de Lille contribueront à améliorer la performance énergétique de ces bâtiments et, partant, à réduire à terme leurs factures d’énergie.

Nous engageons ainsi le gigantesque chantier de décarbonation de la culture, que j’ai placé au cœur de mes priorités. Celui-ci – je vous rejoins sur ce point, monsieur Brisson – doit être mené de manière à concilier la préservation et la valorisation du patrimoine et le développement des énergies renouvelables. Mon ministère travaille par exemple en ce moment même à une instruction visant à concilier – c’est tout à fait possible – l’intégration des panneaux photovoltaïques et la préservation du patrimoine.

Je vous présenterai ce budget en concentrant mon propos autour de cinq grandes orientations qui me tiennent à cœur : l’éducation artistique, la souveraineté, le patrimoine, l’emploi et l’international.

Je remercie les différents orateurs qui ont évoqué l’éducation artistique. Je me félicite que nous nous rejoignions sur ce premier enjeu crucial qu’est la sensibilisation des jeunes générations dès le plus jeune âge à toutes les possibilités d’émancipation, de développement de l’esprit critique et de la confiance en soi que permet la culture.

Dans le budget pour 2023, 14 millions d’euros supplémentaires sont dédiés à cette priorité, dont 4 millions d’euros pour l’éducation artistique hors pass Culture, et 9,5 millions pour le pass Culture, que vous avez largement évoqué.

Je souhaite insister sur le fait que, depuis quelques mois, il s’agit d’un nouveau pass Culture, plus collectif et plus participatif. Les professeurs de collège disposent de 25 euros par élève pour organiser des sorties scolaires. Le spectacle vivant, notamment le théâtre, est d’ailleurs le plus souvent choisi, ce qui n’était pas le cas lorsque le pass était individuel.

Par ailleurs, 2,2 millions de jeunes sont inscrits au pass Culture, ce qui leur permet de bénéficier de la part individuelle de ce dispositif. C’est colossal.

Il ne s’agit pas que d’une plateforme d’achat ; je vous rejoins sur ce point, cher Didier Rambaud. C’est un outil qui vise à faire participer les jeunes, à les engager et à en faire, non pas uniquement des consommateurs, cher monsieur Ouzoulias, mais des protagonistes.

À l’époque de Malraux, internet et les smartphones n’existaient pas. Il va de soi que l’enjeu de la médiation est au cœur de nos politiques. Mais le pass Culture répond aux usages des jeunes, qui, comme les adultes, possèdent tous un smartphone. Compte tenu de l’addiction que suscitent ces machines, c’est par le biais de celles-ci que nous devons atteindre les jeunes.

Bien au-delà du simple clic d’achat, le pass Culture a permis de développer des parcours, un cercle d’ambassadeurs, il est l’occasion d’expériences. J’y reviendrai lors de l’examen des amendements si vous le souhaitez.

Enfin – et je m’en félicite –, le pass Culture devient de plus en plus européen. L’Espagne, où je me suis rendue au mois de septembre, a lancé son Bono cultural, et l’Allemagne, où je me suis rendue voilà trois jours, un Kulturpass dont l’inspiration revendiquée est le modèle français. Plus nous serons nombreux à porter un tel dispositif, plus les jeunes Européens seront reliés par cette nouvelle ambition culturelle.

La deuxième orientation qui me tient à cœur est la souveraineté culturelle, tant dans le monde physique, où il faut soutenir la création, les métiers d’art, la langue française, la création avec le programme Mondes nouveaux, que dans le monde numérique.

Au-delà de ce budget, le plan France 2030 permet de financer des studios de tournage, des formations nouvelles, des expériences immersives en lien avec les expériences physiques et sur ce que sera plus tard le métavers, mais dans une approche française, c’est-à-dire une approche sensorielle et soucieuse – j’y suis très attachée – de la liberté d’expression et de création.

Je vous remercie, cher Julien Bargeton, d’avoir insisté sur le plan de soutien aux métiers d’art. Celui-ci, qui me tient particulièrement à cœur et sur lequel j’aurai l’occasion de revenir, est amorcé dans ce budget pour 2023 au travers de l’augmentation du soutien apporté aux fleurons de nos manufactures que sont la Manufacture nationale de Sèvres et le Mobilier national.

Nous portons également une ambition pour la langue française. Ce budget inclut un financement dédié à l’ouverture au printemps 2023 de la Cité internationale de la langue française à Villers-Cotterêts, où je me suis rendue samedi dernier pour faire le point sur le chantier et échanger avec les élus. Je vous remercie d’avoir rappelé votre attachement à ce projet, monsieur Brisson. (Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains.)

Permettez-moi toutefois de préciser que, dès le 17 mars 2017, le Président de la République Emmanuel Macron, alors candidat, avait déclaré lors d’un discours à Reims que le projet de rénovation de ce château serait dédié à la langue française, compte tenu de l’histoire du château, où a été édictée l’ordonnance de Villers-Cotterêts, et de l’histoire de la commune, où est né Alexandre Dumas.

Le patrimoine est la troisième orientation que je souhaite évoquer. En 2023, un budget historique de plus d’un milliard d’euros lui est consacré. Ces crédits permettront notamment de financer la restauration et la sécurisation des cathédrales – vous avez été nombreux à évoquer la nécessité d’effectuer ces travaux –, le soutien aux monuments historiques dans tous les territoires, des projets emblématiques en région, comme la reconversion de l’ancienne abbaye de Clairvaux – 15 millions d’euros d’autorisations d’engagement y sont alloués, chère Vanina Paoli-Gagin –, un effort en faveur des dispositifs d’accompagnement des collectivités territoriales, notamment le fameux FIP, dont les crédits augmentent, ou encore – nous y sommes tous très attachés – la hausse des fouilles programmées et des diagnostics archéologiques.

La quatrième orientation a trait à l’emploi et aux compétences. J’ai souhaité que ce budget permette d’accompagner les futurs talents et de structurer davantage notre politique d’accompagnement à l’emploi.

L’accent a notamment été mis sur les écoles et les établissements d’enseignement supérieur artistiques, singulièrement les écoles d’architecture. Ces dernières drainant un vivier de 20 000 étudiants, qui seront les penseurs des villes et des logements de demain. Ce budget prévoit un effort particulier en leur faveur.

Je ne reviens pas sur les bourses, sur les hausses des travaux de mise aux normes, les crédits supplémentaires pour l’emploi artistique hors écoles, les artistes auteurs, etc., que les différents orateurs ont déjà évoqués.

Les moyens du ministère sont, eux aussi, confortés. La masse salariale augmentera de 38 millions d’euros, pour atteindre 532 millions d’euros, avec une trajectoire d’emplois stable. Le ministère de la culture compte 29 000 agents dévoués et passionnés, dont 20 705 pour la mission « Culture ».

J’en viens enfin à la politique internationale, dont nous avons beaucoup débattu lors des travaux de la commission ; je sais votre attachement à l’action culturelle extérieure de la France. Bien que celle-ci relève en grande partie du ministère de l’Europe et des affaires étrangères, le ministère de la culture y prend également toute sa part via nos établissements, des plus grands aux plus modestes, dont les équipes travaillent en lien avec leurs partenaires internationaux.

Le budget pour 2023, en hausse de 17 % par rapport à 2022, nous permettra de soutenir la diversité culturelle dans le cadre d’un certain nombre de programmes d’échange avec des pays de plus en plus nombreux – l’Algérie, et de manière générale, le continent africain, les pays du monde francophone et d’autres pays –, mais aussi d’être au rendez-vous de la solidarité que la France a toujours manifestée à l’égard des pays où des artistes sont menacés dans leur liberté d’expression et de création, ou qu’ils ont été contraints de fuir du fait de la guerre ; je pense à l’Ukraine, à l’Afghanistan, à l’Iran et à tant d’autres pays.

Mesdames, messieurs les sénateurs, telles sont les orientations de ce projet de loi de finances pour 2023 pour la mission « Culture » sur lesquelles je souhaitais insister.

Il s’agit d’un budget ambitieux, en forte hausse, qui nous permettra de répondre aux grands défis du présent, mais aussi de l’avenir, et de continuer à porter une voix forte dans le monde.

Quinze minutes, c’est court pour partager avec vous toutes mes convictions, toutes les orientations qui me tiennent à cœur. Avant de passer à l’examen des amendements, permettez-moi toutefois de vous adresser un dernier message – c’est devenu notre rituel – par le biais d’un poème de Jean-Pierre Siméon :

« Je cherche un mot vaste et chaud

« Comme une chambre

« Sonore comme une harpe

« Dansant comme une robe

« Clair comme un avril

« Un mot que rien n’efface

« Comme une empreinte dans l’écorce

« Un mot que le mensonge ne séduit pas

« Un mot pour tout dire

« La mort, la vie,

« La peur, le silence et la plainte

« L’invisible et le doux

« Et les miracles de l’été

« Depuis si longtemps je cherche

« Mais j’ai confiance en vous :

« Il va naître de vos lèvres. » (Applaudissements.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures dix, est reprise à dix-sept heures quinze.)

Culture
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Article 41 quater (nouveau)

Mme la présidente. La séance est reprise.

Mes chers collègues, je vous rappelle que, pour cette mission, la conférence des présidents a fixé la durée maximum de la discussion à deux heures et trente minutes.

En conséquence, nous si nous n’avions pas terminé l’examen de cette mission à dix-huit heures dix, celui-ci se poursuivrait après l’examen des missions figurant à l’ordre du jour de cette semaine, et nous passerions directement à l’examen de la mission « Médias, livre et industries culturelles ».

En revanche, si nous terminons l’examen de cette mission avant le terme de la durée indiquée, l’examen de la mission suivante pourrait commencer sans attendre.

Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Culture », figurant à l’état B.

ÉTAT B

(En euros)

Mission / Programme

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

Culture

3 735 808 077

3 714 890 233

Patrimoines

1 111 683 198

1 100 016 198

Création

1 010 988 722

1 006 161 609

Transmission des savoirs et démocratisation de la culture

801 579 000

799 081 718

Soutien aux politiques du ministère de la culture

811 057 157

809 130 708

 Dont titre 2

713 484 098

713 484 098

Mme la présidente. L’amendement n° II-729, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Supprimer le programme :

Éducation aux médias et à l’information

II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Patrimoines

 

 

 

 

Création

 

 

 

 

Transmission des savoirs et démocratisation de la culture

500 000

 

500 000

 

Soutien aux politiques du ministère de la culture

dont titre 2

3 000 000

 

3 000 000

 

Éducation aux médias et à l’information

 

500 000

 

500 000

TOTAL

3 500 000

500 000

3 500 000

500 000

SOLDE

3 000 000

3 000 000

La parole est à Mme la ministre.

Mme Rima Abdul-Malak, ministre. Cet amendement a un double objet.

Premièrement, il vise à annuler la création d’un cinquième programme budgétaire au sein de la mission « Culture », intitulé « Éducations aux médias et à l’information » et très faiblement doté.

Il est proposé de repositionner les crédits initialement ouverts pour la création de ce programme budgétaire à hauteur de 500 000 euros vers le programme 361, « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture », sur lequel les ouvertures de crédits nécessaires à la création du programme susvisé avaient été gagées. De fait, l’éducation aux médias et à l’information constitue une orientation prioritaire du programme 361. Cela fait suite à l’adoption par l’Assemblée nationale d’un amendement de la députée Violette Spillebout.

Deuxièmement, l’amendement tend à tirer les conséquences de l’adoption de plusieurs amendements parlementaires par l’Assemblée nationale, en rehaussant de 3 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement le programme 224, « Soutien aux politiques du ministère de la culture », de la mission « Culture » au titre du développement du pass Culture en Nouvelle-Calédonie – cette disposition fait suite à l’adoption d’un amendement de Nicolas Metzdorf –, d’une aide pour les collectivités territoriales, afin d’assurer l’entretien et la valorisation du patrimoine local à hauteur d’un million d’euros, du fait de l’adoption d’un amendement de Frédéric Maillot, et du soutien à hauteur d’un million d’euros, suite au vote d’un amendement d’Alexandre Portier, d’une politique de recrutement au sein des fanfares en complément du plan en faveur des fanfares et des harmonies dont j’avais annoncé la reconduction à raison de crédits de 1 million d’euros par an.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Didier Rambaud, rapporteur spécial. Cet amendement de coordination budgétaire vise à tirer les conséquences des dispositions introduites par voie d’amendement et retenues par le Gouvernement dans le texte considéré comme adopté par l’Assemblée nationale. Avis favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-729.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° II-507, présenté par M. Breuiller, Mme de Marco, MM. Dossus, Benarroche, Dantec, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :

I. – Créer le programme :

Aides exceptionnelles au maintien des politiques culturelles des collectivités

II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Patrimoines

 

 

 

 

Création

 

 

 

 

Transmission des savoirs et démocratisation de la culture

 

208 500 000

 

208 500 000

Soutien aux politiques du ministère de la culture

dont titre 2

 

 

 

 

Éducation aux médias et à l’information

 

 

 

 

Aides exceptionnelles au maintien des politiques culturelles des collectivités

 208 500 000

 

208 500 000 

 

TOTAL

208 500 000

208 500 000

208 500 000

208 500 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Daniel Breuiller.

M. Daniel Breuiller. Madame la ministre, vous avez évoqué l’enjeu bienvenu de décarbonation de la culture et les moyens consacrés aux équipements nationaux.

Cet amendement vise à soutenir les politiques culturelles des collectivités et des associations qu’elles subventionnent face à la hausse des prix de l’énergie.

Alors que leurs finances sont déjà sous tension, les collectivités subissent également l’augmentation des coûts de l’énergie, si bien qu’elles se trouvent parfois contraintes d’amputer des politiques culturelles, de diminuer les plages horaires d’ouverture de certains équipements, pénalisant parfois des coopérations avec les groupes scolaires, le soutien à des tiers lieux ou à des universités populaires ; tels sont du moins les exemples dont on m’a avisé.

Je vous propose donc de créer un fonds d’aide pour accompagner les collectivités et leur permettre de continuer à assumer ce maillage culturel local qu’elles assurent quotidiennement.

Les politiques publiques culturelles – je vous rejoins sur ce point, madame la ministre – sont essentielles à l’essor d’une démocratie culturelle. Elles doivent rester fortes et assumées. Surtout, elles ne doivent pas devenir une variable d’ajustement dans cette période de grave crise budgétaire.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Vincent Éblé, rapporteur spécial. L’objectif, que l’on peut partager, me paraît parfaitement pris en compte par les crédits du plan de relance depuis 2021.

Par ailleurs, le dispositif est gagé sur l’intégralité des crédits du pass Culture, ce qui serait un dommage collatéral inopportun.

La commission demande donc le retrait de cet amendement. À défaut, l’avis serait défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Rima Abdul-Malak, ministre. Je partage l’avis du rapporteur spécial.

Nous avons déjà pris en compte la situation très difficile dans laquelle un certain nombre d’opérateurs se trouvent du fait de l’augmentation des coûts de l’énergie.

Même si l’État doit accompagner en priorité les opérateurs qu’il finance seul, nous étudierons avec les Drac les situations les plus critiques, y compris des structures cofinancées avec les collectivités. Nous serons au rendez-vous autant que possible.

J’en profite pour vous signaler l’appel à projets « Alternatives vertes », qui, dans le cadre du plan France 2030, a déjà permis d’attribuer 10 millions d’euros. Nous allons reconduire celui-ci à hauteur du même montant, afin de financer des projets de décarbonation dans le secteur de la culture et partant, de diminuer structurellement, à terme, le montant des factures d’énergie.

Je demande le retrait de cet amendement. À défaut, l’avis serait défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Breuiller, pour explication de vote.

M. Daniel Breuiller. Monsieur le rapporteur spécial, à l’évidence, je n’entends nullement diminuer les crédits mentionnés. Le gage visait simplement à échapper à l’article 40 de la Constitution.

Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre. Je maintiens toutefois mon amendement, car je garde une inquiétude quant à ce qu’il adviendra du soutien aux collectivités territoriales après l’usage du 49.3. Malheureusement, nous n’avons pas de garanties.

Mais j’entends que les financements fléchés sur les équipements nationaux pourront éventuellement accompagner certains établissements cofinancés par les Drac.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-507.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° II-528 rectifié, présenté par M. Dossus, Mme de Marco, MM. Breuiller, Parigi, Gontard, Benarroche, Dantec, Fernique et Labbé, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :

I. – Créer le programme :

Fonds pour la transition écologique du spectacle vivant

II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Patrimoines

 

50 000 000 

 

 50 000 000

Création

 

 

 

 

Transmission des savoirs et démocratisation de la culture

 

 

 

 

Soutien aux politiques du ministère de la culture

dont titre 2

 

 

Éducation aux médias et à l’information

 

 

 

 

Fonds pour la transition écologique du spectacle vivant

50 000 000

 

50 000 000

 

TOTAL

50 000 000

50 000 000

50 000 000

50 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Le présent amendement, complémentaire de celui qui vient d’être présenté, vise à instaurer un dispositif plus pérenne.

La rénovation énergétique du bâti est un enjeu fondamental pour la transition écologique. Il est nécessaire de réduire les factures, mais aussi, et surtout de limiter les consommations pour réduire l’impact environnemental des bâtiments.

Au-delà du bâti, il y a beaucoup à faire, par exemple en matière de déplacements des spectateurs, des artistes ou des prestataires, de mise en commun des ressources pour éviter des consommations superflues ou de sobriété pour le chauffage ou les illuminations.

Les acteurs culturels en sont bien conscients. Lors du traditionnel débat de clôture du festival d’Avignon, cette année, c’est toute une filière qui a appelé à s’engager pour la transition écologique du spectacle vivant.

Les acteurs culturels sont prêts à s’engager. Mais ils demandent un soutien, notamment financier, de leur ministère.

Par cet amendement, je vous propose donc de créer un nouveau programme dédié à la transition écologique du spectacle vivant et de le doter de crédits d’un montant de 50 millions d’euros, afin de permettre aux acteurs culturels de réaliser leurs ambitions louables et nécessaires.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Vincent Éblé, rapporteur spécial. Le plan de relance a déjà mis en place un tel fonds pour les institutions de la création en région sur la période 2021-2022.

Il paraît donc opportun d’attendre les résultats de l’exécution 2022 pour évaluer les modalités éventuelles de reconduction d’un tel dispositif, ainsi que les besoins et les attentes des acteurs culturels.

Je demande donc le retrait de cet amendement. À défaut, l’avis serait défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Rima Abdul-Malak, ministre. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-528 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° II-656, présenté par Mme N. Delattre et MM. Fialaire et Artano, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Patrimoines

 

10 000 000

 

10 000 000

Création

 

 

 

 

Transmission des savoirs et démocratisation de la culture

10 000 000

 

10 000 000

 

Soutien aux politiques du ministère de la culture

dont titre 2

 

 

 

 

Éducation aux médias et à l’information

 

 

 

 

TOTAL

10 000 000

10 000 000

10 000 000

10 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Bernard Fialaire.

M. Bernard Fialaire. Le pass Culture rencontre un grand succès auprès des jeunes. Depuis son lancement en 2019, plus de 10 millions de réservations d’offres ont été déposées par près de 11 000 acteurs culturels.

Les achats soutiennent les diverses composantes du secteur culturel, mais les prestataires n’en tirent pas tous les mêmes bénéfices. On demande en particulier aux acteurs digitaux de proposer une offre gratuite sans contrepartie pour être référencés au pass Culture.

Quand un jeune utilise son pass pour acheter un livre, que celui-ci soit numérique ou non, son compte est débité, et le commerçant et les ayants droit sont payés.

S’il achète en revanche un contenu audio numérique, le compte du jeune est débité, mais le prestataire n’est pas payé alors qu’il paye les droits d’auteur.

Cette situation fragilise le modèle économique de certaines plateformes numériques françaises.

De plus, une telle politique contribue à dévaloriser l’audio numérique par rapport aux autres biens culturels, alors qu’il est aujourd’hui le support économique incontournable de l’industrie musicale.

Cet amendement de Nathalie Delattre vise donc à allouer des crédits d’un montant de 10 millions d’euros à la rétribution des œuvres culturelles numériques dans le cadre du dispositif du pass Culture, afin d’inciter le Gouvernement à rétribuer celles-ci de la même manière que les autres œuvres.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Didier Rambaud, rapporteur spécial. Le dispositif proposé se heurte à la philosophie même du pass Culture. Ce dernier est un outil qui doit non pas non garantir des rentes de situations à des plateformes que connaissent déjà les jeunes, mais permettre de faire évoluer les pratiques culturelles. Cette logique de non-remboursement découle de cette philosophie.

Je note d’ailleurs que la musique enregistrée ne représente que 9 % des achats effectués sur l’application. Il ne semble donc pas utile de revenir sur ce point.

La commission demande donc le retrait de cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Rima Abdul-Malak, ministre. Monsieur Fialaire, lorsque le pass Culture a été conçu, les acteurs numériques y ont été associés en tant que partenaires, et ils ont accepté ce principe de non-remboursement avant même de s’engager dans le dispositif.

Cela correspond du reste à une petite part d’autofinancement du pass Culture, l’essentiel du financement reposant sur le large budget consenti par l’État.

J’ajoute que les dépenses effectuées par les jeunes dans le cadre du pass Culture pour des œuvres numériques sont plafonnées à 100 euros. Or il s’agit de très faibles montants.

À ce stade, une évolution ne paraît donc pas indispensable. Mais nous resterons vigilants à l’avenir.

Je demande donc le retrait de cet amendement.

M. Bernard Fialaire. Je le retire.

Mme la présidente. L’amendement n° II-656 est retiré.

L’amendement n° II-703, présenté par Mme de La Provôté, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Patrimoines

 8 000 000

 

 8 000 000

 

Création

 

 

Transmission des savoirs et démocratisation de la culture

 

8 000 000

 

8 000 000

Soutien aux politiques du ministère de la culture

dont titre 2

 

 

 

 

Éducation aux médias et à l’information

 

 

 

 

TOTAL

8 000 000

8 000 000

8 000 000

8 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Sonia de La Provôté.

Mme Sonia de La Provôté. Cet amendement vise à souligner l’insuffisance du financement de l’archéologie préventive.

Si les subventions destinées aux 62 collectivités territoriales habilitées à réaliser des diagnostics archéologiques ont été relevées, cette augmentation demeure insuffisante pour financer à la hauteur de leurs besoins les opérateurs publics, singulièrement des collectivités, en charge de cette mission. Cette insuffisance est de plus est renforcée par l’inflation.

Il est donc proposé de rattraper ce besoin de financement en abondant le programme 175, « Patrimoines », à hauteur de 8 millions d’euros en fléchant ces crédits sur l’action n° 09, Patrimoine archéologique.

Ce rattrapage me semble d’autant plus justifié que deux amendements visant à augmenter les moyens de l’Inrap seront examinés ensuite. Par parallélisme, les moyens des collectivités doivent, eux aussi, augmenter.

Si les règles de recevabilité budgétaire m’obligent à gager cette proposition par un transfert de crédits provenant d’autres programmes de la mission, en l’occurrence des crédits consacrés au pass Culture, je souhaite néanmoins la levée du gage et la pérennité des autres dispositions de cette mission.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Vincent Éblé, rapporteur spécial. Le projet de loi de finances prévoit environ 9 millions d’euros au titre des dépenses de soutien aux fouilles archéologiques programmées et réalisées par les collectivités territoriales en partenariat avec d’autres organismes.

Ce montant progresse de 4 millions d’euros par rapport à 2022, avec pour ambition une « sincérisation » des crédits. Il s’agit d’une première étape bienvenue.

Une fois que nous disposerons des résultats de l’exécution 2023, nous pourrons envisager d’adapter le dispositif.

À ce stade, la commission demande le retrait de cet amendement. À défaut, l’avis serait défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Rima Abdul-Malak, ministre. Madame la sénatrice de La Provôté, le sujet que vous pointez est l’une des orientations que j’ai défendues au cours de la négociation budgétaire de cet été.

Pour avoir évoqué l’archéologie préventive à plusieurs reprises avec François Sauvadet, le président de l’Assemblée des départements de France, je sais que de nombreux élus sont soucieux de cet enjeu.

Au terme d’un moment fort de la négociation budgétaire de cet été, j’ai tout de même obtenu une hausse, que j’estime assez significative, de 20 % des crédits par rapport à l’an dernier.

À l’issue des prochains mois, nous pourrons faire le bilan de ce budget, et évaluer les arguments à faire valoir en vue d’une éventuelle évolution.

Je demande également le retrait de cet amendement. À défaut, l’avis serait défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Canévet, pour explication de vote.

M. Michel Canévet. Je souhaite appeler l’attention du Gouvernement sur la situation d’un certain nombre de collectivités, d’entreprises et de particuliers qui possèdent des terrains sur lesquels des vestiges sont découverts.

Une fois que la présence potentielle de vestiges est identifiée, la charge de la fouille est particulièrement lourde, et j’estime que des dispositifs d’accompagnement doivent être mis en œuvre.

En effet, cela aboutit par exemple à un renchérissement du coût des opérations immobilières, ce qui, compte tenu du coût est déjà élevé des logements, est particulièrement préjudiciable à l’accès au logement de tous.

Je souhaite donc que le Gouvernement étudie des modalités d’accompagnement des différents acteurs concernés.

Mme la présidente. La parole est à Mme Sonia de La Provôté, pour explication de vote.

Mme Sonia de La Provôté. Madame la ministre, j’ai bien entendu vos remarques au sujet de la hausse du budget de 20 %. Je propose donc de retirer l’amendement jusqu’au rendez-vous du prochain projet de loi de finances.

Comme cela a été dit à juste titre, il s’agit d’une première étape. Je rappelle que les collectivités territoriales ont une place très particulière dans le dispositif d’archéologie préventive et que leur engagement en faveur de la protection du patrimoine archéologique est certain. À ce titre, elles doivent être considérées comme participant de manière pleine et entière à cette politique.

Mme la présidente. L’amendement n° II-703 est retiré.

Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° II-396 rectifié est présenté par Mmes Monier et S. Robert, MM. Kanner, Antiste, Assouline, Chantrel, Lozach, Magner et Stanzione, Mme Van Heghe et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L’amendement n° II-682 est présenté par M. Ouzoulias, Mme Brulin, M. Bacchi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Patrimoines

5 000 000 

 

5 000 000

 

Création

 

 

Transmission des savoirs et démocratisation de la culture

 

 

 

 

Soutien aux politiques du ministère de la culture

dont titre 2

 

5 000 000

 

5 000 000

Éducation aux médias et à l’information

 

 

 

 

TOTAL

5 000 000

5 000 000

5 000 000

5 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, pour présenter l’amendement n° II-396 rectifié.

Mme Marie-Pierre Monier. Sur les exercices précédents, les crédits du plan de relance ont constitué une garantie non négligeable pour les acteurs du patrimoine, mais ils ont aussi engendré une augmentation d’activité en matière d’aménagement et de construction, qui devrait se poursuivre en 2023.

Cette situation a des conséquences directes en matière d’archéologie préventive avec un surcroît d’activité dont on se réjouit, mais que l’Inrap et les services agréés des collectivités territoriales doivent pouvoir assumer en matière de diagnostic. Il apparaît notamment que les aménageurs publics ou privés sont aujourd’hui satisfaits des délais d’exécution des opérations de diagnostic, ce qui n’a pas toujours été le cas.

Aussi, dans un souci de préserver des relations apaisées avec les aménageurs, cet amendement vise à octroyer 5 millions d’euros supplémentaires à l’Inrap, afin de permettre à l’Institut d’assumer les demandes d’opérations actuelles et celles qui sont prévues en 2023, liées à la recrudescence des prescriptions, à la suite de la crise sanitaire.

Nous proposons donc d’abonder de 5 millions d’euros l’action n° 09, Patrimoine archéologique, du programme 175, « Patrimoines », et de minorer, du même montant, l’action n° 07, Fonctions de soutien du ministère, du programme 224, « Soutien aux politiques du ministère de la culture ».

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour présenter l’amendement n° II-682.

M. Pierre Ouzoulias. J’ai eu à pratiquer – c’est pour ainsi dire un souvenir d’ancien combattant – la loi de 1941 relative à la réglementation des fouilles archéologiques et je me souviens de la difficulté, y compris dans cet hémicycle, avec laquelle la nouvelle loi sur l’archéologie préventive a été votée. Je suis très heureux de voir que, aujourd’hui, les élus la défendent et souhaitent même que l’Inrap participe davantage à cette mission de service public.

J’ai entendu aussi, madame la ministre, vos engagements forts en faveur de l’archéologie préventive et je m’en réjouis. Je crois, en effet, que le développement économique ne peut pas aller à l’encontre du patrimoine, pour reprendre les mots très justes de mon collègue Max Brisson à propos des énergies renouvelables.

En l’occurrence, au travers de cet amendement, nous aimerions que les aides de l’Inrap pour réaliser le diagnostic soient bien plus dynamiques et qu’elles puissent s’adapter, de façon presque continue, à l’énorme cahier des charges auquel l’Inrap et les services des collectivités sont soumis. En effet, ils sont complémentaires et, très souvent dans les départements, ils passent des conventions pour travailler ensemble.

J’ai bien compris que Bercy vous demandait un bilan. Il serait intéressant que dans une prochaine loi de finances rectificative l’on puisse ajuster cette subvention à l’Inrap pour lui permettre de réaliser les diagnostics et pour faire en sorte de ne pas ralentir les travaux.

Je considère que cela est tout à fait essentiel pour que l’archéologie préventive continue d’être politiquement acceptable.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Vincent Éblé, rapporteur spécial. Ces amendements identiques, ainsi que le précédent de notre collègue de La Provôté, tendent à faire évoluer les crédits prévus dans le projet de loi de finances sur ces questions.

Il s’agit là de financer l’Inrap ; or il est indiqué que les crédits supplémentaires prévus sur l’exercice 2023, soit 4,8 millions d’euros, couvrent l’inflation pour 2,6 millions d’euros et la progression des salaires des agents pour 2,2 millions d’euros.

Par conséquent, ces nouveaux crédits ne couvrent pas l’augmentation du nombre de diagnostics réalisés, autrement dit la charge pour l’opérateur, alors que celle-ci était déjà en évolution importante puisque l’on comptait 1 842 diagnostics en 2020 et 2 019 interventions en 2021.

Nous souhaiterions donc savoir comment le ministère envisage de gérer avec l’opérateur cette augmentation du nombre de ses interventions. De nouvelles règles sont-elles envisagées pour alléger cette charge ?

Dans le rapport de contrôle sur le financement de la recherche patrimoniale par le ministère de la culture, que Didier Rambaud et moi-même avons publié en février dernier, nous avions insisté sur la nécessité de renforcer, par exemple, les liens entre le département des recherches archéologiques subaquatiques et sous-marines (Drassm) et l’Inrap, au sujet des diagnostics archéologiques subaquatiques. Nous appelions notamment à la systématisation de conventions d’évaluation archéologique tarifées entre les opérateurs numériques et le Drassm pour éviter le risque d’intervention à perte pour l’Inrap. Qu’en est-il, madame la ministre ?

La commission sollicite l’avis du Gouvernement sur ces amendements.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Rima Abdul-Malak, ministre. Je suis ravie de voir autant de spécialistes de l’archéologie au Sénat ; c’est réjouissant ! (Sourires.)

J’étais samedi dernier à Villers-Cotterêts et j’ai pu échanger avec des agents de l’Inrap qui m’ont montré les résultats de leurs fouilles. C’est impressionnant : de magnifiques découvertes viendront enrichir notre connaissance de l’histoire.

Le PLF prévoit en effet un relèvement des crédits de 5 %, qui permet d’absorber la hausse des prix à hauteur de 2,6 millions d’euros et d’accompagner la réforme de la revalorisation salariale des agents à hauteur de 2,2 millions d’euros, comme vous venez de le dire, monsieur le rapporteur spécial.

Toutefois, cette mesure vient en complément des hausses intervenues en 2021 et 2022, soit 5 millions d’euros en 2021 et 1,5 million d’euros en 2022 ; elle s’ajoute surtout aux crédits importants inscrits dans le plan de relance puisque, aux 34,5 millions d’euros initialement prévus en 2020, sont venus s’ajouter dans ce cadre 20 millions d’euros supplémentaires.

En ce qui me concerne, je serai vigilante en matière de gestion. En effet, je n’ai pas pu obtenir plus sur ce sujet que tout ce que j’avais déjà obtenu pour l’archéologie et qui me semble satisfaisant. Toutefois, en matière de gestion, le ministère dispose d’une visibilité certaine sur les chantiers qui progressent, de sorte que je serai très attentive à rééquilibrer la répartition des crédits, chaque fois que cela sera possible.

Le Gouvernement demande donc le retrait de ces amendements.

Mme la présidente. Quel est donc l’avis de la commission ?

M. Vincent Éblé, rapporteur spécial. Nous resterons sur un avis de sagesse, madame la présidente. Chacun décidera en fonction des éléments de réponse.

Nous avons bien compris que Mme la ministre, en négociant son budget, n’a pas obtenu satisfaction en tout point. Peut-être pouvons-nous l’aider ? (Sourires.)

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-396 rectifié et II-682.

(Les amendements sont adoptés.)

Mme la présidente. L’amendement n° II-691, présenté par Mme Paoli-Gagin et M. Capus, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Patrimoines

5 000 000

 

18 000 000

 

Création

 

5 000 000

 

18 000 000

Transmission des savoirs et démocratisation de la culture

 

 

 

 

Soutien aux politiques du ministère de la culture

dont titre 2

 

 

 

 

Éducation aux médias et à l’information

 

 

 

 

TOTAL

5 000 000

5 000 000

18 000 000

18 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin.

Mme Vanina Paoli-Gagin. Cet amendement vise à augmenter les crédits prévus par la mission « Culture » pour la reconversion du site de Clairvaux.

L’abbaye de Clairvaux, fondée en 1115 par Bernard de Clairvaux, constitue un site patrimonial, culturel et historique hors du commun. En effet, cette abbaye cistercienne s’est développée pendant près de huit siècles jusqu’à devenir un bien national, en 1792, après la Révolution. Sur l’initiative de Napoléon, elle est reconvertie au début du XIXe siècle en prison, devenant de ce fait un haut lieu de l’histoire carcérale de notre pays. Elle a notamment accueilli Claude Gueux, dont Victor Hugo s’est inspiré pour l’un de ses romans.

Désormais, l’État a engagé la fermeture de la prison et lancé un appel à manifestation d’intérêt, comme je l’ai indiqué précédemment. Les premiers résultats ont été annoncés le 12 novembre dernier. Plusieurs dossiers de candidature sont encore en lice, qui partagent tous l’ambition de faire de Clairvaux un lieu de culture au rayonnement international, comme il le fut à l’époque cistercienne, ainsi qu’un lieu de redynamisation pour le tissu économique local, en exploitant au mieux toute la richesse patrimoniale du site.

Cette reconversion implique ainsi une mobilisation massive de capitaux privés, afin d’engager d’importants travaux de restauration et le lancement de nouvelles activités en lien avec le projet qui sera finalement retenu. Ce flux financier s’articulera avec les crédits inscrits dans la mission « Culture », à hauteur de 15 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 2 millions d’euros en crédits de paiement, au titre de l’action n° 01, Monuments historiques et patrimoine monumental, du programme 175, « Patrimoines ».

Les rapporteurs spéciaux de la commission des finances indiquent dans leur rapport que « le montant des AE prévu ne représente au mieux que 10 % du coût total du chantier, estimé entre 150 et 200 millions d’euros ».

Afin d’augmenter les moyens consacrés par l’État, dès 2023, à la reconversion du site, cet amendement vise à retenir le même pourcentage de 10 %, mais pour l’appliquer à la borne supérieure de la fourchette estimée des travaux.

En outre, afin d’assurer un décaissement rapide de ces crédits et de ne pas provoquer de retard dans le lancement du projet de reconversion, nous proposons de mettre en correspondance le montant des crédits de paiement avec celui des autorisations d’engagement…

Mme la présidente. Il faut conclure, ma chère collègue.

Mme Vanina Paoli-Gagin. Je m’arrête là, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Vincent Éblé, rapporteur spécial. Nous avons déjà indiqué et je l’ai répété dans une intervention précédente que nous étions réservés sur la dotation de 15 millions d’euros en autorisations d’engagement pour un projet d’une ampleur considérable. En effet, ceux qui connaissent ce monument savent qu’il est extrêmement important en volume et en qualité patrimoniale.

Néanmoins, les premiers résultats de l’appel à manifestation d’intérêt ont été rendus publics il y a deux semaines. Il faudra, bien évidemment, de nombreux mois pour ajuster le projet de négociation, de façon à pouvoir fixer un montant d’autorisations d’engagement définitif.

En l’état d’avancement du dossier, il ne nous semble pas que le montant de 15 millions d’euros soit exclu, raison pour laquelle nous demandons le retrait de cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Rima Abdul-Malak, ministre. Je souscris en tout point à ce que vient de dire M. le rapporteur spécial. Il s’agit de l’un des chantiers qui nous tient le plus à cœur ; je l’avais d’ailleurs mis en avant dans les exemples que j’ai donnés lors de ma conférence de presse budgétaire.

Il est tout de même encourageant que neuf groupements privés se soient portés candidats. Attendons de voir : trois d’entre eux ont été sélectionnés dans la première short list. Sur l’ampleur des travaux et la nature des projets, il faut entrer dans le détail. Ce n’est pas seulement le budget de 2023, mais ce sont aussi ceux de 2024 et des années suivantes qui serviront à accompagner ce chantier.

Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.

M. Pierre Ouzoulias. Madame la ministre, je veux marquer mon attachement très fort à ce lieu de mémoire. D’abord, c’est un édifice cultuel extrêmement important, y compris pour le rayonnement de l’art cistercien. Ensuite, c’est un lieu où des résistants, nombreux, ont été incarcérés et ont été fusillés. Alors que nous vivons partout une période de montée des périls, je pense qu’il est très important de rappeler cette mémoire.

Si vous me permettrez un commentaire très personnel, c’est en ce lieu que mon arrière-grand-père, Maurice Romagon, a été fusillé le 7 mars 1942.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-691.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° II-495, présenté par Mmes Monier et S. Robert, MM. Kanner, Antiste, Assouline, Chantrel, Lozach, Magner et Stanzione, Mme Van Heghe et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Patrimoines

3 000 000

 

3 000 000

 

Création

 

 

 

 

Transmission des savoirs et démocratisation de la culture

 

 

 

 

Soutien aux politiques du ministère de la culture

dont titre 2

 

3 000 000

 

3 000 000

Éducation aux médias et à l’information

 

 

 

 

TOTAL

3 000 000

3 000 000

3 000 000

3 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Marie-Pierre Monier.

Mme Marie-Pierre Monier. Plusieurs rapports réalisés récemment au Sénat soulignent que les directions régionales des affaires culturelles et les directions des affaires culturelles n’ont pas suffisamment de moyens humains pour pouvoir accompagner les collectivités territoriales, notamment en matière d’ingénierie.

Dans un rapport thématique, rendu en juin dernier, la Cour des comptes mentionne, quant à elle, la situation préoccupante des ABF.

Face aux difficultés que rencontrent les collectivités territoriales pour assurer l’entretien et la valorisation du patrimoine local, les effectifs des unités départementales de l’architecture et du patrimoine (Udap) se révèlent insuffisants et ne sont plus en en mesure de répondre aux demandes des collectivités. Le nombre d’architectes des bâtiments de France semble décliner progressivement, comme d’ailleurs l’attractivité de cette carrière : les places au concours n’arrivent plus à être intégralement pourvues.

Ce manque d’attractivité tient sans doute à la rémunération un peu faible des ABF dépendant du ministère de la culture, mais certainement davantage aux conditions difficiles dans lesquelles ceux-ci exercent leur profession, compte tenu de leur petit nombre et du nombre très élevé d’avis annuels à donner.

L’insuffisance de ces moyens humains provoque l’allongement du délai d’instruction des dossiers et le ralentissement des chantiers, mettant ainsi en péril la protection des sites dont les ABF sont les garants.

Au regard des besoins d’expertise patrimoniale croissants dans les territoires, le recrutement d’un architecte des bâtiments de France supplémentaire par département doit constituer un objectif à moyen terme, qui permettrait de renforcer le contrôle scientifique et technique de l’État sur ses projets de restauration et de conservation patrimoniale, et d’offrir une assistance à maîtrise d’ouvrage minimale aux porteurs de projet.

Cet amendement vise donc à abonder de 3 millions d’euros supplémentaires l’action n° 01, Monument historiques et patrimoine monumental, du programme 175, « Patrimoines ». J’ai conscience qu’il faudra aussi envisager de travailler à améliorer l’attractivité du métier, mais, comme je viens de le dire, celle-ci serait déjà sensiblement améliorée si la charge de travail des ABF était moins lourde.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Didier Rambaud, rapporteur spécial. Je rappelle que la majoration des crédits dédiés aux Drac en faveur des patrimoines correspond à une préoccupation ancienne de la commission des finances. Nous avions d’ailleurs signalé, en 2018, à l’occasion d’une mission de contrôle, le manque de moyens pour les déplacements des agents ou encore la faible attractivité financière des métiers.

Une partie des difficultés a été levée grâce au plan de rattrapage indemnitaire, mais celui-ci ne résout pas tout.

Notons cependant que le Gouvernement a entendu notre préoccupation en acceptant une majoration des crédits affectés aux Drac à hauteur de 1 million d’euros, en reprenant un amendement qui avait été déposé à l’Assemblée nationale dans le texte transmis au Sénat.

Dans ces conditions, peut-être faut-il attendre les premiers résultats de l’exécution 2023 pour envisager une nouvelle majoration de crédits.

Aussi, la commission formule une demande de retrait.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Rima Abdul-Malak, ministre. En complément, je précise que l’effectif, qu’il s’agisse de celui des architectes des bâtiments de France, des ingénieurs ou des techniciens, n’a pas diminué durant ces dernières années. Au contraire, le ministère de la culture s’est attaché à reconstituer cet effectif dans les départements où il y avait eu une baisse.

En réalité, l’enjeu est non pas tant celui du nombre d’équivalents temps plein (ETP) que le fait de devoir faire face à des vacances de postes et à une baisse du nombre de candidats aux concours. Il s’agit donc surtout de travailler sur l’attractivité du métier des architectes des bâtiments de France, sujet dont nous avons discuté lors d’un séminaire où je les ai tous réunis, il y a quelques jours. Plusieurs pistes ont été suggérées en ce sens, dont celle de travailler avec l’ordre des architectes.

Je demande donc le retrait de cet amendement, parce que son objet ne répond pas pleinement à la difficulté à laquelle nous sommes confrontés, à savoir le manque d’attractivité de la profession.

Je profite de cette intervention pour remercier tous les sénateurs, qu’ils soient présents ou pas sur les travées, qui se sont mobilisés récemment dans les débats pour défendre le rôle des ABF. Je sais que vous connaissez très bien l’importance de leur mission. Que ce soit pour défendre leur avis conforme ou pour continuer de concilier le développement des énergies renouvelables et la préservation du patrimoine, merci à vous tous pour cet engagement ! (M. Pierre Ouzoulias applaudit.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure pour avis.

Mme Sylvie Robert, rapporteure pour avis. Cet amendement est important, même si son adoption ne permettrait pas de répondre complètement à la question. En effet, on le sait, la situation de l’ingénierie dans les Drac est un vrai sujet pour les collectivités territoriales et la question des ABF s’est posée dans le cadre de l’examen du projet de loi sur les énergies renouvelables. En le votant, nous enverrions un signal aux Drac : il faut les rassurer sur ce sujet, d’autant plus qu’il reviendra.

Mme la présidente. La parole est à M. Max Brisson, pour explication de vote.

M. Max Brisson. Pour ne pas allonger les débats, je dirai simplement que je soutiens et appuie ce que vient de dire Sylvie Robert.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-495.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° II-356, présenté par Mme S. Robert, au nom de la commission de la culture, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Patrimoines

 

 

 

 

Création

 

 

 

 

Transmission des savoirs et démocratisation de la culture

2 500 000

 

2 500 000

 

Soutien aux politiques du ministère de la culture

dont titre 2

 

2 500 000

 

2 500 000

Éducation aux médias et à l’information

 

 

 

 

TOTAL

2 500 000

2 500 000

2 500 000

2 500 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme la rapporteure pour avis.

