M. le président. La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Christian Redon-Sarrazy. Nous venons d’apprendre la fermeture du site Bridgestone de Béthune. Permettez-moi, avant toute chose, d’exprimer, au nom du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, notre soutien et notre solidarité envers les 863 salariés qui vont être durement frappés par cette mesure. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Ma question s’adresse à monsieur le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
Monsieur le ministre, comme les petits commerçants ou les libraires, les personnels éducatifs, en plus de devoir faire face à la menace terroriste, payent eux aussi le manque de cohérence et l’impréparation du Gouvernement dans sa réponse à cette seconde vague. Il était indispensable d’assurer la continuité pédagogique durant le confinement, afin de n’aggraver ou de ne créer aucune inégalité.
Malheureusement, les récents appels à la grève, provenant pour beaucoup des collèges, et les nombreux témoignages d’enseignants désemparés traduisent bien un ratage de plus dans votre méthode. Le monde éducatif déplore des directives inadaptées, et surtout un total manque de temps pour les mettre en œuvre. Les chefs d’établissements comme les collectivités n’ont eu parfois que vingt-quatre heures avant la rentrée des vacances de la Toussaint pour se conformer aux nouveaux protocoles sanitaires. Les mesures de distanciation ou le suivi des règles d’hygiène sont difficiles, voire impossibles à appliquer. La présence en alternance des élèves, évoquée pour le lycée, n’est pas envisagée au collège, où pourtant le brassage des élèves est tout aussi important, et les enfants tout aussi contagieux.
Le risque de devoir fermer des classes et de devoir renvoyer les élèves chez eux est réel. In fine, ce sont eux, et particulièrement les plus défavorisés, qui pâtissent de vos décisions. Dans les quartiers et les zones rurales qui n’offrent pas d’activités périscolaires ou qui manquent de moyens numériques, cela ne fera que creuser les inégalités.
À l’impossible nul n’est tenu, monsieur le ministre. Pour assurer cette continuité pédagogique, le recrutement de personnels supplémentaires et de remplacement apparaît comme une évidence, afin de restaurer la confiance entre votre gouvernement et la communauté éducative, et d’éviter ainsi à celle-ci l’épuisement que connaissent actuellement nos équipes soignantes. Pourtant, vous ne l’avez pas envisagé, contrairement à ce qu’ont décidé les collectivités locales, qui une fois de plus sont le dernier rempart face aux défaillances de l’État. Monsieur le ministre, faudra-t-il une troisième vague pour que ce Gouvernement mette enfin en œuvre la concertation que la communauté éducative et les élus attendent ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports. Monsieur le sénateur, dans toute la traversée de cette crise sanitaire, il est assez aisé d’insister sur les inconvénients, alors même que, par définition, les inconvénients font partie de nos vies quotidiennes. A contrario, comparer les faits à l’échelle européenne, ou même à l’échelle mondiale, me semble une démarche plus intéressante.
Je le répète : nous avons réussi à rescolariser tous les élèves. (Protestations sur les travées des groupes SER et CRCE.) Les statistiques sur le décrochage en 2020 sont même positives et présentent une amélioration par rapport à 2019. Le service public de l’éducation nationale a tenu. Avec de telles critiques, vous pensez attaquer le ministre ; en réalité, c’est la maison dans son ensemble qui doit être remerciée de ce qui a été accompli depuis six mois. (Protestations sur les travées du groupe SER.) Oui ! Comparez avec les autres pays, voyez ce qui se passe ! On me cite parfois des pays qui recrutent ; je ne les nommerai pas pour des raisons diplomatiques, mais la situation y est bien plus mauvaise qu’en France ! Comparez donc ! Au-delà des deux minutes dont je dispose, nous pourrons en discuter. (Exclamations sur les travées du groupe SER.)
Vous prenez la grève comme un signe de désapprobation. J’ai déjà cité le chiffre de la participation : 8,38 %. En aucun cas vous ne pouvez dire que cette désapprobation est massive, parce que les professeurs de notre pays comprennent bien la situation, et je veux les en remercier. Ils sont dévoués, ils sont engagés et ils comprennent que la scolarisation est vitale pour le pays et pour les enfants. C’est bien ce qui se passe actuellement.
