M. Bruno Sido. Très bien !

M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Cet exercice budgétaire nous permet de mobiliser les 85 emplois auxquels nous aurions dû renoncer sans l’arrêt de l’hémorragie auquel vous avez appelé à plusieurs reprises au cours des débats budgétaires antérieurs.

Il va sans dire que la détermination des femmes et des hommes du Quai d’Orsay à assurer le retour de plusieurs centaines de milliers de Français – 370 000 exactement – a certainement contribué à montrer à nos compatriotes l’importance de la diplomatie française et de l’engagement de ses agents au service des Français. Je vous remercie de leur avoir rendu hommage.

Cette stabilisation des moyens humains, que je souhaite également pouvoir constater l’année prochaine, grâce à votre soutien, s’accompagne d’un renforcement de nos moyens de fonctionnement, en particulier sur trois sujets cruciaux, que j’ai eu l’occasion d’aborder avec vous à plusieurs reprises, notamment en commission, et que vous avez vous-mêmes évoqués tout à l’heure : l’immobilier, la sécurité et le numérique.

Premièrement, nous avons changé de logiciel sur l’immobilier. Nous n’en sommes qu’au début, à la première étape, mais nous avons obtenu de ne plus dépendre du seul programme 723 du compte d’affectation spéciale. Le renforcement des moyens alloués au programme 105, qui augmentent de 33 % – excusez-moi du peu –, est conforme à l’engagement que j’avais pris devant vous l’année dernière.

Nous sommes dans une nouvelle logique. Nous continuerons à vendre des biens, mais « pour notre bien », si je puis dire, et non par obligation, ce qui change complètement la donne.

M. Christian Cambon. Très bien !

M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Bien évidemment, nous pouvons réaliser des opérations immobilières à tel ou tel endroit s’il faut restructurer, mais la logique de fond est désormais cohérente, avec des moyens nouveaux qui nous permettront d’assurer une indispensable politique immobilière de qualité et d’enrayer cette logique qui nous amenait parfois à envisager la vente de bijoux de famille, ce à quoi je me suis toujours opposé. Je n’ai d’ailleurs, à ma connaissance, jamais procédé à de telles cessions.

Deuxièmement, plusieurs d’entre vous ont rappelé l’importance de la sécurité des postes à l’étranger dans le contexte actuel, surtout après les deux attaques de Djeddah. Sur ce plan, l’augmentation des moyens est significative.

M. Le Gleut m’ayant interpellé à ce sujet, je confirme que le plan quadriennal de sécurisation de nos ambassades et des lycées français, dont la mise en œuvre avait pris un peu de retard en raison de l’impact de la crise de la covid, sera achevé en 2021 pour les ambassades et en 2022 pour les lycées. Mais d’importants progrès ont déjà été accomplis, et, à ce jour, 100 % des emprises en pays en crise ont déjà été renforcées et sécurisées.

Nous allons aussi permettre à l’AEFE d’assurer le renforcement de sa sécurité par un rebasage de 9 millions d’euros de sa subvention, afin de finaliser l’ensemble des travaux.

Je puis vous garantir que je suis très vigilant sur cette question : lors de chacun de mes déplacements, je vérifie l’état de la sécurité de nos emprises et de nos compatriotes, pour m’assurer que tous les moyens sont mis en œuvre.

Troisièmement, pour ce qui concerne le numérique, face au défi mis en lumière par la crise sanitaire, le ministère investira, l’an prochain, 9 millions d’euros supplémentaires dans la numérisation de ses activités, soit une augmentation de 22 %.

Il s’agit de répondre à un triple besoin : un besoin de sécurité, notre site étant exposé aux attaques en raison de la nature même du réseau informatique ; un besoin technique, car il est urgent de renforcer nos outils de mobilité et de communication ; enfin, un besoin de modernisation du service que nous rendons à nos usagers. En développant nos applications, nous simplifions les démarches administratives des Français.

Au-delà de ces moyens nouveaux, renforcés et plus performants, la deuxième orientation de ce budget est la poursuite de notre engagement en faveur du multilatéralisme. Ainsi, les deux tiers du crédit du programme 105 seront affectés aux contributions européennes et internationales obligatoires de la France.