Mme Sylvie Robert, rapporteure pour avis. Cet amendement, que je présente au nom de la commission de la culture, vise à permettre aux écoles territoriales d’appliquer aux étudiants boursiers le même niveau d’exonération que dans les écoles nationales, en compensant pour elles les effets de cette mesure à hauteur de 2,5 millions d’euros.

Alors que les écoles nationales et les écoles territoriales délivrent les mêmes diplômes, leurs étudiants n’ont pas les mêmes droits. La revalorisation des bourses sur critères sociaux destinées aux étudiants des écoles nationales en 2023 risque de creuser encore l’écart entre les écoles nationales et les écoles territoriales et d’accroître ainsi les inégalités de traitement entre les étudiants.

La diversité sociale et culturelle étant une politique portée par l’État et non par les collectivités territoriales, il paraît logique de prévoir ce transfert de crédits.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Didier Rambaud, rapporteur spécial. En effet, cette ouverture de crédits s’inscrit dans le prolongement de la majoration des bourses sur critères sociaux, versées aux étudiants des écoles nationales, prévue dans le présent PLF à hauteur de 7,5 millions d’euros.

Il convient simplement de rappeler, à ce stade, que des aides individuelles pour le soutien aux pratiques artistiques des élèves de l’enseignement initial, dans le domaine du spectacle vivant, sont déjà versées aux élèves des conservatoires à rayonnement départemental et régional, dès lors que ceux-ci sont adossés à des pôles d’enseignement supérieur du spectacle vivant.

Une dotation de 1,6 million d’euros est prévue dans le présent PLF. La majoration des crédits dédiés de 2,5 millions d’euros que vise le présent amendement viendrait donc plus que doubler cette enveloppe.

Dans le rapport de contrôle sur l’enseignement supérieur du spectacle vivant, que Vincent Éblé et moi-même avions rendu public en février dernier, nous avions appelé à une clarification des modalités de financement des écoles territoriales. Les règles en la matière peuvent, en première analyse, paraître obscures et sont jugées inégales selon les Drac.

L’octroi de nouveaux crédits devrait donc être précédé d’une mise à plat du financement de l’État, dans le prolongement d’ailleurs de la réforme des conservatoires, qui semble peiner à se déployer.

Néanmoins, compte tenu du contexte inflationniste, comme du risque de décalage entre les établissements nationaux et les écoles territoriales, une majoration immédiate peut être jugée opportune. Aussi l’avis est-il favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Rima Abdul-Malak, ministre. Ce sujet est très important : je l’ai dit brièvement dans mon propos liminaire, j’ai placé au cœur de mes priorités l’amélioration de la situation des établissements d’enseignement supérieur artistique, en particulier celle des écoles d’architecture.

Globalement, les écoles d’art territoriales n’ont pas du tout été oubliées, puisqu’elles bénéficient d’une enveloppe de 10 millions d’euros en investissement et de 21 millions d’euros en fonctionnement.

Cela correspond aux demandes que l’on nous a fait remonter, qu’il s’agisse des besoins d’investissement et de mise aux normes ou des besoins de rebasage en fonctionnement pour tenir compte du contexte d’inflation, que vous connaissez.

Je vous assure que, dans le cadre de tous les échanges que j’ai pu avoir avec l’Association des régions de France (ARF), l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité (AMF), l’Assemblée des départements de France (ADF) et même la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR), ce sujet ne faisait pas partie des priorités qui ont été signalées à l’été et à l’automne dernier.

Rappelons quand même que les taux d’inscription sont très bas dans ces écoles : à cet égard, la France enregistre l’un des taux les plus bas d’Europe.

Pour moi, la priorité n’était pas là, je l’avoue ; elle portait sur l’accompagnement pour l’investissement et pour le fonctionnement, et nous y avons mis le budget nécessaire.

Par conséquent, l’avis est défavorable

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-356.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° II-357 rectifié, présenté par Mme S. Robert, au nom de la commission de la culture, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Patrimoines

 

 

 

 

Création

 

 

 

 

Transmission des savoirs et démocratisation de la culture

2 200 000

2 200 000

Soutien aux politiques du ministère de la culture

dont titre 2

 

2 200 000

 

2 200 000

Éducation aux médias et à l’information

 

 

 

 

TOTAL

2 200 000

2 200 000

2 200 000

2 200 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme la rapporteure pour avis.

Mme Sylvie Robert, rapporteure pour avis. Cet amendement, que je présente au nom de la commission de la culture, vise à revaloriser de 2,2 millions d’euros le montant des crédits destinés à compenser la hausse des salaires des enseignants contractuels des Ensa. En effet, le coût de cette mesure a été évalué à 4 millions d’euros, selon ce que l’on nous a dit en audition ; or le projet de loi de finances ne comporte que 1,8 million d’euros à ce titre.

Cette mesure paraît indispensable pour permettre aux Ensa, dont le budget a augmenté, il est vrai – je l’ai mentionné précédemment – de retrouver des marges de manœuvre financières leur permettant de maintenir un enseignement de qualité, car d’autres contraintes viennent aussi affecter leur budget.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Vincent Éblé, rapporteur spécial. Sur ce sujet, il ne semble pas qu’il y ait de désaccord de fond. Tout le monde convient qu’une revalorisation de la rémunération des enseignants-chercheurs dans les écoles d’architecture est nécessaire. Le processus est engagé dans le présent projet de loi de finances, à hauteur de 1,65 million d’euros. La commission, considérant qu’il s’agit là d’une première étape, demande le retrait de cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Rima Abdul-Malak, ministre. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-357 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. J’attire votre attention sur le fait qu’il nous reste quinze minutes et six amendements à examiner. Si chaque orateur prend deux minutes pour présenter son amendement, nous ne parviendrons pas à tenir les délais. Vous aurez compris ce qu’il convient de faire.

L’amendement n° II-505, présenté par M. Breuiller, Mme de Marco, MM. Dossus, Benarroche, Dantec, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :

I. – Créer le programme :

Gratuité des musées pour les 18-25 ans

II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Patrimoines

 

 

 

 

Création

 

 

 

 

Transmission des savoirs et démocratisation de la culture

 

2 000 000 

 

2 000 000 

Soutien aux politiques du ministère de la culture

dont titre 2

 

 

Éducation aux médias et à l’information

 

 

 

 

Gratuité des musées pour les 18-25 ans

2 000 000

 

2 000 000

 

TOTAL

2 000 000

2 000 000

2 000 000

2 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Daniel Breuiller.

M. Daniel Breuiller. Des dispositions ont été prises par l’État, par des collectivités territoriales et par des établissements culturels pour mettre en place, dans une certaine mesure, la gratuité des musées pour les 18-25 ans. La plupart du temps, elles sont soumises à des modalités d’applications variables selon le jour, l’horaire ou l’offre artistique.

Notre amendement vise à généraliser cette gratuité. Nous sommes conscients que celle-ci n’est pas la réponse unique à l’enjeu de démocratisation de la culture. Toutefois, elle permet de lever un premier frein.

Je me permets de souligner que, dans l’étude menée par le Val-de-Marne sur les raisons de la non-fréquentation du Musée d’art contemporain du Val-de-Marne (MAC VAL), la première réponse est : « Ce n’est pas pour moi » et la deuxième : « Le coût est trop élevé », et ce malgré un tarif très peu dissuasif.

Madame la ministre, nous vous demandons d’investir au profit de la jeunesse et nous souhaitons que le gage soit levé sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Didier Rambaud, rapporteur spécial. Nous considérons qu’il s’agit d’un amendement d’appel, incontestablement séduisant. Je me permets de vous rappeler que le pass Culture tente de répondre à votre demande en intégrant les musées dans la partie de son offre dédiée aux 18-20 ans. Il semble néanmoins difficile pour l’État d’imposer à la totalité des musées, notamment privés, cette gratuité, fût-elle compensée.

C’est donc une demande de retrait.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Rima Abdul-Malak, ministre. Même avis, d’autant que le MAC VAL, pour reprendre l’exemple que vous avez cité, est inclus dans le pass Culture et bénéficie du dispositif. Tous les musées nationaux sont déjà gratuits pour les moins de 25 ans, voire les moins de 26 ans.

On ne peut pas imposer aux musées territoriaux leur politique tarifaire au nom de la libre administration des collectivités territoriales. En revanche, grâce au pass Culture collectif, les sorties au musée se développent et c’est également le cas grâce au pass Culture individuel. Nous apportons aussi des aides via les Drac à un ensemble de programmes, dont l’Été culturel, qui permet à des populations, notamment jeunes, qui ne peuvent pas partir en vacances, d’aller au musée.

Par conséquent, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-505.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° II-524, présenté par M. Dossus, Mme de Marco, MM. Breuiller, Parigi, Gontard, Benarroche, Dantec, Fernique et Labbé, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :

I. – Créer le programme :

Fonds de soutien aux associations de réduction des risques

II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Patrimoines

 

 

 

 

Création

 

 

 

 

Transmission des savoirs et démocratisation de la culture

 

 

 

 

Soutien aux politiques du ministère de la culture

dont titre 2

 

2 000 000

 

2 000 000

Éducation aux médias et à l’information

 

 

 

 

Fonds de soutien aux associations de réduction des risques

2 000 000

 

2 000 000

 

TOTAL

2 000 000

2 000 000

2 000 000

2 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Les associations de réduction des risques sont présentes dans de nombreux festivals ou concerts pour sensibiliser le public aux risques liés à l’usage de drogues. Leur action permet de réduire le nombre d’overdoses, d’identifier et de sensibiliser les usagers au sujet des produits les plus dangereux. Or cette présence essentielle est loin d’être garantie pour tous les événements.

Au travers de cet amendement, nous souhaitons donc favoriser la généralisation de la présence de ces associations en milieu festif. Bien souvent, ce sont les collectivités seules qui accordent leurs subventions à ces associations ; il est temps que l’État s’engage davantage.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Vincent Éblé, rapporteur spécial. On ne peut pas être contre l’objet de cet amendement, mais il n’a pas sa place dans le texte. Nous pensons que la création d’un tel dispositif au sein de la mission « Culture » contribuerait à un essaimage regrettable des moyens budgétaires dédiés à la lutte contre ces addictions.

C’est donc une demande de retrait et, à défaut, un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Rima Abdul-Malak, ministre. Je m’engage à parler de ce sujet à mon collègue François Braun, car il relève davantage du domaine de la santé. Je connais bien l’association Technopol, qui a agi de manière très forte sur ces sujets.

Madame la présidente, je prends une minute pour revenir sur un point que je n’ai pas eu le temps d’aborder précédemment.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie de l’attention que vous portez à la tenue des festivals au moment des jeux Olympiques de 2024. Nous sommes au milieu d’un travail très méthodique, que nous menons région par région, phase par phase et au cas par cas pour que les organisateurs de ces festivals puissent décaler leur date de quelques jours et revoir leur format, si besoin est, afin qu’ils puissent se tenir.

En réalité, seuls sont concernés les festivals mobilisant des recours nationaux en unités de forces mobiles. On ne parle donc pas de tous les festivals de France, je veux vous rassurer à ce sujet. Un pointage a été fait de manière très précise et nous sommes en cours de discussion avec le ministre de l’intérieur, la ministre des sports et les préfets concernés. Le dialogue est très constructif à ce stade, soyez donc rassurés.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-524.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° II-657, présenté par Mme Pantel et MM. Fialaire et Artano, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Patrimoines

2 000 000

 

2 000 000

 

Création

 

 

 

 

Transmission des savoirs et démocratisation de la culture

 

2 000 000

 

2 000 000

Soutien aux politiques du ministère de la culture

dont titre 2

 

 

 

 

Éducation aux médias et à l’information

 

 

 

 

TOTAL

2 000 000

2 000 000

2 000 000

2 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Bernard Fialaire.

M. Bernard Fialaire. Cet amendement de notre collègue Guylène Pantel vise à soutenir les collectivités territoriales pour l’entretien et la valorisation du patrimoine local.

On sait combien ce patrimoine, du pigeonnier au lavoir, en passant par la demeure de maître ou le musée de proximité, signe l’identité de nos villes et de nos villages.

Je vous épargne la suite des arguments et m’en tiens à vous dire que, sans méconnaître les moyens financiers du fonds incitatif et partenarial (FIP) grâce auquel l’État accompagne les communes à faibles ressources, nous souhaitons par cet amendement soutenir davantage les collectivités territoriales pour l’entretien et la valorisation du patrimoine local, qui fait toute la richesse de la France.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Vincent Éblé, rapporteur spécial. C’est une demande de retrait en raison de l’inscription dans le projet de loi de finances des crédits d’un fonds incitatif et partenarial, qui est déjà majoré. La commission des finances a estimé que cette demande était satisfaite.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Rima Abdul-Malak, ministre. Même avis.

M. Bernard Fialaire. Je retire l’amendement, madame la présidente !

Mme la présidente. L’amendement n° II-657 est retiré.

L’amendement n° II-496, présenté par Mmes Monier et S. Robert, MM. Kanner, Antiste, Assouline, Chantrel, Lozach, Magner et Stanzione, Mme Van Heghe et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Patrimoines

1 000 000

 

1 000 000

 

Création

 

 

 

 

Transmission des savoirs et démocratisation de la culture

 

 

 

 

Soutien aux politiques du ministère de la culture

dont titre 2

 

1 000 000

 

1 000 000

Éducation aux médias et à l’information

 

 

 

 

TOTAL

1 000 000

1 000 000

1 000 000

1 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Lucien Stanzione.

M. Lucien Stanzione. Par cet amendement, nous proposons, en complément du FIP, qui vise à aider les collectivités disposant de faibles ressources à financer les travaux d’entretien, de restauration et de mise en valeur des monuments historiques, de créer un fonds d’expérimentation permettant aux Drac de proposer une assistance à maîtrise d’ouvrage à titre gracieux en direction de ces mêmes collectivités.

Dans son récent rapport sur la politique de l’État en faveur du patrimoine monumental, la Cour des comptes établit que cette disposition, prévue dans le code du patrimoine depuis que la maîtrise d’ouvrage des travaux sur les monuments a été rendue au propriétaire, a été très peu suivie d’effets.

De nombreuses collectivités ont besoin d’un accompagnement technique des porteurs de projets publics. Or la non-satisfaction de ce besoin entretient la sous-consommation des crédits consacrés aux monuments historiques.

Notre proposition est corroborée par le dispositif mis en place, depuis plus d’une dizaine d’années, par la Drac de Bretagne.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Didier Rambaud, rapporteur spécial. Une majoration de la dotation des Drac de 1 million d’euros, proposée par amendement lors de l’examen du projet de loi de finances l’Assemblée nationale, a été retenue par le Gouvernement dans la version du PLF transmise au Sénat.

La commission demande le retrait du présent amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Rima Abdul-Malak, ministre. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-496.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Culture », figurant à l’état B.

Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits, modifiés.

(Les crédits sont adoptés.)

Mme la présidente. J’appelle en discussion les articles 41 quater et 41 quinquies, qui sont rattachés pour leur examen aux crédits de la mission « Culture ».

Culture

État B
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Article 41 quinquies (nouveau)

Article 41 quater (nouveau)

Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur les actions susceptibles d’être mises en œuvre afin d’améliorer le recours au « pass culture » par ses bénéficiaires potentiels en milieu rural et sur leurs conséquences pour le budget de l’État.

Mme la présidente. L’amendement n° II-8, présenté par MM. Éblé et Rambaud, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Didier Rambaud, rapporteur spécial. La généralisation du pass Culture soulève plusieurs interrogations visant les publics concernés, mais aussi la qualité de l’offre. Le présent article additionnel a trait à son déploiement en milieu rural, ce qui pose avant tout la question de l’offre culturelle dans ces territoires. Si pertinent que soit cet angle d’approche, les pistes d’amélioration du dispositif doivent également concerner l’accès des jeunes ayant quitté les structures scolaires, quelle que soit la zone géographique où ils évoluent.

Les projets et rapports annuels de performance documentent déjà précisément l’évolution du dispositif. Le rapport annuel d’activité de la société par actions simplifiée (SAS) pass Culture détaille également les modalités de recours à l’application mobile, en ciblant notamment les actions en direction des publics les plus éloignés.

Dans ces conditions, il est proposé de supprimer cet article.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Rima Abdul-Malak, ministre. Le Gouvernement s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-8.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, l’article 41 quater est supprimé.

Article 41 quater (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Médias, livre et industries culturelles - Compte de concours financiers : Avances à l'audiovisuel public

Article 41 quinquies (nouveau)

Dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport faisant état des moyens et des coûts de l’activité d’accompagnement de l’État sur les grands projets d’infrastructures culturelles, au regard du contexte, sur les territoires de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy.

Mme la présidente. L’amendement n° II-9, présenté par MM. Éblé et Rambaud, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Vincent Éblé, rapporteur spécial. Sans remettre en question la pertinence du sujet de l’accès aux infrastructures culturelles, il est possible de s’interroger sur la nécessité d’inscrire en loi de finances la remise d’un rapport ; la commission des finances est traditionnellement assez réservée sur ces nombreuses demandes de rapports émises à l’occasion de l’examen du PLF.

En l’occurrence, le rapport demandé ne concerne qu’une partie des territoires ultramarins et ne vise in fine que l’action de la seule direction des affaires culturelles de Guadeloupe, puisque les îles de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy relèvent du ressort de celle-ci.

Dans ces conditions, il est proposé de supprimer cet article.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Rima Abdul-Malak, ministre. Le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-9.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, l’article 41 quinquies est supprimé.

Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Culture ».

Médias, livre et industries culturelles

Compte de concours financiers : Avances à l’audiovisuel public

Article 41 quinquies (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Médias, livre et industries culturelles

Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles » et du compte de concours financiers « Avances à l’audiovisuel public ».

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Roger Karoutchi, rapporteur spécial de la commission des finances. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, il ne me semble pas utile, à ce stade de la discussion, de passer en revue l’ensemble des crédits de cette mission. J’apporterai les précisions nécessaires en donnant l’avis de la commission sur les différents amendements.

Un premier secteur, celui du programme « Livre et industries culturelles », connaît des difficultés liées à la fréquentation des salles, qui n’a pas retrouvé son niveau d’avant 2020 malgré une atténuation de l’épidémie de covid-19, qu’il s’agisse des cinémas, des festivals, des théâtres ou des bibliothèques.

Je le précise immédiatement, puisqu’une série d’amendements les concernant sera examinée : nous avons reçu les responsables du Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC), du Centre national de la musique (CNM) et ceux de la Bibliothèque nationale de France (BNF). Chaque structure a naturellement des difficultés.

Cependant, le financement du CNC, grâce à des méthodes diverses, demeure globalement important, en dépit de la baisse de la fréquentation des salles, significative, d’environ 20 % par rapport à son niveau de 2019. Reste à savoir si le CNC a raison de financer des films ou des séries diffusés sur Netflix, mais c’est un autre sujet.

Le problème du CNM est plus complexe. En effet, cet opérateur n’a, pour le moment, pas réellement trouvé sa place ou, plus exactement, madame la ministre, il ne dispose pas des financements adéquats. Si les crédits nécessaires pour l’année prochaine ont pu à peu près être dégagés, grâce à des redéploiements, il importe néanmoins de réfléchir, dès maintenant, à d’autres sources de financement et à une autre organisation, afin que le CNM ne connaisse pas de très graves difficultés en 2024. Des propositions ont été faites en la matière et nous attendons votre avis afin de savoir quelles pistes pourraient renforcer et stabiliser le monde de la musique.

La BNF représente, quant à elle, un problème permanent. Un amendement y a trait, sur lequel je donnerai un avis défavorable (Oh non ! sur les travées du groupe CRCE.), parce qu’il est nécessaire soit de faire nettement plus, soit de reposer le sujet.

La BNF rencontre des difficultés en matière d’investissement, d’abord parce que le bâtiment vieillit. Ainsi, 10 000 fenêtres sont à remplacer pour un coût unitaire de 16 000 euros par fenêtre, soit un total de 160 millions d’euros. Si vous avez ces crédits « en magasin », madame la ministre, nous sommes preneurs ! (Mme la ministre sourit.) Pour l’instant, nous ne voyons rien venir…

La BNF est le « paquebot de la lecture » en France. Mais c’est un paquebot tellement lourd que j’ignore jusqu’à quel niveau d’investissement il faudra aller pour maintenir la qualité du service et son périmètre. Soyons francs, lors de sa construction, nous pensions nous diriger vers l’ère du numérique et de l’abandon de tout stockage de support papier. Mais c’est ainsi : les dépôts de documents et de livres extrêmement importants perdurent.

Résultat des courses : il a été décidé de créer un nouveau centre de conservation à l’extérieur de Paris. Cependant, alors qu’il n’est ni construit ni livré, il est déjà considéré comme probablement insuffisant pour répondre aux besoins dans quatre à cinq ans. Sans doute faudra-t-il envisager encore un autre centre…

Le budget de la lecture doit donc clairement être recalibré dans ce pays, d’autant que – disons-le – la BNF absorbe un tel niveau de crédits qu’il ne reste pas grand-chose – et je m’en excuse auprès des élus des territoires concernés – pour les bibliothèques de province. La BNF est un gouffre, certes un gouffre utile, mais un gouffre quand même ! Les bibliothèques de province ont donc du mal à survivre face à un tel paquebot.

Madame la ministre, dans les quelque deux minutes qui me restent, j’aborderai la question de l’audiovisuel public.

Pour ne rien vous cacher, je vous l’avais d’ailleurs dit, le candidat-président – ou le président-candidat… – avait promis de supprimer la contribution à l’audiovisuel public (CAP), la présentant comme un gain de pouvoir d’achat pour les citoyens. Sauf qu’en réalité rien n’a été prévu en contrepartie.

Mon collègue Jean-Raymond Hugonet et moi-même avons rédigé un rapport ayant pour objectif de dégager des pistes de financement. Celles-ci sont intéressantes, mais elles ne sont fondées que si une réforme de l’audiovisuel public a lieu. Cette fameuse réforme, dont il est sans arrêt question depuis 2017, ne connaît pas le moindre commencement de réalisation.

Un texte a bien été déposé à l’Assemblée nationale, mais il n’est jamais arrivé au Sénat et a été visiblement en grande partie abandonné, même si vous en reprenez certains éléments.

En pratique, le périmètre et les missions de ce service public ne sont pas remis en cause ; il n’est question que d’argent, ce qui est à mes yeux une aberration.

Ainsi, chaque année, sont ajoutés 2 % ou 3 % au budget de l’année précédente, et ainsi de suite, sans jamais redéfinir les missions de ce service public ni ce qu’on attend de lui. Il s’agit là d’un véritable sujet.

J’ai émis, au sein de la commission des finances, après de nombreuses hésitations, un avis favorable au budget de 3,8 milliards d’euros pour l’audiovisuel public, afin de ne pas entraver son fonctionnement.

Cependant, madame la ministre, très clairement, il s’agit d’un avis favorable one shot, si je puis me permettre d’utiliser l’anglais, pour montrer ma maîtrise de quelques mots. (Sourires.)

One shot, cela veut dire que, si des éléments de réforme, permettant de progresser sur ce sujet, ne sont pas apportés en 2023, l’avis de la commission sera différent sur le budget pour 2024.

Madame la ministre, nous attendons beaucoup de votre part en matière d’audiovisuel public ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à Mme le rapporteur pour avis.

Mme Joëlle Garriaud-Maylam, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, l’audiovisuel extérieur est un puissant outil de rayonnement, dans un contexte de tensions internationales fortes, alors que les valeurs de la démocratie et de l’État de droit sont attaquées de toutes parts. Je voudrais, ici, féliciter et remercier les équipes de France Médias Monde et de TV5 Monde pour leur engagement sans faille et leur courage en soutien de nos valeurs.

Cet audiovisuel répond aussi à une forte attente, dans de nombreux pays, où les audiences sont significatives.

Le projet de loi de finances prévoit une contribution de l’État à l’audiovisuel extérieur de 365 millions d’euros, dont 285 millions pour France Médias Monde, un budget en hausse de 3,5 %, et 80 millions pour TV5 Monde, en hausse de 4 %, hors compensation des effets de la réforme du financement de l’audiovisuel public.

La contribution à l’audiovisuel public a en effet été remplacée par l’affectation, au secteur audiovisuel, d’une fraction du produit de la TVA.

Ce mode de financement confirme que les médias français sont des médias de service public et non des médias d’État : cette distinction est cruciale, sur le plan international, pour conforter l’indépendance de notre audiovisuel extérieur et, donc, pour en asseoir la crédibilité. Ce mode de financement n’est toutefois acté que jusqu’au 31 décembre 2024.

Or, madame la ministre, vos services semblent considérer qu’une budgétisation du financement aurait peu d’effets. Il nous semble, au contraire, qu’elle serait très préjudiciable. D’ores et déjà, les autorités compétentes du Land de Berlin ont fait savoir qu’une budgétisation du financement pourrait remettre en cause l’attribution à Radio France internationale (RFI) d’une fréquence FM.

Alors que nos chaînes subissent déjà des interdictions en Russie et au Mali, une budgétisation risquerait donc d’engendrer des suspicions, à l’origine d’un effet domino.

C’est pourquoi l’autonomie des chaînes de l’audiovisuel extérieur est aussi essentielle. Une fusion des différentes sociétés audiovisuelles publiques ferait passer l’actualité internationale au second plan. Or la plus grande incertitude continue de prévaloir sur l’organisation de l’audiovisuel public extérieur. Dans l’attente, les contrats d’objectifs et de moyens sont reconduits, sans vision claire de ce que sera l’avenir.

La BBC, elle, dispose d’une charte royale, approuvée par le Parlement britannique depuis 2016, qui garantit son indépendance. La mise en place d’une charte de ce type serait un facteur de crédibilisation supplémentaire pour France Médias Monde, s’ajoutant aux considérations relatives au financement et à l’organisation des chaînes, déjà mentionnées.

Sous réserve de ces remarques, l’augmentation des crédits est un signe positif. Notre commission a donc émis un avis favorable sur leur adoption.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Jean-Noël Guérini, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, cela a été rappelé, dans un contexte de concurrence internationale, les incertitudes pesant sur l’avenir de l’audiovisuel extérieur constituent un handicap.

Les moyens des opérateurs français stagnent. Entre 2018 et 2022, les dotations de l’État aux entreprises de l’audiovisuel public extérieur ont subi des baisses de l’ordre de 1,5 %, sans que les recettes propres des chaînes, en diminution en raison de la crise sanitaire, puissent les compenser.

Dans le même temps, l’accroissement des tensions internationales a contraint nos partenaires à renforcer les moyens consacrés à leur audiovisuel extérieur.

C’est ainsi qu’en 2021 la chaîne allemande DW et la branche internationale de la BBC se sont vu allouer respectivement 396 millions d’euros et 355 millions d’euros.

Ces montants sont à comparer aux 255 millions d’euros dont disposait France Médias Monde cette même année, TV5 Monde répondant, quant à elle, à une logique différente.

De surcroît, le secteur audiovisuel est tenu de s’adapter aux nouveaux usages.

Ce qu’il fait bien et avec le succès que nous lui connaissons : France 24 est le premier média français sur YouTube, tandis que la plateforme TV5 Monde Plus, lancée en 2020, propose des contenus visionnés dans plus de 200 pays et territoires.

Si la promotion de la francophonie demeure la pierre angulaire de ce secteur, le plurilinguisme est un enjeu croissant. Ainsi, RFI a renforcé son offre en langues africaines au Sahel, grâce à un financement de l’Agence française de développement. Une étude montre que ces programmes y sont très suivis. France Médias Monde a, par ailleurs, dans le contexte de la guerre en Ukraine, consolidé son offre en Europe orientale avec le soutien financier du ministère de l’Europe et des affaires étrangères. Ainsi une offre de RFI, 100 % numérique en ukrainien, a-t-elle été lancée en octobre 2022.

Nous appelons à la pérennité et à la stabilité des financements du ministère de l’Europe et des affaires étrangères ainsi que de l’Agence française de développement.

Ce budget de l’audiovisuel extérieur est plutôt favorable, même si l’inflation en relativise la portée. Nous devrons rester attentifs aux évolutions des conditions internationales particulièrement troublées.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Michel Laugier, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de léducation et de la communication. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la presse n’allait déjà pas très bien ces dernières années, puisqu’elle a vu ses recettes divisées par huit depuis 2000. Dépouillée de ses ressources publicitaires par les plateformes, elle est aussi la victime collatérale d’une information désormais disponible gratuitement, chacun étant devenu expert en tout.

Depuis des années, nous partageons et étayons ce constat. Je sais l’attention que vous accordez, madame la ministre, à cette question si essentielle pour nos démocraties.

Pourtant, les éditeurs et les journalistes ne sont pas restés immobiles. Certains titres ont su développer de nouveaux modèles économiques, d’autres ont bien avancé dans la transition numérique.

J’ai ainsi rédigé, au nom de la commission de la culture, un rapport sur la presse quotidienne régionale, remis au mois de juillet dernier, qui souligne les difficultés, mais également les perspectives et les ambitions de cette presse qui « va du village au monde ».

Crise, mais adaptation aussi, grâce au soutien jamais démenti des pouvoirs publics, au travers par exemple du plan de soutien à la filière presse, qui a enregistré des résultats remarquables s’agissant des imprimeries.

Or les conséquences de l’inflation sont venues percuter de plein fouet cet édifice encore trop fragile. Avec l’explosion des prix du papier, des titres, jusqu’ici juste à l’équilibre, plongent dans le rouge. Les autres reportent des investissements pourtant nécessaires.

De cela, madame la ministre, vous n’êtes bien entendu nullement responsable. Cependant, l’accompagnement des acteurs vous revient.

Or, si les crédits de cette année progressent, essentiellement pour des raisons liées à la réforme du portage et du postage, presque rien n’est prévu pour compenser, au moins partiellement, la hausse des coûts du papier.

Je dis « presque », car une disposition introduite dans le projet de loi de finances rectificative pour 2022 prévoit 5 millions d’euros. Pour la seule presse quotidienne nationale et régionale, l’ardoise se monte en année pleine à 175 millions d’euros !

Ce n’est ni sérieux ni adapté.

Il est important de souligner que la presse n’a touché qu’une infime fraction des 150 millions d’euros du crédit d’impôt pour le premier abonnement. Ce dispositif, adopté pour la soutenir lors de la sortie de la crise pandémique, a été véritablement torpillé par les lourdeurs administratives, avant d’être supprimé cette année, sans grande considération d’ailleurs pour les quelques éditeurs, en particulier de la presse en ligne, qui avaient commencé à le mettre en avant.

Je pourrais compléter cette somme par les 500 millions d’euros d’amende infligés par l’Autorité de la concurrence, en novembre dernier, à Google, pour non-respect d’injonctions dans le cadre de la rémunération des droits voisins.

Contrairement à ce que d’aucuns pourraient penser, la presse rapporte de l’argent à l’État, mais celle-ci n’en voit pas la couleur en cas de besoin !

Par conséquent, 650 millions d’euros sont disponibles, 10 % seulement de cette somme seraient à la hauteur des enjeux du moment, et il resterait toujours 585 millions d’euros pour l’État.

Pour cette raison, madame la ministre – et à regret, je dois le dire –, la commission de la culture a décidé de s’abstenir sur les crédits du programme 180, « Presse et médias », et de s’en remettre à la sagesse du Sénat. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Jérémy Bacchi, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de léducation et de la communication. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la sinistrose ambiante semble avoir largement contaminé la presse. Des articles alarmistes, parus en octobre, ont ainsi fait état de la « panique », qui se serait emparée du cinéma, et de son « cri d’alarme ». En un mot, les salles seraient aujourd’hui face à un destin funeste, sans grand espoir.

Il est vrai – comment le nier ? – que les chiffres ne sont pas à la hauteur des espoirs de l’après-crise : 50 millions de spectateurs en moins en 2020 et 2021 par rapport à la seule année 2019, et une baisse de fréquentation de 30 % pour 2022, année qui n’aura donc pas permis de retour à la normale.

Cependant, et sans tomber dans l’angélisme, je crois important d’apporter quelques nuances à ce constat.

Les chiffres sont bien meilleurs que la moyenne des années 1990, qui s’établissait alors à 135 millions de spectateurs.

Ensuite, les effets différés de la crise sur les productions doivent être bien mesurés. Si la France a maintenu un haut niveau de production, grâce – il faut le reconnaître – au soutien massif des pouvoirs publics, comme je le soulignais l’année dernière, tel n’a pas été le cas dans d’autres pays, notamment aux États-Unis, où les tournages ont été arrêtés pendant plus d’un an.

Or le cinéma américain est essentiel au cinéma français : les « gros » films font venir les spectateurs en salles, qui en profitent pour découvrir les œuvres nationales. Cependant, ces films, pas encore terminés ou à la sortie décalée, ne sont tout simplement pas revenus en salle, les studios visant plutôt l’année 2023.

On doit alors se réjouir de l’immense succès de Top Gun : Maverick, totalisant 7 millions d’entrées, mais aussi de productions françaises ambitieuses qui ont trouvé leur public, comme La Nuit du 12 de Dominik Moll. Il existe donc bien un public prêt à aller dans les salles.

Ce constat est d’autant plus vrai pour le public jeune, qui est le plus revenu au cinéma. Un travail spécifique pour les publics plus âgés sera certainement nécessaire. Je souhaite, madame la ministre, que la campagne de communication lancée par le CNC porte ses fruits et que vous puissiez trouver, enfin, un moyen d’échapper aux sollicitations pressantes d’un illustre prédécesseur au ministère de la culture.

Enfin, il faut lever plusieurs malentendus, qui, trop complaisamment répandus, finissent par détourner le public des salles.

Non, le prix des billets n’est pas astronomique, à quelques exceptions près : il s’élève en moyenne à 7 euros et seuls 15 % des spectateurs payent leur place plus de 10 euros.

Non, les plateformes ne tuent pas les salles. À ce propos, j’ai pris connaissance, avec intérêt, d’une étude de Médiamétrie montrant que les publics les plus jeunes, précisément ceux qui reviennent en salle, désertent les plateformes de streaming au profit des vidéos courtes diffusées sur internet. Quel retournement de situation !

Vous l’aurez compris, même si les défis sont nombreux et requièrent toute notre attention, je suis persuadé que nous ne devons pas les aborder avec pessimisme, bien au contraire.

C’est dans cet esprit que la commission a souhaité me confier, ainsi qu’à mes collègues Céline Boulay-Espéronnier et Sonia de La Provôté, une mission sur la filière cinématographique, que nous abordons avec enthousiasme et exigence, afin de proposer au Sénat une vision complète du secteur. Nous examinerons notamment le dossier toujours d’actualité de la chronologie des médias, dans la lignée des travaux de Catherine Morin-Desailly conduits en 2017, ainsi que l’action du CNC.

La commission de la culture a donc donné un avis favorable sur l’adoption des crédits du cinéma pour 2023. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE et UC.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Julien Bargeton, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de léducation et de la communication. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, il y a quelque chose de réjouissant à constater que, après une période pandémique qui nous a tous marqués, les industries culturelles connaissent en 2022 une très belle progression et devraient rapidement dépasser leur niveau d’avant-crise. Je dis bien « réjouissant » car, en dépit des problèmes et des difficultés à surmonter que je vais évoquer, cela traduit l’appétit et la curiosité de nos compatriotes pour la culture sous toutes ses formes !

J’en veux ainsi pour preuve les chiffres remarquables de l’édition, supérieurs de 15 % à ceux de 2019. Et quel signal plus encourageant que le succès du pass Culture, qui permet à la jeunesse de découvrir de nouveaux univers ?

Ce dispositif a parfois été critiqué, au prétexte qu’il servirait uniquement à acquérir des mangas. Certes, ce genre connaît un très grand succès – et tant mieux ! –, mais il n’est pas assez relevé que 60 % des jeunes qui achètent un manga avec le pass Culture repartent avec un autre livre. Vous entrez pour One Piece, vous ressortez avec Marcel Proust ! (Exclamations amusées.)

Tout n’est pourtant pas rose dans le secteur. Les relations entre auteurs et éditeurs traversent une phase difficile. L’accord entre les deux parties, dont la signature était prévue le 25 octobre dernier, a été, un peu à la surprise générale, rejeté par les auteurs, qui souhaitent ouvrir le dossier des rémunérations. S’il n’appartient pas aux pouvoirs publics d’intervenir directement en la matière, ils doivent s’efforcer de jouer un rôle de médiation. Je crois, madame la ministre, que vous avez pris ce problème à bras-le-corps, car je connais votre attachement au livre et à ceux qui le font.

Le Centre national de la musique doit trouver son rythme de croisière après la tempête du covid-19.

Quelles missions ? Quel financement ? Quelle participation des uns et des autres à cette « maison commune » patiemment édifiée ? Tel était l’objet de la table ronde de la commission organisée le 19 octobre.

Le Gouvernement m’a confié une mission sur le sujet. La gageure est élevée. Je m’appuierai bien entendu sur les travaux déjà menés par le Sénat.

Je voudrais saluer l’ambition du Gouvernement, qui a lancé le plan France 2030, au sein duquel 1 milliard d’euros sera consacré aux industries culturelles et créatives. Ce n’est pas rien !

Tous les amoureux de la culture, tous ceux qui ont conscience de son importance en termes économiques, en termes d’influence internationale, ne peuvent que se réjouir des moyens supplémentaires qui structureront le paysage pour les années à venir.

Année 2022 oblige, je ne peux pas conclure sans un mot sur les conséquences du choc inflationniste. Je prendrai deux exemples pour illustrer mon propos.

La BNF, avec son demi-million de mètres carrés de surface vitrée consomme autant d’électricité qu’une ville de 20 000 habitants ! C’est plus une montagne qu’un gouffre en la matière… Concrètement, le surcoût estimé à 3,6 millions d’euros en 2023 ne doit pas obérer sa capacité à mener des projets et à assurer l’entretien courant.

Autres acteurs très concernés par cette situation inflationniste, les libraires. Le secteur dégage de très faibles marges et doit aussi suivre la hausse des salaires. Il ne faudrait pas que le renouveau du livre soit empêché par les difficultés économiques de nos libraires.

Il faudra donc en 2023 faire coïncider les fortes ambitions du secteur avec les contraintes du moment.

Sous le bénéfice de ces observations, la commission de la culture a émis un avis favorable sur l’adoption des crédits du programme « Livre et industries culturelles ». (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Mme Sonia de La Provôté applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)

M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de léducation et de la communication. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, quelle est la situation de l’audiovisuel public ?

Le bilan du précédent quinquennat s’est limité, pour l’essentiel, à un travail d’assainissement budgétaire avec la mise en œuvre d’une trajectoire budgétaire inférieure de 190 millions d’euros au cours de la période 2018-2020.

La perspective de la campagne présidentielle laissait espérer qu’un projet pour l’avenir de l’audiovisuel public pourrait émerger des débats, afin de redéfinir sa place dans un paysage largement bouleversé par l’arrivée des plateformes.

Or non seulement aucun projet n’a émergé au cours des derniers mois, mais rarement la situation du secteur aura paru aussi confuse, pour au moins quatre raisons.

Première raison : le Gouvernement a indiqué que l’évolution du secteur n’était pas sa priorité, même s’il n’exclut pas totalement de rouvrir le chantier d’une réforme au printemps 2023.

Deuxième raison : l’élaboration de nouveaux contrats d’objectifs et de moyens a été reportée d’une année. Il faudra donc se contenter de simples avenants et attendre la fin de l’année 2023 pour connaître les objectifs et les moyens, que l’actionnaire entend assigner aux entreprises de l’audiovisuel public pour la période 2024-2028. D’ici là, les entreprises concernées sont, au choix, dans l’attente ou dans la continuité.

Troisième raison : la suppression de la contribution à l’audiovisuel public, cet été, s’est accompagnée d’une solution de financement provisoire par une part de TVA, mais c’est l’inconnu qui domine pour l’après-2024, ce qui crée un climat d’incertitude préjudiciable dans les entreprises concernées.

Quatrième raison, enfin : la fusion avortée entre TF1 et M6 fragilise aujourd’hui ces deux groupes privés, mais aussi France Télévisions. La plateforme Salto apparaît aujourd’hui condamnée du fait des difficultés des trois actionnaires à poursuivre leur coopération. Par ailleurs, la fusion aurait eu un effet de rattrapage sur les prix de la publicité, qui aurait également profité à France Télévisions. Le groupe public se trouve donc doublement pénalisé.

Finalement, 2023 apparaît déjà comme une nouvelle année de transition.

C’est pourquoi je souhaite rappeler les deux propositions principales faites en juin dernier dans un rapport conjoint de nos commissions de la culture et des finances consacré au financement de l’audiovisuel public : premièrement, apporter des garanties au financement des entreprises de l’audiovisuel public en créant une commission indépendante chargée d’évaluer les besoins pluriannuels de l’audiovisuel public ; deuxièmement, fusionner les quatre entreprises nationales – France Télévisions, Radio France, l’Institut national de l’audiovisuel (INA) et France Médias Monde – pour assurer leur pérennité et développer leur offre numérique.

Le projet de loi de finances pour 2023 prévoit une hausse des crédits de 3 % destinée à compenser l’accroissement des charges fiscales consécutif à la suppression de la CAP et à amortir la hausse de l’inflation.

La hausse des moyens est donc à relativiser : je souhaite que la nouvelle ressource soit définie dès 2023 et intégrée aux contrats d’objectifs et de moyens (COM) 2024-2028 pour mettre un terme à l’incertitude sur le financement.

Compte tenu des nombreuses interrogations qui entourent l’avenir de l’audiovisuel public, la commission de la culture a décidé de s’abstenir sur les crédits du compte de concours financiers « Avances à l’audiovisuel public » inscrits dans le projet de loi de finances pour 2023 et de s’en remettre à la sagesse du Sénat.

J’indique, pour ma part, que je voterai ces crédits. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI et sur des travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque unité de discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de quinze minutes pour intervenir.

Si chacun d’entre vous est très raisonnable, nous pouvons finir l’examen de cette mission avant la suspension ; sinon, nous reviendrons tous après le dîner ! (Sourires.)

Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Bernard Fialaire.

M. Bernard Fialaire. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la presse, la télévision, la radio, le livre, la musique, le cinéma sont traversés par la même difficulté : la révolution numérique. Celle-ci a modifié en profondeur les usages de nos concitoyens et affecté le modèle économique de plusieurs grandes entités.

Si l’on ajoute à cela la crise sanitaire, puis aujourd’hui l’inflation, c’est dans un contexte flottant, où se mêlent enjeux structurels et conjoncturels, que les pouvoirs publics doivent accompagner tous ces secteurs, non sans difficulté.

La tâche est immense : l’absence, à court terme, de réforme de l’audiovisuel public en est peut-être le symptôme. Tôt ou tard, il faudra cependant qu’elle intervienne, d’autant plus vite que la contribution à l’audiovisuel public n’existe plus.

Le groupe RDSE n’est pas nostalgique de cette contribution, mais il partage quelques-uns des grands principes préconisés par le rapport d’information du Sénat sur le financement de l’audiovisuel public : stratégie de regroupement des entreprises de l’audiovisuel public, d’un côté, budgétisation des ressources, de l’autre.

Tout autant que le secteur audiovisuel, la presse écrite, le livre et les industries culturelles ont besoin d’un soutien public fort. Les moyens de la mission, en hausse de 0,6 % en autorisations d’engagement et de 4,4 % en crédits de paiement, seront utilement complétés par le plan d’investissement France 2030.

Cette orientation est indispensable. Comme j’ai pu le dire à propos de la culture lors du débat budgétaire précédent, ces secteurs sont au cœur du projet républicain.

En particulier, au travers du soutien à la presse et à sa distribution, il est question de veiller au pluralisme de l’information, un principe indissociable de la démocratie.

Je partage le constat, souvent exprimé ici, d’une nécessaire réorientation du système des aides à la presse. Il mérite au minimum d’être mieux corrélé avec ses objectifs de diffusion, de pluralisme et de modernisation.

S’agissant de la distribution, l’élu du Rhône que je suis ne va pas se plaindre que « le brillant second » soit devenu premier, pour reprendre les termes du rapport pour avis de la commission de la culture… Rassurez-vous, mes chers collègues, je parle non pas de l’OL, mais des Messageries lyonnaises de presse, qui sont passées devant France Messagerie ! (Sourires.)

Cependant, il s’agit de veiller à ce que les deux opérateurs puissent survivre au sein d’un marché structurellement en baisse.