Nous avons réalisé les assouplissements nécessaires, comme au lycée. Au collège, nous sommes capables, parfois au cas par cas, d’appliquer une approche différenciée. Nous accordons beaucoup d’autonomie aux établissements, pour leur permettre de tenir compte de la situation. La coopération avec les collectivités locales est complète. Il ne sert à rien de dire que, d’un côté, les collectivités locales agiraient parfaitement et, d’un autre côté, que l’éducation nationale serait défaillante. Les choses sont plus complexes, et heureusement plus positives et plus constructives.
L’éducation nationale recrute. Nous avons ouvert tout récemment des recrutements d’assistants d’éducation. Comme des personnes vulnérables ne peuvent se rendre à l’école, de nouveaux supports seront créés. Nous avons créé 1 800 postes en cette rentrée, à l’école primaire, alors même qu’il y a moins d’élèves. Oui, nous engageons des moyens supplémentaires, cela se voit aussi dans le budget pour l’année prochaine. Puisque vous avez soutenu d’autres gouvernements dans le passé, je vous rappelle un chiffre : 6 milliards d’euros d’augmentation budgétaire pour l’éducation sous ce quinquennat, contre 2 milliards d’euros sous le quinquennat précédent. Faites la comparaison ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
réouverture des lieux de culte
M. le président. La parole est à M. Pierre Cuypers, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Pierre Cuypers. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.
La laïcité à la française, à laquelle nous sommes tous attachés, a deux versants. Pour le premier, la religion n’a pas à s’immiscer dans les affaires de l’État, conformément à la séparation du spirituel et du temporel ; la loi de 1905 est la loi de séparation des Églises et de l’État. L’autre versant de la laïcité est l’obligation faite à l’État de respecter toutes les croyances et de ne pas intervenir dans les convictions de chacun : l’État doit assurer la liberté de culte, qui a rang, dans notre pays, de liberté fondamentale.
Votre décision de limiter ce qui est essentiel à la fréquentation des grandes surfaces a restreint cette liberté fondamentale : le Conseil d’État, au travers d’une jurisprudence constante, qui s’attache à examiner la proportionnalité de la mesure, a confirmé votre décision ; voilà qui est surprenant ! En quoi est-il plus dangereux de prendre les transports en commun que de se rendre dans un lieu de culte, où les règles de distanciation sociale peuvent être parfaitement respectées ?
Monsieur le Premier ministre, vous avez choisi la technique pour oublier la peur, quitte à priver les croyants de l’indispensable recueillement qu’imposent les traumatismes de la pandémie. Faire autrement n’est qu’une question de volonté, et je sais que vous pouvez le faire. Le Conseil d’État vous a demandé de préciser les conditions dans lesquelles les fidèles ont la possibilité de se rendre individuellement dans un lieu de culte. Peuvent-ils s’y rendre lorsque celui-ci est distant de plus d’un kilomètre ?
Le Conseil d’État vous a également enjoint de réexaminer votre décision à la mi-novembre – nous y sommes – en lien avec les représentants des cultes. Expliquez-vous sur les mesures de concertation et d’assouplissement que vous comptez prendre ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État, porte-parole du Gouvernement.
M. Gabriel Attal, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le sénateur Cuypers, je vous prie tout d’abord d’excuser l’absence de mon collègue Gérald Darmanin, qui se trouve en déplacement officiel en Russie. Monsieur le sénateur – je vous le dis d’emblée, très directement et clairement –, nous sommes très sensibles à la situation des croyants dans notre pays, particulièrement dans cette période de crise, si difficile et éprouvante pour l’ensemble du pays, et qui conduit nécessairement les croyants à vouloir se retrouver, à vouloir se recueillir, à vouloir prier peut-être plus encore. Comment ne pas avoir une pensée pour nos compatriotes catholiques, après l’attentat de Nice ?
La situation sanitaire nous a conduits à prendre une décision difficile, celle du confinement, pour limiter les risques de contamination, avec une fermeture des établissements recevant du public, pour des raisons sanitaires, pour protéger tous les Français.
Pour autant, parce que nous sommes attachés au respect des libertés, notamment au respect de la liberté de culte, nous avons décidé de maintenir les lieux de culte ouverts et de permettre que les cérémonies religieuses y soient célébrées, pour être diffusées à distance. J’ai bien conscience que cette situation est très imparfaite et qu’elle ne permet pas à tous d’accéder à ces cérémonies. Nous avons souhaité aussi autoriser les cérémonies d’enterrement dans la limite de trente personnes, évolution notable par rapport au premier confinement, afin que chacun puisse vivre dignement son deuil.
