Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Griset, ministre délégué. L’identification des pratiques et des initiatives en faveur du bien-être animal est déjà un travail entrepris par le Gouvernement.

Le ministère de l’agriculture et de l’alimentation a demandé au Centre national de référence pour le bien-être animal de dresser un état des lieux des pratiques douloureuses en élevage, en vue de travailler sur des solutions de rechange.

Par ailleurs, la loi Égalim comporte plusieurs mesures visant à lutter contre la maltraitance animale, comme l’extension du délit de maltraitance animale aux établissements d’abattage et de transport d’animaux vivants, ou encore le doublement des peines.

Enfin, rappelons que le Gouvernement a choisi de mobiliser 100 millions d’euros du plan de relance en faveur du bien-être animal.

Votre demande paraît donc satisfaite, monsieur le sénateur ; je vous invite donc à retirer votre amendement, faute de quoi l’avis du Gouvernement serait défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.

M. Joël Labbé. On avait compris avant même le début de ce débat que le texte serait rejeté.

Il n’en reste pas moins que cet amendement du groupe socialiste, présenté par Franck Montaugé, a tout à fait sa raison d’être. On nous objecte que le Gouvernement mène déjà de telles études, mais si le Parlement réclame un tel rapport, c’est bien parce qu’il s’agit d’un vrai sujet et parce que ce document serait dans l’intérêt de tout le monde, y compris des éleveurs.

Vous invoquez la cohérence, madame la rapporteure, et votre opposition à notre proposition de loi dans son ensemble, mais s’il ne restait que cela de ce texte, ce serait autant qui serait inscrit dans la loi. Ce n’est pas un caillou dans la chaussure du Gouvernement, mais un véritable sujet, sur lequel il faut travailler.

Il s’agit pour le Parlement de demander un engagement du Gouvernement ; nous serions là pleinement dans notre rôle.

Mme la présidente. La parole est à M. Arnaud Bazin, pour explication de vote.

M. Arnaud Bazin. Puisqu’il est question de rapport, je vous signale, monsieur le ministre, que l’article 69 de la loi Égalim, entrée en vigueur le 2 novembre 2018, prévoyait la remise au Parlement, sous dix-huit mois, d’un rapport sur la capacité de la spectrométrie, afin d’évaluer la pertinence de cette technologie pour éviter le broyage des poussins et canetons, ainsi que sur les conditions de transport des animaux, deux questions qui sont abordées dans la présente proposition de loi.

À ma connaissance, aujourd’hui, ce rapport n’a pas été remis au Parlement.

Demander des rapports est donc sûrement très intéressant, pour certains d’entre eux du moins, mais encore faudrait-il qu’ils soient remis au Parlement dans des délais décents !

Mme la présidente. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.

M. Fabien Gay. Ici, on est au Parlement : j’entends bien ce que dit notre collègue Laurent Duplomb, mais je ne crois pas qu’il y ait besoin d’être agriculteur ou éleveur pour parler d’agriculture.

Mme Frédérique Puissat. Ce n’est pas ce qu’il a dit !

M. Fabien Gay. Je l’espère, du moins, car il y aurait sinon bien des questions que le Parlement aurait du mal à traiter, personne n’ayant d’expérience en la matière…

Ainsi, le groupe communiste a un avis tranché sur l’impôt de solidarité sur la fortune – nous sommes plutôt favorables à son rétablissement –, alors qu’aucun d’entre nous ne l’a jamais payé ! (Rires et applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST.)

Mme Frédérique Puissat. Mais M. Mélenchon si !

M. Fabien Gay. Monsieur le ministre, on sait bien que cette demande de rapport est un amendement d’appel. Ce que nous vous demandons, c’est un travail en commun.

M. Bazin a raison : la loi Égalim, dont un chapitre entier était consacré à cette question du bien-être animal, contient déjà un certain nombre de mesures en la matière – d’autres ont été rejetées –, mais on voit bien que leur application ne va pas assez vite, notamment la remise du rapport prévu à l’article 69.

Nombre d’initiatives parlementaires ont été prises, beaucoup de propositions de loi ont été déposées, à l’Assemblée nationale comme ici, qui émanent de nombreux groupes. On voit bien qu’il s’agit d’une question de société ; on a bien ressenti dans les diverses interventions de la discussion générale, dans toute la diversité de notre assemblée, que chacun a envie de débattre de ces questions et de pousser ce sujet.

