Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État. Madame la sénatrice Fournier, la codification de la disposition relative à la régularisation des aménagements liés au Brexit dans le tunnel sous la Manche et l’élargissement de son champ d’application ont vocation à répondre à un cas particulier, exceptionnel.
L’article 24 introduit une dérogation aux dispositions du code de l’urbanisme issues de la loi Littoral, dont bénéficient déjà les installations nécessaires au fonctionnement des services publics portuaires. Nous avons dû permettre à Eurotunnel de déposer un permis de construire de régularisation des infrastructures de contrôles frontaliers existantes. Il fallait régulariser des installations déjà construites, dans le contexte que l’on connaît, mais surtout pas étendre de manière pérenne cette dérogation, qui n’a qu’un caractère ponctuel.
L’avis est défavorable sur les deux amendements : quel que soit le mode de codification, l’argumentaire demeure valable.
Mme le président. La parole est à Mme Catherine Fournier, pour explication de vote.
Mme Catherine Fournier. Monsieur le rapporteur, vous évoquez une atteinte forte à la loi Littoral. Or pourquoi l’autoriser pour les ports, mais pas pour Eurotunnel ? Le plus gros concurrent des ports, de Boulogne comme de Calais, c’est Eurotunnel ! Je ne vois pas pourquoi on distinguerait entre le port sec, comme on l’appelle sur notre territoire, et le port maritime. Je ne comprends pas cet argument.
Vous justifiez votre avis négatif par la recherche d’un équilibre. Pour moi, l’équilibre repose sur le développement durable et, donc, sur trois piliers : le social, l’économique et l’environnement. Je ne vois pas en quoi cet amendement ne respecterait pas le droit de l’environnement.
Vous indiquez également que, contrairement aux ports et aux aéroports, Eurotunnel est une société privée. Je précise que c’est une concession de l’État, à l’origine pour cinquante ans et qui a été prolongée. Là encore, je ne comprends pas cet argument.
Madame la secrétaire d’État, vous dites qu’il s’agit d’« un cas exceptionnel ». Bien sûr ! Cela a été le plus gros chantier financier du siècle dernier. Soyons donc à la hauteur des ambitions de ce chantier, préservons l’activité économique qu’il a développée sur notre territoire et ne créons pas de discrimination entre le port maritime et le port sec !
Je maintiens donc ces deux amendements, et j’espère que le premier sera adopté.
Mme le président. La parole est à M. Jean-Pierre Corbisez, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Corbisez. Étant moi aussi sénateur du Pas-de-Calais, je ne comprends pas cette crainte d’une atteinte portée à la loi Littoral et cette limitation aux seuls aménagements rendus nécessaires par le Brexit. Je rappelle en outre que le lien transmanche n’est pas délocalisable !
Entre la pénétration des trains dans le tunnel pour passer sous la Manche et le bord de mer, il y a plus de deux kilomètres. Comment Eurotunnel risquerait-il de se rapprocher de la mer et mettrait-il à mal la loi Littoral ? De surcroît, dans ce secteur, entre le cap Gris-Nez et le cap Blanc-Nez, la plupart des terrains en bord de mer appartiennent au conseil départemental du Pas-de-Calais ou à Eden 62. Je ne vois pas comment une structure privée pourrait acheter des terres déjà protégées ou appartenant à une collectivité territoriale.
La société a déjà mis en place des structures pour renforcer la sûreté et la sécurité conséquemment au Brexit, anticipant le rôle qu’elle devra exercer à partir de 2022. Donner un avis positif au bénéfice d’une structure qui permet aujourd’hui d’aller en Angleterre par mauvais temps qu’est-ce que cela coûte ? Je vous rappelle que lorsque l’on vous dit « the sea is moderate », en général, vous devez garder un sac en papier devant le nez, alors qu’avec le lien transmanche on a tout de même les pieds au sec !
