Mme le président. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 14, présenté par Mme Doineau, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Y compris le tuteur qui n’y vote pas, le conseil de famille est composé de :
La parole est à Mme Élisabeth Doineau.
Mme Élisabeth Doineau. Cet amendement vise à proposer une rédaction différente de l’alinéa 4, qui, en l’état, laisse subsister un droit de vote du tuteur au sein du conseil de famille des pupilles de l’État.
Dans la tutelle de droit commun, le tuteur est membre du conseil de famille. A priori, il n’est donc pas choquant qu’il puisse en être de même dans la tutelle des pupilles de l’État, d’autant que, en l’absence du tuteur, le conseil ne peut pas siéger valablement.
Ayant présidé un conseil de famille pendant de longues années, je parle en connaissance de cause.
Plus significatif, dans la tutelle de droit commun, le tuteur ne vote pas. En effet, le législateur de 2007 a entendu préserver les rôles bien distincts des deux organes de la tutelle. En ce qui concerne la gouvernance de la vie de l’enfant, il a laissé le « pouvoir législatif » au conseil et un « pouvoir exécutif » au tuteur, celui-ci étant le représentant légal de l’enfant.
Il apparaît donc discutable que, demain, l’ensemble des pouvoirs puissent être concentrés entre les mains du tuteur, lui offrant en outre la possibilité d’être élu président du conseil de famille et d’avoir voix prépondérante en cas de partage des voix, ce qui n’aurait pu être le cas dans la tutelle de droit commun, où le conseil de famille est présidé par le juge des tutelles.
Pour respecter, dans l’intérêt des enfants pupilles, la philosophie même de la tutelle, le partage nécessaire des prérogatives de l’un et de l’autre, le présent amendement tend à s’aligner sur la tutelle de droit commun, ce qui correspond au dispositif du code civil.
Cet amendement a été travaillé en lien avec Enfance et familles d’adoption.
Mme le président. L’amendement n° 7, présenté par Mmes Harribey et Meunier, M. Durain, Mme de La Gontrie, MM. Bourgi, Kanner, Kerrouche, Leconte, Marie, Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Supprimer les mots :
Outre le tuteur,
La parole est à Mme Michelle Meunier.
Mme Michelle Meunier. Dans la tutelle de droit commun, le tuteur ne vote pas. En effet, depuis 2007, le législateur a entendu préserver les rôles distincts des deux organes de la tutelle. En ce qui concerne la gouvernance de la vie de l’enfant, il a laissé le législatif au conseil et l’exécutif au tuteur, celui-ci étant le représentant légal de l’enfant.
Il ne nous apparaît donc pas judicieux, si le présent texte devait être adopté en l’état, que l’ensemble des pouvoirs puissent être concentrés entre les mains du tuteur, lui offrant en outre la possibilité d’être élu président du conseil de famille et d’avoir voix prépondérante en cas de partage des voix, ce qui n’aurait pu être le cas dans la tutelle de droit commun, où le conseil de famille est présidé par le juge des tutelles.
Le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain propose donc de conserver le droit en vigueur : le tuteur est présent au sein du conseil de famille, conserve ses prérogatives en matière de représentation légale de l’enfant et son rôle d’observateur et de secrétaire.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Madame la présidente, la commission est d’accord avec les objectifs similaires de ces deux amendements, mais elle a préféré la rédaction de l’amendement présenté par Mme Meunier, qui vise à revenir au droit existant.
Elle émet donc un avis favorable sur l’amendement n° 7 et demande le retrait de l’amendement n° 14.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. À l’inverse, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces deux amendements.
Le tuteur, vous l’avez dit, est pleinement intégré au sein du conseil de famille afin de lui permettre de participer de façon effective aux décisions prises dans l’intérêt du pupille. Actuellement, le tuteur doit prendre des décisions « en accord avec le conseil de famille ». Or, en pratique, lorsque le conseil de famille n’est pas d’accord avec le tuteur, c’est bien lui qui vote. Le conseil de famille prend les décisions et le tuteur ne peut pas y prendre part.
Désormais, il pourra effectivement siéger, voter et exercer son droit de recours. Son rôle de tuteur, qui consiste à exercer l’autorité parentale et à représenter les intérêts de l’enfant, est ainsi renforcé.
Le tuteur n’est pas seul et ne dispose pas des pleins pouvoirs, comme vous l’avez évoqué. Il n’est qu’une voix parmi toutes celles du conseil de famille. Il n’y a donc pas concentration ou amalgame entre les différentes responsabilités exercées. À l’inverse, les dispositions que nous défendons lui permettent pleinement d’exercer l’autorité parentale et de représenter l’intérêt de l’enfant.
Tel est le sens de la rédaction que nous avions adoptée et que je vous propose de conserver.