Concernant le versant éditorial de la presse, je me réjouis de la bonne résistance de l’Agence France-Presse (AFP) dans un climat concurrentiel tendu avec les grands acteurs de l’internet. L’AFP délivre une information qualitative, qu’elle conforte grâce à son service remarqué de « vérification des faits ».

La stabilité en 2023 de la subvention versée par l’État, conformément au contrat d’objectifs et de moyens 2019-2023, devrait conforter sa position, même si les défis sont loin d’être épuisés pour l’Agence.

Je souhaitais également évoquer la situation du livre, dont le modèle est lui aussi fragilisé.

Je m’inquiète du blocage entre les éditeurs et les auteurs, qui ne parviennent pas à signer un accord sur une plus juste rémunération des seconds. Faut-il rappeler une évidence au syndicat national de l’édition : sans création, il n’y a pas d’édition !

Quant aux librairies, le soutien qui leur a été apporté durant la pandémie a été essentiel. Elles attendent toutefois un geste concernant le seuil minimal pour les frais de port.

J’en profite pour évoquer le sort de plus en plus incertain des quelque 150 librairies expatriées, qui souffrent davantage encore du problème des frais de port, aggravé par celui des délais de livraison pour leurs clients. Il faut absolument les aider, car elles représentent indiscutablement un levier de la francophonie dans le monde. (Mme Joëlle Garriaud-Maylam, rapporteur pour avis, marque son approbation.)

Enfin, je terminerai par un mot sur le cinéma, durement éprouvé durant la pandémie. Ce secteur inquiète depuis longtemps. Après avoir cité Malraux cet après-midi, je reprendrai les mots prononcés par François Mitterrand devant le Parlement européen en 1995 : « Alors que nous célébrons le centenaire du cinéma, l’art le plus populaire du siècle n’a jamais été si menacé dans chacun de nos pays. Il n’a d’ailleurs plus besoin d’être menacé dans un certain nombre de ces pays-là, car il a déjà disparu. »

Depuis cette date, le modèle français résiste. Il faut dire que le CNC accompagne plutôt bien les mutations auxquelles le cinéma doit faire face. Nous devons cependant toujours rester attentifs à l’équilibre à trouver avec les plateformes de streaming, la principale menace.

Une fois encore, travailler au maintien d’une création cinématographique française dynamique, c’est contribuer au rayonnement de notre pays et de notre souveraineté culturelle dans le monde.

Mes chers collègues, dans ce contexte, le RDSE votera les crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles ». (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – M. André Gattolin applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Max Brisson. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Max Brisson. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, à l’heure où nous débattons du budget de la culture pour 2023, comme précédemment, la question qui s’impose est celle de la pertinence du fléchage des crédits alloués.

Ainsi, pendant que l’industrie du livre et de la presse se débat contre l’inflation des prix du papier, que celle de la musique fait face aux évolutions comportementales de ses consommateurs et ne bénéficie pas d’un CNM efficient, celle du cinéma rencontre une baisse inquiétante de fréquentation, alors que pèse sur les salles la menace d’une remise en cause de la chronologie des médias.

Une industrie ne cesse quant à elle de tirer habilement son épingle du jeu, celle des jeux vidéo, qui enregistre une progression exceptionnelle de son activité de 13,5 % sur les deux dernières années, au point de faire de la France l’un des principaux leaders du marché, notamment dans celui de l’édition, un exemple qui invite à l’optimisme.

Votre projet de budget prend-il vraiment en compte cette diversité des situations dans le fléchage des crédits alloués ? Insuffisamment, selon moi.

Pour autant, et parce que nous croyons comme vous, madame la ministre, au retour des jours meilleurs, les sénatrices et les sénateurs LR voteront les crédits accordés à cette mission.

Nous avons toutefois une divergence de taille sur le traitement réservé à l’audiovisuel public, non pas sur la suppression de la redevance en tant que telle, mais plutôt sur la méthode employée. Une fois encore, comme l’ont rappelé Roger Karoutchi et Jean-Raymond Hugonet, nous assistons impuissants à la mise en œuvre d’une décision dont la finalité apparaît aussi floue que la prise de décision était précipitée.

Mais n’y retrouvons-nous pas tous les ingrédients d’un mode de gouvernance : une annonce inattendue, un gouvernement pris de court, une mesure qu’il peine à justifier et à financer ?

Cette mesure amplifie la réalité d’un pilotage à vue, sans cap ni stratégie, qui ne génère que du malaise. Les personnels de l’audiovisuel public, déjà inquiets, sont désormais décontenancés par une annonce électorale dont la mise en œuvre a été imposée à marche forcée, sans que fût pris le temps de réfléchir aux missions et à l’organisation de l’audiovisuel public, dans un paysage bouleversé qui n’a plus rien à voir avec celui qui présidait à l’élaboration de la dernière loi d’orientation en 1986.

Je regrette donc le caractère précipité de cette décision ; je regrette qu’elle n’ait pas été pensée dans un cadre général, qui aurait permis d’anticiper ses conséquences et de justifier sa plus-value.

Surtout, je regrette que nous n’ayons pas eu à en débattre : nous aurions pu nous interroger collectivement sur l’avenir de l’audiovisuel public, le format et le modèle que nous souhaitons lui donner.

Autant d’éléments qui auraient pu constituer le corps d’une loi, projet souvent annoncé, mais éternellement repoussé. Selon toute vraisemblance, ni 2022 ni certainement 2023 ne succéderont à 1986, date de la dernière loi sur ce sujet. Nous prenons acte avec regret de ce nouveau rendez-vous manqué.

Et pourtant, que de sujets à traiter sur la place et les missions du service public, le droit voisin, la chronologie des médias, l’indépendance des rédactions, l’éthique des journalistes, les moyens et les missions de l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) ! Que de sujets à envisager face à un paysage audiovisuel éclaté, au sein duquel on n’a pourtant jamais autant parlé de risques de concentration !

Il n’y aura donc pas de grande loi sur l’audiovisuel. Seul un fait du prince isolé aura fait bouger les choses. Nous en reparlerons lorsque nous discuterons des avenants aux contrats d’objectifs et de moyens.

Pour l’instant, suivant l’avis de nos deux excellents rapporteurs spéciaux Roger Karoutchi et Jean-Raymond Hugonet, nous voterons sans enthousiasme les crédits affectés au compte de concours financier « Avances à l’audiovisuel public », et avec un peu plus d’envie ceux de la mission « Médias, livre et industries culturelles ». (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Sonia de La Provôté applaudit également.) Vous noterez, madame la présidente, que je n’ai pas utilisé tout mon temps de parole !

Mme la présidente. Prenez exemple sur M. Brisson ! (Sourires.)

La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin.

Mme Vanina Paoli-Gagin. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, lors de la crise sanitaire, le soutien public en faveur des industries culturelles a été massif.

Il faut le dire : les tendances sont excellentes. En 2022, les industries culturelles ont vu leur chiffre d’affaires augmenter de 10 %, pour atteindre 18,2 milliards d’euros. Le PLF pour 2023 leur consacre plus de 700 millions d’euros en autorisations d’engagement.

S’agissant de la Bibliothèque nationale de France, nous nous sommes tous réjouis de la réouverture du site Richelieu le 17 septembre dernier, après un chantier de dix ans. Cette année, 70 % environ des crédits du programme « Livre et industries culturelles », soit plus de 232 millions d’euros en crédits de paiement, seront dédiés à la BNF.

Il faut rappeler que les trois quarts du budget de la BNF sont consacrés aux dépenses de fonctionnement, pour accueillir le public dans de bonnes conditions et assurer la préservation des ouvrages et documents. Ces coûts risquent d’exploser avec la crise énergétique que nous traversons.

Concernant le livre et la lecture, l’année 2021 a été qualifiée d’exceptionnelle, tant les ventes ont atteint des records. Je souligne le succès du pass Culture, grâce auquel les libraires ont pu bénéficier d’une hausse de leur chiffre d’affaires. C’est une excellente nouvelle, mais il faut prendre ces chiffres avec précaution, car ils découlent d’une situation hors normes. Pour l’année 2023, le PLF prévoit près de 23 millions d’euros en crédits de paiement. Restent en suspens la question de la hausse du coût du papier et celle des relations entre auteurs et éditeurs, plus particulièrement le sujet des rémunérations.

S’agissant de la musique enregistrée, le streaming a désormais pris le lead – excusez-moi, mes chers collègues, pour ce mauvais français (Sourires.) –, avec 10 millions d’abonnés en France et un chiffre d’affaires en hausse de 13 % en 2021.

Les perspectives sont très enthousiasmantes, avec une prévision pour 2032 de près de 35 millions d’abonnés à un service de streaming en France. Acteur majeur du secteur, le Centre national de la musique a démontré toute sa pertinence et son efficacité lors de la crise sanitaire. Le PLF pour 2023 lui destine 27,8 millions d’euros, mais des redéploiements de crédits pourraient être prévus au cours de l’année pour compenser la baisse de ses ressources propres.

Le cinéma, quant à lui, a bénéficié d’un fort soutien pendant la crise, avec un montant total de 430 millions d’euros qui aura été intégralement dépensé à la fin de l’année. Ces dernières semaines, nous avons été informés du recul préoccupant de la fréquentation des salles : les premiers résultats de 2022 affichent un recul de 30 % par rapport à ceux de 2019. Rappelons que le plan France 2030 réserve 350 millions d’euros à la filière de l’image.

Le jeu vidéo – cela a été dit – est un secteur qui affiche une belle croissance de 1,6 % en 2021 et 5,6 milliards d’euros de chiffre d’affaires, après des résultats exceptionnels en 2020.

Ce secteur d’avenir représente un vrai levier d’attractivité et de rayonnement pour la France, comme ont pu le souligner plusieurs acteurs majeurs du secteur lors de la table ronde organisée, au Sénat, le 12 octobre dernier. Il est nécessaire de poursuivre les efforts en sa faveur.

Concernant la presse et les médias, le projet de loi de finances pour 2023 prévoit 371 millions d’euros en crédits de paiement, soit une progression de près de 6 % par rapport à 2022. Après la crise sanitaire, la presse reste fortement dépendante du financement public, ce qui n’est pas tenable sur le temps long. Notre groupe est favorable à une évaluation des aides afin d’étudier la pertinence des crédits mobilisés.

Il reste à évoquer le compte de concours financiers « Avances à l’audiovisuel public ». La suppression de la contribution à l’audiovisuel public intervenue cet été ne fait pas débat, tant elle nous paraissait injuste et inadaptée.

En revanche, le financement du secteur par le fléchage d’une fraction de TVA ne paraît pas satisfaisant à long terme. Il faut poursuivre la réflexion.

Je conclurai en soulignant que notre groupe s’inquiète des conséquences de la crise énergétique et de l’inflation pour les établissements et les acteurs culturels les plus fragiles.

Nous nous félicitons toutefois de l’importance des moyens fléchés par l’État vers nos industries culturelles et créatives. Grâce à la reconnaissance et au soutien conséquent dont elles bénéficient, ces industries participent au rayonnement de notre pays et en font sa force. Pour cette raison, le groupe Les Indépendants votera ces crédits. (M. André Gattolin et Mme Sonia de La Provôté applaudissent.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Monique de Marco. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – M. Yan Chantrel applaudit également.)

Mme Monique de Marco. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la grande majorité des acteurs concernés par cette mission « Médias, livre et industries culturelles » sont aujourd’hui très fragilisés.

Cette fragilité est née du bouleversement qu’a représenté, pour les secteurs de l’information et de la culture, la généralisation des activités en ligne. Mais elle a aussi été accentuée par la crise sanitaire et la fermeture des lieux culturels, hier, et elle le sera demain par la mise sous cloche du pays avec la tenue des jeux Olympiques.

Plus que les autres secteurs, la culture subit de nos jours une grande exposition au fait du prince. Comment mesurer l’impact de la politique culturelle de l’État lorsqu’il annonce d’une main un milliard d’euros de financements pour des projets culturels sur cinq ans, dans le cadre du plan France 2030, et qu’il menace de l’autre de déprogrammer ou de reporter les festivals en 2024 ?

Seuls les secteurs numérisés comme celui du jeu vidéo semblent épargnés et peuvent se projeter à long terme. L’avenir dira également si la belle santé du secteur du livre se maintiendra. Je lis avec inquiétude que la fréquentation des bibliothèques municipales est toujours inférieure à son niveau de 2019.

La situation du cinéma est plus inquiétante, car le système actuel repose pour partie sur la taxation des entrées en salles. L’entrée en vigueur des décrets Smad (services de médias audiovisuels à la demande), qui actent la participation des plateformes de vidéo à la demande au financement de productions françaises, ne garantit pas le retour des spectateurs en salles. La montée en puissance de la vidéo à la demande durant le confinement et le développement de formats très courts sur les réseaux sociaux représentent une concurrence peu chère, voire gratuite.

Face à cette fragilité, l’État doit adapter l’aide financière qu’il apporte à chacun de ces secteurs et accompagner l’émergence de nouveaux modes de financement pour protéger les forces intellectuelles et créatives de ce pays.

Pourtant, ce budget met fin aux aides exceptionnelles mises en place pour éviter la disparition de ces écosystèmes culturels. Vous proposez, madame la ministre, d’y substituer le plan France 2030. Dans le détail, cela représente 250 millions d’euros pour le développement d’offres culturelles immersives, 350 millions d’euros pour l’appel à projets « La grande fabrique de l’image » et 400 millions d’euros pour l’accélération des industries culturelles.

France 2030 a donc plus vocation à soutenir des initiatives émergentes qu’à préserver l’existant. La cotutelle exercée par le CNC et la Caisse des dépôts et consignations nous éclaire également sur la forte logique économique qui sous-tend l’appel à projets « La grande fabrique de l’image », qui échappera de fait au ministère de la culture. Nous ne pouvons donc pas nous en satisfaire.

La situation de la presse écrite nous inquiète également, malgré le rebond de 2021. La question du système de distribution n’est toujours pas résolue. Les aides à la presse devraient être réorientées et conditionnées, comme l’a suggéré la commission d’enquête du Sénat sur la concentration des médias.

Il me semble, madame la ministre, que le Gouvernement a laissé peu de chance au crédit d’impôt sur le premier abonnement. Nous avions déposé plusieurs amendements destinés à l’étendre et à l’adapter, mais aucun n’a été retenu.

L’avenir de l’audiovisuel public nous semble aussi compromis. Après 49 ans d’existence, la redevance a tiré sa révérence. Elle est remplacée par une solution provisoire de financement qui crée un climat d’incertitude. Le service public a besoin d’un financement stable et pérenne sans être soumis aux aléas de la conjoncture politique.

Ce financement est injuste, car tous les Français participeront au même niveau à cette ponction de TVA, ce qui n’était pas le cas de la redevance.

Il est encore possible d’améliorer le financement de l’audiovisuel public en augmentant sa progressivité. Là encore, nous avions proposé un amendement, mais il a lui aussi été rejeté.

Nous attendons des garanties sur la pérennité de l’audiovisuel public, ses moyens et son indépendance.

L’importance de protéger ce pluralisme dépasse d’ailleurs notre seul pays, à l’heure où des guerres de désinformation sont menées à travers le monde.

Vous avez souligné, monsieur le rapporteur, le succès de TV5 Monde à l’étranger en 2022 : sur les 300 millions de francophones qui la reçoivent, 1,8 million de visiteurs sont originaires d’Algérie, du Maroc ou de l’Espagne. Ce n’est certes pas l’audience de la BBC World Service, qui compte plus de 350 millions de téléspectateurs, mais des réserves d’audience restent à conquérir !

Pour toutes ces raisons, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires ne votera pas les crédits alloués au compte de concours financiers « Avances à l’audiovisuel public ».

Mme la présidente. La parole est à M. André Gattolin. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. André Gattolin. Impossible, madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, à l’occasion de ce débat sur les médias et les industries culturelles, de ne pas rendre hommage à Pascal Josèphe, un homme de télévision exceptionnel, qui nous a brutalement quittés la semaine dernière. (Applaudissements.)

Au travers des nombreuses fonctions qu’il a occupées, tant au sein des médias publics que dans les chaînes privées ou dans le monde du conseil, Pascal Josèphe est devenu, nonobstant sa retenue naturelle, l’un des acteurs les plus influents du paysage audiovisuel des quatre dernières décennies.

Encore choqué par la disparition de celui avec qui j’ai très souvent eu le bonheur de travailler au cours de ma vie professionnelle, j’avoue que l’avalanche d’éloges dont il fait l’objet depuis une semaine m’éclaire chaque jour davantage sur l’étendue impressionnante du respect qu’il suscitait.

Nous sommes ici nombreux à avoir bénéficié de ses perspicaces analyses sur l’état de notre audiovisuel et de ses mutations prévisibles.

Vendredi dernier, Jean-Pierre Leleux, notre ancien collègue, me rappelait combien ses avis étaient inspirants pour les législateurs que nous sommes. Son expertise était toujours mue par un souci rare de l’intérêt général.

Sa disparition prématurée est une perte immense et ses écrits publiés sont malheureusement trop peu nombreux. Comme l’on dit en Afrique, ce continent qu’il chérissait tant, « quand un sage disparaît, c’est une bibliothèque qui brûle ».

Dans le débat qui nous anime aujourd’hui, il serait bon, je crois, de lire ou de relire les premières pages du projet qui étayait sa candidature à la présidence de France Télévisions en 2015. (M. Jean-Raymond Hugonet acquiesce.)

Pascal était un fervent défenseur de l’audiovisuel public. C’est la raison pour laquelle, afin d’assurer sa survie à l’ère du numérique et de l’explosion de nouveaux acteurs internationaux, il considérait comme urgent d’entreprendre sa réforme.

Deux grands principes guidaient son ambition.

Il pensait d’abord que la vocation première du service public était de servir, de servir le public évidemment, et non de se servir. Car la tentation est souvent forte pour certains acteurs de l’audiovisuel – c’est vrai aussi pour la culture dans son ensemble – d’oublier l’utilité finale de l’intervention publique.

Cette hiérarchie des devoirs nécessite d’être périodiquement rappelée, au risque sinon de voir le ministère se transformer en institution au service des seuls acteurs des industries culturelles.

À ce propos, nombre d’entre nous ont encore en mémoire la manière dont nous avons dû batailler pour faire aboutir une loi visant à supprimer la publicité dans les émissions destinées aux enfants sur le service public, une mesure pourtant plébiscitée par les Français, les associations de parents d’élèves, de consommateurs et tout le corps de la santé.

La levée de boucliers que nous avons essuyée de la part des milieux dits « professionnels », y compris de la part des dirigeants du service public à l’époque, reste dans les annales de cette maison.

Et que dire, au passage, du rôle joué à l’époque par le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA), qui, après consultations des acteurs du marché, et eux seuls, a cru bon d’édicter un décret d’application restreignant le champ d’application déjà étroit de cette loi, sans même auditionner le Sénat, qui était à l’origine du dispositif et avait adopté le texte à l’unanimité des suffrages exprimés en seconde lecture !

La seconde ambition de Pascal Josèphe, en prolongement de la précédente, était que la télévision publique porte un projet de société autant qu’un projet d’entreprise, un projet qui rassemble pour résister à la fragmentation toujours accrue du corps social.

« Faire société » pour retrouver et, surtout, pour incarner les valeurs fondamentales de notre République et de l’État de droit.

Pour Pascal Josèphe, la mère des batailles, à l’heure du numérique, de la délinéarisation et de la démultiplication des canaux de diffusion était celle des contenus, autrement dit la bataille du sens.

Lorsqu’on parle de contenus porteurs de sens, on pense naturellement, mais de manière trop exclusive, à l’information, sa qualité, son indépendance et son pluralisme.

On oublie trop souvent l’impact considérable de la fiction, du patrimonial et même du divertissement sur les constructions mentales et la diffusion des idées. La fameuse série LInstit, que Pascal Josèphe porta sur les fonts baptismaux alors qu’il était directeur des programmes de France 2, en est l’une des plus belles illustrations encore aujourd’hui.

Là encore, au moment où nous semblons redécouvrir l’importance des grands narratifs et le rôle majeur qu’ils occupent dans la consolidation de nos identités collectives, il est bon de rappeler l’extrême pertinence et la nature anticipatrice de la vision de la télévision de Pascal Josèphe.

Ce qui vaut pour notre audiovisuel national vaut, au moins tout autant, pour notre audiovisuel extérieur, aujourd’hui frontalement attaqué, notamment en Afrique, par les narratifs autoritaires développés par la Russie, la Chine ou la Turquie.

Les paroles prononcées à ce propos par le Président de la République le 9 novembre dernier à Toulon, lors de la présentation de notre revue nationale stratégique, nous obligent !

Madame la ministre, au-delà du vote de ce budget, de grands chantiers nous attendent – et vous attendent – si nous voulons redonner à notre audiovisuel sa pleine utilité sociale dans un monde en profonde transformation. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, RDSE et Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline.

M. David Assouline. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le budget qui nous est proposé est en trompe-l’œil. Il semble aller dans le bon sens, avec une hausse apparente des crédits, mais c’est de l’affichage.

Non seulement cette augmentation est deux fois moins importante que l’inflation – il s’agit donc finalement d’une diminution –, mais, surtout, elle ne corrige pas la gigantesque baisse qui, depuis cinq ans, rogne les crédits de l’audiovisuel public jusqu’à l’os.

Pourtant, face à la concurrence des grands groupes privés et des plateformes étrangères prédatrices, qui organisent la désinformation et uniformisent les contenus, l’audiovisuel public aurait plus que jamais besoin d’oxygène pour remplir ses missions essentielles d’information et de programmation culturelle de qualité.

L’audiovisuel public connaît en effet une situation très difficile. Vous avez significativement diminué son budget depuis cinq ans, tout en le privant de moyens de financement avec la désindexation de la CAP sur l’inflation à partir de 2019, la fin de l’affectation de la taxe sur les services fournis par les opérateurs de communications électroniques (TOCE) à l’audiovisuel public et, maintenant, la fin de la redevance.

Dans le même temps, vous avez réduit son périmètre en supprimant France Ô. Heureusement, France 4, que vous vouliez supprimer également, a été sauvée in extremis, en particulier grâce à la très forte mobilisation de nombreux collègues siégeant à la gauche de cet hémicycle et sur d’autres travées.

Oui, malgré les discours convenus sur sa nécessité, après avoir été dénoncé, au grand bonheur de tous ceux qui veulent sa fin, après avoir été qualifié de « honte de la République » par le Président de la République, le service public de l’audiovisuel a connu des heures sombres sous le précédent quinquennat.

Le plan dit « d’économie », décidé en 2018 pour quatre ans et affectant toutes les sociétés de l’audiovisuel public, a constitué une perte totale de 688 millions d’euros. Il s’est aussi traduit par le sacrifice des salariés : 900 emplois supprimés depuis dix ans à la suite de nombreux plans de départ à France Télévisions et 4 200 emplois à Radio France, tous équivalents temps plein.

Madame la ministre, vous venez de parachever ce travail de sape, en décidant cet été de supprimer purement et simplement la contribution à l’audiovisuel public, en lui substituant une part de la TVA pour financer l’audiovisuel.

Or ce système ne garantit ni son indépendance, ni sa pérennité, ni la justice sociale, puisque la TVA est l’impôt le plus injuste : tout le monde le paye de la même façon, riches ou pauvres. Et même les personnes qui étaient exemptées de la contribution jusque-là, du fait de leur situation de grande précarité, devront elles aussi contribuer désormais au financement de l’audiovisuel.

Certes, la CAP n’était pas juste. Elle n’était pas moderne non plus, puisqu’elle était assise sur un mode de consommation déclinant, qui n’est plus exclusif aujourd’hui – le poste de télévision –, à l’heure où les programmes se regardent sur une multitude d’écrans.

Elle avait toutefois le mérite de garantir l’indépendance de l’audiovisuel public et, depuis sa création, une certaine pérennité. Il fallait donc la réformer, pour qu’elle soit non seulement juste, mais aussi moderne. Vous n’avez fait ni l’un ni l’autre.

Nous avons fait une proposition alternative au travers d’un amendement, que vous n’avez pas soutenue. Elle crée une contribution progressive qui aurait entraîné une économie sur le coût de la redevance pour 85 % des foyers fiscaux français. Cette solution est plus juste socialement et plus moderne, car elle ne s’appuie plus sur le seul téléviseur. Surtout, elle sanctuarise un financement pérenne, indépendant et direct. Nous avons déposé une proposition de loi en ce sens.

Désormais, l’avenir de l’audiovisuel n’est plus garanti, car son mode de financement est temporaire. En effet, à partir du 1er janvier 2025, il ne sera plus effectif et vous avez fait savoir que le financement du secteur se ferait alors via le budget de l’État, un schéma que le Conseil d’État avait pourtant retoqué cet été.

Je le redis, votre proposition d’augmentation de budget est en trompe-l’œil. En effet, elle n’est même pas à la hauteur des prévisions d’inflation pour 2023. Quid, par exemple, de l’augmentation de 50 % de la facture d’électricité de Radio France et de l’augmentation de 22 % des coûts de serveurs informatiques ?

Avec mon groupe, j’ai déposé en première partie du budget un amendement tendant à pallier ce manquement. Vous avez, là encore, émis un avis défavorable. L’augmentation de budget se traduira donc par une nouvelle baisse effective pour notre audiovisuel public.

Pourtant, ce dernier mérite d’être soutenu, et pas seulement avec de belles phrases. Alors que les audiences des médias télé et radio sont en baisse constante depuis dix ans, Radio France et France Télévisions ont battu des records en la matière : Radio France réunit quotidiennement sur ses antennes 15 millions de Français, dont 2 millions de nouveaux auditeurs en quatre ans.

France Télévisions touche quant à elle, chaque semaine et tous écrans confondus, 81 % de la population française, soit plus de 50 millions de citoyens.

Ce succès sur le linéaire, mais également sur le numérique, est dû à des investissements massifs sur fonds propres. Durant les trois dernières années, Radio France et France Télévisions ont investi respectivement 31,4 millions d’euros et 511 millions d’euros pour innover, soit une progression des investissements de 34 % en deux ans.

Ces deux médias ont également réalisé un travail remarquable et remarqué lors des confinements.

Le service public de l’audiovisuel est essentiel pour le financement de la création audiovisuelle et cinématographique française dans son ensemble. Sans son investissement important, les risques seraient réels pour le secteur. Toute la chaîne des acteurs, jusqu’à la production, se trouverait fragilisée.

Ce travail important réalisé par l’audiovisuel public est aussi celui d’Arte et de France Médias Monde, à côté et avec Radio France, France Télévisions, l’INA et TV5 Monde.

Face à la concurrence internationale, notamment des Gafan – Google, Apple, Facebook, Amazon et Netflix –, l’audiovisuel public doit continuer d’innover. Pour cela, il lui faut un investissement à la hauteur de nos ambitions.

C’est pour toutes ces raisons que nous voterons contre les crédits du compte spécial « Avances à l’audiovisuel public ».

En ce qui concerne la presse, l’effort est insuffisant. Face à la crise, à l’inflation, au prix du papier et à la crise du secteur, nous attendons toujours la refonte des aides à la presse que nous avons réclamée au travers de différents travaux.

J’ai pu parler précédemment de la création cinématographique et de l’impact du covid-19 sur l’audiovisuel public. Le cinéma a lui aussi subi fortement les effets de la crise sanitaire.

Avec 96 millions d’entrées en 2021, la fréquentation enregistre certes une hausse de 47 % par rapport à 2020, mais elle est en baisse de 55 % par rapport à 2019, deuxième meilleure année en termes de fréquentation depuis 1966.

Cette situation est inquiétante pour le financement de la création. Ce n’est pas la mise en application de la directive européenne sur les services de médias audiovisuels (SMA), transposée en droit français par le décret relatif aux services de médias audiovisuels à la demande, qui permettra de combler ce manque de recettes.

En outre, la hausse des moyens du CNC pour 2023 sera seulement de 3 %, donc inférieure à l’inflation attendue.

Pour ce qui est du livre, le budget de l’action n° 01, Livre et lecture, est satisfaisant, mais les inquiétudes du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain pour le secteur sont autres, entre une concentration toujours plus importante, l’incertitude sur l’avenir d’Editis, numéro deux français, et ses conséquences sur la diversité de la production.

L’autre sujet inquiétant est la flambée des matières premières. Si le chiffre d’affaires des éditeurs a connu une progression de 12,4 %, le secteur connaît un vrai bouleversement. Les petites maisons d’édition, aux marges trop faibles, connaissent de très fortes difficultés face aux plus grandes maisons.

Avec les temps difficiles marqués par la pandémie, les éditeurs indépendants ont retrouvé les lecteurs. Mais la crise du papier et les manœuvres financières dans le secteur sont inquiétantes. Il faut aider ce dernier plus massivement.

Enfin, l’industrie musicale n’est pas en reste et l’ensemble du spectacle vivant connaît une situation compliquée. Si le chiffre d’affaires de la musique enregistrée connaît une progression, la recette des billetteries des concerts baisse de 10 %.

Nous savons tous qu’il va manquer 20 millions d’euros pour que le CNM puisse mener à bien l’ensemble de ses missions. Il faudra y remédier en 2024. Même si le financement semble désormais consolidé, nous attendons le rapport de M. Bargeton sur le sujet.

M. Laurent Lafon. Nous l’attendons tous ! (Sourires.)

M. David Assouline. Pour finir, je dirai que ce n’est pas parce que nous vivons une grave crise énergétique et inflationniste que la culture doit être minorée. C’est au contraire parce que nous traversons une crise énergétique, sociale, économique, climatique et démocratique que, plus que jamais, la culture doit être promue et placée au cœur des politiques publiques. Il s’agit, autour des valeurs qu’elle incarne, de faire République ensemble. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Céline Brulin.

Mme Céline Brulin. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, les crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles » sont marqués par une insuffisante prise en compte de l’inflation galopante et de la crise énergétique que nous traversons, et par l’insuffisance de moyens dont la puissance publique devrait pourtant se doter pour faire face aux plateformes, géants du web et autres grands groupes, qui concentrent de plus en plus de médias dans les mains de quelques-uns.

Ces crédits reflètent même des choix qui risquent d’affaiblir considérablement la puissance publique, à l’image de la suppression de la contribution à l’audiovisuel public, qui n’est en rien un coup de pouce au pouvoir d’achat des Français.

Cette suppression n’est en effet que provisoirement compensée par une fraction de TVA, l’impôt le plus injuste qui soit et dont personne n’est exonéré, à la différence de la redevance.

En outre, madame la ministre, vous n’avez pas anticipé le fait que cette décision aurait pour conséquence de rendre les entreprises de l’audiovisuel public redevables de la taxe sur les salaires, ce qui nuance sérieusement l’engagement d’une intégrale compensation.

Qu’adviendra-t-il après 2025 ? Nous souhaitons que vous répondiez à cette question lors de nos débats.

En ce qui concerne la presse, pilier de notre démocratie avec l’audiovisuel public, l’explosion du prix du papier – dont l’augmentation est bien supérieure à l’évolution d’autres produits – menace de nombreux titres et, du même coup, le pluralisme.

Selon une décision prise lors de la crise sanitaire, une enveloppe de 150 millions d’euros devait être consacrée au crédit d’impôt sur le premier abonnement. Le dispositif n’ayant pas fonctionné, pourquoi ne pas affecter ces crédits à un soutien d’une autre forme, qui permettrait de faire face à ces surcoûts ?

Je ne parle même pas de l’amende de 500 millions d’euros due par Google, qu’a évoquée fort justement le rapporteur pour avis Michel Laugier. L’article 40 de la Constitution nous empêche, nous, parlementaires, de le décider, mais le Gouvernement peut agir et il serait souhaitable que cette aide privilégie les titres indépendants et favorise le pluralisme.

Cela pourrait même préfigurer une réforme des aides à la presse, comme l’a notamment demandé le groupe communiste républicain citoyen et écologiste, dans le cadre de la commission d’enquête sur la concentration des médias, en proposant le doublement de l’aide aux quotidiens à faibles ressources publicitaires.

Concernant le livre, il convient de revaloriser le niveau minimum des frais de port, comme le demandent les libraires indépendants. En effet, ce dernier est fixé dorénavant à 3 euros alors que les frais de port leur reviennent à un peu plus de 7 euros.

Si ce seuil a le mérite de marquer une première étape, nous devons aller plus loin pour conforter le prix unique du livre et rétablir les conditions d’une concurrence équitable entre les libraires et les plateformes en ligne.

J’insiste, madame la ministre, sur les conséquences de l’augmentation du prix de l’énergie. Cette augmentation considérable affectera les salles de cinéma. Là encore, nous pensons aux salles indépendantes, d’autant que les problèmes de pouvoir d’achat rencontrés par nos concitoyens peuvent jouer sur la fréquentation, qui n’a pas encore retrouvé son niveau d’avant le covid-19.

Elle pèse aussi très lourd sur la Bibliothèque nationale de France, qui fait face à un surcoût estimé à 3,6 millions d’euros en 2022 et près de 15 millions d’euros en 2023.

La BNF a déjà connu la suppression de 300 postes en dix ans, alors même qu’elle voit ses missions augmenter, avec la réouverture du site Richelieu, la poursuite de la numérisation des documents ou encore le dépôt légal numérique.

Il est temps d’engager un véritable débat sur le financement du Centre national de la musique. Les trois ressources dont dispose le CNM ne permettent pas à l’établissement d’assurer les missions qui lui incombent d’accompagnement de la filière musicale.

En effet, avec la baisse de 20 % à 25 % de la fréquentation dans le secteur du spectacle vivant et en l’absence d’un projet de loi de finances suffisamment ambitieux, l’année 2023 risque d’être compliquée. Une taxe de 1,5 % sur le chiffre d’affaires généré par le streaming contribuerait à financer le CNM, avec l’avantage d’aller chercher l’argent là où il y en a.

Cette taxe constituerait un modèle de redistribution, qui pourrait rapporter plus de 20 millions d’euros chaque année.

Enfin, concernant le secteur des jeux vidéo, nous regrettons le manque d’évaluation du crédit d’impôt dont le secteur bénéficie. Ce dernier pourrait d’ailleurs être conditionné à l’amélioration des conditions de travail, dans un secteur où la précarité règne et où l’usage abusif des heures supplémentaires reste très fréquent.

Par conséquent, en raison d’un budget bien trop fragile à nos yeux pour des secteurs essentiels à la vie démocratique, nous ne voterons pas ces crédits. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE. – M. David Assouline applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Sonia de La Provôté. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées du groupe Les Républicains. – MM. Bernard Fialaire et Pierre Médevielle applaudissent également.)

Mme Sonia de La Provôté. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, j’associe à mon propos mon collègue du groupe Union Centriste Jean Hingray, qui s’exprimera pour la partie médias et audiovisuel.

Une inquiétude pèse sur le secteur du cinéma. D’après les chiffres du CNC, les Français ne sont jamais allés si peu au cinéma depuis 1909. Le soutien au secteur des salles de cinéma est donc urgent.

Si l’arrivée de nouveaux acteurs comme Netflix, Disney+ ou Amazon Prime profite financièrement à la filière, quel en est le prix sur le plan artistique ? Quel en est le coût pour l’exception culturelle française ? De quelle évolution du public cela augure-t-il, lui qui risque de s’éloigner plus encore des salles de cinéma ?

Ce budget, soulignons-le, affiche un soutien fort et bienvenu au CNC et à la Cinémathèque française. De même, les dispositifs fiscaux incitatifs pour le cinéma, qui sont maintenus et développés, participent largement à ce soutien.

Concernant le livre, les nouvelles sont bien meilleures. Après une année 2021 exceptionnelle en librairie, le livre continue de bien se porter : les ventes ont augmenté de plus de 10 % en volume et en valeur par rapport à 2019.

L’actualité du secteur est notamment marquée par la mise en œuvre de la loi du 30 décembre 2021 visant à améliorer l’économie du livre et à renforcer l’équité entre ses acteurs, dont notre collègue Laure Darcos est à l’origine. La loi amène reconnaissance et oxygène à la filière. Elle marque un premier pas en matière d’imposition de frais de port. (Mme Laure Darcos remercie loratrice.)

Pour autant, les coûts du papier et de l’énergie sont des menaces nouvelles et sérieuses qu’il convient de prendre en compte et de suivre, notamment pour les petits éditeurs.

Du côté de l’industrie phonographique, la dynamique est aussi positive, avec une cinquième année de croissance d’affilée et une progression du chiffre d’affaires de 14,3 %.

Citons dans les nouvelles mesures budgétaires le lancement du portail national de l’édition accessible (Mme la ministre approuve.), qui doit permettre, d’ici à 2025, de se mettre en conformité avec les exigences européennes en matière d’accessibilité.

Simplifier les démarches des personnes handicapées pour se procurer et repérer des livres est un atout supplémentaire pour la filière et une mesure d’inclusion essentielle.

Le Centre national du livre (CNL) a, quant à lui, les moyens pour accomplir ses missions. Doté d’un nouveau contrat d’objectifs et de performance pour la période 2022-2026, il devrait connaître un rééquilibrage bienvenu de ses missions.

Le CNL était déjà très présent en matière de soutien économique à la filière. S’ajoute désormais à ses objectifs le développement du soutien à la lecture, une politique culturelle et d’émancipation majeure pour nous toutes et nous tous.

Autre sujet, la situation de la Bibliothèque nationale de France est à surveiller, car l’établissement doit faire face à de nouvelles missions – réouverture du site Richelieu, nouveau musée, développement du dépôt légal numérique – à plafond d’emplois constants.

L’impasse budgétaire liée à l’inflation risque de conduire la BNF à ralentir et reporter des investissements importants : création du centre de conservation d’Amiens, sécurisation de l’esplanade du site Tolbiac et renouvellement de son système de sécurité incendie (SSI).

Venons-en au Centre national de la musique, dont le financement continue de soulever de vives interrogations. L’accompagnement de la filière musicale par cette institution impose une réflexion approfondie quant à ses missions et au financement supplémentaire nécessaire pour que le CNM puisse les remplir.

L’influence du streaming et du numérique prouve que les plateformes ont, à coup sûr, un rôle à jouer dans son budget. Le CNM a soutenu efficacement la filière durant la crise sanitaire, mais les ressources qui lui sont allouées sont inférieures à ce qui avait été envisagé au moment de sa création. Nous attendons les conclusions de la mission de notre collègue Julien Bargeton pour donner enfin un cadre optimal à son financement.

Je terminerai par le secteur du jeu vidéo, fleuron national et secteur économique ultradynamique. Le fonds d’aide au jeu vidéo joue un rôle de soutien à l’écriture, la préproduction et la production des entreprises de création. Nous soulignons cet effort pour un secteur très pourvoyeur d’emplois et qui valorise la France sur le plan international.

Madame la ministre, nous retenons les efforts qui sont fournis par le ministère au travers de ce budget pour soutenir les secteurs du livre et des industries culturelles.

Ces secteurs, qui devront faire l’objet d’un suivi très attentif, participent en effet largement à notre économie et font, pour les citoyens, bien plus encore. (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains. – M. Pierre Ouzoulias applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Laure Darcos. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)

Mme Laure Darcos. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, comme vous le savez, la mission « Médias, livre et industries culturelles » rassemble les crédits que le ministère de la culture consacre au développement et au pluralisme des médias et à sa politique en faveur du livre, de la lecture publique et des industries culturelles.

Elle comporte deux programmes, le programme 180, « Presse et médias », et le programme 334, « Livre et industries culturelles ».

Il n’a échappé à aucun d’entre vous que la presse dans son ensemble a particulièrement souffert des années covid et a dû faire face à une érosion importante de son audience, qu’elle n’est pas parvenue à combler à ce jour.

La désaffection du lectorat se double malheureusement de difficultés d’ordre structurel déjà anciennes, en particulier l’érosion de la diffusion papier et la transition numérique inachevée.

Certes, les pouvoirs publics ont mis en place des mesures d’urgence, afin de garantir la continuité de la distribution de la presse et d’aider les acteurs les plus touchés par la crise sanitaire. Mais dans ces aides, madame la ministre, n’oubliez surtout pas la presse de la connaissance et du savoir !

Ces mesures se sont d’ailleurs ajoutées aux aides transversales, dont l’ensemble des acteurs économiques a pu bénéficier.

En 2023, les dotations du programme 180 évoluent de près de 10 %, afin, notamment, de soutenir la mise en œuvre de la réforme du transport de la presse. Mais cette évolution positive ne tient pas compte, malheureusement, de la très forte augmentation du coût du papier.

En fin de compte, le saupoudrage des dépenses, notamment fiscales et sociales, ne contribue pas, de mon point de vue, à traiter à la racine les maux qui affectent l’ensemble des titres de la presse.

S’agissant des radios associatives, acteurs de proximité importants, le projet de loi de finances pour 2023 leur apporte une aide renforcée au travers du fonds de soutien à l’expression radiophonique locale, abondé à hauteur de 1,7 million d’euros. C’est une nécessité de cohésion sociale et je l’approuve.

J’en viens à présent au programme 334, « Livre et industries culturelles », pour évoquer les crédits dédiés au livre et à la lecture.

Dans le contexte économique que nous connaissons, j’émets une crainte, celle de voir tout un pan de l’économie du livre s’effondrer. Comme vous le savez, les librairies sont le commerce de détail le moins rentable, avec des marges extrêmement faibles et des charges fixes – salaires et loyer – élevées. Elles sont donc particulièrement exposées aux conséquences de l’inflation et j’appelle le Gouvernement à la vigilance sur ce sujet.

Permettez-moi également d’exprimer un regret au sujet de la réforme, aux résultats mitigés, des frais d’envoi des livres achetés sur les plateformes de vente à distance, pourtant votée à l’unanimité en 2021 dans le cadre de ma proposition de loi sur le livre.

Le montant de 3 euros minimum et la quasi-gratuité à partir de 35 euros d’achat ne donnent pas aux libraires les moyens de lutter à armes égales contre le géant Amazon et de s’installer sérieusement sur le créneau de la vente à distance.

J’espère surtout que Bruxelles n’y mettra pas carrément, dans sa notification, un coup d’arrêt.

S’agissant du Centre national du livre, les crédits sont abondés de 1,1 million d’euros, afin de lui permettre de renforcer son action de soutien à la diffusion des œuvres et à la présence des auteurs sur l’ensemble des territoires.

Ces crédits supplémentaires ont également pour objectif d’accompagner les éditeurs dans la mise en œuvre de nouvelles obligations d’accessibilité aux personnes en situation de handicap ; je ne peux que m’en réjouir.

De même, je salue l’intérêt que l’État porte à la Bibliothèque nationale de France, qui bénéficiera d’un abondement significatif de ses crédits d’investissement et de fonctionnement, lui permettant de mener à bien son ambitieux programme de modernisation du site François-Mitterrand. Pour autant, sera-t-elle en mesure de faire face aux conséquences de la crise énergétique ? Je n’en suis pas convaincue.

Concernant la musique enregistrée, se pose en 2023 la question cruciale des moyens dont devra disposer le Centre national de la musique pour assurer la plénitude des missions que la loi lui confie.

Si Mme la ministre de la culture a rappelé que le budget pour 2023 du CNM était suffisamment solide, son modèle de financement a néanmoins avivé les tensions parmi les professionnels de la musique. Dans ce contexte, la mission parlementaire confiée à notre collègue Julien Bargeton est la bienvenue. Elle permettra, n’en doutons pas, de dégager des pistes pour un cadre financier cohérent. (Murmures.) La pression est forte ! (Sourires.)

Avec toutes les précautions d’usage, je souligne que la piste d’un financement au moyen de la taxe sur la diffusion en vidéo physique et en ligne de contenus audiovisuels, dite taxe YouTube, peut sembler plus pertinente que celle d’une éventuelle « taxe streaming » permettant de mettre à contribution les acteurs de la musique enregistrée payante.

Je ne conclurai pas cette intervention sans évoquer la situation du cinéma. Depuis la fin de la crise sanitaire, l’industrie du cinéma semble retrouver quelques couleurs, même s’il convient de rester prudent au regard de la baisse de fréquentation de 30 % observée entre 2019 et 2022.

La situation du Centre national du cinéma et de l’image animée s’est, quant à elle, stabilisée, mais reste fragile d’un point de vue financier, en dépit de l’augmentation de 1,9 % des taxes affectées en 2023.