Enfin, monsieur le ministre, je tiens à vous dire qu’il n’y a pas eu de polémique ici sur la proposition de loi portée par le groupe La République En Marche à l’Assemblée nationale. La seule polémique qui a eu lieu est la vôtre, entre le Gouvernement et sa majorité.

En effet, voilà que la majorité affirme partout, notamment dans un journal qui paraît le dimanche matin – non pas l’Humanité Dimanche, mais Le Journal du dimanche –, que ce serait le Sénat qui bloquerait ! Le Sénat ne bloque nullement ce texte : je rappelle que si le groupe RDPI veut faire inscrire cette proposition de loi à l’ordre du jour, il dispose d’un temps réservé pour ce faire ; si le Gouvernement veut la reprendre, il peut tout à fait aussi en demander l’examen.

C’est à vous qu’il appartient d’aller au bout de ce débat et de soumettre à l’examen du Sénat cette proposition de loi !

Pour notre part – je m’exprime là au nom de mon groupe et, au-delà, de toute la gauche –, nous serons ravis d’en débattre et de proposer certains amendements, y compris des propositions que nous avions déjà portées lors de l’examen de la loi Égalim.

Mme la présidente. La parole est à M. Franck Montaugé, pour explication de vote.

M. Franck Montaugé. J’ai bien entendu l’invitation de M. le ministre à retirer mon amendement et je vais y répondre : non, je ne le retirerai pas !

Je crois en effet que tout le monde, sur nos travées, est d’accord avec son objet. Je regrette la position un peu dogmatique, si vous me passez l’expression, de nos collègues de droite, qui sont d’accord, mais qui refusent de l’adopter parce qu’ils sont contre le texte dans son ensemble. Selon moi, il ne faut pas forcément lier les deux.

Quant à votre réponse, monsieur le ministre, je la trouve surréaliste. J’ai peut-être raté des épisodes ou des documents : je vous invite donc à me faire passer, s’ils existent, les éléments que vous évoquez et que nous appelons de nos vœux dans cet amendement. À vrai dire, je suis à peu près sûr qu’ils n’existent pas ou que, s’ils existent, c’est de manière extrêmement partielle et minime par rapport à l’ambition de cet amendement, au travers duquel nous vous demandons un état des lieux et des orientations.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.

M. Daniel Salmon. Ce rapport a tout lieu d’être ! Alors que se pose la question du bien-être animal, cette notion n’a aucune définition bien établie : le rapport devrait aider à l’éclaircir.

Bien entendu, les agriculteurs ne maltraitent pas leurs animaux par plaisir ; assurer le bien-être de leur élevage est pour eux fondamental. Mais un agriculteur a beau avoir beaucoup d’amour pour ses animaux, s’il le partage entre 80 000 volailles, cela fait en fin de compte peu d’amour pour chacune d’elles…

Où se trouve le bien-être des poulets qui sont élevés pendant six semaines seulement, parce qu’a été divisée par trois leur durée de vie ?

Nous sommes tous d’accord pour dire que notre élevage industriel doit évoluer. Et si nous continuons à nous comparer sans cesse au moins-disant, nous serons toujours débordés. Il faut protéger nos élevages ! Nous avons les moyens de lutter contre la concurrence déloyale ; il ne reste plus qu’à les mettre en œuvre. Ce rapport est indispensable. Il sera la première étape pour définir plus précisément la notion de bien-être.

Mme la présidente. La parole est à Mme la présidente de la commission.

Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Je voudrais faire un petit point de méthode, pour rétablir un peu de cohérence.

Nous pouvons nous faire plaisir en décidant de voter ce rapport, qui sera ou non remis par le Gouvernement. Mais, d’ici à une demi-heure, le texte ne sera pas adopté…

Mme Esther Benbassa. Pourquoi ne le serait-il pas ?

Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Par égard pour vous, madame Benbassa, nous n’avons pas déposé d’amendement visant à la suppression des articles 1er, 2 et 3.

A priori, la loi ne sera pas votée à l’issue de la séance : ce débat sera donc inutile.