À cet égard, je veux insister sur une décision significative et symbolique que nous avons prise. La hausse de l’euro face au dollar nous a assuré des disponibilités financières supplémentaires, en particulier pour nos engagements auprès des Nations unies.

De fait, ces crédits alimentent, pour l’essentiel, notre contribution à l’ONU, y compris aux opérations de maintien de la paix. Nous avons choisi d’utiliser la marge ainsi dégagée pour signifier notre soutien au multilatéralisme dans le domaine de la sécurité internationale. Nous avons ainsi financé davantage l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques, l’Agence internationale de l’énergie atomique et le Fonds pour la consolidation de la paix. Nous voulons ainsi marquer que, dès que nous avons des disponibilités supplémentaires, nous nous engageons concrètement en faveur du multilatéralisme.

La troisième priorité de mon ministère dont ce budget témoigne est le renforcement de notre action consulaire.

Vous avez noté, mesdames, messieurs les sénateurs, que le budget de l’action consulaire au service des Français qui résident à l’étranger restait stable, à 136 millions d’euros, mais cette stabilité masque l’effort financier important qui a été engagé en 2020 pour répondre aux conséquences économiques et sociales de la crise de la covid-19 pour les Français de l’étranger.

Je rappelle que 200 millions d’euros additionnels ont été débloqués grâce au Parlement, à la fin du mois de juillet, pour apporter un appui à nos compatriotes.

Cet appui a pris la forme d’un secours de sécurité, doté de 50 millions d’euros, d’un renforcement des bourses scolaires, d’une aide exceptionnelle de subventions supplémentaires pour aider les familles à faire le choix de l’enseignement français à l’étranger, enfin, de 50 millions additionnels sur le programme 823, sous la forme d’avances de France Trésor, pour aider nos établissements.

Je veux, à cet égard, formuler une observation concernant la mobilisation des 50 millions d’euros d’aide sociale. Il est vrai que les critères de départ étaient transposés des critères utilisés en France pour l’aide sociale. Ils ne tenaient pas compte des réalités locales, variables selon les pays, mais il fallait bien trouver des règles. Nous avons adapté ces normes. Dès que celles-ci m’ont paru insuffisantes, de nouvelles orientations ont été données, pour permettre une meilleure mobilisation de ces crédits.

Cette situation explique que seuls 5 millions d’euros aient été dépensés sur les 50 millions d’euros affectés, mais la progression est tout à fait considérable depuis que nous avons modifié les dispositifs voilà trois mois et que les commissions d’affectation ont pris en compte cette nouvelle donne. Je partage votre préoccupation : les crédits reportés doivent pouvoir garder un montant significatif. J’espère que nous pourrons aboutir à ce résultat.

Cependant, les moyens de l’aide sociale seront, à budget constant, renforcés de 17 % en 2021 par rapport au budget initial de 2020. Cela répond à notre souci de porter une grande attention à la situation de nos compatriotes à l’étranger.

Ce budget permettra aussi la modernisation de notre action consulaire, grâce à une dématérialisation accrue des démarches administratives.

Mme Conway-Mouret a appelé mon attention sur le vote par internet : celui-ci se concrétisera effectivement en 2021. Nous allons tout faire pour qu’il soit efficace et éviter les pénalisations que vous avez évoquées, madame la sénatrice.

L’année 2021 verra également la mise en place du « service France consulaire », qui sera le centre de réponses téléphonique et courriel unique et dont l’expérimentation, initialement prévue en 2020, a dû être reportée d’un an.

C’est aussi en 2021 que le registre de l’état civil électronique se mettra en place et que le développement du projet France Visas, porté par le budget du ministère de l’intérieur, sera poursuivi, en pleine coopération avec ce dernier.

La quatrième orientation concerne la diplomatie d’influence, que vous avez largement évoquée, mesdames, messieurs les sénateurs.

Je veux reprendre quelques observations de M. Kern et des rapporteurs spéciaux, notamment pour souligner notre détermination à consolider la diplomatie culturelle. En effet, celle-ci est un élément essentiel de l’influence et un élément central de notre diplomatie globale.

Comme j’ai eu l’occasion de dire à plusieurs reprises, il n’y a pas de soft power et de hard power.