Toutefois, dans son avis budgétaire, notre collègue Jérémy Bacchi n’a pas manqué de souligner le contexte économique particulier dans lequel évolue le cinéma, peu favorable à la prise de risque, ainsi que les enjeux de la sobriété énergétique et du remboursement des prêts garantis par l’État. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Hingray. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. Jean Hingray. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, permettez-moi tout d’abord d’excuser notre collègue Catherine Morin-Desailly, spécialiste de l’audiovisuel, qui a été retenue par d’autres engagements et que j’associe naturellement à mon intervention.

Comme l’a dit le rapporteur spécial Jean-Raymond Hugonet, jamais la situation de l’audiovisuel public n’aura paru aussi confuse et incertaine qu’en cette fin d’année 2022.

Nous devrions être entrés dans une nouvelle étape après le vote de la loi audiovisuelle portée par Franck Riester. Mais nous voilà aujourd’hui au point mort, puisque Roselyne Bachelot l’a enterrée en 2020.

Cette loi aurait permis, entre autres, de clarifier le modèle économique et le modèle de financement. Pourtant promise par Emmanuel Macron en 2017, elle semblait indispensable.

Cerise sur le gâteau, on supprime, cet été, au détour du projet de loi de finances rectificative, la contribution à l’audiovisuel public sans avoir pris soin d’évaluer les conséquences de cette mesure ni réfléchi à un mode de financement alternatif pérenne à l’occasion d’un véritable débat dans nos commissions.

Vous le savez, madame la ministre, le groupe Union Centriste, hostile à l’accroissement de la dette publique, souhaitait le report d’une année de suppression, le temps précisément d’une étude sérieuse et d’un débat éclairé.

Aujourd’hui nous actons le fait que le compte de concours financiers « Avances à l’audiovisuel public » est maintenu. Il est alimenté par une fraction du produit de la TVA correspondant au niveau de dépenses prévues par la trajectoire financière des entreprises.

L’incertitude demeure maintenant sur le mécanisme qui sera retenu à compter de 2025 pour financer l’audiovisuel public de manière pérenne. À cet égard, nous regrettons que les préconisations de nos rapporteurs visant à créer une instance indépendante chargée de proposer une évaluation pluriannuelle des besoins de l’audiovisuel public – idée défendue par notre collègue Catherine Morin-Desailly dans des rapports antérieurs – n’aient pas été retenues par le Gouvernement.

Par ailleurs, les crédits inscrits sont certes en hausse, mais doivent être relativisés, car nous avons découvert les effets fiscaux de la suppression de la CAP, données non communiquées lors de l’examen du projet de loi de finances rectificative.

À cela s’ajoute, pour France Médias Monde et Arte, la perte du droit de déduire la TVA, ce qui a pour conséquence d’augmenter leurs charges en 2022 et 2023.

Restent l’inflation et les coûts de l’énergie, qui auront des conséquences non négligeables sur le budget. En dépit des économies réalisées, la hausse affichée des crédits ne suffira donc pas pour compenser toutes ces difficultés.

Nous craignons aussi que ces moyens ne suffisent pas à financer les nouvelles priorités de ces entreprises. France Télévisions doit être structurellement et financièrement capable d’affronter la concurrence et de continuer à financer la création.

Quant à l’audiovisuel extérieur, amené à jouer un rôle essentiel dans le monde troublé et menaçant que nous vivons – l’actualité nous le rappelle chaque jour –, nous sommes inquiets d’un niveau de ressources insuffisant.

Le financement de France Médias Monde et d’Arte n’est en effet plus suffisamment indépendant, une dotation d’État s’étant substituée à une dotation publique. Voilà pourquoi, en l’absence, à ce stade, de mécanisme de financement approprié et inscrit dans une loi organique – ce que préconise ni plus ni moins le rapport demandé à l’inspection générale des affaires culturelles (Igac) – nous ne pouvons que suivre l’avis du rapporteur et nous abstenir sur ces crédits.

Attaché aux missions de l’audiovisuel public, le groupe centriste restera, madame la ministre, particulièrement vigilant et exigeant dans les semaines à venir pour que les missions dont l’audiovisuel public est doté ne soient pas plus longtemps fragilisées et que les personnels soient rassurés sur leur avenir. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Else Joseph. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Else Joseph. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, alors que les différents secteurs sont touchés par une crise multiforme, la hausse des crédits affectés ne suffit pas à masquer de véritables difficultés sur l’efficacité et la pertinence des dispositifs actuels.

Nous devons déplorer l’absence de véritables réformes pour une meilleure adaptation aux nouveaux enjeux. Les usagers et les usages changent. Les publics n’ont plus les mêmes goûts et les acteurs de l’industrie culturelle proposent de nouvelles démarches. Le numérique est désormais une donnée incontournable dans tous les médias.

Pour l’audiovisuel public, il faut ainsi reconnaître l’absence d’une véritable réforme d’ampleur à la hauteur des attentes.

La suppression de la redevance audiovisuelle est restée avant tout la simple traduction d’une promesse électorale, une décision adoptée sans vision d’ensemble et sans solution concrète pour notre audiovisuel public. Rien n’a été engagé sur son organisation, qui reste nécessaire.

Voilà quelques mois, mes collègues Roger Karoutchi et Jean-Raymond Hugonet proposaient la création d’un « média public puissant et innovant » pour répondre notamment au défi du numérique en raison de la concurrence des plateformes.

Il n’en est rien, malheureusement. Nous sommes loin de nos voisins allemands ou britanniques, qui ont su mettre en place un réseau attractif et reconnu.

La hausse des crédits ne doit pas faire illusion : elle vise surtout à neutraliser les conséquences fiscales de la suppression de la redevance. Le problème du financement des médias publics est prégnant. Si le niveau des recettes est maintenu, rien n’a été fait pour évaluer les besoins de l’audiovisuel public. Et l’horizon 2025 nous inquiète.

Quant à la presse, rien n’a été fait sur la réforme des aides, sauf pour les aides à la distribution. C’est insuffisant. Les rapports entre le système actuel des aides et le contexte numérique n’ont pas été redéfinis.

Dans le cadre du récent rapport de notre collègue Michel Laugier, nous avions émis le vœu que la presse régionale soit mieux aidée pour la digitalisation, en raison de nouveaux usages constatés chez les lecteurs.

Le secteur doit être accompagné pour qu’il puisse se réinventer et trouver lui-même les solutions. Or nous ne les percevons pas.

Pour rester dans le domaine de la culture, nous devons saluer l’attachement des Français au livre. Les ventes de livres sont en hausse, cela a été évoqué. Mais ce qui est gagné d’un côté grâce au goût des Français pour la lecture peut être, hélas ! perdu de l’autre par la hausse des prix du papier, rendant le prix des ouvrages inabordable.

Concernant les frais de port sur les livres, ma collègue Laure Darcos avait déploré un alignement sur le modèle Amazon. Le niveau minimum de frais de port pour les livres est trop faible. Ce n’est pas un message sérieux pour nos libraires et pour l’édition ! L’application de la loi sur l’économie du livre est décevante.

M. Pierre Ouzoulias. Très bien !

Mme Else Joseph. Les éditeurs, les libraires et, au-delà, les lecteurs sont en attente de fortes décisions.

Quant à la musique, il faut noter la poussée continue du streaming. C’est une consommation nouvelle destinée à être pérenne et qui pourrait être une base pour d’éventuelles ressources.

La question du financement du CNM reste posée. Il devient impératif de trouver une solution pour ses recettes, qui sont insuffisantes. Quelles seront les nouvelles ressources adaptées au streaming ? Faudra-t-il une taxe sur cette forme de consommation pour financer le CNM ? Là aussi, nous manquons de perspectives claires.

Parlons à présent du septième art, qui a été, hélas ! lui aussi éprouvé par la crise. Face à la crise sanitaire, le cinéma a symbolisé la vulnérabilité de la culture. Nous sommes sortis des polémiques sur l’ouverture des salles, mais la fréquentation a chuté d’un tiers par rapport à 2019, comme si les contraintes des gestes barrières étaient restées dans les esprits, une véritable jauge mentale qui se substitue aux anciennes.

Parce qu’il manie l’image, le cinéma subit la forte concurrence d’internet et des plateformes numériques. Il y a donc urgence à réviser les soutiens à ce secteur, comme le CNC s’y était engagé en janvier 2020. Nous sommes en attente de décisions fortes.

Comment redonner aux Français, tout simplement, le goût des salles de cinéma ? Voilà un test pour la politique du Gouvernement.

Enfin, la place du jeu vidéo se consolide. Ce secteur a bien résisté à la crise et les perspectives sont prometteuses. La France est bien représentée dans le secteur des jeux ; elle est même une référence. Soutenons la création si nous voulons que notre pays garde sa place, mais il faut prendre en compte la nécessité de préserver les jeunes publics.

Nous déplorons donc l’absence de réformes vitales et nécessaires dans cette mission, alors que des perspectives positives existent. Avec beaucoup de réserves, nous voterons tout de même les crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles ». (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Michel Laugier, rapporteur pour avis, applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Rima Abdul-Malak, ministre de la culture. Madame la présidente, monsieur le président de la commission, madame, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis très heureuse de poursuivre avec vous cet examen de la seconde partie du budget du ministère de la culture pour 2023, au travers des crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles » et du compte de concours financiers « Avances à l’audiovisuel public ».

Les enjeux que recouvrent le livre, les médias et notre audiovisuel public sont fondamentaux pour l’avenir de notre démocratie, surtout à un moment où notre pays est confronté, comme la plupart des sociétés démocratiques, à une crise de l’information. Nous sommes dans cette ère de l’immédiateté qu’avait si bien analysée Pascal Josèphe, à qui vous avez magnifiquement rendu hommage, cher André Gattolin – je vous en remercie.

Recul de la confiance des citoyens dans les médias, transformation des usages, perte de repères face à la profusion d’informations diffusées en ligne, fragilisation du modèle économique de la presse : les défis sont nombreux. S’agissant de consolider les acteurs des médias, du livre et des industries culturelles et créatives et de permettre à la France de rester une « puissance de rêve », pour reprendre des mots de Malraux, ce budget pour 2023 se veut ambitieux. Il peut même être qualifié d’historique : 704 millions d’euros de crédits budgétaires, soit 4,3 % de plus que l’année passée, sont alloués à cette mission « Médias, livre et industries culturelles ». Les crédits du compte de concours financiers « Avances à l’audiovisuel public » s’élèvent de leur côté à 3,8 milliards d’euros, soit une hausse d’un peu plus de 3 % par rapport à l’an dernier.

Je m’y étais engagée, cet engagement est tenu. Non seulement la compensation de la suppression de la redevance s’est faite à l’euro près, mais ce budget prévoit une hausse des dotations aux sociétés de l’audiovisuel public visant à prendre en compte les effets fiscaux du changement du mode de financement et compenser les effets de l’inflation.

La mission « Médias, livre, industries culturelles » pour 2023 est orientée autour de plusieurs grandes priorités.

Je veux d’abord évoquer le développement de la lecture, qui m’est très cher, sur tout le territoire, dans la continuité de la dynamique, très forte, qu’avait impulsée l’attribution à la lecture du label de grande cause nationale. S’il ne faisait aucun doute que les Français étaient attachés au livre et à la lecture – vous l’avez tous dit –, la crise sanitaire a été l’occasion de le rappeler et de mettre en lumière notre première industrie culturelle. Les librairies et les maisons d’édition ont été touchées par la pandémie, mais le soutien public a été au rendez-vous, via de nombreux dispositifs sectoriels, sans oublier, pour les deux dernières années, le plan de relance.

Le soutien au secteur du livre doit se poursuivre. Ce budget illustre bien cette ambition : 10 millions d’euros supplémentaires sont consacrés au développement de la lecture sur tout le territoire, au soutien de nos bibliothèques, du réseau des librairies, des maisons d’édition en région, ainsi qu’au renforcement des manifestations littéraires.

Nous lançons également, en lien avec le ministère des solidarités, de l’autonomie et des personnes handicapées, le projet d’une nouvelle plateforme accessible à toutes les personnes en situation de handicap, qui va référencer les livres adaptés à chaque handicap ; 5 millions d’euros sont prévus à cet égard jusqu’en 2025. Des budgets spécifiques seront aussi versés au Centre national du livre pour inciter les éditeurs à adapter davantage de livres pour les personnes handicapées.

En outre, des aides vont être mises en place, via la Centrale de l’édition, pour financer, faciliter, renforcer le transport des livres – +1 million d’euros de dotation. Il s’agit en particulier de faire face aux difficultés d’acheminement, dont vous avez tous conscience, notamment vers les territoires d’outre-mer et, à l’international, vers les librairies francophones ; cet enjeu me tient très à cœur.

Notre mission est également de garantir le pluralisme des médias et l’accès à une information fiable, libre, vérifiée, indépendante. J’y insiste, il y a là un enjeu majeur pour l’avenir de notre démocratie. Dans les mois à venir vont se tenir les États généraux du droit à l’information, auxquels l’ensemble des acteurs concernés vont être associés, ainsi que, bien sûr, tous les parlementaires qui le souhaitent.

Pour le secteur de la presse, l’année 2023 marque la fin du plan de filière « presse », qui était l’un des plans majeurs du plan de relance. Je veux rappeler l’ampleur de ce plan inédit, une enveloppe de 377 millions d’euros ayant permis de financer les transitions écologique et numérique du secteur et de réaffirmer l’attachement de l’État à cette presse si vitale pour notre démocratie.

Le ministère de la culture va continuer à soutenir le secteur. La priorité que nous avions définie avec la filière était la réforme de la distribution, sur laquelle nous avons travaillé depuis déjà plusieurs mois. C’est pour cette raison que le budget est en hausse de 17,3 millions d’euros pour les aides à la diffusion et la compensation du transport postal.

Vous avez raison, mesdames, messieurs les sénateurs, la hausse des coûts, notamment du prix du papier, est une préoccupation forte et légitime des professionnels. Je sais que vous y êtes tous attentifs et nous allons avoir l’occasion d’en parler lors de l’examen des amendements.

Une somme de 2 millions d’euros est également consacrée aux études préalables et au lancement des travaux de la future Maison du dessin de presse, projet très important à mes yeux, lieu d’exposition, de création et de médiation.

Je veux également vous assurer de ma volonté de mener un état des lieux assez complet des aides à la presse, pour travailler à cette réforme que vous appelez de vos vœux. Je ne suis ministre que depuis six mois ; j’ai déjà négocié un bon budget, mais maintenant, je vous l’accorde, nous devons travailler sur cette réforme des aides à la presse, qui n’est pas une mince affaire.

Concernant le secteur des médias, nous continuerons de soutenir les radios de proximité, pour la troisième année consécutive, en augmentant les crédits du fonds de soutien à l’expression radiophonique locale. Il s’agit d’accompagner la croissance du nombre de radios associatives éligibles à ce fonds, de 690 en 2017 à 744 en 2022.

Comme je l’ai dit à propos de la mission « Culture », ce budget permet non seulement de répondre aux besoins immédiats liés au contexte énergétique, mais aussi de préparer l’avenir en mettant la transition écologique de nos établissements et de nos opérateurs au cœur de l’ensemble de nos politiques publiques. Ainsi, 8 millions d’euros supplémentaires, en dépenses de fonctionnement, permettront de soutenir les établissements publics de la mission « Médias, livre et industries culturelles » face à l’inflation. Pour le Centre national de la musique, 900 000 euros sont prévus visant à accompagner la transition écologique du secteur de la musique en 2023 ; c’est une amorce, évidemment.

Je sais que l’enjeu du financement du Centre national de la musique est au cœur de vos préoccupations – vous l’avez tous évoqué. Le sénateur Julien Bargeton vient de commencer sa mission sur le financement de la filière musicale dans son ensemble, mais je veux vous rassurer de manière très claire pour ce qui est du budget pour 2023 : comme je vous l’avais indiqué – j’ai revérifié –, le Centre national de la musique peut compter sur 20 millions d’euros de reliquats du plan de relance, qui vont s’ajouter à son budget pour 2023. N’ayez crainte, l’an prochain, le secteur sera bien accompagné. Et, sur la base des conclusions de la mission, nous pourrons rediscuter ensemble de l’avenir à plus long terme.

Pour ce qui est de nos cinémas, je vous remercie, mesdames, messieurs les sénateurs, de votre engagement en leur faveur. Ce secteur a fait l’objet d’un soutien sans faille et sans précédent du Gouvernement pendant la crise sanitaire, et ce soutien va se poursuivre : le montant des taxes affectées au CNC va atteindre 711 millions d’euros, en légère hausse par rapport à 2022. L’enjeu principal des semaines passées et des mois à venir est évidemment celui de la fréquentation de nos salles de cinéma, vous l’avez tous dit. On s’attend, à la fin de cette année, à une baisse de fréquentation comprise entre 25 % et 30 % – j’espère que l’on sera plutôt autour des 25 %.

Néanmoins, je reste optimiste. Pourquoi ? Je puise cet optimisme dans l’histoire : au début des années 1990, on nous avait prédit la mort du cinéma, que la télévision devait tuer. La fréquentation annuelle avait chuté à 110 millions de spectateurs en 1992. Et puis les salles se sont réinventées, les films ont été au rendez-vous et, petit à petit, le cinéma a remonté la pente, jusqu’à 213 millions de spectateurs en 2019, avant le covid-19. Le sursaut est donc possible. Le cinéma ne fut pas tué par la télévision ; il ne le sera pas non plus par les plateformes.

Cet optimisme, je le puise aussi dans la comparaison avec nos voisins européens – 60 % de baisse de fréquentation en Italie, 40 % en Allemagne ou en Espagne – ou avec la Corée du Sud, où la baisse est de 50 %. Devant de tels chiffres, je me dis que, tout de même, le secteur du cinéma en France a mieux résisté et que les Français restent un peuple de cinéphiles. Nous avons un vrai appétit pour les films français en salle, pour l’émotion sur grand écran, comme a pu le montrer le succès de films comme Revoir Paris, La Nuit du 12, LInnocent, Simone, le voyage du siècle ou encore Novembre.

L’État accompagne fortement cette reprise, notamment grâce au pass Culture, que nous avons précédemment évoqué. Entre janvier et août 2022, 2,5 millions de séances de cinéma ont été réservées via cet outil, appui précieux à la fréquentation des jeunes, qui sont le public de demain.

À ce sujet, vous avez été plusieurs à mentionner le plan France 2030. C’est aussi par le biais de ce plan très ambitieux que l’État accompagne le secteur du cinéma. Madame de Marco, sachez que le ministère de la culture est pleinement impliqué dans ce plan, le CNC étant une administration centrale dudit ministère. Nous sommes entièrement mobilisés sur l’appel à projets « La grande fabrique de l’image », qui vient d’être clos ; quelque 175 dossiers, émanant de 13 régions – voyez la diversité ! –, ont été déposés.

L’objectif est triple : soutenir des infrastructures de tournage ; soutenir des studios de jeux vidéo, d’animation, d’effets visuels, de postproduction ; soutenir des formations, l’enjeu étant de développer les compétences et les talents. Tout cela est dans le plan France 2030, notamment l’appel à projets « La grande fabrique de l’image », qui est très « territorial » et qui coiffe l’ensemble des secteurs des industries créatives.

J’en viens maintenant au compte de concours financiers « Avances à l’audiovisuel public », dont les crédits augmentent de 114,4 millions d’euros, pour atteindre 3,8 milliards d’euros.

Nous avons eu de nombreux débats cet été. Je ne vais pas y revenir, d’autant que mon temps d’intervention est compté. Nous avons pleinement tenu nos engagements. Je l’ai dit et le redis : le PLF pour 2023 apporte une compensation à l’euro près de la redevance et des effets fiscaux liés au changement de financement. Bien sûr, nous avons aussi tenu compte, en partie, de la hausse des coûts de l’énergie ainsi que de l’inflation.

Je ne reviens pas sur tous les chiffres, que j’ai détaillés en commission, mais je veux rappeler que toutes ces hausses, entreprise par entreprise, ont été déterminées par l’État sur la base de projections qui ont été produites par ces entreprises et discutées avec elles.

Nous avons eu l’occasion, à plusieurs reprises, d’échanger sur le calendrier. La trajectoire financière pluriannuelle de l’audiovisuel public va être fixée en deux temps. Dans un premier temps, un avenant au contrat d’objectifs et de moyens (COM) actuel, 2020-2022, va être signé d’ici à la fin de l’année ; y seront fixées les cibles à atteindre et la dotation publique pour 2023.

Dans un second temps, à l’issue de travaux qui vont évidemment associer le Parlement, dans le cadre d’un dialogue nourri avec les entreprises de l’audiovisuel public, de nouveaux contrats d’objectifs et de moyens vont être établis au cours de l’année 2023 et adossés à une trajectoire de dotation pluriannuelle. Je souhaite que ces nouveaux COM aient une durée de cinq ans, de sorte que l’on se donne la plus grande visibilité possible.

J’ai déjà indiqué quelques grands axes prioritaires qui, à mes yeux, doivent guider ces nouveaux contrats d’objectifs et de moyens.

Nous avons parlé de l’information, de sa fiabilité, de son pluralisme.

Nous avons parlé de la jeunesse. Gardons en tête les chiffres récemment publiés pour le Royaume-Uni, dont nous ne sommes plus très loin : les jeunes regardent sept fois moins la télévision que leurs aînés.

Nous avons parlé de la création : nous savons l’importance du financement de la création par l’audiovisuel public.

Nous avons parlé de la proximité et de l’importance de l’audiovisuel extérieur – je vous remercie de l’avoir évoquée – surtout en des temps de grande manipulation de l’information et d’ingérences étrangères.

Voilà, mesdames, messieurs les sénateurs, les quelques priorités que je souhaitais réaffirmer pour cette mission « Médias, livre et industries culturelles ». Telles sont les ambitions que je veux défendre pour l’audiovisuel public. Je salue votre engagement sur ces enjeux et je me réjouis de pouvoir poursuivre avec vous l’échange nourri que nous avons entamé ces derniers mois. J’en ai terminé, en libérant deux minutes pour la suite du débat… (Sourires. – Applaudissements sur les travées du groupe RDPI et sur des travées du groupe UC. – M. Marc Laménie et Mme Monique de Marco applaudissent également.)

Mme la présidente. Merci, madame la ministre ; je vois que vous préféreriez terminer cet après-midi. (Nouveaux sourires.)

Mes chers collègues, je vous rappelle que, pour cette mission, la conférence des présidents a fixé la durée maximale de la discussion à deux heures quinze.

En conséquence, si nous n’avions pas terminé l’examen de cette mission à vingt heures vingt, celui-ci se poursuivrait à la fin des missions de cette semaine.

médias, livre et industries culturelles

Médias, livre et industries culturelles - Compte de concours financiers : Avances à l'audiovisuel public
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
État D
Médias, livre et industries culturelles - Compte de concours financiers : Avances à l'audiovisuel public
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
État D

Mme la présidente. Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles », figurant à l’état B.

ÉTAT B

(En euros)

Mission / Programme

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

Médias, livre et industries culturelles

702 387 108

704 860 321

Presse et médias

372 049 399

371 009 279

Livre et industries culturelles

330 337 709

333 851 042

Mme la présidente. L’amendement n° II-526, présenté par M. Dossus, Mme de Marco, MM. Breuiller, Parigi, Gontard, Benarroche, Dantec, Fernique et Labbé, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Presse et médias

 

20 000 000

 

20 000 000

Livre et industries culturelles

20 000 000

 

20 000 000

 

TOTAL

20 000 000

20 000 000

20 000 000

20 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Madame la ministre, je vous ai bien entendu nous rassurer sur le financement du CNM pour l’année prochaine ; malgré tout, des inquiétudes demeurent, notamment chez les petits acteurs culturels. Même si nous nous félicitons de la mission qui a été confiée à notre collègue Bargeton sur les ressources du CNM, ses conclusions ne devraient être rendues que courant 2023 ; en d’autres termes, sa traduction budgétaire n’aura pas lieu avant 2024.

Dans l’attente, nous proposons, pour soutenir les filières musicales, d’instaurer un fonds doté de 20 millions d’euros pour l’année 2023. Ce bol d’air financier devrait permettre au CNM de passer cette année difficile, avant qu’il ne dispose de ressources pérennes.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Roger Karoutchi, rapporteur spécial. Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.

Comme l’a dit Mme la ministre, et comme je l’ai moi-même rappelé, les responsables du CNM – nous les avons reçus – n’ont pas de problèmes financiers pour l’année 2023 : ils en ont pour 2024. La mission de Julien Bargeton, décidément à l’honneur (Sourires.), doit nous donner dans quelques mois des orientations. Sur cette base, nous demanderons un réaménagement du budget.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Rima Abdul-Malak, ministre. Demande de retrait également.

Considérez, monsieur le sénateur Dossus, que votre amendement est déjà pris en compte, puisque, je l’ai indiqué, il existe un reliquat d’environ 20 millions d’euros, dont j’ai obtenu le report sur l’exercice 2023. Cette somme va bel et bien abonder le budget pour 2023 du Centre national de la musique, en attendant de préparer l’avenir.

Mme la présidente. La parole est à M. Julien Bargeton, pour explication de vote.

M. Julien Bargeton. J’apporte rapidement des précisions, puisque la mission qui m’a été confiée vient d’être évoquée. Il s’agit de faire le point sur les dispositifs de financement de la filière musicale, en particulier du CNM, d’en faire l’histoire et le bilan, d’en tirer des conclusions, d’analyser le marché, d’objectiver et de documenter la réalité des besoins, et notamment des failles de marché qui justifient l’intervention publique. Il s’agit aussi d’élaborer des scénarios, d’envisager toutes les pistes possibles, avec leurs avantages et leurs inconvénients, et de faire un certain nombre de propositions non seulement sur le CNM, mais aussi, de manière générale, sur la gouvernance, l’organisation et la stratégie de la filière musicale en France.

Par cohérence avec la mission qui m’a été confiée, je ne pourrai donc pas voter cet amendement. En tout cas, j’ai bien entendu les préoccupations qui viennent d’être exprimées, et croyez bien que je m’appuierai aussi sur les travaux du Sénat et sur les nombreuses remarques de mes collègues pour écrire mon rapport.

Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.

M. David Assouline. Nous partageons évidemment en tout point l’esprit de cet amendement ; nous avions d’ailleurs envisagé de faire une proposition en ce sens.

Ce qui me pose néanmoins problème, symboliquement, c’est de devoir gager un tel amendement sur des crédits pris à la presse. Ce secteur n’est pas en si bonne santé que l’on puisse y grappiller des sous pour alimenter le reste… Nous allons donc nous abstenir.

M. Thomas Dossus. Je le retire !

Mme la présidente. L’amendement n° II-526 est retiré.

Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° II-659 n’est pas soutenu.

L’amendement n° II-679, présenté par MM. Artano, Fialaire et Requier, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Presse et médias

10 000 000

 

10 000 000

 

Livre et industries culturelles

 

10 000 000 

 

10 000 000 

TOTAL

10 000 000

10 000 000

10 000 000

10 000 000 

SOLDE

0

0

La parole est à M. Bernard Fialaire.

M. Bernard Fialaire. Cet amendement vise à soutenir le modèle des éditeurs privés de services de télévision et de radio à vocation locale opérant dans les territoires d’outre-mer.

En effet, ces acteurs jouent un rôle essentiel à plusieurs égards.

Ils mettent en avant des identités, des cultures et des traditions locales par une offre de proximité plurielle et diverse.

Ils resserrent les liens entre nos territoires éloignés et la métropole, mission qui s’est révélée cruciale pendant la pandémie.

Ils assurent le rayonnement de la France sur les bassins Pacifique, Indien et Caraïbe.

Ces opérateurs permettent de surcroît un accès gratuit aux meilleurs programmes des chaînes privées hexagonales pour les populations locales.

Je n’oublie pas leur audience et leur poids économique : ils rassemblent près d’un million de personnes chaque jour sur trois zones et emploient plus de 500 salariés directs, ainsi qu’environ 700 intermittents, qui travaillent au sein de groupes audiovisuels intégrés dans les territoires.

Hélas ! malgré tous ces atouts, leur modèle économique est aujourd’hui gravement menacé par les charges anormales de transport et de diffusion qu’ils doivent supporter en raison de leur éloignement du territoire national et des spécificités de leur zone géographique de diffusion.

Craignant que ces éditeurs de télévision et de radio ne subissent le même sort que celui de la presse quotidienne régionale – je vous rappelle les liquidations qu’ont vécues Le Journal de lîle de La Réunion et France-Antilles –, les auteurs de cet amendement d’appel souhaitent rendre le Gouvernement sensible à la nécessité d’accompagner leur modèle et de garantir leur pérennité.

Mme la présidente. L’amendement n° II-564 rectifié, présenté par Mmes Jasmin et Conconne, MM. Antiste et Lurel, Mme S. Robert, MM. Assouline, Kanner, Chantrel, Lozach et Magner, Mme Monier, M. Stanzione, Mme Van Heghe et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Presse et médias

1 000 000

 

1 000 000

 

Livre et industries culturelles

 

1 000 000

 

1 000 000

TOTAL

1 000 000

1 000 000

1 000 000

1 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Victoire Jasmin.

Mme Victoire Jasmin. Cet amendement a pour objet d’accompagner et, surtout, de préserver le modèle des éditeurs privés de services de télévision et de radio à vocation locale opérant dans les différents territoires d’outre-mer. Il s’agit de garantir leur pérennité, afin que, à l’instar de ce qui se passe dans l’Hexagone au profit de nos concitoyens métropolitains, les populations des outre-mer continuent de bénéficier de manière effective de la gratuité d’accès à de nombreux programmes, de la diversité des offres audiovisuelles, du pluralisme des expressions, ainsi que de la mise en valeur des identités et cultures locales. Il s’agit aussi de préserver des emplois directs et indirects – entre 500 et 700 selon les périodes.

L’objectif est que le Gouvernement accepte de créer à cet effet une aide directe et pérenne dès 2023. Pour rappel, nos collègues Jocelyne Guidez et Maurice Antiste, dans le rapport qu’ils ont fait en 2019 au nom de la délégation sénatoriale aux outre-mer, recommandaient déjà une prise en compte réelle de la situation des outre-mer en matière d’audiovisuel public – à l’époque, il s’agissait de fermer France Ô. Nous nous étions opposés à cette suppression, mais le Gouvernement l’avait confirmée. Nous voyons bien, maintenant, que nous avions raison, compte tenu de la situation des médias dans nos territoires.

Je souhaite vivement que nos outre-mer soient dotés de moyens suffisants pour permettre à ces médias de poursuivre leurs activités.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Roger Karoutchi, rapporteur spécial. Je sollicite l’avis du Gouvernement, s’agissant d’un système très spécifique. J’émets tout de même une petite réserve : ces deux amendements sont gagés sur les crédits du livre et de la lecture, ce qui me gêne un peu, chacun le comprend, même si je n’ignore rien des obligations prévues par la Lolf.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Rima Abdul-Malak, ministre. La mesure qui nous est ici proposée est en effet gagée sur les crédits du livre ; or j’ai justement expliqué que nous proposions l’augmentation des crédits destinés à compenser les coûts du transport des livres, notamment vers l’outre-mer.

Je n’ai pas très bien compris si vous parliez globalement de tous les médias en outre-mer ou, plus spécifiquement, des éditeurs privés de services de télévision et de radio à vocation locale. Une aide exceptionnelle a été versée pendant la crise sanitaire. Certes, à l’issue de cette crise, on mesure le caractère structurel de certaines fragilités économiques. Mais je considère ces amendements comme des amendements d’appel, qui nous invitent, dans le cadre plus large de la réforme des aides au pluralisme des médias, à examiner de plus près le cas des outre-mer.

N’ayant pas d’évaluation très précise à vous fournir aujourd’hui, je ne voudrais pas que l’on réduise le soutien au livre, notamment en outre-mer. Je demande donc le retrait de ces amendements.

Mme la présidente. Quel est donc l’avis de la commission ?

M. Roger Karoutchi, rapporteur spécial. Même avis.

Mme la présidente. La parole est à Mme Sylvie Robert, pour explication de vote.

Mme Sylvie Robert. La modification de crédits que nous proposons porte sur 1 million d’euros, contre 10 millions d’euros pour l’amendement n° II-679 : la différence n’est pas mince… Le besoin est bien de 1 million d’euros, comme l’a montré l’évaluation réalisée par notre collègue Victoire Jasmin avec les acteurs concernés. Bien sûr, nous ne souhaitons pas pour autant pénaliser le livre ; nous demandons donc à Mme la ministre de lever le gage.

M. David Assouline. Ce n’est pas beaucoup, 1 million d’euros !

Mme la présidente. Compte tenu de l’avis émis par Mme la ministre, j’imagine que le gage n’est pas levé ?…

Mme Rima Abdul-Malak, ministre. Cela ne dépend pas que de moi !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-679.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-564 rectifié.

Mme Victoire Jasmin. Allez, un effort ! (Sourires.)

(Lamendement nest pas adopté.)

M. Patrick Kanner. Les outre-mer méritent mieux !

Mme la présidente. L’amendement n° II-721, présenté par Mme de Marco, MM. Dossus, Breuiller, Benarroche, Dantec, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :

I. – Créer le programme :

Aide exceptionnelle pour les éditeurs de presse IPG

II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Presse et médias

 

5 000 000

 

5 000 000

Livre et industries culturelles

 

 

 

 

Aide exceptionnelle pour les éditeurs de presse IPG

5 000 000

 

5 000 000

 

TOTAL

5 000 000

5 000 000

5 000 000

5 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Monique de Marco.

Mme Monique de Marco. Cet amendement vise à créer une aide exceptionnelle de 5 millions d’euros à destination des éditeurs de presse d’information politique et générale (IPG). Cette aide serait plus spécifiquement orientée vers ceux qui touchent actuellement moins de 350 000 euros par an, hors aide spécifique au postage et au portage.

Soutenir les petits éditeurs de presse IPG, c’est venir en aide, précisément, à ceux qui sont le moins aidés et qui souffrent le plus de l’augmentation significative du prix du papier, lequel a plus que doublé depuis janvier 2021.

En effet, les aides à la presse sont déjà captées en majorité par la presse papier, et plus particulièrement par les grands groupes de presse. Rappelons que c’est le groupe Aujourd’hui en France–Les Échos–Le Parisien, propriété de Bernard Arnault, qui est le premier bénéficiaire des aides à la presse en France, avec plus de 15,7 millions d’euros en 2021, au seul titre des aides individuelles.

J’espère que vous en conviendrez, mes chers collègues, cette aide ponctuelle doit être fléchée vers ceux qui en ont le plus besoin, c’est-à-dire les titres de presse fragilisés par l’augmentation continue du coût du papier. Il nous incombe de les soutenir au nom de la pluralité des opinions, de la diversité des médias dans nos territoires et de la défense d’une presse libre.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Roger Karoutchi, rapporteur spécial. Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.

Franchement, les éditeurs de presse IPG ne sont pas les plus mal servis, et de loin, ni les plus menacés. Attendons la réforme des aides à la presse, mais, parmi toutes les demandes que nous avons adressées au Gouvernement, celle qui est ici formulée ne me semble pas prioritaire. Qui plus est, ma chère collègue, vous gagez votre amendement sur les crédits du programme « Presse et médias », ce qui, encore une fois, est un peu gênant.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Rima Abdul-Malak, ministre. Madame la sénatrice de Marco, cet enjeu du soutien au secteur de la presse face à la hausse du prix du papier a été identifié par le Gouvernement depuis plusieurs mois. Le Sénat a d’ailleurs lui-même mis en lumière ces difficultés par la voix de votre collègue Michel Laugier, auteur d’un rapport sur le sujet remis en juin dernier, que je remercie.

Dans le cadre du projet de loi de finances rectificative pour 2022, vous avez voté, voilà quelques jours, un dispositif exceptionnel et ponctuel proposé par le député Denis Masséglia, à hauteur de 5 millions d’euros – le compte est bon !

Plus largement, nous travaillons en ce moment même à un dispositif de soutien, lui aussi exceptionnel et conjoncturel, destiné aux éditeurs les plus en difficulté, et pas uniquement les éditeurs de presse IPG, qui voient leurs coûts de production augmenter de manière très significative. Je ne peux pas encore vous annoncer le montant de cette aide, qui sera peut-être alimentée par un redéploiement du plan de relance. En tout cas, il s’agira d’un mouvement de crédits existants, qui interviendra en gestion.

Plusieurs pistes sont à l’étude ; je suis en train d’y travailler et j’espère vous annoncer ce montant dès que possible. Quoi qu’il en soit, il y aura bientôt une enveloppe supplémentaire pour soutenir les éditeurs de presse face à la hausse du coût du papier.

Demande de retrait.

Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.

M. David Assouline. L’intention me semble tout à fait louable, mais je vous mets en garde, ma chère collègue, sur le danger que représenterait la création d’un nouveau programme financé par une ponction opérée sur le programme existant. L’enjeu est plutôt de procéder à une redistribution plus équitable au sein du programme.

Je suis complètement d’accord avec vous : il est nécessaire d’inverser le mode de fonctionnement des aides à la presse. Les entreprises de presse qui sont adossées à de grands groupes très solides financièrement, souvent étrangers au monde de la presse, d’ailleurs, reçoivent actuellement l’essentiel de l’aide publique, ce qui me semble un dévoiement total : l’aide publique n’a pas vocation à soutenir ceux qui disposent d’autres moyens, privés, pour tenir. Inversement, la presse qui est en difficulté, les nouveaux entrants, les petits, qui ne sont pas adossés à de telles puissances financières, reçoivent une moindre part de cette aide publique.

Il faut remettre les choses à l’endroit, et cela passe par une augmentation des crédits de ce programme.

Par contre, créer au sein de la mission un nouveau programme en ponctionnant le programme « Presse et médias » revient à laisser choisir le Gouvernement quant à ce qu’il ponctionnera, par exemple – c’est une possibilité – la petite ligne budgétaire destinée à aider la presse indépendante et les nouveaux entrants.

Pour cette raison, nous nous abstiendrons ; mais, sur le fond, nous sommes complètement d’accord avec l’intention de ses auteurs.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-721.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° II-680, présenté par Mme Brulin, MM. Bacchi, Ouzoulias et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

I. – Créer le programme :

Plan d’urgence pour la BNF

II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Presse et médias

 

3 600 000

 

3 600 000

Livre et industries culturelles

 

 

 

 

Plan d’urgence pour la BNF

3 600 000

 

3 600 000

 

TOTAL

3 600 000

3 600 000

3 600 000

3 600 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Céline Brulin.

Mme Céline Brulin. Cet amendement vise à mettre en place une aide d’urgence de 3,6 millions d’euros en direction de la Bibliothèque nationale de France, ce montant correspondant au surcoût qu’elle doit assumer en 2022 en matière de dépense énergétique.

Monsieur le rapporteur, vous avez dit qu’il fallait faire beaucoup plus pour la BNF ; je ne saurais mieux dire ! Vous avez même évoqué un « gouffre » qu’il fallait combler. Nous proposons de commencer à y pourvoir par cette aide d’urgence.

Je ne reviens pas sur la situation globale qui est celle de la Bibliothèque nationale de France ; quoi qu’il en soit, cette aide nous semble indispensable pour qu’elle puisse faire face au surcoût de l’énergie. Et nous demandons au Gouvernement de lever le gage.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Roger Karoutchi, rapporteur spécial. Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable. J’ai dit tout à l’heure, non par plaisanterie, mais par provocation, que, s’il fallait changer toutes les fenêtres, cela coûterait des dizaines de millions d’euros.

En ce qui concerne le surcoût de l’énergie, les responsables de la BNF admettent eux-mêmes que, grâce aux redéploiements effectués en interne, ils parviennent à s’en sortir pour 2023.

Toutefois, madame la ministre, je ne vous le cache pas, si la BNF devait réaliser de nouveaux travaux et assumer de nouvelles charges en 2024, il faudrait qu’elle trouve des ressources supplémentaires.

Le budget de la BNF a augmenté de 10 % en quatre ans ; il s’élève à 233 millions d’euros.

Qui plus est, vous gagez votre amendement sur le programme « Presse et médias ». À trop tirer sur la corde, cela risque de devenir compliqué… Je préférerais qu’on en reste là.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Rima Abdul-Malak, ministre. Dans le PLF pour 2023, il est prévu que la subvention attribuée à la BNF augmente assez nettement par rapport à l’exercice précédent, de 8,7 millions d’euros – tout de même ! –, dont 5 millions sont fléchés pour accompagner la hausse des coûts.

Nous avons identifié, pour concevoir l’enveloppe de 56 millions d’euros que j’ai présentée, les établissements qui étaient de véritables passoires thermiques, au nombre desquels on compte, en effet, la BNF – je ne reviens pas sur l’exemple des 10 000 fenêtres… Autrement dit, nous venons en aide aux établissements les plus en difficulté.

Je demande donc le retrait de cet amendement : le surcoût est pris en compte.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-680.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° II-523, présenté par M. Dossus, Mme de Marco, MM. Breuiller, Parigi, Gontard, Benarroche, Dantec, Fernique et Labbé, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Presse et médias

50 000

 

50 000

 

Livre et industries culturelles

 

50 000

 

50 000

TOTAL

50 000

50 000

50 000

50 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Il s’agit d’un amendement d’appel concernant, de nouveau, les aides à la presse.

Nombre de ces aides sont destinées à la presse nationale, à la presse quotidienne régionale ou à la presse hebdomadaire ; mais quasiment rien ne va à la presse régionale mensuelle, bimensuelle, bimestrielle ou trimestrielle.

Quand je dis « quasiment rien », ce n’est pas une image : sur un total de 197 millions d’euros d’aides à la presse, les publications régionales périodiques qui ne sont ni quotidiennes ni hebdomadaires bénéficient uniquement des crédits alloués à la troisième section, soit 50 000 euros pour toute la France.

Dans le détail, on s’aperçoit que le montant est si faible que six titres seulement y ont eu accès en 2022. Ce chiffre est surprenant, car la liste des publications régionales d’information politique et générale autres que quotidiennes et hebdomadaires publiée par la Commission paritaire des publications et agences de presse (CPPAP) compte 136 publications sur l’ensemble du territoire.

Imaginez : 6 titres aidés sur 138… Un ras-le-bol commence à s’installer : l’impression que les aides sont focalisées sur les titres proches des lieux de pouvoir, ceux dont les responsables maîtrisent le système.

Surtout, le sentiment prévaut qu’il faut revoir d’urgence les procédures d’attribution des aides du ministère : pour être éligible aux aides au pluralisme, il faut satisfaire à quatre critères, que ces 138 titres remplissent tous ; un taux si faible d’attribution est donc incompréhensible.

Ces journaux n’ont ni les moyens ni les ressources humaines nécessaires pour disposer d’effectifs spécialisés dans les relations avec votre ministère. Il est donc temps de leur simplifier la vie.

Tel est l’objet de notre amendement, qui vise à doubler le montant alloué à ces publications au titre de l’aide à la pluralité ; il s’agit d’éveiller les consciences au sein du Gouvernement et d’inciter celui-ci à revoir d’urgence ces procédures d’attribution.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Roger Karoutchi, rapporteur spécial. Notre collègue évoque lui-même 138 titres. Divisez 50 000 euros par 138 titres, chiffre évoqué par notre collègue ; cela fait à peine 500 euros par titre…

Privilégions une véritable réforme, c’est-à-dire une remise à plat des aides à la diversité ; le Gouvernement doit prendre un certain nombre d’engagements.

J’entends qu’il s’agit d’un amendement d’appel, mais reconnaissez, mon cher collègue, que 50 000 euros en faveur de la diversité à partager entre 138 titres régionaux, c’est symbolique…

Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Rima Abdul-Malak, ministre. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-523.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles », figurant à l’état B.

Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits.

(Les crédits sont adoptés.)

compte de concours financiers : avances à l’audiovisuel public

État B
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Compte de concours financiers : Avances à l'audiovisuel public (interruption de la discussion)
État B
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Compte de concours financiers : Avances à l'audiovisuel public (interruption de la discussion)

Mme la présidente. Nous allons procéder à l’examen des crédits du compte de concours financiers « Avances à l’audiovisuel public », figurant à l’état D.

ÉTAT D

(En euros)

Mission / Programme

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

Avances à laudiovisuel public

3 815 713 610

3 815 713 610

France Télévisions

2 430 513 517

2 430 513 517

ARTE France

303 464 377

303 464 377

Radio France

623 406 038

623 406 038

France Médias Monde

284 734 306

284 734 306

Institut national de l’audiovisuel

93 629 039

93 629 039

TV5 Monde

79 966 333

79 966 333

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° II-506, présenté par M. Breuiller, Mme de Marco, MM. Dossus, Benarroche, Dantec, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

France Télévisions

45 000 000

45 000 000

ARTE France

Radio France

France Médias Monde

45 000 000

45 000 000

Institut national de l’audiovisuel

TV5 Monde

TOTAL

45 000 000

45 000 000

45 000 000

45 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Monique de Marco.

