Mme le président. L’amendement n° 5, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 4
Remplacer les mots :
ou le placement en vue d’adoption de mineurs de quinze ans
par les mots :
de mineurs résidant habituellement à l’étranger
II. – Alinéa 13
Remplacer les mots :
ou le placement en vue d’adoption de mineurs de quinze ans
par les mots :
de mineurs étrangers
III. – Alinéa 15
Rétablir les III à V dans la rédaction suivante :
III. – L’article L. 225-19 du code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est ainsi modifié :
a) Les mots : « ou le placement en vue d’adoption de mineurs de quinze ans » sont remplacés par les mots : « de mineurs résidant habituellement à l’étranger » ;
b) Après la référence : « L. 225-11 », sont insérés les mots : « ou l’habilitation prévue à l’article L. 225-12 » ;
2° Après le même premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Est puni des mêmes peines le fait de recueillir sur le territoire français des mineurs en vue de les proposer à l’adoption. »
IV. – Le chapitre Ier du titre VIII du livre Ier du code civil est ainsi modifié :
1° L’article 348-4 est ainsi rédigé :
« Art. 348-4. – Lorsque les parents, l’un des deux ou le conseil de famille consentent à l’admission de l’enfant à la qualité de pupille de l’État en le remettant au service de l’aide sociale à l’enfance, le choix de l’adoptant est laissé au tuteur, avec l’accord du conseil de famille des pupilles de l’État. » ;
2° À la fin de l’article 348-5, les mots : « ou à un organisme autorisé pour l’adoption » sont supprimés ;
2° bis L’article 349 est abrogé ;
3° Au premier alinéa de l’article 353-1, les mots : « , d’un enfant remis à un organisme autorisé pour l’adoption » sont supprimés.
V. – L’interdiction de recueillir sur le territoire français des mineurs en vue de les proposer à l’adoption prévue au 2° du III du présent article entre en vigueur deux mois après la promulgation de la présente loi.
La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Je me permets de préciser que le Gouvernement n’a pas cherché à rétablir tout ce qui avait été supprimé par le Sénat…
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Le Sénat non plus !
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Le Sénat non plus, vous avez raison, mais, sur d’autres textes, des rapporteurs ont pu m’en faire le reproche. (Sourires.)
Cependant, sur quelques points essentiels, il nous semblait important de nous représenter devant vous avec nos propositions. Nous ne l’avons pas fait, d’ailleurs, sur les habilitations à légiférer par ordonnances, qui, pourtant, avaient été récrites, suivant les sages conseils du Sénat et de l’Assemblée nationale, pour les circonscrire à deux objets très précis de nature légistique. Mais passons…
L’amendement n° 5 vise à rétablir la rédaction de l’article 11 bis adoptée à l’Assemblée nationale en nouvelle lecture. Il s’agit de réintroduire l’interdiction du recueil direct d’enfants en France par les organismes autorisés pour l’adoption, les fameux OAA.
Cette interdiction, je vous le redis, est conforme à l’intérêt de l’enfant, car elle garantit que tous les enfants privés définitivement de la protection de leur famille d’origine bénéficieront du statut de pupille de l’État. Or c’est le statut le plus protecteur pour les enfants.
Vous avez dit, madame la rapporteure, que cela ne concernait qu’une OAA et six enfants par an en moyenne.
Vous nous avez dit également, madame la rapporteure, que les personnes que vous aviez auditionnées étaient souvent des parents, surtout des mères, qui étaient eux-mêmes passés par l’aide sociale à l’enfance et qui ne souhaitaient pas remettre leur enfant dans cet environnement. Je ne porte évidemment aucun jugement sur ce point, mais il faut savoir que nous parlons de nourrissons qui vont être confiés à l’ASE pendant deux ou trois mois au maximum, avant de trouver une famille. Il est faux de dire qu’ils vont rester des années, voire la moitié de leur enfance ou toute leur enfance dans le giron de l’ASE. Ne laissons pas croire cela.
Cette interdiction ne prive pas les enfants d’une quelconque chance.
Un argument revient souvent, mais vous ne l’avez pas repris, madame la rapporteure : les enfants recueillis par des OAA seraient plus facilement adoptés que les enfants confiés à l’ASE. Ce n’est pas la réalité !
La majorité des enfants recueillis en France par des OAA ne présentent pas de besoins spécifiques et n’auront pas la moindre difficulté à trouver des parents, dans le respect des règles de déontologie et de transparence applicables à ces procédures, qui ne sont, il faut le dire, pas toujours totalement, complètement, parfaitement appliquées par les OAA qui recueillent des enfants.