Permettez à Mme la rapporteure, ainsi qu’à moi-même, de jouer la cohérence et d’émettre – avec regret, parce que nous sommes d’accord avec vous ! – un avis défavorable. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.

M. Ronan Dantec. En termes de méthode, même si nous votons contre chacun des articles, il nous restera à la fin à voter sur les articles additionnels qui auront été adoptés…

Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. C’est vrai !

Mme la présidente. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.

M. Guillaume Gontard. Si je vous comprends bien, madame la présidente de la commission, nous pourrions arrêtez nos débats tout de suite ! (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Exactement !

M. Guillaume Gontard. Et nous pourrions le faire sur de nombreux textes déposés dans nos niches parlementaires ! Je perçois bien que le sujet ne vous intéresse pas. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Arnaud Bazin. Au contraire !

M. Guillaume Gontard. J’ai pourtant retenu de nos débats que le sujet était d’importance et que nous devions en discuter. À la fin, il sera procédé à un vote, qui sera peut-être négatif, mais peu importe ! Le simple fait d’en discuter, au travers de ces quelques amendements, satisfait le respect minimum que nous devons au travail parlementaire.

Si cet amendement devait être le seul à être adopté, soit ! Mais nous dire maintenant de terminer la discussion constitue, à tout le moins, un manque de respect pour le travail qui a été réalisé. (Mme Esther Benbassa applaudit.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 1.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel avant l'article 1er - Amendement n° 1
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Article 2

Article 1er

Après le premier alinéa de l’article L. 214-11 du code rural et de la pêche maritime, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« La mise en production de tout bâtiment nouveau ou de toute extension d’un bâtiment d’élevage d’animaux ne respectant pas les modalités d’application fixées par le décret mentionné au dernier alinéa du présent article, limitant les densités de peuplement et permettant l’accès à un espace de plein air des animaux adapté à leurs besoins, est interdite à compter du 1er janvier 2026.

« L’exploitation de tout élevage dans un système de production n’offrant pas aux animaux de rente un accès à un espace de plein air adapté à leurs besoins et ne respectant pas une limitation des densités de peuplement est interdite à compter du 1er janvier 2040. »

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 1er.

(Larticle 1er nest pas adopté.)

TITRE II

Mettre fin aux pratiques génératrices de souffrances animales

Article 1er
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Article 3

Article 2

L’article L. 214-13 du code rural et de la pêche maritime est ainsi rétabli :

« Art. L. 214-13. – Pour les transports d’animaux se déroulant entièrement sur le territoire français, la durée maximale de voyage des animaux domestiques est fixée à huit heures pour les espèces bovine, ovine, caprine, porcine et les équidés et à quatre heures pour les volailles et les lapins.

« Toutefois, une autorisation préalable peut être délivrée pour un voyage d’une durée supérieure, dans une limite maximale de douze heures de transport, par un vétérinaire qui atteste de la capacité des animaux à réaliser ce voyage sans risque d’être blessés ou de subir des souffrances inutiles. »

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 2.

(Larticle 2 nest pas adopté.)

Article 2
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Article additionnel avant l'article 4 - Amendement n° 3 rectifié bis

Article 3

Après l’article L. 214-10 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un article L. 214-10-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 214-10-1. – L’élimination, sauf en cas d’épizootie, des poussins mâles et des canetons femelles vivants est interdite à compter du 1er janvier 2022. »

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 3.

(Larticle 3 nest pas adopté.)

TITRE III

Accompagner les acteurs dans la transition

Article 3
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Article 4 (début)

Article additionnel avant l’article 4

Mme la présidente. L’amendement n° 3 rectifié bis, présenté par MM. Cabanel, Artano et Bilhac, Mme M. Carrère, M. Corbisez, Mme N. Delattre, MM. Fialaire, Gold et Guérini, Mme Guillotin et MM. Guiol et Requier, est ainsi libellé :

Avant l’article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

En cas de confiscation du cheptel d’un agriculteur à l’issue d’un contrôle par les services vétérinaires de l’État, l’accompagnement social et psychologique relevant de la cellule de prévention pluridisciplinaire de la mutualité sociale agricole est automatiquement déclenché au bénéfice de l’agriculteur concerné, dans des conditions définies par décret.

