Mme le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour présenter l’amendement n° 83.
M. Joël Labbé. J’y insiste : il ne s’agit pas plus que précédemment de promouvoir une économie administrée, mais il est question de garantir l’efficacité et la bonne application du mécanisme prévu par la loi Égalim 1. Il est nécessaire de préciser la notion de prix abusivement bas pour disposer d’un véritable garde-fou, via la menace de sanctions pour l’aval si le prix ne couvre pas les coûts de production.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure. Le droit en vigueur est plus large que les dispositions de ces amendements : je le rappelle une nouvelle fois, il permet de prendre en compte d’autres indicateurs que ceux qui sont liés aux coûts de production.
À mon sens, il faut conserver cette souplesse au lieu de contraindre inutilement le juge ou les agents de la DGCCRF dans l’exercice de leurs fonctions.
Mes chers collègues, comme vous, je constate que le prix abusivement bas est rarement condamné aujourd’hui. Si tel est le cas toutefois, ce n’est pas nécessairement parce que sa définition est floue ; c’est plutôt parce que nombre d’agriculteurs n’osent pas s’en plaindre par crainte de représailles.
Il me semble plus pertinent de laisser aux pouvoirs publics une liberté de jugement lors des contrôles que de les obliger à analyser les prix abusivement bas au regard des seuls indicateurs de référence.
Enfin, si, comme vous l’indiquez, votre but est que soit considéré comme prix abusivement bas tout prix inférieur aux coûts de production, nous en revenons au prix plancher, dont nous avons déjà parlé.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 58 rectifié et 83.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme le président. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 59 rectifié est présenté par M. Gay, Mme Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 84 est présenté par MM. Labbé, Salmon et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 442-7 du code de commerce est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les produits importés sont concernés par le présent article. Pour caractériser un prix de cession abusivement bas pour les produits importés, il est tenu compte exclusivement des indicateurs de coûts de production en France mentionnés au deuxième alinéa du présent article. »
La parole est à M. Fabien Gay, pour présenter l’amendement n° 59 rectifié.
M. Fabien Gay. Je suis certain que cet amendement va recueillir l’avis favorable de M. le ministre. (Sourires sur les travées du groupe CRCE.) Ses dispositions seront d’ailleurs un point d’appui pour lui sur la question des clauses miroirs.
Comme le soulignent non seulement la Confédération paysanne, mais aussi l’UFC-Que Choisir, il est impératif d’étendre la notion de prix abusivement bas aux produits importés. Il s’agit de lutter contre les dumpings écologiques et sociaux qu’implique la mise en place d’un marché mondial pour les produits agricoles, actée par les accords de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) dès 1992.
En outre, la multiplication des accords de libre-échange reste, malgré tout, au cœur de la construction européenne, via une politique de concurrence qui prévaut sur toutes les autres politiques communautaires.
Il serait naïf de nier que certains distributeurs passent par des plateformes implantées à l’étranger pour contourner la loi Égalim.
En ce sens, les produits agricoles importés restent le point faible de cette législation. C’est pourquoi, pour des productions fortement concurrencées par des produits importés ne respectant pas les mêmes normes sociales, fiscales et environnementales que les nôtres, un prix minimum d’entrée doit être instauré. Cette proposition revient à étendre la notion de prix abusivement bas pour les producteurs et vendeurs étrangers.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Très bien !
Mme le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour présenter l’amendement n° 84.
M. Joël Labbé. M. Gay a déjà bien défendu ces dispositions. Je tiens simplement à apporter quelques précisions au sujet du prix de l’alimentation.
Monsieur le ministre, vous l’avez dit : l’alimentation a un coût, surtout si l’on veut développer les productions de qualité, en particulier les filières écologiques. Or, si nombre de nos concitoyens ont les moyens de revaloriser la part de leurs revenus consacrée à leur alimentation – ils le font d’ailleurs de plus en plus –, ce n’est malheureusement pas le cas de tous : la crise de la covid a mis en lumière et aggravé la problématique de la précarité alimentaire dans notre pays.