Pour autant, c’est vrai, les OAA ont une vraie expertise sur l’accompagnement, des départements notamment, en matière d’adoption des enfants à besoins spécifiques. D’ailleurs, dans votre texte, vous consacrez cette expertise. Et cette mission qui est exercée par un certain nombre d’OAA en France aujourd’hui pourra évidemment être poursuivie demain. J’avais d’ailleurs eu l’occasion de rassurer personnellement le représentant d’un organisme qui était assez inquiet à l’issue de la première lecture à l’Assemblée nationale : ils pourront continuer d’agir auprès des départements.
Seulement, il y a une différence entre le recueil d’enfants et l’accompagnement des départements, des parents, sur l’adoption d’enfants à besoins spécifiques, un domaine dans lequel, je le répète, ils ont une vraie expertise, que je salue.
Il y a aujourd’hui cinq OAA encore autorisés à recueillir des enfants : la Confédération française pour l’adoption (COFA), Vivre en famille, SOS Emmanuel, La Cause et La Famille adoptive française.
Or seule cette dernière structure fait encore, pour cinq enfants par an sur la France entière, du recueil d’enfants, c’est-à-dire du placement sous leur responsabilité chez des assistants familiaux.
Les autres, et plus particulièrement SOS Emmanuel France, que j’avais eu en direct au téléphone, ne recueillent plus de mineurs. Ils assurent cependant une préparation, un accompagnement des candidats à l’adoption, et travaillent en lien étroit avec les départements au profit des pupilles de l’État à besoins spécifiques. Je le répète et j’y insiste, cette dernière compétence n’est absolument pas remise en cause. Au contraire, elle est confortée par la présente proposition de loi, qui prévoit expressément dans son article 11 que les départements peuvent prendre appui sur ces associations dans la recherche de familles adoptantes pour des pupilles pour lesquels un projet d’adoption est souhaité.
Nous souhaitons donc conforter les OAA en France sur cette mission-là, mais nous souhaitons aussi consacrer le monopole de l’ASE, du système public, avec toutes les garanties qu’offre pour l’enfant le statut de pupille de l’État, s’agissant du recueil des enfants en vue d’une adoption.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous souhaitons que cet article 11 bis soit récrit.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Je ne dirai qu’un seul mot, monsieur le secrétaire d’État : pourquoi ?
Le parti pris de la commission est le suivant : on ne change pas la loi parce qu’on en a envie, on la change parce qu’il existe une raison légitime de le faire, parce que cette modification résout une difficulté.
Vous avez rappelé l’état actuel des OAA en France et la situation en matière de recueil des enfants, mais aucun élément ne justifie que l’on modifie quoi que ce soit. Les enfants qui ne bénéficient pas du statut de pupille de l’État sont parfaitement traités par les OAA, qui continuent de les recueillir.
Si tout fonctionne bien, il n’y a, je le répète, aucune raison de modifier l’existant. C’est pourquoi la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme le président. Je mets aux voix l’article 11 bis.
(L’article 11 bis est adopté.)
Article 11 ter
(Non modifié)
I. – (Non modifié)
I bis. – Le I n’est pas applicable aux candidats à l’adoption titulaires d’un agrément en cours de validité à la date de publication de la présente loi et dont le dossier d’adoption a été enregistré auprès de l’autorité centrale mentionnée à l’article L. 148-1 du code de l’action sociale et des familles au plus tard six mois après la promulgation de la présente loi.
II. – (Supprimé) – (Adopté.)
Article 11 quater
(Non modifié)
La section 4 du chapitre V du titre II du livre II du code de l’action sociale et des familles est ainsi modifiée :
1° (Supprimé)
1° bis L’article L. 225-18 est ainsi rédigé :
« Art. L. 225-18. – Le pupille de l’État placé en vue de l’adoption et les adoptants bénéficient, pendant la durée du placement en vue de l’adoption, d’un accompagnement par le service de l’aide sociale à l’enfance.
« Le mineur placé en vue de l’adoption ou adopté par l’effet d’une décision étrangère qui n’est pas l’enfant du conjoint, du partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou du concubin de l’adoptant et les adoptants bénéficient d’un accompagnement par l’organisme mentionné à l’article L. 225-11 ou, à défaut, par le service de l’aide sociale à l’enfance, à compter de l’arrivée du mineur au foyer de l’adoptant et pendant une durée d’un an.
