Sommaire

Présidence de M. Vincent Delahaye

Secrétaires :

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, M. Loïc Hervé.

1. Procès-verbal

2. Décès d’un ancien sénateur

3. Loi de finances rectificative pour 2022. – Adoption définitive des conclusions modifiées d’une commission mixte paritaire sur un projet de loi

M. Jean-François Husson, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire

M. Gabriel Attal, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics

Texte élaboré par la commission mixte paritaire

Article 3 et état A

Amendement n° 2 du Gouvernement. – Réservé.

Article 4 et état B

Amendement n° 1 du Gouvernement. – Réservé.

Vote sur l’ensemble

M. Didier Rambaud

M. Thierry Cozic

M. Éric Bocquet

M. Vincent Capo-Canellas

M. Christian Bilhac

M. Stéphane Sautarel

M. Claude Malhuret

M. Daniel Breuiller

Adoption définitive, par scrutin public n° 69, du projet de loi dans le texte de la commission mixte paritaire, modifié.

4. Loi de finances pour 2023. – Suite de la discussion d’un projet de loi

Seconde partie (suite)

Sécurités

Compte daffectation spéciale : Contrôle de la circulation et du stationnement routiers

M. Philippe Dominati, rapporteur spécial de la commission des finances

M. Jean Pierre Vogel, rapporteur spécial de la commission des finances

Mme Gisèle Jourda, en remplacement de M. Philippe Paul, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères

Mme Gisèle Jourda, rapporteure pour avis de la commission des affaires étrangères

M. Henri Leroy, rapporteur pour avis de la commission des lois

Mme Françoise Dumont, rapporteure pour avis de la commission des lois

M. François-Noël Buffet

M. Alain Marc

M. Thomas Dossus

M. Alain Richard

M. Patrick Kanner

Mme Éliane Assassi

Mme Nathalie Goulet

Mme Maryse Carrère

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE M. Roger Karoutchi

sécurités

État B

Amendement n° II-415 du Gouvernement. – Adoption.

Amendement n° II-414 du Gouvernement. – Adoption.

Amendement n° II-299 rectifié ter de M. Hussein Bourgi. – Rejet.

Amendement n° II-326 rectifié bis de Mme Gisèle Jourda. – Rejet.

Amendement n° II-298 rectifié de M. Olivier Jacquin. – Rejet.

Amendement n° II-277 rectifié bis de Mme Guylène Pantel. – Retrait.

Amendement n° II-300 rectifié ter de M. Hussein Bourgi. – Rejet.

Amendement n° II-245 de M. Guy Benarroche. – Rejet.

Amendement n° II-242 rectifié de M. Guy Benarroche. – Rejet.

Amendement n° II-297 de M. Jérôme Durain. – Rejet.

Amendement n° II-246 de M. Guy Benarroche. – Rejet.

Amendement n° II-243 rectifié de M. Guy Benarroche. – Rejet.

Amendement n° II-266 rectifié de M. Jean-Yves Roux. – Adoption.

Amendement n° II-215 rectifié de Mme Nathalie Goulet. – Retrait.

Amendement n° II-301 rectifié ter de M. Hussein Bourgi. – Adoption.

Amendement n° II-244 rectifié de M. Guy Benarroche. – Rejet

Amendement n° II-309 rectifié de Mme Nathalie Delattre. – Retrait.

Amendement n° II-247 de M. Guy Benarroche. – Rejet.

Amendement n° II-267 rectifié de M. Jean-Yves Roux. – Rejet.

Amendement n° II-311 rectifié de Mme Nathalie Delattre. – Rejet.

Amendement n° II-310 rectifié de Mme Nathalie Delattre. – Retrait.

Amendement n° II-320 de Mme Monique de Marco. – Rejet.

Vote sur les crédits de la mission

Adoption, par scrutin public n° 70, des crédits de la mission « Sécurités », figurant à l’état B, modifiés.

État G

Amendement n° II-413 du Gouvernement. – Adoption.

Amendement n° II-295 de M. Jérôme Durain. – Adoption.

Amendement n° II-296 de M. Jérôme Durain. – Rejet.

Article 46 ter (nouveau) – Adoption.

Après l’article 46 ter

Amendement n° II-349 du Gouvernement. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

compte d’affectation spéciale : contrôle de la circulation et du stationnement routiers

État D

Vote sur les crédits du compte spécial

Adoption des crédits du compte d’affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers », figurant à l’état D.

5. Modification de l’ordre du jour

6. Loi de finances pour 2023. – Suite de la discussion d’un projet de loi

Sport, jeunesse et vie associative

M. Éric Jeansannetas, rapporteur spécial de la commission des finances

M. Jean-Jacques Lozach, rapporteur pour avis de la commission de la culture

M. Jacques-Bernard Magner, rapporteur pour avis de la commission de la culture

M. Alain Marc

M. Thomas Dossus

M. Didier Rambaud

Mme Sabine Van Heghe

M. Pierre Ouzoulias

M. Claude Kern

M. Bernard Fialaire

M. Michel Savin

M. Cédric Vial

Mme Amélie Oudéa-Castéra, ministre des sports et des jeux Olympiques et Paralympiques

Mme Marlène Schiappa, secrétaire d’État auprès de la Première ministre, chargée de l’économie sociale et solidaire et de la vie associative

Mme Sarah El Haïry, secrétaire d’État auprès du ministre des armées et du ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse, chargée de la jeunesse et du service national universel

État B

Amendement n° II-261 de M. Thomas Dossus. – Rejet.

Amendement n° II-316 de M. Jérémy Bacchi. – Rejet.

Amendement n° II-263 de M. Thomas Dossus. – Rejet.

Amendement n° II-344 de M. Jean-Jacques Lozach. – Rejet.

Amendement n° II-321 de M. Jean-Jacques Lozach. – Rejet.

Amendement n° II-264 de M. Thomas Dossus. – Adoption.

Amendement n° II-262 de M. Thomas Dossus. – Rejet.

Amendement n° II-315 de M. Jérémy Bacchi. – Rejet.

Rappel au règlement

M. Patrick Kanner

État B (suite)

Amendement n° II-287 de M. Michel Canévet. – Retrait.

Amendement n° II-282 de M. Daniel Breuiller. – Rejet.

Amendement n° II-314 de M. Jérémy Bacchi. – Rejet.

Amendement n° II-288 de M. Michel Canévet. – Retrait.

Amendement n° II-324 rectifié ter de M. Jean-François Longeot. – Non soutenu.

Amendement n° II-281 rectifié de M. Daniel Breuiller. – Rejet.

Vote sur les crédits de la mission

Adoption des crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative », figurant à l’état B, modifiés.

Justice

M. Antoine Lefèvre, rapporteur spécial de la commission des finances

M. Alain Marc, rapporteur pour avis de la commission des lois

Mme Agnès Canayer, rapporteur pour avis de la commission des lois

Mme Dominique Vérien, rapporteure pour avis de la commission des lois

Mme Maryse Carrère, rapporteure pour avis de la commission des lois

M. Thomas Dossus

M. Thani Mohamed Soilihi

M. Jean-Pierre Sueur

Mme Cécile Cukierman

M. Arnaud de Belenet

Mme Esther Benbassa

M. Stéphane Artano

M. François-Noël Buffet

M. Alain Marc

Mme Marie-Pierre de La Gontrie

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

État B

Amendement n° II-727 du Gouvernement. – Adoption.

Amendements identiques nos II-68 rectifié ter de M. Gilbert Favreau et II-307 de Mme Marie-Pierre de La Gontrie. – Adoption de l’amendement n° II-307, l’amendement n° II-68 rectifié ter n’étant pas soutenu.

Amendement n° II-274 rectifié de Mme Maryse Carrère. – Devenu sans objet.

Amendement n° II-239 de M. Guy Benarroche. – Devenu sans objet.

Amendement n° II-306 de M. Jean-Pierre Sueur. – Rejet par scrutin public n° 71.

Amendement n° II-308 de Mme Marie-Pierre de La Gontrie. – Rejet par scrutin public n° 72.

Amendement n° II-285 de Mme Cécile Cukierman. – Rejet par scrutin public n° 73.

Amendement n° II-238 de M. Guy Benarroche. – Rejet.

Amendement n° II-237 de M. Guy Benarroche. – Rejet.

Amendement n° II-236 de M. Guy Benarroche. – Rejet.

Amendement n° II-325 de Mme Monique de Marco. – Rejet.

Amendement n° II-312 rectifié de Mme Nathalie Delattre. – Retrait.

Amendement n° II-341 rectifié bis de Mme Martine Filleul. – Rejet.

Amendement n° II-286 de Mme Cécile Cukierman. – Rejet par scrutin public n° 74.

Vote sur les crédits de la mission

Adoption des crédits de la mission « Justice », figurant à l’état B, modifiés.

Articles 44 et 44 bis (nouveau) – Adoption.

Article 44 ter (nouveau)

Amendement n° II-269 de M. Jean-Pierre Sueur. – Rejet.

Amendement n° II-15 de la commission. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Après l’article 44 ter

Amendement n° II-250 de M. Michel Canévet. – Non soutenu.

Amendement n° II-338 rectifié bis de Mme Martine Filleul. – Rejet.

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE Mme Laurence Rossignol

Administration générale et territoriale de lÉtat

Mme Isabelle Briquet, rapporteure spéciale de la commission des finances

Mme Cécile Cukierman, rapporteure pour avis de la commission des lois

M. Dominique Théophile

Mme Florence Blatrix Contat

Mme Éliane Assassi

Mme Nathalie Goulet

Mme Maryse Carrère

Mme Agnès Canayer

M. Alain Marc

M. Daniel Breuiller

M. François Bonhomme

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales

État B

Amendement n° II-241 de M. Guy Benarroche. – Rejet.

Amendement n° II-240 de M. Guy Benarroche. – Rejet.

Amendement n° II-112 rectifié de M. Jean-Pierre Decool. – Retrait.

Amendement n° II-339 rectifié bis de Mme Martine Filleul. – Rejet.

Amendement n° II-294 rectifié de Mme Florence Blatrix Contat. – Retrait.

Vote sur les crédits de la mission

Rejet des crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État », figurant à l’état B.

Article 41 B (nouveau)

Amendement n° II-3 de la commission. – Adoption de l’amendement supprimant l’article.

Engagements financiers de lÉtat

Compte d’affectation spéciale : Participations financières de lÉtat

Compte d’affectation spéciale : Accords monétaires internationaux

Compte de concours financiers : Prêts et avances à divers services de lÉtat ou organismes gérant des services publics

Remboursements et dégrèvements

M. Jérôme Bascher, rapporteur spécial de la commission des finances

M. Claude Raynal, président de la commission des finances, en remplacement de M. Victorin Lurel, rapporteur spécial de la commission des finances

M. Claude Raynal, président de la commission des finances, en remplacement de M. Pascal Savoldelli, rapporteur spécial de la commission des finances

Mme Micheline Jacques, en remplacement de Mme Martine Berthet, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques

M. Christian Bilhac

M. Alain Marc

M. Daniel Breuiller

M. Thani Mohamed Soilihi

Mme Isabelle Briquet

Mme Cécile Cukierman

Mme Nathalie Goulet

M. Gabriel Attal, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics

engagements financiers de l’état

État B

Amendement n° II-443 de la commission. – Adoption.

Amendement n° II-442 de la commission. – Adoption par scrutin public n° 75.

Vote sur les crédits de la mission

Adoption, par scrutin public, n° 76 des crédits de la mission « Engagements financiers de l’État », figurant à l’état B, modifiés.

compte d’affectation spéciale : participations financières de l’état

État D

Amendement n° II-441 de la commission. – Adoption.

Vote sur les crédits du compte spécial

Adoption des crédits du compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État », figurant à l’état D, modifiés.

Après l’article 49

Amendements identiques nos II-105 de M. Daniel Breuiller et II-195 rectifié de Mme Florence Blatrix Contat. – Retrait des deux amendements.

compte de concours financiers : accords monétaires internationaux

État D

Vote sur les crédits du compte spécial

Adoption des crédits du compte d’affectation spéciale « Accords monétaires internationaux », figurant à l’état D.

compte de concours financiers : prêts et avances à divers services de l’état ou organismes gérant des services publics

État D

Vote sur les crédits du compte spécial

Adoption des crédits du compte d’affectation spéciale « Prêts et avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics », figurant à l’état D.

remboursements et dégrèvements

État B

Amendement n° II-747 rectifié du Gouvernement. – Adoption.

Vote sur les crédits de la mission

Adoption des crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements », figurant à l’état B, modifiés.

7. Ordre du jour

compte rendu intégral

Présidence de M. Vincent Delahaye

vice-président

Secrétaires :

Mme Jacqueline Eustache-Brinio,

M. Loïc Hervé.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à dix heures trente.)

1

Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Décès d’un ancien sénateur

M. le président. J’ai le regret de vous faire part du décès de notre ancien collègue François Vendasi, qui fut sénateur de la Haute-Corse de 2005 à 2014.

3

 
Dossier législatif : projet de loi de finances rectificative pour 2022
Discussion générale (suite)

Loi de finances rectificative pour 2022

Adoption définitive des conclusions modifiées d’une commission mixte paritaire sur un projet de loi

M. le président. L’ordre du jour appelle l’examen des conclusions de la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2022 (texte de la commission n° 137, rapport n° 136).

La parole est à M. le rapporteur.

Discussion générale (début)
Dossier législatif : projet de loi de finances rectificative pour 2022
Article liminaire

M. Jean-François Husson, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, dès la première lecture, la semaine dernière, le Sénat a adopté le collectif budgétaire de fin de gestion, en acceptant pour l’essentiel les ajustements, ouvertures et annulations de crédits proposés sur le budget de l’État, tout en notant que le déficit demeurait considérable, celui-ci se situant sur un « plateau » dont il paraissait bien difficile de redescendre.

Le Sénat a également pris acte, sans s’opposer à la plupart d’entre elles, des mesures fiscales pérennes que l’Assemblée nationale a fait le choix d’adopter, revenant en cela sur une pratique établie depuis 2018, que nous retrouverons toutefois l’an prochain du fait de la révision de la loi organique relative aux lois de finances.

Le Sénat a donc adopté la quasi-totalité des mesures votées à l’Assemblée nationale et qui allaient dans la bonne direction. Ainsi en est-il, en particulier, du chèque énergie exceptionnel, du fonds de compensation du surcoût de l’énergie pour les établissements d’enseignement supérieur et les organismes de recherche, et – toujours pour contrer les effets de l’inflation – des 40 millions d’euros supplémentaires destinés aux associations d’aide alimentaire, une mesure que le Sénat avait déjà proposée cet été.

Autre dépense à noter, le soutien financier apporté à l’Ukraine, notamment sur la mission « Défense ». Nous y sommes bien entendu favorables.

Les députés ont par ailleurs procédé utilement au doublement du seuil d’imputation du déficit foncier sur le revenu global pour les dépenses de rénovation énergétique, au soutien à l’achat de pellets et de bûches de bois, ainsi qu’à la prorogation en 2023 de MaPrimeRénov’ sans condition de ressources pour les travaux de rénovation globale.

Au-delà de ces mesures, qui faisaient déjà l’objet d’un accord entre nous, la commission mixte paritaire (CMP) est donc parvenue à un texte commun en retenant la quasi-totalité des mesures proposées par le Sénat.

Elle a conservé plusieurs ouvertures de crédits que nous avions adoptées pour accentuer les moyens dédiés aux infrastructures sur l’ensemble du territoire.

C’est le cas, tout d’abord, des deux enveloppes de 50 millions d’euros chacune, consacrées à la réfection des ponts et du réseau routier, notamment des petites communes. S’agissant des routes, les crédits seront ouverts via la mission « Écologie, développement et mobilité durables » plutôt que via le compte d’affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers », dit CAS Radars : le Gouvernement devra donc s’engager clairement à ce que ces sommes soient affectées aux routes des collectivités territoriales.

C’est le cas, aussi, de la réduction du taux de fuite des réseaux d’eau et de l’accélération de leur rénovation, qui fait l’objet d’une subvention exceptionnelle de 50 millions d’euros accordée aux agences de l’eau, compte tenu des défis induits par l’épisode de sécheresse de cet été et, plus largement, par le dérèglement climatique.

C’est le cas, enfin, de la réalisation de travaux d’insonorisation pour les riverains des aéroports, à laquelle une enveloppe de 20 millions d’euros sera consacrée.

Par ailleurs, la CMP a conservé le soutien à l’action des maisons France Services introduit par le Sénat pour permettre le développement et le bon fonctionnement de ces structures tout en limitant la charge pesant sur les petites collectivités, avec 12,5 millions d’euros supplémentaires.

Retenant la proposition du Sénat, la CMP a également abrogé, dès 2022, la réforme de la répartition des recettes issues de la taxe d’aménagement au sein du bloc communal, qui figurait dans la loi de finances initiale pour 2022.

Elle a aussi rétabli la réforme, souhaitée par l’Assemblée nationale, de la répartition du produit de la composante de l’imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux (Ifer) relative aux centrales photovoltaïques entre les collectivités territoriales et leurs groupements.

Enfin, dans un souci de sincérité, la commission mixte paritaire, sous l’impulsion du Sénat, a réduit de 2 milliards d’euros les crédits du compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État », ces derniers n’ayant pas vocation à être utilisés en 2022.

Je me réjouis du travail mené avec le rapporteur général de l’Assemblée nationale pour rapprocher nos attentes et parvenir à un texte commun. Je le remercie pour ses qualités d’écoute et de dialogue.

Mes chers collègues, je vous invite à voter ces conclusions de CMP, modifiées par les deux amendements du Gouvernement qui visent à tirer les conséquences budgétaires de notre texte. (Applaudissements sur des travées des groupes Les Républicains, UC et RDSE.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Gabriel Attal, ministre délégué auprès du ministre de léconomie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis ravi de vous retrouver ce matin pour la lecture des conclusions de la commission mixte paritaire sur le deuxième projet de loi de finances rectificative (PLFR) de l’année 2022, à la suite de l’accord intervenu mardi dernier.

J’étais avec vous hier après-midi pour l’adoption de la première partie du projet de loi de finances (PLF) pour 2023, tard hier soir pour l’examen d’un certain nombre de missions ; je serai encore avec vous ce soir et cette nuit pour l’examen d’autres missions budgétaires.

Ce compromis trouvé entre l’Assemblée nationale et le Sénat est une bonne nouvelle pour les Français, confrontés chaque jour à la hausse des prix.

Je veux saluer le travail mené par le rapporteur général Jean-François Husson et son homologue de l’Assemblée nationale Jean-René Cazeneuve : ensemble, ils sont parvenus à un accord pour dégager des moyens supplémentaires et permettre à nos compatriotes de tenir le choc.

Oui, mesdames, messieurs les sénateurs, ce projet de loi de finances rectificative constitue une sorte de « rallonge », dans un contexte particulièrement difficile.

Vous le savez, depuis le début de l’année, la vie chère met notre société à rude épreuve. Face à cette nouvelle donne, notre action peut se résumer en une phrase : tout faire – je dis bien tout faire – pour que la crise énergétique ne se transforme pas en une crise économique majeure. Pour cela, nous faisons un choix clair, celui de protéger les Français sans jamais accepter la dérive de nos comptes. Dépenser sans limites aujourd’hui signifierait moins de liberté d’action pour demain.

Nous continuerons de mener ce combat l’année prochaine – l’inflation devrait rester élevée –, mais différemment, par une approche plus ciblée. Je pense notamment au dispositif qui remplacera la ristourne sur les carburants, dont l’extinction est prévue le 31 décembre.

Partout autour de nous, les nuages s’amoncellent.

Je pense, bien entendu, à la guerre en Ukraine, à son impact sur l’approvisionnement énergétique et au risque plus particulier que ce dernier fait peser sur l’industrie allemande, et par ricochet sur l’économie européenne.

Je pense, aussi, à la crise immobilière en Chine ou à l’Inflation Reduction Act américain, qui lui aussi constitue un risque pour notre industrie européenne.

Je pense, enfin, aux évolutions politiques en Italie, au doute sur la trajectoire des finances publiques de ce pays et aux risques qui en résultent pour la zone euro.

Toutefois, ce que l’on peut dire, ce que je peux vous dire, mesdames, messieurs les sénateurs, c’est que notre économie résiste en cette fin d’année 2022.

S’agissant de 2023, je veux partager avec vous une prévision encourageante publiée lundi par le Fonds monétaire international (FMI). L’institution table sur une croissance de 0,75 % pour notre pays, une prévision très proche de celle qui a été retenue pour construire le projet de loi de finances, qui marque la capacité de résistance de notre économie.

Dans ce contexte, le projet de loi de finances rectificative traduit d’abord une volonté de soutenir et de protéger.

Je le disais, ce PLFR accorde une rallonge de 2,5 milliards d’euros, autant de moyens supplémentaires qui vont soutenir de façon directe et immédiate les Français qui en ont besoin.

Concrètement, ce texte va permettre d’aider 12 millions de ménages qui se chauffent au gaz, à l’électricité, au bois ou au fioul à payer leurs factures.

Nous mettons 1,8 milliard d’euros sur la table pour financer le chèque énergie exceptionnel, soit très concrètement un versement de 100 ou de 200 euros qui sera effectué d’ici à la fin de l’année.

J’en profite pour rappeler que la première LFR pour 2022 a déjà prévu un budget de 230 millions pour aider les ménages qui se chauffent au fioul. Cette aide commence à être déployée et se traduit par l’attribution d’un chèque de 200 euros pour les ménages déjà bénéficiaires du chèque énergie, et de 100 euros pour ceux des troisième à cinquième déciles.

J’insiste toutefois sur le fait que cette aide doit être réclamée sur une plateforme dédiée. Nous avons donc tous la responsabilité de faire connaître ce dispositif le plus largement possible, les centres communaux d’action sociale (CCAS) et les collectivités locales pouvant nous aider à relayer l’information. Si des concitoyens éligibles à cette aide, en difficulté pour boucler leurs fins de mois, ne demandaient pas ce chèque par méconnaissance, il n’y aurait rien de pire !

Il fallait par ailleurs corriger un angle mort pour les ménages qui se chauffent au bois. Ils sont tout de même un certain nombre dans notre pays, et c’est la raison pour laquelle l’Assemblée nationale a voté une aide exceptionnelle de 230 millions d’euros pour alléger leur facture. Nous voulons également lutter contre l’opacité du marché du bois de chauffage et les comportements spéculatifs qui nuisent à des ménages parfois déjà en grande difficulté. Nous avons saisi à cette fin la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) ; des parlementaires travaillent également sur le sujet.

Ce texte finance un autre choix que nous avons fait depuis le 1er avril, celui de soutenir les automobilistes. Vous le savez, la Première ministre avait annoncé une prolongation jusqu’à la mi-novembre de la ristourne de 30 centimes par litre de carburant pour tenir compte du blocage des raffineries et des difficultés d’approvisionnement dont ont pâti nos compatriotes. Ce PLFR permet d’assurer le financement de cette prolongation, qui représente un coût pour nos finances publiques de l’ordre de 440 millions d’euros pour deux semaines.

Depuis la semaine dernière, cette remise à la pompe a été réduite à 10 centimes par litre, comme nous l’avions annoncé. Pour autant, 2023 ne sera pas synonyme d’un arrêt brutal du soutien apporté aux automobilistes. La réalité, c’est que nous devons continuer à soutenir les travailleurs qui ont besoin de leur voiture. Il s’agit en effet d’agir de manière plus ciblée, en concentrant l’argent public sur celles et ceux qui en ont le plus besoin.

Ce PLFR est aussi un texte de soutien aux opérateurs de l’État. Je pense notamment aux universités, aux établissements de recherche et aux centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires (Crous), que nous aidons à faire face à la hausse des prix de l’énergie.

Nous avons donc prévu un fonds de 275 millions d’euros, qui pourra être immédiatement débloqué au bénéfice des opérateurs du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche.

Dans la même logique, ce PLFR prévoit l’ouverture de crédits pour les frais de carburant exceptionnels du ministère des armées : 200 millions d’euros sont ainsi débloqués pour nos militaires en opérations extérieures.

Parce que les prix des produits alimentaires connaissent une inflation particulièrement forte, ont également été retenus dans le texte qui vous est soumis les 40 millions d’euros supplémentaires pour l’aide alimentaire votés à l’Assemblée nationale, qui font suite aux 40 millions d’euros adoptés sur l’initiative du Sénat dans le PLFR de l’été.

Au total, ce sont donc 2,5 milliards d’euros qui sont mis sur la table pour aider les Français et certains opérateurs de l’État à faire face au choc énergétique.

Mais il ne s’agit pas seulement de parer à l’urgence. Ce texte procède aussi à un certain nombre d’ajustements de fin de gestion, avec le souci permanent de tenir les comptes publics.

Les ouvertures de crédits auxquelles nous procédons pour assurer de nouvelles dépenses, de l’ordre de 5 milliards d’euros, sont donc compensées par des annulations de crédits d’un montant identique. Autrement dit, nous vous présentons aujourd’hui un texte d’équilibre budgétaire, hors dépenses exceptionnelles liées à la crise de l’énergie.

La principale ouverture de crédits, d’un montant de 2 milliards d’euros, permet de poursuivre le développement de la formation professionnelle et de l’apprentissage au travers du financement de France Compétences, afin d’aider chaque Français à construire son avenir professionnel.

Une dépense qui ne nous exonère en rien de rechercher par ailleurs des sources d’économies. Il faut en effet régulièrement apporter des rallonges au budget de France Compétences et je sais que, lors de l’examen de la mission « Travail et emploi » du PLF pour 2023, vous porterez des propositions pour permettre à cette autorité de réaliser des économies structurelles supplémentaires. Je serai en particulier très favorable à l’amendement qui prévoit d’instaurer un ticket modérateur pour accéder à des formations par l’intermédiaire de France Compétences.

Autre ouverture significative : 1,1 milliard d’euros sont débloqués pour la mission « Défense » afin de financer le soutien militaire que nous apportons à l’Ukraine. Je souligne aussi les 100 millions d’euros supplémentaires issus d’un amendement adopté à l’Assemblée nationale sur l’initiative des députés Charles de Courson, du groupe Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires (LIOT), et Benjamin Haddad, du groupe Renaissance.

Permettez-moi enfin de revenir sur les modifications introduites par le Sénat et retenues dans le cadre des travaux de la CMP. Je sais qu’il s’agit de sujets majeurs pour celles et ceux qui les ont portés, et plus largement pour l’ensemble de la Haute Assemblée.

Nous avons intégré l’amendement qui prévoit d’abroger la réforme de la répartition du produit de la taxe d’aménagement entre les communes et leurs groupements. Je rappelle que l’article 109 de la loi de finances pour 2022 avait rendu obligatoire le reversement de tout ou partie de la taxe d’aménagement entre communes et établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), en fonction des charges d’équipements publics assumées par chacune des collectivités.

Des crédits supplémentaires ont par ailleurs été intégrés pour lutter contre les nuisances aéroportuaires. Nous avons ainsi repris un amendement du sénateur Vincent Capo-Canellas, qui permet de consacrer 20 millions d’euros au financement de projets d’insonorisation destinés aux riverains des aéroports.

Des crédits supplémentaires sont aussi ouverts pour les maisons France Services, avec une hausse de 12,5 millions d’euros pour le programme « Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire » au sein de la mission « Cohésion des territoires », conformément à l’amendement porté par M. Delcros.

Évidemment, nous sommes très attachés au déploiement des maisons France Services, qui permettent à nos concitoyens d’accéder à un bouquet de services publics. Il y en a désormais plus de 2 000 sur notre territoire, et près de 98 % de nos compatriotes habitent à moins d’une demi-heure de l’une de ces maisons.

Nous avons choisi également d’accorder des moyens supplémentaires au financement de nos infrastructures, comme l’a souhaité le rapporteur général Jean-François Husson, avec 50 millions d’euros pour la rénovation des ponts et 50 millions d’euros pour l’entretien des routes. S’y ajoute une enveloppe de 50 millions d’euros pour les agences de l’eau. Tout cela, nous le finançons sans céder un pouce de terrain au laisser-aller budgétaire.

En effet, 2022 n’a pas seulement été l’année du combat contre la vie chère ; ce fut aussi l’année du combat pour des comptes bien tenus, avec un déficit stabilisé à 5 % du PIB. Nous tenons cet engagement, malgré les ouvertures de crédits auxquelles nous avons procédé, et nous maintenons évidemment notre objectif de 5 % de déficit pour l’an prochain. (Mme Nadine Bellurot ironise.)

Cette maîtrise des comptes est possible grâce à une économie qui résiste, à l’engagement et au travail de chacun.

Avec ce projet de loi de finances rectificative, nous aidons les Français à se chauffer et à se déplacer, nous aidons nos étudiants et nos chercheurs à travailler dans de bonnes conditions, nous soutenons les banques alimentaires, nous finançons la bataille en faveur du plein emploi et nous assumons notre choix de nous tenir aux côtés du peuple ukrainien.

Je pense que ces objectifs sont soutenus par une majorité de Français. Par ailleurs, indépendamment des objectifs et des mesures de ce texte, il me semble qu’ils soutiennent aussi notre méthode et notre démarche.

Je souligne qu’il s’agit du premier texte budgétaire de cette session parlementaire adopté à l’Assemblée nationale sans recours au 49.3. Dans la nouvelle configuration de l’Assemblée nationale, sans majorité absolue pour la majorité présidentielle, ce n’était pas gagné d’avance ! Nous avons beaucoup travaillé en amont avec les oppositions, retenu certaines de leurs propositions… Finalement, l’abstention « constructive » des groupes Les Républicains, Socialistes et LIOT a permis l’adoption du texte sans 49.3.

M. Antoine Lefèvre. C’est une petite victoire !

M. Gabriel Attal, ministre délégué. Il n’y a pas de petite victoire, il n’y a que des victoires, monsieur le sénateur. (Sourires.)

C’est, à mon sens, la bonne méthode, celle qu’attendent les Français.

Le Sénat n’a pas attendu pour déployer ce travail de coconstruction, fruit de débats toujours francs et honnêtes, parfois approfondis, mais qui permettent toujours in fine de trouver des solutions de compromis au service de nos concitoyens.

M. Antoine Lefèvre. C’est la nature même du Sénat !

M. Gabriel Attal, ministre délégué. Voilà, mesdames, messieurs les sénateurs, la méthode que nos concitoyens attendent, car nos concitoyens n’ont tout simplement pas les moyens d’attendre ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – MM. Christian Bilhac, Vincent Capo-Canellas et Michel Canévet applaudissent également.)

M. le président. Nous passons à la discussion du texte élaboré par la commission mixte paritaire.

Je rappelle que, en application de l’article 42, alinéa 12, du règlement, le Sénat examinant après l’Assemblée nationale le texte élaboré par la commission mixte paritaire, il se prononce par un seul vote sur l’ensemble du texte en ne retenant que les amendements présentés ou acceptés par le Gouvernement.

En conséquence, le vote sur les amendements et sur les articles est réservé.

Je donne lecture du texte élaboré par la commission mixte paritaire.

projet de loi de finances rectificative pour 2022

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi de finances rectificative pour 2022
Article 1er A

Article liminaire

La prévision de solde structurel et de solde effectif de l’ensemble des administrations publiques pour 2022 s’établit comme suit :

 

Cadre potentiel LPFP 2018-2022 (en points de produit intérieur brut *)

Exécution 2021

Prévision 2022

Solde structurel (1)

-4,5

-3,7

Solde conjoncturel (2)

-2,0

-1,2

Mesures ponctuelles et temporaires (3)

-0,1

-0,1

Solde effectif (1 + 2 + 3)

-6,5

-5,0

* Les montants figurant dans le présent tableau sont arrondis au dixième de point le plus proche ; il résulte de lapplication de ce principe que le montant arrondi du solde effectif peut ne pas être égal à la somme des montants entrant dans son calcul.

PREMIÈRE PARTIE

CONDITIONS GÉNÉRALES DE L’ÉQUILIBRE FINANCIER

TITRE Ier

DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES

Article liminaire
Dossier législatif : projet de loi de finances rectificative pour 2022
Article 2 bis A

Article 1er A

Le 1 du V de l’article 151 septies A du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Au b, les mots : « à la suite de » sont remplacés par les mots : « dans les deux années suivant » ;

2° À la fin du c, les mots : « d’un an » sont remplacés par les mots : « de deux ans ».

˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙

Article 1er A
Dossier législatif : projet de loi de finances rectificative pour 2022
Article 3

Article 2 bis A

(Supprimé)

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TITRE II

DISPOSITIONS RELATIVES À L’ÉQUILIBRE DES RESSOURCES ET DES CHARGES

Article 2 bis A
Dossier législatif : projet de loi de finances rectificative pour 2022
Article 4

Article 3

I. – Pour 2022, l’ajustement des ressources tel qu’il résulte des évaluations révisées figurant à l’état A annexé à la présente loi et la variation des charges du budget de l’État sont fixés aux montants suivants :

 

(En millions deuros *)

Ressources

Charges

Solde

Budget général

Recettes fiscales brutes / dépenses brutes

6 769

6 846

À déduire : Remboursements et dégrèvements

2 579

2 579

Recettes fiscales nettes / dépenses nettes

4 189

4 267

Recettes non fiscales

990

Recettes totales nettes / dépenses nettes

5 179

4 267

À déduire : Prélèvements sur recettes au profit des collectivités territoriales et de l’Union européenne

-2 253

Montants nets pour le budget général

7 432

4 267

+3 165

Évaluation des fonds de concours et crédits correspondants

0

0

Montants nets pour le budget général, y compris fonds de concours

7 432

4 267

Budgets annexes

Contrôle et exploitation aériens

281

-13

+294

Publications officielles et information administrative

10

-2

+12

Totaux pour les budgets annexes

291

-15

+306

Évaluation des fonds de concours et crédits correspondants :

Contrôle et exploitation aériens

0

0

Publications officielles et information administrative

0

0

Totaux pour les budgets annexes, y compris fonds de concours

291

-15

Comptes spéciaux

Comptes d’affectation spéciale

101

-1 839

+1 940

Comptes de concours financiers

1 129

442

+687

Comptes de commerce (solde)

-

Comptes d’opérations monétaires (solde)

-

Solde pour les comptes spéciaux

2 627

Solde général

+6 099

* Les montants figurant dans le présent tableau sont arrondis au million deuros le plus proche ; il résulte de lapplication de ce principe que le montant arrondi des totaux et sous-totaux peut ne pas être égal à la somme des montants arrondis entrant dans son calcul.

II. – Pour 2022 :

1° Les ressources et les charges de trésorerie qui concourent à la réalisation de l’équilibre financier sont évaluées comme suit :

 

(En milliards deuros)

Besoin de financement

Amortissement de la dette à moyen et long termes

145,8

Dont remboursement du nominal à valeur faciale

140,8

Dont suppléments d’indexation versés à l’échéance (titres indexés)

5,0

Amortissement de la dette reprise de SNCF Réseau

3,0

Amortissement des autres dettes reprises

0

Déficit budgétaire

170,9

Autres besoins de trésorerie

-15,4

Total

304,3

Ressources de financement

Émission de dette à moyen et long termes, nette des rachats

260

Ressources affectées à la Caisse de la dette publique et consacrées au désendettement

1,9

Variation nette de l’encours des titres d’État à court terme

0

Variation des dépôts des correspondants

3,0

Variation des disponibilités du Trésor à la banque de France et des placements de trésorerie de l’État

50,4

Autres ressources de trésorerie

-11,0

Total

304,3

;

2° Le plafond de la variation nette, appréciée en fin d’année et en valeur nominale, de la dette négociable de l’État d’une durée supérieure à un an demeure inchangé.

III. – Pour 2022, le plafond d’autorisation des emplois rémunérés par l’État, exprimé en équivalents temps plein travaillé, est porté à 1 942 377.

État A

VOIES ET MOYENS POUR 2022 RÉVISÉS

I. – BUDGET GÉNÉRAL

(En euros)

Numéro de ligne

Intitulé de la recette

Révision des évaluations pour 2022

1. Recettes fiscales

11. Impôt sur le revenu

+2 802 122 918

1101

Impôt sur le revenu

+2 802 122 918

12. Autres impôts directs perçus par voie démission de rôles

-112 467 836

1201

Autres impôts directs perçus par voie d’émission de rôles

-112 467 836

13. Impôt sur les sociétés

+2 257 321 198

1301

Impôt sur les sociétés

+2 257 321 198

13 bis. Contribution sociale sur les bénéfices des sociétés

+11 263 128

1302

Contribution sociale sur les bénéfices des sociétés

+11 263 128

13 ter. Contribution de la Caisse des dépôts et consignations représentative de limpôt sur les sociétés

-104 000 000

1303

Contribution de la Caisse des dépôts et consignations représentative de l’impôt sur les sociétés

-104 000 000

14. Autres impôts directs et taxes assimilées

+303 134 191

1402

Retenues à la source et prélèvements sur les revenus de capitaux mobiliers et le prélèvement sur les bons anonymes

-600 345 350

1406

Impôt sur la fortune immobilière

+100 000 000

1408

Prélèvements sur les entreprises d’assurance

-209 887

1410

Cotisation minimale de taxe professionnelle

-508 013

1411

Cotisations perçues au titre de la participation des employeurs à l’effort de construction

+659 191

1421

Cotisation nationale de péréquation de taxe professionnelle

+442 371

1427

Prélèvements de solidarité

+833 617 402

1431

Taxe d’habitation sur les résidences principales

+15 500

1498

Cotisation foncière des entreprises (affectation temporaire à l’État en 2010)

-1 030 000

1499

Recettes diverses

-29 507 023

15. Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques nette

-291 599

1501

Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques

-291 599

16. Taxe sur la valeur ajoutée nette

+1 231 846 503

1601

Taxe sur la valeur ajoutée

+1 231 846 503

17. Enregistrement, timbre, autres contributions et taxes indirectes

+379 710 855

1701

Mutations à titre onéreux de créances, rentes, prix d’offices

-143 910

1703

Mutations à titre onéreux de meubles corporels

-199 980

1704

Mutations à titre onéreux d’immeubles et droits immobiliers

+28 968 924

1706

Mutations à titre gratuit par décès

+300 000 000

1721

Timbre unique

-109 639

1753

Autres taxes intérieures

-45 207 813

1754

Autres droits et recettes accessoires

-4 035

1755

Amendes et confiscations

-33 787

1756

Taxe générale sur les activités polluantes

+19 083

1774

Taxe spéciale sur la publicité télévisée

-163 062

1785

Produits des jeux exploités par la Française des jeux (hors paris sportifs)

+109 215

1786

Prélèvements sur le produit des jeux dans les casinos

+276 452 535

1787

Prélèvement sur le produit brut des paris hippiques

-5 841 508

1788

Prélèvement sur les paris sportifs

-73 380 875

1789

Prélèvement sur les jeux de cercle en ligne

-554 293

1797

Taxe sur les transactions financières

-100 200 000

2. Recettes non fiscales

21. Dividendes et recettes assimilées

+581 309 668

2110

Produits des participations de l’État dans des entreprises financières

+380 200 000

2116

Produits des participations de l’État dans des entreprises non financières et bénéfices des établissements publics non financiers

+57 000 000

2199

Autres dividendes et recettes assimilées

+144 109 668

22. Produits du domaine de lÉtat

+216 009 500

2201

Revenus du domaine public non militaire

+216 000 000

2212

Autres produits de cessions d’actifs

+9 500

23. Produits de la vente de biens et services

+308 990 000

2301

Remboursement par l’Union européenne des frais d’assiette et de perception des impôts et taxes perçus au profit de son budget

+117 500 000

2304

Rémunération des prestations assurées par les services du Trésor public au titre de la collecte de l’épargne

+31 490 000

2399

Autres recettes diverses

+160 000 000

24. Remboursements et intérêts des prêts, avances et autres immobilisations financières

+405 133 230

2401

Intérêts des prêts à des banques et à des États étrangers

+31 412 586

2402

Intérêts des prêts du fonds de développement économique et social

+5 000 000

2403

Intérêts des avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics

+11 350 000

2409

Intérêts des autres prêts et avances

+274 000 000

2499

Autres remboursements d’avances, de prêts et d’autres créances immobilisées

+83 370 644

25. Amendes, sanctions, pénalités et frais de poursuites

+ 55 864 270

2501

Produits des amendes de la police de la circulation et du stationnement routiers

+15 262 750

2503

Produits des amendes prononcées par les autres autorités administratives indépendantes

+33 000 000

2513

Pénalités

+7 601 520

26. Divers

-577 713 260

2604

Divers produits de la rémunération de la garantie de l’État

-391 973 056

2611

Produits des chancelleries diplomatiques et consulaires

+53 180 492

2612

Redevances et divers produits pour frais de contrôle et de gestion

+8 214 885

2613

Prélèvement effectué sur les salaires des conservateurs des hypothèques

+769

2618

Remboursement des frais de scolarité et accessoires

+654 283

2622

Divers versements de l’Union européenne

-57 237 764

2623

Reversements de fonds sur les dépenses des ministères ne donnant pas lieu à rétablissement de crédits

+83 447 131

2698

Produits divers

-274 000 000

3. Prélèvements sur les recettes de lÉtat

31. Prélèvements sur les recettes de lÉtat au profit des collectivités territoriales

-183 678 335

3101

Prélèvement sur les recettes de l’État au titre de la dotation globale de fonctionnement

-202 448 164

3107

Prélèvement sur les recettes de l’État au titre de la compensation d’exonérations relatives à la fiscalité locale

+19 951 144

3109

Prélèvement sur les recettes de l’État au profit de la collectivité de Corse

-15 802 147

3111

Fonds de mobilisation départementale pour l’insertion

-6 608 527

3130

Dotation de compensation de la réforme de la taxe sur les logements vacants pour les communes et les établissements publics de coopération intercommunale percevant la taxe d’habitation sur les logements vacants

-572 964

3136

Prélèvement sur les recettes de l’État au profit de la collectivité territoriale de Guyane

+27 000 000

3141

Soutien exceptionnel de l’État au profit des collectivités du bloc communal confrontées à des pertes de recettes fiscales et domaniales du fait de la crise sanitaire

-46 000 000

3145

Prélèvement sur les recettes de l’État au titre de la compensation de la réduction de 50 % des valeurs locatives de taxe foncière sur les propriétés bâties et de cotisation foncière des entreprises des locaux industriels

+40 802 323

32. Prélèvement sur les recettes de lÉtat au profit de lUnion européenne

-2 068 854 413

3201

Prélèvement sur les recettes de l’État au profit du budget de l’Union européenne

-2 068 854 413

RÉCAPITULATION DES RECETTES DU BUDGET GÉNÉRAL

(En euros)

Numéro de ligne

Intitulé de la recette

Révision des évaluations pour 2022

1. Recettes fiscales

+6 768 639 358

11

Impôt sur le revenu

+2 802 122 918

12

Autres impôts directs perçus par voie d’émission de rôles

-112 467 836

13

Impôt sur les sociétés

+2 257 321 198

13 bis

Contribution sociale sur les bénéfices des sociétés

+11 263 128

13 ter

Contribution de la Caisse des dépôts et consignations représentative de l’impôt sur les sociétés

-104 000 000

14

Autres impôts directs et taxes assimilées

+303 134 191

15

Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques nette

-291 599

16

Taxe sur la valeur ajoutée nette

+1 231 846 503

17

Enregistrement, timbre, autres contributions et taxes indirectes

+379 710 855

2. Recettes non fiscales

+989 593 408

21

Dividendes et recettes assimilées

+581 309 668

22

Produits du domaine de l’État

+216 009 500

23

Produits de la vente de biens et services

+308 990 000

24

Remboursements et intérêts des prêts, avances et autres immobilisations financières

+405 133 230

25

Amendes, sanctions, pénalités et frais de poursuites

+ 55 864 270

26

Divers

-577 713 260

Total des recettes brutes (1 + 2)

+7 758 232 766

3. Prélèvements sur les recettes de lÉtat

-2 252 532 748

31

Prélèvements sur les recettes de l’État au profit des collectivités territoriales

-183 678 335

32

Prélèvement sur les recettes de l’État au profit de l’Union européenne

-2 068 854 413

Total des recettes, nettes des prélèvements (1 + 2 - 3)

+10 010 765 514

II. – BUDGETS ANNEXES

(En euros)

Numéro de ligne

Intitulé de la recette

Révision des évaluations pour 2022

Contrôle et exploitation aériens

+281 321 928

7061

Redevances de route

+178 800 000

7063

Redevances pour services terminaux de la circulation aérienne pour la métropole

-6 000 000

7064

Redevances pour services terminaux de la circulation aérienne pour l’outre-mer

+8 200 000

7067

Redevances de surveillance et de certification

-2 724 206

7080

Autres recettes d’exploitation

+34 729 509

7501

Taxe de l’aviation civile

+70 316 625

7782

Produit de cession des immobilisations affectées à la dette (art. 61 de la loi de finances pour 2011)

-2 000 000

Publications officielles et information administrative

+10 000 000

A701

Ventes de produits

+10 000 000

Total

+291 321 928

III. – COMPTES D’AFFECTATION SPÉCIALE

(En euros)

Numéro de ligne

Intitulé de la recette

Révision des évaluations pour 2022

Contrôle de la circulation et du stationnement routiers

+121 218 617

Section : Contrôle automatisé

-7 000 000

01

Amendes perçues par la voie du système de contrôle-sanction automatisé

-7 000 000

Section : Circulation et stationnement routiers

+128 218 617

04

Amendes forfaitaires de la police de la circulation et amendes forfaitaires majorées issues des infractions constatées par la voie du système de contrôle-sanction automatisé et des infractions aux règles de la police de la circulation

+128 218 617

Gestion du patrimoine immobilier de lÉtat

-20 000 000

01

Produits des cessions immobilières

-20 000 000

Total

+101 218 617

IV. – COMPTES DE CONCOURS FINANCIERS

(En euros)

Numéro de ligne

Intitulé de la recette

Révision des évaluations pour 2022

Avances à divers services de lÉtat ou organismes gérant des services publics

-19 438 505

03

Remboursement des avances octroyées à des organismes distincts de l’État et gérant des services publics

-29 627 091

04

Remboursement des avances octroyées à des services de l’État

+10 057 524

06

Remboursement des avances octroyées aux exploitants d’aéroports touchés par la crise de covid-19 au titre des dépenses de sûreté-sécurité

+131 062

Avances aux collectivités territoriales

+493 508 448

Section : Avances sur le montant des impositions revenant aux régions, départements, communes, établissements et divers organismes

+493 508 448

05

Recettes diverses

+70 182 861

09

Taxe d’habitation et taxes annexes

+606 780 839

10

Taxes foncières et taxes annexes

-23 662 266

11

Cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises

-171 374 080

12

Cotisation foncière des entreprises et taxes annexes

+11 581 094

Prêts à des États étrangers

+624 489 025

Section : Prêts à des États étrangers en vue de faciliter la vente de biens et de services concourant au développement du commerce extérieur de la France

+23 375 253

01

Remboursement des prêts accordés à des États étrangers en vue de faciliter la vente de biens et de services concourant au développement du commerce extérieur de la France

+23 375 253

Section : Prêts à des États étrangers pour consolidation de dettes envers la France

+30 871 525

02

Remboursement de prêts du Trésor

+30 871 525

Section : Prêts aux États membres de la zone euro

+570 242 247

04

Remboursement des prêts consentis aux États membres de l’Union européenne dont la monnaie est l’euro

+570 242 247

Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés

+30 811 155

Section : Prêts pour le développement économique et social

+30 811 155

06

Prêts pour le développement économique et social

+53 311 155

09

Prêts aux petites et moyennes entreprises

-131 500 000

12

Prêts octroyés dans le cadre des programmes d’investissement d’avenir

+109 000 000

Total

+1 129 370 123

SECONDE PARTIE

MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

TITRE Ier

AUTORISATIONS BUDGÉTAIRES POUR 2022. – CRÉDITS DES MISSIONS

I. – AUTORISATION DES CRÉDITS DES MISSIONS

Article 3
Dossier législatif : projet de loi de finances rectificative pour 2022
Article 6

Article 4

I. – Il est ouvert aux ministres, pour 2022, au titre du budget général, des autorisations d’engagement et des crédits de paiement supplémentaires s’élevant respectivement aux montants de 13 059 528 298 € et de 12 891 005 071 €, conformément à la répartition par mission donnée à l’état B annexé à la présente loi.

II. – Il est annulé pour 2022, au titre du budget général, des autorisations d’engagement et des crédits de paiement s’élevant respectivement aux montants de 6 283 347 086 € et de 6 045 121 815 €, conformément à la répartition par mission donnée à l’état B annexé à la présente loi.

État B

RÉPARTITION DES CRÉDITS POUR 2022 OUVERTS ET ANNULÉS, PAR MISSION ET PROGRAMME, AU TITRE DU BUDGET GÉNÉRAL

BUDGET GÉNÉRAL

(En euros)

Mission / Programme

Autorisations dengagement supplémentaires ouvertes

Crédits de paiement supplémentaires ouverts

Autorisations dengagement annulées

Crédits de paiement annulés

Action extérieure de lÉtat

24 120 019

26 636 001

Action de la France en Europe et dans le monde

3 300 000

6 100 943

Diplomatie culturelle et d’influence

6 850 353

6 850 353

Français à l’étranger et affaires consulaires

13 969 666

13 684 705

Administration générale et territoriale de lÉtat

45 623 702

54 436 555

Administration territoriale de l’État

16 492 169

14 424 638

Vie politique

13 983 583

16 402 758

Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur

15 147 950

23 609 159

Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales

431 293 637

454 023 143

5 012 852

5 054 166

Compétitivité et durabilité de l’agriculture, de l’agroalimentaire, de la forêt, de la pêche et de l’aquaculture

400 811 069

444 173 310

Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation

30 482 568

9 849 833

Conduite et pilotage des politiques de l’agriculture

5 012 852

5 054 166

Aide publique au développement

31 485 455

22 719 919

82 648 689

24 637 717

Aide économique et financière au développement

82 648 689

24 637 717

Solidarité à l’égard des pays en développement

31 485 455

22 719 919

Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation

26 774 719

26 814 496

Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation

19 759 919

19 759 919

Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale

7 014 800

7 054 577

Cohésion des territoires

45 071 358

32 897 502

13 868 478

16 923 022

Urbanisme, territoires et amélioration de l’habitat

9 931 653

12 681 653

Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire

45 071 358

32 897 502

Interventions territoriales de l’État

3 936 825

4 241 369

Conseil et contrôle de lÉtat

2 940 256

4 494 469

Conseil d’État et autres juridictions administratives

2 557 882

4 131 228

Conseil économique, social et environnemental

362 415

362 415

Haut Conseil des finances publiques

19 959

826

Crédits non répartis

500 000 000

500 000 000

Dépenses accidentelles et imprévisibles

500 000 000

500 000 000

Culture

70 731 087

75 731 087

1 654 311

1 654 311

Patrimoines

15 320 907

15 320 907

Création

42 383 592

47 383 592

Transmission des savoirs et démocratisation de la culture

13 026 588

13 026 588

Soutien aux politiques du ministère de la culture

1 654 311

1 654 311

Défense

1 450 500 000

1 325 600 000

149 600 000

149 600 000

Environnement et prospective de la politique de défense

25 812 717

25 812 717

Préparation et emploi des forces

1 450 500 000

1 325 600 000

Soutien de la politique de la défense

31 359 538

31 359 538

Équipement des forces

92 427 745

92 427 745

Direction de laction du Gouvernement

64 042 069

58 914 813

Coordination du travail gouvernemental

24 069 144

18 663 697

Protection des droits et libertés

1 004 122

1 022 514

Présidence française du Conseil de l’Union européenne en 2022

38 968 803

39 228 602

Écologie, développement et mobilité durables

2 473 684 758

1 913 874 262

195 334 330

167 543 242

Infrastructures et services de transports

133 287 157

83 998 902

Affaires maritimes

10 039 375

10 067 076

Paysages, eau et biodiversité

83 235 153

79 234 442

Expertise, information géographique et météorologie

500 000

Prévention des risques

15 294 955

15 560 483

Énergie, climat et après-mines

2 255 162 548

1 748 141 018

Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables

170 000 000

141 915 683

Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par lÉtat (crédits évaluatifs)

1 999 900

1 999 900

Soutien exceptionnel à la rénovation thermique des logements résidentiels (ligne supprimée)

Soutien à l’achat de pellets et de bûches de bois (ligne supprimée)

Économie

7 670 868

268 217 106

371 356 882

Développement des entreprises et régulations

242 311 878

244 539 361

Plan “France Très haut débit”

22 364 795

111 980 044

Statistiques et études économiques

7 670 868

2 001 517

Stratégies économiques

3 540 433

12 835 960

Financement des opérations patrimoniales en 2021 et en 2022 sur le compte d’affectation spéciale “Participations financières de l’État” (ligne nouvelle)

Engagements financiers de lÉtat

2 000 000

2 000 000

2 033 124 721

2 014 552 724

Charge de la dette et trésorerie de l’État (crédits évaluatifs)

2 000 000

2 000 000

Appels en garantie de l’État (crédits évaluatifs)

2 028 049 832

2 002 049 832

Épargne

2 408 337

2 408 337

Dotation du Mécanisme européen de stabilité

2 666 552

2 666 552

Fonds de soutien relatif aux prêts et contrats financiers structurés à risque

7 428 003

Enseignement scolaire

37 708 092

39 778 773

Enseignement scolaire public du premier degré

1 603 003

1 603 003

Enseignement scolaire public du second degré

4 481 846

4 481 846

Vie de l’élève

13 484 678

15 555 359

Enseignement privé du premier et du second degrés

5 850 639

5 850 639

Enseignement technique agricole

12 287 926

12 287 926

Gestion des finances publiques

98 657 204

7 848 117

5 805 064

Gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public local

47 408 247

6 267 135

Conduite et pilotage des politiques économiques et financières

42 529 512

5 805 064

Facilitation et sécurisation des échanges

8 719 445

1 580 982

Immigration, asile et intégration

19 498 369

19 500 822

18 685 781

18 688 234

Immigration et asile

19 498 369

19 500 822

Intégration et accès à la nationalité française

18 685 781

18 688 234

Justice

18 184 597

17 967 929

238 678 049

161 854 708

Justice judiciaire

33 591 341

49 947 503

Administration pénitentiaire

178 435 311

74 857 224

Protection judiciaire de la jeunesse

7 169 517

20 082 622

Accès au droit et à la justice

18 184 597

17 967 929

Conduite et pilotage de la politique de la justice

18 432 087

16 344 150

Conseil supérieur de la magistrature

1 049 793

623 209

Médias, livre et industries culturelles

7 000 000

7 000 000

865 836

15 862 777

Presse et médias

865 836

15 862 777

Livre et industries culturelles

7 000 000

7 000 000

Outre-mer

237 422 951

241 662 541

65 185 100

Emploi outre-mer

236 724 978

241 662 541

Conditions de vie outre-mer

697 973

65 185 100

Plan de relance

298 500 000

298 500 000

Écologie

298 500 000

Compétitivité

222 991 491

Cohésion

75 508 509

Plan durgence face à la crise sanitaire

1 250 000 000

1 250 000 000

1 070 074 317

1 094 968 488

Prise en charge du chômage partiel et financement des aides d’urgence aux employeurs et aux actifs précaires à la suite de la crise sanitaire

405 258 628

405 258 628

Fonds de solidarité pour les entreprises à la suite de la crise sanitaire

52 297 084

77 200 887

Renforcement exceptionnel des participations financières de l’État dans le cadre de la crise sanitaire

296 978 021

296 978 021

Compensation à la sécurité sociale des allègements de prélèvements pour les entreprises les plus touchées par la crise sanitaire

1 250 000 000

1 250 000 000

Matériels sanitaires pour faire face à la crise de la covid-19

315 540 584

315 530 952

Recherche et enseignement supérieur

153 851 151

151 671 150

168 797 083

193 348 169

Formations supérieures et recherche universitaire

153 851 151

151 671 150

Vie étudiante

63 278 657

63 097 657

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

69 898 575

61 061 701

Recherche spatiale

11 981 885

11 981 885

Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables

15 966 535

15 966 535

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

6 929 664

40 498 623

Enseignement supérieur et recherche agricoles

741 767

741 768

Régimes sociaux et de retraite

61 244 474

60 392 474

Régimes sociaux et de retraite des transports terrestres

60 919 874

60 067 874

Régimes de retraite des mines, de la SEITA et divers

324 600

324 600

Relations avec les collectivités territoriales

41 000 000

41 000 000

80 000 000

Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements

80 000 000

Concours spécifiques et administration

41 000 000

41 000 000

Remboursements et dégrèvements

2 721 241 020

2 721 241 020

142 000 000

142 000 000

Remboursements et dégrèvements d’impôts d’État (crédits évaluatifs)

2 721 241 020

2 721 241 020

Remboursements et dégrèvements d’impôts locaux (crédits évaluatifs)

142 000 000

142 000 000

Santé

1 358 457 945

1 358 457 945

71 925 746

70 244 278

Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

7 458 935

5 777 467

Protection maladie

64 466 811

64 466 811

Compensation à la Sécurité sociale du coût des dons de vaccins à des pays tiers et reversement des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet “Ségur investissement” du plan national de relance et de résilience (PNRR)

1 358 457 945

1 358 457 945

Sécurités

18 116 960

47 624 793

60 969 502

36 508 539

Police nationale

56 272 499

34 521 907

Gendarmerie nationale

21 370 458

2 674 571

Sécurité et éducation routières

2 022 432

1 986 632

Sécurité civile

18 116 960

26 254 335

Solidarité, insertion et égalité des chances

658 160 938

658 184 841

12 100 000

3 000 000

Inclusion sociale et protection des personnes

428 160 938

428 184 841

Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales

12 100 000

3 000 000

Prise en charge par l’État du financement de l’indemnité inflation

230 000 000

230 000 000

Aide exceptionnelle aux communes en vue de contribuer à un complément de rémunération des personnels de leurs centres municipaux de santé (ligne supprimée)

Sport, jeunesse et vie associative

125 274 716

140 074 039

Sport

24 864 900

Jeunesse et vie associative

114 174 716

115 209 139

Jeux olympiques et paralympiques 2024

11 100 000

Transformation et fonction publiques

40 000 000

40 000 000

200 149 129

38 828 527

Rénovation des cités administratives et autres sites domaniaux multi-occupants

40 000 000

40 000 000

Transformation publique

196 000 000

33 000 000

Innovation et transformation numériques

304 000

1 789 156

Fonction publique

3 845 129

4 039 371

Travail et emploi

1 627 000 000

2 502 000 000

283 413 109

535 964 247

Accès et retour à l’emploi

273 000 000

524 000 000

Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi

1 627 000 000

2 502 000 000

Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail

5 413 109

6 964 247

Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail

5 000 000

5 000 000

Total

13 059 528 298

12 891 005 071

6 283 347 086

6 045 121 815

˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙

Article 4
Dossier législatif : projet de loi de finances rectificative pour 2022
Article 9 C

Article 6

I. – Il est annulé pour 2022, au titre des comptes d’affectation spéciale, des autorisations d’engagement et des crédits de paiement s’élevant respectivement aux montants de 2 007 000 000 € et de 2 007 000 000 €, conformément à la répartition par mission donnée à l’état D annexé à la présente loi.

II. – Il est ouvert aux ministres, pour 2022, au titre des comptes d’affectation spéciale, des autorisations d’engagement et des crédits de paiement supplémentaires s’élevant respectivement aux montants de 208 218 617 € et de 168 218 617 €, conformément à la répartition par mission donnée à l’état D annexé à la présente loi.

III. – Il est annulé pour 2022, au titre des comptes de concours financiers, des autorisations d’engagement et des crédits de paiement s’élevant respectivement aux montants de 174 558 810 € et de 171 878 810 €, conformément à la répartition par mission donnée à l’état D annexé à la présente loi.

IV. – Il est ouvert aux ministres, pour 2022, au titre des comptes de concours financiers, des autorisations d’engagement et des crédits de paiement supplémentaires s’élevant respectivement aux montants de 613 757 192 € et de 613 757 192 €, conformément à la répartition par mission donnée à l’état D annexé à la présente loi.

II. – PLAFONDS DES AUTORISATIONS D’EMPLOIS

˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙

État D

RÉPARTITION DES CRÉDITS POUR 2022 OUVERTS ET ANNULÉS, PAR MISSION ET PROGRAMME, AU TITRE DES COMPTES SPÉCIAUX

I. – COMPTES D’AFFECTATION SPÉCIALE

(En euros)

Mission / Programme

Autorisations dengagement supplémentaires ouvertes

Crédits de paiement supplémentaires ouverts

Autorisations dengagement annulées

Crédits de paiement annulés

Contrôle de la circulation et du stationnement routiers

128 218 617

128 218 617

7 000 000

7 000 000

Structures et dispositifs de sécurité routière

7 000 000

7 000 000

Contribution à l’équipement des collectivités territoriales pour l’amélioration des transports en commun, de la sécurité et de la circulation routières

67 955 867

67 955 867

Désendettement de l’État

60 262 750

60 262 750

Gestion du patrimoine immobilier de lÉtat

80 000 000

40 000 000

Opérations immobilières et entretien des bâtiments de l’État

80 000 000

40 000 000

Participations financières de lÉtat

2 000 000 000

2 000 000 000

Opérations en capital intéressant les participations financières de l’État

2 000 000 000

2 000 000 000

Total

208 218 617

168 218 617

2 007 000 000

2 007 000 000

II. – COMPTES DE CONCOURS FINANCIERS

(En euros)

Mission / Programme

Autorisations dengagement supplémentaires ouvertes

Crédits de paiement supplémentaires ouverts

Autorisations dengagement annulées

Crédits de paiement annulés

Avances à divers services de lÉtat ou organismes gérant des services publics

636 542

11 436 542

Avances à des organismes distincts de l’État et gérant des services publics

636 542

11 436 542

Avances aux collectivités territoriales

513 757 192

513 757 192

Avances sur le montant des impositions revenant aux régions, départements, communes, établissements et divers organismes

513 757 192

513 757 192

Prêts à des États étrangers

100 000 000

100 000 000

173 922 268

160 442 268

Prêts du Trésor à des États étrangers en vue de faciliter la vente de biens et de services concourant au développement du commerce extérieur de la France

13 480 000

Prêts à des États étrangers pour consolidation de dettes envers la France

160 442 268

160 442 268

Prêts à l’Agence française de développement en vue de favoriser le développement économique et social dans des États étrangers

100 000 000

100 000 000

Total

613 757 192

613 757 192

174 558 810

171 878 810

˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙

TITRE II

AUTRES DISPOSITIONS

I. – MESURES FISCALES ET MESURES BUDGÉTAIRES NON RATTACHÉES

˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙

Article 6
Dossier législatif : projet de loi de finances rectificative pour 2022
Article 9 DA

Article 9 C

I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :

1° Le I de l’article 1586 est ainsi modifié :

a) Au 3°, les mots : « qui n’est pas affectée » sont remplacés par les mots : « ainsi que la part de la composante de l’imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux relative aux centrales de production d’énergie électrique d’origine photovoltaïque prévue à l’article 1519 F qui ne sont pas affectées » ;

b) Au 4°, les mots : « photovoltaïque ou » sont supprimés ;

2° Le I bis de l’article 1609 nonies C est ainsi modifié :

a) Au c du 1, les mots : « photovoltaïque ou » sont remplacés par les mots : « photovoltaïque installées avant le 1er janvier 2023, ou d’origine » ;

b) Le même c est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Pour les centrales de production d’énergie électrique d’origine photovoltaïque installées à compter du 1er janvier 2023, les établissements publics de coopération intercommunale mentionnés au I de l’article 1379-0 bis sont substitués aux communes membres à hauteur de 60 % du produit de la composante de l’imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux perçu par ces dernières. Ils perçoivent également 20 % du produit total de la même composante ; » ;

c) Après le 1 bis, il est inséré un 1 ter ainsi rédigé :

« 1 ter Sur délibération de la commune d’implantation des installations prise dans les conditions prévues au I de l’article 1639 A bis, d’une fraction du produit perçu par la commune des composantes de l’imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux relatives aux centrales de production d’énergie électrique d’origine photovoltaïque installées à compter du 1er janvier 2023, prévue à l’article 1519 F ; ».

II. – Le I s’applique aux centrales de production d’énergie électrique d’origine photovoltaïque installées à compter du 1er janvier 2023.

Article 9 C
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Article 9 D

Article 9 DA

I. – À la seconde phrase du 16° du I et à la seconde phrase du 5° du II de l’article 1379 du code général des impôts, le mot : « reverse » est remplacé par les mots : « peut reverser ».

II. – Les délibérations prévoyant les modalités de reversement, au titre de 2022, de tout ou partie de la taxe perçue par la commune à l’établissement public de coopération intercommunale ou au groupement de collectivités dont elle est membre demeurent applicables tant qu’elles n’ont pas été rapportées ou modifiées par une délibération prise dans un délai de deux mois à compter de la publication de la présente loi.

III. – La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales des I et II est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.

IV. – La perte de recettes résultant pour l’État du III est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

Article 9 DA
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Article 9 E

Article 9 D

Après le mot : « régissent », la fin du premier alinéa du b du 6° de l’article 1382 du code général des impôts est ainsi rédigée : « , par les groupements d’intérêt économique constitués entre exploitations agricoles ou par les sociétés exclusivement constituées entre associés exploitants agricoles à condition que ces bâtiments ne soient utilisés qu’au titre des exploitations agricoles de ces mêmes associés. »

Article 9 D
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Article 9 G

Article 9 E

I. – L’article 1635 quater J du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Au 3°, le montant : « 200 € » est remplacé par le montant : « 250 € » ;

2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Le montant prévu au 3° du présent article est actualisé le 1er janvier de chaque année en fonction du dernier indice du coût de la construction publié par l’Institut national de la statistique et des études économiques. Ce montant est arrondi, s’il y a lieu, à l’euro inférieur. »

II. – Par dérogation à l’article 14 de l’ordonnance n° 2022-883 du 14 juin 2022 relative au transfert à la direction générale des finances publiques de la gestion de la taxe d’aménagement et de la part logement de la redevance d’archéologie préventive, le 1° du I du présent article s’applique aux opérations afférentes aux autorisations d’urbanisme délivrées à compter du 1er janvier 2023, à l’issue d’une demande de permis déposée avant le 1er septembre 2022 ou consécutives à une demande de permis modificatif déposée à compter du 1er septembre 2022 et rattachée à une autorisation d’urbanisme initiale résultant d’une demande déposée avant cette date, de même qu’aux procès-verbaux émis à compter du 1er janvier 2023 constatant l’achèvement de constructions ou d’aménagements en infraction aux obligations résultant d’une autorisation d’urbanisme.

III. – A. – Le 1° du I entre en vigueur le 1er janvier 2023 et s’applique aux opérations pour lesquelles le fait générateur de la taxe d’aménagement intervient à compter de cette date.

B. – Le 2° du I entre en vigueur le 1er janvier 2024.

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Article 9 E
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Article 10

Article 9 G

I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Le troisième alinéa de l’article L. 122-2 est supprimé ;

2° L’article L. 122-4 est abrogé ;

3° Au début de l’article L. 122-5, les mots : « les dispositions des articles L. 122-2 à L. 122-4 sont applicables » sont remplacés par les mots : « L’article L. 122-2 est applicable ».

II. – Le I est applicable à compter du 1er janvier 2023.

II. – AUTRES MESURES

Écologie, développement et mobilité durables

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Relations avec les collectivités territoriales

Article 9 G
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Article 3 et État A

Article 10

La dotation de 120 000 000 euros instituée à l’article 12 de la loi n° 2022-1157 du 16 août 2022 de finances rectificative pour 2022 au profit des départements au titre de la compensation de la revalorisation anticipée du montant forfaitaire des allocations mentionnées aux articles L. 262-2 et L. 522-14 du code de l’action sociale et des familles et résultant de l’application de l’article 9 de la loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat est ainsi répartie :

1° Sont exclus du bénéfice de cette dotation la collectivité territoriale de Guyane, les départements de Mayotte et de La Réunion ainsi que ceux bénéficiant de l’expérimentation prévue à l’article 43 de la loi n° 2021-1900 du 30 décembre 2021 de finances pour 2022 depuis le 1er janvier 2022. Sont inclues au bénéfice de cette dotation les collectivités de Saint-Martin, de Saint-Barthélemy et de Saint-Pierre-et-Miquelon ;

2° La part de la dotation versée à chaque département éligible est égale au produit entre, d’une part, le montant de la dotation mentionné au premier alinéa du présent article et, d’autre part, le rapport entre les deux termes suivants :

a) Le montant de la dépense afférente aux allocations mentionnées au même premier alinéa prise en charge par le département au titre de l’exercice 2021, tel qu’il figure dans le compte de gestion ;

b) Le montant de la dépense afférente aux allocations mentionnées audit premier alinéa prise en charge par l’ensemble des départements au titre de l’exercice 2021, tel qu’il figure dans les comptes de gestion, à l’exclusion de celle exposée par l’État dans les départements dont la compétence d’attribution et de financement du revenu de solidarité active lui a été transférée et par les départements participant à l’expérimentation prévue à l’article 43 de la loi n° 2021-1900 du 30 décembre 2021 précitée depuis le 1er janvier 2022.

Prêts à des États étrangers

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M. le président. Nous passons à la présentation des amendements du Gouvernement avant d’en venir aux explications de vote des groupes.

articles liminaire à 2 bis a

M. le président. Sur les articles liminaire à 2 bis A, je ne suis saisi d’aucun amendement.

Le vote est réservé.

article 3 et état a

Article 10
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Article 4 et État B

M. le président. L’amendement n° 2, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi le tableau de l’alinéa 2 :

(En millions deuros)

RESSOURCES

CHARGES

SOLDE

Budget général

 

 

 

Recettes fiscales brutes / dépenses brutes

6 769

6 980

À déduire : Remboursements et dégrèvements

2 579

2 579

Recettes fiscales nettes / dépenses nettes

4 189

4 401

Recettes non fiscales

990

Recettes totales nettes / dépenses nettes

5 179

4 401

À déduire : Prélèvements sur recettes au profit des collectivités territoriales et de lUnion européenne

-2 253

Montants nets pour le budget général

7 432

4 401

+3 031

Évaluation des fonds de concours et crédits correspondants

0

0

Montants nets pour le budget général, y compris fonds de concours

7 432

4 401

 

Budgets annexes

 

 

 

Contrôle et exploitation aériens

281

-13

+294

Publications officielles et information administrative

10

-2

+12

Totaux pour les budgets annexes

291

-15

+306

Évaluation des fonds de concours et crédits correspondants :

Contrôle et exploitation aériens

0

0

Publications officielles et information administrative

0

0

Totaux pour les budgets annexes, y compris fonds de concours

291

-15

 

Comptes spéciaux

 

 

 

Comptes d’affectation spéciale

101

-1 839

+1 940

Comptes de concours financiers

1 129

442

+687

Comptes de commerce (solde)

-

Comptes d’opérations monétaires (solde)

-

Solde pour les comptes spéciaux

 

 

+2 627

Solde général

 

 

+ 5 965

* Les montants figurant dans le présent tableau sont arrondis au million deuros le plus proche ; il résulte de lapplication de ce principe que le montant arrondi des totaux et sous-totaux peut ne pas être égal à la somme des montants arrondis entrant dans son calcul.

 

(En milliards deuros)

II. – Rédiger ainsi le tableau de l’alinéa 5 :

Besoin de financement

Amortissement de la dette à moyen et long termes

145,8

 Dont remboursement du nominal à valeur faciale

140,8

 Dont suppléments d’indexation versés à l’échéance (titres indexés)

5,0

Amortissement de la dette reprise de SNCF Réseau

3,0

Amortissement des autres dettes reprises

0,0

Déficit budgétaire

171,0

Autres besoins de trésorerie

-15,4

 Total

304,4

Ressources de financement

Émissions de dette à moyen et long termes nettes des rachats

260,0

Ressources affectées à la Caisse de la dette publique et consacrées au désendettement

1,9

Variation nette de l’encours des titres d’État à court terme

0,0

Variation des dépôts des correspondants

3,0

Variation des disponibilités du Trésor à la Banque de France et des placements de trésorerie de l’État

50,5

Autres ressources de trésorerie

-11,0

 Total

304,4

La parole est à M. le ministre délégué.

M. Gabriel Attal, ministre délégué. Nous ajustons l’article d’équilibre pour tirer les conséquences de l’accord trouvé en CMP et lever les gages.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur. Avis favorable.

M. le président. Le vote est réservé.

article 4 et état b

Article 3 et État A
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Explications de vote sur l'ensemble (début)

M. le président. L’amendement n° 1, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Mission Écologie, développement et mobilité durables

Modifier ainsi les ouvertures de crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

+ (majorer l’ouverture de)

- (minorer l’ouverture de)

+ (majorer l’ouverture de)

- (minorer l’ouverture de)

Infrastructures et services de transports

 

 

 

 

Affaires maritimes

 

 

 

 

Paysages, eau et biodiversité

 

 

 

 

Expertise, information géographique et météorologie

 

 

 

 

Prévention des risques

dont titre 2

 

 

 

 

Énergie, climat et après-mines

 

 

 

 

Service public de l’énergie

 

 

 

 

Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables

dont titre 2

170 000 000

 

133 998 902

 

Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l’État (crédits évaluatifs)

 

 

 

 

TOTAL

170 000 000

 

133 998 902

 

SOLDE

+ 170 000 000

+ 133 998 902

La parole est à M. le ministre délégué.

M. Gabriel Attal, ministre délégué. Cet amendement permet de lever les gages à la suite des modifications apportées en CMP à la mission « Écologie, développement et mobilité durables », destinées à financer la rénovation des routes, des ponts, du réseau d’eau et à lutter contre les nuisances sonores.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur. Cet amendement répond aux demandes du Sénat. Avis favorable.

M. le président. Le vote est réservé.

articles 6 à 10

M. le président. Sur les articles 6 à 10, je ne suis saisi d’aucun amendement.

Le vote est réservé.

Vote sur l’ensemble

Article 4 et État B
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Explications de vote sur l'ensemble (fin)

M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble du projet de loi dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, modifié par les amendements du Gouvernement, je vais donner la parole, pour explication de vote, à un représentant par groupe.

La parole à M. Didier Rambaud, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants. (M. Bernard Fialaire applaudit.)

M. Didier Rambaud. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en première lecture, j’espérais que notre assemblée ferait preuve de dialogue constructif. Tel fut le cas, compte tenu de l’accord trouvé en commission mixte paritaire.

Nous ne pouvons que nous réjouir de cet accord si l’on s’arrête un instant sur les apports du Sénat provenant des divers groupes politiques.

Je salue tout d’abord l’ouverture d’une enveloppe de 60 millions d’euros pour la rénovation ou la construction de ponts, la commission ayant notamment été inspirée par le travail de mon collègue Michel Dagbert, coauteur avec Patrick Chaize d’un rapport publié en 2019 sur la sécurité des ponts.

Je salue de même les 100 millions d’euros supplémentaires débloqués pour accélérer la rénovation des réseaux d’eau et la réduction des fuites.

Je salue également l’abrogation de la réforme de la répartition de la taxe d’aménagement entre les communes et leurs groupements, pour revenir à une situation plus simple, celle de la liberté des communes. Alors qu’il s’agissait d’un sujet de tension au sein du « bloc local », les élus locaux pourront désormais décider ou non de reverser une part du produit de cette taxe aux EPCI.

Je salue encore l’ouverture par le Sénat de 20 millions d’euros pour financer des projets d’insonorisation destinés aux riverains des aéroports, un sujet cher à notre collègue Vincent Capo-Canellas.

Je salue surtout l’augmentation de la part de l’État dans le financement des maisons France Services, pour atteindre l’objectif de 50 000 euros par établissement d’ici à 2023, comme le proposait notre collègue Bernard Delcros dans son rapport. France Services est une réussite, qui porte ses fruits. Vecteurs de cohésion sociale, les services publics reviennent dans de nombreux territoires éloignés des métropoles. Nous atteindrons l’objectif de 2 500 maisons France Services, avec un maillage de l’ensemble du territoire.

L’attente est forte chez nos concitoyens, et je ne peux que me réjouir de cet effort qui s’inscrit dans le projet du Président de la République et du Gouvernement, à l’image des réouvertures de six sous-préfectures annoncées en octobre dernier.

Comme je l’indiquais en première lecture, ce PLFR démontre ainsi que, lorsqu’un dialogue apaisé et constructif s’installe, le Parlement peut travailler sereinement sur un texte budgétaire et l’adopter, même en l’absence de majorité absolue, avec des amendements issus des oppositions.

Le président de la commission des finances de l’Assemblée nationale, Éric Coquerel, l’a souligné lui-même : le texte final conserve « tous les amendements » que son groupe proposait, à savoir les aides pour les chaudières à bois, pour l’aide alimentaire et pour les communes qui souhaitent revaloriser les revenus de leur personnel soignant.

Voter ce PLFR, c’est aussi voter les mesures historiques présentées par le Gouvernement pour faire face à la hausse des prix de l’énergie : le chèque énergie exceptionnel, qui concernera 12 millions de foyers, avec 200 ou 100 euros à la clef pour les ménages les plus modestes.

Sans oublier, bien sûr, la prolongation de la remise carburant de 30 centimes jusqu’au 15 novembre, pour un coût de 440 millions d’euros, puis de 10 centimes jusqu’au 31 décembre. Sur l’année 2022, cette aide sur le prix du litre de carburant représente au total 8 milliards d’euros, soit 30 millions d’euros par jour.

Voter ce PLFR, c’est aussi voter le fonds de 275 millions d’euros pour aider les universités, les centres de recherche et les Crous, ou encore les 200 millions d’euros supplémentaires pour les achats de carburant des armées pour les opérations extérieures.

Au total, ce budget rectificatif prévoit 2,5 milliards d’euros d’aides exceptionnelles pour faire face à la hausse des prix de l’énergie.

Voilà autant de raisons qui conduiront mon groupe, le RDPI, à voter sans hésiter ce second PLFR.

M. le président. La parole est à M. Thierry Cozic, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Thierry Cozic. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous sommes réunis afin d’aborder le retour de commission mixte paritaire du PLFR de fin de gestion.

Je me félicite qu’un accord ait été trouvé entre les deux chambres. Alors que les 49.3 s’enchaînent, il est important de constater que, sur ce texte, la représentation parlementaire s’en sort par le haut.

Il est notable, tout d’abord, de constater que les aides accordées aux associations de distribution de denrées alimentaires, aux foyers qui se chauffent au bois ou aux pellets, aux universités, aux armées, à l’Ukraine ou aux agriculteurs ont été maintenues.

Un autre motif de satisfaction vient du travail que le Sénat a fait sur le nouvel article 9 DA du présent texte.

En effet, auparavant, les communes pouvaient reverser tout ou partie du produit de la part locale de la taxe d’aménagement aux structures intercommunales. L’article 109 de la loi de finances pour 2022 est venu modifier les mots « peut-être » pour les remplacer par le mot « est ». Ce faisant, le reversement, jusque-là simple faculté pour les communes, est devenu obligatoire. Cette obligation de reversement niait le fondement même de la dynamique de coopération intercommunale.

C’est à la commune de garder la capacité d’apprécier librement, en bonne intelligence avec l’intercommunalité, la pertinence d’un partage éventuel de la taxe d’aménagement avec l’EPCI, en fonction des équipements publics intercommunaux qu’elle accueille sur son territoire.