Cela étant, de nombreuses politiques publiques peuvent nous permettre d’assumer ces coûts sans créer une alimentation à deux vitesses, fondée sur l’importation de produits alimentaires à vil prix pour nourrir les plus démunis.
En particulier, les élus de notre groupe et d’autres groupes politiques souhaitent en savoir plus sur l’articulation entre le chèque alimentaire durable, la rémunération des agriculteurs et la relocalisation de l’alimentation, ainsi que sur le calendrier de mise en œuvre de ce dispositif.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure. On ne peut pas décréter a priori que le prix payé à un producteur étranger est abusivement bas au regard des indicateurs de coûts de production français.
En effet, le prix abusivement bas se mesure au regard de l’environnement concurrentiel du producteur, c’est-à-dire des prix des autres producteurs du pays étranger. On l’estime également au regard des conditions de production du producteur lui-même. Or, nous le savons bien – nous ne le savons même que trop –, un producteur espagnol, par exemple, n’a pas les mêmes conditions de production qu’un producteur français.
J’émets donc un avis défavorable sur ces amendements identiques.
Néanmoins, nous examinerons bientôt des amendements ayant pour objet le « rémunérascore », qui permet de répondre à ces préoccupations bien légitimes. Ce dispositif doit notamment permettre de prendre en compte l’impact des importations de produits alimentaires sur la rémunération des agriculteurs français : il s’agit là d’un début de réponse.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Julien Denormandie, ministre. J’émets, moi aussi, un avis défavorable.
Messieurs les sénateurs, par ces amendements, vous souhaitez lutter contre le dumping social et environnemental.
M. Fabien Gay. Oui !
M. Julien Denormandie, ministre. Or la fixation du prix ne permet objectivement pas d’agir en ce sens.
M. Fabien Gay. Alors, comment faire ?
M. Julien Denormandie, ministre. Je crois que tout le monde en est conscient.
En revanche, pour lutter contre le dumping social, nous avons obtenu une avancée au titre de la nouvelle politique agricole commune (PAC), qui entrera en application dès le début de l’année 2023 : aucun agriculteur en Europe ne pourra bénéficier du soutien de la PAC dès lors qu’il ne respecte pas le socle du droit du travail européen, lequel suppose par exemple la conclusion de contrats de travail. On le sait bien : aujourd’hui, le dumping social est largement le fait d’exploitations dont les salariés n’ont pas de contrat de travail.
J’insiste sur ce point, d’autant qu’à l’origine très peu de pays défendaient cette ligne et que la France a été parmi les États les plus influents en la matière. À titre personnel, j’y ai consacré énormément de temps. Nous nous sommes battus pour que la nouvelle PAC soit non seulement économique et environnementale, mais aussi sociale.
De surcroît, pour lutter contre le dumping environnemental, nous disposons de règlements que nous allons revoir au premier semestre de l’année prochaine, lesquels nous permettent de détecter, dans les produits que nous importons, l’utilisation de produits non autorisés chez nous. Je pense, par exemple, au diméthoate pour la cerise turque – peut-être avez-vous entendu parler de ce sujet.
À mon sens, il faut aller encore plus loin : ce qu’il faut revoir, ce sont non les accords de libre-échange, mais les règles internationales elles-mêmes. À l’heure actuelle, si l’on n’arrive pas à déterminer que tel produit importé a un impact sur la santé de nos consommateurs ou sur notre environnement, sur le territoire européen, on n’est pas en mesure de l’interdire.
À ce titre, nous allons devoir mener un travail de grande ampleur avec l’OMC. Certains puristes du droit affirment que l’on ne dispose pas de la base juridique pour agir, pour la simple et bonne raison que, souvent, ils ne veulent pas que l’on fasse bouger les choses. Pour ma part, je suis persuadé que l’on peut avancer : s’il faut modifier la base juridique de l’OMC, faisons-le.
Il est là, le gros trou dans la raquette, pour ce qui concerne la distorsion de concurrence environnementale. C’est précisément un combat que je mènerai dès le 1er janvier prochain à l’échelle européenne.