« L’accompagnement prévu au présent article est prolongé si les adoptants en font la demande ou s’ils s’y sont engagés envers l’État d’origine de l’enfant. Dans ce dernier cas, il s’effectue selon le calendrier déterminé au moment de l’engagement. » ;
2° et 3° (Supprimés)
Mme le président. L’amendement n° 11, présenté par Mmes Harribey, Meunier et de La Gontrie, MM. Durain, Bourgi, Kanner, Kerrouche, Leconte, Marie, Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Michelle Meunier.
Mme Michelle Meunier. Cet amendement tend à supprimer l’article 11 quater.
En effet, nous ne sommes pas favorables à l’interdiction de l’accueil des mineurs en vue de l’adoption par les organismes autorisés pour l’adoption en France. La majorité des acteurs de la petite enfance s’accorde à reconnaître l’importance d’un accompagnement après l’adoption à la fois de l’enfant et de ses parents adoptifs pour la réussite du projet parental, mais le caractère obligatoire prévu dans la proposition de loi initiale est contesté.
En effet, dès lors que l’adoption est prononcée, y compris en vertu d’une décision étrangère, les adoptants sont des parents de plein exercice et l’intervention d’un tiers ne devrait pas pouvoir leur être imposée autrement que sur décision d’un juge, en cas de danger pour la santé, la sécurité ou la moralité de l’enfant.
Cet accompagnement post-adoption, qui ne serait obligatoire qu’en cas d’adoption internationale, pourrait être analysé comme une immixtion injustifiée dans la vie privée de la famille et comme une forme de discrimination.
Telle est la raison pour laquelle nous proposons de supprimer l’article 11 quater et de conserver le droit en vigueur.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Je l’ai indiqué précédemment, la commission n’a souhaité modifier que cinq points saillants du texte. Cependant, la position que vient d’exposer parfaitement notre collègue Michelle Meunier était celle du Sénat en première lecture.
Aussi l’avis de la commission est-il favorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. L’article 11 quater, dont vous proposez la suppression, prévoit l’accompagnement par les services de l’aide sociale à l’enfance des pupilles placés en vue de l’adoption, ainsi que des enfants adoptés en vertu d’une décision étrangère. Pourtant, cet accompagnement nous semble essentiel, car il permet d’apporter une aide, des conseils, dans les premiers temps de découverte et d’affiliation entre l’enfant placé en vue de l’adoption ou adopté et ses parents.
Par ailleurs, le pupille placé en vue de l’adoption reste sous la responsabilité du tuteur et du conseil de famille jusqu’au prononcé de l’adoption. Il revient à ces derniers de s’assurer de la bonne intégration de l’enfant au sein de sa famille adoptive et, le cas échéant, de prendre toutes les mesures qui seraient nécessaires si des difficultés venaient à apparaître.
Enfin, l’accompagnement des enfants adoptés en vertu d’une décision étrangère répond à une attente forte des pays d’origine, chaque adoptant prenant un engagement moral auprès de ces derniers, qu’il nous revient de garantir à leurs côtés dans le cadre des relations que nous entretenons avec ces pays.
Pour toutes ces raisons, nous sommes défavorables à l’amendement de suppression de l’article 11 quater.
Mme le président. En conséquence, l’article 11 quater est supprimé, et l’amendement n° 13 n’a plus d’objet.
Article 11 quinquies
(Non modifié)
Le premier alinéa de l’article L. 225-15 du code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° À la fin, les mots : « étrangers de quinze ans » sont remplacés par les mots : « résidant habituellement à l’étranger » ;
2° (Supprimé) – (Adopté.)
Article 11 sexies
(Supprimé)
TITRE II
RENFORCER LE STATUT DE PUPILLE DE L’ÉTAT ET AMÉLIORER LE FONCTIONNEMENT DES CONSEILS DE FAMILLE
Article 12
(Non modifié)
L’article L. 225-1 du code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° La première phrase du premier alinéa est remplacée par trois phrases ainsi rédigées : « Les enfants admis à la qualité de pupille de l’État en application des articles L. 224-4 et L. 224-8 bénéficient, dans les meilleurs délais, d’un bilan médical, psychologique et social, qui fait état de l’éventuelle adhésion de l’enfant à un projet d’adoption, si l’âge et le discernement de l’enfant le permettent. Un projet de vie est ensuite défini par le tuteur avec l’accord du conseil de famille. Ce projet peut être une adoption, si tel est l’intérêt de l’enfant. » ;
2° Après le même premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Un nouveau bilan peut être réalisé à tout moment, à la demande du tuteur en accord avec le conseil de famille ou du mineur lui-même si son âge et son discernement le permettent, notamment si un projet d’adoption est envisagé pour le pupille. » ;
3° Au second alinéa, le mot : « ce » est remplacé par le mot : « le ». – (Adopté.)
