Mme Laurence Cohen. Avec cet amendement, nous proposons de reconnaître la place des sages-femmes dans les équipes de soins primaires. En effet, les actions de dépistage, de prévention et de diagnostic des pathologies effectuées par les sages-femmes les positionnent comme praticienne de premier recours en soins primaires pour la santé des femmes.
Ces professionnels sont donc au cœur du dispositif permettant à la patiente d’être au centre du parcours de santé.
Cette place dans le système de santé français nécessite selon nous d’être clairement identifiée dans la loi. Un parcours de santé se définit comme la trajectoire globale des patients et usagers dans leur territoire, avec une attention particulière portée à la personne et à ses choix.
Le parcours de santé des femmes est, quant à lui, l’organisation de la prise en charge globale et continue de celles-ci au plus proche de leur lieu de vie ou de travail. La lisibilité, l’accessibilité et la fluidité du parcours de santé s’appuient sur la qualité de l’information des conditions d’accueil et d’accompagnement de la femme tout au long de sa vie.
Tous ces arguments plaident en faveur de la reconnaissance des sages-femmes dans les équipes de soins primaires. Cette mesure rejoint – une fois n’est pas coutume ! – la philosophie du plan Ma santé 2022, en élargissant les compétences des sages-femmes.
Pour moi, comme pour l’ensemble des membres de mon groupe, cet amendement tend à s’inscrire dans la continuité des articles précédents visant à améliorer l’attractivité de cette profession, en travaillant sur la valorisation et la reconnaissance du métier.
Mes chers collègues, cela fait plusieurs mois que les sages-femmes se mobilisent pour que leur profession, qui est, je vous le rappelle, médicale, et non paramédicale, soit enfin pleinement reconnue. L’adoption de cet amendement peut y contribuer.
Mme la présidente. L’amendement n° 48 rectifié ter, présenté par M. Longeot, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Le premier alinéa de l’article L. 4151-1 du code de la santé publique est ainsi rédigé :
« Les sages-femmes contribuent auprès de la femme et de l’enfant aux soins de premier recours définis à l’article L. 1411-11. »
La parole est à M. Jean-François Longeot.
M. Jean-François Longeot. Les soins dits « de premier recours », tels que les actions de dépistage, de prévention et de diagnostic, de dispensation et d’administration des médicaments contribuent à pallier le manque de médecins et à assurer un meilleur accès aux soins des Français sur l’ensemble du territoire.
Ces soins sont la plupart du temps administrés par les sages-femmes, praticiennes de premier recours pour la santé des femmes. Cependant, leurs compétences restent peu connues des patientes et d’autres professionnels de santé.
Le présent amendement vise donc à reconnaître officiellement la contribution des sages-femmes à ces soins de premiers recours, contribution qui nécessite d’être clairement identifiée dans la loi.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. La rédaction de l’article L. 1411-1 du code de la santé publique sur les soins de premiers recours n’exclut pas les sages-femmes. La participation à ces soins découle par ailleurs de leurs missions, qui sont définies par les articles L. 4151-1 et suivants du code de la santé publique. Réaffirmer ce principe, comme le fait l’amendement n° 48 rectifié ter, aurait donc peu de portée.
S’agissant de l’amendement n° 190, il ne me paraît pas nécessaire, en outre, de dupliquer dans le code de la sécurité sociale des dispositions qui relèvent déjà du code de déontologie de la profession, comme le libre choix de son praticien ou l’indépendance professionnelle.
Comme ces deux amendements sont satisfaits, j’en demande le retrait ; à défaut, l’avis de la commission serait défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Véran, ministre. Je compléterai l’avis du rapporteur, que je partage. Comme ce dernier l’a indiqué, les amendements sont déjà en pratique satisfaits, car les missions incombant aux sages-femmes recoupent en réalité celles des équipes de soins primaires.
Je veux aussi faire remarquer que, dans le Ségur, nous avons porté une attention très particulière aux sages-femmes. J’ai reçu à plusieurs reprises des représentants de la profession maïeuticienne, pour faire évoluer le métier et le cadre de compétences.