Tout s’inscrit maintenant dans la lutte d’influence et la compétition entre les différentes puissances, d’où l’importance de garantir les trois priorités que nous avons définies en matière d’influence : la promotion de la langue française et l’impulsion d’une nouvelle dynamique de développement de l’enseignement français à l’étranger ; le rayonnement culturel et artistique, notamment par le renforcement de la diffusion et de l’exportation de nos industries culturelles et créatives ; enfin, la mise en place de partenariats universitaires et scientifiques. C’est sur ces trois thèmes que nous nous mobilisons.

Plusieurs d’entre vous m’ont interrogé sur l’Anefe, qui a été remise en cause et modifiée récemment. Je ne partage pas les craintes que vous avez exprimées sur le risque de ne pas trouver les soutiens et les garanties suffisantes pour les établissements concernés. Le sujet étant très technique, je vous préciserai par écrit les dispositions qui ont été mises en place pour garantir le développement de l’enseignement français à l’étranger.

À cet égard, je veux préciser à M. Vallini que nous avons consenti un important effort pour le Liban, comme il a pu le constater lui-même. Il y a, dans ce pays, 330 écoles françaises. C’est énorme ! Il faut garantir leur permanence et les renforcer. L’aide spécifique pour les écoles chrétiennes sera prolongée en 2021.

Tels sont, mesdames, messieurs les sénateurs, les points majeurs du PLF que je voulais évoquer auprès de vous.

Voilà comment nous comptons employer ces moyens renforcés pour apporter des réponses diplomatiques, avec l’ensemble de nos partenaires, à toutes les grandes questions internationales qui engagent aujourd’hui le quotidien des Français, mais aussi l’avenir de notre pays. Je vous remercie de votre soutien. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, INDEP, RDSE, UC et Les Républicains.)

Action extérieure de l'État
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2021
Article 53 A (nouveau)

M. le président. Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Action extérieure de l’État », figurant à l’état B.

ÉTAT B

(En euros)

Mission / Programme

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

Action extérieure de lÉtat

2 932 906 958

2 934 722 690

Action de la France en Europe et dans le monde

1 842 251 585

1 843 766 317

Dont titre 2

687 171 047

687 171 047

Diplomatie culturelle et d’influence

718 091 902

718 091 902

Dont titre 2

73 044 639

73 044 639

Français à l’étranger et affaires consulaires

372 563 471

372 864 471

Dont titre 2

236 786 471

236 786 471

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° II-5, présenté par MM. Delahaye et Féraud, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Action de la France en Europe et dans le monde

 

2 800 000

 

2 800 000

dont titre 2

Diplomatie culturelle et d’influence

 

 

dont titre 2

Français à l’étranger et affaires consulaires

 

 

dont titre 2

TOTAL

2 800 000

2 800 000

SOLDE

- 2 800 000

- 2 800 000

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Monsieur le ministre, je vous remercie de vos propos, mais nous n’avons rien entendu sur les ambassadeurs thématiques. Cet amendement, qui tend à la suppression de 2,8 millions d’euros de crédits, est en réalité un amendement d’appel.

Rémi Féraud et moi-même voulons vous entendre sur le travail de contrôle que nous avons réalisé sur les ambassadeurs thématiques. Celui-ci – je le dis pour notre collègue Guillaume Gontard – était destiné non pas à juger de l’opportunité de leur création, mais plutôt à faire un point complet sur leur coût et sur la façon dont ils sont suivis.

Nous pensons que ce suivi des ambassadeurs thématiques peut être amélioré sensiblement, s’agissant à la fois de leur lettre de mission, de leur rapport d’activité et de leur évaluation. De fait, nous avons remarqué, dans plusieurs cas, l’absence de lettre de mission ou de rapport d’activité, voire des deux.

Les ambassadeurs thématiques sont nommés en conseil des ministres. Nous pensons qu’il est nécessaire d’encadrer davantage leur nomination sur le plan juridique, en prévoyant, par décret, que la lettre de mission, le rapport d’activité et l’évaluation sont des conditions incontournables.