Article 13
I. – L’article L. 224-5 du code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° A Le deuxième alinéa est complété par les mots : « , le cas échéant avec l’assistance d’une personne de leur choix » ;
1° Au 4°, les mots : « père et mère » sont remplacés par le mot : « parents » ;
2° Le dernier alinéa est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :
« Lorsque l’enfant est remis au service par ses parents ou l’un d’eux, selon le 2° ou 3° de l’article L. 224-4, ceux-ci consentent à son admission dans le statut de pupille de l’État, après avoir été éclairés sur ses conséquences, s’agissant notamment de la possibilité pour le conseil de famille de consentir à une adoption en application du 2° de l’article 347 du code civil, si tel est l’intérêt de l’enfant.
« Dans ce cas, le ou les parents sont également invités à consentir eux-mêmes à l’adoption de l’enfant dans les conditions de l’article 348-3 du même code, après avoir été informés que la décision de faire bénéficier l’enfant d’un projet d’adoption, la définition du projet d’adoption, simple ou plénière suivant les circonstances particulières à la situation de l’enfant, ainsi que le choix des adoptants éventuels sont assurés par le tuteur, avec l’accord du conseil de famille en application de l’article L. 225-1 du présent code.
« Ces consentements sont portés sur le procès-verbal. »
II. – (Non modifié)
Mme le président. L’amendement n° 6, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéas 5 à 7
Rédiger ainsi ces trois alinéas :
« Lorsque l’enfant est remis au service par ses parents ou par l’un d’eux, selon les 2° ou 3° de l’article L. 224-4, ceux-ci doivent consentir expressément à l’admission de l’enfant à la qualité de pupille de l’État. Ils sont incités à communiquer les informations médicales connues les concernant.
« Le consentement doit être libre, obtenu sans aucune contrepartie et éclairé sur les conséquences de l’admission à la qualité de pupille de l’État, ouvrant notamment la possibilité pour l’enfant de bénéficier d’un projet d’adoption en application du 2° de l’article 347 du code civil.
« Le consentement à l’admission de l’enfant à la qualité de pupille de l’État emportant la possibilité de son adoption est porté sur le procès-verbal. »
La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Nous voici parvenus à l’un des derniers aspects importants du texte sur lesquels il nous semblait nécessaire de revenir : la question du consentement des parents à l’admission au statut de pupille de l’État. Il s’agit de clarifier, si cela était nécessaire, l’intention du Gouvernement.
Nous vous proposons de réintroduire l’article 13 dans la rédaction issue des travaux de l’Assemblée nationale en nouvelle lecture, car elle clarifie l’état du droit. Fondamentalement, c’est de cela qu’il s’agit. Je vous vois venir, monsieur Bascher, vous allez me dire : « À quoi bon, si c’est déjà le droit ? » Il est parfois nécessaire, notamment pour les professionnels, de clarifier les choses afin que le droit soit bien appliqué.
À l’heure actuelle en effet, le code de l’action sociale et des familles prévoit que les parents sont invités à consentir à l’adoption lorsqu’ils remettent leur enfant à l’aide sociale à l’enfance en vue de son admission au statut de pupille de l’État, mais l’article 349 du code civil indique que ce droit appartient in fine au conseil de famille.
Ainsi, quand bien même les parents ne consentiraient pas à l’adoption, dans les faits, le conseil de famille, s’il considère que c’est dans l’intérêt de l’enfant, peut passer outre le refus ou l’absence de consentement des parents. Inversement, ce n’est pas parce que les parents ont consenti à l’adoption de leur enfant lorsqu’ils l’ont remis à l’aide sociale à l’enfance que ce dernier sera nécessairement adopté. Pour cela, il est nécessaire que le conseil de famille prenne une décision en ce sens.