Mme le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 59 rectifié et 84.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme le président. L’amendement n° 27, présenté par MM. Montaugé et Kanner, Mmes Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy, Tissot, Antiste, Cozic, Devinaz, Durain, Fichet, Gillé, Jacquin et Kerrouche, Mmes Lubin, Monier et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai d’un an après l’entrée en vigueur des articles 1er et 2 de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l’adéquation des dispositifs qu’ils mettent en œuvre avec les spécificités du modèle coopératif agricole. Il propose, le cas échéant, des pistes de réflexion permettant de mieux prendre en compte ces spécificités dans la législation nationale.
La parole est à M. Franck Montaugé.
M. Franck Montaugé. On sait la place considérable qu’occupent les coopératives dans l’agriculture française : les volumes de production en témoignent.
Or certains responsables de la coopération agricole nous le disent avec force arguments : qu’il s’agisse de la formation des prix ou du retour des revenus vers les adhérents coopérateurs, les spécificités de la coopération agricole ne sont pas prises en compte par les articles 1er et 2 de ce texte, ou, du moins, ne le sont qu’insuffisamment.
L’adhérent coopérateur entretient une relation particulière avec sa coopérative. Il est appelé à prendre des décisions d’ordre économique, notamment pour ce qui concerne le retour de valeur vers l’adhérent coopérateur. Cela étant, la coopérative a différentes activités, dont un certain nombre sont connexes à sa mission principale, à savoir la production agricole directe.
Cette proposition de loi est plutôt conçue pour des produits ne connaissant pas d’interférences au titre de l’activité économique. Ce n’est pas le cas des productions des coopératives : nous avons donc besoin d’explications.
Au sein du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, nous sommes très attachés aux valeurs de la coopération et nous ne voyons pas comment cette spécificité peut être prise en compte par ce texte dans sa rédaction actuelle. Notre seule ressource, c’est donc de demander au Gouvernement la remise d’un rapport un an après la mise en œuvre des articles 1er et 2.
Il s’agit de garantir la prise en compte de ces spécificités. J’y insiste, il ne faut pas négliger ce sujet. Les responsables du secteur nous le disent, et j’en suis également convaincu : il y a un hiatus entre les productions prises en compte par ce texte et les produits mis sur le marché par la coopération agricole.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure. Les auteurs de cet amendement réaffirment la spécificité du modèle coopératif et la nécessité de le préserver : leur préoccupation est également la nôtre.
Nous avons d’ailleurs déjà débattu de cette question et nous avons rappelé que l’article 1er ne s’applique pas aux coopératives. Ces dernières doivent simplement prévoir des dispositifs ayant des effets similaires pour l’agriculteur, en lui assurant une forme de prévisibilité des prix payés.
Cette règle n’est pas nouvelle : il s’agit là d’un régime qui s’applique depuis longtemps aux coopératives et qui a fait ses preuves.
Aussi, sur cet amendement, je m’en remets à la sagesse du Sénat.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 1er.
Article 1er bis
I. – (Non modifié) Dans la clause de prix des contrats de vente de produits agricoles mentionnés à l’article L. 631-24 du code rural et de la pêche maritime, les parties peuvent convenir de bornes minimales et maximales entre lesquelles les critères et les modalités de détermination ou de révision du prix, intégrant notamment un ou plusieurs indicateurs relatifs aux coûts pertinents de production en agriculture, produisent leurs effets.
II. – Un décret, de l’élaboration duquel les parties prenantes sont informées, définit, pour un ou plusieurs produits agricoles, les conditions d’une expérimentation de l’utilisation obligatoire d’un modèle de rédaction de la clause mentionnée au I.
Cette expérimentation, d’une durée maximale de cinq ans, vise à évaluer les effets de l’utilisation de la clause mentionnée au même I sur l’évolution du prix de vente des produits concernés et sur la concurrence.
II bis (nouveau). – Est passible de l’amende administrative prévue à l’article L. 631-25 du code rural et de la pêche maritime le fait, pour un producteur, une organisation de producteurs, une association d’organisations de producteurs ou un acheteur de produits agricoles de conclure un contrat écrit ou un accord-cadre écrit ne comportant pas la clause dont l’utilisation a été rendue obligatoire par le décret mentionné au II.