Mme le président. Madame Doineau, l’amendement n° 14 est-il maintenu ?
Mme Élisabeth Doineau. Non, je le retire, madame le président.
Mme le président. L’amendement n° 14 est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° 7.
(L’amendement est adopté.)
Mme le président. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 12 rectifié bis, présenté par Mme Doineau, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 9
Supprimer cet alinéa.
II. - Alinéa 10
Remplacer les mots :
Une personnalité qualifiée titulaire et un suppléant
par les mots :
Deux personnes qualifiées titulaires et deux suppléants
La parole est à Mme Élisabeth Doineau.
Mme Élisabeth Doineau. Cet amendement vise à supprimer la présence au sein du conseil de famille d’une personnalité qualifiée compétente en matière d’éthique et de lutte contre les discriminations et à prévoir celle de deux personnes qualifiées titulaires et de deux suppléants ayant des compétences en matière médicale, psychologique ou sociale.
Il est à mon avis difficilement compréhensible que la défense des postulants à l’adoption se fasse à l’intérieur des conseils de famille, au détriment des enfants, privant ces derniers du regard et de l’expertise d’un psychiatre, d’un conseiller d’éducation, d’un juriste ou même d’un ancien responsable d’une maison d’enfants.
Ces deux personnes qualifiées vont participer à la définition du projet de vie de l’enfant pupille de l’État, en prenant en compte leurs besoins spécifiques.
Cet amendement a également été travaillé avec Enfance et familles d’adoption.
Mme le président. L’amendement n° 8, présenté par Mmes Harribey et Meunier, M. Durain, Mme de La Gontrie, MM. Bourgi, Kanner, Kerrouche, Leconte, Marie, Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Remplacer les mots :
Une personnalité qualifiée titulaire et un suppléant
par les mots :
Deux personnes qualifiées titulaires et deux suppléants
La parole est à Mme Michelle Meunier.
Mme Michelle Meunier. Je retire cet amendement, madame la présidente.
Mme le président. L’amendement n° 8 est retiré.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 12 rectifié bis ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. L’avis de la commission est favorable.
Il s’agit en effet de supprimer la présence au sein du conseil de famille d’une personne qualifiée en matière d’éthique et de lutte contre les discriminations, cette disposition ayant été introduite au cours de la discussion à l’Assemblée nationale.
Nous ne sommes pas pour les discriminations, mais nous estimons, comme l’a indiqué notre collègue Élisabeth Doineau, que la présence de cette personnalité qualifiée est dans l’intérêt des parents.
Pour lutter contre les discriminations, il faut apprendre les bonnes pratiques au sein du conseil de famille et y faire de la formation. Le conseil de famille doit être composé de personnes qui prennent des décisions dans l’intérêt de l’enfant et non pas dans celui des parents potentiels.
Le rétablissement de la composition du conseil de famille tel qu’il existe nous paraissant être une bonne mesure, nous émettons un avis favorable sur cet amendement.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Nous sommes tous évidemment guidés, je le répète, y compris le conseil de famille, par l’intérêt de l’enfant avant toute chose. Pour autant, les conseils de famille doivent respecter un certain nombre de principes auxquels nous sommes également tous attachés.
Or la pratique a montré, et je vous renvoie à cet égard à ce qui s’est passé en Seine-Maritime, il y a deux ou trois ans…
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Il ne s’était rien passé !
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Il ne s’était rien passé ? Ah bon ? L’IGAS a dit que, s’il n’y avait pas de problème systémique,…
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Voilà !
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. … il y avait tout de même eu un problème en Seine-Maritime. Elle a par ailleurs préconisé, tout comme le Comité consultatif national d’éthique et le Conseil national de la protection de l’enfance que j’avais également saisis par ailleurs, que soient rappelés un certain nombre de principes déontologiques.
Une charte rappelant les principes républicains, rien d’autre, a été rédigée et signée, sachez-le, par l’ensemble des préfets et des conseils de famille de notre territoire. Dans cet esprit, les députés et le Gouvernement, qui les accompagne, ont considéré qu’il était important de désigner au sein des conseils de famille une personne qualifiée en raison de ses compétences en matière d’éthique et de lutte contre les discriminations.
Le conseil de famille comprend une personne compétente en matière de protection de l’enfance et en matière médicale, psychologique ou sociale et une personne compétente en matière d’éthique et de lutte contre les discriminations. Un tel équilibre nous semble nécessaire. Nous pensons que l’intérêt supérieur de l’enfant reste préservé.
Par ailleurs, nous considérons qu’il ne faut pas ajouter au sein de ce conseil des personnalités supplémentaires, au risque de poser des problèmes à un certain nombre de petits départements qui, on le sait, rencontrent déjà des difficultés pour composer leur conseil de famille et atteindre les quorums nécessaires.