En conclusion, la rédaction actuelle du code de l’action sociale et des familles produit les mêmes effets juridiques que la disposition adoptée par l’Assemblée nationale, mais induit les parents en erreur sur la réalité de leurs droits et contribue ainsi à alimenter l’idée que le statut de pupille de l’État a pour seul objectif de déboucher sur une adoption. Or l’adoption peut ne pas être dans l’intérêt d’un pupille de l’État, par exemple lorsque l’enfant a tissé des liens forts avec sa famille d’accueil ou lorsqu’il ne souhaite pas être adopté.
C’est pourquoi il est proposé de clarifier ces règles, sans réduire aucunement le champ du consentement des parents. Paradoxalement, on nous a beaucoup reproché de vouloir, avec cette disposition, passer outre le consentement des parents ou de le mettre en cause. C’est tout le contraire !
Les parlementaires ont ainsi ajouté un certain nombre de dispositions qui permettent d’éclairer le consentement des parents au moment où celui-ci est exprimé et de ne pas les entretenir dans l’illusion que le consentement qu’ils donneraient en première intention pourrait être renversé par une absence de consentement au moment de l’adoption.
Pour toutes ces raisons, il nous semble important que cet article 13 puisse être rétabli dans la rédaction issue des travaux de l’Assemblée nationale en nouvelle lecture.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. L’avis de la commission est défavorable.
Nous n’avons pas la même conception de la clarté ou de la clarification, me semble-t-il, monsieur le secrétaire d’État !
Le mécanisme est le suivant : les parents remettent l’enfant, consentent à son admission au statut de pupille de l’État. En l’état actuel du droit, ils sont aussi invités à consentir à l’adoption. Ensuite, il revient au conseil de famille, sur proposition du tuteur, de prendre une décision en la matière.
Dans le texte que vous nous proposez, monsieur le secrétaire d’État, il est indiqué que les parents consentent à l’admission au statut de pupille de l’État et que ce statut emporte consentement à une éventuelle adoption.
Le texte que la commission des lois a rédigé et approuvé me paraît plus clair puisqu’il distingue précisément tous les processus de décision, mais aussi les décisionnaires.
Il prévoit que lorsque « l’enfant est remis au service par ses parents ou par l’un d’eux […], ceux-ci consentent à son admission dans le statut de pupille de l’État […]. Dans ce cas, le ou les parents sont également invités à consentir eux-mêmes à l’adoption de l’enfant […], après avoir été informés que la décision de faire bénéficier l’enfant d’un projet d’adoption, la définition du projet d’adoption […], ainsi que le choix des adoptants éventuels, sont assurés par le tuteur avec l’accord du conseil de famille ».
Cet article semble bien plus clair que celui que propose le Gouvernement, monsieur le secrétaire d’État – je suis navrée de le dire ainsi –, car il y apparaît bien que les processus décisionnels se font en plusieurs étapes.
Mme le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Je répète que c’est une illusion, car c’est le conseil de famille qui décide in fine de l’adoption.
Mme Muriel Jourda, rapporteur. C’est ce que je viens de dire !
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. On ne redemande pas le consentement de la famille au moment de l’adoption.
Il ne faut pas laisser croire aux familles qu’elles auront à exprimer leur consentement au moment de l’adoption et qu’elles pourront donc s’y opposer. C’est ce que laisse sous-entendre votre argument. Si le conseil de famille considère que, dans son intérêt, l’enfant doit être adopté, il le sera. En réalité, on maintient les familles dans une illusion.
Madame la rapporteure, je vous invite à vous reporter à la page 68 du guide Les enfants pupilles de l’État, qui sert aux départements et aux conseils de famille pour cheminer en ces matières. Vous y trouverez le modèle du procès-verbal de recueil de l’enfant à la suite d’une remise à l’aide sociale à l’enfance par son unique parent ou ses deux parents. Je vous parle bien ici de la première étape, la remise de l’enfant à l’aide sociale à l’enfance. Il est indiqué à la fin de ce procès-verbal : « M. X et/ou Mme Y ont expressément consenti à l’adoption de leur enfant. »
Dans les faits, lorsqu’ils remettent l’enfant à l’aide sociale à l’enfance, les parents consentent déjà à ce qu’il soit in fine adopté si le conseil de famille estime que c’est dans son intérêt. C’est bien au conseil de famille qu’il appartient de prendre cette décision.
Nous vous proposons donc de rendre le droit plus clair et cohérent avec la pratique. Il s’agit de ne pas revenir sur cette pratique, contrairement à ce que vous proposez avec cette rédaction.
Mme le président. La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Je pense que chacun voudra que nous terminions assez rapidement ce débat, mais permettez-moi de rappeler que la pratique aujourd’hui, c’est le code civil.