Mme Monique de Marco. Cet amendement vise à fournir à France Télévisions les moyens d’assumer ses missions.

Lors du précédent quinquennat, le financement de l’audiovisuel public a perdu 200 millions d’euros. Par ailleurs, lors de l’examen du PLFR pour 2022, ce même financement a été bouleversé par une réforme menée à la hussarde.

Cette année, en plein contexte inflationniste, le budget de France Télévisions n’augmente que de 1 %. Alors que la société voit ses charges augmenter de 95 millions d’euros, les concours financiers qui lui sont alloués n’augmentent que de 50,7 millions d’euros.

Il est impératif, pour conserver un service public de qualité, d’assurer à l’audiovisuel public des ressources suffisantes et pérennes, assorties d’une visibilité pluriannuelle.

Mme la présidente. L’amendement n° II-508, présenté par M. Breuiller, Mme de Marco, MM. Dossus, Benarroche, Dantec, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

France Télévisions

22 000 000

22 000 000

ARTE France

Radio France

France Médias Monde

22 000 000

22 000 000

Institut national de l’audiovisuel

TV5 Monde

TOTAL

22 000 000

22 000 000

22 000 000

22 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Monique de Marco.

Mme Monique de Marco. Cet amendement d’appel a pour objet de donner l’alerte quant au coût que représente la réforme du financement de l’audiovisuel public pour les sociétés du secteur – 22 millions d’euros supplémentaires pour France Télévisions, coût non amorti par l’État.

Cette réforme a été menée à la hussarde, je l’ai dit, lors de l’examen du PLFR pour 2022, à tel point que l’on ne constate qu’après coup que les nouveaux crédits, étant issus des recettes de la TVA, ne sont pas assujettis à cette taxe. Les sociétés de l’audiovisuel public se retrouvent du même coup assujetties à la taxe sur les salaires, soit, j’y insiste, pour ce qui est de France Télévisions, une charge de 22 millions d’euros non compensée par l’État.

Nous demandons que l’État compense cette perte. Surtout, cet épisode doit nous alerter, et alerter le Gouvernement, sur les conséquences d’une réforme menée un peu trop vite.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Roger Karoutchi, rapporteur spécial. Je commencerai par émettre l’avis de la commission sur l’amendement n° II-508, car il est satisfait. Ma chère collègue, vous demandez 22 millions d’euros destinés à compenser l’assujettissement de France Télévisions à la taxe sur les salaires. Or le projet de loi de finances pour 2023 prévoit, comme pour toutes les autres sociétés de l’audiovisuel public, une compensation intégrale de la taxe sur les salaires dont s’acquitte France Télévisions, à hauteur de 22,4 millions d’euros.

Votre amendement, madame de Marco, est donc pleinement satisfait ; je vous demande de bien vouloir le retirer.

J’en viens maintenant à l’amendement n° II-506 : vous demandez 45 millions supplémentaires pour France Télévisions, que vous gagez sur les crédits de France Médias Monde. Autrement dit, vous prenez 20 % du total des crédits de France Médias Monde pour les donner à France Télévisions. Comment vous dire, ma chère collègue ?… Eu égard aux difficultés que traverse France Médias Monde, il ne serait pas sérieux de couper dans ses crédits, aussi élevés soient-ils : avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Rima Abdul-Malak, ministre. Je partage l’avis du rapporteur.

Pour ce qui est de la compensation de l’inflation et des effets fiscaux de la réforme du mode de financement, j’ai déjà répondu : l’engagement a été tenu.

J’ai le sentiment que vous voulez, en quelque sorte, rattraper les années de baisse du précédent quinquennat ; sauf que les économies qui ont été réalisées l’ont été à ambition égale en matière de qualité de l’information, des documentaires et des enquêtes comme en matière d’audience numérique.

Des synergies nouvelles ont d’ailleurs vu le jour, entre Radio France et France Télévisions, avec la création de la chaîne de télévision France Info, ou, désormais, entre France 3 et France Bleu.

Ces économies n’ont donc affecté ni les audiences ni l’ambition de l’audiovisuel public. C’est de cette ambition qu’il nous faut dessiner les contours pour l’avenir, en vue de répondre aux défis que j’ai évoqués rapidement dans mon propos liminaire.

Commençons par discuter des objectifs avant de discuter des moyens ; c’est ainsi que nous définirons la trajectoire pluriannuelle, que j’ai souhaitée d’une durée de cinq ans, à laquelle seront adossés les nouveaux contrats d’objectifs et de moyens.

Le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis serait défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.

M. David Assouline. Ce que vous nous dites, madame la ministre, nous ne saurions l’entendre : les gigantesques baisses subies depuis quatre ans se seraient en définitive révélées bénéfiques, prétendez-vous, les agents de l’audiovisuel public ayant rempli leurs missions de façon extraordinaire.

En réalité, s’ils l’ont fait, c’est à la sueur de leur front : on les a mis à l’os !

Et si une partie du retard n’est pas bientôt rattrapée, il est clair qu’il sera impossible de réaliser les investissements nécessaires, car, dans ce domaine, cela coûte très cher de rester compétitif. Se donner les moyens de mener la révolution numérique et de concurrencer les plateformes, cela coûte cher !

À vous entendre, on pourrait croire que les baisses de budget sont amorties et que désormais tout va bien… Non, ça va mal ! Le service public ne pourra pas continuer de faire ce qu’il faisait auparavant, notamment dans le domaine du sport. J’en donne un seul exemple : pensez-vous que France Télévisions pourra renchérir sur les offres qu’Amazon, qui a fait irruption sur le marché, mettra sur la table pour obtenir les droits de diffusion de Roland-Garros ?

Il faut donc une augmentation du budget.

Aussi avons-nous présenté, en première partie, deux amendements visant à donner à France Télévisions les moyens d’un tel rattrapage, que vous réclamez. L’un tendait à indexer les ressources de l’audiovisuel public sur l’inflation, l’autre à construire un mode de financement structurel en substituant à l’affectation d’une fraction de TVA la mise en place d’une contribution progressive.

Quoi qu’il en soit, ce rattrapage ne saurait en aucun cas se faire à budget constant, c’est-à-dire au détriment de l’audiovisuel extérieur, qui lui aussi est à l’os ! À l’heure actuelle plus que jamais, il faut au contraire le renforcer. En pleine guerre en Ukraine, au beau milieu d’une crise internationale, le moment n’est certainement pas venu de baisser la garde : l’audiovisuel extérieur, c’est le nerf de l’information !

Mme Monique de Marco. Je retire ces deux amendements, madame la présidente !

Mme la présidente. Les amendements nos II-506 et II-508 sont retirés.

Nous allons procéder au vote des crédits du compte de concours financiers « Avances à l’audiovisuel public », figurant à l’état D.

Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits.

J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 79 :

Nombre de votants 344
Nombre de suffrages exprimés 273
Pour l’adoption 182
Contre 91

Le Sénat a adopté.

Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles » et du compte de concours financiers « Avances à l’audiovisuel public ».

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures quarante-cinq.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt heures quinze, est reprise à vingt et une heures quarante-cinq.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

Compte de concours financiers : Avances à l'audiovisuel public (début)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Discussion générale

5

Mise au point au sujet d’un vote

Mme la présidente. La parole est à M. Stéphane Piednoir.

M. Stéphane Piednoir. Lors du scrutin public n° 68, M. Louis-Jean de Nicolaÿ souhaitait s’abstenir.

Mme la présidente. Acte vous est donné de cette mise au point, mon cher collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin concerné.

6

Compte de concours financiers : Avances à l'audiovisuel public (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Deuxième partie

Loi de finances pour 2023

Suite de la discussion d’un projet de loi

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Recherche et enseignement supérieur
Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Recherche et enseignement supérieur

Mme la présidente. Nous reprenons l’examen, au sein de la seconde partie du projet de loi de finances, des différentes missions.

Recherche et enseignement supérieur

Moyens des politiques publiques et dispositions spéciales
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
État B

Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur » (et article additionnel après l’article 44 sexies).

La parole est à Mme le rapporteur spécial.

Mme Vanina Paoli-Gagin, rapporteur spécial de la commission des finances. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, les crédits alloués à l’enseignement supérieur, répartis sur deux programmes, bénéficient cette année encore d’une hausse importante, pour atteindre 18 milliards d’euros. L’augmentation s’élève à près de 750 millions d’euros en crédits de paiement, soit une progression de 4,3 % par rapport à 2022.

Compte tenu de la masse salariale des universités, près de la moitié des crédits nouveaux sont consacrés à la mise en place pour 2023 de la compensation de la hausse du point d’indice pour les établissements d’enseignement publics. Il est à noter qu’aucune mesure de compensation n’aura été prise pour les mois de juillet à décembre 2022, pour lesquels les universités devront mobiliser leurs fonds propres.

La poursuite de la mise en œuvre de la loi de programmation de la recherche (LPR) contribue à hauteur de 140 millions d’euros à la croissance des crédits du programme « Formations supérieures et recherche universitaire ». Ces crédits sont essentiellement destinés aux dépenses de personnel, via des mesures de revalorisation salariale et d’élargissement des voies de recrutement. Le PLF pour 2023 prévoit, en outre, la création de 413 emplois, dont 385 au titre de la LPR.

Nous pouvons, je le pense, nous féliciter du renforcement des moyens ainsi consacrés aux universités, qui contribue à leur redonner des marges de manœuvre et à limiter les tensions sur leur masse salariale.

Nouveauté de ce budget, 35 millions d’euros sont prévus pour la conclusion expérimentale de nouveaux contrats d’objectifs, de moyens et de performance pluriannuels entre l’État et une dizaine d’universités. L’idée me paraît intéressante, mais les montants destinés à être contractualisés sont pour l’instant extrêmement faibles à l’échelle de l’ensemble des crédits accordés aux universités. Nous n’en sommes pour l’instant qu’à la phase de définition de cette expérimentation, mais je serai attentive à la négociation en cours entre le ministère et les universités.

Je soulignerai toutefois un point sur lequel devra s’exercer notre vigilance : du fait de la taille de leur patrimoine immobilier et des infrastructures de recherche qu’ils hébergent, y compris certains organismes de recherche, les établissements d’enseignement supérieur sont particulièrement touchés par la crise énergétique.

Le surcoût, en 2022, serait de 40 % à 50 % par rapport à 2021, soit près de 100 millions d’euros. Pour ce qui est de l’année 2023 – et bien que l’évaluation des surcoûts potentiels soit un exercice délicat –, le ministère estime que le surcoût s’élèverait à 400 millions d’euros par rapport à 2022.

Pour 2022, les universités devront mobiliser leurs fonds de roulement pour tenir compte de ces hausses. En 2023, elles bénéficieront du fonds de compensation du surcoût de l’énergie qui vient d’être voté par notre assemblée en projet de loi de finances rectificative.

Si, sur le principe, cela semble un signal très positif pour les universités, seuls 150 millions d’euros de nouveaux crédits sont en réalité ouverts dans la loi de finances rectificative. En effet, les 125 millions complémentaires sont en partie financés sur les crédits dégagés par la baisse du nombre d’étudiants boursiers.

Le constat de la vulnérabilité des établissements d’enseignement supérieur aux difficultés énergétiques me conduit à aborder les enjeux cruciaux d’investissement dans le patrimoine immobilier universitaire. Madame la ministre, nous ne pourrons repousser indéfiniment l’indispensable plan de rénovation global de l’immobilier universitaire.

J’en viens maintenant aux moyens consacrés à la vie étudiante, autre pan du volet « Enseignement supérieur » de la mission « Recherche et enseignement supérieur ».

En 2021 et 2022, les crédits du programme « Vie étudiante » avaient enregistré une hausse très importante ; le projet de loi de finances pour 2023 prévoit leur stabilisation.

Le montant des bourses sur critères sociaux a été revalorisé de 4 % à la rentrée 2022 afin de tenir compte de l’inflation. Le coût de cette mesure est chiffré à 85,1 millions d’euros en 2023, mais les crédits dédiés restent identiques à ceux qui étaient prévus l’année dernière, du fait de la baisse attendue du nombre d’étudiants boursiers. En outre, cette revalorisation ne permettra pas de couvrir l’érosion du pouvoir d’achat découlant de l’inflation constatée en 2022 et prévue en 2023.

En parallèle, la subvention versée au réseau des œuvres universitaires progressera de 35,6 millions d’euros par rapport à 2022, pour financer notamment la prolongation du ticket U à un euro pour les étudiants boursiers et le gel des loyers dans les résidences étudiantes. Le coût du repas à un euro s’élève à 51 millions d’euros en 2023.

La situation financière du réseau des centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires (Crous), qui avait été très exposé pendant la crise sanitaire, s’améliore. Là encore, je soulèverai un point d’attention : la hausse du coût des denrées alimentaires pourrait engendrer un effet ciseau, le nombre de repas servis augmentant parallèlement au renchérissement du prix des matières premières.

Les prévisions à date du Centre national des œuvres universitaires et scolaires (Cnous) font état d’une possible hausse des effets directs du repas à un euro pour la fin de l’année, le coût total étant de l’ordre de 50 millions d’euros – nous devrons y être très attentifs, madame la ministre.

Au-delà de ces quelques remarques, la mission « Recherche et enseignement supérieur » bénéficiant de hausses de crédits substantielles qui permettent de respecter la trajectoire définie en loi de programmation, la commission des finances vous propose d’en adopter les crédits. (M. Julien Bargeton applaudit.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Jean-François Rapin, rapporteur spécial de la commission des finances. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, les crédits des programmes relevant du volet « Recherche » de la mission devraient atteindre, en 2023, 12,8 milliards d’euros. Cela représente une hausse de plus de 7 % par rapport à l’exercice précédent.

Avant d’entrer dans les détails, je dresserai deux constats sur cette augmentation.

Je commencerai, madame la ministre, par exprimer une satisfaction – prenez-la comme un dessert (Sourires.) – qui est sans doute également la vôtre : la trajectoire proposée pour 2023 respecte la hausse prévue par la loi de programmation de la recherche. Il s’agira de la troisième année de mise en œuvre de cette loi, dont l’ambition en faveur de la recherche était à saluer, tout du moins sur le papier.

À l’échelle de la mission, près de 400 millions d’euros supplémentaires sont ainsi prévus pour 2023 afin de respecter les engagements qui ont été pris dans le cadre de la loi de programmation. Nous pouvons, me semble-t-il, nous en féliciter.

Toutefois, la trajectoire de la LPR a été établie en 2020 en volume, c’est-à-dire sans tenir compte de l’inflation. À l’époque, madame la ministre, en tant que rapporteur pour avis sur la loi de programmation, j’avais averti votre prédécesseure quant aux risques qui découlaient d’un tel choix. Il est vrai que l’inflation était alors très faible, ce que n’avait pas manqué de faire valoir le Gouvernement. Dans la situation actuelle, la loi de programmation aura surtout protégé la mission « Recherche et enseignement supérieur » d’une érosion de ses moyens liée à l’inflation.

La clause de revoyure figurant dans la loi de programmation prévoyait une actualisation de la programmation au moins tous les trois ans. J’espère, madame la ministre, que cette occasion sera saisie en 2023 et que nous pourrons en rediscuter.

Par ailleurs, de nombreuses infrastructures de recherche sont très consommatrices d’électricité et seront par conséquent très affectées par la hausse des coûts énergétiques en 2023. Je souligne notamment les difficultés auxquelles fait face l’Institut polaire français Paul-Émile-Victor (Ipev), particulièrement exposé et dont les infrastructures vieillissantes appelleront tôt ou tard un effort particulier. Je précise, au passage, que nous avons tous été très sollicités, quelles que soient les travées sur lesquelles nous siégeons, par cet institut.

L’enjeu pour les organismes de recherche est donc de minimiser la déstabilisation de leurs activités et, en particulier, de maintenir la continuité de l’activité expérimentale. Espérons que la mobilisation des ressources propres des opérateurs et le dégel de la réserve y pourvoiront.

J’en viens maintenant aux détails de ce projet de budget.

Les organismes de recherche bénéficient au total de plus de 7 milliards d’euros de crédits, en hausse de 370 millions d’euros par rapport à l’année précédente, dont une part importante – 130 millions d’euros – est destinée à financer la hausse du point d’indice en 2023.

Les efforts consentis au titre de la mise en œuvre de la LPR expliquent le reste de l’augmentation enregistrée en 2023. Celle-ci a trait notamment à l’amélioration des carrières dans la recherche, à la rémunération des doctorants et à l’augmentation des moyens alloués aux laboratoires et aux grandes infrastructures de recherche nationales et internationales.

Il est indéniable que ces moyens nouveaux vont redonner des marges de manœuvre aux organismes de recherche. Alors que la subvention pour charges de service public versée aux opérateurs subissait année après année une lente érosion, le budget pour 2023 confirme l’inversion de tendance qui avait pu être espérée en 2022.

Cette observation me conduit à traiter du redressement financier de l’Agence nationale de la recherche (ANR), qui se poursuit cette année.

En 2023, les crédits de l’ANR au titre du programme 172 devraient s’élever à 1,226 milliard d’euros en autorisations d’engagement, en hausse de 15,4 %, et à près de 1 milliard d’euros en crédits de paiement. Les hausses de crédits des deux dernières années ont permis d’atteindre un taux de succès des appels à projets de 23,7 % en 2023, contre 16 % en 2020. Je le rappelle, le Sénat avait estimé que, pour bien régler la voilure, il fallait 1 milliard d’euros et 25 % de taux de succès – on y est presque.

De manière générale, le redressement financier de l’ANR constitue un signal très encourageant pour nos chercheurs. Il me semble que nous devons être attentifs aux enjeux d’articulation avec les appels à projets européens, afin que les appels à projets nationaux et européens ne se concurrencent pas.

Je salue par ailleurs la rebudgétisation sur la mission « Recherche et enseignement supérieur » du programme 191, « Recherche duale (civile et militaire) », doté de 150 millions d’euros. Ces crédits avaient été déplacés sur la mission « Plan de relance » pour 2021 et 2022, ce que leur nature ne justifiait pas. De surcroît, loin d’occasionner une augmentation des moyens consacrés à cette ligne budgétaire, un tel transfert a accompagné une diminution masquée des montants accordés au programme depuis 2020.

Enfin, le budget de la recherche spatiale s’élèverait à 1,7 milliard d’euros en 2023. Ainsi les moyens globaux alloués au Centre national d’études spatiales (CNES) progresseraient-ils de 10 %.

Néanmoins, plus de la moitié de ces crédits sont in fine transférés à l’Agence spatiale européenne (ESA) via la cotisation dont nous nous acquittons auprès d’elle. Le montant des fonds qui lui sont versés devrait d’ailleurs augmenter de 200 millions d’euros au cours des prochains mois, notamment pour abonder le projet Ariane 6.

En conclusion, dans la mesure où le projet de budget pour 2023 se révèle conforme à la LPR et comme l’a indiqué ma collègue rapporteur, la commission des finances propose au Sénat d’adopter les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme le rapporteur spécial et M. Claude Kern applaudissent également.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – M. Pierre Médevielle applaudit également.)

M. Jean-Pierre Moga, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, mon propos sera essentiellement centré sur les crédits de la mission interministérielle pour la recherche et l’enseignement supérieur (Mires) entrant dans le périmètre de la commission des affaires économiques.

Les crédits de la mission sont en hausse, conformément à la trajectoire budgétaire et à la trajectoire d’emploi prévues par la LPR.

Depuis deux ans, j’ai pris l’habitude de vous dire que je n’auditionne que des gens heureux. (Sourires.) Cette année, je trouve les gens heureux, mais soucieux ! (Nouveaux sourires.)

En effet, ce projet de loi de finances est marqué par la hausse des prix et des coûts de l’énergie, dont les répercussions sont, me semble-t-il, sous-estimées.

En 2020, le Sénat avait attiré l’attention du Gouvernement sur le fait que la trajectoire budgétaire prévue par la LPR était calculée en euros courants et non en euros constants, c’est-à-dire sans prise en compte de l’inflation ; il nous avait été répondu que l’inflation était une donnée économique qui appartenait au passé. Force est de constater que la situation que nous vivons nous donne raison.

Les écarts prévisionnels de trajectoire sont importants : au moins 50 millions d’euros en 2023 et jusqu’à 400 millions d’euros en 2027 si aucune mesure n’est prise.

Les budgets des opérateurs de recherche sont d’ores et déjà touchés par l’inflation et par la hausse des coûts de l’énergie.

Ces surcoûts ne seront que partiellement compensés par les dégels de crédits autorisés en gestion et par la mise en place annoncée d’un fonds d’intervention destiné à alléger les factures énergétiques et doté de 275 millions d’euros.

Les modalités de mise en œuvre de ce fonds demeurent floues. Je me permets d’insister sur deux points : d’une part, l’ensemble des grands organismes de recherche doivent pouvoir bénéficier de ce fonds ; d’autre part, les versements doivent s’effectuer au prorata des surcoûts énergétiques et non de façon forfaitaire par établissement.

Les budgets sont également touchés par le dégel du point d’indice des fonctionnaires décidé au mois de juillet 2022. Si des compensations sont prévues en 2023, ce n’est pas le cas pour le second semestre 2022.

Je souhaite ici être clair : les objectifs de la loi de programmation de la recherche ne doivent pas être détournés pour amortir les surcoûts engendrés par l’inflation et par la hausse des coûts de l’énergie. Les augmentations de budget prévues par la LPR doivent avant tout permettre de soutenir nos activités de recherche et de porter notre effort national de recherche à 3 % du PIB, alors que nous stagnons depuis plusieurs années à seulement 2,2 % du PIB.

La clause de revoyure de la LPR prévue en 2023 devrait être l’occasion de définir une trajectoire budgétaire en euros constants pour les années à venir.

Voilà, mes chers collègues, les éléments sur lesquels la commission des affaires économiques souhaitait insister et qu’elle tenait à porter à votre connaissance. Elle a émis un avis favorable sur le rapport que je lui ai soumis. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et INDEP. – Mme Patricia Demas et M. Pierre Ouzoulias applaudissent également.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. Frédéric Marchand, rapporteur pour avis de la commission de laménagement du territoire et du développement durable. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable a émis un avis favorable sur les crédits du programme « Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables » de la mission « Recherche et enseignement supérieur ».

Avec 72 millions d’euros supplémentaires inscrits cette année au projet de loi de finances, ce budget mérite un satisfecit. Si ce soutien apporté aux opérateurs stratégiques dans le domaine de la recherche est indispensable, c’est, d’une part, en raison du contexte actuel inédit et, d’autre part, parce qu’il y va du maintien du niveau d’excellence de la recherche française.

La situation actuelle est marquée par une inflation des prix de l’énergie – cela a été dit –, exposant nos opérateurs à l’explosion des factures énergétiques. Malheureusement, il est à craindre que l’augmentation des crédits ne permette pas de compenser les surcoûts.

J’évoquerai, comme l’a fait Jean-François Rapin, la situation particulière de l’Institut polaire français Paul-Émile Victor. Cet opérateur participe au rayonnement de la France dans le domaine de la recherche polaire, permettant à cette fin la mobilisation d’importants moyens humains, matériels, techniques et financiers. Sa situation budgétaire est telle que la continuité de ses activités se trouve menacée ; la sonnette d’alarme a été tirée. Fort heureusement, cette alerte a été entendue par le Gouvernement : un fonds de soutien financier a été créé et abondé en loi de finances rectificative pour 2022. J’appelle l’exécutif à la plus grande vigilance pour ce qui est de veiller à la pérennité des moyens alloués à l’Ipev.

Mes chers collègues, accorder à nos opérateurs des moyens justes et cohérents afin qu’ils puissent mener leurs travaux en toute sérénité nous permettra de sauvegarder l’excellence de la recherche française.

Des opérateurs tels que le Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives, l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), IFP Énergies nouvelles ou encore l’université Gustave-Eiffel sont, dans leurs domaines respectifs, de véritables pionniers, que dis-je, de véritables pépites. En témoigne le nombre important de brevets déposés par ces acteurs de pointe, traduisant une véritable reconnaissance de l’expertise française et démontrant une capacité à investir de nouveaux sujets de recherche. De même, des projets déployés à l’échelle européenne ou internationale mettent en lumière la maturité de la recherche française ; je pense ici à l’implication de la filière aéronautique française dans la création d’avions de ligne bas-carbone à l’horizon 2023.

Perpétuer dans la durée le soutien accordé aux opérateurs nous permettra de répondre à un double enjeu.

Le premier enjeu est de préserver notre position de leader en matière de recherche. Sur ce point, j’appelle votre attention, madame la ministre, et j’appelle la nôtre, mes chers collègues, sur le phénomène de « fuite des cerveaux » vers le secteur privé – les représentants des opérateurs qui ont été auditionnés en ont fait mention.

Le second enjeu est d’éclairer les choix des décideurs afin de lutter efficacement contre le changement climatique et de garantir une maîtrise des risques environnementaux, industriels et nucléaires. En outre, il s’agit de renseigner et de sensibiliser toujours davantage nos concitoyens, qui sont, à juste titre, de plus en plus préoccupés par le dérèglement climatique. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – M. Jean-François Longeot applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Laurent Lafon applaudit également.)

Mme Laure Darcos, rapporteure pour avis de la commission de la culture, de léducation et de la communication. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, tout comme mon collègue rapporteur spécial, j’exprime ma satisfaction de voir le budget de la recherche poursuivre son augmentation en 2023, sous l’effet du déploiement de la loi de programmation de la recherche. Sa troisième annuité permettra d’abonder de 400 millions d’euros supplémentaires la Mires, évolution respectueuse de la programmation que nous avons votée, ce qui mérite d’être salué.

Je me félicite aussi que vous ayez pris l’initiative, madame la ministre, d’aller plus loin que la LPR quand la situation le nécessitait. C’est ainsi le cas pour la revalorisation de la rémunération des doctorants, que vous avez décidé d’étendre aux contrats en cours. Il s’agit là d’un signal très positif pour nos doctorants !

L’année 2023 sera aussi la troisième année de montée en charge financière de l’Agence nationale de la recherche, dont nous observons d’ores et déjà les retombées positives pour nos chercheurs : le taux de sélection aux appels à projets atteint aujourd’hui 23,5 %, contre 17 % en 2020, et le taux de préciput s’élève à 28,5 %, pour un montant de 200 millions d’euros.

Ces premiers résultats sont très prometteurs, mais ils se heurtent malheureusement à la réalité économique. Le rapporteur spécial l’a rappelé, le Sénat avait alerté sur le manque de crédibilité de la trajectoire budgétaire sur dix ans, car elle ne tenait pas compte de l’inflation. Deux ans plus tard, le choc inflationniste que connaît notre pays est tel que l’effort budgétaire de la LPR est largement absorbé.

Pour notre commission, il est donc indispensable que la clause de revoyure prévue en 2023 soit mise à profit pour rectifier la trajectoire, d’une part, en ramenant sa durée à sept ans, comme nous l’avions demandé initialement, afin d’atténuer les risques liés aux aléas macroéconomiques ; d’autre part, en augmentant l’intensité des prochaines annuités, afin de créer les conditions du réinvestissement massif dont notre recherche a besoin.

Devant notre commission, madame la ministre, vous vous êtes engagée à nous transmettre d’ici à la fin de l’année un premier bilan de la mise en œuvre de la LPR et, sur cette base, à examiner la faisabilité d’une accélération de la trajectoire. Je compte donc sur votre détermination, mais aussi sur notre mobilisation, mes chers collègues, pour faire de la clause de revoyure en 2023 un rendez-vous constructif et ambitieux, qui puisse trouver sa traduction budgétaire dans le projet de loi de finances pour 2024.

Ce rendez-vous sera d’autant plus attendu que l’année 2023 suscite une forte inquiétude chez les opérateurs de recherche, pris à la gorge par les surcoûts énergétiques. Est-il besoin de rappeler que de nombreuses infrastructures de recherche sont très consommatrices d’énergie et que l’activité expérimentale ne peut être brutalement interrompue ?

Vous avez réussi, madame la ministre – et je vous en félicite –, à obtenir de Bercy le déblocage d’un fonds exceptionnel de soutien, dont 55 millions d’euros iront aux organismes de recherche, qui devront aussi mobiliser leurs ressources propres. Espérons que ces fonds permettront à nos opérateurs de recherche de ne pas basculer dans le rouge !

Je conclurai en mettant un rapide coup de projecteur sur un sujet qui me tient très à cœur, la culture scientifique. La mesure du « 1 % ANR » de la LPR a eu un véritable effet catalyseur : loin d’être une simple source de financement, elle a créé un engouement, une dynamique, dont je me réjouis. De nombreuses initiatives ont déjà vu le jour : le lancement d’appels à projets ciblés sur la culture scientifique, la création de prix récompensant les chercheurs engagés dans ce domaine, des campagnes de labellisation des sites universitaires accueillant des initiatives « culture scientifique ».

Sous le bénéfice de ces observations, la commission de la culture a émis un avis favorable sur l’adoption des crédits de la recherche pour 2023. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Stéphane Piednoir, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de léducation et de la communication. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je partage la satisfaction générale de constater l’augmentation de près de 750 millions d’euros des moyens consacrés à l’enseignement supérieur.

La compensation de l’augmentation du point d’indice était évidemment très attendue des établissements, qui n’y ont pas eu droit en 2022 et qui, en conséquence, devront financer une demi-année de hausse sur leurs fonds propres. Ce surcoût de masse salariale vient s’ajouter au glissement vieillesse technicité (GVT), toujours non compensé à ce jour.

Les établissements d’enseignement supérieur nous disent par ailleurs leur forte inquiétude face à l’ampleur des surcoûts énergétiques. Le déblocage d’un fonds exceptionnel doté de 275 millions d’euros est accueilli avec soulagement par les intéressés, mais suscite des interrogations. Madame la ministre, 150 millions d’euros de nouveaux crédits sont ouverts dans la loi de finances rectificative pour 2022. D’où proviendront donc les 125 millions restants ? Les opérateurs de l’enseignement supérieur et de la recherche devront-ils assumer eux-mêmes ces crédits de soutien en recourant au dégel de leurs réserves de précaution ?

Depuis que je suis rapporteur pour avis, je plaide pour le lancement d’un grand plan d’investissement destiné à la rénovation du parc immobilier universitaire, connu pour être très vaste, vieillissant, en partie vétuste et énergivore.

La crise énergétique que nous subissons rend plus que jamais nécessaire une réflexion de fond sur la quantité et la qualité du bâti universitaire au regard des récentes évolutions pédagogiques et sociétales, l’avenir consistant sans doute en « moins de mètres carrés » pour « mieux de mètres carrés ».

Durant la crise sanitaire, quand l’urgence était de relancer rapidement l’économie française, le Gouvernement a fait le choix de passer par la méthode de l’appel à projets pour encourager la rénovation énergétique dans l’enseignement supérieur et la recherche. Cette initiative a certes permis de donner une véritable impulsion, mais, compte tenu du retard accumulé ces dernières décennies et de l’ampleur des besoins d’investissement – évalués à 7 milliards d’euros par votre ministère, mais à plus du double par France Universités –, un changement d’échelle est indispensable.

Je conclurai en tirant la sonnette d’alarme quant au financement de l’activité de restauration des Crous. Si, en 2022, la rentrée s’est déroulée dans un climat beaucoup plus serein que les années précédentes, les restaurants universitaires sont confrontés à une tension croissante. En deux ans, leur activité a augmenté, selon les sites, de 20 % à 40 %, sous l’effet de plusieurs facteurs : attractivité du repas à un euro, fidélisation de nouveaux étudiants, contexte inflationniste et conséquences de la loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous (Égalim). Je m’étonne qu’il n’y ait aucun lien entre le volume de repas fournis et le niveau de la subvention versée au réseau, laquelle stagne depuis plusieurs années. Il est sans doute temps d’ouvrir ce chantier d’une remise à plat du financement de la restauration universitaire.

Sous le bénéfice de ces observations et malgré ces quelques réserves, la commission de la culture a émis un avis favorable sur l’adoption des crédits de l’enseignement supérieur pour 2023. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)

Mme la présidente. Dans la suite de notre discussion, mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque unité de discussion comprend le temps de l’intervention générale et celui de l’explication de vote.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de quinze minutes pour intervenir.

La parole est à M. Bernard Fialaire.

M. Bernard Fialaire. Madame la ministre, vous vous fixez comme objectif de contribuer à promouvoir l’égalité des chances des différentes classes sociales dans l’accès aux formations de l’enseignement supérieur ; c’est très bien.

Parlons-en !

Au sein des grandes écoles, la diversité sociale n’a pas progressé en dix ans. Si l’on devait brosser le portrait de leurs étudiants, on pourrait dire que leurs parents sont issus des catégories socioprofessionnelles supérieures et que, le plus souvent, ils résident en Île-de-France.

Cette année, 83 000 étudiants sont inscrits en classes préparatoires aux grandes écoles. À étudier le classement des dix meilleures classes préparatoires dans chaque filière, que remarque-t-on ? Si, pour ce qui est des filières scientifique et littéraire, une large majorité de ces classes préparatoires sont publiques, en revanche, sept des dix meilleures classes préparatoires de la filière économique et commerciale générale sont privées, les frais annuels y dépassant en moyenne les 5 000 euros.

Il existe aussi des officines privées, auxquelles les étudiants ont recours en parallèle de leurs enseignements, qui peuvent être très coûteuses et qui les aident à préparer les travaux dirigés et les examens. Pourquoi ne pas encourager des systèmes de tutorat interpromotion gratuit ? Cela existe déjà, mais gagnerait à être développé. Ainsi les chances de réussite des étudiants augmenteraient-elles en même temps que les liens sociaux seraient renforcés.

L’enseignement public doit être la voie d’excellence.

Tel est le cas pour les filières scientifique et littéraire ; il faut qu’il en aille de même dans toutes les disciplines. Le secteur du jeu vidéo, par exemple, dispose d’une seule formation supérieure publique, alors qu’il est en plein développement, propose des recrutements et constitue un domaine d’excellence pour la France.

Les déterminants non académiques de la réussite ne doivent pas représenter un obstacle et le mérite doit demeurer un ascenseur social.

La loi du 8 mars 2018 relative à l’orientation et à la réussite des étudiants avait prévu que soit retenu, dans le cadre de la procédure Parcoursup, un taux minimal de bacheliers bénéficiaires d’une bourse nationale de lycée, cette mesure étant notamment censée s’appliquer dans les filières sélectives. Si l’on remarque, dans le sillon de cette loi, une augmentation – de 20 % à 25 % – de la proportion de néo-bacheliers boursiers admis dans le supérieur, ceux-ci restent relativement peu nombreux au sein des classes préparatoires aux grandes écoles, puisqu’ils y représentent 28 % des étudiants, contre 39 % à l’université et 54 % dans les sections de technicien supérieur (STS).

En outre, madame la ministre, votre objectif concernant le pourcentage d’étudiants boursiers en classes préparatoires aux grandes écoles stagne à 30 % jusqu’en 2025.

Nous devons être plus ambitieux !

Je salue les mesures prises par le Gouvernement en faveur du pouvoir d’achat des étudiants, comme le gel de l’indexation des loyers en résidence universitaire, la revalorisation de 4 % du montant des bourses sur critères sociaux et le maintien du repas en restaurant universitaire à un euro pour les étudiants boursiers.

Concernant la contribution de vie étudiante et de campus (CVEC), qui fut particulièrement mobilisée pour faire face en urgence à la crise sanitaire, le montant de sa collecte devrait atteindre 175 millions d’euros en 2023, soit 25 millions d’euros de plus que l’année dernière. Il est important que la CVEC ne devienne pas un simple levier d’intervention face aux crises sanitaires et énergétiques, mais qu’elle favorise chez les étudiants, conformément à l’intention du législateur, la pratique sportive et l’accès à l’art et à la culture, c’est-à-dire au bien-être et à l’épanouissement.

L’activité physique étant un important facteur d’épanouissement physique et psychique, je me réjouis de l’extension du Pass’Sport à 800 000 étudiants boursiers depuis la rentrée 2022. À ce propos, madame la ministre, je souhaite vous interpeller sur la place du sport universitaire, encore trop négligé.

Ce projet de budget prévoit une hausse des crédits alloués aux universités et aux organismes de recherche, des revalorisations salariales et la création de 650 chaires de professeur junior et postes de doctorants. J’ajoute que, désormais, aucun chercheur ne sera payé moins de 2 Smic en début de carrière. Notre vivier de chercheurs s’amenuisant depuis des années, ces mesures sont une étape indispensable en vue de restaurer la dignité et l’attractivité de la recherche ; il y va de l’avenir de notre pays.

Par conséquent, le groupe RDSE votera les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – M. Julien Bargeton applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Max Brisson. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Max Brisson. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, les années passées ont été marquées par les effets de la crise sanitaire. Celle-ci a durement et durablement affecté l’enseignement supérieur dans notre pays. Le profond mal-être des étudiants, l’isolement des enseignants au moment de donner leurs cours et le désarroi de l’ensemble des personnels d’université ont laissé des traces au cœur d’une institution déjà affaiblie par un manque de financement chronique.

La recherche, elle, n’a pas non plus été hermétique à ces épreuves. La question de la performance de la recherche étant posée au grand jour, l’occasion a été donnée de rappeler combien, dans certains secteurs, notre pays s’était endormi.

C’est dans un tel contexte que nous avions examiné, à partir des travaux de notre collègue Laure Darcos, le projet de loi de programmation de la recherche.

À cette occasion, nous avions pointé un manque de financements concernant tant le budget de l’enseignement supérieur que celui de la recherche : manque de financements pour les revalorisations salariales ; manque d’investissements pour rattraper notre décrochage dans le domaine de la recherche ; manque de financements pour rénover les bâtiments universitaires vieillissants ; manque de financements, enfin, pour parer aux effets de l’inflation.

Qu’en est-il dans le cadre de ce projet de budget pour 2023 ? Avons-nous progressé ? Allons-nous progresser ?

Indéniablement, oui, puisque les crédits augmentent substantiellement : +1 milliard d’euros par rapport à 2022.

Madame la ministre, je salue l’ambition forte que vous défendez et les résultats concrets que vous obtenez. Cette ambition s’articule autour de trois priorités, que vous avez rappelées : compensation pérenne de la revalorisation du point d’indice ; poursuite de la trajectoire de la LPR ; mesures nouvelles en faveur de la vie étudiante ou reconduction de mesures exceptionnelles mises en œuvre depuis la crise sanitaire.

Les moyens augmentent, des efforts significatifs sont réalisés afin de répondre à l’urgence que connaissent ces secteurs stratégiques pour l’avenir de notre pays. Dans le contexte d’inflation et de crise énergétique que nous connaissons, ces hausses de crédits permettent de tenir les objectifs et d’éviter d’affaiblir plus encore qu’ils ne le sont déjà l’enseignement supérieur et la recherche, parents pauvres du budget de l’État pendant de trop nombreuses années.

Toutefois, madame la ministre, dans le prolongement des recommandations de nos collègues, je vous appelle à faire rayonner votre ambition avec la même force en matière d’investissements d’avenir. En effet, à la lecture de ce projet de budget, le sentiment général est le suivant : on répond aux urgences et les engagements sont tenus, mais, là où il s’agit de relever les défis d’avenir et de bâtir l’université de demain, les moyens sont moindres.

Le choc inflationniste absorbe les efforts budgétaires prévus par la LPR. Je vous encourage donc à redoubler d’ambition, afin que les augmentations de moyens se traduisent réellement par un « choc d’investissements » et ne servent pas seulement à faire face à l’inflation.

Le cas de la réhabilitation du patrimoine universitaire est parlant. Votre ministère évalue le besoin à 7 milliards d’euros, dont 75 % devraient être consacrés à la transition énergétique. L’appel à projets de 2020 avait permis de lancer certaines opérations, mais avait également exhibé l’ampleur des besoins. Le ministère continue donc d’accumuler du retard.

Aussi, je m’associe pleinement aux recommandations formulées par le rapporteur pour avis de la commission de la culture Stéphane Piednoir, qui appelle à lancer un plan d’investissement d’envergure assorti d’une réflexion de fond sur la quantité et la qualité du bâti universitaire, en lien avec les évolutions pédagogiques et sociétales.

La revalorisation des contrats des doctorants, initialement réservée aux nouveaux entrants et que vous avez décidé d’étendre, ce qui est une bonne chose, ne doit pas occulter le besoin d’un travail de fond sur l’attractivité de la recherche. Les conclusions de notre collègue rapporteure pour avis Laure Darcos, qui relève que les postes créés par la LPR n’ont pas tous été pourvus, nous invitent également à une très grande vigilance.

Madame la ministre, comme mes collègues du groupe Les Républicains, je voterai les crédits de cette mission. Je salue votre volontarisme pour défendre l’enseignement supérieur et la recherche.

Toutefois, je vous exhorte à ne pas perdre de vue l’une des finalités des politiques menées en ce domaine : mieux former les étudiants, mieux les orienter, lutter contre des taux d’échec qui restent importants.

Voilà pourquoi je vous invite à vous rapprocher de votre collègue ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse, M. Pap Ndiaye, et à ouvrir enfin le chantier de l’orientation et de l’articulation lycée-licence, bac–3/bac+3.

Nous le disions voilà peu, à l’occasion d’un débat organisé par nos collègues du groupe communiste républicain citoyen et écologiste : cette articulation ne fonctionne pas. L’enseignement supérieur n’a pas pris réellement la mesure du nouveau baccalauréat et cette non-prise en compte génère et nourrit l’échec de la réforme du lycée.

Les attendus de l’enseignement supérieur ne peuvent plus ignorer le souci de donner plus de liberté et de choix aux lycéens et, par leur spécialisation progressive, de les aider à se muer peu à peu en étudiants. Les formations supérieures qui privilégient le tronc commun, celles qui, par leurs attendus, cherchent à reconstituer l’ancienne voie S, rendent un bien mauvais service à la réforme du lycée, et même au pays.

Faire de l’orientation des lycéens et des étudiants une grande cause nationale, voilà ce qui manque à votre projet de budget comme à celui de votre collègue Pap Ndiaye.

Il me semble pourtant indispensable de mettre en chantier ce lien lycée-licence, si souvent évoqué. Le nouveau baccalauréat aurait dû être l’occasion d’une réflexion de fond sur la mue progressive d’un lycéen en étudiant. Parce que l’instauration de Parcoursup dans l’urgence et la réforme du lycée ont été conçues en silo et selon un calendrier inversé, nous nous retrouvons dans la même situation qu’en 2017.

L’articulation lycée-licence reste à construire. Votre projet de budget, par ailleurs volontariste, ne dessine pour autant aucune priorité en la matière. C’est dommage !

Résultat, les angoisses des futurs étudiants s’amplifient, relayées par les parents, au point que certains s’en prennent à l’outil, exprimant leur souhait d’un retour à une situation antérieure qui n’était pourtant plus tenable. Ce n’est pourtant pas l’outil qui est en cause, même s’il doit être amélioré, ni la philosophie du nouveau baccalauréat, même si bien des calages restent à faire – on l’a vu pour l’enseignement des mathématiques.

C’est la prise en compte de l’esprit et de l’organisation du nouveau baccalauréat qui est à construire pour assurer la fluidité du parcours bac–3/bac+3.

Madame la ministre, nos rapporteurs spéciaux de la commission des finances et nos rapporteurs pour avis de la commission de la culture, tout en nuançant leurs analyses, ont indiqué qu’ils avaient apprécié les efforts fournis et les ambitions posées pour l’avenir. J’espère que vous entendrez mon appel à ouvrir le grand chantier de l’articulation lycée-licence et que vous travaillerez à construire la fluidité pour laquelle je plaide entre les lycées et l’enseignement supérieur.

Il y va de la réussite de nos étudiants et de l’efficience de l’« amont » de l’enseignement supérieur, où tout se joue. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et RDSE. – M. Pierre Ouzoulias applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Médevielle. (M. Julien Bargeton applaudit.)

M. Pierre Médevielle. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, les crédits de l’enseignement supérieur atteignent 18 milliards d’euros dans le budget pour 2023. La progression des crédits, qui est de 4,68 % par rapport à l’année dernière, est une excellente nouvelle. Cependant, près de la moitié des nouveaux crédits sont consacrés à la compensation de la hausse du point d’indice : on parle de 364 millions d’euros budgétés pour 2023.