Cette tendance est déjà actée dans d’autres textes de loi, comme vous le savez : je pense à l’expérimentation de l’IVG instrumentale, qui – je le pense – sera ensuite rapidement généralisée, par les sages-femmes, mais aussi au suivi des femmes qui ne sont pas forcément enceintes, à la prescription d’un certain nombre d’examens ou d’actes aux personnes qui accompagnent les parturientes… Ces exemples montrent bien que la profession évolue. Je suis totalement convaincu de la place éminente des sages-femmes dans le système de santé.
Il faut également citer le bloc de revalorisation pour les sages-femmes qui exercent en établissement. J’ai demandé qu’une attention particulière leur soit portée dans le travail sur les grilles salariales.
Enfin, d’autres enjeux existent, notamment dans le domaine des ressources humaines : il faut lutter contre les contrats courts que subissent, trop souvent, les sages-femmes dans certains établissements. Nous faisons donc évoluer le cadre de métier des sages-femmes.
Ces amendements ne feraient que complexifier le dispositif, alors que la promotion du cœur, ou du socle, de la profession qui les sous-tend est déjà mise en œuvre dans la pratique.
Je demande donc le retrait de ces amendements.
Mme la présidente. Madame Cohen, l’amendement n° 190 est-il maintenu ?
Mme Laurence Cohen. J’ai entendu les explications de M. le rapporteur et de M. le ministre. Puisque notre amendement semble satisfait, nous n’allons pas le maintenir.
Monsieur le ministre, je veux toutefois attirer votre attention sur un point. Vous avez semblé avoir vraiment à cœur de reconnaître l’importance de la profession de sage-femme, et je partage tout à fait vos propos. J’ai été sollicitée par des sages-femmes sur le fait que l’Insee les considère comme des paramédicaux, ce qui entraîne pour la profession un moindre salaire.
Les sages-femmes vous demandent de les recevoir pour évoquer cet aspect. Il serait important que vous puissiez les écouter, car chacun se repasse le problème, alors que cette question est très importante pour elles.
Nous retirons donc notre amendement ; j’en ai profité pour lancer un appel au ministre, comme vous avez pu le constater, mes chers collègues ! (Sourires.)
Mme la présidente. L’amendement n° 190 est retiré.
Monsieur Longeot, l’amendement n° 48 rectifié ter est-il maintenu ?
M. Jean-François Longeot. Non, je le retire après les explications de M. le rapporteur et de M. le ministre. J’espère que les sages-femmes seront entendues et que les mesures évoquées seront bien appliquées.
M. Olivier Véran, ministre. Je profite de la concorde qui règne dans l’hémicycle pour répondre à Mme Cohen.
J’ai reçu les représentants des sages-femmes, notamment la présidente de l’Ordre. J’ai également saisi Bercy de la question de la classification de l’Insee : je ne sais pas quelle réponse me sera faite – elle sera évoquée en interministériel –, mais sachez que je suis bien conscient du problème que vous avez soulevé.
Mme Laurence Cohen. Merci, monsieur le ministre !
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 2 bis.
(L’article 2 bis est adopté.)
Article 2 quater
L’article L. 4151-4 du code de la santé publique est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Elles peuvent prescrire le dépistage d’infections sexuellement transmissibles à leurs patientes ainsi qu’à leurs partenaires, en transmettant au médecin traitant de ces derniers les informations relatives à ces examens. »
Mme la présidente. L’amendement n° 4 rectifié bis, présenté par MM. Bonne, Bascher, Bazin, E. Blanc, Bouloux, Brisson et Burgoa, Mme Chauvin, M. Cuypers, Mmes Darcos, Di Folco, Estrosi Sassone, F. Gerbaud et Guidez, MM. Henno, Laménie et Moga, Mme Muller-Bronn, MM. Rapin, Savary, Segouin, Paccaud et Gremillet et Mme Schalck, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Bernard Bonne.