La parole est à M. Henri Cabanel.

M. Henri Cabanel. Le bien-être de l’agriculteur, tout comme celui de l’animal, constitue une cause légitime.

Cet amendement a pour objet que, lorsqu’un contrôle de l’administration ayant pour but de confisquer le cheptel d’un éleveur est effectué, une aide psychologique soit automatiquement déclenchée à l’adresse de l’éleveur, grâce aux outils aujourd’hui proposés par la MSA.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Marie-Christine Chauvin, rapporteur. Il s’agit d’un sujet très important, que Mme Ferrat et vous-même connaissez très bien, pour l’avoir étudié dans votre rapport sur la détresse des agriculteurs.

L’amendement a pour objet que, concrètement, la MSA active un accompagnement automatique en cas de confiscation du cheptel d’un agriculteur, événement particulièrement traumatisant. Cette idée mérite d’être étudiée par le Gouvernement, comme le rapport le préconisait déjà, notamment via son plan d’action et la convention d’objectifs et de gestion avec la MSA.

Cela peut être mis en œuvre dès demain, sans attendre qu’une loi soit votée. Je souhaiterais donc entendre l’avis du Gouvernement sur la question. Toutefois, par construction, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement, compte tenu de son appel à rejeter le texte.

J’y insiste, il me semble que cette mesure peut être instituée très rapidement, sans recourir à la loi : nous comptons sur vous, monsieur le ministre, pour que les choses puissent avancer avec la MSA.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Griset, ministre délégué. L’amendement tend à souligner la nécessité d’accompagner socialement et psychologiquement les agriculteurs qui font l’objet d’une confiscation d’un cheptel à la suite d’un contrôle vétérinaire.

Le Gouvernement partage la nécessité de sensibiliser les corps de contrôle à ces risques, en leur permettant, lorsqu’ils décident et exécutent une telle décision de confiscation, de délivrer une information complète aux agriculteurs concernés sur les aides psychologiques et économiques dont ils peuvent bénéficier.

Le plan d’action devrait ainsi prévoir l’identification de référents départementaux économiques et sociaux, permettant de mieux coordonner les actions sur les territoires. Par ailleurs, ces questions, qui relèvent davantage de l’organisation des aides et de l’accompagnement des cellules pluridisciplinaires de la MSA, ne nécessitent pas de légiférer sur le sujet, ni de prendre un texte réglementaire.

Pour ces raisons, et parce qu’il est pleinement mobilisé à travers ce plan d’action pour mener des actions spécifiquement en faveur des agriculteurs, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 3 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel avant l'article 4 - Amendement n° 3 rectifié bis
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Article 4 (fin)

Article 4

I. – Il est créé un fonds de soutien à la transition pour le bien-être animal destiné aux exploitants agricoles et aux acteurs de l’abattage, notamment ceux dont l’activité est sensiblement affectée par la présente loi, afin d’accompagner financièrement la transformation de leur activité. Ces aides visent prioritairement à soutenir et développer l’abattage de proximité et notamment l’abattage mobile ainsi que les dispositifs permettant la transition vers des systèmes d’élevage garantissant l’accès à un espace de plein air des animaux dans les conditions établies par la présente loi.

Un décret, pris conjointement par les ministres chargés de l’agriculture et de l’environnement, définit au plus tard six mois après la promulgation de la présente loi les modalités de mise en œuvre de ces dispositifs. Ce décret définit notamment les conditions d’éligibilité aux aides qui en sont issues et les modalités de gestion du fonds.

II. – Les éventuelles conséquences financières résultant pour l’État de la présente loi sont compensées, à due concurrence, par la création de taxes additionnelles aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Mme la présidente. L’amendement n° 2, présenté par MM. Montaugé et Kanner, Mmes Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 1

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Ces aides visent également à mettre en œuvre des mesures de soutien et d’accompagnement psychologiques pour les agriculteurs et les acteurs de l’abattage afin de leur apporter une écoute et leur proposer des mesures améliorant leur bien-être au travail.

La parole est à M. Franck Montaugé.

M. Franck Montaugé. En réalité, cet amendement du groupe SER tend à s’inscrire dans les travaux beaucoup plus larges menés par Henri Cabanel et Françoise Férat, que je salue.