Faire de cette faculté une obligation relevait de l’infantilisation des maires, à qui il fallait imposer ce que la loi leur permettait déjà de faire s’ils jugeaient une telle répartition légitime.

Le nouveau texte vise à revenir à la situation antérieure à celle qui a été créée par l’article 109 de la loi de finances pour 2022 ; c’est louable.

Les maires ne méritaient pas une telle infantilisation ; ils méritent au contraire toute notre considération, laquelle doit se transcrire par l’apport de moyens nécessaires à l’exercice de leurs missions.

Sur ce point, une étude du cabinet d’audit S&P estime que les collectivités locales vont perdre 3 milliards d’euros par an de budget avec la stabilisation de la dotation globale de fonctionnement (DGF), la suppression de la taxe d’habitation issue de la réforme de la fiscalité locale en 2021 et la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE).

Monsieur le ministre, vous prévoyez que les collectivités locales contribuent pour un quart à la réduction des dépenses publiques de 2023 à 2027. Je le dis sans ambages, c’est pour elles un lourd fardeau, étant donné qu’elles ne représentent que 19 % des dépenses, 8 % de la dette et qu’elles n’ont pas de déficit.

Je pense aussi que cela pourrait affecter négativement le tissu économique local, car il n’est pas inutile de rappeler que les collectivités représentent plus de 60 % de l’investissement public total. De fait, leur investissement devrait baisser de 12 % hors inflation d’ici à 2024 par rapport à son pic de 2019.

Tous vos dogmes mènent donc à la baisse des impôts de production, qui, sous couvert de garantie de compétitivité des entreprises, n’ont de cesse de baisser.

Car le mythe d’une spirale des petits entrepreneurs écrasés par la fiscalité locale n’existe pas. Cette baisse des impôts de production est en réalité la poursuite d’une logique plus générale de baisse des prélèvements, qui conduit à sacrifier l’investissement public sur l’autel de la compétitivité.

Pour s’en convaincre, la littérature scientifique ne met pas en évidence un lien entre niveau de fiscalité et dynamisme des entreprises, et l’on sait que la création d’emplois par les entreprises dépend autant de leur lieu d’implantation, qui est modelé par l’investissement public, que de leurs caractéristiques individuelles.

Vous le savez, la baisse des impôts de production affecte le financement de nos collectivités locales.

Si l’État déclare la compenser à l’euro près, il devient malgré tout décideur et revient sur l’autonomie financière des collectivités. C’est précisément pour cette raison que, dans sa note, le Conseil d’analyse économique recommande d’affecter aux régions une part des recettes de la TVA en fonction du poids des collectivités dans la valeur ajoutée globale des entreprises.

Dans une certaine mesure, ce PLFR de fin de gestion va dans le bon sens. Néanmoins, parce qu’il traduit encore l’idéologie qui est la vôtre, notamment eu égard à la mise sous tutelle des finances des collectivités locales et à la baisse chronique des impôts de production, le groupe SER s’abstiendra. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. le président. La parole est à M. Éric Bocquet, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

M. Éric Bocquet. Monsieur le ministre, vous avez bien conservé les qualités de porte-parole du Gouvernement que vous fûtes un temps, sémillant VRP de la politique gouvernementale. C’est votre rôle. (M. Vincent Capo-Canellas sourit.)

La commission mixte paritaire a trouvé un accord sur le projet de loi de finances rectificative pour 2022.

Chacun verra des avancées dans un texte dont la portée est toute relative. Il intègre des mesures qui arrivent trop tard, bien trop tard, ces retards étant la conséquence de choix inadaptés face à l’explosion inédite des prix de l’énergie.

Les ménages qui peinaient à réaliser une rénovation énergétique globale de leur logement sont restés longtemps hors radars. Les mesures décidées en faveur des universités, qui étaient sur le point de renoncer à accueillir leurs étudiants, sont très loin du compte.

Autant d’angles morts qui n’ont pas vocation à figurer dans un projet de loi de finances rectificative : la rectification doit intervenir au moment de la loi de finances initiale, dont nous sommes en train de débattre, au pire par la voie d’un collectif budgétaire.

À trop tarder, la situation risque de se crisper vis-à-vis des oubliés, qui se sentent délaissés, alors qu’inéluctablement il fallait les soutenir. Les endiviers du Nord, par exemple, sont très inquiets à très brève échéance, tout comme de très nombreuses PME.

Il y a, par ailleurs, ceux qui ont pu bénéficier des mesures du paquet pouvoir d’achat. Dans ce « paquet pouvoir de survie » adopté à l’été, les avancées étaient notoirement insuffisantes, on le constate aujourd’hui. Tant et si bien que le ministre se félicitait de « cette première étape », renchérissant en ces termes : « Le Gouvernement souhaite que nous puissions continuer dans cette voie au service de nos compatriotes. »

Mais l’inflation se confirme, insistante – nous l’avons expliqué en première lecture –, et le Gouvernement s’est arrêté en chemin. Après l’augmentation du point d’indice, inférieure de moitié à l’inflation, quelles sont les nouvelles hausses prévues ? Aucune. À quelle nouvelle revalorisation des minima sociaux, alors que leur hausse est inférieure de plus de deux points à l’inflation de l’année, pouvons-nous nous attendre ? Aucune.

Il est insupportable, nous vous le disons, que nombre de nos concitoyens voient leur capacité de vivre ou plutôt de survivre diminuer en 2022. Notons que le budget 2023 ne contient d’ailleurs aucune mesure en leur faveur.

Cela est d’autant plus inacceptable que le projet de budget rectificatif acte la fin des aides au carburant à la fin de l’année et qu’il se borne à un chèque énergie exceptionnel pour les ménages bien au-dessous des revenus médians.

Nous répétons que la politique des chèques relève du saupoudrage, mais que, faute de mieux, nous les prenons. Il s’agit, je l’ai dit, de la survie de nombre de nos compatriotes.

En ce qui concerne les collectivités territoriales, le collectif budgétaire revient sur la ponction, votée à l’Assemblée nationale, des recettes d’Ifer des départements.

La logique en matière de fiscalité énergétique ne peut pas être celle des vases communicants, avec des transferts de l’un vers l’autre à périmètre constant. Les réformes de la fiscalité intervenues lors du précédent quinquennat ont complètement bouleversé l’équilibre et la cohérence des recettes des collectivités locales.

Il n’est pas acceptable que la répartition du produit des recettes fiscales ait pour conséquence, dans notre République, la mise en concurrence des différents échelons territoriaux.

Il faut penser leur complémentarité et refondre une fiscalité au plus près des compétences. Sans cela, la lutte fera rage pour déterminer qui devra récupérer le produit de l’autre. Ce sera un combat sans fin, au détriment de l’action publique territoriale si nécessaire.

Au vu des modifications à la marge – mais non moins souhaitables – qui ont été apportées, nous voterons contre ce collectif budgétaire.

Notre opposition résolue est destinée à signifier que la clause de revoyure en faveur du pouvoir d’achat de nos concitoyens n’a pas été honorée par le Gouvernement. Ce dernier ne semble pas avoir pris la mesure réelle de l’inquiétude croissante de nombre de nos concitoyens et concitoyennes. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE. – M. Thierry Cozic et M. Daniel Breuiller applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. Vincent Capo-Canellas, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – Mme Maryse Carrère applaudit également.)

M. Vincent Capo-Canellas. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la commission mixte paritaire qui a examiné ce second PLFR a abouti à un accord et notre groupe s’en réjouit.

Dans un esprit de responsabilité, députés et sénateurs ont su travailler en bonne intelligence. C’est naturel, mais autant le souligner.

Des mesures importantes ont été adoptées pour permettre aux Français de passer la période hivernale plus sereinement, compte tenu du contexte inflationniste que nous subissons tous.

Je n’y reviendrai pas dans le détail, mais je pense au versement des chèques énergie pour les ménages les plus précaires ou encore au fonds débloqué pour que nos jeunes puissent étudier dans de meilleures conditions, après avoir subi de plein fouet la crise sanitaire.

Les motifs de satisfaction du groupe Union Centriste sont nombreux. Outre les mesures que je viens d’aborder, nous nous félicitons que cette CMP conclusive ait pu retenir des dispositions significatives adoptées par le Sénat.

Je pense tout particulièrement aux différents amendements qu’a évoqués M. le ministre et qui, proposés par les sénateurs centristes, ont été conservés dans le texte de la commission mixte paritaire.

Je veux parler tout d’abord de l’augmentation des crédits dédiés au programme France Services, promu par l’État. Le financement des maisons France Services a été forfaitisé – on le sait – à hauteur de 30 000 euros par an. Or le coût moyen de fonctionnement d’une maison France Services est d’environ 110 000 euros.

Pour répondre à cette situation, notre collègue Bernard Delcros a fait adopter une augmentation de 12,5 millions des crédits dédiés au financement des maisons France Services. C’est utile.

Ensuite, notre groupe a souhaité, au travers d’un amendement, abroger la réforme de la répartition du produit de la taxe d’aménagement.

La répartition entre les communes et leurs groupements était issue d’un amendement au projet de loi de finances pour 2022 adopté à l’Assemblée nationale. N’ayant pu l’examiner à l’époque, nous revenons sur l’obligation, pour les communes, de délibérer sur l’affectation d’une fraction du produit de la taxe d’aménagement à leur EPCI. Ce dispositif contrariait, me semble-t-il, le fondement même de la dynamique de coopération intercommunale.

Enfin, je veux souligner l’ouverture de 20 millions d’euros de crédits afin de financer les projets d’insonorisation destinés aux riverains des aéroports et, ainsi, de lutter contre les nuisances sonores aéroportuaires.

Alors que le rendement de la taxe sur les nuisances sonores aériennes a connu une très forte diminution depuis 2020 en raison de la baisse du trafic sur laquelle elle est assise, la perte de financement cumulée pour ce dispositif pouvait s’élever à plus de 80 millions d’euros l’année prochaine.

C’est pourquoi le déblocage de 20 millions d’euros que j’ai proposé est un signal utile à tous les riverains des aéroports, qui pâtissent de l’activité aérienne quotidienne.

Un dernier point de satisfaction est à souligner. Il s’agit de l’ouverture de 50 millions d’euros de crédits pour la rénovation des ponts. Cette mesure a été proposée par la commission des finances par la voix de son rapporteur général, que je remercie au passage pour la qualité et le sérieux de son travail.

En 2019, notre collègue centriste Hervé Maurey avait présidé une commission d’enquête sur la sécurité des ponts et appelé à un véritable plan Marshall en faveur des ponts du bloc communal.

On sait que les ponts routiers des collectivités territoriales sont dans un état parfois préoccupant, notamment dans les plus petites communes, qui, bien souvent, n’ont pas les moyens de les entretenir. Comme le suggérait notre collègue, l’ouverture de crédits vient apporter une réponse concrète pour aider nos collectivités.

Le texte enrichi par le Sénat et les sénateurs centristes ayant été largement intégré dans la version issue de la CMP qui nous est présentée, le groupe Union Centriste adoptera ce PLFR à la quasi-unanimité.

Au-delà, je voudrais le rappeler, bien que la crise, l’inflation et les incertitudes perdurent et justifient que nous soutenions, en responsabilité, le pouvoir d’achat de nos concitoyens, nous avons aussi le devoir de garder comme cap la bonne gestion de nos finances publiques. Si ces mesures se conçoivent aisément au vu de l’urgence de la situation, elles n’en demeurent pas moins coûteuses.

Aussi, je rappelle que nous devons nous attaquer au redressement rapide de nos finances publiques, alors que notre déficit, qui devrait s’élever à 5 % du PIB jusqu’en 2025, reste très préoccupant.

De ce point de vue, le message du FMI renforce encore notre préoccupation et devra guider nos choix à l’avenir. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – M. le rapporteur général et M. Marc Laménie applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. Christian Bilhac, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – M. Michel Canévet applaudit également.)

M. Christian Bilhac. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous voici réunis pour examiner les conclusions de la commission mixte paritaire du 22 novembre dernier sur le second projet de loi de finances rectificative pour 2022, qui s’équilibre sans recours à l’emprunt, ce qui est rare et mérite d’être souligné.

Le texte pérennise les moyens consacrés au bouclier énergétique au travers, par exemple, du chèque énergie. Il prolonge la remise carburant, le dispositif MaPrimeRénov’, l’aide à l’achat de bûches et de pellets de bois ou encore l’aide aux agriculteurs.

Mais permettez-moi d’entrer directement dans le vif du sujet en évoquant les points qui constituent de réelles avancées pour les collectivités territoriales.

Tout d’abord, la décision de revenir sur la réforme de la taxe d’aménagement au bénéfice des EPCI me paraît satisfaisante, car elle correspond à une demande unanime des élus que j’ai rencontrés sur le terrain. Désormais, le projet de loi de finances rectificative prévoit, dans sa rédaction issue de la CMP, la possibilité, pour un conseil municipal, d’annuler la délibération dans un délai de deux mois à partir de la publication de la loi, ce qui donne au versement un caractère facultatif.

La CMP a également rétabli l’acquisition et l’entretien du terrain concerné dans le périmètre du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA), ce qui était également très demandé.

L’affectation de l’imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux de la filière photovoltaïque a par ailleurs été revue : 50 % pour les EPCI, 30 % pour les départements et 20 % pour les communes. Cette mesure aligne l’Ifer photovoltaïque sur l’éolien et contribue à davantage de cohérence et de clarté, même si j’aurais souhaité une part plus importante pour les communes.

En ce qui concerne le reversement des amendes de police, le Sénat avait affecté la somme de 60 millions d’euros à la réfection des ponts. Le texte issu de la CMP en retient 50 millions. De même, alors que 60 millions d’euros étaient prévus par le Sénat pour les travaux d’aménagement et de sécurisation du réseau routier, la CMP en a retenu 50.

Quant aux 100 millions de subventions exceptionnelles votées par le Sénat pour les agences de l’eau afin de contribuer à réduire le taux de fuite et à rénover les réseaux d’eau, la CMP n’en retient que 50 millions. Ces sommes sont nécessaires pour faire face au vieillissement des réseaux et aux importantes fuites qui en découlent.

La décision d’accorder 20 millions d’euros pour les dépenses d’insonorisation au profit des riverains des aéroports a été prise en grande partie pour compenser le manque à gagner qu’avait subi cette ressource pendant la période de la covid-19, durant laquelle les avions étaient cloués au sol.

La CMP a par ailleurs trouvé un accord pour attribuer 12 millions d’euros aux maisons France Services, ce qui représente environ 5 000 euros par structure et permet de maintenir un partage des charges à 50 % entre l’État et les collectivités locales. Nous devons être vigilants, car, trop souvent par le passé, le partage du financement entre État et collectivités locales a été oublié.

La CMP a donc retenu finalement la somme de 180 millions d’euros au bénéfice des collectivités locales, à comparer aux 250 millions qui avaient été votés par le Sénat pour le même périmètre.

Comme toujours, on peut voir le verre à moitié vide ou à moitié plein. Pour ma part, je retiens de l’examen du texte issu de la CMP sur le deuxième projet de loi de finances rectificative pour 2022 le rôle central du Sénat, reconnu comme partenaire des collectivités territoriales.

En responsabilité et tout en gardant en tête le nécessaire cap du redressement des comptes publics, ce dernier a en effet permis de donner au bloc communal les moyens de faire face à ses missions en cette période très difficile.

Pour conclure, je voudrais vous remercier, monsieur le ministre, pour votre disponibilité, votre écoute et votre pédagogie.

Comme les membres du groupe RDSE, je voterai ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – M. Marc Laménie applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Stéphane Sautarel, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Stéphane Sautarel. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la commission mixte paritaire qui s’est réunie mardi dernier est parvenue à un accord.

Si ce texte traduit le budget rectificatif classique de fin de gestion de la part du Gouvernement, il a également été amendé et travaillé avec sérieux par les deux chambres de notre Parlement. Il contient donc, faut-il le noter, des avancées significatives pour les Français et les collectivités territoriales.

En effet, le Sénat a réussi à s’accorder avec l’Assemblée nationale sur un texte qui comporte notamment une enveloppe de 2,5 milliards d’euros d’aides supplémentaires pour faire face à l’inflation et à la crise énergétique. À cet égard, je le redis : une réponse européenne est attendue sur les prix, la réponse budgétaire ne pouvant être durable.

La sagesse de notre Haute Assemblée ne s’est pas arrêtée à la confirmation des annonces gouvernementales. Nous avons aussi proposé de nouvelles dispositions en faveur de nos territoires.

Ainsi, nous avons débloqué 50 millions d’euros pour la réfection des ponts et du réseau routier, dont les besoins sont aujourd’hui très importants pour des raisons de sécurité et de bonne circulation.

Si vous ne l’avez pas encore fait, je vous invite à lire l’excellent rapport d’information de notre collègue Bruno Belin, publié en juin dernier et intitulé Sécurité des ponts : face au chantier du siècle, lurgence dune action publique plus ambitieuse. Il fait suite à d’autres travaux, notamment à ceux d’Hervé Maurey.

Nous avons également voté l’accélération de la rénovation des réseaux d’eau, par une subvention exceptionnelle accordée aux agences de l’eau à hauteur de 50 millions d’euros. En effet, les sécheresses de l’été 2022 ont endommagé les infrastructures du réseau d’eau déjà fortement abîmées, puisqu’on estime que, chaque année, 20 % du volume d’eau potable distribuée chez les usagers est perdu, ce qui représente un milliard de mètres cubes d’eau.

Sur l’initiative de la commission des finances, nous avons aussi voté l’augmentation de 12,5 millions d’euros des crédits dédiés au financement des maisons France Services. Cela permettra d’assurer un appui renforcé à leur fonctionnement, pour que ces guichets de proximité, qui regroupent plusieurs administrations, soient des lieux d’accompagnement de nos concitoyens dans tous les territoires et soient, à terme, financés à hauteur de 50 000 euros par maison.

Enfin nous avons ajouté une nouvelle dotation destinée aux travaux d’insonorisation des riverains des grands aéroports à hauteur de 20 millions d’euros.

Je me félicite par ailleurs que l’amendement que j’ai eu l’honneur de porter ait été voté et retenu par la CMP. Il permet de rétablir la situation prévalant avant 2022 quant à l’affectation du produit de la taxe d’aménagement au sein du bloc communal au seul bénéfice de la commune, dans le respect des libertés locales et des pactes financiers territoriaux qui peuvent ensuite se nouer.

Cette demande remontait de nos territoires, car, en plus de bouleverser les équilibres financiers entre communes et intercommunalités, le caractère obligatoire du reversement diminuait encore un peu plus l’autonomie financière des communes, notamment des communes rurales.

Comme celle qui concerne l’Ifer, cette mesure permettant de stabiliser et de sécuriser les ressources des départements et du bloc communal est à saluer.

Sur cette question, je souhaite d’ailleurs, monsieur le ministre, que vous puissiez détailler les aspects techniques de l’abrogation et nous confirmer notamment que les délibérations déjà prises cette année seront bien automatiquement abrogées.

Je tiens également à souligner les apports de nos collègues du groupe LR à l’Assemblée nationale, qui ont défendu notamment la prorogation en 2023 de l’attribution de MaPrimeRénov’ sans condition de ressources et le soutien aux ménages qui se chauffent au bois dans leurs achats de pellets et de bûches de bois.

C’est là une aide concrète envers nos concitoyens, qui font face à la hausse des prix de l’énergie, quelle que soit la source, sur le modèle de celle que nous avions proposée dans le cadre du premier PLFR en faveur de ceux qui se chauffent au fioul.

Protéger de manière ciblée tout en accélérant le rétablissement de nos comptes publics est aussi notre volonté.

Cette CMP conclusive même sur un texte de fin de gestion classique souligne la capacité du Parlement à travailler en bonne intelligence pour trouver des solutions et apporter des avancées pour notre pays, pour peu que le Gouvernement entende et accepte les propositions qui lui sont faites.

Avant de conclure, je tiens à remercier au nom de mon groupe le travail de notre rapporteur général, qui a permis d’aboutir à cet accord. Nous savons le rythme de travail auquel il est soumis lors du marathon budgétaire de fin d’année.

Mes remerciements vous sont également adressés, monsieur le ministre, pour l’écoute dont vous faites preuve.

Pour toutes ces raisons, le groupe Les Républicains votera ce second projet de loi de finances rectificative pour 2022, tel qu’il ressort des conclusions de la CMP. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Alain Marc applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Claude Malhuret, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires.

M. Claude Malhuret. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je me réjouis à mon tour que la commission mixte paritaire soit parvenue à un accord sur le deuxième projet de loi de finances rectificative de l’année.

C’est un coup double pour l’année 2022 : après l’adoption du paquet pouvoir d’achat cet été, l’Assemblée nationale et le Sénat sont de nouveau parvenus à élaborer un texte commun au bénéfice des Français.

Permettez-moi, néanmoins, de commencer par une brève remarque critique, qui rejoint les propos du rapporteur général. Par sa voix, la commission des finances du Sénat a regretté que le véhicule du PLFR de fin d’année que nous examinons en même temps que le PLF pour l’année 2023 intègre des mesures fiscales nouvelles, notamment pour 2023, contrairement à la vocation première d’un PLFR.

Avant la crise sanitaire, le Gouvernement avait fait preuve d’une rigueur appréciable, en vidant les collectifs budgétaires de fin d’exercice des mesures budgétaires et fiscales les plus lourdes. Cela permettait de concentrer les débats de PLFR sur les ajustements classiques et nécessaires en fin d’exercice.

Cette méthode a le mérite de clarifier les choses, j’espère que nous pourrons bientôt l’appliquer de nouveau.

Je ne reviendrai pas sur les grands équilibres de ce texte, qui n’ont pas évolué de manière significative au cours des débats.

Nous sommes parvenus à maintenir le déficit public à 5 % du PIB, malgré des dépenses supplémentaires votées par les deux chambres, et ce grâce à des recettes plus dynamiques que prévu, ce qui confirme la résilience de notre économie.

Ces recettes supplémentaires ont notamment permis de financer le chèque énergie exceptionnel. Cette aide, d’un montant de 100 à 200 euros, concerne les ménages les plus modestes.

Bien sûr, la politique du chèque a des défauts et des limites que je ne m’attarderai pas à rappeler – bon nombre de nos collègues s’en sont déjà chargés. Je tiens toutefois à saluer le fait que ce chèque soit ciblé sur les plus modestes, même si le ciblage demeure assez large, puisque 40 % des foyers y sont éligibles.

Le ciblage des mesures de soutien au pouvoir d’achat matérialise le passage du « quoi qu’il en coûte » au « combien ça coûte ». Les certitudes sur le présent et, surtout, les incertitudes sur le futur nous obligent à aborder les dépenses publiques avec davantage de prudence.

Je n’ai pas pour habitude de me réjouir des dépenses publiques supplémentaires, mais il est une ouverture de crédits prévue par ce projet de loi de finances rectificative que je tiens à saluer. Il s’agit du renforcement de l’aide militaire de la France à l’Ukraine.

Ces crédits supplémentaires font suite aux engagements pris par le Président de la République. Au total, ce texte apporte 1,1 milliard d’euros pour financer l’aide que nous apportons aux hérauts de la liberté que sont les Ukrainiens.

Il est indispensable que la France poursuive son soutien matériel à l’Ukraine, car un soutien moral sans soutien matériel, c’est un peu comme un chèque en bois : à la fin, on perd en crédit bien davantage que ce qu’on espérait gagner.

Ce qui se joue à l’Est est bien davantage que la paix en Europe, ce qui est déjà immense ; c’est la survie de la démocratie face aux dictatures. Il ne faut pas faiblir.

Je me réjouis que personne, notamment à l’Assemblée nationale, n’ait appliqué à ces crédits une lecture strictement comptable. Cela aurait soit révélé une courte vue, soit dénoncé de coupables accointances.

Une grande partie de nos dépenses publiques nouvelles, et donc des sacrifices que les Français consentent, soit aujourd’hui par l’inflation, soit demain par l’impôt, sont indirectement le fait du boucher du Kremlin, ne l’oublions pas.

En résumé, mes chers collègues, notre groupe soutiendra bien évidemment ce texte issu du compromis en CMP. (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP, RDSE et Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Daniel Breuiller, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

M. Daniel Breuiller. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce projet de loi de finances rectificative de fin d’année est assez exceptionnel, puisque, grâce à l’accord obtenu en CMP, il sera promulgué prochainement sans passer par l’article 49.3. C’est devenu assez rare pour le souligner.

Il est vrai que le texte contient, par rapport au projet de loi de finances rectificative de cet été, des mesures ajustées, qui sont bienvenues.

Je pense notamment aux 275 millions d’euros pour aider les universités, les Crous et les opérateurs de recherche à payer leur facture énergétique. Le chèque énergie exceptionnel ou encore l’aide exceptionnelle aux ménages se chauffant aux pellets ou à la bûche sont également de bonnes mesures, parce qu’elles sont des mesures ciblées en direction des ménages les plus modestes, et c’est essentiel.

Nous saluons aussi les différentes avancées obtenues en commission mixte paritaire, comme l’augmentation du budget consacré à l’aide alimentaire ou encore la possibilité, pour les communes, de revaloriser les revenus du personnel soignant.

Certains apports du Sénat ont été maintenus, bien que revus à la baisse, comme les crédits nécessaires débloqués pour la réfection des ponts et du réseau routier ou la subvention exceptionnelle accordée aux agences de l’eau, qui est tout aussi nécessaire.

Monsieur le ministre, cette liste non exhaustive montre que, quand le Gouvernement écoute, quand vous laissez le temps au dialogue parlementaire, nous pouvons arriver à des compromis. D’ailleurs, le compromis serait encore meilleur si vous écoutiez plus de l’oreille gauche. (Sourires.)

Cependant, en miroir à l’examen du PLF dont nous venons de terminer la discussion de la première partie, nous déplorons toujours que l’écologie ne soit pas le cœur des projets et des budgets.

Nous vous avons proposé quelques mesures écologiques et sociales, comme l’exonération de TVA sur l’usage domestique des premiers mètres cubes d’eau, soit la quantité jugée vitale par l’Organisation mondiale de la santé (OMS).

J’entends bien que toucher à la TVA est contraire au droit européen, mais, chers collègues, l’accès à l’eau pour les besoins élémentaires est un droit fondamental. Il faudra donc changer les choses pour que les besoins de base ou le fait de remplir sa piscine ne soient plus tarifés de la même manière.

Le plafonnement de la hausse des prix de l’énergie à 15 % prévu par le bouclier tarifaire a des effets positifs, mais demeure d’une faible efficacité en matière de justice écologique et sociale. C’est le sens de la demande de rapport que nous avons faite sur une tarification duale, qui protégerait davantage les ménages en deçà d’un seuil de consommation et les soumettrait au prix de marché au-delà.

Nous vous avons également proposé de soutenir les collectivités par l’amortissement de la revalorisation du point d’indice sur trois ans. Vous avez balayé cette proposition d’un revers de main.

Je veux donner deux exemples concrets. À Grenoble, cette revalorisation conduit à une hausse de la masse salariale de 2,7 millions d’euros en 2022 et de 5 millions en année pleine. À Arcueil, la hausse est de 750 000 euros.

Les collectivités savent gérer de nouvelles charges, mais, lorsqu’on leur impose une trajectoire sur cinq ans inférieure à l’inflation, l’exercice devient périlleux, voire impossible.

Cette mesure ne serait d’ailleurs pas indispensable si vous reteniez le vote du Sénat en faveur de l’indexation sur l’inflation du montant de la dotation globale de fonctionnement (DGF).

Je terminerai mon propos sur ce PLFR, texte technique de fin de gestion, en vous invitant de nouveau à vous pencher sur la question de la résilience de notre pays et sur la nécessité de penser chaque mesure d’urgence du point de vue de la résilience.

Les mesures de court terme peuvent être nécessaires. Elles peuvent panser des plaies et stopper des hémorragies, mais elles ne suffisent pas.

Notre planète est malade, malade de notre suractivité, de notre surconsommation et de notre surcompétitivité, qui consiste parfois à créer des produits en France, les fabriquer en Chine et les ramener par bateau dans notre pays. Il est urgent de changer de modèle. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

M. le président. Conformément à l’article 42, alinéa 12, du règlement, je mets aux voix, dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, modifié par les amendements du Gouvernement, l’ensemble du projet de loi de finances rectificative pour 2022.

En application de l’article 59 du règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.

Il va y être procédé dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 69 :

Nombre de votants 344
Nombre de suffrages exprimés 268
Pour l’adoption 252
Contre 16

Le Sénat a adopté définitivement.

Explications de vote sur l'ensemble (début)
Dossier législatif : projet de loi de finances rectificative pour 2022
 

4

Compte de concours financiers : prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés - État D (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Sécurités - Compte d'affectation spéciale : Contrôle de la circulation et du stationnement routiers

Loi de finances pour 2023

Suite de la discussion d’un projet de loi

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Sécurités
Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Sécurités
Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Sécurités

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2023, considéré comme adopté par l’Assemblée nationale en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution (projet n° 114, rapport général n° 115, avis nos 116 à 121).

Nous poursuivons l’examen, au sein de la seconde partie du projet de loi de finances, des différentes missions.

SECONDE PARTIE (suite)

MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

Sécurités

Compte d’affectation spéciale : Contrôle de la circulation et du stationnement routiers

M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Sécurités » (et article 46 ter) et du compte d’affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers ».

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Philippe Dominati, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’examen du budget de la mission « Sécurités » pour 2023 s’inscrit dans un contexte qui pourrait appeler à la nouveauté : d’une part, il s’agit du premier budget du second quinquennat du président Emmanuel Macron ; d’autre part, c’est également le premier budget de mise en œuvre des annonces faites dans le cadre du projet de loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur (Lopmi), en cours d’examen par le Parlement.

Pourtant, en examinant précisément le budget de la mission, on constate avant tout une forme de continuité.

Certes, il y a des changements positifs qu’il faut souligner. Globalement, les crédits de la mission sont ainsi en hausse et je m’en réjouis.

Le projet de Lopmi prévoit d’ailleurs une hausse cumulée du budget du ministère de l’intérieur de 15 milliards d’euros entre 2023 et 2027.

En 2023, pour ce qui concerne l’ensemble de la mission « Sécurités », la hausse des crédits s’élève à 1,43 milliard d’euros en crédits de paiement, soit une hausse d’un peu moins de 7 %. Pour la police et la gendarmerie nationales, les crédits de paiement sont en hausse de 1,34 milliard d’euros.

Pour les programmes « Police nationale » et « Gendarmerie nationale », les dépenses hors titre 2 augmentent de 2,1 % en autorisations d’engagement et de 10 % en crédits de paiement. En 2023, ces crédits sont en particulier dédiés à la modernisation numérique et à l’équipement de la gendarmerie et de la police nationales. C’est une dynamique nécessaire.

S’agissant du numérique, il est notamment prévu, d’une part, de développer les outils numériques des forces de sécurité intérieure afin d’améliorer leurs conditions de travail et favoriser leur présence et leur efficacité sur le terrain, d’autre part, de renforcer les moyens de lutte contre la cybercriminalité, en augmentant par exemple le nombre de « cyberpatrouilleurs », et d’améliorer la relation numérique avec les citoyens.

Par ailleurs, l’équipement des policiers et gendarmes fait également l’objet d’efforts pour assurer l’opérationnalité de nos forces et accompagner les hausses d’effectifs. Est notamment prévu en 2023 le renouvellement des équipements de protection, d’intervention et de maintien de l’ordre, de l’habillement et des outils technologiques de pointe. La tenue de la Coupe du monde de rugby en 2023 et la préparation des jeux Olympiques de 2024 justifient cet effort sur l’équipement de nos forces.

Pour autant, comme je le disais, le présent budget présente aussi des caractéristiques de continuité ; on pourrait même dire qu’il retombe dans certains travers constatés par le passé, ce que l’on peut regretter.

En premier lieu, on constate une stabilisation de la part des dépenses de personnel dans l’ensemble des dépenses de la police et de la gendarmerie en 2023. C’est une mauvaise nouvelle, d’autant qu’une dynamique de baisse avait été amorcée en 2021.

Comme je l’ai souvent rappelé, il est indispensable de réduire la part des dépenses de personnel dans l’ensemble du budget des deux forces, afin de dégager des marges de manœuvre suffisantes pour l’équipement et l’investissement.

Or il est souvent arrivé dans le passé que les dépenses de personnel dérapent au détriment de l’investissement et des autres dépenses de fonctionnement. En 2023, 83 % des autorisations d’engagement et 86 % des crédits de paiement seront consacrés aux dépenses de personnel pour les deux forces – c’est beaucoup.

Cette stabilisation de la part des dépenses de personnel s’explique par le fait que ces dernières augmentent de 5,8 % pour les deux forces en 2023.

Cette hausse provient, d’abord, de la poursuite de la politique de recrutement. Comme vous le savez, le Président de la République a décidé la création de plus de 10 000 emplois de 2018 à 2022.

Alors que ce plan de création de postes était achevé, la Première ministre, Élisabeth Borne, a annoncé, le 6 septembre dernier, la création de 8 500 postes de policiers et de gendarmes d’ici à 2027, poursuivant ainsi sur la lancée du quinquennat précédent.

Le projet de loi de finances pour 2023 prévoit la création de 2 857 postes équivalents temps plein (ETP) pour les deux forces, dont 1 907 pour la police nationale et 950 pour la gendarmerie nationale. Ces recrutements ont nécessairement des conséquences financières notables.

En outre, l’année 2023 sera également marquée par le coût lié à la revalorisation du point d’indice de la fonction publique intervenue au 1er juillet 2022, pour un coût d’environ 170 millions d’euros pour les deux forces.

Enfin, le poids des mesures catégorielles atteindra, en 2023, 85 millions d’euros pour la police nationale et 72 millions pour la gendarmerie nationale. Ce montant est en forte hausse du fait des premières conséquences budgétaires des deux protocoles conclus en mars 2022.

En second lieu, et c’est la deuxième limite du présent budget, les crédits de la mission sont insatisfaisants s’agissant de certaines dépenses de fonctionnement et d’investissement. Le risque est, comme cela est déjà arrivé par le passé, qu’à la sortie d’un plan d’équipement porté cette fois-ci par le plan de relance les dépenses d’investissement se tarissent, dans une sorte de stop and go difficilement soutenable.

En particulier, l’investissement dans l’immobilier ne répond pas à l’acuité des enjeux, surtout pour la gendarmerie nationale.

En effet, les crédits d’investissement portés par la mission pour les locaux de la gendarmerie, c’est-à-dire principalement les casernes, sont en baisse de 42,5 millions d’euros en autorisations d’engagement. Ils n’augmentent que très modérément, de 13,5 millions d’euros, en crédits de paiement.

Globalement, les crédits de paiement s’établissent ainsi à 130 millions d’euros en 2023, chiffre à comparer au montant des revalorisations catégorielles que je viens d’évoquer. Le caractère modeste de cette somme doit être souligné, d’autant qu’à compter de 2023 les crédits du plan de relance ne viennent plus apporter un complément significatif comme cela avait été le cas en 2021 et 2022.

Je rappelle que, s’agissant de l’immobilier, l’effort doit être maintenu sur la durée.

Je voudrais conclure par quelques mots sur le compte d’affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers » et sur la politique de sécurité routière.

En 2021, année encore marquée par les restrictions de déplacement dans le cadre de la gestion de la crise sanitaire, la mortalité avait augmenté par rapport à 2020, 3 219 personnes ayant alors été tuées sur les routes de France.

Par rapport à 2019, cependant, année de référence avant la pandémie, la mortalité avait diminué de 9 % et l’accidentalité, de 4,5 %.

M. le président. Il faut conclure, monsieur le rapporteur spécial.

M. Philippe Dominati, rapporteur spécial. Le bilan sur les sept premiers mois de 2022 présente quant à lui une augmentation de la mortalité routière par rapport à 2019.

Les recettes et les crédits du CAS sont en hausse de 7 %. Ses dépenses comprendront notamment 200 millions d’euros pour la modernisation, la maintenance et le déploiement des radars automatiques.

Au nom de la commission des finances, j’émets un avis favorable sur les crédits de la mission « Sécurités ». (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Jean Pierre Vogel, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je souhaiterais, en préambule de mon intervention, rendre hommage à l’ensemble des sapeurs-pompiers, des pilotes et des formations militaires de la sécurité civile et des associations agréées : tous s’investissent sans compter dans la lutte contre les crises qui touchent notre pays, comme nous l’avons de nouveau constaté cet été, marqué par des feux de forêt d’une ampleur quasi inégalée.

Ces incendies ont rappelé à quel point notre modèle de sécurité civile doit être préservé. Je me félicite à cet égard de la hausse importante des crédits du budget du programme 161 pour l’année 2023.

Je voudrais en premier lieu m’attarder sur l’enjeu du soutien de l’État en faveur des services départementaux d’incendie et de secours (Sdis), plus particulièrement sur la concrétisation en 2023 des « pactes capacitaires », qui permettront, dans le cadre de cofinancements entre l’État et les collectivités locales, de soutenir des projets d’investissement au bénéfice des Sdis.

Un montant de 30 millions d’euros sur cinq ans devait initialement leur être consacré, ce qui apparaissait particulièrement faible au regard des besoins d’investissement des Sdis. Le Gouvernement a toutefois procédé à un renforcement bienvenu de cette dotation durant l’examen de ce PLF, en l’abondant d’un montant de 150 millions d’euros, dont 37,5 millions au titre de l’année 2023.

Le Président de la République a néanmoins indiqué, lors de ses annonces du 28 octobre dernier, que cette dotation de 150 millions d’euros s’inscrivait dans le cadre de la compensation de la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises. On ne peut donc pas présenter cette enveloppe comme un véritable renouvellement de l’effort de l’État en faveur du financement des Sdis, puisqu’elle consiste en réalité en une réaffectation aux Sdis d’une recette qui bénéficiait déjà à leurs principaux financeurs, à savoir les collectivités locales.

Malgré cette réserve, on ne peut que se féliciter de la concrétisation de ces pactes capacitaires dans un contexte où les Sdis doivent investir massivement pour se doter des moyens de faire face à l’augmentation des sollicitations opérationnelles.

J’en viens maintenant à la question du nécessaire renforcement de la flotte aérienne de la sécurité civile. Ce projet de loi de finances pour 2023 contient plusieurs avancées à cet égard.

Je me félicite tout d’abord du renouvellement et de l’extension à venir de notre flotte d’hélicoptères Dragon vieillissante et amputée ces dernières années de plusieurs appareils à la suite d’accidents tragiques.

Ce PLF concrétise la commande de 36 nouveaux appareils annoncée dans le cadre du projet de Lopmi, ce qui se matérialise par près de 470 millions d’euros en autorisations d’engagement. Ces hélicoptères, contrairement à ceux de la flotte actuelle, seront équipés d’une capacité de largage d’eau importante et pourront dès lors être utilement mobilisés pour la lutte contre les feux de forêt.

Le vieillissement de la flotte de canadairs constitue également une source de préoccupation partagée depuis plusieurs années par l’ensemble des acteurs de la sécurité civile.

Les annonces faites par le Président de la République le 28 octobre dernier d’un renouvellement intégral et d’une extension de cette flotte se sont traduites par un amendement du Gouvernement visant à financer une commande d’une douzaine d’appareils.

Cette commande est évidemment bienvenue, mais le calendrier de livraison des canadairs suscite des interrogations : la chaîne de production de ces avions, à l’arrêt depuis plusieurs années, vient à peine d’être relancée et les premiers appareils ne pourront probablement pas être livrés avant 2027.

Il est donc important que le ministère de l’intérieur identifie d’autres pistes de renforcement de la flotte à court terme.

Il me semble par ailleurs que l’enjeu du renforcement des moyens aériens de la sécurité civile ne peut être envisagé sous le seul prisme capacitaire.

Les problématiques de prévention des feux de forêt, du dimensionnement des infrastructures d’accueil des aéronefs ou de la disponibilité des moyens humains nécessaires au fonctionnement opérationnel de la flotte doivent également être prises en considération.

Or la direction générale de la sécurité civile est confrontée à de grandes difficultés pour recruter et fidéliser ses pilotes d’aéronefs. Cette profession souffre indéniablement d’un déficit d’attractivité : en moyenne, un pilote de la sécurité civile est trois fois moins payé qu’un pilote de l’aviation commerciale.

Le présent PLF prévoit certes des mesures de revalorisation pour les personnels navigants, estimées à 1,5 million d’euros, mais je souhaiterais vous entendre, madame la ministre, sur la stratégie envisagée par le ministère de l’intérieur pour pallier ces difficultés de recrutement et renforcer l’attractivité de la profession de pilote de la sécurité civile.

Je conclurai mon propos en évoquant le projet de mutualisation des systèmes d’information des Sdis : NexSIS 18-112.

Les nombreux retards dans le déploiement du projet ont conduit à entamer la confiance des Sdis dans sa concrétisation. Cette situation fragilise le modèle économique de NexSIS, puisque les Sdis sont largement impliqués dans le financement du programme par l’intermédiaire de leurs contributions volontaires. Ces contributions devraient être complétées par un soutien renforcé de l’État en faveur de l’Agence du numérique de la sécurité civile, dont les moyens sont aujourd’hui bien trop faibles pour permettre le déploiement du projet dans de bonnes conditions.

En tout état de cause, les investissements consentis dans le cadre de ce budget pour 2023 vont indéniablement dans le bon sens. Pour cette raison, je vous propose, mes chers collègues, d’adopter les crédits de la mission « Sécurités ». (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure pour avis, en remplacement de M. Philippe Paul, rapporteur pour avis.

Mme Gisèle Jourda, en remplacement de M. Philippe Paul, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, après plusieurs années de progression des crédits de la gendarmerie nationale due notamment au plan de relance, nous pouvions craindre un retour de balancier.

Grâce à la programmation prévue dans le cadre du projet de Lopmi, ce n’est pas le cas. Nous pouvons donc saluer des crédits globalement en hausse en 2023 : ils passent de 9,3 milliards à 9,9 milliards d’euros en crédits de paiement, soit une hausse de 6,4 %.

En outre, les effectifs progresseront de 950 emplois, permettant la création de 7 escadrons de gendarmerie mobile et le début de la mise en place de 200 nouvelles brigades territoriales. Celles-ci seront sans doute regardées comme un apport très utile dans certains départements après des années de suppression et de regroupement de brigades.

Il est vrai que, lors de l’examen du projet de Lopmi, nous avions exprimé quelques interrogations à ce sujet.

D’abord sur la méthode. La concertation avec les élus locaux a été lancée très vite, avant même le vote de la Lopmi. Nous avons aussi alerté sur la nécessité d’avoir des critères objectifs afin de garantir une implantation durable et un réel effet sur la délinquance.

Ensuite, nous avons exprimé notre préoccupation sur la capacité des collectivités territoriales à investir pour construire des locaux.

Outre les dispositifs de soutien existants au travers des décrets de 1993 et de 2016, la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR) a été évoquée. Madame la ministre, avez-vous prévu des dispositifs supplémentaires, conformément à l’amendement adopté par le Sénat au sein du rapport annexé au projet de Lopmi ?

D’autres aspects de ce budget représentent à notre sens un progrès indéniable, en particulier les 120 millions d’euros de crédits de paiement pour la modernisation informatique et la création d’une agence du numérique des forces de sécurité intérieure.

Je rappelle qu’en 2019 nous avions eu des interrogations sur la création d’une direction du numérique auprès du secrétaire général du ministère de l’intérieur. Cette direction devait plus ou moins absorber les services d’information et de communication des directions générales de la police et de la gendarmerie, notamment le service des technologies et des systèmes d’information de la sécurité intérieure (STSI2), qui avait fait ses preuves au travers de NÉO ou encore d’Agorha-solde.

Pouvez-vous nous confirmer, madame la ministre, que la nouvelle agence du numérique sera bien construite à partir du STSI2, mais avec davantage de moyens ?

Pour le reste, le budget du programme 152 pour 2023 affiche une certaine stagnation des crédits hors titre 2 après plusieurs années d’efforts dans ce domaine.

S’agissant de l’investissement immobilier, la Lopmi a prévu la mise en place d’un nouveau service chargé de planifier les nouvelles constructions et la maintenance lourde selon un échéancier qui reste à élaborer. Sachez, madame la ministre, que nous serons très attentifs à cette question.

En conclusion, le budget de la gendarmerie nationale pour 2023 affiche une nouvelle progression des crédits, permettant de poursuivre la mise à niveau numérique, la montée en puissance des effectifs et une présence accrue auprès des populations.

Pour l’ensemble de ces raisons, tout en restant attentive à la mise en œuvre effective des orientations de la future Lopmi en matière d’investissements, la commission a émis un avis favorable sur l’adoption des crédits du programme 152.

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure pour avis.

Mme Gisèle Jourda, rapporteure pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le budget de la gendarmerie pour 2023 comporte plusieurs aspects positifs, notamment les moyens importants investis dans la transformation numérique, qui permettront de poursuivre la modernisation de la gendarmerie, en mettant en œuvre les nouvelles étapes de NÉO et du système PC Storm, qui constitue une brique essentielle du réseau Radio du futur.

Tous ces nouveaux systèmes numériques génèrent logiquement des dépenses récurrentes pour le maintien en condition opérationnelle et le renouvellement des équipements. Cela montre une fois de plus l’importance de la programmation pluriannuelle.

Il est difficile de tout financer à la fois, mais il ne faut pas laisser se dégrader un aspect pendant que l’on en renforce un autre. Développer les meilleurs outils numériques, c’est bien, mais si parallèlement les gendarmes exercent dans des brigades décrépites et sont logés dans des casernes dégradées, c’est problématique et inacceptable.

Or le projet de Lopmi ne prévoit pas de programmation des investissements permettant de remédier à ces points noirs bien connus. Une fois de plus, les investissements prévus pour l’immobilier au sein du programme 152 seront insuffisants en 2023. Avec un montant de 126 millions d’euros, on est loin des 300 millions annuels nécessaires. L’année dernière, un effort avait pourtant été accompli pour passer de 100 millions d’euros à 150 millions – on revient donc en arrière.

Le Sénat a pourtant adopté notre amendement au sein du rapport annexé au projet de Lopmi, prévoyant ce nécessaire investissement de 300 millions d’euros annuels dans l’immobilier domanial. Quelle est votre intention, madame la ministre, s’agissant de la mise en œuvre de cette disposition, pour 2023 mais aussi pour les années suivantes ?

En ce qui concerne les véhicules, un renouvellement de 2 000 unités seulement est prévu pour 2023, chiffre le plus bas depuis 2014. Il est vrai qu’un effort important avait été consenti sur la période 2020-2022, avec plus de 3 500 véhicules par an, ce qui a permis de rajeunir un peu le parc.

Là encore, la stabilité et la pluriannualité sont indispensables, afin d’avoir un parc de véhicules légers qui reste en bon état au fil du temps, et non des périodes fastes qui alternent avec des périodes où l’état des véhicules est indigne. En 2023, nous serons bien au-dessous du renouvellement annuel de 10 % du parc pourtant inscrit dans le rapport annexé au projet de Lopmi.

Je terminerai par un point positif, en évoquant la réserve opérationnelle de la gendarmerie. Le projet de Lopmi prévoit le passage de 30 000 à 50 000 réservistes, objectif qui paraissait ambitieux compte tenu de la stagnation des crédits au cours des dernières années. Or on observe bien, au sein du programme 152 pour 2023, une hausse de 20 % des crédits fléchés vers la réserve, ce dont nous nous félicitons.

La progression significative des crédits du programme 152 a conduit notre commission à donner un avis favorable sur leur adoption, même si nous gardons à l’esprit certains points négatifs, en particulier la poursuite du sous-investissement dans l’immobilier auquel il faudra impérativement remédier dans les prochaines années.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Henri Leroy, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et dadministration générale. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la commission des lois a donné un avis favorable sur l’adoption des crédits de la mission « Sécurités ».

Ce projet de loi de finances fait suite à plusieurs années de larges concertations – Livre blanc de la sécurité intérieure, Beauvau de la sécurité…

Un projet de Lopmi a ensuite été élaboré, ce qui répondait à l’une de nos anciennes recommandations. Ce projet porte des ambitions programmatiques fortes pour le budget du ministère de l’intérieur, puisque ce ne sont pas moins de 15 milliards d’euros supplémentaires qui seraient budgétés sur cinq ans par rapport aux crédits affectés au ministère en 2022.

Tant les dépenses de personnel que de fonctionnement et d’investissement augmentent en 2023, ce qui permettra de financer les priorités fixées par le projet de Lopmi.

La commission a toutefois assorti de trois réserves son avis favorable sur l’adoption des crédits.

La première concerne la prise en compte de l’inflation dans l’exécution du budget 2023.

Le projet de Lopmi a été élaboré avant la survenue de ce phénomène et les budgets n’ont pas été revalorisés en conséquence. La police et la gendarmerie nationales vont donc devoir participer à l’effort national de rationalisation des dépenses, mais cela ne devra pas porter préjudice à la capacité des forces à faire face aux échéances de 2023 et 2024.

Deuxième réserve, le doublement des effectifs sur la voie publique n’aura de sens que si les effectifs des services judiciaires qui traitent les enquêtes et ceux des juridictions sont augmentés de manière proportionnelle. Sans cela, c’est toute la chaîne pénale qui serait engorgée sans amélioration de la réponse pénale.

Enfin, la troisième réserve concerne la nécessaire diminution de la part des dépenses de personnel dans le budget global de ces deux programmes : après deux années de diminution nette, cette tendance est moins claire en 2023. Une évolution structurelle est nécessaire et la commission des lois se montrera attentive à cette question. (Applaudissements au banc des commissions. – M. François-Noël Buffet applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure pour avis.

Mme Françoise Dumont, rapporteure pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et dadministration générale. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la commission des lois a donné un avis favorable sur l’adoption des crédits du programme 161 relatif aux moyens nationaux de la sécurité civile.

Nous saluons la hausse significative tant des autorisations d’engagement, qui dépassent pour la première fois le milliard d’euros, que des crédits de paiement. Ces crédits supplémentaires permettront de renouveler et de renforcer notre flotte d’hélicoptères, conformément aux préconisations formulées l’année dernière par la commission des lois.

Cette forte hausse nous paraît nécessaire, et même vitale, tant l’année 2022 a mis à rude épreuve tous les acteurs de la sécurité civile. Avec 72 000 hectares brûlés, soit sept fois plus que la moyenne annuelle des vingt dernières années, la dernière saison des feux a marqué une nette rupture dans notre appréhension des aléas, remettant en question de nombreuses certitudes quant à la résilience de notre modèle de lutte contre les incendies.

Nous devons apporter une réponse de manière urgente. Outre la réquisition précipitée de huit hélicoptères, la France, qui traditionnellement aide ses voisins, a eu recours, pour la première fois depuis son instauration en 2001, au mécanisme européen de protection civile. Nous avons donc incontestablement atteint les limites capacitaires de nos forces de sécurité civile.

C’est pourquoi notre avis favorable ne s’apparente aucunement à un quitus à l’égard du Gouvernement.

Tout d’abord, nous insistons sur la forte attente de notre part quant à la publication, par le Gouvernement, du rapport sur le financement des services départementaux et territoriaux d’incendie et de secours, demandé dans le cadre de la loi visant à consolider notre modèle de sécurité civile et valoriser le volontariat des sapeurs-pompiers et les sapeurs-pompiers professionnels, dite loi Matras.

En effet, toute réflexion générale sur les moyens de la sécurité civile, rendue nécessaire cette année, doit impérativement associer les collectivités territoriales et se pencher sur l’enjeu du financement des Sdis, mis en difficulté par l’ampleur de la dernière saison des feux et ne disposant pas des mêmes leviers financiers que l’État pour y répondre.

Mme Nathalie Goulet. Absolument !

Mme Françoise Dumont, rapporteure pour avis de la commission des lois. Concernant les moyens aériens nationaux, nous avons émis de vives réserves quant aux effets d’annonce autour du plan de renouvellement et de renforcement des canadairs, largement commenté par le ministre de l’intérieur à l’occasion de l’examen du projet de Lopmi, puis décrit comme une nouveauté lors du discours du Président de la République le 28 octobre dernier.

Cela fait en outre plus de trois ans que sont attendus les deux canadairs devant être commandés dans le cadre de l’Union européenne et pourtant mis en avant dans tous les discours gouvernementaux sur la sécurité civile.

Par ailleurs, le calendrier ambitieux, affiché par le Président de la République, visant un renouvellement intégral de nos canadairs d’ici à la fin du quinquennat paraît irréaliste, alors qu’aucun financement n’a encore été engagé.

Cela démontre une certaine confusion dans la communication gouvernementale d’autant que, à deux reprises, le ministre de l’intérieur a déclaré à notre commission qu’il y avait de fortes tensions sur la chaîne de production des canadairs et que ceux-ci devront se faire attendre plusieurs années, même en faisant preuve d’optimisme.

Nous serons donc particulièrement vigilants à ce que les annonces faites soient convenablement menées à bien. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi quau banc des commissions.)

Mme Nathalie Goulet. Très bien !

M. le président. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque unité de discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de quinze minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à M. François-Noël Buffet. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. François-Noël Buffet. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je voudrais, au nom du groupe Les Républicains, faire quelques observations.

Cela fait maintenant plusieurs années que le Sénat appelle de ses vœux une loi de programmation pour la sécurité intérieure. Ce texte est peut-être sur le point d’aboutir puisque la commission mixte paritaire aura lieu jeudi prochain.

Au-delà des quelques appréciations positives, l’examen des crédits de cette mission nous a fait identifier des points de vigilance.

Nous voulons insister sur la nécessité de fortifier dans la durée les capacités opérationnelles des forces de sécurité intérieure, c’est-à-dire que ces efforts doivent impérativement se poursuivre jusqu’à la fin du quinquennat.

En effet, il ne faut pas oublier que nous allons organiser très prochainement deux grands événements sportifs, à savoir la Coupe du monde de rugby en 2023 et les jeux Olympiques en 2024, ce qui nécessitera le déploiement en bonne et due forme de moyens importants. Il ne s’agira pas de lésiner sur la sécurité à ces occasions.

Par ailleurs, l’augmentation des effectifs ne devra pas se faire au détriment des dépenses d’investissement et de fonctionnement, comme l’a souligné Philippe Dominati voilà quelques instants.

Aussi, je nous encourage à être particulièrement vigilants, quasi quotidiennement, sur l’affectation de ces crédits. Faut-il le rappeler, le contexte budgétaire de notre pays est extrêmement contraint et le Conseil d’État a émis dans deux avis des inquiétudes concernant cette Lopmi.

J’en viens aux points positifs.

La dernière loi de programmation sur les moyens du ministère de l’intérieur datait un peu, puisqu’elle portait sur la période 2011-2013. Nous aurions préféré avoir une Lopmi plus rapidement, mais elle est enfin là : tant mieux ! Nous devons admettre que ces 15 milliards d’euros supplémentaires budgétés sur cinq ans représentent un effort substantiel.

Pour autant, ce budget doit être non pas conjoncturel, mais structurel. Rien ne serait pire pour nos services de sécurité que d’être victimes d’une politique erratique.

Plusieurs objectifs pluriannuels du projet de Lopmi doivent être retenus.

D’abord, les crédits affectés à la police et à la gendarmerie passeraient d’environ 21 milliards d’euros en crédits de paiement à plus de 25 milliards d’euros en 2027, soit une hausse significative, de plus de 20 %.

Ensuite, est prévue une hausse des dépenses de personnels de 5,8 % pour les deux forces. Ainsi, Mme la Première ministre a annoncé le 6 septembre dernier la création de 8 500 postes de policiers et de gendarmes d’ici à 2027.

En outre, il faut souligner une mise à niveau des équipements : acquisition de gilets tactiques, développement de solutions opérationnelles comme le PC Storm, pour permettre aux forces de sécurité de communiquer via un outil unique et sécurisé, dans l’attente du déploiement du réseau Radio du futur prévu dans ce même projet de Lopmi, acquisition de caméras-piétons, etc. Cette mise à niveau des équipements est absolument essentielle.

Enfin, je n’oublie pas la montée en puissance des réserves opérationnelles de la police, avec 8,4 millions d’euros en 2023, et de la gendarmerie, avec plus de 14 millions d’euros.

À ce stade, je voudrais évoquer deux sujets particuliers en matière technologique.

D’abord, l’enjeu crucial que représente le numérique. Près de 8 milliards d’euros y ont été affectés par le projet de Lopmi, soit quasiment la moitié du budget total que celui-ci prévoit. Ce n’est pas une petite affaire, si vous me permettez cette expression. Il faut poursuivre le développement de nos capacités numériques, au travers des terminaux NÉO, des ordinateurs portables Ubiquity, etc.

Il faut également développer le dépôt de plainte en ligne. Nous avons déjà expérimenté la procédure de pré-plainte, mais il faut aller beaucoup plus loin pour plus d’efficacité.

Enfin, nous devons mettre l’accent sur les applications permettant d’accroître le nombre d’actes de procédure que peuvent réaliser nos policiers et gendarmes en mobilité, en évitant à tout prix le fiasco du logiciel Scribe.

Le second sujet concerne l’intelligence artificielle : où en est-on ? Il n’existe pas, à ce jour, de cadre juridique adapté à l’usage des technologies de reconnaissance biométrique dans l’espace public.

Une mission d’information du Sénat menée par MM. Marc-Philippe Daubresse, Arnaud de Belenet et Jérôme Durain, a rendu un rapport, le 10 mai dernier, intitulé La reconnaissance biométrique dans lespace public : 30 propositions pour écarter le risque dune société de surveillance. Cette source pourrait être utile au Gouvernement en prévision, notamment, des grands événements sportifs que j’ai évoqués, mais pas seulement. En tout état de cause, nous devons être prêts à créer ce cadre adapté pour les jeux Olympiques de 2024, en fixant naturellement des lignes rouges à ne pas franchir, comme l’ont proposé nos rapporteurs.

Je terminerai en évoquant la question sensible de la réforme de la police judiciaire.

Peu de gens en parlent, même si une mission au sein de la commission des lois du Sénat est en cours. À l’occasion de ce débat budgétaire, le groupe Les Républicains voudrait insister, au-delà de la réforme, sur la crise des vocations qui touche la police judiciaire. Ce constat est partagé par tous. Ces difficultés de recrutement tiennent non pas à un désintérêt pour ces fonctions, mais aux difficiles conditions de travail. Il faut bien reconnaître que ces personnels sont disponibles 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, compte tenu des enjeux exceptionnels auxquels ils sont confrontés pour assurer leur mission à notre service.

Nous voulons donc profiter de l’occasion offerte par ce débat pour rappeler, alors que les discussions s’ouvrent sur la réorganisation de la police judiciaire, cette problématique de la crise des vocations, véritable point de vigilance. Il faut poser les problèmes sérieusement sur la table pour que notre police judiciaire, qui est un exemple, disons-le, puisse continuer d’exercer dans l’excellence, en poursuivant avec succès les voyous auteurs des infractions les plus graves.

Pour conclure, je dirai que les efforts sont là, mais que nous devons rester vigilants. L’efficacité des moyens mis en place pour notre sécurité dépend aussi de la continuité de la chaîne pénale, c’est-à-dire des moyens qui seront affectés à la justice pour donner des suites aux opérations menées par nos services de sécurité. Nous examinerons justement la mission « Justice » cet après-midi. N’oublions pas que c’est un ensemble qu’il s’agit de faire fonctionner harmonieusement. Autrement dit, le doublement des effectifs sur la voie publique n’a de sens que si les effectifs des services judiciaires traitant les enquêtes et des juridictions sont augmentés proportionnellement. Il y a un lien direct, chacun le comprend bien.

Au bénéfice de ces observations, le groupe Les Républicains suivra les avis favorables du rapporteur spécial, M. Philippe Dominati, et de nos deux rapporteurs pour avis de la commission des lois, M. Henri Leroy et Mme Françoise Dumont. La courtoisie aurait voulu, madame, que je vous cite en premier. Je vous prie de bien vouloir m’en excuser. (Sourires et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Alain Marc.

M. Alain Marc. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le budget que nous examinons aujourd’hui reprend les éléments du projet de loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur, voté en première lecture il y a peu.

Ce texte prévoit une augmentation des moyens consacrés à nos forces de l’ordre. La progression de l’insécurité doit en effet être enrayée. C’est le souhait non seulement du Président de la République, mais aussi, je le crois, de tous les citoyens de ce pays. Il s’agit bien sûr d’accroître la présence policière sur le terrain, engagement que nous ne pouvons que saluer.

Pour ce faire, il importe de libérer les agents des nombreuses tâches administratives auxquelles ils sont astreints. Le projet de Lopmi y concourt.

Il sera cependant nécessaire d’envisager une réforme en profondeur de la procédure pénale, afin de la simplifier. Tous les acteurs du monde judiciaire en bénéficieront, les justiciables au premier chef.

Pour accroître cette présence, il faut aussi augmenter les effectifs. C’est notamment ce que permettent les crédits de la mission « Sécurités ». Entre 2017 et 2022, plus de 8 000 policiers et plus de 2 000 gendarmes ont été recrutés, 10 000 agents supplémentaires qui veillent à la sécurité de nos concitoyens et de nos entreprises, ainsi qu’à la sûreté de nos territoires.

Cette dynamique se poursuit cette année encore, et nous nous en félicitons. Ainsi, près de 3 000 emplois seront créés en 2023.

En plus d’une augmentation d’effectifs, nos forces de l’ordre ont besoin d’investissements massifs, en matière tant d’équipement que d’immobilier.

Les policiers et les gendarmes exercent un métier dangereux, dans des conditions difficiles et tendues. Aussi, ils doivent pouvoir compter sur un matériel de qualité. La question du parc automobile est un sujet sensible, même si l’on peut constater, ces dernières années, que la situation s’est considérablement améliorée. On ne voit plus de gendarmes circulant dans de vieilles Twingo… C’est heureux, car cela donne une autre image de nos forces de l’ordre.

Les délits de fuite sont de plus en plus nombreux et entraînent de plus en plus de dégâts. Les policiers et les gendarmes doivent être en mesure de maîtriser les suspects. Ils ont pour cela besoin de véhicules puissants, fiables et, donc, récents. Force doit rester à la loi !

Si des efforts ont été faits, nous sommes quand même préoccupés par la baisse des crédits consacrés au renouvellement de la flotte de véhicules.

Le parc immobilier a, lui aussi, grand besoin d’être rénové et modernisé. La dynamique est enclenchée. Il convient de maintenir cet effort dans la durée.

Les missions des forces de l’ordre évoluent sans cesse. À mesure que le numérique prend une place de plus en plus importante dans nos vies, la délinquance et le crime s’y développent. Nos policiers et gendarmes doivent acquérir de nouvelles compétences et de nouvelles capacités pour faire face et assurer la sécurité de nos concitoyens.

Nous avons tous en tête les récentes attaques informatiques qui ont ciblé des hôpitaux ou encore des communes. La complexité et l’impact de ces opérations ne cessent de croître. Parallèlement, de récentes arrestations ont mis au jour d’importants réseaux pédopornographiques dans notre pays. Tout cela révèle l’ampleur prise par le numérique dans le travail des forces de l’ordre.

Le projet de Lopmi prévoit, en conséquence, un plan de modernisation numérique, particulièrement nécessaire et attendu.

Au-delà de ces nouveaux champs d’intervention, policiers et gendarmes assurent également des missions plus classiques, mais tout aussi importantes. J’évoquerai plus particulièrement la sécurité routière.

Ce sujet ne fait pas les gros titres des journaux, mais les accidents de voiture emportent chaque année la vie de plus de 3 000 de nos concitoyens, c’est-à-dire trois fois plus que le nombre d’homicides. L’augmentation des crédits dédiés à la sécurité routière est donc bienvenue, d’autant que 2022 semble être une année particulièrement mauvaise à cet égard. Il faut inverser la tendance.

L’accroissement des missions, comme l’augmentation de la délinquance et de la criminalité, justifie la hausse du budget consacré à la sécurité. Nos concitoyens en ont besoin pour pouvoir exercer leurs libertés.

Le groupe Les Indépendants – République et Territoires votera en faveur de l’adoption de ce budget.

M. le président. La parole est à M. Thomas Dossus. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

M. Thomas Dossus. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, première traduction financière du projet de Lopmi, présenté par ce gouvernement, le budget de la mission « Sécurités » voit les crédits alloués à ce volet de l’action publique fortement augmenter. Nous devrions nous en réjouir, mais nous ne sommes pas là pour ne regarder que le chiffre en bas du tableau. C’est bien la répartition et l’utilisation de ces fonds qui interrogent notre groupe.

Lors des longs débats que nous avons eus autour du projet de loi de programmation, nous avons pu exposer notre vision des forces de l’ordre : au service des citoyens et au plus proche d’eux.

Lors de cet examen, nous avons bien voté l’article comprenant la trajectoire d’augmentation des crédits alloués aux serviteurs de l’État, saluant cet effort substantiel, pour reprendre les termes du président Buffet, mais pas le rapport qui en décrivait l’usage. Les forces de sécurité de notre pays sont, à l’instar d’autres fonctionnaires comme les soignants de l’hôpital public, les enseignants ou les magistrats, parfois bien maltraités par l’État employeur.

Ce sentiment d’abandon, de manque de moyens, d’accompagnement, de formation, aggravé par la politique du chiffre et des missions aussi chronophages qu’inutiles, se traduit, hélas, par l’épuisement de nos forces de l’ordre. Songez que 24 % des gendarmes ou policiers déclarent être confrontés à des pensées suicidaires. C’est cela qui devrait être la priorité.

Nous avons bien perçu la continuité d’une politique, plus répressive que protectrice, qui ignore tant les liens de confiance à renforcer avec la population que cette immense souffrance au travail de nos forces de l’ordre, lesquelles s’engagent pourtant pour agir auprès de la population, avec la population, pour la population.

Ce gouvernement préfère allouer l’argent public à la numérisation, à une robotisation outrancière, une modernisation de façade, qui oublie les problèmes du quotidien, à la fois des citoyens et des agents.

La numérisation ne simplifie la vie que d’une partie de la population : l’illectronisme est une réalité qui touche 13 millions de personnes en France. Ne les laissons pas à la porte de nos services publics !

Je profite d’être à cette tribune pour m’associer aux craintes évoquées par de nombreux parlementaires sur un tel investissement dans la technologie, et ce au regard du fiasco qu’a été le déploiement du logiciel Scribe.

Alors, certes, il faut reconnaître que la menace numérique s’accroît. Aussi, nous nous réjouissons du renforcement des services de lutte contre la cybercriminalité. Nous saluons l’ensemble des agents qui ont récemment permis l’interpellation de plusieurs cyberpédocriminels.

Nous nous félicitons également de l’engagement gouvernemental de répondre enfin au problème de la vétusté des locaux, qui n’est pas sans conséquence non seulement pour les forces de l’ordre, mais aussi pour les gardés à vue, comme l’a très justement souligné Dominique Simonnot.

Cet effort en faveur de conditions de travail dignes est essentiel pour renforcer aujourd’hui les liens avec les citoyens.

Nos craintes restent les mêmes depuis l’étude du projet de Lopmi : un développement de façade d’une police structurée autour du tout-répressif ; une multiplication de nouvelles compagnies de CRS calibrées, nous dit-on, pour faire face aux grands événements que notre pays s’apprête à accueillir, mais sans repenser notre doctrine de maintien de l’ordre, qui a pourtant brillé par sa médiocrité devant le monde entier lors d’un grand événement au printemps dernier.

L’évolution des dépenses de fonctionnement et d’investissement entre la police et la gendarmerie diffère : elles augmentent ainsi significativement pour la police nationale, mais diminuent pour la gendarmerie nationale.

Nous défendons une police de proximité, essentielle pour renouer le lien de confiance avec les citoyens. Ce sont donc bien les missions que l’on doit questionner avant l’allocation des moyens.

Le tout-répressif et la culture du chiffre ont leurs limites, mais ce budget est loin de dresser un tel constat.

Pour ce qui est des missions inutilement consommatrices de forces et de moyens, l’exemple de la lutte contre le cannabis est emblématique de l’impasse d’une politique antidrogue inefficace. Malgré tous les coups de filet, les points de deal démontés, toutes les amendes forfaitaires, vous vous heurtez toujours au même problème : les Français aiment ce produit et en sont toujours parmi les plus grands consommateurs d’Europe. Votre politique ne tient que par votre dogmatisme et ne fait qu’épuiser les troupes.

Le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires souhaite traduire dans ce budget des propositions que nous avions faites dans le cadre du débat sur le projet de Lopmi, propositions qui avaient reçu le soutien du Gouvernement, à savoir le développement des officiers de liaison LGBTQI ou encore la formation au tir.

Nous proposerons aussi la création d’une réelle autorité administrative indépendante chargée de la déontologie de nos forces de l’ordre.

Sur le volet sécurité civile, notre déception est grande. Comme partout ailleurs, les moyens ne sont pas à la hauteur des enjeux liés au changement climatique. Ils ne permettent pas de construire une première ligne solide face aux périls qui viennent.

Le budget de la sécurité civile n’est de nature, selon nous, ni à répondre au besoin réel de prévenir les risques accrus à venir ni à compenser les dégâts subis cet été. Le renforcement des moyens de lutte contre les incendies est bienvenu, certes, mais son niveau est insuffisant dans un contexte inflationniste.

Dans l’ensemble, ce budget ne nous convient pas. Nous restons dubitatifs, au même titre que le Conseil d’État, qui a également déploré un manque de données sur la situation et l’évolution des phénomènes d’insécurité et de délinquance au cours des dernières années, ainsi qu’une absence d’évaluation des dernières lois sécuritaires adoptées depuis 2018.

Aussi, notre groupe ne pourra voter les crédits de la mission « Sécurités ». (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

M. le président. La parole est à M. Alain Richard.

M. Alain Richard. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, j’évoquerai, dans le peu de temps qui m’est imparti, les moyens croissants de la police et de la gendarmerie nationales, qui figurent dans le projet de loi de programmation et qui connaissent une première année d’application dans ce budget, avec des créations d’emplois substantielles. Je souligne à ce titre l’importance d’avoir prévu dans le projet de Lopmi des actions de formation, à la fois initiale et continue, de ces personnels : elles sont indispensables à leur réussite, compte tenu de la polyvalence et de la complexité de leurs missions.

De même, les efforts sur le numérique, facteur à la fois d’efficacité et d’amélioration des conditions d’emploi des agents, apparaissent comme une priorité. À cet égard, il faudra tenir compte des difficultés passées et en tirer les leçons.

En matière de politique de ressources humaines, je suis de ceux qui sont attentifs aux problèmes d’attractivité des emplois de policier et de gendarme dans les grandes agglomérations et métropoles, en Île-de-France au premier chef. Nous devons chercher à renforcer les outils d’attractivité de ces métiers. Parmi ceux que j’entrevois, il y a évidemment l’aide dans le déroulement de carrière. Il faut savoir que, dans les commissariats ou services de sécurité publique des grandes agglomérations, nous manquons d’encadrants stables. La gestion des carrières est un levier efficace à mon sens.

En Île-de-France notamment, nous devons aussi réfléchir à l’aide au logement des personnels de police, puisque c’est l’un des facteurs de retrait.

Pour la gendarmerie nationale, mes observations sur le problème du logement sont quelque peu différentes. Lorsque j’avais la charge de la gendarmerie en tant que ministre de la défense, j’ai connu l’époque – bénie – où il y avait un accord de fond entre les collectivités, principalement les départements, et la gendarmerie nationale, pour assurer le financement en capital des installations et la récupération de ces investissements sous forme de loyers. Ce système s’est dégradé, parce que le prix des installations de gendarmerie a crû très substantiellement dans les années qui ont suivi. Aujourd’hui, l’équation financière ne fonctionne plus.

Il me semble que c’est un petit défi pour le ministère de l’intérieur que de travailler à une standardisation et à une homogénéisation des plans des locaux de gendarmerie, de sorte que les collectivités investisseuses fassent l’économie d’une recherche d’optimum dans chaque projet.

Je serai très bref sur l’amélioration de la chaîne pénale. À l’heure actuelle, dans les services de sécurité publique et de police judiciaire, on constate chez les personnels un découragement devant le nombre d’infractions ne donnant pas lieu à une enquête judiciaire structurée et, partant, à une sanction. Il faut absolument que le ministère de l’intérieur poursuive la concertation avec la Chancellerie pour que la chaîne pénale retrouve son efficacité.

L’intitulé de cette mission sur les sécurités, au pluriel, me conduit, pour terminer, à faire des observations en matière de sécurité routière.

Nous avons connu des progrès réguliers quant à la dangerosité de la circulation sur nos routes au cours de la décennie passée, mais la tendance est en train de s’inverser. Les gendarmes ont noté la reprise de comportements vraiment dangereux, tels que des dépassements sans visibilité ou des excès de vitesse importants. La surveillance par les radars doit rester une priorité.

À ce sujet, je souhaite faire une demande particulière au ministère de l’intérieur dans sa permanence, madame la ministre.

Je ne comprends pas qu’un très grand nombre de véhicules ne soient actuellement pas immatriculés. C’est un constat que nous faisons dans les rodéos, qui sont difficiles à réprimer, certains véhicules motorisés à deux roues étant immatriculés, au contraire d’autres, censés être des véhicules tout-terrain. Surtout, j’observe avec inquiétude le développement des nouvelles mobilités urbaines, avec des véhicules capables de performances élevées.

Il m’est ainsi arrivé, en rentrant du Val-d’Oise, de me faire doubler à 45 kilomètres par heure par une trottinette dont le conducteur n’avait pas de casque. Quand je vois également des vélos-cargos, qui sont des véhicules assez lourds, frôler les trottoirs, je me dis qu’il y a des précautions à prendre.

Il faut que le ministère de l’intérieur se rende compte de la nécessité d’immatriculer tous ces véhicules, ce qui est simple à faire, si l’on veut assurer un minimum de respect de la loi dans le cadre de la circulation urbaine. J’ai lu hier soir dans la presse qu’une première compagnie de location de trottinettes avait décidé de le faire de sa propre initiative. Cela signifie que l’État a laissé passer un train. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner.

M. Patrick Kanner. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain est exigeant s’agissant des moyens alloués pour assurer la sécurité, la sûreté, dirai-je même, de nos concitoyens, de tous nos concitoyens.

Cette mission, qui regroupe les crédits de la police nationale, de la gendarmerie nationale et des pompiers est en hausse de 6,6 % pour 2023, conformément à la trajectoire contenue dans le projet de loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur, qui a animé nos débats voilà quelques semaines. Dont acte !

Si l’on peut se féliciter de la hausse globale du budget de la mission, certaines disparités sont à noter. Par exemple, pour la police nationale, trois des six actions, et non des moindres, sont en baisse : les crédits alloués à la sécurité et à la paix publiques, à la sécurité routière ainsi qu’aux missions de police judiciaire et concours à la justice subissent tous des baisses de plus de 13 %.

Pourtant, la sécurité et la paix publiques ne sont pas à mettre de côté. Ce signal est mauvais, à un moment où la réforme de la police judiciaire est en question, soulevant beaucoup d’interrogations dans la profession. Une des difficultés pressenties est que les effectifs de police judiciaire seront noyés par les affaires de délinquance courante, ce qui n’est pas souhaitable. C’est tout le débat que nous aurons prochainement, je n’en doute pas.

Vous vous rappelez sans doute les craintes que nous avons pu exprimer sur la police judiciaire lors de nos débats sur le projet de Lopmi ; elles restent d’actualité. Les auditions auxquelles nous procédons, les uns et les autres, montrent que les choses ne sont pas aussi simples que le ministre de l’intérieur voudrait parfois nous les présenter.

Trois audits commandés par M. Darmanin et M. le garde des sceaux n’ont pas encore livré leurs résultats. Ces travaux devraient, je l’espère, être utiles pour rassurer la police judiciaire partout sur le territoire national.

Je reviens à la mission « Sécurités » du projet de loi de finances pour 2023, étroitement liée au projet de Lopmi. Je tiens à rappeler que le groupe SER a été constructif et que notre vote a été positif. Si nous sommes prêts à soutenir nos forces de l’ordre et nos forces de sécurité civile, nous n’en sommes pas moins exigeants sur quelques points précis.

Notre collègue Jérôme Durain, qui suit ces problématiques pour notre groupe, l’a d’ailleurs répété à plusieurs reprises : notre vote ne signifie pas une adhésion sans réserve. Nous avons par ailleurs entendu les voix qui nous disaient que seule la rationalisation budgétaire avait guidé cette réforme.

Nous serons donc vigilants, chaque année, à la bonne application de la prochaine Lopmi, qui donne des moyens supplémentaires à nos forces de sécurité, mais nous nous attacherons également à ce que la réforme de la police judiciaire ne conduise pas à de nouvelles difficultés de résolution des affaires. C’est une question de respect des droits de nos concitoyens.

En ce qui concerne la gendarmerie, le projet de loi de programmation sanctuarise la dynamique ascendante de ses crédits. Tant mieux ! Le renforcement des moyens de la police et de la gendarmerie se traduit par la poursuite des recrutements avec, dès 2023, l’accroissement des effectifs de 2 857 ETP supplémentaires, qui viendront renforcer les rangs de ces deux corps, nécessaires à notre bon fonctionnement républicain.

Ce recrutement doit pouvoir garnir les rangs des nouvelles brigades rurales et des nouveaux escadrons de gendarmerie mobile qui ont été annoncés. Notre groupe soutient bien évidemment ces mises en place et va même plus loin : nous porterons ainsi un amendement visant à allouer 50 millions d’euros supplémentaires aux gendarmeries rurales, et ce afin d’anticiper une révision du décret de 1993 sur les subventions aux collectivités territoriales pour la construction de casernements de gendarmerie.

Rappelons-le, aux termes du projet de Lopmi, la police et la gendarmerie doivent doubler leur présence sur la voie publique, notamment en vue de la Coupe du monde de rugby en 2023 et des jeux Olympiques en 2024. L’intégration de nouvelles recrues va mettre en tension les capacités de formation, d’autant que s’y ajoute l’intégration de la formation d’officier de police judiciaire au cursus des gardiens de la paix, toujours aux termes de ce même projet de loi.

Enfin, en ce qui concerne la sécurité civile, il convient de rappeler qu’au minimum les deux tiers du budget reposent sur les communes et départements, qui financent largement les Sdis. L’État n’assure donc qu’une part minoritaire du financement du budget total des Sdis. Cela dit, pour 2023, la participation de l’État augmente de 13 %, dans le droit fil des objectifs contenus dans le projet de loi de programmation. Si le vote de ce dernier entraîne une augmentation des moyens alloués aux forces de sécurité civile, celles-ci en sont toutefois les parents pauvres, puisque seulement 5 % des moyens prévus dans ce texte leur sont consacrés.

C’est pourquoi, dans le projet de loi de finances pour 2023, nous souhaitons aller plus loin dans le soutien à apporter à nos combattants du feu, qui ont positivement défrayé la chronique cet été et qui méritent plus que des éloges médiatiques.

Notre groupe présentera plusieurs amendements visant à étendre le bouclier tarifaire aux Sdis – pourquoi n’en bénéficieraient-ils pas ? Ils sont aussi touchés par l’inflation –, à augmenter les moyens de la dotation de soutien aux investissements structurants et à mieux protéger les personnels contre les agressions qu’ils subissent. La Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France (FNSPF) nous demande une prise en considération de cette problématique récurrente. En effet, l’actualité nous montre que, très régulièrement, des sapeurs-pompiers sont agressés dans le cadre de leurs fonctions, y compris par les personnes qu’ils sont amenés à protéger.