Cette situation reste imparfaite, nous le savons. Le Conseil d’État l’a confirmé. Nous savons que les restrictions sont dures, et croyez bien que notre souhait est qu’elles puissent être levées dès que possible. C’est la raison pour laquelle je peux vous annoncer qu’une réunion se tiendra au ministère de l’intérieur, dès le début de la semaine prochaine, probablement dès lundi prochain, en présence des représentants des cultes. L’objectif de cette réunion sera non seulement d’aborder les précisions que vous avez évoquées, et qui sont demandées par le Conseil d’État, mais également de dessiner ensemble, dès maintenant, les conditions dans lesquelles les lieux de culte pourront à nouveau recevoir du public, dès lors qu’un assouplissement sera possible. Nous devons mener ce travail dès maintenant, car, dès que cela sera possible, nous avons le souhait de pouvoir permettre aux croyants de rejoindre ces lieux de culte. Nous sommes extrêmement mobilisés, et nous allons construire ces solutions avec les représentants des cultes.
M. le président. La parole est à M. Pierre Cuypers, pour la réplique.
M. Pierre Cuypers. Dois-je vous rappeler que sous prétexte d’irrégularités constatées par vidéo sur le respect des consignes sanitaires dans deux diocèses, à savoir Bayonne et la Martinique, le Conseil d’État englobe dans sa décision tous les autres lieux de culte ? Jusqu’à ce jour, il n’y a pas eu de cluster déclaré en ces lieux. Aucun ! (Murmures sur les travées du groupe SER.)
Nos concitoyens ont perdu la confiance. C’est dommage, c’est triste ! Ce n’est pas à l’honneur de la République ! Alors ne leur imposez pas de perdre leur espérance ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
situation au haut-karabakh
M. le président. La parole est à M. Gilbert-Luc Devinaz, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Gilbert-Luc Devinaz. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères.
Monsieur le ministre, vous disiez la semaine dernière vouloir que la France tienne sa place dans la médiation du conflit en Artsakh. La France et l’Union européenne sont hors-jeu. L’accord signé lundi sous l’égide de la Russie montre notre incapacité à compter. La communauté internationale, en ne s’opposant pas à cette irruption de la force militaire dans un conflit séculaire, renonce dans le Caucase, mais aussi dans tout le Proche-Orient, à la possibilité d’une gestion diplomatique des conflits et à la protection des droits humains, laissant ainsi les mains libres aux ambitions de M. Erdogan. Ce conflit, dit « gelé », a trouvé une issue par la force, la violence et la haine.
Cette évolution en plein cœur du sud du Caucase est une catastrophe. Plusieurs milliers de jeunes appelés ont trouvé la mort. Jusqu’à 90 000 personnes pourraient être contraintes à l’exode. M. Poutine a déclaré que les termes de l’accord permettent aux personnes déplacées de retourner au Haut-Karabakh, alors que le président Aliev s’est félicité d’avoir « chassé les Arméniens de nos terres comme des chiens ». Dans ces conditions, comment les populations déplacées peuvent-elles y retourner ?
Dans le groupe de Minsk, quelle est la place exacte de la France ? Allons-nous continuer à nous cacher derrière notre coprésidence ? Aurions-nous totalement perdu la mémoire et sacrifié nos valeurs de démocratie et de liberté ? Qu’est-ce que votre gouvernement compte faire pour protéger les populations et garantir la stabilité de cette région ? Avons-nous les moyens d’établir la réalité des accusations sur l’usage par l’Azerbaïdjan de bombes à fragmentation et au phosphore ? Si tel était le cas, allez-vous proposer des sanctions face à ces crimes de guerre ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER, INDEP, UC et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères.
M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l’Europe et des affaires étrangères. Monsieur le sénateur Devinaz, je voudrais m’inscrire en faux contre certains de vos propos. Je viens de m’entretenir avec M. Mnatsakanyan, mon homologue arménien. Cela doit être la dixième ou la quinzième fois que je m’entretiens avec lui sur la situation. Son message – vous pouvez l’interroger – est clair : il demande à la France de rester dans le cadre de ses responsabilités de coprésidente du groupe de Minsk, parce que l’Arménie a besoin d’elle. Pour ma part, je travaille avec M. Mnatsakanyan.