Je ne vois pas comment on pourrait attaquer le littoral alors que ce dernier est déjà protégé par le conseil départemental du Pas-de-Calais. Je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas valider les structures de sûreté qui ont déjà été anticipées. Je voterai donc les amendements de Mme Fournier.
Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° 21 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° 22 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme le président. Je mets aux voix l’article 24.
(L’article 24 est adopté.)
Article 24 bis (nouveau)
Sont ratifiées :
1° L’ordonnance n° 2020-1162 du 23 septembre 2020 relative aux conditions de travail des jeunes travailleurs de moins de dix-huit ans à bord des navires et à l’embarquement de personnes autres que gens de mer à des fins d’observation ou de mise en situation en milieu professionnel ;
2° L’ordonnance n° 2020-933 du 29 juillet 2020 relative aux conditions d’exercice d’activités maritimes accessoires et à l’adaptation des conditions d’exercice de certaines activités maritimes aux voyages à proximité du littoral ;
3° L’ordonnance n° 2020-599 du 20 mai 2020 portant mise en œuvre de la convention sur le travail dans la pêche et d’amendements à la convention du travail maritime ;
4° L’ordonnance n° 2021-77 du 27 janvier 2021 modifiant les dispositions du code des transports relatives aux services privés de recrutement et de placement des gens de mer ;
5° L’ordonnance n° 2021-266 du 10 mars 2021 portant application de la convention conclue à Nairobi sur l’enlèvement des épaves ;
6° L’ordonnance n° 2021-267 du 10 mars 2021 relative aux sanctions des infractions aux interdictions de rejets polluants des navires prévues par le Recueil sur la navigation polaire et aux sanctions de la méconnaissance des obligations de surveillance, de déclaration et de vérification des émissions de dioxyde de carbone du secteur du transport maritime prévues par le règlement (UE) 2015/757 du 29 avril 2015. – (Adopté.)
Chapitre II bis
Dispositions relatives à la prévention des risques
(Division et intitulé nouveaux)
Article 25
Le code de l’environnement est ainsi modifié :
1° Au II de l’article L. 521-1, la première occurrence du mot : « et » est remplacée par le signe : « , » et, après la référence : « (UE) n° 517/2014 », sont insérés les mots : « et (UE) n° 852/2017 » ;
2° Au premier alinéa du 1° du II de l’article L. 521-6, la première occurrence du mot : « et » est remplacée par le signe : « , » et, après la référence : « (CE) n° 1272/2008 », sont insérés les mots : « et (UE) n° 852/2017 » ;
3° Le II de l’article L. 521-12 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« – règlement (UE) n° 852/2017 du Parlement européen et du Conseil du 17 mai 2017 relatif au mercure et abrogeant le règlement (CE) n° 1102/2008. » ;
4° Au premier alinéa de l’article L. 521-17, après la référence : « (CE) n° 1272/2008 », est insérée la référence : « et (UE) n° 852/2017 » ;
5° À la fin du 9° du I de l’article L. 521-21, la référence : « et (UE) n° 517/2014 » est remplacée par la référence : « , (UE) n° 517/2014 et (UE) n° 852/2017 » ;
6° À l’article L. 521-24, après la référence : « (CE) n° 1272/2008 », est insérée la référence : « et (UE) n° 852/2017 » ;
7° Le 14° de l’article L. 541-46 est ainsi rédigé :
« 14° Ne pas respecter les interdictions et prescriptions du règlement (UE) n° 852/2017 du Parlement européen et du Conseil du 17 mai 2017 relatif au mercure et abrogeant le règlement (CE) n° 1102/2008 ; ». – (Adopté.)
