M. le président. L’amendement n° 61, présenté par M. Frassa, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Alinéa 91
Après le mot :
ans
supprimer la fin de cet alinéa.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Christophe-André Frassa, rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 62, présenté par M. Frassa, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 92
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
… – À l’article L. 351-7-1 du code rural et de la pêche maritime, la référence : « L. 680-5 » est remplacée par la référence : « L. 680-11 ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Alain Griset, ministre délégué. Cet amendement ne nous pose pas de difficultés ; l’avis est donc favorable.
M. le président. L’amendement n° 47 rectifié, présenté par MM. Cabanel, Requier, Bilhac et Corbisez, Mme N. Delattre, MM. Gold et Guérini, Mme Guillotin et M. Roux, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, dans les six mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport relatif aux expérimentations prévues à l’article 40 de la loi n° 2018-727 du 10 août 2018 pour un État au service d’une société de confiance, en particulier en ce qui concerne la dématérialisation des procédures concernant les travailleurs non salariés.
La parole est à M. Henri Cabanel.
M. Henri Cabanel. L’objet de cet amendement est de favoriser la dématérialisation des procédures administratives auxquelles sont soumis les travailleurs et entrepreneurs indépendants lors de leurs différentes démarches.
La loi du 10 août 2018 pour un État au service d’une société de confiance, dite loi Essoc, consacre un chapitre à la dématérialisation des relations entre les usagers et l’administration – les articles 40 à 48 – où s’exprime le principe du « dites-le-nous une fois ». La dématérialisation figure aussi dans la stratégie nationale d’orientation de l’action publique annexée à cette loi.
La loi du 7 octobre 2016 pour une République numérique comporte, elle aussi, des dispositions dans ce domaine.
Toutefois, les procédures concernant les travailleurs et entrepreneurs indépendants apparaissent encore souvent trop lourdes et insuffisamment à jour au regard des moyens de communication actuelle. Certaines difficultés se sont d’ailleurs révélées tout particulièrement durant la pandémie.
Aussi, dans ma question écrite du 17 décembre 2020, ai-je interrogé le Gouvernement sur la dématérialisation de la procédure fiscale des droits d’enregistrement par la direction générale des finances publiques.
Il est ici proposé de demander un rapport au Gouvernement sur ces expérimentations, sans se limiter aux seules questions fiscales, pour toucher le plus large éventail possible de procédures concernant les indépendants.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Christophe-André Frassa, rapporteur. Mon cher collègue, je vous rejoins sur l’importance de la simplification et de la dématérialisation des formalités administratives pour les indépendants.
Comme vous le savez, nous n’en sommes pas aux premières tentatives en la matière : vous avez vous-même rappelé la loi pour une République numérique, dont j’ai eu l’honneur d’être le rapporteur au Sénat, ainsi que la loi Essoc. Ces questions méritent naturellement un débat parlementaire.
Toutefois, il m’échoit le triste privilège de vous rappeler que la commission des lois, qui n’est pas convaincue de l’intérêt opérationnel des demandes de rapport, leur est traditionnellement défavorable. En revanche, je veux croire que M. le ministre ne manquera pas de vous apporter des éléments de fond sur le sujet que vous évoquez.
En tout état de cause, la commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, son avis sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Alain Griset, ministre délégué. À titre personnel, je suis naturellement extrêmement favorable à tout ce qui peut simplifier la vie des entrepreneurs. L’article 40 de la loi Essoc prévoit d’ailleurs à ce sujet une expérimentation, qui doit faire l’objet d’une évaluation.
Il me semble que nous devons laisser le temps à cette expérimentation de se dérouler. C’est pourquoi je vous invite à retirer votre amendement ; à défaut, l’avis du Gouvernement sera défavorable.