Par ailleurs, les grands défis auxquels les pompiers doivent faire face du fait du dérèglement climatique nous imposent de leur accorder des moyens à la hauteur de leur mission.

Quant aux crédits dédiés à la sécurité et à l’éducation routières, leur augmentation est surtout due à l’intégration de nouvelles actions jusqu’ici comprises dans d’autres programmes. En effet, cette hausse semble liée à l’augmentation des moyens de l’Agence nationale des titres sécurisés (ANTS), rendue nécessaire par la généralisation des amendes forfaitaires délictuelles (AFD) prévue par le projet de Lopmi – mesure à laquelle nous nous opposons. Nous le répétons : les AFD ne doivent pas être généralisées.

En effet, une telle mesure méconnaît le principe d’égalité devant la justice et est entachée d’incompétence négative. Nous demandons qu’il appartienne au législateur d’apprécier au cas par cas et dans le respect de ce principe la pertinence du recours à cette procédure, au regard de la conciliation à opérer entre la nature du délit concerné, la protection des droits des personnes mises en cause et des victimes, la défense des intérêts de la société et les exigences tant d’une bonne administration de la justice que d’une répression effective des infractions. Voilà ce qui doit conduire notre parcours législatif.

Vous le voyez, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain a des réserves, qu’il exprime régulièrement et il restera vigilant sur les moyens mis en œuvre.

Cela étant dit, nous ne souhaitons pas être une opposition stérile ; nous pensons avant tout à nos forces de sécurité. Notre groupe votera donc les crédits dévolus à la mission « Sécurités », en conformité avec les avis de nos rapporteurs, que je salue. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’année 2023 sera la première année de mise œuvre des mesures prévues dans le projet de loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur, mesures qui seront financées par les crédits de la mission « Sécurités ».

Nous l’avons déjà souligné lors de son examen au Sénat, mais je me permets de le réaffirmer : la Lopmi est selon nous la pierre angulaire d’une police qui s’éloigne du triptyque « prévention, dissuasion, répression », doctrine pourtant essentielle à nos yeux.

Par son approche en mode dégradé de la police et de la sécurité, ce projet de loi d’orientation et de programmation consacrera un relâchement du lien de confiance entre les policiers et la population et nous semble annonciatrice de ce que l’on peut d’ores et déjà considérer comme une perte de sens pour les métiers de la sécurité.

Loin de moi l’idée de diaboliser la dématérialisation ou de sous-estimer sinon sa nécessité, du moins son utilité pour accéder à des informations et effectuer des démarches administratives, mais elle ne peut pas être l’alpha et l’oméga de la relation entre la police et nos concitoyens.

Au fond, nous devons nous interroger sur la révision de la doctrine du maintien de l’ordre, dans toute sa dimension, la priorité étant, nous semble-t-il, formation de nos forces de sécurité.

Les lacunes de la Lopmi, que nous avions pointées lors de son examen, se reflètent dans le budget de la mission « Sécurités ».

Les crédits de l’action Sécurité et paix publiques sont destinés à concrétiser l’entreprise de dématérialisation des plaintes engagée dans le projet de loi d’orientation et de programmation. Selon nous, une telle affectation des crédits mettra à mal l’objectif d’une police proche de nos concitoyens. Nous le répétons, la recherche d’efficacité ne doit pas se faire au prix d’une rupture du lien entre citoyens et police.

De plus, les crédits de l’action Missions de police judiciaire et concours à la justice, qui regroupe l’ensemble des activités de police judiciaire et des missions réalisées au profit de la justice ou de l’administration pénitentiaire, diminuent de 429 millions d’euros, sans qu’aucune explication soit fournie dans les documents budgétaires.

Alors même que l’on nous dit de ce budget qu’il est destiné à resserrer les liens entre la police et les citoyens, nous peinons à croire que, avec une telle baisse des crédits alloués à la police judiciaire, nous poursuivions un noble but. Ce n’est objectivement pas le cas.

Il s’agit d’un budget d’affichage. En effet, en le décortiquant, on constate que, sur le fond, il est très loin de prévoir un réel soutien à nos agents. Si tel avait été le cas, le budget de la formation de nos agents de police ne serait pas passé à la trappe.

Par ailleurs, la baisse des crédits consacrés à la police judiciaire nous conforte dans l’analyse que nous avons faite de la Lopmi : son application sera vectrice de perte de sens pour nos policiers. Je vous rappelle, madame la ministre, que nous manquons d’environ 5 000 officiers de police judiciaire. Aussi peinons-nous à comprendre vos contradictions ; je dois même dire que nous nous inquiétons.

Cette partie du budget ne renvoie pas une image attrayante. Elle est en fait plutôt effrayante. Nous déduisons de son manque d’envergure que la départementalisation de la police nationale aura de lourdes conséquences sur la police judiciaire. Dénoncée tant par les professionnels de la sécurité que par ceux de la justice, cette départementalisation sera synonyme d’intrusion du pouvoir exécutif dans les procédures pénales. Comme ce budget en atteste, elle donnera lieu également à une mutualisation des moyens alloués à ces missions publiques, ce que nous ne pouvons que déplorer, car elle entraînera une dégradation des conditions de travail des personnels, auxquels je suis très attachée, mais aussi l’accueil des victimes.

De même, nous regrettons que le budget prévu en vue de la tenue en France de la Coupe du monde de rugby en 2023 et des jeux Olympiques et Paralympiques en 2024 traduise un objectif non pas de qualité, mais de quantité. Nous nous interrogeons – ce n’est pas nouveau – sur le recours à des entreprises privées pour assurer la sécurité lors de ces événements.

En effet, nous persistons à faire valoir que la sécurité publique est du ressort du pouvoir régalien et donc des fonctionnaires de police et de gendarmerie, qui sont par définition des acteurs du service public. La privatisation n’est pas une solution et entraînera une dégradation des conditions de travail de nos forces de l’ordre. En outre, les personnels privés ne sont pas soumis au cadre déontologique propre à l’exercice de fonctions régaliennes.

Ainsi ce budget ne fait-il que confirmer nos craintes concernant la Lopmi. En toute cohérence, nous ne voterons pas les crédits de la mission « Sécurités ». Nous serons toutefois attentifs à plusieurs des amendements déposés par nos collègues. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

Mme Nathalie Goulet. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, comme chacun sait, le budget « Sécurités » comporte quatre programmes.

Un budget est une marque de volonté ; nous l’avons constaté lors de l’examen de la Lopmi, comme l’augmentation de 1,55 milliard d’euros de l’ensemble des crédits de la mission le confirme.

Au-delà des chiffres, la discussion budgétaire permet d’évoquer des stratégies.

À cet égard, madame la ministre, je vous interrogerai tout d’abord sur la cybercriminalité et, par ricochet, sur la coopération internationale. Sauf erreur de ma part, aucun montant relatif à la coopération internationale ne figure dans les documents budgétaires du programme – cette coopération est pourtant indispensable.

N’y figure qu’une contribution à Interpol. À ce sujet, j’ai eu la chance, grâce au président Buffet, d’aller passer une matinée au siège d’Interpol, à Lyon. Je tiens donc à rendre hommage au travail de cette organisation et à nos agents qui y sont détachés.

De quels moyens disposez-vous, madame la ministre, pour la coopération internationale ? Ma question porte non pas sur les seules frontières, qui dépendent d’une autre mission, mais sur la lutte contre la cybercriminalité, qui n’est évidemment pas franco-française.

On ne compte plus les cyberattaques. La filière cyber a été renforcée grâce à l’augmentation du nombre de gendarmes et de policiers cyberpatrouilleurs et à la création du Centre national de formation cyber (CNF-Cyber), qui assurera la formation continue des enquêteurs spécialisés – c’est évidemment indispensable.

Par ailleurs, Tracfin a développé une cellule spécifique dédiée à la délinquance financière liée aux crypto-actifs. Il faut, madame la ministre, mettre des moyens extrêmement importants sur cette question, car, alors que nous en sommes encore à la guerre de l’obus et du blindage, les délinquants, eux, courent évidemment plus vite que la police – c’est une constante.

Le 23 novembre dernier, le Parlement européen a subi une attaque informatique après l’adoption d’un texte concernant la Russie. Et je ne parle pas du très désagréable espionnage de nos amis du Qatar… Tout cela n’est pas très rassurant pour la sécurité de nos institutions.

J’aimerais par ailleurs connaître la position du ministre de l’économie et des finances – en réalité, ma question s’adressait à l’origine à Gérald Darmanin en tant qu’ancien ministre du budget – qui a indiqué le 17 octobre dernier qu’il voulait faire de la France le « camp de base en Europe » des crypto-actifs. J’ignore si la faillite de la plateforme FTX aura freiné ses élans, madame la ministre, mais le fait est qu’il va bien falloir nous préparer aux conséquences du développement des crypto-actifs. Notre connaissance du sujet est loin d’être parfaite, alors que le règlement européen Mica, pour « markets in crypto-assets », encadrera bientôt ces crypto-actifs.

Nous devons préparer nos services à l’éventualité d’une attaque massive par ce type de délinquance. C’est d’autant plus évident que, si seulement 8 % des Français détiennent actuellement des crypto-actifs, ce taux augmente de façon exponentielle.

Pour revenir à un sujet plus local, j’aborderai maintenant la question de la défense incendie, sur laquelle je formulerai deux remarques.

La première porte sur la nouvelle réglementation en matière de défense incendie. Nous l’avons certes votée, mais celle-ci interdit purement et simplement la moindre construction dans certains territoires, les départements n’ayant pas les moyens de fournir les infrastructures nécessaires.

Selon la délégation aux collectivités territoriales du Sénat, la réforme engagée en 2011 de la défense extérieure contre l’incendie (DECI) « n’a pas tenu ses promesses et a provoqué un large mécontentement de la part des maires : 70 % des maires interrogés par la Délégation estiment que la concertation n’a pas été suffisante et 81 % considèrent que leur territoire n’est que partiellement couvert au regard des nouvelles normes de défense. Cela signifie que près d’une habitation sur trois serait hors champ de la couverture, 6 à 7 millions de concitoyens étant concernés. »

Les coûts de mise aux normes sont astronomiques et insupportables. Dans ce contexte, le service départemental d’incendie et de secours (Sdis) du département de l’Orne a imaginé une expérimentation, que je vais maintenant vous présenter.

Il s’agit, en l’espèce, d’équiper le Sdis de huit porteurs d’eau de forte capacité pour l’ensemble du département, dans un périmètre acceptable. J’ai donc déposé un amendement visant à lancer une expérimentation assez bon marché – elle coûterait environ 2 millions d’euros –, ce qui nous permettra d’aborder plus longuement ce sujet lors de la discussion des articles.

Seconde remarque : je m’étonne que, lors de l’examen de la première partie de la loi de finances, de nombreux amendements de notre collègue Anne-Catherine Loisier, excellente spécialiste de la forêt, aient été rejetés.

J’ai pourtant le sentiment que la gestion des espaces forestiers et le risque incendie sont intrinsèquement liés. Les arbitrages budgétaires en faveur de l’un et de l’autre, notamment s’agissant de l’entretien, ne sont pas sans conséquence.

De ce point de vue, nous devrons procéder à un réajustement, car, si les forêts sont mal entretenues, le risque incendie augmente. En ce sens, les amendements déposés par Anne-Catherine Loisier me semblaient soulever des questions très importantes.

Je vous l’ai déjà dit, madame la ministre, le groupe Union Centriste votera les crédits de la mission.

Permettez-moi, avant de conclure, de vous adresser un message personnel à l’approche de Noël : le maire de Sainte-Gauburge-Sainte-Colombe, magnifique commune de l’Orne, souhaiterait se doter d’un équipement pour éditer les cartes d’identité et les passeports. Or les normes fixées par le préfet – 18 rendez-vous par jour, 6 heures par jour, 5 jours par semaine – lui semblent pour le moins excessives ; il ne pourra pas y satisfaire.

Disposant d’une maison France Services, il verrait d’un très bon œil que celle-ci soit équipée de ce matériel. Il a écrit au Président de la République et à tous les services concernés. Au lendemain du Congrès des maires de France, le moment est bien choisi pour relayer sa demande, qu’il aimerait que vous examiniez de très près, madame la ministre. (Mme la ministre sourit.)

Je profiterai de la minute qu’il me reste pour remercier, alors que le Congrès des maires de France vient de prendre fin, l’ensemble des personnels du Sénat, qui ont assuré la visite de centaines de personnes dans des conditions exceptionnelles. Je tiens donc à leur rendre un hommage appuyé. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. le président. La parole est à Mme Maryse Carrère. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et RDSE.)

Mme Maryse Carrère. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, dans son Discours sur lorigine et les fondements de linégalité parmi les hommes, Jean-Jacques Rousseau nous livre une formule intéressante : « À mesure que le genre humain s’étendit, les peines se multiplièrent ». Cette multiplication des inquiétudes et des dangers résonne bien avec le pluriel employé dans l’intitulé de cette mission, dont les enjeux sont singulièrement variés.

En premier lieu, il y a la sécurité quotidienne : celle de la vie ordinaire de nos concitoyens, des rues et des lieux publics, qui comporte des procédures que chacun est, hélas ! amené à rencontrer. En effet, les statistiques récentes en matière de délinquance ne sont malheureusement pas très encourageantes.

En deuxième lieu, il y a la sécurité événementielle, dont on a mesuré l’importance à l’occasion de l’accueil de la finale de la Ligue des champions au mois de juin dernier. De ce point de vue, nous abordons des années décisives à l’approche de deux événements phares : la Coupe du monde de rugby et les jeux Olympiques.

En troisième lieu, il y a la sécurité de crise : je pense en particulier aux incendies de cet été, qui ont durement frappé la Gironde.

Durant ces moments, les agents doivent être mobilisés sans discontinuer.

Nous avons examiné au mois d’octobre le projet de loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur, qui affiche de nombreuses promesses. Ce budget me semble aujourd’hui aller dans la direction annoncée.

La hausse d’un milliard d’euros n’a rien de négligeable. Elle permet des recrutements attendus, tant dans la police que dans la gendarmerie. Nous aurions donc tort, à mon sens, de nous montrer trop pessimistes, d’autant que cette progression poursuit celle que l’on a déjà observée au cours des exercices précédents.

Permettez-moi d’énumérer, pêle-mêle, quelques points que nous souhaitons saluer.

Premièrement, je l’ai déjà dit, nous nous réjouissons de l’augmentation importante des effectifs de la police et de la gendarmerie nationales, les dépenses de personnel connaissant une hausse, déjà constatée dans les budgets précédents, de 6 % cette année.

Deuxièmement, nous saluons le maintien de la dynamique des dépenses de fonctionnement et d’investissement. Ces dépenses devraient accompagner les recrutements en permettant aux agents d’être opérationnels d’un point de vue matériel. C’est, là aussi, une bonne chose.

Troisièmement, nous saluons l’affectation de crédits supplémentaires en vue de développer les outils de lutte contre les cybercriminalités. Il ne faut nullement négliger cette question. Le piratage au cours de l’été du réseau informatique de l’hôpital de Corbeil-Essonnes a montré avec force la nécessité de poursuivre l’investissement dans ce domaine.

Quatrièmement, enfin : je ne peux que saluer les crédits qui devraient être alloués au renouvellement de la flotte d’hélicoptères.

Nous voyons donc que, afin d’assurer toutes ces missions de sécurité publique, il nous faut des agents et du matériel en nombre suffisant.

Par ailleurs, au-delà de la quantité, il faut de la qualité, c’est-à-dire des agents correctement formés – le groupe du RDSE a déjà eu l’occasion d’insister sur cet aspect, en particulier lors de l’examen de la Lopmi.

Je le redis : qu’il s’agisse de la formation initiale ou de la formation continue, trop souvent délaissée au cours de la carrière, il y a encore beaucoup à faire pour améliorer la performance des différents services.

Les travaux en cours de la mission d’information sur les moyens d’action et les méthodes d’intervention de la police et de la gendarmerie, dont Catherine Di Falco et moi sommes les rapporteures, montrent que nous avons une importante marge de progression en la matière.

Enfin, j’insisterai tout de même sur les enjeux de sécurité civile. La question des incendies, que j’ai déjà évoquée, est particulièrement préoccupante pour les années à venir. Nous avons le sentiment que le soutien budgétaire est insuffisant pour y faire face, d’autant que les projections climatiques sont loin d’être rassurantes.

Aussi notre groupe présentera-t-il plusieurs amendements visant à encourager l’investissement dans la lutte contre l’incendie. Je pense notamment à la proposition de notre collègue Jean-Yves Roux d’accompagner financièrement les communes rurales dans la réalisation de leurs obligations légales de débroussaillement, ou encore à l’amendement de Nathalie Delattre visant à financer l’acquisition de drones, utiles à la lutte contre les incendies.

Ces remarques faites, notre groupe devrait voter en faveur des crédits alloués à cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée auprès du ministre de lintérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je représenterai, pour l’examen des crédits de cette mission, le ministre de l’intérieur et des outre-mer, qui ne peut malheureusement pas être présent en raison d’un déplacement à Bruxelles à l’occasion du conseil Justice et affaires intérieures.

La mission « Sécurités » du projet de loi de finances pour 2023 qui est aujourd’hui soumise à votre approbation est essentielle pour tous les Français. Elle détermine les moyens mis à la disposition de l’État pour assurer l’une de ses missions premières : garantir à chacun de nos concitoyens le droit à mener une vie tranquille dans notre pays, à y vivre en sécurité.

J’espère que vous trouverez dans mon propos, mesdames, messieurs les sénateurs, quelques réponses aux questions que vous avez soulevées.

Beaucoup a été fait depuis 2017, sous la conduite du Président de la République, pour renforcer la sécurité intérieure. Des efforts budgétaires constants ont été consentis, se traduisant, par exemple, par le plan de recrutement exceptionnel de 10 000 policiers et gendarmes, ou encore par la mobilisation substantielle, dans le cadre du plan de relance, de crédits dédiés notamment à la prise en compte des nouveaux enjeux de la protection et à l’équipement de nos policiers et de nos gendarmes.

Toutefois, beaucoup reste encore à faire, c’est vrai.

Le caractère novateur, l’ambition et le pragmatisme de la politique que nous souhaitons mener transparaissent clairement, me semble-t-il, dans le projet de loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur pour la période 2023-2027. Celui-ci a été adopté à une très large majorité par le Sénat et, récemment, par l’Assemblée nationale : j’y vois la mobilisation de tous pour renforcer la sécurité de notre pays.

Le consensus parlementaire qui s’est dégagé n’est pas le fruit du hasard, il est la conséquence de la méthode avec laquelle nous avons élaboré ce projet de loi : dans la concertation et la coconstruction, avec l’ensemble des acteurs de la sécurité intérieure de notre pays,…

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. C’est une blague ?

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée. … dans le cadre, notamment, du Beauvau de la Sécurité, qui s’est achevé au mois d’octobre dernier.

Ce projet de loi d’orientation et de programmation prévoit une hausse du budget du ministère de 15 milliards d’euros sur cinq ans. Cette augmentation historique n’est pas seulement l’addition de moyens nouveaux ; elle est mise au service d’une vision stratégique refondée de la sécurité intérieure, portée par le PLF pour 2023. Le budget du ministère de l’intérieur sera d’ores et déjà, en 2023 – première année de mise en œuvre de la Lopmi – en hausse de 1,25 milliard d’euros.

Au travers de la mission « Sécurités », nous nous donnons les ressources nécessaires pour intensifier et améliorer encore les constantes de l’action publique : notre lutte contre la criminalité et toutes les formes de délinquances, la prévention des risques et la prise en charge de nos concitoyens en danger. Cela passe par le renforcement de nos capacités opérationnelles et par l’amélioration des conditions de travail de l’ensemble des agents de la sécurité intérieure.

Nous nous donnons également les moyens d’apporter une réponse forte et adaptée aux défis inédits auxquels la France fait face en ce moment, dans un contexte de multiplication des crises à la fois géopolitiques, économiques, sociales, environnementales… Autant de menaces nouvelles pour nos concitoyens, qui risquent, à terme, si nous n’en prenons pas la pleine mesure, de déstabiliser notre contrat social et de mettre en péril la cohésion de la Nation.

La mission « Sécurités » comporte quatre programmes distincts, qui recouvrent les différents volets de l’action de l’État en matière de sécurité intérieure.

Au total, comme dans chacune de ses parties, la mission « Sécurités » porte un engagement financier en nette augmentation par rapport à l’année dernière.

Le budget global de la mission est en hausse de 6,82 % en autorisations d’engagement et de 6,65 % en crédits de paiement par rapport à 2022.

Je vous ferai part des lignes directrices que nous avons suivies pour construire chacun de ces programmes, ainsi que de leurs mesures principales.

Tout d’abord, en ce qui concerne la police et la gendarmerie nationales, l’objectif premier est bien de répondre au besoin d’une présence accrue d’agents sur la voie publique, conformément à l’objectif fixé par le Président de la République d’en doubler le nombre en dix ans. Continuer à déployer davantage d’agents sur le terrain revient à améliorer directement la qualité de vie de nos concitoyens dans tous les territoires, en métropole comme en outre-mer.

Pour cela, il est nécessaire de poursuivre le renforcement des effectifs. Dès 2023, 2 857 équivalents temps pleins seront créés, l’objectif étant de compter près de 7 400 nouveaux policiers et gendarmes d’ici à cinq ans.

Ces derniers armeront en particulier les onze unités de force mobile supplémentaires que nous voulons créer d’ici au début des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 – sept escadrons de gendarmerie mobile (EGM) et quatre compagnies républicaines de sécurité (CRS) –, auxquelles s’ajouteront sept unités de force mobile parisiennes qui seront libérées de leurs missions de garde statique.

Ces nouveaux agents renforceront également les circonscriptions de sécurité publique prioritaires de la police nationale. Ils seront déployés en particulier sur la voie publique et dans les transports en commun. Le ministre de l’intérieur a annoncé cette semaine que les effectifs de policiers et de gendarmes passeront de 1 675 à 3 510, soit 1 835 agents supplémentaires, dont 200 à Paris. C’est un effort sans précédent.

En parallèle, nous accompagnerons la montée en puissance de la réserve opérationnelle de la police et de la gendarmerie nationales, l’objectif étant d’atteindre 50 000 réservistes d’ici à 2027. Le budget spécifiquement consacré à la réserve de la gendarmerie sera crédité de 14 millions d’euros, soit un renfort de 6 000 réservistes, tandis que celui de la réserve de la police sera abondé à hauteur de 8 millions d’euros.

De même, le remplacement d’agents opérationnels par des agents civils administratifs ou des corps militaires de soutien se poursuivra afin de libérer 900 policiers et gendarmes supplémentaires en 2023.

Le PLF pour 2023 vise également à donner les moyens nécessaires au ministère de l’intérieur dans la perspective de la Coupe du monde de rugby et des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024. Pour les jeux Olympiques, le ministre vous a présenté, à la fin du mois d’octobre, le détail du dispositif de sécurisation envisagé pour cet événement inédit : près de 35 000 policiers et gendarmes seront mobilisés en moyenne par jour. Ainsi, près de 200 millions d’euros sont d’ores et déjà fléchés pour nous doter des moyens humains et matériels nécessaires.

Notre deuxième objectif, concomitant, est d’affermir l’ancrage territorial de nos forces de sécurité intérieures, afin de résorber les zones blanches sécuritaires qui peuvent exister dans notre pays. À cette fin, en concertation avec les élus locaux, nous engageons la création de 200 nouvelles brigades territoriales d’ici à 2027. La démétropolisation de près de 300 postes permettra de consolider cet engagement majeur.

Les policiers et gendarmes seront non seulement plus nombreux dans notre pays, mais également mieux équipés.

En 2023, quelque 4 800 véhicules légers seront acquis par la police et la gendarmerie nationales, dans la continuité des efforts réalisés ces dernières années, et quelque 250 millions d’euros seront mobilisés pour l’habillement, l’achat de tenues spécialisées et l’équipement des agents. Nous finaliserons notamment l’achat de caméras-piétons, pour atteindre l’objectif de 54 000 unités et ainsi renforcer la transparence de l’action de nos forces de l’ordre.

Par ailleurs, nous engageons dès 2023 le développement du réseau Radio du futur (RRF) : 250 millions d’euros y seront consacrés, sur près de 2 milliards d’euros qui seront investis au total pour son déploiement d’ici à 2030. Cette solution de télécommunication résiliente et interopérable est un atout indispensable pour permettre à nos forces de sécurité de gagner en efficacité.

Je tiens enfin à souligner que le ministère acquerra l’année prochaine 36 nouveaux hélicoptères, en vue de renouveler le parc existant et d’harmoniser ses différentes composantes – gendarmes et sécurité civile.

Nous poursuivons également le déploiement de la vidéoprotection sur la voie publique, pas moins de 22 millions d’euros étant programmés à cet effet pour la seule année 2023.

Les forces de sécurité intérieure seront dotées de moyens supplémentaires pour faire face, au-delà de la prise en charge de la délinquance du quotidien, à de nouveaux enjeux, dont elles doivent s’emparer pleinement.

Le premier de ces enjeux est la prise en compte croissante des nouvelles frontières de la délinquance, en particulier numériques. La filière cyber sera ainsi renforcée grâce au recrutement de 1 500 gendarmes et policiers cyberpatrouilleurs supplémentaires et au développement d’un appel d’urgence, le « 17 cyber ».

Ensuite, le déploiement dès l’année prochaine des premiers éléments de la gendarmerie verte, formée aux atteintes à l’environnement et dotée d’un commandement unique, permettra de répondre aux enjeux environnementaux.

L’année 2023 amorcera également la première étape de la mise en place des protocoles sociaux liés à la mise en œuvre de la Lopmi, qui visent à améliorer de façon substantielle les conditions de travail de tous les agents de la sécurité intérieure.

Sont ainsi prévues non seulement des mesures d’aide en matière de logement pour les policiers, mais également des aides à la garde d’enfants en horaires atypiques, les premières revalorisations de grilles indiciaires et l’augmentation de certaines primes et d’indemnités, comme la prime qui était attribuée aux officiers de police judiciaire, l’indemnité journalière d’absence temporaire ou encore la prime pour le travail de nuit des policiers.

Premier acte de la Lopmi, cette mission « Sécurités » témoigne, vous le voyez, mesdames, messieurs les sénateurs, de notre volonté d’en engager résolument la dynamique, au service de nos forces de sécurité et d’une meilleure protection de nos concitoyens, en particulier à l’approche des grands rendez-vous sportifs et populaires que notre pays accueillera dans les prochains mois.

Le même volontarisme se retrouve dans le programme « Sécurité civile ». Cette année, plus encore que les années précédentes, les conséquences du réchauffement climatique se sont cruellement fait sentir sur notre territoire. Je pense aux feux de forêt dévastateurs de cet été, aux ravages de la tempête Fiona en Guadeloupe ou encore aux fortes intempéries qu’ont connues la Somme et le Pas-de-Calais récemment.

Face à ces menaces d’ampleur, nous devons réarmer notre sécurité civile pour lui permettre de faire face à des crises toujours plus complexes et inattendues dans les années à venir.

Les objectifs déjà importants fixés dans la première version du programme 161 seront encore augmentés par deux amendements gouvernementaux, afin d’inclure les dernières mesures annoncées par le Président de la République en retour d’expérience de la saison de feux de forêt.

Le premier amendement aura ainsi pour objet d’abonder de 12 millions d’euros supplémentaires les crédits du programme, afin de renforcer les moyens humains et matériels dédiés à la lutte contre les feux de forêt. Le second tendra à mobiliser 240 millions d’euros en autorisations d’engagement et 24 millions d’euros en crédits de paiement pour l’acquisition de quatorze canadairs supplémentaires.

Ces deux amendements visent à compléter l’amendement qui a été intégré dans le projet de loi de finances pour 2023, après son examen à l’Assemblée nationale. Ils tendent à prévoir une augmentation de 150 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 37,5 millions d’euros en crédits de paiement des moyens dédiés aux pactes capacitaires au sein de la dotation de soutien à l’investissement structurant des Sdis.

Les engagements pris dans le cadre de cette enveloppe exceptionnelle ouverte en 2023 donneront lieu à des paiements étalés au cours des prochaines années, au fil du déploiement des projets d’investissement mis en œuvre par les collectivités territoriales au profit des Sdis.

Enfin, les moyens mobilisés dans le cadre du programme « Sécurité routière » sont une nouvelle fois en nette hausse, car, si les chiffres sont bons, nous ne pouvons pas nous permettre de relâcher nos efforts.

Le nombre de tués sur les routes de France a continué de diminuer en 2021 par rapport à 2019, dernière année de référence sans restriction de circulation, cette diminution ayant atteint 9 %.

Pour pérenniser cet élan, il faut bien sûr continuer d’agir en matière de dépistage et de formation, et pour cela recruter des inspecteurs du permis de conduire et de la sécurité routière supplémentaires. Il faut surtout agir en matière de prévention et de communication auprès de nos concitoyens. C’est une nouvelle fois l’axe fort de ce programme, pour cette année 2023, qui prend en compte de manière croissante les nouveaux facteurs d’accidentalité comme les mobilités douces.

Mesdames, messieurs les sénateurs, vous le voyez, la mission « Sécurités » du projet de loi de finances pour 2023 donne aux forces de sécurité intérieure les crédits indispensables pour s’adapter aux nouveaux enjeux de notre époque et renforcer leur action de protection pour tous les Français.

Comme l’écrivait Henri Fayol, « prévoir, c’est à la fois supputer l’avenir et le préparer ; prévoir, c’est déjà agir ». C’est ce que cette mission permet de faire. Mesdames, messieurs les sénateurs, c’est à vous désormais qu’il appartient de la voter, au nom de l’intérêt général de notre pays et de nos concitoyens. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente-cinq.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à treize heures cinq, est reprise à quatorze heures trente-cinq, sous la présidence de M. Roger Karoutchi.)

PRÉSIDENCE DE M. Roger Karoutchi

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

Nous poursuivons l’examen des crédits de la mission « Sécurités ».

sécurités

Deuxième partie
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
État B

M. le président. Je vous rappelle que, pour cette mission, la conférence des présidents a fixé la durée maximum de la discussion à deux heures trente.

En conséquence, si nous n’avions pas terminé l’examen de cette mission à quinze heures trente-cinq, celui-ci se poursuivrait à la fin des missions de cette semaine ou la semaine prochaine, et nous passerions à l’examen de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ».

La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Claude Raynal, président de la commission des finances. Mes chers collègues, il nous reste environ une heure pour examiner vingt-huit amendements, ce qui, au regard de l’importance des sujets à aborder, semble un délai assez court.

C’est la raison pour laquelle je vous demande d’aider un peu à la manœuvre. Si vous êtes le premier signataire de l’amendement appelé en discussion, vous pouvez le défendre exhaustivement. En revanche, si vous en êtes le cosignataire, je vous remercie de commencer par le présenter succinctement ; les rapporteurs spéciaux et la ministre exposeront leurs arguments de façon détaillée et vous aurez tout loisir de reprendre éventuellement la parole en explication de vote pour leur répondre.

Cela nous permettra, comme je le dis toujours, de faire entrer un litre et demi dans une bouteille d’un litre !

Mme Cécile Cukierman. C’est bien, cela ! (Sourires.)

Sécurités
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
État G

M. le président. Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Sécurités », figurant à l’état B.

ÉTAT B

(En euros)

Mission / Programme

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

Sécurités

24 365 517 107

23 035 497 879

Police nationale

12 702 800 038

12 372 926 960

 Dont titre 2

10 833 651 481

10 833 651 481

Gendarmerie nationale

10 367 449 313

9 910 086 369

 Dont titre 2

8 354 918 174

8 354 918 174

Sécurité et éducation routières

75 270 325

74 375 325

Sécurité civile

1 219 997 431

678 109 225

 Dont titre 2

201 827 016

201 827 016

M. le président. L’amendement n° II-415, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Police nationale

dont titre 2

 

 

 

 

Gendarmerie nationale

dont titre 2

 

 

 

 

Sécurité et éducation routières

 

 

 

 

Sécurité civile

dont titre 2

240 000 000

 

24 000 000

 

TOTAL

240 000 000

 

24 000 000

 

SOLDE

+ 240 000 000

+ 24 000 000

La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée. Mesdames, messieurs les sénateurs, lors de la discussion générale sur cette mission, certains d’entre vous m’ont demandé de fournir le détail de la commande de matériel à venir.

Je rappelle que, le 28 octobre dernier, le Président de la République s’est engagé à investir massivement.

Cet amendement vise à commander les douze avions qui devront remplacer la flotte existante et à financer l’achat de deux avions supplémentaires. Les 240 millions d’euros d’autorisations d’engagement constituent la première tranche de cette ambition.

À ces quatorze avions s’ajoutent deux avions supplémentaires en cours d’acquisition dans le cadre du mécanisme de protection civile de l’Union européenne (MPCU).

Au total, en intégrant les appareils financés par le programme européen, la flotte aérienne de la sécurité civile sera ainsi composée de seize avions amphibies bombardiers d’eau.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean Pierre Vogel, rapporteur spécial. La commission émet un avis favorable sur cet amendement.

Cependant, elle s’interroge sur le calendrier annoncé par le Président de la République : les bombardiers d’eau devaient être opérationnels à l’horizon 2027. Cependant, il semble que la chaîne de fabrication vienne juste d’être lancée et, d’après les avis de personnes spécialisées, il sera quasiment impossible de respecter les délais avancés, ne serait-ce que la livraison de deux appareils avant 2027.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée. Je confirme la date qui a été annoncée.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-415.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° II-414, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Police nationale

dont titre 2

 

 

 

 

Gendarmerie nationale

dont titre 2

 

 

 

 

Sécurité et éducation routières

 

 

 

 

Sécurité civile

dont titre 2

12 000 000

 

12 000 000

 

TOTAL

12 000 000

 

12 000 000

 

SOLDE

+ 12 000 000

+ 12 000 000

La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée. À la suite des interventions particulièrement importantes de l’été 2022 et dans la perspective d’événements hors normes, il est apparu que nous devions disposer de moyens humains suffisants.

Il paraît indispensable de favoriser l’engagement de l’ensemble des sapeurs-pompiers. Cet amendement vise donc, d’une part, à financer les remboursements aux services d’incendie et de secours liés à la création d’une indemnité de mobilisation opérationnelle exceptionnelle au profit des sapeurs-pompiers professionnels engagés dans le cadre des colonnes de renfort, pour un montant de 2 millions d’euros, d’autre part, à revaloriser le barème d’indemnisation des moyens matériels des services d’incendie et de secours pour leur participation aux colonnes de renfort à la demande de l’État, pour un montant de 1 million d’euros.

En outre, cet amendement tend à augmenter de 4 millions d’euros l’enveloppe budgétaire afin de renforcer, dès 2023, les capacités de remboursement du dispositif de colonnes de renfort sur le territoire national.

Enfin, fort du retour d’expérience de la saison de feux de l’année 2022, le Gouvernement entend renforcer les vecteurs aériens de l’année 2023 par l’augmentation du nombre d’hélicoptères bombardiers d’eau en location, ce qui représente une enveloppe supplémentaire de 5 millions d’euros.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean Pierre Vogel, rapporteur spécial. La commission émet un avis favorable sur cet amendement.

Dans la mesure où les hélicoptères bombardiers d’eau ont largement démontré leur utilité cette année, le Gouvernement prévoira-t-il d’en acheter plutôt que d’en louer dans les prochaines années ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée. À ce stade, monsieur le rapporteur spécial, nous en restons à la location.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-414.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° II-299 rectifié ter, présenté par MM. Bourgi, Kanner et Durain, Mmes de La Gontrie et Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie, Sueur, Tissot et Fichet, Mme Monier, M. P. Joly et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Police nationale

dont titre 2

 

 

Gendarmerie nationale

dont titre 2

250 000 000

250 000 000

Sécurité et éducation routières

 

 

 

Sécurité civile

dont titre 2

 250 000 000

250 000 000 

TOTAL

250 000 000

250 000 000

250 000 000

250 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Patrick Kanner.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean Pierre Vogel, rapporteur spécial. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement qui vise à étendre aux services départementaux d’incendie et de secours (Sdis) le bouclier tarifaire créé par l’exécutif afin d’endiguer les augmentations importantes des coûts de l’énergie, notamment de l’électricité et du gaz naturel.

En effet, les Sdis bénéficient déjà de plusieurs mesures de soutien financier dans ce projet de loi de finances, notamment en réponse à la crise énergétique : prorogation de la minoration des tarifs de l’ancienne taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité, mise en place du dispositif d’amortissement électricité. Si ce dernier est certes moins ambitieux que le bouclier tarifaire, il permettra néanmoins d’alléger la facture d’électricité.

Par ailleurs, sur l’initiative de la commission des finances, le Sénat a adopté un amendement visant à permettre aux Sdis de bénéficier d’une exonération du malus écologique sur leur véhicule.

Enfin, le programme « Sécurité civile » n’est pas le bon véhicule pour financer ce bouclier tarifaire, qui relève de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée. Même avis, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, pour explication de vote.

M. Patrick Kanner. Les Sdis sont aussi des établissements publics qui mériteraient de bénéficier du bouclier tarifaire.

Je rappelle que les Sdis sont confrontés à l’accroissement de nombreuses dépenses : augmentation de la prime de feu de 6 %, dégel du point d’indice de 3,5 %, augmentation du coût des indemnités des sapeurs-pompiers volontaires d’au moins 3,5 %, inflation liée à l’énergie.

Je sais que cet amendement sera rejeté, mais nous tenions à témoigner, en le déposant, de notre solidarité avec les combattants du feu.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-299 rectifié ter.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° II-326 rectifié bis, présenté par Mme G. Jourda, MM. Durain, Kanner et Jacquin, Mme de La Gontrie, M. Bourgi, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie, Sueur et Temal, Mmes Carlotti et Conway-Mouret, MM. Roger, Todeschini, M. Vallet, Vallini, Vaugrenard et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Police nationale

dont titre 2

 

174 000 000

 

174 000 000

Gendarmerie nationale

dont titre 2

174 000 000

 

174 000 000

 

Sécurité et éducation routières

 

 

 

 

Sécurité civile

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

174 000 000

174 000 000

174 000 000

174 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Patrick Kanner.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Dominati, rapporteur spécial. En préambule, j’indique dès à présent que la commission demandera le retrait de nombre des amendements présentés, pour une raison simple. Certes, les problèmes soulevés sont importants et légitimes, mais on prend toujours les crédits d’une arme pour les donner à l’autre : on les prend à la police nationale, quand il est question de la gendarmerie, et à la gendarmerie, quand il s’agit de la police nationale. Ce n’est pas satisfaisant.

Cet amendement a trait à l’insuffisance des crédits de l’immobilier de la gendarmerie nationale, sujet évidemment très important. On constate en effet un léger fléchissement dans ce budget par rapport à l’effort consenti l’an dernier.

Cet amendement s’inscrit dans le cadre d’une réflexion générale sur la nécessité d’augmenter les effectifs de la gendarmerie et de la police nationales et sur la création de 200 brigades supplémentaires sur un effectif existant de 3 200 brigades. En réalité, au cours d’une décennie, la gendarmerie a été soumise à un véritable yo-yo.

Un ancien directeur général de la gendarmerie nationale, le général Denis Favier, expliquait que le fait d’implanter territorialement des brigades constituait un handicap pour la gendarmerie, lorsqu’il fallait déployer des capacités opérationnelles. Nous assistons aujourd’hui à un mouvement inverse, puisque l’on recrée des brigades.

À examiner les crédits de la mission, on s’aperçoit que les seules mesures catégorielles concernant le titre 2, c’est-à-dire les mesures de personnel de gendarmerie, sont d’un montant supérieur à l’investissement nécessaire dans l’immobilier.

Comme je l’ai annoncé, la commission demande le retrait de cet amendement, mais, monsieur le sénateur, vous soulevez un problème pour les années à venir, sur lequel nous reviendrons sans doute fréquemment lors de nos débats budgétaires.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée. Même avis.

M. le président. Monsieur Kanner, l’amendement n° II-326 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Patrick Kanner. Oui, je le maintiens, monsieur le président.

Certes, il est bon de créer des postes, mais, si l’on ne loge pas les gendarmes correctement, on marche sur la tête ! Il est donc cohérent d’augmenter les crédits en faveur d’une amélioration des casernes de gendarmerie.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Claude Raynal, président de la commission des finances. De manière générale, émettre un avis défavorable sur un amendement au prétexte que son adoption reviendrait à déplacer les crédits d’un programme sur un autre ne me paraît pas satisfaisant, d’autant que son auteur n’a jamais eu l’intention d’appauvrir une autre ligne de crédit.

M. Philippe Dominati, rapporteur spécial. Naturellement !

M. Claude Raynal, président de la commission des finances. En réalité, la seule question qui se pose est la suivante : le Gouvernement accepte-t-il de lever le gage ?

M. Philippe Dominati, rapporteur spécial. Vous avez raison !

M. Claude Raynal, président de la commission des finances. C’est sans doute ainsi qu’il faut le formuler, car je ne doute pas, monsieur le rapporteur spécial – d’ailleurs, vous l’avez dit –, que vous soyez favorable à une augmentation de ces crédits.

Dans ce débat, c’est la position du Gouvernement qui importe : accepte-t-il ou non de lever le gage ?

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-326 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° II-298 rectifié, présenté par M. Jacquin, Mme G. Jourda, MM. Durain et Kanner, Mme de La Gontrie, M. Bourgi, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie, Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Police nationale

dont titre 2

 

50 000 000

 

50 000 000

Gendarmerie nationale

dont titre 2

50 000 000

 

50 000 000

 

Sécurité et éducation routières

 

 

 

 

Sécurité civile

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

50 000 000

50 000 000

50 000 000

50 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Patrick Kanner.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Dominati, rapporteur spécial. Demande de retrait.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, pour explication de vote.

M. Patrick Kanner. M. Olivier Jacquin tenait, par cet amendement, à souligner la situation particulière de plusieurs casernements en Meurthe-et-Moselle. Il s’agit donc de la même thématique que précédemment.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-298 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° II-277 rectifié bis, présenté par Mme Pantel, M. Artano, Mme M. Carrère et MM. Fialaire, Gold, Guérini, Guiol, Requier, Roux, Bilhac et Cabanel, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Police nationale

dont titre 2

 

 

 

 

Gendarmerie nationale

dont titre 2

 

30 000 000

 

30 000 000

Sécurité et éducation routières

 

 

 

 

Sécurité civile

dont titre 2

30 000 000

 

30 000 000

 

TOTAL

30 000 000

30 000 000

30 000 000

30 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Maryse Carrère.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean Pierre Vogel, rapporteur spécial. Cet amendement vise à augmenter les crédits affectés aux moyens nationaux de la sécurité civile, afin de permettre l’achat et l’entretien de nouveaux hélicoptères en vue d’assurer une meilleure couverture du territoire métropolitain, en transférant 30 millions d’euros de l’action n° 04 du programme 152 vers l’action n° 12 du programme 161.

Le renouvellement de l’extension de la flotte d’hélicoptères de la sécurité civile a déjà été acté dans le cadre de la Lopmi et se traduira par la livraison de trente-six appareils. Ainsi, la flotte devrait être portée à quarante hélicoptères, ce qui correspond à l’objectif fixé par le ministère de l’intérieur.

Le problème soulevé par l’amendement ne peut être traité de façon unilatérale par un abondement des crédits du ministère de l’intérieur. En effet, aux côtés des hélicoptères rouges de la sécurité civile, il y a aussi les hélicoptères bleus de la gendarmerie, les hélicoptères blancs des hôpitaux et les HéliSMUR du service mobile d’urgence et de réanimation (Smur).

La question de la couverture territoriale de la flotte d’hélicoptères de secours ne concerne donc pas uniquement les appareils de la sécurité civile et doit faire l’objet d’une réflexion à l’échelon interministériel.

La commission émet un avis défavorable sur cet amendement. Pour autant, madame la ministre, peut-être nous confirmerez-vous que les quarante hélicoptères prévus dans la Lopmi seront bien réservés à la sécurité civile et ne feront pas l’objet d’un partage avec la gendarmerie et d’autres services ?

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée. Je confirme que le Président de la République a annoncé le renouvellement et la modernisation de la flotte d’hélicoptères de la sécurité civile.

Je confirme également que deux hélicoptères ont déjà été livrés et que deux autres ont été commandés.

Pour autant, au moment où je vous parle, je ne peux m’engager plus avant.

En revanche, le renouvellement de cette flotte d’hélicoptères de secours sera intégralement lancé en 2023 ; à cet égard, 471 millions d’euros d’autorisations d’engagement sont ouverts dans le cadre du projet de loi de finances pour 2023. Cet engagement est déjà acté dans la Lopmi.

Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.

M. le président. Madame Carrère, l’amendement n° II-277 rectifié bis est-il maintenu ?

Mme Maryse Carrère. Cet amendement a été déposé par Guylène Pantel, élu de la Lozère, département qui a déjà connu des problématiques en termes de dessertes de secours.

J’entends les arguments de la commission, mais il faut veiller à ce qu’il y ait un maillage territorial équilibré pour assurer les secours dans nos territoires, y compris les plus ruraux.

Toutefois, je retire cet amendement.

M. le président. L’amendement n° II-277 rectifié bis est retiré.

L’amendement n° II-300 rectifié ter, présenté par MM. Bourgi, Kanner et Durain, Mmes de La Gontrie et Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie, Sueur, Tissot et Fichet, Mme Monier, M. P. Joly et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Police nationale

dont titre 2

 

 

Gendarmerie nationale

dont titre 2

25 000 000

25 000 000

Sécurité et éducation routières

 

 

 

Sécurité civile

dont titre 2

 25 000 000

25 000 000 

TOTAL

25 000 000

25 000 000

25 000 000

25 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Patrick Kanner.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean Pierre Vogel, rapporteur spécial. Cet amendement a pour objet de soutenir l’investissement structurant des Sdis.

Cette augmentation modérée des ressources permettrait de soutenir les Sdis des départements nouvellement touchés par les risques d’intempéries et de feux de forêt en leur permettant de réaliser les investissements nécessaires, notamment l’achat de plusieurs dizaines de camions-citernes feux de forêt, dont le prix – 450 000 euros – reste particulièrement onéreux pour ces services.

Pour autant, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement, même si j’ai évoqué à plusieurs reprises la question de la dotation de soutien aux investissements, dotation qui s’est réduite comme peau de chagrin depuis sa création en 2017 et qui, depuis plusieurs années, n’est plus dédiée qu’au financement du projet NexSIS.

En revanche, il est prévu un pacte capacitaire qui viserait à renforcer les moyens de différents Sdis. (Mme la ministre déléguée acquiesce.) Ce premier pas du Gouvernement est intéressant, même avec la réserve que j’ai formulée lors de la discussion générale, c’est-à-dire si ce montant est puisé sur le fonds visant à compenser la disparition de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée. Les 150 millions d’euros supplémentaires serviront bien à cofinancer les pactes capacitaires, qui constituent des outils majeurs de modernisation de la réponse opérationnelle de la sécurité civile, ainsi que la garantie d’une couverture territoriale plus complète et plus efficiente. Cette précision me permet de vous rassurer, madame Carrère.

Par conséquent, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.

M. le président. Monsieur Kanner, l’amendement n° II-300 rectifié ter est-il maintenu ?

M. Patrick Kanner. Oui, je le maintiens au nom de Hussein Bourgi, monsieur le président.

On parle de 21 millions d’euros pour les départements qui ont le plus souffert cet été ! C’est très bien de faire des visites sur le terrain, madame la ministre, mais c’est encore mieux de permettre aux départements de ne pas souffrir de nouveau, alors qu’ils devront investir. La pression sera très forte sur les élus locaux.

Manifester de la solidarité nationale en complément des bonnes intentions qui ont été exprimées pendant cette période si marquante pour nos collègues de l’Hérault, de la Gironde et de bien d’autres départements avait du sens.

Je regrette cet avis défavorable, au nom des sapeurs-pompiers.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-300 rectifié ter.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° II-245, présenté par MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon, Mme M. Vogel et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :

I. – Créer le programme :

Sécurité environnementale

II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Police nationale

dont titre 2

 

 

 

 

Gendarmerie nationale

dont titre 2

 

 

 

 

Sécurité et éducation routières

 

15 000 000

 

15 000 000

Sécurité civile

dont titre 2

 

 

 

 

Sécurité environnementale

15 000 000

 

15 000 000

 

TOTAL

15 000 000

15 000 000

15 000 000

15 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Cet amendement a pour objet de soutenir les services assumant les missions assermentées de police de l’environnement.

Pour permettre à la France de se doter de moyens adaptés, il convient d’abonder l’Office national des forêts (ONF) et l’Office français de la biodiversité (OFB) de 20 millions d’euros via une nouvelle ligne intitulée « Sécurité environnementale ».

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Dominati, rapporteur spécial. C’est un sujet important et nouveau dans le débat sur la mission « Sécurités ». Cette année, le Gouvernement a surtout développé les brigades vertes ou la gendarmerie verte. Nous suivons l’évolution de cette initiative.

En revanche, il me semble peu opportun de créer un programme budgétaire uniquement sur ce sujet. C’est pourquoi la commission demande de retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée. Avis défavorable, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-245.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° II-242 rectifié, présenté par MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon, Mme M. Vogel et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :

I. – Créer le programme :

Autorité indépendante en charge de la déontologie des forces de l’ordre

II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Police nationale

dont titre 2

 

10 000 000

 

10 000 000

Gendarmerie nationale

dont titre 2

 

 

 

 

Sécurité et éducation routières

 

 

 

 

Sécurité civile

dont titre 2

 

 

 

 

Autorité indépendante de contrôle des actions de la police

10 000 000

 

10 000 000

 

TOTAL

10 000 000

10 000 000

10 000 000

10 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Cet amendement vise à rétablir la confiance entre les citoyens et les forces de l’ordre en créant une autorité indépendante, rattachée à la Défenseure des droits, en charge de la déontologie des forces de l’ordre.

M. le président. L’amendement n° II-297, présenté par M. Durain, Mme de La Gontrie, MM. Kanner et Bourgi, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie, Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

I. – Créer le programme :

Inspection des forces de sécurité

II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Police nationale

dont titre 2

 

500 000

 

500 000

Gendarmerie nationale

dont titre 2

 

500 000

 

500 000

Sécurité et éducation routières

 

 

 

 

Sécurité civile

dont titre 2

 

 

 

 

Inspection des forces de sécurité

1 000 000

 

1 000 000

 

TOTAL

1 000 000

1 000 000

1 000 000

1 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Patrick Kanner.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Dominati, rapporteur spécial. J’avancerai le même argument que précédemment : créer un programme spécifique au sein de cette mission n’est, à mon sens, pas utile du point de vue de la technique budgétaire.

Certes, il peut y avoir un débat sur la densité de l’activité des autorités concernées, mais c’est justement pourquoi il faut faire confiance à ces services. Nous verrons bien si, dans la durée, la réitération de cette problématique dans le débat budgétaire change la donne.

Pour l’heure, la commission demande de retrait de ces amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée. La réforme des corps d’inspection est engagée. Par ailleurs, la Défenseure des droits dispose déjà d’un rôle de contrôle externe des forces de sécurité intérieure.

Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces amendements.

M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, pour explication de vote.

M. Patrick Kanner. Monsieur le président, je ne doute pas de votre sagacité visuelle, mais prenons un peu de temps pour vérifier le décompte des voix, surtout sur des amendements de ce type.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-242.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-297.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° II-246, présenté par MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon, Mme M. Vogel et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Police nationale

dont titre 2

5 000 000

 

5 000 000

 

Gendarmerie nationale

dont titre 2

5 000 000

 

5 000 000

 

Sécurité et éducation routières

 

 

 

 

Sécurité civile

dont titre 2

 

10 000 000

 

10 000 000

TOTAL

10 000 000

10 000 000

10 000 000

10 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Cet amendement a pour objet d’augmenter le budget des programmes « Police nationale » et « Gendarmerie nationale » afin d’octroyer plus de moyens à l’accueil des victimes de violences sexistes et sexuelles dans les commissariats et gendarmeries.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Dominati, rapporteur spécial. C’est un amendement ciblé…

Dans de nombreux endroits, l’accueil des victimes, d’une manière générale, n’est pas toujours très satisfaisant. J’ai reçu un certain nombre de témoignages, même s’ils ne concernent pas ce type de délit, qui l’attestent. Il faut accueillir correctement les victimes ; qui plus est, cela contribue à l’image positive de la police.

Le ministre a été sensibilisé à cette question (M. Thomas Dossus manifeste son scepticisme.), surtout à la suite d’événements récents. En tant que rapporteur spécial, j’y suis attentif : j’ai d’ailleurs signalé des cas, notamment en Île-de-France.

Pour autant, il n’est pas utile de créer un nouveau programme au sein de la mission « Sécurités ». C’est pourquoi la commission demande le retrait de cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée. J’insiste sur la volonté du Gouvernement de multiplier les intervenants sociaux en gendarmerie, ainsi que les référents violences intrafamiliales. Il s’agit là d’un véritable engagement du ministre de l’intérieur.

D’ailleurs, le nombre de maisons de confiance et de protection des familles (MCPF) a augmenté d’une manière significative et un effort est également réalisé en matière d’accueil numérique des victimes.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-246.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° II-243 rectifié, présenté par MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon, Mme M. Vogel et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :

I. – Créer le programme :

Fonds pour le développement des officiers de liaison LGBT+

II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Police nationale

dont titre 2

 

5 000 000

 

5 000 000

Gendarmerie nationale

dont titre 2

 

 

 

 

Sécurité et éducation routières

 

 

 

 

Sécurité civile

dont titre 2

 

 

 

 

Fonds pour le développement des officiers de liaison LGBT+

5 000 000

 

5 000 000

 

TOTAL

5 000 000

5 000 000

5 000 000

5 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Il s’agit de prévoir le recrutement de plus d’officiers de liaison LGBT+ formés aux thématiques des LGBTphobies. Présents dans certaines grandes villes de France, ils sont chargés de recevoir les plaintes et de traiter les procédures liées à l’homophobie et à la transphobie.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Dominati, rapporteur spécial. Il va de soi que tous les efforts doivent être faits pour que les victimes de ce genre de délit n’hésitent pas à porter plainte.

À l’occasion de l’examen de la Lopmi, le ministre a apporté un certain nombre d’assurances et des officiers de liaison ont déjà été désignés. C’est pourquoi il convient d’attendre un premier bilan avant d’envisager de renforcer les effectifs lors de l’examen des prochains budgets.

La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement, qui semble satisfait.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-243 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° II-266 rectifié, présenté par M. Roux, Mmes N. Delattre et M. Carrère, MM. Fialaire, Gold, Guérini, Guiol, Requier, Artano, Bilhac et Cabanel et Mme Pantel, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Police nationale

dont titre 2

 

 

 

 

Gendarmerie nationale

dont titre 2

 

5 000 000

 

5 000 000

Sécurité et éducation routières

 

 

 

 

Sécurité civile

dont titre 2

5 000 000

 

5 000 000

 

TOTAL

5 000 000

5 000 000

5 000 000

5 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Maryse Carrère.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean Pierre Vogel, rapporteur spécial. Les obligations légales de débroussaillement (OLD) participent pleinement de la résilience des territoires face aux effets du réchauffement climatique. Elles sont essentielles pour prévenir les feux de forêt, dévastateurs par leur propagation rapide.

Cet amendement a pour objet d’augmenter les crédits affectés aux moyens nationaux de la sécurité civile afin de financer une subvention de l’État aux communes rurales, pour aider celles-ci à s’acquitter de leurs OLD.

Il vise donc à transférer 5 millions d’euros de l’action n° 04 du programme 152 vers l’action n° 13, Soutien aux acteurs de la sécurité civile, du programme 161.

Je connais l’importance des OLD, et je sais combien il est difficile de les faire appliquer, mais les difficultés que rencontrent les maires en la matière ne découlent pas uniquement de problèmes budgétaires. Par conséquent, un amendement de crédits ne suffira pas à les faire mieux appliquer.

D’ailleurs, le Sénat a déjà adopté dans ce PLF un crédit d’impôt pour dépenses de débroussaillement. Cet amendement ne me semble donc pas opportun et j’en demande le retrait. À défaut, l’avis de la commission sera défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée. C’est le ministère de l’agriculture qui est pilote s’agissant des OLD. Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.

M. le président. La parole est à Mme Maryse Carrère, pour explication de vote.

Mme Maryse Carrère. Comme il s’agit de terrains appartenant aux communes, je ne pense pas que le crédit d’impôt ait beaucoup d’effet… Jean-Yves Roux a donc pensé qu’il faudrait rendre ces communes éligibles à des subventions, même à coût constant, en mobilisant la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR) ou le futur fonds vert.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-266 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° II-215 rectifié, présenté par Mme N. Goulet et M. Segouin, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Police nationale

dont titre 2

 

 

 

 

Gendarmerie nationale

dont titre 2

 

 

 

 

Sécurité et éducation routières

 

2 400 000

 

2 400 000

Sécurité civile

dont titre 2

2 400 000

 

2 400 000

 

TOTAL

2 400 000

2 400 000

2 400 000

2 400 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Nathalie Goulet.

Mme Nathalie Goulet. Comme je l’ai annoncé lors de la discussion générale, cet amendement a pour objet de lancer une expérimentation en matière de défense contre les incendies.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean Pierre Vogel, rapporteur spécial. Une enveloppe de 158 millions d’euros est déjà prévue dans le PLF pour financer des pactes capacitaires et peut sans doute servir à l’acquisition de véhicules porteurs d’eau.

La commission émet un avis défavorable sur cet amendement, car il ne semble pas justifié que des crédits de l’État soient consacrés à l’acquisition d’engins de lutte anti-incendie au bénéfice d’un seul département.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée. Même avis, monsieur le président.

M. le président. Madame Goulet, l’amendement n° II-215 rectifié est-il maintenu ?

Mme Nathalie Goulet. Non, je le retire, monsieur le président. Je vais examiner de plus près l’enveloppe mentionnée par le rapporteur spécial.

M. le président. L’amendement n° II-215 rectifié est retiré.

L’amendement n° II-301 rectifié ter, présenté par MM. Bourgi, Kanner et Durain, Mmes de La Gontrie et Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie, Sueur, Tissot et Fichet, Mme Monier et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Police nationale

dont titre 2

 

 

Gendarmerie nationale

dont titre 2

1 497 000

1 497 000

Sécurité et éducation routières

 

 

 

Sécurité civile

dont titre 2

1 497 000

1 497 000

TOTAL

1 497 000

1 497 000

1 497 000

1 497 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Patrick Kanner.

M. Jean Pierre Vogel, rapporteur spécial. Cet amendement vise à porter à 1 497 000 euros les crédits de paiement et les autorisations d’engagement du programme 161, afin d’équiper chaque véhicule de pompiers de caméras de surveillance.

La loi du 25 novembre 2021 visant à consolider notre modèle de sécurité civile et valoriser le volontariat des sapeurs-pompiers et les sapeurs-pompiers professionnels a déjà apporté plusieurs éléments de réponse à ce problème et prévu le renforcement des sanctions pénales.

En outre, ces équipements ont vocation à être financés non par le budget de l’État, mais par celui des Sdis.

La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée. La loi du 3 août 2018 relative à l’harmonisation de l’utilisation des caméras mobiles par les autorités de sécurité publique ouvre la voie à l’expérimentation pour les sapeurs-pompiers professionnels, volontaires et militaires, la brigade des sapeurs-pompiers de Paris et les marins-pompiers de Marseille.

La loi du 25 novembre 2021 visant à consolider notre modèle de sécurité civile et valoriser le volontariat des sapeurs-pompiers et les sapeurs-pompiers professionnels intègre l’usage de ce dispositif au code de la sécurité intérieure.

La loi du 24 janvier 2022 relative à la responsabilité pénale et à la sécurité intérieure autorise, dans les conditions prévues par décret en Conseil d’État, après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil), l’utilisation des caméras embarquées à bord des véhicules. Les travaux préparatoires à la publication de ce décret, attendu pour le début de l’année 2023, sont en cours.

Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.

M. le président. Monsieur Kanner, l’amendement n° II-301 rectifié ter est-il maintenu ?

M. Patrick Kanner. Oui, monsieur le président.

Il ne s’agit pas de savoir si l’utilisation des caméras est autorisée ou non, puisqu’elle l’est. La question porte sur le financement des caméras. Les véhicules concernés sont caillassés, et pas seulement dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville.

Cet amendement, porté par mon collègue Hussein Bourgi, vise donc à renforcer quelque peu notre solidarité, notamment avec les départements. Nous parlons de 1,5 million d’euros : très franchement, c’est peu. Les pompiers auraient mérité un petit effort de la part du rapporteur et du Gouvernement !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-301 rectifié ter.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° II-244 rectifié, présenté par MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon, Mme M. Vogel et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Police nationale

dont titre 2

1 000 000

 

1 000 000

 

Gendarmerie nationale

dont titre 2

 

1 000 000

 

1 000 000

Sécurité et éducation routières

 

 

 

 

Sécurité civile

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

1 000 000

1 000 000

1 000 000

1 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Cet amendement a pour objet de renforcer la formation continue au tir.

Dans son avis du 11 février 2021, la Commission nationale consultative des droits de l’homme a constaté que les entraînements obligatoires aux tirs et aux pratiques professionnelles en intervention prévus chaque année pour garantir le niveau d’aptitude des agents ne sont pas systématiquement respectés dans la pratique.

Cet amendement vise à combler cette lacune.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Dominati, rapporteur spécial. Sur le fond, je suis entièrement d’accord avec vous. Voilà des années qu’on estime que nos forces de l’ordre ne font pas assez de séances d’entraînement au tir.

Il y a plus d’une dizaine d’années, le temps de formation de nos agents a été réduit à six mois, avant d’être porté à huit mois puis, cette année, à douze mois. Il faut adapter en conséquence le nombre de séances de tir.

Il y a plusieurs sujets. En milieu urbain, il n’est pas toujours facile de trouver de la disponibilité. Le transport et les plages horaires posent aussi problème, et nous manquons de stands de tir.

Étant élu d’une ville où des refus d’obtempérer ont fait plusieurs victimes, je suis partisan d’un effort particulier sur ce point.

J’émets toutefois un avis défavorable sur cet amendement, car il ne m’appartient pas de lever le gage.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée. Le projet de loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur met l’accent sur la formation continue des policiers. Des crédits importants ont été prévus à cet effet et nous paraissent suffisants.

Ainsi, la formation au tir et aux techniques d’intervention a été renforcée. Il est devenu obligatoire de suivre trois sessions par an. En outre, un outil d’entraînement par vidéo complète cette formation.

Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Claude Raynal, président de la commission des finances. Il faut aider Philippe Dominati, qui est en complet accord avec l’amendement, mais qui ne peut pas lever le gage ! Cet amendement vise à faire passer un message, ce qui n’est pas inutile. Le Gouvernement verra ce qu’il en fera et s’il lèvera le gage.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-244 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° II-309 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, M. Artano, Mme M. Carrère, MM. Fialaire, Gold, Guérini, Guiol, Requier, Roux, Bilhac et Cabanel et Mme Pantel, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Police nationale

dont titre 2

 

 

 

 

Gendarmerie nationale

dont titre 2

 1 000 000

1 000 000 

Sécurité et éducation routières

 

1 000 000 

 

1 000 000 

Sécurité civile

dont titre 2

 

 

TOTAL

1 000 000

1 000 000

1 000 000

1 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Maryse Carrère.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Dominati, rapporteur spécial. Le sujet des suicides, aussi bien dans la police que dans la gendarmerie nationales, y compris sur le lieu de résidence, est malheureusement récurrent.

Le problème est traité par la direction générale de la gendarmerie nationale. Ce n’est pas qu’une question budgétaire, bien évidemment : c’est beaucoup plus une question d’entourage et de moyens, mais aussi une question de commandement, régional ou local. C’est en tout cas un sujet qui, depuis des années, fait partie des préoccupations essentielles du directeur général de la police nationale et du directeur général de la gendarmerie nationale.

La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable. Même si je suis sensible aux propos de Claude Raynal, je ne peux pas modifier l’avis de la commission.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée. Nous augmentons le nombre de psychologues recrutés dans la gendarmerie nationale, car la situation est particulièrement préoccupante : 25 suicides de gendarmes, 42 de policiers…

Face à ces drames, il faut absolument écouter les forces de l’ordre et dialoguer avec elles. C’est la raison pour laquelle nous augmentons fortement le nombre de psychologues recrutés pour la gendarmerie nationale. Pour prévenir de tels drames, que nous déplorons, il nous faut venir en appui et protéger nos gendarmes et nos policiers quand ils font face à de grosses difficultés ou en cas de dépression, compte tenu de la difficulté de leur métier.

Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable

M. le président. La parole est à Mme Maryse Carrère, pour explication de vote.

Mme Maryse Carrère. Ce sujet est grave, car le taux de suicide est plus élevé que dans d’autres pays. Toutefois, au vu des explications de Mme la ministre, je retire cet amendement.

M. le président. L’amendement n° 309 rectifié est retiré.

L’amendement n° II-247, présenté par MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :

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(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Police nationale

dont titre 2

 

 

 

 

Gendarmerie nationale

dont titre 2

 

 

 

 

Sécurité et éducation routières

 

1 000 000

 

1 000 000

Sécurité civile

dont titre 2

1 000 000

 

 

1 000 000

TOTAL

1 000 000

1 000 000

1 000 000

1 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Cet amendement vise à augmenter les crédits de l’action n° 11, Prévention et gestion de crises, qui porte sur la veille, l’alerte et la gestion interministérielle des crises, sur la solidarité nationale en cas de survenance d’une crise, sur la prévention opérationnelle et la protection des populations et, enfin, sur l’activité opérationnelle lors de crises.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean Pierre Vogel, rapporteur spécial. La commission émet un avis défavorable, bien que je partage le constat sur la nécessité de renforcer la prévention, notamment en matière de lutte contre les feux.

Cet amendement ne semble pas apporter une solution satisfaisante à cette question, qui ne saurait être réglée par un abondement de crédits budgétaires. La prévention des feux de forêt doit s’inscrire dans le cadre d’une stratégie multidimensionnelle dépassant les seuls enjeux financiers. Je pense notamment aux obligations légales de débroussaillement ou à la définition d’une stratégie efficace de prépositionnement des moyens aériens de lutte contre les feux de forêt.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée. On ne peut que soutenir l’effort de développement de l’offre de services de Météo-France et de l’ONF pour une meilleure connaissance et une meilleure prévention des risques de feux de forêt.

Néanmoins, la prévention du risque et sa connaissance sont de la compétence du ministère de la transition écologique. Celui-ci octroie déjà une subvention de service public et fixe des objectifs en termes de plafond d’emplois.

Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-247.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° II-267 rectifié, présenté par MM. Roux et Artano, Mme M. Carrère, MM. Fialaire, Gold, Guérini, Guiol, Requier, Bilhac et Cabanel et Mme Pantel, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Police nationale

dont titre 2

 

 

 

 

Gendarmerie nationale

dont titre 2

 

 

Sécurité et éducation routières

 

1 000 000

 

1 000 000

Sécurité civile

dont titre 2

1 000 000

 

1 000 000

 

TOTAL

1 000 000

1 000 000

1 000 000

1 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Maryse Carrère.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean Pierre Vogel, rapporteur spécial. Cet amendement vise à ajouter 1 million d’euros aux crédits du programme 161, « Sécurité civile », afin de permettre l’aménagement de vestiaires pour les femmes sapeurs-pompiers dans les casernes.

Il est naturellement nécessaire de mieux prendre en compte la féminisation des sapeurs-pompiers, notamment volontaires, mais les dépenses relatives à l’aménagement des casernes ne relèvent pas du budget de l’État. Il revient aux Sdis de financer les mesures d’aménagement que vous évoquez.

La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Christian Bilhac, pour explication de vote.

M. Christian Bilhac. J’entends bien qu’il appartient aux Sdis et non à l’État de financer de telles installations, mais enfin, la profession se féminise, c’est un fait.

Alors que nous venons d’évoquer les besoins financiers énormes des Sdis, il me semble que flécher un tel financement vers l’aménagement de vestiaires pour les sapeurs-pompiers féminins serait une bonne chose.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-267 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° II-311 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, M. Artano, Mme M. Carrère, MM. Fialaire, Gold, Guérini, Guiol, Requier, Bilhac et Cabanel et Mme Pantel, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Police nationale

dont titre 2

700 000

 

700 000

 

Gendarmerie nationale

dont titre 2

 

 

 

 

Sécurité et éducation routières

 

700 000

 

700 000

Sécurité civile

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

700 000

700 000

700 000

700 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Maryse Carrère.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Dominati, rapporteur spécial. Il est défavorable, car il s’agit d’une mesure opérationnelle.

Plusieurs brigades de CRS ont été créées. En outre, les CRS ont vocation à être mobiles. Il faut laisser au directeur général de la police nationale de la souplesse dans leur répartition sur le territoire.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Christian Bilhac, pour explication de vote.

M. Christian Bilhac. En somme, avec les redéploiements, vous proposez de déshabiller Pierre pour habiller Paul.

Nathalie Delattre a raison de souligner que Bordeaux est la seule grande ville qui n’a pas de dotation. Pour lui fournir une compagnie, à quel maire allez-vous en enlever ? Nous préférons demander des crédits supplémentaires.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-311 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° II-310 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, M. Artano, Mme M. Carrère, MM. Fialaire, Gold, Guérini, Guiol, Requier, Roux, Bilhac et Cabanel et Mme Pantel, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Police nationale

dont titre 2

 

 

 

 

Gendarmerie nationale

dont titre 2

 

 

Sécurité et éducation routières

 

500 000 

 

 500 000

Sécurité civile

dont titre 2

500 000

 

500 000

 

TOTAL

500 000

500 000

500 000

500 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Maryse Carrère.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean Pierre Vogel, rapporteur spécial. Cet amendement a pour objet de majorer de 500 000 euros les crédits du programme 161 pour financer l’achat de drones par la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC).

La DGSCGC souhaite acquérir des drones pour renforcer les moyens de lutte contre les feux. Les considérations budgétaires ne sont pas seules en cause : des travaux préalables de certification de ces appareils sont encore nécessaires, au regard des exigences réglementaires et opérationnelles. Il ressort des informations que je me suis procurées que ces travaux n’ont pas encore pleinement abouti. Dès lors, cet amendement me semble prématuré. La commission y est donc défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée. La sécurité civile suit de près les travaux de recherche et de développement engagés par un certain nombre d’industriels pour fabriquer des drones de surveillance, voire de largage. À ce stade, il serait prématuré d’ouvrir des crédits pour l’acquisition de ce type d’engins.

Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.

M. le président. La parole est à Mme Maryse Carrère, pour explication de vote.

Mme Maryse Carrère. Nous avons vu des drones très performants de la police nationale fonctionner lors des incendies en Gironde : ils ont rendu un très grand service aux équipes opérationnelles des pompiers.

Toutefois, dans l’attente de précisions techniques sur ces équipements, je retire cet amendement.

M. le président. L’amendement n° II-310 rectifié est retiré.

L’amendement n° II-320, présenté par Mme de Marco, MM. Dossus, Breuiller, Benarroche, Dantec, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Police nationale

dont titre 2

 

 

 

 

Gendarmerie nationale

dont titre 2

 

 

 

 

Sécurité et éducation routières

 

300 000

 

300 000

Sécurité civile

dont titre 2

300 000

 

300 000

 

TOTAL

300 000

300 000

300 000

300 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Cet amendement ne coûte pas très cher, mais son adoption permettrait de graver dans le marbre ce que nous avons tous voté dans le projet de loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur, c’est-à-dire l’installation d’une deuxième base de canadairs.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean Pierre Vogel, rapporteur spécial. Il est défavorable, car la plupart des acteurs de la sécurité civile admettent que l’ouverture d’une seconde base n’est pas la solution. Elle conduirait en effet à une démultiplication des coûts de maintenance et des ressources humaines, et à un éparpillement des appareils de la flotte aérienne, ce qui rendrait plus difficile leur coordination.

Mieux vaut explorer d’autres pistes. Dès lors, l’étude que cet amendement vise à financer ne serait pas opportune.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée. La base de Nîmes a vocation à demeurer la base principale de la sécurité civile, notamment pour les opérations de maintenance lourde.

La souplesse de l’organisation actuelle permet de faire face aux besoins et d’organiser des détachements opérationnels, en fonction de l’analyse des risques et des besoins, sur l’un des 22 pélicandromes répartis sur l’ensemble du territoire métropolitain.

Les hélicoptères EC145 de la sécurité civile vont être remplacés par des appareils plus puissants, équipés de dispositifs d’emport et de largage d’eau. Nous disposerons ainsi d’une capacité de bombardiers d’eau sur de multiples bases, réparties sur tout le territoire.

J’émets donc sur cet amendement le même avis que M. le rapporteur spécial.

M. le président. La parole est à M. Thomas Dossus, pour explication de vote.

M. Thomas Dossus. Je souligne que, concernant la création d’une seconde base, le ministère a changé d’avis en quelques semaines !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-320.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Sécurités », figurant à l’état B.

Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits, modifiés.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 70 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 343
Pour l’adoption 316
Contre 27

Le Sénat a adopté.

État B
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Article 46 ter (nouveau)

M. le président. Nous allons procéder à l’examen des amendements portant sur les objectifs et indicateurs de performance de la mission « Sécurités », figurant à l’état G.

ÉTAT G

1374

Sécurités

1375

(P176.1/P152.1) Évaluer objectivement la prévention de la délinquance

1376

Évolution du nombre de crimes et délits en matière d’atteintes aux biens (AAB) constatés

1377

Évolution du nombre de crimes et délits et de victimes en matière d’atteintes volontaires à l’intégrité physique (AVIP) constatés

1378

(P176.2/P152.2) Renforcer l’activité des services pour mieux combattre la délinquance

1379

Nombre d’heures de patrouille de voie publique

1380

Taux d’élucidation ciblés

1381

(P176.4/P152.4) Renforcer l’efficacité dans la lutte contre l’insécurité routière

1382

Nombre de tués

1383

Assurer l’efficacité et l’efficience des dispositifs de lutte contre les feux de forêt (161)

1384

Efficacité du dispositif de protection des forêts pendant la campagne « saison feux » (161)

1385

Assurer la disponibilité des moyens aériens et leur conformité aux besoins opérationnels (161)

1386

Efficience des opérations de secours aux personnes en hélicoptère en milieux difficiles (161)

1387

152 - Gendarmerie nationale

1388

Évaluer la prévention et l’activité répressive des forces de sécurité

1389

Évolution du nombre de crimes et délits commis à l’encontre des personnes dépositaires de l’autorité publique

1390

Évolution du nombre de crimes et délits en matière d’atteintes aux biens (AAB) constatés en zone gendarmerie

1391

Évolution du nombre de crimes et délits et de victimes en matière d’atteintes volontaires à l’intégrité physique (AVIP) constatés en zone gendarmerie

1392

Optimiser l’emploi des forces mobiles

1393

Engagement des forces mobiles

1394

Maintien en condition opérationnelle des escadrons de gendarmerie mobile

1395

Renforcer l’activité des services pour mieux combattre la délinquance

1396

Délai moyen d’intervention

1397

Effort de formation dans la lutte contre la délinquance

1398

Généralisation de la police technique et scientifique

1399

Lutte contre les filières, l’économie souterraine et les profits illicites

1400

Recentrage des forces sur le cœur de métier

1401

Taux d’élucidation ciblés

1402

Taux de présence de voie publique

1403

Renforcer l’efficacité dans la lutte contre l’insécurité routière

1404

Accidentologie, infractions et dépistages liés à l’usage des stupéfiants

1405

Accidentologie, infractions et dépistages liés à l’alcoolémie

1406

Renforcer la transparence du service public de sécurité intérieure

1407

Efficacité du service « magendarmerie.fr »

1408

Perception de l’action des forces de gendarmerie nationale

1409

Taux de satisfaction des usagers

1410

161 - Sécurité civile

1411

Assurer l’efficacité et l’efficience des dispositifs de lutte contre les feux de forêt [Stratégique]

1412

Efficacité du dispositif de protection des forêts pendant la campagne “saison feux” [Stratégique]

1413

Assurer la disponibilité des moyens aériens et leur conformité aux besoins opérationnels [Stratégique]

1414

Efficience des opérations de secours aux personnes en hélicoptère en milieux difficiles [Stratégique]

1415

Taux de disponibilité opérationnelle des avions de la sécurité civile

1416

Faire évoluer la cartographie des centres de déminage pour éliminer les munitions historiques et faire face à la menace terroriste

1417

Interventions sur objets suspects dans les délais (Improvised explosive devices disposal ou IEDD)

1418

Taux d’évolution des stocks collectés de munitions anciennes (Explosive ordonnance disposal ou EOD)

1419

Harmoniser les moyens des services départementaux d’incendie et de secours

1420

Taux de déploiement du système NEXSIS 18-112 au sein des SIS

1421

176 - Police nationale

1422

Évaluer la dépense fiscale

1423

Nombre de bénéficiaires de l’indemnité journalière d’absence temporaire (IJAT)

1424

Évaluer la prévention et l’activité répressive des forces de sécurité

1425

Évolution du nombre de crimes et délits commis à l’encontre des personnes dépositaires de l’autorité publique

1426

Évolution du nombre de crimes et délits en matière d’atteintes aux biens (AAB) constatés en zone police

1427

Évolution du nombre de crimes et délits et de victimes en matière d’atteintes volontaires à l’intégrité physique (AVIP) constatés en zone police

1428

Optimiser l’emploi des forces mobiles

1429

Engagement des forces mobiles

1430

Renforcer l’activité des services pour mieux combattre la délinquance

1431

Délai moyen d’intervention

1432

Effort de formation dans la lutte contre la délinquance

1433

Généralisation de la police technique et scientifique

1434

Lutte contre les filières, l’économie souterraine et les profits illicites

1435

Nombre d’heures de patrouille de voie publique effectuées par la police nationale

1436

Recentrage des forces sur leur cœur de métier

1437

Taux d’élucidation ciblés

1438

Renforcer l’efficacité dans la lutte contre l’insécurité routière

1439

Accidentologie, infractions et dépistages liés à l’alcoolémie

1440

Accidentologie, infractions et dépistages liés à l’usage de stupéfiants

1441

Renforcer la transparence du service public de sécurité intérieure

1442

Délai de prise en charge de l’usager après l’arrivée au commissariat

1443

Nombre de signalements externes reçus par l’IGPN via la plateforme dédiée

1444

Taux d’obtention d’un rendez-vous dans les 10 jours après une pré-plainte en ligne

1445

207 - Sécurité et éducation routières

1446

Améliorer le service du permis de conduire dans le cadre du développement de l’éducation routière tout au long de la vie

1447

Délai d’attente médian aux examens et coût unitaire d’obtention du permis de conduire

1448

Mobiliser l’ensemble de la société sur la sécurité routière pour réduire le nombre d’accidents et de tués sur les routes

1449

Nombre annuel des tués (France métropolitaine et départements d’outre-mer)

M. le président. L’amendement n° II-413, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 1379

Compléter cet alinéa par les mots :

rapporté à l’activité totale

La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée. Cet indicateur a déjà été modifié dans le projet annuel de performance 2023. Il s’agit donc d’un amendement de coordination.

