M. le président. La parole est à M. François Bonhomme, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. François Bonhomme. Monsieur le ministre, depuis plusieurs semaines, le Comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation vous a mis en garde contre des appels répétés de la mouvance islamiste visant à contourner la loi de 2004 qui, vous le savez, interdit les signes religieux à l’école.
Cette mouvance encourage en particulier les jeunes filles, via les réseaux sociaux, à porter des vêtements à connotation religieuse. Déjà, 720 signalements d’atteintes aux principes de laïcité dans les écoles ont été effectués par vos propres services.
Depuis la rentrée scolaire, une vingtaine de jeunes filles portaient l’abaya au lycée Bourdelle de Montauban. La semaine dernière, nous avons appris qu’une enseignante de ce lycée a été placée sous protection policière après avoir fait une remontrance à l’une de ces élèves sur sa tenue. Cette élève a ensuite publié une vidéo de la scène, captée à l’insu de sa professeure.
Monsieur le ministre, face à ces dérives répétées, à Montauban comme ailleurs, allez-vous clairement indiquer que le port de l’abaya est une atteinte délibérée au principe de laïcité et n’a pas sa place à l’école ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.
M. Pap Ndiaye, ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse. Monsieur le sénateur François Bonhomme, la situation du lycée de Montauban est suivie de près par le rectorat, en lien avec la préfecture de Tarn-et-Garonne. (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains.)
Que s’est-il passé ? Avant les vacances, une vingtaine de lycéennes portaient des abayas. La direction du lycée a engagé une procédure, qui commence par des échanges avec les élèves concernées et avec les familles, ce qui a amené seize de ces lycéennes à renoncer à porter ce vêtement à intention religieuse. À la rentrée, il en restait quatre, dont trois ont renoncé depuis quelques jours. La dernière, particulièrement radicale, est celle qui a été impliquée dans l’incident que vous évoquez.
Le proviseur ainsi que la professeure en question ont porté plainte. Une protection fonctionnelle a été accordée et la direction a travaillé en bonne intelligence avec la préfète du Tarn-et-Garonne. Nous surveillons de près la situation, bien entendu. Nous gardons une grande vigilance sur la question.
Dans la loi de 2004, le législateur avait précisément prévu que différentes itérations de vêtements à intention religieuse pourraient survenir. Cette loi a une dimension générale et s’applique à de multiples situations. Notre boussole est de la faire observer. La laïcité exige du discernement, du sang-froid, de la fermeté. C’est ce que nous apportons : pas besoin d’effets de manche pour cela ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – M. Jean-Pierre Sueur applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. François Bonhomme, pour la réplique.
M. François Bonhomme. Monsieur le ministre, j’avais l’espoir que vous exprimiez une position un peu plus claire et ferme en réponse à ma question. Malheureusement, vous avez fait une réponse tout à fait ordinaire, et même administrative, ce que je n’attendais pas.
Or ce qui se passe à Montauban se passe ailleurs, comme vous le savez parfaitement. Je comprends très bien qu’on entame un dialogue pour essayer de réduire, par filtres successifs, le nombre de personnes concernées. Mais, au bout d’un moment, il faut prendre une position claire, ce que vous n’avez pas fait, monsieur le ministre. Cette situation, via les réseaux sociaux, va se reproduire régulièrement. Vous n’avez jamais posé un interdit.
La situation est grave, et je rappelle qu’il ne s’agit pas d’un fait divers. Vous avez dit dans une interview qu’il ne fallait pas généraliser. Mais la masse critique est atteinte, et il est temps de passer à une position ferme et définitive sur ce problème qui va nécessairement se poser de nouveau.
Monsieur le ministre, nous attendons de vous une réponse ferme et durable, précisément pour que l’école soit un lieu d’émancipation à l’abri de toute pression. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
port de l’abaya dans les collèges et lycées
M. le président. La parole est à M. Pierre-Antoine Levi, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Pierre-Antoine Levi. Monsieur le ministre de l’éducation nationale, il y a un an tout juste, j’interrogeais votre prédécesseur sur les leçons à tirer du tragique assassinat de Samuel Paty, dont nous célébrions il y a un mois le triste anniversaire. Ma question rejoint celle de mon collègue François Bonhomme, qui évoquait le département de Tarn-et-Garonne, mais le sujet est suffisamment important pour qu’on s’y attarde. Vous vous en doutez bien, l’affaire du lycée Antoine Bourdelle de Montauban a très profondément choqué le corps enseignant.