M. le président. Monsieur Cabanel, l’amendement n° 47 est-il maintenu ?
M. Henri Cabanel. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 47 est retiré.
Section 2
De la mise en extinction du statut de l’entreprise individuelle à responsabilité limitée
Article 5
I. – La section 2 du chapitre VI du titre II du livre V du code de commerce est ainsi modifiée :
1° A (nouveau) L’intitulé est ainsi rédigé : « Du régime de l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée (en extinction) » ;
1° L’article L. 526-5-1 est abrogé ;
2° Le II de l’article L. 526-8 est ainsi modifié :
a et b) (Supprimés)
c) Au début du dernier alinéa, après le mot : « individuel », sont insérés les mots : « à responsabilité limitée » ;
3° L’article L. 526-16 est abrogé ;
3° bis (nouveau) La première phrase du II de l’article L. 526-17 est ainsi modifiée :
a) Les mots : « avec maintien de l’affectation » sont supprimés ;
b) À la fin, sont ajoutés les mots : « sans maintien de l’affectation, sans préjudice de l’article L. 526-1 B » ;
4° Le second alinéa de l’article L. 526-19 est supprimé.
II. – À compter de l’entrée en vigueur de la présente loi, nul ne peut affecter à son activité professionnelle un patrimoine séparé de son patrimoine personnel en application de l’article L. 526-6 du code de commerce. L’affectation à un patrimoine affecté déjà constitué ou le retrait d’éléments de celui-ci demeurent permis.
Les personnes physiques exerçant leur activité sous le régime de l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée à la date d’entrée en vigueur de la présente loi demeurent régies par la section 2 du chapitre VI du titre II du livre V du même code.
Le présent II est applicable dans les îles Wallis et Futuna.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 41, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 2
Supprimer cet alinéa.
II. – Alinéa 5
Rétablir les a et b dans la rédaction suivante :
a) A la première phrase du deuxième alinéa, les mots : « qui exerçait son activité professionnelle antérieurement à la déclaration mentionnée à l’article L. 526-7 » sont supprimés ;
b) A la seconde phrase du même alinéa, les mots : « le premier exercice » sont remplacés par les mots : « l’exercice suivant » ;
III. – Alinéas 8 à 10
Supprimer ces alinéas.
IV. – Alinéa 12
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Alain Griset, ministre délégué. Cet amendement a pour objet de rétablir la version initiale de cet article organisant la mise en extinction du régime de l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée, ou EIRL.
M. le président. L’amendement n° 63, présenté par M. Frassa, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 10
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…° Après la même première phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Toutefois, l’affectation est maintenue si le cessionnaire ou le donataire était soumis, à la date de la transmission, au régime défini à la présente section. » ;
…° Le début de la deuxième phrase du même premier alinéa est ainsi rédigé : « L’acte donne lieu… » (le reste sans changement) ;
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n° 41.
M. Christophe-André Frassa, rapporteur. Je commencerai par dire quelques mots sur l’amendement n° 41 du Gouvernement.
Contrairement à ce que l’on peut lire dans l’exposé de ses motifs, adopter cet amendement conduirait à permettre au régime de l’EIRL de perdurer indéfiniment, puisque, dans le cas où un EIRL transférerait son patrimoine affecté à une autre personne, l’affectation serait maintenue de plein droit, avec pour conséquence la soumission du bénéficiaire du transfert au régime de l’EIRL s’il n’y était pas déjà soumis.
L’amendement n° 63, que je vous propose d’adopter, me semble répondre à l’objectif commun de la commission et du Gouvernement : permettre aux EIRL existants de se maintenir, voire de se céder mutuellement leur patrimoine affecté, mais interdire la création de nouvelles entreprises individuelles sous ce régime à compter de l’entrée en vigueur de ce texte.
Voilà pourquoi je propose au Gouvernement de retirer son amendement n° 41 au profit de l’amendement n° 63 de la commission.
Il me semble que le Gouvernement et la commission sont d’accord sur le fond : s’il est opportun de mettre en extinction le régime de l’EIRL, en ne permettant pas à de nouvelles personnes physiques de s’y soumettre à l’avenir, il est en revanche légitime qu’un EIRL puisse céder l’un de ses patrimoines affectés à un autre EIRL existant, avec maintien de l’affectation. La commission a la faiblesse de croire que le dispositif de son amendement n° 63 répond mieux à cet objectif.