Ainsi rectifié, l’indicateur sera mieux calibré pour évaluer le poids des activités de patrouille de voie publique dans l’activité totale de la police et de la gendarmerie nationale.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Dominati, rapporteur spécial. Il est en effet intéressant de disposer d’indicateurs pour l’étude d’un budget. Celui que propose ici le Gouvernement permettra de s’assurer qu’il y a des agents sur la voie publique.

Toutefois, pour le renseigner, il faudra prélever des agents sur la voie publique et les mettre dans des bureaux pour qu’ils y saisissent les données… Ce sera compliqué ! Qu’en dites-vous, madame la ministre ? Comment, d’une manière générale, ces indicateurs sont-ils renseignés ? J’émettrai également des réserves sur les autres indicateurs.

Sur cet amendement, la commission s’en remettra à la sagesse du Sénat.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée. Cet amendement vise simplement à transcrire dans le projet de loi de finances une modification apportée dans le projet annuel de performance 2023, sous la labellisation « nombre d’heures de patrouille de voie publique ».

L’indicateur modifié permettra de mieux évaluer le poids des activités de patrouille de voie publique dans l’activité totale de la police et de la gendarmerie nationales. Il est plus significatif avec cette mise en perspective, dans la mesure où le simple décompte des heures de patrouille ne permet pas de déterminer quel est le poids de cette activité pour les forces de sécurité intérieure.

L’objectif du Gouvernement est bien de faire en sorte que les heures passées par les forces de sécurité intérieure en patrouilles sur la voie publique représentent plus de 32 % de leur activité totale.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-413.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° II-295, présenté par M. Durain, Mme de La Gontrie, MM. Kanner et Bourgi, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie, Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 1380

Insérer trois alinéas ainsi rédigés :

(P176.2/P152.1) Lutter contre les discriminations subies ou commises par les forces de police et de gendarmerie

Nombre de faits de discriminations subies par des membres des forces de sécurité

Nombre de faits de discriminations causés par des membres des forces de sécurité

La parole est à M. Patrick Kanner.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Dominati, rapporteur spécial. La commission souhaite connaître l’avis du Gouvernement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée. Il est défavorable.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour explication de vote.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. C’est assez décevant, madame la ministre. Nous avons interrogé le ministre sur le rapport de Christian Vigouroux, qui a travaillé sur les discriminations, subies ou causées, dans la police. Il s’était engagé à travailler rapidement sur ce sujet.

Notre amendement vise donc à proposer un indicateur qui prendrait en compte la lutte contre les discriminations dans l’action des forces de sécurité, qu’elles en soient auteurs ou victimes.

L’amendement n° II-296 tendant à proposer un autre indicateur, complémentaire, je vous propose de le présenter dans la foulée, monsieur le président.

M. le président. Je suis saisi de l’amendement n° II-296, présenté par M. Durain, Mme de La Gontrie, MM. Kanner et Bourgi, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie, Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 1380

Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :

(P176.2/P152.1) Évaluer la mise en œuvre des contrôles d’identité par les forces de sécurité

Nombre de personnes contrôlées et récurrence des contrôles via le contrôle du nombre de passages au fichier des personnes recherchées

Nombre de palpations et de fouilles

Faits constatés

La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Cet amendement a pour objet d’instaurer un indicateur pour évaluer la mise en œuvre des contrôles d’identité par les forces de sécurité. Il s’agit ici non pas d’introduire un quelconque récépissé, mais simplement d’évaluer ces modalités, comme le préconise le rapport Vigouroux.

Si le Gouvernement ne tient pas les engagements pris par le ministre lors de son audition, nous ne saurons plus ce que vaut la parole d’un ministre…

M. Patrick Kanner. Ce serait dommage !

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements ?

M. Philippe Dominati, rapporteur spécial. J’ai fait part de ma réserve sur la perte de temps que représenterait le fait d’avoir à alimenter en données les indicateurs. J’attendais de connaître l’avis du Gouvernement, après l’engagement pris par le ministre devant la commission des lois : je m’en remettrai à la sagesse du Sénat sur l’amendement n° II-295.

En revanche, je demande le retrait de l’amendement n° II-296 ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée. J’émets un avis défavorable sur l’amendement n° II-295. Je précise que les rapports d’activité de l’inspection générale de la gendarmerie nationale (IGGN) et de l’inspection générale de la police nationale (IGPN) rendent compte des discriminations dont sont auteurs ou victimes les gendarmes et les policiers. Les indicateurs qui ont été demandés étaient trop nombreux pour pouvoir être satisfaits.

Mon argumentaire sera à peu près le même sur l’amendement n° II-296. J’ajoute simplement que la Cour des comptes vient de lancer un contrôle sur les contrôles d’identité. Il est donc important et opportun d’attendre ses conclusions et ses préconisations sur ce sujet. J’émets sur cet amendement également un avis défavorable, comme sur le précédent.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-295.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-296.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. J’appelle en discussion l’article 46 ter, qui est rattaché pour son examen aux crédits de la mission « Sécurités ».

Sécurités

État G
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Article additionnel après l'article 46 ter - Amendement n° II-349

Article 46 ter (nouveau)

L’indemnité de sujétion spécifique des personnels administratifs, techniques et spécialisés de la police nationale, des personnels civils de la gendarmerie nationale et des personnels militaires mentionnés au 2° de l’article L. 4145-1 du code de la défense est prise en compte, à compter du 1er juillet 2023, dans le calcul de la pension de retraite, par dérogation aux articles L. 15 et L. 61 du code des pensions civiles et militaires de retraite, et est soumise à cotisation dans des conditions fixées par décret.

Les personnels exerçant au ministère de l’intérieur admis à faire valoir leurs droits à la retraite à compter du 1er juillet 2023 et titulaires d’une pension servie en application du code des pensions civiles et militaires de retraite qui ont perçu, au cours de leur carrière, l’indemnité de sujétion spécifique mentionnés au premier alinéa du présent article ont droit à un complément de pension de retraite qui s’ajoute à la pension liquidée.

Les conditions de jouissance et de réversion de ce complément sont identiques à celles de la pension elle-même.

Seules les années de services accomplies dans la police nationale et la gendarmerie nationale entrent en compte pour le calcul de cette majoration de pension.

M. le président. Je mets aux voix l’article 46 ter.

(Larticle 46 ter est adopté.)

Article 46 ter (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Compte d'affectation spéciale : contrôle de la circulation et du stationnement routiers

Après l’article 46 ter

M. le président. L’amendement n° II-349, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l’article 46 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au I bis de l’article L. 86 du code des pensions civiles et militaires de retraite, les mots : « des personnels des services actifs de police qui peuvent être admis à la retraite dans les conditions prévues au premier alinéa de l’article 2 de la loi n° 57-444 du 8 avril 1957 instituant un régime particulier de retraites en faveur des personnels actifs de police » sont remplacés par les mots : « des fonctionnaires mentionnés à l’article L. 414-4 du code général de la fonction publique ».

La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée. La loi du 25 mai 2021 pour une sécurité globale préservant les libertés entendait permettre le cumul des revenus des pensions de retraite avec ceux d’une activité exercée dans le secteur privé.

Cet amendement vise à corriger une erreur rédactionnelle dans cette loi, afin d’inclure les commissaires de police dans le dispositif.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Dominati, rapporteur spécial. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-349.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 46 ter.

compte d’affectation spéciale : contrôle de la circulation et du stationnement routiers

Article additionnel après l'article 46 ter - Amendement n° II-349
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
État D (interruption de la discussion)
Article additionnel après l'article 46 ter - Amendement n° II-349
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
État D (interruption de la discussion)

M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits du compte d’affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers », figurant à l’état D.

ÉTAT D

(En euros)

Mission / Programme

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

Contrôle de la circulation et du stationnement routiers

1 640 756 534

1 640 756 534

Structures et dispositifs de sécurité routière

339 950 000

339 950 000

Contrôle et modernisation de la politique de la circulation et du stationnement routiers

26 200 000

26 200 000

Contribution à l’équipement des collectivités territoriales pour l’amélioration des transports en commun, de la sécurité et de la circulation routières

656 441 463

656 441 463

Désendettement de l’État

618 165 071

618 165 071

M. le président. Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits.

(Les crédits sont adoptés.)

M. le président. Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Sécurités » et du compte d’affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers ».

État D (début)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Discussion générale

5

Modification de l’ordre du jour

M. le président. Mes chers collègues, M. Patrick Kanner, président du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, demande, dans le cadre de l’ordre du jour réservé à son groupe du mercredi 7 décembre, que la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, visant à lutter contre la précarité des accompagnants d’élèves en situation de handicap et des assistants d’éducation soit examinée en remplacement de la proposition de loi relative à la titularisation des accompagnants d’élèves en situation de handicap et des assistants d’éducation, présentée par Mme Sylvie Robert et plusieurs de ses collègues.

Ces deux propositions de loi contenant des dispositions quasiment identiques, nous pourrions, en accord avec la commission de la culture, déroger à titre tout à fait exceptionnel au délai de six semaines prévu entre la demande d’inscription à l’ordre du jour et l’examen en séance publique.

Y a-t-il des observations ?…

Il en est ainsi décidé.

6

État D (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Sport, jeunesse et vie associative

Loi de finances pour 2023

Suite de la discussion d’un projet de loi

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
État B
Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
État B
Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
État B

M. le président. Nous reprenons l’examen, au sein de la seconde partie du projet de loi de finances, des différentes missions.

Sport, jeunesse et vie associative

M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ».

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Éric Jeansannetas, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, madame la ministre, mesdames les secrétaires d’État, mes chers collègues, cette année, la mission « Sport, jeunesse et vie associative » ne comporte aucune mesure nouvelle de grande ampleur, mais elle voit ses dispositifs existants renforcés.

La mission bénéficie ainsi d’une hausse notable de ses crédits, de 5,8 %, soit exactement 100 millions d’euros de plus que l’année dernière.

Avant l’examen de la mission, j’aimerais rappeler que les actuelles crises énergétique et inflationniste affectent durement le monde sportif et les associations.

Selon un sondage de l’institut Odoxa datant de la rentrée, un quart des Français auraient renoncé à pratiquer un sport à cause de l’inflation. Quant aux associations, en raison de leur public cible, elles ont souvent des réticences à augmenter leur tarif, ce qui peut aggraver leurs difficultés financières.

La situation impose donc de s’interroger sur l’efficacité des dispositifs d’aides aux associations et à la pratique sportive.

Le Pass’Sport, dispositif ciblé sur les ménages modestes, a été reconduit en 2023, pour un budget de 100 millions d’euros, identique à celui de l’année dernière. Si c’est un outil intéressant, il souffre d’un non-recours important : seuls 18,3 % des jeunes éligibles ont formulé une demande.

L’Agence nationale du sport (ANS) bénéficie d’un rehaussement de 7,5 % de sa subvention, qui atteint 264,7 millions d’euros. Le renforcement de ses moyens doit être l’occasion de mener une réflexion sur la gouvernance : la « nouvelle gouvernance du sport » doit laisser une place importante aux acteurs du sport, mais elle ne doit surtout pas être synonyme d’un désengagement de l’État. Une gouvernance solide est essentielle alors que les jeux Olympiques et Paralympiques se profilent.

Les tensions sur le marché de l’énergie et sur le marché des matières premières ont déjà des conséquences importantes sur la préparation de ces événements.

Selon la direction des sports, le besoin de financement supplémentaire pour la Société de livraison des ouvrages olympiques (Solideo) est évalué à 143 millions d’euros, dont les deux tiers seront pris en charge par l’État.

Au-delà du seul budget de la Solideo, j’évoquerai les enjeux financiers plus larges de l’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques. En effet, les financements privés du Comité d’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques (Cojop) ne sont à l’heure actuelle pas totalement assurés. Cette situation suscite des interrogations, et la séance de ce jour pourrait être l’occasion d’éclaircir cette question, notamment s’agissant de la mobilisation de la garantie de l’État.

Je conclurai mon propos en évoquant le soutien aux associations et les politiques d’engagement de la jeunesse.

Le compte d’engagement citoyen (CEC), qui voit ses crédits diminuer pour 2023, ne tient pas encore ses promesses. Alors que le nombre d’ayants droit était estimé à 400 000 à la fin de l’année 2021, seuls 3 192 dossiers ont été validés. Je pense qu’il s’agit d’une idée intéressante pour valoriser l’engagement bénévole, mais le fonctionnement du dispositif doit être revu.

Le service national universel (SNU) continue sa montée en charge. Son budget est désormais de 140 millions d’euros, l’objectif pour 2023 étant que 64 000 jeunes accomplissent ce service, contre 50 000 cette année. Toutefois, et même en écartant le facteur de la crise sanitaire, la progression est beaucoup plus lente que ce que prévoyaient les projections initiales.

C’était inévitable : les contraintes du service national universel ne sont pas compatibles avec une généralisation rapide du dispositif. Les centres pouvant accueillir les jeunes effectuant le séjour de cohésion sont en nombre limité, il est difficile de recruter des encadrants et la construction d’une administration du service national universel prend du temps.

J’ai pu constater l’engagement des équipes pour offrir aux jeunes un séjour de qualité, mais je reste sceptique à la fois sur l’opportunité et la faisabilité de la généralisation du service national universel.

Au nom de la commission des finances, je mène un contrôle budgétaire sur le SNU et nous rendrons nos conclusions durant le premier semestre de 2023.

Le service civique bénéficie, lui, de 518,8 millions d’euros en 2023, ce qui représente une augmentation de 20 millions d’euros par rapport à 2022, mais une diminution de crédits par rapport au plan de relance.

J’ai souvent exprimé mes réserves sur le recours au service civique dans le cadre du plan de relance. Plutôt qu’une politique de stop-and-go, je défends encore et toujours une montée en charge progressive du dispositif, qui permettrait de mettre en place des missions plus intéressantes et valorisantes, et de rassurer les opérateurs. Le budget du service civique présenté dans le projet de loi de finances m’apparaît à cet égard satisfaisant.

Au regard de ces éléments, la commission des finances a décidé de proposer au Sénat d’adopter sans modification les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ». (Applaudissements sur des travées des groupes SER et RDSE.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Jean-Jacques Lozach, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de léducation et de la communication. Monsieur le président, madame la ministre, mesdames les secrétaires d’État, mes chers collègues, l’examen des crédits consacrés au sport conduit à des conclusions différentes, selon que l’on regarde l’année 2023 ou les années 2024 et 2025.

À court terme, on peut estimer que le monde du sport a plutôt bien résisté à la crise sanitaire. Le projet de loi de finances pour 2023 reconduit plusieurs dispositifs utiles, comme le Pass’Sport ou le plan en faveur du développement des équipements de proximité.

Par ailleurs, l’Institut national du sport, de l’expertise et de la performance (Insep) retrouve les 5 équivalents temps plein supprimés l’an dernier et l’Agence française de lutte contre le dopage (AFLD) voit ses crédits augmenter. Quant à ceux de l’Agence nationale du sport, ils sont préservés.

Hormis la question des taxes affectées, sur laquelle nous reviendrons au cours de notre débat, on peut saluer la hausse de 3 % des crédits consacrés au sport, même si cette augmentation signifie en réalité une baisse en euros constants, compte tenu de l’inflation attendue en 2023.

À moyen terme, en revanche, les nuages semblent s’amonceler sur l’horizon du sport. Les crédits du plan de relance mobilisés pour améliorer l’isolation thermique de certains équipements sportifs n’ont pas été reconduits, alors que sévit une crise énergétique sans précédent. La discussion du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027 a révélé que le Gouvernement prévoyait de baisser les crédits consacrés au sport à l’issue des jeux Olympiques et Paralympiques.

Mais, à l’heure actuelle, les inquiétudes semblent surtout concerner les coûts des jeux de Paris 2024, qui pourraient croître de manière significative, en particulier du fait de l’inflation. S’agissant des infrastructures olympiques, la Solideo tient son calendrier et son budget en euros constants, même si elle a besoin de 150 millions d’euros pour faire face à l’inflation, dont un tiers serait à la charge des collectivités territoriales.

Les principales inquiétudes se concentrent sur le Cojop, qui peine, semble-t-il, à boucler son budget. Si on peut comprendre que les multiples crises actuelles ont un impact sur les comptes de ces jeux Olympiques et Paralympiques – selon les informations rendues publiques hier, 200 millions d’euros, sur les 400 millions d’euros supplémentaires au budget, seraient liés à l’inflation –, les Français n’ont pas à en assumer la charge. Une transparence totale est nécessaire sur ce sujet et des économies doivent être recherchées.

Nous constatons que les hypothèses sur lesquelles les jeux Olympiques et Paralympiques ont été pensés ne tiennent plus aujourd’hui, et ce pour des raisons indépendantes de la volonté des organisateurs.

Mais, au-delà de ce rendez-vous olympique, la question de l’avenir de notre ambition pour le sport est posée. Nous aurons bien un rendez-vous en 2024, madame la ministre, comme vous l’avez indiqué en commission. À cette fin, nous avons besoin d’y voir clair sur le financement du sport dans les années à venir, ce qui passe, selon moi, par trois priorités : la réouverture du débat sur l’attribution au sport de la totalité du produit des trois taxes affectées ou la recherche d’un financement alternatif aux crédits extrabudgétaires actuels ; le lancement d’un grand plan de rénovation de nos équipements structurants et locaux, notamment pour répondre à la crise de l’énergie ; l’accélération de la mise en œuvre de la gouvernance territoriale de l’ANS, qui n’est pas encore pleinement opérationnelle.

Compte tenu de ces nombreuses interrogations, la commission de la culture a adopté un avis de sagesse sur l’adoption des crédits des programmes 219 et 350. (Applaudissements sur des travées du groupe SER.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur des travées du groupe SER.)

M. Jacques-Bernard Magner, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de léducation et de la communication. Monsieur le président, madame la ministre, mesdames les secrétaires d’État, mes chers collègues, la commission de la culture a examiné le programme 163, « Jeunesse et vie associative », doté pour 2023 de 837 millions d’euros, soit une augmentation de 65 millions d’euros par rapport à 2022.

Toutefois, cette augmentation s’explique en grande partie par la montée en charge du service national universel, dont les crédits dédiés augmentent encore de 30 millions d’euros, malgré les nombreuses réserves émises depuis sa création.

Le SNU peine encore à atteindre ses objectifs, malgré tous les efforts que le Gouvernement déploie. Cette année, seulement 32 000 volontaires y ont participé, loin de l’objectif de 50 000 jeunes affiché. Pour l’encadrement des jeunes, le recours massif au contrat d’engagement éducatif (CEE) n’est en aucun cas adapté aux particularités du dispositif. Par ailleurs, encore trop peu de jeunes réalisent les missions d’intérêt général de la phase 2.

De nombreux doutes persistent donc quant à une nouvelle montée en charge du SNU et je crois qu’un débat s’impose sur le sujet : il faut faire un point avant d’envisager sa poursuite.

S’agissant des crédits réservés au service civique, ils sont en augmentation de 20 millions d’euros. Cette hausse, bienvenue, doit être nuancée par l’arrêt du financement des missions lancées dans le cadre du plan de relance, qui représentaient environ 200 millions d’euros.

Pourtant, le service civique a fait ses preuves et démontre, chaque année davantage, son efficacité en termes d’accompagnement et d’insertion des jeunes.

Dans le même temps, l’effort en faveur de la jeunesse et de l’éducation populaire, visible notamment au travers des mesures issues des Assises de l’animation, doit être souligné. Pour autant, il ne doit pas occulter la situation inquiétante du brevet d’aptitude aux fonctions d’animateur (Bafa), cette formation connaissant depuis plusieurs années une baisse drastique du nombre de candidats.

La rentrée scolaire de 2021 a effectivement été marquée par de grandes difficultés dans le secteur des accueils collectifs de mineurs, parmi lesquels les colonies de vacances. Face à l’ampleur des besoins, il faut redonner aux jeunes l’envie de s’investir davantage dans ces secteurs en crise.

Enfin, j’évoquerai la diminution des crédits en faveur du développement de la vie associative.

Plus que jamais, il m’apparaît essentiel de renforcer le soutien aux associations, qui peinent à retrouver leur dynamisme d’avant-crise. L’activité bénévole demeure trop peu valorisée, et les dispositifs à destination des bénévoles mal connus et peu lisibles. Cette fragilisation du tissu associatif, accentuée par l’impact de la crise énergétique sur les activités associatives, est particulièrement préoccupante pour la survie des petites associations.

Face à ces besoins croissants, je regrette que le montant alloué au fonds pour le développement de la vie associative (FDVA) soit encore en stagnation. En l’état actuel, le dispositif ne permet pas de répondre à l’ensemble des demandes qui lui sont adressées.

Comme vous pouvez le constater, mes chers collègues, la répartition des crédits supplémentaires en faveur de la jeunesse et de la vie associative pose question. C’est pourquoi la commission de la culture, de l’éducation et de la communication a décidé de s’abstenir sur l’adoption des crédits du programme 163. (Applaudissements sur des travées du groupe SER.)

M. le président. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Alain Marc.

M. Alain Marc. Monsieur le président, madame la ministre, mesdames les secrétaires d’État, mes chers collègues, la mission « Sport, jeunesse et vie associative » dans le projet de loi de finances pour 2023 enregistre une croissance de 5,8 % du budget prévu, pour atteindre 1 822,2 millions d’euros en crédits de paiement. Cette hausse se concentre principalement sur les politiques dédiées à l’engagement des jeunes, la poursuite du plan en faveur des équipements sportifs de proximité et, enfin, l’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024.

Les crédits consacrés au sport devraient augmenter de près de 3 %, pour atteindre 818,3 millions d’euros. Je salue la poursuite du plan consacré aux équipements de proximité, 100 millions d’euros de nouveaux crédits étant prévus en 2023 et 2024, ainsi que la reconduction du Pass’Sport pour 100 millions d’euros en 2023.

Ce Pass bénéficiera à de nouveaux publics, puisque les étudiants boursiers et les jeunes bénéficiaires de l’allocation aux adultes handicapés (AAH) y ont désormais accès. C’est une bonne chose, tant le sport véhicule des valeurs essentielles, mais les crédits restent trop peu consommés. Le taux de recours au Pass est seulement de 18 %. Il est essentiel de continuer à faire la promotion de ce dispositif sur l’ensemble du territoire, pour qu’il bénéficie au plus grand nombre.

Je regrette l’insuffisante prise en compte de la dégradation de la situation économique. La crise énergétique a dès à présent des conséquences sur les familles, les collectivités territoriales et l’ensemble des acteurs du secteur. Les crédits du plan de relance concernant l’accompagnement à la rénovation thermique des bâtiments dédiés à la pratique sportive n’ont pas été reconduits, tandis que les élus locaux font face à l’explosion des coûts de fonctionnement.

Concernant les jeux Olympiques et Paralympiques, les crédits accordés sont globalement stables, atteignant 294,9 millions d’euros. L’éventualité de pénuries de matériaux de construction représente un risque supplémentaire. Nous serons attentifs à la question du dépassement budgétaire, tout comme au respect du calendrier par la Solideo.

Le sport est parfois le meilleur des remèdes. Notre groupe est favorable à la poursuite d’une réflexion sur la prise en charge par la solidarité nationale de séances d’activité sportive dans le cadre de nos politiques de prévention de la perte d’autonomie. Le développement du programme des maisons sport-santé (MSS), doté de 4 millions d’euros en 2023 et 2024, va dans le bon sens.

Par ailleurs, le soutien public accordé à la vie associative et à la jeunesse est essentiel, tant l’une et l’autre représentent un socle de cohésion et de lien social.

Pourtant, les crédits destinés à la vie associative sont en baisse – je le regrette. L’écosystème associatif, composé principalement de petites structures, reste particulièrement fragilisé par la crise sanitaire. Après la période de repli sur soi que nous avons connue pendant la crise de la covid-19, il faut redonner du souffle au monde associatif, qui souffre cruellement.

Pour la jeunesse, le projet de loi de finances fait état d’une progression de 20 millions d’euros des crédits dédiés au service civique, soit une hausse de 15 %. Je salue la poursuite de cette dynamique, particulièrement visible en milieu rural. En revanche, la baisse drastique du nombre de candidats au Bafa, malgré les aides mises en place, doit nous alerter.

De son côté, le service national universel devait initialement concerner 400 000 jeunes au cours de l’année 2022. En réalité, il n’y avait que 50 000 places disponibles, qui n’ont pas toutes été pourvues, malgré la qualité des encadrements.

Ce dispositif est une bonne idée, mais il peine à se hisser à la hauteur de ses ambitions. En 2023, le PLF lui accorde 140 millions d’euros, soit une hausse de 30 %. Avant d’annoncer sa généralisation, il faut s’assurer que la prise en charge sera réelle, dans l’ensemble des territoires, et qu’il ne s’agit pas simplement d’effets d’annonce.

Pour ce qui est des jeux Olympiques et Paralympiques, il est essentiel de favoriser des retombées concrètes sur tout le territoire national et de généraliser la pratique sportive, pour les jeunes, pour la santé et l’inclusion sociale des Français. Pour gagner, nous devons rehausser notre niveau de jeu, à nouveau partout sur le territoire, et profiter de cet événement d’ampleur pour faire de la France une nation sportive avant, pendant et après cette échéance.

C’est dans cette optique que le groupe Les Indépendants - République et Territoires votera globalement en faveur des crédits de cette mission, tout en appelant à rehausser nos ambitions dans la perspective des grands événements à venir.

M. le président. La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Monsieur le président, madame la ministre, mesdames les secrétaires d’État, mes chers collègues, nous entamons l’examen des crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ». Sport, jeunesse, vie associative : de toutes les missions du projet de loi de finances, celle-ci est certainement la plus fourre-tout, mais, ne nous y trompons pas, cette architecture budgétaire large ne doit rien au hasard. Elle traduit une volonté politique claire et assumée d’empêcher l’émergence d’une réelle politique d’éducation populaire tournée vers l’émancipation.

Disons-le clairement, ce n’est pas le chemin que prend cette mission. Le projet phare du volet consacré à la jeunesse, le service national universel, en est le parfait exemple : un dispositif extrêmement coûteux – 140 millions d’euros –, dont le budget augmente année après année, même s’il ne remplit pas ses objectifs, et dont aucune évaluation sérieuse n’est faite.

Pour nous, c’est un dispositif inutile, fondé sur une nostalgie surannée du service militaire, un dispositif au fumet autoritaire, pensé pour faire « rentrer la jeunesse dans le rang », la faire obéir, la faire saluer au garde-à-vous, y compris des responsables civils. Un dangereux mélange des genres !

La liste des scandales entourant le SNU ne cesse de s’allonger au fil des mois : malaises de jeunes laissés en plein soleil, brimades et punitions physiques collectives, désorganisation des convocations et, même, atelier de menottage en lien avec la police nationale.

On est loin de l’émancipation, on est loin du moment collectif qui fédère, on est très loin de la politique pour la jeunesse que notre pays mérite.

Profitons ensuite de cette discussion budgétaire pour relayer les craintes du mouvement associatif. Certaines, qui concernaient une mise au pas des associations les plus militantes, s’étaient exprimées au moment de l’examen de la loi, dite Séparatisme, du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République. Ces craintes se sont concrétisées récemment, le contrat d’engagement républicain ayant été utilisé pour attaquer la liberté associative et priver une association écologiste de ses subventions.

Je veux dire ici mon soutien aux libertés associatives et appelle le Gouvernement à revenir sur ce dispositif dangereux.

J’en viens au troisième volet de la mission, le sport, qui – rappelons-le – est aussi politique.

Ce programme prévoit 100 millions d’euros pour le Pass’Sport. Cette aide à la prise de licence est bienvenue, mais mériterait une réelle montée en puissance.

Les annonces concernant la mobilisation du fonds vert pour rénover les équipements devraient nous rassurer. Mais, comme tous les ministres semblent vouloir se servir dans ce fonds, nous sommes très dubitatifs sur les montants qui seront réellement affectés.

J’ai été surpris – mais pas vraiment étonné, tant c’est le cas dans toutes les missions budgétaires – de l’absence du mot climat dans la présentation du programme « Sport ». J’ai compris pourquoi lorsque nous avons eu confirmation de la présence de notre ministre des sports à la Coupe du monde de football organisée au Qatar, et donc de la caution apportée, par sa présence, à l’aberration, pour ne pas dire à la bombe climatique, que constitue cet événement. C’est toujours le même déni gouvernemental sur les questions climatiques, que nous connaissons depuis cinq ans !

Pourtant, le changement climatique aura des conséquences dramatiques sur les pratiques sportives, les stations de ski, les installations littorales, le sport en extérieur et en plein été. De tout cela, il n’est pas prévu de débattre aujourd’hui, à la lecture de ce budget, et c’est pourquoi nous aborderons ce sujet par voie d’amendement.

J’évoquerai un dernier point, et pas des moindres tant il constitue presque l’horizon unique de la politique sportive française des prochaines armées : les jeux Olympiques et Paralympiques de 2024.

Le budget poursuit une trajectoire financière qui, sans surprise, commence à déraper – mais tout cela était prévu de longue date.

Je dois en revanche me faire ici l’écho des inquiétudes relatives à l’annulation possible des festivals en 2024, qui plonge dans l’insécurité de nombreuses entreprises culturelles, peinant déjà à relever la tête après la pandémie de covid-19.

Le risque d’opposer sport et culture est grand. La fête des jeux Olympiques et Paralympiques ne doit pas être gâchée par une saison de festivals annulée de plus. Il est donc nécessaire de mieux dimensionner la mobilisation de nos forces de sécurité pour que saison culturelle et jeux puissent se dérouler en harmonie.

Pour conclure, s’agissant du sport, nous constatons la faiblesse des ambitions climatiques ; s’agissant de la jeunesse, nous refusons la mise au pas annoncée ; s’agissant de la vie associative, nous déplorons le manque de visibilité et les attaques aux libertés.

Nous nous abstiendrons donc sur les crédits de cette mission.

M. le président. La parole est à M. Didier Rambaud.

M. Didier Rambaud. Monsieur le président, madame la ministre, mesdames les secrétaires d’État, mes chers collègues, dix mois avant la Coupe du monde de rugby et vingt mois avant les jeux Olympiques et Paralympiques de Paris, l’État augment les moyens financiers en faveur du sport.

En témoigne l’augmentation de 5,1 % des crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative », qui atteignent 1,82 milliard d’euros en crédits de paiement.

Ces moyens financiers permettent de poursuivre l’accès des jeunes à la pratique sportive, avec le Pass’Sport, un dispositif pertinent qui porte ses fruits et que nous devons amplifier. Je me réjouis donc de son extension à de nouveaux publics : les étudiants jusqu’à 28 ans révolus bénéficiant d’une bourse sur critères sociaux de l’enseignement supérieur et les jeunes bénéficiaires de l’allocation aux adultes handicapés.

Je salue également le déploiement des parcours sport-santé de proximité sur les territoires, sans oublier les 100 millions d’euros destinés au financement du programme des 5 000 équipements sportifs de proximité, soit 200 millions d’euros sur deux ans pour développer la pratique sportive sur tout le territoire national, l’objectif étant d’atteindre trois millions de nouveaux pratiquants d’ici à 2024.

Ce sont des moyens substantiels pour des équipements incitant à la pratique sportive dans les meilleures conditions et dont les caractéristiques peuvent se résumer en deux mots : simplicité et proximité. Pour garder cette proximité – je profite de l’occasion pour vous interroger, madame la ministre –, le zonage ne pourrait-il pas être retravaillé afin d’éviter l’exclusion de certains territoires, qui ne sont situés ni dans les zones de revitalisation rurale ni dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville ?

Le Gouvernement envoie également un message positif pour l’engagement de la jeunesse.

Dans une société divisée, où de nombreux jeunes sont en quête de repères, je pense que le service national universel mérite toute notre attention. Je suis donc plus qu’étonné de voir le nombre d’amendements déposés pour réduire les moyens financiers qui lui sont dédiés.

Les auteurs de ces amendements considèrent-ils que le service national universel ne mérite pas de bénéficier d’une enveloppe supplémentaire de 30 millions d’euros ? Je pense au contraire, mes chers collègues, que nous ne dépenserons jamais assez d’argent pour l’engagement de notre jeunesse au service de l’intérêt général et des valeurs de la République.

Enfin, je ne peux terminer sans revenir un instant sur les jeux Olympiques et Paralympiques de 2024.

Les crédits du programme dédié diminuent de 0,7 %, ce qui démontre que la trajectoire budgétaire a été anticipée et demeure maîtrisée.

Certes, le comité d’organisation vient d’annoncer cette semaine un coût supplémentaire d’environ 400 millions d’euros, mais je crois pouvoir dire que ces coûts sont liés, d’une part, à l’inflation des coûts énergétiques, aggravés par la guerre en Ukraine ; d’autre part, au renforcement des moyens dédiés à la cybersécurité et à la quiétude de l’ordre public lors de la cérémonie d’ouverture, qui s’annonce d’ores et déjà historique.

À ce jour, l’enveloppe prévisionnelle totale atteint donc 8,7 milliards d’euros.

Permettez-moi de rappeler que les jeux Olympiques et Paralympiques de Londres ont coûté l’équivalent de plus de 10 milliards d’euros, quand le coût de ceux de Rio est estimé à plus de 13 milliards d’euros…

Ce rappel étant fait, je conclus en précisant que le groupe RDPI votera ces crédits, qui encouragent la pratique du sport et l’engagement de notre jeunesse. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à Mme Sabine Van Heghe. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme Sabine Van Heghe. Monsieur le président, madame la ministre, mesdames les secrétaires d’État, mes chers collègues, je remercie nos deux rapporteurs pour avis, Jean-Jacques Lozach et Jacques-Bernard Magner, de la qualité de leur travail.

Je commencerai par faire quelques remarques générales sur les crédits globaux de cette mission pour 2023, qui connaissent une hausse de 5,8 % des crédits de paiement, soit 1,8 milliard d’euros, et une baisse de 10,8 % des autorisations d’engagement, soit 1,5 milliard d’euros.

C’est le programme 219, « Sport », dont les autorisations d’engagement sont en baisse de 22 %, qui est préoccupant pour les années à venir.

Rappelons que le plan de relance complétait pour 2021 et 2022 les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » de 330 millions d’euros supplémentaires, lesquels disparaissent en 2023. Les crédits de cette mission sont donc en baisse de 200 millions d’euros.

Permettez-moi à ce stade de faire un rappel utile : lorsque la gauche était au pouvoir, entre 2012 et 2017, les moyens globaux avaient progressé de 31 %.

J’en viens maintenant aux détails de chacun des programmes, en commençant par le programme 219, « Sport ».

En 2023, ses crédits de paiement augmenteront de 26 %, soit 690 millions d’euros, dont 164 millions seront absorbés par l’Agence nationale du sport.

Les crédits de l’action n° 02, Développement du sport de haut niveau, ne progressent que d’un peu plus de 2 %, ce qui est un mauvais signal à la veille de la Coupe du monde de Rugby de 2023 et des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024.

Le dispositif Pass’Sport, soutenu de longue date par les sénateurs de notre groupe, en particulier par notre rapporteur, bénéficie en 2023 d’une enveloppe de 100 millions d’euros, comme en 2022.

Néanmoins, nous relevons la sous-consommation des crédits budgétaires, surprenante alors qu’il est urgent d’améliorer la condition physique dégradée de nos jeunes. Il faut donc réfléchir à une extension de l’éligibilité au Pass’Sport.

Je regrette également la baisse de la subvention de l’Agence française de lutte contre le dopage, au regard du taux actuel de l’inflation et à l’heure où les contrôles dans les compétitions sportives devraient se multiplier.

Nous nous inquiétons aussi du financement du sport français, assuré pour une part importante par trois taxes parafiscales abondant l’Agence nationale du sport.

Le rendement total de ces trois taxes a progressé de 9 % depuis 2017, mais la part allant au mouvement sportif a été réduite de moitié. Pour 2023, le produit des trois taxes est évalué à 487,3 millions d’euros, mais seuls 166 millions d’euros seront affectés à l’ANS – et donc au sport –, soit un tiers. Nous proposons de déplafonner ces taxes, comme le réclame depuis des années notre collègue Jean-Jacques Lozach.

Je dirai à présent quelques mots sur le programme 350, « Jeux Olympiques et Paralympiques 2024 ».

J’attends du Gouvernement des précisions sur l’évolution du budget global des JO. Alors qu’il était initialement estimé à 6,6 milliards d’euros, il atteindrait plus de 8 milliards d’euros. Sans argent public, la volonté exprimée par le Président de la République – « Les jeux financent les jeux » – sera-t-elle respectée ?

Enfin, quid de l’avenir du sport français à l’issue des JO ? L’examen au Sénat du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027 fait craindre un affaiblissement des crédits du sport après 2024. Or les JO ne doivent pas être l’arbre qui cache la forêt.

Le programme 163, « Jeunesse et vie associative », bénéficie pour 2023 de 837 millions d’euros, soit une augmentation de 8,4 % par rapport à 2022.

Ces 65 millions d’euros supplémentaires sont en grande partie destinés au service national universel, dont les crédits augmentent de 30 millions, l’objectif étant que 64 000 jeunes soient concernés en 2023.

Les 140 millions d’euros de crédits dévolus au SNU sont démesurés par rapport à la faible attractivité de ce dispositif auprès des jeunes. Faut-il alors vraiment le maintenir ? Rappelons que l’objectif initial du Gouvernement était que, à l’horizon 2022, 800 000 jeunes effectuent un SNU.

À titre de comparaison, le service civique, qui, lui, suscite un véritable engouement auprès de la jeunesse, ne verra ses crédits augmenter en 2023 que de 20 millions d’euros. La crise sanitaire a révélé l’importance du rôle joué par les jeunes en service civique. Alors, pourquoi ne pas renforcer encore ce dispositif, dont les crédits ne progressent que de 4 %, soit moins que l’inflation ?

Un autre fait est absolument regrettable : la baisse de 10 % des crédits destinés au développement de la vie associative et au soutien du bénévolat. Très affaibli, le secteur avait déjà dû subir au début du quinquennat précédent une baisse drastique des contrats aidés, la suppression de la réserve parlementaire et, en 2020 et en 2021, la crise sanitaire.

Certes, les activités associatives redémarrent progressivement, mais les problèmes auxquels sont confrontées les associations sont encore très importants. Je le vois dans mon département du Pas-de-Calais, où les acteurs associatifs me font part de leurs difficultés, qui vont croître avec la crise économique.

J’ai un autre regret : la baisse des dotations en faveur des métiers de l’animation et celle du nombre de jeunes ciblés par le Bafa et le BAFD, le brevet d’aptitude aux fonctions de directeur. Pourtant, la pénurie d’animateurs formés a des effets négatifs sur les structures de loisirs. Les causes sont multiples : conséquences de la crise sanitaire, coût de la formation, par exemple. Une réflexion doit être engagée sur la prise en charge de cette formation.

Pour conclure, force est de constater que les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » pour 2023 augmentent de façon trop modeste. Ils sont même en diminution si l’on tient compte de la non-reconduction des crédits issus du plan de relance depuis deux ans. Ce sont les actions au profit du sport pour tous et de la vie associative qui pâtiront le plus de ce manque de moyens.

Compte tenu de ces signaux d’alerte, les sénateurs du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain s’associent aux avis de sagesse exprimés par nos deux rapporteurs et s’abstiendront donc sur le vote des crédits de la mission « Sport, jeunesse, vie associative » pour 2023. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. le président. La parole est à M. Pierre Ouzoulias.

M. Pierre Ouzoulias. Monsieur le président, madame la ministre, mesdames les secrétaires d’État, mes chers collègues, une très grande part de ce projet de budget est consacrée à l’accompagnement des jeux Olympiques et Paralympiques de Paris. Pourtant, de fortes incertitudes demeurent sur l’organisation et le financement de dispositifs absolument nécessaires à leur bon déroulement.²

Pour commencer, je tiens à saluer l’esprit de responsabilité des collectivités, qui ont accepté de prendre à leur charge une grande partie des surcoûts de construction de plusieurs équipements.

Pour obtenir les jeux, ses futurs organisateurs avaient pris notamment des engagements très fermes sur la réalisation d’infrastructures de transport, qui devaient permettre une circulation aisée et une consommation de carbone réduite.

À 610 jours de l’ouverture des jeux Olympiques, il faut reconnaître avec honnêteté que ces engagements ne seront définitivement pas tenus.

De toutes les lignes de transport prévues dans le dossier de la candidature parisienne, une seule sera disponible pour les jeux. Il a donc été décidé de mettre en œuvre, dans l’urgence, des transports alternatifs. Ainsi, 1 400 bus et cars spécifiques seront mobilisés, sur des voies réservées, pour les 200 000 personnes accréditées.

À rebours des promesses du comité d’organisation, les jeux de Paris vont donc aggraver la pollution, accroître les embarras liés à la circulation des véhicules et dégrader davantage les conditions de déplacement des usagers des transports publics. Il est à craindre que la vie quotidienne des Franciliens ne pâtisse grandement du déroulement de ces jeux. À l’avenir, c’est l’acceptabilité de ces grandes manifestations qui est menacée.

Les différents sites ont été installés à proximité de lignes que l’État, par l’entremise de la Société du Grand Paris, s’était engagé à livrer avant l’ouverture de ces jeux. Lors de son audition par notre commission, le 19 décembre 2018, M. Castex, alors délégué interministériel aux jeux Olympiques et Paralympiques, nous déclarait : « Je suis peut-être un peu “vieux jeu”, mais lorsqu’un Président de la République, un Premier ministre, quels qu’ils soient, engagent la parole de la France à l’international, spontanément, j’ai tendance à penser qu’il faut l’honorer. »

Force est de reconnaître que cette parole n’a pas été honorée. Mais il y a pire. Par la loi du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale, vous avez transféré à Île-de-France Mobilités, c’est-à-dire aux collectivités, la compétence des transports des personnes accréditées et, donc, la gestion de 1 400 bus. Comment cet établissement va-t-il trouver les chauffeurs nécessaires, alors qu’il en manque 1 800 en Île-de-France ?

Quel est le coût de ce nouveau service et comment Île-de-France Mobilités va-t-il le financer, alors que cet organisme est proche de la cessation de paiements et que le Gouvernement et la majorité sénatoriale ont refusé, ce mercredi, de lui permettre d’accroître ses ressources financières ?

Vous nous avez expliqué à plusieurs reprises, madame la ministre des sports, que les jeux devaient financer les jeux. Nous constatons aujourd’hui que ce sont les collectivités qui prennent à leur charge les surcoûts et pallient les défaillances.

Les jeux ne peuvent être organisés sans argent public, mais vous avez choisi de maintenir le plafond des taxes qui financent l’Agence nationale du sport.

Il est tout à fait regrettable que ce débat budgétaire ne nous ait pas permis d’apprécier plus justement les conséquences financières des manquements de l’État à ses engagements pris lors de la candidature de Paris. C’est pour cette raison que nous voterons contre les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)

M. le président. La parole est à M. Claude Kern. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. Claude Kern. Monsieur le président, madame la ministre, mesdames les secrétaires d’État, mes chers collègues, les crédits de la mission que nous examinons aujourd’hui interpellent à plusieurs égards selon le prisme par lequel nous décidons de les aborder : court terme ou long terme, performances de haut niveau ou sport pour tous, abondement général ou capillarité dans les territoires.

Dans la perspective des jeux Olympiques et Paralympiques, ainsi que des prochaines échéances sportives majeures, le budget général augmente de 5,8 %, ce qui est inédit. C’est bien évidemment une nouvelle réjouissante.

De même, nous nous devons de saluer le retour d’un ministère des sports de plein exercice, dans la perspective des jeux Olympiques et Paralympiques, ce qui constitue un signal fort.

Cependant, et notre enthousiasme trouve là ses limites, nous attendons que l’État poursuive son effort après cette échéance. Car les questions restent nombreuses en termes de cohésion nationale, de dynamisme, d’engagement de la jeunesse, d’insertion, mais aussi de santé. La lecture du projet annuel de performance du programme « Sport » n’apaise nullement les inquiétudes que nous pouvons avoir : les crédits baisseraient de 20 % entre 2023 et 2025.

Une « grande nation sportive », comme se plaît à l’évoquer le Président de la République requiert une vision budgétaire stable, claire et déclinée de telle façon qu’elle permette à l’ensemble des acteurs du monde du sport de s’engager

Or ce budget, en l’état, pèche encore trop par certains aspects, notamment en dynamique de long terme et, a fortiori, dans un contexte inédit d’inflation.

Ainsi, au sein du programme « Sport », l’ANS bénéficie certes de 11 millions d’euros supplémentaires pour mieux structurer sa gouvernance et amplifier son action territoriale, mais les politiques publiques doivent être davantage transversales et associer pleinement toutes les parties prenantes. Le volet territorial de l’Agence doit être dynamisé, car il reste inachevé, deux ans après sa création.

Par ailleurs, l’ANS bénéficiera cette année, en plus de la ligne budgétaire du programme, de 170 millions d’euros de taxes affectées, taxes dont le rendement diminue encore cette année. Il faut agir sur le plafond de ces taxes pour dégager des recettes suffisantes et financer l’ensemble des problématiques qui restent en suspens. À cet égard, nous regrettons votre obstination à ne pas vouloir que « le sport finance le sport » !

Le sport français a besoin de ressources supplémentaires pour assurer sa présence sur la durée dans tous les territoires. Nous connaissons, dans cette enceinte, le rôle massif et crucial joué par collectivités en tant que premiers financeurs publics du sport.

Une nouvelle enveloppe de 100 millions d’euros est dédiée aux équipements sportifs de proximité, dans la continuité des engagements du Président de la République à « mettre le sport au cœur de la Nation », que ce soit dans le cadre des jeux Olympiques et Paralympiques ou dans l’optique d’un enjeu d’héritage.

Mais, concrètement, quand on mesure l’ampleur du chantier, il semble évident qu’il manque un véritable engagement de l’État. Les collectivités ne peuvent supporter seules le coût des adaptations.

On note enfin une faible progression des crédits en faveur du sport pour tous, alors que les clubs souffrent encore. Ils ont besoin de pouvoir anticiper, de se développer, de renforcer l’emploi et la formation des éducateurs et des entraîneurs pour répondre aux attentes et aux besoins des Français.

Il aurait fallu faire des efforts dans ce domaine. À cet égard, on peut s’interroger sur le maillage des maisons sport-santé, même si elles se voient attribuer 4 millions d’euros. Est-ce suffisant pour renverser la dynamique du sport pour tous, qui est carencée ?

En tout état de cause, il faut encore développer la pratique sportive, véritable enjeu de santé publique. Tous ces domaines d’intervention nécessitent à la fois une articulation parfaite entre les politiques menées entre l’État et celles qui le sont par les collectivités, ainsi qu’un choc de décentralisation et de rationalisation.

Au sein du programme « Jeunesse et vie associative », j’insisterai sur les crédits dédiés au soutien à la vie associative, qui n’augmentent pas, alors que le contexte actuel de crise a des effets significatifs sur le tissu associatif.

Certes, on note une sanctuarisation du fonds pour le développement de la vie associative, dont les crédits sont reconduits. Cependant, nous regrettons que l’ensemble des mesures visant à valoriser l’engagement bénévole adoptées lors de l’examen de la loi du 2 mars 2022 visant à démocratiser le sport en France n’ait pas rencontré plus d’écho.

Le SNU et le service civique favorisent-ils réellement chez nos jeunes l’autonomie et le développement de compétences tout en répondant à leurs attentes ? Nous pouvons en douter. Peut-être faudrait-il repenser ce dispositif et le simplifier ?

Enfin, en tant que corapporteur sur les crédits du programme « Jeux Olympiques et Paralympiques 2024 », je ne peux conclure mon propos sans dire un mot sur le budget de cet événement majeur qui nous oblige à bien des égards et qui, en raison de l’inflation, doit être le centre de notre attention afin d’éviter tout dérapage financier. Le Cojop et la Solideo devront y veiller.

Une enveloppe de près de 4 milliards d’euros était prévue pour l’organisation de ces jeux et de 3,7 milliards d’euros pour les infrastructures. Ces montants devront à l’évidence être actualisés. Si nous sommes évidemment conscients du poids des dépenses contraintes, sur lesquelles nous n’avons aucune prise, il est de bonne guerre de pointer une certaine sous-évaluation des dépenses dès le départ, conséquence d’un modèle, celui que vous nous avez présenté, dont l’équilibre était largement perfectible.

Les aspects sécurité, énergie, billetterie et partenariats doivent, à terme, être maîtrisés et équilibrés, et des arbitrages doivent être effectués. Comment abordez-vous cette nécessaire révision budgétaire ? Madame la ministre, il nous faut la plus grande transparence sur ces sujets, car cet événement doit rester festif et faire rayonner la France à l’échelon international. Il ne saurait se transformer en une addition douloureuse pour les Français.

En conclusion, le groupe Union Centriste, au nom duquel j’interviens, votera les crédits de cette mission, tout en soulignant, après les réserves que je viens d’exprimer, que la « grande nation sportive » doit s’envisager comme une véritable course de fond et nécessite un engagement et des apports concrets.

Encore un petit effort, madame la ministre ! (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. le président. La parole est à M. Bernard Fialaire. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

M. Bernard Fialaire. Monsieur le ministre, madame la ministre, mesdames les secrétaires d’État, mes chers collègues, nous savons que l’activité physique est un outil indispensable de prévention du surpoids et de l’obésité, mais également de réussite scolaire et d’épanouissement personnel.

Aussi, nous saluons les démarches du Gouvernement visant à encourager les Français, notamment la jeunesse, à prendre goût à l’activité physique, grâce à la généralisation des trente minutes quotidiennes dans toutes les écoles, l’expérimentation de deux heures supplémentaires de sport pour les collégiens et l’extension du Pass’Sport à 800 000 étudiants boursiers à la rentrée 2022.

Le sport, qui permet cet épanouissement personnel physique et psychique, qui développe le goût de l’effort, de la persévérance, le respect des règles, des arbitres, des éducateurs et des adversaires, est un excellent vecteur de fraternité, nécessaire à la cohésion sociale. C’est également un excellent promoteur de l’activité physique.

Aussi, je vous rappelle, madame la ministre, mon interpellation pour la promotion du sport scolaire et universitaire, qui devrait avoir une place prépondérante par rapport au « sport business » et à ses excès.

S’agissant de notre tissu associatif, il continue d’encaisser le choc de la pandémie. Notre collègue du groupe RDSE, Éric Gold, avait déposé une proposition de loi à ce sujet : face aux restrictions d’activités, aux reports ou aux annulations de manifestations sportives et culturelles, aux résiliations d’adhésion, il proposait d’accorder un soutien financier accru aux associations. Ce texte n’a malheureusement pas été adopté.

Notre rapporteur pour avis, Jacques-Bernard Magner, porte à notre attention deux éléments : la stagnation des crédits consacrés au FDVA et la complexité de certains dispositifs de soutien du tissu associatif.

Pour ma part, je prône un soutien accru à la formation dans le domaine de l’animation pour l’accueil collectif des jeunes. Madame la secrétaire d’État à la jeunesse, je vous ai interpellée ce mois-ci par une question écrite au sujet des difficultés de recrutement du secteur. L’animation n’attire plus. Certains territoires ont dû revoir à la baisse leur offre d’accueil collectif.

Je proposais d’assouplir temporairement les règles d’encadrement en prévoyant un animateur pour vingt-cinq enfants par exemple, contre dix-huit actuellement, pour les enfants que l’on considère comme suffisamment autonomes du fait de leur âge. En milieu périscolaire, je proposais d’autoriser un effectif équivalent à une classe, ce qui permettrait à de nombreuses communes de satisfaire à cette exigence.

Je salue le travail fourni grâce à votre plan « Pour un renouveau de l’animation en accueils collectifs de mineurs », qui dégage 5 millions d’euros d’aides pour la formation au Bafa et revalorise le contrat d’engagement éducatif. Ce cap doit être maintenu.

Il faut abattre les cloisons entre l’école, la maison et la rue, agir en synergie sur les temps scolaire et périscolaire pour mieux appréhender globalement l’éducation.

L’école ouverte procède de cette idée en renforçant l’articulation entre l’école et les associations, qu’elles soient sportives ou culturelles, et les communes qui les soutiennent : en intensifiant le lien entre l’école et les familles via les services médico-sociaux des départements ; entre l’école et les régions pour l’orientation et les stages de découverte.

Cette vision d’ensemble doit être le principe directeur de votre action pour que nous puissions voter les crédits de cette mission.

M. le président. La parole est à M. Michel Savin, qui ne disposera pas de temps de parole supplémentaire, bien que ce soit aujourd’hui son anniversaire ! (Sourires et applaudissements.)

M. Michel Savin. Monsieur le président, madame la ministre, mesdames les secrétaires d’État, je concentrerai mon propos sur le programme « Sport », tandis que mon collègue Cédric Vial traitera du programme « Jeunesse et vie associative ».

Le projet de loi de finances pour 2023 prévoit, il est vrai, une hausse des crédits accordés au sport. Cependant, cette montée en puissance doit beaucoup à la perspective des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024.

Pour autant, avec 1,1 milliard d’euros prévus pour 2023, les moyens alloués au sport restent modérés et ne représentent que 0,3 % du budget général. Cette proportion, il faut le rappeler, n’a pas évolué au cours des derniers exercices. En outre, cette augmentation de 2,6 % des crédits, même si elle est bienvenue, reste malgré tout inférieure à l’inflation.

Ce budget reste donc en trompe-l’œil, même si nous reconnaissons des évolutions positives, que nous appelions de nos vœux depuis plusieurs années.

Je pense d’abord à la stabilisation du nombre de postes de conseillers techniques sportifs (CTS), à la réinscription des cinq postes manquants à l’Insep, aux vingt nouveaux emplois dégagés pour le suivi des affaires de violences sexistes ou sexuelles ou de radicalisation.

Ensuite, nous apprécions que notre demande d’extension du plan pour les équipements sportifs de proximité à tous les territoires, et non plus uniquement aux quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) et aux zones de revitalisation rurale (ZRR), ait été prise en compte.

Ces signes sont encourageants, mais insuffisants, car une enveloppe budgétaire, même mieux dotée qu’auparavant, ne fait pas une politique. Le Gouvernement ne fait que limiter la casse et ne se donne pas les moyens de ses ambitions.

Les fédérations et associations sont inquiètes : la covid-19 a fragilisé leur modèle, leurs finances, et a modifié les habitudes des usagers. Là encore, c’est au Gouvernement d’insuffler de nouveau de la confiance.

Les collectivités s’inquiètent également de l’explosion du coût de l’énergie, ainsi que des besoins de rénovation des équipements vétustes. À cet égard, elles ont besoin d’un accompagnement.

Or le montant des crédits alloués au renouvellement des installations locales est loin d’être à la hauteur des besoins. Et la marge de manœuvre des collectivités, qui est limitée, ne leur permet pas toujours de maintenir en fonction certains équipements.

Je pense, par exemple, aux piscines publiques, dont on connaît le rôle majeur en matière d’égalité d’accès au sport. Comment pouvons-nous afficher une priorité sur le savoir nager sans investir dans la rénovation des bassins ? J’en appelle, une nouvelle fois, à un plan Marshall des piscines à l’échelon national, auquel seraient bien sûr associées l’ensemble des collectivités.

En ce sens, une loi d’orientation et de programmation pluriannuelle du sport permettrait de mieux répondre aux enjeux des acteurs du monde associatif et des collectivités, de mieux les anticiper. Pour cela, nous avons besoin de stabilité. Nous ne voulons pas, comme cela est prévu dans le projet annuel de performance, assister à une baisse des crédits de paiement en 2024 et en 2025.

Madame la ministre, quel sera l’héritage de Paris 2024 si tous les Français n’ont toujours pas accès à des installations dignes de ce nom ?

Une fois l’événement passé, qu’adviendra-t-il des crédits affectés aux jeux Olympiques ? Le sport en France connaît-il un petit sursaut, avant de retomber tout en bas de la liste des priorités ? Pouvez-vous nous rassurer sur ce point, car les élus locaux comme les acteurs associatifs craignent une violente gueule de bois au lendemain des jeux ?

Enfin, le Gouvernement n’a pas pris que de mauvaises décisions ; il en a aussi oublié.

Je pense au sport-santé, parent pauvre de nos politiques publiques, qui ne fait l’objet que d’une action budgétaire. La promotion et le développement de l’activité physique et sportive, dans le cadre du traitement de certaines maladies, mais aussi pour notre jeunesse, apparaissent pourtant évidents.

Cette mission apparaît comme une nouvelle opération de communication, dans la mesure où le Gouvernement renvoie le sport-santé à d’énièmes expérimentations, alors que l’on connaît tous ses effets positifs et que de nombreuses applications existent déjà : à Nice, à Strasbourg, à Dunkerque, à Ville-d’Avray, pour ne citer que ces villes.

Le temps n’est plus aux tâtonnements : nous avons besoin de décisions. Or le Gouvernement refuse d’en prendre.

En outre, nous avons des inquiétudes sur différents dispositifs.

L’objectif des deux millions de Pass’Sport sera-t-il atteint en 2023, quand seuls 650 000 jeunes en avaient bénéficié au mois d’octobre ?

Nous sommes aussi sceptiques sur la réelle application des trente minutes d’activité physique par jour à l’école. Sur ce point, l’éducation nationale à un rôle important à jouer pour que cette obligation soit effectivement mise en œuvre.

Enfin, l’organisation des conférences territoriales des financeurs, qui ont beaucoup de mal à fonctionner, nous laisse perplexes. Attention à ne pas démotiver une grande partie de ces acteurs.

Pour conclure, ce budget, qui, au premier coup d’œil, peut sembler satisfaisant, n’est pas à la hauteur de nos ambitions.

Non, le Président de la République ne peut pas décréter le sport « grande cause nationale » en 2024 et n’y consacrer que 0,3 % du budget de l’État. « Mettre le sport au cœur de la Nation », c’est définir un projet ambitieux qui mobilise l’ensemble des acteurs et des territoires et prévoir les moyens budgétaires permettant de réellement répondre à tous ces enjeux.

Aujourd’hui, comme notre rapporteur pour avis l’a rappelé, ces conditions ne sont pas réunies. Sachez cependant, madame la ministre, que nous avons la volonté de vous soutenir, si vous souhaitez, comme nous, travailler et porter les évolutions attendues par les différents acteurs du sport français. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Patrick Kanner applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Cédric Vial. (Mme Elsa Schalck applaudit.)

M. Cédric Vial. Monsieur le président, madame la ministre, mesdames les secrétaires d’État, mes chers collègues, je commencerai mon intervention, si vous me le permettez, madame la secrétaire d’État chargée de la jeunesse et du service national universel, en vous présentant mes excuses.

Je vous aime bien, mais ce que je m’apprête à vous dire ne va pas forcément vous être très agréable. (Mme la secrétaire dÉtat sourit.) Je vous aime bien parce que je crois en la sincérité de votre engagement en faveur de la jeunesse pour faire de cette dernière une chance pour notre Nation. Toutefois, si je reconnais que vous êtes une croyante sincère, je regrette que vous ne soyez pas une pratiquante !

Nous nous retrouvons pour étudier les crédits du programme « Jeunesse et vie associative », un programme en trompe-l’œil, comme le décrit dans son dernier rapport la Cour des comptes. Pourtant, les enjeux ne sont pas minces : la jeunesse, c’est l’avenir de notre pays, c’est notre avenir à tous.

Mener une politique en direction de la jeunesse, ce n’est pas forcément mener une politique en direction des jeunes : c’est mener une politique pour la France. Et cette jeunesse ne va pas bien : alors qu’elle a été particulièrement touchée par la covid-19, elle est aussi beaucoup plus exposée aux problématiques de notre société – la délinquance, la crise énergétique et sociale – et victime d’une perte de repères sans aucun précédent.

Qu’avons-nous donc à proposer à notre jeunesse ? Quelques dispositifs, mais, pour que ceux-ci forment une politique efficace, il vous manque deux choses, madame la secrétaire d’État : d’une part, une politique, d’autre part, des dispositifs qui soient efficaces.

Entrons dans le détail des principaux dispositifs que comporte ce programme.

Tout d’abord, le compte d’engagement citoyen ne marche pas, ne marche toujours pas, devrais-je dire. Vous en avez d’ailleurs tiré les conclusions en réduisant de 14 millions d’euros les crédits qui y sont affectés.

Le FDVA, ensuite, qui a remplacé la fameuse réserve parlementaire, outil à la disposition des élus, a été remplacé par un même outil, à la disposition de l’administration. Quelle drôle de conception !

Enfin, le service civique fait partie de ce programme. Je vous avais interrogée, madame la secrétaire d’État, lors de l’examen du PLF pour 2021, alors que vous affichiez l’ambition – importante – de passer de 145 000 à 245 000 jeunes en service civique. Je vous avais dit, à l’époque, que vous n’y arriveriez probablement pas, puisque vous souhaitiez obtenir en un an les résultats qui avaient initialement été obtenus en dix ans.

Je vous avais également indiqué que vous vous apprêtiez à infliger un placebo à la jeunesse. Vous m’aviez alors répondu, la main sur le cœur : « Moi, j’y crois, monsieur le sénateur, et on va y arriver. » Le résultat, madame la secrétaire d’État, c’est que sur les 100 000 services civiques supplémentaires qui étaient prévus, vous n’en avez réalisé aucun.

Pourtant, puisqu’il est ici question de données budgétaires, ce sont plus de 201 millions d’euros supplémentaires qui ont été versés, dans le cadre du plan de relance, à l’Agence du service civique, laquelle dispose aujourd’hui d’une trésorerie de plus de 288 millions d’euros ! Cet argent de l’État, bien mal géré, serait plus utile à d’autres usages. On peut même parler d’un tour de passe-passe budgétaire à la Gérard Majax, référence si chère à notre Président de la République.

J’en viens au service national universel. Si l’on se réfère aux objectifs qui avaient été définis lors de sa création, 2023 devrait être l’année de la généralisation, plus de 800 000 engagés étant attendus. Votre objectif est tout autre : 64 000, soit le double des 32 000 engagés que vous avez réussi à convaincre l’année dernière, alors que votre objectif n’était pourtant que de 50 000.

Là encore, c’est un tour de passe-passe budgétaire que vous nous faites, puisque, sans tenir compte des économies réalisées l’année dernière, vous promettez de budgéter les 64 000 nouveaux contrats. Ce sont donc 40 millions d’euros supplémentaires qui disparaissent.

Pis encore, on s’attend d’un moment à l’autre à la généralisation de ce dispositif, qui n’a pourtant pas fait ses preuves lors de son expérimentation. Il va probablement être intégré à la scolarité des élèves ou recyclé dans des parcours existants. Ce n’est plus du ressort de la prestidigitation, mais de la grande illusion ; ce n’est plus Gérard Majax, c’est David Copperfield ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)

Le Gouvernement propose 2 milliards d’euros d’aides fiscales supplémentaires à destination de la vie associative et de la jeunesse ; mais l’efficacité et l’efficience de ces aides et de ces niches fiscales n’ont fait l’objet d’aucune évaluation – la Cour des comptes le relève elle aussi.

Nous sommes décidément bien loin de ce que la Nation est en droit d’attendre de son gouvernement : qu’il fixe un cap, traduise une volonté et mène une véritable politique en faveur de la jeunesse et de la vie associative.

Nous nous abstiendrons donc sur l’ensemble de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Patrick Kanner applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre des sports.

Mme Amélie Oudéa-Castéra, ministre des sports et des jeux Olympiques et Paralympiques. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, avant tout, je vous remercie de ces interventions, qui démontrent votre soutien de long terme à la cause du sport dans notre pays.

Pour ma part, je tiens à rappeler les traits saillants du budget des sports, qui atteint un niveau inédit pour s’établir à 1,113 milliard d’euros.

Le programme 219, « Sport », confirme le soutien de l’État aux politiques publiques du sport en France. Comme l’a souligné M. Lozach, ses crédits progressent de 3 %. J’ajoute que ce programme monte en puissance à moyen terme : ses crédits ont augmenté de 50 % à périmètre constant depuis le début du quinquennat précédent.

Quant au programme 350, relatif aux jeux Olympiques et Paralympiques, il présente des moyens à la fois maîtrisés et conformes à nos engagements. Au total, il regroupe 295 millions d’euros de crédits, dont un peu plus de 60 millions d’euros sont destinés à compenser les effets de l’inflation pour la Solideo.

Enfin, les moyens humains de mon ministère et de ses opérateurs se trouvent renforcés.

La haute performance fait l’objet d’un effort particulier : je pense aux cinq emplois supplémentaires, mentionnés précédemment, dont va bénéficier l’Insep.

Les politiques prioritaires du ministère bénéficieront quant à elles de la stabilisation des effectifs de conseillers techniques sportifs (CTS) à 1 442 ETP et de l’attribution de vingt postes supplémentaires dans les services déconcentrés. Ainsi pourrons-nous être à la hauteur de nos responsabilités dans le champ régalien, qu’il s’agisse de lutter contre les violences sexuelles et sexistes ou de combattre la radicalisation dans le sport.

Je souligne la force du lien qui nous unit aux collectivités territoriales, à commencer par les communes, socle de notre modèle sportif. C’est tout le sens de notre soutien renouvelé au plan « 5 000 terrains de sport », lequel est doté d’une nouvelle enveloppe de 100 millions d’euros ; c’est tout le sens de notre soutien à la jeunesse via le Pass’Sport, pour une nouvelle tranche de 100 millions d’euros.

Nous avons également la volonté de mener, avec les collectivités territoriales, le combat de la rénovation thermique et énergétique des équipements, au travers du fonds vert et des tranches restantes du plan de rénovation thermique de ces équipements sportifs pour 2023.

Soyez-en assurés, l’État sera au rendez-vous de l’avenir.

Nous veillerons à la maîtrise des budgets des jeux Olympiques et Paralympiques dans le cadre de la révision qui doit être actée le 12 décembre prochain, lors du conseil d’administration de Paris 2024.

De même, nous ferons en sorte d’ancrer dans le long terme cet effort en faveur du sport, auquel je vous sais attachés. Il s’agit de lever l’ensemble des obstacles à la pratique sportive. À cet égard, les équipements structurants recevront un soutien particulier, à l’instar du sport universitaire, et nous confirmerons notre effort dans le champ régalien. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État, chargée de l’économie sociale et solidaire et de la vie associative.

Mme Marlène Schiappa, secrétaire dÉtat auprès de la Première ministre, chargée de léconomie sociale et solidaire et de la vie associative. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je vais m’efforcer d’être brève, mais je n’en suis pas moins heureuse d’être au Sénat cette après-midi pour débattre du volet « vie associative » de cette mission, aux côtés de mes deux collègues membres du Gouvernement.

Vous le savez, un Français sur trois est bénévole et, dans notre pays, 1,5 million d’associations s’engagent pour servir l’intérêt général. L’État se doit d’être à leurs côtés, pour les soutenir.

Les axes de ma feuille de route sont très clairs : Mme la Première ministre m’a demandé, premièrement, de simplifier et, deuxièmement, de valoriser la vie associative.

En matière de simplification, mon objectif est clair : cesser de noyer les bénévoles sous la paperasse – passez-moi l’expression. C’est pourquoi nous poursuivons le développement du Guid’Asso dans trois régions supplémentaires, en augmentant le budget y afférent de 1,3 million d’euros. Nous avons la volonté de généraliser cet outil à l’ensemble du territoire en 2024.

En parallèle, grâce aux projets Data Sub et à Data Asso, nous entendons faciliter la circulation des documents. À cette fin, nous doublons les crédits dédiés à ces dispositifs : ils sont en effet portés de 757 000 à 1,5 million d’euros.

J’en viens à la valorisation et au soutien au monde associatif.

Évidemment, vous connaissez toutes et tous le FDVA. Certains d’entre vous contribuent d’ailleurs à en définir les stratégies de soutien, en lien avec les préfets. Le montant de ce fonds est sensiblement le même que l’année dernière : il est de l’ordre de 50 millions d’euros.

S’y ajoute le compte d’engagement citoyen, dont certains d’entre vous ont souligné la baisse des crédits. Cette dernière s’explique par un non-recours assez important. Nous devons donc, collectivement, en accroître la notoriété.

Ce dispositif s’inscrit dans la stratégie du Gouvernement. Je rappelle qu’il permet à un bénévole de valoriser son engagement à hauteur de 240 euros par an sur son compte personnel de formation (CPF), s’il justifie de 200 heures annuelles d’action associative.

Enfin, pour ce qui concerne le tour de France des bénévoles et le contrat d’engagement républicain, j’aurai l’occasion de m’exprimer en donnant l’avis du Gouvernement sur certains amendements et je suis, bien sûr, à votre disposition. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de la jeunesse et du service national universel.

Mme Sarah El Haïry, secrétaire dÉtat auprès du ministre des armées et du ministre de léducation nationale et de la jeunesse, chargée de la jeunesse et du service national universel. Autonomie, cohésion, service civique, sport, mixité, patriotisme, cérémonies mémorielles, rencontres, laïcité, valeurs de la République, mobilité, éducation populaire, engagement, bénévolat : quel est le point commun entre toutes ces politiques, entre toutes ces formes d’engagement ?

Léo-Lagrange, la Ligue de l’enseignement, les pupilles de l’enseignement public (PEP), les Francas, les cadets de nos gendarmeries, les jeunes sapeurs-pompiers, les membres de nos conseils municipaux jeunes, les membres de nos associations, les jeunes du Souvenir français, les élus et les membres des services de l’État, notamment des délégations régionales académiques à la jeunesse, à l’engagement et aux sports (Drajes) : tels sont, au quotidien, les partenaires et les acteurs du SNU.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je comprends les questions qui sont posées, mais aussi les inquiétudes et les doutes qui s’expriment. Mais, ce matin encore, j’ai rencontré de jeunes volontaires, qui, loin du portrait qu’en fait M. Dossus, sont de réelles graines de citoyens.

Le service national universel ne prétend pas répondre à l’ensemble des maux de notre société.

M. Michel Savin. Il faut le supprimer !

Mme Sarah El Haïry, secrétaire dÉtat. Il n’en constitue pas moins un temps fort, qui doit s’inscrire dans un continuum, dans un parcours qui commence à l’école, dans les associations sportives de nos territoires ou encore lors des cérémonies mémorielles de nos communes, au pied de nos monuments aux morts.

Ce continuum d’engagement, c’est le gage de la complémentarité éducative que vous appelez de vos vœux. C’est aussi un gage de mixité sociale et territoriale. À quel autre moment des jeunes de Montauban, d’Aurillac, de Guéret et de Nantes ont-ils l’occasion de se rencontrer et de faire des choses ensemble ?

Le service national universel est une chance. Pour autant, est-ce l’alpha et l’oméga de notre politique en faveur de la jeunesse ? Évidemment non : ce dispositif s’inscrit dans un parcours.

À l’heure où tant de dangers nous menacent, où la guerre fait rage en Ukraine, où les défis climatiques s’accumulent, une fracture se fait jour entre les jeunesses au sein même de notre société. Alors, faisons en sorte que les jeunes se rencontrent ; qu’ils soient fiers de hisser un même drapeau ; qu’ils aient confiance en l’avenir, bien loin des caricatures que l’on a pu faire du service national universel.

Sur ce sujet, le débat est-il nécessaire ? Bien sûr. Je serai évidemment à la disposition de vos commissions pour aborder plus en détail le service national universel, son projet pédagogique et ses différents acteurs, dont il faut relayer les témoignages.

N’opposons pas les dispositifs. Le secteur de l’animation connaît une crise d’une ampleur inédite et nous devons créer de nouvelles vocations.

Aujourd’hui, si le Bafa traverse une crise, c’est parce que, malheureusement, l’éducation populaire elle-même est en crise ; mais nous sommes au rendez-vous.

Les parents font de nouveau confiance aux colonies de vacances : soyons à leurs côtés. Continuons de renforcer le plan Mercredi, de développer les vacances apprenantes et les colos apprenantes.

C’est précisément ce que nous faisons : nous n’avons jamais déshabillé Paul pour habiller Pierre. Chacun des budgets dont il s’agit est en augmentation. Ainsi, 30 millions d’euros sont mobilisés pour le service national universel et 20 millions d’euros pour le service civique. Le fonds de coopération de la jeunesse et de l’éducation populaire (Fonjep) est renforcé, de même que les dispositifs d’animation, grâce à des réformes d’ampleur.

Parmi les sujets qui font débat figure le contrat d’engagement jeune (CEJ), qu’il faut effectivement revoir en profondeur : sa version actuelle ne permet pas un déploiement plus massif. Or, le 13 juillet dernier, le Président de la République m’a demandé de préparer la généralisation de ce contrat. Ce travail suppose bien sûr un débat devant la représentation nationale. Avant tout, il faut en effet dresser un état des lieux concret.

Nous avons expérimenté beaucoup de choses à cet égard. En 2019, ce contrat concernait 2 000 jeunes. Comme vous le savez, l’année 2020 n’est pas représentative, compte tenu de la situation sanitaire d’alors. Le nombre de CEJ a été porté à 15 000 en 2021 et à 32 000 en 2022. En 2023, il doit atteindre 64 000.

D’une certaine manière – je le concède –, nous avons revu à la baisse le volet quantitatif de ce dispositif, pour éviter toute course à l’échalote. Mais la réponse pédagogique qualitative est bien là : pour vous en convaincre, je vous invite à rencontrer ces jeunes volontaires, qui font la fierté de notre Nation.

Nous devrons continuer à construire le continuum pédagogique que j’évoquais précédemment. À cette fin, nous devrons travailler avec l’école, notamment en lien avec le programme d’éducation civique et morale, pour créer un parcours de citoyenneté et de civisme. Tel est le chemin de cette jeunesse engagée.

Mesdames, messieurs les sénateurs, vos questions sont légitimes. Le temps me manque pour les traiter plus longuement à cette tribune, mais je suis à votre disposition pour les aborder plus en détail. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

sport, jeunesse et vie associative

Deuxième partie
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Rappel au règlement

M. le président. Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative », figurant à l’état B.

Je vous rappelle que pour cette mission, la conférence des présidents a fixé la durée maximale de la discussion à deux heures quinze.

En conséquence, si nous n’avions pas terminé l’examen de cette mission à dix-sept heures cinquante, celui-ci se poursuivrait à la fin de l’examen des missions de cette semaine ou la semaine prochaine, et nous passerions à l’examen de la mission « Justice ».

ÉTAT B

(En euros)

Mission / Programme

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

Sport, jeunesse et vie associative

1 519 055 860

1 832 192 986

Sport

600 625 019

700 262 145

 Dont titre 2

128 049 392

128 049 392

Jeunesse et vie associative

837 070 841

837 070 841

 Dont titre 2

35 952 981

35 952 981

Jeux olympiques et paralympiques 2024

81 360 000

294 860 000

M. le président. Je suis saisi de huit amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° II-261, présenté par MM. Dossus, Breuiller, Parigi, Gontard, Benarroche, Dantec, Fernique et Labbé, Mmes de Marco et Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :

I. – Créer le programme :

Fonds de soutien à l’éducation populaire

II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Sport

dont titre 2

 

 

 

 

Jeunesse et vie associative

dont titre 2

 

140 047 188

 

140 047 188

Jeux olympiques et paralympiques 2024

 

 

 

 

Fonds de soutien à l’éducation populaire

140 047 188

 

140 047 188

 

TOTAL

140 047 188

140 047 188

140 047 188

140 047 188

SOLDE

0

0

La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Nous le savons tous : la généralisation du SNU n’aura pas lieu : alors, finissons-en tout de suite, pour gagner du temps et faire des économies !

Preuve d’une nostalgie du service militaire, le SNU impose à la jeunesse une vision passéiste et autoritaire de l’engagement, en rupture avec les aspirations et les enjeux de notre époque. Nous en avons aujourd’hui la preuve flagrante, car la jeunesse ne vient pas au SNU.

Madame la secrétaire d’État, alors que vous n’avez pas réussi à atteindre vos objectifs, que vous n’avez pas atteint les 50 000 contrats cette année, vous augmentez pourtant la capacité d’accueil à 64 000. J’y insiste, les jeunes ne viennent pas. Ils n’approuvent pas la vision de l’engagement que traduit le SNU. Que peuvent-ils bien en tirer, hormis un moment de vie commune qu’ils pourraient concevoir autrement ?

Notre pays a déjà un meilleur programme, riche de sens, source de mobilisation et d’émancipation : celui de l’éducation populaire, qui permet aux jeunes adultes d’interroger le monde dans lequel ils vivent, de combattre les liens de domination, de fabriquer une culture politique commune et d’en être les acteurs, en un mot de faire société en s’émancipant.

Aussi, je vous propose de transférer les crédits du SNU à l’éducation populaire : nous en finirons avec ce dispositif et, ainsi, nous gagnerons du temps.

M. le président. L’amendement n° II-316, présenté par M. Bacchi, Mme Brulin, M. Ouzoulias et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Sport

dont titre 2

140 047 188

140 047 188

Jeunesse et vie associative

dont titre 2

140 047 188

140 047 188

Jeux olympiques et paralympiques 2024

TOTAL

140 047 188

140 047 188

140 047 188

140 047 188

SOLDE

0

0

La parole est à M. Pierre Ouzoulias.

M. Pierre Ouzoulias. Il faut se rendre à l’évidence : le SNU a été expérimenté, il ne fonctionne pas : il faut l’arrêter.

Madame la secrétaire d’État, eu égard à votre enthousiasme, j’ai cherché un moyen de vous le dire de manière plaisante et j’ai trouvé deux citations des Shadoks. La première, c’est : « Plus ça rate et plus on a de chances que ça marche. » La seconde, c’est : « Il est préférable de pomper d’arrache-pied, même s’il ne se passe rien, que de risquer qu’il se passe quelque chose de pire en ne pompant pas. » (Mme la secrétaire dÉtat chargée de la jeunesse et du service national universel rit.) Avec ce dispositif, nous sommes tous en train de pomper !

Ce qui est malheureux, c’est que, dans le cadre du continuum pédagogique, vous ne travailliez pas avec les collectivités territoriales, alors que ces dernières exercent des missions considérables dans ce domaine.

Vous avez mis en œuvre un système très centralisé, très national, un peu comme pour le pass Culture, qui ne prend pas suffisamment en compte ce que les collectivités territoriales font sur le terrain : il faudrait revoir ce système pour mieux y inclure leurs différentes initiatives.

M. le président. L’amendement n° II-263, présenté par MM. Dossus, Breuiller, Parigi, Gontard, Benarroche, Dantec, Fernique et Labbé, Mmes de Marco et Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :

I. – Créer le programme :

Fonds d’investissement pour la sobriété énergétique des bâtiments sportifs

II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Sport

dont titre 2

 

 

 

 

Jeunesse et vie associative

dont titre 2

 

100 000 000

 

100 000 000

Jeux olympiques et paralympiques 2024

 

 

 

 

Fonds d’investissement pour la sobriété énergétique des bâtiments sportifs

100 000 000

 

100 000 000

 

TOTAL

100 000 000

100 000 000

100 000 000

100 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Le sport, comme toutes les activités humaines, a sa part de responsabilité dans le réchauffement climatique, surtout quand on considère les consommations énergétiques ; et il sera durement frappé par ce phénomène.

La plupart de nos gymnases, de nos salles de sport et de nos dojos ont été construits au siècle passé, à une époque où l’on bâtissait vite, mais aussi – il faut le dire – assez mal.

Ces équipements sportifs sont très souvent de véritables passoires énergétiques, qui font exploser la consommation d’électricité et de chauffage, donc les factures. Ils ne répondent plus aux enjeux de notre époque : comme les logements, ils exigent un effort massif de rénovation.