Vous avez raison de souligner l’existence d’un cessez-le-feu. Il importe qu’il soit respecté. Cette guerre a été meurtrière ; cette guerre a été d’une très grande brutalité ; elle a été dramatique. Les combats ont maintenant cessé, il faut que le cessez-le-feu soit respecté totalement, par toutes les parties.
Doivent maintenant s’ouvrir les discussions, sur la base du cessez-le-feu, pour en définir les différents paramètres, pour faire en sorte qu’un vrai règlement du conflit dans le Haut-Karabakh puisse avoir lieu, sur le long terme. Cette discussion se fera sur l’initiative des trois coprésidents, que sont M. Lavrov, M. Pompeo et moi-même, à Moscou, la semaine prochaine, puis à New York, au siège des Nations unies. Cette initiative reçoit l’appui des autorités arméniennes.
D’ici là, il faut s’assurer non seulement que le cessez-le-feu soit totalement respecté, mais aussi que les combattants étrangers soient exclus de la zone et que les réfugiés puissent revenir dans leur lieu d’habitation. Ces mesures font partie des accords de cessez-le-feu, il faut les appliquer. Par ailleurs, il importera que l’énorme effort humanitaire que la France veut déployer à l’égard des Arméniens se mette en œuvre. Les opérations ont déjà commencé ; d’autres initiatives seront prises, vous le constaterez dans l’après-midi, à la suite d’une rencontre au plus haut niveau entre les autorités de l’État français, les ONG et la communauté arménienne de France, pour que la France soit réellement présente auprès de l’Arménie et qu’elle réponde à l’urgence humanitaire, en même temps qu’à l’urgence diplomatique.
situation du secteur de l’événementiel
M. le président. La parole est à Mme Catherine Dumas, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Catherine Dumas. Ma question s’adresse à M. le ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargé des petites et moyennes entreprises.
Monsieur le ministre, l’impact économique et social de la fermeture des établissements qui reçoivent du public et l’interdiction d’organiser tout rassemblement ou événement placent le secteur de l’événementiel dans une situation dramatique. Il s’agit pourtant d’une filière qui est essentielle pour l’attractivité de notre pays, pour l’attractivité des territoires et pour notre secteur touristique. En France, chaque année, sont organisés 1 200 foires et salons, 2 800 congrès et 380 000 événements d’entreprises et d’institutions. Plus de 77 millions de participants sont ainsi accueillis chaque année, dont 10 % de participants d’origine étrangère.
Au cœur de la crise se trouvent notamment les traiteurs, organisateurs de réception, qui travaillent avec une clientèle tant de professionnels que de particuliers. Depuis le printemps, plus de 17 000 entreprises sont ainsi à l’arrêt, inquiètes pour leur avenir économique, y compris les entreprises phares du secteur.
Je voudrais aussi terminer cette intervention en évoquant le sort des extras, les 70 000 intermittents de la restauration, monsieur le ministre ! Les entrepreneurs de foire, de salons, de congrès, les traiteurs, les extras de la restauration ont-ils, dans un futur proche, un avenir autre que la faillite ou le RSA ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des petites et moyennes entreprises.
M. Alain Griset, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargé des petites et moyennes entreprises. Madame la présidente, vous avez raison, l’événementiel est un secteur primordial pour notre pays. Jean-Baptiste Lemoyne et moi-même, depuis plusieurs mois, faisons ce que nous pouvons pour envisager, avec les professionnels, des solutions. Ce secteur est très complexe dans sa diversité. Nous avons pris suffisamment de temps pour inscrire ces professionnels dans les catégories S1 et S1 bis, de façon à essayer d’éviter qu’ils ne soient oubliés.
Par ailleurs, vous nous parlez des traiteurs. J’ai personnellement reçu à sept reprises les représentants des traiteurs, les Traiteurs de France, les Traiteurs de Paris, pour examiner une situation qui est – vous avez raison – très difficile : ils ont perdu entre 90 % et 95 % de leur chiffre d’affaires.