Article 26
Le code de l’environnement est ainsi modifié :
1° Au second alinéa de l’article L. 521-17, après le mot : « manquement, », sont insérés les mots : « à l’exception d’un manquement aux obligations relatives au respect des quotas alloués prévu à l’article 15 du règlement (UE) n° 517/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 précité » ;
2° Le 6° de l’article L. 521-18 est abrogé ;
3° Après le même article L. 521-18, il est inséré un article L. 521-18-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 521-18-1. – I. – Au plus tard six mois après la constatation d’un manquement aux obligations prévues à l’article 15 du règlement (UE) n° 517/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 relatif aux gaz à effet de serre fluorés et abrogeant le règlement (CE) n° 842/2006, l’autorité administrative compétente, après avoir invité la personne concernée à prendre connaissance du dossier et à présenter ses observations dans un délai n’excédant pas trois mois, peut ordonner au fabricant ou à l’importateur ayant dépassé le quota de mise sur le marché d’hydrofluorocarbures qui lui a été alloué conformément à l’article 16 du règlement (UE) n° 517/2014 du Parlement et du Conseil du 16 avril 2014 précité, le paiement d’une amende au plus égale au produit de la quantité équivalente en tonne équivalent dioxyde de carbone du dépassement de quota par un montant de 75 €. Cette amende est revalorisée corrélativement à la part carbone dans les tarifs des taxes intérieures de consommation des produits énergétiques inscrites au tableau B du 1 de l’article 265 du code des douanes.
« II. – Au plus tard six mois après la constatation d’un manquement aux obligations prévues à l’article 15 du règlement (UE) n° 517/2014 du Parlement et du Conseil du 16 avril 2014 précité, l’autorité administrative compétente, après avoir invité la personne concernée à prendre connaissance du dossier et à présenter ses observations dans un délai n’excédant pas trois mois, peut ordonner au fabricant ou à l’importateur d’un ou plusieurs équipements pré-chargés ayant dépassé l’autorisation de quota de mise sur le marché d’hydrofluorocarbures qui lui a été alloué conformément à l’article 18 du règlement (UE) n° 517/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 précité, le paiement d’une amende au plus égale au produit de la quantité équivalente en tonne équivalent dioxyde de carbone du dépassement de l’autorisation de quota par un montant de 75 €. Cette amende est revalorisée corrélativement à la part carbone dans les tarifs des taxes intérieures de consommation des produits énergétiques inscrites au tableau B du 1 de l’article 265 du code des douanes. » – (Adopté.)
Article 27
Le code de l’environnement est ainsi modifié :
1° Au II de l’article L. 521-1, au 1° du II de l’article L. 521-6, au premier alinéa de l’article L. 521-17, au 9° du I de l’article L. 521-21 et à l’article L. 521-24, la référence : « (CE) n° 850/2004 » est remplacée par la référence : « (UE) n° 1021/2019 » ;
2° À la fin du quatrième alinéa du II de l’article L. 521-12 et du 13° du I de l’article L. 541-46, la référence : « (CE) n° 850/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004, concernant les polluants organiques persistants et modifiant la directive 79/117/CEE » est remplacée par la référence : « (UE) n° 1021/2019 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 concernant les polluants organiques persistants ». – (Adopté.)
Chapitre III
Dispositions relatives aux minerais de conflit
Article 28
I. – Tout importateur d’étain, de tantale, de tungstène, de leurs minerais, ou d’or, qui dépasse les seuils fixés à l’annexe I au règlement (UE) n° 2017/821 du Parlement européen et du Conseil du 17 mai 2017 fixant des obligations liées au devoir de diligence à l’égard de la chaîne d’approvisionnement pour les importateurs de l’Union qui importent de l’étain, du tantale et du tungstène, leurs minerais et de l’or provenant de zones de conflit ou à haut risque est soumis aux obligations en matière de documentation, de systèmes de gestion, de gestion des risques, de vérifications par des tiers indépendants et de communication d’informations définies aux articles 3, 4, 5, 6 et 7 du règlement (UE) n° 2017/821 du Parlement européen et du Conseil du 17 mai 2017 précité.
En cas de manquement aux obligations mentionnées au premier alinéa du présent I, l’importateur peut faire l’objet des mesures prévues au IV du présent article, prononcées par l’autorité compétente mentionnée à l’article 10 du règlement (UE) n° 2017/821 du Parlement européen et du Conseil du 17 mai 2017 précité.