De cet effort, nous ne voyons, hélas ! pas l’esquisse dans ce budget. Si quelques crédits de l’ANS sont bien fléchés vers la rénovation d’installations, de manière très marginale, la situation des centaines et milliers de gymnases et de salles de nos communes, qui eux aussi auraient besoin d’une sérieuse rénovation, n’est évoquée nulle part.

Dès lors, par cet amendement, nous proposons de créer un fonds dédié doté de 100 millions d’euros pour investir massivement dans la rénovation, mobiliser l’appareil d’État et provoquer un effet de levier auprès des filières et des entreprises pour mener à bien ce projet.

Madame la ministre, 100 millions d’euros, c’est le montant réclamé par l’Association nationale des élus en charge du sport (Andes). Une telle somme ne sera peut-être pas suffisante. En rappelant cet ordre de grandeur, notre amendement tend, à tout le moins, à sensibiliser le Gouvernement.

Tels sont les moyens nécessaires à la remise en état du bâti. Il est temps de sortir d’une logique de saupoudrage et d’enclencher réellement les réformes dont le sport a besoin.

M. le président. L’amendement n° II-344, présenté par M. Lozach, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Sport

dont titre 2

70 400 000

 

70 400 000

 

Jeunesse et vie associative

dont titre 2

 

70 400 000

 

70 400 000

Jeux olympiques et paralympiques 2024

 

 

 

 

TOTAL

70 400 000

70 400 000

70 400 000

70 400 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Jean-Jacques Lozach.

M. Jean-Jacques Lozach. Cet amendement vise à déplafonner le prélèvement sur les paris sportifs en ligne.

Je rappelle que les deux tiers du produit des trois taxes affectées aux sports échappent, dans les faits, au sport.

Par cet amendement comme par le suivant, nous interrogeons la structure même du budget du ministère des sports, constitué à la fois de crédits budgétaires et de crédits extrabudgétaires.

On imagine mal que le budget de la défense dépende totalement d’un prélèvement sur le loto ou sur des paris en ligne… Certes, le ministère des sports n’est pas dans cette situation ; mais, selon nous, pour financer ses politiques publiques, mieux vaudrait qu’il reçoive uniquement des crédits budgétaires bien identifiés et qu’il ne dépende pas de taxes aléatoires.

Cela étant, nous devons bien partir de l’existant ; et l’existant, ce sont ces trois taxes affectées.

On assiste en particulier à l’explosion des mises sur les paris sportifs en ligne.

Je rappelle que ces paris n’existeraient pas sans le sport, qui lui-même n’existerait pas sans les clubs, les associations et les bénévoles qui les animent.

Si nous proposons d’augmenter ces crédits de 70 millions d’euros, c’est tout simplement parce qu’il s’agit là du différentiel entre le rendement attendu pour 2023 et la recette perçue en 2022.

M. le président. L’amendement n° II-321, présenté par M. Lozach, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Sport

dont titre 2

14 400 000

 

14 400 000

 

Jeunesse et vie associative

dont titre 2

 

14 400 000

 

14 400 000

Jeux olympiques et paralympiques 2024

 

 

 

 

TOTAL

14 400 000

14 400 000

14 400 000

14 400 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Jean-Jacques Lozach.

M. Jean-Jacques Lozach. Cet amendement a pour objet non pas la taxe sur les paris sportifs en ligne, mais la taxe Buffet, c’est-à-dire le prélèvement sur les droits de retransmission télévisée.

Bien entendu, nous regrettons la diminution de la recette attendue de cette taxe, d’autant qu’elle symbolise en quelque sorte la solidarité entre le sport amateur et le sport professionnel. On le sait, cette baisse est le résultat de la fameuse affaire Mediapro, qui s’est ajoutée à la crise sanitaire et à la suppression d’un ensemble de rencontres sportives.

Madame la ministre, j’ai bien noté la compensation proposée par l’État : à cet égard, mon amendement est avant tout d’un amendement d’appel. En effet, nous attendons quelques précisions quant à l’origine et à la destination de cette enveloppe de 14 millions d’euros.

M. le président. L’amendement n° II-264, présenté par MM. Dossus, Breuiller, Parigi, Gontard, Benarroche, Dantec, Fernique et Labbé, Mmes de Marco et Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Sport

dont titre 2

2 200 000 

 

2 200 000 

 

Jeunesse et vie associative

dont titre 2

 

2 200 000 

 

2 200 000 

Jeux olympiques et paralympiques 2024

 

 

 

 

TOTAL

2 200 000 

2 200 000 

2 200 000 

2 200 000 

SOLDE

0

0

La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Le sport n’est pas plus épargné que les autres domaines de la société par le fléau des violences sexistes et sexuelles. Plusieurs affaires particulièrement graves ont ainsi défrayé la chronique ces derniers mois et ces dernières années, jetant une lumière crue sur des pratiques inacceptables, qui doivent être éradiquées du monde du sport.

De manière plus inquiétante encore, une enquête menée en Seine-Saint-Denis par l’Observatoire départemental des violences envers les femmes et publiée en mars 2022 révélait qu’en moyenne quatre encadrants de clubs de sport sur dix avaient constaté des violences. En outre, 51,4 % des personnes ayant répondu à l’enquête menée disaient ne pas se sentir suffisamment outillées pour orienter les victimes.

La réponse du Gouvernement s’est révélée – disons-le – assez légère, puisqu’il s’est contenté de publier un guide de bonnes pratiques sur internet. Au-delà d’un tel document, ce qu’il faut, c’est de la formation et un véritable budget dédié. Il faut également créer des cellules d’écoute et d’accompagnement, auprès des clubs ou des fédérations, afin que ces pratiques se diffusent dans le milieu sportif et que les victimes soient correctement accompagnées.

Nous proposons ainsi de doubler le budget dédié à la lutte contre les violences sexistes et sexuelles dans le programme de prévention et de protection du ministère. Les bonnes intentions ne suffisent pas : elles doivent se traduire en une réelle politique.

M. le président. L’amendement n° II-262, présenté par MM. Dossus, Breuiller, Parigi, Gontard, Benarroche, Dantec, Fernique et Labbé, Mmes de Marco et Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :

I. – Créer le programme :

Observatoire national de l’adaptation du sport au changement climatique

II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Sport

dont titre 2

 

 

 

 

Jeunesse et vie associative

dont titre 2

 

2 000 000

 

2 000 000

Jeux olympiques et paralympiques 2024

 

 

 

 

Observatoire national de l’adaptation du sport au changement climatique

2 000 000

 

2 000 000

 

TOTAL

2 000 000

2 000 000

2 000 000

2 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. En juillet 2021, le WWF publiait, avec le soutien du ministère des sports, un rapport majeur sur les menaces que le réchauffement climatique fait peser sur les pratiques sportives.

Dans un scénario de réchauffement de l’ordre de 2 degrés, les sportifs pourraient perdre jusqu’à deux mois de pratique : ils seraient privés de vingt-quatre jours de sport en raison de la hausse des températures.

Ce rapport mentionne aussi l’impact évident du réchauffement sur les pratiques nautiques côtières, du fait de la montée des eaux, et sur l’activité des stations de ski, dont l’enneigement n’aura plus rien d’évident.

Il nous invite à réfléchir à la saisonnalité des compétitions sportives. En effet, on ne pratique pas un sport collectif en extérieur de la même manière quand il fait 25 ou 40 degrés.

Au vu des trajectoires d’émissions de gaz à effet de serre et face à l’inaction climatique collective, notamment gouvernementale, ce scénario risque de devenir une triste réalité.

Il faut évidemment lutter contre les causes de ce réchauffement, en réduisant nos émissions et en accélérant la rénovation énergétique ; mais nous devons aussi nous préparer à affronter ses effets.

C’est précisément l’objet de cet amendement : nous proposons la création d’un observatoire de l’adaptation du sport au changement climatique afin que le Gouvernement et les autorités sportives disposent d’une instance d’expertise, d’étude et de recommandation pour la pratique sportive du futur.

M. le président. L’amendement n° II-315, présenté par MM. Bacchi et Ouzoulias, Mme Brulin et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Sport

dont titre 2

1 500 000

1 500 000

Jeunesse et vie associative

dont titre 2

1 500 000

1 500 000

Jeux olympiques et paralympiques 2024

TOTAL

1 500 000

1 500 000

1 500 000

1 500 000

SOLDE

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La parole est à M. Pierre Ouzoulias.

M. Pierre Ouzoulias. Par cet amendement, nous proposons de doubler les crédits supplémentaires accordés à l’Agence française de lutte contre le dopage. Nous souhaitons, ce faisant, appeler l’attention du Sénat sur le problème du dopage dans le sport amateur.

Dans le sport professionnel, ce fléau est aujourd’hui bien connu. En revanche, dans le sport amateur, la culture du dopage reste mal cernée ; or elle est catastrophique, non seulement en termes éthiques, mais surtout en termes de santé. Les jeunes, très tôt, prennent l’habitude de consommer des produits dopants et, par la suite, cette addiction ne les lâche plus.

Voilà pourquoi nous souhaitons des initiatives fortes pour lutter contre le dopage dans le sport amateur.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Éric Jeansannetas, rapporteur spécial. L’amendement n° II-261 tend à transférer l’intégralité du budget du SNU à un fonds de soutien à l’éducation populaire. Quant à l’amendement n° II-316, il vise, dans le même esprit, à supprimer les crédits du SNU.

Le service national universel présente des défauts indéniables et il sera sans doute difficile de le généraliser à l’ensemble d’une classe d’âge. Toutefois, couper l’intégralité des crédits qui lui sont dévolus me semble une solution extrême.

Monsieur Dossus, je l’ai dit lors de mon intervention à la tribune : je mène, au nom de la commission des finances, une mission de contrôle budgétaire relative au service national universel. Je ne sais pas si mes propos sont à même de vous rassurer ; mais, à ce titre, j’ai accompli un certain nombre de déplacements et je n’ai pas observé les situations que vous décrivez.

Dans ce cadre, il faut saluer le fort engagement des acteurs de l’éducation populaire, de l’éducation nationale et des corps en uniforme.

Bien sûr, je n’ai pas la prétention de détenir la vérité à moi seul, mais j’ai aussi cru percevoir, chez ces jeunes gens, un sens aigu de l’engagement.

Pour ce qui concerne les missions d’intérêt général, bien des questions demeurent quant à l’accueil. (Mme la secrétaire dÉtat chargée de la jeunesse et du service national universel le concède.) Toutefois, ces questions sont d’ores et déjà soulevées et – Mme la secrétaire d’État l’a elle-même indiqué – nous aurons à en débattre avant de nous prononcer sur ce sujet.

Pour l’ensemble de ces raisons, je sollicite le retrait de ces deux amendements.

L’amendement n° II-263 vise à accélérer la rénovation énergétique des bâtiments sportifs. J’approuve cet objectif, mais une telle ouverture de crédits trouverait davantage sa place dans la mission « Écologie, développement et mobilités durables », ou encore dans la mission « Cohésion des territoires ». C’est pourquoi je demande le retrait de cet amendement.

Monsieur Lozach, j’en viens à vos deux amendements d’appel – à mon sens, c’est bien de cela qu’il s’agit.

L’amendement n° II-344 vise à déplafonner les taxes affectées à l’Agence nationale du sport. Nous en avons déjà débattu hier, lors de l’examen de l’article 15, et cette mesure a été rejetée. Je demande donc le retrait de cet amendement.

Quant à l’amendement n° II-321, il a pour objet les 14,4 millions d’euros de la taxe Buffet ; mais, comme vous l’avez indiqué, la compensation est déjà assurée par le projet de loi de finances. Dès lors, cet amendement n’a pas réellement d’objet et je vous prie de bien vouloir le retirer également.

L’amendement n° II-264 vise à augmenter les moyens consacrés à la lutte contre les violences sexistes et sexuelles. Il s’agit plus précisément d’abonder de 2,2 millions d’euros les crédits consacrés à la lutte contre les incivilités et la violence dans le sport. À mon sens, les besoins en formation et en prévention justifient ces crédits supplémentaires : en conséquence, je m’en remets à la sagesse du Sénat sur cet amendement.

L’amendement n° II-262 tend à créer un observatoire de l’adaptation du sport au changement climatique. J’en approuve l’objectif : il faut bel et bien renforcer les exigences environnementales, qu’il s’agisse de la pratique du sport ou de l’organisation des compétitions sportives. Toutefois, une telle instance ne me semble pas être le bon vecteur. Nous risquons en effet de créer une structure supplémentaire, dont les compétences et les pouvoirs seraient mal définis. Il est avant tout nécessaire de mieux cibler l’action publique pour mener à bien la transition écologique. Je demande donc le retrait de cet amendement.

Enfin, l’amendement n° II-315 tend à augmenter les crédits de l’Agence française de lutte contre le dopage.

Monsieur Ouzoulias, la Coupe du monde de rugby, comme les jeux Olympiques et Paralympiques de 2024, implique effectivement de renforcer les moyens du contrôle antidopage. Toutefois, l’AFLD connaît déjà une augmentation continue de sa subvention depuis 2020 et le projet de loi de finances pour 2023 lui accorde une nouvelle hausse de crédits : pour l’heure, ces fonds me semblent suffisants.

Il sera surtout nécessaire de s’assurer que le déménagement du laboratoire au sein du campus Paris-Saclay, qui a pris du retard et devrait s’achever au début de l’année prochaine, se déroule dans les meilleures conditions.

En conséquence, je sollicite le retrait de cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements nos II-261 et II-316 ?

Mme Sarah El Haïry, secrétaire dÉtat. M. le rapporteur spécial vient de s’exprimer avec sagesse sur ces deux amendements.

Comme le dirait une personne qui me tient à cœur, « là où il y a une volonté, il y a un chemin ». En la matière, nos ambitions pour l’année écoulée étaient effectivement plus fortes, mais nous avons tout de même fait une partie du chemin.

Monsieur Ouzoulias, j’entends que nous devons agir en lien plus étroit avec les collectivités territoriales. Ce travail est absolument nécessaire ; c’est précisément pourquoi nous nous appuyons, entre autres, sur le comité de filière Animation, où l’ensemble des associations d’élus locaux sont représentées. Surtout, nous avons la volonté de soutenir les engagements de chaque territoire.

Nous en sommes aujourd’hui au stade du momentum, de l’état des lieux factuel et le débat parlementaire est, lui aussi, absolument nécessaire. J’y insiste, nous arrivons à un moment particulier dans le déploiement du service national universel.

Je suis donc défavorable aux amendements nos II-261 et II-316.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur les six amendements suivants ?

Mme Amélie Oudéa-Castéra, ministre. L’amendement n° II-263 vise à minorer de 100 millions d’euros les fonds du service national universel pour attribuer ce montant à un nouveau programme intitulé « Fonds d’investissement pour la sobriété énergétique des bâtiments sportifs ».

Il s’agirait d’encourager la planification écologique dans le sport tout en prolongeant les efforts déployés par l’Agence nationale du sport et par le Gouvernement, dans le cadre du plan de relance, pour la rénovation énergétique des bâtiments et équipements sportifs.

Nous avons placé ce sujet au cœur du plan de sobriété énergétique du sport, que j’ai présenté à l’ensemble des acteurs le 13 octobre dernier.

Les équipements sportifs peuvent prétendre aujourd’hui au dispositif de rénovation mis en œuvre, d’une part, par l’ANS, et, d’autre part, par l’État, au titre de la dotation de soutien à l’investissement local.

Ce type de dispositifs sera renforcé dès 2023 par la mise en place du fonds vert, qui vise à atteindre la performance énergétique. Cela m’a été confirmé, les équipements sportifs sont pleinement éligibles à ce fonds, qui est placé sous la responsabilité des préfets, lesquels sont également, je le rappelle, les délégués territoriaux de l’Agence nationale du sport.

Je rends donc un avis défavorable sur cet amendement, dans la mesure où le fonds vert, annoncé par le Gouvernement, répondra à l’objectif que vous visez légitimement.

Mesdames, messieurs les sénateurs, l’amendement n° II-344 tend à solliciter le transfert d’une fraction du service national universel vers l’action n° 01, Promotion du sport pour le plus grand nombre, du programme 219, « Sport », à hauteur de 70 millions d’euros, en s’appuyant sur le relèvement du plafond du prélèvement sur les paris sportifs en ligne.

Ainsi que nous venons de le rappeler, le Gouvernement est très fortement attaché au financement du SNU, afin de garantir la poursuite de son déploiement et la réussite de ce projet auprès de tous les jeunes Français de 15 à 17 ans.

En outre, le présent amendement a perdu une grande part de son objet, dans la mesure où l’examen d’éventuels relèvements de plafonds de prélèvements a déjà été effectué précédemment, au sein de cet hémicycle, et a été rejeté.

Enfin, je voudrais insister sur le fait que l’action n° 01, Promotion du sport pour le plus grand nombre, au sein du programme 219, « Sport », paraît déjà suffisamment dotée et, à ce jour, ne nécessite pas de nouvelles ressources.

J’émets donc un avis défavorable sur cet amendement.

S’agissant de l’amendement n° II-361, monsieur le sénateur, vous proposez de transférer quelque 14 millions d’euros alloués au SNU, afin de compenser une perte de ressources de l’Agence nationale du sport due à la baisse du rendement de la taxe Buffet. Celle-ci est étroitement liée, ainsi que l’a rappelé le sénateur Lozach, à la défaillance entre 2020 et 2021 de la société Mediapro.

Aussi, il a fallu, en 2021, compenser en gestion à l’aide des crédits de ma mission, afin de maintenir les ressources de l’Agence nationale du sport et les financements du sport pour tous. Cela a été possible grâce aux marges restées disponibles à la suite de l’exécution du Pass’Sport. En 2022, le rendement de la taxe sera affecté de la même façon, et une compensation du même type en gestion est également prévue.

Dans le cadre de notre PLF pour 2023, nous avons souhaité, au contraire, sécuriser les ressources de l’Agence nationale du sport, afin de ne pas courir de nouveau le risque de manquer de marges de manœuvre suffisantes en gestion pour compenser une éventuelle baisse de rendement. À cet effet, une diminution du plafond d’affectation de la taxe a été introduite, pour le ramener au niveau de son juste rendement prévisionnel.

Cette réduction du plafond de 14,4 millions d’euros est intégralement compensée par de nouveaux crédits dans le programme 119, qui ne sont donc pas prélevés sur les politiques publiques que je porte. Ainsi, les ressources de l’ANS sont pleinement préservées.

De plus, le plafond de la taxe ayant été fixé au niveau de son rendement prévisionnel, le principe de solidarité entre le sport professionnel et le sport amateur, rendu effectif par la taxe affectée est pleinement assuré. Nous sommes nous aussi particulièrement attachés à ce principe, et nous continuerons à y être attentifs à l’avenir.

Monsieur le sénateur Lozach, dans ces conditions, votre amendement me semble déjà satisfait, et je vous propose donc de le retirer.

Monsieur le sénateur Dossus, en cette Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes, je ne puis que partager avec vous le constat selon lequel les violences à caractère sexiste et sexuel demeurent des fléaux dans notre société, y compris malheureusement dans le milieu sportif.

Soyez toutefois assuré que, pour mieux prévenir et lutter contre ce phénomène de violence, nous avons véritablement engagé, depuis de nombreux mois, des actions fortes, en ce qui concerne la formation des acteurs du secteur notamment.

Ainsi, la loi du 2 mars 2022 visant à démocratiser le sport en France a rendu obligatoire l’enseignement de la prévention et de la lutte contre toutes les formes de violence et de discrimination dans les programmes de formation des professionnels des activités physiques et sportives.

Sur le plan réglementaire également, nous allons très prochainement faire évoluer les textes régissant la préparation au métier d’éducateur sportif, afin d’obliger les organismes de formation à intégrer, lors de leur demande d’habilitation, des actes de prévention de ces violences sexistes et sexuelles.

De plus, des engagements forts en matière de lutte contre ces violences ont également été demandés aux fédérations sportives dans le cadre des contrats de délégation ; leur respect sera assuré par la conduite d’un dialogue exigeant et régulier avec celles-ci.

Pour assurer la mise en œuvre des actions de formation, des financements sont accessibles aux fédérations via l’Agence nationale du sport et au titre des projets sportifs fédéraux, ainsi que des projets sportifs territoriaux et des contrats de développement à l’échelon national.

Par ailleurs, le ministère assure le subventionnement de plusieurs associations pour des formations et des actions de sensibilisation sur cet enjeu majeur, au bénéfice des établissements sous notre tutelle principalement.

Je n’hésiterai pas à prendre toutes les mesures qui s’imposent à l’encontre des fédérations qui ne respecteraient pas ce cadre d’action essentiel pour garantir l’intégrité du sport français. En effet, je suis avec une attention toute particulière ce sujet, notamment au travers de la montée en puissance des signalements sur la plateforme « signal-sports », qui a été mise en place par les services d’administration centrale et déconcentrée et dont les moyens sont en train d’être fortement accrus.

Enfin, pour renforcer la lutte contre les violences à caractère sexiste et sexuel, nous augmentons les moyens qui lui sont dédiés, comme je l’ai rappelé en préambule. En effet, vingt effectifs supplémentaires seront pleinement engagés d’ici à janvier 2023 dans la réalisation des enquêtes administratives et dans leur bonne articulation avec les enjeux judiciaires et disciplinaires de ce problème.

Monsieur le sénateur, pour toutes ces raisons, et forte de cette extrême mobilisation de l’ensemble de mes services, j’estime que l’augmentation que vous proposez n’est pas aujourd’hui nécessaire. Mon avis est donc défavorable sur l’amendement n° II-264.

Les auteurs de l’amendement n° II-262 proposent de mettre en place un observatoire national de l’adaptation du sport au changement climatique, dont la rédaction s’inspire des préconisations du rapport de l’association WWF sur le dérèglement climatique.

Je tiens à souligner que la transition écologique est une priorité de tout premier plan pour mon ministère. L’adaptation de la pratique sportive au changement climatique est l’un des principaux axes structurant ma feuille de route aujourd’hui. Elle fait l’objet d’une concertation approfondie, qui a déjà été engagée avec l’ensemble des acteurs du sport, à l’occasion du lancement du plan de sobriété, auquel j’ai fait allusion précédemment, le 13 octobre dernier. (Marques dimpatience sur diverses travées.)

J’ai pu adjoindre deux volets tout à fait importants à ce plan : le déploiement accéléré de la charte des 15 engagements écoresponsables, d’une part ; l’élaboration, en lien avec le ministère de Christophe Béchu, d’un plan d’adaptation de la pratique sportive au réchauffement climatique, d’autre part. C’est la raison pour laquelle cette proposition de création d’un observatoire doit être examinée dans le cadre des travaux du groupe de travail que j’ai pu lancer et qui rendra ses conclusions en mai 2023.

M. le président. Madame la ministre, je vous rappelle que l’examen de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » doit s’achever à dix-sept heures cinquante.

Pourriez-vous être plus concise dans vos avis, afin que nous puissions procéder au débat sur les amendements ?

Mme Amélie Oudéa-Castéra, ministre. J’émets donc un avis défavorable sur cet amendement, mais je m’engage à ce que cette proposition soit examinée par ce groupe de travail.

En ce qui concerne l’amendement n° II-315, qui a pour objet les moyens consacrés à l’Agence française de lutte contre le dopage, je rappellerai la hausse de 37 %, ces quatre dernières années,… (Nouvelles marques dimpatience sur diverses travées.)

Mme Laurence Rossignol. Lâchez vos fiches, madame la ministre !

Mme Amélie Oudéa-Castéra, ministre. … des crédits de cet organisme, mais également l’effort supplémentaire que nous réaliserons en 2023 pour augmenter son budget à hauteur de 10 millions d’euros.

À cet égard, nous pourrons développer 12 000 contrôles par an. En matière de prévention du dopage…

M. le président. Madame la ministre, en répondant trop longuement, vous réduisez le temps de parole des parlementaires, et c’est inadmissible.

Pourriez-vous nous donner l’avis du Gouvernement sur cet amendement ?

Mme Amélie Oudéa-Castéra, ministre. Il est défavorable.

Mme Laurence Rossignol. Quelle surprise !

Mme Amélie Oudéa-Castéra, ministre. En raison de la progression de ces crédits…

M. le président. Merci, madame la ministre.

Rappel au règlement

La parole est à M. Patrick Kanner, pour un rappel au règlement.

État B
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Justice

M. Patrick Kanner. Avec tout le respect que je porte aux membres du Gouvernement ici présents, je veux rappeler que nous examinons les textes dans un temps contraint. Il faut y veiller.

Il faut surtout faire en sorte que nous puissions expliquer nos positions de vote sur les amendements proposés. De grâce, soyons solidaires entre membres du Gouvernement et du Parlement !

Au Sénat, notre ambiance de travail est sereine. Madame la ministre, je vous remercie de la respecter. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et UC, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. Michel Canévet. Très bien !

M. le président. Acte vous est donné de votre rappel au règlement, mon cher collègue.

La parole est à M. Michel Savin, pour explication de vote.

M. Michel Savin. Mon intervention portera sur l’ensemble des amendements relatifs au programme « Sport ». Et rassurez-vous, je serai bref !

L’Agence nationale du sport, chargée du financement et du soutien au sport d’élite et de proximité, est essentiellement financée par trois taxes affectées : la taxe sur les paris sportifs, la taxe sur les jeux de hasard et la taxe Buffet.

Le plafond de la taxe Buffet avait été porté à son maximum, puisque son rendement prévisionnel s’élevait par le passé à 74 millions d’euros, mais aujourd’hui ce montant est de quelque 59,7 millions d’euros à la suite de la crise des droits de diffusion du football.

La précédente ministre des sports avait déclaré, en février 2021, que le Gouvernement examinerait la possibilité d’augmenter la dotation budgétaire de l’ANS, en procédant au relèvement des plafonds des deux autres taxes affectées à l’Agence ou via l’augmentation des moyens du programme 219. C’est cette seconde option qui a été choisie par l’État pour compenser ce manque, en inscrivant 14,4 millions d’euros dans le budget.

Toujours sur le sujet du financement des politiques menées par l’ANS, en 2022 quelque 13 millions d’euros ont été transférés du dispositif Pass’Sport vers l’Agence, pour financer des projets sportifs fédéraux, le fonds d’urgence pour venir en aide aux fédérations en difficulté et les travaux des centres de préparation.

Nous le voyons, le décalage est grand entre les montants des moyens alloués à l’ANS et ceux qui sont nécessaires à la bonne réalisation de ses missions. Ces changements cumulés, d’une année sur l’autre, font peser un risque.

Dans le sport, tout dépend du bon vouloir du Gouvernement, comprenons-le bien ! Si les plafonds commencent déjà à baisser avant les jeux Olympiques et Paralympiques, rien ne nous dit qu’ils ne diminueront pas encore plus drastiquement après.

Si nous voulons collectivement – le Gouvernement et le Parlement – poursuivre et véritablement renforcer le soutien aux politiques sportives, tout en préparant de la meilleure des façons l’héritage des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024, alors il faudrait, comme nous l’avons plusieurs fois proposé, relever le montant de la taxe sur les paris sportifs, dont les recettes sont en constante augmentation – la prévision d’augmentation pour 2023 est d’ailleurs de quelque 70 millions d’euros, madame la ministre.

La logique est simple : le sport doit financer le sport. Ces crédits supplémentaires issus des paris sportifs permettraient notamment à l’ANS de mieux flécher son soutien aux collectivités territoriales, dans le cadre du financement des équipements sportifs structurants.

Nous ne voterons pas ces amendements, car nous préférons relever les plafonds des taxes affectées, notamment celui de la taxe sur les paris sportifs, plutôt que procéder à des transferts de crédits.

M. le président. La parole est à M. Thomas Dossus, pour explication de vote.

M. Thomas Dossus. Lors de l’examen de la première partie du PLF, nous avions proposé d’augmenter la taxe sur les paris sportifs, mais cela avait été rejeté, y compris par la majorité sénatoriale…

Pour ma part, je veux m’inscrire en faux contre les propos de mes collègues : je remercie Mme la ministre des sports de ses explications, même si elles ont été un peu longues, sur mes amendements. J’ai apprécié son effort.

Je remercie également la commission de son avis de sagesse sur l’amendement n° II-264. La lutte contre les violences sexistes et sexuelles dans le sport mérite ce petit supplément budgétaire.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-261.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-316.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-263.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-344.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-321.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-264.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-262.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-315.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° II-287, présenté par MM. Canévet et Delcros, Mmes Férat, Ract-Madoux, Guidez et Jacquemet et M. P. Martin, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Sport

dont titre 2

 

100 000 000

 

100 000 000

Jeunesse et vie associative

dont titre 2

 

 

 

 

Jeux olympiques et paralympiques 2024

100 000 000

100 000 000

TOTAL

100 000 000

100 000 000

100 000 000

100 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Michel Canévet.

M. Michel Canévet. L’organisation de notre pays doit être cohérente : mener des politiques identiques à tous les échelons de compétence ne permet pas à l’action publique d’être la plus efficiente possible.

Nous considérons que le Pass’Sport est une politique de proximité. Aussi, elle serait bien mieux déployée par les départements que par l’échelon national.

Nous proposons donc, au travers de cet amendement, de transférer sa mise en œuvre à l’échelle départementale.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Éric Jeansannetas, rapporteur spécial. Je pense que l’option que vous proposez est intéressante pour renforcer la dimension territoriale du dispositif.

Néanmoins, pour améliorer le taux de recours au dispositif, l’urgence est de renforcer les liens avec les fédérations et les associations. Il est peut-être encore un peu tôt pour modifier radicalement la gestion du Pass’Sport.

La commission demande donc le retrait de cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Amélie Oudéa-Castéra, ministre. Le Pass’Sport est un dispositif qui s’adresse spécifiquement aux enfants et aux jeunes issus de milieux défavorisés. Son attribution est fondée sur des critères sociaux, indépendamment du territoire de résidence, qui sont complémentaires à ceux qui sont mis en place par les collectivités.

L’objectif – nous le partageons tous – est de toucher le plus grand nombre de jeunes possible.

J’émets donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Monsieur Canévet, l’amendement n° II-287 est-il maintenu ?

M. Michel Canévet. Les départements ont déjà la compétence en matière d’action sociale. Ainsi, ils sont les mieux indiqués pour assumer des actions auprès des jeunes en situation difficile.

Cela dit, je retire mon amendement, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° II-287 est retiré.

L’amendement n° II-282, présenté par MM. Breuiller, Dossus, Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :

I. – Créer le programme :

Soutien aux fédérations sportives scolaires

II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Sport

dont titre 2

 

 

 

 

Jeunesse et vie associative

dont titre 2

 

 

 

 

Jeux Olympiques et paralympiques 2024

 

23 000 000

 

23 000 000

Soutien aux fédérations sportives scolaires

23 000 000

 

 

 

TOTAL

23 000 000

23 000 000

23 000 000

23 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Le présent amendement a pour objet l’instauration d’un Pass’Sport scolaire, qui fonctionnerait comme le Pass’Sport déjà existant. Celui-ci est attribué sous condition de ressources et fournit une aide à la prise de licence et à la pratique dans un club sportif ; le sport scolaire en est toutefois exclu.

Or pour beaucoup d’enfants et de jeunes, le sport scolaire est la première et parfois la seule voie d’accès au sport.

L’aide proposée est à destination des enfants et des jeunes. Même si le coût de la cotisation à l’Union nationale du sport scolaire (UNSS) est de 20 euros, le coût de la pratique peut également intégrer d’autres éléments.

Le dispositif que nous vous demandons d’adopter est un message pour tous les jeunes qui veulent pratiquer le sport. Il s’agit de leur dire : « Toi aussi tu peux choisir d’avoir une activité sportive, et tu pourras la payer sans être obligé de demander à payer les 20 euros en dix mensualités de 2 euros », car c’est un constat que nous faisons bien trop souvent dans certaines villes.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Éric Jeansannetas, rapporteur spécial. Je partage la volonté de soutenir les fédérations sportives scolaires, mais la multiplication des dispositifs risquerait de rendre la politique de l’aide à la pratique sportive illisible.

Pour l’instant, le Pass’Sport scolaire ne ferait que compliquer les initiatives existantes.

La commission demande donc le retrait de cet amendement. À défaut, son avis serait défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Amélie Oudéa-Castéra, ministre. Monsieur le sénateur Dossus, je soutiens déjà largement le sport scolaire, puisque de nouveaux dispositifs sont en train d’être déployés par les services de mon ministère – les deux heures au collège, les trente minutes d’activité quotidienne et toute une série de mesures visant à soutenir l’UNSS et l’Usep (Union sportive de l’enseignement du premier degré), dont les subventions ont augmenté ces derniers temps.

Je serai extrêmement attentive à la situation de l’UNSS, de l’Usep et de l’Union générale sportive de l’enseignement libre, tant mon souhait est de diffuser la pratique du sport au sein de notre jeunesse.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Lozach, pour explication de vote.

M. Jean-Jacques Lozach. Toutes les fois qu’un amendement correspond à un prélèvement de crédit sur le programme « Sport » ou sur la Solideo, nous voterons contre, parce que nous devons naturellement préparer dans les meilleures conditions possible les jeux Olympiques de 2024.

De plus, en ce qui concerne les déficits, des recherches de financements supplémentaires ont été annoncées, en plus des filets de sécurité déjà existants, pour financer les jeux Olympiques – je pense notamment à la réserve pour aléas ou à la garantie de 3 milliards d’euros, qui figure dans la loi de finances de 2022. Mais ce n’est pas parce que de tels filets de sécurité existent que nous devons laisser filer les budgets…

Nous sommes un certain nombre ici à défendre une vision éthique du sport ; or, celle-ci passe aussi par la rigueur budgétaire dans l’organisation de grands événements sportifs.

Enfin, en toute sincérité, le budget prévisionnel, qui s’élevait à quelque 6,8 milliards d’euros dans le dossier de candidature, va atteindre jusqu’à 8 ou 9 milliards d’euros ; mais c’est peanuts par rapport à certains déficits que nous avons connus, notamment lors des jeux Olympiques de Pékin !

M. le président. La parole est à M. Didier Rambaud, pour explication de vote.

M. Didier Rambaud. Il est bien de soutenir les fédérations sportives scolaires, mais l’urgence est de les restructurer.

M. Didier Rambaud. Quand je compare le sport scolaire, tel que je l’ai connu, organisé par l’Usep le mercredi après-midi, à ce qu’il est devenu aujourd’hui, tel que mes enfants le pratiquent, je ne puis que constater le grand démantèlement de ce secteur.

Voilà une priorité sur laquelle nous devons travailler.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-282.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° II-314, présenté par M. Bacchi, Mme Brulin, M. Ouzoulias et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Sport

dont titre 2

17 000 000

17 000 000

Jeunesse et vie associative

dont titre 2

17 000 000

17 000 000

Jeux olympiques et paralympiques 2024

TOTAL

17 000 000

17 000 000

17 000 000

17 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Pierre Ouzoulias.

M. Pierre Ouzoulias. En quelques mots, il s’agit, au travers de cet amendement, de donner un peu plus d’argent au fonds pour le développement de la vie associative.

En effet, nous pensons qu’il est aujourd’hui absolument indispensable d’aider les associations.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Éric Jeansannetas, rapporteur spécial. L’objet de cet amendement est de renforcer le fonds pour le développement de la vie associative, le FDVA, de 17 millions d’euros. Toutefois, celui-ci bénéficie déjà de 15 millions d’euros supplémentaires, via le mécanisme de fléchage des comptes inactifs de l’État, cher à Jacques-Bernard Magner.

De plus, le FDVA a vocation à aider les associations sur un plan structurel.

Enfin, la priorité, selon moi, c’est d’aider les associations à faire face à l’augmentation des coûts de l’énergie.

La commission demande donc le retrait de cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marlène Schiappa, secrétaire dÉtat. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Alain Marc, pour explication de vote.

M. Alain Marc. Cet amendement est pour moi l’occasion de regretter la disparition de la réserve parlementaire. (Exclamations.)

Mme Esther Benbassa. Il n’a pas tort !

M. Alain Marc. En Aveyron, il y avait cinq parlementaires, soit 750 000 euros de réserve au total : l’essentiel de ces fonds était destiné aux associations.

Or aujourd’hui, dans mon département, le fonds pour le développement de la vie associative s’élève à 300 000 euros.

Faites les comptes et vous verrez que la situation, contrairement à ce que l’on prétend, est bien moins intéressante pour les associations qu’avant la suppression de la réserve parlementaire.

M. Michel Savin. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, pour explication de vote.

M. Patrick Kanner. M. Marc a totalement raison.

La disparition de la réserve parlementaire a permis d’alimenter la dotation d’équipement des territoires ruraux, la DETR, et le fonds pour le développement de la vie associative, mais seulement à hauteur de la moitié de ce qui était distribué auparavant… Mesdames les ministres, c’est une véritable arnaque, je vous le dis comme je le pense !

Je rappelle que la suppression de la réserve avait été votée dans la loi du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique, afin de prévenir l’éventuel clientélisme des élus locaux…

Or, quand je vois l’évolution de la jurisprudence gouvernementale dans ce domaine, je pense que, en matière de moralisation, il peut y avoir de meilleurs exemples. (Sourires sur les travées du groupe SER.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-314.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° II-288, présenté par MM. Canévet et Delcros, Mmes Ract-Madoux, Guidez et Jacquemet et M. P. Martin, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Sport

dont titre 2

 

 

 

 

Jeunesse et vie associative

dont titre 2

 

8 100 000

 

8 100 000

Jeux olympiques et paralympiques 2024

8 100 000

 

8 100 000

 

TOTAL

8 100 000

8 100 000

8 100 000

8 100 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Michel Canévet.

M. Michel Canévet. La réserve parlementaire permettait de cibler un certain nombre de projets associatifs dans les départements, ce qui la rendait particulièrement intéressante.

Depuis lors, le fonds pour le développement de la vie associative, le FDVA, a été créé… On voit qu’il sert à faire de l’épicerie fine, c’est-à-dire à saupoudrer quelques centaines d’euros ici et là à une multitude d’associations, ce qui implique une instruction particulièrement longue par les services de l’État.

Franchement, il est temps de rationaliser tout cela. Les départements font la même chose. Si nous leur confions ces fonds, ils les utiliseront à bon escient et sans frais supplémentaires.

M. Pierre Ouzoulias. Tout à fait !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Éric Jeansannetas, rapporteur spécial. Cet amendement vise à transférer la gestion du fonds pour le développement de la vie associative aux conseils départementaux. Il s’agit en réalité d’un amendement d’appel.

Le fonds fait déjà l’objet d’une gestion à l’échelon départemental par le biais d’un collège départemental, qui comprend des élus locaux et au sein duquel les parlementaires peuvent désormais déjà siéger.

Je puis témoigner de ce que j’ai vu dans la Creuse : c’est un travail sérieux. J’ai un peu moins de regrets sur la réserve parlementaire, car les fonctionnaires de l’ancienne direction départementale des sports connaissent bien le milieu associatif et font des analyses pertinentes, que je partage, mais je ne sais pas s’il en va de même dans tous les départements.

La gestion du fonds peut encore être améliorée. Je ne pense pas toutefois que le transfert complet de sa gestion aux conseils départementaux soit la bonne solution.

La commission demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marlène Schiappa, secrétaire dÉtat. Je défendrai le FDVA. Il est placé sous l’autorité des préfets, mais les parlementaires doivent y être associés.

Mesdames, messieurs les sénateurs, si ce n’est pas le cas, n’hésitez pas à nous faire remonter les cas d’attributions ou de réunions de comité du FDVA qui se tiendraient sans vous. (Mme Cécile Cukierman proteste.)

En ce qui concerne cet amendement plus précisément, je rappellerai que la formation des bénévoles ne fait pas partie des compétences des départements.

L’avis du Gouvernement est donc défavorable sur cet amendement.

M. le président. Monsieur Canévet, l’amendement n° II-288 est-il maintenu ?

M. Michel Canévet. Monsieur le président, je maintiens que l’instruction de cette demande de subvention nécessite des moyens tout à fait considérables.

Toutefois, j’ai entendu que le rapporteur était sensible à mes propositions et qu’il comptait les étudier…

Je retire donc mon amendement, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° II-288 est retiré.

L’amendement n° II-324 rectifié ter n’est pas soutenu.

L’amendement n° II-281 rectifié, présenté par MM. Breuiller, Dossus, Benarroche, Dantec et Gontard, Mme de Marco, MM. Fernique, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Sport

dont titre 2

20 000

 

20 000

 

Jeunesse et vie associative

dont titre 2

 

 

 

 

Jeux olympiques et paralympiques 2024

 

20 000

 

20 000

TOTAL

20 000

20 000

20 000

20 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. La santé menstruelle des femmes sportives de haut niveau est aujourd’hui un enjeu majeur pour leur performance.

Dans une enquête de l’Institut national du sport, de l’expertise et de la performance, parue le 22 avril 2022, quelque 84 % des sportives interrogées expliquaient vivre la période des menstruations comme une difficulté.

Cet amendement vise à piloter un programme de recherche et d’actions dédié à la santé menstruelle des sportives.

Ce programme de recherche devra fournir des données complètes, médicales et psychologiques des sportives, mais également des préconisations pour construire des axes de formation et d’accompagnement sur mesure des sportives, des cadres et coachs, notamment les directeurs techniques nationaux et les conseillers techniques sportifs, ainsi que le recommande la boxeuse française Sarah Ourahmoune.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Éric Jeansannetas, rapporteur spécial. Je partage l’objectif de cet amendement, qui est d’engager un programme de recherche et d’actions dédié à la santé menstruelle des sportives de très haut niveau.

Sur ce sujet, je souhaite entendre Mme la ministre. Si le Gouvernement émettait un avis favorable, celui de la commission le serait également, vu le faible montant de la somme qui est en jeu – 20 000 euros.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Amélie Oudéa-Castéra, ministre. Ce sujet est en effet absolument capital, mais nous avons récemment enclenché une démarche intitulée « Sportives de haut niveau : les cycles, les règles, la contraception et la performance », qui est en train d’être déployée et dont les moyens nous semblent tout à fait appropriés.

Nous souhaitons en tirer absolument toutes les conclusions.

J’émets donc un avis défavorable.

M. le président. Quel est donc l’avis de la commission ?

M. Éric Jeansannetas, rapporteur spécial. Sagesse.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-281 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative », figurant à l’état B.

Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits, modifiés.

(Les crédits sont adoptés.)

M. le président. Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ».

Justice

Rappel au règlement
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
État B

M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Justice » (et articles 44, 44 bis et 44 ter).

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Antoine Lefèvre, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, en ce qui concerne le budget de la justice, vous me permettrez de commencer par un constat, celui qui a été dressé par le comité des États généraux de la justice : le service public de la justice est une institution qui traverse une crise majeure. C’est un bateau naufragé, qui n’a pas coulé à pic, mais qui a pris l’eau progressivement, au fil d’années de restrictions budgétaires. La crise sanitaire a, de ce point de vue, agi comme un révélateur de ses dysfonctionnements.

C’est sous cet angle que nous devons analyser le budget qui nous est proposé pour l’année 2023, pour toutes les composantes de la justice : la protection judiciaire de la jeunesse, l’administration pénitentiaire, la justice judiciaire, le secrétariat général du ministère et le Conseil supérieur de la magistrature.

Point positif, ce budget augmente, pour atteindre 11,6 milliards d’euros. En dix ans, les crédits alloués à la justice auront augmenté de plus de moitié. Pour ce qui concerne les effectifs, 10 000 postes devraient être créés d’ici à 2027, dont 1 500 de magistrats et 1 500 de greffiers. Les hausses successives sont absolument essentielles pour remédier aux défaillances de ce service public.

Pour citer les propos de Jean-Marc Sauvé, président du comité des États généraux, « on ne peut plus continuer d’appliquer une multitude de rustines à une chambre à air dont on n’a pas voulu voir qu’elle était totalement usée. » Une réforme systémique s’impose, tant sur le fond que sur le plan du budget.

Monsieur le ministre, la future loi de programmation qui, je l’espère, nous sera prochainement présentée devra consacrer cette trajectoire. Il ne s’agira bien sûr pas de vous donner un blanc-seing ! L’augmentation significative des moyens du ministère de la justice depuis plusieurs années doit s’accompagner de la diffusion d’une réelle culture de l’évaluation des dépenses réalisées.

Telle que je la conçois, une loi de programmation ne doit pas simplement consister en la définition d’indicateurs de performance et de lignes de crédits et d’emplois. Elle doit être l’occasion, pour le ministère concerné, de s’interroger sur le sens des politiques publiques qu’il mène, sur la qualité du service public qu’il soutient et sur sa propre gestion des moyens, budgétaires comme humains.

À cet égard, la future loi de programmation des moyens de la justice ne pourra faire l’économie d’une réflexion sur l’amélioration de la gestion et sur la construction d’indicateurs de suivi fiables. Le ministère s’est trop longtemps retrouvé « dans l’incapacité de relever les défis d’une gestion rigoureuse », pour reprendre de nouveau un constat des États généraux.

Prenons l’exemple du plan de transformation numérique de la justice (PTN), initialement doté de 530 millions d’euros. Il est inconcevable que, comme elle l’a admis dans un rapport remis à la demande de la commission des finances, la Cour des comptes ait rencontré d’importantes difficultés pour reconstituer les dépenses budgétaires exécutées au titre du PTN !

L’informatique fait d’ailleurs partie, avec l’immobilier et la gestion des ressources humaines, des trois chantiers qui doivent être menés à bien pour soutenir le service public de la justice.

Je suis en effet convaincu que l’institution judiciaire ne sortira pas de sa crise majeure si elle ne s’interroge pas sur la gestion de ses fonctions support, qu’il faut rapprocher des utilisateurs, avec un impératif : mieux prendre en compte les besoins des usagers de la justice, qu’il s’agisse des personnels, des justiciables ou des professionnels du droit, tels que les avocats.

En ce qui concerne l’informatique, un second plan de transformation numérique est amené à prendre la suite du premier, établi pour la période 2018-2022. La commission des finances avait entendu la Cour des comptes sur sa mise en œuvre au mois de février dernier.

Soyons clairs : si le premier plan de transformation numérique était un plan de rattrapage, le second devrait être celui de la modernisation. Pour réussir, il devra non seulement être doté de moyens budgétaires suffisants, mais également tenir compte de plusieurs impératifs.

Il devra tout d’abord pleinement inclure les usagers et leurs besoins, alors que le malaise grandit au sein des juridictions sur les outils numériques. Il n’est pas normal que la modification de certains systèmes d’information oblige désormais les magistrats et les greffiers à ressaisir manuellement certaines données !

Ensuite, le second PTN devra conduire à une véritable interopérabilité des systèmes d’information du ministère. Par exemple, aucune application ne permet aujourd’hui de fournir des données sur le parcours complet des mineurs pris en charge par la justice. Le décloisonnement des applications devra donc s’opérer en interne, mais aussi en externe, avec le ministère de l’intérieur par exemple, ainsi qu’avec les professionnels du droit, comme les avocats.

Le deuxième enjeu est celui de la professionnalisation de la gestion des ressources humaines. Je suis convaincu que le pilotage des ressources humaines n’est pas seulement une question d’augmentation des effectifs : il implique également de prendre en compte les questions relatives au vivier de recrutement ou à la revalorisation de certains métiers en perte d’attractivité. Il s’agit là d’un enjeu capital, qui ne peut se contenter d’une seule réflexion sur la rémunération.

J’en viens à la troisième fonction support : l’immobilier. Le plus grand chantier du ministère est, bien sûr, celui de la construction de 15 000 places de détention supplémentaires, sous l’égide de l’administration pénitentiaire. Je reste toutefois persuadé – nous aurons l’occasion de vous entendre à ce sujet, monsieur le garde des sceaux, lors de la discussion de l’article 44 ter – qu’une politique pénitentiaire ne peut se résumer à une politique immobilière.

À l’inverse, la politique immobilière du ministère ne peut se résumer au « plan 15 000 ». Les programmes de rénovation, que ce soit des tribunaux judiciaires ou des établissements de détention, sont absolument cruciaux. Ils participent aussi de la valorisation des magistrats, des greffiers ou des surveillants pénitentiaires. Au regard des missions absolument essentielles que ceux-ci accomplissent, nous leur devons d’améliorer leurs conditions d’exercice.

Telles sont, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, les observations que je souhaitais formuler sur le projet de budget du ministère de la justice. Compte tenu de l’effort budgétaire consenti pour la mission, j’ai proposé de l’adopter à la commission des finances, laquelle a souhaité suivre mon avis à l’unanimité.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Alain Marc, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et dadministration générale. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, pour la troisième année consécutive, les crédits alloués à l’administration pénitentiaire dans le projet de loi de finances s’inscrivent en forte hausse, avec une progression de 7,5 %.

Ces moyens supplémentaires ne sont pas superflus, compte tenu des besoins en moyens humains et des investissements nécessaires pour rénover et développer notre parc pénitentiaire.

Pourtant, les auditions auxquelles j’ai procédé m’ont parfois donné l’impression que les efforts réalisés sur le plan budgétaire n’avaient pas encore d’effets perceptibles sur le terrain. Je vois à cela deux explications : tout d’abord, une part importante des crédits est absorbée par le « programme 15 000 », qui vise à ouvrir 15 000 nouvelles places de prison d’ici à 2027 ; ensuite, le retour à une situation de surpopulation carcérale dégrade les conditions de travail du personnel, ainsi que les conditions de détention.

Concernant le « programme 15 000 », je rappelle qu’il est divisé en deux tranches : 7 000 places devaient être livrées entre 2017 et 2022, et 8 000 entre 2022 et 2027.

Nous devons constater que la première tranche a pris du retard, puisque le nombre de places livrées en cette fin d’année 2022 est de l’ordre de 2 000. La livraison d’une dizaine d’établissements est prévue en 2023, ce qui permettra de combler une partie de ce retard.

Il n’en reste pas moins que l’achèvement du programme à l’échéance prévue paraît aujourd’hui bien incertain. Je m’interroge, en particulier, sur les surcoûts qui résulteront de la hausse des prix de l’énergie et des matières premières : ils pourraient inciter à étaler dans le temps la mise en œuvre du programme.

Après la baisse constatée en 2020, du fait de la pandémie, la population carcérale est repartie à la hausse, pour se rapprocher désormais de ses plus hauts niveaux historiques. Dans les maisons d’arrêt, le taux d’occupation dépasse 140 % en moyenne, avec des pointes à plus de 200 % dans certains établissements, par exemple à la prison de Bordeaux-Gradignan, sur laquelle la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté nous a alertés.

Dans ce contexte, le Gouvernement a fait adopter, à l’Assemblée nationale, un amendement tendant à reporter une nouvelle fois la mise en application du principe de l’encellulement individuel. À l’évidence, les conditions observées sur le terrain font obstacle au respect de ce principe à compter du 1er janvier 2023.

La surpopulation carcérale dégrade tout d’abord les conditions de détention : on observe davantage de matelas au sol et un accès plus difficile aux activités sportives ou culturelles, et le suivi par les conseillers pénitentiaires d’insertion et de probation (CPIP) tend à s’espacer, ce qui réduit les chances de réinsertion.

Elle détériore également les conditions de travail du personnel : les schémas d’emplois dans les établissements sont définis en fonction du nombre théorique de places, non en fonction du nombre de détenus réellement accueillis ; d’où une importante surcharge de travail, notamment pour les surveillants pénitentiaires, qui sont quotidiennement au contact des personnes incarcérées.

En dépit de ces difficultés qui persistent, la commission des lois a émis un avis favorable sur l’adoption des crédits de l’administration pénitentiaire, ainsi que sur l’article rattaché 44 ter, tout en étant convaincue de la nécessité de remettre à niveau de notre service public pénitentiaire.

M. le président. Je vous invite à respecter votre temps de parole, mes chers collègues.

La parole est à Mme le rapporteur pour avis.

Mme Agnès Canayer, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et dadministration générale. Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, en novembre 2021, quelque 3 000 magistrats jetaient la lumière, dans une tribune, sur leur malaise profond. Un an plus tard, après les États généraux de la justice, ils sont toujours dans la rue.

Or le projet de budget pour 2023 poursuit l’effort de rattrapage, avec une hausse des crédits de paiement de 8 %, dont 300 millions d’euros supplémentaires pour les juridictions. Pourquoi, alors que le budget de la justice augmente pour la troisième année consécutive, le malaise persiste-t-il ? Pourquoi, malgré les recrutements en nombre, les délais de jugement s’allongent-ils toujours, passant, pour les affaires civiles, de 11,4 mois en 2019 à 13,7 mois en 2021 et à près de 50 mois pour les crimes ?

La création, en 2023, de 1 220 postes, dont 546 titulaires – 200 magistrats, 191 greffiers et 155 directeurs de greffe –, doit permettre de renforcer les juridictions.

Cette dynamique devrait se poursuivre avec la création, sur cinq ans, de 1 500 postes de magistrats, 1 500 postes de greffiers et 2 000 postes de juristes assistants. Ces moyens humains sont attendus, notamment à Nanterre, où un juge aux affaires familiales (JAF) traite 235 000 affaires, contre 108 000 en moyenne dans les autres juridictions.

Cette ambition impose de développer les moyens de formation des personnels recrutés et d’attirer de nouvelles vocations. Pour cela, le PLF prévoit une prime de 1 000 euros brut en moyenne pour les magistrats judiciaires, modulée en fonction de l’ancienneté.

Pour les greffes, un effort de 165 euros brut par mois pour les greffiers et de 250 euros pour les directeurs de greffe est prévu. Cette augmentation est la reconnaissance du rôle central des greffiers dans la chaîne judiciaire, mais elle ne permettra pas l’amélioration réelle de leurs conditions de travail tant qu’il y aura 7 % de postes non pourvus et que les conditions matérielles – informatiques et locaux – ne seront pas améliorées.

Je pense particulièrement au greffe du tribunal judiciaire de Rouen, qui travaille dans des conditions peu acceptables : pas de fenêtres, bureaux partagés avec la salle de pause des agents ou installés dans d’anciennes toilettes réaffectées, faute de place.

Cependant, cette augmentation massive des effectifs doit impérativement s’accompagner d’une véritable politique de ressources humaines.

L’évaluation de la charge des magistrats, que nous appelons de nos vœux depuis cinq ans, devrait heureusement aboutir à la fin de l’année 2022. Mais il importe surtout de moderniser les méthodes de travail du magistrat, en créant une « équipe », qui lui permettra de se concentrer sur son office, de revaloriser le rôle des greffiers et de donner un avenir aux contractuels. Cela nécessitera une clarification des missions de chacun, aujourd’hui peu lisibles, entre les assistants de justice, les juristes assistants, les contractuels « justice de proximité » et les assistants spécialisés…

Monsieur le garde des sceaux, vous vous êtes engagé sur le chemin long et sinueux de la réforme de la justice. Si nous considérons qu’il faut aller plus vite, il convient surtout d’éclaircir la méthode ! Les États généraux de la justice donnent le guide ; il faut maintenant fixer le cap.

Ce budget est un bon début. C’est pourquoi la commission des lois a émis un avis favorable.

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure pour avis.

Mme Dominique Vérien, rapporteure pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et dadministration générale. Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, le temps qui m’est alloué étant particulièrement réduit, je n’aborderai que trois sujets.

Premièrement, s’agissant de l’informatique, les crédits augmentent encore une fois, certes. Pourtant, force est de constater que, sur le terrain, en dehors de l’aspect matériel, les évolutions concrètes sont encore attendues. Nous le signalons chaque fois que nous en avons l’occasion, depuis plusieurs années maintenant, et nous continuerons à le faire.

D’ailleurs, si j’en crois Le Canard enchaîné, « après le naufrage de la numérisation des procédures civiles pilotée par Sopra Steria et Cap Gemini, le ministère a signé un nouveau marché de 45 millions d’euros avec… Sopra Steria et Cap Gemini ! Après tout, ce sont sans doute les mieux informés de ce qu’il ne faut pas faire… »

Deuxièmement, en ce qui concerne le renforcement des effectifs, je suis évidemment sur la même ligne qu’Agnès Canayer. Si je loue cet effort notable, le recrutement doit s’accompagner de changements sur le terrain. À ce titre, les recommandations du rapport de Dominique Lottin sur la structuration des équipes juridictionnelles pluridisciplinaires permettraient d’engager ce changement sur des bases concrètes.

Troisièmement, et enfin, je veux aborder un sujet qui me tient à cœur : la nouvelle augmentation des crédits alloués à l’accès au droit et à l’aide aux victimes.

Parlons des victimes de violences conjugales, qui représentent plus de 40 % des personnes prises en charge par les associations d’aide aux victimes. Le budget pour 2023 permettra de financer 5 000 téléphones grave danger et 835 bracelets anti-rapprochement (BAR).

La volonté politique existe – c’est indéniable –, mais, là encore, cela doit se concrétiser sur le terrain, dans la justice du quotidien. En effet, trop souvent, la victime n’est reconnue et traitée pleinement comme telle que par le milieu associatif,…

M. Michel Canévet. Absolument !

Mme Dominique Vérien, rapporteure pour avis. … dont les acteurs, comme Michel Canévet l’a souligné, aimeraient disposer d’une vision pluriannuelle de leur financement, notamment pour être certains de pouvoir pérenniser leurs emplois de juristes.

Il n’est pas rare que les victimes se heurtent d’abord à l’institution policière, puis à l’institution judiciaire. D’ailleurs, la première urgence, pour ces victimes, n’est-elle pas que leurs dossiers ne soient pas tout simplement jetés à la poubelle ?

Malheureusement, même lorsque la victime a la chance d’être reconnue par l’institution, elle se heurte trop souvent à de grandes difficultés dans le traitement de son dossier, voire de ses dossiers – un chez le JAF, un chez le juge des enfants, un au pénal… –, avec des décisions parfois contradictoires.

Cependant, monsieur le garde des sceaux, je vous remercie, ainsi que Mme la Première ministre, de m’avoir fait confiance pour conduire une mission sur les violences intrafamiliales. Je veillerai, avec ma collègue Émilie Chandler, à vous faire des propositions concrètes sur ce sujet.

Je puis d’ores et déjà vous dire que les trois premières d’entre elles seront : formations, formations et formations… En effet, on ne peut pas traiter correctement ces dossiers si l’on ne sait pas ce que sont le psychotraumatisme, l’emprise ou encore le contrôle coercitif, et ce que cela entraîne chez la victime.

Aussi, je vous remercie de cette mission et, même si tout n’est pas parfait, je vous remercie de ce budget ! (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure pour avis.

Mme Maryse Carrère, rapporteure pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et dadministration générale. Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, le programme 182 relatif à la protection judiciaire de la jeunesse représente 9,4 % des crédits de la mission « Justice » pour 2023. Il serait doté de 1,10 milliard d’euros en autorisations d’engagement et de 1,08 milliard d’euros en crédits de paiement, soit une augmentation de 11,2 % et de 10,4 % par rapport à la loi de finances pour 2022.

L’enjeu n’est donc pas le montant des crédits alloués ; c’est leur allocation.

Dans le prolongement des années précédentes, je souhaite me concentrer sur trois défis majeurs auxquels fait face la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) : la redynamisation du milieu ouvert, les difficultés de recrutement et la mise en œuvre progressive de l’applicatif métier Parcours.

Le code de la justice pénale des mineurs (CJPM) est en vigueur depuis maintenant un peu plus d’un an. Nous savons qu’il a entraîné un bouleversement de la manière de travailler des services placés auprès des juridictions, dont l’activité a considérablement augmenté, d’après les premiers retours sur la réforme.

Toutefois, cette réforme a aussi et peut-être surtout un impact sur le milieu ouvert, soumis à la nécessité d’organiser une prise en charge avant l’audience de sanction. Le CJPM peut être un levier de la redynamisation du secteur ouvert ; c’est l’un des axes de travail de la PJJ, qui s’appuie sur les Assises du placement judiciaire, closes en octobre dernier.

L’attention croissante portée au milieu ouvert, notamment par des créations de postes et les moyens donnés aux unités éducatives d’accueil de jour, est bienvenue.

Au cours des dernières années, nous avons en effet eu l’occasion de nous inquiéter de la place très importante prise par la création des centres éducatifs fermés (CEF) dans l’augmentation du budget de la PJJ – elle en a représenté près d’un quart sur les trois dernières années –, alors même que les besoins du milieu ouvert sont très importants.

J’en viens justement à la question des centres éducatifs fermés, dont le développement a constitué un axe majeur de la politique du Gouvernement ces dernières années. Sur le programme de 20 nouveaux CEF, il semble aujourd’hui que la PJJ soit amenée à renoncer à trois ou quatre projets, qui ne pourront aboutir. Parallèlement, deux nouveaux projets de CEF sont envisagés.

Sous-jacente aux difficultés de la PJJ est la question des personnels. Il s’agit là d’une véritable inquiétude, en raison d’un taux de vacance de postes de 6 % et d’un niveau de rotation élevé sur plusieurs postes difficiles. Le taux de contractuels dans la PJJ, supérieur à 20 %, et celui de leur renouvellement sont eux aussi élevés. Si de nouveaux postes sont créés chaque année, nous avons noté, par le passé, que tous ne parviennent pas à être pourvus.

Face à ce manque d’attractivité, la revalorisation salariale est nécessaire, mais elle n’est apparemment pas suffisante, au moins à court terme. Il faut également redonner du sens aux métiers de la PJJ, avec des orientations mobilisatrices et la volonté d’agir pour l’insertion des jeunes. Les moyens déployés à cette fin peuvent aller en ce sens.

Je veux, pour terminer, évoquer le déploiement de l’applicatif Parcours. L’appropriation de l’outil s’est révélée particulièrement difficile, et le besoin de formation est important. La PJJ a donc relancé un programme de formation des personnels. De nouveaux développements se révèlent nécessaires, mobilisant 4 millions d’euros en 2022 et, de nouveau, en 2023, pour permettre le déploiement du deuxième lot de Parcours, destiné aux éducateurs eux-mêmes.

Pour l’heure, au regard de l’augmentation de son budget, la commission des lois a émis un avis favorable sur l’adoption des crédits du programme 182. (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE et UC.)

M. le président. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps de l’intervention générale et celui de l’explication de vote.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de quinze minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le budget de la justice pour 2023 est présenté dans la foulée des États généraux de la Justice, qui ont rendu leurs conclusions le 8 juillet 2022.

Certes, ces États généraux ont permis de renouer un dialogue perdu entre les acteurs de la justice et les pouvoirs publics. Le budget, sur les trois dernières années, bénéficie d’une augmentation significative de ses crédits. Nous devrions nous féliciter de cette prise de conscience, mais, derrière les effets d’annonces, la réalité est hélas plus compliquée.

Les difficultés structurelles des juridictions sont considérables, et notre système judiciaire est à bout de souffle. La justice française est l’une des plus mauvaises élèves de l’Union européenne. Elle compte trois procureurs pour 100 000 habitants, contre 12 en moyenne dans les États membres. Son budget demeure inférieur à celui des autres pays européens comparables. Avec un budget de 5 euros par habitant consacré à l’aide juridictionnelle, la France se situe encore en dessous de la moyenne européenne, qui est de 6,50 euros par habitant.

Un exemple très parlant illustre les défaillances et l’encombrement de notre justice : une dépêche interministérielle, datée de mai 2021, a incité les magistrats à classer sans suite de très nombreuses affaires jugées trop anciennes ou pour lesquelles aucune enquête n’a été menée. Ces injonctions illustrent tout l’échec de notre système judiciaire.

La justice française souffre également d’une sous-évaluation chronique des besoins humains dans les juridictions. À titre d’exemple, le taux de vacance des postes de greffier s’établit à 7,2 %, soit 2,7 points de plus qu’en 2019, avant la crise du covid-19.

Les embauches de près de 200 magistrats et 198 greffiers ne pourront, hélas, répondre aux besoins que représentent les postes non pourvus.

Sur ces postes, nous dénonçons également la méthode du Gouvernement consistant en une embauche massive de contractuels. Ces assistants de justice contractuels, en situation précaire, remplacent à bas coût les recrutements de magistrats. Cette politique de recrutement à moindre coût n’est pas une solution pérenne acceptable pour notre pays, et elle illustre la logique gestionnaire à courte vue qui s’impose de plus en plus, au détriment de la qualité de la justice rendue et de l’accès à la justice pour tous les citoyens.

Des moyens supplémentaires seront, en outre, alloués au bracelet anti-rapprochement. Or ces outils, dès leur création, ont connu de nombreux dysfonctionnements techniques, ce qui a conduit le ministère à changer de prestataire en 2022. Cet exemple montre que, en dépit de moyens supplémentaires, le pilotage fait toujours défaut…

Enfin, que dire du budget colossal alloué à la construction de nouvelles prisons ? En dépit des nombreuses condamnations de la France par la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) pour les conditions indignes de détention, aucune réflexion n’est menée sur l’architecture des parcs actuels et sur l’entretien des établissements existants, alors que cela permettrait d’améliorer rapidement la qualité de vie des détenus et les conditions de travail des surveillants pénitentiaires.

La promesse des 15 000 places pour 2027, défendue comme remède aux problèmes chroniques de surpopulation, nous paraît inappropriée. Le taux d’occupation des places en maison d’arrêt pourrait ainsi atteindre plus de 130 % en 2023.

Les subventions aux associations, destinées à financer les activités culturelles et sportives des détenus, connaissent une diminution importante, de 25 %, alors que les activités organisées au sein de la détention participent au quotidien carcéral et s’inscrivent pleinement dans le parcours de réinsertion. Dans ces conditions, comment espérer une véritable amélioration des conditions de détention ?

Vous annoncez également, monsieur le garde des sceaux, des créations de postes de surveillant, mais nous savons tous ici que ce budget sera difficile à mobiliser, puisque cette profession souffre, en vérité, d’une grave crise des vocations, en raison notamment des conditions de travail et de rémunération, qui ne sont pas à la hauteur des enjeux et des missions effectuées par ces agents.

Mes derniers mots porteront sur la protection judiciaire de la jeunesse, qui, au gré des réformes et des budgets, reste le parent pauvre de la justice. Certes, la PJJ bénéficie d’une hausse budgétaire, mais la priorité donnée par le Gouvernement est fléchée vers la création de places dans les centres éducatifs fermés ou renforcés. La culture du tout-répressif a ses limites, surtout pour ce qui est de notre jeunesse, même lorsqu’elle est délinquante.

C’est pourquoi, même si, dans son ensemble, nous saluons l’augmentation du budget de la mission « Justice », la répartition des crédits ne répond pas suffisamment aux besoins de recrutement de personnels, aux difficultés de la justice du quotidien ni au besoin d’améliorer rapidement les conditions de détention dans notre pays.

Notre groupe s’abstiendra donc sur les crédits de cette mission.

M. le président. La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi.

M. Thani Mohamed Soilihi. Fidèle à vos engagements, monsieur le garde des sceaux, vous avez obtenu pour la troisième année consécutive, un budget important pour 2023, puisque les crédits alloués au ministère de la justice augmentent de nouveau de 8 %.

Cette hausse est d’autant plus opportune que les États généraux de la justice ont mis en exergue l’impérieuse nécessité de maintenir une trajectoire ambitieuse. Cela a été rappelé à de nombreuses reprises : le budget de la justice a augmenté de 26 % depuis votre entrée au Gouvernement et de 40 % depuis le début du premier quinquennat du président Macron, ce qui est considérable.

Certes, notre enthousiasme doit être tempéré, car ce changement de braquet, opéré depuis trois ans, n’inverse pas encore la tendance. La France demeure l’un des pays d’Europe qui consacre le moins d’argent à sa justice.

La mobilisation organisée mardi dernier, un an après la parution d’une tribune qui avait dénoncé la souffrance au travail de la profession judiciaire, en est l’une des illustrations : il reste encore beaucoup à faire pour améliorer la justice dans notre pays, et l’impatience des professionnels du droit est bien légitime.

Cependant, nous ne serions pas honnêtes si nous ne reconnaissions pas les grandes avancées que permettra ce beau budget.

Je pense tout d’abord aux moyens humains, puisque ces crédits rendront possibles un renforcement des effectifs – 2 253 emplois seront créés cette année –, ainsi que l’amélioration des conditions de travail des agents et de la qualité du service rendu. Ainsi, 80 millions d’euros sont prévus pour revaloriser les salaires de tous les agents du ministère, des magistrats, qui verront leur rémunération augmenter de 1 000 euros bruts par mois en moyenne, jusqu’aux éducateurs, en passant par les surveillants pénitentiaires.

Le budget permettra également de poursuivre les programmes immobiliers judiciaires et pénitentiaires.

S’agissant de l’administration pénitentiaire, et alors que nous connaissons un retour à une surpopulation carcérale endémique, le Gouvernement a décidé de poursuivre la sécurisation et la modernisation du service public pénitentiaire.

La création de nouvelles places de prison dans le cadre du « plan 15 000 » doit nécessairement s’accompagner du développement des aménagements de peines et des mesures alternatives à l’incarcération. À ce titre, je salue les efforts déployés par le Gouvernement pour favoriser la réinsertion des personnes placées sous main de justice et me réjouis de la hausse des crédits consacrés à la mise en place du statut du détenu travailleur, qui aidera à prévenir la récidive et à maintenir un climat apaisé en détention.

La hausse des moyens consacrés au renforcement de la sécurité des personnels et des établissements est à souligner également. La montée en puissance du rôle du surveillant pénitentiaire, l’ouverture de nouvelles unités pour détenus violents, la généralisation des caméras-piétons sont autant de mesures qui permettront de lutter plus efficacement contre les violences au sein de nos établissements pénitentiaires.

Enfin, des efforts renouvelés et importants sont déployés en faveur de la modernisation de la justice et du renforcement de l’accès au droit.

Aussi, je souhaite souligner l’augmentation des crédits destinés aux investissements numériques, des crédits consacrés aux frais de justice pour renforcer notamment les moyens d’enquête et d’expertise judiciaire, des crédits dédiés à l’accès au droit et à la médiation, des crédits alloués à l’aide juridictionnelle, ou encore des crédits affectés à l’aide aux victimes – cette hausse contribuera à une meilleure justice de proximité.

Monsieur le garde des sceaux, je manquerais à tous mes devoirs si je ne vous réinterrogeais pas sur les annonces que vous avez faites lors de votre déplacement à Mayotte en mars dernier. Je pense particulièrement à la création d’une nouvelle cité judiciaire, d’un second centre pénitentiaire ou encore d’un centre éducatif fermé. Comprenez mon insistance, mais j’espère que vous pourrez nous apporter de nouvelles précisions sur leur calendrier de mise en œuvre.

La réalisation de ces projets prendra nécessairement du temps, d’autant que nous faisons face à un énorme problème de foncier, lequel pourrait retarder la concrétisation de ces indispensables évolutions. Dès lors, que peut-on entreprendre immédiatement pour traiter et juguler la terrifiante flambée de la délinquance juvénile que l’on peut observer sur place ?

Le groupe RDPI, que je représente, considère que ce budget dote le ministère de la justice de moyens à la hauteur de ses missions, car il accélérera sa modernisation et mettra en œuvre les recommandations issues des États généraux de la justice, ainsi que les mesures contenues dans la loi pour la confiance dans l’institution judiciaire.

Voilà pourquoi nous voterons, sans trembler, ces crédits. (M. Arnaud de Belenet applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, monsieur le président de la commission, mesdames, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, les États généraux de la justice ont dressé le constat très alarmant d’une institution « en état de délabrement avancé ».

Aussi, monsieur le garde des sceaux, allons-nous saluer l’augmentation de 7,8 % des crédits de la justice, soit 710 millions d’euros de plus qu’en 2022, après une hausse de 8 % durant deux années consécutives.

Nous ne pouvons toutefois méconnaître, non plus que vous, le poids de l’inflation. Celle-ci atteint 6 % et réduit donc cette augmentation à…

M. Jean-Pierre Sueur. … 2 %, ainsi que vient de le calculer Mme de La Gontrie. Il n’en demeure pas moins qu’un effort est incontestablement fait.

Rappelons tout de même que, à la suite d’une très longue carence, la France consacre à la justice 72,50 euros par habitant, contre 78 euros en moyenne en Europe. La hausse devra donc se poursuivre pour atteindre les objectifs préconisés par les États généraux.

S’agissant de la protection judiciaire de la jeunesse, ses crédits augmentent de 10,4 %, et vous prévoyez la construction de nouveaux centres éducatifs. Pour autant, le rapport de la mission sénatoriale Prévenir la délinquance des mineurs – Éviter la récidive, dont faisait partie notamment notre collègue Laurence Harribey, insiste sur le manque de suivi scolaire au sein de ces centres. Gageons, monsieur le garde des sceaux, que vous aurez à cœur de prendre en compte les conclusions de ce travail accompli par le Sénat.

En ce qui concerne l’administration pénitentiaire, vous annoncez 15 000 nouvelles places de prison, dans une temporalité que nous ne connaissons pas. On en parle depuis longtemps : votre prédécesseur l’évoquait déjà et son prédécesseur également.

Vous savez que, depuis 1990, on a créé 36 000 places de prison pour lutter contre la surpopulation, alors que celle-ci restait constante. Peut-on donc considérer que créer de nouvelles places de prison conduit à réduire la surpopulation carcérale ? C’est une question qui se pose. (M. le garde des sceaux acquiesce.)

Nous reconnaissons l’intérêt de vos annonces, mais nous estimons que la restauration des établissements existants est plus importante encore que la création de nouvelles places. Nos prisons se trouvent en effet dans un état de délabrement et de décrépitude tel qu’il a donné lieu à la condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l’homme en raison des conditions d’indignité qui y règnent.

Vous connaissez les chiffres : au 1er septembre dernier, 71 669 personnes étaient détenues pour 60 715 places, soit une surpopulation de 120 % en moyenne – plus de 130 % dans les maisons d’arrêt et plus de 150 % dans 36 établissements. Cela signifie que 2 000 êtres humains se trouvent actuellement à trois dans des cellules de neuf mètres carrés et dorment sur des matelas au sol, au mépris de toutes les conditions d’intimité que l’on est en droit d’attendre dans nos prisons.

Voilà une vingtaine d’années, Robert Badinter a dit que la condition pénitentiaire était la première cause de la récidive ; il convient donc d’écouter les États généraux de la justice, et je ne doute pas que vous y serez sensible, monsieur le ministre. Le rapport qui en est issu préconise un mécanisme de régulation carcérale.

M. le président. Eh bien, ce sera votre conclusion, mon cher collègue !

M. Jean-Pierre Sueur. Il recommande d’œuvrer contre…

M. le président. Mon cher collègue, le temps est contraint pour tout le monde.

La parole est à Mme Cécile Cukierman. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)

Mme Cécile Cukierman. Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, le service public de la justice a besoin de soutien et de considération.

Monsieur le garde des sceaux, vous nous présentez une augmentation de son budget de près de 8 %, en vous félicitant d’un triplé historique. Pour autant, pour nous, comme pour de nombreux acteurs du monde judiciaire, ces efforts budgétaires demeurent insuffisants pour combler les difficultés structurelles de la justice, car nous partons de trop loin. L’institution judiciaire est dans un état plus que dégradé, et les crises internes qu’elle subit exigent que nous agissions en responsabilité.

Nous dénonçons à cet égard un budget qui reste parmi les moins élevés en Europe, alors que la souffrance des acteurs de la justice ne saurait être minimisée. Nous soutenons ceux d’entre eux qui dénoncent l’accent mis sur le rendement, au détriment d’une justice humaine. Le temps de l’écoute et de l’étude n’est malheureusement pas celui de la justice française.

Nos magistrats ne sont pas en cause dans ce constat : cette situation est le fruit de vingt années d’abandon humain et budgétaire de la justice par les ministères successifs. Malgré les efforts fournis cette année, la justice continuera à se rendre au rabais.

À titre d’exemple, la France compte 11 juges professionnels pour 100 000 habitants, contre 22 en moyenne en Europe. Cet écart se manifeste également à propos des effectifs d’autres personnels indispensables. Ainsi, les greffiers et les assistants spécialisés sont également moins nombreux en France que dans d’autres pays.

Nous le martelons depuis des années : il faut donner des moyens aux juridictions et suspendre les réformes. Leur mise en œuvre à un rythme accéléré, sans augmentation parallèle des crédits et sans outils informatiques adaptés, provoque l’épuisement du système judiciaire.

Par ailleurs, nous constatons que l’administration pénitentiaire se voit accorder une hausse de crédits de 268 millions d’euros pour 2023. Ses moyens restent toutefois nettement insuffisants au vu de la menace grandissante qui pèse sur son personnel.

Les difficultés de cette administration restent prégnantes : les heures supplémentaires sont trop nombreuses et le rythme de travail est harassant. Face à cela, vous concentrez les moyens sur l’extension du parc carcéral, une mesure qui, de surcroît, ne permettra pas de résoudre le problème de la surpopulation.

À ce propos, rappelons que les taux d’incarcération et de surpopulation carcérale en France sont parmi les plus élevés d’Europe. Les conditions de détention indignes dans les prisons françaises sont régulièrement dénoncées depuis de nombreuses années, et la loi du 8 avril 2021 tendant à garantir le droit au respect de la dignité en détention n’y répond pas entièrement.

Enfin, nous insistons pour que soient octroyés à la justice des mineurs des moyens humains et matériels significatifs, afin que la détection des violences et la protection des enfants ne soient pas illusoires. À nos yeux, la prévention est le moyen le plus efficace d’assurer la protection judiciaire de la jeunesse.

Vous l’aurez compris, nous ne voterons pas les crédits de la mission « Justice » en l’état, car ils ne correspondent pas à nos exigences et aux besoins de nos concitoyens en la matière, non plus qu’à ceux des personnels de la justice.

M. le président. La parole est à M. Arnaud de Belenet. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. Arnaud de Belenet. Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mesdames, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, le budget qui nous est présenté aujourd’hui est ambitieux et s’inscrit dans une dynamique pluriannuelle. Les crédits alloués à la justice judiciaire, par exemple, sont en hausse pour la troisième année consécutive.

Monsieur le garde des sceaux, vous démontrez ainsi par les chiffres l’engagement du Gouvernement en faveur du monde judiciaire, lequel en a vraiment besoin. Les États généraux de la justice ont toutefois confirmé un diagnostic maintes fois répété : notre justice va mal. Elle est lente, parce qu’elle est débordée, et ses personnels sont souvent en souffrance et démotivés.

Parmi les annonces récentes, l’augmentation de traitement substantielle dont vont bénéficier les magistrats en 2023 est naturellement une très bonne chose. Elle leur permettra d’être rétribués, à l’instar de leurs homologues des juridictions administratives, à la hauteur de leur investissement professionnel et des lourdes responsabilités qu’ils assument. Elle contribuera également, peut-être, à renforcer leur motivation.

Soyons clairs : de la motivation, il en faut pour les personnels de votre ministère ! Il en faut aux surveillants pénitentiaires, qui souffrent d’un déficit d’image ; il en faut aux greffiers, ainsi qu’aux magistrats traitant de la justice pénale. J’entendais encore cette semaine, à l’occasion d’un rassemblement devant le tribunal judiciaire de Paris, le témoignage d’un magistrat décrivant une audience de comparution immédiate qui s’est terminée à cinq heures du matin !

Il en faut aussi, même si l’on en parle beaucoup moins, aux praticiens de la justice civile. Cette justice du quotidien est rarement mise sur le devant de la scène médiatique ou politique ; elle est pourtant bien souvent la seule justice à laquelle seront confrontés nos concitoyens au cours de leur vie. Elle est couramment passée sous le boisseau, mais sa situation est également alarmante.