Monsieur le ministre, votre circulaire du 9 novembre dernier est supposée éclairer l’application de la loi de 2004 sur la laïcité à l’école. Malheureusement, on constate tous les jours dans les établissements que cette circulaire laisse souvent enseignants et chefs d’établissement bien seuls face à des phénomènes de revendication religieuse et de radicalisation, en particulier face à de nouvelles manières d’affirmer son identité culturelle et religieuse, dont l’abaya est un parfait exemple. De quoi s’agit-il ? D’une longue robe, qui recouvre tout le corps sauf la tête et les mains. Bien que ce vêtement ne soit pas originellement de nature religieuse, ne soyons pas naïfs, son usage l’est clairement aujourd’hui.
La loi de 2004 dispose que, à l’école, « le port de signes ou tenues par lesquels les élèves manifestent ostensiblement une appartenance religieuse est interdit ». Quelle est la doctrine de l’éducation nationale sur l’abaya au regard de la loi ? Vous n’avez pas répondu, monsieur le ministre. Ce vêtement est-il considéré comme une manifestation ostensible d’appartenance religieuse ? Malgré les précisions de la secrétaire d’État chargée de la citoyenneté sur ce sujet, rien n’est clair.
L’incident de Montauban soulève une fois encore le problème de la formation et de la protection du corps enseignant, surtout au regard du danger représenté par les smartphones et les réseaux sociaux, véritables condensateurs de haine et de violence.
Monsieur le ministre, la formation au métier d’enseignant comporte-t-elle des mises en situation concrètes, notamment pour les contractuels ? Leur apprend-on à réagir face à de telles provocations et agressions ? Sur la protection, a-t-on réellement avancé depuis l’assassinat de Samuel Paty ? (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.
M. Pap Ndiaye, ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse. Monsieur le sénateur Levi, les signalements effectués traduisent trois phénomènes.
Le premier est celui des réseaux sociaux, où se multiplient des défis depuis le mois de septembre. Nous nous plaignons auprès des responsables de ces réseaux de la lenteur et de la faiblesse de la modération. Il faut avouer que, sur ce terrain-là, nos armes juridiques sont limitées. Je mets en garde les élèves contre ces influenceurs de mauvais aloi.
Le deuxième phénomène est que, comme l’année dernière, l’hommage à Samuel Paty s’accompagne toujours, malheureusement, de contestations.
Le troisième phénomène est l’accroissement de notre vigilance : nous faisons remonter des rectorats tous les signalements. J’ai décidé une production de chiffres mensuels, ce qui permet de faire de ces données un meilleur outil de pilotage.
Pourquoi ne faut-il pas préciser le type de vêtement visé par la loi de 2004 ? Parce que nous nous aventurerions sur un terrain extrêmement complexe. D’un point de vue juridique, l’abaya n’est pas simple à définir (Mme Valérie Boyer s’exclame.), et nous serions contournés la semaine suivante par une longueur de robe, par une forme de col, par tel ou tel accessoire qui prolongerait le problème de semaine en semaine et nous contraindrait à multiplier les circulaires, ce qui nous emmènerait directement au tribunal administratif, où nous perdrions. (Vives protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
C’est la loi de 2004 qui doit être appliquée, avec fermeté et avec sang-froid. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Pierre-Antoine Levi, pour la réplique.
M. Pierre-Antoine Levi. Monsieur le ministre, ce que veulent les enseignants, c’est une réponse claire. Votre circulaire du 9 novembre n’est pas claire. Finalement, quand je vous écoute, je me dis que la solution serait peut-être d’imposer un uniforme… (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)
système de combat aérien du futur
M. le président. La parole est à M. Pascal Allizard, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Pascal Allizard. Ma question s’adresse à M. le ministre des armées.
Nous avons bâti une partie de la dernière loi de programmation militaire sur le paradigme de la coopération européenne, et plus particulièrement franco-allemande. C’était effectivement une opportunité qu’il fallait saisir.