M. le président. Monsieur le ministre délégué, l’amendement n° 41 est-il maintenu ?
M. Alain Griset, ministre délégué. Non, monsieur le président ; au vu de l’éloquence de M. le rapporteur, je le retire au profit du sien ! (Exclamations enjouées au banc des commissions.)
M. le président. L’amendement n° 41 est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° 63.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 5, modifié.
(L’article 5 est adopté.)
Section 3
Des dispositions applicables aux professions libérales réglementées
Article 6
(Supprimé)
M. le président. L’amendement n° 28, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
I. – Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est habilité à prendre par voie d’ordonnance, dans un délai de douze mois à compter de la publication de la présente loi, toutes dispositions relevant du domaine de la loi permettant de :
1° Clarifier, simplifier et mettre en cohérence les règles relatives aux professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé, d’une part en précisant les règles communes qui leur sont applicables, d’autre part en adaptant les différents régimes juridiques leur permettant d’exercer sous forme de société ;
2° Faciliter le développement et le financement des structures d’exercice des professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé.
II. – Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de six mois à compter de la publication de l’ordonnance.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Alain Griset, ministre délégué. Monsieur le président, je me permettrai d’être un peu long sur la présentation de cet amendement ; j’attache en effet beaucoup d’importance à ce que nous puissions trouver ensemble une solution adéquate au différend que nous avons sur ce sujet avec la commission des lois.
Je connais la position de celle-ci sur les ordonnances et le Gouvernement a pris acte de sa décision de supprimer l’article 6 de ce projet de loi.
Cet article habilitait le Gouvernement à prendre une ordonnance afin de simplifier l’exercice en société des professions libérales réglementées.
Tout d’abord, je tiens à souligner que cette réforme a fait l’objet d’un travail approfondi et d’une première phase de concertation avec les organisations professionnelles à la suite de la remise du rapport de l’inspection générale des finances en novembre 2020. Il y a 68 organisations professionnelles dans les professions libérales ; je les vois toutes régulièrement.
Le rapport de la commission des lois a mis en avant plusieurs considérations, sur lesquelles je voudrais revenir.
Il me semble que le premier constat est partagé entre nous : l’exercice sous forme sociétaire des professions libérales réglementées, s’il demeure minoritaire – environ les deux tiers des professionnels libéraux exercent en tant qu’indépendants – répond à un réel besoin de ces professionnels, en leur permettant de mutualiser des moyens, d’anticiper le développement de leur activité, ou tout simplement de s’inscrire dans une perspective de long terme et de transmission. C’est la raison pour laquelle ce sujet important trouve une place naturelle dans le cadre du projet de loi que je porte.
Le second constat est tout aussi consensuel : cet exercice en société demeure aujourd’hui complexe, parfois même dissuasif. C’est notamment le résultat de la superposition et de l’enchevêtrement, pour reprendre les termes de votre rapporteur, de textes juridiques nombreux. Cet état de fait est source d’incertitude et d’insécurité juridique pour les professionnels libéraux. La nécessité de légiférer est, à ce titre, établie sans conteste.
Sur la base de ces constats, je retiens deux réserves exprimées par la commission. Premièrement, les problématiques propres aux différentes professions seraient trop diverses pour permettre de les traiter ensemble. Deuxièmement, la question de l’ouverture du capital serait trop sensible et susciterait trop d’interrogations.
Je reviendrai tout d’abord sur ce dernier point. Nous ne prendrons dans cette ordonnance aucune initiative qui ne soit pleinement consensuelle avec les professionnels concernés. Je le répète : nous ne prendrons aucune initiative qui ne soit pleinement consensuelle avec les professionnels concernés.
Ainsi, toutes les écritures qui trouveront place dans l’ordonnance seront coconstruites avec eux en amont et soumises à concertation en aval. Il en va ainsi, bien évidemment, de la question sensible de l’ouverture du capital. Je me permets d’ailleurs de préciser que cet axe de nos travaux couvre également la question de l’assouplissement du régime des sociétés de participations financières de professions libérales (SPFPL), qui fait l’objet d’un large consensus.
L’autre réserve tenait à la diversité des situations rencontrées et des souhaits potentiellement divergents qui peuvent se manifester au sein des différentes familles de professions libérales.