Ces travaux font désormais référence, et c’est une excellente chose. Pour ma part, j’ajouterais la situation particulière des opérateurs d’abattoirs, qui, indépendamment de la question du bien-être animal, travaillent dans des conditions extrêmement difficiles. Ils sont en permanence confrontés à la mort ; la donner fait partie de leur métier.

Je ne vais pas citer de nouveau des références littéraires et philosophiques, mais certains considèrent que les abattoirs ont quelque chose à voir avec l’univers concentrationnaire, et je pèse mes mots ; des penseurs de très haut niveau l’ont souligné. Comme la plupart d’entre nous, mes chers collègues, j’ai visité des abattoirs et je me suis rendu compte de ce qu’ils représentaient.

Je souhaiterais donc qu’une aide ou des accompagnements particuliers soient mis en œuvre au bénéfice de ces opérateurs, en même temps que pour les éleveurs qui, eux aussi, sont confrontés à des conditions particulièrement difficiles.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Marie-Christine Chauvin, rapporteur. Par souci de cohérence avec les autres amendements, et compte tenu du sort qu’elle suggère de réserver au présent texte, la commission a émis un avis défavorable.

Comme l’explicite l’exposé des motifs, il s’agit d’un amendement d’appel, qui établit un lien très juste entre bien-être animal, bien-être des éleveurs et bien-être des professionnels des abattoirs. Les mesures suggérées peuvent être mises en place dès aujourd’hui par le Gouvernement ; le ministre nous en parlera peut-être.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Griset, ministre délégué. Cette proposition rejoint pleinement la préoccupation du Gouvernement : la prévention du mal-être et du risque suicidaire est un enjeu majeur des politiques publiques de santé au travail.

S’appuyant, d’une part, sur le rapport du député Olivier Damaisin, et, d’autre part, sur les 63 recommandations formulées par la commission des affaires économiques du Sénat, dont les rapports étaient les sénateurs Ferrat et Cabanel, un plan d’action portant sur les moyens mis en œuvre par l’État en matière de prévention et d’accompagnement des agriculteurs en situation de détresse sera présenté par le ministère de l’agriculture dans les prochaines semaines.

Le plan de modernisation des abattoirs constitue également une formidable chance pour que les projets d’investissements améliorent réellement les conditions de travail et la protection animale, ces deux ambitions étant intimement liées.

Même s’il partage vos préoccupations, le Gouvernement, qui ne souhaite pas voir adopté l’article 4, ne peut donc qu’émettre un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 2.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je vais mettre aux voix l’article 4.

Mes chers collègues, je vous rappelle que, si cet article n’était pas adopté, il n’y aurait plus lieu de voter sur l’ensemble de la proposition de loi, dans la mesure où les quatre articles qui la composent auraient été rejetés ; il n’y aurait donc pas d’explications de vote sur l’ensemble du texte.

La parole est à M. Yves Bouloux, pour explication de vote sur l’article.

M. Yves Bouloux. Le groupe Les Républicains suivra l’avis de Mme la rapporteure, et cela pour plusieurs raisons.

Les éleveurs français sont les premiers à être soucieux du bien-être de leurs animaux, et les méfaits de certains ne doivent pas jeter l’opprobre sur toute une profession.

Ces dernières années, toutes les filières ont engagé des actions en faveur de l’amélioration des conditions d’élevage. Par exemple, l’Interprofession nationale porcine française, l’Inaporc, a mis en place le socle de base du porc français, qui intègre des critères de bien-être animal minimum – lumière, matériaux manipulables, abreuvement, etc.

Ces évolutions sont également accompagnées par les consommateurs. C’est particulièrement visible pour les œufs : une baisse significative des capacités de production des élevages en cage a été constatée au profit des autres types d’élevages, lesquels représentent désormais 53 % des poules pondeuses, contre 19 % en 2008.

Toutes ces avancées se sont faites sans recourir à la loi. Néanmoins, comme l’a expliqué Mme la rapporteure, la meilleure échelle pour prendre des décisions destinées à encadrer certaines pratiques d’élevage, de transport et d’abattage, comme le propose le texte, c’est l’Union européenne. Celle-ci y travaille déjà !