Néanmoins, ce volontarisme dont la France a fait preuve se heurte aux dures réalités de la politique, de l’industrie et des intérêts. Depuis de longs mois, les signaux inquiétants s’accumulent sur divers projets : l’avion de combat, le char, l’avion de patrouille maritime… Les forces armées s’interrogent, comme d’ailleurs les industriels et comme les parlementaires, sur le calendrier, les conditions et, désormais, sur l’aboutissement même de ces différents projets.
En ce qui concerne l’avion de combat, nous arrivons à une phase où chacun attend des garanties de l’État en matière de maîtrise d’ouvrage, de maîtrise d’œuvre par Dassault Aviation, de prise en compte des besoins spécifiques de nos armées, de protection de la propriété intellectuelle des technologies françaises ou de cadres d’exportation.
Ma question est simple, madame la ministre : quels engagements pensez-vous prendre sur ces différents sujets et quel est le plan B en cas d’échec de la coopération ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée des anciens combattants et de la mémoire.
Mme Patricia Mirallès, secrétaire d’État auprès du ministre des armées, chargée des anciens combattants et de la mémoire. Monsieur le sénateur Allizard, je vous prie tout d’abord d’excuser l’absence du ministre des armées, qui est retenu par ailleurs.
Je vous remercie d’aborder le sujet du système de combat aérien du futur (Scaf), qui est important pour nos armées et pour la France, et qui fait l’objet, d’ailleurs, de débats réguliers au Parlement. Nous devons prioritairement nous concentrer sur les faits.
Premier fait : la France aura besoin d’un avion de combat du futur, parce que notre armée est une armée d’emploi, parce que nous entendons rester dans la course technologique et parce que ce système d’avion, mais aussi – je le rappelle – de combat, qui appartiendra aux forces aériennes et stratégiques, sera déterminant pour notre dissuasion.
La France est engagée dans le Scaf, car elle y trouve son intérêt, avec ses partenaires allemands et – ne l’oublions pas – espagnols.
Deuxième fait : dans la logique du meilleur athlète réaffirmée par nos partenaires, Dassault Aviation est clairement le leader de l’avion de combat au sein du programme Scaf. Nous restons attentifs sur ce point dans la durée.
Quelle est la situation au moment où nous nous parlons ? Nous devons donner sa chance à la phase 1B du projet. Elle consiste dans le démarrage de la phase de démonstration.
Les divergences entre les industriels se sont désormais largement estompées et, comme l’ont indiqué publiquement Éric Trappier et Guillaume Faury, l’accord entre les industriels est très proche.
Du côté des États, la France, qui pilote le projet, souhaite maintenant notifier les contrats aux industriels. Sur ce point, nous sommes en attente d’une confirmation de la part de nos partenaires allemands et espagnols. L’objectif est que les contrats soient signés dès le mois de décembre prochain.
Au-delà de la phase 1B, nous continuerons à préserver les intérêts stratégiques de la France, en ce qui concerne tant l’élaboration que l’exportation du Scaf.
C’est important pour l’exportation, car en signant des accords de défense, c’est la parole de la France que nous engageons.
Vous le savez, le ministre des armées est particulièrement attentif sur ce point. Je reprendrai, en conclusion, ce qu’il a affirmé à de multiples reprises : il ne s’agit pas d’une affaire idéologique liée au couple franco-allemand. Il y aura, quoi qu’il en soit, un avion de chasse pour succéder au Rafale dans l’armée française. (Applaudissements sur les travées du RDPI. – M. Olivier Cadic applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Pascal Allizard, pour la réplique.
M. Pascal Allizard. La base industrielle et technologique de défense (BITD) française représente – vous le savez, madame la ministre – des compétences uniques non délocalisables et des entreprises allant des start-up aux grands groupes. Nous devons collectivement préserver, dans nos territoires, ces emplois et ces savoir-faire qui, une fois perdus, seraient très difficiles à récupérer.
Nos armées ont besoin du Scaf – en tout cas d’un avion de chasse – pour garantir leur supériorité dans les futures opérations et dans un monde où les avions de combat et les drones évoluent très vite, de même que les défenses antiaériennes. Pour la continuité de la dissuasion et de l’aéronavale, nous avons donc besoin du futur avion de combat.