Les magistrats souffrent face à une charge de travail considérable, qui conduit certains d’entre eux à évoquer une perte de sens de leur travail. Nos concitoyens subissent aussi cette situation, en raison de la lenteur du processus judiciaire, laquelle a d’ailleurs déjà provoqué des condamnations de la France. Nous savons pourtant tous ici que, en vertu du paragraphe 1 de l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, « toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue […] dans un délai raisonnable, par un tribunal ».

Lors d’un récent déplacement au Québec, vous avez réaffirmé, monsieur le ministre, votre volonté de développer largement le règlement des litiges à l’amiable. On ne peut que s’en féliciter, tant l’expérience montre qu’une telle procédure est de nature à améliorer la compréhension par nos concitoyens des décisions rendues, mais aussi à accélérer la conclusion de nombreux litiges ; il s’agit, en somme, d’une justice plus rapide et mieux comprise.

Pour développer la médiation et la conciliation, il faut d’abord que les magistrats et les avocats se forment et qu’ils soient plus sensibilisés sur le sujet. Il faut sans doute progresser en ce sens.

Nous aurons l’occasion d’aborder de nouveau ces sujets dans le cadre du projet de loi de programmation qui est encore en préparation et qui prendra la suite de la loi portée par votre prédécesseur pour la période 2018-2022.

Ce texte nous permettra, au-delà de la discussion budgétaire pour l’année 2023, d’aborder la question des investissements à long terme de votre ministère, notamment en matière immobilière.

Comme vous l’avez rappelé lors de votre audition devant notre commission, il faut prévoir et préparer l’accueil des recrutements que vous avez annoncés. Cela passe par des investissements massifs dans l’immobilier de nos juridictions, qui en ont cruellement besoin.

Il convient de mieux accueillir les justiciables, bien sûr, mais aussi d’améliorer les conditions de travail des agents actuels et des renforts humains qui les rejoindront au cours des cinq années à venir. En la matière, la marge de progression est importante.

On peut regretter, au-delà de l’état général de certains bâtiments, le manque d’autonomie dans la gestion du quotidien des tribunaux. Remplacer une ampoule, effectuer des travaux d’entretien ou des réparations basiques : autant de tâches pour lesquelles chaque chef de juridiction devrait être capable d’agir rapidement et de manière autonome, avec des moyens dédiés suffisants, sans devoir entrer dans un processus administratif lourd et inutile.

Je ne développerai pas, en outre, la question de l’introduction des chiens en support des victimes au pénal – notamment des victimes mineures, qu’ils contribuent à apaiser –, qui pose de nouveaux problèmes logistiques et de personnel.

Ce souhait d’autonomie concerne également les fournitures : la fameuse pénurie de ramettes de papier est encore le quotidien de nos juridictions.

M. Michel Canévet. C’est du concret !

M. Arnaud de Belenet. Et je ne parlerai même pas des logiciels, qui ont déjà été évoqués par Dominique Vérien.

Enfin, l’article 44 ter rattaché à cette mission prolonge jusqu’au 31 décembre 2027 la possibilité de déroger au principe d’encellulement individuel des personnes détenues en maison d’arrêt.

Avec un taux d’encellulement individuel de seulement 20,1 %, il était, certes, illusoire de penser que nous serions capables de respecter ce principe au 31 décembre 2022. Pour autant, nous ne cessons de prolonger ce moratoire depuis la loi pénitentiaire de 2009, alors même que ce droit à l’encellulement individuel était déjà affirmé dans la loi de 1875 sur le régime des prisons départementales…

Dès lors, continuer à brandir cet objectif a-t-il encore un sens ? Sur le plan des principes ou des objectifs à atteindre, probablement ; en matière juridique, ce type de moratoire me semble vain. Je forme le vœu que le vote de ce énième prolongement permette, notamment à la faveur de votre programme de création de 15 000 places de prison, de faire évoluer la situation un peu plus vite.

Monsieur le garde des sceaux, nous saluons les arbitrages budgétaires que vous avez réussi à obtenir dans le cadre de la mission « Justice » du PLF pour 2023.

Le groupe Union Centriste apportera donc son soutien à ses crédits, et nous attendons avec impatience et vigilance votre projet de loi de programmation, en espérant que celui-ci permettra d’inscrire dans la durée le rattrapage du retard accumulé ces dernières décennies.

Gardons à l’esprit que la France consacre aujourd’hui 72,50 euros par habitant à son système judiciaire, soit près de deux fois moins que l’Allemagne, et qu’elle est le seul des grands pays européens à dédier moins de 0,3 % de son PIB à la justice. Ici comme ailleurs, la paix sociale vaut davantage que cela. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. le président. La parole est à Mme Esther Benbassa. (M. Patrick Kanner applaudit.)

Mme Esther Benbassa. Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mesdames, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, je voudrais tout d’abord évoquer la mémoire de Charlotte, l’histoire tragique d’une jeune magistrate de 29 ans qui s’est donné la mort le 23 août 2021 à Béthune.

Envoyée de tribunal en tribunal, elle comblait les effectifs manquants des juridictions du Nord. À ces conditions de travail difficiles s’ajoutaient des injonctions à aller toujours plus vite, symptôme d’une justice malade qui préfère un jugement rapide et dégradé à un jugement de qualité.

À la suite de son suicide, une pétition réunissant 3 000 magistrats et plus de 100 greffiers a vu le jour pour condamner une justice qui n’écoute pas et qui chronomètre tout.

Parlons de la magistrate Marie Truchet, qui s’est écroulée en pleine audience de comparution immédiate, le 18 octobre dernier, au tribunal de Nanterre, pour ne plus jamais se relever.

Il ne s’agit pas là de faits anecdotiques, mais de vies humaines, sacrifiées sur l’autel d’une justice à bout de souffle. Les États généraux ont d’ailleurs confirmé l’état de délabrement avancé de notre système judiciaire, qui ne parvient plus à exercer ses missions dans des conditions satisfaisantes.

La grève qui a rassemblé cette semaine greffiers et magistrats autour de ces questions constitue une illustration supplémentaire du ras-le-bol qui règne au sein du corps judiciaire.

Dans son rapport, le comité des États généraux met également l’accent sur l’importance de la réinsertion en prison.

Nous relevons une augmentation significative des crédits alloués à l’insertion professionnelle des détenus, dont 2,8 millions d’euros pour le renforcement du statut de détenu travailleur et 2 millions d’euros consacrés à la diversification des actions de réinsertion.

J’aurais aimé que l’on s’indigne autant de l’état de nos prisons que d’une séance de karting à la maison d’arrêt de Fresnes… Mes nombreuses visites en prison me permettent d’attester que les prisons françaises ne répondent pas à l’exigence de dignité à laquelle tout être humain peut prétendre. Nous ne soignerons pas le fléau de la surpopulation carcérale par l’élargissement du parc immobilier. La solution est ailleurs ; elle réside dans l’aménagement des courtes peines.

Monsieur le garde des sceaux, on ne peut nier tous les efforts financiers entrepris ces trois dernières années pour redresser le budget de la justice. Pour autant, 9,6 milliards d’euros suffiront-ils pour faire oublier trop d’années de négligence ?

Au vu de ces efforts, je voterai toutefois ces crédits, même si notre justice a besoin d’une réforme structurelle de fond, à tous les niveaux. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. le président. La parole est à M. Stéphane Artano. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

M. Stéphane Artano. Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mesdames, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, voilà maintenant trois ans que la justice de notre pays rattrape progressivement son retard budgétaire. Nous partions de très loin.

Les derniers rapports d’évaluation de la Commission européenne pour l’efficacité de la justice (Cepej) montraient que la dépense par habitant pour la justice judiciaire était en France inférieure à la moyenne européenne. Les récents exercices budgétaires devraient renverser cette tendance ; nous devons nous en réjouir et poursuivre nos efforts.

Dans l’ensemble, nous saluons les principales dispositions de ce budget : financement des revalorisations indemnitaires des magistrats et des greffiers ; mise en œuvre des recrutements nécessaires ; nouvelle hausse des crédits budgétaires portée par l’augmentation des frais de justice et par l’immobilier judiciaire ; développement des aménagements de peines et des mesures alternatives à l’incarcération. Tout cela nous semble aller dans la bonne direction.

Pour 2023, les crédits de la mission « Justice » connaissent une augmentation inscrite dans la continuité des deux exercices budgétaires précédents, et la dynamique observée en matière d’emplois doit être soulignée.

J’y insiste, tant les maux de la justice dans notre société se résument souvent à des questions de temps. D’un côté, le temps d’attente d’un jugement est trop long pour le justiciable, dont l’impatience se justifie ; de l’autre, le temps disponible pour les juridictions est trop limité, ce qui entrave leur capacité à rendre des décisions suffisamment motivées et comprises par nos concitoyens.

Aussi, toutes ces annonces budgétaires vont dans le bon sens, mais il reste du chemin à parcourir pour que notre justice retrouve légitimement sa place dans l’esprit de nos concitoyens et que ceux-ci reprennent confiance dans l’institution judiciaire.

Tout le monde pense spontanément à la justice pénale, mais d’autres services sont également sinistrés. J’ai en particulier à l’esprit la protection judiciaire de la jeunesse. De nombreux établissements qui en relèvent sont saturés en raison d’un manque de personnel et font face à des difficultés de recrutement, comme l’a souligné notre collègue Maryse Carrère, dans son rapport.

Éducateurs, chefs de service ou psychologues ne sont pas assez nombreux, parce que les postes manquent, mais aussi parce que ceux qui existent restent vacants, en raison d’une faible attractivité et d’une rotation élevée dans les services. La hausse des crédits est ici salutaire, mais elle ne suffira pas à désengorger ces structures.

Ajoutons à ce constat que la Cour européenne des droits de l’homme ne manque pas de condamner régulièrement la France en raison de la durée excessive de ses procédures.

Évidemment, personne dans cet hémicycle n’envisagerait de céder au désir archaïque d’une justice expéditive et hasardeuse. Il demeure néanmoins que des réformes procédurales adoptant des perspectives de simplification et d’allégement sont proposées périodiquement. Elles concernent la collégialité, dont l’usage est de plus en plus rare dans les juridictions, voire, plus radicalement, l’exclusion du recours au juge.

Le Sénat avait fait montre de sa prudence, et notre groupe avait dit ses inquiétudes, lors de l’examen du projet de loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur, au sujet de la généralisation de l’amende forfaitaire délictuelle.

Notre justice étant trop lente, chacun s’accorde à le constater, il faut trouver des solutions, mais celles-ci ne sauraient pour autant nous conduire à renoncer à notre procédure pénale ; sa complexité permet de garantir que les décisions qui en émanent sont équilibrées et répondent aux vertus de prudence, de tempérance, de justice et de force auxquelles notre République aspire. Aussi, à des procédures simplifiées, nous préférons un renforcement des moyens, humains comme matériels, et des formations.

Les magistrats, greffiers et avocats expriment régulièrement leur mal-être, par des grèves ou via des tribunes de presse ; ils nous font part de leur surcharge de travail, de leur découragement et de leur épuisement. Je suis certain, toutefois, qu’aucun d’entre eux ne voudrait renoncer aux principes fondamentaux de notre justice. Nous devons donc continuer à former et à recruter, sans jamais dévoyer notre droit processuel.

Pour ce faire, il faut des moyens. Ce budget en comporte, nous le saluons, mais l’effort n’est pas encore achevé. Le projet de loi de programmation qui est annoncé devra s’inscrire dans cette dynamique.

Mes chers collègues, vous l’aurez compris, tout en restant vigilant, le groupe du RDSE votera en faveur des crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

M. le président. La parole est à M. François-Noël Buffet. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. François-Noël Buffet. Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, monsieur le président de la commission des finances, mesdames, messieurs les rapporteurs, cette intervention contiendra peu de chiffres, car j’entends laisser aux rapporteurs l’évocation des sujets financiers, pour tenir au nom de mon groupe un propos plus général.

La situation de notre justice est discutée au Sénat depuis longtemps. Un rapport de la commission des lois de 2017 avait fait date, en établissant un constat et en énonçant un principe, qui donnait son titre à ce travail : Cinq ans pour sauver la justice !

Il préconisait, à l’époque, une remise à niveau des moyens humains et matériels des services judiciaires et pénitentiaires, se traduisant par un projet de loi de programmation pour la justice, élaboré dans une grande concertation et fondé sur une étude d’impact approfondie, soumise au Parlement.

Ce document était clair. Malheureusement, il faut reconnaître que votre prédécesseur en a peu tenu compte. Vous n’y êtes pour rien, mais nous n’avons pas rencontré beaucoup d’écho, en particulier à l’occasion de la préparation de la loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice.

C’est dommage, parce que la situation s’est aggravée en 2021. L’Agora de la justice, que le président Larcher a organisée en septembre de cette année, avait débouché sur seize propositions, préconisant, notamment, la mise à niveau des effectifs dans les juridictions.

Il était question de combler en priorité les vacances de postes de greffiers ; de réévaluer les besoins des magistrats professionnels au regard des réformes intervenues ; d’augmenter le nombre d’officiers de police judiciaire ; de rendre plus attractives leurs fonctions et de renforcer leur formation continue ; de procéder à l’évaluation réaliste de toute évolution législative et réglementaire en matière de justice et d’en dresser un bilan rigoureux.

Nous nous trouvions déjà alors dans une période postérieure à la pandémie de covid-19, laquelle avait révélé des carences importantes dans le fonctionnement du dispositif.

Au moment où se tenait cette Agora, un sondage montrait que 53 % de nos concitoyens ne faisaient pas confiance à notre justice, trop lente à leurs yeux. En conséquence, en cas de litige, ils ne la saisissaient qu’en tout dernier recours.

Ces constats ont donné naissance, dans un contexte particulier, aux États généraux de la justice, après une pétition signée par 3 000 magistrats – ils seraient en réalité 7 000 ! – et une sollicitation forte du Gouvernement.

Le rapport issu de ces travaux a été rendu au mois de juillet dernier ; il a malheureusement confirmé les constats qui avaient déjà été faits en 2017. Reprenant les principes dont nous nous étions alors saisis, il a affirmé que, si une remise à niveau des moyens humains et matériels était nécessaire, il fallait surtout envisager une réforme systémique de la justice.

L’un des axes particuliers qui ressortent de ces travaux est la simplification de la procédure pénale. N’oublions pas, toutefois, que, si celle-ci est extrêmement importante, car elle touche à nos libertés, la procédure civile est plus encore en souffrance. Or elle est la justice du quotidien, la justice de celles et ceux qui n’iront pas en prison, mais qui ont besoin de récupérer un loyer ou une propriété, de discuter d’un conflit de voisinage, voire d’une dette. Elle est absolument essentielle.

Monsieur le garde des sceaux, en toute honnêteté, il faut saluer ce budget important, qui marque une troisième hausse consécutive, de 8 %, et qui atteint un peu plus de 9 milliards d’euros, ce qui n’est pas inintéressant. L’augmentation atteint maintenant 40 % depuis 2017, rejoignant ce que nous avions nous-mêmes recommandé. Il faut le dire.

Quelques points posent néanmoins question, moins sur le fond que sur notre capacité à mettre en œuvre votre projet.

Vous prévoyez ainsi la création de 10 000 emplois en plus sur le quinquennat. C’est très bien. Cependant, il conviendra d’assurer les embauches annoncées de 2 500 magistrats supplémentaires sur cinq ans sans sacrifier la qualité du recrutement, à laquelle tout le monde est attaché. La capacité de l’École nationale de la magistrature (ENM) est ce qu’elle est, mais ce n’est pas impossible.

En outre, la formation de 500 auditeurs de justice et de 1 000 greffiers par an nécessitera d’importants aménagements, tant pour les premiers que pour les seconds, mais aussi pour les surveillants pénitentiaires et les assistants qui complètent l’équipe entourant les magistrats.

Un orateur déplorait précédemment l’embauche de contractuels. Ces derniers ont pourtant été très utiles. Les magistrats que nous rencontrons dans les juridictions le confirment tous, et ils demandent d’ailleurs que ces emplois soient reconduits.

Prenons garde à ce que nous disons, mes chers collègues : la magistrature a besoin de confiance, de propos rassurants et de moyens pour continuer son travail.

Nous aurons peut-être quelques difficultés à recruter des surveillants pénitentiaires, mais il faudra bien trouver le moyen de rendre cette profession attractive et de fidéliser ses agents.

Vous avez revalorisé les rémunérations à hauteur de 117 millions d’euros, non pas pour chacun des magistrats – ils auraient sans doute apprécié (Sourires.) –, mais pour l’ensemble d’entre eux, de 50 millions d’euros pour les fonctionnaires et de 10 millions d’euros pour les greffiers.

Comme l’a rappelé le rapporteur pour avis Alain Marc, nous sommes attachés à la construction des 15 000 places de prison promises il y a des années. Combien de fois avons-nous déploré, à cette tribune ou dans d’autres cénacles, que ces places de prison ne soient toujours pas construites, et insisté sur la nécessité de les bâtir ?

Ces places de prison sont indispensables, d’une part, pour progresser, autant que faire se peut, vers l’encellulement individuel et, d’autre part, pour mener une politique pénale qui soit complète, c’est-à-dire qui repose non pas seulement sur l’incarcération pure et dure, mais aussi sur d’autres mesures de privation de liberté. Des lieux de semi-liberté sont nécessaires pour assurer cette complémentarité. Nous y serons attentifs, monsieur le garde des sceaux.

Au total, ce rattrapage était absolument nécessaire.

J’en viens au point, qu’il serait sans doute exagéré de qualifier de passionnel, mais que la commission des lois considère du moins comme important, du numérique. D’aucuns diront qu’il s’agit d’un marronnier, mais il faut bien reconnaître que cela reste un point faible. En 2018, Mme Belloubet avait déclaré que le numérique était « le cœur du réacteur ». Nous en étions d’accord !

Vous avez consacré des moyens financiers importants à ce chantier dans les trois derniers budgets, mais la question aujourd’hui n’est pas tant celle des moyens que celle de la mise en œuvre, monsieur le garde des sceaux. Cette remise à niveau doit être menée rapidement, afin de répondre aux attentes des magistrats, des greffiers et, en réalité, de tous les personnels de justice.

Je ne dis pas que nous en sommes au stade de la préhistoire (Sourires.), mais alors que d’autres ont réussi cette réforme, le ministère régalien de première importance qui est le vôtre a tout de même un terrible retard à rattraper.

Il est nécessaire de refonder la maîtrise d’ouvrage des applications et indispensable de renforcer la place du numérique au secrétariat général et dans les autres directions du ministère. Il convient, en somme, que notre justice soit équipée efficacement pour remplir ses missions.

Nous avons ce matin évoqué la mission « Sécurité », singulièrement la loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur et les nouveaux moyens alloués, à hauteur de 15 milliards d’euros, au renforcement de nos services de police judiciaire et de sécurité publique.

Si cette réforme aboutit, nous disposerons de services de police performants et productifs. Il en résultera pour la justice une charge de travail supplémentaire qu’il lui faudra absorber.

L’attelage ne peut fonctionner que s’il est complet. Il faudra donc y veiller, pour ne pas nous retrouver dans une situation ubuesque où les magistrats peineraient à traiter de trop nombreuses arrestations et procédures. Le remède serait pire que le mal, mes chers collègues, et nous savons combien la situation peut s’enflammer rapidement.

Enfin, monsieur le garde des sceaux, il importe que ces efforts budgétaires soient non pas conjoncturels – je ne le crois pas –, mais structurels. Il convient en effet de doter notre justice de moyens pérennes et suffisants pour mener les autres réformes qu’il faudra engager. Je pense notamment au projet de loi, dont nous ne doutons pas qu’il viendra, relatif à la simplification de la procédure pénale, à l’évolution du droit civil et à l’adaptation de notre système judiciaire, qui est au service de l’ensemble de nos concitoyens.

Le groupe Les Républicains que je représente aujourd’hui suivra les avis favorables de nos rapporteurs sur l’ensemble de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Alain Marc.

M. Alain Marc. Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, cette année encore, nous nous réjouissons de voir le budget de la justice progresser de 8 %.

Après avoir été délaissée pendant des années, notre justice en avait bien besoin, au point que les conditions d’exercice des professionnels du droit sont devenues insoutenables. Au point, aussi, que nos concitoyens ont perdu confiance en elle : en juillet dernier, 70 % des Français considéraient que la justice fonctionnait mal.

Lorsque l’on sait le rôle essentiel que cette institution joue dans notre société, aussi bien pour la cohésion nationale que pour la vie de notre démocratie, nous ne pouvions que nous en inquiéter. Il était urgent d’inverser la tendance. Le budget de la justice progresse ainsi de 26 % entre 2020 et 2023.

Comme la commission, nous notons la place prépondérante de l’administration pénitentiaire dans ce budget. La construction de places de prison est une nécessité pour assurer le respect de notre politique pénale. Elle s’impose aussi pour éliminer la surpopulation carcérale et permettre à notre pays de respecter ses engagements en matière de droits humains.

Les juridictions judiciaires ont également un impérieux besoin de crédits. Les magistrats sont débordés, et ils sont depuis longtemps en nombre insuffisant. Dans ces conditions, il est difficile de juger les affaires dans un délai raisonnable.

Le projet de budget pour 2023 prévoit un renforcement significatif des effectifs, que nous saluons, par la création de 1 220 postes nets, dont 200 postes de magistrats.

Autre mesure très attendue de ce projet de budget, les magistrats judiciaires vont bénéficier d’une revalorisation indemnitaire de 1 000 euros brut. Cette revalorisation nous paraît nécessaire pour maintenir l’attractivité de la fonction. Elle contribuera également à mettre fin à une inégalité entre les magistrats judiciaires et les magistrats administratifs ou financiers qui ne se justifiait nullement et à laquelle il est grand temps de mettre un terme.

Le monde judiciaire ne se limite pas aux magistrats, bien que ces derniers en soient la pièce maîtresse. Les greffiers sont également des acteurs très importants. Plusieurs dispositions de ce budget leur sont destinées, puisqu’ils bénéficieront d’une revalorisation indemnitaire et verront leurs effectifs renforcés.

Ce n’est pas à vous, monsieur le garde des sceaux, que nous apprendrons le rôle essentiel des avocats. Auxiliaires de justice, ils assurent la défense de nos concitoyens et se battent pour faire respecter leurs droits et libertés. Cette mission est encore plus nécessaire auprès de ceux de nos concitoyens qui sont les plus démunis.

Le budget de cette année prolonge la dynamique de l’augmentation de la rétribution des avocats d’aide juridictionnelle. Il s’agit ici non pas d’intérêts catégoriels, mais bien de l’accès au droit et au juge. Nous nous félicitons donc de cette augmentation.

Le volet numérique qu’évoquait François-Noël Buffet constitue aussi un chantier important. Comme beaucoup d’autres, le ministère de la justice fait face à des difficultés dans la numérisation de ses activités.

Nous souhaitons tous que l’augmentation du budget de la justice produise ses effets le plus rapidement possible. Les délais de jugement sont encore beaucoup trop longs : plus d’un an pour une affaire civile, deux ans pour un divorce et plus de quatre ans pour une affaire pénale. Nous ne pouvons pas nous en satisfaire. La justice prend du temps, mais tant qu’elle n’est pas passée, l’application du droit est comme suspendue.

Les augmentations de budget comme celles de ces dernières années contribuent à améliorer la justice de notre pays et à renouer la confiance entre les citoyens et leurs institutions – du moins, nous l’espérons.

Nul doute que les défis à venir nécessiteront de persévérer dans cette trajectoire. L’ensemble du groupe Les Indépendants – République et Territoires votera donc en faveur de l’adoption des crédits de cette mission.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – Mme Esther Benbassa applaudit également.)

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, vous ne serez pas étonnés que le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, comme tous les autres dans cet hémicycle, salue l’augmentation de crédits prévue pour cette mission, même si, j’y reviendrai, nous aurons des questions à poser concernant la réalité de cette augmentation.

Je souhaite simplement souligner quelques points.

En ce qui concerne tout d’abord la méthode, le comité des États généraux de la justice avait affirmé dans son rapport le besoin de ce rehaussement budgétaire, mais il précisait aussi la nécessité de repenser de façon systémique et articulée l’institution judiciaire, en soulignant que, avant de poser la question des moyens, il fallait clarifier les objectifs assignés à la justice. Comment avez-vous appréhendé cette démarche, monsieur le garde des sceaux ?

Mon groupe apprécie l’effectivité de l’augmentation du budget de la justice au regard du contexte inflationniste. S’il convient de souligner cette augmentation, a fortiori parce qu’elle intervient à la suite d’autres augmentations, notre collègue Lefèvre, dans l’excellent rapport de la commission des finances, note que le budget de la justice augmente certes de 7,7 % en valeur, mais de 3,2 % seulement en euros constants. Il importe de le souligner.

Par ailleurs, monsieur le garde des sceaux, pouvez-vous nous éclairer sur vos prévisions d’exécution au regard de la sous-exécution des crédits consacrés à l’investissement dans le budget précédent ?

Au sein de notre groupe, nous avons une divergence d’appréciation concernant votre vision quelque peu sécuritaire de la justice, qui s’inscrit dans la continuité des budgets des précédentes années.

Je ne rappellerai pas que le nombre de magistrats et de personnels de justice en France est insuffisant par rapport aux autres pays. Je saluerai plutôt, au nom de mon groupe, les créations d’emplois et les revalorisations salariales qui, même si elles ne résolvent pas les problèmes liés au défaut d’attractivité des métiers, ont toute leur importance.

Nous notons la hausse du budget dédié au bracelet anti-rapprochement, mais nous souhaiterions savoir, monsieur le garde des sceaux, si cela est dû au changement de prestataire ou s’il s’agit d’un renforcement du dispositif.

Mon groupe présentera plusieurs amendements.

Le premier, partagé me semble-t-il sur l’ensemble des travées, vise à revaloriser l’unité de valeur de l’aide juridictionnelle à 42 euros, comme cela était proposé dans le rapport de la mission Perben. En tant qu’ancien avocat, monsieur le garde des sceaux, vous savez combien cette revalorisation est indispensable pour améliorer l’accès au droit des justiciables en difficulté financière.

Par ailleurs, en cette journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes, nous présenterons un amendement visant à instaurer une juridiction spécialisée en charge des violences sexuelles, intrafamiliales et conjugales. Nous avons déjà formulé cette proposition par le passé, et nous continuerons inlassablement de la porter.

Vous le savez, notre modèle est le modèle espagnol, dont je rappellerai quelques résultats, car vous semblez douter de son efficacité, monsieur le garde des sceaux. Depuis 2004, l’Espagne enregistre 25 % de féminicides en moins. Chaque année, quelque 56 000 femmes sont protégées dans ce pays, où deux fois plus de condamnations qu’en France sont par ailleurs prononcées. Enfin, un magistrat espagnol sur trois est formé à cette matière extrêmement particulière.

Sur ce point, qui n’est pas très coûteux – vous en êtes convenu lors de nos travaux en commission des lois, monsieur le garde des sceaux –, nous souhaitons, nonobstant, qu’une mission visant à définir les contours d’une telle juridiction soit prévue, que vous nous précisiez vos ambitions budgétaires.

Sous ces différentes réserves, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicains – Jean-Pierre Sueur n’a pas eu le temps de le dire tout à l’heure – s’apprête à voter les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – Mme Esther Benbassa applaudit également.)

M. Jean-Pierre Sueur. Merci de me suppléer ! (Sourires.)

M. Claude Raynal, président de la commission des finances. Très bien !

M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de budget que j’ai l’honneur de vous présenter aujourd’hui devrait permettre, si vous le votez, une nouvelle hausse de plus de 8 % en 2023 au profit de notre justice.

Ce sont ainsi 710 millions d’euros supplémentaires qui abonderont en 2023 le budget du service public de la justice, qui frôlerait ainsi les 10 milliards d’euros pour l’année 2023. D’aucuns diront peut-être que ce n’est toujours pas suffisant, mais c’est plus que cela n’a jamais été.

Nous poursuivons les hausses sur ce quinquennat, et tous les acteurs du ministère – j’y insiste – bénéficieront directement et concrètement de celles-ci.

Le budget des services judiciaires augmente de 9 %, pour atteindre 3,39 milliards d’euros pour 2023. Les crédits consacrés à l’administration pénitentiaire sont en hausse de plus de 7 %, soit un budget de 3,91 milliards d’euros pour 2023, et ceux de la protection judiciaire de la jeunesse s’accroissent de plus de 10 %, atteignant 917 millions d’euros pour 2023.

Si l’on dresse le bilan de l’effort budgétaire consacré à la justice, depuis mon arrivée, ce sont près de 4 milliards d’euros de crédits supplémentaires qui ont été alloués à la Chancellerie, passant ainsi de 7,6 milliards d’euros en 2020 à 9,6 milliards d’euros en 2023, soit une hausse de plus de 26 % du budget en trois ans, et de plus de 40 % si l’on prend comme point de départ le début du premier quinquennat du Président de la République.

Pour mémoire, le budget de la justice s’élevait, en 2017, à 6,9 milliards d’euros.

Cette nouvelle hausse budgétaire confirme la priorité pluriannuelle donnée à la justice au sein de la politique gouvernementale. Elle confirme notre cap : continuer le rattrapage de trente ans d’abandon de la justice et mettre en œuvre les recommandations issues des États généraux de la justice.

À ce propos, il faut souligner que, si la question des moyens est bien sûr essentielle, nous devons également simplifier la procédure civile et la procédure pénale. Notre objectif – je sais que vous le partagez – est d’avoir une justice plus proche des justiciables, plus rapide et bien sûr plus efficace.

J’annoncerai dans quelques jours le plan d’action issu des travaux des États généraux de la justice. Je viendrai naturellement le présenter devant votre commission des lois.

Mesdames, messieurs les sénateurs, l’efficacité de la justice tient d’abord aux hommes et aux femmes qui font preuve d’un engagement quotidien à son service.

Premièrement, afin de soutenir nos agences, un plan de recrutement de 10 000 emplois supplémentaires sera mis en place d’ici à 2027. Celui-ci comprend notamment des emplois en juridiction, dont 605 ont d’ores et déjà été pérennisés au titre de la justice de proximité à la mi-2022.

Ces 10 000 recrutements seront répartis finement, année après année, en fonction des besoins qui nous remontent du terrain, mais également des besoins opérationnels. J’ai toutefois sanctuarisé la création de 1 500 postes de magistrats et de 1 500 postes de greffiers supplémentaires sur tout le quinquennat, afin de renforcer les effectifs en juridiction.

Ces créations de postes emportent un rythme d’embauche deux fois plus important qu’au cours du premier quinquennat.

En ce qui concerne l’année 2023, quelque 2 253 personnels seront recrutés pour la justice, soit un triplement du rythme de recrutement par rapport à 2022, puisque seules 720 créations d’emplois étaient alors prévues.

Ces 2 253 personnels seront répartis de la façon suivante : 1 220 pour la justice judiciaire, dont 200 magistrats et 191 greffiers, 809 pour l’administration pénitentiaire et 92 pour la protection judiciaire de la jeunesse. Les 132 personnels restants seront affectés à la coordination de la politique publique de la justice. J’ajoute que, en sus de ces 2 253 emplois supplémentaires, 60 sont prévus pour nos opérateurs.

Deuxièmement, mesdames, messieurs les sénateurs, pour assurer ce niveau inédit de recrutement, je souhaite renforcer encore l’attractivité des métiers de la justice par des revalorisations salariales.

À cet effet, le budget 2023 permettra, une fois encore, d’augmenter les crédits alloués au titre des mesures catégorielles, atteignant ainsi 60 millions d’euros en 2023, soit un doublement de l’enveloppe par rapport à 2022, afin de revaloriser les professionnels de ce ministère.

Concernant les magistrats, vous le savez, une revalorisation inédite, d’un montant de 1 000 euros par mois, soit une hausse de plus de 16 % en un an de la masse salariale des magistrats, sera effective à compter du 1er octobre 2023.

La conséquence en est directe : demain, un jeune magistrat sortant de l’École nationale de la magistrature commencera sa carrière à près de 3 000 euros net par mois.

J’en viens aux fonctionnaires. L’année 2023 sera encore une année historique, puisqu’une enveloppe catégorielle de 50 millions d’euros est prévue. Elle contribuera à améliorer l’attractivité de nos métiers, et à développer et fidéliser les compétences.

Par ailleurs, l’effort inédit consenti en faveur de la revalorisation indemnitaire des greffiers et des directeurs des services de greffe judiciaires sera poursuivi. Une enveloppe de 10 millions d’euros est prévue à cette fin en 2023. Au total, entre 2021 et 2023, les personnels de greffe auront bénéficié d’une augmentation de 12 %.

J’ai de plus demandé aux directeurs des services de greffe judiciaires d’engager une réflexion sur une réforme du statut des greffiers.

Concernant les personnels relevant des corps spécifiques de la protection judiciaire de la jeunesse, 7 millions d’euros seront consacrés cette année à des revalorisations indemnitaires.

Nous achevons en 2023 la mesure de revalorisation de l’indemnité pour charge pénitentiaire des surveillants pénitentiaires. Celle-ci est passée de 1 400 euros à 1 869 euros en trois ans. Les surveillants pénitentiaires ont de plus bénéficié en 2022 d’une réforme importante de leur statut et de leur rémunération. La fusion des grades de surveillant et de brigadier a permis de simplifier la carrière des agents et de revaloriser les rémunérations, notamment en début et en fin de carrière.

Comme je l’ai indiqué à plusieurs reprises, cette réforme est une première étape. Des travaux seront engagés dès le début de l’année 2023 avec les organisations syndicales pour travailler à une revalorisation d’envergure du statut des agents pénitentiaires et de leur rémunération. Celle-ci sera mise en œuvre dans les années à venir.

Pour ouvrir les nouveaux établissements pénitentiaires prévus dans le cadre du plan de construction de 15 000 places de prison, nous devons en effet nous donner les moyens de recruter plus et dans de meilleures conditions, mais aussi de fidéliser ces agents qui exercent des missions nécessaires, mais ô combien difficiles, nous en sommes tous conscients.

Enfin, 10 millions d’euros seront consacrés cette année à une revalorisation du régime indemnitaire, mais également indiciaire, de tous nos corps d’encadrement, qu’il s’agisse des directeurs des services de greffe judiciaires, des directeurs pénitentiaires d’insertion et de probation, des directeurs des services de la protection judiciaire de la jeunesse ou des directeurs des services pénitentiaires.

Troisièmement, ces crédits permettront au ministère d’achever le plan de construction des 15 000 places de prison supplémentaires voulu par le Président de la République. Ce plan permettra d’augmenter la capacité carcérale de 60 000 à plus de 75 000 places.

Depuis que j’ai pris mes fonctions de garde des sceaux, je suis pleinement engagé pour la mise en œuvre de ce plan. En ce moment même, dix-huit opérations sont en chantier dans toute la France, dont dix – Avignon, Osny, Meaux et Troyes-Lavau, etc. – seront livrées en 2023.

Sur la cinquantaine de chantiers que compte le « plan 15 000 », la moitié des établissements seront opérationnels en 2024. Le rythme des livraisons va maintenant s’accélérer jusqu’en 2027, car l’ensemble des terrains est désormais identifié.

C’est d’ailleurs jusqu’à cette échéance de 2027 que je vous propose de proroger le moratoire sur l’impératif encellulement individuel.

Dans ce cadre, le Gouvernement émettra un avis favorable sur l’amendement proposé par M. le rapporteur spécial Lefèvre, par lequel il est proposé que deux rapports soient remis, en 2025 et en 2027, afin d’informer le Parlement, en toute transparence et en responsabilité, de l’état d’avancement du programme immobilier pénitentiaire et de ses conséquences sur le taux de placement en cellule individuelle.

Quatrièmement, je souhaite moderniser et agrandir l’immobilier juridictionnel. C’est indispensable si l’on veut accueillir les renforts humains qui sont attendus dans les années à venir. À ce titre, 502 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 269 millions d’euros de crédits de paiement immobiliers sont prévus en 2023.

Ces crédits permettront en outre de poursuivre les opérations majeures engagées lors du quinquennat précédent – je pense notamment aux palais de justice de Lille, de l’île de la Cité et de Bayonne –, de poursuivre l’étude des projets de Cayenne, Cussey, Meaux, Moulins, Nancy, Nantes, Perpignan, et de lancer de nouvelles opérations immobilières comme à Argentan, Chartres, Colmar, Saint-Brieuc ou encore Verdun.

Cinquièmement, et enfin, permettez-moi de mettre en exergue certains efforts budgétaires.

L’enveloppe de crédits consacrée aux dépenses de frais de justice sera portée à 660 millions d’euros, soit une hausse de 12 millions d’euros.

Les crédits alloués aux investissements informatiques seront portés à 195 millions d’euros dans le cadre de la poursuite de la mise en œuvre du plan de transformation numérique du ministère.

Les crédits dédiés à l’aide juridictionnelle continueront de croître en 2023, pour atteindre 641 millions d’euros, soit une hausse de 26 millions d’euros en une année.

Parallèlement, l’aide aux victimes sera portée à 43 millions d’euros, soit une hausse de 7 %, et au sein de cette enveloppe, 16,1 millions d’euros seront dédiés aux violences intrafamiliales, marquant un doublement de ce budget annuel, dont le montant s’élevait à mon arrivée à la Chancellerie en 2020 à 8 millions d’euros.

La justice est à la croisée des chemins. Délaissé pendant près de trois décennies, son budget fait l’objet, depuis cinq ans, d’un renforcement massif de près de 4,7 milliards d’euros, traduction de la volonté claire du Président de la République et de la Première ministre, volonté qui est également la mienne, de considérer la justice comme ce qu’elle est : une institution qui fonde le pacte social.

En tant que parlementaires, il vous revient d’approuver ce renforcement de notre justice, ou bien, mais je pense que nul ne le souhaite, de bifurquer vers les réflexes des décennies passées – sous-dotations, effets d’affichage sans lendemain, court-termisme, « à-quoi-bonisme », etc.

Vous le savez, on ne répare pas trente ans d’abandon budgétaire, humain et politique en un claquement de doigts. La route est longue, bien sûr, mais j’espère que le Sénat, qui accorde à la justice une grande importance, à l’instar de ses commissions des lois et des finances, sera à nos côtés pour voter cette nouvelle hausse de 8 % et nous suivra sur le chemin de la restauration d’ampleur que nous menons.

Il s’agit de construire la justice de qualité que nous appelons tous de nos vœux – une justice rapide, efficace et proche de nos concitoyens –, pour ceux qui la font vivre, mais aussi pour l’ensemble de nos compatriotes, qu’elle sert. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – M. Christian Bilhac applaudit également.)

justice

M. le président. Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Justice », figurant à l’état B.

Mes chers collègues, je vous rappelle que la conférence des présidents a fixé, pour cette mission, la durée maximale de la discussion à trois heures.

En conséquence, l’examen de cette mission pourrait se prolonger jusqu’à vingt heures trente. Si nous n’avions pas terminé à vingt heures trente, la fin de l’examen de cette mission serait reportée à la semaine prochaine.

Mme Cécile Cukierman. Nous pouvons même tenter de terminer avant !

Justice
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Article 44

M. le président. Je vous en saurais gré, ma chère collègue ! (Sourires.)

ÉTAT B

(En euros)

Mission / Programme

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

Justice

12 510 993 647

11 563 403 289

Justice judiciaire

4 514 856 450

4 147 305 671

 Dont titre 2

2 745 253 859

2 745 253 859

Administration pénitentiaire

5 409 946 458

4 927 411 859

 Dont titre 2

3 066 113 201

3 066 113 201

Protection judiciaire de la jeunesse

1 103 663 261

1 087 265 816

 Dont titre 2

644 687 864

644 687 864

Accès au droit et à la justice

713 982 275

713 982 275

Conduite et pilotage de la politique de la justice

764 462 906

682 463 430

 Dont titre 2

220 578 577

220 578 577

Conseil supérieur de la magistrature

4 082 297

4 974 238

 Dont titre 2

3 106 298

3 106 298

M. le président. L’amendement n° II-727, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Justice judiciaire

dont titre 2

1 500 000

 

1 500 000

 

Administration pénitentiaire

dont titre 2

 

 

 

 

Protection judiciaire de la jeunesse

dont titre 2

 

 

 

 

Accès au droit et à la justice

 

 

 

 

Conduite et pilotage de la politique de la justice

dont titre 2

 

 

 

 

Conseil supérieur de la magistrature

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

1 500 000

 

1 500 000

 

SOLDE

+ 1 500 000

+ 1 500 000

La parole est à M. le garde des sceaux.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Cet amendement vise à rétablir les crédits supprimés sur le programme 166, « Justice judiciaire », de la mission « Justice » au cours des débats sur le PLF pour 2023 à l’Assemblée nationale, compte tenu des mouvements de crédits consécutifs à l’adoption de l’amendement n° II-1906.

Ces ouvertures de crédits sont considérées comme des charges de fonctionnement, telles qu’elles sont définies aux 1° à 4°, ainsi qu’au 6°, du I de l’article 5 de la loi organique relative aux lois de finances (Lolf).

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Antoine Lefèvre, rapporteur spécial. Cet amendement, qui vise à rétablir les crédits du programme « Justice judiciaire », a été déposé vers midi, après la réunion de la commission. J’exprimerai donc seulement un avis personnel.

Le texte élaboré par le Gouvernement, sur lequel celui-ci a engagé sa responsabilité en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution, intégrait un amendement rehaussant les crédits en faveur du dispositif téléphone grave danger, mais sans lever le gage.

Dans mon rapport budgétaire, j’avais appelé le Gouvernement à lever ce gage, en rétablissant les crédits du programme « Justice judiciaire ».

Je ne puis donc qu’être favorable à cet amendement, qui vise à suivre ma recommandation.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-727.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L’amendement n° II-68 rectifié ter est présenté par MM. Favreau et Cambon, Mme Gruny, M. Burgoa, Mme Di Folco, MM. Brisson et Belin, Mme Belrhiti, MM. Anglars, D. Laurent, Bonhomme, Bonne et Klinger, Mme Raimond-Pavero et M. Charon.

L’amendement n° II-307 est présenté par Mme de La Gontrie, MM. Sueur, Kanner, Bourgi et Durain, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Justice judiciaire

dont titre 2

Administration pénitentiaire

dont titre 2

Protection judiciaire de la jeunesse

dont titre 2

Accès au droit et à la justice

80 000 000

80 000 000

Conduite et pilotage de la politique de la justice

dont titre 2

80 000 000

80 000 000

Conseil supérieur de la magistrature

dont titre 2

TOTAL

80 000 000

80 000 000

80 000 000

80 000 000

SOLDE

0

0

L’amendement n° II-68 rectifié ter n’est pas soutenu.

La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour présenter l’amendement n° II-307.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Il est défendu, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° II-274 rectifié, présenté par Mme M. Carrère, M. Artano, Mme N. Delattre, MM. Fialaire, Gold, Guérini, Guiol, Requier, Roux, Bilhac et Cabanel et Mme Pantel, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Justice judiciaire

dont titre 2

 

 

 

 

Administration pénitentiaire

dont titre 2

 

 

 

 

Protection judiciaire de la jeunesse

dont titre 2

 

 

 

 

Accès au droit et à la justice

40 000 000 

 

40 000 000 

 

Conduite et pilotage de la politique de la justice

dont titre 2

 

40 000 000 

 

 40 000 000

Conseil supérieur de la magistrature

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

40 000 000 

40 000 000 

 40 000 000

40 000 000 

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Maryse Carrère.

Mme Maryse Carrère. Il est également défendu.

M. le président. L’amendement n° II-239, présenté par MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon, Mme M. Vogel et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Justice judiciaire

dont titre 2

 

 

 

 

Administration pénitentiaire

dont titre 2

 

1 000 000

 

1 000 000

Protection judiciaire de la jeunesse

dont titre 2

 

 

 

 

Accès au droit et à la justice

1 000 000

 

1 000 000

 

Conduite et pilotage de la politique de la justice

dont titre 2

 

 

 

 

Conseil supérieur de la magistrature

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

1 000 000

1 000 000

1 000 000

1 000 000

SOLDE

0

0

0

0

La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Cet amendement vise à revaloriser à 42 euros le montant de l’unité de valeur de l’aide juridictionnelle.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Antoine Lefèvre, rapporteur spécial. Ces amendements ont pour objet d’augmenter les crédits de l’aide juridictionnelle. Cependant, il me semble s’agir davantage d’amendements d’appel destinés à attirer l’attention du Gouvernement sur la faiblesse du montant relatif de l’unité de valeur.

Je partage les préoccupations de mes collègues. Monsieur le garde des sceaux, les avocats nous confient que, dans près de la moitié des cas, leur rétribution au titre de l’aide juridictionnelle n’est pas suffisante pour couvrir les frais qu’ils engagent par dossier. Le rapport de la mission relative à l’avenir de la profession d’avocat, présidée par Dominique Perben, avait, à cet égard, recommandé de rehausser le montant de l’unité de valeur à 40 euros.

Deux éléments attirent cependant notre attention.

Tout d’abord, la revalorisation du montant de l’unité de valeur (UV) a fortement progressé ces dernières années, entraînant, il faut bien le dire, un coût certain pour les finances publiques. Ce montant, qui n’était que de 26,50 euros en 2016, s’élève à 36 euros depuis la loi de finances pour 2022. Un rattrapage a donc eu lieu durant cette période, même s’il semble encore insuffisant dans certains cas. M. le garde des sceaux pourra sans doute nous indiquer s’il envisage de nouvelles pistes d’amélioration pour le prochain budget.

Ensuite, et surtout, l’adoption de ces amendements augmenterait, certes, le budget de l’aide juridictionnelle, mais ne permettrait absolument pas de revaloriser le montant de l’unité de valeur pour les avocats. Leur portée concrète est par conséquent limitée.

La commission demande donc le retrait de ces amendements ; à défaut, son avis serait défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Mesdames, messieurs les sénateurs, le budget qui vous est présenté inscrit 641 millions de crédits consacrés à l’aide juridictionnelle (AJ). Cela représente une hausse de plus de 26 millions d’euros par rapport à 2022 et de 157 millions d’euros depuis 2021, soit 32 % d’augmentation.

À la question : « Allez-vous faire plus dans les prochains budgets ? », je répondrai que telle est ma volonté. Parmi les réponses envisagées issues des États généraux de la justice figure le recours à davantage de modes de résolution amiable, donc de médiation et d’intervention du barreau.

Dans ces conditions, il faudra permettre aux avocats, si je puis m’exprimer ainsi, de préférer la médiation et l’amiable, plutôt que le procès. Naturellement, ils examineront ce qu’ils gagnent et si le procès paie moins que la médiation, ils iront moins vers le procès.

Dans ces conditions, le Gouvernement demande le retrait de ces amendements ; à défaut, son avis serait défavorable.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour explication de vote.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. L’amendement n° II-307 n’est pas du tout un amendement d’appel ! Ce n’est pas parce qu’un progrès a été accompli qu’il est suffisant.

Monsieur le garde des sceaux, je suis presque gênée de le souligner, puisque, dans cet hémicycle, vous êtes l’un de ceux qui connaissent le mieux ce que je vais énoncer : il s’agit de populations qui n’ont pas accès au droit et de professionnels de la justice qui se détournent de plus en plus de l’AJ, parce qu’elles ne s’y retrouvent pas. Si nous voulons réellement que les Français puissent accéder au droit de manière satisfaisante, nous devons adopter cette mesure.

Pour le coup, je vous trouve sévère avec nos anciens confrères. Je ne crois pas qu’ils s’orienteront davantage vers la médiation que vers le procès, simplement parce que ce serait mieux rétribué. De toute façon, nous le savons bien, l’AJ est peu rémunérée ; ce n’est donc jamais intéressant.

Encore une fois, sur ces travées, nous voulons cette revalorisation. Ce n’était pas un amendement d’appel ; nous souhaitons qu’il soit adopté.

M. le président. La parole est à Mme Maryse Carrère, pour explication de vote.

Mme Maryse Carrère. Notre collègue Nathalie Delattre a déposé un amendement identique. L’aide juridictionnelle est un thème cher au groupe du RDSE. Nous avions proposé un montant moins séduisant, mais peut-être plus raisonnable, soit une augmentation de deux euros, un minimum au regard de l’inflation.

L’aide juridictionnelle fait vivre les jeunes avocats ou des avocats se consacrant à des causes difficiles et à des situations précaires. D’ailleurs, la profession d’avocat regroupe un ensemble de praticiens aux profils très variés.

Cet amendement vise à aider non pas les grands cabinets d’affaires, par exemple, qui ne bénéficieront pas de l’aide juridictionnelle, mais des avocats aux parcours plus modestes.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-307.

(Lamendement est adopté.) – (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. le président. En conséquence, les amendements nos II-274 rectifié et II-239 n’ont plus d’objet.

L’amendement n° II-306, présenté par M. Sueur, Mme de La Gontrie, MM. Kanner, Bourgi et Durain, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Justice judiciaire

dont titre 2

 

 

 

 

Administration pénitentiaire

dont titre 2

50 000 000

 

50 000 000

 

Protection judiciaire de la jeunesse

dont titre 2

 

 

 

 

Accès au droit et à la justice

 

 

 

 

Conduite et pilotage de la politique de la justice

dont titre 2

 

50 000 000

 

50 000 000

Conseil supérieur de la magistrature

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

50 000 000

50 000 000

50 000 000

50 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

M. Jean-Pierre Sueur. Vous avez fait preuve tout à l’heure d’un zèle particulièrement remarquable, monsieur le président, en m’interrompant au milieu d’une phrase, ce qui démontre votre grand attachement à la loi du chronomètre. Pourtant mes phrases restent raisonnables – je ne me compare pas à Marcel Proust, vous le savez bien. Vous eussiez donc pu me laisser finir ma phrase.

Que disait la fin de la phrase ? Chacun s’interroge à ce sujet. (Sourires.) Je vais vous rassurer, mes chers collègues. Elle disait – M. le garde des sceaux le sait très bien – qu’il ne suffit pas de construire de nouvelles prisons pour régler le problème de la surpopulation pénitentiaire, mais que les États généraux de la justice demandent une régulation dès maintenant.

Cette régulation doit naturellement être compatible avec les choix réalisés par les juges. Mais il est possible, premièrement, de faire très attention aux courtes peines, qui ont souvent des effets négatifs, deuxièmement, de développer les alternatives à la détention, qui sont aussi des peines et qui sont efficaces, et, troisièmement, de travailler sur les aménagements de peine.

De cela, vous n’avez nullement parlé, monsieur le garde des sceaux, dans votre propos introductif, mais j’espère que vous souscrirez à ces orientations, qui éviteront que la France soit de nouveau condamnée pour indignité.

Il est possible que l’on traite mieux la question par les alternatives et par les aménagements de peine. Nous croyons pour notre part que c’est une absolue nécessité. C’est pourquoi nous avons déposé cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Antoine Lefèvre, rapporteur spécial. Mon cher collègue, vous venez d’évoquer l’importance de soutenir l’Agence du travail d’intérêt général et de l’insertion professionnelle des personnes placées sous main de justice.

Dans le cadre de mes travaux, j’ai interrogé sur ce point les directions du ministère de la justice concernées. Elles m’ont confirmé que les 30 000 postes seraient atteints dès l’année 2023. Encore faut-il ensuite que les places soient occupées, mais cela relève moins de l’administration pénitentiaire que de la décision des magistrats. La diversification des postes a également tendance à s’accroître, ce qui ne peut être que positif pour l’insertion des détenus.

La direction de l’administration pénitentiaire souhaite également redynamiser les partenariats avec les régions, notamment pour la formation professionnelle, et davantage renforcer le lien entre travail et formation professionnelle, en adéquation avec les besoins de main-d’œuvre et les bassins d’emploi des territoires régionaux.

La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, son avis serait défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Même avis, monsieur le président.

M. Jean-Pierre Sueur. Toujours pas de réponse !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-306.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 71 :

Nombre de votants 344
Nombre de suffrages exprimés 344
Pour l’adoption 92
Contre 252

Le Sénat n’a pas adopté.

L’amendement n° II-308, présenté par Mme de La Gontrie, MM. Sueur, Kanner, Bourgi et Durain, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Justice judiciaire

dont titre 2

40 000 000

 

40 000 000

 

Administration pénitentiaire

dont titre 2

 

 

 

 

Protection judiciaire de la jeunesse

dont titre 2

 

 

 

 

Accès au droit et à la justice

 

 

 

 

Conduite et pilotage de la politique de la justice

dont titre 2

 

40 000 000

 

40 000 000

Conseil supérieur de la magistrature

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

40 000 000

40 000 000

40 000 000

40 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Laurence Rossignol.

Mme Laurence Rossignol. Cet amendement, que je défends avec mes collègues du groupe socialiste, vise à créer une juridiction spécialisée dans la lutte contre les violences commises, au sein de la famille, à l’encontre des femmes et des enfants.

La présentation de cet amendement est pour moi l’occasion d’interroger le garde des sceaux et de lui exprimer mon inquiétude.

Le président Macron avait, au cours de sa campagne électorale, pris un engagement en faveur de la création de cette juridiction spécialisée. La ministre chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes, de la diversité et de l’égalité des chances y est attachée et y travaille. Deux parlementaires se sont vu confier une mission et ont été nommées par la Première ministre.

Le président de la République était aujourd’hui à Dijon. J’imagine qu’il ne s’y est pas rendu uniquement pour rencontrer son ami, le maire de cette ville. Un 25 novembre, il avait également des annonces à faire en matière de lutte contre les violences faites aux femmes et aux enfants, sans doute… Or nous attendions une annonce sur la juridiction spécialisée.

La défense de cet amendement vous fournit l’occasion, monsieur le garde des sceaux, de nous confirmer l’engagement du président de la République en faveur de la mise en place de cette juridiction spécialisée, car nous en avons besoin.

En effet, nous avons identifié les violences faites aux femmes avant leur départ du domicile conjugal, ainsi que le parcours de sortie du domicile – éviction du conjoint violent, éventuellement complétée de la mise à l’abri de la femme et de ses enfants. Un autre parcours doit être identifié ensuite, celui des violences post-séparation, dans lesquelles les hommes, qui ont perdu la pleine propriété et la possession de leur femme, continuent de développer leur vindicte à l’encontre de leur ex-épouse par l’intermédiaire des enfants.

Ces violences-là se nouent dans le cabinet du juge aux affaires familiales et parfois conduisent jusqu’au juge des enfants, ouvrant des procédures parallèles aux plaintes déposées devant la justice pénale.

Deux ou trois juridictions traitent donc parallèlement de la même affaire. Elles s’attendent les unes les autres, chacune tenant l’autre en l’état, et les femmes sont coincées.

Nous avons besoin de cette juridiction spécialisée.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Antoine Lefèvre, rapporteur spécial. La position de la commission est conforme à celle qui a déjà été exprimée par mes collègues de la commission des lois, ainsi que par le Sénat, à l’occasion de l’examen du projet de loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur.

Ce n’est pas, sans doute, par le biais d’un amendement qu’une telle réforme de notre organisation judiciaire peut être proposée,…

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Mais il s’agit de crédits !

M. Antoine Lefèvre, rapporteur spécial. … même si cette proposition a pour mérite d’aborder ce sujet extrêmement délicat, comme vous venez de le faire.

D’importantes questions de procédure, de compétences, de moyens et d’organisation devraient être réglées avant d’instaurer une telle juridiction. De même, des travaux préparatoires devraient être conduits avec les professionnels de la justice.

La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, son avis serait défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Je voudrais vous rassurer, madame la sénatrice Rossignol, le président de la République a eu d’autres occupations à Dijon que de rencontrer M. Rebsamen. Il s’est notamment assuré de la façon dont les gendarmes sont aujourd’hui formés pour recueillir la parole des femmes victimes de violences intrafamiliales. J’étais à ses côtés, et ce qui nous a été montré était tout à fait passionnant.

Ensuite, pardonnez-moi de le rappeler, mais un travail parlementaire est en cours. Celui-ci a été confié à Mme la sénatrice Dominique Vérien et à Mme la députée Émilie Chandler. Si le président de la République annonçait des mesures au cours de cette visite à Dijon ou si je m’exprimais à ce propos, vous seriez, sans aucun doute, la première à déclarer que nous ne respectons pas le travail parlementaire. Souffrez que ce travail se termine.

Mme Laurence Rossignol. Ce sont les femmes qui souffrent !

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Je pense qu’il est en de très bonnes mains et que des réponses seront trouvées à ces questions importantes.

Je sais que vous consultez et travaillez beaucoup. Encore une fois, ce sujet est traité, soyez tout à fait rassurée, et les réponses seront apportées en temps voulu, madame la sénatrice.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour explication de vote.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. J’entendais notre collègue rapporteur spécial de la commission des finances, et je ne voudrais pas que des malentendus s’installent : il ne s’agit pas de créer la juridiction spécialisée. Nous parlons de budget aujourd’hui.

Si l’inscription budgétaire que nous proposons est refusée, cela implique que l’année 2023 ne verra pas la création de juridictions spécialisées. Nous proposons donc simplement que les conclusions des travaux, menés par Dominique Vérien et notre collègue députée, puissent trouver leur concrétisation au cours de l’année prochaine.

Si vous refusez ces crédits, cela signifie que vous refusez toute traduction concrète des propositions de cette mission, quelle que soit leur nature. C’est très grave ; il y a sur ce sujet une obstination qui est totalement incompréhensible.

M. le président. La parole est à Mme Dominique Vérien, pour explication de vote.

Mme Dominique Vérien. La mise ne place d’une juridiction spécialisée est effectivement la question qui nous a été posée. Vous le savez, je partage cette opinion qu’il est impossible qu’un juge aux affaires familiales prenne une décision sans concertation avec le juge des enfants, en ignorant totalement le volet pénal de l’affaire. C’est absolument délétère.

Une solution doit donc être trouvée pour que tous les acteurs travaillent ensemble. C’est ce qu’on appelle une juridiction spécialisée.

Actuellement, et jusqu’au mois de janvier prochain, nous sommes en train de recenser les bonnes pratiques au sein des différentes juridictions, dans le cadre de notre mission. L’objectif que nous nous sommes fixé, Émilie Chandler et moi-même, pour la remise de notre rapport, en mars, est de définir deux étapes.

La première étape est de court terme et a trait à ce qui peut être immédiatement mis en place pour que cela fonctionne mieux. Nous avons, par exemple, entendu le tribunal de Châlons-en-Champagne, qui a déjà mis en place plusieurs dispositifs, qui fonctionnent bien, à budget constant, parce qu’il s’agit de bonnes pratiques.

En revanche, des mesures seront probablement à mettre en place à plus long terme. Ce sera la seconde étape, et elle requerra, comme je l’ai souligné plus tôt, de la formation, de la formation et encore de la formation. En effet, chez les gendarmes, les magistrats – de toutes catégories d’ailleurs – ou les services sociaux, le point faible, c’est la méconnaissance de ce que sont les violences conjugales.

Très clairement, la véritable juridiction spécialisée dont nous rêvons ne sera pas mise en place en 2023. Cette année-là, nous mettrons en œuvre les pratiques qui permettent de fonctionner mieux, le plus rapidement possible, et d’obtenir immédiatement de meilleurs résultats.

Ensuite, un temps de formation sera nécessaire. La véritable juridiction spécialisée verra donc le jour plutôt en 2024.

M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.

Mme Laurence Rossignol. Je remercie Dominique Vérien, dont je connais le travail et l’engagement. Je sais que sa mission a l’intention de travailler par étapes.

Cependant, ma chère collègue, vous venez de mettre le doigt sur ce qui fait débat. Allons-nous vers une solution élaborée à moyens constants et dans l’organisation telle qu’elle existe aujourd’hui ? S’agit-il d’une meilleure coordination des magistrats, comme cela existe déjà dans un certain nombre de tribunaux ?

D’une part, cette coordination suppose des actions de formation. Depuis quelques années, les magistrats sortant de l’École nationale de la magistrature sont supposés être formés sur les violences. D’autre part, tout cela est très bien, à un détail près : les magistrats obtiennent des mutations. Les protocoles mis en place au sein des tribunaux sont souvent dépendants de l’engagement personnel des magistrats concernés par ce dossier.

C’est pourquoi je distingue coordination du travail et mise en place d’une réelle juridiction spécialisée.

Les violences faites aux femmes, les féminicides, les 80 000 actes de violence commis chaque année et les violences faites aux enfants sont un sujet majeur de sécurité et de politique pénale.

Des parquets spécialisés en matière de terrorisme et de pédocriminalité ont été mis en place, parce que certaines infractions et certains types de délinquance nécessitent une action particulière de nos magistrats.

J’entends vos propos et je comprends la première étape que vous proposez. Mais ma grande crainte est que l’on s’en tienne là, quels que soient votre bonne volonté et votre engagement personnel.

Ce que nous demandons par cet amendement est un engagement du ministre et une confirmation que l’objectif du Gouvernement est bien de mettre en place une juridiction spécialisée, le travail des parlementaires consistant à préparer l’état des lieux et les pistes envisagées pour sa meilleure mise en œuvre.

M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Madame la sénatrice, je vous entends murmurer dans mon dos – ce n’est plus un murmure d’ailleurs : « Il n’en veut pas ». Pardonnez-moi, mais pour ma part je suis respectueux du travail qui est en cours.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Cela vous arrange !

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Je vous remercie d’ailleurs, madame Vérien, de nous avoir répété vos propos.

Si, à cet instant, je déclarais que votre travail, au fond, ne sert à rien, que nous ne l’attendons pas et que nous discutions des crédits, ce serait, pardonnez-moi de vous le dire, mettre la charrue avant les bœufs !

Vous cherchez à faire de la politique et à préempter le sujet. Or examinez ce que nous avons réalisé et ce que vous avez fait, examinez les budgets que nous avons consacrés, ce qui est bien légitime, aux VIF, les violences intrafamiliales – ce sigle est hélas presque devenu un nom commun aujourd’hui ! Honnêtement, nous n’avons pas de leçons à recevoir de vous.

J’attends que le travail parlementaire soit terminé. C’est ainsi que cela doit se passer. Si je faisais le contraire, comme vous cherchez parfois à faire le buzz et la polémique (Protestations sur les travées du groupe SER.), vous diriez que je ne respecte pas le travail des parlementaires. Mais nous n’allons pas polémiquer ici ce soir : le Sénat est un lieu d’apaisement.

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. C’est vrai ! Cela devrait être dit plus souvent.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-308.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 72 :

Nombre de votants 344
Nombre de suffrages exprimés 344
Pour l’adoption 92
Contre 252

Le Sénat n’a pas adopté.

L’amendement n° II-285, présenté par Mme Cukierman et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

I. – Créer le programme :

Création d’une politique de régulation carcérale

II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Justice judiciaire

dont titre 2

 

 

 

 

Administration pénitentiaire

dont titre 2

 

30 000 000

 

30 000 000

Protection judiciaire de la jeunesse

dont titre 2

 

 

 

 

Accès au droit et à la justice

 

 

 

 

Conduite et pilotage de la politique de la justice

dont titre 2

 

 

 

 

Conseil supérieur de la magistrature

dont titre 2

 

 

 

 

Création d’une politique de régulation carcérale

30 000 000

 

30 000 000

 

TOTAL

30 000 000

30 000 000

30 000 000

30 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. Il est défendu, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Antoine Lefèvre, rapporteur spécial. Cet amendement vise à créer un programme, doté de 30 millions d’euros, dédié à la création d’une politique de régulation carcérale.

Au risque de vous surprendre, ma chère collègue, je partage le fond de votre propos. Je rappelle régulièrement, dans le cadre de mes travaux, qu’une politique pénitentiaire ne peut se résumer à une politique immobilière et à la construction de places supplémentaires en détention.

Toutefois, et c’est là sans doute où nous divergeons, il me semble illusoire de croire pouvoir régler complètement la situation, à court terme, grâce un mécanisme de régulation carcérale. D’ailleurs, si le comité des États généraux de la justice évoque cette piste, c’est davantage dans une perspective de moyen terme et au travers d’un double mécanisme de seuil d’alerte et de seuil critique.

Cependant, l’examen de votre amendement nous permet d’interroger le Gouvernement sur les suites qu’il entend donner à cette préconisation.

La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, son avis serait défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Même avis, monsieur le président.

M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.

Mme Cécile Cukierman. Personne ne me surprend, monsieur le rapporteur ! Ma philosophie est que la contradiction humaine et son propre dépassement sont ce qui nous fait agir.

Je maintiendrai cet amendement. Cependant, ce sujet est toujours en débat et doit être questionné, car l’un ne va pas sans l’autre.

Il s’agissait plutôt d’un amendement d’appel. J’en profite également pour signaler que, selon une sorte de parallélisme des formes, nous défendrons dans quelques instants un amendement du même type en matière de protection judiciaire de la jeunesse.

Dans la même veine, cet amendement vise à nous permettre de savoir raison garder en matière de construction pénitentiaire.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-285.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 73 :

Nombre de votants 344
Nombre de suffrages exprimés 344
Pour l’adoption 92
Contre 252

Le Sénat n’a pas adopté.

L’amendement n° II-238, présenté par MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon, Mme M. Vogel et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :

I. – Créer le programme :

Fonds pour la création d’un programme d’accompagnement Justice-Santé mentale

II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Justice judiciaire

dont titre 2

 

 

 

 

Administration pénitentiaire

dont titre 2

 

15 000 000

 

15 000 000

Protection judiciaire de la jeunesse

dont titre 2

 

 

 

 

Accès au droit et à la justice

 

 

 

 

Conduite et pilotage de la politique de la justice

dont titre 2

 

 

 

 

Conseil supérieur de la magistrature

dont titre 2

 

 

 

 

Fonds pour la création d’un programme d’accompagnement Justice-Santé mentale

15 000 000

 

15 000 000

 

TOTAL

15 000 000

15 000 000

15 000 000

15 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Cet amendement vise à instaurer un fonds pour la création d’un programme d’accompagnement justice-santé mentale.

En réalité, cette proposition s’inspire d’un dispositif existant au Québec depuis vingt ans. Il permet d’accompagner et d’encadrer les personnes présentant un problème de santé mentale et ayant commis des infractions criminelles dans le processus judiciaire, tout en leur offrant les moyens d’améliorer leur situation.

En France, les problèmes de santé mentale touchent huit fois plus de personnes dans la société carcérale que dans la société libre.

Le présent amendement a ainsi pour objet de lancer une expérimentation dans le but de déployer le programme d’accompagnement justice-santé mentale en France.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Antoine Lefèvre, rapporteur spécial. J’entends les arguments soulevés par notre collègue, mais la création d’un fonds spécifique ne nous semble pas constituer le véhicule budgétaire le plus adapté. Au contraire, cette préoccupation doit être partagée par l’ensemble des acteurs de la justice de manière transversale.

Des actions sont déjà menées en ce sens par le ministère, que ce soit auprès des mineurs ou dans les établissements pénitentiaires, et M. le garde des sceaux pourra sans doute nous en dire plus.

La commission émet donc un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Monsieur le sénateur, je veux tout d’abord vous rappeler que les soins psychiatriques aux personnes détenues relèvent au premier chef du ministère de la santé et de la prévention, même si cet enjeu mobilise au quotidien tous les services de l’État, notamment l’administration pénitentiaire.

Les ministères de la justice et de la santé mènent un travail conjoint pour améliorer les modalités de prise en charge des personnes détenues nécessitant des soins psychiatriques, suivant la feuille de route qu’ils ont signée pour la période 2019-2022 et qui sera reconduite à compter de 2023.

Dans ces conditions, je demande le retrait de cet amendement. À défaut, j’émettrais un avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-238.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° II-237, présenté par MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon, Mme M. Vogel et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Justice judiciaire

dont titre 2

 

 

 

 

Administration pénitentiaire

dont titre 2

 

5 000 000

 

5 000 000

Protection judiciaire de la jeunesse

5 000 000

 

5 000 000

 

dont titre 2

5 000 000

5 000 000

Accès au droit et à la justice

 

 

 

 

Conduite et pilotage de la politique de la justice

dont titre 2

 

 

 

 

Conseil supérieur de la magistrature

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

5 000 000

5 000 000

5 000 000

5 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Le présent amendement a pour objet de déployer des crédits pour le recrutement d’éducateurs de la protection judiciaire de la jeunesse, un secteur en proie à une crise matérielle et des vocations depuis des années.

Les crédits affectés au programme « Protection judiciaire de la jeunesse » se concentrent majoritairement dans la poursuite de création de nouveaux centres éducatifs fermés, très coûteux, sans remédier à la crise que subit le personnel de la PJJ.

La Contrôleure générale des lieux de privation de liberté a mis en garde sur la nécessité d’établir un bilan actualisé des structures de ce type et de cesser d’en construire de nouvelles.

Le présent amendement vise donc à renforcer les moyens financiers et humains des acteurs de la PJJ, qui assurent des missions d’éducation et de prévention auprès des mineurs.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Antoine Lefèvre, rapporteur spécial. Je partage bien évidemment vos préoccupations sur la PJJ, mon cher collègue, notamment sur la nécessité d’en revaloriser les métiers, qui souffrent d’un déficit d’attractivité, alors même qu’ils sont essentiels et répondent à une mission de service public.

Je ne suis toutefois pas d’accord sur le manque de moyens que vous mettez en avant, ni même sur la priorité qui serait donnée à la construction de centres éducatifs fermés.

La hausse de 10,3 % des crédits alloués à la PJJ est en très grande partie tirée par l’augmentation des dépenses de personnel, qui s’explique par le relèvement du point d’indice, mais, surtout, par l’effet en année pleine des revalorisations décidées dans le cadre du Ségur. Certains corps communs spécifiques, tels que les éducateurs, les travailleurs sociaux et les psychologues, ont en outre bénéficié de mesures catégorielles.

En conséquence de ces évolutions positives figurant dans le projet de loi de finances pour 2023, l’avis de la commission est défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Les crédits de personnels pour la PJJ s’élèveront en 2023 à 645 millions d’euros, soit une hausse de 77 millions d’euros ou de 14 % par rapport à la loi de finances pour 2022.

Par ailleurs, 92 créations d’emplois sont prévues à la PJJ, c’est-à-dire 51 de plus qu’en 2022.

Dans ces conditions, le Gouvernement émet donc évidemment un avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-237.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° II-236, présenté par MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon, Mme M. Vogel et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Justice judiciaire

dont titre 2

4 000 0000

 

4 000 000

 

Administration pénitentiaire

dont titre 2

 

4 000 0000

 

4 000 000

Protection judiciaire de la jeunesse

dont titre 2

 

 

 

 

Accès au droit et à la justice

 

 

 

 

Conduite et pilotage de la politique de la justice

dont titre 2

 

 

 

 

Conseil supérieur de la magistrature

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

4 000 000

4 000 000

4 000 000

4 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Cet amendement vise à revaloriser la rémunération des greffiers.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Antoine Lefèvre, rapporteur spécial. Je partage vos préoccupations sur la situation des greffiers, monsieur Dossus. J’ai moi-même rencontré leurs organisations professionnelles.

Nous avons incontestablement accumulé un certain retard dans le traitement de leur charge de travail et la revalorisation de leur rémunération. Il ne faut toutefois pas nier les efforts entrepris ces deux dernières années, ainsi que ceux qui sont à venir : 191 postes de greffiers seraient créés l’an prochain et 1 500 d’ici à 2027 – la montée en charge est nécessairement progressive, car il faut tenir compte du temps de formation initiale. De même, la rémunération des greffiers augmenterait d’environ 150 euros par mois cette année.

Il ne me semble donc pas nécessaire d’abonder les crédits, d’autant que vous proposez surtout un montant d’appel à travers cet amendement.

La commission demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Les greffiers jouent un rôle absolument essentiel, et c’est la raison pour laquelle le ministère a souhaité revaloriser leur rémunération, dans les termes qui viennent d’être rappelés par le rapporteur.

La rémunération des greffiers a progressé de près de 12 % depuis 2020, soit une augmentation d’environ 1 500 euros par an. Cette hausse va se poursuivre : 15 millions d’euros supplémentaires, répartis entre les différents corps de greffe, sont déjà prévus à cette fin dans le projet de budget.

Je sollicite donc le retrait de cet amendement. À défaut, mon avis serait défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-236.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° II-325, présenté par Mme de Marco, MM. Dossus, Breuiller, Benarroche, Dantec, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Justice judiciaire

dont titre 2

 

 

 

 

Administration pénitentiaire

dont titre 2

2 500 000

 

2 500 000

 

Protection judiciaire de la jeunesse

dont titre 2

 

 

 

 

Accès au droit et à la justice

 

 

 

 

Conduite et pilotage de la politique de la justice

dont titre 2

 

2 500 000

 

2 500 000

Conseil supérieur de la magistrature

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

2 500 000

2 500 000

2 500 000

2 500 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Le centre pénitentiaire de Bordeaux-Gradignan est l’un des plus vétustes de France.

En juillet dernier, la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté a dressé un constat accablant : le taux d’occupation global y était de 199 %, et même de 235 % pour la maison d’arrêt des hommes ; 145 cellules étaient triplées avec un matelas au sol et de nombreux détenus avaient un espace personnel de moins de 3 mètres carrés.

Dans la foulée, le 13 octobre dernier, le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux a enjoint au ministère de la justice de mettre en œuvre neuf mesures, dont la rénovation des cellules.

Cet amendement vise à ouvrir les crédits nécessaires à cette rénovation. Des mesures d’urgence doivent être prises, afin de garantir le respect des droits fondamentaux, d’autant que le chantier de reconstruction de la prison, qui ne se terminera qu’en 2027, restera largement insuffisant, ces travaux permettant à peine d’absorber la surpopulation actuelle.

Malheureusement, la prison de Gradignan n’est pas un cas isolé : en 2020, la justice française a alerté sur les conditions de vie indignes des détenus dans 35 établissements pénitentiaires. La France a également été condamnée à dix-huit reprises par la Cour européenne des droits de l’homme pour violation de l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme au titre des conditions de détention.

En janvier 2020, cette même Cour européenne a condamné la France à prendre des mesures structurelles pour mettre un terme à la surpopulation carcérale.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Antoine Lefèvre, rapporteur spécial. Cet amendement semble davantage être un amendement d’appel visant à attirer l’attention sur la situation du centre pénitentiaire de Bordeaux-Gradignan.

À titre personnel, j’entends votre appel, mon cher collègue : j’ai prévu de me rendre sur place en 2023 en qualité de rapporteur spécial.

Je signale également que, dans le cadre de mes travaux budgétaires, j’ai interrogé le directeur de l’administration pénitentiaire sur la rénovation des établissements, car la construction de nouvelles places dans le cadre du « plan 15 000 » ne doit pas conduire à négliger l’entretien et la rénovation de l’existant.

Je vous communique donc les chiffres que j’ai obtenus : l’administration pénitentiaire disposera l’an prochain d’un budget inédit de 142 millions d’euros dédiés à la maintenance et à l’entretien des bâtiments.

Ce montant est plus élevé que la moyenne de 110 millions d’euros qui prévalait sur la période 2018-2022 et bien supérieur aux 40 à 60 millions d’euros qui avaient été budgétés de 2014 à 2016 et qui nous avaient conduits à accumuler un important retard dans la rénovation d’établissements parfois indignes. Le ministère pourra sans doute vous en dire plus sur la répartition de ces fonds.

La commission demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Évidemment, ces situations de tension pénitentiaire constituent une véritable préoccupation pour le Gouvernement. Sur le plan immobilier, on peut soit construire un nouvel établissement, soit le rénover. S’agissant de Bordeaux-Gradignan, j’ai déjà évoqué la situation avec Mme la présidente Delattre.

Pour répondre à ces enjeux majeurs, le ministère agit. Le nouveau centre pénitentiaire en cours de construction sera mis en service progressivement : une première tranche sera livrée en 2023 et une seconde en 2026, ce qui permettra la création de 150 places supplémentaires.

Des travaux, dont certains sont déjà engagés, permettront par ailleurs de répondre aux injonctions du tribunal administratif en ce qui concerne la luminosité des cellules, au moyen notamment du changement des châssis les plus dégradés et de l’amélioration de l’éclairage. D’autres travaux, d’un montant de 655 000 euros, sont également prévus pour remettre en état les douches, résorber les infiltrations et reprendre la peinture des cellules.

Je vous confirme que les crédits nécessaires aux travaux d’amélioration de la prison de Gradignan sont inscrits dans l’enveloppe de rénovation des établissements, qui, je le rappelle, a doublé depuis 2018, pour atteindre plus de 140 millions d’euros en 2023.

C’est pourquoi je vous demande de retirer cet amendement. À défaut, j’émettrais un avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-325.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° II-312 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, M. Artano, Mme M. Carrère, MM. Fialaire, Gold, Guérini, Guiol, Requier, Roux, Bilhac et Cabanel et Mme Pantel, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Justice judiciaire

dont titre 2

 

 

 

 

Administration pénitentiaire

dont titre 2

1 000 000 

 

1 000 000 

 

Protection judiciaire de la jeunesse

dont titre 2

 

 

 

 

Accès au droit et à la justice

 

 

 

 

Conduite et pilotage de la politique de la justice

dont titre 2

 

1 000 000 

 

1 000 000 

Conseil supérieur de la magistrature

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

1 000 000

1 000 000

1 000 000

1 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Stéphane Artano.

M. Stéphane Artano. Cet amendement de Mme Delattre fait écho au rapport sénatorial Mieux organiser la Nation en temps de crise, qui avait montré que les services pénitentiaires d’insertion et de probation (Spip) avaient connu de graves perturbations lors de la crise sanitaire, notamment en raison d’un manque d’équipements rendant difficile le travail à distance.

La numérisation de la justice ne doit pas négliger les Spip, qui peuvent assumer une grande partie de leurs missions à distance, à condition de pouvoir se connecter.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Antoine Lefèvre, rapporteur spécial. Cet amendement vise à majorer d’un million d’euros les crédits à destination des services pénitentiaires d’insertion et de probation.

Notre collègue insiste à juste titre sur l’équipement informatique et la numérisation des Spip. Je veux à cet égard rappeler que le plan de transformation numérique de la justice concerne l’ensemble des services et des métiers, y compris donc les Spip.

Les crédits ne sont pas forcément labellisés sur ceux de l’administration pénitentiaire, car les projets sont parfois pilotés par le secrétariat général du ministère de la justice. S’agissant des équipements pour le télétravail, le ministère a confirmé que, désormais, l’ensemble des agents ayant des fonctions pouvant être exercées à distance disposent des équipements nécessaires.

La commission demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Même avis : retrait ou avis défavorable.

M. Stéphane Artano. Je le retire, monsieur le président !

M. le président. L’amendement n° II-312 rectifié est retiré.

L’amendement n° II-341 rectifié bis, présenté par Mme M. Filleul, M. Sueur, Mme de La Gontrie, M. Bourgi, Mme G. Jourda et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Justice judiciaire

dont titre 2

 

 

 

 

Administration pénitentiaire

dont titre 2

 

 1 000 000

 

 1 000 000

Protection judiciaire de la jeunesse

dont titre 2

 

 

 

 

Accès au droit et à la justice

1 000 000

 

1 000 000

 

Conduite et pilotage de la politique de la justice

dont titre 2

 

 

 

 

Conseil supérieur de la magistrature

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

1 000 000

1 000 000

1 000 000

1 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

M. Jean-Pierre Sueur. Au travers de cet amendement, notre collègue Martine Filleul propose de favoriser l’accès à internet en prison.

En 2020, la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté avait estimé dans un rapport que cet accès devait être considéré comme « prioritaire », considérant cette privation comme une « entrave » à de nombreux droits fondamentaux, dont la liberté d’expression, le droit à l’éducation et le droit d’une personne détenue à la préparation de son retour au sein de la société.