Monsieur le ministre, nous voulions entendre, dans votre bouche, et pas seulement dans celle de vos conseillers, une parole forte sur le sujet. Nous aimerions, ce soir, être rassurés sur l’encadrement des ambassadeurs thématiques.

M. le président. L’amendement n° II-584, présenté par Mme N. Goulet, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Action de la France en Europe et dans le monde

 

2 000 000

 

2 000 000

dont titre 2

Diplomatie culturelle et d’influence

 

 

 

 

dont titre 2

Français à l’étranger et affaires consulaires

2 000 000

 

2 000 000

 

dont titre 2

TOTAL

2 000 000

2 000 000

2 000 000

2 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Nathalie Goulet.

Mme Nathalie Goulet. Cet amendement sur les ambassadeurs thématiques est un marronnier, avec une différence cette année : la commission des finances, considérant finalement que ce sujet est intéressant, a bien voulu prendre le relais.

Avant de retirer mon amendement au profit de celui de la commission, je veux dire que je ne suis absolument pas hostile au principe des ambassadeurs thématiques.

Je crois même que, dans certains cas, ils peuvent être extrêmement utiles. En effet, sur certains sujets transversaux, nous avons absolument besoin d’une sorte de guichet unique, d’un représentant identifié au cœur d’un dispositif – un ambassadeur pour le terrorisme, par exemple.

Cependant, comme l’a dit M. le rapporteur spécial, un certain nombre de nominations ont pu être discutables : absence de rapport, impossibilité de contacter l’ambassadeur thématique…

L’idée d’ambassadeurs bien ciblés sur des sujets transversaux est très bonne. L’enjeu est de calibrer ces ambassadeurs, en conditionnant leur nomination à une lettre de mission, à la possibilité de s’adresser à eux et, surtout, à la définition de moyens de contrôle.

Au bénéfice de ce qu’a dit M. le rapporteur spécial, je retire mon amendement, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° II-584 est retiré.

Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° II-5 ?

M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Je remercie les rapporteurs spéciaux et Mme Goulet d’avoir soulevé la question des ambassadeurs thématiques.

C’est un vrai sujet. Cela dit, dès lors que les choses bougent en la matière, on ne peut plus parler de marronnier… (Sourires.)

Notre diplomatie compte vingt ambassadeurs thématiques depuis mercredi dernier. Sachant que vous alliez m’interroger à leur sujet, j’ai relu leur liste tout à l’heure : je puis vous dire que tous ont des tâches essentielles.

Vous avez débattu avant-hier de la situation du Haut-Karabagh. Sachez qu’un ambassadeur thématique est chargé de la négociation au sein du groupe de Minsk. Heureusement qu’il est là !

La nomination en conseil des ministres, mercredi dernier, de M. Olivier Poivre d’Arvor comme ambassadeur chargé des pôles et des enjeux maritimes permet, tout d’abord, d’économiser un poste, puisque nous fusionnons deux compétences. Au reste, il faut bien que quelqu’un suive les enjeux relatifs, en particulier, à l’Arctique ou aux océans, compte tenu des négociations climatiques à venir. Il faut bien un coordonnateur sur ces enjeux !

Cela dit, je n’ai pas eu l’impression que vous remettiez en cause la nécessité même de ces ambassadeurs thématiques. Vous avez proposé qu’un cadre d’ensemble organise les missions des ambassadeurs thématiques et qu’il puisse être formellement défini par décret.

Je suis d’accord : il faut des lettres de mission, des engagements, un suivi de l’action de ces ambassadeurs, une coordination avec les ambassadeurs de postes et avec les directions de l’administration centrale.

Nous mettrons en œuvre l’ensemble de ce dispositif très rapidement, pour faire suite à votre rapport.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Je remercie M. le ministre de son accord avec les propositions de notre rapport de contrôle et de son engagement.

Je retire donc cet amendement, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° II-5 est retiré.

Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° II-517, présenté par Mme Gréaume, M. P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Action de la France en Europe et dans le monde

 

 

 

26 753 985

dont titre 2

Diplomatie culturelle et d’influence

 

 

 

 

dont titre 2

Français à l’étranger et affaires consulaires

 

 

26 753 985

 

dont titre 2

TOTAL

 

 

26 753 985

 

SOLDE

0

La parole est à Mme Michelle Gréaume.