Enfin, nous devons pouvoir continuer à exporter – c’est important et c’est un des sujets avec l’Allemagne – auprès de pays amis ou alliés, sans contraintes extérieures. Je me permets d’insister : nous avons, en France, des procédures d’exportation qui, me semble-t-il, sont robustes, suffisantes et efficaces. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – MM. Olivier Cadic et André Guiol applaudissent également.)
recettes du secteur des énergies renouvelables
M. le président. La parole est à M. Didier Marie, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Didier Marie. Monsieur le ministre délégué chargé des comptes publics, dans un communiqué du 8 novembre dernier, la Commission de régulation de l’énergie (CRE) a annoncé que les producteurs d’énergie renouvelable allaient reverser 30,9 milliards d’euros au budget de l’État dans le cadre de la contribution au service public de l’électricité (CSPE).
Cette contribution est exceptionnelle. C’est la première fois que l’État ne compense pas les charges de service public de l’énergie, mais au contraire, encaisse des recettes, qui sont exceptionnelles et inattendues, puisque les prévisions initiales envisageaient une dépense de 8 milliards d’euros pour l’État, soit un différentiel de près de 40 milliards d’euros.
Cette inversion de tendance et les 30,9 milliards d’euros de recettes qui en découlent s’expliquent par l’augmentation des prix de gros de l’électricité par rapport aux tarifs garantis par l’État, dans le contexte énergétique et géopolitique que nous connaissons.
À elle seule, la filière de l’éolien terrestre, parfois contraignante pour les communes et leurs habitants, apporte une contribution de 21,7 milliards d’euros.
Comme l’indique la CRE dans sa communication, ces recettes supplémentaires devront financer le bouclier tarifaire.
Alors que les élus locaux sont en première ligne face à l’explosion des prix de l’énergie, des matières premières et de l’inflation, comptez-vous utiliser concrètement cette manne financière pour soutenir les collectivités territoriales ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Rachid Temal. Bravo !
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des comptes publics.
M. Gabriel Attal, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics. Monsieur le sénateur Didier Marie, vous l’avez rappelé : nous avons en France un système de contribution au service public de l’électricité, qui revenait pour l’État, par la signature de contrats à prix garanti avec les énergéticiens du renouvelable, à subventionner ces derniers en leur versant la différence entre le prix de marché et le prix garanti. Les énergéticiens pouvaient ainsi rentabiliser leurs investissements.
Sauf que, en raison de la crise et de l’envolée des prix de l’électricité, le prix du marché dépasse désormais le prix qui avait été conclu. Dans ce cas de figure, les contrats prévoient effectivement que les énergéticiens reversent le surplus à l’État.
À cet égard, je remercie d’ailleurs le Parlement d’avoir voté, cet été, une mesure déplafonnant les contrats – certains d’entre eux prévoyaient en effet un plafonnement du montant reversé à l’État.
Monsieur le sénateur, ces fonds servent aujourd’hui à financer une partie du bouclier tarifaire, lequel permet de contenir la facture d’électricité des Français.
La réalité est que, en 2023, le bouclier tarifaire nous coûtera 47 milliards d’euros et que, quand on défalque les recettes issues de la CSPE, il reste 16 milliards d’euros net de dépenses liées au bouclier tarifaire.
Vous voyez bien que ce que nous récupérons des énergéticiens au titre de ces contrats ne finance qu’une partie du bouclier tarifaire. Cela étant, nous continuerons, évidemment, à accompagner les collectivités locales dans le cadre de la crise de l’inflation et de l’envolée des prix de l’énergie.
M. Rachid Temal. Ce n’est pas ce qu’elles disent…
M. Gabriel Attal, ministre délégué. Nous entamons, cet après-midi, les débats budgétaires au travers de l’examen du projet de loi de finances rectificative (PLFR) pour 2022 et, demain, du projet de loi de finances (PLF) pour 2023. Je sais combien ils seront nourris. Un certain nombre de mesures qui ont été votées à l’Assemblée nationale seront certainement enrichies, renforcées, précisées et clarifiées au Sénat.