La même année, la mission d’information du Sénat sur la lutte contre l’illectronisme et pour l’inclusion numérique qualifiait cette situation de « double peine » pour les personnes privées de liberté. Plusieurs pays ont d’ailleurs introduit des accès contrôlés à internet en cellule, notamment l’Allemagne, la Suisse et les États-Unis.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Antoine Lefèvre, rapporteur spécial. Vous parlez d’une interdiction totale en détention, monsieur Sueur. J’aimerais nuancer vos propos, car c’est un sujet que j’ai abordé dans le cadre de mes travaux budgétaires.

Ainsi, depuis l’année dernière, une expérimentation est menée pour équiper les cellules de maisons d’arrêt de tablettes sécurisées. Ces tablettes permettent aux détenus d’accéder à leurs dossiers ou de suivre le traitement de leurs demandes, y compris de formation.

La commission demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.

M. Jean-Pierre Sueur. Certes, l’expérimentation est en cours, mais Mme Filleul veut tout simplement la favoriser et l’accélérer.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-341 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° II-286, présenté par Mme Cukierman et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

I. – Créer le programme :

Renforcement des moyens visant à favoriser les peines alternatives et les aménagements de peines de la protection judiciaire de la jeunesse

II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Justice judiciaire

dont titre 2

 

 

 

 

Administration pénitentiaire

dont titre 2

 

 

 

 

Protection judiciaire de la jeunesse

dont titre 2

 

600 000

 

1 900 000

Accès au droit et à la justice

 

 

 

 

Conduite et pilotage de la politique de la justice

dont titre 2

 

 

 

 

Conseil supérieur de la magistrature

dont titre 2

 

 

 

 

Renforcement des moyens visant à favoriser les peines alternatives et les aménagements de peines de la protection judiciaire de la jeunesse

600 000

 

1 900 000

 

TOTAL

600 000

600 000

1 900 000

1 900 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. Il est défendu, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Antoine Lefèvre, rapporteur spécial. Cet amendement d’appel semble satisfait par le droit existant et les réformes engagées par le ministère, même si le rythme de celles-ci est sans doute encore trop lent.

Par exemple, lors de l’examen de la loi de programmation, nous avions voté une diversification du panel des peines applicables aux mineurs, afin de mieux les adapter. Le ministère propose également aux professionnels des formations aux aménagements de peine, pour intégrer ces évolutions dans leurs pratiques.

En conséquence, la commission sollicite le retrait de cet amendement. À défaut, elle émettrait un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Le Gouvernement a la même position de la commission.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-286.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 74 :

Nombre de votants 344
Nombre de suffrages exprimés 344
Pour l’adoption 92
Contre 252

Le Sénat n’a pas adopté.

Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Justice », figurant à l’état B.

Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits, modifiés.

(Les crédits sont adoptés.)

M. le président. J’appelle en discussion les articles 44 à 44 ter, ainsi que les amendements tendant à insérer des articles additionnels après l’article 44 ter, qui sont rattachés pour leur examen aux crédits de la mission « Justice ».

Justice

État B
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Article 44 bis (nouveau)

Article 44

Au premier alinéa de l’article 7 de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle, le mot : « sixième » est remplacé par le mot : « huitième ». – (Adopté.)

Article 44
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Article 44 ter (nouveau)

Article 44 bis (nouveau)

La loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique est ainsi modifiée :

1° L’article 13 est ainsi modifié :

a) Le premier alinéa est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :

« I. – Il est institué un bureau d’aide juridictionnelle chargé de :

« 1° Se prononcer sur les demandes d’admission à l’aide juridictionnelle relatives aux instances portées devant les juridictions du premier et du second degrés, à l’exécution de leurs décisions et aux transactions avant l’introduction de l’instance ;

« 2° Constater l’éligibilité ou l’inéligibilité à l’aide juridictionnelle ou à l’aide à l’intervention de l’avocat de la personne qui a bénéficié de l’intervention d’un avocat dans les conditions prévues à l’article 19-1. » ;

b) Au début du deuxième alinéa, est ajoutée la mention : « II. – » ;

c) Au quatrième alinéa, les mots : « statuant sur » sont remplacés par les mots : « chargée d’examiner » ;

d) Avant le dernier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Chacune de ces sections est également chargée de constater l’éligibilité ou l’inéligibilité des personnes ayant bénéficié de l’intervention d’un avocat dans les conditions prévues à l’article 19-1. » ;

e) Au début du dernier alinéa, est ajoutée la mention : « III. – » ;

2° L’article 21 est ainsi modifié :

a) Le premier alinéa est complété par les mots : « et à l’aide à l’intervention de l’avocat dans les procédures non juridictionnelles » ;

b) Le deuxième alinéa est complété par les mots : « ou de l’aide à l’intervention de l’avocat dans les procédures non juridictionnelles » ;

c) Le troisième alinéa est complété par les mots : « ou par l’aide à l’intervention de l’avocat dans les procédures non juridictionnelles » ;

3° Les articles 64, 64-1, 64-1-1, 64-1-2 et 64-3 sont abrogés ;

4° Après le mot : « résultant », la fin de l’article 69-2 est ainsi rédigée : « de la loi n° … du … de finances pour 2023. » ;

5° Le 9° de l’article 70 est ainsi modifié :

a) Après le mot : « juridictionnelle », sont insérés les mots : « et de l’aide à l’intervention de l’avocat dans les procédures non juridictionnelles » ;

b) À la fin, les mots : « 43 et 44 » sont remplacés par les mots : « 13, 19-1, 43, 44 et 67-2 ». – (Adopté.)

Article 44 bis (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Article additionnel après l'article 44 ter - Amendement n° II-338 rectifié bis

Article 44 ter (nouveau)

À la fin du premier alinéa de l’article 8 de l’ordonnance n° 2022-478 du 30 mars 2022 portant partie législative du code pénitentiaire, l’année : « 2022 » est remplacée par l’année : « 2027 ».

M. le président. L’amendement n° II-269, présenté par M. Sueur, Mme de La Gontrie, MM. Kanner, Bourgi et Durain, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

M. Jean-Pierre Sueur. L’article 44 ter a pour objet de proroger la date de mise en œuvre du principe de l’encellulement individuel, qui figure pourtant dans notre législation depuis 1875.

Je me souviens des débats très vifs qui s’étaient tenus dans cette assemblée en 2009, à l’occasion de l’examen du projet de loi pénitentiaire. Le rapporteur du texte, Jean-René Lecerf, avait alors plaidé avec beaucoup de force pour que l’on maintienne cette perspective de l’encellulement individuel, qui renforce bien entendu la dignité les conditions de détention et favorise la préparation à la réintégration sociale des détenus.

Revenir sur ce principe serait un mauvais signe, même si nous savons qu’il ne pourra pas être appliqué avant la fin de l’année, y compris au prix de nombreux d’efforts.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Antoine Lefèvre, rapporteur spécial. Nous ne pouvons bien évidemment pas nous satisfaire de devoir prolonger une nouvelle fois le moratoire sur le principe d’encellulement individuel en maisons d’arrêt.

Pour autant, reconnaissons que cet objectif est inatteignable d’ici à la fin de l’année, y compris en recourant à des mécanismes de régulation. Je ne vous donnerai qu’un exemple : alors que le nombre de détenus avait considérablement baissé durant la crise sanitaire, le taux d’encellulement individuel n’était toujours que de 35,2 % au 1er juillet 2020.

Si je suis donc d’accord pour dire que notre politique pénitentiaire ne doit pas se résumer à un programme immobilier, je suis hostile à la suppression de l’article, qui ne changera pas la situation.

La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. J’aimerais tellement, comme vous, monsieur Sueur, que l’on règle cette question de l’encellulement individuel. Mais les socialistes eux-mêmes avaient voté la prolongation du moratoire…

Aujourd’hui, nous sommes au pied du mur, au sens propre comme au sens figuré. Il n’y a pas de génération spontanée des places de prison… Un principe de réalité s’impose à nous : il faut d’abord les construire !

Moralement, vous avez raison et je comprends parfaitement vos arguments, mais je ne sais pas comment régler la question. Attendons 2027 : les places de prison seront construites, et nous devrions pouvoir régler la question.

Je suis donc défavorable à cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-269.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° II-15, présenté par M. Lefèvre, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

L’article 8 de l’ordonnance n° 2022-478 du 30 mars 2022 portant partie législative du code pénitentiaire est ainsi modifié :

1° À la fin du premier alinéa, l’année : « 2022 » est remplacée par l’année : « 2027 » ;

2° Au second alinéa, les mots : « de l’année 2022 » sont remplacés par les mots : « des années 2025 et 2027 ».

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Antoine Lefèvre, rapporteur spécial. L’article 44 ter prolonge jusqu’au 31 décembre 2027 la possibilité de déroger au principe d’encellulement individuel des personnes détenues en maison d’arrêt, en application de l’article L. 213-4 du code pénitentiaire.

Si cette prorogation est nécessaire, elle n’en demeure pas moins un aveu des retards concédés par le Gouvernement en matière de politique pénitentiaire, cette dernière ne pouvant se résumer à la seule construction de places de détention supplémentaires.

Par coordination avec le prolongement du moratoire, je propose au travers de cet amendement que le Gouvernement remette deux nouveaux rapports, en 2025 et 2027, ce qui permettra au Parlement de prendre connaissance, à intervalles réguliers, de l’exécution des programmes immobiliers pénitentiaires et de leur impact quant au respect de l’objectif de placement en cellule individuelle.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. D’ordinaire, le Gouvernement se lève pour émettre un avis de principe défavorable aux rapports, qui donnent du travail en plus aux administrations… Je vous demande alors de me faire confiance sur ma bonne mine, ce qui, je le comprends bien, n’est pas suffisant en l’occurrence. (Sourires.)

Nous allons donc produire les rapports que vous demandez : j’émets un avis favorable sur cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-15.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 44 ter, modifié.

(Larticle 44 ter est adopté.)

Article 44 ter (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Administration générale et territoriale de l'État

Après l’article 44 ter

M. le président. L’amendement n° II-250 n’est pas soutenu.

L’amendement n° II-338 rectifié bis, présenté par Mme M. Filleul, M. Sueur, Mme de La Gontrie, MM. Temal et Bourgi, Mme G. Jourda et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 44 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport sur la charge de travail des conseillers pénitentiaires d’insertion et de probation et l’impact sur les finances publiques des nécessités du recrutement de nouveaux conseillers afin que ceux-ci puissent pleinement mener à bien leurs missions.

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

M. Jean-Pierre Sueur. Je connais le discours cent fois réitéré sur les rapports. Mais, en l’occurrence, il s’agit de se pencher sur les conditions de travail des personnels des Spip, conformément au souhait de Mme Filleul.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Antoine Lefèvre, rapporteur spécial. Je suis défavorable à cette demande, les rapports n’étant pas toujours le meilleur moyen d’obtenir les informations souhaitées.

Le Gouvernement a déjà engagé un travail sur l’évaluation de la charge de travail des magistrats. Il pourra peut-être nous indiquer s’il envisage de conduire la même démarche pour les autres métiers du ministère de la justice, qui sont eux aussi soumis à d’importantes tensions.

La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Chassez le naturel, il revient au galop : l’avis sera défavorable. (Sourires.)

Le Gouvernement n’a pas envie de réaliser un rapport sur ce sujet, d’autant qu’il connaît déjà la réponse à votre question : grâce aux recrutements, le nombre de dossiers suivis par les Spip a diminué de 13 %, passant de 80 dossiers à 71 par conseiller pénitentiaire d’insertion et de probation.

En conséquence, j’émets un avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-338 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Justice ».

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures cinquante, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de Mme Laurence Rossignol.)

PRÉSIDENCE DE Mme Laurence Rossignol

vice-présidente

Mme la présidente. La séance est reprise.

Administration générale et territoriale de l’État

Article additionnel après l'article 44 ter - Amendement n° II-338 rectifié bis
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
État B

Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État » (et article 41 B).

La parole est à Mme la rapporteure spéciale.

Mme Isabelle Briquet, rapporteure spéciale de la commission des finances. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la promesse du Gouvernement de « réarmement de l’État territorial » trouve une traduction budgétaire d’une ampleur très limitée. En effet, les effectifs de l’administration territoriale de l’État augmenteront en 2023 de 48 ETP, soit une hausse de seulement 0,16 %. Peut-être s’agit-il de l’amorce d’un changement de paradigme, mais, en tout état de cause, c’est une avancée bien limitée au regard des enjeux considérables de la mission.

Je souhaite aborder, dans un premier temps, les grands enjeux de la réforme de l’organisation territoriale de l’État.

Les préfets sont au cœur de la réforme, singulièrement les préfets de région, qui peuvent, en fonction des priorités locales et nationales, redéployer jusqu’à 2 000 équivalents temps plein par an entre diverses missions budgétaires.

Outre la mission « Administration générale et territoriale de l’État » (AGTE), les mouvements concernent les missions « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales », « Écologie, développement et mobilité durables », « Culture », « Travail et emploi », « Solidarité, insertion et égalité des chances » et « Économie ».

Alors que le bilan des redéploiements devait faire l’objet d’un amendement du Gouvernement au projet de loi de finances rectificative, aucun amendement n’a été déposé avant la réunion de la commission mixte paritaire. Cette situation nuit à l’information du Parlement au sujet des priorités mises en œuvre dans les territoires.

Par ailleurs, les secrétariats généraux communs départementaux rencontrent d’importantes difficultés. Manifestement, cette réforme n’a pas été suffisamment anticipée.

Les chantiers de convergence doivent impérativement s’accélérer dans le périmètre de l’administration territoriale de l’État, pour que ces services puissent fonctionner dans de bonnes conditions.

Dans son rapport sur les effectifs de l’administration territoriale, la Cour des comptes dresse des constats que je partage entièrement. Elle considère ainsi que les suppressions de postes de ces dernières années « n’ont pas été réalistes » au sein des préfectures, qui « ne fonctionnent qu’au moyen de contrats courts qui précarisent leurs titulaires et désorganisent les services ».

La Cour des comptes fait également le constat que « le plan Préfectures nouvelle génération (PPNG) de 2016 a été conçu pour adapter les missions aux réductions d’effectifs et non l’inverse ». Et elle poursuit : « En dix ans, le programme a réalisé un schéma d’emplois […] cumulé de -4 748 équivalents temps plein, soit plus de 16 % des emplois de 2010. » Au rythme du réarmement annoncé pour 2023, il nous faudrait un siècle pour parvenir à la situation de 2010…

Le ministère de l’intérieur a également mis en place un document stratégique, Missions prioritaires des préfectures 2022-2025. Ce document porte mal son nom, puisque, loin de prioriser certaines missions par rapport à d’autres, il se contente de reprendre l’ensemble des missions des préfectures.

Il est donc nécessaire que l’État clarifie son discours : ou bien les préfectures doivent prioriser leurs missions et, à ce titre, les missions les moins importantes auront vocation à abonder, en moyens et en emplois, les missions prioritaires ; ou bien aucune mission ne peut perdre d’emploi – c’est d’ailleurs mon avis – et il faut conforter en urgence les effectifs et les moyens des préfectures.

Par ailleurs, depuis plusieurs mois, les délais d’obtention des cartes nationales d’identité et des passeports atteignent des délais inacceptables. À la fin du mois de mai dernier, une personne souhaitant obtenir un passeport ne pouvait en moyenne espérer en disposer avant la mi-septembre.

Si le Gouvernement a augmenté la dotation titres sécurisés à destination des communes, l’augmentation du nombre de dispositifs de recueil ne me semble pas en phase avec l’évolution des demandes de titres.

Concernant l’accueil des publics étrangers en préfecture, dont on ne connaît que trop les nombreuses difficultés, des renforts en contractuels sont prévus jusqu’en 2024. Ce choix regrettable du Gouvernement de recourir une fois de plus aux vacataires laisse penser qu’il ne s’agit que de renforts ponctuels, alors que la priorité devrait être de consolider les services et de fidéliser des compétences.

Pour conclure, je souhaite évoquer la situation des intervenants sociaux dans les commissariats de police et les unités de gendarmerie. Vous en conviendrez sans doute, madame la ministre, ils jouent un rôle majeur pour l’accueil des victimes en situation de fragilité : femmes victimes de violences intrafamiliales, personnes en situation de handicap, etc.

J’appelle de toute urgence à clarifier le régime de financement de ces intervenants, alors que l’État se désengage au détriment des associations et surtout des départements. En la matière, je souhaite que l’État suive au minimum les recommandations d’un rapport de l’inspection générale de l’administration, en stabilisant ses financements à hauteur de 33 % de prise en charge par le fonds interministériel de prévention de la délinquance.

Au regard de ces considérations, la commission a émis un avis défavorable sur l’adoption des crédits de la mission.

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure pour avis.

Mme Cécile Cukierman, rapporteure pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et dadministration générale. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, l’examen des crédits de la mission « AGTE » n’appelle pas d’observations particulières en ce qui concerne le programme 232, « Vie politique » – la forte diminution des crédits, de l’ordre de 75 %, s’explique par un calendrier électoral à ce jour moins chargé en 2023 ! – et le programme 216, « Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur », dont l’augmentation sert à financer la stratégie immobilière du ministère et le renforcement des moyens du fonds interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation.

C’est donc bien la question des moyens alloués au programme 354, « Administration territoriale de l’État », qui constitue l’enjeu essentiel de la mission, tant est préoccupante la situation du réseau préfectoral, en premier lieu celle de l’échelon de proximité que représentent les sous-préfectures.

Le projet annuel de performance de la mission « AGTE » prévoit un véritable réarmement de l’État territorial, dans la continuité du document Missions prioritaires des préfectures 2022-2025 et du projet de loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur, qui prévoyaient déjà un renforcement des services déconcentrés.

Je salue la prise de conscience salutaire du Gouvernement, qui semble désormais comprendre que l’État ne peut continuer à diminuer sa présence dans les territoires sans risquer d’amplifier le sentiment d’abandon de nos concitoyens comme des élus locaux.

Toutefois, ces annonces interviennent après des années de coupes budgétaires drastiques, qui ont conduit à la suppression cumulée de 14 % de l’effectif initial de l’administration territoriale de l’État entre 2012 et 2020, et de réformes incessantes, qui ont mis à mal les services de l’État.

Je rappelle que les secrétariats généraux communs départementaux ont été créés le 1er janvier 2021, afin de mutualiser les fonctions support des préfectures et des directions départementales interministérielles et de faire des économies.

Nous n’avons pas encore eu le temps de dresser le bilan de cette réforme que le Gouvernement déploie déjà un nouveau plan d’action pour les préfectures à horizon 2025.

L’annonce de la création de 210 équivalents temps plein dans les trois prochaines années, l’ouverture de six sous-préfectures cette année – dont cinq sont en réalité des déjumelages de sous-préfectures fermées au gré des réformes administratives successives – m’apparaissent dérisoires au regard des besoins et de l’atrophie qu’a subie l’administration territoriale de l’État depuis plus de dix ans.

Ainsi, pour l’année 2023, le projet de loi de finances prévoit de revaloriser le schéma d’emplois à hauteur de 48 ETP, soit certes une hausse, mais modeste, de 0,16 % du nombre d’emplois.

De même, si je salue l’augmentation de l’ordre de 13 % en autorisations d’engagement et de 7 % en crédits de paiement, il convient de rappeler que l’impact réel de cette hausse est minoré par la revalorisation du point d’indice dans la fonction publique, dans un contexte de tensions inflationnistes.

Dans ces conditions, le réarmement de l’État territorial relève plus de la communication que d’une réelle conviction du Gouvernement.

Pour ces raisons, la commission des lois a émis un avis défavorable sur l’adoption des crédits de cette mission.

Mme la présidente. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps de l’intervention générale et celui de l’explication de vote.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Dominique Théophile.

M. Dominique Théophile. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la mission « Administration générale et territoriale de l’État », pilotée par le ministère de l’intérieur et des outre-mer, verra en 2023 ses crédits augmenter de 10,32 % en autorisations d’engagement et de 4,14 % en crédits de paiement, sous l’effet principalement de la hausse du coût de l’énergie, d’investissements importants dans l’immobilier et dans le numérique et, d’une manière générale, du réarmement de l’État dans nos territoires.

Le programme 354, « Administration territoriale de l’État », qui représente à lui seul 60 % des crédits de la mission, porte les moyens du réseau préfectoral et des services placés sous l’autorité des préfets de région et des directions départementales interministérielles. En 2023, il connaîtra une hausse de ses crédits de paiement de 13,3 % par rapport à 2022, afin de renforcer, de manière inédite, les moyens et les effectifs de l’administration territoriale de l’État.

Le nouveau schéma d’emplois triennal, qui prévoit une augmentation de 210 ETP, dont 48 pour la seule année à venir, est bien sûr à saluer et à mettre en perspective avec le nombre d’emplois supprimés entre 2012 et 2020.

Cette évolution traduit, je l’ai dit, le renforcement de la capacité d’action de l’État. Elle met fin à plus de vingt années de réduction systématique des effectifs départementaux et – nous le souhaitons – à la lente érosion des liens entre l’État et ses citoyens.

Conformément aux recommandations de la Cour des comptes, un rééquilibrage de la répartition des emplois entre les préfectures devrait par ailleurs être progressivement mis en œuvre, au profit des territoires les plus exposés. Je pense notamment à Mayotte.

Autre motif de satisfaction : le nombre d’apprentis dans le réseau de l’administration territoriale devrait continuer à croître en 2023. Rappelons que 622 apprentis étaient présents dans ce réseau au 31 décembre 2021 ; ils étaient deux fois moins nombreux en 2020.

Enfin, l’Agence nationale des titres sécurisés verra ses effectifs augmenter pour tenter de répondre aux difficultés rencontrées un peu partout en France dans la délivrance des titres sécurisés.

Sans surprise, le programme 232, « Vie politique, cultuelle et associative », qui regroupe les crédits destinés à l’organisation des élections de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) et à l’aide publique aux partis enregistrera, en 2023, une baisse importante, du fait de l’absence d’élections d’envergure au suffrage direct.

Notons cependant, puisque le sujet nous concerne tout particulièrement, que l’organisation des élections sénatoriales de septembre 2023 et des élections territoriales en Polynésie française nécessitera quelque 37,71 millions d’euros en autorisations d’engagement, soit une baisse de 79,90 % par rapport à 2022.

Je dirai quelques mots, enfin, sur le programme 216, « Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur », qui porte les moyens et les emplois d’une grande partie de l’administration centrale du ministère de l’intérieur et des outre-mer.

Avec 1,96 milliard d’euros en autorisations d’engagement et 1,87 milliard d’euros en crédits de paiement, il bénéficiera, en 2023, de la plus forte augmentation de crédits, en valeur comme en volume.

Le fonds interministériel de prévention de la délinquance, créé en 2007, sera par ailleurs doté, en 2023, de 84 millions d’euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement. Il permettra de financer la réalisation d’actions de prévention de la délinquance, de sécurisation ou de prévention de la radicalisation.

Dans leur rapport, les commissions des finances et des lois ont estimé, et nous le regrettons, que les moyens alloués à cette mission n’étaient pas à la hauteur des ambitions affichées. Je vous propose, à l’inverse, de ne pas bouder notre plaisir de réarmer notre État territorial, en adoptant ces crédits.

Mme la présidente. La parole est à Mme Florence Blatrix Contat.

Mme Florence Blatrix Contat. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, au travers de la mission « AGTE », le ministère de l’intérieur met en œuvre trois de ses responsabilités fondamentales : garantir l’exercice des droits des citoyens, assurer la présence et la continuité de l’État dans le territoire et mettre en œuvre au plan local les politiques publiques nationales.

Notre propos portera principalement sur le programme 354 relatif à l’administration territoriale.

Tout d’abord, le constat du retrait de l’État territorial est unanime. Tout le monde s’accorde à dire que ce dernier se trouve actuellement dans une phase de recul, le dernier rapport de la Cour des comptes sur les effectifs de l’administration territoriale de l’État et le récent rapport d’information de nos collègues Agnès Canayer et Éric Kerrouche en témoignent.

Ainsi, la Cour des comptes constate que l’administration territoriale de l’État a perdu 14 % de ses effectifs en une décennie et que les baisses subies par les services déconcentrés sont souvent disproportionnées par rapport à celles supportées par les services centraux.

Au surplus, alors que les territoires doivent massivement investir dans les transitions, le ministère de l’écologie a fait le choix de faire peser cette baisse sur les services départementaux.

En définitive, la Cour juge les suppressions au sein des préfectures « irréalistes ». Elle considère que les schémas d’emplois postérieurs à 2008 mettent à mal le renforcement des missions prioritaires des préfectures, d’autant plus que ces dernières ne sont pas définies.

Le rapport de nos deux collègues Agnès Canayer et Éric Kerrouche montre que la chute des effectifs au sein des directions départementales interministérielles (DDI) est de l’ordre de 36 % en dix ans et de 10 % pour les personnels des préfectures et sous-préfectures. Cette baisse drastique et continue a été compensée par le recrutement de personnels contractuels précaires pour de courtes durées, ce qui précarise les agents, désorganise les services et complexifie leur gestion.

La rapporteure spéciale, Isabelle Briquet, abonde également dans ce sens, mettant en exergue la perte de compétences, donc la perte d’expertise de l’État, qui découle de cette stratégie d’économies de moyens.

Visiblement le Gouvernement lui-même partage ce constat. Le projet annuel de performance de la mission indique que l’évolution des moyens dédiés au fonctionnement de l’administration territoriale de l’État « traduit un renforcement de la capacité de l’action de l’État sur le terrain […], mettant ainsi fin à plus de vingt ans de réduction systématique des effectifs départementaux ».

Cependant, ces moyens sont en inadéquation avec le discours de réarmement des territoires que tient le Gouvernement. Quelle est, au fond la doctrine territoriale de l’État ?

Au vu de ce constat unanime, il aurait été logique que le Gouvernement mobilise les moyens nécessaires au renforcement de l’action de l’État dans les territoires. Pourtant, la hausse présentée dans le projet de loi de finances pour 2023 est en trompe-l’œil, car elle est principalement liée, en réalité, à l’augmentation du point d’indice et ne permet pas de répondre aux besoins. Elle représente en réalité un demi-ETP par préfecture. Par ailleurs, la répartition entre les effectifs est floue et ne précise aucun critère de détermination des redéploiements.

Cette situation est d’autant plus préoccupante que la Cour des comptes a souligné le vieillissement des agents territoriaux, ce qui imposerait logiquement un recrutement échelonné au fil du temps et le développement de l’attractivité dans certaines régions.

Si le nouveau plan, Missions prioritaires des préfectures 2022-2025, marque un changement de philosophie que l’on peut saluer, les moyens alloués peinent à convaincre.

Force est de constater que les délais pour l’obtention des titres d’identité vont croissant et qu’il en est de même pour les demandes de titres de séjour.

Les collectivités n’ont toujours pas pu bénéficier d’un redéploiement d’effectifs en matière de conseil en ingénierie et de contrôle de légalité. À cet égard, la Cour des comptes estime dans un rapport récent que la qualité de contrôle se dégrade. Elle est d’autant plus critique que les recommandations formulées en 2016 n’ont pas été suivies d’effet.

Par conséquent, comme nous l’avons déjà dit les années précédentes, il y a lieu de s’interroger sur la doctrine territoriale de l’État et de réaliser un choix : soit les missions des préfectures sont de même niveau et, dans ce cas, il faut donner à l’administration les moyens de ses ambitions, soit il faut sélectionner, c’est-à-dire clarifier les missions de l’État, et renforcer certains postes.

Or le Gouvernement ne choisit pas, et « l’État touche-à-tout » perdure, sans en avoir les moyens. En conséquence, il dysfonctionne, nourrissant ainsi un sentiment d’abandon dans nos territoires, alimentant les frustrations, qui ont elles-mêmes des effets électoraux délétères.

Peu de domaines de l’action publique ont connu autant de réformes, en nombre comme en cadencement, sans qu’une évaluation soit réalisée à chaque étape.

Il est impératif pour l’État de clarifier son organisation avec ses représentants, comme son rapport aux collectivités territoriales, pour rendre l’action publique lisible et efficace et garantir un service public de proximité, qui est le pilier de notre République.

S’agissant des deux autres programmes de la mission budgétaire, le calendrier électoral de 2023 réduit à raison les crédits du programme 232, « Vie politique ».

Les investissements dans le numérique et l’immobilier, qui sont traduits dans le programme 216, sont positifs, mais d’importants efforts restent à fournir pour les applicatifs utilisés localement.

De même, si la poursuite des investissements en matière de numérique est nécessaire, il reste à évaluer les effets de leur déploiement dans le temps, car le numérique représente à la fois un besoin et une limite de l’État territorial.

Pour conclure, si l’on peut saluer la prise de conscience de l’exécutif sur le nécessaire réarmement de l’État territorial, nous partageons les conclusions de la rapporteure sur l’inadéquation des moyens mobilisés et voterons donc contre l’adoption de cette mission budgétaire.

Mme la présidente. La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je tiens tout d’abord à remercier nos deux rapporteures, dont Cécile Cukierman, de leur travail. Elles ont très vivement rappelé l’importance et la nécessité de la présence de l’État auprès de nos habitants et de nos communes.

Lorsque je présentais la mission « Administration générale et territoriale de l’État » en 2021, je notais déjà une stagnation des moyens alloués à cette mission. Aujourd’hui, la légère hausse budgétaire que l’on peut, il est vrai, noter n’est toutefois pas à la hauteur des besoins pour compenser les dix années de désengagement de l’État dans nos territoires.

« Nous devons réarmer les territoires ». Ces mots ne sont pas les miens, mais ceux de l’ancien Premier ministre Jean Castex. La crise des « gilets jaunes », puis la crise sanitaire ont témoigné des limites de l’État dans nos territoires. Pendant plus de dix ans, on a réduit les moyens financiers et humains, ce qui a entraîné de lourdes conséquences sur la gestion quotidienne des services déconcentrés de l’État.

Pourquoi un tel désengagement ? Où en sommes-nous de cette égalité républicaine tant promise, qui pourtant n’existe que sur le papier ?

Aujourd’hui, ce sont des files d’attente à n’en plus finir devant les préfectures pour renouveler des titres de séjour, pour obtenir des demandes de naturalisation, et j’en passe. Il n’y a pas assez d’argent pour accueillir le public ni suivre les dossiers. Il n’y a pas de véritable accompagnement, puisque les méthodes sont imposées d’en haut, sans tenir compte des réalités du terrain.

Madame la ministre, les différentes réformes administratives n’ont fait qu’augmenter la défiance envers les pouvoirs publics, entraîner des suppressions de postes et faire naître un mal-être dans votre administration.

Pis encore, la forte dématérialisation – on y revient encore – accentue les inégalités et ne permet pas de renforcer la présence de l’État. Au contraire, la rationalisation prime l’humain et, de ce fait, affecte le service public.

Nous demandons le redéploiement de l’État sur le territoire et non un semblant de rééquilibrage. Les maisons France Services, qui ont été créées pour accompagner la dématérialisation, témoignent de leurs limites : les liens sont rompus avec l’administration, les agents n’ont pas la formation adéquate et l’accompagnement de l’usager se heurte à des difficultés d’accès à l’information.

C’est une réalité de nos territoires, autant dans les milieux ruraux qu’à l’échelle urbaine, et je connais bien le sujet en tant qu’élue de Seine-Saint-Denis : des milliers de gens ne peuvent accéder aux services publics pour régler leurs problèmes quotidiens.

La Défenseure des droits nous alerte sur cette dématérialisation, qui augmente le nombre de saisines, puisque l’accès aux droits est mis en cause. Encore une fois, ce sont les collectivités territoriales qui supportent toutes ces réformes, parfois sans les ressources ni l’ingénierie nécessaires.

Aussi, rappelez-vous, mes chers collègues, voilà quelques mois encore, les délais d’attente rallongés pour obtenir une carte d’identité ou un passeport. Plusieurs centaines de communes n’avaient pas les outils nécessaires à une bonne gestion. Rappelez-vous également les délais rallongés de traitement des dossiers en préfecture, faute de personnel pour s’en charger.

Les collectivités territoriales et les élus locaux n’attendent qu’une seule chose : travailler de manière intelligente avec l’État et ses représentants. Le préfet du département ou le sous-préfet doit être en pleine responsabilité dans son territoire. Il doit faire avec les élus, afin de comprendre chaque réalité territoriale et apporter les réponses nécessaires.

Le couple maire-préfet était particulièrement applaudi et félicité durant la crise sanitaire. Pour autant, le mariage semble encore loin… (Sourires.)

Les politiques imposées par le haut ne permettront pas d’obtenir des résultats positifs ni d’améliorer le service public pour les habitants. Il faut faire avec celles et ceux qui sont dans la gestion quotidienne. Car, aujourd’hui, le problème est bien celui-ci : on demande aux collectivités d’assumer des missions, alors qu’on applique des restrictions budgétaires qui mettent à mal les finances locales.

L’horizontalité doit être le maître-mot pour que l’État renoue avec ses communes et sa population. C’est uniquement en renforçant les moyens humains et financiers que nous pourrons réarmer les territoires et, ainsi, lutter contre l’isolement d’une partie de nos usagers.

Pour toutes ces raisons, vous l’aurez compris, nous ne voterons pas cette mission.

Mme Cécile Cukierman, rapporteure pour avis. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet.

Mme Nathalie Goulet. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, j’évoquerai deux points dans mon intervention : la fraude documentaire et la lutte contre la radicalisation.

La fraude documentaire est un sujet majeur, qui concerne bien cette mission. À ceux qui, par pudeur ou dogmatisme, s’évertuent à nous expliquer qu’elle n’existe pas, je souhaite raconter une petite histoire.

Un individu fiché S, chef d’un réseau sophistiqué de faussaires – faux papiers d’identité, comptes bancaires usurpés, escroqueries aux prêts automobiles – a détourné 193 véhicules au moyen de 73 fausses identités, alors qu’il était mis en examen depuis 2010, et ce dans le cadre d’une affaire de financement du terrorisme !

Toujours au sujet de la fraude documentaire, permettez-moi de vous lire ce courriel assez récent, adressé par le responsable d’un commissariat de l’Orne à l’Association des maires de ce département : « Je souhaite vous sensibiliser sur le point suivant : lors de la demande de carte nationale d’identité en mairie, les usagers présentent un certificat de naissance. Ce certificat de naissance peut être vérifié par les agents via le logiciel Comedec, qui est facultatif pour les mairies, car très onéreux. » Ne croyez-vous pas, madame la ministre, qu’il serait temps que l’utilisation de ce logiciel soit gratuite ?

Par ailleurs, lorsque nous essayons, notamment à l’occasion de l’élaboration de la loi de finances, monsieur le président de la commission, d’amender les dispositifs afin d’améliorer les communications, nous voyons nos amendements être jugés irrecevables au titre de l’article 40 de la Constitution, au motif qu’ils créent des dépenses supplémentaires. Il est donc impossible aujourd’hui, si vous voulez améliorer l’efficacité d’un logiciel en raison de difficultés de communication ou dans l’échange de données, de le faire par voie d’amendement !

Madame la ministre, il faudrait tout de même que ce type d’amélioration, notamment en ce qui concerne la sécurisation des titres d’identité en mairie, puisse être évoquée avec vos services.

D’autres mesures utiles ne peuvent ainsi être adoptées par voie d’amendement, parce qu’elles constituent une dépense nouvelle. C’est dommage !

Le responsable du commissariat poursuit : « Les voyous profitent de cette faille pour se présenter dans les mairies de ces communes avec de faux certificats de naissance et une demande de carte nationale d’identité. Si l’agent de la mairie ne s’assure pas de l’authenticité du certificat de naissance, le demandeur se retrouve avec une vraie carte d’identité, mais une identité frauduleuse. »

De mon point de vue, le dispositif relève complètement de la mission « AGTE », et la situation est tout à fait réparable.

Par ailleurs, je tenais à vous signaler qu’il n’existe toujours pas de formulaire Cerfa pour les actes de naissance en France. Si le contenu de l’acte de naissance est partout le même, chaque mairie émet des documents sur son propre papier à en-tête, ce qui crée évidemment des facilités pour la fraude.

Un programme du fonds européen pour la sécurité intérieure (FSI), doté de 98 millions d’euros au titre de la programmation 2021-2027, sera reconduit. Il est destiné notamment à la lutte contre la fraude documentaire et à l’interopérabilité des systèmes d’information. Or c’est bien de cela que nous parlons. J’ajoute que la fraude documentaire est aussi favorisée par notre mauvaise communication et par le fait que nous échangeons mal les données.

Madame la ministre, je vous demande donc très officiellement de bien vouloir prendre en considération ce fonds européen de 98 millions d’euros, une enveloppe pas tout à fait anodine. Ne pourrait-on l’utiliser ? Cela éviterait au président Raynal de rendre un article 40 et nous permettrait d’améliorer les dispositifs.

En outre, on nous dit que le fichier Application de gestion des dossiers des ressortissants étrangers en France (AGDREF) est sur le point de disparaître au profit d’un autre fichier. Cette question relève peut-être davantage de la mission « Immigration, asile et intégration », mais elle s’inscrit pourtant dans la rubrique des titres sécurisés.

Enfin, comme chaque année, je voudrais vous dire mes doutes sur le comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (CIPDR). Ce comité n’a pas encore subi la moindre évaluation. Il distribue des fonds par-ci, par-là, dans une période particulièrement critique, car on parle moins de terrorisme, certes, mais le sujet de la radicalisation demeure tout aussi important. Il est vraiment fondamental selon moi d’évaluer les actions du CIPDR.

Dans le jaune budgétaire annexé au projet de loi de finances et dénommé Liste des commissions et instances consultatives ou délibératives placées directement auprès du Premier ministre ou des ministres – un très bon document, arraché de haute lutte par le Sénat –, j’ai trouvé trace d’un conseil scientifique sur les processus de radicalisation qui s’est réuni trois fois en 2017, trois fois en 2018 et six fois en 2019. Je n’ai pu savoir s’il s’était réuni en 2020 ou 2021, la crise du covid-19 expliquant peut-être cela.

En tout cas, madame la ministre, je souhaitais vraiment attirer votre attention sur ces deux points : la fraude documentaire et l’évaluation des travaux du CIPDR.

Mme la présidente. La parole est à Mme Maryse Carrère.

Mme Maryse Carrère. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, de prime abord, les montants annoncés semblent plutôt satisfaisants. Nous observons en effet une hausse globale des crédits de paiement comme des autorisations d’engagement de la mission « Administration générale et territoriale de l’État ».

Cette augmentation traduit une volonté de réforme pluriannuelle en matière tant immobilière que numérique, ce que nous ne pouvons que saluer. Je pense en particulier au développement du système de communication des forces de sécurité et de secours de dernière génération : le réseau Radio du futur. Il est également annoncé une rationalisation des effectifs, qui est attendue, mais qui devra répondre aux besoins réels des territoires – voilà le vrai sujet !

Comment faire pour que nous cessions, comme c’est, hélas, le cas chaque année lors de l’examen de cette mission, de constater le recul de l’État dans nos territoires, notamment les plus ruraux ?

Comment faire pour cesser d’avoir encore à dénoncer l’effacement progressif des services publics de proximité au profit de la dématérialisation et du tout-numérique, qui exclut, de fait, une partie de nos concitoyens de l’accès aux services ?

Si nous nous battons dans cet hémicycle pour la liberté des collectivités et la décentralisation, nous luttons aussi pour une déconcentration efficace qui valorise le travail des préfectures et des sous-préfectures, au service des administrés. Chacun en a conscience ; il faut maintenant traduire cela en acte.

Aussi, s’il y a du bon dans la présentation budgétaire de cette mission, j’entends également les critiques portées par les rapporteurs. Elles traduisent les inquiétudes de nos territoires.

Nous sortons de dix années de réduction continue des effectifs, comme l’a très justement souligné la Cour des comptes dans son rapport. Nous ne pouvons que nous réjouir d’observer que l’année 2022 marque la fin cette trajectoire, avec une stabilisation des emplois. Il faudra inscrire ce retournement dans la durée – c’est en tout cas ce que nous souhaitons.

Du point de vue du personnel, il faut par exemple cesser de recourir à des contrats courts, par essence précaires.

Du point de vue des institutions, nous regrettons ce phénomène de multiplication des agences aussi spécialisées qu’éloignées des administrés, lesquels ne parviennent plus à trouver d’interlocuteur.

La délivrance des titres sécurisés est sans aucun doute l’exemple le plus criant de l’échec des stratégies successives visant à rationaliser et mutualiser, ce qui n’est pas toujours efficace ni nécessairement synonyme d’économies.

Nous parlons ici de quelque chose qui affecte très concrètement le quotidien des Français et qui, par la même occasion, contribue à propager les clichés qui entourent notre administration : lenteur, mille-feuille, paperasse, complexité… Tout le monde connaît quelqu’un dans son entourage qui peut lui raconter les déconvenues qu’il a subies, lorsqu’il a voulu se faire délivrer un document.

Pour l’anecdote, j’ai eu la curiosité de contacter un avocat spécialisé dans les recours en cas de carence de l’Agence nationale des titres sécurisés (ANTS). Il m’a dressé la liste des décisions des juges administratifs enjoignant à l’agence de délivrer, sous astreinte, des permis de conduire à la suite de retards de plusieurs mois.

Dans ce contexte, le groupe du RDSE s’abstiendra sur les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Agnès Canayer.

Mme Agnès Canayer. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, « c’est le même marteau qui frappe, mais on en a raccourci le manche » : avancée il y a près de deux siècles, cette image du rôle des préfets comme acteurs de la proximité de l’État est toujours d’actualité.

Le préfet est le bras armé de l’État territorial. Il incarne l’État au plus proche des administrés. Le débat sur l’État territorial, les services déconcentrés et la décentralisation est ancien.

À mesure du mouvement de décentralisation impulsé dans les années 1980, l’administration territoriale de la République a évolué, avec l’émergence des collectivités territoriales. Cette consécration fait apparaître le lien indéfectible entre l’État et ses services déconcentrés, d’une part, et les collectivités territoriales, d’autre part.

La bonne santé du partenariat collectivités-État, aujourd’hui consacré par le couple maire-préfet, conditionne la qualité des politiques publiques, l’exercice des droits et la bonne gestion des ressources publiques au profit des citoyens.

Nous examinons ce soir la mission « Administration générale et territoriale de l’État ». Composée de trois programmes, cette mission est en hausse globale, mais de manière inégale. Néanmoins, cette augmentation n’est pas à la hauteur d’un véritable réarmement de l’État dans les territoires, comme celui qu’appelle de ses vœux notre collègue rapporteure pour avis de la commission des lois, Cécile Cukierman.

La Haute Assemblée dresse ce constat depuis plusieurs années, et la bonne réception de ce message est de bon augure. Toutefois, les moyens nouvellement alloués n’effacent pas une décennie de recul de l’État dans les territoires. En effet, les sous-préfectures ont perdu un quart de leurs effectifs physiques entre 2012 et 2019, alors que les besoins ne cessaient de s’accroître.

Ces efforts salutaires ne sont pas suffisants. Et au-delà de la simple inscription budgétaire, la réflexion doit porter sur le rôle même de l’État territorial.

Comment rompre avec le sentiment d’abandon des agents et des usagers et rétablir la confiance en un État territorial performant ?

Comment mieux associer les élus de terrain aux transformations et leur redonner de la lisibilité sur l’action de l’État dans les territoires ?

Comment donner une cohérence à l’enchevêtrement des réformes successives, jamais évaluées et empilées les unes après les autres ?

Avec mon collègue Éric Kerrouche, j’ai récemment publié un rapport d’information, au nom de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation du Sénat, dont le titre est signifiant : À la recherche de lÉtat dans les territoires.

En nous fondant sur une large consultation, tant d’élus des territoires que d’agents de l’État, nous avons étayé ce que nous déplorons, depuis longtemps, au Sénat : une succession, depuis quinze ans, de réformes administratives, qui transforment sans inclure suffisamment les acteurs concernés. Près de quatre élus sur cinq estiment ne pas avoir été suffisamment associés aux dernières réformes des services déconcentrés de l’État. Et 43 % des préfets et sous-préfets consultés ont le même sentiment.

Le diagnostic est cinglant : l’État est à la peine face aux attentes des élus locaux. La moitié des maires des communes de moins de 1 000 habitants estime que l’offre de services publics sur son territoire est défaillante. Un nombre croissant de communes se tourne vers le département, l’intercommunalité ou le secteur privé en matière d’ingénierie territoriale.

Aussi, nous avons formulé plusieurs recommandations.

Tout d’abord, il faut ancrer le préfet au cœur de l’État territorial. La crise sanitaire a souligné les bénéfices du couple maire-préfet. Il est nécessaire que le préfet connaisse le territoire, en y restant plusieurs années, qu’il dispose, en période de crise, de l’ensemble des services de l’État et surtout qu’il soit délégué territorial de toutes les agences de l’État.

Ensuite, il est nécessaire d’instaurer une relation de confiance avec les élus locaux, grâce notamment à une plus grande transparence dans l’attribution des subventions de l’État et à une évaluation des préfets par les maires.

Il est aussi indispensable de garantir les moyens de l’État dans les territoires, pour qu’ils soient plus adaptés avec une meilleure répartition des effectifs, la sortie de la logique systémique des appels à projets et un renforcement des moyens du Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema).

Enfin, il convient d’assurer une présence territoriale adaptée, avec une permanence physique garantie dans les locaux des préfectures et sous-préfectures, pour lutter contre la fracture numérique. Il faut notamment refondre les schémas départementaux d’amélioration de l’accessibilité des services au public.

Nos territoires méritent considération, moyens et performances. Il n’y aura pas de bonne décentralisation sans une réelle déconcentration des services de l’État, au service des élus et des administrés.

La mission que nous examinons n’est pas encore sur cette trajectoire. C’est pour cette raison que le groupe Les Républicains ne la votera pas.

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Marc.

M. Alain Marc. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, les crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État » que nous examinons ce soir soutiennent ce qui est au cœur de nos institutions républicaines. Ils sont en augmentation de 10,32 % en autorisations d’engagement et de 4,14 % en crédits de paiement.

Pour autant, cette hausse des moyens, qui intervient après dix ans de recul de l’État au sein des territoires, apparaît insuffisante au regard des enjeux considérables de la mission.

Le réseau préfectoral est indispensable à notre pays et aux services rendus à nos concitoyens. Or l’administration territoriale de l’État est actuellement très affaiblie par les réformes qui se sont succédé, et nous devons faire face à un recul des services publics, surtout des services de proximité.

Le plan Préfectures nouvelle génération, mis en œuvre entre 2016 et 2020, a été fortement orienté vers la dématérialisation des formalités administratives et a profondément remodelé la délivrance des titres, tels que les passeports, les cartes nationales d’identité ou encore les permis de conduire.

De nombreux points de contact qui permettaient à une population souvent âgée ou n’ayant pas accès à internet de disposer d’un interlocuteur dans ses démarches administratives ont été supprimés. En outre, les publics fragiles se heurtent à l’absence de mobilité dans un certain nombre de territoires.

Si l’entrée du numérique dans les procédures apparaît nécessaire au vu des évolutions technologiques, la fracture numérique, territoriale et sociale ne doit pas être aggravée.

Or les suppressions successives des relais physiques de l’État dans les communes au profit de services en ligne ou trop éloignés ont créé un véritable sentiment d’abandon pour les habitants des territoires ruraux.

L’implantation des maisons France Services un peu partout dans nos territoires ruraux connaît un succès mitigé ; il faudra évaluer ce concept dans quelques années et, surtout, poursuivre le financement par l’État de ces structures – c’est un sujet sur lequel les maires se posent beaucoup de questions.

Cette réalité, nous la connaissons tous dans les départements ruraux. De même, nous sommes tous confrontés aux retards dans la délivrance des titres. Les délais d’obtention des cartes nationales d’identité et des passeports sont devenus inacceptables – ils peuvent aller jusqu’à quatre ou cinq mois.

La révolution numérique a ses limites, et les moyens humains restent indispensables.

Je veux enfin attirer votre attention, madame la ministre, sur une autre réalité : la diminution de la qualité de l’ingénierie territoriale délivrée aux communes.

Les départements ont souvent pallié la baisse des moyens de l’administration territoriale de l’État, en créant des structures chargées de répondre aux besoins des communes et en leur apportant soutien et conseil.

En Aveyron, le département a ainsi créé Aveyron Ingénierie afin d’offrir un accompagnement personnalisé et une assistance administrative, juridique, technique et financière aux collectivités locales et à leurs groupements dans l’exercice de leurs compétences et pour la réalisation de leurs projets. La charge de cette ingénierie incombe donc aujourd’hui au département et non à l’État.

Madame la ministre, mes chers collègues, la présence de l’État dans les territoires aux côtés des citoyens et des élus locaux est plus que jamais nécessaire. Si l’on peut se féliciter d’une prise de conscience du Gouvernement sur la nécessité de mieux assurer cette présence territoriale, ce budget ne semble toutefois pas à la hauteur des enjeux.

Pour cette raison, la majorité des membres du groupe Les Indépendants s’abstiendra sur cette mission.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Breuiller.

M. Daniel Breuiller. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, l’ancien maire d’Arcueil souffre pour les sous-préfets aux moyens rabougris et encore plus pour les usagers. C’est sans doute le cas de nombreux maires et anciens maires, peut-être même à Beauvais ! (Sourires.)

Ce budget présente une augmentation très légère, mais peu signifiante. Depuis 2010, quelque 11 763 postes en équivalent temps plein ont été supprimés dans l’administration territoriale et 4 748 dans le réseau des préfectures, soit 14 % des effectifs et même 24 % pour les seules sous-préfectures.

La commission des lois l’a souligné, les moyens mobilisés ne sont pas suffisants pour atteindre l’objectif de renforcement de l’administration territoriale de l’État et il est nécessaire de s’interroger en profondeur sur le rôle de l’État dans les territoires, ce que le Gouvernement se refuse encore à faire, préférant multiplier des réformes administratives.

Une traduction concrète de cette situation est la création des secrétariats généraux communs, ces nouveaux services déconcentrés interministériels placés sous l’autorité du préfet, qui est lui-même sous l’autorité du ministre de l’intérieur, mettant de fait des administrations comme celle du ministère de la transition écologique sous sa tutelle.

Cette organisation nous interroge particulièrement, d’autant que nous ne sommes pas certains que les premiers retours fassent état de gains issus de cette mutualisation.

Notre expérience des territoires montre des failles dans l’ambition du fameux couple maire-préfet. La commission des lois rappelait d’ailleurs ce problème majeur : les élus locaux ne peuvent compter que sur la bonne volonté des sous-préfets, qui entretiennent de plus en plus difficilement une connaissance fine du terrain et un lien de proximité avec les maires de leur arrondissement.

Aussi, nous avons accueilli avec intérêt le début des réouvertures de sous-préfectures et du renforcement réel d’effectifs. Le plan Préfectures nouvelle génération 2022-2025 marquera-t-il un progrès réel ? Nous le souhaitons !

Défenseur de l’égalité dans l’accès au service public, je rappellerai que le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires n’a cessé d’alerter sur les dangers d’une dématérialisation massive comme seul indicateur d’une modernisation au service du citoyen. L’illectronisme est une réalité qui touche 13 millions de nos concitoyens, et chacun d’entre nous connaît plusieurs expériences, vécues ou rapportées, de difficultés et de situations délicates, voire ubuesques, liées à la fin de l’accueil au guichet.

Nous saluons donc le début de l’augmentation attendue d’effectifs d’agents titulaires consacrés aux missions d’accueil dans les trois prochaines années.

Nous espérons que ce redémarrage pourra aussi servir dans la gestion des titres de séjour. À la veille d’un débat sur l’immigration et l’asile, nous veillerons à ce que la dégradation des délais de rendez-vous en préfecture ou de traitement des dossiers ne serve pas de justification à une aggravation de la situation des étrangers dans leurs liens et échanges avec l’administration.

Il est à noter que la commission des finances a très justement pointé du doigt le fait que la défaillance de l’État dans la délivrance des titres était inacceptable.

Nous comprenons la diminution des crédits du programme « Vie politique » au regard du calendrier électoral de 2023. Nous regrettons toutefois l’absence de la démocratie locale et participative dans ces crédits.

En résumé, allers-retours contradictoires sur la politique d’accueil de l’usager, moyens inadaptés à des réformes dont l’évaluation demeure à faire, recours trop important aux contractuels, dont la pérennisation des emplois est pourtant indispensable, notamment pour les intervenants sociaux au cœur du dispositif de prévention de la délinquance et de la radicalisation, tous ces éléments ne nous permettront pas de voter les crédits de cette mission.

Mme la présidente. La parole est à M. François Bonhomme.

M. François Bonhomme. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous voilà donc parvenus à l’examen des crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État ». Cette mission concerne principalement la situation du réseau préfectoral, en particulier de son échelon de proximité, à savoir les sous-préfectures.

Maintes fois, le Gouvernement a affirmé son intention de réarmer l’État territorial, en s’inscrivant dans la continuité des missions prioritaires des préfectures 2022-2025. Cette volonté affichée doit s’inscrire dans la triple mission des préfectures, qui a déjà été rappelée.

Nombreuses sont les personnes qui ont regretté la diminution de la présence et de l’efficacité de l’État sous sa forme territoriale. L’État a beaucoup perdu de terrain ces dernières années, au fur et à mesure des différents plans d’action et réformes.

La création des secrétariats généraux communs départementaux, il y a près de deux ans, est trop récente pour en mesurer les effets et pour évaluer la réalité des objectifs d’économies et de mutualisation des fonctions support des préfectures et des directions départementales interministérielles.

Je sais que la succession de plans d’action n’arrange pas les choses. Je me demande même si ce n’est pas devenu une sorte de stratégie de communication.

Néanmoins, il y a une chose sur laquelle nous voyons clair : les effectifs de l’administration territoriale de l’État. Nous pouvons dire que nous sommes à la croisée des chemins : la réforme de l’administration territoriale de l’État engagée il a plus de dix ans s’est traduite par une réduction ininterrompue d’effectifs. Il s’agit tout de même d’une perte de plus de 11 000 postes en équivalent temps plein que nous avons enregistrée, soit 14 % de l’effectif initial.

C’est seulement cette année que cette trajectoire a été interrompue. Naturellement, il n’est pas surprenant que domine un sentiment d’abandon et de perte de présence humaine dans les réseaux des préfectures.

Même dans l’hypothèse où le Gouvernement prendrait un soin particulier à l’allocation des moyens humains et des effectifs, en tenant compte de manière fine du niveau d’activité des préfectures et des sous-préfectures, cela se traduirait inévitablement par un effacement accru de la présence de l’État.

Il faut dire que les suppressions de postes dans les préfectures ont manqué de discernement, faute d’analyses adaptées. Nous avons tous des retours d’expérience de services au sein des préfectures qui ne fonctionnent pas ou qui fonctionnent mal et où l’abus de l’utilisation de contractuels est source de fragilité et de désorganisation.

Il a sans doute manqué une véritable réflexion globale préalable et une analyse plus fine à chaque niveau de service sur la répartition de l’effort en fonction de la réalité des besoins de chaque région.

Nous avons été un certain nombre à constater et à regretter les difficultés des directions départementales interministérielles, notamment celles de l’écologie et des ministères sociaux, ainsi que le fait que les suppressions portent sur l’échelon départemental, au profit le plus souvent des directions régionales, qui ont été largement épargnées.

Plus structurellement, il y a la question lancinante et parfois criante pour l’État du manque d’attractivité de certaines fonctions ou de territoires.

Je ne vois pas aujourd’hui de stratégie d’ensemble nouvelle, ni les moyens suffisants dans cette mission pour faire en sorte que les postes soient préservés et qu’ils ne restent pas vacants faute de candidats.

Dernièrement, la Cour des comptes a formulé des recommandations à ce sujet ; je n’y reviendrai pas, mais je pense qu’elles pourraient nous inspirer. La Cour recommande notamment un guide méthodologique pertinent, qu’il revient désormais au ministère de l’intérieur de s’approprier et de mettre en œuvre en sa qualité de chef de file de l’administration territoriale de l’État.

Nous attendons donc un rééquilibrage des emplois entre préfectures, en fonction des réalités et des besoins de chaque région. Il semble que vous envisagiez la création d’un observatoire des effectifs de l’administration territoriale de l’État, afin de fiabiliser les données relatives aux emplois au niveau tant régional que départemental. Qu’en est-il vraiment, madame la ministre ?

Une chose est sûre, c’est que toute décision doit se faire à l’aune d’un principe : le rétablissement du lien de proximité. Il s’agit notamment de redonner aux services les moyens de fonctionner, en les rendant plus accessibles et en veillant à maintenir un haut degré de qualité. Autant de principes qui, je l’espère, trouveront une consécration à l’échelle de nos territoires.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée auprès du ministre de lintérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais tout d’abord vous transmettre les excuses de Gérald Darmanin, qui regrette de ne pouvoir vous présenter lui-même cette mission. Il est actuellement en déplacement à Bruxelles pour le Conseil « Justice et affaires intérieures ».

La mission « Administration générale et territoriale de l’État » du projet de loi de finances pour 2023, qui vous est soumise aujourd’hui, permet la mise en œuvre par le ministère de l’intérieur et des outre-mer de plusieurs de ses fonctions essentielles : garantir le libre exercice de leurs libertés publiques par les citoyens, avec l’organisation des scrutins électoraux ; assurer une présence continue de l’État sur l’ensemble du pays, dans l’Hexagone comme dans les territoires ultramarins ; assurer la déclinaison locale des politiques publiques nationales.

Cette mission intègre des constantes de l’action ministérielle, mais elle porte également la marque, comme la mission « Sécurités », des chantiers d’envergure portés par le projet de loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur sur la période 2023-2027, en particulier en termes de réarmement de l’État dans les territoires et de réorientation stratégique du pilotage des politiques publiques, à l’aune des nouveaux enjeux à relever pour assurer la sécurité de nos concitoyens.

Dans le contexte de la hausse globale du budget du ministère de l’intérieur de 1,25 milliard d’euros pour 2023, la mission « Administration générale et territoriale de l’État » voit ses moyens progresser nettement, avec une augmentation de 10,32 % des autorisations d’engagement et de 4,14 % des crédits de paiement.

Ces chiffres témoignent d’une volonté ambitieuse tournée vers l’avenir. Nous nous donnons ainsi les moyens nécessaires pour nos objectifs dès l’année qui vient.

Plus de la moitié des crédits de la mission sont inscrits au sein du programme « Administration territoriale de l’État », qui témoigne d’un engagement sans précédent pour renforcer la capacité de l’État dans les territoires.

Partant du constat d’un besoin accru de service public et de proximité de l’État, le Président de la République a lancé cette dynamique dès l’an dernier. En témoigne notamment l’annonce qu’il a faite le 10 octobre dernier de la réouverture de six sous-préfectures – cinq en métropole et une en Guyane.

Cette évolution, qui renverse le courant des vingt dernières années, nécessite de s’appuyer sur des effectifs nouveaux. J’oserai vous paraphraser, en disant que nous réarmons les territoires.

L’objectif sur trois ans est de créer 210 équivalents temps plein, dont 50 pour la seule année 2023. Ces créations de postes viennent renforcer les effectifs préfectoraux sur des missions clés, en particulier les services dédiés aux étrangers, la délivrance des titres sécurisés, qui connaît, comme vous le savez, un fort engorgement, en grande partie conjoncturel après les deux années de crise sanitaire, ou encore la lutte contre la radicalisation et le terrorisme.

Cet élan de consolidation du réseau préfectoral bénéficiera à tous nos concitoyens en matière de sécurité et de service public, mais aussi aux élus locaux pour la conception et la mise en œuvre de leurs projets et, en définitive, à l’ensemble de notre pays.

Nous n’abandonnons pas pour autant les efforts continus menés en faveur de la rationalisation des services de l’État dans les territoires, en particulier en matière de mutualisation.

Étape charnière dans la poursuite de la réforme de l’organisation territoriale de l’État, l’année 2021 a vu la mise en œuvre des secrétariats généraux communs départementaux, nouveaux services déconcentrés interministériels placés sous l’autorité du préfet. Ils permettent de grouper et de rendre plus efficace la gestion des moyens budgétaires, des ressources humaines, des achats publics ou encore des systèmes d’information et de communication. Gage de performance et d’économies, leur déploiement se poursuivra.

Pour ce qui est de la conduite et du pilotage des politiques du ministère de l’intérieur, l’objectif constant est celui de la maîtrise des coûts, à la fois en administration centrale et dans les territoires, tout en servant la modernisation et l’indispensable amélioration des fonctions support.

Je pense en particulier aux enjeux numériques, qui constituent une priorité pour l’action du ministère.

La direction du numérique se voit attribuer des moyens nécessaires à la réalisation de ses projets d’ampleur comme la constitution du cloud de deuxième génération ou celle du réseau Radio du futur. Son budget global de 498 millions d’euros sur cette mission doit être mis en regard des autres engagements de la mission « Sécurités », qui prévoit au minimum 381 millions d’euros de dépenses numériques en 2023, notamment pour assurer la transformation numérique des services et l’amélioration des systèmes de communication.

Par ailleurs, le ministère poursuit ses efforts de rationalisation de ses emprises immobilières dans l’ensemble du pays, afin d’optimiser les coûts et de faciliter concrètement la synergie entre ses différents services.

Deux projets sont emblématiques de cette démarche : tout d’abord, la création d’un centre unique du renseignement intérieur – 43 millions d’euros sont engagés en 2023, sur un coût total de 1,3 milliard d’euros –, alors que les services sont aujourd’hui répartis sur plusieurs sites ; ensuite, la création d’un grand pôle transversal des directions support du ministère.

Au-delà, le ministère mobilise près de 340 millions d’euros en autorisations d’engagement, afin de permettre notamment la programmation de nouveaux projets d’implantation d’hôtels de police et de commissariats, ainsi que 384 millions d’euros pour la maintenance lourde du bâti. Conformément aux priorités fixées par la Première ministre, 6 millions d’euros sont en outre spécifiquement dédiés à la rénovation énergétique des bâtiments préfectoraux.

Enfin, ce sont plus de 84 millions d’euros qui sont dédiés au financement de la prévention de la délinquance et de la radicalisation, un budget en hausse de plus de 21 % par rapport à l’année précédente.

Le programme 232, « Vie politique », est le seul qui est en baisse dans la mission, une diminution qui s’explique par le calendrier électoral bien moins chargé en 2023, avec tout de même la tenue des élections territoriales en Polynésie française, ainsi que les élections sénatoriales.

Mesdames, messieurs les sénateurs, la mission « Administration générale et territoriale de l’État » va permettre de poursuivre les chantiers de long terme du ministère et de renforcer la présence et l’efficacité de l’État dans tous les territoires.

Les investissements indispensables à mettre en œuvre pour faire face aux défis nouveaux qui menacent nos concitoyens y bénéficient de moyens solides, mais il ne s’agit en rien d’une dynamique de hausse de l’ensemble des dépenses.

En parallèle d’engagements ciblés et importants, gages d’efficacité, la politique de rationalisation et de contrôle des dépenses de fonctionnement se poursuit avec autant de rigueur.

J’ai bien entendu, mesdames, messieurs les sénateurs, vos critiques, mais je voudrais attirer votre attention sur l’effort historique que nous vous proposons dans cette mission : jamais le ministère de l’intérieur n’avait obtenu un tel budget. Il est néanmoins impossible de rattraper le retard de près de vingt ans de baisse.

J’espère que le Sénat, chambre des territoires, pourra apporter une réponse concrète aux besoins des Françaises et des Français, ainsi qu’aux impératifs de sécurité intérieure. Ce consensus, mesdames, messieurs les sénateurs, il vous appartient désormais de le dégager.

administration générale et territoriale de l’état

Administration générale et territoriale de l'État
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Article 41 B (nouveau)

Mme la présidente. Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État », figurant à l’état B.

ÉTAT B

(En euros)

Mission / Programme

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

Administration générale et territoriale de lÉtat

4 859 598 566

4 568 766 349

Administration territoriale de l’État

2 790 059 400

2 578 911 198

 Dont titre 2

2 020 976 507

2 020 976 507

Vie politique

113 358 103

119 610 368

 Dont titre 2

6 263 700

6 263 700

Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur

1 956 181 063

1 870 244 783

Dont titre 2

829 787 282

829 787 282

Mme la présidente. L’amendement n° II-241, présenté par MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon, Mme M. Vogel et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Administration territoriale de l’État

15 000 000

15 000 000

dont titre 2

15 000 000

15 000 000

Vie politique

dont titre 2

Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur

15 000 000

15 000 000

dont titre 2

15 000 000

15 000 000

TOTAL

15 000 000

15 000 000

15 000 000

15 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Daniel Breuiller.

M. Daniel Breuiller. Cet amendement vise à augmenter de 15 millions d’euros en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement les dépenses de personnel portées par l’action n° 02, Réglementation générale, garantie de l’identité et de la nationalité et délivrance des titres, du programme 354, « Administration territoriale de l’État ».

Les centres d’expertise et de ressources des titres (Cert) ne disposent pas des moyens humains nécessaires pour assurer leurs missions de manière pérenne.

Des défaillances ont été analysées par la Cour des comptes dans son rapport public de 2020. Après la crise du covid-19, ces centres font face à une multiplication des demandes et n’arrivent pas à combler le retard. Une hausse, même ponctuelle, de leurs ressources permettrait sans doute de le rattraper en partie.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Isabelle Briquet, rapporteure spéciale. Les Cert rencontrent d’importantes difficultés dans le traitement des demandes de titres et le Gouvernement a fait le choix d’augmenter sensiblement le nombre de contractuels au sein de ces structures.

Ainsi, pour les demandes de cartes nationales d’identité et de passeports, alors que ce service comptait 35 contractuels en 2021, il en compte 161 en 2022.

Je partage avec les auteurs de l’amendement l’idée qu’il faut pérenniser les emplois au sein des Cert et sortir d’une logique de gestion des crises successives. L’Agence nationale des titres sécurisés m’ayant indiqué que la hausse des demandes de titres était durable, il me semble que nous devons avoir pour priorité de recourir à des fonctionnaires titulaires et leur permettre de monter en compétence sur leur mission.

La Cour des comptes considère en effet que les préfectures ne fonctionnent qu’au moyen de contrats courts. Il est donc important de titulariser ces postes, mais, dans la situation actuelle, je ne pense pas que l’augmentation des crédits proposée dans le présent amendement permette de résoudre cette difficulté. Nous devons apporter des solutions pérennes aux services en question, et non pas voter des renforts ponctuels. Pour cette raison, je demande le retrait de cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée. L’accueil reste en effet une priorité ministérielle, que ce soit dans les préfectures ou dans les sous-préfectures. Une partie des 350 créations d’emplois prévues sur la période 2023-2027 est dédiée au renforcement des Cert.

Quant à la délivrance des titres sécurisés, l’État a renforcé son aide aux communes avec un budget de 21 millions d’euros pour pouvoir augmenter le nombre de rendez-vous proposés aux usagers, ce qui est une condition évidemment impérative pour diminuer les délais de délivrance des titres. Je vous propose donc de retirer cet amendement, faute de quoi l’avis sera défavorable.

Mme la présidente. Monsieur Breuiller, maintenez-vous votre amendement ?

M. Daniel Breuiller. Oui, madame la présidente.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-241.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° II-240, présenté par MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon, Mme M. Vogel et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Administration territoriale de l’État

7 000 000

 

7 000 000

 

dont titre 2

7 000 000

7 000 000

Vie politique

dont titre 2

 

 

 

 

Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur

 

7 000 000

 

7 000 000

dont titre 2

7 000 000

7 000 000

TOTAL

7 000 000

7 000 000

7 000 000

7 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Daniel Breuiller.

M. Daniel Breuiller. Le plan Préfectures nouvelle génération 2022-2025 avait pour objectifs le recours massif à la dématérialisation, la fin de l’accueil physique des usagers en préfecture et la mutualisation des fonctions support. Cette politique a eu des conséquences désastreuses, notamment pour l’accueil des publics les plus éloignés du numérique et pour l’accès aux rendez-vous des étrangers dans les préfectures. Pour ces derniers, il n’est plus possible de se présenter au guichet en préfecture afin d’obtenir des rendez-vous pour l’instruction et la délivrance des titres de séjour. Or les prises de rendez-vous sur internet sont quasiment impossibles. Chaque jour, des personnes se retrouvent dans l’incapacité de régulariser leur situation à cause d’un manquement des services publics.

Les juridictions font ainsi face à une augmentation très importante des référés « mesures utiles » pour obtenir des rendez-vous en préfecture, en l’absence de créneau disponible sur internet.

La Cimade a pu constater – je l’ai aussi constaté moi-même – que les ruptures de droit au séjour peuvent être dramatiques pour les personnes concernées, « entraînant non seulement un risque d’interpellation en cas de contrôle policier, mais causant fréquemment des difficultés dans l’emploi, l’accès à la formation, aux études, ainsi qu’aux droits sociaux ».

Le Conseil d’État, dans une décision datant du 27 novembre 2019, a dénoncé cette situation et a enjoint à l’État de proposer une solution alternative à la saisine par voie électronique.

Le Gouvernement a pris acte de l’échec de sa stratégie en annonçant le renforcement des effectifs et des moyens consacrés à l’accueil des usagers, mais, pour 2023, cette hausse reste trop modeste.

Cet amendement vise donc à renforcer les moyens humains permettant d’améliorer l’accueil physique en préfecture par un transfert de 7 millions d’euros.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Isabelle Briquet, rapporteure spéciale. C’est aussi une demande de retrait. Cet amendement appelle plusieurs remarques.

Le ministère de l’intérieur a en partie pris la mesure de l’importance des difficultés liées à l’accueil des publics étrangers et a fait le choix de renforcer les effectifs à hauteur de 190 ETPT par an jusqu’en 2024, en parallèle de la montée en puissance de l’Administration numérique pour les étrangers en France (Anef). Je pense que cette évolution doit être accueillie favorablement, même si, comme pour les Cert, dont nous avons parlé précédemment, la difficulté réside à mon sens davantage dans la pérennisation des postes et la montée en compétences des agents. Les renforts ponctuels n’apportent pas de réponse satisfaisante et durable aux problématiques décrites dans l’amendement. Je partage votre constat, mais je note qu’un effort a été fait par le Gouvernement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée. Même avis, mais je vais donner quelques explications.

Je rappelle qu’entre 2010 et 2020 les préfectures ont supporté la suppression de 4 700 emplois, une tendance que le Gouvernement entend stopper. Depuis 2021, il a stabilisé les emplois avec un schéma d’emplois neutre qui a mis fin à ces années de diminution des effectifs. L’accueil reste donc une priorité ministérielle et une partie des 350 créations d’emplois prévues pour la période 2023-2027 est dédiée à son renforcement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-240.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° II-112 rectifié, présenté par MM. Decool, Wattebled, A. Marc, Guerriau et Grand, Mme Mélot, MM. Lagourgue, Levi et Calvet, Mme Guidez, M. Belin, Mme Férat et MM. Moga et Lafon, est ainsi libellé :

I. – Créer le programme :

Automatisation du répertoire électoral unique

II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Administration territoriale de l’État

dont titre 2

 

 

 

 

Vie politique

dont titre 2

 

1 000 000

 

1 000 000

Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur

dont titre 2

 

 

 

 

Automatisation du répertoire électoral unique

1 000 000

 

1 000 000

 

TOTAL

1 000 000

1 000 000

1 000 000

1 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Alain Marc.

M. Alain Marc. Cet amendement a été déposé sur l’initiative de mon collègue Jean-Pierre Decool.

Le droit de vote, et son aboutissement par l’acquisition du suffrage universel, est une suite de combats et de luttes acharnés. Alors que nous sommes nombreux à prendre conscience de cette conquête faite au prix de longs sacrifices, les chiffres des élections départementales et régionales de juin 2021 sont tombés comme un couperet. Le taux d’abstention était de 65,31 % au second tour et de 82 % pour les jeunes, selon les estimations de l’institut de sondage IFOP.

Face à ce problème démocratique, mes collègues Jean-Pierre Decool et Dany Wattebled ont fait le choix de déposer la proposition de loi n° 391 (2021-2022), qui a pour objet d’automatiser la mise à jour du répertoire électoral unique. Le dispositif de ce texte prévoit que chaque administration communique systématiquement tous les changements d’adresse des administrés à l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) pour la mise à jour du répertoire électoral unique, sauf mention contraire expresse de l’administré.

En conséquence, cet amendement vise à créer un programme « Automatisation du répertoire électoral unique » au sein de la mission « Administration générale et territoriale de l’État ».

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Isabelle Briquet, rapporteure spéciale. Si je partage le constat des auteurs de l’amendement sur l’exercice du droit de vote et ses enjeux démocratiques, il me semble que l’amendement proposé pose néanmoins quelques difficultés, notamment au regard du règlement général sur la protection des données (RGPD), mais cela reste à vérifier.

Par ailleurs, l’automatisation de la mise à jour des informations, pour être suffisamment fiable, me semble également complexe à mettre en place, mais Mme la ministre pourra peut-être nous apporter des réponses à ce sujet.

Je pense enfin qu’il existe probablement d’autres moyens de faciliter les inscriptions des électeurs que ces évolutions automatiques. Je demande le retrait de l’amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée. La mesure proposée par les auteurs de cet amendement de rendre automatiques les inscriptions sur les listes électorales des électeurs qui changent de résidence n’apporterait, à mon sens, qu’une solution partielle aux situations de non-inscription et de mauvaise inscription.

D’une part, le citoyen est libre de s’inscrire dans la commune où il souhaite voter et cet amendement semble remettre en cause les principes législatifs et réglementaires encadrant la procédure d’inscription sur les listes électorales.

D’autre part, je vous signale que le ministre de l’intérieur et des outre-mer a lancé une expertise sur la faisabilité d’un dispositif pour fluidifier la procédure de réinscription. L’avis est défavorable.

M. Alain Marc. Je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° II-112 rectifié est retiré.

L’amendement n° II-339 rectifié bis, présenté par Mme M. Filleul, M. Sueur, Mmes de La Gontrie, Blatrix Contat et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Administration territoriale de l’État

dont titre 2

 

 

Vie politique

dont titre 2

 

1 000 000

 

1 000 000

Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur

dont titre 2

1 000 000

1 000 000

TOTAL

1 000 000

1 000 000

1 000 000

1 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Florence Blatrix Contat.

Mme Florence Blatrix Contat. Cet amendement, porté par ma collègue Martine Filleul, vise à développer les travaux d’intérêt général (TIG) au niveau local et à lever un certain nombre de freins à cet effet. L’idée est que l’État propose un accompagnement des collectivités territoriales par une dotation fléchée rattachée au fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD) en préfecture.

Le TIG est une peine très intéressante pour certains auteurs d’infraction en ce qu’elle permet de sanctionner, mais également de réparer, voire de réinsérer. Elle est une vraie solution alternative à l’incarcération de courte durée.

Malgré plusieurs avancées législatives, il existe encore dans la pratique des freins à la création de postes dans ce domaine. Le déploiement de référents TIG au niveau local, dont le rôle serait de faire l’interface entre les services pénitentiaires d’insertion et de probation et les collectivités locales et organismes, nécessite la création de postes supplémentaires. Ce soutien de l’État en direction des collectivités territoriales pour une meilleure réinsertion des délinquants nous paraît indispensable. Tel est l’objet de cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Isabelle Briquet, rapporteure spéciale. À ce sujet, je ne pense pas qu’il faille changer la logique du FIPD, qui est d’abord tourné vers la prévention de la délinquance et non pas vers la sanction ou la réparation. Il importe de ne pas confondre les dispositifs et de ne pas utiliser le même outil pour prévenir la délinquance et pour la sanctionner. Les crédits dédiés aux travaux d’intérêt général étant portés par la mission « Justice », je vous demande de bien vouloir retirer cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée. Je voudrais rappeler que les crédits alloués au FIPD en 2023 sont renforcés, avec une hausse de 4,81 millions d’euros par rapport au PLF pour 2022, soit une dotation pour cette année de 84,09 millions d’euros. Ces crédits vont permettre de poursuivre le financement de la stratégie nationale de prévention de la délinquance, dont fait partie le déploiement des TIG à l’échelle locale, comme vous l’avez rappelé. Cet amendement me semblant satisfait, l’avis est défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-339 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° II-294 rectifié, présenté par Mme Blatrix Contat et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Administration territoriale de l’État

dont titre 2

1

 

1

 

Vie politique

dont titre 2

 

 

 

 

Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur

dont titre 2

 

1

 

1

TOTAL

1

1

1

1

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Florence Blatrix Contat.

Mme Florence Blatrix Contat. Au cours des dernières années, la nécessité d’augmenter considérablement la capacité de production électrique en énergies renouvelables (EnR) a eu pour conséquence un engorgement des services ministériels déconcentrés dans les préfectures.

L’examen préalable de chaque nouvelle demande d’installation doit suivre une procédure d’autorisation précise et longue, faisant intervenir plusieurs directions ou agences, en plus des directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement (Dreal), qui sont cheffes de file et qui disposent de moyens limités.

À l’occasion de l’examen du projet de loi relatif à l’accélération de la production d’EnR, le Sénat a inséré un article 1er bis visant à créer un référent départemental pour faciliter et accélérer l’instruction des projets d’EnR et des projets industriels nécessaires à la transition écologique.

Cette mesure présente l’intérêt d’identifier un interlocuteur unique en préfecture et, partant, de garantir davantage de lisibilité aux porteurs de projets.

Cependant, son application risque de se heurter au sous-dimensionnement des services administratifs par rapport au flux des demandes. En effet, les travaux de la rapporteure spéciale du Sénat, ainsi que de la rapporteure pour avis de la commission des lois, confirment le constat établi de longue date d’un manque important de moyens humains au sein des services instructeurs dans les départements, sur l’ensemble du territoire. Or, sans des moyens en personnels, nous ne parviendrons pas à garantir le déploiement accéléré des EnR dans le respect de l’environnement et en cohérence avec les spécificités des territoires d’implantation.

Vous l’avez compris, le présent amendement est un amendement d’appel, qui me permet de vous interroger, madame la ministre, sur la réalité de l’engagement pris par Mme la ministre de la transition énergétique de prévoir, dans le PLF pour 2023, un renforcement des services de l’État dédiés à cet objectif.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Isabelle Briquet, rapporteure spéciale. S’agissant d’un amendement d’appel, je vais bien entendu en demander le retrait. Il me semble tout de même indispensable de mieux coordonner les services de l’État, de sorte que la multiplicité des intervenants ne fasse pas obstacle aux différents projets d’implantation. Madame la ministre, il faut vraiment faire avancer les choses. On ne peut accepter des blocages sur des projets aussi importants.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée. Parmi les missions prioritaires des préfectures pour les années 2022-2025 figure bien l’amélioration de la coordination des expertises, des modalités de suivi des projets territoriaux, du conseil et de l’orientation des porteurs de projet. L’administration territoriale a bénéficié en 2021 et 2022 d’une stabilisation de ses emplois, avec un schéma qui a mis fin, je le répète, à dix années de baisse continue des effectifs. Je rappelle que 350 créations d’emploi prévues sur la période 2023-2027 garantissent le maintien des moyens humains dans l’ensemble des services locaux, notamment ceux chargés de la coordination des politiques publiques. C’est un avis défavorable.

Mme la présidente. Madame Blatrix Contat, maintenez-vous votre amendement ?