II. – Pour s’assurer du respect des obligations prévues au I, les agents chargés de réaliser les contrôles mentionnés à l’article 11 du règlement (UE) n° 2017/821 du Parlement européen et du Conseil du 17 mai 2017 précité peuvent :
1° Prendre connaissance de tout document relatif à ces obligations, sans que leur soit opposable le secret des affaires ;
2° Effectuer des inspections sur place dans les conditions et selon les garanties prévues aux articles L. 175-5 à L. 175-15 du code minier.
Ils sont astreints au secret professionnel conformément aux articles 226-13 et 226-14 du code pénal.
Un décret détermine les catégories d’agents compétents pour procéder à ces contrôles.
III. – Lorsqu’un agent habilité, dans les conditions prévues au II, constate un manquement à tout ou partie des obligations mentionnées au I, il adresse à l’autorité compétente un rapport et en remet une copie à l’importateur. Ce dernier peut, dans des conditions déterminées par voie réglementaire, faire part de ses observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, de ses observations orales à l’autorité compétente et demander que lui soit communiquée copie de son dossier. L’importateur peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix.
IV. – En cas de manquement à tout ou partie des obligations mentionnées au I, l’autorité compétente notifie à l’importateur un avis prescrivant les mesures correctives qu’il doit prendre et le met en demeure de régulariser sa situation dans un délai qu’elle détermine.
Si, à l’expiration de ce délai, l’importateur n’a pas pris les mesures correctives prescrites, l’autorité compétente peut, par décision motivée :
1° Faire procéder d’office, en lieu et place de l’importateur mis en demeure et à ses frais, à l’exécution de tout ou partie des mesures prescrites ;
2° Ordonner le paiement d’une astreinte journalière au plus égale à 1 500 € applicable à partir de la notification de la décision la fixant et jusqu’à satisfaction de la mise en demeure. Le montant de l’astreinte est proportionné à la gravité des manquements constatés et à la situation financière de la personne physique ou morale concernée. L’astreinte bénéficie d’un privilège de même rang que celui prévu à l’article 1920 du code général des impôts. Il est procédé à son recouvrement comme en matière de créances de l’État étrangères à l’impôt et au domaine. Le comptable peut engager la procédure de saisie administrative à tiers détenteur prévue à l’article L. 262 du livre des procédures fiscales. L’opposition à l’état exécutoire pris en application d’une décision fixant une astreinte journalière n’est pas suspensive.
V. – L’avant-dernière phrase du 2° du IV n’est pas applicable à Saint-Martin.
VI. – Le chapitre III du titre II du code des douanes est complété par un article 59 quindecies ainsi rédigé :
« Art. 59 quindecies. – Les agents chargés des contrôles mentionnés au II de l’article 28 de la loi n° … du … portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine des transports, de l’environnement, de l’économie et des finances et les agents des douanes peuvent se communiquer, spontanément ou sur demande, pour les besoins de leurs missions de contrôle, tous renseignements et documents détenus ou recueillis à l’occasion de l’exercice de leurs missions respectives. » – (Adopté.)
Chapitre IV
Dispositions relatives à la protection et à l’information environnementales
Article 29
Le V de l’article L. 212-1 du code de l’environnement est ainsi modifié :
1° La deuxième phrase est supprimée ;
2° À la troisième phrase, les mots : « ces délais » sont remplacés par les mots : « ce délai ». – (Adopté.)
Article 30
Le III de l’article L. 2224-8 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° Au septième alinéa, les mots : « d’un dispositif » sont remplacés par les mots : « de tout ou partie d’une installation » ;
2° À l’avant-dernier alinéa, les mots : « dispositifs de traitement destinés à être intégrés dans des » sont supprimés. – (Adopté.)
Article 31
L’article L. 411-2 du code de l’environnement est complété par un III ainsi rédigé :
« III. – Un décret en Conseil d’État détermine les conditions et modalités dans lesquelles est instauré un système de contrôle des captures et mises à mort accidentelles des espèces animales énumérées au a de l’annexe IV à la directive 92/43/CEE du Conseil du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages. » – (Adopté.)