III. – (Non modifié) Six mois avant le terme de cette expérimentation, le Gouvernement remet au Parlement un rapport d’évaluation de l’expérimentation.
Mme le président. L’amendement n° 87, présenté par MM. Labbé, Salmon et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Les bornes minimales ne peuvent pas être inférieures au coût de production, qui peut être déterminé à l’appui des indicateurs de référence de coûts pertinents de production en agriculture tels que mentionnés au quinzième alinéa du III du même article L. 631-24.
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. L’expérimentation d’un tunnel de prix prévue par l’article 1er bis peut être intéressante. Toutefois, dans la rédaction actuelle, rien ne garantit que le prix payé aux producteurs dans ce cadre ne descende pas sous les coûts de production.
C’est pourquoi cet amendement vise à préciser que la borne minimale du tunnel de prix couvre les coûts de production afin de garantir un revenu minimal à l’agriculteur : on y revient. Il s’agit de renforcer l’expérimentation de ce dispositif en l’appuyant sur les indicateurs de coûts de production.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure. Il s’agit précisément d’une expérimentation, qui permettra de savoir s’il est utile ou non de préciser de manière normative des planchers ou des plafonds. Il ne nous semble pas opportun de rigidifier le système avant même qu’il n’ait vu le jour.
La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. Monsieur Labbé, l’amendement n° 87 est-il maintenu ?
M. Joël Labbé. Nous travaillons pour assurer une rémunération décente des agriculteurs : au sujet du tunnel de prix, il est utile de préciser que la base ne doit pas être inférieure aux coûts de production. Selon nous, il convient de border cette expérimentation.
Je maintiens donc cet amendement.
Mme le président. Je mets aux voix l’article 1er bis.
(L’article 1er bis est adopté.)
Article 1er ter
Le sixième alinéa de l’article L. 682-1 du code rural et de la pêche maritime est complété par une phrase ainsi rédigée : « L’observatoire publie, chaque trimestre, un support synthétique reprenant l’ensemble des indicateurs, rendus publics, relatifs aux coûts pertinents de production en agriculture mentionnés au quinzième alinéa du même III, à l’article L. 631-24-1 et au II de l’article L. 631-24-3. »
Mme le président. L’amendement n° 68 rectifié bis, présenté par MM. Panunzi, Houpert, Bonhomme, Tabarot, Hingray, Rapin et Laménie, Mmes Belrhiti et Deromedi et MM. Bouchet, Charon et Sido, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Le sixième alinéa de l’article L. 682-1 du code rural et de la pêche maritime est complété par deux phrases ainsi rédigées : « L’observatoire propose un support synthétique et périodique reprenant l’ensemble des indicateurs mentionnés à l’avant-dernier alinéa du III de l’article L. 631-24, à l’article L. 631-24-1 et au II de l’article L. 631-24-3. Pour une filière donnée, en l’absence d’indicateur proposé par l’organisation interprofessionnelle, l’observatoire publie dans ce support les indicateurs issus de son rapport annuel. »
La parole est à Mme Catherine Belrhiti.
Mme Catherine Belrhiti. Il est défendu.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure. Défavorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° 68 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme le président. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 29 est présenté par MM. Montaugé et Kanner, Mmes Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy, Tissot, Antiste, Cozic, Devinaz, Durain, Fichet, Gillé, Jacquin et Kerrouche, Mmes Lubin, Monier et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 144 est présenté par MM. Labbé, Salmon et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 1
Supprimer les mots :
, rendus publics, relatifs aux coûts pertinents de production en agriculture
La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy, pour présenter l’amendement n° 29.
M. Christian Redon-Sarrazy. Cet amendement vise à revenir sur les ajouts opérés en commission par Mme la rapporteure, lesquels ont pour effet de réduire le champ de publication des indicateurs par l’Observatoire de la formation des prix et des marges (OFPM) aux seuls indicateurs relatifs aux coûts pertinents de production en agriculture.