Mme Michelle Gréaume. Cet amendement a pour objet la problématique récurrente du réseau de nos écoles à l’étranger.

La crise sanitaire n’a fait qu’exacerber une situation déjà difficile. On touche aujourd’hui aux limites du financement des établissements du réseau de l’AEFE par les familles, car, lorsque ces dernières ne veulent ou ne peuvent plus participer activement au financement des établissements, ceux-ci se trouvent en grande difficulté.

S’il est vrai que la baisse du nombre d’élèves est plus faible – aux alentours de 2 600, au lieu de 12 000 qui étaient estimés cet été –, la diminution des frais d’inscriptions enregistrés, couplée aux surcoûts liés au protocole sanitaire et au déploiement du distanciel, inquiète les établissements.

Le Gouvernement a profité des différentes lois de financement rectificatives de ce printemps pour abonder le réseau de l’AEFE d’un budget exceptionnel de 50 millions d’euros. En parallèle, le Trésor a été autorisé à faire une avance de 50 autres millions d’euros, mais il faut se souvenir d’où nous partons. Finalement, les familles participent aux alentours de 1,5 milliard d’euros au financement du réseau, estimé à environ 2 milliards d’euros.

Aussi, on comprend mieux comment les frais d’inscription des établissements ont pu bondir de 25 % depuis 2012, pour atteindre 5 300 euros en moyenne. Nous sommes dans une situation d’urgence, que les 50 millions d’euros d’aides exceptionnelles et les 50 millions d’euros d’avances du Trésor ne pourront pas suffire à compenser.

Notre amendement, s’il est forcément circonscrit financièrement, vise à faciliter l’instauration des protocoles sanitaires. C’est d’autant plus important que nous parlons d’un réseau dans 130 pays, qui doit donc s’adapter à 130 législations nationales et situations sanitaires. Or nous savons aussi que nous sommes dans une crise de long terme, avec des vagues épidémiques successives touchant les différents pays.

Cette complexité est encore aggravée par la multiplication des modes de gestion des établissements et des personnels, qui implique une influence différenciée du réseau de l’AEFE.

Dans ces conditions, il nous semble essentiel de renforcer les crédits de ce réseau.

M. le président. L’amendement n° II-413, présenté par Mme Conway-Mouret, M. Leconte, Mme Lepage, MM. Todeschini, Roger et Kanner, Mmes Carlotti et G. Jourda, MM. Temal, M. Vallet, Vallini, Vaugrenard et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Action de la France en Europe et dans le monde

10 000 000

10 000 000

dont titre 2

Diplomatie culturelle et d’influence

dont titre 2

Français à l’étranger et affaires consulaires

10 000 000

10 000 000

dont titre 2

TOTAL

10 000 000

10 000 000

 10 000 000

10 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret.

Mme Hélène Conway-Mouret. Cet amendement est devenu un amendement d’appel depuis l’annonce au conseil d’administration de l’AEFE, mercredi dernier, du basculement de 30 millions supplémentaires sur l’enveloppe des bourses. Je veux tout de même en profiter pour exposer deux points.

Tout d’abord, je veux vous alerter, monsieur le ministre, sur la nécessité de réviser les critères d’attribution des aides sociales, mis en place dans l’urgence, comme vous l’avez rappelé. Cela vaut aussi pour l’aide exceptionnelle pour les bourses : 42 % des demandes déposées au troisième trimestre ont été rejetées, ce qui explique, du reste, la disponibilité des crédits aujourd’hui.

Nous connaissons le profil socio-économique des Français qui ont été fortement affectés par la crise : il s’agit d’autoentrepreneurs, de personnes travaillant dans le domaine du tourisme, d’artisans, etc. Beaucoup ont perdu leur emploi ou se trouvent dans des situations très précaires. Les besoins sont donc réels, mais ces familles n’ont pas eu le droit à l’aide, à cause de critères inadaptés.

Cet amendement est aussi un marronnier : nous le déposons chaque année. En effet, la réforme de 2013 n’a pas été conçue pour une enveloppe budgétaire constante.