Article 32
L’article L. 124-2 du code de l’environnement est ainsi modifié :
1° À la fin du premier alinéa, les mots : « qui a pour objet » sont remplacés par le mot : « concernant » ;
2° Le 2° est complété par les mots : « , ainsi que les décisions et activités destinées à protéger ces éléments ». – (Adopté.)
Articles additionnels après l’article 32
Mme le président. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 23 rectifié, présenté par MM. Requier, Corbisez, Bilhac et Cabanel, Mme N. Delattre, MM. Gold et Guérini, Mme Guillotin et M. Guiol, est ainsi libellé :
Après l’article 32
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de l’environnement est ainsi modifié :
1° L’article L. 122-1 est ainsi modifié :
a) Le II est ainsi modifié :
– au premier alinéa, les mots : « en fonction de critères et de seuils définis par voie réglementaire et, pour certains d’entre eux, » sont supprimés ;
– au deuxième alinéa, les mots : « Pour la fixation de ces critères et seuils et » sont supprimés ;
– au troisième alinéa, les mots : « chargée de l’examen au cas par cas » sont remplacés par le mot : « environnementale » ;
b) Le IV est ainsi modifié :
– le premier alinéa est ainsi rédigé :
« L’autorité environnementale est saisie par le maître d’ouvrage d’un dossier présentant le projet afin de déterminer si celui-ci doit être soumis à évaluation environnementale. » ;
– au deuxième alinéa, les mots : « l’autorité mentionnée à l’article L. 171-8 » sont remplacés par le mot : « environnementale » ;
c) Le V bis est ainsi modifié :
– à la première phrase, les mots : « l’examen au cas par cas » sont remplacés par les mots : « l’autorisation du projet » ;
– à la deuxième phrase, les mots : « en charge de l’examen au cas par cas ou comme autorité » sont supprimés ;
2° Le 1° du II de l’article L. 122-3 est abrogé.
La parole est à M. Jean-Pierre Corbisez.
M. Jean-Pierre Corbisez. Deux lettres de mise en demeure ont été adressées à la France par la Commission européenne portant sur les lacunes de la législation française transposant la directive Projets de 2011 sur deux points : l’obligation de prendre en considération l’ensemble des critères établis en annexe III de la directive pour déterminer si un projet doit être soumis à évaluation environnementale ; l’obligation de veiller à ce que les autorités compétentes accomplissent leur mission de manière objective.
La nomenclature des projets soumis à évaluation a été annulée par le Conseil d’État le 15 avril dernier, au motif qu’elle se fonde essentiellement sur la dimension du projet. Quant à la prévention des conflits d’intérêts, le décret du 3 juillet 2020, qui organise un système de déport, ne semble pas non plus suffire à la Commission.
Selon nous, la France a deux issues possibles pour débloquer rapidement la situation.
La première serait de préserver la fixation de critères et de seuils, comme cela est le cas aujourd’hui, mais en y ajoutant une « clause-filet ». Cela permettrait de rattraper les projets qui n’entrent pas dans la nomenclature et qui pourraient néanmoins avoir une incidence notable sur l’environnement, comme le proposent nos collègues du groupe écologiste par un amendement que nous avions cosigné par le passé.
La seconde issue, que nous vous soumettons par cet amendement, est de supprimer les critères et les seuils définis par voie réglementaire et de laisser l’autorité environnementale indépendante décider au cas par cas de soumettre, ou non, le projet à évaluation environnementale, en se fondant sur les termes de la directive.
Tant que l’autorisation du projet et l’examen au cas par cas relèveront de la même autorité, les contentieux devant les tribunaux administratifs perdureront. Le Conseil d’État a rappelé, dans un arrêt du 28 avril 2021, que l’autorité environnementale doit disposer d’une autonomie réelle et, à ce titre, être pourvue de moyens administratifs et humains qui lui sont propres.