Depuis quelques semaines, Bruno Le Maire et moi-même avons demandé à Bpifrance et au Comité interministériel de restructuration industrielle (CIRI), le service de Bercy spécialement chargé d’étudier les situations particulières, d’appeler les traiteurs. Deux cents traiteurs sont appelés individuellement pour examiner leur situation, quitte à leur apporter une partie de fonds propres pour qu’ils puissent passer cette période difficile.
Madame la sénatrice, nous faisons ce que nous pouvons pour accompagner ces professionnels. J’espère comme vous que nous pourrons assez rapidement les autoriser à reprendre leur activité, essentielle pour notre pays, parce que ce sont eux qui nous permettent d’organiser les meilleurs événements.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Dumas, pour la réplique.
Mme Catherine Dumas. Merci, monsieur le ministre, de votre réponse. Je vous le répète : nous avons besoin d’un plan de sauvegarde massif spécifique à ces secteurs ! L’événementiel est un écosystème de PME qui ne survivront pas si nous ne les aidons pas. Nous avons un rôle collectif à jouer pour sauver ces pépites, qui sont emblématiques de la France. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
impact du confinement sur le niveau des élèves
M. le président. La parole est à Mme Sonia de La Provôté, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme Sonia de La Provôté. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
Ma question porte sur les évaluations en cours préparatoire (CP), cours élémentaire première année (CE1) et classe de sixième. Elles mettent en évidence une stabilité en sixième et une baisse des résultats en CP et CE1. Dans les trois niveaux, l’écart se creuse entre les élèves en éducation prioritaire et les autres. Pour les sixièmes, l’évaluation a lieu à la fin du cours moyen deuxième année (CM2) et confirme ainsi la différence de niveau en défaveur des élèves de primaire en réseau d’éducation prioritaire (REP) et REP+. Le confinement a donc eu pour eux un effet négatif.
Nous constatons aussi que les élèves du cycle 2 ont été plus fragilisés que ceux de sixième. Plus âgés, ces derniers sont probablement plus autonomes vis-à-vis des outils de l’école à distance, et moins touchés par une absence de présence à l’école et de contact avec leurs professeurs. Enfin, si le dédoublement des classes de CP et CE1 avait eu un effet positif, la crise l’a clairement annulé. Cela confirme le rôle essentiel du temps personnalisé passé par l’enseignant aux côtés de chaque élève. Les déterminants liés à un environnement socio-économique défavorable sont bien compensés par l’école de la République, encore faut-il qu’elle soit physiquement présente. D’où l’importance du rôle des enseignants et de l’école comme structure sociale et éducative pour effacer les différences.
Monsieur le ministre, dès lors, plusieurs questions se posent. Bon nombre d’élèves ont été déscolarisés ou sous-scolarisés pendant et après le confinement. Ont-ils bien tous été identifiés ? Quels moyens avez-vous mis en place pour remédier individuellement à ces effets négatifs ?
Par ailleurs, ces résultats vont-ils conduire à une réflexion plus large pour le cycle 2 ? La présence de l’enseignant aux côtés de l’élève y est essentielle. Ce deuxième confinement, avec écoles ouvertes, vous amène-t-il déjà à envisager, en cas d’aggravation de la crise, à maintenir cette présence pour eux ?
Enfin, cette cohorte d’élèves a vécu une expérience inédite aux nombreuses conséquences, sur le plan des acquis et sur le plan psychologique. Va-t-elle faire l’objet d’un suivi et d’une évaluation spécifiques renforcés dans le temps, tant au niveau pédagogique que par la médecine scolaire ? Je vous remercie. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports. Madame la sénatrice Sonia de la Provôté, votre question porte sur un sujet absolument fondamental. Je souhaite en souligner l’importance devant l’ensemble des sénateurs et sénatrices. Il s’agit de la situation de l’école primaire, alors même que nous vivons cette crise sanitaire. Dans un contexte mondial, où on ne dira jamais assez qu’une catastrophe éducative est possible à cause du confinement, l’objectif doit bel et bien être de garder ouverts les écoles, les collèges et, autant que possible, les lycées.
Cette enquête est extrêmement intéressante. Tout d’abord, la France a désormais, depuis trois ans, un outil unique au monde, c’est-à-dire la possibilité d’évaluer au début de l’année scolaire 800 000 enfants de CP, 800 000 enfants de CE1 et 800 000 enfants de sixième. Ce dispositif unique nous a permis, premièrement, en ce début d’année, d’avoir une évaluation personnalisée pour chaque enfant et donc de connaître ses faiblesses et ses forces, et ainsi d’aider chaque élève. Deuxièmement, ce dispositif permet de dresser un portrait de la Nation.