Comme l’a très bien expliqué Vanina Paoli-Gagin, rapporteur spécial de la commission des finances, l’ensemble des engagements inscrits dans la loi de programmation de la recherche sont respectés.

Je m’inquiète en revanche de l’insuffisante prise en compte de la rénovation du parc immobilier universitaire dans les crédits alloués.

D’après le ministère, le surcoût énergétique devrait s’élever à 400 millions d’euros. Ni la fermeture des universités quelques semaines supplémentaires ni la généralisation des cours en distanciel pour contrebalancer la hausse des coûts de l’énergie ne seront des solutions satisfaisantes.

Le groupe Les Indépendants appelle donc à un investissement de grande ampleur en faveur de la rénovation énergétique de l’immobilier universitaire.

Les crédits consacrés à la vie étudiante augmentent de 1,5 %, à hauteur de 3,13 milliards d’euros en crédits de paiement. Le montant des bourses sur critères sociaux a été revalorisé de 4 % à la rentrée de 2022 pour tenir compte de l’inflation ; il est extrêmement important de ne pas laisser les étudiants dans la précarité.

Les repas à un euro, qui ont été distribués à plus de 430 000 étudiants boursiers lors de l’année scolaire dernière, sont maintenus. Le coût de cette mesure est de 51 millions d’euros, mais il y a là une excellente nouvelle, car cette politique a du sens.

Je salue l’organisation, au cours de l’automne, d’une vaste concertation sur la vie étudiante à l’échelle nationale et locale. Une telle concertation nourrira la réflexion menée autour de la réforme des bourses, annoncée comme l’un des grands chantiers qui seront entrepris en faveur de la jeunesse dans les prochaines années.

Pour ce qui concerne le budget pour 2023 du volet « Recherche » de la mission, il augmente de 824 millions d’euros en crédits de paiement, atteignant 12,77 milliards d’euros. Notre groupe salue cette hausse qui est autant un choix qu’une nécessité.

La stratégie française en faveur de ses chercheurs et de son industrie spatiale est déterminante pour rester en pointe. Soutenir la recherche est un enjeu de souveraineté essentiel dans la perspective des années à venir.

Je me réjouis de la bonne articulation entre la programmation pluriannuelle de la recherche et le projet de loi de finances pour 2023.

La dotation du programme « Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires » progresse de 331 millions d’euros en autorisations d’engagement par rapport à 2022. En revanche, la hausse des coûts n’a pas été prise en compte dans l’octroi des crédits, ce qui doit nous alerter au regard de l’actuelle tendance inflationniste.

La forte hausse des crédits alloués à la recherche spatiale est une très bonne nouvelle. La Chine et les États-Unis investissent massivement dans l’espace et nous devons faire de même si nous voulons rester dans la course. Le montant global de ces crédits serait de 1,7 milliard d’euros pour 2023, soit une hausse de 74 millions d’euros à périmètre constant. Il faut toutefois rappeler que plus de la moitié de cette enveloppe est transférée à l’Agence spatiale européenne.

Les rapporteurs anticipent une réévaluation du budget dans les prochains mois, de l’ordre de 200 millions d’euros, du fait du surcoût induit par le retard du projet Ariane 6. Ce retard est d’autant plus dommageable qu’il fragilise la souveraineté européenne en matière de politique spatiale ; ce n’est pas l’élu toulousain que je suis qui restera insensible à ce constat ! (Sourires.)

Il est également important de rappeler que de nombreuses infrastructures de recherche, étant très consommatrices d’électricité, sont heurtées de plein fouet par la hausse des coûts énergétiques.

Je conclurai en mentionnant deux points de satisfaction.

Premièrement, le budget pour 2023 se révèle conforme à la LPR et suit la trajectoire qui avait été définie, pour la recherche comme pour l’enseignement supérieur.

Deuxièmement, l’État se doit de doter les enseignants des moyens nécessaires ; à cet égard, la hausse globale de la rémunération de 6 % va dans le bon sens.

Pour ces raisons, le groupe Les Indépendants accueille favorablement ces crédits et les votera.

Mme la présidente. La parole est à Mme Monique de Marco. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

Mme Monique de Marco. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, alors que nous abordons l’examen des crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur » pour 2023, notre groupe ne fait guère mystère de son opposition aux arbitrages ici retenus.

Nous étions en effet déjà opposés à la philosophie sous-jacente à la loi de programmation de la recherche. Or ce budget s’inscrit dans la continuité de cette loi, 61 % des crédits de la mission étant destinés à sa mise en œuvre. Certes, conformément aux engagements qui avaient été pris, les crédits de la mission sont en hausse, mais il s’agit d’une augmentation en trompe-l’œil, eu égard à l’ambition prévue de la trajectoire. Nous demeurons opposés à une mise en compétition des chercheurs, que des dispositifs fiscaux et budgétaires mal calibrés maintiennent par ailleurs dans la précarité.

L’augmentation des moyens de l’ANR est une bonne nouvelle pour les futurs lauréats des appels à projets. Nous réitérons toutefois notre inquiétude concernant la place accordée aux financements par appels à projets : nous l’avons dit, s’ils constituent de bons compléments des financements récurrents, leur généralisation n’est ni un gage d’excellence ni un gage d’efficacité. En outre, ils accroissent les inégalités entre laboratoires.

Le refus de prendre en considération notre proposition de rendre éligibles au crédit d’impôt recherche les dépenses de recherche essentielles à la lutte contre le réchauffement climatique et à la protection de l’environnement témoigne d’un manque d’ambition politique. Au lendemain de la COP27, c’est aller à contresens de l’histoire !

Les crédits du programme 190, « Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables », progressent de 4 % seulement, quand ceux du programme 193, « Recherche spatiale », augmentent de 14 %. Il est vrai que la conquête spatiale fascine et bénéficie d’une grande médiatisation, à l’instar de la dernière mission de Thomas Pesquet.

Je rappellerai cependant l’avertissement formulé par Hannah Arendt dans Condition de lhomme moderne : elle voyait dans la conquête de l’espace le prolongement des plus glorieux exploits de la science moderne, mais aussi des plus déconcertants, car ils induisent une aliénation du rapport à la Terre.

En effet, les travaux, sur terre, de l’Institut polaire français Paul-Émile-Victor ont autant à nous apprendre sur les changements climatiques en cours que la contemplation de notre planète depuis la station spatiale. Or, faute d’exposition médiatique, cet institut peine à préserver ses financements. Pour paraphraser un ancien Président de la République, nos forêts brûlent et nous contemplons les étoiles. Veillons à ne pas en faire notre maxime d’action !

Enfin, et surtout, la France dépense moins par étudiant qu’il y a quinze ans. Nous ne pouvons pas adopter en l’état un budget dans lequel on n’a pas pris la mesure de la détresse des étudiants de notre pays.

Sur ce sujet également, nous avons proposé des mesures fortes pour renforcer la justice fiscale et réformer le système des bourses sur critères sociaux, qui manque de progressivité et ne permet pas, à l’heure actuelle, de soutenir tous les étudiants qui en ont besoin.

Cette proposition a été rejetée, comme celle que nous avons faite d’affecter la totalité du produit de la CVEC aux Crous et aux établissements d’enseignement supérieur. Comme vous, monsieur le rapporteur, nous donnons l’alerte quant au montant trop faible de l’enveloppe accordée aux Crous.

Alors que les deux années de confinement ont grandement fragilisé les esprits au sein de la population étudiante, voilà que l’inflation et les restrictions alimentaires affaiblissent à présent les corps. Pour en revenir à des considérations qui, pour le coup, sont très « terre à terre », on lit dans Sud Ouest que 43 % des étudiants sautent des repas et que 58,3 % d’entre eux renoncent à des soins. Cela n’est pas digne de notre République !

Les signaux d’alerte se multiplient. La mission d’information sénatoriale sur les conditions de vie étudiante en France, qui a remis son rapport en 2021, a établi un bilan éloquent dont le Gouvernement n’a, semble-t-il, pas tenu compte. Sur toutes les travées, nous sommes régulièrement saisis de cette question. Aussi avons-nous déposé une série d’amendements visant à améliorer le bien-être de nos étudiants.

De même, nous allons proposer, par amendement, que les moyens du fonds exceptionnel de compensation du surcoût des énergies soient complétés et qu’un fonds permanent pour la rénovation énergétique soit créé. La Cour des comptes évalue les besoins en la matière à 7 milliards d’euros.

En conclusion, malgré les efforts du Gouvernement, la hausse globale des crédits de la mission est insuffisante pour absorber les surcoûts liés à l’inflation et à l’augmentation des prix de l’énergie. Dès lors, il est peu probable que notre pays atteigne l’objectif de consacrer 3 % de son PIB à la recherche.

C’est pourquoi notre groupe ne votera pas les crédits de cette mission. Nous invitons le Gouvernement à se saisir de la clause de revoyure prévue dans la LPR pour pallier les effets de la crise et de l’inflation. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

Mme la présidente. La parole est à M. Julien Bargeton. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. Julien Bargeton. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le projet de loi de finances pour 2023 affiche une hausse inédite des crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur », conformément à ce qui a été prévu dans la loi de programmation de la recherche, comme l’ont souligné tous les orateurs qui m’ont précédé. Je les en remercie, même s’ils ont par ailleurs porté une appréciation parfois nuancée sur ces crédits, ce qui est bien normal.

La mission est dotée de 30,8 milliards d’euros en crédits de paiement, soit une hausse d’un peu plus de 5 %. C’est la plus forte progression des crédits de cette mission depuis plus de cinq ans. Au total, les crédits ont augmenté de près de 4 milliards d’euros entre la loi de finances pour 2017 et le projet de loi de finances pour 2023, et ce à périmètre constant. L’effort consenti sur longue période est considérable et il est plus important encore cette année.

De surcroît, je rappelle que 650 millions d’euros sont consacrés à la recherche dans le cadre du programme d’investissements d’avenir et du plan France 2030. À terme, ce sont 12,25 milliards d’euros qui seront fléchés, dans le plan France 2030, vers le périmètre correspondant à la mission « Recherche et enseignement supérieur ».

Cette montée en puissance est conforme à la loi de programmation de la recherche : la hausse par rapport à 2022 est de 400 millions d’euros en crédits et de 650 équivalents temps plein (ETP) en emplois, soit une augmentation cumulée de 2 000 ETP sur la période 2021-2023, ce qui est loin d’être négligeable.

L’impact de la LPR est particulièrement visible sur le programme 150, le plus doté et le plus important de cette mission.

Les crédits alloués à ce programme en application de la loi de programmation financent des mesures indemnitaires : revalorisations statutaires des personnels de recherche, repyramidage des maîtres de conférences et des ingénieurs et techniciens de recherche et de formation, à hauteur de 75 millions d’euros.

Ces crédits financent également une hausse du budget de recherche des universités, afin de consolider la trajectoire en emplois, qui comprend la création de chaires de professeur junior. En parallèle, les moyens des laboratoires progressent de 15 % par rapport à 2020, soit une hausse de 56,9 millions d’euros.

Enfin, les crédits de ce programme financent une revalorisation du montant des contrats doctoraux à compter du 1er septembre 2021, puis du 1er septembre 2022, l’objectif étant d’atteindre une revalorisation de 30 % à l’horizon 2023, associée à une augmentation graduelle du nombre de ces contrats, pour un montant de 11 millions d’euros en 2023.

On voit que la hausse se décline en trois trains de mesures extrêmement précises.

Ce projet de budget érige par ailleurs la lutte contre la précarité étudiante au rang de priorité.

Il est vrai que la situation des étudiants est extrêmement difficile, cela a été souligné, mais il ne faudrait pas laisser accroire que rien n’est fait pour y remédier. Certes, les besoins sont extrêmement importants, mais, convenons-en, un effort est réalisé, dont il faut prendre la mesure.

Le montant des bourses sur critères sociaux a été revalorisé de 4 % à la rentrée de 2022 afin de tenir compte de l’inflation ; cette mesure représente un effort financier de plus de 85 millions d’euros en 2023. Le Gouvernement a en outre annoncé le lancement d’une grande concertation préalable à une réforme des bourses sur critères sociaux.

Une enveloppe de 51 millions d’euros est prévue pour maintenir l’offre de repas à un euro dans les restaurants universitaires pour les étudiants boursiers. En 2021-2022, plus de 430 000 étudiants boursiers ont bénéficié de cette mesure.

Le réseau des œuvres universitaires se voit doté d’une subvention pour charges de service public en hausse de 35,5 millions d’euros par rapport à 2022. Des créations de postes se traduisant par un schéma d’emploi de 40 ETP supplémentaires sont prévues en 2023 pour le recrutement de travailleurs sociaux au sein des cités universitaires.

Dans le même temps, des mesures exceptionnelles ont été prises : versement de l’indemnité inflation en complément de la mensualité de bourse de décembre 2021, chèque de rentrée de 100 euros accordé à l’automne 2022.

Toutes ces mesures ont d’ores et déjà été mises en place.

En réalité, le Gouvernement lutte contre la précarité étudiante de façon continue. Depuis 2020, il a en effet multiplié les dispositifs visant à préserver le pouvoir d’achat des étudiants en agissant sur leurs principaux postes de dépense, tels que le logement – gel des loyers dans les résidences universitaires, maintenu depuis 2019 –, la restauration – ticket-restaurant universitaire à un euro pour les étudiants les plus précaires –, l’équipement numérique, l’hygiène – mise à disposition de protections périodiques gratuites.

Si, selon certains, l’effort est insuffisant, force est de reconnaître qu’il est considérable et qu’un grand nombre de mesures ont été prises depuis le début de la crise.

La loi de programmation de la recherche étant respectée et les crédits alloués à l’investissement et à l’Agence nationale de la recherche étant en hausse, notre groupe votera les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

Mme la présidente. La parole est à M. Yan Chantrel. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Yan Chantrel. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le projet de budget que nous examinons ce soir est le premier de la législature et le premier élaboré sous votre tutelle, madame la ministre. Vous le savez, après cinq ans de frustration démocratique et de dialogue de sourds entre les parlementaires et le Gouvernement sur les questions relatives à l’enseignement supérieur et à la recherche, c’est avec bienveillance que nous accueillons vos premiers pas.

Mais cette bienveillance a ses limites, compte tenu des urgences auxquelles font face nos universités, l’ensemble des personnels de l’enseignement supérieur, les chercheurs et nos étudiants.

La première de ces urgences, c’est la flambée des prix de l’énergie. Quelle ne fut pas notre stupeur, à la rentrée dernière, lorsque plusieurs présidents d’université ont annoncé envisager une fermeture temporaire de leurs établissements au cœur de l’hiver, par crainte de ne pouvoir faire face aux surcoûts liés à la hausse des prix de l’énergie ! Le souvenir douloureux des cours en distanciel, des enseignements tronqués, des difficultés d’accès aux ressources et de l’isolement grandissant de chacun a ressurgi.

Face à l’urgence de la situation, vous avez su réagir, madame la ministre, en créant, dans le dernier PLFR pour 2022, un fonds de compensation du surcoût de l’énergie doté de 275 millions d’euros. Mais cela risque d’être bien insuffisant ! Selon les estimations de France Universités, la hausse des prix de l’énergie entraînerait en 2023, par rapport à 2021, une dépense de 500 millions d’euros supplémentaires pour les établissements d’enseignement supérieur et de 200 millions d’euros supplémentaires pour les organismes nationaux de recherche.

En réalité, c’est l’ensemble du parc immobilier universitaire qui a besoin d’un grand plan de réhabilitation ; à défaut, il sera impossible d’atteindre l’objectif fixé par le Gouvernement d’une diminution de 40 % de la consommation d’énergie d’ici à 2030. Le parc universitaire représente 20 % du patrimoine immobilier de l’État, mais près d’un tiers de ces bâtiments sont des passoires énergétiques ! Nous proposerons, au cours de la discussion, des amendements tendant à remédier à cette situation.

Deuxième urgence : le manque de moyens réels de l’enseignement supérieur et de la recherche. Certes, le budget du ministère est en hausse et la trajectoire prévue dans la loi de programmation de la recherche est en apparence respectée. Vous pouvez vous prévaloir, madame la ministre, d’une hausse globale de 5 % des crédits alloués à la mission « Recherche et enseignement supérieur », qui passent de 29,07 milliards à 30,61 milliards d’euros.

Mais que reste-t-il réellement de cette hausse une fois prise en compte l’inflation galopante – elle frôle les 6 % ? Dans les faits, les moyens baissent.

Aux effets de l’inflation et aux surcoûts liés à l’énergie, il faut ajouter les non-compensations du glissement vieillesse technicité et de la hausse du point d’indice. Si la hausse du point d’indice de 3,5 %, soit un taux inférieur à celui de l’inflation, est bien compensée pour 2023, elle ne l’a été qu’à moitié pour 2022.

Pour ce qui est du long terme, l’objectif de consacrer 3 % du PIB aux dépenses de recherche et développement, dont 1 % pour le secteur public, ne pourra pas être atteint en 2030 si, budget après budget, les effets de l’inflation ne sont pas davantage compensés.

Nous vous appelons donc, madame la ministre, à utiliser en 2023 la clause de revoyure prévue dans la LPR afin d’ajuster le tir et de permettre à la France d’atteindre cet objectif, sur lequel nous nous sommes engagés lors du sommet européen de Barcelone voilà tout juste vingt ans cette année.

J’en viens au problème majeur que posent les crédits de cette mission : leur hausse ne suit pas celle des effectifs ! Cette année encore, la dépense moyenne par étudiant baisse, comme c’est le cas chaque année depuis 2014, à tel point que, sur ce critère, nous sommes classés à la quinzième place des pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).

Les étudiants inscrits à l’université continuent de souffrir du sous-investissement de l’État dans leur scolarité en regard des efforts consentis pour les étudiants des classes préparatoires. Ainsi, selon une note de la direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance publiée en novembre 2022, la dépense moyenne par étudiant variait en 2021 de 10 270 euros par an pour un étudiant d’université à 16 370 euros pour un élève de classe préparatoire aux grandes écoles. On consacre donc à un étudiant en université 60 % seulement des sommes dépensées pour un étudiant en classe prépa ! Cette injustice contribue à la reproduction sociale dans notre pays.

Pis, ces inégalités vont en se renforçant, y compris entre les sexes. Selon une récente note de l’Institut des politiques publiques, les étudiantes sont sous-représentées dans les filières et disciplines les plus coûteuses. Conséquence, les dépenses d’enseignement supérieur allouées aux femmes sont inférieures de 18 % à celles qui sont dévolues aux hommes. Ces inégalités se perpétuent ensuite sur le marché du travail.

Troisième urgence : la précarité étudiante.

C’est avec déchirement que nous avons vu réapparaître ces derniers jours d’interminables files d’étudiants faisant la queue chaque soir pour récupérer un panier de provisions auprès d’associations d’aide alimentaire. La précarité étudiante n’a pas disparu avec le covid, bien au contraire ; elle augmente en raison de l’inflation et de la hausse des prix de l’énergie.

Le témoignage de Maëlle, largement diffusé sur les réseaux sociaux, nous a tous bouleversés. Avec une bourse de 100 euros par mois, et malgré ses petits boulots d’étudiante, elle n’arrive plus à joindre les deux bouts et craque sous la pression.

Comment peut-on étudier sereinement quand on vit dans un logement exigu, souvent loué à un prix exorbitant, quand la fac se trouve à plus d’une heure de transport, quand on doit faire appel aux banques alimentaires pour manger à sa faim ? Dans ces conditions, comment faire face à la charge de travail quotidienne à la fac, au stress des examens et à la pression de devoir trouver un emploi au sortir de l’université ? Comment réussir ses études quand on a l’esprit troublé par des préoccupations matérielles et le corps brisé par la fatigue du labeur ?

Nombre d’étudiants, abandonnés à leur sort par les pouvoirs publics, sont forcés d’interrompre leurs études.

Face à cette situation, la réponse du Gouvernement n’est pas à la hauteur. Dès le mois de septembre, lorsque les associations étudiantes ont annoncé que le coût moyen de la rentrée par étudiant était en hausse de 7,3 % par rapport à l’année dernière, il est apparu très clairement que la hausse de 4 % des bourses sur critères sociaux, votée à l’été, serait totalement insuffisante.

Certes, madame la ministre, la concertation que vous avez lancée sur une réforme des bourses est bienvenue, mais notre jeunesse ne peut attendre : l’urgence est là ! Nous proposerons par conséquent plusieurs amendements visant à pallier le manque de moyens alloués à la vie étudiante.

Nous demandons tout d’abord le retour du ticket-restaurant universitaire à un euro pour l’ensemble des étudiants. Il est indispensable de rétablir cette aide quotidienne pour tous les étudiants précaires qui ne bénéficient ni d’une bourse, ni de petits jobs, ni d’aide de leur famille.

Ensuite, sachant pertinemment que l’extension du ticket de resto U à un euro mettra les Crous sous pression, alors qu’ils subissent eux-mêmes la hausse des coûts de l’énergie, mais aussi des prix des denrées alimentaires, nous défendrons une rallonge de 10 millions d’euros pour ces centres.

Par ailleurs, nous voulons faire de la santé étudiante une priorité, car il est établi, hélas ! que le premier poste de dépenses que sacrifient les étudiants lorsque le coût de la vie augmente, c’est la santé.

Les services de santé universitaire sont souvent trop méconnus ou délaissés par les étudiants, les délais d’attente étant trop longs en raison du manque de médecins. Pis, dans certaines antennes délocalisées de grandes universités, les médecins sont totalement absents. Il faut donc renforcer ces services.

Alors que les deux années de covid-19 ont laissé des traces pérennes chez les jeunes et que la pression toujours plus grande à laquelle ils sont soumis met à mal leur santé mentale, le manque de psychologues sur les campus se fait aussi cruellement sentir.

Nous sommes toutefois bien conscients que ces quelques amendements visant à lutter contre la précarité étudiante, à supposer qu’ils soient adoptés, n’offriraient qu’une rustine temporaire face aux problèmes systémiques qui entravent la réussite des étudiants les plus modestes et creusent les inégalités dans notre pays.

C’est pourquoi nous continuons de défendre la création d’un « minimum jeunesse » : une telle aide individuelle à l’émancipation solidaire permettrait de répondre à la détresse d’une partie de notre jeunesse, laquelle s’enfonce dans la précarité et a le sentiment, pas toujours injustifié, que les adultes sont indifférents à son sort.

Telles sont les raisons pour lesquelles nous nous abstiendrons sur ce projet de budget. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur des travées des groupes CRCE et GEST.)

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Ouzoulias. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER, UC et Les Républicains. – M. Pierre Médevielle applaudit également.)

M. Pierre Ouzoulias. Attendez la fin, mes chers collègues ! (Sourires.)

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la France délaisse ses universités. Pour s’en convaincre, il suffit d’examiner quelques chiffres.

Depuis dix ans, la dépense moyenne par élève a augmenté de 1,5 % par an dans le premier degré et de 1,2 % par an dans le second degré. Cette progression continue s’explique par la conjonction de la stabilité des moyens budgétaires et de la baisse des effectifs.

Le processus est inverse dans les universités, qui ont dû accueillir durant la même période un demi-million d’étudiants supplémentaires à budget constant. Ainsi la dépense moyenne par étudiant a-t-elle baissé en moyenne de 1,4 % tous les ans depuis 2014. En revanche, elle est restée stable pour les élèves des classes préparatoires aux grandes écoles, qui ont bénéficié en 2021 de 16 370 euros per capita, contre 10 270 euros pour les étudiants à l’université, soit une différence de près de 62 %.

Le choix politique, confirmé de gouvernement en gouvernement, de ne pas financer l’augmentation des charges de service public des universités a conduit ces établissements à une situation de quasi-banqueroute, d’autant qu’à ce déficit structurel s’ajoutent désormais des surcoûts énergétiques colossaux. À moyen terme, des incertitudes pèsent de surcroît sur la compensation par l’État de la revalorisation du point d’indice du traitement des fonctionnaires et du glissement vieillesse technicité.

Il serait très préjudiciable à la qualité pédagogique des enseignements et à la réussite des étudiants que ces apories budgétaires aient finalement pour conséquences de nouvelles régressions des taux d’encadrement.

Les universités, comme les collectivités, sont en quelque sorte placées sous la curatelle budgétaire de l’État pour assurer leurs missions de service public. Cette dépendance accrue est la conséquence du conflit entre la hausse de la démographie, le principe constitutionnel d’égalité d’accès des étudiants à l’université et l’inadéquation des dotations de l’État.

Cette « striction » malthusienne induit une recentralisation de la maîtrise budgétaire au profit des administrations et, à terme, la fin de l’autonomie des universités. Quel sens peut avoir le dialogue stratégique et de gestion si l’État ne donne pas aux universités les moyens budgétaires d’exercer leurs missions d’intérêt général ?

À l’origine de cette carence organisée, il y a le calcul budgétaire de Bercy, qui considère que la baisse attendue de la démographie estudiantine redonnera des marges budgétaires aux établissements. Je ne partage pas cette projection stratégique, car elle ignore les objectifs d’une baisse du taux d’échec en licence et d’une hausse du taux de poursuite des études universitaires. Comme je l’ai déjà dit à cette tribune, notre pays doit mobiliser davantage l’université pour satisfaire l’impérieux besoin d’un accroissement des connaissances.

Par-dessus tout, cette contrainte budgétaire traduit une méconnaissance de la situation matérielle des étudiants, qui est dramatique. La banalisation de la pression épidémique n’a pas mis un terme à la précarité estudiantine ; au contraire, elle en révèle au grand jour les causes structurelles.

Le ministère des solidarités estime que 40 % des étudiants qui vivent seuls sont en situation de pauvreté. Pendant la crise sanitaire, ils avaient été privés de leur emploi ; désormais, ils subissent avec une grande violence l’inflation et l’augmentation des prix de l’énergie.

Comme l’avait établi la commission de la culture dans le rapport réalisé sous la conduite de son président, la résorption de la précarité étudiante requiert un plan pluriministériel dont la mise en œuvre associerait les collectivités. Une réforme des bourses ou l’instauration d’un revenu étudiant ne suffiront pas à réduire complètement les fortes disparités qui existent entre les différentes situations régionales. Ainsi est-il absurde de concentrer l’offre d’études supérieures dans les métropoles, alors que ces villes sont soumises à une pression sans cesse accrue en matière de logement. Dans de nombreuses régions, le premier poste de dépense des étudiants, c’est le logement ; il est donc urgent de relancer la construction.

Le ministre chargé de la ville et du logement a annoncé aujourd’hui le lancement du volet logement du Conseil national de la refondation. À cet égard, je regrette que, des trois thématiques retenues, aucune ne traite du logement étudiant… Les universités et les étudiants ne peuvent plus être systématiquement ignorés des politiques sociales. Ils doivent être placés au cœur des ambitions de l’État. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER, GEST et UC, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Hingray. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. Jean Hingray. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous nous félicitons que les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur » augmentent de 6,3 % pour l’année 2023. Les deux programmes retraçant les crédits alloués à l’enseignement supérieur bénéficient cette année encore d’une hausse importante, leur dotation atteignant 18 milliards d’euros.

Près de la moitié des nouveaux crédits sont consacrés à la compensation, en 2023, de la hausse du point d’indice pour les établissements d’enseignement supérieur publics.

Après des hausses importantes en 2021 et 2022, le PLF pour 2023 prévoit une stabilisation des crédits du programme « Vie étudiante ». Le montant des bourses a été revalorisé de 4 % à la rentrée 2022 afin de permettre aux étudiants boursiers de faire face à l’inflation. Cependant, cette revalorisation ne permettra pas de compenser la hausse des prix, le taux d’inflation ayant atteint plus de 6 % au mois d’octobre dernier.

Pour commencer, j’évoquerai la précarité étudiante. Après deux années de pandémie mondiale, la rentrée 2022 a été synonyme de retour à la normale pour la majorité des étudiants. Toutefois, deux étudiants sur trois sont aujourd’hui dans une situation d’extrême précarité, que l’inflation ne risque pas d’améliorer… Les postes de dépense sont nombreux pour les étudiants : alimentation, logement, santé.

Il faut certes saluer la création, annoncée le 22 novembre dernier, d’un fonds de solidarité doté de 10 millions d’euros. Ce fonds permettra de financer environ 300 000 colis alimentaires jusqu’à la fin de l’hiver. Nous regrettons néanmoins que les propositions formulées par le Sénat, et plus particulièrement par le groupe Union Centriste, par exemple le ticket-restaurant étudiant, n’aient pas retenu l’attention du Gouvernement. La proposition de loi visant à favoriser l’accès de tous les étudiants à une offre de restauration à tarif modéré, déposée par Pierre-Antoine Levi, aurait pu être une réponse pour les étudiants dont les établissements ne proposent pas de service de restauration universitaire – il existe encore, en la matière, de nombreuses zones blanches.

La précarité, qui concerne, donc, un grand nombre d’étudiants, ne s’arrêtera pas avec l’hiver. Des dispositifs sont-ils prévus en vue du printemps ? Si ce fonds répond à une situation d’urgence, il ne constitue pas une solution pérenne.

La situation des Crous, qui ont été très sollicités durant la crise sanitaire, continue de s’améliorer et les crédits qui leur sont alloués sont en constante augmentation. Cependant, la hausse des prix des denrées alimentaires pourrait engendrer un déséquilibre.

En parallèle, on enregistre une croissance de 20 % à 30 % de la fréquentation des restaurants universitaires. Si le PLF pour 2023 prévoit une augmentation des moyens des Crous, cette hausse ne semble pas suffisante pour leur permettre de faire face aux défis qui se présenteront dans les prochains mois. Aussi souhaitons-nous que ces moyens soient encore renforcés ; tel est le sens des amendements que présentera Laurent Lafon dans quelques instants.

L’augmentation sans précédent des coûts de l’énergie a pris au dépourvu de nombreuses universités, qui ont dû envisager dans l’urgence des plans de sobriété, allant même jusqu’à proposer des fermetures sur certaines périodes.

Le fonds de compensation du surcoût de l’énergie et l’« amortisseur électricité » annoncés par le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche sont bienvenus. Mais les 275 millions d’euros du fonds ne suffiront pas, étant entendu que le surcoût énergétique s’élèvera à 5 millions d’euros pour certaines universités.

La crise énergétique à laquelle nous faisons face rend de plus en plus criantes les vulnérabilités de nombreux bâtiments universitaires. Comme le covid-19 a précipité la digitalisation, la crise énergétique rend la transition environnementale encore plus urgente. Alors qu’il est impératif de lancer un plan massif de rénovation de ce patrimoine, la dotation budgétaire consacrée à l’immobilier universitaire augmente seulement de 30 millions d’euros. Cet effort ponctuel demeure insuffisant et ne permettra pas à la France d’atteindre les objectifs ambitieux qu’elle s’est fixés en matière de transition énergétique.

Cette réflexion doit aussi englober les laboratoires, dont les matériels scientifiques sont bien plus énergivores que le chauffage des amphithéâtres. Ainsi Esiee Paris, école d’ingénieurs comptant parmi les membres de l’université expérimentale Gustave-Eiffel, possède-t-elle une salle blanche qui concentre à elle seule plus ou moins la moitié des dépenses énergétiques de l’école.

Les crédits des programmes du volet « Recherche » de la mission devraient atteindre, en 2023, 12,8 milliards d’euros en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement, soit une hausse de 7 % par rapport à l’année précédente.

Cette évolution résulte essentiellement de l’ajout d’une enveloppe de 330 millions d’euros allouée aux organismes de recherche du programme 172, ainsi que de la forte hausse des crédits consacrés à la recherche spatiale.

La trajectoire proposée pour 2023 respecte la hausse prévue par la LPR ; ce sera la troisième année que cette loi sera mise en œuvre. Nous avions salué, lors de son adoption, l’ambition qui y était inscrite en faveur de la recherche.

Au total, 400 millions d’euros supplémentaires sont prévus pour 2023 en application des engagements pris dans le cadre de cette loi ; nous pouvons nous en féliciter.

Cependant, cette trajectoire ne prend pas en compte l’inflation, ce que nous avions déjà regretté à l’époque, et ce que nous continuons de dénoncer. La LPR prévoyait une actualisation de la programmation tous les trois ans. Nous devrions donc, en 2023, rediscuter de l’ensemble de ces sujets. Nous espérons que le Parlement sera associé à l’ensemble de cette réflexion.

D’ici là, madame la ministre, vous pouvez être assurée que nous soutenons les efforts consentis par le Gouvernement : nous voterons en faveur de ces crédits. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Grosperrin. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Sonia de La Provôté applaudit également.)

M. Jacques Grosperrin. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous pouvons dire que le montant des crédits demandés dans ce PLF pour la mission « Recherche et enseignement supérieur » témoigne d’une évolution globalement satisfaisante. Max Brisson parlait du manque de financement dont le secteur avait souffert, et il avait raison.

Le présent budget se veut rassurant, en tout cas en affichage : 25,7 milliards d’euros en crédits de paiement pour 2023, soit une hausse de plus de 1 milliard d’euros par rapport à 2022.

Dans le détail, on peut noter la hausse sensible des crédits relatifs à la vie étudiante. Au total, 3,1 milliards d’euros sont engagés sur le programme 231, soit 50 millions d’euros de plus que l’année précédente. On peut également relever la hausse des crédits demandés pour le programme 150, qui permet de porter à 14,9 milliards d’euros pour 2023 le budget relatif aux formations supérieures et à la recherche universitaire.

Toutefois, si cette hausse globale des crédits nous semble aller dans le bon sens, elle ne saurait masquer les graves difficultés auxquelles sont confrontés les établissements de l’enseignement supérieur, leur personnel et leurs étudiants.

La première difficulté tient à la crise énergétique. Avec la hausse des prix de l’énergie, les établissements d’enseignement supérieur vont voir leur facture s’alourdir considérablement. Les universités sont particulièrement touchées, car elles hébergent une grande majorité des laboratoires et infrastructures très énergivores.

Déjà, la facture pour l’année 2022 a fait apparaître un surcoût estimé à plus de 100 millions d’euros par rapport à 2021. Mais le pire est à venir : le surcoût attendu en 2023 est de plus de 400 millions d’euros.

Jean-François Rapin et Laure Darcos ont fait allusion à la question des postes non pourvus.

Le calcul est simple : la hausse des prix de l’énergie va entraîner pour nos établissements un surcoût de plus de 500 millions d’euros pour les années 2022 et 2023. Pour y parer, vous avez annoncé en octobre dernier une mesure conjoncturelle consistant à débloquer en urgence 275 millions d’euros dans le cadre du collectif budgétaire. Vous avez également demandé aux établissements d’enseignement supérieur de puiser dans leurs fonds de roulement.

Mais nous attendons un véritable plan de rénovation énergétique du parc immobilier universitaire, qui, avec ses 18,7 millions de mètres carrés, représente 20 % du patrimoine immobilier de l’État.

Incroyable mais vrai, ce patrimoine est pour un tiers composé de passoires thermiques, ce qui, en plus d’alourdir la facture des universités, compromet la satisfaction des exigences environnementales et de sobriété énergétique. À cet égard, Stéphane Piednoir avait raison de dénoncer une accumulation de retards… On comprend pourquoi, au vu des inquiétudes des présidents d’université, certains chantiers de démolition sont freinés.

Il est donc urgent d’agir, à court terme et à long terme, afin de réhabiliter le parc immobilier universitaire. C’est indispensable si nous voulons que nos universités atteignent l’objectif de réduction de 40 % de leur consommation d’énergie d’ici 2030, objectif fixé par le décret dit tertiaire.

La deuxième difficulté tient à la précarité étudiante. Nous ne pouvons que nous satisfaire de la hausse des crédits consacrés à la vie étudiante. Mais les moyens mis en œuvre ne nous paraissent pas suffisants, car le nombre d’étudiants ne cesse d’augmenter, année après année.

L’évolution de la dépense moyenne par étudiant continue de baisser. Le rapport 2023 sur les politiques nationales de recherche et de formations supérieures indique même que, de 2013 à 2021, le coût moyen par étudiant à l’université a baissé de presque 15 %.

Nos étudiants sont frappés par la précarité, situation aggravée par l’inflation due notamment à la guerre d’Ukraine.

Il serait faux de dire que le Gouvernement n’agit pas : vous avez décidé d’augmenter les bourses de 4 %, vous gelez les loyers des résidences universitaires et vous étendez le Pass’Sport aux étudiants boursiers.

Une inquiétude demeure cependant concernant les restaurants universitaires, de plus en plus prisés des étudiants en raison de leur faible coût. Si vous avez décidé de maintenir le repas à un euro pour les boursiers, le regain d’attractivité de ces restaurants met en tension leur modèle économique, qui doit d’urgence être repensé.

À ce sujet, on ne peut que s’étonner que la subvention pour charges de service public du réseau (SCSP) soit stabilisée à 300 millions d’euros au lieu d’être revue à la hausse, alors que l’activité de restauration s’accroît considérablement depuis la crise sanitaire, que le réseau poursuit son développement et qu’il se voit confier des missions supplémentaires d’accompagnement social des étudiants. Madame la ministre, nous ne comprenons pas votre refus d’indexer la SCSP sur le volume de repas fournis.

Enfin, puisque je suis le dernier à intervenir, je souhaite évoquer un cas d’école, qui est loin d’être hors sujet, celui de la Comue (communauté d’universités et établissements) Université Bourgogne Franche-Comté.

L’université de Franche-Comté fut créée en 1423 par Philippe le Bon ; elle fut d’abord installée à Dole avant d’être déplacée à Besançon en 1481. Les Dijonnais, quant à eux, fondèrent leur université en 1722, et la concurrence entre les deux villes ne s’est jamais démentie.

La décision prise par l’université de Bourgogne de se retirer de la Comue a des conséquences désastreuses pour les personnels et les étudiants ; elle a entraîné le gel par l’État de plus de 60 millions d’euros de dotations prévues au titre du programme d’investissements d’avenir (PIA). Un nouveau projet semble se dessiner et une nouvelle configuration se mettre en place. Quelle serait, le cas échéant, la position de l’État ? Serait-il prêt à dégeler les 60 millions d’euros tant attendus par nos professeurs, enseignants-chercheurs et étudiants ?

Madame la ministre, vous l’aurez compris, si quelques réserves subsistent concernant le volet « Enseignement supérieur » de cette mission, le projet de budget qui nous est présenté va globalement dans le bon sens. C’est pourquoi nous le voterons. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Sylvie Retailleau, ministre de lenseignement supérieur et de la recherche. Madame la présidente, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le président de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication, madame la rapporteure spéciale, monsieur le rapporteur spécial, madame, messieurs les rapporteurs pour avis, mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-moi tout d’abord de vous remercier pour la qualité de vos interventions et de vos remarques.

Le montant des crédits inscrits dans le projet de budget pour 2023 du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche est substantiel : ces crédits progresseraient de 1,1 milliard d’euros par rapport à 2022, hors financements issus du programme d’investissements d’avenir et du plan France 2030 et sans compter ni les 275 millions d’euros supplémentaires destinés à compenser la hausse du prix de l’énergie dans le PLFR pour 2022 ni l’amortisseur visant à réduire les factures en 2023, dont nous ne connaissons pas encore le montant exact. J’y reviendrai lors de la discussion des amendements, mais j’ai d’ores et déjà annoncé le déblocage de 3 millions d’euros supplémentaires pour l’Ipev.

Une telle augmentation est d’autant plus notable qu’elle s’inscrit dans un contexte économique compliqué, alors que le Gouvernement engage des dépenses massives en faveur de la préservation du pouvoir d’achat des Français, qui est bien sûr notre priorité.

Les crédits alloués au ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche pour 2023 s’élèvent ainsi à 25,7 milliards d’euros, répartis entre les trois programmes, 150, 172 et 231, qui relèvent de ma responsabilité. La Mires rassemble également des programmes relevant d’autres ministères : le programme 190 relève du ministère de la transition écologique, le programme 191 du ministère des armées, le programme 142 du ministère de l’agriculture et les programmes 192 et 193 du ministère de l’économie et des finances.

Le programme 193, « Recherche spatiale », touche à un sujet d’actualité, puisque la conférence ministérielle de l’ESA (Agence spatiale européenne), qui s’est tenue à Paris la semaine dernière, s’est conclue par l’annonce d’une forte hausse de la contribution de la France, et qu’une jeune femme inspirante, Sophie Adenot, a intégré la nouvelle promotion d’astronautes de l’Agence.

Ce programme a pour finalité d’assurer à la France, et à l’Europe via l’ESA, la maîtrise des technologies spatiales nécessaires pour progresser dans la connaissance de l’univers, pour mieux quantifier l’impact du changement climatique sur notre planète et pour garantir notre autonomie stratégique sur les enjeux de souveraineté. Le projet de loi de finances pour 2023 illustre cette ambition renouvelée, soulignée par la Première ministre voilà quelques semaines devant le Congrès international d’astronautique.

Pour ce qui est des crédits de mon ministère, leur augmentation par rapport à 2022 vise trois objectifs principaux.

Il s’agit tout d’abord de tenir l’engagement que j’avais pris devant certains d’entre vous avant l’été, lorsque vous m’avez auditionnée, celui de confirmer la trajectoire de la LPR : le budget de la mission augmente de 400 millions d’euros et 650 emplois sont créés. Les effets de l’inflation sur la masse salariale, compte tenu de la hausse du point d’indice, seront compensés de façon pérenne à partir de 2023. Pour faire face à la hausse du prix de l’énergie, nous avons prévu, je l’ai dit, la création d’un fonds doté de 275 millions d’euros et la mise en place d’un amortisseur. J’ai pris de surcroît l’engagement d’honorer au printemps la clause de revoyure prévue par la LPR.

Il s’agit, ensuite, de renforcer les moyens, via 160 millions d’euros de mesures nouvelles en faveur de la réussite étudiante dans l’enseignement supérieur, d’améliorer la visibilité pluriannuelle et d’élargir la responsabilité dont disposent les universités sur leurs moyens.

Il s’agit, enfin, de financer l’amélioration des conditions de vie des étudiants : une enveloppe de 200 millions d’euros est allouée, pour la rentrée 2022-2023, à la mise en œuvre de mesures nouvelles et à la reconduction de certaines mesures exceptionnelles qui avaient été prises au moment de la crise du covid-19.

Le budget pour 2023 porte également la compensation aux établissements d’enseignement supérieur, aux organismes de recherche et au Cnous de la revalorisation du point d’indice des agents publics : 500 millions d’euros supplémentaires sont ainsi « soclés » de manière pérenne.

Les trajectoires en crédits et en emplois prévues par la LPR seront donc pleinement respectées en 2023, avec, je l’ai dit, 400 millions d’euros supplémentaires, dont 350 millions pour les programmes du ministère et 51 millions d’euros, conformément à la LPR, pour le programme 193, « Recherche spatiale ».

Les principales mesures financées sont connues : ce sont celles dont vous aviez discuté lors de l’examen de la LPR.

Je citerai en premier lieu les mesures de gestion des ressources humaines : 114 millions d’euros supplémentaires destinés à améliorer la rémunération et les carrières de l’ensemble des personnels. Ces revalorisations et requalifications d’emplois concernent l’ensemble des agents, fonctionnaires ou contractuels, sous statut de droit public ou privé, travaillant dans des organismes de recherche ou dans des universités. Je souligne – c’est important – que la hausse du point d’indice s’ajoute à ces mesures : elle ne s’y substitue pas. À cette enveloppe s’ajoutent 40 millions d’euros de crédits prévus pour le recrutement de doctorants supplémentaires et la revalorisation de leur rémunération : des doctorants plus nombreux et mieux rémunérés, tel était l’un des objectifs de la LPR ; nous le mettons en œuvre.

En deuxième lieu, les autorisations d’engagement ouvertes au profit de l’Agence nationale de la recherche sont stabilisées à un niveau supérieur de plus de 400 millions d’euros au point de référence, à savoir le budget pour 2020, étant entendu que la LPR ne prévoyait pas de montée en charge pour 2023. On peut déjà souligner les effets visibles de l’augmentation de l’enveloppe d’engagement, qui a permis – c’était l’objectif – de porter le taux de sélection des projets à hauteur de 23 %. En crédits de paiement, la montée en charge des projets sélectionnés se traduit logiquement par une hausse d’environ 44 millions d’euros.