Je pense notamment au filet de sécurité que nous prévoyons pour 2023 – 1,5 milliard d’euros budgétés – et dont j’attends vraiment que nos travaux communs précisent le dispositif.
Enfin, je ne rappelle pas les nombreux dispositifs que mettent régulièrement en avant mes collègues Christophe Béchu et Caroline Cayeux et que nous continuerons à déployer au bénéfice des collectivités locales. (Applaudissements sur les travées du RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Didier Marie, pour la réplique.
M. Didier Marie. Ces recettes nouvelles permettraient pourtant de changer la donne, alors que, depuis 2017, vous avez privé la Nation de pas moins de 392 milliards d’euros de recettes fiscales. Cette année, avec votre volonté de supprimer la contribution sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), vous persistez et poursuivez votre stratégie de désarmement fiscal.
Monsieur le ministre, il est possible de réinvestir ces recettes supplémentaires de manière juste et efficace, en y intéressant mieux les collectivités territoriales.
Entendez notre demande d’indexation de la dotation globale de fonctionnement (DGF). Améliorez le bouclier énergétique pour les collectivités. Accompagnez plus et mieux les collectivités dans leur projet de transition écologique. Cessez de vouloir contrôler les dépenses des collectivités !
Monsieur le ministre, il est inconcevable que, alors que vous enregistrez 30 milliards d’euros de recettes supplémentaires, de nombreuses communes soient contraintes de fermer des structures sportives et culturelles, de limiter l’éclairage public, d’augmenter les tarifs de restauration scolaire, de freiner leurs investissements.
Monsieur le ministre, le compte n’y est pas ! Il est encore temps de corriger la copie. C’est ce que nous vous invitons à faire lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2023. (Vifs applaudissements sur les travées du groupe SER. – MM. André Reichardt, Gérard Longuet et Daniel Breuiller applaudissent également.)
fiscalité à paris
M. le président. La parole est à Mme Céline Boulay-Espéronnier, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Céline Boulay-Espéronnier. Ma question s’adresse à M. le ministre chargé des comptes publics.
Quand Anne Hidalgo, maire de Paris, s’est présentée en mars 2020 aux élections municipales, elle avait proclamé deux engagements.
Le premier était qu’elle ne serait pas candidate à l’élection présidentielle. La France entière a alors constaté qu’elle n’avait pas tenu parole. (Murmures sur les travées du groupe SER.)
M. Rachid Temal. Cela n’a rien à voir !
Mme Céline Boulay-Espéronnier. Le second engagement a été fait la main sur le cœur : jamais elle n’augmenterait les impôts des Parisiens. Or non seulement elle n’a cessé de le faire depuis 2014, mais cette semaine, coup de grâce : les Parisiens ont appris d’une manière pour le moins cavalière qu’elle allait augmenter la taxe foncière de plus de 50 %, pour tenter de sortir Paris du chaos économique ! (Protestations sur les travées du groupe SER.)
M. David Assouline. C’est encore moins que dans les villes que vous gérez !
Mme Céline Boulay-Espéronnier. La majorité de gauche avait pourtant hérité, ne vous en déplaise, d’une situation saine lors de l’alternance. (Protestations sur les mêmes travées.)
Les Parisiens sont excédés. (M. David Assouline s’exclame.) Les services publics ne sont pas à la hauteur d’une grande métropole européenne. Paris se déclasse !
Cela étant dit, il n’est pas envisageable, monsieur le ministre, que l’État en profite pour porter atteinte aux libertés communales. Il n’est donc pas sérieux de parler de mise sous tutelle.
Cependant, il est temps que le Président de la République s’intéresse au cœur de la région capitale. (M. David Assouline s’exclame.)
Je souhaite donc que vous m’indiquiez, monsieur le ministre, par quelle mesure particulière le Gouvernement compte soulager les Parisiens, qui devront, de surcroît, faire des efforts dans la perspective des jeux Olympiques de 2024. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. David Assouline. Dans le XVIe, ça va aller… Il faut pouvoir y vivre…
M. Philippe Pemezec. Votre mépris est insupportable !
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des comptes publics.