Elle a permis d’intégrer plus de 2 000 familles de classe moyenne dans le dispositif et, pour la première fois, d’aligner l’aide sur les besoins réels des familles. Elle n’a pas non plus été conçue pour dépouiller une famille de 5 % ou 10 % de l’aide qui lui était attribuée et basculer ce montant sur une autre famille, tout aussi nécessiteuse.

Quand les demandes augmentent de 2 % par an, l’enveloppe devient vite insuffisante si elle reste constante. C’est ce que l’on observe depuis plusieurs années. Nous observons également que les commissions locales des bourses réalisent des ajustements et s’autocensurent pour entrer dans l’enveloppe.

Nous espérons que ce budget mettra fin à ces pratiques et, surtout, soutiendra les familles qui investissent et s’investissent très largement dans nos établissements.

Cela dit, je retire l’amendement, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° II-413 est retiré.

Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° II-517 ?

M. Rémi Féraud, rapporteur spécial. Nous ne pouvons pas donner un avis favorable à l’amendement présenté par Mme Gréaume.

Cet amendement n’a pas un objet strictement budgétaire : son adoption correspondrait à une décision politique de sortie de l’OTAN, que nous ne partageons pas.

Cela dit, je veux répondre à la question des crédits alloués aux bourses. Ainsi que notre discussion l’a montré, nous sommes dans une année un peu particulière : l’enveloppe a été augmentée, en 2020, de 50 millions d’euros, mais – vous me démentirez si je me trompe, monsieur le ministre – seuls 10 millions d’euros ont été utilisés à ce stade.

Il serait intéressant, pour les rapporteurs spéciaux que nous sommes, de connaître le niveau de report envisagé sur l’année prochaine, s’il est déjà décidé par le Gouvernement.

Ce report conduirait à une enveloppe plus importante, mais nous ne pouvons évidemment pas savoir aujourd’hui s’il serait suffisant pour faire face à des besoins très accrus, puisque, comme le disait Hélène Conway-Mouret, c’est la première fois que le montant de l’enveloppe évolue.

J’émets donc un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Madame Gréaume, je ne voudrais pas que, ce soir, à dix-neuf heures vingt-cinq, au détour d’un amendement, la France quitte l’OTAN ! (Sourires.) Une telle décision nécessiterait un débat préalable. En outre, je ne suis pas sûr que ce serait une bonne décision dans la période actuelle.

Pour ma part, je sais combien l’engagement de la France dans l’OTAN est important et combien il assure notre propre liberté de parole. Vous avez pu vous en rendre compte !

L’adoption de votre amendement conduirait à quitter l’OTAN, ce que vous n’avez pas précisé. Nous avons une discussion chaque année sur ce sujet, notamment avec Pierre Laurent ; je n’y reviendrai pas.

Je conçois votre souci de renforcer les bourses scolaires, souci que partage Mme Hélène Conway-Mouret. Nous pensons que les financements supplémentaires de 50 millions d’euros affectés dans le cadre du PLFR 3 sont significatifs. Il faut effectivement appliquer les critères avec une certaine souplesse, les réalités différant d’un pays à l’autre. Je pense que les commissions sont capables de bien apprécier les situations.

En ce qui concerne les reports sur l’année prochaine des crédits destinés aux bourses qui n’auront pas été dépensés, j’ai eu confirmation, monsieur le rapporteur spécial, qu’ils s’élèveraient à 30 millions d’euros, ce qui nous laisse une marge de manœuvre importante.

Je pense que cette information montre ma détermination à poursuivre notre action auprès des Français de l’étranger.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Pierre Laurent, pour explication de vote.

M. Pierre Laurent. Pour tout vous dire, monsieur le ministre, nous ne sommes pas extrêmement surpris que vous soyez défavorable à notre amendement et que vous ne vouliez pas, ce soir, sortir de l’OTAN !

Pour notre part, nous ne voulons pas que les déclarations du Président de la République sur la question de l’OTAN à l’automne dernier n’aient été qu’une étoile filante. Il s’agit tout de même d’un vrai sujet stratégique ! Des événements le montrent régulièrement.

Nous souhaitons que ce débat ne reste pas sans lendemain politique. Hélas, nous avons l’impression que la parenthèse ouverte par la déclaration du Président de la République à l’OTAN s’est déjà refermée.