M. Bernard Bonne. Mon amendement tend à la suppression de l’article 2 quater.
Les articles L. 4151-1 à L. 4151-10 du code de la santé publique définissent les compétences des sages-femmes et prévoient que ces dernières sont tenues d’adresser la femme à un médecin en cas de situation pathologique, ce qui est le cas en cas de suspicion d’infection par une infection sexuellement transmissible, ou IST.
Pour la sécurité des patientes, la prescription d’un traitement curatif doit relever du médecin, seul professionnel à disposer de la compétence pour prescrire un traitement curatif et à en assumer les conséquences.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. L’article 2 quater a été réécrit en commission : nous en avons circonscrit le champ au domaine de la prévention – les examens de dépistage des IST pour la femme et son partenaire –, en excluant le volet curatif, à savoir le traitement des IST chez les partenaires.
Cette rédaction a paru équilibrée à la commission des affaires sociales. Elle lui a semblé répondre aux observations soulevées par les auteurs de cet amendement.
Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis de la commission serait défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Monsieur Bonne, comment réagissez-vous à la demande de retrait de l’amendement n° 4 rectifié bis ?
M. Bernard Bonne. Très mal, madame la présidente ! (Sourires.)
Si j’ai bien compris, la commission a modifié l’article en refusant le traitement au partenaire, mais en l’autorisant pour la patiente. Je fais confiance à la commission et à son rapporteur – c’est la période ! –, mais je voudrais tout de même être sûr que la réflexion aboutisse aussi bien pour l’amendement précédent que j’ai déjà retiré que pour celui-là.
Je retire donc mon amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 4 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 49 rectifié bis, présenté par M. Longeot, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
L’article L. 4151-4 du code de la santé publique est ainsi rédigé :
« Art. L. 4151-4. – Les sages-femmes peuvent prescrire tous les actes, produits et prestations strictement nécessaires à l’exercice de leur profession.
« Un décret en Conseil d’État, pris après avis du Conseil national de l’ordre des sages-femmes, détermine les conditions d’application du présent article. »
La parole est à M. Jean-François Longeot.
M. Jean-François Longeot. Les sages-femmes peuvent aujourd’hui prescrire des actes, produits et prestations mentionnés sur des listes fixées par voie réglementaire.
Or, ces listes pouvant rapidement devenir obsolètes, la patiente peut être contrainte d’effectuer une double consultation : d’abord chez sa sage-femme, puis chez son médecin.
Par conséquent, le présent amendement vise à supprimer ces restrictions et à ouvrir plus largement le droit de prescription des sages-femmes, tout en l’inscrivant strictement dans le champ de compétences de ces professionnels de santé, afin de simplifier, partout sur le territoire, l’accès aux soins.
Cette disposition alignerait ainsi le régime applicable aux sages-femmes sur celui d’autres professions médicales, comme les chirurgiens-dentistes, qui disposent, dans leur champ de compétences, d’une pleine faculté de prescription.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. L’article L. 4151-4 du code de la santé publique prévoit déjà que les sages-femmes peuvent prescrire des dispositifs médicaux et des médicaments, selon une liste fixée par arrêté, ainsi que « les examens strictement nécessaires à l’exercice de leur profession ».
L’intention de l’auteur de cet amendement est d’ouvrir plus largement ce droit de prescription, afin notamment d’éviter un décalage entre les textes réglementaires et les produits de santé utiles à l’exercice de la profession ; néanmoins, les conditions d’application restent renvoyées au pouvoir réglementaire.
Le cadre actuel, tel qu’il est ajusté à l’article 2 quinquies A du texte, paraît donc tout aussi satisfaisant à la commission des affaires sociales. En outre, ces dispositions entreraient en contradiction avec les autres mesures du code de la santé publique encadrant les missions des sages-femmes.
Par conséquent, la commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettrait un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Véran, ministre. Je précise, en complément de ce que vient de dire M. le rapporteur, que l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, l’ANSM, et les sociétés savantes ont été saisies récemment, afin de réviser la liste des médicaments que les sages-femmes peuvent prescrire.