En troisième lieu, une somme de 91 millions d’euros est prévue pour rehausser les budgets des organismes de recherche et des universités, afin de garantir la soutenabilité de leur recrutement, mais aussi d’augmenter la dotation de base aux laboratoires.

En quatrième lieu, d’autres augmentations, pour un montant total de 81 millions d’euros, doivent permettre d’investir dans les grands équipements scientifiques et de renforcer le lien entre la science et la société via la diffusion de la culture scientifique et le transfert des résultats de la recherche vers le monde des entreprises.

Enfin, les 650 créations de postes prévues par la LPR viendront soutenir l’attractivité de la recherche, avec 179 nouvelles chaires de professeur junior, 377 contrats doctoraux supplémentaires et 94 nouveaux postes de titulaires dans les organismes de recherche.

Vous le voyez, le budget pour 2023 traduit mon engagement de réinvestir dans la recherche en poursuivant la dynamique de la LPR, sans rien enlever à notre ambition commune.

Deuxième volet de mon intervention : une nouvelle augmentation des moyens de l’enseignement supérieur, de près de 700 millions d’euros, permettra d’améliorer la réussite étudiante et de renforcer la visibilité pluriannuelle des universités sur leurs moyens.

Nous pouvons distinguer, au sein de ce deuxième volet, trois grands blocs de mesures. Premier bloc : 143 millions d’euros sont alloués au titre de la LPR aux établissements d’enseignement supérieur, car c’est aussi par eux que la recherche est mise en œuvre. Le deuxième bloc renvoie aux 364 millions d’euros prévus pour la compensation de la revalorisation du point d’indice.

Quant au troisième bloc, sur lequel je vais dire quelques mots plus précis, il regroupe environ 160 millions d’euros de mesures nouvelles en faveur de l’enseignement supérieur.

Ces mesures visent tout d’abord à prendre en compte l’évolution de la démographie étudiante via le « soclage » pérenne d’environ 50 millions d’euros de crédits auparavant ouverts au titre du plan de relance et destinés à la création de places de master et de licence ; s’y ajoutent 8 millions d’euros de crédits complémentaires visant à maintenir le taux d’encadrement relevant du programme 150 à la rentrée universitaire 2023-2024.

Ce troisième bloc comprend ensuite le financement d’annonces ou de réformes déjà engagées : 13 millions d’euros pour couvrir les coûts d’accueil des stagiaires dans les instituts nationaux supérieurs du professorat et de l’éducation (Inspé), 8 millions d’euros pour créer des places dans les formations en santé à la rentrée 2023-2024.

Les crédits de ce troisième bloc permettront également la conclusion dès 2023 des nouveaux contrats d’objectifs, de moyens et de performance, dont l’objet est de donner aux établissements une meilleure visibilité pluriannuelle sur les ressources dont ils disposent, pour un montant de 35 millions d’euros s’ajoutant à l’enveloppe du dialogue stratégique de gestion – c’était l’une de mes priorités.

Toujours au sein de ce troisième bloc, 30 millions d’euros supplémentaires sont alloués en crédits de paiement à la mise en œuvre de la programmation immobilière du ministère – il s’agit notamment de garantir la montée en charge des projets prévus dans les contrats de plan État-région (CPER). L’augmentation est de près de 400 millions d’euros en autorisations d’engagement, notamment dans la perspective du lancement du campus hospitalo-universitaire Grand Paris-Nord de Saint-Ouen.

Parmi ces mesures figure enfin, à hauteur de 17 millions d’euros, la compensation en base aux établissements de mesures transversales de gestion des ressources humaines mises en œuvre en 2022, telle la revalorisation des rémunérations de certains personnels administratifs, sociaux et de santé.

Le budget pour 2023 permet par ailleurs – c’est le troisième volet de mon propos – d’améliorer les conditions de vie étudiante et de continuer à lutter contre la précarité étudiante. Le texte qui vous est soumis est la traduction budgétaire des mesures majeures annoncées avant l’été par le Gouvernement en faveur du pouvoir d’achat de tous nos étudiants.

Je citerai les deux principales, qui auront à elles seules un impact de 135 millions d’euros l’an prochain : la revalorisation de 4 % des bourses sur critères sociaux, dont le coût en année pleine sera de 85 millions d’euros ; le maintien du repas à un euro, qui représente pour les Crous un engagement de 50 millions d’euros intégralement compensé par l’État.

Le PLF pour 2023 permet également de renforcer l’accompagnement des étudiants, de mieux protéger leur santé, de mieux prendre en compte leurs difficultés.

Je pense au doublement des moyens consacrés à l’accompagnement des étudiants en situation de handicap, soit une hausse de 7,5 millions d’euros, conformément aux conclusions du comité interministériel au handicap de février 2022.

Je pense également au doublement des moyens alloués à la lutte contre les violences sexistes et sexuelles dans les établissements d’enseignement supérieur : +1,8 million d’euros. Nous amplifierons ainsi notre soutien aux projets de prévention des associations et des établissements. Nous mobiliserons des moyens humains destinés à épauler chaque établissement dans la structuration de mesures de prévention et de réponse aux violences sexistes et sexuelles.

Je citerai également la réforme des services de santé universitaire, pour laquelle les crédits augmentent de 8,2 millions d’euros. Ces services devront s’ouvrir à l’ensemble des étudiants et se rendre plus accessibles.

Les crédits ouverts l’an dernier pour financer l’ouverture de 80 postes de psychologues et la distribution gratuite de protections périodiques sont par ailleurs pérennisés.

Je pense, enfin, à l’augmentation de 3 millions d’euros de l’enveloppe dévolue au financement de la mobilité étudiante.

Le PLF pour 2023 traduit aussi le soutien apporté au réseau des œuvres universitaires, avec la compensation de la hausse du point d’indice, mais surtout la revalorisation salariale des agents du réseau, à hauteur de 12 millions d’euros supplémentaires, et l’accompagnement, à hauteur de 4 millions d’euros supplémentaires, de la mise en œuvre des objectifs de la loi Égalim en faveur d’une alimentation équilibrée. Nous renforçons de surcroît les services sociaux des Crous : 40 travailleurs sociaux supplémentaires seront recrutés en 2023.

Avant de conclure, je voudrais rappeler qu’au budget du ministère s’ajoutent les crédits de France 2030.

La recherche et l’innovation sont à la source des nouvelles découvertes, qu’il s’agisse des fonds marins ou de l’espace, de nouveaux médicaments ou du nucléaire, d’agriculture ou de mobilités propres. Le déploiement de ces innovations nécessitera de former de nouveaux talents, en s’appuyant, entre autres, sur l’excellence de nos sites universitaires et de tous nos établissements. Ainsi, plus de 13 milliards d’euros seront investis au bénéfice des acteurs de la recherche, de l’enseignement supérieur et de l’innovation sur la période 2020-2027, qui verra l’ouverture de places supplémentaires pour des formations nouvelles.

Le budget de la Mires est un budget important. Malgré les contraintes actuelles, il est, cette année encore, en augmentation. Cela traduit l’engagement renouvelé du Gouvernement en faveur de l’enseignement supérieur et de la recherche, en faveur de nos étudiantes et de nos étudiants, donc en faveur de notre avenir. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Mmes Laure Darcos et Élisabeth Doineau et MM. Laurent Lafon et Stéphane Piednoir applaudissent également.)

Mme la présidente. Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur », figurant à l’état B.

Je vous rappelle que la durée maximale prévisionnelle d’examen a été fixée à deux heures trente. Il nous reste donc cinquante minutes pour examiner trente-sept amendements. Si nous n’y parvenons pas, la suite du débat sera reportée à la fin de l’examen des autres missions.

M. Jean-François Rapin, rapporteur spécial. Donc samedi…

M. Jacques Grosperrin. C’est dit !

Recherche et enseignement supérieur
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Après l’article 44 sexies (début)

ÉTAT B

(En euros)

Mission / Programme

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

Recherche et enseignement supérieur

31 212 650 565

30 806 185 909

Formations supérieures et recherche universitaire

15 205 807 643

14 907 800 643

 Dont titre 2

422 468 964

422 468 964

Vie étudiante

3 136 414 445

3 130 191 945

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

8 070 807 751

7 833 527 751

Recherche spatiale

1 865 683 825

1 865 683 825

Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables

1 675 829 878

1 800 829 878

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

681 599 180

693 736 238

Recherche duale (civile et militaire)

150 019 167

150 019 167

Enseignement supérieur et recherche agricoles

426 488 676

424 396 462

Dont titre 2

251 492 994

251 492 994

Mme la présidente. Je suis saisie de dix-huit amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° II-591, présenté par M. Chantrel, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitaire

dont titre 2

1 000 000 000

 

1 000 000 000

 

Vie étudiante

 

 

 

 

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

 

1 000 000 000

 

1 000 000 000

Recherche spatiale

 

 

 

 

Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables

 

 

 

 

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

 

 

 

 

Recherche duale (civile et militaire)

 

 

 

 

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

1 000 000 000

1 000 000 000

1 000 000 000

1 000 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Yan Chantrel.

M. Yan Chantrel. Cet amendement vise à souligner l’urgence qu’il y a à mettre en œuvre un grand plan immobilier au sein de nos universités, qui se trouvent dans un état de délabrement avancé. Il est indispensable de garantir aux étudiants un environnement sain et de qualité, élément essentiel à leur réussite comme à l’atteinte des objectifs scientifiques.

Dans son dernier rapport, daté d’octobre 2022, la Cour des comptes souligne d’ailleurs qu’il est urgent d’adapter notre patrimoine immobilier aux besoins d’enseignement et à la démographie étudiante. Si des programmes exceptionnels ont bien été mis en œuvre à la faveur des crises, ils ne répondent pas au besoin global de financement de l’immobilier universitaire, ce financement demeurant profondément défaillant.

Le ministère chargé de l’enseignement supérieur estime à 7 milliards d’euros le coût des réhabilitations en attente, dont les trois quarts seraient liées aux exigences de la transition énergétique et environnementale. Pour sa part, France Universités retient un montant de 15 milliards d’euros pour une rénovation totale.

Lors de l’examen du dernier projet de loi de programmation de la recherche, nous avions regretté qu’aucun budget ne soit programmé en matière d’immobilier universitaire. Afin de compenser ce manque, nous proposons d’allouer au traitement de cette question 1 milliard d’euros supplémentaires chaque année jusqu’en 2030 – l’adoption de cet amendement serait à cet égard une première étape : un premier milliard dès 2023.

Mme la présidente. L’amendement n° II-512, présenté par M. Breuiller, Mme de Marco, MM. Dossus, Benarroche, Dantec, Fernique, Gontard et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitaire

dont titre 2

1 000 000 000

 

1 000 000 000

 

Vie étudiante

 

 

 

 

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

 

 

 

 

Recherche spatiale

 

1 000 000 000

 

1 000 000 000

Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables

 

 

 

 

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

 

 

 

 

Recherche duale (civile et militaire)

 

 

 

 

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

1 000 000 000

1 000 000 000

1 000 000 000

1 000 000 000

SOLDE

0

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La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Cet amendement est quasi identique au précédent ; ce milliard est important !

Comme l’a dit Jacques Grosperrin, le décret tertiaire prévoit une réduction de 40 % de la consommation d’énergie d’ici 2030, c’est-à-dire en sept ans. Le ministère évalue le coût des rénovations nécessaires à 7 milliards d’euros ; il faut donc prévoir 1 milliard d’euros sans attendre, dès 2023 – le calcul me paraît cohérent.

Mme la présidente. L’amendement n° II-593, présenté par M. Chantrel, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitaire

dont titre 2

500 000 000

 

500 000 000

 

Vie étudiante

 

 

 

 

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

 

500 000 000

 

500 000 000

Recherche spatiale

 

 

 

 

Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables

 

 

 

 

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

 

 

 

 

Recherche duale (civile et militaire)

 

 

 

 

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

500 000 000

500 000 000

500 000 000

500 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Yan Chantrel.

M. Yan Chantrel. Cet amendement a pour objet de souligner la nécessité d’un grand plan immobilier en faveur des infrastructures sportives des universités.

L’Observatoire national de l’activité physique et de la sédentarité (Onaps) et le ministère des sports viennent de présenter, en septembre, un bilan inquiétant concernant la pratique d’activités physiques et sportives à l’université. Hors filière Staps (sciences et techniques des activités physiques et sportives), seul un étudiant sur cinq fait du sport dans le cadre d’une pratique universitaire. Un étudiant passe, en moyenne, huit heures par jour devant son écran, constat terrible quand on sait que rester assis sept heures par jour augmente de manière significative le risque de développer une maladie cardiovasculaire.

L’entrée dans l’enseignement supérieur est ainsi un point de rupture dans la pratique sportive des jeunes. Et la crise sanitaire n’a rien arrangé : sédentarité, cours à distance, augmentation du temps passé devant les écrans. Cette baisse de l’activité physique représente un facteur de risque important pour la santé mentale, physique et sociale des étudiants.

Il est donc urgent de renforcer la place du sport à l’université, y compris dans le cursus universitaire de chaque étudiant. Mais cela n’est réalisable qu’à la condition que chaque université soit dotée d’infrastructures sportives de qualité et accessibles à tous.

C’est pourquoi nous réclamons un grand plan d’urgence pour les infrastructures sportives universitaires. Nous proposons à cet effet un premier amendement visant à abonder de 500 millions d’euros les crédits immobiliers des universités. Il est nécessaire que ce plan fasse l’objet d’une réflexion associant l’ensemble des parties prenantes – État, collectivités territoriales, tiers – et qu’il soit élaboré selon une programmation pluriannuelle.

Mme la présidente. L’amendement n° II-444, présenté par Mme de Marco, MM. Dossus, Breuiller, Benarroche, Dantec, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitaire

dont titre 2

 

 

 

 

Vie étudiante

400 000 000

 

400 000 000

 

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

 

 

 

 

Recherche spatiale

 

400 000 000

 

400 000 000

Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables

 

 

 

 

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

 

 

 

 

Recherche duale (civile et militaire)

 

 

 

 

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

400 000 000

400 000 000

400 000 000

400 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Monique de Marco.

Mme Monique de Marco. Lors de la crise sanitaire, le Gouvernement a annoncé l’extension des repas à un euro à tous les étudiants, boursiers et non boursiers.

Malheureusement, cette mesure a été supprimée à la rentrée universitaire 2021, le repas à un euro étant de nouveau réservé aux seuls étudiants boursiers.

Pourtant, la précarité étudiante ne cesse de progresser dans notre pays. D’après la Fédération des associations générales étudiantes (Fage), 62 % des étudiants ont des difficultés pour se nourrir correctement.

De nombreuses associations organisent régulièrement des distributions alimentaires ; le Gouvernement a d’ailleurs débloqué 10 millions d’euros pour soutenir leur action. C’est bien, mais nous attendons des réponses plus structurelles : notre jeunesse doit avoir la possibilité de manger correctement.

Mme la présidente. L’amendement n° II-445, présenté par Mme de Marco, MM. Dossus, Breuiller, Benarroche, Dantec, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitaire

dont titre 2

 

 

 

 

Vie étudiante

398 190 000

 

398 190 000

 

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

 

 

 

 

Recherche spatiale

 

398 190 000

 

398 190 000

Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables

 

 

 

 

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

 

 

 

 

Recherche duale (civile et militaire)

 

 

 

 

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

398 190 000

398 190 000

398 190 000

398 190 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Monique de Marco.

Mme Monique de Marco. Selon l’Observatoire de la vie étudiante, 20 % des étudiants vivent en dessous du seuil de pauvreté et 46 % d’entre eux exercent au moins une activité salariée durant leurs études.

Or, plus le volume horaire de l’emploi étudiant est important, plus les chances d’échec scolaire augmentent ; telles sont d’ailleurs les conclusions du rapport de la mission d’information sénatoriale sur les conditions de la vie étudiante.

Afin de sécuriser les revenus des étudiants les plus précaires et de garantir l’égalité des chances, je vous propose d’augmenter de 10 % le montant des bourses sur critères sociaux.

Mme la présidente. L’amendement n° II-452, présenté par Mme de Marco, MM. Dossus, Breuiller, Benarroche, Dantec, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitaire

dont titre 2

 

 

 

 

Vie étudiante

398 190 000

 

398 190 000

 

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

 

 

 

 

Recherche spatiale

 

398 190 000

 

398 190 000

Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables

 

 

 

 

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

 

 

 

 

Recherche duale (civile et militaire)

 

 

 

 

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

398 190 000

398 190 000

398 190 000

398 190 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Monique de Marco.

Mme Monique de Marco. La majorité des étudiants boursiers bénéficient des bourses sur critères sociaux dix mois par an et ne perçoivent plus rien en juillet et en août. Pourtant, vous le savez, le loyer et les charges de la vie courante ne s’arrêtent pas en juin.

Selon une enquête menée par Diplomeo, 70 % des étudiants travaillent en juillet et en août et 53 % d’entre eux sont obligés de travailler pour financer leurs études. En outre, ils sont de plus en plus nombreux à faire des stages ou à étudier durant la pause estivale : préparation de concours, rédaction de mémoires et séjours linguistiques ponctuent le quotidien de nos étudiants durant l’été, et toutes ces activités entraînent des charges substantielles.

Ainsi, cet amendement vise à permettre le versement des bourses douze mois par an à tous les étudiants boursiers. Cette mesure est loin d’être superflue, à l’heure où 20 % des étudiants français vivent en dessous du seuil de pauvreté.

Mme la présidente. L’amendement n° II-592, présenté par M. Chantrel, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitaire

dont titre 2

275 000 000

 

275 000 000

 

Vie étudiante

 

 

 

 

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

 

275 000 000

 

275 000 000

Recherche spatiale

 

 

 

 

Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables

 

 

 

 

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

 

 

 

 

Recherche duale (civile et militaire)

 

 

 

 

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

275 000 000

275 000 000

275 000 000

275 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Yan Chantrel.

M. Yan Chantrel. Cet amendement vise à financer le surcoût de l’énergie pour les universités, dans le contexte exceptionnel que nous connaissons.

L’actualité a montré que ce surcoût pourrait se traduire par la fermeture temporaire de certaines universités. Or il paraît inconcevable que la vie universitaire s’en trouve affectée et que ce coût soit indirectement supporté par les étudiants, qui se retrouveraient de nouveau en distanciel, chez eux, dans des logements que l’on sait précaires et avec des factures d’électricité qui explosent.

Ainsi, par cet amendement, nous demandons que l’État double la rallonge budgétaire destinée à couvrir les coûts de l’énergie dans nos universités en 2023. Nous proposons à cet effet d’abonder de 275 millions d’euros, en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, l’action n° 14, Immobilier, du programme 150.

Mme la présidente. L’amendement n° II-675, présenté par MM. Ouzoulias et Bacchi, Mme Brulin et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitaire

dont titre 2

185 000 000

185 000 000

Vie étudiante

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

185 000 000

185 000 000

Recherche spatiale

Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

Recherche duale (civile et militaire)

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

TOTAL

185 000 000

185 000 000

185 000 000

185 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Pierre Ouzoulias.

M. Pierre Ouzoulias. Cet amendement tend à couvrir le surcoût que représente pour les établissements la revalorisation du point d’indice, estimé à 185 millions d’euros et non compensé par l’État en 2022.

Mme la présidente. L’amendement n° II-519, présenté par M. Chantrel, Mmes S. Robert et M. Filleul, MM. Kanner, Antiste, Assouline, Lozach et Magner, Mme Monier, M. Stanzione, Mme Van Heghe et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitaire

dont titre 2

 

 

 

 

Vie étudiante

150 000 000

 

150 000 000

 

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

 

150 000 000

 

150 000 000

Recherche spatiale

 

 

 

 

Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables

 

 

 

 

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

 

 

 

 

Recherche duale (civile et militaire)

 

 

 

 

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

150 000 000

150 000 000

150 000 000

150 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Yan Chantrel.

M. Yan Chantrel. Cet amendement vise à étendre le ticket-restaurant universitaire (ticket U) à un euro, aujourd’hui réservé aux boursiers, à l’ensemble des étudiants.

Mise en œuvre entre janvier et septembre 2021, l’extension des repas à un euro aux étudiants non boursiers a permis de multiplier par cinq le nombre de repas distribués chaque semaine : près de 178 000 étudiants non boursiers ont pu bénéficier d’au moins un repas pendant cette période, contre moins de 50 000 habituellement. Les chiffres sont éloquents, alors même qu’à cette période les étudiants n’étaient pas de retour à temps plein sur les campus.

En pleine période inflationniste et alors que sévit la crise énergétique, il est essentiel de rétablir cette aide quotidienne à destination de tous les étudiants précaires qui ne bénéficient ni d’une bourse, ni d’un job, ni d’une aide de leur famille.

Les boursiers représentent à ce jour un quart des étudiants ; nous proposons donc de quadrupler les crédits prévus par le Gouvernement pour financer le ticket U à un euro, en portant l’enveloppe actuelle, via un abondement de 150 millions d’euros, à 200 millions d’euros.

Mme la présidente. L’amendement n° II-520, présenté par M. Chantrel, Mme S. Robert, MM. Kanner, Antiste, Assouline, Lozach et Magner, Mme Monier, M. Stanzione, Mme Van Heghe et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitaire

dont titre 2

 

 

 

 

Vie étudiante

100 000 000

 

100 000 000

 

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

 

100 000 000

 

100 000 000

Recherche spatiale

 

 

 

 

Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables

 

 

 

 

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

 

 

 

 

Recherche duale (civile et militaire)

 

 

 

 

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

100 000 000

100 000 000

100 000 000

100 000 000

SOLDE

0

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La parole est à M. Yan Chantrel.

M. Yan Chantrel. Il s’agit d’accroître les moyens des services de santé universitaire (SSU). Ce faisant, nous entendons améliorer l’accès aux soins des étudiants, dont la santé physique et mentale a été gravement affectée par la pandémie et par la hausse du coût de la vie, en déployant une offre complète de prévention et de soins sur l’ensemble du territoire.

Il est devenu urgent de faire de la santé étudiante une priorité.

Selon la Fage, 40 % des étudiants ont renoncé à se soigner depuis le début de la crise du covid-19, en mars 2020. Parmi eux, 43 % l’ont fait pour des raisons financières, notamment à cause de la forte hausse des frais de complémentaires santé – +32 % au cours de l’année écoulée – et du manque de médecins dans les services de santé universitaire.

Voilà pourquoi nous proposons, en faveur de la santé étudiante, un financement supplémentaire de 100 millions d’euros.

Mme la présidente. L’amendement n° II-469, présenté par Mme de Marco, MM. Dossus, Breuiller, Benarroche, Dantec, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitaire

dont titre 2

 

 

 

 

Vie étudiante

143 272 800

 

143 272 800

 

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

 

 

 

 

Recherche spatiale

 

143 272 800

 

143 272 800

Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables

 

 

 

 

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

 

 

 

 

Recherche duale (civile et militaire)

 

 

 

 

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

143 272 800

143 272 800

143 272 800

143 272 800

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Monique de Marco.

Mme Monique de Marco. Dans notre pays, plus de 990 000 étudiants renoncent à des soins par manque de moyens. En effet, si la sécurité sociale rembourse environ 70 % des dépenses de santé, les 30 % restants représentent une somme significative dans le budget d’un étudiant.

Cette réalité est d’autant plus forte que 36 % des étudiants ne sont pas couverts par une complémentaire santé, principalement par manque de moyens.

Selon l’Union nationale des étudiants de France (Unef), le coût de la santé atteint 134 euros par an dans le budget d’un étudiant sans complémentaire. De surcroît, ce coût augmente chaque année avec l’inflation, contrairement aux aides perçues par les étudiants.

Aussi cet amendement vise-t-il à octroyer chaque année un « chèque santé » de 134 euros aux étudiants qui ne disposent pas d’une complémentaire santé.

Mme la présidente. L’amendement n° II-687, présenté par Mme N. Delattre et MM. Fialaire et Artano, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitaire

dont titre 2

90 000 000

 

90 000 000

 

Vie étudiante

 

 

 

 

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

 

 

 

 

Recherche spatiale

 

90 000 000

 

90 000 000

Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables

 

 

 

 

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

 

 

 

 

Recherche duale (civile et militaire)

 

 

 

 

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

90 000 000

90 000 000

90 000 000

90 000 000

SOLDE

0

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La parole est à M. Bernard Fialaire.

M. Bernard Fialaire. Cet amendement tend à relever le montant de l’enveloppe accordée aux établissements d’enseignement supérieur privés d’intérêt général (Eespig), fixé à 94,9 millions d’euros dans la mission « Recherche et enseignement supérieur ».

Ces établissements participent en effet pleinement à la mission de service public de l’enseignement supérieur : ils contribuent notamment à absorber la hausse des effectifs étudiants. Ainsi, pour l’année 2021-2022, le nombre d’élèves scolarisés en leur sein a augmenté de 10 %, ce qui représente au total près de 160 000 étudiants supplémentaires.

L’augmentation des effectifs étudiants en formation initiale dans ces établissements ne s’est pas accompagnée de l’effort budgétaire correspondant. Rapportées au nombre d’étudiants, les subventions publiques octroyées par l’État aux établissements privés labellisés d’intérêt général ont donc baissé drastiquement : elles ont été divisées par deux en dix ans et ne représentent plus que 596 euros par étudiant, soit un vingtième du coût moyen de la formation.

En conséquence, notre amendement tend à porter la subvention versée par l’État à ces établissements à son niveau d’il y a dix ans, correspondant à 10 % du coût moyen de la formation par étudiant.

Mme la présidente. L’amendement n° II-392 rectifié, présenté par MM. Piednoir, Belin et Burgoa, Mme Deroche, MM. Perrin, Rietmann, Brisson et Le Gleut, Mmes Goy-Chavent, Gruny, L. Darcos et Gosselin, MM. Bonne et Somon, Mme Belrhiti, M. Savary, Mmes de Cidrac, F. Gerbaud et Dumont et MM. D. Laurent et Klinger, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitaire

dont titre 2

25 000 000

 

25 000 000

 

Vie étudiante

 

 

 

 

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

 

 

 

 

Recherche spatiale

 

25 000 000

 

25 000 000

Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables

 

 

 

 

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

 

 

 

 

Recherche duale (civile et militaire)

 

 

 

 

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

25 000 000

25 000 000

25 000 000

25 000 000

SOLDE

0

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La parole est à M. Stéphane Piednoir.

M. Stéphane Piednoir. À l’instar de M. Fialaire, je propose de réévaluer la dotation accordée aux établissements d’enseignement supérieur privés d’intérêt général.

Mes chers collègues, les mots ont un sens et ce label signifie quelque chose : les établissements privés dont il s’agit assument une véritable mission de service public. Ils contribuent à la diversification des formations proposées dans les territoires et accueillent un grand nombre d’étudiants ; ils ont d’ailleurs vocation à absorber l’afflux d’inscriptions dans l’enseignement supérieur. Pourtant, leur dotation n’est pas réévaluée.

Madame la ministre, vous le savez, ces établissements réclament depuis des années que leur subvention soit portée à hauteur de 10 % de ce que coûte un étudiant dans l’enseignement public ; selon les dernières évaluations, ce total s’établit à 10 600 euros, mais, à ce jour, la dotation des Eespig stagne à un peu moins de 600 euros par étudiant.

Voilà quatre ans que je suis rapporteur pour avis des crédits de cette mission et j’ai pu constater que cette difficulté était signalée régulièrement. À mon sens, la situation actuelle n’est pas acceptable.

Mme la présidente. L’amendement n° II-217 rectifié, présenté par Mmes Doineau, Guidez et Herzog, MM. Guerriau, Bonhomme et P. Joly, Mme Loisier, MM. Joyandet, J.P. Vogel, Levi et Bonneau, Mme Vermeillet, MM. Perrin, Rietmann et P. Martin, Mme Bonfanti-Dossat, M. Menonville, Mmes Demas, Ract-Madoux, Perrot et Gruny, M. Decool, Mme Dindar, MM. Détraigne et Kern, Mme F. Gerbaud, MM. Le Nay et Houpert, Mmes Malet et Sollogoub, MM. Moga et Chauvet, Mmes de La Provôté et Jacquemet, MM. Gremillet et Duffourg et Mme Gacquerre, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitaire

dont titre 2

 

 

 

 

Vie étudiante

 

 

 

 

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

20 000 000

 

20 000 000

 

Recherche spatiale

 

20 000 000

 

20 000 000

Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables

 

 

 

 

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

 

 

 

 

Recherche duale (civile et militaire)

 

 

 

 

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

20 000 000

20 000 000

20 000 000

20 000 000

SOLDE

0

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La parole est à Mme Élisabeth Doineau.

Mme Élisabeth Doineau. Mes chers collègues, comme chaque année, je vous soumets un amendement sur la maladie de Lyme ; beaucoup d’entre vous sont déjà sensibilisés à cette cause.

Chaque année, on s’interroge sur les moyens consacrés à la recherche contre cette maladie, qui peut se révéler très invalidante ; j’espère que l’effort de sensibilisation auquel je m’astreins finira par porter ses fruits !

Par cet amendement, nous visons deux objectifs.

Premièrement, il s’agit de doter l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) de 20 millions d’euros supplémentaires – c’est beaucoup moins que ce que je demandais les années passées, monsieur le rapporteur spécial ! – afin de développer des projets de recherche sur les formes sévères et persistantes de la maladie de Lyme et, surtout, sur les co-infections.

Deuxièmement, il s’agit d’obtenir une clarification à la suite de la publication du rapport fait par notre collègue député Mickaël Bouloux au nom de la commission des finances de l’Assemblée nationale sur la mission « Recherche et enseignement supérieur » du PLF pour 2023.

En effet, aux pages 21 et 22 de ce document, on apprend qu’un budget de 20 millions d’euros a été évoqué par un groupe de travail qui se penche sur ces questions depuis 2020 : « Les discussions du groupe de travail se poursuivent pour en finaliser le contour, identifier les canaux de financement existants qui pourraient d’ores et déjà être mobilisés par les différents partenaires, déterminer la gouvernance du projet et enfin mobiliser les équipes sur le sujet. »

En gras, dans le même rapport, on trouve aussi cette information assez inattendue : « L’Inserm a indiqué au rapporteur spécial qu’à ce stade des financements supplémentaires inscrits en loi de finances n’étaient pas nécessaires ». Or, selon les associations de patients, rien n’indique qu’un programme concret de recherche soit en train d’émerger et que des financements aient été trouvés.

Cette situation nous interpelle : nous sommes très nombreux à nous mobiliser contre la maladie de Lyme. Chaque année nous demandons où sont les crédits de recherche fléchés vers la lutte contre cette maladie et chaque année, dans le magma budgétaire qui nous est présenté, nous échouons à les trouver…

Mme la présidente. Veuillez conclure, ma chère collègue.

Mme Élisabeth Doineau. Bref, nous attendons des budgets précis.

Mme la présidente. L’amendement n° II-457, présenté par Mme de Marco, MM. Dossus, Breuiller, Benarroche, Dantec, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitaire

dont titre 2

 

 

 

 

Vie étudiante

 

 

 

 

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

20 000 000

 

20 000 000

 

Recherche spatiale

 

20 000 000

 

20 000 000

Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables

 

 

 

 

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

 

 

 

 

Recherche duale (civile et militaire)

 

 

 

 

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

20 000 000

20 000 000

20 000 000

20 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Monique de Marco.

Mme Monique de Marco. Pour faire face aux conséquences du dérèglement climatique, il est plus que jamais nécessaire d’investir dans la recherche : cette dernière est essentielle à la transition énergétique, agricole et industrielle que nous menons.

Cet amendement vise à renforcer les moyens alloués à la recherche dans le domaine environnemental : je vous propose de réorienter 20 millions d’euros du programme « Recherche spatiale » vers ce secteur déterminant pour notre avenir. L’importance de la recherche spatiale n’est plus à démontrer, mais son budget augmente déjà de 223 millions d’euros.

Mme la présidente. L’amendement n° II-470, présenté par Mme de Marco, MM. Dossus, Breuiller, Benarroche, Dantec, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitaire

dont titre 2

 

 

 

 

Vie étudiante

 

 

 

 

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

 

 

 

 

Recherche spatiale

 

6 000 000

 

6 000 000

Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables

6 000 000

 

6 000 000

 

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

 

 

 

 

Recherche duale (civile et militaire)

 

 

 

 

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

6 000 000

6 000 000

6 000 000

6 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Monique de Marco.

Mme Monique de Marco. Le dernier rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) est clair : nous sommes à la croisée des chemins.

Les décisions que nous prendrons et les investissements que nous réaliserons peuvent nous garantir un avenir vivable.

Pourtant, alors même que le Gouvernement défend les mérites de l’innovation et qu’il augmente le budget de la recherche spatiale de 223 millions d’euros, les moyens alloués à la recherche dans le domaine des transports, de la construction et de l’aménagement baissent de 0,5 % en 2023.

La construction et les transports représentent respectivement 20 % et 31 % des émissions de gaz à effet de serre : ces deux secteurs ne sauraient être négligés.

Voilà pourquoi nous proposons d’attribuer 6 millions d’euros à ces domaines de recherche.

Mme la présidente. L’amendement n° II-365 rectifié bis, présenté par M. Savary, Mmes Imbert et Férat, MM. Détraigne et Belin, Mme Belrhiti, MM. Bonne, Bouchet, Brisson et Burgoa, Mmes Di Folco, Dumas, Dumont, Estrosi Sassone et F. Gerbaud, M. Gremillet, Mme Lassarade, MM. D. Laurent, Lefèvre, Mouiller et Perrin, Mme Puissat, MM. Rietmann et Somon, Mme Canayer, M. Charon, Mmes Demas et Gruny et M. Sol, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitaire

dont titre 2

 

 

 

 

Vie étudiante

 

 

 

 

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

5 000 000

 

5 000 000

 

Recherche spatiale

 

5 000 000

 

5 000 000

Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables

 

 

 

 

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

 

 

 

 

Recherche duale (civile et militaire)

 

 

 

 

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

5 000 000

5 000 000

5 000 000

5 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. René-Paul Savary.

M. René-Paul Savary. Par cet amendement, nous demandons 5 millions d’euros de crédits de recherche supplémentaires en faveur de la médecine intégrative. Je suis sûr que le docteur Rapin sera sensible à cette question, comme vous tous, mes chers collègues ! (Sourires.)

Qu’est-ce que la médecine intégrative ? Il s’agit d’une médecine complémentaire qui, au-delà de la médecine traditionnelle, considère le malade dans son entièreté et le traite dans son environnement. Elle permet ainsi d’éviter les effets délétères souvent engendrés par les traitements lourds.

Il est essentiel de remettre le patient au centre du dispositif de soins et de prendre toutes les mesures nécessaires pour qu’il guérisse plus rapidement et puisse ainsi reprendre sa vie sociale et professionnelle.

Cette question a été évoquée plus tôt dans la journée, les personnes qui restent assises plus de sept heures par jour – nous nous sommes sentis un peu concernés… (Sourires. – Mme Élisabeth Doineau sesclaffe.) – s’exposent, du fait de leur sédentarité, à des risques cardiovasculaires. Grâce à la médecine intégrative, on pourrait assurer une meilleure prévention de ces risques : nous serions moins nombreux à être touchés par ce type de complications…

M. Pierre Ouzoulias. Alors, il faut aller à la buvette ? (Sourires.)

M. Julien Bargeton. … ou se lever pour défendre un amendement ?

M. René-Paul Savary. Je suis sûr que, sensibles à de tels arguments, vous voterez cet amendement, mes chers collègues. (Nouveaux sourires. – Mme Élisabeth Doineau applaudit.)

Mme la présidente. L’amendement n° II-455, présenté par Mme de Marco, MM. Dossus, Breuiller, Benarroche, Dantec, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitaire

dont titre 2

 

 

 

 

Vie étudiante

3 000 000

 

3 000 000

 

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

 

 

 

 

Recherche spatiale

 

3 000 000

 

3 000 000

Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables

 

 

 

 

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

 

 

 

 

Recherche duale (civile et militaire)

 

 

 

 

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

3 000 000

3 000 000

3 000 000

3 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Monique de Marco.

Mme Monique de Marco. Alors que 33 % des étudiants renoncent à des soins par manque de moyens, il est nécessaire de renforcer l’offre des services de santé universitaire et interuniversitaire.

Cet amendement vise à augmenter de 3 millions d’euros les moyens attribués à ces services afin qu’ils puissent remplir leur mission de service public. Éléments clés du parcours de santé des étudiants, ils sont essentiels en matière de prévention, de contraception, de suivi vaccinal et d’accompagnement psychologique ; mais, pour l’heure, la hausse des moyens qui leur sont attribués reste largement insuffisante.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos II-591, II-512, II-593, II-444, II-445, II-452, II-592, II-675, II-519, II-520, II-469, II-687, II-392 rectifié et II-455 ?

Mme Vanina Paoli-Gagin, rapporteur spécial. Sur le fond, je reconnais bien sûr la nécessité d’un plan de rénovation globale des bâtiments universitaires. Toutefois, un tel chantier a été évalué à 7 milliards d’euros et je ne pense pas que cette question puisse être traitée au détour d’un amendement.

Avis défavorable, donc, sur l’amendement n° II-591 ; avis défavorable également, pour les mêmes raisons, sur l’amendement n° II-512.

La santé physique et psychique des étudiants passe bel et bien par le développement du sport à l’université. Beaucoup d’actions ont déjà été déployées en ce sens et 5,3 millions d’euros sont inscrits à ce titre dans le présent PLF. Les étudiants boursiers pourront aussi solliciter l’attribution d’un Pass’Sport à hauteur de 50 euros par an. J’émets, partant, un avis défavorable sur l’amendement n° II-593.

Au total, 280 000 étudiants non boursiers précaires ont bénéficié du repas à un euro au cours de la dernière année scolaire. Ce PLF consacre par ailleurs 51 millions d’euros aux repas à un euro. Si l’amendement n° II-444 était adopté, les étudiants les plus précaires seraient beaucoup moins bien ciblés : avis défavorable.

Le montant des bourses sur critères sociaux ayant déjà été revalorisé de 40 % à la rentrée 2022, j’émets également un avis défavorable sur l’amendement n° II-445.

Quant à l’amendement n° II-452, il tend à augmenter de 10 % le montant des bourses sur critères sociaux : avis défavorable.

Monsieur Chantrel, le second projet de loi de finances rectificative pour 2022, que nous venons de voter, mobilise déjà 275 millions d’euros de crédits pour aider les établissements de recherche et les universités à passer le cap de la crise énergétique. L’amendement n° II-592 nous semble donc satisfait et je vous prie de bien vouloir le retirer.

De même, je demande le retrait de l’amendement n° II-675, pour deux raisons. Premièrement, il a pour objet le budget des universités pour 2022 : sa place eût été en PLFR. Deuxièmement, les universités ont accepté de financer sur leurs fonds propres la hausse du point d’indice en échange d’une aide leur permettant de faire face aux surcoûts énergétiques.

L’amendement n° II-519 tend à généraliser l’accès au repas à un euro dans les restaurants universitaires à tous les étudiants précaires – 280 000 étudiants non boursiers précaires ont déjà bénéficié du repas à un euro. Pour les raisons précédemment indiquées, l’avis de la commission est défavorable sur cet amendement.

Je partage la préoccupation des auteurs de l’amendement n° II-520 : la santé des étudiants est une question cruciale dans le contexte actuel. Je suis donc favorable à la mise en place d’un accompagnement plus personnalisé. En revanche, je doute du caractère opérationnel de l’amendement : une hausse des crédits de 20 millions d’euros ne paraît pas une réponse efficace. En outre, le plafond d’emploi restant inchangé, il ne sera pas possible de recruter des personnels supplémentaires : demande de retrait.

Certaines régions ont d’ores et déjà mis en place des dispositifs identiques à ce qui est suggéré par les auteurs de l’amendement n° II-469. De surcroît, le dispositif Santé psy étudiant, lancé en 2021, a été pérennisé en 2023 : il s’agit donc, me semble-t-il, d’un amendement d’appel ; j’en demande le retrait.

L’adoption de l’amendement n° II-687 reviendrait à doubler les moyens accordés aux établissements d’enseignement supérieur privés d’intérêt général, ce qui ne semble pas nécessaire : en moyenne, les financements publics ne couvrent que 5 % du budget des établissements concernés. Nonobstant les efforts que nous devons faire en faveur des Eespig, je demande le retrait de cet amendement.

Je sollicite également, au nom de la commission des finances, le retrait de l’amendement n° II-392 rectifié – à titre personnel, en revanche, j’aurais émis un avis de sagesse.

Enfin, bien que je comprenne tout à fait les préoccupations des auteurs de l’amendement n° II-455, je doute du caractère opérationnel des dispositions proposées : demande de retrait.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos II-217 rectifié, II-457, II-470 et II-365 rectifié bis ?

M. Jean-François Rapin, rapporteur spécial. Madame Doineau, avec l’amendement n° II-217 rectifié, je vous soupçonne de vouloir toucher mon cœur de médecin. (Sourires.) Vous revenez chaque année sur ce sujet, avec une obstination bienveillante ; mais, à mon sens, il s’agit encore et toujours d’un amendement d’appel.

Vous avez cité un rapport ; j’en mentionnerai un autre, celui que notre collègue députée Mme Louwagie a présenté en 2021. Vous déplorez le flou qui entoure les crédits de recherche relatifs à cette maladie. Toutefois, le rapport en question précise que quarante-cinq projets sont en cours.

Plus globalement, la Fédération française contre les maladies vectorielles à tiques nous indique que ce budget de recherche représente à peu près 1 million d’euros annuels. À cet égard, le rapport de Mme Louwagie contient un tableau très instructif, récapitulant les crédits alloués à ces travaux de recherche depuis 2016.

Aujourd’hui, vous proposez 20 millions d’euros supplémentaires ; mon cœur de médecin pourrait vous dire oui, mais le cœur de la commission vous demande un retrait, ma chère collègue. (Sourires.)

M. Pierre Ouzoulias. La commission n’a pas de cœur ! (Nouveaux sourires.)

M. Jean-François Rapin, rapporteur spécial. Madame de Marco, on ne peut que reconnaître la transversalité des enjeux liés à l’environnement ; mais vous ne fléchez pas les crédits demandés, ou vous les fléchez mal…

M. Jean-François Rapin, rapporteur spécial. Vous ne précisez pas l’opérateur qui pourrait conduire de telles actions.

De surcroît – ce point nous opposera toujours, comme je l’ai constaté dans mes échanges avec la commission de la culture –, il me semble un peu rosse de ponctionner ainsi les crédits de la recherche spatiale…

Vous nous avez mis en garde, en discussion générale, contre la contemplation des étoiles. Mais ce n’est pas si mal de regarder les étoiles ! Allez voir le film Dont look up : vous y apprendrez qu’à ne pas regarder les étoiles on échoue à sauver la Terre. (Sourires.)

Pour ces raisons, je suis défavorable à l’amendement n° II-457. De même, dans la mesure où les organismes de recherche décident eux-mêmes de leurs thématiques de travail, je sollicite le retrait de l’amendement n° II-470, dont les dispositions semblent inopérantes.

Monsieur Savary, je vous parlerai de médecin à médecin. Vous faites preuve vous aussi d’obstination : voilà deux ans, vous aviez déjà déposé un amendement similaire – nous n’avons pas examiné les crédits des missions l’an dernier.

Ce sujet est très intéressant ; mais, selon moi, il ne relève pas tant de la recherche, via d’éventuels programmes de l’Inserm, que de la médecine opérationnelle, et notamment des centres hospitaliers universitaires (CHU).

Je me tourne vers les membres de la commission des affaires sociales : peut-être est-il possible d’explorer cette piste. Pour l’heure, je sollicite le retrait de l’amendement n° II-365 rectifié bis ; à défaut, j’émettrais un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Sylvie Retailleau, ministre. J’émets globalement les mêmes avis que Mme et M. les rapporteurs spéciaux ; je tiens simplement à apporter quelques précisions sur certains amendements.

Plusieurs amendements ont pour objet la rénovation des bâtiments universitaires. Pour ce qui les concerne, j’émets à mon tour un avis défavorable.

En la matière, le Gouvernement est pleinement mobilisé : en témoignent plusieurs dispositifs que vous connaissez – plan de relance, CPER, appels à projets Résilience.

J’ajoute qu’un grand plan de rénovation de l’ensemble des bâtiments de l’État est à l’étude : il fait l’objet de réflexions interministérielles, en particulier avec le ministère de la transition écologique. En la matière, nous devrons prioriser les besoins tout en combinant divers leviers d’action.