Vous avez parfaitement résumé la situation, avec ce que j’appellerai une demi-mauvaise nouvelle et une bonne nouvelle. Premièrement, la demi-mauvaise nouvelle est que – nous nous y attendions – les élèves de CP, l’année dernière, ont pâti du confinement. Cependant, le progrès constaté de 2018 à 2019 vient relativiser cette mauvaise nouvelle : la régression de 2019 à 2020 nous ramène au niveau de 2018. Nous avons régressé, mais à un niveau que nous pourrions qualifier de raisonnable. Nous pouvons espérer désormais que les mesures que nous prenons, comme le dédoublement des classes, pour les élèves qui ont le plus pâti du confinement, permettront de rattraper ce retard en 2021.
Deuxièmement, les élèves, l’année dernière, ont pu surcompenser les problèmes en CM2 ; ils sont arrivés cette année en sixième avec un meilleur niveau que l’année précédente. Nous devons nous en réjouir. Les mesures prises, comme les vacances apprenantes, le dispositif « Je rentre en sixième », le travail des professeurs, tout simplement, ont permis de véritables progrès. Nous devons rester vigilants, parce que beaucoup trop d’élèves arrivent en sixième avec une lecture qui n’est pas assez fluide. Néanmoins, les efforts portent leurs fruits ; l’école primaire a bien tenu le choc et nous allons pouvoir continuer à aller de l’avant.
données scientifiques et fermetures des commerces
M. le président. La parole est à M. Jean-Baptiste Blanc, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-Baptiste Blanc. Monsieur le président, ma question s’adresse à M. le Premier ministre et porte sur la gestion du covid-19.
Monsieur le Premier ministre, vous êtes encore appelé, ce soir, à annoncer des mesures qui portent atteinte, d’une manière inédite en temps de paix, à nos libertés fondamentales.
Si, dans son principe, le Parlement a parfaitement admis, quoi que vous en disiez, la nécessité d’une action rapide en la matière, une difficulté majeure se pose quant à la proportionnalité et à la justification des mesures ainsi adoptées.
En effet, vous disposez de nombreuses informations précises sur la situation et les risques sanitaires, mais ni la représentation nationale, ni les commissions indépendantes – je ne citerai que la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) –, ni nos concitoyens, ni les élus locaux n’en disposent, ce qui place notre pays dans un état d’incompréhension, de sidération et de colère sans précédent.
Il nous semble ainsi que trois correctifs doivent être apportés sans délai.
En premier lieu, vous pourriez intégrer les bureaux des deux chambres dans toutes les boucles de diffusion des informations internes, qu’elles soient destinées à préparer les décisions ou à les adopter.
En deuxième lieu, il serait grand temps que l’État s’engage enfin à documenter et à motiver en droit ses décisions – je pense notamment à toutes les mesures réglementaires restrictives de libertés qui sont adoptées.
En troisième lieu, il serait aussi grand temps de comprendre que vous pouvez vous appuyer sur les maires de France. Ils pourraient ainsi adopter des mesures complémentaires de police administrative adaptées aux circonstances locales qu’ils connaissent mieux que personne.
Je voudrais enfin évoquer une étude publiée dans Nature et évoquée avant-hier dans le New York Times et aujourd’hui dans Le Figaro. Cette étude nous apprend que tous les types de commerce ne se valent pas en termes de sources de contamination et que tous les commerces ne présentent pas de risques sévères à ce titre. En effet, il ressort de cette étude que les librairies, les magasins qui vendent des fleurs ou des jouets, les salons de coiffure et tant d’autres sont quinze fois moins dangereux que d’autres catégories de commerce, ce qui tend à prouver une certaine forme d’inutilité de vos choix hétéroclites pris dans l’urgence, sous la pression d’un virus qui mène la danse.
Pour conclure, monsieur le Premier ministre, il faudra mieux préparer les choses pour éviter une troisième vague. Cela ne pourra se faire sans des dépistages de masse, par dizaines de millions, et sans un bouclage strict, zone par zone, pour éradiquer la circulation du virus. Quand comptez-vous être transparent et réagir ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)