Sur ce point, je rappellerai tout d’abord que les textes en vigueur, en particulier la loi du 31 décembre 1990 sur les sociétés d’exercice libéral, comportent déjà des dispositions visant spécifiquement telle ou telle famille professionnelle.
Notre objectif est très simple : nous souhaitons clarifier les règles applicables aux professions libérales, tout en opérant une distinction précise entre ce qui relève d’un socle commun à l’ensemble de ces professions et ce qui est et restera propre à chaque famille.
C’est en cela que le vecteur de l’ordonnance nous paraît incontournable, au regard du nombre et de la technicité des textes à rationaliser ou à rapprocher, y compris à droit constant.
En revanche, une fois cette difficulté résolue, notre approche aura l’immense avantage de mettre en regard les dispositions comparables qui s’appliquent aux uns et aux autres, en y intégrant des problématiques éminemment interprofessionnelles, comme le développement des sociétés pluriprofessionnelles d’exercice, dont le statut demeure largement perfectible.
Permettez-moi aussi de vous préciser que nous allons entrer dans une seconde phase de consultation approfondie, qui va permettre de creuser les sujets déjà identifiés et sûrement d’en faire apparaître d’autres.
C’est toujours le même message que nous adressons, inlassablement, aux professionnels libéraux : ces enjeux sont trop importants pour manquer la fenêtre qui s’offre à nous ; cette ordonnance doit être la vôtre, une boîte à outils à votre service pour simplifier considérablement l’exercice en société de vos professions.
J’ai bien entendu également le souhait du Sénat d’être associé à ces travaux. Je vous propose que des concertations dédiées puissent être menées avec vos représentants afin de recueillir leurs contributions sur ces sujets sensibles et de les ajouter à celles que nous obtiendrons directement auprès des professionnels.
À la lumière de ces éléments, je vous propose, par l’amendement n° 28, de réintroduire dans le texte l’habilitation à prendre l’ordonnance dont je viens de vous exposer la nécessité ; je m’engage devant vous à ce qu’elle soit présentée avant la fin de ce quinquennat.
Permettez-moi enfin d’illustrer mon propos par deux exemples.
Évoquons d’abord le cas de M. Y et Mme Z, qui sont architectes et exercent au sein d’une société d’exercice libérale. Ils veulent investir dans le BIM, Building Information Modeling, outil moderne pour la construction de bâtiments. Ils manquent de trésorerie et souhaiteraient pouvoir avancer à la société d’exercice des fonds propres personnels, sans recourir à un prêt bancaire. Avant la réforme que nous prévoyons, la loi du 31 décembre 1990 plafonne les comptes d’associés à hauteur de trois fois leur participation au capital : M. Y et Mme Z ne peuvent donc pas avancer les fonds nécessaires à leur investissement. Après la réforme, les comptes d’associés sont déplafonnés : M. Y et Mme Z peuvent compléter leur trésorerie sans recourir à un prêt bancaire.
Le second exemple est celui de M. K, radiologue : il exerce au sein d’une société d’exercice libérale et souhaiterait devenir propriétaire de ses locaux. Il a créé une société holding pour structurer ses investissements au sein de sa société. Avant la réforme, aucune disposition ne l’autorise clairement à utiliser cette holding pour acheter ces locaux. Après la réforme, il pourra le faire.
Je vous prie de m’excuser d’avoir été aussi long, mais il me paraissait nécessaire d’exposer très précisément l’objet de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Christophe-André Frassa, rapporteur. Nous abordons ici la deuxième des trois habilitations à légiférer par ordonnances que ce texte de quatorze articles comptait initialement.
Le Gouvernement propose, avec cet amendement, de rétablir l’article 6, qui a été supprimé par la commission. Cet article habilitait le Gouvernement à légiférer par ordonnance pour préciser les règles communes applicables aux professions libérales réglementées et adapter les différents régimes d’exercice sociétaire. L’habilitation visait également à faciliter le développement et le financement des structures d’exercice de ces professions.