Cette nouvelle rédaction nous laisse dubitatifs, nous nous interrogeons même sur son véritable impact juridique. Nous sommes favorables à une transparence accrue pour lutter contre l’opacité qui règne aujourd’hui dans les relations commerciales agricoles. Or, dans la version actuelle du texte, la notion de coûts pertinents induit une interprétation de cette pertinence. Cette subjectivité – c’est bien de cela qu’il s’agit – pourrait aboutir à réduire encore davantage les indicateurs pouvant être rendus publics dans le rapport de l’OFPM.
Au vu de ces inquiétudes, il nous semble préférable d’en rester à la rédaction initiale de cet alinéa.
Mme le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour présenter l’amendement n° 144.
M. Joël Labbé. Cet article a pour objet de rendre les travaux de l’OFPM visibles et utilisables de manière opérationnelle, pour une organisation de producteurs comme pour un agriculteur, afin qu’ils s’en saisissent facilement pour l’établissement des clauses de prix dans tel ou tel contrat.
Limiter cette publication à certains indicateurs pertinents remet donc en cause l’efficacité de ces dispositions. C’est pourquoi nous proposons de revenir à la publication de l’ensemble des indicateurs.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure. En commission, nous avons réduit le champ des indicateurs dont l’OFPM doit faire une synthèse publique. Nous avons précisé que cette obligation ne vaut, bien entendu, que pour les indicateurs rendus publics, c’est-à-dire ceux dont l’observatoire a connaissance.
L’article 1er ter ne dispose pas que l’observatoire doit élaborer les indicateurs, mais précise qu’il doit les publier chaque trimestre et qu’il fait la synthèse de ceux qui existent.
D’autres organismes peuvent se charger des indicateurs de prix de marché ou des indicateurs pouvant être liés à d’autres paramètres, comme la qualité et la traçabilité. Gardons à l’esprit que l’OFPM est une petite structure : il serait hors de sa portée de publier chaque trimestre une synthèse de tous les indicateurs de référence en France, concernant toutes les filières.
Enfin, les autres indicateurs seront publics, conformément à l’article 1er : ils seront consultables par tout un chacun – il suffira de se rendre sur le site de l’interprofession concernée. Il ne s’agit en aucun cas de garder certains indicateurs secrets.
Pour ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur ces amendements identiques.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 29 et 144.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme le président. Je mets aux voix l’article 1er ter.
(L’article 1er ter est adopté.)
Article 2
I. – Le titre IV du livre IV du code de commerce est ainsi modifié :
1° Après l’article L. 441-1, il est inséré un article L. 441-1-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 441-1-1. – I. – Les conditions générales de vente :
« 1° Soit présentent la part agrégée des matières premières agricoles entrant dans la composition des denrées alimentaires, sous la forme d’un pourcentage du volume de ladite denrée et d’un pourcentage du tarif du fournisseur. Dans ce cas, elles présentent également, sous la même forme, la part agrégée des produits transformés entrant dans la composition des denrées alimentaires lorsqu’ils sont composés de plus de 50 % de matières premières agricoles.
« L’acheteur peut, à ses frais, demander au fournisseur de mandater un tiers indépendant pour attester l’exactitude des éléments figurant dans les conditions générales de vente. Dans ce cas, le fournisseur remet au tiers indépendant les pièces justifiant l’exactitude de ces éléments. La mission du tiers indépendant consiste exclusivement, sur la base d’un contrat conclu avec le fournisseur, à attester l’exactitude des informations transmises, notamment la détermination de la part agrégée des matières premières agricoles et produits transformés dans le tarif du fournisseur, et à transmettre cette attestation à l’acheteur ;
« 2° Soit prévoient, sous réserve qu’elles fassent état d’une évolution du tarif fournisseur d’une denrée alimentaire par rapport à l’année précédente, l’intervention d’un tiers indépendant chargé de certifier la part de cette évolution qui résulte de l’évolution du prix des matières premières agricoles ou des produits transformés mentionnés au 1°. Dans ce cas, le fournisseur lui transmet les pièces nécessaires à cette certification.