Le problème, c’est que le code civil et le code de l’action sociale et des familles ne sont pas tout à fait rédigés en des termes concordants. Aujourd’hui, le code civil précise que les parents sont invités à consentir.
Je rappelle les propos très justes qui ont été tenus par notre collègue Michelle Meunier lors de la discussion générale : il est extrêmement important que les parents, lorsqu’ils font ce dernier acte de parents qui est de remettre leur enfant à l’aide sociale à l’enfance, puissent faire savoir ultérieurement à ce dernier qu’ils ont souhaité qu’il ait une nouvelle vie de famille avec d’autres parents. Il est important de le préciser, comme la commission l’a fait dans sa rédaction.
Mme le président. Je mets aux voix l’article 13.
(L’article 13 est adopté.)
Article 14
(Non modifié)
I. – Le code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° L’article L. 224-2 est ainsi rédigé :
« Art. L. 224-2. – Les membres du conseil de famille sont nommés par le représentant de l’État dans le département ou, en Corse, par le représentant de l’État dans la collectivité de Corse, en considération de l’intérêt porté à la politique publique de protection de l’enfance, en fonction de leur aptitude ainsi que de leur disponibilité.
« Outre le tuteur, chaque conseil de famille comprend :
« 1° Un membre titulaire et un membre suppléant d’associations de pupilles ou d’anciens pupilles ou de personnes admises ou ayant été admises à l’aide sociale à l’enfance dans le département ;
« 2° Deux membres titulaires et deux membres suppléants d’associations familiales concourant à la représentation de la diversité des familles, dont un membre titulaire et un membre suppléant d’associations de familles adoptives ;
« 3° Un membre titulaire et un membre suppléant d’associations d’assistants familiaux ;
« 4° Deux représentants du conseil départemental et deux suppléants, désignés par lui sur proposition de son président ou, en Corse, un représentant de la collectivité de Corse et un suppléant, désignés par l’Assemblée de Corse ;
« 5° Une personnalité qualifiée titulaire et un suppléant, que leur compétence et leur expérience professionnelles en matière d’éthique et de lutte contre les discriminations qualifient particulièrement pour l’exercice de fonctions en son sein ;
« 6° Une personnalité qualifiée titulaire et un suppléant, que leur expérience et leur compétence professionnelles en matière médicale, psychologique ou sociale qualifient particulièrement pour l’exercice de fonctions en son sein.
« Le mandat de ses membres est de six ans. Nul ne peut exercer plus de trois mandats, dont plus de deux en tant que titulaire.
« À chaque renouvellement d’un conseil de famille des pupilles de l’État, les membres nouvellement nommés bénéficient d’une formation préalable à leur prise de fonction, dans des conditions définies par décret.
« Dans l’intérêt des pupilles de l’État, les membres titulaires veillent à être présents à chaque réunion du conseil de famille des pupilles de l’État ou, à défaut, à se faire remplacer par leur suppléant.
« Les membres du conseil de famille sont tenus au secret professionnel dans les conditions prévues aux articles 226-13 et 226-14 du code pénal.
« Le représentant de l’État dans le département ou, en Corse, le représentant de l’État dans la collectivité de Corse peut mettre fin au mandat des membres du conseil de famille en cas de manquement caractérisé à leurs obligations.
« Il est institué, dans chaque département, un conseil de famille supplémentaire lorsque le nombre de pupilles suivis par les conseils de famille existants est supérieur à cinquante. » ;
2° L’article L. 224-3 est ainsi rédigé :
« Art. L. 224-3. – Sauf disposition contraire, les décisions et délibérations de toutes natures du conseil de famille des pupilles de l’État sont susceptibles de recours.
« Ce recours est ouvert :
« 1° Au tuteur ;
« 2° Aux membres du conseil de famille ;
« 3° Aux personnes à qui le service de l’aide sociale à l’enfance a confié un pupille de l’État pour en assurer la garde et qui souhaitent l’adopter, pour les décisions et délibérations relatives à ce projet d’adoption.
« Le recours est porté devant le tribunal judiciaire. Le délai de recours est de quinze jours. Les parties ne sont pas tenues de constituer avocat.
« L’appel est ouvert aux personnes mentionnées aux 1° et 2°, même si elles ne sont pas intervenues à l’instance. » ;
3° Au second alinéa de l’article L. 224-3-1, la référence : « quatrième alinéa » est remplacée par la référence : « 4° ».
II. – (Supprimé)