Confier à un préfet de région le soin, à la fois, de décider de l’opportunité de mener l’évaluation et d’autoriser le projet constitue une violation du principe de séparation fonctionnelle et un vice de procédure substantiel.
L’adoption de cet amendement aurait également pour avantage de simplifier la procédure en amont de l’évaluation environnementale pour le maître d’ouvrage.
Il nous semble qu’une remise à plat de la législation est indispensable et préférable aux divers raccommodages intervenus en réaction à la jurisprudence du Conseil d’État.
Mme le président. L’amendement n° 24 rectifié, présenté par MM. Requier, Corbisez, Bilhac et Cabanel, Mme N. Delattre, MM. Gold et Guérini, Mme Guillotin et M. Guiol, est ainsi libellé :
Après l’article 32
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 122-1 du code de l’environnement est ainsi modifié :
1° Au troisième alinéa du II, les mots : « chargée de l’examen au cas par cas » sont remplacés par le mot : « environnementale » ;
2° Au deuxième alinéa du IV, les mots : « l’autorité mentionnée à l’article L. 171-8 » sont remplacés par le mot : « environnementale » ;
3° Le V bis est ainsi modifié :
a) À la première phrase, les mots : « l’examen au cas par cas » sont remplacés par les mots « l’autorisation du projet » ;
b) À la deuxième phrase, les mots : « en charge de l’examen au cas par cas ou comme autorité » sont supprimés.
La parole est à M. Jean-Pierre Corbisez.
M. Jean-Pierre Corbisez. Il s’agit d’un amendement de repli.
Mme le président. L’amendement n° 5 rectifié, présenté par MM. Dantec, Fernique et Benarroche, Mme Benbassa, MM. Dossus, Gontard et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :
Après l’article 32
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le II de l’article L. 122-1 du code de l’environnement, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :
« …. – Lorsqu’un projet, en deçà des seuils fixés, est toutefois susceptible d’avoir des incidences notables sur l’environnement ou la santé humaine, l’autorité compétente transmet les informations relatives au projet dont elle dispose à l’autorité environnementale qui examine sans délai la nécessité d’une évaluation des incidences sur l’environnement.
« La saisine de l’autorité environnementale est également ouverte au maître d’ouvrage qui peut transmettre à l’autorité environnementale une demande d’examen au cas par cas.
« Lorsque le maître d’ouvrage n’est pas à l’origine de la demande, l’autorité compétente l’informe sans délai.
« L’absence de réponse de l’autorité environnementale au terme du délai fixé par voie réglementaire vaut dispense de réaliser une étude d’impact.
« Les modalités d’application du présent paragraphe sont fixées par voie réglementaire. »
La parole est à M. Ronan Dantec.
M. Ronan Dantec. Il s’agit d’un vieux dossier, et j’ai déjà eu l’occasion de présenter plusieurs amendements sur le sujet, y compris à l’époque où j’avais trouvé asile politique au sein du groupe du RDSE.
Nous vous avions alertés sur le fait que l’Europe n’accepterait pas notre législation. Pour saisir l’autorité environnementale, des critères quantitatifs avaient été imposés. Or des projets qui n’atteignent pas ces critères peuvent pourtant avoir un impact environnemental fort. Nous vous avions prévenus que cela ne passerait pas : ça n’a pas raté, ce n’est pas passé, et, le 15 avril 2021, le Conseil d’État a annulé le décret du 4 juin 2018.
Cet amendement vise à régler cette difficulté. Vous me répondrez sans doute qu’il s’agit d’une mesure de nature réglementaire, ainsi que le rapporteur l’a indiqué en commission. Pourtant, s’agissant de conformité à une directive européenne, l’introduction de ce qu’on appelle une clause de rattrapage, un dispositif filet, peut être de niveau législatif.
Pour gagner du temps, plutôt que d’attendre que le Gouvernement publie un nouveau décret, il suffit d’adopter cet amendement.