Le Gouvernement émet donc également un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Monsieur Longeot, l’amendement n° 49 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Jean-François Longeot. Il s’agit d’un véritable problème d’aménagement du territoire et d’accès aux soins. Cette mesure, d’ailleurs appliquée à d’autres professions médicales, me semble importante.
Je maintiens donc mon amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Au fond, la question est de savoir si l’on aligne le droit appliqué aux sages-femmes sur celui d’autres professions médicales, comme les chirurgiens-dentistes, ou si l’on avance pas à pas, en colmatant les brèches, en modifiant petit à petit les dispositions permettant aux sages-femmes d’exercer pleinement leur profession médicale, en matière de santé sexuelle et reproductive.
Les dispositions de l’amendement de notre collègue Jean-François Longeot vont plutôt dans le sens de la plénitude d’exercice de cette profession, qui se verrait ainsi reconnaître un droit de prescription, dans un champ limité à la santé sexuelle et reproductive.
Nous voterons donc cet amendement.
Mme la présidente. En conséquence, l’article 2 quater est ainsi rédigé, et les amendements nos 131, 28 rectifié ter, 53 rectifié et 92, ainsi que les amendements identiques nos 33 rectifié bis et 183 rectifié, n’ont plus d’objet.
Article additionnel après l’article 2 quater
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 44 rectifié, présenté par MM. J.M. Arnaud et Belin, Mme Billon, MM. Brisson, Canevet et Delahaye, Mme de La Provôté, MM. Delcros et Détraigne, Mme Doineau, M. Duffourg, Mmes Férat, Gatel, Guidez et Havet, MM. Lafon, Laménie et Le Nay, Mme Loisier, MM. Longeot, P. Martin et Moga et Mmes Perrot et Saint-Pé, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le premier alinéa de l’article L. 4151-1 du code de la santé publique, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« La sage-femme peut être désignée comme référent parcours par les futurs parents afin de coordonner pendant et après la grossesse la préparation à la naissance et à la parentalité en lien avec les différents professionnels de santé. »
La parole est à M. Jean-Michel Arnaud.
M. Jean-Michel Arnaud. Il s’agit, là encore, des sages-femmes. L’approche préventive des complications de la grossesse et des risques psychosociaux repose sur la création d’une relation de confiance entre futurs parents et professionnels de santé.
Or ceux-ci sont souvent nombreux et ils sont surtout multiples, au cours du suivi, ce qui suscite parfois de la confusion et une perte de confiance. Il est donc nécessaire de coordonner les interventions sans les multiplier, afin d’assurer la cohérence et la gradation des propositions, adaptées aux besoins et à la temporalité des parents.
Un référent de parcours doit être identifié dès le début de la grossesse, soit, lors de l’inscription, au sein de la maternité, soit, en ville, au moment de la découverte de la grossesse. Cette identification doit s’accompagner de la possibilité, pour les parents, de s’adresser à la sage-femme ou au maïeuticien qu’ils ont choisi comme référent, afin de poursuivre et de personnaliser l’accompagnement.
Le rapport remis, le 8 septembre dernier, au secrétaire d’État Adrien Taquet recommandait d’ailleurs d’aller en ce sens, afin de faciliter le suivi des futurs parents dans les territoires en manque de spécialistes.
L’exercice libéral de la profession de sage-femme s’est accru très sensiblement au cours des dix dernières années ; il constitue un maillage particulièrement puissant, notamment dans les territoires ruraux et dans les villes petites et moyennes.
C’est pourquoi je propose d’insérer, après l’article 2 quater du texte, un article additionnel permettant aux maïeuticiens d’être désignés comme référents de parcours par les futurs parents, afin de coordonner, pendant et après la grossesse, la préparation à la naissance et à la parentalité, en lien avec les différents professionnels de santé.