Telles sont les raisons pour lesquelles le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
Mme le président. Je mets aux voix l’article 14, modifié.
(L’article 14 est adopté.)
Article 15
(Non modifié)
I. – (Non modifié)
II. – La section 3 du chapitre IV du titre II du livre II du code de l’action sociale et des familles est ainsi modifiée :
1° et 2° (Supprimés)
3° La première phrase de l’article L. 224-11 est remplacée par deux phrases ainsi rédigées : « Les associations départementales des personnes accueillies en protection de l’enfance représentent et accompagnent ces personnes. Elles participent à l’effort d’insertion sociale des personnes accueillies en protection de l’enfance. » – (Adopté.)
TITRE III
AMÉLIORER LES AUTRES DISPOSITIONS RELATIVES AU STATUT DE L’ENFANT
˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙
Article 17
(Non modifié)
L’article 411 du code civil est ainsi rédigé :
« Art. 411. – La tutelle est déclarée vacante s’il est impossible de mettre en place une tutelle avec un conseil de famille ou d’admettre l’enfant à la qualité de pupille de l’État. Dans ce cas, le juge des tutelles la défère à la collectivité publique compétente en matière d’aide sociale à l’enfance. La tutelle ne comporte alors ni conseil de famille ni subrogé tuteur.
« La tutelle est levée dès que l’enfant peut être admis à la qualité de pupille de l’État. » – (Adopté.)
˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙
Article 19
(Non modifié)
La présente loi est applicable sur tout le territoire de la République, sauf en Nouvelle-Calédonie.
Pour l’application de l’article L. 224-3 du code de l’action sociale et des familles dans les collectivités d’outre-mer, la référence au tribunal judiciaire est remplacée, en tant que de besoin, par la référence au tribunal de première instance. – (Adopté.)
Mme le président. Les autres dispositions de la proposition de loi ne font pas l’objet de la nouvelle lecture.
Vote sur l’ensemble
Mme le président. Personne ne demande la parole ?…
Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l’ensemble de la proposition de loi visant à réformer l’adoption.
(La proposition de loi est adoptée.)
10
Ordre du jour
Mme le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, jeudi 27 janvier 2022 :
De dix heures trente à treize heures trente :
Proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, visant à combattre le harcèlement scolaire (texte de la commission n° 324, 2021-2022).
À quinze heures :
Proposition de loi visant à faire évoluer la gouvernance de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger et à créer les instituts régionaux de formation, présentée par Mme Samantha Cazebonne (procédure accélérée ; texte de la commission n° 316, 2021-2022) ;
Éventuellement, suite de la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, visant à combattre le harcèlement scolaire (texte de la commission n° 324, 2021-2022).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée le jeudi 27 janvier 2022, à zéro heure quarante.)
nomination de membres de commissions mixtes paritaires
La liste des candidats désignés par la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale pour faire partie des commissions mixtes paritaires chargées de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à améliorer la protection des lanceurs d’alerte et de la proposition de loi organique visant à renforcer le rôle du Défenseur des droits en matière de signalement d’alerte a été publiée conformément à l’article 8 quater du règlement.
Aucune opposition ne s’étant manifestée dans le délai d’une heure prévu par l’article 8 quater du règlement, cette liste est ratifiée. Les représentants du Sénat à ces commissions mixtes paritaires sont :
Titulaires : M. François-Noël Buffet, Mmes Catherine Di Folco, Muriel Jourda, Nathalie Goulet, Angèle Préville, MM. Jean-Yves Leconte et Ludovic Haye ;
Suppléants : Mmes Nadine Bellurot, Jacqueline Eustache-Brinio, Marie Mercier, MM. Hervé Marseille, Jérôme Durain, Jean-Yves Roux et Éric Bocquet.
nomination de membres d’une éventuelle commission mixte paritaire
La liste des candidats désignés par la commission des affaires économiques pour faire partie de l’éventuelle commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi pour un accès plus juste, plus simple et plus transparent au marché de l’assurance emprunteur a été publiée conformément à l’article 8 quater du règlement.
Aucune opposition ne s’étant manifestée dans le délai d’une heure prévu par l’article 8 quater du règlement, cette liste est ratifiée. Les représentants du Sénat à cette éventuelle commission mixte paritaire sont :
Titulaires : Mme Sophie Primas, MM. Daniel Gremillet, Jean-Baptiste Blanc, Patrick Chauvet, Mme Florence Blatrix Contat, M. Rémi Féraud et Mme Marie Evrard ;
Suppléants : MM. Jérôme Bascher, Yves Bouloux, Mmes Marie-Christine Chauvin, Sylvie Vermeillet, M. Jean-Claude Tissot, Mme Guylène Pantel et M. Fabien Gay.
Pour la Directrice des comptes rendus du Sénat,
le Chef de publication
ÉTIENNE BOULENGER