Mme Agnès Canayer, rapporteur. Il faut bien avouer que nous faisons tous aujourd’hui une overdose de visioconférences. Néanmoins, on le voit bien, ce moyen peut parfois être utile, et pas simplement dans le cas d’une crise sanitaire. En effet, il peut permettre de simplifier des procédures et d’améliorer leur rapidité, à condition que ce ne soit pas un moyen exclusif.
Il me semble donc que ce peut être utile, dans certains cas, d’avoir recours à ces moyens de communication audiovisuelle, qui permettent de ne pas forcément extraire le jeune et de simplifier la procédure.
Nous émettons donc un avis défavorable sur ces deux amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 60 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 3
(Non modifié)
Le titre Ier du livre Ier du code de la justice pénale des mineurs, dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2019-950 du 11 septembre 2019 précitée, est ainsi modifié :
1° L’article L. 111-3 est ainsi modifié :
a) Après la seconde occurrence du mot : « une », la fin du premier alinéa est ainsi rédigée : « peine. » ;
b) Les 1° et 2° sont abrogés ;
2° L’article L. 112-2 est ainsi modifié :
a) À la seconde phrase du premier alinéa, le mot : « l’ » est supprimé ;
b) Le 7° est ainsi modifié :
– le mot : « vingt-trois » est remplacé par le nombre : « 22 » ;
– la première occurrence du mot : « six » est remplacée par le nombre : « 6 » ;
3° L’article L. 112-3 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est ainsi modifié :
– à la première phrase, après la référence : « L. 112-2 », sont insérés les mots : « et les obligations et interdictions mentionnées aux 5° à 9° du même article L. 112-2 » ;
– la seconde phrase est supprimée ;
b) Le deuxième alinéa est supprimé ;
4° Au premier alinéa de l’article L. 112-10, le mot : « conseil » est remplacé par le mot : « Conseil » ;
5° À la fin du 1° de l’article L. 112-14, les mots : « ainsi qu’au service de l’aide sociale à l’enfance » sont supprimés ;
6° Le troisième alinéa de l’article L. 112-15 est ainsi modifié :
a) Le signe : « , » est remplacé par le mot : « et » ;
b) Après le mot : « durée », il est inséré le signe : « , » ;
c) Après le mot : « an », il est inséré le signe : « , » ;
d) La première occurrence du mot : « et » est remplacée par les mots : « ainsi que » ;
7° L’article L. 113-2 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les mots : « qui en avait la garde » sont remplacés par les mots : « à laquelle il était confié » ;
b) Le dernier alinéa est complété par le mot : « public » ;
8° La section 2 du chapitre III est complétée par un article L. 113-8 ainsi rédigé :
« Art. L. 113-8. – À chaque entrée d’un mineur dans un établissement relevant du secteur public ou habilité de la protection judiciaire de la jeunesse, le directeur de l’établissement ou les membres du personnel de l’établissement spécialement désignés par lui peuvent procéder au contrôle visuel des effets personnels du mineur, aux fins de prévenir l’introduction au sein de l’établissement d’objets ou de substances interdits ou constituant une menace pour la sécurité des personnes ou des biens. Au sein de ces établissements, ces mêmes personnels peuvent, aux mêmes fins, procéder à l’inspection des chambres où séjournent ces mineurs. Cette inspection se fait en présence du mineur sauf impossibilité pour celui-ci de se trouver dans l’établissement. Le déroulé de cette inspection doit être consigné dans un registre tenu par l’établissement à cet effet. Ces mesures s’effectuent dans le respect de la dignité des personnes et selon les principes de nécessité et de proportionnalité. »
Mme la présidente. L’amendement n° 8, présenté par Mmes Cukierman, Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 1
Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :
… L’article L. 111-1 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, le mot : « mineur » est remplacé par les mots : « enfant ou un adolescent » ;
b) Avant le 1°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« … La remise à parents ; »
La parole est à Mme Cécile Cukierman.
Mme Cécile Cukierman. Nous proposons de réintroduire la mesure de remise aux parents. Nous considérons que les parents sont des acteurs fondamentaux de la justice des mineurs et qu’il est nécessaire de les intégrer dans le processus de sanction et dans l’échelle des peines.