« Tout manquement au présent I est passible d’une amende administrative dans les conditions prévues au VII de l’article L. 443-8.
« II. – Le tiers indépendant est astreint au secret professionnel pour les faits, actes et renseignements dont il a pu avoir connaissance à raison de ses fonctions.
« Le recours à un tiers indépendant ne dispense pas le fournisseur de conserver un exemplaire des pièces justificatives afin de répondre, le cas échéant, aux demandes de l’administration.
« III. – Le prix de la matière première agricole est celui payé pour la livraison de produits agricoles, au sens des articles 148 et 168 du règlement (UE) n° 1308/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 portant organisation commune des marchés des produits agricoles et abrogeant les règlements (CEE) n° 922/72, (CEE) n° 234/79, (CE) n° 1037/2001 et (CE) n° 1234/2007 du Conseil, par un premier acheteur, par une organisation de producteurs avec transfert de propriété ou par une coopérative agricole.
« IV. – Les conditions générales de vente indiquent si un contrat de vente, en application de l’article L. 631-24 du code rural et de la pêche maritime, portant sur les matières premières agricoles entrant dans la composition de la denrée alimentaire, est déjà conclu.
« V. – Le présent article n’est applicable ni aux grossistes au sens du II de l’article L. 441-4, ni à certaines denrées alimentaires ou catégories de denrées dont la liste est définie par décret en raison des spécificités de leur filière de production.
« VI. – Un décret précise les modalités d’application du présent article et peut définir des conditions adaptées à la taille de l’entreprise, en particulier pour les très petites, petites et moyennes entreprises, sous réserve de tenir compte des volumes qu’elles traitent. » ;
2° Le chapitre III est complété par un article L. 443-8 ainsi rédigé :
« Art. L. 443-8. – I. – Pour les denrées alimentaires, une convention écrite conclue entre le fournisseur et son acheteur mentionne les obligations réciproques auxquelles se sont engagées les parties à l’issue de la négociation commerciale, dans le respect des articles L. 442-1 et L. 442-3. Cette convention est établie soit dans un document unique, soit dans un ensemble formé par un contrat-cadre et des contrats d’application.
« La convention mentionne chacune des obligations réciproques et leur prix unitaire, auxquelles se sont engagées les parties à l’issue de la négociation commerciale.
« Lorsqu’elle est conclue avec un distributeur, la convention est conclue dans les conditions prévues aux articles L. 441-3 et L. 441-4, sous réserve du présent article.
« II. – La négociation commerciale ne porte pas sur la part agrégée, dans le tarif du fournisseur, du prix des matières premières agricoles et des produits transformés mentionnés au premier alinéa du 1° du I de l’article L. 441-1-1. Lorsque les conditions générales de vente prévoient l’intervention d’un tiers indépendant en application du 2° du même article L. 441-1-1, la négociation commerciale ne porte pas sur la part de l’évolution tarifaire liée à l’évolution du prix des matières premières agricoles.
« Le contrat ne peut être légalement conclu en l’absence de la certification mentionnée au 2° du même article L. 441-1-1.
« III. – Lorsque le fournisseur fait figurer dans ses conditions générales de vente les éléments mentionnés au premier alinéa du 1° du I de l’article L. 441-1-1, la convention mentionne, aux fins de concourir à la détermination du prix convenu, la part agrégée du prix des matières premières agricoles et des produits transformés mentionnés au même 1°, telle qu’elle figure dans les conditions générales de vente. La convention précise les modalités de prise en compte de ce prix d’achat dans l’élaboration du prix convenu.
« III bis. – (Supprimé)
« III ter. – La convention comporte une clause de révision automatique des prix du contrat en fonction de la variation du coût de la matière première agricole entrant dans la composition de la denrée alimentaire. Les parties déterminent librement, selon la durée du cycle de production, la formule de révision et, en application du III de l’article L. 631-24-1 du code rural et de la pêche maritime, les indicateurs utilisés. Lorsque l’acquisition de la matière première agricole par le fournisseur fait l’objet d’un contrat écrit en application du I du même article L. 631-24-1, la clause de révision inclue obligatoirement les indicateurs relatifs aux coûts de production en agriculture.