Enfin, si, par certains aspects, nous partageons la philosophie de ce texte, nous sommes aussi soucieux du bien-être des agriculteurs, qui sont actuellement soumis à d’importantes difficultés économiques, ainsi qu’à un agribashing permanent et insupportable.

Notre groupe, en grande majorité, votera contre la proposition de loi ; certains d’entre nous s’abstiendront.

Mme la présidente. La parole est à Mme Esther Benbassa, pour explication de vote sur l’article.

Mme Esther Benbassa. Je constate, avec regret, que notre assemblée est très loin des demandes de la population, des jeunes et des consommateurs. En effet, l’avenir ne peut qu’être favorable à l’adoption de ces quatre articles.

Ce texte est certainement pionnier, mais, par rapport à l’Allemagne ou à d’autres pays, nous sommes en retard. Notre initiative n’a pas de quoi nous enorgueillir !

La présente proposition de loi est le fruit d’un travail d’équipe. Je remercie mes collègues Joël Labbé et Daniel Salmon : nous avons, ensemble, travaillé avec les associations, les syndicats d’agriculteurs et toutes les autres personnes s’intéressant à ces sujets.

Notre travail est à l’image de ce qui se passe dans la société. Comment pouvons-nous, aujourd’hui, être si loin de la réalité et de ses exigences ? Il semble qu’un certain conservatisme nous empêche de penser ces questions, pourtant inéluctables dans l’avenir.

Avez-vous eu peur du débat, en refusant ce texte ? La question mérite d’être posée. Si nous siégeons dans cette assemblée, c’est non pas pour rejeter les textes qui nous sont soumis, mais pour discuter, avancer et préparer l’avenir.

Le débat d’aujourd’hui est loin de ce qui devrait nous caractériser : une assemblée doit ouvrir la voie à l’avenir ! Or nous demeurons freinés par un certain conservatisme.

Il ne s’agit pas ici de défendre les agriculteurs, car nous avons conçu ce texte dans le trio « bien-être animal, bien-être des agriculteurs et bien-être des consommateurs ». Nous sommes donc bien tristes de constater que, une fois de plus, le Sénat est en retard.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote sur l’article.

M. Daniel Salmon. La discussion de ce texte me laisse un grand regret.

Mme Frédérique Puissat. Cela va passer… (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Daniel Salmon. Il s’agit d’une occasion manquée de faire évoluer l’élevage agro-industriel vers un système plus respectueux à la fois des agriculteurs et du bien-être animal.

Mes collègues et moi-même avons essayé d’écrire une loi équilibrée, nuancée, bien loin de ce que vous appelez l’agribashing. Nous ne versons nullement dans l’agribashing. C’est vous qui faites des amalgames et qui utilisez cet argument pour couper court au débat !

Avec la date de 2040, nous laissions pourtant du temps à la réalisation de nos propositions. Il me semble que, en dix-neuf ans, il est tout à fait possible de faire évoluer un modèle ! En refusant cette évolution, vous êtes en train, au lieu de sauver l’élevage, d’en condamner toute une partie. En effet, beaucoup d’éleveurs ne pourront pas se défendre face à de la viande de synthèse, fabriquée en laboratoire.

Mme Marie-Christine Chauvin, rapporteur. Ça, c’est un autre débat !

M. Daniel Salmon. Nous avons plusieurs fois parlé de la qualité de la viande. Mais quelle est donc la qualité des élevages industriels de poulets de six semaines, dont la viande « spaghetti » s’effiloche ?

Avec le moins-disant, on peut même faire pire que les États-Unis : élever une semaine de moins encore un poulet, dont les muscles ne fonctionneront pas et dont la viande n’aura aucune valeur gustative. Pis encore, nous pourrions élever des cellules de muscles hors-sol, en laboratoire !

Si nous n’évoluons pas, l’élevage en France mourra bientôt.

Mme la présidente. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote sur l’article.

M. Guillaume Gontard. Je suis très surpris que l’on nous accuse de faire de l’agribashing, d’être radicaux, de stigmatiser, de jeter l’opprobre ou de faire des amalgames. Je me demande, en définitive, si vous avez lu ce texte jusqu’au bout,…