La remise aux parents est bien évidemment la mesure la plus clémente que peut prononcer le juge des enfants. Elle apparaît parfois hautement symbolique, puisqu’elle a vocation à rappeler aux parents leurs responsabilités. Elle vise aussi et surtout à réhabiliter la place des pères et mères auprès du mineur et de la justice. Elle permet également, parfois, de faire un état des lieux, de pointer des difficultés et d’apporter des premières réponses. On voit bien là que l’on change de paradigme : une mesure qui peut apparaître comme hautement symbolique devient l’une des réponses éducatives.
La place des parents ainsi que leurs responsabilités est un débat que nous avons depuis plusieurs années, plus encore ces derniers temps. L’objectif est non pas de leur faire payer les actes du mineur, mais de les réintégrer dans l’ensemble du processus, afin qu’ils y prennent toute leur place.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Il est vrai que le rôle éducatif des parents et la place qu’ils ont à tenir dans la justice pénale des mineurs sont essentiels. De la même manière, la responsabilisation des parents est un enjeu important.
Nous nous étions posé la question de la suppression de cette notion de remise à parents, qui peut parfois paraître inutile. Je pense qu’elle est très accessoire. Néanmoins, cela peut être un signal symbolique envoyé aux parents pour souligner leur rôle éducatif. C’est pour cette raison que nous donnons un avis favorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Vous savez ce que je pense du fait de remplacer le terme « mineur » par le terme « enfant » ; je me suis déjà exprimé à ce sujet.
Le code de la justice pénale des mineurs vise un objectif de simplification et de lisibilité pour tous les mineurs. C’est pourquoi nous avons supprimé cette mesure de remise à parents. Allez expliquer à un gamin que le juge le remet à ses parents… Vous trouvez peut-être cela clair, moi, pas du tout. On ne peut pas considérer qu’il s’agisse là d’une sanction. Vous me direz que cela dépend des parents, mais ce serait de l’humour de mauvais aloi. S’il s’agit d’une mesure éducative, alors elle est totalement redondante dans sa sémantique : « Je te remets à tes parents »… En ce qui nous concerne, nous voulons simplifier les choses.
Nous évoquions, à propos d’autres mots, le fait qu’ils étaient obsolètes. En l’occurrence, la formule l’est totalement. Dans ces conditions, le Gouvernement est défavorable à cet amendement. Cela ne simplifie rien, au contraire. D’ailleurs, regardez comme les choses sont cohérentes : nous évoquions précédemment le discernement – dispositif que vous avez voté – en disant qu’il fallait que l’on soit en mesure de comprendre ce qui se passe sur le terrain procédural.
Je le répète, parce que cela me paraît frappé au coin du bon sens, allez dire à un gamin qu’on le remet à ses parents, vous verrez si ses yeux ne vont pas totalement s’écarquiller d’incompréhension.
Mme la présidente. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.
Mme Cécile Cukierman. J’entends ce que vous dites, monsieur le garde des sceaux, mais je ne fais pas partie de ceux qui cherchent à simplifier la justice des mineurs, mais à la rendre plus efficace.
Par ailleurs, je ne sais pas si cela est obsolète ou pas, mais, si cela répond à des besoins, la question de l’obsolescence ne se pose pas. L’exemple que vous avez pris est réel, mais je crois qu’il y a de nombreuses mesures que le mineur ne comprend pas forcément. Si, dans la réponse pénale, il fallait uniquement en rester à des mesures que comprend le jeune, on pourrait tout arrêter et, au moins, on n’aurait plus de problème d’engorgement des tribunaux.
Plus sérieusement, l’argument que je partage, c’est que ce n’est pas que du symbole. Parce que, oui, il s’agit peut-être de simplification pour vous, mais, supprimer la remise à parents, c’est aussi sortir les parents de tout un système.
Bien évidemment, la question n’est pas de faire de la remise à parents une torture qui serait imposée. Vous le savez mieux que moi par votre pratique professionnelle, la remise à parents permet parfois de déceler un certain nombre de choses dans les comportements et d’identifier les difficultés. Je ne dis pas que c’est la réponse magique. Je dis simplement que ce serait envoyer un mauvais signal que de supprimer cette mesure-là, fût-elle désuète, obsolète ou réac. En tout cas, je pense qu’elle a encore son efficacité dans la justice des mineurs.
Mme la présidente. L’amendement n° 26 rectifié, présenté par M. Sueur, Mme Harribey, M. Bourgi, Mme de La Gontrie, MM. Durain, Kanner, Kerrouche, Leconte, Marie, Antiste et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
I. - Alinéas 7 à 9
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
b) Les 5° à 9° sont abrogés ;
II. - Alinéa 12
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Thierry Cozic.