« IV. – La convention mentionnée au I du présent article est conclue pour une durée d’un an, de deux ans ou de trois ans. La convention est conclue au plus tard le 1er mars et le fournisseur communique ses conditions générales de vente à l’acheteur au plus tard trois mois avant cette date ou, pour les produits soumis à un cycle de commercialisation particulier, deux mois avant le point de départ de la période de commercialisation.
« Le distributeur dispose d’un délai d’un mois à compter de la réception des conditions générales de vente pour soit motiver explicitement et de manière détaillée, par écrit, le refus de ces dernières ou, le cas échéant, les dispositions des conditions générales de vente qu’il souhaite soumettre à la négociation, soit notifier leur acceptation.
« V. – Sans préjudice des articles L. 442-1 à L. 442-3, tout avenant à la convention mentionnée au I du présent article fait l’objet d’un écrit, qui mentionne l’élément nouveau le justifiant.
« VI. – Le présent article n’est applicable ni aux contrats de vente de produits agricoles mentionnés à l’article L. 631-24 du code rural et de la pêche maritime, ni aux grossistes au sens du II de l’article L. 441-4 du présent code.
« VI bis. – Le présent article n’est pas applicable à certains produits alimentaires ou catégories de produits dont la liste est définie par décret, en raison des spécificités de leur filière de production.
« VII. – Tout manquement au présent article est passible d’une amende administrative dont le montant ne peut excéder 75 000 € pour une personne physique et 375 000 € pour une personne morale. Le maximum de l’amende encourue est doublé en cas de réitération du manquement dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle la première décision de sanction est devenue définitive. » ;
2° bis Après le mot : « pour », la fin de la seconde phrase du VI de l’article L. 441-4 est ainsi rédigée : « soit motiver explicitement et de manière détaillée, par écrit, le refus de ces dernières ou, le cas échéant, les dispositions des conditions générales de vente qu’il souhaite soumettre à la négociation, soit notifier leur acceptation. » ;
3° Après le mot : « écrits », la fin du dernier alinéa du I de l’article L. 443-2 est ainsi rédigée : « est obligatoire en application de l’article L. 631-24 du code rural et de la pêche maritime. »
II. – Le tableau constituant le second alinéa du 4° du I de l’article L. 950-1 du code de commerce, dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2021-859 du 30 juin 2021 relative aux pratiques commerciales déloyales dans les relations interentreprises au sein de la chaîne d’approvisionnement agricole et alimentaire, est ainsi modifié :
1° La vingt-deuxième ligne est ainsi rédigée :
« |
Article L. 440-1 |
la loi n° … du … visant à protéger la rémunération des agriculteurs |
» ; |
2° La vingt-troisième ligne est remplacée par trois lignes ainsi rédigées :
« |
Article L. 441-1 |
l’ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019 |
|
Article L. 441-1-1 |
la loi n° … du … visant à protéger la rémunération des agriculteurs |
||
Article L. 441-2 |
l’ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019 |
» ; |
3° La vingt-cinquième ligne est ainsi rédigée :
« |
Article L. 441-4 |
la loi n° … du … visant à protéger la rémunération des agriculteurs |
» ; |
4° La trente et unième ligne est ainsi rédigée :
« |
Article L. 442-1 |
la loi n° … du … visant à protéger la rémunération des agriculteurs |
» ; |
5° La trente-sixième ligne est remplacée par trois lignes ainsi rédigées :
« |
Article L. 443-1 |
l’ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019 |
|
Article L. 443-2 |
la loi n° … du … visant à protéger la rémunération des agriculteurs |
||
Article L. 443-3 |
l’ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019 |
» ; |
6° Après la même trente-sixième ligne, est insérée une ligne ainsi rédigée :
« |
Article L. 443-8 |
la loi n° … du … visant à protéger la rémunération des agriculteurs |
». |