M. Gabriel Attal, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics. Madame la sénatrice Boulay-Espéronnier, quand je suis arrivé au ministère du budget il y a quelques mois, j’ai découvert que la Ville de Paris bénéficiait d’un arrangement avec la comptabilité publique, négocié à l’époque avec François Hollande, appelé système des loyers capitalisés. (Exclamations.)
Cela signifie que la Ville de Paris avait obtenu, en 2015, le droit de s’endetter en achetant des logements, en les confiant à des bailleurs sociaux pour qu’ils les transforment en logements sociaux et qu’ils les entretiennent, et en demandant aux bailleurs de lui verser en une fois plusieurs décennies de loyer à venir pour équilibrer son budget de fonctionnement. (Mme Marie-Pierre de La Gontrie s’exclame.)
Je vous raconte cela, madame la sénatrice, d’abord parce que j’ai décidé de mettre fin à ce système, qui était une véritable bombe à retardement pour les Parisiennes et pour les Parisiens (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, INDEP, UC et Les Républicains.), ensuite parce que cela dit tout de la gestion budgétaire de la Ville de Paris par Mme Hidalgo et son équipe.
La réalité, c’est que Mme Hidalgo considère qu’elle est condamnée à taxer plus, parce qu’elle refuse de dépenser moins, de maîtriser ses dépenses et de mener des réformes. (Applaudissements sur les mêmes travées. – Vives protestations sur les travées du groupe SER.)
M. David Assouline. Marine Le Pen est aux portes et vous attaquez Anne Hidalgo !
M. Gabriel Attal, ministre délégué. La réalité, c’est que l’État est aux côtés de la ville de Paris, que les recettes fiscales ont été, cette année encore, exceptionnelles – un versement exceptionnel de 50 millions d’euros de recettes de TVA a été enregistré il y a quelques semaines –, que la Ville de Paris est d’ailleurs éligible au filet de sécurité dont je parlais tout à l’heure et qu’elle peut bénéficier à ce titre d’un acompte de 15 millions d’euros.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. C’est faux !
M. Gabriel Attal, ministre délégué. Malheureusement, l’État ne peut pas faire les réformes nécessaires à la Ville de Paris à la place de la Ville de Paris.
La réalité, c’est que des réformes sont possibles et nécessaires. D’abord, appliquer strictement les 35 heures aux fonctionnaires de la Ville de Paris. (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP, UC et Les Républicains.) Alors que la Ville a été condamnée à appliquer les 35 heures, elle trouve tous les moyens de contourner l’obligation légale ! (M. David Assouline s’exclame.)
Ensuite, il faudrait mettre un terme à l’explosion des dépenses discrétionnaires de subventionnement à des associations parfois faméliques. (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP, UC et Les Républicains.)
M. David Assouline. Marine Le Pen est aux portes du pouvoir !
M. Gabriel Attal, ministre délégué. Cela aussi, c’est possible ; cela se décide ; cela nécessite du courage politique. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du RDPI et des groupes INDEP, UC et Les Républicains.)
Tout cela pour vous dire, madame la sénatrice, que le Gouvernement et moi-même serons toujours aux côtés des Parisiennes et des Parisiens…
M. le président. Il va falloir conclure !
M. Gabriel Attal, ministre délégué. … ne serait-ce que pour conduire la Ville de Paris et lui indiquer les réformes nécessaires qui permettraient une gestion saine des finances publiques. (Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées du RDPI et des groupes INDEP, UC et Les Républicains.)
M. David Assouline. C’est honteux !
M. le président. La parole est à Mme Céline Boulay-Espéronnier, pour la réplique.
Mme Céline Boulay-Espéronnier. Monsieur le ministre délégué, je prends acte, bien évidemment, de vos propos.
Je suis ravie que nous partagions la même analyse et que nous puissions travailler ensemble à faire en sorte que Paris se porte mieux ! (Exclamations ironiques sur les travées du groupe SER.)
Bien entendu, l’État n’est pas comptable de cette situation. Je lui demande, en revanche, de s’intéresser réellement aux Parisiens.
La question n’était pas facile puisque, aux élections municipales et régionales, les listes de la majorité présidentielle avaient été boudées. Mais, depuis, trois députés de Paris sont entrés dans le gouvernement de Mme Borne, qui a d’ailleurs travaillé à la mairie de Paris…