M. Thierry Cozic. Cet amendement vise à maintenir la distinction entre éducatif et répressif en supprimant les modules coercitifs de la mesure éducative.
Les mesures éducatives doivent impérativement se distinguer des mesures répressives : il y va de leur efficacité. En effet, l’essence même de la relation éducative est de se fonder sur un lien de confiance, lien qui est, par principe, distendu dans le cadre d’une mesure coercitive. A contrario, les mesures coercitives perdront de leur solennité et seront totalement banalisées, et donc peu respectées, si leur contenu peut être prononcé à l’identique, sans sanction, dans le cadre d’une mesure éducative.
Aussi, quel que soit le point de vue duquel on se place, la confusion sur le contenu de la mesure a des effets pervers. C’est pourquoi le présent amendement vise à supprimer purement et simplement l’ensemble des interdictions et obligations qui ont été prévues dans le cadre de ces mesures – article L. 112-2, 5° à 9° – afin de privilégier un véritable accompagnement éducatif.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Plusieurs interdictions existent dans le cadre des mesures éducatives : l’interdiction de paraître dans certains lieux, l’interdiction d’entrer en contact avec la victime, la confiscation de l’objet qui a servi à commettre l’infraction ou encore l’obligation de suivre un stage de citoyenneté. Je pense que ces interdictions peuvent jouer un vrai rôle éducatif. Il n’y a donc pas lieu de les exclure de la mesure éducative.
Par conséquent, l’avis est défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Je veux ajouter un autre exemple de mesure tout à fait utile pour l’éducation d’un adolescent : l’interdiction d’aller et venir sur la voie publique entre 22 heures et 6 heures du matin.
L’avis du Gouvernement est défavorable.
Mme la présidente. Monsieur le ministre, mes chers collègues, il est minuit. Je vous propose de prolonger notre séance jusqu’à minuit et demi afin d’aller plus avant dans l’examen de ce texte.
Il n’y a pas d’opposition ?…
Il en est ainsi décidé.
L’amendement n° 54 rectifié bis, présenté par Mmes V. Boyer, Deroche et Belrhiti, M. Bouchet, Mme Dumont, MM. Cadec et Panunzi, Mme Dumas, MM. Bascher et B. Fournier, Mme F. Gerbaud, M. Klinger, Mme de Cidrac et MM. Belin, Brisson, Bonhomme, Le Rudulier et Boré, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 14
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…° Au premier alinéa de l’article L. 112-4, la référence : « L. 112-9 » est remplacée par la référence : « L. 112-8 » ;
…° L’article L. 112-8 devient l’article L. 112-9 et l’article L. 112-9 devient l’article L. 112-8 ;
La parole est à Mme Valérie Boyer.
Mme Valérie Boyer. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Ce n’est pas tout à fait un amendement rédactionnel : il inverse, dans le code, la définition du module de réparation et la possibilité pour le juge de le prononcer.
Nous considérons qu’il vaut mieux, en droit, définir avant d’envisager l’application.
Par conséquent, nous sollicitons le retrait de cet amendement.
Mme Valérie Boyer. Je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 54 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 23, présenté par Mmes Cukierman, Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéas 18 et 19
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
a) Les mots : « en fixe la durée qui ne peut excéder un an » sont remplacés par les mots : « pour une durée de six mois renouvelable » ;
La parole est à Mme Cécile Cukierman.
Mme Cécile Cukierman. Ce n’est pas qu’un amendement de sémantique. En effet, si nous ne sommes pas opposés à la possibilité d’un placement pénal d’un an, nous souhaitons qu’un bilan intermédiaire soit obligatoirement réalisé à l’issue d’une période de six mois.
Certes, la réalisation d’un tel bilan avant une éventuelle prolongation conduira à accroître la charge de travail et à alourdir les procédures. Elle nous semble toutefois impérative, parce que c’est l’avenir du mineur qui est en jeu.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Une durée de placement de six mois ne nous paraît pas pertinente : nous pensons qu’il faut de la durée pour mettre en place une mesure éducative de long terme. Le jeune a besoin que le travail éducatif soit marqué par la stabilité.
Pour cette raison, nous émettons un avis défavorable sur l’amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 2, présenté par Mmes Cukierman, Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéas 25 et 26
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Cécile Cukierman.
Mme Cécile Cukierman. Nous nous opposons au dispositif qui vise à confier un pouvoir de police jusqu’à présent uniquement détenu par les forces de police ou de gendarmerie aux professionnels de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) et au secteur associatif habilité.