Bien sûr, le soutien de l’État est indispensable ; mais il faudra aussi recourir à l’emprunt ou à des montages innovants, comme le tiers financement, et mobiliser les capacités financières des établissements lorsque ces derniers ont déjà prévu une telle mobilisation dans leurs fonds de roulement – en effet, un certain nombre de projets sont déjà engagés.

Ces différents dispositifs vous seront présentés prochainement ; ils forment un ensemble et ne sauraient être remplacés par une simple dotation d’investissement de l’État, fût-elle de 1 milliard d’euros par an. Nos établissements ont besoin d’une visibilité financière à long terme pour lancer leurs études et leurs chantiers, ce qu’une allocation annuelle ne permettrait pas.

Madame de Marco, vous l’avez souligné avec raison en présentant l’amendement n° II-444, il faut absolument garantir aux étudiants les conditions de leur réussite.

Plusieurs orateurs l’ont indiqué, le repas à un euro n’est pas destiné aux seuls étudiants boursiers : depuis septembre dernier, tous les étudiants précaires peuvent y avoir accès en s’adressant aux Crous – il est important de le rappeler.

L’État compense intégralement les dépenses des Crous afférentes à ce dispositif. Pour les autres étudiants, le tarif est de 3,30 euros par repas.

Vous proposez de pérenniser le repas à un euro pour tous les étudiants, sans aucune condition de ressources ; tel n’est pas le choix du Gouvernement. Pour notre part, nous souhaitons promouvoir le principe de solidarité, qui est à la base du modèle social français et que nous devons inculquer à tous nos jeunes. Au nom de la solidarité, valeur cardinale de notre société républicaine, nous entendons réserver cette aide aux jeunes qui en ont le plus besoin. Pour cette raison, madame de Marco, j’émets un avis défavorable sur l’amendement n° II-444.

Monsieur Piednoir, monsieur Fialaire, j’en viens à vos amendements nos II-392 rectifié et II-687.

S’ils sont agréés par l’État et participent à l’exercice d’une mission d’intérêt général, les Eespig diffèrent fondamentalement, par leur modèle économique, des établissements publics d’enseignement supérieur.

Bien sûr, ce statut recouvre des situations variables, mais certains de ces établissements perçoivent des frais d’inscription très élevés alors que ceux des universités sont gelés depuis quatre années consécutives. (M. Jacques Grosperrin le concède.)

Par ailleurs – Mme la rapporteure spéciale vient de le souligner –, les subventions de l’État ne représentent que 5 % des dépenses de fonctionnement de ces établissements. À l’inverse, la subvention pour charges de service public représente environ 80 % du budget de fonctionnement des universités : vous constatez combien les modèles sont différents.

En outre, je relève à mon tour que les subventions à l’enseignement supérieur privé ont augmenté de 16 millions d’euros depuis 2017. Certes, la subvention de l’État par étudiant a baissé depuis les années 2010, mais elle s’est stabilisée depuis 2018 et ce mouvement est poursuivi dans le budget pour 2023 : nous avons octroyé aux Eespig une augmentation de leur dotation de 1 million d’euros au titre de l’évolution de la démographie étudiante de ces établissements, afin, précisément, que la subvention par étudiant ne baisse pas. Avis défavorable, donc, sur ces deux amendements.

Madame Doineau, vous me demandez des éclaircissements quant aux moyens additionnels envisagés pour le financement des recherches sur la maladie de Lyme.

Vous citez le rapport du député Mickaël Bouloux ; il y est en effet indiqué que, selon l’Inserm, l’inscription au PLF de nouveaux financements ne sont pas nécessaires à ce stade. En effet, divers financements sont déjà fléchés vers la recherche sur la maladie de Lyme via l’ANR, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) ou la direction générale de l’offre de soins (DGOS).

En parallèle, des financements sont octroyés à l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae), au CNRS et à l’Inserm pour étudier ce genre de maladies infectieuses. S’y ajoutent des crédits des ministères de la santé et de la transition écologique.

Dans son rapport d’information sur le financement et l’efficacité de la lutte contre la maladie de Lyme, Mme la députée Véronique Louwagie, considérant que ces crédits sont insuffisants et trop morcelés, recommande un soutien de 5 millions d’euros par an – ces éléments sont sans doute à l’origine des précisions contenues dans le rapport de M. le député Bouloux.

Dans ce cadre et à la demande du ministère de la santé et de la prévention, l’Alliance nationale pour les sciences de la vie et de la santé (Aviesan) a préparé un programme de recherche global reposant sur la mise en place d’une cohorte, d’une biobanque et d’une tiquothèque.

Le coût dudit programme a fait l’objet d’une première évaluation : il est estimé à 20 millions d’euros sur cinq ans, dont 4 millions d’euros la première année. Ce projet pourra bénéficier d’un soutien financier dans le cadre du plan Innovation Santé 2030, qui est doté de 7 milliards d’euros, dont 100 millions d’euros alloués aux cohortes.

Non seulement le sujet est identifié, mais il apparaît finançable à l’aide des outils actuels et, de surcroît, il est bel et bien à l’étude, en particulier au sein de l’Inserm.

Enfin, par l’amendement n° II-470, Mme de Marco propose d’allouer 6 millions d’euros à deux établissements financés sur les crédits de l’action « Recherche dans le domaine des transports, de la construction et de l’aménagement », à savoir l’université Gustave-Eiffel et le Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB), afin de compenser les effets de l’inflation.

Ces deux établissements sont déjà accompagnés face aux surcoûts de l’énergie, qui représentent l’essentiel des impacts de l’inflation. Actuellement, leur situation financière est jugée soutenable. D’ailleurs, l’université Gustave-Eiffel bénéficie également des crédits de la LPR et des financements qu’il reçoit de ses deux ministères de tutelle. Pour ces raisons, nous émettons, comme M. le rapporteur spécial, un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Thomas Dossus, pour explication de vote.

M. Thomas Dossus. Madame la ministre, j’ai bien noté vos explications quant aux trajectoires de rénovation thermique des bâtiments. « Des réflexions sont en cours », « nous vous présenterons des pistes prochainement » : cela fait des mois que l’on entend ce genre de discours !

M. Grosperrin a donné les ordres de grandeur : les passoires thermiques représentent un quart du patrimoine immobilier de l’État, ce qui signifie plusieurs millions de mètres carrés à isoler. Et vous n’avez toujours pas défini de trajectoire financière crédible pour assurer ces rénovations ?

À l’évidence, vous ne mesurez ni l’ampleur de la tâche ni l’urgence qu’il y a à agir : une telle réponse n’est vraiment pas à la hauteur.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-591.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-512.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-593.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-444.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-445.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-452.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-592.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-675.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-519.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-520.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-469.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-687.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. Stéphane Piednoir. Je retire l’amendement n° II-392 rectifié, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° II-392 rectifié est retiré.

Mme Élisabeth Doineau. Le mien est retiré également !

Mme la présidente. L’amendement n° II-217 rectifié est retiré.

Je mets aux voix l’amendement n° II-457.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-470.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. René-Paul Savary. Je retire mon amendement, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° II-365 rectifié bis est retiré.

Je mets aux voix l’amendement n° II-455.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, il nous reste un quart d’heure pour examiner dix-neuf amendements.

Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° II-674, présenté par MM. Ouzoulias et Bacchi, Mme Brulin et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

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Formations supérieures et recherche universitaire

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100 000 000

 

100 000 000

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100 000 000

 

100 000 000

 

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

 

 

 

 

Recherche spatiale

 

 

 

 

Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables

 

 

 

 

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

 

 

 

 

Recherche duale (civile et militaire)

 

 

 

 

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

100 000 000

100 000 000

100 000 000

100 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Pierre Ouzoulias.

M. Pierre Ouzoulias. Il s’agit, par cet amendement, d’abonder de 100 millions d’euros le budget du Cnous pour lui permettre de financer un certain nombre de ses politiques, en matière de restauration, par exemple, ou de soutien aux étudiants précaires, y compris non boursiers. La situation matérielle de ces étudiants exige qu’ils soient aidés par les Crous, comme vous l’avez très justement rappelé, madame la ministre.

Mme la présidente. L’amendement n° II-395, présenté par Mme S. Robert, MM. Chantrel, Kanner, Antiste, Assouline, Lozach et Magner, Mme Monier, M. Stanzione, Mme Van Heghe et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitaire

dont titre 2

 

 

 

 

Vie étudiante

10 000 000

 

10 000 000

 

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

 

 

 

 

Recherche spatiale

 

10 000 000

 

10 000 000

Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables

 

 

 

 

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

 

 

 

 

Recherche duale (civile et militaire)

 

 

 

 

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

10 000 000

10 000 000

10 000 000

10 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Sylvie Robert.

Mme Sylvie Robert. Cet amendement a pour objet d’octroyer 10 millions d’euros supplémentaires au Cnous pour compenser la hausse des charges – je pense notamment à l’augmentation du prix des denrées alimentaires, et en particulier des fluides.

Il s’agit de donner au Cnous les moyens de se conformer aux obligations fixées dans la loi Égalim, qui prévoit que les repas servis dans la restauration collective soient composés de 50 % de produits de qualité et durables, dont 20 % au moins d’origine biologique.

L’évaluation de ces surcoûts étant difficile, nous demandons que le budget du Cnous soit abondé de 10 millions d’euros.

Mme la présidente. L’amendement n° II-623, présenté par M. Lafon, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitaire

dont titre 2

 

 

 

 

Vie étudiante

5 000 000

 

5 000 000

 

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

 

 

 

 

Recherche spatiale

 

 

 

 

Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables

 

 

 

 

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

 

 

 

 

Recherche duale (civile et militaire)

 

5 000 000

 

5 000 000

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

5 000 000

5 000 000

5 000 000

5 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Laurent Lafon.

M. Laurent Lafon. Cet amendement a également pour objet de lutter contre la précarité alimentaire qui touche les étudiants, et plus spécifiquement ceux qui vivent dans les « zones blanches » du territoire, non couvertes par un restaurant universitaire.

Il s’agit, en abondant de 5 millions d’euros les crédits du Cnous et des Crous, de leur permettre de conclure des conventions avec des organismes publics agréés dans les territoires où un restaurant universitaire ne peut être implanté.

Cette politique de conventionnement existant déjà, l’idée est d’en accélérer le déploiement, conformément à l’une des recommandations de la mission d’information sur les conditions de la vie étudiante en France, votée, comme toutes les préconisations du rapport, à l’unanimité.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Vanina Paoli-Gagin, rapporteur spécial. Il est nécessaire d’être attentif à ce que les Crous ne pâtissent pas trop de la hausse des prix des denrées alimentaires, mais les montants proposés par les auteurs des amendements nos II-674 et II-395 ne nous semblent pas judicieux ; des ajustements sont nécessaires. Je demande donc le retrait de ces amendements.

Sur l’amendement n° II-623, qui a pour objet d’autoriser les structures locales à accéder aux centrales d’achat des Crous, je souhaite connaître l’avis du Gouvernement. Du reste, nous aurons sans doute un débat à ce sujet un peu plus tard dans la soirée, lors de l’examen de l’amendement n° II-728 du Gouvernement, sur lequel, je l’annonce, nous émettrons un avis de sagesse.

Sans préjuger du vote sur cet amendement du Gouvernement, le montant demandé pourrait permettre aux Crous d’absorber la charge de gestion.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Sylvie Retailleau, ministre. Je demande le retrait de ces trois amendements, mais nous reviendrons sur les dispositions de l’amendement n° II-623 en formulant une proposition.

Mme la présidente. Quel est donc l’avis de la commission sur l’amendement n° II-623 ?

Mme Vanina Paoli-Gagin, rapporteur spécial. Défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-674.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-395.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-623.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° II-59 rectifié ter est présenté par M. Mouiller, Mme Deroche, MM. Lefèvre et Mandelli, Mmes L. Darcos et Di Folco, M. Cambon, Mmes Dumont et F. Gerbaud, MM. Bouchet et Burgoa, Mme Chauvin, M. Longeot, Mmes Lassarade et Thomas, M. J.P. Vogel, Mme Gosselin, M. Frassa, Mme Belrhiti, MM. Hugonet et Belin, Mmes Berthet et Micouleau, MM. Courtial, Brisson et Sautarel, Mme Puissat, M. Milon, Mmes Malet, Gruny et M. Mercier, MM. Perrin et Rietmann, Mme Lopez, MM. Gremillet, D. Laurent, Meignen, Bonhomme, Bonne et B. Fournier, Mme Schalck, MM. Piednoir et Charon, Mmes Canayer, Borchio Fontimp, Dumas et de Cidrac, MM. Bouloux, C. Vial et Pointereau, Mme Boulay-Espéronnier et M. Favreau.

L’amendement n° II-427 rectifié est présenté par MM. Corbisez, Artano, Bilhac et Cabanel, Mmes M. Carrère et N. Delattre, MM. Fialaire, Gold et Guérini, Mme Pantel et MM. Requier et Roux.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitaire

dont titre 2

90 000 000

90 000 000

Vie étudiante

90 000 000

90 000 000

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

Recherche spatiale

Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

Recherche duale (civile et militaire)

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

TOTAL

90 000 000

90 000 000

90 000 000

90 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Max Brisson, pour présenter l’amendement n° II-59 rectifié ter.

M. Max Brisson. La question de l’accessibilité des universités, des grandes écoles et des lycées constitue un frein majeur pour les jeunes en situation de handicap qui souhaitent poursuivre des études supérieures.

Les besoins non couverts sont nombreux, qu’il s’agisse des actes de la vie quotidienne ou des aides au travail personnel ou à l’apprentissage.

L’accessibilité de l’enseignement supérieur suppose aussi l’accès au logement ; la crise du logement étudiant concerne aussi les étudiants en situation de handicap. Sur les 60 000 logements promis, seuls 36 000 ont été construits.

Pour toutes ces raisons, nous proposons, par cet amendement, d’abonder de 90 millions d’euros l’action n° 02 du programme 231.

Mme la présidente. La parole est M. Bernard Fialaire, pour présenter l’amendement n° II-427 rectifié.

M. Bernard Fialaire. Il est défendu !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Vanina Paoli-Gagin, rapporteur spécial. Demande de retrait.

Cette demande est louable, mais le statut d’« étudiant en situation de handicap » accorde la priorité sur les logements étudiants disponibles dans toute l’offre gérée par les Crous, qui compte 9 500 places.

À l’heure actuelle, ces places restent insuffisamment demandées par les étudiants en situation de handicap : il y va non pas d’un manque de moyens, mais plutôt de la bonne utilisation de ceux qui sont déjà mobilisés.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Sylvie Retailleau, ministre. Le nombre d’étudiants en situation de handicap dans l’enseignement supérieur public a beaucoup progressé, de 8 000, en 2005, à 51 000, en 2021.

Pour cette raison, le Gouvernement a annoncé le doublement, de 7,5 millions à 15 millions d’euros, des moyens consacrés à l’accessibilité pédagogique des enseignements. Ces moyens seront pérennisés et financeront des actions concrètes.

En ce qui concerne le logement, le parc des Crous compte aujourd’hui 9 500 places pour les personnes à mobilité réduite ; ce nombre est suffisant pour accueillir les quelque 6 000 étudiants qui sont recensés comme étant dans cette situation.

Nous sommes malgré tout confrontés à un problème de sous-occupation de ces places : trop d’étudiants en situation de handicap ne trouvent pas à se loger alors même que ces places existent. C’est pourquoi le Cnous vient de mettre en ligne, au mois d’octobre, une cartographie de cette offre de logements adaptés et adaptables.

Ces efforts vont être poursuivis, en lien avec mon collègue Olivier Klein, ministre du logement, dans le cadre de la concertation sur la vie étudiante lancée à l’échelon territorial. J’ajoute que l’université inclusive et l’accessibilité du bâti feront partie des huit domaines prioritaires de la prochaine Conférence nationale du handicap, qui se tiendra au printemps prochain et qui sera l’occasion de mettre en œuvre de nouvelles actions concrètes.

Vous le voyez, le Gouvernement est pleinement engagé sur la voie d’un renforcement de l’accompagnement des étudiants en situation de handicap.

Je vous demande donc, messieurs les sénateurs, de bien vouloir retirer vos amendements ; à défaut, l’avis du Gouvernement serait défavorable.

M. Max Brisson. Retiré !

M. Bernard Fialaire. Retiré également !

Mme la présidente. Les amendements identiques nos II-59 rectifié ter et II-427 rectifié sont retirés.

Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° II-64 rectifié ter est présenté par M. Mouiller, Mme Deroche, MM. Lefèvre et Mandelli, Mmes L. Darcos et Di Folco, M. Cambon, Mmes Dumont et F. Gerbaud, MM. Bouchet et Burgoa, Mme Chauvin, M. Longeot, Mmes Lassarade et Thomas, M. J.P. Vogel, Mme Gosselin, M. Frassa, Mme Belrhiti, MM. Hugonet et Belin, Mmes Berthet et Micouleau, MM. Courtial, Brisson et Sautarel, Mme Puissat, M. Milon, Mmes Malet, Gruny et M. Mercier, MM. Perrin et Rietmann, Mme Lopez, MM. Gremillet, D. Laurent, Bonhomme, Bonne, Meignen et B. Fournier, Mme Schalck, MM. Piednoir, Segouin et Charon, Mmes Canayer, Borchio Fontimp, Dumas et de Cidrac, MM. Bouloux, Favreau et Pointereau et Mme Boulay-Espéronnier.

L’amendement n° II-456 rectifié est présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Fialaire, Gold et Guérini, Mme Pantel et MM. Requier et Roux.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitaire

dont titre 2

 

 

 

 

Vie étudiante

 

 

 

 

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

10 000 000

 

10 000 000

 

Recherche spatiale

 

10 000 000

 

10 000 000

Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables

 

 

 

 

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

 

 

 

 

Recherche duale (civile et militaire)

 

 

 

 

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

10 000 000

10 000 000

10 000 000

10 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Max Brisson, pour présenter l’amendement n° II-64 rectifié ter.

M. Max Brisson. Cet amendement, dont l’initiative revient à Philippe Mouiller, vise à allouer des fonds supplémentaires à la recherche sur le handicap.

L’Institut pour la recherche en santé publique (Iresp) et la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) ont identifié plusieurs domaines de recherche dans lesquels les travaux restent rares ou incomplets : l’évaluation, la tarification, la connaissance des publics, les alternatives à l’établissement.

Il vous est donc proposé, mes chers collègues, d’augmenter de 10 millions d’euros les crédits de l’action n° 15, Recherches scientifiques et technologiques en sciences de la vie et de la santé, du programme 172.

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Fialaire, pour présenter l’amendement n° II-456 rectifié.

M. Bernard Fialaire. Il s’agit d’encourager la recherche scientifique sur le handicap, dans laquelle sont notamment investis l’Institut pour la recherche en santé publique et la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie.

Le handicap est progressivement devenu un enjeu majeur des politiques publiques. Cependant, les retards accumulés nécessitent une mobilisation importante en faveur de l’autonomie des personnes concernées par le handicap.

Dans un contexte de longévité croissante de la population, il est fondamental de soutenir la recherche dans des disciplines transversales, l’enjeu étant d’améliorer la prise en charge du handicap et de faciliter son intégration dans le quotidien de nos sociétés.

Il faut promouvoir la recherche scientifique dans le domaine de l’autonomie en s’écartant des angles le plus souvent considérés, à savoir la sociologie et la psychologie.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Rapin, rapporteur spécial. Dans une société inclusive comme la nôtre, la préoccupation exprimée par les auteurs de ces amendements ne saurait être négligée.

Le montant demandé est substantiel, alors même que les structures qui s’occupent de ce genre de choses sont déjà relativement nombreuses.

Aussi la commission demande-t-elle le retrait de ces deux amendements ; à titre personnel, je m’abstiendrai.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Sylvie Retailleau, ministre. Depuis 2021, le soutien à la recherche dans les domaines du handicap et du vieillissement a été renforcé via plusieurs programmes dédiés.

Le premier est le programme prioritaire de recherche « Maintien en autonomie », doté de 30 millions d’euros dans le cadre du plan France 2030 et dont le pilotage est confié au CNRS. Un premier appel à projets, doté de 7 millions d’euros, était structuré autour de deux axes : définir la notion d’autonomie ; concevoir des politiques publiques en la matière. Un deuxième appel, dont le budget est de 19 millions d’euros, vient d’être publié sur deux thématiques : analyser les expériences de l’autonomisation et de la réduction de l’autonomie ; étudier la conception, la réception et les usages des innovations.

Deuxième programme : le programme « Autonomie : personnes âgées et personnes en situation de handicap » de l’Institut pour la recherche en santé publique, financé par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie à hauteur de plus de 4 millions d’euros ; dans ce cadre, quatre nouveaux appels à projets ont été lancés. (Marques dimpatience sur les travées du groupe Les Républicains.)

Je citerai un troisième programme, qui s’inscrit dans le cadre de la stratégie nationale pour l’autisme au sein des troubles du neuro-développement. Cette stratégie se décline en plusieurs engagements, dont le premier consiste à remettre la science au cœur de la politique publique de l’autisme en dotant la France d’une recherche d’excellence. À cet effet, quatre grandes mesures sont prévues et financées : création d’un groupement d’intérêt scientifique et de postes de chefs de clinique ; développement d’un « living lab » et d’un « learning lab » ; lancement d’appels à projets de recherche ; financement d’une grande étude de cohorte.

Mesdames, messieurs les sénateurs, vous le voyez, le Gouvernement soutient avec conviction la recherche sur le handicap et les acteurs qui la conduisent.

Ces projets de recherche doivent être menés dans le cadre d’une concertation permettant de définir des actions pour et avec un comité scientifique. (Les marques dimpatience se répètent sur les mêmes travées, ainsi que sur des travées des groupes UC et SER.)

Il n’est donc pas nécessaire à ce jour, compte tenu de ce que contient déjà le plan France 2030, de prévoir des mesures budgétaires supplémentaires. Le Gouvernement demande donc le retrait de ces amendements ; à défaut, l’avis serait défavorable.

M. Max Brisson. Je retire mon amendement, madame la présidente !

M. Bernard Fialaire. Et moi le mien !

Mme la présidente. Les amendements identiques nos II-64 rectifié ter et II-456 rectifié sont retirés.

Madame la ministre, mes chers collègues, il est minuit et quart…

Plusieurs sénateurs du groupe Les Républicains. Et voilà !

Mme la présidente. Je déduis du rythme d’avancée de nos travaux que vous souhaitez revenir plus tard dans la semaine…

Nous ne pouvons pas poursuivre cette séance indéfiniment ; je vous propose de la prolonger jusqu’à minuit et demi afin d’achever l’examen de cette mission.

Il n’y a pas d’observation ?…

Il en est ainsi décidé.

Je suis donc saisie d’un amendement n° II-655, présenté par MM. Canévet, Delcros, P. Martin et Bonnecarrère, Mme Sollogoub, MM. Chauvet et Duffourg, Mme Gatel, M. Kern, Mme Guidez et MM. Folliot, Cadic et Détraigne, et ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitaire

dont titre 2

Vie étudiante

 

 

 

 

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

10 000 000

10 000 000

Recherche spatiale

 

 

 

 

Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

Recherche duale (civile et militaire)

10 000 000

10 000 000

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

TOTAL

10 000 000

10 000 000

10 000 000

10 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Michel Canévet.

M. Michel Canévet. La mission d’information sénatoriale sur l’exploration, la protection et l’exploitation des fonds marins a mis en évidence la nécessité pour la France d’élaborer une stratégie en la matière.

Tel est l’objet de cet amendement, car les conditions financières actuelles ne permettent pas de mettre en œuvre ce programme.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Rapin, rapporteur spécial. Demande de retrait.

La Flotte océanographique française, qui fait partie des très grandes infrastructures de recherche (TGIR), est déjà dotée de 70 millions d’euros pour 2023 ; c’est déjà bien, même si ce n’est jamais assez…

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Sylvie Retailleau, ministre. Même avis.

Mme la présidente. L’amendement n° II-655 est retiré.

L’amendement n° II-521, présenté par M. Dossus, Mme de Marco, MM. Breuiller, Parigi, Gontard, Benarroche, Dantec, Fernique et Labbé, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitaire

dont titre 2

3 600 000

 

3 600 000

 

Vie étudiante

 

 

 

 

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

 

 

 

 

Recherche spatiale

 

 

 

 

Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables

 

 

 

 

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

 

 

 

 

Recherche duale (civile et militaire)

 

3 600 000

 

3 600 000

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

3 600 000

3 600 000

3 600 000

3 600 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Il s’agit d’accroître les moyens dévolus à la lutte contre les violences sexistes et sexuelles dans les universités et dans l’enseignement supérieur.

Une enquête publiée hier dans Libération montrait que les jeunes chercheuses sont les premières victimes des comportements abusifs.

Dans ce projet de loi de finances, les crédits fléchés vers la lutte contre les violences sexistes et sexuelles s’élèvent à 1,8 million d’euros seulement ; c’est trop peu ! Nous proposons donc de doubler ce montant, pour le porter à 3,6 millions d’euros.

Vendredi dernier, je le rappelle, tous les groupes ont voté un amendement similaire dans le cadre du programme « Sport ». J’espère que ce soir encore notre hémicycle sera traversé par le consensus.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Vanina Paoli-Gagin, rapporteur spécial. Ce PLF prévoit déjà 10 millions d’euros supplémentaires destinés au développement des services de santé universitaire et à la lutte contre les violences sexistes et sexuelles. Il ne semble pas nécessaire d’y ajouter dès à présent des crédits.

Demande de retrait.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Sylvie Retailleau, ministre. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-521.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° II-699, présenté par MM. Fernique, Breuiller, Parigi, Benarroche, Dantec, Dossus, Gontard et Labbé, Mmes de Marco et Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitaire

dont titre 2

 

 

 

 

Vie étudiante

 

 

 

 

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

3 000 000

 

3 000 000

 

Recherche spatiale

 

3 000 000

 

3 000 000

Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables

 

 

 

 

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

 

 

 

 

Recherche duale (civile et militaire)

 

 

 

 

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

3 000 000

3 000 000

3 000 000

3 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Monique de Marco.

Mme Monique de Marco. Le présent amendement vise à renforcer le budget de l’Institut polaire français Paul-Émile-Victor afin de lui permettre de continuer à exercer ses missions en 2023 et, par là même, de garantir la présence française en Arctique et en Antarctique à court terme.

Madame la ministre, l’idéal serait que le Gouvernement lève le gage, afin que la somme que nous demandons ne soit pas prélevée sur le budget de la recherche spatiale.

Mme la présidente. L’amendement n° II-814, présenté par M. Rapin, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitaire

dont titre 2

 

 

 

 

Vie étudiante

 

 

 

 

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

3 000 000

 

3 000 000

 

Recherche spatiale

 

 

 

 

Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables

 

3 000 000

 

3 000 000

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

 

 

 

 

Recherche duale (civile et militaire)

 

 

 

 

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

3 000 000 

3 000 000 

 3 000 000

3 000 000 

SOLDE

0

0

La parole est à M. le rapporteur spécial, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n° II-699.

M. Jean-François Rapin, rapporteur spécial. Nous demandons 3 millions d’euros pour l’Ipev – c’est le montant qui, me semble-t-il, a été annoncé par Mme la ministre ; mais les crédits correspondants n’apparaissent pas dans le PLF. Je souhaite donc leur inscription dans cette mission.

Je demande le retrait de l’amendement n° II-699 au profit de celui de la commission, qui est gagé différemment.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Sylvie Retailleau, ministre. Madame la sénatrice, nous partageons votre préoccupation sur la situation de l’Ipev.

Nous avons annoncé et sommes en train de mettre en œuvre la notification à l’Ipev d’un abondement exceptionnel de 3 millions d’euros de crédits supplémentaires destinés à couvrir ses surcoûts énergétiques, mais aussi d’autres besoins ponctuels, liés notamment à la crise sanitaire. J’observe également que l’Ipev a bénéficié d’autres canaux de financement.

En tout état de cause, ces 3 millions d’euros sont d’ores et déjà prévus au titre de la compensation des surcoûts de l’énergie ; ils n’ont donc pas besoin d’être prélevés sur les crédits d’autres programmes de la mission.

Je dis un mot des créations de postes : 7 postes ont été ouverts cette année. Monsieur le rapporteur spécial, vous estimiez le besoin à 23 postes à l’horizon 2025. Le plafond d’emplois a été rehaussé de 5 ETP pour 2022 et, depuis 2021, 11 ETP supplémentaires ont été créés à l’Ipev : sur un effectif total de 53 ETP, cela représente une augmentation substantielle. De surcroît, il sera possible de soutenir de nouveau l’Institut dans le cadre de la LPR, qui prévoit un schéma d’emplois positif pour les prochains exercices budgétaires.

Nous sommes en train de travailler, en concertation avec l’Institut lui-même et en lien avec de grands organismes, à la réorganisation de l’Ipev, ce qui devrait permettre de régler le problème de ses surcoûts énergétiques tout en continuant d’envisager des créations de postes.

Avis défavorable sur ces deux amendements.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-699.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-814.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° II-502, présenté par Mmes Monier et S. Robert, M. Chantrel, Mme G. Jourda, MM. Kanner, Antiste, Assouline, Lozach, Magner et Stanzione, Mme Van Heghe et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitaire

dont titre 2

 

 

 

 

Vie étudiante

 

 

 

 

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

 

 

 

 

Recherche spatiale

 

2 988 063

 

2 988 063

Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables

 

 

 

 

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

 

 

 

 

Recherche duale (civile et militaire)

 

 

 

 

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

2 988 063

 

2 988 063

 

TOTAL

2 988 063

2 988 063

2 988 063

2 988 063

SOLDE

0

0

La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy.

M. Christian Redon-Sarrazy. Je présente cet amendement au nom de ma collègue Marie-Pierre Monier.

Les établissements d’enseignement supérieur agricole accueillent cette année plus de 19 000 étudiants, soit 2 000 de plus qu’en 2021-2022.

Le budget consacré aux bourses de ces étudiants, abondé cette année par le transfert de quelque 25 872 286 euros de crédits issus du programme 143, « Enseignement technique agricole », diminue nettement, de 149 212 euros, alors même que l’effectif est en hausse.

Le coût estimé pour le rattrapage de ce budget par rapport au PLF pour 2022, par équité avec les étudiants relevant du ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation (Mesri), dont le montant des bourses a été revalorisé de 4 %, est de 2 988 063 euros.

Il est donc proposé d’abonder d’autant l’action n° 01, Enseignement supérieur, du programme 142, « Enseignement supérieur et recherche agricoles », et de minorer de ce même montant l’action n° 05, Maîtrise des technologies orbitales et de l’innovation technologique, du programme 193 « Recherche spatiale ».

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Vanina Paoli-Gagin, rapporteur spécial. Je demande l’avis du Gouvernement.

Il serait en effet étrange, mon cher collègue, que les bourses sur critères sociaux des étudiants de l’enseignement supérieur agricole soient les seules à n’avoir pas été revalorisées de 4 %.

Madame la ministre, pouvez-vous nous confirmer qu’une telle revalorisation a bien été décidée y compris pour ces étudiants ?

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Sylvie Retailleau, ministre. Oui, je le confirme : le montant de ces bourses, comme de toutes les autres, a augmenté de 4 %.

Mme la présidente. Quel est donc l’avis de la commission ?

Mme Vanina Paoli-Gagin, rapporteur spécial. Demande de retrait.

Mme la présidente. Monsieur Redon-Sarrazy, l’amendement n° II-502 est-il maintenu ?

M. Christian Redon-Sarrazy. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° II-502 est retiré.

L’amendement n° II-383 rectifié, présenté par MM. Piednoir, Belin et Burgoa, Mme Deroche, MM. Perrin, Rietmann, Brisson et Le Gleut, Mmes Goy-Chavent, Garnier, Gruny, L. Darcos et Gosselin, MM. Bonne et Somon, Mme Belrhiti, M. Savary, Mmes de Cidrac, F. Gerbaud et Dumont et MM. D. Laurent et Klinger, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitaire

dont titre 2

 

 

 

 

Vie étudiante

1 100 000

 

1 100 000

 

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

 

 

 

 

Recherche spatiale

 

1 100 000

 

1 100 000

Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables

 

 

 

 

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

 

 

 

 

Recherche duale (civile et militaire)

 

 

 

 

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

1 100 000

1 100 000

1 100 000

1 100 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Stéphane Piednoir.

M. Stéphane Piednoir. Si vous me le permettez, madame la présidente, je présenterai d’un même mouvement cet amendement et les deux suivants, les amendements nos II-382 rectifié et II-384 rectifié.

Mme la présidente. J’appelle donc en discussion l’amendement n° II-382 rectifié, présenté par MM. Piednoir, Bascher, Belin et Burgoa, Mme Deroche, MM. Perrin, Rietmann, Brisson et Le Gleut, Mmes Goy-Chavent, Garnier, Gruny, L. Darcos et Gosselin, MM. Bonne et Somon, Mme Belrhiti, M. Savary, Mmes de Cidrac, F. Gerbaud et Dumont et MM. D. Laurent et Klinger, et ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitaire

dont titre 2

 

 

 

 

Vie étudiante

1 000 000

 

1 000 000

 

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

 

 

 

 

Recherche spatiale

 

1 000 000

 

1 000 000

Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables

 

 

 

 

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

 

 

 

 

Recherche duale (civile et militaire)

 

 

 

 

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

1 000 000

1 000 000

1 000 000

1 000 000

SOLDE

0

0

J’appelle également en discussion l’amendement n° II-384 rectifié, présenté par MM. Piednoir, Belin et Burgoa, Mme Deroche, MM. Perrin, Rietmann, Brisson et Le Gleut, Mmes Goy-Chavent, Garnier, Gruny, L. Darcos et Gosselin, M. Somon, Mme Belrhiti, M. Savary, Mmes de Cidrac, F. Gerbaud et Dumont et MM. D. Laurent et Klinger, et ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitaire

dont titre 2

 

 

 

 

Vie étudiante

1 000 000

 

1 000 000

 

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

 

 

 

 

Recherche spatiale

 

1 000 000

 

1 000 000

Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables

 

 

 

 

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

 

 

 

 

Recherche duale (civile et militaire)

 

 

 

 

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

1 000 000

1 000 000

1 000 000

1 000 000

SOLDE

0

0

Veuillez poursuivre, monsieur Piednoir.

M. Stéphane Piednoir. Il s’agit de rétablir une forme d’équité entre les étudiants de l’enseignement supérieur public et ceux des Eespig, dont il a déjà été question.

L’amendement n° II-383 rectifié tend à rendre les étudiants boursiers sur critères sociaux des Eespig éligibles à l’aide à la mobilité internationale, à laquelle jusqu’à présent ils ne peuvent prétendre.

L’amendement n° II-382 rectifié vise à étendre à l’ensemble des Eespig la faculté d’accueillir des étudiants boursiers sur critères sociaux : aussi surprenant que cela puisse paraître, en effet, certains de ces établissements ne sont pas habilités à recevoir de tels étudiants, ce qui constitue une véritable rupture d’égalité.

L’amendement n° II-384 rectifié, qui a trait à la politique des Eespig en matière d’inclusion, a pour objet d’inclure ces établissements dans le périmètre du plan « Pour une université inclusive », dont ils sont actuellement exclus.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Vanina Paoli-Gagin, rapporteur spécial. Pour ce qui est de l’amendement n° II-383 rectifié, j’en demande le retrait : les étudiants boursiers peuvent d’ores et déjà bénéficier de l’aide à la mobilité internationale, dont les mensualités s’élèvent à 400 euros, dès lors qu’ils sont inscrits dans des établissements d’enseignement supérieur reconnus par l’État, publics comme privés. En la matière, il n’y a pas lieu, nous semble-t-il, de mobiliser des crédits supplémentaires.

Même avis sur l’amendement n° II-382 rectifié, qui porte sur l’habilitation des Eespig à recevoir des étudiants boursiers : demande de retrait. Il s’agit, à mon sens, d’un amendement d’appel ; en témoigne le montant des mouvements de crédits demandés, 1 million d’euros.

Quant à l’amendement n° II-384 rectifié, j’en demande également le retrait. Le plan « Pour une université inclusive » est doté de 15 millions d’euros destinés aux établissements publics. En effet, mon cher collègue, il ne devrait pas concerner les établissements privés ; mais l’adoption de votre proposition contribuerait à aggraver encore la dispersion de ces crédits entre les établissements. Quant à la somme demandée, 1 million d’euros, elle me fait penser, derechef, qu’il s’agit davantage d’un appel que d’une réelle adaptation des moyens financiers aux enjeux.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Sylvie Retailleau, ministre. Le Gouvernement demande le retrait des amendements nos II-383 rectifié et II-382 rectifié.

Sur l’amendement n° II-384 rectifié, j’émets un avis de sagesse ; nous y travaillerons.

M. Laurent Lafon. Ah ! Nous voterons donc l’amendement.

Mme la présidente. Madame la ministre, acceptez-vous de lever le gage sur l’amendement n° II-384 rectifié ?

Mme Sylvie Retailleau, ministre. Non, madame la présidente. Nous y travaillerons, comme je l’ai dit.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-383 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-382 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-384 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° II-503, présenté par Mmes Monier et S. Robert, M. Chantrel, Mme G. Jourda, MM. Kanner, Antiste, Assouline, Lozach, Magner et Stanzione, Mme Van Heghe et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitaire

dont titre 2

 

 

 

 

Vie étudiante

 

 

 

 

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

 

 

 

 

Recherche spatiale

 

220 821

 

220 821

Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables

 

 

 

 

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

 

 

 

 

Recherche duale (civile et militaire)

 

 

 

 

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

220 821

 

220 821

 

TOTAL

220 821

220 821

220 821

220 821

SOLDE

0

0

La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy.

M. Christian Redon-Sarrazy. Le budget alloué à la prévention et à la santé des étudiants de l’enseignement supérieur agricole, inscrit au programme 142, n’a pas évolué depuis quatre ans.

Le financement affiché par étudiant est toujours de 25,25 euros, mais sur la base d’un effectif théorique de 10 000 étudiants, alors que l’on compte désormais 19 000 étudiants dans l’enseignement supérieur agricole. Rapporté aux effectifs réels de la filière, le financement tombe donc à 13,63 euros par étudiant. Aussi faut-il procéder à un rattrapage, dont le coût est estimé à 220 821 euros.

Il est donc proposé d’abonder de ce montant l’action n° 01, Enseignement supérieur, du programme 142 et de minorer du même montant l’action n° 05, Maîtrise des technologies orbitales et de l’innovation technologique, du programme 193, « Recherche spatiale ».

Mme la présidente. L’amendement n° II-596 rectifié bis, présenté par Mme Billon, M. Henno, Mme Loisier, M. Laugier, Mmes de La Provôté et Vérien, MM. Canévet, Détraigne et Longeot, Mme Férat, MM. Kern et Duffourg et Mmes Saint-Pé et Jacquemet, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitaire

dont titre 2

 

220 821

 

220 821

Vie étudiante

 

 

 

 

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

 

 

 

 

Recherche spatiale

 

 

 

 

Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables

 

 

 

 

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

 

 

 

 

Recherche duale (civile et militaire)

 

 

 

 

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

220 821

 

220 821

 

TOTAL

220 821

220 821

220 821

220 821

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Annick Billon.

Mme Annick Billon. Au gage près, mon amendement est identique au précédent ; il est défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Vanina Paoli-Gagin, rapporteur spécial. Avis favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Sylvie Retailleau, ministre. Demande de retrait : ces amendements sont satisfaits.

Si vous le souhaitez, mesdames, messieurs les sénateurs, je peux vous donner lecture des arguments qui m’ont été communiqués par le ministère de l’agriculture. (Sourires.)

M. Jean-François Rapin, rapporteur spécial. Votons pour, au cas où !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-503.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, l’amendement n° II-596 rectifié bis n’a plus d’objet.

Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur », figurant à l’état B.

Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits, modifiés.

(Les crédits sont adoptés.)

Mme la présidente. J’appelle en discussion les amendements tendant à insérer un article additionnel après l’article 44 sexies, qui sont rattachés pour leur examen aux crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur ».

État B
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Après l’article 44 sexies (interruption de la discussion)

Après l’article 44 sexies

Mme la présidente. L’amendement n° II-647 n’est pas soutenu.

L’amendement n° II-728, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Après l’article 44 sexies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le quatrième alinéa de l’article L. 822-1 du code de l’éducation, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le centre national des œuvres universitaires et scolaires peut exercer les missions d’une centrale d’achat au sens de l’article L. 2113-2 du code de la commande publique, pour acquérir, à destination de l’État, des collectivités territoriales ou des établissements publics, des denrées alimentaires et d’autres biens nécessaires au développement d’une offre de restauration bénéficiant au moins en partie à des étudiants. »

II. – En conséquence, faire précéder cet article d’une division additionnelle ainsi rédigée :

Recherche et enseignement supérieur

La parole est à Mme la ministre.

Mme Sylvie Retailleau, ministre. La crise du covid-19 a rappelé combien les collectivités territoriales étaient des acteurs essentiels, aux côtés des Crous et du Cnous, lorsqu’il s’agit de soutenir tous les étudiants. Je tiens donc à saluer leur engagement et les investissements qu’elles réalisent en la matière.

L’accès de nos étudiants à une offre de restauration de qualité est une préoccupation majeure que nous partageons tous ici. Comme vous le savez, le réseau des œuvres universitaires et scolaires met à leur disposition un service de restauration sur la plupart des sites universitaires.

Pour autant, certains sites délocalisés ou isolés peuvent plus difficilement faire l’objet d’une construction en dur ou d’un service propre de restauration dédié. Aussi avons-nous renforcé de 33 %, pour l’an prochain, les moyens des Crous, qui pourront donc pallier ce manque en multipliant le nombre de conventions.

À ce jour, plus de 185 conventions ont été conclues sur l’ensemble du territoire. Dans quelques lieux, néanmoins, le réseau des Crous commence à être confronté, en dépit de certaines perspectives, au manque d’acteurs susceptibles de cocontracter. Il nous faut donc mobiliser d’autres leviers ; tel est l’objet de cet amendement que nous avons travaillé ensemble.

Il s’agit d’ouvrir la centrale d’achats des Crous aux collectivités ou aux opérateurs publics qui le souhaitent, afin de leur permettre de développer une offre de restauration au bénéfice – non nécessairement exclusif – des étudiants, et ce à des tarifs adaptés.

En plus d’améliorer le service rendu aux étudiants, cette disposition permettrait tant au réseau des Crous qu’aux cocontractants de réaliser des économies d’échelle, les collectivités proposant déjà une offre de restauration à destination des élèves, de même que les hôpitaux pour les patients et le personnel.

La solution que je vous soumets, mesdames, messieurs les sénateurs, est une solution pratique pour tous ces acteurs, qui feraient des économies sur l’achat des denrées tout en complétant le concours qu’ils apportent aux étudiants.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Vanina Paoli-Gagin, rapporteur spécial. Cet amendement reprend une recommandation de la mission d’information du Sénat sur les conditions de la vie étudiante.

La chambre des territoires ne peut qu’apprécier la logique de mutualisation qui est ici à l’œuvre.

Toutefois, la commission a un doute sur le rattachement de cet amendement au domaine des lois de finances.

Avis de sagesse.

Mme la présidente. La parole est à M. Laurent Lafon, pour explication de vote.

M. Laurent Lafon. Cet amendement est complémentaire de mon amendement n° II-623, que nous avons adopté.

Il correspond bel et bien, de surcroît, à une recommandation de la mission d’information sur les conditions de la vie étudiante.

Je ne peux que voter pour !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-728.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l’article 44 sexies.

Mes chers collègues, nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur ».

Après l’article 44 sexies (début)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Discussion générale

7

Ordre du jour

Mme la présidente. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, mardi 29 novembre 2022 :

À neuf heures trente :

Quarante-trois questions orales.

À quatorze heures trente et le soir :

Sous réserve de sa transmission, nouvelle lecture du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 ;

Suite du projet de loi de finances pour 2023, considéré comme adopté par l’Assemblée nationale en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution (texte n° 114, 2022-2023) ;

Mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » et article 46 quater ;

Mission « Santé » et article 46 bis ;

Mission « Plan de relance » ;

Mission « Investir pour la France de 2030 ».

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée le mardi 29 novembre 2022, à zéro heure trente.)

Pour le Directeur des comptes rendus du Sénat,

le Chef de publication

FRANÇOIS WICKER