À partir de là, nous allons diverger, je le crois…
M. Christophe-André Frassa, rapporteur. Commençons par le fond.
La superposition de régimes juridiques permettant l’exercice sociétaire des professions libérales réglementées est certes regrettable et le droit mériterait une clarification.
Pour autant, il n’existe pas de consensus au sein de ces professions sur le sens à donner à une telle réforme. Certaines sont opposées tant à la convergence des régimes d’exercice sociétaire qu’à la modification des règles relatives à la détention du capital et à la répartition des droits de vote. D’autres professions sont favorables à ces deux points et certaines s’opposent uniquement au second.
Les modifications relatives aux règles de détention du capital et de répartition des votes suscitent, de mon point de vue, les plus fortes interrogations. Il est en effet crucial de préserver les garanties d’indépendance caractérisant l’exercice des professions libérales réglementées.
Je ne citerai qu’un exemple, l’un des derniers en date : au deuxième paragraphe de son communiqué de presse, l’organisation interprofessionnelle Libéraux de santé estime que « l’ouverture du capital des sociétés à des non-exerçants constitue un risque majeur pour l’indépendance des professionnels libéraux de santé ».
J’en viens maintenant à la forme.
Il n’est évidemment pas acceptable pour le Parlement – vous me permettrez de parler également au nom de l’Assemblée nationale – d’abandonner sa compétence sur des questions qui appellent par nature des choix politiques.
Dans l’exposé de l’objet de son amendement, le Gouvernement justifie le choix de l’habilitation par la nécessité d’« approfondir la concertation menée avec les professionnels » et il assure qu’« aucune modification ne saurait être envisagée, ou aboutir, sans l’appui des professions concernées ».
Monsieur le ministre, ne confondons pas vitesse et précipitation ! Vous l’avez déjà fait à plusieurs reprises et vous avez entendu le Sénat à ce sujet. Si ces concertations sont encore en cours – c’est ce que je comprends de vos propos –, je ne vois aucune raison de se presser et d’avoir recours à une ordonnance pour légiférer.
Surtout, les concertations menées par le Gouvernement ne sauraient en aucun cas, à notre sens, se substituer à un débat parlementaire. La promesse du Gouvernement de n’agir qu’avec l’appui des professionnels ne peut pas non plus remplacer les garanties offertes par le marbre de la loi.
Pour conclure, un débat parlementaire me paraît absolument indispensable sur ce type de sujet ; un simple débat sur une habilitation ou sur la ratification d’une ordonnance ne saurait en tenir lieu.
Pour toutes ces raisons, l’avis de la commission sur l’amendement n° 28 est très défavorable !
M. André Reichardt. Parfait !
M. le président. En conséquence, l’article 6 demeure supprimé.
Chapitre II
De l’artisanat
Article 7
I. – Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est habilité à réécrire, par voie d’ordonnance, les dispositions législatives du code de l’artisanat afin d’en clarifier la rédaction et le plan. Cette nouvelle codification est effectuée à droit constant sous réserve des modifications qui seraient rendues nécessaires pour assurer le respect de la hiérarchie des normes, garantir la cohérence rédactionnelle des textes, harmoniser l’état du droit et abroger les dispositions obsolètes ou devenues sans objet.
L’ordonnance prise sur le fondement du premier alinéa du présent article peut en outre :
1° Intégrer dans le même code les dispositions de nature législative relatives à l’artisanat qui n’auraient pas été codifiées, qui seraient codifiées dans un autre code, ou qui seraient issues de la présente loi ;
2° Actualiser les dispositions applicables aux départements de la Moselle, du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de Mayotte en procédant aux adaptations nécessaires.
II. – L’ordonnance mentionnée au I est prise dans un délai de quatre mois à compter de la publication de la présente loi. Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de cette ordonnance.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 21 est présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian.