Les fonctionnaires de la PJJ ne sont nullement habilités à exercer ces prérogatives. Les salariés du secteur privé, dont le niveau de formation en matière éducative est parfois faible, le sont encore moins.
Les agents de la PJJ ont une mission éducative. Pour l’exercer, il leur appartient d’instaurer un climat de confiance et de créer une relation humaine entre l’enfant confié et l’ensemble de l’équipe professionnelle, ce qui peut parfois prendre du temps.
Nous pensons, à l’instar d’organisations syndicales de ce secteur, que l’extension de ce pouvoir de police pourrait remettre en cause ce lien de confiance.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. La possibilité de contrôler que l’amendement tend à supprimer consiste en un simple contrôle visuel. Ce dernier est nécessaire dans certains centres éducatifs fermés (CEF).
L’avis est donc défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. C’est une posture dogmatique que de considérer que les éducateurs ne pourraient pas surveiller les gamins qui entrent dans les CEF, alors que certains y introduisent des couteaux !
Ce pouvoir de police est une demande des éducateurs eux-mêmes, pour leur propre sécurité et pour celle des autres mineurs. Ils ont tout de même le droit de se protéger !
Je suis totalement défavorable à cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.
Mme Cécile Cukierman. Je ne retirerai pas l’amendement.
Monsieur le garde des sceaux, peut-on débattre de manière respectueuse ? Je ne pense pas que ma posture soit dogmatique.
J’entends que vous n’êtes pas d’accord. Cependant, je pense qu’un véritable débat existe sur l’extension du pouvoir de police, y compris, comme je l’ai dit, au sein des personnels.
On ne saurait balayer d’un revers de manche ce que peuvent exprimer des organisations syndicales ou caricaturer les propos en ramenant l’éducatif à un laxisme débridé. Bien évidemment, un éducateur se doit de rappeler les règles et les interdits.
Toutefois, monsieur le garde des sceaux, le dispositif qui a été ajouté à l’Assemblée nationale va bien plus loin qu’un simple rappel du cadre : il élargit une mesure existante.
Pour terminer, permettez-moi de vous faire remarquer que je ne vous accuse pas de dogmatisme quand vous vous opposez systématiquement à tous nos amendements… Nous avons un débat. Nous avons des désaccords. C’est ainsi que fonctionne la démocratie !
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 3, modifié.
(L’article 3 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 3
Mme la présidente. L’amendement n° 53 rectifié bis, présenté par Mmes V. Boyer, Deroche et Belrhiti, M. Bouchet, Mme Dumont, MM. Cadec et Panunzi, Mme Dumas, M. Bascher, Mme Garnier, M. B. Fournier, Mme F. Gerbaud, M. Klinger, Mme de Cidrac et MM. Belin, Brisson, Bonhomme, Le Rudulier et Boré, est ainsi libellé :
Après l’article 3
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La première phrase du premier alinéa de l’article L. 112-2 du code de la justice pénale des mineurs, dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2019-950 du 11 septembre 2019 précitée, est complétée par les mots : « mais également de la gravité des faits qui lui sont reprochés et du trouble à l’ordre public qui en est résulté ».
La parole est à Mme Valérie Boyer.
Mme Valérie Boyer. Le code de la justice pénale des mineurs définit la mesure éducative judiciaire comme « un accompagnement individualisé construit à partir d’une évaluation » de la « situation personnelle, familiale, sanitaire et sociale » du mineur.
Pour autant, nous ne devons pas oublier les faits reprochés au mineur. Les mesures éducatives prévues doivent également en tenir compte.
C’est pourquoi il me semble nécessaire d’évaluer de la manière la plus proportionnée possible la mesure éducative à prendre. Il convient également de prendre en compte la gravité des faits reprochés au mineur et du trouble à l’ordre public qui en résulte.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Les mesures éducatives sont les moyens qui doivent permettre d’accéder au « relèvement éducatif et moral » des jeunes. Nous avons déjà eu l’occasion d’en débattre précédemment.
Ces mesures éducatives sont centrées autour du jeune, de sa personnalité et de son environnement. En revanche, les sanctions prennent en compte la gravité des faits.
Nous pensons que cibler les mesures éducatives sur la gravité des faits apporterait une confusion, alors que le code de la justice pénale des mineurs a pour objectif de simplifier les sanctions et les mesures prononcées.
La commission sollicite donc le retrait de l’amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Comme la commission, le Gouvernement sollicite le retrait de l’amendement, faute de quoi il émettra un avis défavorable.