Mme la présidente. L’amendement n° 31 rectifié ter, présenté par MM. Chasseing, Malhuret, Guerriau, Médevielle, Menonville et Wattebled, Mme Mélot, MM. Lagourgue, A. Marc, Capus, Verzelen, Pellevat, Canevet, Laménie et Nougein, Mmes Garriaud-Maylam et Saint-Pé, M. Lefèvre, Mme F. Gerbaud, MM. Moga, Genet, Meurant, Fialaire, Longeot et Sautarel, Mmes N. Delattre et Létard et M. Henno, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 162-8-1 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 162-8-… ainsi rédigé :
« Art. L. 162-8-…. – Afin de favoriser la coordination des soins en lien avec le médecin, toute assurée ou ayant droit enceinte peut déclarer à son organisme gestionnaire de régime de base de l’assurance maladie le nom de sa sage-femme référente. »
La parole est à M. Daniel Chasseing.
M. Daniel Chasseing. Cet amendement vise à permettre à chaque femme enceinte de déclarer une sage-femme référente, qui tiendra à jour le dossier médical.
Il s’agit d’une évolution souhaitable du modèle périnatal français, visant à mieux répondre aux besoins et aux attentes des femmes et des professionnels.
Mme la présidente. L’amendement n° 101, présenté par Mme Poncet Monge, M. Benarroche, Mme Benbassa, MM. Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco, MM. Parigi et Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 162-8-1 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 162-8-… ainsi rédigé :
« Art. L. 162-8-…. – Afin de favoriser la coordination des soins en lien avec le médecin, pendant et après la grossesse, toute assurée ou ayant droit enceinte peut déclarer à son organisme gestionnaire de régime de base de l’assurance maladie le nom de sa sage-femme référente.
« Les modalités d’application du présent article sont définies par voie réglementaire. »
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. La simplification dont nous parlons aujourd’hui trouve ici un objet pertinent.
Le modèle périnatal français a évolué au cours des dernières années et il doit continuer de le faire. Cette évolution passe par le renforcement du lien, d’ailleurs insuffisamment abordé dans cette proposition de loi, entre médecine de ville et hôpital. Pour ce faire, il faut renforcer la coordination du parcours des femmes enceintes.
En effet, tant le rapport intitulé Les 1 000 premiers jours, remis au Gouvernement le 8 octobre 2020, que la Haute Autorité de santé recommandent de mettre en place un suivi global de la grossesse, dans lequel les intervenants seraient limités et agiraient de manière coordonnée.
Ce suivi est indispensable au bon déroulement de la grossesse et de l’accouchement. Je le rappelle, il est possible, pour une femme, de choisir d’être suivie, en prénatal, par une sage-femme. Or ce suivi est au cœur du travail de ces professionnels de santé.
Cet amendement vise donc à offrir la possibilité à chaque femme enceinte de déclarer à l’assurance maladie une sage-femme référente et de nouer, par ce biais, une relation forte de confiance avec celle-ci. Il ne s’agit en aucun cas de remplacer le médecin traitant ; le statut de sage-femme référente intervient au moment de la grossesse, dont il faut articuler la prise en charge et préparer les suites.
Il n’y a pas non plus de risque de perte d’information pour le médecin ; il y en a, en tout cas, moins qu’avec des intervenants multiples, car la sage-femme référente tiendra à jour un dossier obstétrical complet, transmis au médecin traitant.
Cela permettra, entre autres, d’aider à la construction du projet de naissance dans un climat de confiance, de faire le lien avec la maternité, d’éviter des passages aux urgences et de rendre effectif le volet anténatal du programme d’accompagnement du retour à domicile, le Prado, en organisant en amont les sorties de maternité, précoces ou non, des femmes et des nouveau-nés.
Cette mesure a été élaborée en lien avec le Conseil national de l’ordre des sages-femmes.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. La notion de sage-femme référente rejoint une recommandation de la profession, consistant à reconnaître le rôle des sages-femmes de coordination dans la prise en charge de la femme au cours de la grossesse.
Toutefois, les implications concrètes de cette notion ne sont pas précisées dans ces amendements, non plus que sa plus-value.
La commission demande donc le retrait des amendements nos 44 rectifié et 31 rectifié ter au profit de l’amendement n° 101, visant à renvoyer à un décret pour la déclinaison de cette notion. Et pour ce dernier amendement, la commission s’en remet à la sagesse du Sénat.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Véran, ministre. Ces amendements tendent à permettre à toute assurée enceinte de déclarer à son organisme d’assurance maladie le nom d’une sage-femme référente, afin de favoriser la coordination des soins, en lien avec son médecin.