Mme Florence Blatrix Contat. Je vais le retirer, mais je voudrais quand même insister sur un point. Vous n’êtes pas sans savoir que la France est le seul parmi les 27 États de l’Union européenne à avoir raté sa cible en matière d’EnR, ce qui lui a valu une amende de 500 millions d’euros. Nous ne pouvons plus nous permettre d’échouer. J’ai reçu nombre de témoignages sur des retards dans l’instruction de dossiers. Il nous faut avancer collectivement sur ce sujet. Je resterai attentive à ce que ce soit le cas.

Mme la présidente. L’amendement n° II-294 rectifié est retiré.

Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État », figurant à l’état B.

Je vous rappelle que la commission des finances est défavorable à l’adoption de ces crédits.

Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits.

(Les crédits ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. J’appelle en discussion l’article 41 B, qui est rattaché pour son examen aux crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État ».

Administration générale et territoriale de lÉtat

État B
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Engagements financiers de l'État - Compte d'affectation spéciale : Participations financières de l'État - Compte d'affectation spéciale : Accords monétaires internationaux - Compte de concours financiers : Prêts et avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics - Remboursements et dégrèvements

Article 41 B (nouveau)

Avant le 31 décembre 2023, le Gouvernement remet au Parlement un rapport évaluant les conséquences budgétaires, pour la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, d’une évolution de ses missions ayant pour objectifs :

1° La création d’un droit de communication de pièces à la commission par les fournisseurs ou les prestataires de services des candidats, sur le modèle de celui prévu pour les services fiscaux à l’article L. 81 du livre des procédures fiscales ;

2° La possibilité pour la commission de consulter le fichier national des comptes bancaires et assimilés ;

3° L’habilitation de la commission à saisir le service mentionné à l’article L. 561-23 du code monétaire et financier afin qu’il lui indique si des mouvements financiers sur les comptes alimentant une campagne ont fait l’objet de déclarations ;

4° La possibilité pour la commission de disposer d’un accès en temps réel, avec, le cas échéant, le concours des commissaires aux comptes, à la comptabilité des partis politiques soutenant les candidats aux élections.

Mme la présidente. L’amendement n° II-3, présenté par Mme Briquet, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme la rapporteure spéciale.

Mme Isabelle Briquet, rapporteure spéciale. La demande de rapport proposée au présent article porte sur des évolutions majeures dans les compétences et les moyens de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP). Cette commission, sur son site internet, analyse le présent article comme un pas « vers une évolution des moyens d’enquête du régulateur financier de la vie politique. »

Même si des précautions ont été prises pour tenir compte des conséquences budgétaires pour la CNCCFP de ces évolutions, une telle demande de rapport ne relève pas du domaine des lois de finances.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée. Avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-3.

(Lamendement est adopté.)

Article 41 B (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Engagements financiers de l'État

Mme la présidente. En conséquence, l’article 41 B est supprimé.

Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État ».

Engagements financiers de l’État

Compte d’affectation spéciale : Participations financières de l’État

Compte d’affectation spéciale : Accords monétaires internationaux

Compte de concours financiers : Prêts et avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics

Remboursements et dégrèvements

Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Engagements financiers de l’État », du compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État », des comptes de concours financiers « Accords monétaires internationaux » et « Prêts et avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics », ainsi que de la mission « Remboursements et dégrèvements ».

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Jérôme Bascher, rapporteur spécial de la commission des finances. Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des finances, mes chers collègues, je relève d’abord que les conditions de ce débat ne sont pas tout à fait satisfaisantes. Il s’agit quand même d’évoquer les dégrèvements et les charges de la dette, soit la plus grosse mission du budget. C’est un peu dommage de traiter ainsi de ces sujets importants. Je tenais à ce que cela soit dit.

Ensuite, pour reprendre en substance la formule d’une « réclame » diffusée au temps de notre jeunesse, j’ai cinq minutes pour vous dire que la mission « Engagements financiers de l’État », c’est de la dynamite. Effectivement ! Voici une mission qui explose, PLF après PLF. C’est la plus forte hausse, qui, hélas, traduit celle de la charge des intérêts, laquelle va grever nos marges de manœuvre, monsieur le ministre. Notre déficit primaire ne se résorbe pas. Bien au contraire, nous allons payer toujours plus d’intérêts.

En 2022, nous avons eu la mauvaise surprise de l’inflation et de la hausse des taux d’intérêt. En 2023, je vous annonce que ce n’est pas terminé. Christine Lagarde, présidente de la Banque centrale européenne (BCE) vient de le confirmer. Qu’est-ce à dire ? En 2023, malgré une prévision d’inflation très optimiste de votre part, nous allons payer encore plus. C’est l’effet « boule de neige », car notre déficit ne se réduit pas. Bien au contraire, en 2023, selon vos prévisions, il augmentera encore par rapport à 2022, qui n’aura finalement pas été une si mauvaise année, peut-être même meilleure que ce que nous avons voté dans la LFR ce matin. Nous le souhaitons tous, évidemment, pour notre pays.

Malheureusement, il y a encore de l’effet volume dans cette dette, et c’est bien là le problème, monsieur le ministre. Vous n’arrivez pas à inverser la courbe de la dette. Vous remarquerez au passage que celui qui avait proposé en son temps d’inverser une autre courbe s’est pris les pieds dans le tapis… Vous faites bien de ne pas l’imiter. (Sourires.)

Hélas, c’est nécessaire, et le Fonds monétaire international, que connaît bien aussi Christine Lagarde, vous a rappelé à l’ordre, lundi dernier, vous invitant à redresser nos finances publiques rapidement. Rien ne va plus ! Or nous sommes à la veille ou à l’avant-veille de la notation de la dette française par les agences de notation – ce sera, je crois, le 2 décembre : Austerlitz ou Waterloo ? Nul ne le sait.

Nous verrons bien ce qu’elles diront des perspectives de notre pays, ce qui déterminera le prix que nous allons payer pour la dette.

Dans notre malheur, il faut le dire, nous avons quand même une chance, c’est la force de nos institutions. Il peut paraître curieux de dire cela quand on parle des charges d’intérêt de la dette. Seulement, si nous n’avions pas le 49.3, dans l’état actuel de la démocratie française, notre dette serait sans doute attaquée par les marchés financiers. La procédure du 49.3, qui avait été bien pensée déjà à l’époque, permet d’être sûr de pouvoir exécuter un budget. (M. le ministre délégué approuve.) Il est important pour un pays comme la France, qui n’a pas fait défaut, d’avoir cette forme de sécurité.

Toutefois, c’est un peu mince et cela ne fait pas une politique solide pour redresser les finances publiques de ce pays, qui nécessiterait une large majorité afin d’être bien comprise des Français.

Nous allons essayer de vous aider à réduire un tout petit peu le déficit. C’est déjà ce que nous avons fait, ici, au Sénat, dans le cadre des discussions de la loi de programmation des finances publiques, en proposant une nouvelle trajectoire. L’idée est de dire que, si tout le monde fait des efforts, on peut arriver aux 3 % en 2025. Malheureusement, je crains que ce ne soit pas le chemin que vous empruntiez. Monsieur le ministre, je vous donne rendez-vous un peu plus tard pour la discussion des amendements. Je vous ferai des propositions, car j’ai décelé une incohérence entre les crédits évaluatifs de cette mission et votre scénario macroéconomique.

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des finances, en remplacement de M. Victorin Lurel, rapporteur spécial.

M. Claude Raynal, président de la commission des finances, en remplacement de M. Victorin Lurel, rapporteur spécial de la commission des finances. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous examinons ce soir les crédits du compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État ».

Intervenant au nom du rapporteur spécial, Victorin Lurel, qui n’a pas pu être parmi nous ce soir, je souhaiterais introduire mon propos par un retour sur la situation du compte. Depuis 2020, son fonctionnement est très nettement affecté par les conséquences économiques de la crise sanitaire et, désormais, par le contexte international, tant du côté des dépenses, avec d’importants moyens mobilisés pour aider certaines entreprises du portefeuille, que du côté des recettes, du fait de l’interruption des cessions d’actifs. Il a ainsi fallu recourir à plusieurs versements du budget général pour alimenter le compte.

Cette logique devrait se poursuivre en 2023. Alors que les conditions du marché ne sont toujours pas favorables à la réalisation de nouvelles cessions, les versements du budget général devraient représenter les trois quarts des recettes du compte, et même 95 % une fois retranchées les recettes exceptionnelles.

Par ailleurs, pour l’année prochaine, seule une faible part des 10 milliards d’euros d’investissements en capital prévus par le Gouvernement est connue et détaillée dans le projet annuel de performance du compte. Pour 80 % des crédits, « le caractère [des] opérations reste confidentiel, afin de ne pas porter préjudice aux intérêts patrimoniaux de l’État ». Si nous pouvons comprendre ce besoin de confidentialité, cela limite très fortement la capacité d’appréciation du Parlement pour l’année à venir.

Par ailleurs, l’inscription de 6,6 milliards d’euros au titre de la contribution au désendettement de l’État est un véritable tour de « bonneteau » budgétaire, selon l’expression de M. Lurel. Personne n’est dupe : la contribution au désendettement vient en réalité nourrir d’autant le déficit prévu pour 2023.

C’est pour écarter ce mécanisme en trompe-l’œil que la commission des finances a adopté un amendement visant à supprimer les crédits du programme 732 du CAS. Cet amendement intervient en cohérence avec l’annulation des crédits proposés sur la mission « Engagements financiers de l’État » par notre collègue Jérôme Bascher.

Je tiens cependant à relever un point positif : le versement sur le CAS de la dotation en numéraire du fonds pour l’innovation et l’industrie (FII). Alors que celle-ci bénéficiait d’une garantie de rémunération de 2,5 % par an sur un compte du Trésor, financé par l’État, le Gouvernement fait enfin le choix du bon sens en mettant fin à cette dotation et en la remplaçant par des crédits budgétaires.

J’en arrive à la situation du portefeuille de l’État actionnaire, lequel a retrouvé cet été une valorisation légèrement supérieure à son niveau d’avant la crise. Cette valorisation est toutefois dopée par l’offre publique d’achat visant les actions du groupe EDF.

Ainsi, si l’on isole la valorisation d’EDF, la performance du portefeuille de l’Agence des participations de l’État (APE) est très inférieure à celle des grandes entreprises françaises, et ce malgré les opérations de recapitalisation intervenues.

La nationalisation d’EDF me semble aller dans le bon sens. Elle laisse néanmoins entièrement ouverte la question de la situation financière du groupe, dont la dette devrait atteindre 60 milliards d’euros d’ici à la fin de l’année, et dont les besoins d’investissements sont évalués entre 17 milliards et 20 milliards d’euros par an.

Le nouveau président-directeur général d’EDF, Luc Rémont, qui a pris ses fonctions hier, jeudi, devra répondre rapidement aux nombreux défis de l’entreprise : il devra rassurer face aux craintes de démantèlement et permettre la viabilité de l’entreprise.

Je terminerai mon intervention en envisageant la suite : quel rôle et quels défis pour l’État actionnaire demain ? Alors que la nouvelle doctrine d’intervention de l’APE n’est pas encore définie, les pistes esquissées l’an dernier sont toujours d’actualité.

L’intervention de l’APE devra ainsi tenir compte de quatre facteurs : le soutien auprès d’entreprises touchées par la crise ; la préservation de notre souveraineté économique ; l’accompagnement des transitions environnementales et l’accompagnement face aux ruptures technologiques et numériques.

Outre un retour à la doctrine définie sous François Hollande en 2014, j’y vois surtout le choix de revenir à une utilisation des participations financières de l’État comme un outil de politique économique à part entière.

La commission des finances propose d’adopter les crédits du compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État », amendés par l’amendement de la commission visant à supprimer les crédits dédiés au remboursement factice de la dette.

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des finances, en remplacement de M. Pascal Savoldelli, rapporteur spécial.

M. Claude Raynal, président de la commission des finances, en remplacement de M. Pascal Savoldelli, rapporteur spécial de la commission des finances. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Remboursements et dégrèvements » retrace les dépenses résultant mécaniquement de l’application de dispositions prévoyant des dégrèvements, des remboursements ou des restitutions d’impôts. Le caractère mécanique de ces dépenses implique que ces crédits soient évaluatifs.

Par ailleurs, cette mission est la première en volume de crédits, tous budgets confondus, et permet d’avoir une vision d’ensemble des mesures fiscales mises en œuvre et de leurs évolutions.

Elle se compose de deux programmes, l’un consacré aux remboursements et dégrèvements d’impôts d’État, l’autre aux mêmes opérations pour les impôts directs locaux.

En ce qui concerne les remboursements et dégrèvements d’impôts d’État, les dépenses sont évaluées, dans le PLF pour 2023, à 123,7 milliards d’euros, soit une très légère diminution par rapport à la loi de finances initiale (LFI) pour 2022.

Cette quasi-stabilité résulte de tendances contraires entre les différentes actions du programme ; je m’attacherai dans mon exposé à vous faire part des variables les plus notables.

Tout d’abord, les restitutions liées à la mécanique de l’impôt enregistrent une hausse importante de 6,6 milliards d’euros entre 2022 et 2023 sous l’effet, notamment, de la hausse des restitutions de TVA qui devraient atteindre, en 2023, un total de 67,2 milliards d’euros.

Cette augmentation s’explique par le contexte inflationniste, en raison de l’effet volume sur la TVA collectée et par le contexte d’incertitude économique, qui pousse les entreprises à opter pour le remboursement plutôt que pour l’imputation du crédit de TVA sur les années suivantes.

Ce niveau historiquement haut justifierait, à mon sens, un renforcement des moyens de lutte contre la fraude à la TVA et une évaluation plus précise des pertes en découlant. Ce travail me paraît d’autant plus nécessaire que, à la suite des différentes réformes de la fiscalité locale – suppression de la taxe d’habitation sur les résidences principales et baisse des impôts de production –, les collectivités locales ne perçoivent plus désormais que des fractions de TVA, pour un montant total de près de 38 milliards d’euros.

Ce partage de la TVA entre État et collectivités, dont le taux de dépendance à cet impôt augmente, rend indispensable une gestion optimisée de sa collecte, afin de sécuriser les ressources, tant nationales que locales.

Par ailleurs, en 2023, le niveau des remboursements de l’impôt sur les sociétés est évalué à 14,2 milliards d’euros, soit une hausse de 13,8 % par rapport à la LFI pour 2022. Celle-ci résulte d’une diminution attendue, eu égard au contexte économique, du bénéfice fiscal des entreprises en 2022. Toutefois, les incertitudes sont grandes en ce qui concerne l’exécution à venir.

À l’inverse, les remboursements liés à des politiques publiques enregistrent une baisse de près de 5 milliards d’euros en raison de la suppression du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) et de celle de la contribution à l’audiovisuel public. Je m’interroge sur l’effet de cette dernière, annoncée comme une mesure pour améliorer le pouvoir d’achat des Français. En effet, la suppression de la contribution à l’audiovisuel public ne concernera pas les foyers les plus modestes, qui en étaient déjà exonérés.

Si le niveau du crédit d’impôt recherche (CIR) reste, quant à lui, stable, à environ 7 milliards d’euros en 2023, je demeure sceptique sur l’efficacité de ce dispositif en matière de création d’emplois et de multiplication des brevets déposés.

Par ailleurs, comment se satisfaire de l’ambition très mesurée du Gouvernement s’agissant des taux de retour de ce crédit d’impôt, avec une cible fixée à 1 euro investi pour 1 euro remboursé ?

De plus, ce crédit d’impôt est particulièrement complexe à contrôler en raison de la nécessité pour les services de la direction générale des finances publiques (DGFiP) et pour ceux du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche de se coordonner. Il génère également de nombreux contentieux relatifs au caractère éligible ou non des dépenses d’innovation. Il nous faut donc le réformer.

Je conclurai cette partie sur les remboursements d’impôts d’État par une note positive. Les remboursements liés aux contentieux de série baissent sensiblement grâce aux efforts notables réalisés dans le suivi et la gestion des plus gros contentieux.

Je prendrai quelques instants pour évoquer le second programme de cette mission, consacré aux dégrèvements et remboursements d’impôts locaux.

Dans le PLF pour 2023, les crédits évalués au titre du programme 201 s’élèvent à 4,6 milliards d’euros, soit une baisse de 30,8 % par rapport à la LFI pour 2022. Cette diminution résulte des baisses consécutives enregistrées lors des précédentes LFI, qui s’expliquaient notamment par la réforme de la taxe d’habitation sur les résidences principales et, dans une moindre proportion, par la réforme des impôts de production.

Le document que m’a confié M. Savoldelli étant un peu long, je me vois dans l’obligation de réduire son intervention…

M. Jérôme Bascher, rapporteur spécial. Un mot sur deux ! (Sourires.)

M. Claude Raynal, président de la commission des finances en remplacement de M. Pascal Savoldelli, rapporteur spécial. Il ne faudrait pas rendre encore plus illisible le financement des collectivités territoriales.

Au bout du compte, les mesures de compensation des différentes réformes de la fiscalité locale engendrent une perte de l’autonomie financière des collectivités territoriales. En 2022, la part de TVA est déjà la première recette des départements et des régions. Après la possible suppression de la CVAE, elle deviendra la deuxième recette du bloc communal.

Ainsi, les ressources – et donc l’avenir – des collectivités seront désormais majoritairement tributaires d’un impôt national, sur lequel elles n’exercent aucun pouvoir en matière de fixation du taux. La dynamique de cette taxe est certes importante en cette période inflationniste, mais les évolutions futures demeurent très incertaines.

Mme la présidente. La parole est à Mme Micheline Jacques, en remplacement de Mme Martine Berthet, rapporteure pour avis.

Mme Micheline Jacques, en remplacement de Mme Martine Berthet, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je vous prie de bien vouloir excuser Martine Berthet, qui m’a chargée de la remplacer.

La commission des affaires économiques a émis un avis défavorable sur l’adoption des crédits du compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État ». La compétence et le travail du personnel de l’Agence des participations de l’État ne sont bien évidemment pas en cause, mais nous regrettons et contestons les faiblesses du Gouvernement en ce qui concerne l’État actionnaire.

Tout d’abord, nous déplorons le fait qu’en dépit d’annonces qui allaient dans le bon sens, le Gouvernement n’a toujours pas opté pour le retour à un État stratège, capable de soutenir résolument la souveraineté économique de la France. La défense de notre souveraineté reste balbutiante et la nationalisation d’EDF ne doit pas nous tromper : elle est l’arbre qui cache une forêt d’atermoiements, de renoncements et d’hésitations.

En effet, nous avons toujours considéré que la doctrine d’investissement formulée en 2017 était trop floue et ne garantissait pas, en l’état, la sauvegarde de la souveraineté économique française. L’enchaînement de crises depuis 2020 a mis sur le devant de la scène nombre de produits, entreprises ou filières dont le rôle est stratégique pour notre pays, mais qui, pour autant, n’entrent pas dans les catégories que vous avez définies.

L’an dernier, nous avons donc accueilli avec satisfaction les propos du ministre et du commissaire aux participations selon lesquels l’État actionnaire allait davantage prendre en compte cette dimension de souveraineté – conformément à ce que nous martelons au Sénat depuis des années. Malheureusement, trois ans après le début de la crise, nous attendons toujours la concrétisation de ces déclarations, alors même que la nouvelle doctrine n’est toujours pas publiée…

Par ailleurs, en ce qui concerne la nationalisation d’EDF, nous n’en savons guère plus que ce que nous avons pu lire dans la presse. Les informations utiles se font rares, en dépit du montant important de l’opération.

En outre, la nationalisation ne répond pas à toutes les questions. Par exemple, comment régler la dette de près de 43 milliards d’euros d’EDF ? Comment sera financée la relance du nucléaire ? Qu’en est-il des contentieux relatifs aux concessions hydrauliques ?

De même, nous regrettons fortement la méthode par laquelle le Gouvernement envisage de se désendetter de 7 milliards d’euros grâce à ce compte, alors même qu’il ne prévoit aucune recette. En d’autres termes, le remboursement de la dette proviendra en réalité d’un simple versement du budget général. Le tour de passe-passe est vertigineux : 7 milliards d’euros sont prélevés dans le budget, mis dans le compte qui nous intéresse, et enfin versés au désendettement.

Autrement dit, absolument aucun effort structurel n’est fait pour assainir les finances publiques.

Mme Nathalie Goulet. Très bien !

Mme Micheline Jacques, en remplacement de Mme Martine Berthet, rapporteure pour avis. Nous remboursons la dette non pas par des économies, mais en continuant de creuser le budget général ! L’objectif de cette manœuvre est simple : afficher un effort de désendettement, qui n’en a en réalité que le nom, car, de fait, nous nous endettons pour nous désendetter…

Voilà, mes chers collègues, les trois raisons qui conduisent la commission à émettre un avis défavorable sur l’approbation de ce compte.

Mme la présidente. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque unité de discussion comprend le temps de l’intervention générale et celui de l’explication de vote. Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Christian Bilhac.

M. Christian Bilhac. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’objet de ces missions peut paraître quelque peu aride. Il n’en est pas moins crucial, compte tenu des masses financières qu’il représente : plus de 50 milliards d’euros pour la mission « Engagements financiers de l’État », plus de 120 milliards d’euros pour la mission « Remboursements et dégrèvements », sans compter les différents comptes spéciaux.

Le budget de la mission « Engagements financiers de l’État » augmente de plus de 35 % en crédits de paiement en 2023. Son montant total représenterait plus de 10 % des dépenses de l’État.

La composante majeure de cette mission est l’augmentation de la charge de la dette. La remontée des taux d’intérêt, depuis le début de l’année 2022, a eu un effet quasi immédiat sur le coût de notre endettement public, qui était resté somme toute limité ces dernières années, malgré un encours total ayant littéralement explosé, d’abord après la crise financière de 2008, mais surtout en 2020 et 2021 à cause des mesures liées à la crise sanitaire.

Plus que jamais, notre État vit à crédit, pouvant encore compter sur la qualité de la signature française sur les marchés internationaux.

La remontée est pourtant spectaculaire : près de 12 milliards d’euros supplémentaires ont été engagés dès cette année pour le seul paiement des intérêts d’emprunt, par rapport à la loi de finances initiale. En 2023, le service de la dette devrait à peu près équivaloir à 50 milliards d’euros. Il dépassera de nouveau le budget de la défense – réalité quelque peu ironique à l’heure où nous relançons l’effort militaire face à la nouvelle donne internationale.

M. Jérôme Bascher, rapporteur spécial. Eh oui !

M. Christian Bilhac. Face au durcissement du marché obligataire, l’Agence France Trésor (AFT) n’aurait-elle pas intérêt à rechercher davantage les faveurs d’investisseurs français plutôt qu’internationaux, afin de réduire les risques de souveraineté sur notre dette publique ? À cet effet, nous pourrions nous inspirer du Japon, dont l’endettement public, le plus élevé du monde, est essentiellement détenu par des résidents. Mais peut-être cela ne collerait-il pas avec les conceptions ordolibérales qui prévalent au sein de la zone euro…

En ce qui concerne l’imputation de la dette covid dans un programme budgétaire dédié, j’émettrai les mêmes réserves que la commission des finances, relativement aux modalités de calcul et au principe même.

L’argument d’une meilleure lisibilité ne peut faire oublier que les mêmes règles s’appliquent en ce qui concerne le remboursement du capital et le paiement des intérêts. L’ensemble des dettes publiques est intégré dans la fameuse dette maastrichtienne, étalon commun aux pays européens et instrument de mesure de la Commission européenne.

Les montants énormes de la mission « Remboursements et dégrèvements » ne sont généralement pas décomptés dans la présentation courante du budget de l’État. Il est vrai qu’il y a, semble-t-il, peu à dire sur cette mission, s’agissant de restitutions d’impôts et de taxes par l’administration fiscale. L’importance du montant interroge néanmoins sur l’ampleur des irrégularités dans la perception des impôts. Mais, encore une fois, ce débat appartient davantage aux spécialistes du recouvrement fiscal.

Les dégrèvements d’impôts locaux sont plus inspirants : la suppression de la part régionale de la CVAE cette année et la suppression générale prévue pour 2023 et 2024 devant être compensées à l’euro près – ou bien le dégrèvement de 50 % aux entreprises, si le vote du Sénat en première partie venait à être définitivement retenu – donneraient lieu automatiquement à une hausse significative des mouvements sur ce compte.

En conclusion, malgré ces réserves, les membres du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen approuveront les crédits de ces missions.

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Marc.

M. Alain Marc. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, au tournant du siècle, la France s’est laissée bercer par le mythe d’une mondialisation heureuse. Cette douce musique nous a fait oublier l’importance de l’État stratège.

Malheureusement, la crise sanitaire, puis la crise énergétique nous ont cruellement rappelé sa nécessité. L’État stratège, c’est l’État qui bâtit une stratégie économique pour défendre sa souveraineté.

Il ne s’agit pas de dire que l’État doit administrer l’économie. Bien au contraire, l’État doit choisir ses priorités stratégiques et travailler, sur ces verticales, à garantir l’intérêt général sur le long terme. Cette vision doit aujourd’hui nous réunir, au-delà de nos clivages politiques.

Vous l’aurez compris, je concentrerai mon propos sur le compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État ».

Les crédits de ce compte sont en constante augmentation depuis le début de la crise sanitaire, il y a près de trois ans. Cela correspond précisément au retour de l’État stratège sur le devant de la scène. En 2023, le montant des crédits dépassera les 17 milliards d’euros, essentiellement en provenance du budget général.

La succession des crises a eu un double effet positif : d’une part, elle a permis l’abondement massif de ce compte pour financer une stratégie économique ambitieuse ; d’autre part, elle a encouragé l’Agence des participations de l’État à reconsidérer sa doctrine, pour se consacrer désormais aux secteurs les plus stratégiques.

La nationalisation d’EDF, qui prépare le renouvellement de notre parc nucléaire, avec la construction, à long terme, de plusieurs EPR (European Pressurized Reactors), en cohérence avec la volonté affichée par le Gouvernement de neutralité carbone et d’indépendance énergétique, découle de cette logique.

Bien sûr, l’avenir d’EDF ne tient pas exclusivement à ces nouveaux chantiers. Notre fleuron national devra également rénover le parc existant, développer des produits d’export, tels que les SMR (Small Modular Reactors), et, bien sûr poursuivre le développement des énergies renouvelables, afin de doter la France d’un mix décarboné et résilient.

Monsieur le ministre, j’attire votre attention sur un sujet qui nous tient à cœur depuis longtemps : le renouvellement de nos concessions électriques en Aveyron. Cela fait dix ans que celles-ci sont suspendues à la décision de la Commission européenne. Or c’est au Gouvernement qu’il revient de négocier avec cette dernière. Nous souhaitions déjà, lorsque j’étais député, et c’est toujours le cas de l’ensemble des formations politiques du Sénat aujourd’hui, qu’EDF continue d’être concessionnaire.

En effet, EDF a exprimé son envie d’investir considérablement sur les barrages hydroélectriques, qui représentent en Aveyron 10 % de la production hydroélectrique nationale. Nous savons combien celle-ci est nécessaire. En quelques secondes, nous pouvons offrir une quantité considérable d’énergie ; il me semble que ce n’est pas neutre, en cette période. Aussi aimerions-nous que ce dossier avance.

Je crois que sur ces différents chantiers, la nationalisation d’EDF contribuera à la réalisation de nos objectifs.

Je salue le travail mené par notre collègue Martine Berthet, rapporteure spéciale au nom de la commission des affaires économiques, sur ces crédits.

Je partage l’essentiel de son analyse, notamment sur les enjeux liés à la nationalisation d’EDF et au grand professionnalisme de l’Agence des participations de l’État. Je fais également miennes ses réserves quant à la lisibilité du compte.

D’une part, des montants importants sont transférés du budget général vers ce compte spécial, ce qui permet certes de soutenir une politique ambitieuse, mais doit s’accompagner de décisions courageuses.

D’autre part, la nouvelle doctrine de l’agence doit également permettre la cession d’actifs non stratégiques, pour poursuivre le désendettement de l’État.

Malgré ces réserves, le groupe Les Indépendants soutiendra les crédits de ce compte spécial. Il s’agit non pas de donner un blanc-seing au Gouvernement, mais bien de renforcer le rôle de l’État stratège dans notre pays.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Breuiller.

M. Daniel Breuiller. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, il faut arrêter de confier la mission à Jérôme Bascher : à chaque fois qu’il la présente, la dette augmente ! (Sourires.)

M. Jérôme Bascher, rapporteur spécial. C’est une bonne idée !

M. Daniel Breuiller. La mission «Engagements financiers de l’État » est en hausse, nous dit-il, pointant, à raison, que cela est dû à un double effet : un effet taux et un effet volume.

L’effet volume compte plusieurs composantes : la dette covid, conséquence du « quoi qu’il en coûte », dans une période où ceux qui prônent l’orthodoxie budgétaire s’étaient justement convertis à la nécessaire intervention massive de l’État ; le déficit de l’État, au nom duquel le Gouvernement impose des restrictions budgétaires aux collectivités locales ; les mesures de soutien face à l’inflation.

Alors, lorsque les taux repartent à la hausse, la charge de la dette augmente – de 50 milliards d’euros, en l’occurrence. Mais ces sommes ne sont pas perdues pour tout le monde, car si l’État est endetté, il y a en face des préteurs dont les profits augmentent au même rythme, à la faveur de l’inflation.

Je le redis, face aux crises à venir, économiques ou climatiques, dont les coûts seront sans aucune mesure avec ceux déjà trop élevés de l’été catastrophique que nous venons de vivre, nous devons nous interroger sur notre manière de gérer la dette.

La dette covid est isolée, et, si M. le rapporteur spécial estime qu’aucun argument économique ou budgétaire n’est de nature à justifier cet isolement, nous pensons le contraire en ce qui concerne la part de la dette liée aux mesures environnementales. En effet, celle-ci est de nature différente et la noyer dans la masse indistincte de la dette conduira, encore une fois, à la traiter comme une variable d’ajustement.

Le Gouvernement nous proposera de nouveau son habituel arbitrage : maîtrisons d’abord la dette, puis nous prendrons les mesures nécessaires pour nous engager plus radicalement contre le réchauffement climatique.

Mais pour s’en donner les moyens, ne faut-il pas, monsieur le ministre, stopper le désarmement fiscal de l’État et limiter l’effet volume par des recettes nouvelles ? À cet effet, nous avons formulé une proposition d’impôt sur la fortune (ISF) climatique, dont j’espère que vous avez lu l’intégralité.

En ce qui concerne la mission «Remboursements et dégrèvements», nous nous prononçons sur des crédits qui, en raison du caractère mécanique de ces dépenses, sont évaluatifs, comme l’a noté M. le rapporteur spécial Pascal Savoldelli – par la voix du président Raynal.

Toutefois, ces prévisions peuvent susciter quelques interrogations.

En 2023, le rapport indique que le niveau estimé des remboursements de l’impôt sur les sociétés est en hausse de 13,8 % par rapport à la LFI pour 2022. Ces remboursements correspondent à l’écart entre l’imposition effectivement due et les acomptes calculés sur les résultats de l’année précédente. Cette augmentation des remboursements est donc liée à la baisse attendue du bénéfice fiscal des entreprises en 2022, dans un contexte de crise inflationniste.

J’éprouve quelques difficultés à rapprocher cette information – la baisse attendue du bénéfice fiscal des entreprises dans un contexte de crise inflationniste – de votre déclaration, monsieur le ministre, dans cet hémicycle, le 21 novembre dernier : « Plus le gâteau grandit, plus les recettes fiscales augmentent. Nous percevons davantage d’impôt sur les sociétés depuis que son taux a été abaissé à 25 %.»

S’agissant de la question récurrente de la fraude à la TVA, la nécessité d’une vigilance accrue sur les risques de montages frauduleux est pointée. Nous soutenons toutes les mesures prises à cet effet, qui nécessitent selon nous une hausse des moyens humains, d’autant que le coût des postes qui y sont consacrés est moindre que les recettes qu’ils produisent.

Mme Nathalie Goulet. Absolument !

Mme la présidente. La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi.

M. Thani Mohamed Soilihi. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, plan de relance, France 2030, bouclier tarifaire… Le Gouvernement a fait le choix volontariste de soutenir coûte que coûte notre économie, considérant que cet accompagnement permettra de recréer de la richesse.

Si je rappelle ici le « quoi qu’il en coûte », c’est que ce plan de soutien a affecté nos comptes publics : 200 milliards d’euros, ce n’est pas rien ! Mais cette stratégie est pleinement assumée ; elle a permis de sauver notre économie.

De fait, les crédits de la mission « Engagements financiers de l’État » affichent une hausse inédite de 15,9 milliards d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2022. Ils s’élèveraient ainsi à 60,2 milliards d’euros en 2023.

Cette augmentation s’explique principalement par l’ouverture, en cours d’année, de 11,9 milliards d’euros de crédits supplémentaires pour financer la charge de la dette, dans un contexte de forte inflation – bien que la maîtrise de cette dernière en France contribue à modérer ce facteur.

En parallèle, ce niveau élevé d’inflation a également conduit les banques centrales à normaliser leurs politiques monétaires et à remonter leurs taux d’intérêt.

Après plusieurs années de conditions extrêmement favorables pour le financement de la dette française, les taux d’intérêt augmenteraient substantiellement en 2023, à 2,6 % en moyenne annuelle pour les obligations assimilables du trésor à dix ans.

C’est donc la fin de l’argent magique, c’est-à-dire la fin de l’assouplissement quantitatif, prônée par la Banque centrale européenne (BCE), après que le procédé a été abondamment utilisé durant la décennie 2010.

Aussi, face au spectre de la dette et pour éviter les remontrances du FMI, notre gouvernement ne regarde pas ailleurs ; c’est pour cela que le « quoi qu’il en coûte » se mue en « combien ça coûte ».

C’est aussi la raison pour laquelle nous sommes convaincus que des réformes structurelles comme le recul de l’âge de départ à la retraite ou l’achèvement de la réforme de l’assurance-chômage sont nécessaires et conduiront à terme à la maîtrise de nos dépenses publiques.

C’est en ce sens que le programme 114, « Prêt garanti par l’État », poursuivra sa décrue. En effet, la mobilisation toujours forte de cette action, de l’ordre de 1,91 milliard d’euros, baisse de 30 % par rapport à 2022.

Rappelons-nous que, dans le sillage du « quoi qu’il en coûte », le prêt garanti par l’État (PGE) avait connu un grand succès : au 31 juillet 2022, on dénombrait près de 800 000 entreprises bénéficiaires de PGE, pour un encours total de 142,7 milliards d’euros.

Mais l’heure est désormais au remboursement. Selon le dernier baromètre Bpifrance, publié le 17 novembre, 9 % des PME et TPE ayant souscrit un PGE redoutent de ne pas être en mesure de le rembourser. Cette proportion est en hausse de 2 points par rapport à la dernière enquête en date. Toutefois, dans leur grande majorité, les entreprises devraient honorer leurs échéances.

Par ailleurs, le compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État » traduit l’ambition du Gouvernement de rester un État actionnaire.

La nationalisation d’EDF constitue en effet une étape indispensable pour renforcer la crédibilité de l’entreprise sur les marchés dans la perspective de la construction de six EPR2, de la poursuite du programme de grand carénage et de l’amplification des investissements dans les énergies renouvelables.

En ce qui concerne la mission « Remboursements et dégrèvements », il convient de noter que les remboursements d’impôts d’État liés aux contentieux de série baissent sensiblement, passant ainsi de 2,7 milliards en 2022 à 1,1 milliard d’euros en 2023, grâce aux efforts réalisés dans le suivi des plus gros contentieux. Aussi ne pouvons-nous que saluer le travail réalisé par notre administration fiscale.

En conclusion, la France se trouve en quelque sorte sur une ligne de crête, prise en étau entre le rétablissement nécessaire des comptes publics et le soutien de l’activité économique et énergétique. C’est toutefois ce seul chemin que nous devons poursuivre.

Mme la présidente. La parole est à Mme Isabelle Briquet.

Mme Isabelle Briquet. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Engagements financiers de l’État » nous appelle à une grande vigilance en raison des nombreuses zones d’ombre de ses programmes.

Plusieurs points méritent notre attention.

Tout d’abord, la charge de la dette a littéralement explosé entre 2020 et 2023, enregistrant une hausse de 45,5 %.

Les crédits de la mission sont parmi ceux qui augmentent le plus, en raison de l’inflation constante que nous subissons depuis quelques mois. Face à une hausse historique des taux d’intérêt, nous pouvons légitimement nous interroger sur vos prévisions de stabilité à l’horizon 2023.

Ensuite, les prêts garantis par l’État risquent fort d’être une bombe à retardement. En effet, la crise sanitaire, les conséquences économiques de la crise en Ukraine – crise de l’énergie ou de l’approvisionnement, coût des matières premières – et les tensions sur le marché du travail ont eu de fortes répercussions sur la trésorerie des entreprises.

Le risque est double : d’une part, une accélération du nombre de faillites, y compris d’entreprises parfaitement viables et productives et, d’autre part, une réduction de leurs dépenses d’investissement – c’est ce que les économistes qualifient généralement d’étranglement par la dette.

Les chiffres sont édifiants : parmi les quelque 700 000 entreprises ayant souscrit un PGE – pour plus de 148 milliards d’euros au total –, elles sont seulement 11 % à s’être acquittées de leur dette.

Les courbes actuelles laissent présager 37 000 défauts de paiement en 2022 – chiffre pour le moins inquiétant. Bien que le PLFR pour 2022 prévoie une baisse de 2 milliards d’euros des provisions pour les PGE, nous avons de sérieux doutes sur ce calibrage en 2023.

De la même manière, nous estimons urgent de mettre en place des mécanismes innovants pour éviter le défaut de paiement des créances aux entreprises dont la solvabilité à court terme est remise en question.

Par ailleurs, que penser de l’absence de prise en compte budgétaire de la dette covid ou de celle de SNCF Réseau parmi les crédits dévolus à la charge de la dette ? En toute logique, cela devrait pourtant être le cas.

Au regard de ces approximations, la question du désarmement fiscal de la France se pose avec d’autant plus d’acuité.

L’amortissement de ces dettes doit-il se faire sur le dos de tous les Français, en tablant sur une réduction de la dépense publique et en supprimant encore davantage de services publics ? Nous ne le pensons pas.

Bien au contraire, nous avons formulé des propositions pour davantage de justice fiscale et sociale : suppression de la flat tax, rétablissement de l’ISF, taxation des superprofits, rehaussement de la taxe sur le numérique…

Manifestement, les débats sur la première partie de ce PLF pour 2023 n’indiquent aucune remise en question de vos choix fiscaux. Vous refusez toujours de faire payer ceux qui le peuvent – les plus aisés, ceux qui s’enrichissent de la crise et de la situation économique du pays –, au détriment des plus vulnérables.

Ces choix, monsieur le ministre, fragilisent la situation financière de notre pays et accentuent le sentiment d’abandon qui gagne un peu plus chaque jour l’ensemble de nos concitoyens.

Cette fracture se manifeste dans l’accès aux services publics, car la dématérialisation est une facilité qui peut aussi isoler certains de nos concitoyens. Même s’il semble que ce soit le cap choisi, je rappelle que la dématérialisation ne peut se substituer à l’accueil du public, pour qui la fracture numérique constitue un handicap de tous les jours.

Enfin, l’analyse du programme 201, « Remboursements et dégrèvements d’impôts locaux », suscite tout de même quelques commentaires.

En volume, nous constatons une baisse de 31 % environ par rapport à l’exercice précédent. Cette baisse continue n’est pas une simple ligne comptable ; elle traduit, de manière indirecte, l’insidieuse atteinte à l’autonomie fiscale des collectivités.

En effet, cette diminution découle de la suppression progressive de la taxe d’habitation, d’une part, et de la réduction massive des impôts de production, d’autre part.

Vous le savez, monsieur le ministre, nous sommes loin de partager votre position dogmatique sur la baisse d’impôt, qui conduit à une injustice grandissante. D’ailleurs, au rythme où vont vos réformes, il est à craindre qu’il ne sera plus nécessaire d’étudier ce programme l’an prochain, car, sans impôts locaux, point de remboursement ou de dégrèvement !

Ce programme pose donc la question de l’autonomie fiscale de nos collectivités, celle du lien entre l’impôt local, le territoire et les habitants, et, au-delà, celle de la démocratie locale. Si ce débat n’est pas mené, plusieurs programmes budgétaires pourraient disparaître et, avec eux, une certaine idée de la décentralisation.

Mme la présidente. La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, au travers de la discussion du compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État », qui retrace la doctrine de l’État actionnaire, je souhaite particulièrement insister sur l’avenir du groupe EDF.

En effet, après une augmentation de 2,6 milliards d’euros au mois d’avril 2022, justifiée par la situation financière très difficile de l’entreprise – situation due aux contraintes imposées par l’État à EDF d’un blocage des tarifs de l’électricité –, les crédits doivent désormais être employés pour financer la montée au capital du groupe EDF afin de parvenir à 100 % de détention par l’État par le rachat des parts des actionnaires minoritaires.

Alors que cette opération a un coût annoncé de 9,7 milliards d’euros, le Parlement ne dispose pas d’informations précises sur les raisons d’une telle opération ni, monsieur le ministre, sur votre vision stratégique pour l’avenir de l’entreprise historique. Les documents budgétaires en notre possession sont incomplets, voire inexistants, et vous vous refusez toujours au débat.

Pourquoi cela, alors que de nombreuses interrogations, voire des zones d’ombre persistent ?

Hormis la volonté affichée de gérer les concessions hydroélectriques en quasi-régie afin d’éviter leur mise en concurrence, qu’attendez-vous d’une détention de 100 % du capital d’EDF ?

Avez-vous abandonné la réorganisation du groupe EDF, sur le modèle du projet Hercule ou grand EDF, impliquant le démantèlement de l’entreprise et la privatisation de ses activités les plus rentables, en particulier les énergies renouvelables ?

Sur ce dernier point, pourquoi les notes préparatoires à l’opération de montée au capital qui indiqueraient qu’elle permettrait « de préparer sur une base nouvelle les négociations – régulation du nucléaire et réorganisation du groupe – à venir avec l’ensemble des parties prenantes » ne sont-elles pas accessibles aux parlementaires ?

Allez-vous céder des actifs comme Dalkia ou ouvrir le capital d’Enedis ?

Dois-je rappeler qu’EDF est au cœur de notre système électrique ? Dès lors, il est impératif qu’il y ait le plus de transparence possible quant au futur statut du groupe, au devenir du mécanisme relatif à l’accès régulé à l’électricité nucléaire historique (Arenh) et au financement du nouveau nucléaire, qui seront les grands sujets de l’année prochaine.

Face aux enjeux financiers de cette montée au capital, en pleine crise énergétique et d’approvisionnement, le Gouvernement ne peut faire l’économie d’une explication devant le Parlement.

Comme cela a été rappelé sur de nombreuses travées, l’absence de recours à une loi de nationalisation ne permet pas d’avoir un débat satisfaisant sur l’avenir de l’entreprise et, ainsi, sur l’emploi des deniers publics nécessaires pour mener à bien cette étatisation. Parce qu’EDF est une entreprise stratégique contribuant à la souveraineté énergétique du pays et parce qu’elle a en charge une mission d’intérêt général et de service public, nous pensons que sa disparition dans sa forme intégrée porte en germe un risque systémique.

Comme vous le savez, monsieur le ministre, nous sommes favorables à une nationalisation d’EDF. Nous sommes favorables à la reconstruction d’un grand service public de l’énergie qui regrouperait Engie et, pourquoi pas, TotalEnergies, un service public de l’énergie soustrait aux logiques concurrentielles du marché européen.

C’est pourquoi notre groupe rejettera les crédits de ce compte d’affectation spéciale. Nous voulons rappeler au Gouvernement la nécessité d’avoir un tel débat sur la stratégie d’EDF. Ce débat doit concerner le Parlement, en associant aussi les usagers et les salariés et syndicats du groupe.

Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet.

Mme Nathalie Goulet. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, Laurent Saint-Martin et moi-même avions envisagé, voilà quelques années, l’organisation d’un débat sur la dette avant tout examen du projet de loi de finances.

En effet, le déficit et la dette annihilent quelque peu notre liberté sur un débat extrêmement important (M. le rapporteur spécial acquiesce.) portant sur une mission que j’affectionne particulièrement, pour en avoir été moi-même le rapporteur spécial, lorsque j’ai eu le bonheur de siéger à la commission des finances pendant trois ans. De ce point de vue, je partage les propos du rapporteur spécial.

Par conséquent, je mesure bien de quoi il s’agit ; je pense notamment, ces dernières années, aux effets d’un taux d’intérêt négatif anesthésiant la moindre réaction. Nous n’avons eu de cesse d’alerter sur le fait qu’un beau jour, comme la Belle au bois dormant, il faudrait se réveiller, puisque les taux allaient finir par augmenter, mais, telle sœur Anne ne voyant rien venir, personne ne s’est inquiété d’une augmentation des taux qui n’arrivait pas. Cette fois, nous y sommes et le réveil est difficile !

Évidemment, je félicite le rapporteur spécial pour son travail sur cette mission.

Monsieur le ministre, je vous rappelle qu’à plusieurs reprises, les années passées, nous avions demandé une simulation des conséquences d’une augmentation des taux. Cependant, tous ceux que la commission des finances a entendus en audition se sont renvoyé la patate chaude en indiquant ne pas savoir faire.

M. Jérôme Bascher, rapporteur spécial. Oui !

Mme Nathalie Goulet. Aujourd’hui, il ne s’agit plus de simulation, puisque nous sommes confrontés à une augmentation effective de l’augmentation des taux. Toutefois, si, par hasard, cette tendance devait se confirmer, il serait intéressant de disposer d’évaluations des conséquences immédiates de l’augmentation des taux, au moins pour l’année prochaine.

À ce moment précis de mon intervention, je tiens à saluer les agents de l’Agence France Trésor, qui accomplissent un travail absolument remarquable dans des conditions loin d’être faciles. J’en profite pour vous demander, monsieur le ministre, si vous détenez la liste des possesseurs de notre dette et comment celle-ci est répartie – une telle information serait intéressante. En effet, nous ne disposons pas de toutes les données, alors que la situation devient délicate, d’autant que nous devons affronter le problème des engagements hors bilan – sujet majeur de mon propos.

Les engagements hors bilan représentent en effet 4 615 milliards d’euros, ce qui n’est pas rien et suscite des interrogations de notre part. Monsieur le ministre, j’ignore si vous pourrez nous fournir quelques informations sur ce sujet, sachant que, à cette heure tardive, pour être populaire dans cette maison, il convient d’intervenir en trois minutes au lieu de six. (Exclamations amusées.)

Mme Cécile Cukierman. Il vous suffit de ne pas parler de votre département ! (Sourires.)

Mme Nathalie Goulet. J’en reviens justement…

M. Jérôme Bascher, rapporteur spécial. De l’Orne !

Mme Éliane Assassi. Vous en avez assez parlé aujourd’hui. (Nouveaux sourires.)

Mme Nathalie Goulet. … et j’en ai en effet déjà beaucoup parlé aujourd’hui. Pour une fois, je n’en reparlerai donc pas.

Je remercie les membres de la commission des lois, qui sont majoritairement présents sur ce sujet important.

Sans plaisanterie, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le ministre, je crois qu’il faudrait essayer de faire en sorte que, l’année prochaine, ce débat figure assez tôt dans l’organisation de nos travaux, parce qu’il arrive toujours tard le soir. C’est un débat, sacrifié, alors que, à mon sens, il est absolument fondamental pour la compréhension tant de l’équilibre budgétaire que des moyens dont nous disposons pour les politiques publiques.

Il faut dépasser le caractère mécanique de l’exercice, consistant à rappeler les éléments figurant dans le rapport de la commission des finances, car il s’agit d’un dossier extrêmement important. De la même façon, le dossier relatif aux dégrèvements est éminemment politique : les dégrèvements, c’est une politique et une stratégie. Je trouve donc extrêmement dommageable que, cette année comme les années précédentes, ce débat important arrive à cette heure tardive.

Je continue de penser que la conclusion à laquelle le député Saint-Martin et moi-même étions parvenus s’applique encore cette année. C’est pourquoi je le répète : monsieur le président de la commission des finances, sans doute faudrait-il l’année prochaine organiser, en début de session budgétaire, un débat portant uniquement sur les engagements, donc sur la dette, de façon que nous soyons totalement éclairés quant aux marges de manœuvre à notre disposition sur les politiques publiques à venir.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Gabriel Attal, ministre délégué auprès du ministre de léconomie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics. Je remercie d’emblée les rapporteurs spéciaux, les rapporteurs pour avis et les orateurs des groupes de la qualité de leurs interventions. Je m’efforcerai de répondre dans le temps imparti aux principaux sujets soulevés et organiserai mon propos autour des trois blocs de politique publique examinés à l’occasion de la discussion des crédits de ces missions.

D’emblée, je précise que nous partageons bien évidemment la préoccupation exprimée par le rapporteur spécial Jérôme Bascher et plusieurs d’entre vous, mesdames, messieurs les sénateurs, sur l’évolution des taux d’intérêt. La programmation budgétaire du Gouvernement intègre déjà une hausse des taux d’intérêt en cohérence avec un scénario pluriannuel de normalisation des conditions monétaires. Le scénario de taux retenu pour le projet de loi de finances pour 2023 est celui d’une remontée des taux longs.

Ainsi, le projet de loi de finances fait l’hypothèse que le taux à dix ans serait à 2,5 % fin 2022, puis à 2,6 % fin 2023. Mme Briquet s’est interrogée sur la prévision des taux et a remis en cause celle du Gouvernement de 2,6 % à fin 2023. Ce soir, le taux des obligations assimilables du Trésor (OAT) à dix ans est à 2,43 % ; la prévision des marchés pour la fin 2022 est égale ou inférieure à 2,5 % et le projet de loi de finances pour 2023 est bâti sur des hypothèses structurelles et non sur les dernières données du marché, qui est évidemment très volatil en ce moment.

À M. Bilhac qui a formulé le souhait que l’Agence France Trésor revienne sur son marché domestique, je réponds que la diversité des investisseurs internationaux est un atout et non une menace, qui nous permet d’emprunter moins cher, de diversifier les détenteurs et de les mettre en concurrence. Je rappelle d’ailleurs que détenir une OAT n’ouvre qu’un seul droit, celui d’être remboursé.

Mme Goulet a demandé des précisions sur l’impact qu’aurait une augmentation des taux. Un choc de taux de 1 point par rapport au scénario de référence à 2,6 % entraînerait une hausse de la charge de la dette de 2,5 milliards d’euros la première année, de 6 milliards d’euros la suivante et de 16 milliards d’euros à horizon 2027. Il s’agit donc d’un enjeu absolument majeur.

Le scénario de hausse progressive des taux d’intérêt est cohérent avec le scénario macroéconomique du Gouvernement, comme avec la cible d’inflation à long terme de la Banque centrale européenne, dont le mandat est de maintenir l’inflation de long terme proche de 2 %.

Je rappelle que le calibrage d’un montant retenu pour les appels en garantie des prêts garantis par l’État en 2023, qui a été critiqué par Mme Briquet, prend appui sur les calculs réalisés par la Banque de France pour la direction générale du Trésor et actualisés au moins deux fois par an. L’évolution des appels en garantie dépend étroitement de l’évolution de la conjoncture économique et financière, de la dynamique des défaillances d’entreprises et de la bonne santé financière des entreprises. Je pense au prix des intrants, aux coûts de production, à l’accès au financement, aux liquidités, au niveau d’endettement. C’est pourquoi aucun autre élément que les prévisions susmentionnées ne permet de présager un montant final d’avances sur indemnisation pour l’année 2023.

L’isolement budgétaire de la dette covid dans un programme dédié, qui a été relevé, si ce n’est critiqué par le président de la commission des finances et le rapporteur spécial Jérôme Bascher, a pour objectif prioritaire de retracer dans les comptes publics de manière lisible et claire le montant des dettes d’État résultant de la crise sanitaire et d’afficher une trajectoire de remboursement de cette dette entre 2022 et 2042. L’intégration de la charge des intérêts avec la dette elle-même, qui matérialise le coût complet de l’effort national, est en effet inhabituelle, mais s’apprécie au regard de sa vertu pédagogique.

J’en viens au compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État ». Je rappelle d’emblée que, de manière constante, tous les gouvernements ont fait le choix de retenir un montant notionnel de prévisions de recettes et de dépenses, afin de ne pas donner de signaux au marché. Le Gouvernement est en effet soumis à plusieurs obligations : d’abord – et c’est la première d’entre elles –, l’information et la transparence à l’égard du Parlement, ensuite, gérer au mieux les données publiques et défendre les intérêts du contribuable, ce qui suppose de ne pas révéler ses intentions au marché, enfin, protéger la réputation d’entreprises, dont les difficultés potentielles pourraient nécessiter en cours d’année des opérations de recapitalisation.

C’est cette tension entre ces différents impératifs qui s’impose au Gouvernement et qui justifie l’inscription de crédits notionnels qu’a soulignée Mme Jacques dans son intervention. Malgré ces contraintes, l’effort de transparence de l’État est chaque année particulièrement important, avec la publication du projet annuel de performance du compte d’affectation spéciale ainsi que d’un rapport d’activité et d’un rapport financier de l’Agence des participations de l’État, en annexe du projet de loi de finances.

Madame Jacques, notre vision d’un État stratège existe bel et bien. Elle se concrétise en recourant à trois outils d’intervention en fonds propres, dont les doctrines sont complémentaires.

Premièrement, la Caisse des dépôts et consignations investit sans horizon de temps en tant qu’actionnaire stratégique d’influence ou de contrôle dans certains secteurs prioritaires – la transition écologique, le développement économique, la cohésion territoriale, l’habitat, la cohésion sociale –, mais elle reste évidemment également attachée à des niveaux de rentabilité minimaux. (M. le rapporteur spécial sexclame.)

Deuxièmement, Bpifrance investit en tant qu’actionnaire minoritaire actif au capital d’entreprises françaises, à l’occasion d’une évolution actionnariale et aux côtés d’un actionnaire majoritaire ou de référence pour assurer un actionnariat français dans ces entreprises avec un horizon d’investissement de type fonds d’investissement, même si la durée de détention n’est pas fixée ex ante.

Troisièmement, l’Agence des participations de l’État est pour sa part l’actionnaire stratégique sur les sujets les plus critiques, conjuguant un fort niveau de contrôle de l’État – on compte quarante-quatre entreprises dans lesquelles l’État est majoritaire sur les quatre-vingt-trois que détient l’agence –, une capacité à privilégier des objectifs stratégiques ou industriels avant les attentes de rendement, et des capacités financières pouvant être gérées sur le long terme et sans limite d’horizon d’investissement.

C’est dans ce contexte que doit s’apprécier la performance financière du portefeuille coté de l’APE. Ce portefeuille est fortement pondéré sur un petit nombre de secteurs, notamment l’énergie, ce qui limite sa comparabilité avec le panel plus large des entreprises du CAC 40. Ainsi, au 18 novembre 2022, la valeur des participations de l’État dans EDF et Engie représentait 56 % de la valeur du portefeuille coté de l’État.

La question de l’inscription de 6,6 milliards d’euros au titre de la contribution au désendettement de l’État est régulièrement soulevée. Nous avons mis en place une trajectoire d’apurement de la dette née de la crise sanitaire, permettant d’amortir son montant sur une période de vingt ans par des dotations annuelles auprès de la Caisse de la dette publique (CDP). En l’absence de recettes de cession et compte tenu du caractère stratégique de la dépense, chaque échéance annuelle versée à cet établissement nécessite l’abondement préalable en recettes du compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État » à partir du programme 369, « Amortissement de la dette de l’État liée à la covid-19 », à hauteur de la dépense envisagée.

Maintenir la maquette budgétaire inchangée en conservant le programme 732, « Désendettement de l’État et d’établissements publics de l’État », permettra d’assurer le suivi dans le temps de ces opérations, notamment quand une reprise des cessions de participations pourra être envisagée pour participer au désendettement, ce qui est notre souhait.

Sur la mission « Remboursements et dégrèvements », la hausse marquée du remboursement de la TVA traduit, de la part des entreprises, une préférence pour le présent, dans un contexte d’incertitude économique. En ce qu’il contribue à la liquidité des entreprises, le droit d’opter pour le remboursement plutôt que pour l’imputation pour les périodes d’affaires suivantes participe très concrètement au soutien de l’économie. Cet outil a été mobilisé de façon très efficace dans les premiers mois de la crise sanitaire : il fait partie des aides peu visibles, mais décisives pour nos entreprises.

Je rappelle que la TVA est censée rester neutre pour les acteurs économiques tout au long de la chaîne de valeur et que la charge de trésorerie liée au décalage entre la collecte et le reversement de la TVA peut représenter dans certains secteurs et en période de tension économique une charge réelle pour les exploitations. Ce dispositif de remboursement de TVA constitue une part majoritaire des crédits de la mission, à hauteur de 54 %.

En parallèle, j’indique que la lutte contre la fraude à la TVA est l’un des objectifs prioritaires du Gouvernement. C’est un domaine dans lequel nous ne ménageons pas nos efforts. (Mme Nathalie Goulet manifeste sa satisfaction.) Disant cela, je m’adresse particulièrement à Mme Goulet, spécialiste de cette question ! (Sourires.)

Les travaux d’estimation du manque à gagner en matière de TVA progressent. Ainsi, l’Insee a mis au point une méthode d’évaluation robuste, dont les premiers résultats donnent une enveloppe absolument vertigineuse.

M. Gabriel Attal, ministre délégué. L’estimation du montant de fraude à la TVA oscille entre 20 et 25 milliards d’euros par an !

Pour contribuer à sa fiabilisation, la DGFiP a lancé environ 500 contrôles aléatoires en TVA, dont les premiers résultats sont attendus dans les prochaines semaines. Bien évidemment, je les transmettrai au Parlement.

La loi de finances pour 2020 a permis d’augmenter l’arsenal juridique disponible et la coopération entre administrations, laquelle est facilitée par l’ouverture ou l’accès croisé aux applications, notamment pour lutter contre la fraude à la TVA à l’importation.

Dans le projet de loi de finances pour 2023, nous avons élaboré avec le Parlement plusieurs mesures qui nous donnent de nouvelles armes : réforme de la procédure de suspension des numéros de TVA intracommunautaire, élargissement des compétences des officiers fiscaux judiciaires à l’escroquerie à la TVA.

Mme Nathalie Goulet. Très bien !

M. Gabriel Attal, ministre délégué. D’un point de vue opérationnel, la DGFiP a également engagé des actions spécifiques en ciblant des secteurs à risque, par exemple l’utilisation abusive du régime de TVA sur la marge dans le secteur du négoce des véhicules d’occasion ou, s’agissant des fraudes au carrousel, la judiciarisation précoce des dossiers détectés par l’administration fiscale.

Dans tous les domaines, les travaux sont engagés pour une transparence accrue des transactions assujetties à la TVA à partir de 2024, grâce à une meilleure maîtrise de la donnée.

Ainsi débutera auprès des plateformes électroniques la collecte des données relatives aux opérations réalisées via leur marketplace. Par ailleurs, et c’est un grand chantier dont nous serons amenés à beaucoup reparler ici, la facturation électronique se déploiera dans les relations entre assujettis à la TVA à compter du 1er juillet 2024 pour les grandes entreprises – c’est-à-dire très bientôt.

Toutes ces mesures doivent contribuer à sécuriser les ressources de l’ensemble des bénéficiaires de la TVA à un horizon proche.

Au-delà de la seule TVA, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous rappelle que la performance du contrôle fiscal continue de s’améliorer. Le montant des droits rappelés est égal à 13,4 milliards d’euros en 2021, soit 5,2 milliards d’euros de plus qu’en 2020, qui était une année particulière, et 1,7 milliard d’euros de plus qu’en 2019. Le contrôle fiscal se transforme : nous faisons plus de prévention, nous ciblons mieux les contrôles en fonction des risques, notamment grâce aux data mining. En 2021, la part des contrôles issus du data mining atteint 45 %, contre une cible initiale à 40 %.

Enfin, sur les remboursements à des politiques publiques, je rappelle que la suppression de la contribution à l’audiovisuel public est une mesure nationale permettant de supprimer un impôt injuste, car forfaitaire, dû par de nombreux ménages modestes, aisément contournable et obsolète, tout en maintenant la même ambition de financement du service public de l’audiovisuel.

Le crédit d’impôt recherche a pour objectif de stimuler les investissements des acteurs privés en recherche et développement. Il s’agit d’une dépense fiscale très importante pour le budget de l’État, mais aussi de l’un des dispositifs les plus au cœur de l’attractivité économique de notre pays.

J’évoque enfin la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, dont l’enjeu est de poursuivre la baisse de la fiscalité de production en supprimant intégralement l’impôt qui génère le plus d’effets économiques néfastes à la compétitivité des entreprises françaises. Il ne m’a pas échappé que la Haute Assemblée avait rejeté l’article 5 lors de l’examen de la première partie du projet de loi de finances pour 2023. Comme j’ai eu l’occasion de le dire, le Gouvernement regrette fortement cette décision.

Je ne convaincrai sans doute pas une majorité d’entre vous, mesdames, messieurs les sénateurs, mais je rappelle que nous en avons besoin pour la souveraineté industrielle. Nous aurons l’occasion d’en reparler lors de l’examen des amendements, puisque l’un d’entre eux a pour objet la traduction concrète de l’absence de suppression de la CVAE.

engagements financiers de l’état

Engagements financiers de l'État - Compte d'affectation spéciale : Participations financières de l'État - Compte d'affectation spéciale : Accords monétaires internationaux - Compte de concours financiers : Prêts et avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics - Remboursements et dégrèvements
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Compte d'affectation spéciale : participations financières de l'État
Engagements financiers de l'État - Compte d'affectation spéciale : Participations financières de l'État - Compte d'affectation spéciale : Accords monétaires internationaux - Compte de concours financiers : Prêts et avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics - Remboursements et dégrèvements
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Compte d'affectation spéciale : participations financières de l'État

Mme la présidente. Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Engagements financiers de l’État », figurant à l’état B.

ÉTAT B

(En euros)

Mission / Programme

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

Engagements financiers de lÉtat

53 516 946 497

60 289 283 120

Charge de la dette et trésorerie de l’État (crédits évaluatifs)

50 825 000 000

50 825 000 000

Appels en garantie de l’État (crédits évaluatifs)

2 582 736 463

2 582 736 463

Épargne

59 210 034

59 210 034

Dotation du Mécanisme européen de stabilité

50 000 000

50 000 000

Augmentation de capital de la Banque européenne d’investissement

0

0

Fonds de soutien relatif aux prêts et contrats financiers structurés à risque

0

185 850 311

Amortissement de la dette de l’État liée à la covid-19

0

6 586 486 312

Mme la présidente. L’amendement n° II-443, présenté par M. Bascher, au nom de la commission, est ainsi libellé :

I. – Supprimer le programme :

Amortissement de la dette de l’État liée à la covid-19

II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits de programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Charge de la dette et trésorerie de l’État (crédits évaluatifs)

 

 

 

 

Appels en garantie de l’État (crédits évaluatifs)

 

 

 

 

Épargne

 

 

 

 

Dotation du Mécanisme européen de stabilité

 

 

 

 

Augmentation de capital de la Banque européenne d’investissement

 

 

 

 

Fonds de soutien relatif aux prêts et contrats financiers structurés à risque

 

 

 

 

Amortissement de la dette de l’État liée à la Covid-19

 

 

 

6 586 486 312

TOTAL

 

 

 

6 586 486 312

SOLDE

- 6 586 486 312

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Jérôme Bascher, rapporteur spécial. Nous nous sommes déjà largement exprimés sur le cantonnement de la dette liée au covid-19 dans un seul programme. Dans la mesure où nous sommes contre, nous allons décantonner ! (Sourires.)

Cet amendement vise donc à supprimer le programme 369 « Amortissement de la dette de l’État liée à la covid-19 » et les crédits afférents.

En effet, en procédant ainsi, le Gouvernement mélange les choux et les carottes, puisque ce programme rassemble le capital et des crédits de charges d’intérêts. C’est très original, comme M. le ministre l’a d’ailleurs souligné.

Nous ne sommes pas du tout favorables à cette soupe choux-carottes, au moment où le budget prend le bouillon. (Nouveaux sourires.)

Vous avez parlé de pédagogie, monsieur le ministre, mais ce n’est pas le budget de l’éducation !

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gabriel Attal, ministre délégué. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.

La crise a pesé sur notre endettement et ces dispositifs ont pour objectif d’identifier, retracer et suivre l’amortissement de la dette liée à la crise sanitaire.

Pendant cette crise, nous avons paré au plus urgent. Maintenant que nous en sortons, nous devons rembourser cette dette et c’est notamment par la croissance que nous y arriverons. C’est pourquoi, chaque année, une partie du surcroît de recettes liées à la croissance sera affectée au remboursement de la dette covid de l’État. Ce programme permet de suivre l’évolution de la dette chaque année d’ici à 2042, depuis son estimation initiale de 165 milliards d’euros à la fin de l’année 2021.

Nous y voyons là un enjeu de lisibilité et de transparence sur la gestion de nos finances publiques, comme de responsabilité. Par ailleurs, cela correspond à une attente des Français qui se posent de nombreuses questions sur cette dette.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-443.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° II-442, présenté par M. Bascher, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Charge de la dette et trésorerie de l’État (crédits évaluatifs)

 

 

 

 

Appels en garantie de l’État (crédits évaluatifs)

 

700 000 000

 

700 000 000

Épargne

 

 

 

 

Dotation du Mécanisme européen de stabilité

 

 

 

 

Augmentation de capital de la Banque européenne d’investissement

 

 

 

 

Fonds de soutien relatif aux prêts et contrats financiers structurés à risque

 

 

 

 

Amortissement de la dette de l’État liée à la Covid-19

 

 

 

 

TOTAL

 

700 000 000

 

700 000 000

SOLDE

- 700 000 000

- 700 000 000

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Jérôme Bascher, rapporteur spécial. Il s’agit de remettre un peu de sincérité et de cohérence dans les prévisions du Gouvernement.

Aujourd’hui, il est très difficile de faire des hypothèses économiques et macroéconomiques – c’est un peu comme gagner au loto ! (Sourires.)

Ce qui est certain, en revanche, c’est que nous avons supprimé 2 milliards d’euros de crédits pour les PGE lors de l’examen des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de finances rectificative pour 2022 ce matin. C’est pourquoi la commission des finances revoit à la baisse les prévisions du Gouvernement et propose une annulation de crédits à hauteur de 700 millions d’euros.

De deux choses l’une, soit la réalité sera pire que les hypothèses retenues et toutes les entreprises prendront le bouillon, davantage à cause des Urssaf et de la crise de l’énergie que des PGE, d’ailleurs ; soit la situation sera meilleure et les prévisions du Gouvernement sont trop hautes.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gabriel Attal, ministre délégué. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.

Nous avons besoin de ces crédits pour rembourser les entreprises. Nous avons tenu compte de leur sinistralité. C’est pourquoi il est impossible de comparer les prévisions de 2023 avec le montant des crédits annulés en 2022, au regard des aléas bien plus graves qui s’annoncent pour 2023.

Je ne voudrais pas voir dans cet amendement un moyen simple pour la majorité sénatoriale de faire des économies à l’occasion de l’examen de ce projet de loi de finances.

À la fin de l’examen de la première partie, on a beaucoup parlé du solde. Je rappelle, mesdames, messieurs les sénateurs, que, dans le cadre du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027, vous vous êtes engagés sur un solde de 4,6 milliards d’euros, ce qui nécessite de réaliser 10 milliards d’euros d’économies.

Hier, dans le cadre de l’examen de la mission « Crédits non répartis », vous avez annulé 1 milliard sur la dotation de 1,8 milliard d’euros du programme « Dépenses accidentelles et imprévisibles ». De ce point de vue, c’est de l’argent facilement trouvé.

Avec cet amendement, vous économisez 700 millions d’euros.

Il reste 8 milliards d’euros à trouver. Je pense qu’il faut plutôt les chercher dans des réformes structurelles.

Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Je suis désolée, monsieur le rapporteur spécial, mais je ne peux pas voter cet amendement, qui tend à supprimer des fonds alors que le risque existe toujours.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-442.

J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Je rappelle que l’avis du Gouvernement est défavorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 75 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 225
Pour l’adoption 200
Contre 25

Le Sénat a adopté.

Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Engagements financiers de l’État », figurant à l’état B.

Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits, modifiés.

J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 76 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 280
Pour l’adoption 229
Contre 51

Le Sénat a adopté.

compte d’affectation spéciale : participations financières de l’état

État B
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Article additionnel après l'article 49 - Amendements n° II-105 et n° II-195 rectifié
État B
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Article additionnel après l'article 49 - Amendements n° II-105 et n° II-195 rectifié

Mme la présidente. Nous allons procéder à l’examen des crédits du compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État », figurant à l’état D.

ÉTAT D

(En euros)

Mission / Programme

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

Participations financières de lÉtat

17 117 486 312

17 117 486 312

Opérations en capital intéressant les participations financières de l’État

10 531 000 000

10 531 000 000

Désendettement de l’État et d’établissements publics de l’État

6 586 486 312

6 586 486 312

Mme la présidente. L’amendement n° II-441, présenté par M. Husson, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Opérations en capital intéressant les participations financières de l’État

 

 

 

 

Désendettement de l’État et d’établissements publics de l’État

 

6 586 486 312

 

6 586 486 312

TOTAL

 

6 586 486 312

 

6 586 486 312

SOLDE

- 6 586 486 312

- 6 586 486 312

La parole est à M. Jérôme Bascher, rapporteur spécial.

M. Jérôme Bascher, rapporteur spécial. Cet amendement, déposé par Jean-François Husson pour la commission des finances, a pour objet de tirer les conséquences, pour ce compte d’affectation spéciale, de la décision que nous venons de prendre en supprimant la dette covid cantonnée. C’est donc un amendement de cohérence.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gabriel Attal, ministre délégué. Défavorable, par cohérence également.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-441.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits du compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État », figurant à l’état D.

Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits, modifiés.

(Les crédits sont adoptés.)

Mme la présidente. J’appelle en discussion les amendements portant article additionnel, qui sont rattachés pour leur examen aux crédits du compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État ».

État D
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
État D

Après l’article 49

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° II-105 est présenté par MM. Breuiller, Parigi, Gontard, Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Labbé, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel.

L’amendement n° II-195 rectifié est présenté par Mme Blatrix Contat, M. Montaugé, Mme Artigalas, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

I. – Après l’article 49

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport d’information sur l’évaluation de la mise en œuvre de l’article 66 de la loi n° 2020-935 du 30 juillet 2020 de finances rectificative pour 2020 sur l’éco-conditionnalité des prises de participation de l’État via l’agence des participations de l’État dans le cadre du plan de relance. Ce rapport d’information fait état des perspectives de pérennisation de la mesure au-delà du plan de relance, d’élargissement à d’autres types d’aides publiques, en particulier aux prises de participation de BPI France, et de renforcement des engagements des entreprises.

II. – En conséquence, faire précéder cet article d’une division additionnelle ainsi rédigée :

Participations financières de l’État

La parole est à M. Daniel Breuiller, pour présenter l’amendement n° II-105.

M. Daniel Breuiller. Cet amendement vise à demander au Gouvernement un rapport d’évaluation de la disposition, adoptée dans la loi de finances rectificative pour 2020, qui conditionne la prise de participation de l’État dans une grande entreprise, via l’Agence des participations de l’État, à la souscription par cette dernière d’engagements en matière de réduction de ses émissions de gaz à effet de serre.

En l’état, cette disposition ne concerne que les prises de participation débloquées dans le cadre du plan de relance, soit deux entreprises seulement.

Le rapport que nous demandons permettrait d’étudier l’opportunité et les conditions d’un élargissement et d’une pérennisation de la mesure au-delà du plan de relance et à d’autres types d’aides publiques, notamment aux prises de participation effectuées par Bpifrance.

De plus, ce rapport devra évaluer la pertinence des engagements demandés aux entreprises et leur éventuel renforcement. En particulier, l’on pourrait envisager un élargissement du périmètre des missions concernées, afin de couvrir les activités des entreprises à l’international, ainsi que la mise en place de sanctions en cas de non-respect des objectifs fixés.

Mme la présidente. La parole est à Mme Florence Blatrix Contat, pour présenter l’amendement n° II-195 rectifié.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Claude Raynal, président de la commission des finances. Elle demande le retrait de ces amendements. Ceux-ci font référence aux crédits du plan de relance qui auraient abondé le compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État », mais aucun crédit de la mission « Plan de relance » n’a abondé ce compte, qui n’a bénéficié que des crédits votés dans l’urgence de la première vague de l’épidémie de covid-19, c’est-à-dire bien avant que le Gouvernement ne décide d’une politique de relance.

Puis, il ne semble pas utile de demander un rapport au Gouvernement sur des éléments qui sont, de toute façon, rendus publics par les entreprises elles-mêmes. En effet, l’article 66 de la loi de finances rectificative prévoit la publication d’un rapport annuel des entreprises sur leurs engagements climatiques.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gabriel Attal, ministre délégué. Même avis : un tel rapport, sur la mise en œuvre de l’écoconditionnalité, est déjà disponible sur le site internet de l’APE. De plus, on trouve dans les déclarations extra-financières des entreprises des rapports annuels sur le respect de leurs obligations. Cet amendement est donc satisfait.

M. Daniel Breuiller. Je retire l’amendement.

Mme Florence Blatrix Contat. Je le retire aussi.

Mme la présidente. Les amendements nos II-105 et II-195 rectifié sont retirés.

compte de concours financiers : accords monétaires internationaux

Article additionnel après l'article 49 - Amendements n° II-105 et n° II-195 rectifié
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Compte de concours financiers : prêts et avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics
Article additionnel après l'article 49 - Amendements n° II-105 et n° II-195 rectifié
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Compte de concours financiers : prêts et avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics

Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits du compte de concours financiers « Accords monétaires internationaux », figurant à l’état D.

ÉTAT D

(En euros)

Mission / Programme

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

Accords monétaires internationaux

0

0

Relations avec l’Union monétaire ouest-africaine

0

0

Relations avec l’Union monétaire d’Afrique centrale

0

0

Relations avec l’Union des Comores

0

0

Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits.

(Les crédits sont adoptés.)

compte de concours financiers : prêts et avances à divers services de l’état ou organismes gérant des services publics

Compte de concours financiers : accords monétaires internationaux
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Remboursements et dégrèvements
Compte de concours financiers : accords monétaires internationaux
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Remboursements et dégrèvements

Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits du compte de concours financiers « Prêts et avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics », figurant à l’état D.

ÉTAT D

(En euros)

Mission / Programme

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

Prêts et avances à divers services de lÉtat ou organismes gérant des services publics

10 522 176 994

10 622 176 994

Avances à l’Agence de services et de paiement, au titre du préfinancement des aides communautaires de la politique agricole commune

10 000 000 000

10 000 000 000

Avances à des organismes distincts de l’État et gérant des services publics

228 800 000

228 800 000

Prêts et avances à des services de l’État

256 619 989

256 619 989

Avances à l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) au titre de l’indemnisation des victimes du Benfluorex

15 000 000

15 000 000

Prêts aux exploitants d’aéroports touchés par la crise de covid-19 au titre des dépenses de sûreté-sécurité

0

0

Prêts destinés à soutenir Île-de-France Mobilités à la suite des conséquences de l’épidémie de la covid-19

0

0

Prêts destinés à soutenir les autorités organisatrices de la mobilité à la suite des conséquences de l’épidémie de la covid-19

0

0

Prêts destinés au financement des infrastructures de transports collectifs du quotidien de la métropole d’Aix-Marseille-Provence

0

100 000 000

Prêts à FranceAgriMer au titre des préfinancements de fonds européens

100 000 000

100 000 000

Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits.

(Les crédits sont adoptés.)

remboursements et dégrèvements

État D
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
État B (interruption de la discussion)
État D
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
État B (interruption de la discussion)

Mme la présidente. Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements », figurant à l’état B.

ÉTAT B

(En euros)

Mission / Programme

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

Remboursements et dégrèvements

128 346 095 440

128 346 095 440

Remboursements et dégrèvements d’impôts d’État (crédits évaluatifs)

123 763 110 332

123 763 110 332

Remboursements et dégrèvements d’impôts locaux (crédits évaluatifs)

4 582 985 108

4 582 985 108

Mme la présidente. L’amendement n° II-747 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Remboursements et dégrèvements d’impôts d’État (crédits évaluatifs)

3 299 904 341

 

3 299 904 341

 

Remboursements et dégrèvements d’impôts locaux (crédits évaluatifs)

2 312 828 557 

 2 312 828 557

TOTAL

5 612 732 898

5 612 732 898

SOLDE

+ 5 612 732 898

+ 5 612 732 898

La parole est à M. le ministre délégué.

M. Gabriel Attal, ministre délégué. Cet amendement a notamment pour objet d’ouvrir 2,3 milliards d’euros de crédits pour le programme 201. Ce mouvement tire les conséquences de la suppression de l’article 5, que je regrette, car cet article supprimait la CVAE. Il tend donc à ouvrir 2,3 milliards d’euros de crédits destinés à la prise en charge par l’État du dégrèvement de CVAE en faveur de certaines entreprises.

En préparant cet amendement, nos services, mais aussi les équipes de la commission des finances du Sénat, se sont rendu compte d’une erreur puisque nous actons dans l’article d’équilibre de la première partie une annulation de crédits de 2,3 milliards d’euros au lieu de procéder à une ouverture de crédits de même montant. Je vous propose de corriger cette erreur en adoptant un amendement à la fin de la seconde partie.

Nous avons adopté hier l’article d’équilibre, non sans de nombreuses délibérations décidées par la majorité sénatoriale pour revenir sur un certain nombre de votes. Au milieu des mouvements de crédits ainsi occasionnés, une erreur s’est glissée dans l’article d’équilibre.

M. Claude Raynal, président de la commission des finances. Y a-t-il un impact sur le solde de l’article liminaire ?

M. Gabriel Attal, ministre délégué. Non, l’erreur n’a d’incidence que sur le solde budgétaire, pas sur la comptabilité nationale.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Claude Raynal, président de la commission des finances. La commission ne s’est pas réunie pour examiner cet amendement. À titre personnel, sagesse.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-747.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements », figurant à l’état B.

Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits, modifiés.

(Les crédits sont adoptés.)

Mme la présidente. Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Engagements financiers de l’État », des comptes d’affectation spéciale « Participations financières de l’État », « Accords monétaires internationaux », du compte de concours financiers « Prêts et avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics », ainsi que de la mission « Remboursements et dégrèvements ».

État B (début)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Discussion générale

7

Ordre du jour

Mme la présidente. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au lundi 28 novembre 2022 :

À dix heures, quatorze heures trente et le soir :

Suite du projet de loi de finances pour 2023, considéré comme adopté par l’Assemblée nationale en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution (texte n° 114, 2022-2023) ;

Mission « Travail et emploi » et articles 47 à 49 :

Mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » ; articles 41 et 41 bis ;

Mission « Culture » ; articles 41 quater et 41 quinquies ;

Mission « Médias, livre et industries culturelles » ;

Compte spécial « Avances à l’audiovisuel public » ;

Mission « Recherche et enseignement supérieur ».

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée le samedi 26 novembre 2022, à minuit dix.)

Pour le Directeur des comptes rendus du Sénat,

le Chef de publication

FRANÇOIS WICKER