En effet, il est extrêmement important de distinguer l’éducatif du reste.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 53 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. L’amendement n° 28, présenté par Mme Harribey, MM. Sueur et Durain, Mme de La Gontrie, MM. Kanner, Bourgi, Kerrouche, Marie, Leconte, Antiste et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 3
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 113-8 du code la justice des mineurs, dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2019-950 du 11 septembre 2019 précitée, est insérée une section ainsi rédigée :
« Section…
« Des centres éducatifs renforcés
« Art. L. 113-9. – Les centres éducatifs renforcés sont des établissements publics ou des établissements privés habilités dans des conditions prévues par décret en Conseil d’État. Ils ont vocation à prendre en charge des mineurs délinquants multirécidivistes en grande difficulté ou en voie de marginalisation ayant souvent derrière eux un passé institutionnel déjà lourd. Ils se caractérisent par des programmes d’activités intensifs pendant des sessions de trois à six mois selon les projets et un encadrement éducatif permanent. Ils visent à créer une rupture dans les conditions de vie du mineur et à préparer les conditions de sa réinsertion. »
La parole est à M. Jean-Yves Leconte.
M. Jean-Yves Leconte. Le chapitre III du code de la justice pénale des mineurs concerne le régime du placement.
Nous devons constater que les seuls lieux de placement mentionnés sont les centres éducatifs fermés. Les centres éducatifs renforcés (CER) ne figurent pas du tout dans le code, alors qu’ils s’inscrivent dans un dispositif global de réponse pénale graduée. Ils participent à la nécessité de gradation et de diversification des réponses éducatives. Ils sont reconnus pour offrir un encadrement éducatif renforcé par la mise en place d’un accompagnement permanent dans les actes de la vie quotidienne comme dans les démarches de remobilisation des mineurs.
Par ailleurs, inscrire les CER dans le code permettrait de lutter contre d’éventuels placements décidés indifféremment en CER ou CEF.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Cet amendement vise à définir le rôle des centres éducatifs fermés.
Il pose tout d’abord un petit problème d’imputation : « après l’article L. 113-8 » ne nous paraît pas le bon endroit pour insérer ses dispositions.
Cet amendement, déposé à la demande de la Convention nationale des associations de protection de l’enfant (Cnape), fait référence aux centres éducatifs renforcés, qui sont à la fois différents et complémentaires des centres éducatifs fermés. Il existe, en effet, une gamme dans le placement, le centre éducatif renforcé intervenant souvent en amont ou en aval du placement en CEF.
Néanmoins, les contraintes ne sont pas les mêmes : un jeune qui ne respecterait pas son placement en centre éducatif fermé serait probablement mis en détention. Il serait donc compliqué d’intégrer les centres éducatifs renforcés dans le code de la justice pénale des mineurs au même titre que les centres éducatifs fermés.
L’avis de la commission est défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 31, présenté par Mme Harribey, MM. Sueur et Durain, Mme de La Gontrie, MM. Bourgi, Marie, Leconte, Kerrouche, Kanner, Antiste et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 3
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l’article L. 241-1 du code de la justice pénale des mineurs, dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2019-950 du 11 septembre 2019 précitée, est complété par les mots : « et aux établissements du secteur associatif habilité ».
La parole est à Mme Laurence Harribey.
Mme Laurence Harribey. Cet amendement vise à intégrer la référence aux établissements du secteur associatif habilité, qui ne sont pas cités dans le texte.
Il ne faut pas oublier que le secteur associatif habilité est chargé, aux côtés des établissements de la protection judiciaire de la jeunesse, de mettre en œuvre un grand nombre de décisions prises par les magistrats.
Or l’article L. 241-1 ne mentionne que les établissements de la protection judiciaire, alors que, sur les 52 centres éducatifs fermés existant actuellement, 34 ont un statut associatif et que, dans le projet d’ouverture de 20 CEF supplémentaires, 15 seraient associatifs.
Il s’agit véritablement de reconnaître la participation du secteur associatif habilité au dispositif.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Comme le souligne Mme Harribey, auteur de cet amendement, la mise en œuvre des décisions prises en application du code de la justice pénale des mineurs est confiée avant tout « aux services et établissements de la protection judiciaire de la jeunesse », mais en lien avec les établissements du secteur associatif habilité.
Il ne nous paraît donc pas complètement inopportun de citer ces derniers dans le texte du code. La commission émet un avis favorable.