La mise en place d’un professionnel de santé référent de périnatalité correspond effectivement à une proposition du rapport de la Commission des 1 000 premiers jours, remis par Boris Cyrulnik. Elle répond à un réel besoin de coordination et de suivi tout au long du parcours de natalité.
Ce que nous avons prévu pour atteindre cet objectif, sur lequel, je le répète, nous sommes d’accord, c’est tout d’abord de conduire une expérimentation dans quelques territoires, en 2021, sur le fondement de l’article 51 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018, afin de trouver la meilleure formule et le meilleur moyen pour organiser et structurer le dispositif, qui serait ensuite généralisé sur tout le territoire si d’aventure il était jugé utile et satisfaisant.
Cette expérimentation va être lancée sous peu, je m’y engage.
Le Gouvernement demande donc le retrait de ces trois amendements.
Mme la présidente. Monsieur Arnaud, l’amendement n° 44 rectifié est-il maintenu ?
M. Jean-Michel Arnaud. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 44 rectifié est retiré.
Monsieur Chasseing, l’amendement n° 31 rectifié ter est-il maintenu ?
M. Daniel Chasseing. Non, je le retire également, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 31 rectifié ter est retiré.
Madame Poncet Monge, l’amendement n° 101 est-il maintenu ?
Mme Raymonde Poncet Monge. Oui, je le maintiens, madame la présidente.
Mme la présidente. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Je partage le point de vue de M. le ministre et celui du rapporteur. Il faut effectivement soumettre cette question à une expérimentation, parce que nous n’aurons bientôt plus que des référents : le médecin référent, l’infirmier référent, la sage-femme référente, le kinésithérapeute référent…
Cela me rappelle les aides multiples, quand chacun soutient un projet, mais que tout le monde veut coordonner. On ne fait que des guichets uniques et, finalement, tout le monde devient « guichet unique »…
J’appelle donc votre attention sur ce point, mes chers collègues : une expérimentation permettra de juger sur pièces, d’autant qu’une grossesse et son suivi représentent une période charnière dans une vie. Il faut laisser le rôle de référent à un professionnel unique, qu’il soit médecin, infirmier ou autre, afin qu’il n’y ait qu’un référent qui coordonne. Sinon, s’il n’y a que des coordonnateurs, on aboutit à une absence de coordination…
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Michel Arnaud, pour explication de vote.
M. Jean-Michel Arnaud. J’entends bien les arguments de M. le ministre, à la position duquel je me rallie bien volontiers ; j’apprécierais d’ailleurs que soit portée à notre connaissance la liste des départements qui ont été ou qui seront choisis pour l’expérimentation.
Il se trouve que, dans nombre de territoires, il n’y a pas de médecin coordonnateur, tout simplement parce qu’il n’y a pas de médecin du tout ! Il n’y a pas non plus d’infirmier coordinateur parce qu’il n’y a pas d’infirmier libéral ! Et il n’y a pas davantage de gynécologues !
Je pense particulièrement au département de l’Ardèche, dans lequel il y a, me semble-t-il, zéro gynécologue pour 100 000 habitants, tandis que, dans le département dont je suis élu, les Hautes-Alpes, ce ratio atteint 3,5 % ou 4 %.
Or nous avons là une profession qui est au contact de la population, dans tous les territoires. Ainsi, dans une commune de 2 500 habitants que je connais bien, pour en avoir été le maire pendant vingt ans, il y a une sage-femme libérale, qui est en mesure, dans tous les champs de la vie d’une femme, de la famille et du dialogue conjugal, d’être un bon professionnel de santé. Ces professionnels peuvent apporter une solution aux problèmes des femmes.
Je me rallie bien volontiers à l’amendement n° 101 de notre collègue, Mme Poncet Monge, et j’attends avec beaucoup d’impatience les retours de l’expérimentation proposée par M. le ministre.