L’amendement n° 22 rectifié bis est présenté par MM. Reichardt et D. Laurent, Mme Muller-Bronn, MM. B. Fournier et Calvet, Mme Chain-Larché, MM. Cuypers, Burgoa, Panunzi, Cadec, de Nicolaÿ et Bouchet, Mme Bourrat, MM. Brisson et Daubresse, Mme Drexler, M. Cardoux, Mmes N. Goulet et Gruny, M. Courtial, Mmes Billon, Thomas et Gosselin, MM. Longeot, Chatillon, Gremillet, Lefèvre, Belin et Levi, Mmes F. Gerbaud, Schalck et Dumont, MM. Rietmann, Perrin et Klinger et Mme Borchio Fontimp.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Daniel Salmon, pour présenter l’amendement n° 21.
M. Daniel Salmon. Cet amendement vise à supprimer la demande d’habilitation à légiférer par ordonnance prévue à l’article 7 en vue de procéder à des clarifications entre différentes règles législatives et réglementaires existantes.
Depuis une dizaine d’années, le recours aux ordonnances dans des domaines relevant normalement de la loi est devenu plus fréquent ; il s’est même banalisé durant ce quinquennat dans des proportions sans commune mesure avec ce que la Ve République avait connu jusqu’à présent. Depuis 2017, plus de la moitié des textes relevant du domaine de la loi sont pris par ordonnance. En 2020, on a atteint un record : 73 % des textes sont des ordonnances !
À l’évidence, faire passer une mesure sans recourir au débat parlementaire est devenu une marque de fabrique de cet exécutif ; c’est très révélateur de la posture « jupitérienne » du Président de la République.
Rappelons que la force de l’article 38 de la Constitution se trouve dans son utilisation parcimonieuse. En y ayant trop souvent recours, on retire de facto au Parlement sa capacité de faire la loi.
Parce que le Parlement ne doit pas être considéré comme une simple chambre d’habilitation et qu’il doit pleinement assumer son rôle et ses compétences, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires demande que les clarifications, la rédaction et le plan du code de l’artisanat soient réalisés par la voie législative.
M. le président. La parole est à M. André Reichardt, pour présenter l’amendement n° 22 rectifié bis.
M. André Reichardt. L’article 7 de ce texte habilite le Gouvernement à réécrire par voie d’ordonnance les dispositions du code de l’artisanat. Avec ceux de mes collègues qui ont accepté de signer à ma suite cet amendement de suppression, nous pensons qu’il n’est pas sain d’encourager ainsi le recours devenu désormais systématique – cela a été rappelé – aux ordonnances.
Certes, monsieur le ministre, il est indiqué ici que la nouvelle codification serait effectuée à droit constant, mais « sous réserve des modifications qui seraient rendues nécessaires pour »… – je vous fais grâce de la suite.
Or nous savons d’expérience qu’il arrive fréquemment que des ordonnances ne respectent pas totalement – c’est le moins que l’on puisse dire ! – le périmètre fixé.
Ajoutons-y le fait qu’en raison d’une récente jurisprudence du Conseil constitutionnel certaines ordonnances ne donnent désormais plus lieu à ratification par le Parlement, et l’on ne peut être que prudents à l’égard du recours à cette nouvelle façon de légiférer.
Ensuite, il est indiqué, dans ce même article 7, que l’ordonnance pourra également « actualiser les dispositions applicables » aux départements de la Moselle, du Haut-Rhin et du Bas-Rhin, « en procédant aux adaptations nécessaires ». Là, monsieur le ministre, permettez-moi de m’inquiéter : les termes « actualiser » et « adaptations » me paraissent bien trop flous pour que l’on puisse accepter cet alinéa tel quel !
Il nous a paru jusqu’à présent indispensable, préalablement à toute modification du droit local, que la plus grande concertation ait lieu avec les acteurs de terrain. Or qui pourrait mieux la mener que les parlementaires concernés, qui peuvent s’appuyer sur leurs actions de terrain et sur les travaux qu’ils mènent au Parlement ?
Je relève d’ailleurs qu’à ce jour, malgré l’engagement du Gouvernement, la nouvelle commission du droit local d’Alsace-Moselle n’a toujours pas été mise en place. Ce n’est pas faute d’avoir adressé au Gouvernement des rappels à ce sujet durant les derniers mois ! Le projet se trouverait sur le bureau du Premier ministre…
Pour ces raisons, mes chers collègues, je vous invite à voter cet amendement et à supprimer l’article 7.